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Assemblée nationale

Compte rendu
analytique officiel

Séance du mercredi 2 juillet 2008

2ème séance
Séance de 21 heures 30
4ème séance de la session
Présidence de M. Marc Laffineur, Vice-Président

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La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

LIBÉRATION D’INGRID BETANCOURT

M. le Président – Nous venons d’apprendre la libération d’Ingrid Betancourt par l’armée colombienne, vers 19 h 25 aujourd’hui (Applaudissements sur tous les bancs). Au nom de l'Assemblée nationale, je tiens à exprimer la joie que nous éprouvons tous.

M. François Rochebloine – En effet, nous attendons cette nouvelle depuis de trop nombreuses années. En cette occasion exceptionnelle, je tiens à saluer l’action que le Président de la République a menée depuis longtemps, qui a certainement contribué au succès de cette libération. Je propose, pour la célébrer, que l'Assemblée nationale suspende ses débats pendant quelques minutes (Applaudissements).

M. Alain Vidalies – Les députés socialistes partagent la joie que M. le président a exprimée. La libération d’Ingrid Betancourt est une très grande nouvelle. La liberté, enfin, l’emporte sur la barbarie. Mme Betancourt, enlevée parce qu’elle luttait pour ses idées, a retrouvé ce plus précieux des biens : la liberté.

Dresser la liste des mérites des uns et des autres serait indécent. Partageons tous ensemble ce moment de joie républicaine, en ayant une pensée aussi pour la famille de Mme Betancourt (Applaudissements).

Mme Martine Billard – Après tant d’années de souffrance, au cours desquelles l’ensemble des forces politiques se sont mobilisées aux côtés de la famille Betancourt, nous apprenons enfin avec un immense soulagement la libération d’Ingrid Betancourt. Au-delà de cet événement si heureux, nous devons poursuivre le combat en faveur de la libération de tous les otages encore retenus par les FARC. Mme Betancourt, à l’heure de sa libération, pense certainement elle aussi à ses camarades de détention. Nul doute qu’elle continuera de lutter pour leur libération ! (Applaudissements)

M. Benoist Apparu – Comme l’ensemble de nos collègues, je me réjouis de la libération de Mme Betancourt, et j’ai une pensée émue pour sa famille. N’oublions pas tous les otages encore retenus dans le jungle colombienne. Espérons que les gouvernements se mobiliseront pour leur libération avec autant de succès qu’ils l’ont fait pour celle d’Ingrid Betancourt ! (Applaudissements)

La séance, suspendue à 21 heures 40, est reprise à 21 heures 45.

DÉMOCRATIE SOCIALE (SUITE)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail.

ART. 7

Mme Martine Billard – L’alinéa 6 de cet article prévoit que dans les entreprises de moins de deux cents salariés dans lesquelles il n’y a pas de délégué syndical, les délégués du personnel peuvent négocier et conclure des accords collectifs de travail sur des mesures dont la mise en œuvre est subordonnée par la loi à un accord collectif, sauf exceptions. L’amendement 111 rectifié propose d’étendre ces exceptions notamment aux mesures portant sur le temps de travail. Il ne convient en effet pas de négocier sur de telles mesures, qui mettent en jeu la santé des travailleurs, sans profiter de la compétence d’un délégué syndical.

M. Régis Juanico – L’amendement 191 est identique. Une exception à la possibilité de négocier, pour les représentants du personnel des entreprises de moins de deux cents salariés dépourvues de délégué syndical, est prévue pour les cas de licenciement de dix salariés dans une période de trente jours. Cette exception doit être étendue aux nouvelles négociations en matière de contingent annuel d’heures supplémentaires, de mise en œuvre des conventions de forfait en jours et en heures sur l’année et d’organisation des cycles de travail.

M. Roland Muzeau – L’amendement 254, deuxième rectification, est identique. Les dispositions de l’article 7 sont particulièrement dangereuses. Elles permettent de négocier avec les élus du personnel ou des salariés mandatés dans toutes les entreprises de moins de deux cents salariés dépourvues de représentant syndical. Une seule exception est prévue, concernant le licenciement de dix salariés en trente jours. C’est insuffisant, d’autant que la deuxième partie du texte prévoit de nouvelles négociations relatives au temps de travail. Les employeurs pourraient ainsi se passer d’accord avec les syndicats et déréglementer le temps de travail soit par décision unilatérale, soit par convention de gré à gré. Nous proposons donc d’étendre l’exception à ces nouvelles dispositions.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur de la commission des affaires culturelles – Je rappelle à M. Muzeau que depuis les amendements que la commission a adoptés, on ne peut plus décemment prétendre qu’il n’y aura pas d’accord préalable. La commission a repoussé les trois présents amendements, dans le souci justement de permettre la négociation dans l’entreprise sur ces sujets, y compris en l’absence de délégué syndical.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité – Avis défavorable.

Les amendements 111 rectifié, 191 et 254, deuxième rectification, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Benoist Apparu – L’article 7 permet de négocier dans les petites entreprises même en l’absence de délégué syndical. Une des conditions est que l’accord soit validé au niveau de la branche, mais aucun délai n’est prévu. L’amendement 206 propose que la commission paritaire de branche se prononce dans les quatre mois suivant la transmission de l’accord. À défaut, l’accord serait réputé validé.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Avis favorable. C’est une amélioration.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable.

M. Alain Vidalies – Je crois comprendre que M. Apparu souhaite que la commission paritaire de branche soit obligée de se prononcer dans ce délai. Mais en l’état, son amendement lui impose plutôt de donner un avis favorable, puisqu’il prévoit qu’elle « doit valider l’accord dans les quatre mois ». C’est bien sûr une simple erreur de plume, mais je suis étonné que la commission et le Gouvernement aient accepté d’introduire une telle disposition dans la loi française.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Je propose de modifier la rédaction. On pourrait écrire que la commission « se prononce » dans les quatre mois.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – « Se prononce sur la validité » serait mieux.

