Accueil > Travaux en séance > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques de la session > Compte rendu analytique de la séance

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Consulter le sommaire

Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mercredi 11 juillet 2007

2ème séance
Séance de 15 heures
6ème séance de la session
Présidence de M. Rudy Salles

Consulter le sommaire

La séance est ouverte à quinze heures.

DEMANDE DE SUSPENSION DE SÉANCE

M. Michel Bouvard, vice-président de la commission des finances Monsieur le Président, l’ordre du jour de ce début de session extraordinaire appelle trois textes en discussion successive à la commission des finances : le texte dont nous débattons aujourd’hui et sur lequel elle est saisie au fond ; la loi de règlement et le débat d’orientation budgétaire, dont l’examen est prévu lundi. La commission des finances procédant actuellement, en vue de la préparation de ces deux derniers textes, à l’audition du Premier président de la Cour des comptes, je me joins à M. le Président de la commission et à M. le Rapporteur général pour solliciter une suspension de séance d’une demi-heure afin de mener à bien cette audition.

M. le Président – Cette demande me paraît tout à fait légitime ; je suspends donc la séance.

La séance, suspendue à 15 heures 05, est reprise à 15 heures 40 sous la présidence de M. Le Guen.

PRÉSIDENCE de M. Jean-Marie LE GUEN
vice-président

RAPPELS AU RÈGLEMENT

M. Jean-Pierre Brard - Rappel au Règlement fondé sur l’article 58, alinéa 1. Ce matin, Mme la ministre de l’économie, dont nous attendions la réplique aux orateurs, a effectivement répondu à ceux du groupe de l’UMP, qui s’étaient pour la plupart limités à répéter les propos de leur mentor. De ce côté-ci de l’hémicycle, le seul qui a eu droit à une réponse est notre collègue Didier Migaud, et sous une forme du reste assez déplaisante, puisqu’elle a consisté à expliquer au président de la commission des finances qu’il a déjà bien de la chance d’occuper cette fonction, par la grâce incommensurable du Président de la République et des députés du groupe UMP, qui ont voulu qu’il en soit ainsi – ce dernier point tenant au demeurant de l’affabulation.

Depuis quand les orateurs de l’opposition n’ont-ils plus droit à une réponse du Gouvernement ? Messieurs les ministres, il vous faudra dire à Mme Lagarde que si le débat devait se poursuivre sur ce mode, le Gouvernement prendrait le risque qu’il ne se déroule pas dans les meilleures conditions. Ou serait-ce que cette manière de ne pas respecter le Parlement signe la fameuse « rupture » et anticipe la présidentialisation annoncée ?

M. Jean-Louis Idiart - Rappel au Règlement fondé sur l’article 58, alinéa 1. S’agissant des heures supplémentaires, la ministre a reconnu ce matin que, comme l’avait souligné Didier Migaud, le supplément de revenu serait exonéré d’impôt mais que dans le même temps, ce bonus serait pris en compte pour apprécier l’éligibilité à la PPE, et intégré dans le revenu fiscal de référence, qui sert de base à l’ouverture d’un droit à dégrèvement ou à exonération de la taxe d’habitation et de diverses taxes ainsi qu’au calcul de différents tarifs – ceux des crèches et des cantines par exemple. Nous exigeons donc de connaître les impôts et taxes sur lesquels la mesure aura un impact, le nombre des contribuables concernés et l’ampleur de l’effet attendu. Nous demandons des réponses immédiates à ces questions, avant que le débat ne commence, faute de quoi nous demanderions une suspension de séance. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen)

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État chargé des entreprises et du commerce extérieur – Au moment de prendre la parole pour la première fois au cours de cette mandature, je tiens à dire combien je suis heureux de retrouver les débats parlementaires. Je suis un homme de débat, vous le savez, Monsieur Brard, et nous avons même confronté nos points de vue à Montreuil, ce dont je garde un souvenir agréable. Nous ne sommes pas là pour ne pas répondre (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) car nous sommes là pour agir.

Chaque article fera l’objet d’une discussion au cours de laquelle nous vous donnerons toutes les précisions que vous souhaitez sur un texte qui traduit les engagements pris par le Président de la République, dont les arguments ont été validés par les résultats des élections présidentielles et législatives. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen) Nous débattrons donc avec sérénité et détermination. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Marc Ayrault - Je prends acte de la réponse de M. Novelli, mais, si courtoise soit-elle, ce n’en est pas une. La question de fond est celle du pouvoir d’achat. « Travailler plus pour gagner plus » était un slogan de campagne électorale. Maintenant, il faut clairement dire ce qu’il en est pour que les Français ne soient pas trompés. Or, non seulement nous pensons que vous n’apportez pas la bonne réponse, mais nous voyons une faille dans le dispositif que vous proposez. Il faut donc que Mme Lagarde réponde, si vous ne pouvez pas le faire. Il ne faudrait pas que les Français qui, demain, effectueraient des heures supplémentaires, à la demande de l’entreprise soient piégés, l’augmentation de leur revenu fiscal de référence les exposant à acquitter une taxe d’habitation, des tarifs de crèche ou de cantine plus élevés.

On ne peut continuer sur ces bases, et vous ne pouvez toujours nous répondre que les Français ont voté en ce sens. Ce n’est pas cela qu’ils ont décidé. Nous demandons donc qu’on réponde à l’opposition. Si Mme Lagarde n’est pas là pour le faire, au nom de mon groupe, je réitère la demande de suspension de séance pour qu’elle revienne. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine)

M. Jérôme Chartier - Je salue d’abord notre ancien collègue, Hervé Novelli. Qu’il soit assuré de toute notre amitié et de notre soutien.

M. Ayrault n’était pas là ce matin, je vais donc lui donner quelques informations. D’abord, 412 amendements ont été déposés, dont un certain nombre par l’opposition, et nous allons les examiner. Ce sera l’occasion, article après article, de demander des précisions et de les obtenir. Mais pour l’instant, nous avons repoussé la motion de renvoi en commission, nous avons commencé à entendre les inscrits sur l’article premier, et nous n’avons pas encore examiné un seul amendement. Commençons donc le débat lui-même, pour que chacun puisse demander des éclaircissements et pour que les réponses soient données.

Enfin, Monsieur Brard, il est faux de dire que Mme Lagarde n’a répondu qu’au président de la commission des finances. Elle a répondu à M. Idiart, et elle n’a pas pu vous répondre parce que vous n’étiez pas là. La prochaine fois, venez en séance, je suis certain qu’elle vous répondra. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe Nouveau centre)

M. le Secrétaire d'État chargé des entreprises et du commerce extérieur - Je ne voudrais pas que nous ayons des suspensions de séance à répétition alors que ces questions vont être largement débattues au cours de la discussion des amendements. Simplement, l’exposé des motifs, page 5, répond clairement à la question de M. Ayrault : « Pour préserver l’économie d’autres avantages fiscaux ou sociaux soumis à condition de ressources dont bénéficieraient les salariés concernés, il est proposé de réintégrer dans le revenu fiscal de référence la rémunération des heures supplémentaires et complémentaires. Cette rémunération sera également prise en compte dans le calcul des limites conditionnant le bénéfice de la prime pour l’emploi ». Ces rémunérations sont bien prises en compte dans le revenu fiscal de référence. Cela signifie qu’un salarié qui gagne 1,2 SMIC et effectuerait quatre heures supplémentaires par semaine, exonérées fiscalement et socialement, percevrait 2 500 euros par an, diminués, comme c’est logique, des 490 euros de la PPE, soit un gain net d’environ 2 000 euros. (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Brard - D’abord, Monsieur Chartier, vous auriez dû venir tôt en séance. J’y étais.

Une majorité a rejeté le renvoi en commission. Soit. Mais, élément nouveau, nous venons d’auditionner le Premier président de la Cour des comptes. Que nous a-t-il dit ? Que vos comptes de l’année dernière n’étaient pas sincères, que vous avez fait de la cavalerie, et que, entre 16 et 50 milliards, on ne sait pas de combien le déficit s’est creusé. Ici, on propose d’exonérer les heures supplémentaires de cotisations sociales. Des transferts, on nous demande souvent d’en voter. Or, dans sa profonde sagesse, Philippe Séguin qui, à la différence de Mme Lagarde, propose que nous pensions par nous-mêmes, vient de nous dire qu’il y a des centaines de milliards de transferts sans qu’on puisse en évaluer l’efficacité. Il nous a dit encore qu’en l’état actuel la Cour ne peut pas dire si les exonérations de charges sont une bonne chose ou non. Vous voulez donc nous faire délibérer à l’aveugle, Monsieur Novelli. Cette habileté ne m’étonne pas de vous. Mais pour la transparence du débat, ce n’est pas une bonne manière.

M. le Président – La suspension est de droit.

La séance, suspendue à 15 heures 55, est reprise à 16 heures.

TRAVAIL, EMPLOI, POUVOIR D’ACHAT (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat.

ARTICLE PREMIER (suite)

M. le Président - Je donne la parole à M. Idiart pour un rappel au Règlement. (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Louis Idiart - Nous avons beau le relire en tous sens, le rapport de M. Carrez ne comporte ni données chiffrées, ni étude d’impact…

M. Dominique Dord - Vous l’avez déjà dit !

M. Jean-Louis Idiart - Dès lors, il est naturel que nous interrogions sans relâche la ministre à ce sujet. Las, Mme Lagarde s’est dispensée de répondre à nos motions, se contentant d’un exposé très général qui témoigne de l’impréparation de ce texte. Vous n’avez pas mesuré l’incidence des mesures que vous proposez, et ce n’est pas parce qu’un nouveau Président de la République a été élu en mai que le Parlement doit renoncer à exercer sa mission et se soumettre à son empire ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, radical et citoyen ; exclamations sur les bancs du groupe UMP) Vous avez tort de protester, chers collègues de la majorité, car vous ne devriez pas accepter d’être traités de cette façon. C’est aussi pour vous défendre que nous demandons au Gouvernement de répondre à la représentation nationale !

M. Richard Mallié – Allons, nous n’avons pas de leçons à recevoir !

M. Jean-Louis Idiart - Les représentants du Gouvernement doivent nous donner l’assurance que des réponses précises seront apportées aux différents points que nous avons soulevés. À défaut, je me verrais contraint de demander de nouvelles suspensions de séance.

Mme Laurence Dumont – Puisque la discussion technique ne peut s’engager faute de réponses précises, je m’en tiendrai aux principes. Je voterai contre cet article premier car il représente à mes yeux une supercherie, un leurre et une tromperie.

Une supercherie, d’abord, en laissant croire à nos compatriotes que tous les salariés potentiellement concernés choisissent librement d’effectuer ou non des heures supplémentaires, alors que chacun sait que cette décision relève du bon vouloir de l’employeur. Connaît-on un salarié qui, à l’heure de l’embauche, décide de sa propre initiative qu’il va faire aujourd’hui une ou deux heures de plus ? Mieux, depuis l’adoption de la loi de modernisation sociale de 2005, le refus d’effectuer des heures supplémentaires à la demande de l’employeur peut constituer un motif valable de licenciement : mis dans l’incapacité d’effectuer des heures supplémentaires de sa propre initiative, le salarié se voit contraint de les accepter lorsqu’elles lui sont imposées ! Alors, arrêtez de faire rêver les Français en leur faisant croire qu’ils pourraient décider librement de leur temps de travail et de la rémunération qui en découle. Au reste, cet article ne peut se substituer à une véritable politique salariale, plus nécessaire que jamais. S’il est adopté, une seule réponse sera faite à tous ceux qui prétendront à une augmentation de salaire : faites des heures supplémentaires. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen)

Un leurre, ensuite, car plutôt que d’inciter les entreprises à faire travailler davantage ceux qui ont déjà un emploi, ne faudrait-il pas les encourager à embaucher ? Et la politique continue de baisse du coût du travail – engagée par le Gouvernement précédent – ne risque-t-elle pas de diffuser plus encore un modèle d’emploi dégradé, fondé sur des contrats précaires de très courte durée, souvent à temps partiel imposé ? On le sait, la politique d’exonération des cotisations sociales coûte cher par rapport à son efficacité réelle et fragilise l’emploi en multipliant les trappes à bas salaire.

Une tromperie, enfin, car la part de revenu procurée par les heures supplémentaires ne s’accompagnera pas des droits sociaux correspondants, du fait de l’exonération des cotisations sociales. En subissant cette logique, c’est leur avenir que les salariés mettront en péril, en bradant leurs droits futurs – notamment pour ce qui concerne leur retraite – au profit d’un avantage immédiat.

Vous comprendrez par conséquent que je m’oppose résolument à l’adoption de cet article. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen)

M. Jean-Claude Sandrier - Le premier article de ce texte est à la fois injuste et, de l’avis même du Conseil d’analyse économique, excessivement coûteux pour nos finances publiques. Il s’inscrit du reste dans la droite ligne des 65 milliards de cadeaux fiscaux aux entreprises consentis chaque année, dont la Cour des comptes a déjà eu l’occasion de relever – pour la dernière fois en juin 2006 – le faible impact sur le chômage : sur 20 milliards d’exonérations accordées par l’État, 17 milliards ne servent pas à améliorer la situation de l’emploi. Las, vous persistez dans cette voie, et, tout en vous faisant les chantres de la bonne gestion et du désendettement, n’hésitez pas à creuser les déficits.

Tout le monde admet désormais que votre paquet fiscal n’est pas financé. Ce n’est pas en tablant sur une hypothétique hausse des recettes et sur une baisse des dépenses tout aussi improbable – et dans quels secteurs ? – que vous allez compenser les 15 milliards de moins values fiscales liés à vos cadeaux aux plus aisés…

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques Ce n’est pas une dépense mais un investissement !

