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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du vendredi 13 juillet 2007

2ème séance
Séance de 15 heures
12ème séance de la session
Présidence de M. Marc Le Fur

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La séance est ouverte à quinze heures.

TRAVAIL, EMPLOI, POUVOIR D’ACHAT (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat.

M. le Président - Ce matin, le vote sur l’amendement 307 rectifié a été reporté en application de l’article 61, alinéa 3, du Règlement. Par ailleurs, les amendements 306 et 413 rectifiés, en discussion commune avec le précédent, ont fait l’objet d’un large débat.

Les amendements 307 rectifié, 306 rectifié et 413, 2ème rectification, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean Launay - On ne saurait parler de moralisation des pratiques en matière de stock-options si l’on permettait aux bénéficiaires de ces plans, en outre, d’inclure dans le calcul du bouclier fiscal l’imposition due à ce titre. Notre amendement 320 rectifié a donc pour objet de l’exclure.

M. Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances - Avis défavorable car non seulement la fiscalité des stock-options n’a pas été modifiée depuis la loi « nouvelles régulations économiques » de 2001, mais leur prise en compte dans le calcul du bouclier se fait au détriment du contribuable, puisque les plus-values de cession figurent au dénominateur – ce qui réduit les chances de bénéficier du bouclier.

Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, des finances et de l’emploi - Même avis. Notre souci de moralisation va se traduire dans des dispositions ultérieures du projet.

L'amendement 320 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Gérard Bapt - Notre amendement 305 devrait recueillir une large approbation puisqu’il prolonge la discussion que nous avons eue ce matin sur l’imposition minimale. Nous proposons que l’application du bouclier fiscal ne puisse réduire l’imposition au titre de l’ISF en dessous d’un minimum fixé pour chaque tranche de patrimoine. Il ne s’agit en aucun cas de relever la cotisation due à ce titre, mais d’éviter que celle-ci puisse être purement et simplement annulée. Les minima que nous proposons sont très raisonnables – 1 230 euros pour les contribuables dont le patrimoine est compris entre 732 000 et 1 180 000 euros, 4 346 euros pour la tranche suivante.

M. le Rapporteur général - Rejet car nous allons traiter dans quelques instants de la question plus générale de l’impôt minimal.

Mme la Ministre - Même avis.

L'amendement 305, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 5 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 5

M. Didier Migaud, président de la commission des finances - Mes amendements 158, 159 et 157 rectifiés, comme l’amendement 273 du président Méhaignerie, abordent le thème de l’impôt minimum, qui a déjà été développé tant par notre collègue de Courson qu’à l’occasion d’amendements du groupe socialiste. Est-ce à dire qu’un consensus se forme sur tous les bancs à ce sujet ? J’aimerais le croire… Il convient en effet de respecter l’esprit de l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, selon lequel la contribution des citoyens doit être également répartie entre eux à raison de leurs facultés : c’est l’idée de justice fiscale.

Je regrette avec d’autres que le Gouvernement nous propose de renforcer le bouclier fiscal sans avoir préalablement évalué l’impact du bouclier à 60 %, et avec eux je voudrais éviter que ne s’émousse le glaive de la justice fiscale, d’autant que, diverses études récentes le montrent, les inégalités de revenus et de patrimoine ont tendance à s’aggraver.

Plusieurs solutions techniques sont possibles. Soit, comme le dit l’amendement 158, limiter l’effet des niches fiscales en pourcentage du revenu du contribuable car le plafonnement en pourcentage de l’impôt dû, défendu par nos collègues du Nouveau centre, a l’inconvénient de créer des effets de seuil. Soit, comme je le propose par les amendements 159 et 157, reprendre l’idée que j’ai défendue dans un récent rapport d’information, et qui s’inspire de l’impôt minimum alternatif existant aux États-Unis. Il s’agit d’appliquer à une assiette de revenus déjà existante dans le CGI un barème alternatif, empêchant les contribuables de trop réduire leur impôt – alors qu’il est même possible aujourd’hui, on le sait, de l’annuler complètement.

Ces deux pistes sont opérationnelles. Sans doute peuvent-elles être davantage étudiées, mais je vous invite à dépasser le stade des rapports. Je peux néanmoins adhérer à l’amendement 273 de M. Méhaignerie, qui demande un rapport au Gouvernement pour le 15 octobre, afin que nous puissions débattre de cette question lors du prochain débat.

Un impôt minimal serait certes plus facile à instaurer qu’un plafonnement des niches, mais nous sommes prêts à examiner toutes les options. Nous demandons seulement que la commission des finances puisse travailler sur ce sujet ! M. Copé, alors ministre du budget, avait botté en touche au cours de la précédente législature sans pour autant rejeter nos propositions. Il avait annoncé la constitution d’un groupe de travail, qui s’est effectivement réuni, mais sans aboutir à un résultat concret.

Il est sans doute nécessaire de continuer à réfléchir, Madame la ministre, mais de grâce, ne reportons pas à l’infini notre décision ! J’aimerais que vous preniez l’engagement de nous présenter un rapport analysant les exemples étrangers, notamment le système fiscal américain que vous connaissez bien, afin que nous puissions adopter une réforme à l’occasion du budget pour 2008.

Voilà le sens de ces trois amendements. Puissions-nous faire un nouveau pas, cet après-midi, vers l’instauration d’une cotisation minimale !

M. Jean-Louis Idiart - Les amendements 275 et 276 rectifiés tendent à plafonner les exonérations consenties sur l’impôt sur le revenu. Comme le soulignait Didier Migaud dans son rapport, cet impôt est aujourd’hui miné par des distorsions entre les différentes catégories de contribuables et par la prolifération des niches fiscales. Cela fait des années que nous dénonçons cette situation…

Pour les deux tranches supérieures de l’IR, les taux marginaux s’élèvent en effet à 27 % ou 36 % sur les salaires, compte tenu de déduction forfaitaire de 10 %, à 16 % sur les intérêts soumis à prélèvement forfaitaire libératoire, et à 25,4 % ou 33,9 % sur les revenus fonciers.

Nous avons déjà débattu de tous ces sujets au cours de la précédente législature, mais sans aboutir. J’espère que nos amendements permettront enfin d’avancer.

M. le Rapporteur général - La commission des finances a rejeté les amendements déposés par son président, même si je suis d’accord avec lui sur le fond. Lorsque nous avons instauré, voici deux ans, le bouclier fiscal, nous avions également prévu un plafonnement des niches. Je pense que Jean-François Copé s’en souvient…

M. Jean-François Copé - Oui, j’ai même l’impression de revivre en direct nos débats ! (Sourires)

M. le Rapporteur général - Nous nous inspirions en effet de deux principes : si l’impôt ne doit pas être confiscatoire, nul ne doit être pour autant exonéré d’impôt s’il dispose de revenus suffisants. Voilà pourquoi nous avions élaboré non seulement un plafond fiscal, mais aussi un plancher.

Malgré un certain consensus en séance, nous avions quelques doutes, Pierre Méhaignerie et moi-même, sur le dispositif de plafonnement des niches qui était proposé, car il nous semblait exagérément complexe après qu’on en eut excepté successivement l’avantage « Malraux », l’outre-mer, les investissements dans les PME, et j’en passe.

Nous inspirant du système américain d’impôt minimal, nous avions bien proposé un système plus simple, mais nous avons dû renoncer à la demande du ministre du budget. Saisi par l’opposition, le Conseil constitutionnel a finalement validé le bouclier fiscal, mais censuré le plafonnement des niches, le considérant comme « inintelligible et imprévisible pour le contribuable ». Compte tenu de cette décision, je doute que nous puissions revenir à un plafonnement niche par niche…

Le groupe de travail réuni par Jean-François Copé a ensuite travaillé contrairement à ce que j’ai pu entendre : on n’a pas botté en touche ! Nous devons aujourd’hui avancer en suivant la voie la moins périlleuse, celle de l’impôt minimal. Voilà pourquoi je souhaiterais, Madame la ministre, qu’un rapport nous soit présenté en vue d’aboutir en loi de finances pour 2008.

Mme la Ministre - Je retiens de ce superbe duo entre MM. Migaud et Carrez que le Gouvernement vous a donné à rêver (Sourires)

M. Jean-François Copé - Mais ils n’ont pas voulu aller jusqu’au bout !

Mme la Ministre - Comment faut-il donc donner corps à ce rêve ? Voulons-nous d’un corps à une patte, à deux pattes ou à mille pattes ? (Sourires) Nous devrons examiner avec la plus grande attention toutes les pistes qui s’ouvrent à nous. Je rends d’ailleurs hommage au travail déjà effectué par la commission. Nous allons nous approprier cet héritage, dans un souci de justice fiscale, et vous présenter différents scenarii d’ici au 15 octobre.

En attendant, je demande le rejet de tous les amendements qui tendent à instaurer sans attendre un impôt minimal ou différents plafonnements.

M. Louis Giscard d'Estaing - Ces amendements ont le mérite d’aborder le sujet de l’impôt minimal, mais ils n’apportent pas la réponse que nous souhaitons. Nous aurions dû nous inspirer de l’amendement déposé par M. Méhaignerie, qui rappelle ce principe fondamental, issu du droit fiscal américain : nul contribuable ne peut s’exonérer complètement de l’impôt s’il dispose d’un revenu élevé.

S’apercevant que 155 contribuables n’avaient pas payé d’impôt fédéral sur le revenu au titre de l’année 1966, alors que leurs revenus étaient supérieurs à 200 000 dollars, le Congrès a en effet instauré un impôt minimal dès 1969. Je vous propose de rejeter les amendements qui nous sont aujourd’hui proposés afin d’examiner une solution comparable.

M. Gérard Bapt - Heureusement que M. Giscard d’Estaing est là pour troubler notre faux consensus. (Sourires) Comme j’ai déjà eu l’occasion de le faire remarquer, on renvoie toujours à demain l’idée d’une cotisation minimale. M. Copé n’étant plus ministre, il ne pourra pas honorer ses engagements. Or, entre 2002 et 2007, cent niches fiscales nouvelles ont vu le jour et le présent projet en crée encore huit nouvelles ! Il est regrettable que les propositions que fait régulièrement M. Méhaignerie ne soient pas suivies d’effet.

Je rappelle par ailleurs au rapporteur général que nous avions saisi le Conseil constitutionnel de l’ensemble du projet, mais que le Conseil s’est saisi de son propre chef de la question des niches fiscales. Au demeurant, le dispositif censuré qui ne supprimait que la moitié des niches, était insuffisant. Pour mettre fin à un système scandaleux qui permet à l’imposition de certains contribuables aisés de tendre vers l’euro symbolique, nous proposons donc de plafonner l’avantage procuré, toutes niches fiscales confondues, à proportion de l’impôt dû.

M. le Président de la commission - Peut-être n’avez-vous pas botté en touche au cours de la précédente législature, Monsieur le Rapporteur général, mais ce qui est certain, c’est que le ballon n’est pas retombé… (Sourires) Il reste, maintenant, marquer à l’essai, à l’occasion de la prochaine loi de finances.

Il faut bien reconnaître que le dispositif très inventif proposé par l’ancien ministre du budget était, comme l’a écrit le Conseil constitutionnel, « inintelligible et imprévisible ». Il doit donc être retravaillé, car il est inconcevable que l’on puisse se soustraire à l’impôt. Je suis prêt à retirer mes trois amendements si Mme la ministre confirme que, bien que l’amendement 273 rectifié de M. Méhaignerie n’ait pas été défendu, le Gouvernement présentera au Parlement, avant le 15 octobre 2007, un rapport sur les modalités de création d’une imposition minimale sur le revenu, de manière qu’un débat sur ce point puisse avoir lieu cet automne.