M. Benoist Apparu – Je suis d’accord.

M. le Président – L’amendement 206 rectifié se lit donc ainsi : « La commission paritaire de branche se prononce sur la validité de l’accord dans les quatre mois qui suivent sa transmission ». Le reste est inchangé .

L'amendement 206 rectifié, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Les amendements 50 et 51 sont rédactionnels.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable.

Les amendements 50 et 51 sont successivement adoptés.

Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques – Les amendements identiques 52 et 98 des deux commissions précisent que les salariés mandatés pourront non seulement conclure des accords, mais aussi les négocier préalablement.

Les amendements 52 et 98, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

M. Alain Vidalies – L’amendement 192 concerne à nouveau les exceptions à la possibilité de négocier avec des salariés mandatés.

M. Roland Muzeau – L’amendement 255, deuxième rectification, est identique.

Les amendements 192 et 255, deuxième rectification, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Les amendements 53 et 54 apportent des précisions. Le 55 est un amendement de coordination.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable.

L'amendement 53, mis aux voix, est adopté, de même que les amendements 54 et 55.

L'article 7, modifié, mis aux voix, est adopté.

M. Benoist Apparu – Je demande une courte suspension de séance.

La séance, suspendue à 21 heures 55, est reprise à 22 heures.

ART. 8

M. Alain Vidalies – Depuis plusieurs années, nous ne cessons d’invoquer l’accord dit UPA signé en décembre 2001, pour la satisfaction de tous ceux qui défendent la démocratie sociale, par toutes les organisations syndicales de salariés et par une organisation d’employeurs représentant 800 000 entreprises artisanales. Cet accord portait non sur l’organisation du dialogue social – renvoyé à une négociation ultérieure –, mais sur son financement par les petites entreprises, au moyen d’une contribution représentant 0,15 % de leur masse salariale.

Sept ans plus tard, dans un pays qui fait partie des grandes puissances mondiales et où l’on ne cesse d’invoquer la démocratie sociale et l’importance des petites entreprises, fortes de quatre millions de salariés et de patrons disposés – chose rare – à y engager leur patrimoine, cet accord reste sans effet. Pourquoi ? Parce que lorsque les grandes et moyennes entreprises, par l’intermédiaire du MEDEF et de la CGPME, refusent un progrès social, tous les coups sont permis ! Les recours judiciaires se sont succédé, et, malgré nos protestations, les gouvernements depuis 2002 n’ont cessé de s’abriter derrière ces recours qui ont été à deux reprises jusqu’à la Cour de cassation, laquelle a reconnu la validité de l’accord.

Certes, en transcrivant la position commune, ce projet devait enfin lui permettre d’être appliqué ; je vous en donne acte, Monsieur le ministre. Pour autant, nous ne sommes pas au bout de nos peines, puisque notre commission a adopté un amendement du rapporteur qui en diffère de nouveau l’application.

Selon la lettre de protestation que l’UPA a adressée à tous les parlementaires, cet amendement est « totalement inadmissible et absolument incompréhensible aux yeux des entreprises artisanales, lesquelles appellent de leurs vœux l’application d’un accord qui doit leur permettre de mutualiser le financement et d’organiser le dialogue social dans leurs branches professionnelles ». « La reporter de nouveau », poursuit la lettre, « revient à exclure du dialogue social 92 % des entreprises françaises et 37 % des salariés. Le MEDEF prétend aux parlementaires que les recours juridictionnels dont l’accord fait l’objet n’ont pas encore abouti… »

M. le Président – Veuillez conclure.

M. Alain Vidalies – J’en termine, Monsieur le président. « Le MEDEF invoque notamment le recours qu’il aurait déposé auprès de la CJCE, voire de la CEDH ; tout cela est totalement faux. »

« Les grandes entreprises et leurs représentants », conclut la lettre, « n’ont pas lieu de craindre une nouvelle charge. En outre, le MEDEF ne peut légitimement s’exprimer au nom des entreprises du secteur de l’artisanat, dont, selon toutes les juridictions, il n’est pas représentatif. Voilà pourquoi je vous demande expressément de repousser l’amendement de la commission ».

À propos de ce texte relatif au dialogue social, plusieurs orateurs ont réaffirmé l’importance des petites entreprises. Mais de même qu’il n’y a pas d’amour, seulement des preuves d’amour, nous vous invitons à traduire ces déclarations en actes : repoussez l’amendement, conformément aux attentes de quatre millions de salariés, représentés par toutes les organisations syndicales, et de 800 000 chefs d’entreprise !

Mme Laure de La Raudière – L’amendement 1656 est défendu.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Avis défavorable à cet amendement, qui relève du domaine réglementaire et non du domaine législatif.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis, pour les mêmes raisons.

L'amendement 1656, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 199 est retiré.

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques – Aux termes de l’amendement 99 rectifié, afin de permettre à l’accord collectif de décider librement des modalités de la contribution des entreprises au financement du dialogue social, « une convention ou un accord collectif de travail peut prévoir que les entreprises qui relèvent de son champ d’application contribuent au financement du dialogue social ».

En effet, la contribution peut être financière ou passer par des mises à disposition ; en outre, dans le premier cas, il appartient à l’accord définitif d’en déterminer les modalités de calcul, car la loi ne saurait obliger à l’asseoir sur la masse salariale. Voilà pourquoi nous proposons d’exclure des alinéas 26 à 28 toute référence à une contribution pécuniaire, tout en conservant, au cas où l’accord retiendrait ce type de contribution, les dispositions protectrices définissant des règles de déductibilité et de répartition.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – À titre personnel, je suis favorable à cet amendement, que la commission des affaires culturelles n’a pas pu examiner, mais qui fait tomber celui qu’elle avait adopté sur mon initiative.

Tout d’abord, je rappelle que la position commune, dans son article 15-3, fixe les règles de financement du paritarisme sans en préciser toutefois les modalités.