M. Jean-Claude Sandrier - Et si vous ne touchez qu’aux impôts progressifs – IR, ISF et droits de succession –, c’est pour mieux préparer une hausse future des impôts les plus injustes, comme la TVA. Vous habillez votre politique de toute une rhétorique sur le retour de la croissance, en insistant sur la bienveillance de l’Eurogroupe. Mais à quel prix nos partenaires européens ont-ils été « rassurés » ? Ne les avez-vous pas amadoués en leur laissant entendre qu’interviendraient très vite de nouvelles recettes, grâce à une augmentation de la TVA ou de la pression fiscale sur les collectivités, avec les conséquences négatives qui en découlent pour l’emploi et l’investissement ?

Le choc fiscal que vous annoncez, ce n’est rien d’autre que la restauration des privilèges. (Murmures sur les bancs du groupe UMP) Il annonce le retour à une société de rentiers : les voilà, vos vrais actifs ! (Même mouvement) C’est aussi la mise à mal du principe constitutionnel selon lequel chacun doit participer à l’effort collectif selon sa capacité contributive. Le processus dans lequel vous prétendez engager le pays a déjà été expérimenté, sous l’ère Thatcher au Royaume-Uni et sous la présidence Reagan aux États-Unis…

M. Henri Plagnol – 20 ans de croissance dans les deux pays !

M. Jean-Claude Sandrier - Les effets en sont malheureusement bien connus : explosion des inégalités, enrichissement des nantis, mise en cause des sécurités collectives ; est-ce vraiment cela dont notre pays a besoin ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine)

M. Jean-Pierre Brard - Cet article premier est tout à fait révélateur de votre volonté politique. Forts de la mésaventure de la TVA antisociale entre les deux tours des élections législatives, vous avancez masqués car vous avez bien compris que, dès lors que vous dévoilerez vos intentions véritables, les Français ne vous suivront plus. Vous avez donc parlé d’un « choc de confiance » : pour ma part, si je vois le choc, je cherche toujours la confiance ! En libéral conséquent, M. Novelli – qui joue les idéologues de service – a bien compris que pour atteindre ses objectifs, mieux valait les dissimuler. Moins expérimentée, Mme Lagarde nous a servi hier un discours digne de la Monarchie de juillet : « Vous, les riches, mes amis, enrichissez-vous, et, pour ce faire, n’hésitez pas à augmenter le travail des autres ! » (« C’est du Zola ! » sur les bancs du groupe UMP)

M. François Goulard - Mettez-le dans une réserve ! Il faut le conserver en l’état ! (Sourires)

M. Jean-Pierre Brard - Au plan idéologique, vous entretenez l’illusion que chacun peut réussir individuellement aux dépens de la collectivité. Cela revient à opposer chacun contre chacun et à renoncer à nos traditions de solidarité.

Si votre système est adopté, croyez-vous qu’un chef d’entreprise – même s’il n’est pas particulièrement pervers – hésitera longtemps entre une nouvelle embauche et l’imposition à ses salariés déjà en poste d’heures supplémentaires défiscalisées ? Il choisira forcément les heures supplémentaires défiscalisées, au détriment des millions de chômeurs qui attendent un emploi.

De sorte qu’un salarié partant à la retraite ne sera pas remplacé par un autre, mais par ses collègues qui effectueront des heures supplémentaires. Ce n’est pas seulement la rupture avec ces traditions de solidarité – que, depuis toujours, vous voulez briser – qui est perverse, c’est aussi votre façon de vider les caisses de l’État et des régimes sociaux.

Xavier Bertrand manque d’ailleurs à l’appel. Mais le ministre de la santé sait ce qu’il fait : en démontrant que les trous de la sécurité sociale – que vous creusez – ne peuvent être bouchés, il crée les conditions pour que les porte-monnaie des patients soient davantage sollicités et qu’il soit fait appel de plus en plus aux assurances privées !

M. Denis Jacquat - C’est faux !

M. Jean-Pierre Brard - C’est pour elles que vous roulez et votre exclamation est une confirmation de mes propos, Monsieur Jacquat (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) !

M. Denis Jacquat - C’est faux !

M. Dominique Dord - Je ne suis pas certain que ce texte sera la panacée. Mais il a un mérite, celui de tenter de guérir les deux maux qui minent notre pays depuis très longtemps, un pouvoir d’achat modeste et une croissance insuffisante ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe Nouveau centre) Or, j’ai entendu l’opposition formuler beaucoup de critiques, mais aucune proposition ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe Nouveau centre)

Oui, les Français les plus modestes nous l’ont répété sur tous les tons durant ces deux derniers mois, leur problème, c’est le pouvoir d’achat. Et si l’euro est en partie à l’origine de ces difficultés, la limitation du temps de travail en est également la cause ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Lorsque les 35 heures ont été généralisées en 2002, les salariés ont vu leur pouvoir d’achat bloqué, tandis que le coût du travail augmentait de 11,4 % pour les entreprises !

M. Roland Muzeau – C’est faux, elles ont gagné en flexibilité !

M. Dominique Dord – Le pouvoir d’achat est en berne, quand les entreprises délocalisent massivement vers des pays où le coût du travail est moins élevé (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) !

Ce texte vise donc – ce n’est pas le moindre de ses mérites – à augmenter le pouvoir d’achat des salariés sans enchérir le coût du travail pour les entreprises. Quelles ont été les propositions de la gauche durant les campagnes électorales ? les Verts ont prôné les 32 heures. Nous sommes d’accord si elles sont payées 32 heures ! Mme Royal a suggéré une augmentation du SMIC à 1 500 euros… avant d’admettre qu’elle n’y croyait pas elle-même ! Nous proposons simplement de laisser les Français travailler plus s’ils veulent gagner plus (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) ! Nous n’avons pas de botte secrète, cela nous paraît simplement du bon sens …

Ce texte s’attaque aussi à la croissance, insuffisante.

M. Jean-Louis Idiart - La faute à qui ?

M. Dominique Dord - Les 600 000 emplois actuellement non pourvus représentent 20 milliards de salaires bruts, qui ne sont pas redistribués. Nous voulons aller chercher ces 20 milliards qui nous tendent les mains, mais auxquels nous tournons le dos depuis tant d’années !

Plusieurs députés du groupe socialiste, radical et citoyen - Cinq ans !

M. Dominique Dord - Oui, il faut changer de philosophie et passer de la doctrine Aubry, qui nous pénalise, au pragmatisme de Sauvy. Partager le travail est un mythe, travailler plus permet de créer de l’emploi. Voilà ce que contient cet article premier, qui nous permet de tourner enfin le dos à un dogmatisme d’un autre âge, qu’aucun autre pays, même géré par des socialistes, n’a cru bon d’appliquer (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe UMP) !

M. Marc Dolez - L’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires est présentée par le Gouvernement comme l’instrument principal de sa politique en faveur de l’emploi et du pouvoir d’achat. C’est l’illustration du slogan « travailler plus pour gagner plus », scandé pendant la campagne présidentielle. Mais il s’agit d’une supercherie.

Faut-il le rappeler ? Ce ne sont pas les salariés qui choisissent d’effectuer des heures supplémentaires, mais les employeurs qui le décident de manière unilatérale. Depuis cinq ans, le recours aux heures supplémentaires a été largement favorisé, grâce notamment à l’augmentation du contingent annuel de 130 à 180 heures en 2002, puis à 220 heures en 2004. Faute d’une activité économique suffisante, le nombre d’heures de travail n’a pas crû. Cette mesure ne peut donc, en aucun cas, se substituer à une politique salariale.

En réalité, la réduction des cotisations sociales revient à amplifier les effets négatifs de la baisse généralisée du coût du travail, menée sans contrepartie depuis cinq ans. Les exonérations, qui coûtent 20 milliards chaque année, ont encouragé la création d’emplois précaires, peu qualifiés et peu rémunérés, comme l’a dénoncé la Cour des comptes. Avec cette nouvelle exonération, qui rend l’heure supplémentaire moins coûteuse que l’heure « normale », les salariés à temps partiel ne connaîtront pas le temps plein et les demandeurs d’emploi resteront à la porte des entreprises.

La détaxation risque également d’inciter à la déclaration d’heures supplémentaires fictives. N’est-ce pas la raison pour laquelle le projet de loi prévoit un délai de carence d’un an ? Et comment contrôlerez-vous les heures supplémentaires déclarées dont, en outre, la défiscalisation n’aura aucun effet pour la moitié des ménages qui ne paient pas d’impôts, alors qu’elle mettra en péril le financement de la protection sociale. Le projet de loi demeure muet sur la compensation par l’État pour les régimes de sécurité sociale, comme sur les pertes subies par les retraites complémentaires et par l’assurance chômage.

Cette détaxation est une arnaque, particulièrement coûteuse pour le contribuable, qui n’a rien à voir avec une politique d’augmentation des salaires et de création d’emplois. Elle sert surtout de couverture aux autres dispositions du projet de loi, destinées aux ménages les plus riches ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen)

M. Serge Letchimy - Au nom de Victorin Lurel, je voudrais d’abord dénoncer l’asphyxie des collectivités locales, qui auront, avec le consommateur et la sécurité sociale, à financer ces mesures – sur la pertinence desquelles je ne me prononcerai pas. Le Premier ministre a annoncé dans son discours de politique générale que les dotations de l’État ne pourraient pas augmenter plus que l’inflation en 2008. Les finances des collectivités locales d’outre-mer, structurellement plus fragiles, sont particulièrement visées. Cette décision, annoncée sans concertation, concrétise l’abandon unilatéral du pacte de solidarité qui liait l’État aux collectivités locales depuis de nombreuses années.

Outre-mer, où les ressources financières des collectivités locales sont à la fois moindres qu’en métropole et incertaines, avec des bases fiscales bien plus faibles, votre décision met en péril la remise à niveau des économies locales. En dépit de cette privation de ressources, les collectivités locales devront prendre en charge le financement de nombreuses mesures comme le renforcement du bouclier fiscal prévu par l'article 5, sans que soit évoquée la répartition de son coût entre l'État, les collectivités locales et les organismes de sécurité sociale, ou comme la substitution progressive du RSA au RMI, l’État ne compensant que 50 % du surcoût aux départements. Les nouvelles exonérations de charges prévues à l'article premier seront-elles intégralement compensées à la sécurité sociale? De même, le projet sur les universités que nous examinerons à la fin du mois conduira de facto les régions à investir dans le patrimoine immobilier universitaire.

Nous proposons quant à nous de mettre fin au véritable scandale que constitue l’exclusion des 220 000 chômeurs recensés outre-mer des statistiques nationales : ce serait une mesure de justice et d’égalité.

Nous proposons d'autre part de bonifier les dispositifs d'exonération de charges – idéalement de 20 % – pour les jeunes diplômés sans emploi outre-mer, afin de lutter contre le fléau du chômage des jeunes.

J’en viens à un problème crucial outre-mer, en particulier aux Antilles, celui de la pollution des terres au chlordécone et autres pesticides. Les agriculteurs dont les productions sont devenues impropres à la consommation se voient privés de revenus et confrontés à des contentieux inextricables du fait de cette catastrophe environnementale dont l'État est entièrement responsable, lui qui a laissé entrer dans ces territoires ce poison interdit partout ailleurs. En guise de compensation, le groupe socialiste, républicain et citoyen vous propose d'exonérer ces agriculteurs de cotisations.

Nous souhaitons que ces propositions soient entendues lors de la discussion des amendements.

J’évoquerai enfin, s’agissant du logement, la déductibilité des intérêts d’emprunts. Quels que soient son intérêt et sa pertinence, cette mesure n'apportera rien outre-mer, puisque le dispositif est exclusif de la défiscalisation de l'achat immobilier. Ce texte ne consent donc aucun effort supplémentaire en faveur du logement outre-mer.

Permettez-moi cependant de vous poser une question : comment l'État entend-il payer ses dettes relatives au logement social et financer la construction de logements outre-mer, où les besoins sont estimés à 120 000 logements supplémentaires ? Le sénateur UMP Henri Torre dénonçait récemment « une politique suicidaire » et « une gestion hasardeuse » sur ce sujet. La dette en matière de logement social atteindrait ainsi entre 500 millions et un milliard d'euros. La situation est grave : il faut agir. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine)

M. Alain Vidalies - Rappel au Règlement, relatif à l’organisation de nos travaux. Il est tout de même surprenant que le Gouvernement ne respecte pas ses engagements les plus récents. La loi de modernisation du dialogue social du 31 janvier 2007, votée à l’initiative d’un gouvernement qui était le cousin germain du vôtre, messieurs les ministres, a élargi les missions du Comité supérieur de l’emploi, où sont représentées les organisations professionnelles d’employeurs et de travailleurs ainsi que les administrations intéressées : il doit désormais émettre un avis sur les projets de loi, d’ordonnance et de décret qui concernent l’emploi. Or vous avez bafoué cet engagement : ce texte n’a pas été soumis au Comité. Si le Gouvernement ne nous écoute pas, qu’il applique au moins les textes qu’il a fait adopter il y a quelques semaines !

M. le Président - Je donne la parole à M. Novelli.

M. Arnaud Montebourg - Un ministre se lève enfin ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Hervé Novelli, secrétaire d’État - Le Gouvernement n’a nullement l’intention de se dérober au débat.