Mme la Ministre - J’irai plus loin : je reprends à mon compte les premières lignes de l’amendement Méhaignerie : « Le Gouvernement présentera au Parlement, le 15 octobre 2007, un rapport sur les modalités de mise en place d’une imposition minimale sur le revenu des personnes physiques en vue d’un examen à l’occasion du projet de loi de finances pour 2008 ». On ne peut être plus clair. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - Ce sera l’amendement 488. Les amendements 158 rectifié, 159 rectifié et 157 rectifié sont donc retirés.

Les amendements 275 et 276 rectifiés, repoussés par la commission et par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'amendement 488, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

M. Jacques Myard - Avec votre autorisation, Monsieur le Président, je présenterai successivement les amendements 174 rectifié et 170. Par l’amendement 174 rectifié, je propose la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune. Depuis 1998, à cause de cet impôt, 113 milliards ont quitté la France pour être investis dans d’autres pays. Dans le même temps, l’ISF a rapporté 35 milliards à l’État – et encore est-ce une estimation haute, puisque je ne tiens pas compte du temps passé par les fonctionnaires des finances pour le recouvrer. L’Allemagne, l’Irlande, l’Italie, les Pays-Bas, l’Autriche, la Suède ont supprimé cet impôt. Seules la Norvège, la Finlande et la Grèce nous imitent encore en Europe. Je comprends l’aspect social de la question, mais je le redis, l’ISF est un impôt antiéconomique, qui contribue pour beaucoup à l’atonie des investissements. Et les non-résidents qui investissent en France n’y sont pas soumis ! C’est une aberration de maintenir un dispositif qui fait fuir notre épargne à l’étranger, tandis que ceux qui achètent nos entreprises - pour les démanteler parfois -, n’y sont pas soumis.

L’amendement 170 est de repli : il soustrait la résidence principale du contribuable de l’assiette à l’ISF.

M. Henri Plagnol - Très bien !

M. le Rapporteur général - Je demande le rejet de l’amendement 174 rectifié parce que, grâce à la création du bouclier fiscal et les mesures prises pour préserver les entreprises familiales lors des transmissions, les effets pervers que vous avez dénoncés sont contenus, la France est redevenue attractive. Je demande aussi le rejet de l’amendement 170 au bénéfice de l’amendement 366 qui vous sera soumis ensuite.

Mme la Ministre - Même avis.

M. Jean-Pierre Brard - Notre collègue Myard est très habile. Lui qui sait d’ordinaire être abrupt, il avance cette fois benoît et patelin. Mais peut-on dénoncer vigoureusement le traité de Maastricht, la BCE, les paradis fiscaux, et refuser la mise au point de mesures efficaces pour les empêcher de nuire ? Ceux qui s’en vont en emportant leur fortune après avoir profité du système éducatif français et de sa protection sociale pour eux et leur famille, refusant ainsi, par égoïsme de classe, de faire preuve de solidarité avec la collectivité doivent être stigmatisés. Vous avez parlé d’atonie des investissements, Monsieur Myard, mais à qui la faute ? La machine économique ne fonctionne que si le pouvoir d’achat augmente ; pourtant, le Gouvernement vient de refuser toute revalorisation du SMIC au-delà du minimum légal.

M. Myard a du moins le mérite de l’honnêteté, il avance à visage découvert, même si c’est sous les oripeaux du grand capital, pour reprendre sa formule. Il assume ! Ce n’est pas comme d’autres – n’est-ce pas, Monsieur Mothron ? N’est-ce pas Monsieur Copé ?. Que penseraient les habitants des HLM de Meaux, qui ont cru bien faire en votant pour lui (« Ils ont bien fait ! » sur les bancs du groupe UMP), s’ils savaient qu’il met son zèle au service des grandes fortunes de Neuilly ou du 16ème arrondissement, et non des plus modestes ? Il le sait d’ailleurs si bien qu’il préfère garder le silence !

L'amendement 174 rectifié, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 366, que j’ai cosigné avec M. Copé, vise à porter de 20 % à 30 % l’abattement au titre de la résidence principale, ce qui est cohérent avec la politique d’encouragement à l’accession à la propriété et sera perçu comme une mesure de justice fiscale.

Mme la Ministre - Le Gouvernement est conscient que les prix de l’immobilier ont fortement augmenté entre 1997 et 2006 et que le patrimoine immobilier, et notamment la résidence principale, constituent l’essentiel du patrimoine de la majorité des contribuables redevables de l’ISF. Je suis donc favorable à cet amendement, et je lève le gage.

M. Jean-Louis Idiart - Il y a quelques minutes, M. Myard nous expliquait franchement qu’il était pour la suppression de l’ISF. Vous aussi, d’ailleurs, mais vous n’osez pas le faire. Vous empruntez donc des chemins détournés. M. le Rapporteur général l’a reconnu implicitement tout à l’heure lorsqu’il a répondu à M. Myard qu’avec toutes les dispositions qui avaient été prises, ce n’était même plus la peine de supprimer l’ISF. Et voila que l’amendement de M. Copé vient le vider un peu plus de sa substance ! Allez-vous continuer longtemps à faire de tels cadeaux et à vider les caisses de l’État ? Franchement, cela devient inadmissible ! De prime abord, vos mesures apparaissent sympathiques. Mais combien de personnes concernent-elles ? Ayez au moins le courage de dire ouvertement ce que vous faites ! Et ce sont vos premières mesures ! Vous avez décidé de porter les plus mauvais coups cet été…

M. Yves Censi - Ce ne sont pas des arguments !

M. Jean-Louis Idiart - Les Aveyronnais ont l’habitude de thésauriser. Mais croyez-vous que vos électeurs ne comprennent pas ce que vous êtes en train de faire, Monsieur Censi ?

M. Philippe Vitel - Les gens sont très heureux de ce système !

M. Jean-Louis Idiart - Nous verrons les conséquences de tout cela dès la loi de finances : aujourd’hui les cadeaux pour les uns, demain les factures pour les autres !

M. Jean-Pierre Brard - Voici un amendement phare, un amendement symbolique de votre idéologie et de votre cynisme. Vous avez fabriqué, en cinq ans, 300 000 RMistes supplémentaires. Vous vous apprêtez à faire voter le RSA, pour lequel vous allez consentir un effort de 25 millions d’euros.

M. Jacques Myard - Plus le reste !

M. Jean-Pierre Brard - Voilà la mesure de votre intérêt pour les plus pauvres.

Voici donc, disais-je, l'amendement inspiré qui a fait couler tant d'encre ces derniers jours, premier fait d'armes du nouveau président du groupe UMP à l’Assemblée. On ne peut évidemment taxer M. Copé d’incompétence. Il a ses fidélités, parfois tardives, certes – à l’égard de Nicolas – (Sourires) mais sans faille à l’égard de ceux dont il est le fondé de pouvoirs dans l’Hémicycle. Il a d’ailleurs expliqué sa proposition dans le Figaro : « ce n'est pas une révolution, dit-il, mais cela permet à un certain nombre de contribuables des classes moyennes et moyennes supérieures – évidemment, il ne donne pas de chiffres –qui se sont trouvées brutalement assujetties à l'ISF, etc ». Le moins que l'on puisse dire est que cette allégation trahit une conception particulièrement extensive de la notion de classe moyenne. Les assujettis visés par cette déclaration sont loin d'approuver la position de l'ancien ministre du Budget !

L'Adhir, association qui regroupe les fameux habitants de l'île de Ré assujettis à l'ISF, qui ont servi d’alibi pour porter les premiers coups de boutoir à l’ISF – et Mme Lagarde sait de quoi je parle, tout comme Bernard Debré, qui défend ses électeurs du 16ème

M. Bernard Debré - Je défends tous les Français ! Nous représentons tous la France !

M. Jean-Pierre Brard - Oui, mais pas de la même manière. Vous, vous représentez les gros comptes ; moi, je représente plutôt les sans compte !

Les habitants de l’île de Ré, donc, ont fait part cet après-midi de leur profond mécontentement. La présidente de l’association, Mme Valérie Constancin, n'a pas eu de mots assez durs pour dénoncer le bouclier fiscal et la mesure d'abattement d'ISF dont nous débattons. « Tout cela, dit-elle, va dans le sens des gens qui gagnent beaucoup d'argent, des plus gros patrimoines, et pas dans le sens des petites gens, qui ne paient pas l'impôt sur le revenu ». Elle vous avait crus : elle est déçue.

On comprend mieux encore son mécontentement devant les chiffres accablants de la direction des impôts et les calculs réalisés par le Syndicat national unifié des impôts. Selon ces calculs, un contribuable imposé à l'ISF résidant dans un hôtel particulier dont il est propriétaire, d'une valeur déclarée de 10 millions d'euros, bénéficiera d'une baisse d'imposition de 15 550 euros. Si la valeur déclarée est de 1,2 million, l'abattement sera de 660 euros, soit 23 fois moins.

Vous avez réinventé la progressivité de l’impôt, Monsieur Copé, mais à l’envers ! Plus on est riche, plus on touche de l’État ! On ne peut mieux faire la démonstration du caractère inéquitable de vos mesures. Même dans le cas de personnes disposant de patrimoines importants, vous aimez à distinguer et à favoriser les plus riches parmi les riches. (Interruptions sur les bancs du groupe UMP)

M. le Président - Le groupe SRC demande un scrutin public sur l’amendement 366.

M. Jean-François Copé - En vous écoutant tous, à gauche, depuis trois jours que nous débattons, je comprends mieux pourquoi les Français n’ont pas voulu de vous. Votre discours immuable, qui consiste à opposer les riches et les pauvres, les méchants et les gentils, comme si les temps n’avaient pas changé, donne de vous une image d’un autre siècle.

Ce projet de loi fixe le cap économique clair que les Français attendent en matière de pouvoir d’achat et de travail. Il présente de surcroît l’avantage de n’oublier personne. Je pense au revenu de solidarité active – dont nous traiterons quand vous le voudrez bien…

M. Christophe Sirugue - 25 millions !

M. Jean-François Copé - …à la défiscalisation des heures supplémentaires qui permettra à chaque Français qui le souhaite de travailler plus pour gagner plus, sans oublier les mesures destinées à faciliter l’accession à la propriété.

C’est dans ce cadre que s’inscrit l’amendement que nous avons déposé avec Gilles Carrez, destiné seulement à tenir compte de la flambée récente du marché de l’immobilier qui a fait que des personnes, dont les revenus n’avaient pas augmenté, se sont trouvées brutalement assujetties à l’ISF. Il nous a semblé que dans ces conditions, il était normal de porter à 30 % l’abattement sur la résidence principale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Je comprends, Monsieur Brard, vous qui ne voyez la vie qu’à travers le prisme de l’opposition entre de méchants riches et de gentils pauvres, que cela soit pour vous insoutenable. De toute façon, quel que soit l’amendement en discussion, vous répétez le même numéro. Mes collègues de l’UMP font d’ailleurs preuve à cet égard d’une patience que j’admire.

M. Jean-Pierre Brard - Ils n’ont rien à dire !

M. Jean-François Copé - Les Français, eux, sont pressés, et heureusement que tous ne voient pas le spectacle donné ici aujourd’hui, où vous cherchez désespérément à retarder un débat sur des propositions qui ne font que concrétiser des engagements de campagne.

M. Jean-Pierre Brard - Esbroufe !

M. Jean-François Copé - En vous écoutant, Messieurs les socialistes, je comprends pourquoi les Français n’ont pas souhaité élire votre candidate à la Présidence de la République. Votre aptitude au double langage est en effet immense. L’un de vos amis, M. Charzat, expliquait dans un rapport sur l’attractivité du territoire remis en juillet 2001 que l’ISF devait être réformé « pour ne pas être considéré comme une sanction de la réussite, mais une juste contribution à la solidarité prévalant dans le modèle français. »

M. Jean-Pierre Brard - L’erreur est humaine !

M. Jean-François Copé - Certes, et M. Charzat n’est plus ici. Mais M. Hollande l’est encore, et s’il avait été présent aujourd’hui, il aurait pu nous expliquer pourquoi, en 1990, quand il pensait peut-être que le parti socialiste pouvait se moderniser à l’instar de ses homologues européens, il évoquait « les effets contestables de l’ISF sur la mobilité du patrimoine : vieillissement des dirigeants incités à ne pas céder leurs titres, héritiers devenus imposables suite au fractionnement du capital consécutif aux successions ».