Ensuite, l’accord signé par l’UPA et par toutes les organisations salariales, que M. Vidalies vient d’évoquer, arrête les modalités de financement du paritarisme dans plusieurs branches professionnelles. Juridiquement validé, il fait l’objet de plusieurs recours qui n’ont pas encore abouti, notamment auprès des juridictions européennes ; je n’y reviens pas.

En outre, plusieurs entreprises contribuent déjà au financement du dialogue social selon des modalités libres, ou fixées par un accord collectif.

Enfin, il est légitime, s’agissant de cette partie du texte, de mentionner les crédits d’heures.

Je présenterai tout à l’heure avec M. Anciaux un amendement qui tend à reporter la date d’effet de cet article afin de garantir l’efficacité du dialogue.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis.

M. Pierre Morange – L’adoption de cet amendement ferait tomber l’amendement 234, cosigné par M. Tian et moi-même, et qui tend à favoriser le dynamisme et la compétitivité de nos entreprises.

Rappelons que la position commune ne précise pas les modalités de financement du dialogue social.

En outre, si nous en comprenons l’esprit, l’amendement 99 rectifié risque d’entraîner un appel d’air : les modalités définies par l’accord UPA, que leur extension à toutes les branches professionnelles permettrait de sécuriser, seraient dès lors reproduites à l’identique.

Les modalités de financement pourraient être prévues, mais ne devraient pas être opposables ; nous aimerions que le ministre nous précise sa position sur ce point. Enfin, il faut éviter que les conventions collectives s’empilent et s’additionnent, grevant le dynamisme de l’activité économique qui finance notre système de protection sociale.

M. François Rochebloine – L’UPA et d’autres organisations de PME étaient tombées d’accord sur le texte initial. Des modifications sont aujourd’hui proposées, qui recueillent l’avis favorable du Gouvernement. Je suis surpris par cette tournure des événements, au moment où nous souhaitons développer les accords entre partenaires sociaux. J’aurais mieux aimé, comme l’UPA, qu’on en reste au texte initial. Cette volte-face satisfait peut-être le MEDEF, mais il n’y a pas que lui !

M. le Président – Je suis saisi d’une demande de scrutin public sur le vote de l’amendement 199 rectifié.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La formulation actuelle de l’article 8 pose deux problèmes. Tout d’abord, il rend possible l’extension automatique de l’accord UPA à un ensemble d’acteurs économiques qui ne seraient pas concernés. D’un autre côté, il fait peser un risque pour l’UPA elle-même – avec M. Anciaux, nous nous en sommes entretenus à deux reprises avec son président –, à savoir que le contenu de l’accord signé en 2001 avec cinq organisations syndicales se perde dans les sables.

Face à ces risques, l’amendement de M. Anciaux, auquel je me rallie, crée, en relation avec l’amendement 61 qui viendra un peu plus tard en discussion, un système reposant sur deux piliers : l’un consistant à supprimer la référence automatique à la masse salariale, pour laisser la liberté à ceux qui doivent signer cette convention d’asseoir leur contribution sur la référence de leur choix ; l’autre consistant à leur laisser le temps – à savoir un an – pour définir les modalités les plus appropriées : maintenir les accords UPA dans les branches où ils existent actuellement – comme je le souhaite –, les étendre si besoin est… Nous ne souhaitons pas supprimer ces accords, mais il faut prévenir leur extension à des branches qui ne seraient pas concernées.

M. François Rochebloine – Vous rayez un accord !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Non : nous disons que ces conventions peuvent être validées dans le cadre d’une négociation patronale dans l’année. Je ne vois pas pourquoi, si une loi était votée dans un an, ces accords ne pourraient être validés.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Le Gouvernement souhaite que l’amendement de M. Anciaux soit adopté. L’article 8 aurait pu ne pas être inscrit dans ce texte ; j’aurais pu, en effet, étendre l’accord UPA de mon propre chef, mais il n’y aurait alors eu aucune garantie que les entreprises ne paient pas deux fois, tant le 0,15 % que les dépenses liées aux délégués du personnel ou aux comités d’entreprise. Nous avons voulu éviter tout doublon, et l’amendement est celui qui apporte toutes les garanties nécessaires ; il opère une clarification d’ensemble, tout en étant juridiquement sécurisé, contrairement à l’amendement de MM. Tian et Morange.

Monsieur Morange, il n’y aura pas de nouvelles contributions légales qui viendront s’empiler sur celles déjà existantes, et les conventions collectives ne peuvent pas non plus s’additionner sur un même champ. Il ne s’agit pas, aujourd’hui, de créer une nouvelle contribution, puisque, dans l’artisanat – je tiens à votre disposition le formulaire de versement des cotisations sur masse salariale de 2007, notamment pour la charcuterie –, le 0,15 % existe et des doublons sont donc actuellement possibles. Cela ne sera plus le cas après l’adoption de ce texte.

Si l’accord a fait, depuis 2001, l’objet de recours, c’est parce que le MEDEF, mais aussi d’autres organisations, craignaient une contagion. Cela ne sera pas non plus possible, et dès lors les fantasmes se dissiperont. Voter l’article 8 tel qu’amendé par M. Anciaux, c’est la seule façon d’apporter les clarifications nécessaires, sans prélèvement obligatoire, et sans forcer non plus aucune organisation patronale ou syndicale à négocier ou à signer un accord de ce type ; ce sont des dispositions optionnelles…

M. Régis Juanico – C’est toujours optionnel !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Au-delà du secteur de l’artisanat, dans de nombreux domaines, des contributions de ce type existent. La garantie que vous apporterez, c’est que les contributions ne s’additionnent pas (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles – Nous avons travaillé avec les rapporteurs sur ces propositions pendant quinze jours. C’est la seule synthèse qui ne ferme pas les portes à l’UPA. Je demande à nos collègues de l’adopter.