M. Jean-Pierre Brard - Où est Mme Lagarde ?

M. Hervé Novelli, secrétaire d'État - Elle nous rejoindra dans quelques instants. Nous essayerons de vous répondre comme il convient – et je l’ai fait tout à l’heure lorsque le président Ayrault m’a interrogé.

Nous discutons d’un texte à caractère fiscal – vous l’appelez d’ailleurs le « paquet fiscal ». Il n’y a aucune raison de saisir le Comité supérieur de l’emploi d’un texte qui vise à exonérer de charges sociales et fiscales les heures supplémentaires. En l’occurrence, la loi de modernisation du dialogue social ne s’applique donc pas.(Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine)

M. Roland Muzeau - Vous ne vous étonnerez pas que notre amendement 122 propose la suppression pure et simple de votre dispositif.

En effet, vous trompez délibérément les salariés sur la nature et la portée exacte de votre réforme, qui s’avère être un leurre. Tout d’abord, elle ne va pas desserrer l'étau des heures supplémentaires contraintes, dont l'employeur décide seul, le salarié ne pouvant pas plus les exiger que les refuser. Les 650 salariés en CDI et les 150 salariés précaires de l'usine Kronenbourg d’Obernai, en Alsace, ont ainsi fait grève pendant quatre jours contre les heures supplémentaires il y a quelques semaines. Après s'être débarrassée d'une brasserie de Lorraine, la direction avait décidé d'imposer 100 heures supplémentaires à chaque salarié, les contraignant à travailler 48 heures par semaine, y compris le samedi. Les grévistes ont demandé et obtenu que les heures supplémentaires soient mises en place sur la seule base du volontariat.

Cette grève a mis en évidence l'hypocrisie de votre politique. À Vénissieux, déjà, les salariés de l’usine Bosch s’étaient vu imposer de revenir aux 39 heures – sans gagner plus – sous la menace de la délocalisation. Faudra-t-il que les salariés multiplient ces bras de fer pour faire respecter le principe du volontariat ?

Autre hypocrisie, le gain en termes de pouvoir d'achat sera illusoire, et vous le savez bien. Les quelques euros de plus touchés par les salariés seront très vite repris : par le blocage du salaire de base auquel vous encouragez implicitement les employeurs, mais aussi par les augmentations de dépenses programmées, tant en matière de santé qu’avec l'augmentation probable de la TVA prétendument sociale.

Enfin, votre mesure accroîtra les inégalités. Non seulement les allégements de cotisations et de contributions fiscales seront proportionnés aux salaires, mais les salariés précaires et en contrats temporaires, comme ceux des branches et entreprises où les accords prévoient des majorations pour heures supplémentaires inférieures à 25 % en seront écartés.

C'est ainsi que la plupart des salariés dont le temps de travail est le plus long et les salaires les plus bas, cette « France qui se lève tôt » chère au Président de la République – je pense en particulier à l’hôtellerie-restauration – ne tireront aucun bénéfice de vos mesures.

À M. Carrez qui nous expliquait doctement hier que le partage du temps de travail était une impasse, je réponds que l’allongement du temps de travail de ceux qui ont un emploi aura une incidence, non seulement sur les salaires, qui seront tirés vers le bas, mais encore sur l'embauche. Pour une entreprise de 50 salariés, faire faire trois heures supplémentaires par semaine à chaque salarié revient à supprimer quatre possibilités d'embauche. (Interruptions sur les bancs du groupe UMP)

Affirmer que votre mesure sera favorable à l'emploi est donc une hérésie : rien ne permet de dire aujourd'hui qu’elle aura un quelconque effet sur la croissance, condition sine qua non de la résorption du chômage.

C'est l'avis de la plupart des économistes, y compris les plus libéraux. C'est aussi le nôtre : les politiques d'exonération fiscale ne peuvent avoir d'autre effet que de priver l'État des marges de manoeuvre utiles à la relance de notre économie. La Cour des comptes l’a d’ailleurs rappelé à plusieurs reprises.

M. Gaëtan Gorce - Notre amendement 234 vise également à supprimer cet article. Nous avons en effet des doutes quant à l’impact de ce dispositif sur le pouvoir d’achat. Le Gouvernement ne nous a d’ailleurs pas répondu sur ce point, ce qui serait pourtant la moindre des choses. Nous n’avons pas non plus de réponse sur la compensation et le remboursement à la protection sociale de ces exonérations de charges. J’espère que Mme Lagarde pourra nous donner toutes informations utiles sur ce point.

Nous n’avons pas davantage de réponse sur les conséquences de ce texte pour les salariés qui bénéficient actuellement de la PPE ou qui risquent de perdre d’autres exonérations ou prestations du fait de l’intégration de ces rémunérations supplémentaires dans leur profil fiscal de référence, ce qui serait tout de même un paradoxe. Nous aimerions obtenir des précisions sur tous ces points qui conditionnent l’efficacité des mesures proposées, faute de quoi j’en conclurai que pour le Gouvernement, si j’ose dire, plus il y a de flou, plus on rit ! Pour notre part, nous n’avons pas envie de rire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine)

Mme Martine Billard – Ces dispositions seraient indispensables, nous dit-on, parce que les Français seraient des fainéants qui refusent de travailler. Or, des statistiques officielles nous apprennent qu’en 2005, un Français a produit en moyenne 71 900 dollars de richesses, un Américain 81 000, un Anglais 64 100, un Allemand 59 100 et un Japonais 56 300. Les Français ne sont donc pas, et de loin, les plus mal placés. De même, au troisième trimestre 2006, selon Eurostat, un Français a travaillé en moyenne 36,4 heures par semaine, contre 36,1 heures dans l’ex-Union à quinze. Les chiffres ne confirment donc tous pas vos allégations !

Vous avez dit en commission, Madame la ministre, que ce texte ne nécessitait pas d’étude d’impact, la voix du suffrage universel en tenant lieu. Une telle étude aurait pourtant été bien utile. S’il faut aujourd’hui instituer le RSA, c’est pour remédier aux difficultés que rencontrent les allocataires du RMI lorsqu’ils reprennent un travail. Il serait absurde de commettre aujourd’hui de nouveau en montant cette incroyable usine à gaz, s’agissant des heures supplémentaires, les erreurs commises par les gouvernements UMP successifs des cinq dernières années (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

Tout d’abord, rien ne prouve qu’une augmentation du nombre d’heures supplémentaires par salarié accroît la productivité d’une entreprise. L’effet est même contraire au-delà d’un certain seuil d’heures travaillées. Ensuite, une entreprise qui pourra faire faire à moindre coût des heures supplémentaires à ses salariés, déjà formés, n’embauchera ni intérimaires ni salariés en CDD. Enfin, alors que le nombre de suicides en entreprise augmente – des salariés pris entre le marteau et l’enclume, entre la pression de l’entreprise et celle des clients, en arrivant à cette extrémité –, il est à craindre qu’il n’augmente encore si, comme il est prévu, le nombre d’heures supplémentaires autorisé peut porter la durée hebdomadaire du travail jusqu’à 48 heures. Quant au nombre d’arrêts maladie, reparti à la hausse, il continuera lui aussi d’augmenter car à vouloir toujours tirer davantage sur la corde, on en arrive à ce que les salariés ne tiennent plus le coup, tombent malades et creusent encore davantage le déficit de la Sécurité sociale (Interruptions sur les bancs du groupe UMP). Ce sont là les réalités du monde du travail, qui ne sont pas celles en effet du monde de la finance. Cet article premier concerne bel et bien la vie au travail de millions de salariés. C’est pourquoi nous proposons par notre amendement 432 de le supprimer.

M. Jean-Pierre Brard - L’amendement 399 est également de suppression.

Ce qui me frappe est le conformisme de la pensée de nos collègues de l’UMP. Pour eux, si la France ne suit pas les pires exemples étrangers, elle n’est pas au niveau ! M. Dord a dit tout à l’heure qu’aucun autre pays n’avait mis en place les 35 heures comme nous. Est-ce à dire que nous avons eu tort ? (« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP) Avions-nous tort le 14 juillet 1789, ou à Valmy le 20 septembre 1992, où nul doute que vous auriez été du côté des coalisés avec les Coblençards ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Bien que seul, le général de Gaulle avait-il tort le 18 juillet 1940 ? (Mêmes mouvements) Le mimétisme n’est jamais de bonne politique. Avons-nous eu tort de refuser d’aller en Irak ? Bien évidemment non, et pourtant nous étions seuls. Nos collègues de la majorité, esclaves du libéralisme intégral, se soumettent à la loi d’airain de l’exploitation, laquelle a aujourd’hui pour nom les exigences des actionnaires -encore que Mme la ministre n’accorde pas à tous la même confiance et préfère le cénacle restreint des administrateurs, les assemblées générales ayant déjà un parfum de démocratie qui empêche de s’arranger entre soi ! Notre pays doit continuer de rayonner et nous ne le laisserons pas placer sous l’éteignoir du fait de l’ultra-libéralisme que vous prônez.

Nous sommes hostiles à cet article premier qui conduira à opposer les salariés aux uns aux autres, privera le budget de l’État de recettes fiscales et les régimes sociaux de ressources -qui ne sont pas des charges mais des cotisations sociales, c’est-à-dire un salaire indirect. Vous recourez de nouveau à l’allègement des cotisations alors même que le Président Philippe Séguin vient de nous dire en commission que la Cour des comptes ne pouvait se prononcer sur l’utilité de ces exonérations, la preuve n’en étant pas établie. Vous ne défendez cette idée que par idéologie, (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) celle de votre classe ou plutôt de ceux pour qui vous roulez, car même ceux d’entre vous qui ne sont pas nés avec une cuiller d’or dans la bouche défendent les intérêts de Forgeard, Lagardère, Bouygues et consorts.

Je me suis plaint tout à l’heure, Madame la ministre, que vous ne répondiez pas aux orateurs de l’opposition, excepté à Didier Migaud auquel vous avez rappelé qu’il n’était président de la commission des finances que par la bonne volonté du Président de la République et de la majorité et qu’il ne devait par conséquent pas exagérer... Eh bien, chers collègues, le croirez-vous, c’est par discrétion que Mme Lagarde ne nous a pas répondu. En effet, son service de presse vient de diffuser les réponses qu’elle ne nous a pas faites. Voilà ce qu’elle devait me répondre (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). À preuve ce feuillet intitulé « Réponse à M. Brard s’il intervient » – il me semblait être intervenu suffisamment pour mériter une réponse ! (Rires) Je lis : « Je me permets, Monsieur Brard, de réitérer mes propos. Vous pensez trop, l’étendue de votre culture et l’impertinence de vos références nous l’ont confirmé. Et cela nuit à votre sens pratique (Rires sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) car celui-ci vous aurait immanquablement conduit à la conclusion que plus d’argent pour les travailleurs, c’est mieux que moins d’argent. À force de penser, vous perdez en outre le sens de la géographie. Vous me traitez d’Américaine, puis d’Autrichienne » – je n’ai pas dit que vous étiez autrichienne, mais que vous m’évoquiez davantage Marie-Antoinette que la reine Christine… (Rires sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et du groupe socialiste, radical et citoyen) « Je me permets, poursuivez-vous, de vous rappeler que je suis avant tout française ». Madame la ministre, mon sens pratique, je l’ai acquis non seulement, et j’en suis fier, parce que je suis fils d’ouvrier et instituteur de la République, mais aussi parce que je suis élu du suffrage universel, notamment au service de mes concitoyens de Montreuil dont je suis le maire. Et sans doute ai-je davantage de sens pratique que vous qui avez dirigé un cabinet d’avocats d’affaires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine).

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances - La commission a repoussé ces amendements de suppression.

Il est incontestable que la baisse du coût du travail engagée depuis 1993 a été la plus efficace des politiques pour améliorer l’emploi et réduire le chômage, comme le démontre d’ailleurs le rapport de la Cour des comptes de l’an dernier. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP)

M. Henri Emmanuelli - Mais non !

M. le Rapporteur général – La meilleure preuve en est que cette politique a été poursuivie entre 1997 et 2002.

En revanche, la politique autoritaire de réduction du temps de travail a été décevante…

M. Michel Bouvard - Et coûteuse !

M. le Rapporteur général – Les études convergent pour estimer qu’elle a permis de créer de 200 000 à 300 000 emplois, soit bien moins que tous ceux créés grâce à la réduction du coût du travail. Mais elle a eu une incidence catastrophique sur nos finances publiques puisque les compensations indispensables nous coûtent aujourd’hui 11 milliards d’euros. Autrement dit, nous aurions depuis longtemps commencé de réduire la dette si nous n’avions pas hérité du fardeau des 35 heures. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean Glavany - Idéologue !

M. le Rapporteur général – N’étant justement pas un idéologue, Monsieur Glavany, je reconnais aussi que les lois Aubry, en permettant l’annualisation du temps de travail, ont donné une certaine flexibilité aux entreprises, notamment aux plus grandes d’entre elles, pour mieux s’adapter à leurs cycles de production.

Cela étant, ouvrons les yeux. Je souhaite répondre aux propos tenus par M. Pierre-Alain Muet ce matin. La France est le pays développé où le temps de travail, s’agissant des actifs occupés, est l’un des plus faibles : il est inférieur à 1 550 heures, alors qu’il s’élève en Europe à plus de 1 600 heures en moyenne.