Enfin, Didier Migaud lui-même ne peut avoir oublié qu’il estimait en janvier 2002 « nécessaire de remettre l’ISF sur le métier pour le rendre économiquement supportable ». (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) Même Jacques Myard n’avait pas osé l’écrire ! « L’ISF a des effets pervers, poursuivait Didier Migaud, – écoutez, Monsieur Brard, cela vous évitera de ne toujours viser que l’UMP ! – qui incitent de nombreux contribuables à délocaliser leur fortune ou leur patrimoine professionnel, au détriment de l’emploi dans ce dernier cas. » (Mêmes mouvements) Il ne lui reste décidément plus beaucoup de chemin à faire, maintenant qu’il est président de la commission des finances, pour, après d’autres, nous rejoindre dans le camp des modernes. (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche)

M. Jean-Louis Idiart - Ce n’est pas brillant !

M. Jean-François Copé - Un dernier mot à M. Brard qui m’a invité à donner des leçons de fidélité à mes électeurs. Ce qu’attendent les électeurs de Meaux, peu nombreux à être assujettis à l’ISF mais nombreux à habiter des logements sociaux, n’est pas qu’on décapite les riches et tous ceux qui réussissent, mais que ce Gouvernement poursuive sa politique de lutte contre l’insécurité et contre le chômage. Alors, vos leçons de fidélité, Monsieur Brard, vous pouvez vous les garder, vous qui êtes un communiste à géométrie variable, n’hésitant pas à en appeler aux grands anciens quand il en a besoin pour les fouler aux pieds lorsqu’ils ne lui sont plus utiles. Voilà en une phrase ce que j’avais envie de vous dire depuis le début de ce débat.

Pour toutes ces raisons, l’Assemblée serait sage d’adopter l’amendement 366 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Le montant de l’ISF acquitté au titre de la seule résidence principale est beaucoup plus faible qu’on ne le croit. Ainsi, à Paris, le propriétaire d’une résidence principale de 100 m² estimée 940 000 euros ne paie, après abattement de 20 %, que 11 euros d’ISF et 33 si son bien est estimé 945 000 euros. Il eût certes été légitime de se préoccuper de la situation des propriétaires de leur seule résidence principale qui, du jour au lendemain, du seul fait de l’évolution du marché immobilier, ont pu se trouver assujettis à l’ISF. Mais vous prenez prétexte de cette situation pour servir encore davantage ceux qui possèdent des patrimoines beaucoup plus importants, dont la résidence principale n’est qu’un élément. Lors de notre troisième séance du 21 octobre 2005, le ministre délégué au budget de l’époque, nul besoin de rappeler qui il était, soulignait lui-même que s’agissant de l’ISF acquitté sur la seule résidence principale, il fallait « regarder les chiffres de près ». « Les montants dus sont beaucoup plus faibles qu’on croit », ajoutait-il, ce qui lui valut d’être applaudi sur les bancs socialistes.

Nous persistons à penser que, lorsque la résidence principale n’est qu’un élément d’un patrimoine beaucoup plus important, il n’y a aucune raison d’augmenter l’abattement dont elle fait déjà l’objet. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche et du groupe de la Gauche démocrate et républicaine)

M. François Brottes - M. Migaud nous a dit tout à l’heure que M. Copé, dans d’autres fonctions, l’avait fait rêver. Vu ce que nous venons d’entendre, il s’agissait certainement d’un cauchemar…

Je me suis pris, moi, à rêver des nouvelles activités que pourrait susciter ce texte tant il contient d’avantages fiscaux pour les plus riches. Pourquoi pas, par exemple, une agence immobilière qui pourrait s’appeler L’Île dorée, se reconvertissant de la multi-propriété à la multi-réduction fiscale ? En effet, un propriétaire pourra réduire son impôt sur le revenu, sans condition de ressources, en déduisant les intérêts d’emprunts contractés pour acheter sa résidence principale, laquelle bénéficiera désormais, quelle que soit sa valeur, d’un abattement majoré au titre de l’ISF. Pour peu qu’il soit concerné par le bouclier fiscal, ce propriétaire pourra se voir remboursées la taxe d’habitation et la taxe foncière payées sur ce bien, qu’il pourra, à sa mort, transmettre sans droits de succession. Ne serait-ce pas là une publicité alléchante ?

M. le Président de la commission - Monsieur Brottes, je n’ai jamais dit que M. Copé m’avait fait rêver, (Rires) je parlais de l’idée de l’institution d’une imposition minimale.

Mais passons du rêve à la réalité… Je crains que la contribution de M. Copé ne soit inutile, au regard du débat et de l’horloge – que surveille avec inquiétude le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement – et quelque peu faussée, puisque mes propos ont été sortis de leur contexte. Je suis prêt à discuter de l’ISF et à saisir la commission des finances se saisisse de ce sujet, mais vous refusez le débat et tentez de le contourner. Nous avons, Jean-Pierre Brard et moi-même, déjà réfléchi et sommes prêts à aller plus avant, qu’il s’agisse de l’assiette ou du financement de l’ISF, sans a priori dogmatique.

Que disait M. Copé, alors ministre délégué au budget, lors du débat sur le projet de loi de finances pour 2007 ? Quelques mois se sont écoulés depuis, et que je sache, le marché de l’immobilier n’a pas explosé. Or, repoussant un amendement similaire déposé par des collègues de l’UMP, M. Copé avait déclaré qu’il ne fallait pas exagérer le montant de la cotisation, ajoutant que ce problème n’était pas d’actualité. En cela, il avait été soutenu par M. Carrez, déjà rapporteur général. Pourquoi a-t-il donc changé d’avis ?

M. Henri Plagnol - Les Français ont tranché !

M. Didier Migaud - Ce point ne figurait pas au programme de M. Sarkozy mais les élections ont eu lieu, en effet, et quelques complexes sont restés au vestiaire…

M. le Rapporteur général - Sous la précédente législature, l’entreprise et l’emploi étaient nos priorités. En 2003, nous avons réussi, Hervé Novelli et moi-même, à faire adopter un amendement mettant en place des engagements de conservation pour garder nos entreprises familiales, qui auparavant, à cause de l’ISF, étaient acquises par de grands groupes internationaux, et délocalisées. Nous avons ensuite obtenu, non sans mal, un accord de la part du Gouvernement pour porter cet abattement de 50 à 75 % et pour protéger les chefs d’entreprises, parfois contraints de vendre leurs actions. En retour, le Gouvernement n’a pas souhaité de modification sur le sujet de la résidence principale. Mais voici une nouvelle législature, qui nous permet de saisir ce problème, et de répondre aux attentes de 400 000 Français. Je pense d’ailleurs que les députés de gauche de grandes villes comme Grenoble ou Toulouse pourront, auprès de leurs électeurs assujettis à l’ISF, s’enorgueillir d’avoir participé à cette avancée.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Bien au contraire, je leur dirai que je m’y suis opposé !

L'amendement 170, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

À la majorité de 54 voix contre 20 sur 74 votants et 74 suffrages exprimés, l’amendement 366 est adopté.

M. Jean-Pierre Brard - La vie de château, aux frais des contribuables !

Heureusement, nos compatriotes regardent toujours plus nombreux nos séances ; le rideau de fumée sera bientôt dissipé et ils se rendront compte que, non seulement ce sont les privilégiés qui bénéficieront de ces dispositifs, mais qu’eux-mêmes seront mis à contribution avec la TVA « antisociale », l’augmentation de la part résiduelle pour les consultations chez le médecin ou encore les franchises. Ils se rappelleront ce 13 juillet comme un anti Quatre Août !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Très bien !

M. Jean-Pierre Brard - Messieurs les députés de la droite, vous vous êtes abaissés sur l’auge, tels des animaux affamés…

M. Georges Tron - Mais ça ne va pas ?

M. Jean-Pierre Brard - Si. Cessez de parler la bouche pleine, près des gens dont l’assiette est vide ! Soyez convenable !

M. Georges Tron - Vous-même ! Vos propos sont stupides !

M. Jean-Pierre Brard - Nous vous tendons le miroir, et nous montrons à nos concitoyens qui vous êtes vraiment !

M. Georges Tron - Ne faites pas d’esprit, vous êtes stupide !

M. Jean-Pierre Brard - Pour l’amendement 398, nous proposons de modifier l’assiette de l’ISF. Pour bien en faire comprendre l’enjeu à nos collègues récalcitrants, permettez-moi de citer un passage du Guide de l’immobilier et de la défiscalisation « Investir dans les œuvres d’art » : « les œuvres d'art, quelle que soit leur nature, ne sont pas assujetties à l’ISF. Elles ne sont donc pas mentionnées dans la déclaration d'ISF, et les montants consacrés à l'acquisition sont non imposables. Cette disposition fiscale en fait un parfait outil de déplafonnement de l'ISF. »

Notre amendement a tout d’abord pour vocation de lutter contre la fraude et le blanchiment. Chacun sait à quoi servent les œuvres d’art… A Singapour, un armateur chinois…

M. Dominique Tian - Un ami communiste ?

M. Jean-Pierre Brard - Singapour ne fait pas partie de la Chine, Monsieur Tian ! (Rires) Comme je lui demandais s’il appréciait la peinture, il me répondit : « c’est pour acheter ? » ! Il est des gens qui ne voient l’art que sous cet angle.

Cet amendement culturel permettra aussi de favoriser la présentation au public des œuvres d'art, puisqu’elle sera un motif de défiscalisation. Enfin, les créations contemporaines ne figureront pas dans l’assiette. Cette proposition, qui n’est pas nouvelle et qui avait été soutenue à l’époque par la presse suisse, permettra aussi d’améliorer le rendement de l’ISF, dont se sont inquiétés certains collègues de l’UMP.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable

Mme la Ministre - Même avis.

M. Jean-Pierre Brard - C’est un peu court !

L'amendement 398, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Louis Idiart - Nous parvenons peu à peu à vous faire admettre, malgré la grande finesse dont vous faites preuve, que vous démantelez progressivement l’ISF - M. le Rapporteur général l’avouait presque ouvertement tout à l’heure. Nous en arrivons ainsi aux fondements mêmes du texte !

Notre amendement 318 vise à revenir sur des cadeaux fiscaux que vous aviez accordés à l’occasion du vote de la loi sur l’initiative économique et de la loi de finances pour 2005. En effet, vous faites preuve de suite dans les idées ; mais nous aussi ! La disposition visée permettait d’exonérer d’ISF les placements en capital au sein de PME installées en France ou à l’étranger, dans l’Union européenne. Ce champ singulièrement large, s’il est imposé par la réglementation communautaire pour toute aide fiscale particulière, souligne cependant le décalage entre votre prétention de combattre les délocalisations d’entreprises hors du territoire national et la réalité constituée par ces cadeaux fiscaux. Voilà pourquoi nous demandons que soit abrogé l’article 885 I ter du code général des impôts.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable. Je saisis l’occasion pour dire à nouveau combien Hervé Novelli et moi-même nous félicitons d’avoir proposé cette mesure en 2003 : elle a permis de renforcer les capitaux propres des PME et a contribué au développement de l’emploi.

Mme la Ministre - Même avis.

L’amendement 318, mis aux voix, n'est pas adopté.