À la majorité de 57 voix contre 27 sur 84 votants et 84 suffrages exprimés, l’amendement 99 rectifié est adopté.

M. le Président – Par conséquent, les amendements 234, 56, 57, 58, 198 rectifié, 235 et 59 tombent.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – De nombreuses organisations syndicales et patronales ont exprimé le besoin d’une plus grande transparence quant aux moyens mis à leur disposition. L’amendement 60 rectifié précise donc les modalités de l’information fournie aux salariés par les employeurs sur les moyens en personnel que les entreprises consentent aux organisations syndicales et patronales.

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis – L’amendement 100 rectifié est identique.

Les amendements 60 rectifié et 100 rectifié, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 61, que j’ai évoqué, complète l’amendement 99 rectifié, en disposant que la section concernant le financement du paritarisme n’entrera en vigueur que le 30 juin 2009. Il convient de laisser le temps aux partenaires sociaux pour négocier les modalités de ce financement.

M. le Président – Je suis saisi par le groupe socialiste d’une demande de scrutin public sur le vote de l’amendement 61.

M. Alain Vidalies – Cet amendement est le plus préoccupant pour l’UPA, puisqu’il reporte l’entrée en vigueur de l’accord signé en 2001. Je ne comprends pas, alors que l’on prétend s’intéresser au financement du dialogue social, que l’on empêche ce qui existe de s’appliquer ! C’est la raison pour laquelle j’ai demandé un scrutin public. Pourquoi différer l’application de ces dispositions ? Les artisans et leurs salariés ne le comprendraient pas.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis favorable.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Vous ne pouvez pas dire, Monsieur Vidalies, que l’application des accords sera reportée d’un an : vous êtes assez fin juriste pour savoir qu’ils n’entreront pas en vigueur tant qu’il y aura des recours pendants devant la justice.

Je rappelle en outre que nous devons trouver un équilibre. Vous ne voulez que du bien à l’artisanat – je n’en doute pas. Toutefois, il me semble que nous ne pourrons satisfaire les différents intérêts en cause qu’en adoptant cet amendement.

À la majorité de 47 voix contre 32 sur 79 votants et 79 suffrages exprimés, l’amendement 61, mis aux voix, est adopté.

L'article 8, modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 9

M. Pierre Morange – Dans la rédaction actuelle du texte, les critères de représentativité en vigueur au niveau interprofessionnel seront maintenus pendant une période transitoire de cinq ans, et de nouvelles organisations syndicales pourront être reconnues à tout moment. L’amendement 200 tend à supprimer cette dernière possibilité, qui semble contradictoire avec la position commune.

Nous savons que la volonté du Gouvernement est de ne pas fermer le paysage syndical, mais nous aimerions tout de même quelques précisions.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La commission a repoussé à regret cet amendement, car il supprime la référence aux organisations dont la représentativité est fondée sur les critères mentionnés à l’article L. 2121-1 du code du travail. J’espère que vous accepterez de le retirer, Monsieur Morange ; à défaut, avis défavorable.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Avis défavorable. Si cet amendement était adopté, la situation serait entièrement figée. Or, on pourrait assister à l’émergence de nouveaux syndicats, de nature réformiste, pendant la période transitoire, ce qui peut présenter un intérêt. N’empêchons pas les salariés de choisir eux-mêmes le nombre et la force des organisations syndicales.

L'amendement 200 est retiré.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Les amendements 62 à 65 sont rédactionnels.

Les amendements 62 à 65, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 66 est de clarification.

L'amendement 66, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Les amendements 67 à 73 sont rédactionnels.

Les amendements 67 à 73, acceptés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 74 rectifié permettra aux organisations syndicales actuellement considérées comme représentatives de conserver ce statut pendant la période transitoire.

M. Alain Vidalies – L’amendement 193 a le même objet.

M. Roland Muzeau – Ce que vous proposez n’est pas conforme à la position commune… J’ai sous les yeux une note de la CFDT, qui s’étonne du contenu de l’article 9. N’instaurons pas des systèmes parallèles.

L'amendement 74 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – L’amendement 193 tombe.

L'article 9 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 10

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 75 rectifié concerne les cas où la validation des accords s’effectue selon les règles dérogatoires prévues par la loi du 4 mai 2004, notamment dans la branche du remorquage maritime.

L'amendement 75 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 76 rectifié a le même objet.

L'amendement 76 rectifié, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

M. le Président – Les amendements 194 et 195 tombent.

L'article 10 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 11

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – L’amendement 77 apporte une précision.

L'amendement 77, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 11 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 12

L'article 12, mis aux voix, est adopté.

ART. 13

L'article 13, mis aux voix, est adopté.

ART. 14

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis – Alors que le projet de loi ne prévoit qu’une seule date butoir pour l’application des nouvelles dispositions relatives à la transparence financière et au contrôle des comptes, à savoir le quatrième exercice comptable à partir de l’entrée en vigueur de la loi, il serait possible d’aller plus vite dans certains cas, notamment pour l’obligation de tenir des comptes. L’amendement 101 rectifié de notre commission prévoit une application échelonnée du dispositif entre 2009 et 2012.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La commission des affaires culturelles a adopté un amendement 78 rectifié qui est identique.

Les amendements 78 rectifié et 101 rectifié, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

L'article 14 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 15

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur L’amendement 273 tire les conséquences des amendements adoptés à l’article 2.

L'amendement 273, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

L'article 15 ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L'ART. 15

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis – L’amendement 102 rend obligatoire la rémunération des congés de formation économique et sociale et de formation syndicale au cours du mois où ils sont pris.

L'amendement 102, accepté par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté.

AVANT L'ART. 16

M. Alain Vidalies – Nous devrions finir nos travaux à cet instant, puisque ici s’arrête la transcription de l’accord. Nous allons maintenant entrer dans un autre monde. Au nom du groupe socialiste, je vous demande pour préparer ce voyage (Sourires) une suspension de séance de dix minutes.