M. Henri Emmanuelli - Et en Allemagne, quel est-il ?

M. le Rapporteur général - Il s’agit là d’un véritable handicap. Toutes les études économiques convergent : plus le temps de travail par actif occupé est élevé et plus le taux de chômage est faible. (« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP) De fait, M. Muet – pourtant économiste reconnu – a dû, pour fournir un contre-exemple, citer le cas de la Norvège, qui ne s’explique en réalité – chacun le sait – que par la rente pétrolière. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Sur le plan économique, nous avons soigneusement testé la mesure d’exonération des heures supplémentaires. Cette mesure présente deux avantages : d’une part, améliorer la croissance – il s’agit de la disposition la plus solide nous permettant de conquérir un demi-point ou un point de croissance supplémentaire ; d’autre part, améliorer le pouvoir d’achat des Français. Je le disais hier : l’heure supplémentaire, du seul fait de l’exonération des charges acquittées par le salarié – CSG comprise –, sera majorée de près d’un quart. Si l’on y ajoute la majoration légale de l’heure supplémentaire, il est possible de parvenir à une augmentation de 60 %.

Cette mesure fait partie des engagements souscrits par le candidat qui était le nôtre à l’élection présidentielle ; elle incarne notre détermination à valoriser le travail. Ainsi, vous nous faites aujourd’hui le reproche de tenir nos engagements ! C’est ce dont nous accusait ce matin M. Cahuzac : « il est vrai », nous disait-il, « que vous avez annoncé cette mesure, mais, puisqu’elle est mauvaise, vous ne devez pas tenir cette promesse ! »

Plusieurs députés SRC - Il a raison !

M. le Rapporteur général - Que dire alors de votre candidate, qui a défendu l’augmentation du SMIC à 1 500 euros au cours de la campagne pour l’élection présidentielle avant de condamner cette mesure une fois la campagne terminée ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen) Ce n’est pas là, mes chers collègues, la conception que nous nous faisons de la politique.

M. Roland Muzeau – Et la TVA sociale ?

M. le Rapporteur général – Nous avons annoncé ces mesures et les Français les ont approuvées ; nous respecterons nos engagements. Il y va de notre honneur et de notre crédibilité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme Christine Lagarde, ministre de l’économie, des finances et de l’emploi - Je me réjouis d’être de retour parmi vous, après m’être entretenue un peu plus longuement que prévu avec M. le ministre des comptes de la nation, qui nous impose pour l’exercice 2008 une rigueur budgétaire digne d’admiration, et particulièrement importante en matière de diminution des dépenses publiques.

M. Jean-Pierre Brard - Il faut se lever plus tôt !

Mme la Ministre – Ce projet de loi est un texte fondateur et emblématique de notre volonté de réhabiliter le travail et de le replacer au cœur de notre économie et de la vie des Français. Or les différents amendements que vous proposez visent à supprimer son article premier, lequel contient les dispositions fondamentales facilitant et rendant plus attrayant, pour l’employeur comme pour le salarié, le recours aux heures supplémentaires. Je demande donc le retrait ou, à défaut, le rejet de ces amendements.

S’agissant des points que vous avez plus précisément évoqués, j’attire tout d’abord votre attention sur l’exposé des motifs…

M. Arnaud Montebourg - Nous l’avons lu !

Mme la Ministre - …et plus particulièrement sur le passage suivant, qui concerne le financement de cette mesure : « En application de l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, l’État compensera les exonérations de cotisations de sécurité sociale aux régimes concernés ».

En second lieu, vous avez soulevé la question des études d’impact. Or il est extrêmement difficile de procéder à ce type d’études : nous ignorons dans quelle mesure les employeurs auront recours aux heures supplémentaires – car c’est aux employeurs de fournir le travail, non à l’État de déterminer un plafond ou un plancher d’heures supplémentaires ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen)

M. Arnaud Montebourg - Quel aveu !

M. Michel Sapin - On croyait que ce seraient les salariés qui choisiraient !

Mme la Ministre - Notre calcul se fonde donc sur le nombre d’heures supplémentaires actuellement effectuées. Le « stock » d’heures supplémentaires, en année courante, s’élève ainsi à 900 millions d’heures supplémentaires environ ; à ce « stock », dont on peut imaginer qu’il subsistera, il convient d’appliquer, comme l’a très justement fait remarquer M. le Rapporteur général, un plafond d’environ 23 % de charges sociales par heure supplémentaire, puisque nous procédons à une déduction des cotisations sociales. Il faut naturellement y ajouter également les 11 % d’imposition moyenne sur le revenu des personnes physiques qui s’applique aux sommes ayant la nature de salaires. S’y ajoute enfin, dans le cas des sociétés comptant 20 salariés au plus, le complément correspondant à la majoration de 15 % des heures supplémentaires, puisque nous anticipons ainsi sur le texte qui le fixait à 25 % et devait entrer en vigueur le 1er janvier 2009. Ces chiffres étant posés, il nous est impossible de savoir, dans l’état actuel de l’activité économique, si les employeurs auront recours à 10, 15 ou 20 % d’heures supplémentaires en plus. Nous espérons conquérir le point de croissance dont nous avons besoin afin d’être en mesure, dans un monde ouvert où circulent marchés, individus et capitaux, de soutenir la concurrence avec les autres pays.

Permettez-moi de remarquer que, lors de la réunion de l’Eurogroupe, à Bruxelles, les représentants de gouvernements socialistes, notamment des gouvernements britannique, espagnol et italien, ont vivement applaudi les mesures que nous proposons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP, exclamations sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen)

Enfin, comme le dispose également l’exposé des motifs, le Gouvernement s’engage à fournir au Parlement, dans 18 mois, un rapport d’évaluation de l’efficacité de cette mesure. C’est indispensable à la fois au choc de confiance et au changement d’attitude vis-à-vis du travail auxquels nous aspirons (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Henri Emmanuelli – Cet après-midi, le ton est monté et vous ne cessez, chers collègues de la majorité, de vous autocongratuler. Je vous encourage à continuer, tant que la saison y est propice, mais sans pour autant dire n’importe quoi ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP) À vous entendre, les 35 heures seraient à l’origine du chômage et de la dégradation des finances publiques. (« Oui ! » sur les bancs du groupe UMP) Vous êtes pourtant au pouvoir non pas depuis deux mois, ni depuis un an, mais depuis cinq ans ! Pourquoi ne pas les avoir supprimées ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen) En réalité, vous êtes même en train de les généraliser : les entreprises qui n’appliquaient pas jusqu’à présent les 35 heures – les PME, les entreprises de moins de 20 salariés – auront financièrement intérêt à y recourir pour bénéficier du dispositif de l’article premier !

Quant aux chiffres du chômage, Monsieur le Rapporteur général, je vous rappelle qu’au cours de la législature 1997-2002 ont été créés 1,5 million d’emplois, contre moins du tiers sous la législature suivante ! Les 35 heures hypothèqueraient-elles la productivité du pays ? C’est d’autant moins vrai que les bénéfices des entreprises du CAC 40 ont atteint l’an dernier des records.

M. Jacques Myard - Cela n’a rien à voir !

M. Henri Emmanuelli - Vous ne nous livrez pas une démonstration économique, ni arithmétique, mais un catéchisme libéral dont vous cherchez à nous bourrer le crâne alors qu’il ne correspond pas à la réalité ! Après cinq ans de votre gouvernement, les finances publiques atteignaient, au mois de mai dernier, 65 % du PIB et à la réunion de Bruxelles que vous évoquiez, je ne sache pas qu’il y ait eu sur ce sujet d’applaudissements, mais plutôt des remarques acerbes... Et que dire des 13 milliards d’euros de charges que vous ajoutez, sans financement si ce n’est le vague espoir d’une croissance qui ne se décrète pas, et pour laquelle la diminution de 0,8 % de la consommation enregistrée en mai n’est guère encourageante ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Vous avez usé et abusé durant cinq ans de l’argument relatif aux 35 heures : vous ne l’utiliserez pas durant cinq années supplémentaires !

Si vous vouliez revaloriser le pouvoir d’achat, vous aviez d’excellents moyens de le faire, mais vous n’avez ni donné de coup de pouce au SMIC le 1er juillet, ni augmenté la prime pour l’emploi. Qui s’en étonnera ? Votre politique n’est pas au service des salariés mais à celui des actionnaires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen, protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Pierre-Alain Muet - Le rapporteur général s’est efforcé de montrer, par des comparaisons internationales, que plus la durée du travail était importante dans un pays donné, plus le taux de chômage y était faible. Or, comme j’en ai fait état ce matin, le graphique qui figure en page 51 de son propre rapport démontre le contraire. On y voit que la Norvège et les Pays-Bas, pays qui ont depuis longtemps diminué de manière considérable le temps de travail, sont ceux qui à la fois travaillent le moins et connaissent le plein emploi (« Et le pétrole ? » sur les bancs du groupe UMP), et que la Grèce, la Pologne et la République tchèque, les trois pays qui travaillent le plus, sont aussi ceux qui connaissent les taux de chômage les plus élevés. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Faut-il rappeler que, sur 5 millions d’emplois créés en France en un siècle, 2 millions l’ont été entre 1997 et 2002… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)

M. Jérôme Chartier - Des emplois assistés !

M. Pierre-Alain Muet – …contre moitié moins au cours du dernier quinquennat ? (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Il faut, dites-vous, « travailler plus pour gagner plus », mais c’est un objectif qui doit être fixé à l’échelle globale, et non individuelle. Or, la seule période du siècle pendant laquelle le nombre total d’heures a augmenté de près de 10 % est celle du gouvernement Jospin, grâce aux 2 millions d’emplois créés. C’est le seul moment où notre pays a effectivement travaillé plus pour gagner plus, et le gain est allé à ceux qui en avaient besoin – les chômeurs. C’est aussi la seule période pendant laquelle le chômage des jeunes a reculé, et le déficit public et la dette baissé. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen)

Plusieurs députés UMP - Et Jospin, où est-il ?

M. Arnaud Montebourg - Rappel au Règlement ! Le Gouvernement et le rapporteur général sont enfin entrés un peu plus avant dans le débat, ce qui nous a permis d’apprendre de la bouche de Mme la ministre qu’il était impossible de savoir précisément quels seraient les effets d’une mesure dont le coût est évalué, excusez du peu, entre 6 et 7 milliards. J’observe que, pour toute réponse aux questions précises qui lui sont posées, Mme Lagarde lit l’exposé des motifs de son texte et cite les hypothétiques applaudissements qu’elle aurait reçus à Bruxelles – hypothétiques car aucun autre pays européen n’a fait la folie de consacrer 6 milliards d’euros à subventionner le chômage ! (Exclamations et protestations sur les bancs du groupe UMP) Je constate encore que l’on refuse tout débat véritable au motif que le résultat des élections a été celui que l’on sait. Mais enfin ! Les Français on élu une équipe, certes, mais en quoi cela justifierait-il que l’on ne puisse discuter des mesures qu’elle s’apprête à appliquer ? Si le débat ne peut avoir lieu, autant fermer le Parlement ! (Interruptions sur les bancs du groupe UMP).

M. Muet, économiste dont l’autorité intellectuelle va bien au-delà des limites de notre hémicycle, a cité ce matin un rapport du Conseil d’analyse économique qui souligne les « effets incertains sur l’emploi et le pouvoir d’achat » de cette mesure, d’un « coût exorbitant » pour les finances publiques. D’autre part, M. Tavernier, ancien directeur adjoint du trésor et actuel directeur du cabinet de M. Woerth, avait jugé la mesure « inopportune » lorsque l’actuel Président de la République l’avait consulté à ce sujet. Que répondez-vous, Madame la ministre, non seulement au Conseil d’analyse économique et à M. Tavernier, mais aussi à M. Méhaignerie et à M. de Courson, qui s’interrogent publiquement sur le bien-fondé de cette mesure, et aux députés de l’opposition ?

Les amendements 122, 234, 399 et 432, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Pierre Brard - Rappel au Règlement ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) L’usage veut qu’un orateur puisse répondre à la commission et un autre au Gouvernement.

M. le Président – C’est ce qui a été fait.

M. Jean-Pierre Brard - De manière quelque peu unilatérale, puisque je n’ai pu prendre la parole quand je l’ai demandé… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) . Sur le fond, la période 1997-2002 n’a pas dû être si mauvaise que vous le dites, puisque le Président de la République envoie M. Strauss-Kahn au FMI… (Mouvements divers).

De fait, au cours de ces cinq années, 1,5 million d’emplois ont été créés, le pouvoir d’achat a augmenté, le chômage a diminué ; ensuite, l’actuelle majorité a créé 300 0000 RMistes. (Protestations sur les bancs du groupe UMP).

Madame la ministre, vous n’êtes pas Bernadette Soubirous, (Exclamations sur les mêmes bancs) et il ne vous suffit pas d’invoquer la croissance pour qu’elle apparaisse. Monsieur le rapporteur général, nous vous avons connu plus rigoureux dans vos démonstrations. Il est vrai que vous n’avez pas toute liberté dans vos fonctions (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) mais de là à affirmer comme un axiome « Nous savons que la mesure est bonne » alors que le Premier président de la Cour des comptes dit que personne n’en sait rien ! Le problème, c’est celui du financement, car moins de ressources fiscales, cela signifie aussi de moindres ressources sociales. On nous dit que l’État compensera cette perte, mais ce n’est écrit nulle part ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP) Vous devez, Madame la ministre, vous expliquer sur ce mécanisme de vases communicants par lequel vous prenez aux uns pour donner aux autres. (Exclamations et interruptions sur les mêmes bancs) Et, pour que notre Assemblée retrouve sa sérénité, je demande une suspension de séance.