ART. 6

M. Jean-Louis Idiart - Cet article porte sur l’exonération d’ISF des contribuables qui investissent dans certaines entreprises. L’esprit en est identique à celui que nous évoquions il y a quelques instants : il s’agit de faire en sorte que certaines personnes soient dispensées d’acquitter l’ISF ; l’argent, au lieu d’être versé dans les caisses de l’État, ira alimenter l’activité économique des PME. En somme, il s’agit encore et toujours de vider les caisses de l’État alors même que les finances publiques ne se portent pas bien. Cela tranche avec les pratiques qui ont cours au sein de l’Union européenne. À ce propos, en début de semaine, après que vous avez accompagné, Madame la ministre, le Président de la République à Bruxelles, les journaux étaient dithyrambiques, parlaient d’unité et de force, et vous avez vous-même affirmé que les ministres avaient applaudi le Président de la République, mais, en cette fin de semaine, c’est une tout autre version que nous entendons. Vous qui ne cessez de citer en exemple nos voisins, ne voyez-vous pas que ceux-ci parviennent à réduire leur déficit tout en parvenant à augmenter la dépense publique, alors que nous continuons de prétendre réduire certaines de nos recettes, creusant ainsi le déficit public ? Mais nous en reparlerons sous peu, lors du débat d’orientation budgétaire.

Les mesures contenues dans cet article relèvent d’une nouvelle culture selon laquelle l’impôt n’est pas noble, ne sert pas la collectivité mais se réduit à un obstacle à tout développement de l’activité nationale. Pour nous, nous sommes partisans d’une meilleure organisation de la dépense, mais nous n’en tirons pas pour conséquence qu’il faudrait remettre en cause la valeur que représente l’impôt aux yeux d’un certain nombre de catégories sociales. L’article 6 se situe dans le droit fil de ce que vous nous avez jusqu’à présent donné à lire et entendre au cours de nos débats ; c’est pourquoi nous déposerons des amendements afin qu’il soit rejeté ou, à défaut, amendé.

M. le Président - Sur l’article 6, je suis saisi de plusieurs amendements de suppression.

M. Roland Muzeau – Je défends l’amendement 130. Les promesses, on le sait, n’engagent que ceux qui les reçoivent. Ainsi Nicolas Sarkozy s’aventurait-il à affirmer, peu avant d’être élu à la présidence de la République, qu’il ne supprimerait pas l’ISF.

M. Hervé Novelli, Secrétaire d’État chargé des entreprises et du commerce extérieur - Eh oui !

M. Roland Muzeau - « Il est normal, déclarait-il, que ceux qui possèdent les patrimoines les plus importants paient davantage. » En réalité, vous êtes en train de vider l’ISF de sa substance. Certes, le sigle continuera d’exister, de même que les 35 heures, que vous n’avez pas osé supprimer, ou que la retraite à 60 ans, alors que bientôt plus personne ne pourra bénéficier à cet âge d’une retraite pleine et entière. Comme le disait M. Le Bouillonnec, c’est à un véritable écran de fumée que s’apparente désormais la politique de l’UMP et de ses alliés. Vous prenez les Français pour des imbéciles, mais ils ne tarderont pas à s’apercevoir que les cadeaux que vous leur annoncez ne leur sont pas destinés !

L'article qui nous est soumis propose de réduire l'impôt de solidarité sur la fortune à peau de chagrin - autant dire de le faire disparaître. Il s’agit cette fois de permettre aux quelque 450 000 ménages français assujettis à l'ISF de transformer leur impôt - dans la limite de 50 000 euros – en investissement dans les PME. L'objectif enthousiasmant affiché par le chef de l'État et par son gouvernement est de « faire revenir les patrimoines et de créer une nouvelle génération de capitalistes familiaux ». Cette mesure est susceptible de supprimer l'essentiel des 3,6 milliards d'euros collectés au titre de l'ISF l'an dernier. Un montant d'ISF de 50 000 euros correspond en effet à un patrimoine taxable d'environ 6 millions, au-delà duquel il ne reste qu'environ 3 % des assujettis à l'ISF.

Le barème étant toutefois très progressif, ceux-ci acquittent plus d'un tiers du produit de l'ISF. Si l’on ajoute à cette disposition le bouclier fiscal limitant les impôts à 50 % des revenus, l'ISF est en voie de disparaître du paysage fiscal - pour votre plus grande satisfaction, sans doute, mais au prix de mensonges et de moyens détournés qui révèlent à quel point vous souhaitez faire preuve de discrétion en la matière.

Le patronat, dans son ensemble, a salué une « mesure qui va dans le bon sens » – selon la Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises – et une « manne pour les PME dynamiques en devenir » – pour reprendre les termes du Centre des jeunes dirigeants. Les économistes et fiscalistes se sont montrés quant à eux beaucoup plus réservés. Selon Jean-Yves Mercier, avocat associé de CMS Bureau Francis Lefebvre, « la seule mesure décisive est la suppression de l'ISF, qui serait infiniment plus rentable pour l'économie qu'un investissement potentiellement hasardeux dans les PME ». À en croire Henri Sterdyniak, de l'Observatoire français des conjonctures économiques, cette mesure est « une nouvelle niche fiscale, donc un nouveau champ d'action pour les conseillers fiscaux. Ceux qui acquittent un niveau élevé d'ISF appartiennent souvent à des familles d'entrepreneurs, qui pourront dès lors investir dans des PME bidons » – jugement sévère ! Quant au Syndicat national unifié des impôts – SNUI –, il estime que la mesure favorisera « le développement des inégalités sur fond de reconstitution de rente » ; en outre, « le manque à gagner budgétaire se répercuterait soit sur le niveau de services publics offerts à la population, soit sur d'autres impôts » – l’on songe évidemment à la TVA « antisociale ». Nous partageons naturellement ces constats ; nous voterons donc contre cet article.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Notre amendement 316 vise bien sûr à empêcher la création d’une nouvelle niche fiscale, pour un coût qui ne cesse de croître – l’on parlait au début de nos débats de 13 milliards d’euros, mais le compteur continue de tourner et le montant s’élève chaque jour. Grâce au travail de l’opposition, les Français commencent à se demander si, plutôt que d’écran de fumée, il ne faudrait pas parler maintenant d’incendie – si vous n’êtes pas en train de mettre le feu à la maison ! Nous ne pouvons accepter ces mesures alors même que le RSA, seule disposition susceptible de recueillir notre soutien – même si elle doit être discutée -, ne se voit octroyer que quelques millions d’euros et que l’État ne consacre que 400 millions d’euros au logement social, à rapporter aux 3 milliards environ que coûtera l’allégement des intérêts d’emprunt !

Madame la ministre, permettez-moi de vous demander des éclaircissements sur la seconde version de la réunion de l’Eurogroupe qu’évoquait tout à l’heure M. Idiart, que l’on trouve dans la presse et qui remet en cause ce que le Président de la République et vous-même avez d’abord déclaré. Est-il exact que le Président de la République a contracté des engagements beaucoup plus importants que ceux qu’il a prétendu avoir pris et à propos desquels il a parlé d’une quasi-unanimité ? Est-il exact que le Président de la République s’est en réalité engagé à ramener le déficit en deçà de 2,4 % en 2008, c’est-à-dire moins encore qu’en 2007, alors qu’il est censé s’élever à 2,7 ou 2,8 % sans mesure correctrice ? Est-il exact qu’il s’est engagé à présenter devant l’Eurogroupe un programme de stabilité dès le mois de septembre, autrement dit, mes chers collègues, avant même que la loi de finances ne soit votée ?

M. le Président - On s’éloigne sensiblement de votre amendement.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Non : c’est un amendement de suppression, parce qu’il faut arrêter d’ouvrir les vannes.

Le Président de la République, enfin, aurait pris l’engagement de parvenir à l’équilibre budgétaire en 2010 ? Madame la ministre, confirmez-vous ces engagements ? Si oui, comment allez-vous faire puisqu’en même temps vous proposez 13 milliards supplémentaires d’avantages fiscaux ?

M. Jean-Pierre Brard - En effet, on ne s’éloigne pas du sujet : tandis qu’on continue ici à piller les finances publiques, le Président de la République prend l’engagement de réduire le déficit ! Il faut absolument que nous obtenions des réponses précises à nos questions.

Par mon amendement 403, je propose moi aussi la suppression de cet article. Vous prétendez promouvoir des usages vertueux de l’ISF, mais votre but est en fait de le supprimer. Son démantèlement est un puzzle : vous le partagez en plusieurs morceaux pour mieux le dissimuler !

Vous prétendez faire de l’ISF un impôt économiquement utile, mais toute votre entreprise ne tend qu’à favoriser des familles d’entrepreneurs héréditaires. Pourtant, l’ISF est loin d’avoir le caractère confiscatoire que vous lui prêtez – ou, si confiscation il y a, c’est celle des finances publiques et des politiques redistributives !

M. le Rapporteur général - La commission a repoussé ces amendements, ce dispositif étant attendu depuis longtemps.

M. Jean-Pierre Brard et M. Roland Muzeau - Par qui ?

M. le Rapporteur général - Il va permettre de renforcer les fonds propres de nos petites et moyennes entreprises. Or vous savez parfaitement que ce sont elles qui ont le potentiel de création d’emplois le plus important, qui irriguent le mieux le territoire, qui innovent, mais qu’elles sont malheureusement trop endettées et ont besoin d’atteindre la taille critique, et qu’il faut donc absolument les aider à se développer. Ce dispositif est le meilleur qu’on pouvait imaginer ; il nous fait rejoindre plusieurs de nos partenaires européens qui, bien que dirigés par des majorités sociales-démocrates, ont adopté ce système depuis des décennies ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

Mme la Ministre - Avis défavorable, bien entendu, pour les mêmes raisons. Monsieur Brard, vous qui parliez ce matin du private banking, permettez-moi d’évoquer les business angels, qui sont les investisseurs providentiels nécessaires aux PME, ou encore l’expression love money, que je me hasarderai à traduire par « argent de proximité » ; à ce sujet, il faudra nous interroger sur l’utilité qu’il pourrait y avoir à mettre en place un système d’intermédiation entre les contribuables redevables de l’ISF et les PME à la recherche de financements.

Pour reprendre une expression de mon collègue et ami Hervé Novelli, plutôt que de payer le percepteur, pourquoi ne pas payer l’entrepreneur ? C’est le sens de cet article, qui vise, au-delà des PME, les organismes de recherche et d’insertion des personnes. Les sommes investies pourront être imputées pour 75 % sur le montant de l’ISF dû, dans la limite de 50 000 euros ; il est en effet de l’intérêt de notre pays d’opérer cette forme de relance par l’offre.

M. Gérard Bapt - Cette profession de foi ne répond pas à l’argumentation de M. Le Bouillonnec. On ajoute une niche fiscale à une autre – et dans les deux cas, les PME visées ne sont pas seulement celles de notre pays, mais celles de l’ensemble de l’Union. La loi Dutreil n’a pourtant pas fait la preuve de son efficacité économique.

Les amendements 130, 316 et 403, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec - Permettez-moi de faire un rappel au Règlement sur le déroulement de la séance.

La représentation nationale mérite du Gouvernement une autre attitude que le mépris. Ai-je manqué de courtoisie ? Ai-je été incorrect ? Ai-je fait une erreur dans la présentation des faits ? Non. Je m’étonne donc que Mme la ministre ne prenne pas le soin de me répondre.

Je renouvelle donc mes questions. Est-il exact que le Président de la République s’est engagé à ramener le déficit à 2,4 % du PIB en 2008 ? Est-il exact qu’il s’est engagé à présenter un programme de stabilité dès le mois de septembre, c’est-à-dire avant le vote de la loi de finances ? Est-il, dans ces conditions, raisonnable de proposer 13 milliards de défiscalisation ?