M. le Président – Elle est de droit.

La séance, suspendue à 21 heures 45, est reprise à 23 heures.

Mme Martine Billard – Avant de présenter mon amendement, permettez-moi de compléter l’information donnée en début de séance : outre Ingrid Betancourt, quatorze otages ont été libérés.

Mon amendement 171 vise à supprimer le titre II. En effet la position commune du 9 avril portait sur la représentativité syndicale, qui fait l’objet du titre I ; le titre II, qui porte sur le temps de travail, fait l’unanimité des syndicats contre elle.

Lors du débat sur la loi de modernisation du marché du travail, Monsieur le ministre, vous aviez déclaré que « dans une société moderne », il fallait « privilégier la voie de la négociation, voire de la concertation selon les sujets », que le rôle du politique n’était « pas forcément de tout faire lui-même » et qu’il fallait « faire confiance aux partenaires sociaux ». Sans doute votre conception de la modernité a-t-elle beaucoup changé depuis : la voie de la négociation ne vous convient plus, vous ne faites plus confiance aux partenaires sociaux ; vous souhaiteriez de nouveaux syndicats réformistes car les confédérations syndicales existantes ne vous conviennent pas, n’étant pas disposées à signer quand vous en donnez l’ordre.

Ce titre II doit être rapproché d’un document intitulé « Moderniser le code du travail : les 44 propositions du MEDEF », qui date de mars 2004. Le point 23 sur la durée du travail était très clair : le MEDEF indiquait que « la durée du travail est le domaine par excellence qui relève de la négociation entre partenaires sociaux au plus près du terrain » et voulait que le code du travail ne reprenne que les dispositions de la directive européenne du 27 novembre 1993. Vous n’avez pas pu aller jusque là : le Président de la République ayant fait toute sa campagne sur le thème « travailler plus pour gagner plus », il n’était pas possible de supprimer la règle légale des 35 heures sans supprimer du même coup le seuil de déclenchement des heures supplémentaires. Vous la maintenez donc dans le code, mais toute l’astuce est de la détruire par le bais des négociations d’entreprise.

M. Alain Vidalies – Les articles de ce titre s’organisent autour de principes sur lesquels nous ne pouvons vous suivre.

Le premier, c’est le choix de l’entreprise comme niveau prééminent, l’accord de branche n’intervenant plus que de manière supplétive. Même si un accord de branche comporte des dispositions plus favorables pour les salariés, l’accord d’entreprise s’appliquera – autrement dit, le principe de faveur n’existe plus ; du point de vue de la hiérarchie des normes sociales, c’est une véritable révolution. Au moment où les deux plus grandes organisations syndicales signent un accord très important, vous leur donnez un très mauvais signal.

Monsieur le ministre, vous n’avez pas répondu aux deux observations juridiques que j’ai faites en défendant l’exception d’irrecevabilité.

La première concerne la jurisprudence de la Cour de justice européenne. Celle-ci considère que les normes sociales nationales, pour pouvoir être opposées à des entreprises qui voudraient s’installer sur notre territoire, doivent être de portée et d’application générales. N’avoir à opposer que des accords d’entreprise est donc très dangereux.

La seconde concerne le repos compensateur. En le supprimant pour en faire un élément de négociation dans l’entreprise, on s’attaque à des règles qui datent des années 1975 – 1978 et qui, destinées à protéger la santé des travailleurs, n’ont rien à voir avec les règles d’organisation du temps de travail ; or dans une décision rendue en 2004, le Conseil constitutionnel a considéré que les questions de santé publique ne peuvent pas être déléguées par le législateur à la négociation collective.

C’est pourquoi j’ai déposé mon amendement 276, qui tend à supprimer le titre II.

M. Jean-Marc Ayrault – Nous sommes à un moment très important de l’examen de ce projet. La question est particulièrement grave : il ne s’agit pas seulement des 35 heures, mais d’un changement profond des règles du pacte social. Quelle que soit l’habileté de M. Bertrand, nous n’accepterons pas qu’il soit entériné comme cela, au cours d’une séance de nuit ; nous ne serons pas complices.

Monsieur le ministre, en réponse à une question d’actualité du groupe socialiste sur la directive « Travail », que vous avez considérée comme une grande avancée sociale européenne, vous n’avez pas dit la vérité. Vous voulez imposer de nouvelles relations sociales, du « gré à gré » entre le salarié et son employeur, en réglant leur sort aux conventions collectives et aux accords de branche.

Nous refuserons toute fragilisation des salariés français. Les négociations par entreprise ne sont acceptables qu’à la condition qu’elles demeurent protégées par le code du travail et les accords de branche. Or, c’est cette sécurité que vous voulez détruire, de même que vous souhaitez étendre à tous les salariés le forfait temps applicable aux cadres.

Nous ne pouvons donc entamer ce débat sans nous accorder sur la méthode. Pour réunir mon groupe, je demande une suspension de séance d’une demi-heure (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). La question est trop grave : tôt ou tard vous devrez rendre compte de ce que vous faites aujourd’hui !

Plusieurs députés du groupe UMP – Oui !

M. Benoist Apparu – Et nous serons fiers de le faire !

Mme Laure de La Raudière – Quand rendrez-vous des comptes sur les trente-cinq heures ?

M. Jean-Marc Ayrault – À force de rechercher une victoire idéologique, vous détruisez les acquis du mouvement ouvrier depuis le Front populaire !

M. Daniel Fasquelle – Caricature !

M. Jean-Marc Ayrault – La semaine de travail comporterait-elle quarante heures que vous mèneriez la même bataille ! Je vous demande donc une suspension non pas de quelques instants, mais d’une demi-heure, Monsieur le président.

M. le Président – La suspension est de droit. Je vous accorde quinze minutes.

La séance, suspendue à 23 h 15, est reprise à 23 h 40.