M. le Président - Elle est de droit, mais elle interviendra après la discussion des amendements 168 et 236.

M. Roland Muzeau - Je ne crois pas non plus, Madame la ministre, que vous puissiez vous limiter à nous donner lecture de l’exposé des motifs de votre texte au moment où nous entrons dans le détail des articles et des dégâts collatéraux qu’ils vont provoquer. Alors que la richesse financière explose, il est inadmissible de ne s’attacher qu’aux coûts salariaux, de ne pas admettre que la captation des richesses par la sphère financière est destructrice pour l’emploi et dangereuse pour l’économie nationale.

Nous estimons qu’il convient, par une nouvelle architecture des cotisations sociales, de favoriser l’emploi et la création de richesses. On ne peut traiter de la même manière les PME et les grande sociétés du CAC 40. Malheureusement, vous ne faites que renforcer les privilèges des dirigeants et des entreprises les plus profitables. Les profits des entreprises du CAC 40 sont passés de 35 milliards en 2003 à plus de 100 milliards en 2006 – avec l’application des 35 heures – tandis que les salaires n’augmentaient que de 6 %. C’est sans doute la « justice » dont vous parlez. Pour briser cette allégeance aux marchés financiers et permettre une modulation des cotisations sociales favorable à l’emploi et aux salaires, nous vous proposons d’adopter l’amendement 168.

M. Paul Giacobbi - Après l’exposé de Mme Lagarde, ou plutôt son réquisitoire contre l’article premier, est-il encore nécessaire de plaider pour sa suppression ? Mme Lagarde nous dit en effet que, la mesure étant expérimentale, il est impossible de savoir avant dix-huit mois si elle sera efficace ; que les chiffrages sont fondés sur un stock constant d’heures supplémentaires, autrement dit que les exonérations de charges sociales coûteront la bagatelle de 5 milliards avant même que les Français travaillent une minute de plus. Enfin, – nous sommes ici dans le domaine sinon de la théologie, du moins de l’espérance – selon elle, la mesure fera gagner un point de croissance. C’est ce que disait M. Mer il y a cinq ans à propos de la baisse de l’impôt sur le revenu, et les ministres successifs ont continué à le chercher – sauf M Gaymard, qui, lui, cherchait un appartement... (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Alain Gest - Ne jouez pas ce jeu-là !

M. Paul Giacobbi - Par quel raisonnement, en vertu de quel modèle économétrique, parvenez-vous à relier l’article premier et ce point de croissance ? Pour ma part, je ne sais pas.

Enfin, s’il est encore besoin compléter le réquisitoire contre l’article premier, il est inconstitutionnel. Ce n’est pas le salarié qui choisit de travailler plus, c’est le chef d’entreprise qui choisit pour lui. Donc le salarié qui bénéfice, volens nolens, de l’heure supplémentaire et de son exonération n’est pas à égalité avec celui qui voudrait bien bénéficier de l’exonération et travailler plus, mais auquel l’employeur refuse les heures supplémentaires.

Par l’amendement 236 nous proposons, à la place, d’introduire un abattement général de 5 % sur l’ensemble des revenus salariaux et de relever de 60 % à 75 % la base imposable des dividendes.

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé ces deux amendements, qui sont beaucoup moins efficaces que la proposition du Gouvernement, pour l’emploi comme pour le pouvoir d’achat.

M. Michel Sapin - Prouvez-le ! Où est le point de croissance ?

Mme la Ministre - L’amendement 168 tend à moduler le taux de la cotisation en fonction de la variation de la masse salariale dans la valeur ajoutée globale de l’entreprise. Mais ce ratio entre travail et capital varie considérablement selon le secteur d’activité. De plus, un rapport sur la réforme des cotisations patronales de Sécurité sociale a été élaboré l’an dernier, puis discuté au sein du Conseil d’orientation pour l’emploi, auquel participent les organisations syndicales, puis du Conseil d’analyse économique, et enfin a fait l’objet d’une synthèse par le Conseil d’analyse stratégique. Il en ressort que, chaque année, dans plus d’un quart des entreprises, ce ratio varie de plus de dix points, et que cette volatilité est très faiblement liée à la politique de l’emploi suivie par l’entreprise. On ne peut donc utiliser de manière générale ce ratio, cela conduirait à bouleverser la répartition du prélèvement social. Je vous demande donc de rejeter l’amendement 168.

M. Henri Emmanuelli - Cela fait vingt ans que Bercy répond cela !

Mme la Ministre - Peut-être, mais trois conseils d’experts différents se sont prononcés sur la question.

Quant à l’amendement 236, il revient à supprimer l’article premier. Or, celui-ci est au cœur du projet, c’est lui qui tend à faire du travail, de nouveau, une valeur cardinale. Substituer au dispositif un abattement général de 5 % sur les revenus salariaux, gagé par un relèvement de la fiscalité sur les dividendes, est une chose à laquelle je ne peux évidemment pas être favorable, car c’est le travail que nous souhaitons encourager.

M. Jean-Pierre Brard - Depuis hier, vous nous rebattez les oreilles avec votre formule « réhabiliter la valeur travail ». Eh bien, je vous prends au mot ! Que vaut une heure de travail ? Pas seulement ce qui est inscrit sur la fiche de paye, mais aussi tous les services et produits qui contribuent à l’entretien du travailleur qui effectue cette heure. En réalité, vous diminuez la valeur du travail en n’y incorporant pas, du fait des exonérations fiscales et sociales, ce que coûte l’entretien du travailleur. En effet, tout ce qui contribue à ce que le travailleur puisse travailler – la santé, l’école, tout ce qui relève du salaire indirect – ne sera plus à la charge de l’employeur, mais de l’État, donc du contribuable, en particulier grâce à la TVA. Vous plumez les plus pauvres pour enrichir les plus riches !

MM. Alain Cacheux et Jacques Desallangre - Très bien !

Les amendements 168 et 236, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Pierre Brard - J’ai demandé une suspension de séance.

M. le Président - Je croyais que la discussion vous avait permis d’exprimer toutes vos inquiétudes. Mais si vous souhaitez faire un rappel au Règlement…

M. Jean-Pierre Brard - Je vous remercie, je n’y avais pas pensé. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP, applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et des bancs du groupe socialiste, radical et citoyen) Mais puisque vous m’en donnez la possibilité, je reprends les paroles du rapporteur : il faut faire de la politique autrement en affichant ses convictions et en tenant ses engagements. Justement, Nicolas Sarkozy a promis de supprimer les parachutes dorés. Comment justifiez-vous qu’aujourd’hui il en soit autrement ? Cela n’a pas trait à l’article premier, certes, mais il s‘agit d’un aspect éthique essentiel. Les turpitudes des uns ou des unes ne sauraient excuser celles des autres…

Je maintiens bien sûr ma demande de suspension de séance. (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - Elle est de droit. La séance est suspendue pour quelques minutes.

La séance, suspendue à 17 heures 40, est reprise à 17 heures 45.

M. Michel Liebgott - Notre amendement 272 est incontestable en ce qu’il tend à combattre votre projet d’instaurer une société à deux vitesses, clivée entre les personnes imposables, lesquelles se verraient proposer de nouveaux avantages grâce au dispositif que vous créez, et les plus modestes, qui, par définition, ne sont pas soumis à l’impôt. Les doctrinaires, c’est vous, qui voulez que les riches s’enrichissent encore un peu plus, cependant que les pauvres, s’ils parvenaient d’aventure à améliorer leurs revenus, seraient vite rattrapés par la TVA sociale ou la perte de certaines prestations.

Mme Sylvia Bassot - Caricature !

M. Michel Liebgott - Et je dois dire que j’ai été quelque peu stupéfait d’entendre dire que les politiques conduites entre 1997 et 2002 n’auraient pas créé d’emplois…

Mme Sylvia Bassot - Nous parlons de vrais emplois, pas d’emplois assistés !

M. Michel Liebgott - Ce qui est incontestable, c’est que la politique du gouvernement Jospin a créé des emplois, alors que le présent Gouvernement s’apprête, lui, à dépenser beaucoup – il peine lui-même à évaluer combien – sans avoir la moindre idée de l’efficacité réelle des mesures qu’il propose. Au reste, il n’est guère encourageant pour vous de constater que votre unique soutien, la présidente du Medef, Mme Parisot, juge le dispositif très insuffisant, en particulier pour les entreprises de moins de 20 salariés et vous demande d’aller beaucoup plus loin, cependant que les organisations syndicales de salarié-e-s rejettent unanimement votre texte. Alors que les 35 heures avaient amené plus de souplesse, de flexibilité et de productivité tout en créant des emplois, vous préférez creuser les inégalités et opposer les salariés entre eux. C’est à la fois regrettable et inquiétant, la constitutionnalité de l’ensemble du dispositif n’étant en outre pas établie.

M. le Rapporteur général – Avis défavorable.

Mme la Ministre - Même avis.

M. Gaëtan Gorce - Un mot pour tenter d’obtenir enfin quelques précisions sur les conséquences d’un éventuel retour fiscal des salariés concernés et de l’intégration du bonus de rémunération tiré de l’accomplissement d’heures supplémentaires dans le revenu fiscal de référence. Qu’est-il prévu dans le cas où ce bonus rapprocherait la rémunération perçue d’1,4 fois le SMIC, au risque de faire perdre l’éligibilité à la PPE ou au dégrèvement de certaines taxes locales ? Peut-on obtenir une réponse précise sur ce point. L’exemple qui nous a été présenté n’était pas significatif puisqu’il concernait un salarié dont le revenu complété n’excéderait pas 1,2 fois le SMIC. Quant à l’amendement que nous avions présenté en commission pour tenter de neutraliser l’effet de la mesure, il est tombé sous le couperet de l’article 40. Loin de voir leur situation s’améliorer, les salariés concernés risquent d’être pénalisés : cela mérite au moins un début de réponse !

M. le Rapporteur général – Je puis garantir à M. Gorce qu’il n’y aura aucun changement par rapport à la situation actuelle. Aujourd’hui, les heures supplémentaires interviennent déjà pour faire sortir – ou entrer – dans le champ de la PPE. Le fait que ces heures soient ou non exonérées d’IR ou de cotisations ne jouera pas.

Prenons le cas d’un salarié à temps partiel : si, du fait de l’accomplissement d’heures complémentaires, son revenu devient équivalent à un quart du SMIC, il pourra devenir éligible à la PPE ; le fait que celles-ci soient ou non défiscalisées ne change rien. Dans la législature précédente, nous nous sommes attachés à concentrer le bénéfice de la PPE sur les salariés à temps partiel, pour tenir compte de leur fragilité particulière. Si, demain, un salarié aujourd’hui rémunéré à hauteur d’1,2 SMIC perçoit 1,4 SMIC grâce à ses heures supplémentaires, il n’est pas anormal qu’il sorte du champ de la PPE, que les heures soient ou non fiscalisées. Quant aux dégrèvements de taxe d’habitation, ils interviennent en fonction d’un plafond de revenu qui continuera d’incorporer les heures supplémentaires, qu’elles soient ou non exonérées.

M. Gaëtan Gorce - Soit, mais votre raisonnement, Monsieur le Rapporteur général, est en contradiction avec l’esprit du texte que vous prétendez soutenir, qui est – pardon de sembler l’avoir mieux compris que vous ! – de détaxer intégralement le supplément de revenu tiré des heures supplémentaires. Si, dans le même temps, le salarié prend de plein fouet la perte du bénéfice de la PPE… Au reste, le Gouvernement a bien vu la difficulté dans d’autres cas, pour lesquels il a pris grand soin de neutraliser les effets de seuil. Pourquoi ce qui est possible pour certaines catégories de salariés ne le serait-il pas pour les plus modestes ?

L'amendement 272, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard – L’article premier tend à consacrer la trop fameuse maxime du candidat Sarkozy : «travailler plus pour gagner plus ». En pratique, il s’agit de défiscaliser les heures supplémentaires, en vue d’alléger encore les cotisations patronales, au détriment de l’emploi.

M. Jean-Pierre Soisson - Mais non ! C’est tout bénéfice pour le salarié !

M. Jean-Pierre Brard - Le risque est en effet bien réel de voir, à terme, un contrat de 20 heures requalifié en contrat de 18 heures assorti de 2 heures supplémentaires. Pour le salarié, le bénéfice est nul, alors qu’il en coûtera à l’État. De même, des augmentations de salaire ou des « bonus » pourraient être traduits en heures supplémentaires fictives. Autre effet pervers, les entreprises préfèreront recourir aux heures supplémentaires plutôt que d’embaucher.

Pierre Cahuc et Patrick Artus, tous deux membres du Conseil d’analyse économique, dénoncent ces dangers dans un projet de rapport rédigé avec André Zylberberg. Selon ces économistes, cité par le quotidien Les Echos, « une fiscalité spécifique sur les heures supplémentaires, quelle que soit sa forme, aurait au mieux un effet incertain sur l’emploi et le revenu global, avec un risque de coût exorbitant pour les finances publiques, qui se double d’une complexité accrue du système fiscal ». Les rapporteurs ajoutent que ces mesures « ne constituent pas un moyen efficace de valoriser le travail ». Enfin, ils soulignent l’effet d’aubaine et pointent le risque d’une entente entre employeur et salariés, qui auraient intérêt à « abaisser le taux de salaire des heures normales et à déclarer fictivement un grand nombre d’heures supplémentaires afin de bénéficier des avantages fiscaux ».

Par l’amendement 404, nous proposons d’interdire que des licenciements soient compensés par la réalisation d’heures supplémentaires.

M. le Rapporteur général - Prenons l’exemple d’une entreprise de Montreuil, forcée de licencier après la perte d’un client important, et qui voit à nouveau ses carnets de commande se remplir : pourquoi les salariés ne pourraient-ils pas bénéficier de cette mesure d’exonération ? Ce serait injuste et, connaissant votre sens de la justice fiscale, je suis sûr que vous seriez en désaccord avec une telle disposition. Avis défavorable.