Mme la Ministre - Le Président de la République et moi-même nous sommes rendus à l’Eurogroupe ; le lendemain, j’étais à la réunion Ecofin. Les engagements pris par le Président de la République ne sont que le reflet de ceux qu’a toujours eus la France. En 2006, nous avons respecté l’engagement d’un déficit limité à 2,5 %. Pour 2007, notre engagement est de descendre à 2,4 %. Pour 2008, le Président de la République a indiqué que nous nous efforcerions de faire mieux que cette année. Nous allons rencontrer le commissaire européen cet été, puis en septembre à l’occasion d’une probable réunion informelle des ministres des finances. J’ajoute que le débat a essentiellement porté sur le programme de réformes considérables lancé par le Gouvernement, programme qui a enthousiasmé nos partenaires.

M. Jean-Louis Idiart - Il paraît qu’ils faisaient même des bonds sur leurs sièges ! (Sourires)

Mme la Ministre - Je précise enfin que je ne vous ai jamais suspecté, Monsieur Le Bouillonnec, de manquer de courtoisie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Pierre Brard - Notre collègue en rougit, mais vous n’avez pas entièrement répondu à sa question. Le retour à l’équilibre est-il prévu pour 2010 ou 2011 ?

Allez-vous surtout continuer à démanteler notre impôt sur la fortune au prétexte d’aider les PME, menacées par des appétits étrangers, et de lutter contre l’exil des jeunes cadres dynamiques, qui seraient obligés de prendre l’Eurostar à l’aube pour aller travailler à la City ?

Vous ne vous souciez des « talents » que s’il y a des billets de cent euros accrochés à leurs semelles ! Vous n’évoquez jamais nos chercheurs et nos savants, qui partent eux aussi. Sont-ils ringards parce qu’ils ne sont pas cotés au Dow Jones et au CAC 40 ? Vos affections sont bien électives, car tout va aux détenteurs du capital.

Votre seule ambition étant de soustraire la richesse au devoir de solidarité, vous n’avez pas un mot pour les chercheurs, que vous privez de postes et que vous payez avec un élastique. Je vous demande de rétablir un peu de moralité en adoptant notre amendement 131.

L'amendement 131, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 72 est de précision.

L'amendement 72, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 191 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 191 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 73 est de coordination.

L'amendement 73, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 192 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 192 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 74 est de précision.

L'amendement 74, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Pierre Brard - L’amendement 415 tend à contrer les tentatives immorales du Gouvernement, qui ne pense qu’à vider l’ISF de sa substance, cette fois en accordant une exonération de 50 000 euros dans l’hypothèse d’un investissement dans les PME.

Derrière vos discours à tirer des larmes se cache une réalité qui n’a pas échappé aux Echos : vous cédez aux suppliques du Medef, qui cherche à vous convaincre d’amender ce projet de loi en faveur de ses propres intérêts. Votre texte dépasse toutes les espérances de la présidente du Medef, mais il faudrait encore aller plus loin !

Notre amendement s’y oppose. Rétablissons la seule situation économiquement, mais aussi éthiquement acceptable.

M. le Rapporteur général - Je me suis déjà exprimé sur un amendement similaire. Avis défavorable.

Mme la Ministre - Même avis.

L'amendement 415, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Louis Idiart - L’amendement 317 vise à interdire aux redevables ayant bénéficié d’une exonération d’ISF en contrepartie d’un investissement dans les PME de participer à la distribution des bénéfices pendant une durée de cinq ans – durée pendant laquelle ils doivent déjà conserver leurs titres.

M. le Rapporteur général - La commission a rejeté cet amendement qui entraverait la liberté de fonctionnement des entreprises. L’effet obtenu serait contraire à l’objectif de soutien aux PME.

Mme la Ministre - Même position.

L'amendement 317, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 193 rectifié est rédactionnel.

Mme la Ministre - Le Gouvernement est favorable à la clarification apportée par cet amendement, qui tend à exclure du dispositif les entreprises exerçant une activité de gestion de patrimoine mobilier ou immobilier.

M. Roland Muzeau - Cet amendement n’a donc rien de rédactionnel !

L'amendement 193 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Pierre Brard - L’efficacité économique des entreprises dépend certes de la qualité de leur gestion, mais aussi de la compétence et de la stabilité de leur personnel. Il faut donc éviter que l’on joue au Monopoly avec les salariés, trop souvent traités comme de simples pions.

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques - Vous déraisonnez !

M. Jean-Pierre Brard - L’amendement 416 tend à limiter les exonérations d’ISF aux seules entreprises qui emploient sous forme de CDI plus de 90 % de leur effectif. Vous chantez sur tous les tons votre attachement au droit du travail. Grâce à cet amendement, vous avez l’occasion de mettre vos actes en conformité avec vos paroles !

M. le Rapporteur général - Avis défavorable.

Mme la Ministre - Le Gouvernement souhaitant faire souffler davantage de liberté dans notre économie, cet article permettra aux contribuables d’affecter une partie de l’ISF dû dans les PME, s’ils le souhaitent. Ils pourront également choisir les PME concernées, notamment celles qui s’engagent en faveur du développement durable.

Vous savez en outre qu’il existe une administration chargée au respect du code du travail et de sanctionner d’éventuels contrevenants. Pourquoi faut-il toujours que vous présentiez les entreprises comme des exploiteurs, hostiles au bon peuple ?

M. Jean-Pierre Brard - C’est vous qui avez un goût prononcé pour la caricature, Madame la ministre. Étant marxiste, je sais que seule l’économie est déterminante en dernière analyse, pas la spéculation. Vous parlez souvent de « valeur travail », mais en déformant le sens des mots, dont vous usez comme d’un grigri afin de tromper l’opinion.

Vous vous abritez derrière le principe de liberté, oubliant qu’il y a pas de liberté sans règle. Ce serait en effet contraire à la déclaration des droits de l’homme. Vous ne pensez qu’à la liberté du renard dans le poulailler !

Il faut donc réorienter votre dispositif, notamment en faveur des entreprises innovantes, qui participent au transfert de la recherche dans le processus productif. Cessez de tirer la porte et de nous tourner le dos, Madame la ministre. La liberté sans règle, c’est le pouvoir du fort sur le faible. Je ne connais qu’une liberté, celle qui a été consacrée pendant la nuit du 4 août 1789.

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis - M. Brard fait de beaux discours, mais l’on voit qu’il méconnaît le monde de l’entreprise…

M. Roland Muzeau - J’en étais sûr !

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis - …puisque, par cet amendement, il rend inéligibles à la mesure, par exemple, les entreprises à l’activité très saisonnière. Or, ce sont celles dont les propriétaires misent tout sur leurs biens propres, à chaque saison nouvelle !

M. Jean-Pierre Brard - Je vois qu’un sous-amendement se profile, consistant à exclure de ma proposition les entreprises à l’activité très saisonnière. Si cela conduit à l’adoption de l’amendement, je m’y rallierai volontiers ... (Sourires)

L'amendement 416, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Vous qui nous dites, Madame la ministre, être contre la fraude et favorable à la transparence, vous ne pouvez pas vouloir aider des entreprises qui ne sont pas en règle avec les services fiscaux. C’est exactement le sens de l’amendement 428.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable.

Mme la Ministre - Avis également défavorable. Ce qui nous sépare, Monsieur Brard, c’est que je pars de l’idée que les entreprises sont à jour de leurs obligations fiscales. Si elles ne l’étaient pas, il appartiendrait au fisc de le démontrer.

L'amendement 428, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 194 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 194 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 75 précise que les investissements intermédiés bénéficiant de la réduction d’ISF pour investissement dans les PME doivent être réalisés sous forme de souscriptions en numéraire.

L'amendement 75, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Pierre-Christophe Baguet - Je me trouvais aux côtés des familles de l’escadron de gendarmerie de Malakoff frappées par le terrible drame qu’y vient de s’y produire et je n’ai donc pu défendre mes amendements relatifs à l’ISF. J’en suis désolé, et je regrette qu’au moins celui qui proposait la familiarisation de cet impôt n’ait pas été retenu. Dans la mesure où la résidence principale n’est pas exclue de l’assiette de cet l’ISF, cet amendement me semblait pourtant s’imposer, puisque le logement s’agrandit à proportion du nombre d’enfants.

Par l’amendement 211, je propose, compte tenu de la grave crise du logement que connaît notre pays en dépit des efforts faits sous la précédente législature, de permettre l’affectation de tout ou partie de la cotisation ISF à un investissement dans le secteur du logement à loyer intermédiaire ou social, soit directement, soit par l’intermédiaire d’OPCI, ou dans des logements respectueux des impératifs de développement durable.

L'amendement 211, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Michel Fourgous - Je retire l’amendement 153 au bénéfice de l’amendement 214 rectifié. En France, les entreprises dont le capital est inférieur à un million ont beaucoup de mal à renforcer leurs fonds propres ; elles n’ont collecté que 1,5 milliard d’investissement, contre 10 milliards pour leurs homologues britanniques, ce qui explique pour partie la différence du nombre d’emplois – 6 millions – entre la France et la Grande-Bretagne. Conformément au programme de l’UMP, je propose un coup de pouce en leur faveur, en autorisant ceux que la gauche appellent « les riches » à aider les petites entreprises. Il s’agit de permettre que l’avantage fiscal prévu dans cet article s'applique également aux parts de fonds communs de placement à risque, de fonds communs de placement dans l'innovation et de fonds d'investissement de proximité, lorsque l'actif du fonds est constitué exclusivement de titres de sociétés dont les capitaux propres sont inférieurs à deux millions. Ainsi serait-on certain que 90 % des entreprises françaises, celles qui emploient moins de 40 salariés, bénéficieraient du dispositif.

M. le Rapporteur général - La commission n’a pas pris position sur cet amendement, qui tend, par le biais de FCPR, de FCPI ou de FIP, à élargir la possibilité d’intermédiation à des entreprises dont on peut penser qu’elles sont éligibles au dispositif, puisque leur capital devrait être inférieur à 2 millions, versement inclus.

Mme la Ministre - Le Gouvernement, assez réservé, s’en remettra à la sagesse de l’Assemblée. L’article 6 permet aux contribuables qui le souhaitent d’affecter tout ou partie de leur impôt de solidarité sur la fortune au financement de PME ou de la recherche. J’insiste sur le fait que les contribuables concernés ne s’exonèrent pas de l’ISF. Mais le dispositif a aussi pour objet d’amener les Français à s’intéresser à la création de valeur et aux fruits que l’on en retire. C’est pourquoi l’amendement ne me paraît pas répondre exactement à l’objectif poursuivi.

M. Pierre-Christophe Baguet - Il faut permettre aux particuliers qui envisagent des investissements dans des PME d’entrer en relation avec les entreprises les plus crédibles et les plus fiables tout en évitant le dévoiement du dispositif par des assujettis à l’ISF qui créeraient des PME fictives pour faire jouer l'avantage fiscal. Par l’amendement 212, je propose donc d’ouvrir le bénéfice de la réduction d’impôt aux versements réalisés dans des fonds communs de placement dans l’innovation et des fonds d’investissement de proximité. Cet amendement va dans le même sens que celui de M. Fourgous, que je soutiens.

M. le Président - L’amendement 462 est également défendu.

M. le Rapporteur général - L’objectif de l’article 6 est d’encourager l’investissement en fonds propres dans les PME. Nous devons donc être particulièrement vigilants sur la destination des fonds investis, et c’est pourquoi il n’est pas possible d’étendre le champ de l’intermédiation, comme le propose M. Baguet, à des FCPI ou à des FIP. L’amendement de notre excellent collègue Jean-Michel Fourgous, assure une vraie sécurité juridique quant à la cible que nous voulons toucher. Je soutiens donc le seul amendement 214 rectifié.

Mme la Ministre - Sagesse.

M. Roland Muzeau - Vous m’étonnez, Madame la ministre – à moins que vous n’ayez beaucoup d’humour – lorsque vous vous en remettez à la sagesse de l’Assemblée : cela fait maintenant quelques jours que la sagesse a déserté les rangs de la majorité. Vous n’essayez même pas de nous dire combien cette mesure coûtera à l’État ! Il serait en outre souhaitable que vous indiquiez, lorsque vous donnez la position du Gouvernement, si vous levez ou non le gage.