M. Christophe Sirugue – L’amendement 277 est identique aux précédents.

S’ouvre ici une nouvelle étape de la discussion, bien différente de la précédente qui aurait pu aboutir à un accord sur la définition de la représentativité. Cette seconde partie du texte porte un mauvais coup au dialogue social, et constitue un détricotage sans précédent du code du travail. C’est un choix idéologique beaucoup plus que de raison car si ces mesures permettaient d’améliorer la situation économique, cela se saurait. Voilà le septième texte que cette majorité nous soumet en six ans pour faire croire que la fin de la réduction du temps de travail permettrait de retrouver force et compétitivité. En janvier 2003, vous avez commencé avec la loi Fillon qui a porté le contingent des heures supplémentaires de 130 à 180 heures, puis vous êtes allés jusqu’à 220. Vous voulez nous faire croire que cela a permis d’améliorer les chiffres de l’emploi, mais chacun sait bien que ceux-ci s’expliquent pour une bonne part par les évolutions démographiques. Vous avez promis des merveilles des défiscalisations et des allégements de cotisation, mais ces mesures n’ont eu pour résultat que de creuser les déficits de l’État et de la protection sociale. Vous avez prétendu agir pour le pouvoir d’achat, mais les revendications n’ont jamais été aussi fortes à ce sujet.

Non, ce choix n’est pas autre chose qu’un choix idéologique. Vous privilégiez la discussion dans l’entreprise comme si celle-ci était le lieu adéquat, alors que ce dont nous avons besoin, c’est de sécuriser la relation des salariés avec leur employeur. Vous organisez une société de l’individualisme, dans laquelle les accords collectifs seront mis de côté au profit du gré à gré. Les protections que les générations successives ont édifiées au fil du temps sont balayées, en plein mois de juillet, en pleine nuit (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP) – comme si vous aviez un peu honte tout de même (Exclamations sur les bancs du groupe UMP). Il faudra que vous défendiez vos choix devant les salariés de ce pays, qui vous ont déjà signifié en mars ce qu’ils pensaient de votre politique, mais vous avez ignoré le message.

Et vous ne vous arrêtez pas à la libéralisation des heures supplémentaires : le repos compensateur, qui est un acquis beaucoup plus ancien que les 35 heures, est aussi balayé d’un revers de la main.

M. le Président – Il faut conclure, Monsieur Sirugue.

M. Christophe Sirugue – Toute cette seconde partie propose en fait un choix de société.

M. Benoist Apparu – Le rapport avec l’amendement ?

M. Christophe Sirugue – Nous ne partageons pas ce choix, et les Français vous ont signifié qu’eux non plus.

Plusieurs députés du groupe UMP – Quand ça ?

M. Christophe Sirugue – C’est pourquoi nous souhaitons que l’ensemble de ces mesures soient supprimées (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

M. Jean-Patrick Gille – L’amendement 278 est identique.

M. Jean Mallot – L’amendement 279 aussi. Il s’agit de supprimer la partie scélérate du texte, celle qui viole la parole donnée, qui foule aux pieds la négociation sociale. Le 18 juin 2007, le Gouvernement a invité les partenaires sociaux à négocier sur les critères de représentativité. En décembre, il refermait le piège en leur demandant d’aborder la question du financement, mais aussi celle du temps de travail.

Par ce projet, le Gouvernement est allé au-delà des conclusions de la négociation sociale. Comme je vous l’ai rappelé cet après-midi, Monsieur le ministre, si nous nous étions abstenus sur le projet portant transcription de l’ANI – dont vous souhaitiez qu’il soit adopté à l’unanimité –, c’est parce qu’il ne retenait de la « flexicurité à la française » que la flexibilité, au détriment de la sécurité. Le respect des partenaires sociaux, au nom duquel vous vous en étiez alors remis à la sagesse de l’Assemblée sur l’un de mes amendements, est aujourd’hui oublié !

J’ai d’abord cru qu’en profitant de l’occasion pour rouler les partenaires sociaux dans la farine par l’ajout subreptice d’une seconde partie, vous jouiez aux apprentis sorciers. Mais l’apprenti sorcier est celui qui déchaîne des événements dont il ne sera pas capable d’enrayer le cours alors que vous, vous savez fort bien ce que vous faites !

M. Benoist Apparu – Et nous l’assumons !

M. Jean Mallot – Vous voulez instaurer la société du dumping social, de la concurrence généralisée. De même, en permettant à chacun, y compris des fonctionnaires, de s’instituer auto-entrepreneur, la loi de modernisation de l’économie – dont M. Brottes pourrait nous parler – revenait à légaliser le travail au noir ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP)

M. Jean-Paul Anciaux, rapporteur pour avis – C’est la liberté !

M. Jean Mallot – Vous pouvez bien vous énerver : vous avez voté ces dispositions ! (Même mouvement)

Dans cette seconde partie, comme l’a rappelé M. Sirugue, vous allez jusqu’à remettre en cause les dispositions qui protègent la santé des travailleurs ! (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR ; protestations sur les bancs du groupe UMP) Assumez donc vos intentions !

De même, les franchises médicales instaurées par le dernier PLFSS confient aux malades le financement des dépenses liées à leur maladie !

M. Philippe Vitel – Hors sujet !

M. Jean Mallot – Non : il s’agit du même débat de société ! Vous voulez changer la société française…

Plusieurs députés du groupe UMP – Eh oui !

M. Jean Mallot – …mais de cela, nous ne voulons pas !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Et voilà !

MM. Benoist Apparu et Daniel Fasquelle – Conservateurs !

M. le Président – Mes chers collègues, seul M. Mallot a la parole.

M. Jean Mallot – Merci, Monsieur le président. Non, nous ne voulons pas de cette société individualiste, où règne une concurrence généralisée ! Si une entreprise arrache un accord modifiant le contingent d’heures supplémentaires ou revoyant les salaires à la baisse, de quelle marge les salariés d’une entreprise voisine et concurrente disposeront-ils pour négocier ? Ils seront eux aussi broyés !