Mme la Ministre - Même avis. Il n’est pas question de faire figurer dans les dispositions relatives au licenciement pour motif économique les mesures concernant l’encouragement au travail.

M. Jean-Pierre Brard - M. Carrez apporte de l’eau à mon moulin : il vient de faire la démonstration qu’une entreprise embauche, non pas parce qu’elle reçoit des aides, mais parce qu’elle a des commandes ! Voilà la preuve que cette disposition n’est rien d’autre qu’une tentative de détruire, en réduisant délibérément ses ressources, un système de protection sociale que vous abhorrez au même titre que les 35 heures.

L'amendement 404, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 34 de la commission des finances est rédactionnel.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales - Le sous-amendement 473 tend à inclure parmi les salariés concernés par cette mesure ceux ayant bénéficié d’une réduction de la durée du travail sous forme d’une ou plusieurs périodes d’au moins une semaine, en raison des besoins de leur vie familiale.

M. le Rapporteur général - Je remercie M. Tian pour l’excellence de cet amendement.

Mme la Ministre - Avis favorable.

M. François Brottes - Je regrette de n’avoir pu m’exprimer sur l’amendement 404, qui traitait du licenciement économique, et profite de la discussion de ces dispositions techniques pour évoquer le cas du CNE, qui autorise les licenciements sans motif et qui concerne 900 000 salariés. Ceux-ci voudront certainement bénéficier de ces dispositions, mais se trouvent pour le moment dans une insécurité juridique absolue. Il serait judicieux que Mme la ministre puisse éclairer leur avenir et nous dire quel sort le Gouvernement entend donner à ces contrats, après que la cour d’appel de Paris a considéré qu’un CNE devait être requalifié en CDI.

M. le Président - Le Gouvernement lève-t-il le gage sur le sous-amendement 473 ?

Mme la Ministre – Oui.

S’agissant du CNE, deux cours d’appel se sont prononcées, mais le débat judiciaire n’est pas clos. En tout état de cause, il ne m’appartient pas de prendre position sur la requalification d’un contrat de travail.

Le sous-amendement 473, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 34, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. Pierre-Christophe Baguet - Dans sa version initiale, le texte de loi excluait de ce dispositif un certain nombre de catégories de salariés, notamment ceux dont le temps de travail horaire était calculé annuellement, ceux dont le temps de travail était calculé journellement à l’année, les salariés à temps partiel annuel ou à temps plein collectif inférieur à la durée légale. Je voudrais m’assurer que l’amendement 34 intègre bien ces catégories dans le dispositif. Tel est l’objet de l’amendement 206.

M. le Rapporteur général - La commission a rejeté cet amendement, comme tous ceux qui tendent à modifier la définition des heures supplémentaires et des heures complémentaires, telle qu’elle résulte du code du travail. M. Baguet nous propose de qualifier d’heures supplémentaires des heures effectuées à l’intérieur de l’annualisation du temps de travail. Or les heures supplémentaires visées par l’article premier sont les heures effectuées au-delà des 1 607 heures ou des 218 jours annuels.

Le but de cet article premier, c’est de travailler davantage. Or cet objectif ne pourrait être atteint pour des salariés dont la durée annualisée de travail, ramenée à la semaine, s’établirait à moins de 35 heures. C’est pourquoi nous ne comptons les heures supplémentaires que dès lors qu’elles dépassent les 1 607 heures par an ou les 218 jours. La commission a donc rejeté cet amendement.

Mme la Ministre - Même avis. Nous ne souhaitons pas modifier la définition des heures supplémentaires retenue pour l’application de la mesure d’exonération fiscale et sociale. Je vous serais donc reconnaissante de bien vouloir retirer cet amendement.

M. Pierre-Christophe Baguet - J’entends bien vos arguments. Mais le Gouvernement n’a eu de cesse, sous la législature précédente, de promouvoir le dialogue social. Un certain nombre d’entreprises sont parvenues, par le dialogue social, à des solutions satisfaisantes – annualisation du temps de travail par exemple. Elles se retrouvent aujourd’hui pénalisées : c’est injuste. Il y a désormais deux catégories de salariés : ceux qui sont victimes du dialogue social et des accords de branche et les autres.

M. Roland Muzeau - C’est vous qui avez déréglementé et mis partout ce que vous appelez de la liberté !

M. Pierre-Christophe Baguet - Il fallait bien mettre de la liberté, comme vous dites, pour répondre à la catastrophe des 35 heures !

M. le Président - Évitons les dialogues, Monsieur Baguet.

M. Pierre-Christophe Baguet - L’intervention de notre collègue est tout de même assez déplacée !

J’accepte cependant, Madame la ministre, de retirer mon amendement, sous réserve que vous repreniez la réflexion avec les partenaires sociaux afin de trouver une solution adaptée à la situation de ces entreprises qui ont fait l’effort d’aller jusqu’au bout du dialogue social.

Mme la Ministre - Un certain nombre de branches ont en effet négocié des accords, et je voudrais rendre hommage à Gérard Larcher qui a beaucoup œuvré à ce regain de la négociation sociale. Ces accords incluent en général une disposition permettant de revoir les dispositions relatives à la durée du travail, ou permettant une modulation de celle-ci au sein des entreprises en fonction de l’activité. Il me semble que c’est dans ce cadre que nous devrions tenter de parvenir à davantage d’égalité. C’est en tout cas à aller dans ce sens que je vous encourage.

M. Pierre-Christophe Baguet - Je compte sur la poursuite du dialogue social dans le sens de l’équité, Madame la ministre. Je retire donc mon amendement.

L'amendement 206 est retiré.

M. Alain Vidalies - Les conséquences pratiques de ce débat étant importantes, nous ne pouvons en rester à la position du Gouvernement. Il s’agit en effet de savoir ce qui peut se passer demain dans les entreprises qui ont signé des accords de modulation du temps de travail – par exemple dans l’agro-alimentaire, où il est courant de travailler 30 heures une semaine et 45 heures la suivante, le total annuel restant à 1 607 heures. Le Gouvernement considère qu’il ne s’agit pas d’heures supplémentaires au sens du code du travail : ces salariés ne sont donc pas concernés par le texte. Mais les partenaires sociaux auront tout intérêt à modifier l’accord pour pouvoir, sans aucun changement dans le volume d’heures travaillées, qualifier ces heures d’heures supplémentaires et ainsi bénéficier des mesures d’exonération et d’abattement fiscal. Cela fragilise considérablement votre dispositif.

M. Gaëtan Gorce - Votre texte traite de manière discriminatoire les salariés qui sont au forfait jours – notamment les cadres. Rappelons que le forfait jours a été pensé pour permettre aux cadres, dont le temps de travail ne peut être déterminé sur une base journalière ou hebdomadaire, de bénéficier néanmoins d’une réduction effective du temps de travail comme ils le souhaitaient. La loi a donc distingué trois catégories de salariés : ceux relevant du régime « général » – prise en compte de l’horaire hebdomadaire –, les cadres dirigeants, qui ont été exclus du dispositif, et les autres, qui peuvent bénéficier soit d’un forfait hebdomadaire, soit d’un forfait jours sur l’année, le plafond de jours travaillés étant fixé à 218 jours. La négociation collective a pu fixer ce nombre à un niveau inférieur.

Or certains de ces salariés ne pourront pas bénéficier de l’augmentation de pouvoir d’achat dont vous entendez faire bénéficier tous les salariés, tandis que ceux qui auront bénéficié d’accords collectifs réduisant le plafond des jours travaillés à 210 ou 216, par exemple, ne pourront pas bénéficier, au-delà de ce plafond, de la rémunération des heures supplémentaires. L’amendement 465 vise donc à corriger cette discrimination, et l’amendement 238 à faire en sorte que les accords collectifs soient respectés. Puissiez-vous faire preuve sur ce point de la vertu que vous exigez des autres !

M. le Rapporteur général - La commission a rejeté ces amendements. L’ensemble des cadres au forfait jours bénéficieraient en effet d’un abattement de 3 % du revenu imposable, ce qui introduirait une discrimination majeure par rapport à ceux qui sont en régime horaire, puisque seuls ceux effectuant des heures supplémentaires bénéficieront d’une exonération.

Dès lors que les cadres travailleront plus de 218 jours et que pourra être négociée une monétisation des journées de RTT au-delà de ces 218 jours, les jours supplémentaires seront considérés comme bénéficiant de l’exonération. Le système est donc équilibré par rapport au régime « général », alors que votre amendement introduirait une injustice.

Mme la Ministre - Avis défavorable, pour les mêmes raisons.

M. Pierre-Christophe Baguet - C’est dans le même esprit que je défends l’amendement 204. Le problème ne concerne pas que les cadres – il y a des conventions collectives à 204, 210 ou 212 jours. Les salariés concernés devront donc travailler 218 jours avant de pouvoir bénéficier de la défiscalisation de leurs heures supplémentaires. Ce n’est pas avec de telles disparités qu’on encouragera à travailler davantage ! Les salariés qui sont en compte épargne temps se trouvent eux aussi exclus du bénéfice de la défiscalisation. Bref, on arrive à des disparités selon que des accord de branche ont été conclus ou non. Mme la ministre s’est engagée à y réfléchir. C’est important : notre industrie a besoin d’être soutenue.

Mme Martine Billard - Jusqu’où ira-t-on dans l’absurdité ? Je rappelle d’abord que le problème ne concerne pas que les cadres : beaucoup d’autres salariés sont en forfait jours, en forfait heures ou en forfait annuel. D’autre part, le forfait jours n’est pas nécessairement de 7 heures : c’est précisément parce qu’ils travaillent bien davantage que les cadres ou les salariés de l’informatique sont en forfait jours ! On nous explique maintenant qu’au-delà de 218 jours de travail, ils pourront, en monétisant les journées supplémentaires – notamment par l’intermédiaire du compte épargne temps – bénéficier d’une défiscalisation. Cela introduit de considérables inégalités entre salariés ! Ceux qui sont au forfait horaire pourront bénéficier de la défiscalisation de leurs heures supplémentaires tandis que ceux au forfait jour ne le pourront pas. Le risque est donc d’aggraver les inégalités au sein d’une même entreprise.

Je signale enfin qu’en France où n’existe pas, comme en Grande-Bretagne, l’opt-out, ces forfaits jour contreviennent à la réglementation sociale européenne, laquelle fixe une durée hebdomadaire du travail maximale de 48 heures. Or, dans le cadre de ces forfaits, les salariés travaillent souvent bien davantage par semaine.

M. Gaëtan Gorce - Le forfait jour permet d’abord de déroger à la durée maximale journalière du travail sur une semaine, la seule obligation qu’il comporte étant celle d’un repos minimal de 11 heures par jour. Un salarié au forfait jour peut travailler 13 heures par jour six jours sur sept pendant 218 jours !

Je comprends que vous soyez aujourd’hui embarrassé par le forfait jour que votre majorité avait souhaité en son temps étendre à d’autres catégories de salariés que les cadres. Il faudrait soit revenir sur l’application extensive que vous en avez permise, soit faire bénéficier les salariés qui y sont d’une rémunération forfaitaire de leurs heures supplémentaires. À défaut, vous risquez de les inciter à basculer sur un forfait horaire, de façon qu’un certain nombre de leurs heures travaillées, requalifiées en heures supplémentaires, puissent bénéficier des exonérations prévues. Vous ne leur auriez alors pas permis de « travailler plus pour gagner plus » mais simplement de s’organiser pour tirer le meilleur profit des exonérations fiscales et sociales.

Vous ne m’avez pas répondu, Monsieur le Rapporteur général, sur la question des accords collectifs qui fixent un plafond de jours travaillés inférieur au plafond légal, ce qui implique que les jours de travail effectués au-delà sont rémunérés en heures supplémentaires. Si cette rémunération ne peut bénéficier des exonérations, il y aura bel et bien discrimination. Je doute que le Conseil constitutionnel, saisi de la question, n’y trouve rien à redire.

M. Alain Vidalies - On voit bien là toute la fragilité du dispositif. Vous excluez le forfait jour, évacuant d’ailleurs la question, Monsieur le Rapporteur général, en faisant comme si la situation était la même qu’avec le plafond légal de 1 607 heures par an, alors que ce forfait, qui autorise à travailler 13 heures par jour, peut aboutir à un horaire annuel de 2 400 heures. Dans ces conditions, chacun aura intérêt à passer du forfait jour au forfait horaire, ce qui ne sera pas difficile, le code du travail actuel donnant la possibilité d’obtenir un forfait annualisé en heures. Pour éviter cet effet d’aubaine, il faut prendre en compte, comme le proposent nos amendements et d’autres, la situation de l’ensemble des salariés.

Mme la Ministre - Les forfaits jour comme les forfaits annuels ou les accords de modulation résultent soit de contrats de travail, soit de conventions collectives, soit d’accords d’entreprise. Il appartient aux partenaires sociaux de les renégocier si besoin, et si d’aventure certains de ces textes n’étaient pas conformes aux dispositions légales sur la durée maximale journalière ou annuelle du travail, de les contester devant les juridictions compétentes. Pour maintenir un principe d’égalité, la loi ne peut entrer dans le détail de la multiplicité des conventions collectives, des accords de branche et des accords d’entreprise. C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à ces trois amendements.