M. François Brottes - Mme la ministre a eu raison de rappeler qu’on ne s’exonérait pas de l’ISF en investissant dans les PME. Je souhaite simplement vous interroger, Monsieur le rapporteur général, sur l’impact que ces mesures pourraient avoir pour l’avenir de telle ou telle PME : peut-on par ce biais racheter une entreprise ? Payer son impôt de cette manière permet-il, d’autre part, de toucher des dividendes ?

M. le Rapporteur général - Cet investissement est un investissement long. Il s’agit de fonds propres, ils doivent donc être investis durablement – c’est ce dont ont besoin les PME. L’investissement dans l’entreprise doit être au minimum de cinq ans. Il est en effet possible que cela modifie les relations entre actionnaires, mais je vous rappelle que nous ne sommes pas dans une entreprise du CAC 40 !

L’investissement étant long, on ne peut d’autre part exclure la possibilité de verser des dividendes. Ce qui est important, c’est que des épargnants acceptent de prendre un risque sur la durée dans des PME.

M. Pierre-Christophe Baguet - Je suis bien sûr d’accord avec le rapporteur général, mais je rappelle que pour les FCPI et les FIP, l’investissement était aussi au minimum de cinq ans. Je retire mon amendement au profit de celui de Jean-Michel Fourgous.

Les amendements 212 et 462 sont retirés.

L'amendement 214 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Levez-vous le gage, Madame la ministre ?

Mme la Ministre - Non.

M. le Président - L’amendement 461 est défendu.

L'amendement 461, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Michel Fourgous - L’amendement 155 vise à permettre aux contribuables de déduire de leur ISF les versements effectués jusqu’au 14 juin de l’année d’imposition, le paiement de l’impôt intervenant le 15 juin. C’est une mesure de simplification.

M. Louis Giscard d'Estaing - L’amendement 353 a le même objet. Il s’agit que le dispositif puisse jouer jusqu’au dernier moment.

M. le Rapporteur général - La rédaction de l’amendement 353 me paraît préférable. Nous avons là une proposition très intéressante qui rendra la mesure plus efficace.

Mme la Ministre - Même avis.

L'amendement 155 est retiré.

M. François Brottes - Peut-on espérer que les contribuables qui voient leurs revenus modifiés en cours d’année bénéficient de la même réactivité de la part des services fiscaux que les redevables de l’ISF ?

Mme la Ministre - C’est une bonne question. Mais il me paraît préférable d’expérimenter ce système avant de l’étendre éventuellement à d’autres impositions.

L'amendement 353, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre - Je lève le gage.

M. le Rapporteur général - L’amendement 76 précise que le plafond de 50 000 euros vaut globalement, pour l’ensemble des investissements, qu’ils soient effectués dans des PME, des organismes de recherche ou des entreprises d’insertion.

L'amendement 76, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 77 est également de précision. Cela peut sembler aller de soi, mais mieux vaut l’écrire, la réduction d’ISF consentie à un contribuable ne peut s’appliquer aux souscriptions au capital de son entreprise ou de celle d’un membre du foyer fiscal.

L'amendement 77, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Roland Muzeau - L’amendement 421 est défendu.

L'amendement 421, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 78 tend à inclure les établissements privés de recherche ou d’enseignement supérieur agréés dans la liste des organismes éligibles.

Mme la Ministre - Favorable. Je lève le gage.

M. François Brottes - J’espère que cela n’aura pas pour conséquence une diminution des crédits de l’État à ces établissements.

L'amendement 78, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - Mon amendement 195 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 195 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général - L’amendement 79, qui a été proposé par notre collègue de Courson, étend la possibilité d’investissement en réduction d’ISF aux ateliers et chantiers d’insertion.

Mme la Ministre - Avis favorable. Je lève le gage.

L'amendement 79, mis aux voix, est adopté.

M. Louis Giscard d'Estaing - L’amendement 354 est défendu.

L’amendement 156 est retiré.

L'amendement 354, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

Mme la Ministre - Je lève le gage.

M. le Rapporteur général - L’amendement 80 précise que, dans ce cas aussi, le plafond de 50 000 euros vaut pour l’ensemble des investissements, qu’ils soient effectués dans des PME, des organismes de recherche ou des entreprises d’insertion.

L'amendement 80, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur général – L’amendement 196 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 196 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté.

M. Hervé Mariton - Mon amendement 200 est dans le même esprit que l’amendement 214 rectifié adopté tout à l’heure. Je souhaite qu’il donne l’occasion au Gouvernement de préciser ses réponses sur les points concernés.

M. le Rapporteur général - La commission l’a repoussé, estimant qu’il ne donnait pas toutes garanties que seraient exclusivement concernées les PME, comme il est souhaité.

Mme la Ministre - Même avis que le rapporteur général.

L'amendement 200 est retiré.

M. le Rapporteur général - L’amendement 197 rectifié est rédactionnel.

L'amendement 197 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 6 modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 6

M. le Rapporteur général - L’amendement 71, 2ème rectification, qui émane de notre collègue Michel Bouvard et a été repris par la commission, exclurait des charges déductibles du bénéfice net des entreprises les indemnités de départ et de licenciement dès lors que leur montant dépasse, pour une personne, un million d’euros. J’indique que j’avais donné un avis défavorable, comme lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2007, mais que cela n’a pas empêché la commission de l’adopter.

Mme la Ministre - Il est louable de souhaiter moraliser certaines pratiques, mais l’introduction de ce plafond me paraît plus contestable sur le plan juridique. En effet, les indemnités de licenciement sont traditionnellement considérées comme des dommages et intérêts destinés à compenser un préjudice, et non comme un salaire. Elles ne sont donc pas imposées à ce titre. Dans ces conditions, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

L'amendement 71, 2ème rectification, mis aux voix, est adopté.

ART. 7

M. Jean Launay - Notre capitalisme financier est-il mature ? À l’évidence, non. La longue liste des chèques substantiels - doux euphémisme - encaissés par les patrons français le prouve. Les parachutes dorés, auxquels a trait cet article 7, se sont multipliés ces dernières années, en même temps que leur montant explosait.

Permettez-moi de vous en infliger la liste. En 1989, Le Canard enchaîné révélait la rémunération de 2,2 millions de francs touchée par Jacques Calvet, patron de Peugeot. Depuis lors, stock-options, actions gratuites et parachutes dorés se sont envolés. En 1999, Philippe Jaffré encaissait 30 millions de francs à son départ d’Elf Aquitaine. En 2002, Jean-Marie Messier, patron de Vivendi, devait empocher, si la justice ne l’en avait empêché, quelque 20,5 millions d’euros. En 2005, Daniel Bernard quittait Carrefour avec 9,5 millions d’euros d’indemnités et une retraite chapeau représentant 40 % de son dernier salaire. En 2006, Antoine Zacharias, PDG de Vinci, touchait à son départ 13 millions d’euros, se voyait octroyer une retraite chapeau équivalant à 50 % de son dernier salaire, et surtout empochait 200 millions d’euros de stock-options. En 2007, Laurence Danon, patronne du Printemps, recevait 2,5 millions d’euros d’indemnités de départ ; Serge Tchuruk 5,7 millions après la fusion d’Alcatel avec Lucent ; enfin, EADS versait à Noël Forgeard plus de 6 millions d’euros d’indemnités, soit deux ans de salaire brut, auxquels s’ajoutaient 2,44 millions d’euros d’indemnité de non-concurrence durant deux ans. Il faut rappeler qu’en 2006, Noël Forgeard avait touché 2,6 millions d’euros en exerçant ses stock-options juste avant l’annonce des retards de livraison de l’A380. Et demain Jean-Paul Gut, président d’EADS International, pourrait fort bien empocher 12 millions d’euros. La liste pourrait être longue encore.

Pourtant, les gouvernements successifs, chacun à leur façon, ont essayé d’agir. Ce fut en 2001 la loi sur les nouvelles régulations économiques puis, en 2005, la loi pour la confiance dans l’économie numérique qui a soumis les indemnités de départ et les retraites surcomplémentaires à l’autorisation préalable des conseils d’administration et à l’approbation des assemblées générales. Mais faut-il aujourd’hui un nouveau texte ? Assurément oui. Notre collègue Christophe Caresche avait déjà proposé en 2004 la création d’une commission d’enquête sur le renforcement de la responsabilité des mandataires sociaux. Le groupe socialiste avait, dès décembre 2003, déposé une proposition de loi sur la responsabilité individuelle des dirigeants et mandataires sociaux et sur la transparence et le contrôle des rémunérations dans les sociétés cotées. Le 18 mai, le Président de la République nouvellement élu confirmait devant les salariés d’Airbus sa promesse de campagne de rendre illégaux les parachutes dorés. Jean-Louis Borloo, éphémère ministre de l’économie, devait, selon Le Monde du 20 mai, déposer un projet de loi les interdisant purement et simplement. Patrick Ollier lui-même, président de notre commission des affaires économiques, indigné par les indemnités de M. Forgeard, dénonçait ces pratiques.

Je devine donc aujourd’hui le trouble dans vos rangs, car le présent texte bannit l’expression de parachute doré. Il n’est plus question que d’indemnités de départ, comme on le disait, de manière convenue, en 2005. Et loin d’interdire ces parachutes, notre projet ne fait que lier l’ampleur de la rémunération différée à la performance du dirigeant et à la situation de l’entreprise. Les cabinets d’avocats réfléchissent déjà aux astuces juridiques qui permettront de contourner la loi comme de faire voter l’indemnité de départ par une filiale étrangère du groupe, soumise à une réglementation moins contraignante, de fractionner les rémunérations ou d’anticiper le départ à la retraite pour certains dirigeants.

En réalité, vous abordez ce sujet à contrecœur parce que vous partagez les réticences structurelles du Medef à toute législation sur le sujet. Quand Gérard Rameix, secrétaire général de l’Autorité des marchés financiers, en appelle à une politique rationnelle des rémunérations des dirigeants mais ne pense pas qu’on pourra imposer des règles par la loi et estime que la norme de rémunération viendra du marché, par le seul biais de progrès dans la gouvernance des entreprises à l’échelle internationale, le libéralisme débridé a encore de beaux jours devant lui, et ce n’est pas sans vous réjouir !

Cet article 7 est donc très loin des attentes de nos concitoyens. Pourtant, comme l’écrivait Élie Cohen, « le pacte a été rompu, les dirigeants sociaux ayant voulu mettre en place un jeu où ils gagnaient à tous les coups en matière de rémunération ».

M. Jacques Kossowski - Des dérives préoccupantes sont apparues ces cinq dernières années dans les rémunérations octroyées aux grands dirigeants d'entreprise, dont les plus emblématiques ont été les « golden parachutes » accordés aux présidents de Total, Vivendi, Carrefour, Vinci, Accor ou Alcatel. Il y a quelques mois, l'opinion publique a été, à juste titre, choquée, par les indemnités de départ considérables versées à Noël Forgeard, alors même qu’EADS venait d'enregistrer une perte de cinq milliards d'euros et prévoyait de supprimer quelque dix mille emplois d'ici à 2010. Cela est venu nourrir un peu plus la défiance de la société civile envers ce qu’elle perçoit comme une caste de privilégiés, dont les rémunérations échappent à toute règle économique, juridique et morale.

Ces dérives ont, hélas, favorisé l'amalgame entre les pratiques isolées de quelques grands patrons et le comportement des grandes entreprises en général. Une enquête de la Sofres révèle que les grandes entreprises recueillent désormais 51 % d’opinions défavorables, et leurs dirigeants 59 %, les PME semblant épargnées par ce jugement sévère. Mais le salaire moyen net mensuel d'un patron de PME n’est que de 3 973 euros, sans compter qu’il prend plus de risques personnels que bien des dirigeants de grandes sociétés.