M. le Président – Veuillez conclure.

M. Jean Mallot – Voilà pourquoi nous combattrons votre projet de loi (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC).

Mme Danièle Hoffman-Rispal – Je défends l’amendement 280. La conception de la démocratie et du dialogue social que vous défendez depuis hier ne surprendra pas les parlementaires qui prennent le temps d’écouter les partenaires sociaux. De fait, vos attaques répétées contre la législation sociale nous ont fourni l’occasion de les entendre à de nombreuses reprises. Selon eux, les termes de l’offre raisonnable d’emploi, qui devaient être négociés, ont été définis unilatéralement par un projet de loi scandaleux, bientôt soumis à notre Assemblée. De même, après leur avoir détaillé le menu il y a un an, sous la forme d’un document d’orientation les invitant à négocier sur les critères de représentativité, vous avez ajouté à la commande, en décembre 2007, le financement des organisations syndicales et le temps de travail, avant de leur présenter une addition surprise qui ne retient de la position commune que ce qui vous arrange. La douloureuse ne saurait mieux mériter son nom !

On comprend que votre bonne foi laisse désormais sceptiques des partenaires sociaux que vous ne cessez d’invoquer. Peut-être décréterez-vous une baisse des salaires à la faveur de la négociation sur la pénibilité du travail qu’ils s’apprêtaient à entamer… En supprimant le titre II, vous pourriez reconquérir leur confiance, ou du moins leur donner, comme à l’opposition, un gage de bonne volonté.

Ainsi François Chérèque évoque-t-il « une faute grave du pouvoir » et une « confiance difficile à ressusciter » ; Bernard Thibaut, un « passage en force qui suggère que nous ne servons à rien » ; Jean-Claude Mailly, « des mécontentements qui ne pourront éternellement continuer de s’accumuler sans produire une explosion sociale ». Selon la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment elle-même, la négociation du temps de travail au niveau de l’entreprise – à propos de laquelle vous ne nous avez pas répondu hier soir, Monsieur le ministre – est un non-sens pour les petites entreprises, où elle risque de semer la panique. Quant à Mme Parisot, elle parle d’une victoire à la Pyrrhus !

En somme, deux ans après que le Gouvernement s’est solennellement engagé à saisir les partenaires sociaux avant la discussion de tout projet de loi touchant au code du travail, les masques tombent et les illusions des syndicats – même signataires de la position commune – se dissipent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

M. Régis Juanico – L’amendement 282 est identique.

Mme Catherine Coutelle – Je défends l’amendement 288, identique. Nous l’avons dit hier au cours de la discussion générale, la seconde partie de ce texte est la plus problématique, car elle trahit le dialogue social. On est loin de la position commune, qui se contentait d’autoriser, sous réserve d’un accord majoritaire d’entreprise, des dérogations expérimentales à certains contingents d’heures supplémentaires ! La protection assurée par les conventions collectives de branche disparaît, conformément à l’esprit de la loi Fillon de 2004 sur le dialogue social, qui remettait en cause la hiérarchie des normes. En somme, au-delà des lois sur les 35 heures, il y va du maintien de règles collectives de référence en matière de temps de travail et de droit du travail.

Nous l’avons montré hier, le texte obéit, comme tous vos projets, à un double objectif de dérégulation et de valorisation de la concurrence. Sa logique politique consiste à faire des droits sociaux un objet de concurrence entre les entreprises, dans le droit fil de la loi de modernisation de l’économie, dont les dispositions sur l’auto-entrepreneur créent une concurrence entre les petites entreprises et les entreprises artisanales, sans garantie pour le client, sans statut ni contribution sociale. Les assemblées générales des chambres de métiers ont beaucoup à dire sur le sujet !

M. François Brottes – Scandale !

Mme Catherine Coutelle – En somme, vous vous efforcez de convaincre les salariés que l’on ne remporte la compétition économique qu’au détriment des droits sociaux qui les protègent ! Votre projet réduit les rapports sociaux à une relation individuelle entre l’employeur et chaque salarié ; ainsi, les conventions de forfaits-heure, semaine ou mois applicables à tous les salariés développent le gré à gré de la défiscalisation des heures supplémentaires – sans attendre le rapport dont cette expérimentation devait, aux termes de la loi TEPA, faire l’objet avant de pouvoir être étendue, et qui doit être remis au Parlement fin 2008 !

En outre, si le texte maintient la durée légale du travail, entre celle-ci et les différents maxima, tout devient possible par accord d’entreprise, voire par accord individuel, ou encore du seul fait du chef d’entreprise en l’absence d’accord d’entreprise ou de délégués ! Ainsi, cette partie du texte aggrave la précarité des salariés, la dégradation de leurs conditions de travail et l’inégalité du rapport de force, en autorisant une durée du travail à la carte, entreprise par entreprise, voire salarié par salarié ! Voilà pourquoi nous ne saurions accepter, en ce début d’été, ce mauvais coup porté à notre droit du travail (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR).

M. Marc Dolez – L’amendement 290 est identique.

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – La commission a repoussé ces amendements, ce qui n’étonnera personne (« Bravo ! » sur les bancs du groupe UMP ; exclamations sur les bancs du groupe SRC).

M. Jean Mallot – Sans débat !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Monsieur Mallot, comment pouvez-vous dire cela ? Ces amendements ont été débattus…

M. Jean Mallot – Cet après-midi, pendant la séance !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Non, la semaine dernière, mais vous n’étiez pas là !

Nos divergences en matière de choix politiques n’ont rien de surprenant. Vous nous reprochez d’avancer masqués, mais nous ne dissimulons pas nos intentions, ce qui vous a d’ailleurs suffisamment donné l’occasion de brocarder, en même temps que les partenaires sociaux, le groupe UMP et le Gouvernement !