L'amendement 465, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que les amendements 204 et 238.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - L’amendement 7, comme le sous-amendement 473 que nous venons d’adopter, vise à garantir au plus grand nombre de salariés le bénéfice des exonérations sociales et fiscales. Le projet de loi a pris en compte la situation dans laquelle des cadres renoncent à des jours de repos en contrepartie d’une majoration salariale, mais la loi du 13 mars 2005 a aussi prévu que les salariés des entreprises de vingt salariés au plus puissent, en l’absence d’accord collectif, renoncer aux journées ou demi-journées de repos accordées au titre de la réduction du temps de travail ou dans le cadre d’un forfait jour annuel pour les cadres, dans la limite de dix jours par an. Cet amendement permettra que l’ensemble des sommes versées à ce titre bénéficie des exonérations prévues.

M. le Rapporteur général - Avis favorable.

Mme la Ministre - Avis favorable. Je lève le gage.

L'amendement 7, mis aux voix, est adopté.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - L’amendement 8 vise à garantir le bénéfice des exonérations fiscales et sociales prévues aux salariés disposant d’un forfait établi sur une base mensuelle.

M. le Rapporteur général - La commission n’a pas examiné cet amendement, mais je n’y suis pas, à titre personnel, favorable. En effet, en l’état actuel du texte, ces salariés bénéficieront bien des exonérations prévues, leurs heures supplémentaires étant décomptées selon la règle de droit commun.

Mme la Ministre – Je partage ce point de vue. J’invite donc M. Tian à retirer cet amendement qui est satisfait.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis - Au vu des précisions apportées, je le retire.

L'amendement 8 est retiré.

M. Pierre-Christophe Baguet - L’amendement 205 vise les salaires versés aux salariés à temps plein pour les heures complémentaires comprises entre l’horaire collectif de référence applicable et l’horaire légal. En effet, tous les salariés qui travaillent par exemple à temps plein 34 heures par semaine, soit 1 582 heures par an, seraient exclus du bénéfice des nouvelles dispositions, car travaillant moins de 1 607 heures par an. Il faut corriger cet oubli ou en tout cas trouver, d’ici à l’examen du texte au Sénat, une solution adaptée, n’exigeant pas de revoir tous les accords de branche et d’entreprise concernés.

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis - L’amendement 340 que je défends à titre personnel reprend le premier point de l’amendement 205. Je souhaiterais avoir l’assurance que les heures complémentaires gérées annuellement seront traitées de la même façon que celles gérées de mensuellement ou hebdomadairement.

M. le Rapporteur général - L’amendement 340 peut être accepté car il s’appuie sur la définition des heures complémentaires donnée par le code du travail. Ce n’est pas le cas du 205 dont la deuxième partie assimilerait à des heures supplémentaires des heures complémentaires effectuées en dessous de la durée légale. Telle n’est pas la philosophie de cet article premier qui ne traite en heures supplémentaires que les heures au-delà de la 35ème.

Mme la Ministre - Le Gouvernement pense de même. Je vous suggère donc, Monsieur Baguet, de retirer votre amendement et de vous rallier au 340.

M. Pierre-Christophe Baguet - J’en suis d’accord.

L’amendement 205 est retiré.

M. Alain Vidalies - Le slogan « travailler plus pour gagner plus » a suscité l’intérêt des salariés qui travaillent à temps partiel, en particulier dans le cas où le temps partiel est subi : ils ont cru être encouragés à travailler davantage – ce qui aurait correspondu aux besoins dont ils font l’expérience, surtout dans le cas de personnes seules, pour lesquelles les factures, elles, ne sont pas à temps partiel ! Or ces salariés ne sont pas concernés par le texte et par les abattements et exonérations qu’il propose. Vous voilà ainsi amenés à exclure de votre dispositif les salariés à temps partiel, accentuant ainsi la flexibilité, qui constitue l’une des limites de notre code du travail. Je songe en particulier aux travailleurs à temps partiel annualisés, dans certaines activités saisonnières. Il n’est pas certain qu’ils aient compris que votre slogan ne les concernait pas !

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis - M. Vidalies, je ne suis pas un brillant économiste, je ne suis qu’un chef d’entreprise. M. Emmanuelli demandait tout à l’heure à M. le Rapporteur général pourquoi nous n’avions pas supprimé les 35 heures – c’est dommage qu’il soit parti…

M. Henri Emmanuelli - Non, je suis là !

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis - Tant mieux : je vais donc pouvoir tenter de vous répondre. Tout d’abord, il est possible de tirer avantage même d’une mauvaise situation. En l’occurrence, ce qui a profité aux entreprises…

M. Michel Bouvard - C’est l’argent de l’État !

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis - …c’est que la modulation leur a permis de supprimer des heures supplémentaires, ce qui a paupérisé de nombreux salariés qui ne travaillent pas, M. Vidalies, à temps partiel, mais bien à temps plein : je veux notamment parler des travailleurs saisonniers, qui travaillent 169 heures par mois – 157 heures depuis l’instauration des 35 heures. Nous ne pouvions remettre celle-ci entièrement en cause après les très longues négociations dont elle avait fait l’objet ! Mais, sans les 35 heures, l’article premier du projet ne serait pas aussi complexe : nous chercherions simplement à alléger le coût des heures supplémentaires. Il eût également fallu revenir sur les aides versées aux entreprises. En somme, votre système était presque irréversible. Il s’agit désormais de faire en sorte que, comme l’a dit le Président de la République, les 35 heures soient non pas un maximum, mais un minimum.

Le recours aux heures supplémentaires dépend non pas des employeurs, mais de la demande émanant des clients. Quant aux salariés, ils aiment l’entreprise où ils travaillent : lorsque la demande l’exige, ils sont désireux de faire des heures supplémentaires. Or ces heures sont aujourd’hui trop chères : c’est pourquoi nous souhaitons en diminuer le coût. En réalité, le recours aux heures supplémentaires, loin d’être permanent, varie en fonction des périodes et dépend de la logique de développement de l’entreprise : selon la demande, l’entreprise recourt aux heures supplémentaires, puis se développant et trouvant de nouveaux marchés, crée des emplois ; lorsque la demande s’accroît encore, on recourt de nouveau aux heures supplémentaires.

M. Henri Emmanuelli - Monsieur le Rapporteur général, je le répète : si les 35 heures sont la source de tous nos malheurs économiques – déficit public, perte de productivité, entre autres -, supprimez-les, puisque vous avez la majorité !

M. Michel Bouvard - Mais vous aviez signé des conventions avec les entreprises !

M. Henri Emmanuelli - En réalité, les 35 heures sont pour vous commodes, car elles vous permettent de dissimuler l’échec de votre politique macroéconomique. J’ai mentionné tout à l’heure les statistiques de l’OCDE. Notre pays a connu des périodes durant lesquelles la conjoncture était favorable à la création d’emplois : entre 1997 et 2002 – fin 2001, pour être tout à fait exact –, près de 2 millions d’emplois ont été créés, contre moins de 300 000 au cours de la législature suivante.

M. Michel Bouvard - Il s’agissait d’emplois publics !

M. Henri Emmanuelli - Non, il s’agissait de 1,8 million d’emplois privés et de 200 000 emplois publics – les emplois-jeunes. Vous êtes chef d’entreprise ; je connais moi aussi l’entreprise : j’ai travaillé quinze ans au sein d’une banque privée et y ai rencontré de nombreux chefs d’entreprise. Vous avez raison de dire que ce sont les clients qui décident et qui prescrivent des heures supplémentaires. Mais permettez-moi de citer l’exemple, dans ma circonscription, du dirigeant d’une entreprise de 900 salariés appartenant à un secteur d’activité fragilisé – celui du meuble : ce chef d’entreprise a tout intérêt à recourir aux heures supplémentaires en lieu et place de certains contrats à durée indéterminée. De tels secteurs, caractérisés par le travail à la chaîne et la production en grande série, y trouvent avantage ; ce type de cas ne manquera pas de se présenter.

Si, comme vous l’affirmez, les 35 heures étaient à l’origine de la stagnation du pouvoir d’achat, l’année 2006 n’aurait pas connu des records en termes de bénéfices ! Vous savez d’autre part qu’il existe un contingent d’heures supplémentaires dont la moitié n’est pas même utilisée.

Un député UMP - Parce que cela coûte trop cher !

M. Henri Emmanuelli - Non, car le coût dépend des produits et des secteurs. Dans certains secteurs - vous le savez -, la main d’œuvre ne représente plus que 10 ou 15 % du prix.

Madame la Ministre, à la question portant sur l’existence d’études d’impact, vous avez répondu que l’effet de ces dispositions n’était pas mesurable. Nous savons pourtant que des études réalisées en 2004 à la demande de M. Sarkozy, alors ministre de l’économie et des finances, et qui proposait des mesures semblables, ont conclu à leur absence de pertinence. Certes, 2004 n’est pas 2007, mais les raisons profondes de cette conclusion restent inchangées. Le succès de telles mesures dépend de la conjoncture ainsi que des moyens utilisés pour stimuler la croissance ; or les dispositions que vous proposez stimuleront non la croissance, mais le taux d’épargne, dans un pays où son niveau par rapport au PIB bat déjà des records. Vous ne pouvez pas prétendre à la tribune que l’on a fait fuir l’argent et les riches, alors que notre taux d’épargne est le plus élevé d’Europe ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen)

M. le Président - Madame la Ministre, retirez-vous le gage de l’amendement 340 ?

Mme la Ministre - Oui.

L’amendement 340, mis aux voix, est adopté.

La séance, suspendue à 18 heures 55, est reprise à 19 heures 05.

M. Michel Liebgott - Les salariés des particuliers employeurs travaillent, dans leur immense majorité, à temps partiel et, de ce fait, les heures supplémentaires qu’ils effectuent sont souvent des heures complémentaires. Par l’amendement 239, nous voulons préciser que malgré cette spécificité la compensation prévue dans cet article leur sera due.

M. le Rapporteur général - La notion d’heures complémentaires ne s’applique pas aux emplois à domicile à temps partiel en raison de l’amplitude horaire exceptionnelle qui les caractérise. L’amendement est donc sans objet. En revanche, les heures supplémentaires seront compensées comme le prévoit le dispositif.

Mme la Ministre - Même avis. Je précise que la règle rappelée par votre rapporteur général découle d’un arrêt rendu en 2000 par la Cour de cassation.

Mme Martine Billard - Des précisions que vous avez apportées, il résulte que les salariés à domicile embauchés directement et dépendant de ce fait de la convention nationale des particuliers employeurs n’auront pas droit aux compensations auxquelles pourront prétendre les salariés embauchés par des intermédiaires – associations spécialisées ou sociétés commerciales – auxquels le droit commun s’applique. Une fois de plus, on crée des différences entre les salariés. D’autre part, les nouvelles dispositions imposeront la modification des logiciels de paye. Comme cela représentera une charge importante – dont personne ne parle – pour les petites entreprises, on peut craindre qu’elles ne traînent les pieds, ce qui suscitera des retards et de nouvelles inégalités entre les salariés.

M. Michel Liebgott - J’ajoute que les particuliers employeurs signent les deux tiers des contrats d’emplois à domicile, secteur dans lequel la durée conventionnelle du travail est de 40 heures. Voilà donc une nouvelle catégorie de salariés exclue d’un dispositif censé faire travailler plus pour gagner plus et dont ne bénéficieront, pour la plupart, que les salariés déjà assurés d’un emploi pérenne dans des secteurs en croissance, et peu les salariés à temps partiel. C’est l’une des insuffisances de ce dispositif.

L'amendement 239, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 35 précise le texte.

M. Henri Emmanuelli - Il en a besoin !

L'amendement 35, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Marc Le Fur – Je suis un fervent partisan de cet article premier qui était attendu, particulièrement du monde ouvrier. Nous devons donc tout faire pour que le plus grand nombre possible de salariés puissent en bénéficier et, pour cela, régler les situations singulières. Par l’amendement 224, je souhaite donc préciser explicitement que les tâcherons, ces salariés qui travaillent au rendement ne seront pas oubliés. D’autant que ce sont des adeptes du « travailler plus pour gagner plus » : encore faut-il qu’ils puissent bénéficier complètement des heures supplémentaires. Mon amendement 224 est donc un amendement d’appel. Je souhaite que vous puissiez lever les incertitudes qui les concernent ou que, dans les jours suivant l’adoption de la loi, des dispositions réglementaires règlent le problème.

M. Charles de Courson - L’amendement 264 est identique. La commission a jugé sage d’attendre les réponses de la ministre sur ce point, car les situations varient beaucoup. Par exemple, les désosseurs dans les abattoirs doivent traiter un certain nombre de porcs en 7 heures, les unités traitées en plus leur comptant un certain nombre d’heures supplémentaires.

M. Roland Muzeau – Comme pour le poulet.

M. Charles de Courson - Les ouvriers forestiers sont payés au stère de bois, les ouvriers qui palissent les vignes sont payés à la tâche. Ils gagnent souvent entre le SMIC et 10 % à 15 % au-dessus. Le texte s’applique-t-il à eux et comment transforme-t-on des stères de bois ou des superficies de palissage en heures supplémentaires ?

M. le Rapporteur général – La commission a repoussé ces amendements car il est prévu au 9ème alinéa de l’article premier que, pour les salariés dont le cas n’entre pas dans le droit commun, les modalités de décompte des heures supplémentaires seront fixées par décret. La ministre nous en dira certainement le contenu.

Mme la Ministre - Je rends d’abord hommage aux salariés dont vous parlez, car ceux qui travaillent à la tâche ont souvent envie de travailler, envie de maximiser leur rémunération (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, radical et citoyen et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine) et, quelle que soit leur rémunération, sont valeureux. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Henri Emmanuelli - Ce sont les plus mal traités !