Il est urgent, Madame la ministre, de réconcilier les Français avec le monde de l'entreprise, moteur de toute création d'emploi et de richesse, et de restaurer la confiance. Pour cela, il faut garantir une meilleure gouvernance, dont la rémunération des dirigeants est l’un des éléments essentiels. L'article 7 de ce texte y concourt. En s'attaquant aux symboles les plus choquants, il permettra de répondre aux préoccupations de l'opinion publique et des investisseurs sans jeter l'anathème sur la très grande majorité des dirigeants d'entreprises. Cet article, s’inspirant de la philosophie politique développée par Nicolas Sarkozy durant sa campagne…

M. Jean-Pierre Brard - Philosophie, un bien grand mot !

M. Jacques Kossowski - …prévoit de « subordonner, dès le départ, dans la convention de rémunération, le versement de rémunérations différées à certaines conditions de performance appréciées par le conseil d'administration au moment du versement ».

La récompense doit en effet être liée au mérite. Nicolas Sarkozy n’avait-il pas déclaré à ce propos : « Je ne crois pas à la survie d'un capitalisme sans morale et sans éthique où ceux qui échouent gagnent davantage que ceux qui réussissent ».

L’article 7 instaure la transparence, puisque les critères de performance devront être désormais spécifiés et rendus publics. Le conseil d’administration pourra ainsi juger objectivement du respect de la « feuille de route » imposée au dirigeant. Cette volonté de transparence se traduit aussi par l'obligation de soumettre à un vote contraignant de l'assemblée générale une résolution spécifique et détaillée portant sur la convention de rémunération. L'assemblée générale des actionnaires voit ainsi son rôle renforcé et son contenu rendu plus intéressant.

À titre personnel, j'aurais aimé que l'on accorde un rôle plus important au comité de rémunération, en le rendant obligatoire pour toutes les entreprises cotées et en en définissant juridiquement le statut. Il aurait été également souhaitable de mieux garantir son indépendance, en augmentant le nombre des administrateurs indépendants et en excluant les membres de l'équipe dirigeante. Vous avez préféré privilégier la responsabilité universelle du conseil d'administration et vous appuyer sur les codes de place définis par l'AMF.

Malgré ces quelques réserves, je voterai pour cet article qui participe à la moralisation de la vie économique voulue par les Français et par le Président de la République. Permettez-moi enfin de suggérer une piste de travail : il nous faudrait parallèlement développer l’actionnariat des salariés, afin de réconcilier nos compatriotes avec le monde de l'entreprise.

M. Roland Muzeau - La question des indemnités de départ a fait irruption dans la campagne présidentielle après que plus de 12 millions de dollars ont été octroyés au directeur général d’EADS, Noël Forgeard. Cette décision était d’autant plus choquante qu’elle survenait quelques semaines après l’annonce de la mise à pied de 10 000 employés d’Airbus. Tous les candidats ont alors dénoncé les conditions de départ de l’administrateur, Nicolas Sarkozy promettant d'interdire les parachutes dorés.

Mais ce texte est beaucoup moins ambitieux. Confirmant cette approche plus timide, vous avez déclaré, Madame la ministre, qu’un « petit peu de moralisation » ne « ferait pas de mal ». De fait, votre réforme se contente de « moraliser » les indemnités de départ, autrement dit les maintient en les liant directement à la performance de l'entreprise, sous la gouverne du dirigeant concerné. Les critères d’évaluation pourront porter sur le cours boursier – lequel flambe toujours à l’annonce d’un plan social – les emplois créés ou les bénéfices réalisés, la décision étant approuvée par l'assemblée des actionnaires.

La présidente du Medef, qui estime que le projet de loi va « rendre les indemnités plus transparentes » tout en permettant à la France de « conserver sa compétitivité » dans le recrutement d'administrateurs de haut niveau, peut bien montrer sa satisfaction : votre réforme est vide de tout contenu.

Pour moraliser les pratiques, il faudrait prendre des mesures d'une toute autre ampleur, non seulement en interdisant les parachutes dorés, mais en plafonnant les revenus des dirigeants, en donnant un droit de regard aux comités d'entreprise, ou en intégrant la fixation des revenus des dirigeants dans la négociation salariale globale.

Selon la publication de l’Institut Montaigne, toujours fort instructive, 80 % des visiteurs du site boursorama.com, considéraient en mai 2007 que la polémique sur les parachutes dorées était fondée. Toujours selon cet article, la rémunération moyenne des dirigeants s’est très fortement accrue depuis dix ans et a progressé de 15 % par an ces cinq dernières années, tandis que les salaires augmentaient à un rythme annuel de 3 %. Loin de la modération recommandée par les organismes patronaux eux-mêmes, on a assisté à une évolution inverse : s’est installée une échelle de perroquets, les augmentations des uns justifiant celles des autres. Dans ce contexte, l’article 7 est tout bonnement scandaleux !

M. Jean-Pierre Brard - Nicolas Sarkozy nous avait promis l’interdiction des parachutes dorés, mais redoutant certainement de faire de la peine à ses amis, tels Vincent Bolloré, il a préféré y renoncer. Notons que Mme Parisot a parlé d’indemnités plus « transparentes », et non pas plus « morales » : les deux termes ne font pas toujours bon ménage ! Les « performances » dont il est question dans cet article sont celles qui sont appréciées en bourse, ce qui n’a rien à voir avec l’intérêt du pays ou celui des salariés – dont, d’ailleurs, vous n’avez pas parlé !

M. Kossowski, vous évoquez le « vote contraignant » de l’assemblée générale : sans doute avez-vous lu en diagonale, car c’est le conseil d’administration qui prendra la décision ! Vous savez comme moi que dans ce monde feutré des grands patrons de l’industrie – j’évite volontairement le terme de « capitaines » – , on est dans « l’entre soi », et l’on n’attend pas la prochaine assemblée générale pour demander à un dirigeant de partir ! Mais trouve-t-on autour de la table du conseil d’administration ?

M. Alain Cacheux - Des braves gens !

M. Jean-Pierre Brard - Oui, ils se ressemblent tous, celui qui va partir est leur semblable et leur sort sera un jour le même. Il ne peut être fait de place aux petits actionnaires ou aux salariés, dont le savoir-faire est bien à l’origine de la production de richesses. La « responsabilité universelle » du conseil d’administration signifie en français profane : « pouvoir exclusif ». Vous ne moralisez pas la vie économique et vous ne prévoyez pas davantage de le faire dans vos « pistes de travail ».

En conclusion, je ferai remarquer que les trois parachutes alloués à MM. Zaccharias et Tchuruk et à Mme Danon en 2007 équivalent à peu près à la somme consacrée au RSA. En 2006, les deux parachutes dont ont bénéficié MM. Espalioux et Forgeard ont atteint le même montant. En 2005, MM. Bernard et Weinberg ont touché l’équivalent de deux années de RSA !

Avec l’article 7, vous ne faites qu’une concession de façade à l’opinion publique révoltée par ces mœurs d’un autre temps, où l’on mise tout sur l’individu, rien sur la solidarité !

M. Jean-Louis Idiart - Rappel au Règlement. Monsieur le Président, je demande une suspension de séance pour que nous puissions nous mettre d’accord sur le déroulement de la suite de nos travaux. Des engagements avaient été pris pour que nous puissions regagner nos circonscriptions à une heure décente. Nous devons être fixés sur notre emploi du temps.

La séance, suspendue à 18 heures 15, est reprise à 18 heures 20.

M. le Président - Nous en arrivons aux amendements à l’article 7.

M. Jean-Pierre Brard - Nous avons entendu tout à l’heure le plaidoyer vibrant de M. Kossowsi en faveur de la transparence, mais il semble bien que les choses se gâtent lorsqu’il faut passer à la pratique. La transparence, c’est toujours mieux pour les autres ! Par notre amendement 169, nous demandons que la fixation des revenus des dirigeants soit intégrée dans la négociation salariale globale avec les organisations syndicales. Pourquoi débattrait-on publiquement de la rémunération des secrétaires et pas de celle du PDG ? Y a-t-il une différence de dignité entre ces deux acteurs de l’entreprise ? Tous ceux qui veulent sincèrement introduire de la transparence se doivent de soutenir cet amendement.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable. Je profite de la discussion de ce premier amendement pour rappeler que cet article introduit un progrès considérable par rapport à la loi sur les nouvelles régulations économiques – adoptée quand la gauche était majoritaire – et au texte pour la confiance et la modernisation de l’économie que nous avons voté il y a deux ans : désormais, les rémunérations différées seront liées aux performances…

MM. Roland Muzeau et Jean-Pierre Brard - Mais c’est quoi, les performances ?

M. le Rapporteur général - Cela se mesure et se constate. Si l’assemblée générale des actionnaires et le conseil d’administration estiment que le dirigeant n’a pas satisfait à ses obligations de performances, les rémunérations différées qu’il était prévu de lui verser ne le seront pas.

Mme la Ministre - Le Gouvernement n’est pas favorable à cet amendement.

M. Jean-Pierre Brard - Tiens donc ! (Sourires)

Mme la Ministre - Votre amendement, Monsieur le député, vise essentiellement les mandataires sociaux, dont la rémunération est fixée par le conseil d’administration de l’entreprise. Bien entendu, si les dirigeants sont aussi liés par un contrat de travail, la rémunération prévue au contrat est incluse dans la masse salariale examinée lors de la négociation salariale globale.

M. Jean Launay - Ne perdons pas de vue ce que les Français ont retenu de l’épisode Forgeard : le montant perçu par l’intéressé, et son indécence par rapport aux 2 euros d’intéressement versés aux salariés d’EADS. Cela a provoqué un véritable choc ! Tant que pourront exister de tels décalages, il faudra aller plus loin dans le contrôle des rémunérations différées. En tout cas, le présent texte est insuffisant.

M. le Président - Sur le vote de l’amendement 169, je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

M. Jean-Pierre Brard - Il faut s’entendre sur la notion de performances : ne faudrait-il pas considérer, comme le fait la Banque centrale aux États-Unis, que la capacité du dirigeant à développer – ou, à défaut, à maintenir – l’emploi est le premier critère de performance et qu’il doit l’emporter sur l’évolution des dividendes pour estimer s’il a ou non réussi ?

Mme la Ministre - Non. La relation entre le dirigeant et les instances de l’entreprise est régie par un contrat, et c’est dans ce cadre que peut être défini un panier de critères de performances. Dès lors, on peut imaginer toute une série de critères propres à l’entreprise considérée : emploi, investissement, cours de bourse, insertion dans son environnement économique, etc. Le conseil d’administration doit rester souverain en la matière, pour décider au cas par cas, avec l’approbation des actionnaires dont il est l’émanation. Il n’appartient pas au régulateur qu’est l’État ou au législateur de gouverner la relation individuelle entre un dirigeant et sa société. L’objet de cet article 7 est d’introduire de la performance en fixant un cadre général.

M. Jean-Pierre Brard - Merci d’être aussi claire : pour vous, ce sont donc les détenteurs du capital qui doivent décider de tout !

À la majorité de 28 voix contre 12 sur 40 votants et 40 suffrages exprimés, l’amendement 169 n’est pas adopté.

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis - Par notre amendement 106, nous proposons que la convention de rémunération différée soit conclue dès le début du mandat du dirigeant. En effet, quelle valeur conférer au constat de la réalisation des objectifs s’il intervient juste après la définition de ceux-ci ?

M. le Rapporteur général - Avis défavorable, ce risque étant extrêmement limité.

Mme la Ministre - Même avis.

L'amendement 106, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean Launay - Pendant la campagne présidentielle, M. Sarkozy avait dit qu’il mettrait fin aux parachutes dorés, qu’il avait lui-même qualifiés à Agen de « forme d’abus de bien social ». Or vous nous proposez un dispositif timoré, qui ne fait qu’introduire une référence à la performance des dirigeants. Notre amendement 322 vise donc à instaurer une véritable interdiction.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable, pour les raisons précédemment exposées.