Mme Laure de La Raudière et M. Benoist Apparu – Et nous assumons !

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – Ne négligeons pas la tendance constante – que j’avais soulignée en commission, et à laquelle nous pourrions réfléchir ensemble – au rééquilibrage entre les dimensions législative et contractuelle du code du travail (Exclamations sur les bancs du groupe SRC). Vous pouvez rire, Madame Lebranchu : les lois Auroux elles-mêmes en relevaient !

M. Régis Juanico – Et la hiérarchie des normes ?

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – En apportant davantage de souplesse tout en maintenant des dispositions contractuelles – et vous ne pouvez ignorer les amendements que la commission a adoptés à cette fin –, le texte demeure équilibré.

Enfin, aux termes de l’article 17, alinéa 2, de la position commune – que l’on commente beaucoup, mais qu’on ne lit guère –, « les entreprises transmettront les accords conclus dans le cadre du présent article aux branches dont elles relèvent, qui en assureront une évaluation paritaire ». Cela ne signifie nullement que les accords d’entreprise sont nécessairement soumis aux accords de branche !

Je l’ai dit en commission : aucun désaccord de fond ne nous oppose aux signataires de la position commune…

M. Jean Mallot – Ce n’est pas ce qu’ils nous ont dit !

M. Roland Muzeau – Pourquoi les avez-vous trahis ?

M. Jean-Frédéric Poisson, rapporteur – …quant à la possibilité de revoir les modes de calcul des contingents d’heures supplémentaires. En revanche, il y a désaccord entre nous : vous souhaitez que les partenaires sociaux le fassent à titre expérimental, et nous qu’ils le fassent à titre opérationnel. C’est pourquoi la commission a repoussé ces amendements de suppression.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail – Même avis.

M. Jean-Marc Ayrault – Monsieur le Président, vous comprenez la gravité des circonstances dans lesquelles nous nous trouvons (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC). Chers collègues, vous pouvez bien ironiser, mais êtes-vous crédibles, alors que la CGT, la CFDT, FO, l’UNSA, la CFTC, la CGC sont contre les dispositions que vous présentez ? Vous pouvez chercher toutes les arguties, tous les artifices : vous n’êtes pas crédibles ! (Même mouvement). Assumez votre responsabilité…

M. Benoist Apparu – Nous l’assumons !

M. Jean-Marc Ayrault – Assumez-la jusqu'au bout ! Lorsque M. Devedjian a dit, un jour, la vérité, ses amis de l’UMP lui sont tombés sur le dos. Vous êtes en train de casser le droit du travail en France.

Monsieur le Président, compte tenu de la gravité des circonstances,…

M. Jean Leonetti – Il est interdit de rire !

M. Jean-Marc Ayrault – …nous demandons, au titre de l’article 61 du Règlement, la vérification du quorum avant de procéder au vote.

M. le Président – Je suis saisi par le président du groupe SRC d’une demande, faite en application de l’article 61 du Règlement, tendant à vérifier le quorum avant de procéder au vote sur les amendements identiques.

Je constate que le quorum n’est pas atteint.

M. Jean-François Copé – Monsieur Ayrault, sur ce sujet, nous sommes pleinement dans nos convictions, et nous ne faisons rien d’autre qu’appliquer les engagements que nous avons pris devant les Français, s’agissant du temps de travail et du pouvoir d’achat (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR). Et contrairement à ce que vous dites, nous avons à cœur la qualité du dialogue social.

Vous aussi, assumez ! Comme vous allez participer à un bureau politique, je voudrais vous proposer d’ajouter un point à votre ordre du jour. Peut-être pourriez-vous trouver le temps, entre deux injures à M. Sarkozy, de réfléchir à votre position sur la montée de l’extrême gauche en France,… (Exclamations sur les bancs du groupe SRC et du groupe GDR)

M. Régis Juanico – Hors sujet !

M. Jean-François Copé – …sur la manière dont se comporte M. Besancenot, qui accueille M. Rouillan à bras ouverts (Même mouvement). Nous aimerions savoir si vous avez prévu de nouer des alliances électorales avec ce nouveau parti, car ce ne serait pas alors des 35 heures que nous parlerions, mais de bien autre chose !

M. François Brottes – C’est vous qui allumez les incendies !

M. Jean-François Copé – Nous sommes déterminés, quant à nous, à continuer à réformer la France, et nous attendons toujours vos propositions pour mener les réformes dont notre pays a besoin ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC)

M. le Président – J’ai constaté que le quorum n’était pas atteint et je vais donc, compte tenu de l’heure, renvoyer le vote à la séance de demain matin, qui débutera par le scrutin public sur ces amendements. Avant cela, vous avez la parole, Monsieur Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault – Monsieur le Président, merci d’avoir constaté que le quorum n’était pas atteint. Je m’étonne cependant que, l’ayant fait, vous ayez ensuite donné la parole à M. Copé…

M. Jean-François Copé – C’est la démocratie !

M. Jean-Marc Ayrault – Vous avez certes le droit de vous exprimer, cher collègue. Souffrez cependant que je vous réponde, puisque vous m’avez mis en cause. Le dialogue entre MM. Rouillan et Besancenot, je vous le laisse ! (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP et du groupe NC) Nous, nous ne nous contentons pas de manifester dans la rue, nous défendons le monde du travail. Nous l’avons fait ce soir, nous le ferons demain et les jours suivants. Car vous êtes en train de casser tous les acquis des salariés. Elle est là, votre responsabilité ! Et je ne suis pas surpris que M. Bertrand n’ait pas voulu nous répondre, car la vérité est bien gênante. Nous l’avons dite avec force, et nous continuerons à le faire. Alors, oui, assumez vos responsabilités ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC)

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu ce matin, jeudi 3 juillet, à 9 heures 30.

La séance est levée à 0 heure 5.

Le Directeur du service
du compte rendu analytique,

Michel Kerautret

© Assemblée nationale