Mme la Ministre - Les travailleurs rémunérés à la tâche ou à la pièce sont dans le champ d’application de la présente loi, soient qu’ils entrent dans le champ de la loi de mensualisation du 19 janvier 1978, auquel cas les heures supplémentaires sont payées dans leur intégralité selon les modalités prévues par l’article L. 212-5 du code du travail, soit parce qu’en qualité de travailleurs à domicile effectuant le cas échéant du télétravail, ils bénéficient des dispositions du projet en application de l’alinéa 6-1 de l’article premier, les heures supplémentaires s’appréciant alors pour toute activité prolongée au-delà de huit jours. L’amendement 224 est donc satisfait et j’en suggère le retrait.

M. de Courson demande comment ramener des stères de bois ou du palissage à des équivalents heures. Les salariés forestiers sont inclus dans le champ couvert par la loi en fonction du 1° de l’article L. 713-1.

M. Charles de Courson - Mais comment procède-t-on ?

Mme la Ministre - Il appartiendra aux groupements d’employeurs et aux organisations représentatives de ces salariés de parvenir à un accord sur les modes de conversion.

Mme Marylise Lebranchu - Ce ne sont pas des salariés !

Mme la Ministre - Ce sont des salariés même s’ils sont rémunérés à la tâche et pas par un salaire mensuel. La définition du salariat résulte du lien de subordination, pas du mode de rémunération.

À défaut d’accord collectif, les équivalents horaires seront définis par décret.

Mme Marylise Lebranchu - Je suis très étonnée. Depuis des années, des organisations patronales comme la CAPEB ou l’UPA luttent avec acharnement pour qu’on ne confonde plus un salarié et un tâcheron, en particulier pour des raisons de concurrence. Un certain nombre de personnes se retrouvent, disons de façon non volontaire, à faire du tâcheronnage, car les prendre comme salariés poserait des problèmes de charges et de gestion. En 1998, les petits entrepreneurs ont demandé qu’on cesse une fois pour toutes de faire cette confusion. On ne peut donc pas dire ici des choses qui sont inexactes en droit du travail. Le tâcheron met à disposition sa force de travail et souvent du matériel. On considère donc qu’il ne s’inscrit pas dans un lien de subordination. Ce sont des ouvriers, mais pas des salariés et je vois pas comment on pourrait parler d’heures supplémentaires pour le tâcheronnage. En Bretagne, Monsieur Le Fur doit le savoir, les professionnels se sont réunis à diverses reprises pour essayer de mettre fin à un certain nombre de pratiques, par exemple concernant le ramassage des poulets la nuit.

M. Marc Le Fur - Ce sont des salariés.

Mme Marylise Lebranchu - Pour 65 heures de présence effective, on leur faisait une feuille de salaire à 30 heures. Et en ce qui concerne les chaînes d’abattage, je peux vous assurer que les employées que je connais, ne peuvent pas, physiquement, faire un quart d’heure de plus par jour. Et ces femmes qui ont commencé au SMIC finiront leur carrière au SMIC plus 10 % après 27 ans de travail. Il y a des choses qu’on ne peut pas dire, par respect du droit. D‘ailleurs si l’on disait que les tâcherons d’un abattoir sont des salariés, l’employeur serait condamné.

Mme la Ministre - Le salarié se définit par trois critères, le lien de subordination, la dépendance économique et l’insertion dans une organisation du travail, non en vertu de tel ou tel mode de rémunération. On peut remplir ces trois critères en étant payé à la pièce.

Mme Marylise Lebranchu - Alors ne parlez pas de tâcheron.

Mme la Ministre - Mais si. Selon la chambre sociale de la cour de cassation, ce sont les trois critères que j’ai énumérés qui définissent le salarié. L’appellation de tâcheron n’est pas une définition juridique.

M. Marc Le Fur - Il existe des prestataires qui sont indépendants, même s’ils sont dans une dépendance de fait. Mais la question que je soulève ici, ce sont les salariés payés à la tâche. Dans les abattoirs, ce sont des centaines de personnes. Ils sont payés à l’unité de porc découpé et définissent leur rythme de travail dans l’atelier de découpage – c’est un cas différent de la chaîne pour les volailles. La ministre a indiqué clairement que ces salariés payés à la tâche bénéficieront des heures supplémentaires dans l’essentiel des cas. J’en prends acte et je retire l’amendement 224.

M. Charles de Courson - Les formes d’organisation dont parle Mme Lebranchu existent et le code rural en traite. Mais le problème ici est autre. Il s’agit de maintenir l’égalité entre tous les salariés dans l’application du texte. Le décret fixera des équivalences. J’en prends acte, mais ce sera complexe. L’amendement 264 est retiré.

Les amendements 224 et 264 sont retirés.

M. Charles de Courson - L’amendement 257 est le premier d’une série d’amendements concernant les « parasubordonnés », qui sont des indépendants au sens du droit du travail et des salariés en droit social. L’amendement 257 concerne les vendeurs à domicile, c’est-à-dire quand même 200 000 personnes. Le problème de leur traitement fiscal a été réglé il y a quelques mois. Mais sont-ils concernés par ce texte, et si oui comment ?

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé les amendements 257 à 263, mais ce sont des amendements d’appel destinés à permettre au Gouvernement de préciser les règles applicables au cas par cas. Certaines de ces professions concernent des salariés, et l’article premier du texte trouvera naturellement à s’appliquer, avec, parfois, quelques difficultés pour décompter les heures ; d’autres concernent des non salariés – tels les avocats dirigeants ou les mandataires sociaux –, qui ne sont à l’évidence pas visés par le texte ; d’autres enfin – notamment les VRP – ont des statuts plus fluctuants, qui peuvent poser certaines difficultés d’interprétation, eu égard au lien de subordination effectif qui les lie à leur employeur.

Mme la Ministre - S’agissant de l’amendement 257, dans la mesure où les vendeurs à domicile ne sont pas des salariés et où ils sont maîtres de l’organisation de leur temps de travail, il est patent qu’ils ne sont pas concernés par l’article premier du texte.

L’amendement 257 est retiré.

M. Jean-Pierre Soisson - Permettez à l’ancien ministre du travail que je suis de faire observer que nous ne travaillons pas bien en donnant des indications qui pourraient être mal interprétées par les rédacteurs des futurs décrets : ces problèmes devront être tranchés par la voie réglementaire. Ne traitons pas dans l’urgence des situations incertaines.

Mme Martine Billard - Cette discussion met en évidence la fragilité et les limites de ces dispositions. On voit bien que certaines catégories de salariés n’ont pas été prises en compte, et l’on risque, à terme, de construire une usine à gaz dans laquelle plus personne ne se retrouvera. Quid, en outre, des personnes qui deviennent salariées du fait de la requalification de leur contrat de travail ? Le cas est relativement fréquent dans l’hôtellerie, pour les gérants présumés indépendants qui travaillent en réalité pour une chaîne hôtelière. Comment se fera le décompte des heures dans ces situations souvent inextricables ? Il y a là un risque contentieux non négligeable.

M. Yves Censi - Enfin, c’est comme ça : tout le monde n’a pas le même statut !

M. Charles de Courson - J’ai bien entendu les arguments du rapporteur général et de Mme la ministre. Je défendrai donc rapidement les amendements suivants : le 258 pose le problème des travailleurs à domicile.

Mme la Ministre - En tant que salariés, ils sont concernés par le dispositif.

L'amendement 258 est retiré.

M. Charles de Courson - L’amendement 259 concerne la catégorie importante des VRP.

Mme la Ministre - Leur qualité de salariés les fait entrer dans le champ de l’article.

L'amendement 259 est retiré.

M. Charles de Courson - L’amendement 260 a trait aux gérants minoritaires.

Mme la Ministre - Non salariés, ils ne sont pas visés – sauf s’ils cumulent leur activité avec un contrat de travail de droit commun.

L'amendement 260 est retiré.

M. Charles de Courson - L’amendement 261 concerne les artistes du spectacle et les mannequins.

Mme la Ministre - Salariés, ils sont visés par le dispositif.

L'amendement 261 est retiré.

M. Charles de Courson - L’amendement 262 vise les journalistes professionnels.

Mme la Ministre - Ce sont des salariés : ils sont visés par le texte.

L'amendement 262 est retiré.

M. Charles de Courson - L’amendement 263 concerne les avocats salariés.

Mme la Ministre - Dans la mesure où ils ont ce statut, ils entrent dans le champ du dispositif.

L'amendement 263 est retiré.

M. Pierre Morange - Par l’amendement 448, je propose de faire bénéficier du nouveau régime d’exonération fiscale les éléments de rémunération versés aux salariés au titre de l’ensemble du temps supplémentaire travaillé du fait de l’utilisation de leur compte épargne-temps – CET. Créés par une loi de 1994, ces comptes ont été constamment actualisés et j’ai déposé, sous la législature précédente, une proposition de loi visant à simplifier ce dispositif intéressant. Il me semble judicieux d’exonérer aussi les bénéficiaires de ces comptes.

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé cet amendement, parce qu’il ne comprend aucun encadrement par rapport aux durées légales et parce que la structure même des CET ne permet pas de distinguer le stock d’heures supplémentaires.

Mme la Ministre - Même avis pour les mêmes raisons. Les CET peuvent être alimentés par d’autres heures que les heures supplémentaires.

L'amendement 448, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Charles de Courson - L’amendement 254 traite d’un point extrêmement important dont nous avons longuement débattu en commission. Dans un souci de simplification des formalités d’établissement de la fiche de paie, il vise à ce que l’exonération d’IR puisse également porter sur la majoration conventionnelle résultant d’un accord d’entreprise ou d’établissement, dès lors que son taux est supérieur au taux légal. Il est donc proposé de retenir le taux effectif de majoration des heures supplémentaires. Il nous a été objecté que le Gouvernement avait retenu le dispositif compliqué qui nous est soumis pour prévenir d’éventuelles fraudes, certains employeurs pouvant être tentés de sur-rémunérer les heures supplémentaires ayant vocation à être défiscalisées, en contrepartie par exemple d’une période de modération salariale. Cela justifie-t-il de complexifier encore la vie des PME et de rendre très difficile le contrôle par les inspecteurs des impôts de la base exonérée ? D’où notre proposition de retenir le taux effectif.

M. le Rapporteur général - La commission, après en avoir longuement discuté, a rejeté l’amendement. Si une entreprise a décidé de majorer l’heure supplémentaire de 100 % en l’absence d’un accord de branche, votre amendement lui permettra de prendre une base majorée de 100 %. Cela provoquera inévitablement une substitution d’heures supplémentaires artificiellement majorées aux rémunérations normales. Il s’agit moins de fraude que d’un comportement d’optimisation, mais nous souhaitons l’éviter. La complexité proviendra en effet de la nécessité de plafonner l’exonération au montant légal, lequel sera différent de celui de l’entreprise.

Mme la Ministre - Même avis. M. Novelli a consulté les experts comptables. Ceux-ci l’ont assuré qu’ils étaient en mesure de mettre en œuvre ce dispositif, malgré cette complexité destinée à lutter contre les comportements d’optimisation.

M. Charles de Courson - Une telle disposition ajoutera immanquablement une ligne de plus aux feuilles de paye, qui sont passées de 5 lignes à 27 ou 32 lignes, selon les branches, en cinquante ans ! En outre, le contrôle des inspecteurs des impôts sera très complexe, puisqu’il leur faudra se rapporter au contrat de travail et à la convention collective. Enfin, je ne crois pas qu’une entreprise puisse majorer de 100 % une heure supplémentaire ! Si des personnes abusent, trouvons un mode de sanction. Mais n’empoisonnons pas la vie de centaines d’entreprises pour autant. Je maintiens cet amendement (Applaudissements sur bancs du groupe Nouveau centre).

M. Jean-Pierre Soisson - M. de Courson a raison. Gardons-nous d’aller vers une trop grande complexification, lorsque le mouvement est plutôt de simplifier les feuilles de paye. À vouloir tout régler par un texte, on risque de créer des différends judiciaires.

L'amendement 254, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur général – L’amendement 36 est rédactionnel.

L'amendement 36, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général– L’amendement 37 comble un oubli du projet. Le plafonnement à 25 % de la majoration salariale prise en compte pour l’exonération doit s’appliquer également aux heures complémentaires réalisées dans la limite du dixième de la durée contractuelle de travail.

Mme la Ministre - Avis favorable.

L'amendement 37, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général – L’amendement 38 comble également un oubli. Il s’agit d’introduire un plafonnement de la majoration salariale prise en compte pour les heures assimilées aux heures supplémentaires réalisées par les salariés dans le cadre d’un forfait en heures sur une base annuelle.

Mme la Ministre - Avis favorable.

M. Alain Vidalies - Vous soutenez la règle selon laquelle la loi doit être appliquée à l’ensemble des salariés. Nous vous avons demandé plusieurs fois de prendre en compte la situation des salariés qui disposent d’une convention annualisée horaire. Or cet amendement a pour objectif de limiter le montant de la majoration dont ils pourraient bénéficier.

M. le Rapporteur général – Je n’ai pas été suffisamment clair. Il ne s’agit pas de plafonner le montant de la rémunération supplémentaire, mais de plafonner le montant retenu au titre de l’exonération : une entreprise pourra payer 140 %, mais l’exonération ne jouera qu’à hauteur de 125 %.

L'amendement 38, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - Les amendements 39, 40 et 41 sont rédactionnels.

Les amendements 39, 40 et 41, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance qui aura lieu, ce soir, à 21 heures 30.

La séance est levée à 19 heures 55.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

www.assemblee-nationale.fr

© Assemblée nationale