Mme la Ministre - De même.

M. le Président - Je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public sur cet amendement.

À la majorité de 28 voix contre 10 sur 38 votants et 38 suffrages exprimés, l’amendement 322 n’est pas adopté.

M. le Rapporteur général - Je retire l’amendement 81 au profit de l’amendement 1.

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis - Je fais de même pour l’amendement 107.

M. Sébastien Huyghe, rapporteur pour avis de la commission des lois - Notre amendement 1 vise à conditionner l’attribution des indemnités et avantages de départ à des conditions de performances non seulement du bénéficiaire, mais aussi de la société qu’il dirige.

Par ailleurs, Madame la ministre, j’aimerais savoir si les critères de performance seront communiqués à l’assemblée générale des actionnaires lorsqu’elle sera appelée à ratifier la convention de départ.

Mme la Ministre - Oui, ces critères feront partie du document.

Sur votre amendement, le mandataire social devant bien entendu agir dans l’intérêt de la société, je vous propose un sous-amendement 479 précisant que ses performances doivent être « appréciées au regard de celles de la société ».

M. Roland Muzeau - J’aimerais comprendre ce qu’on appelle la performance d’une entreprise. Quand M. Tchuruk a annoncé qu’il allait avoir des entreprises sans salariés, il a provoqué une flambée du cours d’Alcatel… De même, l’action Danone a fait un bond lorsque M. Riboud a annoncé la fermeture de deux entreprises Lu. Sa stratégie a en fait été de faire un bon bénéfice en vendant la fabrication de biscuits aux Américains, pour mieux racheter une autre entreprise spécialisée dans les aliments pour bébés.

Je ne connais qu’un seul dirigeant qui ait rendu ce qu’il avait reçu, c’est M. Pierre Bilger, l’ex-PDG d’Alstom…

M. le Rapporteur général - Beau geste !

M. François Brottes - Si on mesure la performance à travers la réalisation des objectifs fixés par le conseil d’administration – qui peuvent être par exemple de supprimer des emplois –, on peut se demander où est la vertu. Il serait donc important que le législateur apporte des précisions.

Mme la Ministre - Je confirme que le Gouvernement est favorable à l’appréciation de la performance du dirigeant non seulement en fonction des qualités dont il fait preuve, mais aussi au regard des performances de la société. En revanche, il ne revient pas au législateur de définir une grille de critères. Il appartient au seul conseil d’administration – où siègent deux représentants des salariés – de fixer les critères pertinents, notamment en fonction du secteur concerné, de la conjoncture, du cours des matières premières ou de la stratégie de l’entreprise.

Les amendements 81 et 107 sont retirés.

Le sous-amendement 479, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 1 ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - Sur l’amendement 414, je suis saisi d’une demande de scrutin public par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

M. François Brottes - Rappel au Règlement. Dès lors que vous refusez de définir les critères de performances, quelle sera l’orientation dominante ? Distribuer plus de dividendes, ou créer de l’emploi ? Je vous laisse deviner. Avec ce vote, le reste de l’article vient de perdre toute portée !

M. Jean-Pierre Brard - Par l’amendement 414, nous demandons une fois de plus de moraliser les pratiques. Nos conceptions de la morale divergent sans doute, de même que notre vision de l’économie et celle de la société, mais il ne faut pas confier les clefs à des actionnaires qui n’hésitent pas à passer d’une entreprise à l’autre.

Faisons prévaloir l’intérêt général ! L’objet de cet amendement est de plafonner les indemnités et les avantages des dirigeants à vingt fois le salaire moyen versé chaque mois aux salariés. Au lieu de laisser les mains libres aux actionnaires, il faut mettre un taquet ! Vous stigmatisez les dirigeants médiocres, mais vous allez laisser s’engraisser les autres fat cats !

Il est vrai que les émoluments sont aujourd’hui encadrés par la loi sur les nouvelles régulations économiques, adoptée en 2001, et que certaines rémunérations annexes sont désormais soumises au régime des conventions réglementées depuis 2005. Toutefois, malgré de multiples scandales, les rémunérations des patrons ont continué à augmenter sans justification ; elles atteignent maintenant des montants faramineux.

Pourquoi ne pas prendre comme étalon la « valeur travail » dont vous chantez sans cesse les louanges ? Songez seulement que la rémunération moyenne des dirigeants de sociétés cotées au CAC 40 s’établit en 2006 à 2,2 millions d’euros en dépit de la multiplication des plans sociaux, dont la société tout entière supporte le coût.

Nous introduirons plus de mesures en adoptant l’amendement 414, qui devrait inciter les patrons français à garder les pieds sur terre, au lieu de se perdre dans leur bulle imaginaire de chiffres.

M. le Rapporteur général - Avis défavorable.

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques  - J’ai suivi plus de réunions de Nicolas Sarkozy que vous…

M. Jean-Pierre Brard - Vous adorez les grandes messes !

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis - Cela ne choque pas le Président de la République que l’on puisse gagner de l’argent, beaucoup d’argent même, quand on dirige une entreprise. Ce qui est inadmissible en revanche, c’est qu’on touche des émoluments au moment de quitter une entreprise, surtout lorsqu’elle connaît des difficultés et qu’on a échoué.

Voilà pourquoi ce texte soumet la situation de l’entreprise et la performance de ses dirigeants à l’appréciation du conseil d’administration. Il faudra en outre l’accord de l’assemblée générale, composée de tous les actionnaires, y compris les plus petits d’entre eux, qui peuvent être des salariés.

M. François Brottes - Mais cette loi ne définit aucun critère d’évaluation !

M. Roland Muzeau - M. Tchuruk n’a pas « échoué » : Son mandat était de supprimer des emplois…

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis - Si vous trouvez honteux de gagner l’argent quand on gère normalement une entreprise, comment voulez-vous inciter des jeunes à fonder leur propre société et ainsi créer de la richesse, donc de nouveaux emplois ?

M. Jean-Pierre Brard - Entre Messier et les PME, il y a tout de même une marge !

À la majorité de 26 voix contre 6 sur 32 votants et 32 suffrages exprimés, l’amendement 414, repoussé par le Gouvernement, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis – L’écart se creuse !

M. Jean Launay - L’amendement 326 tend à interdire toute autorisation d’indemnités avant l’annonce publique de la cessation ou du changement des fonctions du bénéficiaire. Nous éviterons ainsi le renouvellement des situations aussi choquantes que celle de M. Forgeard : il est intolérable que ce dirigeant ait bénéficié d’un golden parachute après l’échec cinglant du plan Power 8, responsable de licenciements chez Airbus et de difficultés pour tous les sous-traitants, ainsi que pour d’autres entreprises qui ont souffert de la dégradation de leur environnement économique.

M. le Rapporteur général – Rejet.

Mme la Ministre - Même position.

M. François Brottes - Une fois encore, je dénonce le mutisme du rapporteur et de la ministre. Je comprends mal. N’allons-nous pas dans le même sens que le rapporteur et le Président de la République ?

Si tout est déjà décidé avant que se prononce le conseil d’administration, les dirigeants concernés pourront de toute façon réclamer leurs indemnités, même en cas de refus du conseil d’administration. Aucun compte ne sera donc tenu de la gestion de l’entreprise. Vous vous contentez d’amuser la galerie !

M. le Président – Sur l’amendement 326, je suis saisi d’une demande de scrutin public par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

À la majorité de 26 voix contre 15 sur 41 votants et 41 suffrages exprimés, l’amendement 326, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard – L’amendement 426 s’inspire des mêmes principes. Chacun doit être conscient que nous n’avons pas la même conception de la société. Vous voudriez que les sociétés anonymes, sociétés à l’intérieur de la société, puissent dicter leur loi !comme si les entreprises ne s’inscrivaient pas dans l’ensemble national ! Qu’il s’agisse d’EADS ou d’Alstom, comment accepter, quand la fibre nationale vibre et quand la seule boussole doit être l’intérêt général, que l’autorité politique abdique et laisse les entreprises décider – d’autant que, lorsqu’il y a de la casse, les dégâts collatéraux sont à la charge de la société ? Votre doctrine est ultralibérale, on le sait ; pour nous, les entreprises ont un rôle à jouer au sein de la collectivité mais les autorités politiques n’ont pas à capituler devant elles.

M. le Président – Sur l’amendement 426, je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.

M. le Rapporteur général – Avis défavorable. Les représentants du personnel siègent au conseil d’administration…

M. Jean-Pierre Brard - Avec voix consultative ! Ils pourront porter les faire-part de décès…

M. le Rapporteur général - …qui délibérera à l’arrivée et au départ du dirigeant concerné. Avis défavorable.

Mme la Ministre – Même avis.

À la majorité de 26 voix contre 15 sur 41 votants et 41 suffrages exprimés, l’amendement 426 n’est pas adopté.

M. Jean-Pierre Brard - Rappel au Règlement. Nous avons déjà bien avancé, et nous avons eu une discussion sur l’organisation de nos travaux, au cours de laquelle nous avons dit ne pas souhaiter aller trop vite. Chacun comprend les raisons politiques qui poussent la présidence à mettre le turbo mais c’est une mauvaise idée. Nous l’avons dit, nous voulons prendre le temps d’éclairer l’opinion. Il reste une vingtaine d’amendements à discuter sur l’article 7, et nombre de nos collègues veulent rejoindre leur circonscription – M. Plagnol, par exemple, qui brûle d’aller retrouver M. Beaumont (Rires sur plusieurs bancs. M. Plagnol ne dissimule pas son amusement) et que nous ne voudrions pas priver de ces retrouvailles. Il faut donc, Monsieur le Président, lever la séance. Si vous ne le décidiez pas, je demanderais une suspension de séance qui permettrait à notre groupe de se concerter avec le groupe SRC sur la conduite à tenir.

M. le Président – Je vous propose, avant de prendre une décision, d’examiner les amendements 108, 82 et 109.

M. Jean-Charles Taugourdeau, rapporteur pour avis - Je retire les amendements 108 et 109.

M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement - Le Gouvernement souhaite, si l’Assemblée en est d’accord, poursuivre l’examen de l’article jusqu’au sous-amendement 480. Ainsi la discussion du texte pourra-t-elle reprendre, lundi, par l’examen d’un amendement de M. Brard. (Assentiment)

M. Jean-Pierre Brard - Je suis sensible à cette attention.

M. le Rapporteur général - L’amendement 82 est identique à l’amendement 2 de la commission des lois. Je le retire.

M. Sébastien Huyghe, rapporteur pour avis de la commission des lois - L’amendement 2 est le pendant de l’amendement 1 pour les sociétés à directoire et à conseil de surveillance.

Mme la Ministre - Par le sous-amendement 480, et comme il l’avait fait pour les sociétés à conseil d’administration, le Gouvernement s’est attaché à faire la synthèse de vos propositions. Sous réserve de son adoption, j’exprimerai un avis favorable à l’adoption de l’amendement.

Les amendements 108, 109 et 82 sont retirés.

Le sous-amendement 480, accepté par la commission, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 2, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - J'ai reçu de M. le secrétaire d'État aux relations avec le Parlement une lettre m'informant que la suite de la discussion du projet aura lieu le lundi 16 juillet 2007, l'après-midi et le soir, à la suite du débat d'orientation budgétaire.

Prochaine séance lundi 16 juillet, à 10 heures.

La séance est levée à19 heures 5.

La Directrice du service
du compte rendu analytique,

Marie-Christine CHESNAIS

Le Compte rendu analytique
est disponible sur Internet
en moyenne deux heures après la fin de séance.

Préalablement,
est consultable une version incomplète,
actualisée au fur et à mesure du déroulement de la séance.

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