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Edition J.O. - débats de la séance
Articles, amendements, annexes

Assemblée nationale
XIIIe législature
Deuxième session extraordinaire de 2007-2008

Compte rendu
intégral

Première séance du jeudi 25 septembre 2008

SOMMAIRE ÉLECTRONIQUE

SOMMAIRE


Présidence de M. Marc Laffineur

1. Revenus du travail

Après l’article 2 (suite)

Amendements nos 7 deuxième rectification, 39 rectifié, 13 rectifié, 1813 (sous-amendement), 28, 29 rectifié, 42, 10 rectifié, 30, 15 rectifié, 53 à 73, 432 à 452, 1168 à 1189

Article 3

M. Lionel Tardy

M. Xavier Bertrand, ministre du travail

M. Jérôme Cahuzac

M. Christian Eckert

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales

Mme Marisol Touraine

M. Xavier Bertrand, ministre du travail

M. Alain Vidalies

M. Marcel Rogemont

M. Jean Mallot

M. Jean-Pierre Brard

M. Francis Vercamer

M. Roland Muzeau

Amendement no 1500

Rappel au règlement

M. Jean-Pierre Brard

Suspension et reprise de la séance

Rappel au règlement

M. Jean-Pierre Brard

Reprise de la discussion

Amendements nos 31, 1782, 1817 rectifié (sous-amendement)

Rappel au règlement

M. Jean-Pierre Brard

Suspension et reprise de la séance

Amendements nos 1669 rectifié à 1690 rectifié, 1691 rectifié à 1712 rectifié, 1713 rectifié à 1734 rectifié, 642 à 662, 32, 663 à 683

Après l’article 3

Amendements nos 180 à 200, 1050 à 1097, 159 à 179, 138 à 158, 46, 222 à 242, 1002 à 1049, 243 à 263, 1581 à 1602, 1603 à 1624, 1625 à 1646, 1647 à 1668

Article 4

M. Xavier Bertrand, ministre du travail

M. Jean-Pierre Brard

M. Christian Eckert

Suspension et reprise de la séance

Rappel au règlement

M. Jean-Pierre Brard

Reprise de la discussion

M. Alain Vidalies

Amendements nos 705 à 725, 684 à 704, 1502 rectifié, 44 rectifié, 1507, 33, 747 à 767

Après l’article 4

Amendements nos 1558 à 1579, 768 à 788, 726 à 746

Article 5

M. Roland Muzeau

Amendements nos 789, 34, 1735 à 1756, 35, 36, 1783, 37, 1757 à 1778, 1454 à 1475

Après l’article 5

Amendements nos 1514 à 1535, 264 à 284, 285 à 305

Explications de vote et vote sur l’ensemble

M. Christian Eckert, M. Jean-Pierre Brard, M. Francis Vercamer, M. François Cornut-Gentille

2. Ordre du jour de la prochaine séance


Présidence de M. Marc Laffineur,
vice-président

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures trente.)

1

Revenus du travail

Suite de la discussion, après déclaration d’urgence, d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi en faveur des revenus du travail (nos 1096, 1107, 1106, 1108).

Après l’article 2 (suite)

M. le président. Hier soir, le vote sur les amendements identiques nos 27 et 41, tendant à introduire un article additionnel après l’article 2, et sur le sous-amendement n° 1819 a été reporté en application de l’article 61, alinéa 3, du règlement.

Je vais d’abord mettre aux voix le sous-amendement, auquel la commission et le Gouvernement ont donné un avis favorable.

(Le sous-amendement n° 1819 est adopté.)

M. le président. Sur les amendements nos 27 et 41, le Gouvernement lève-t-il le gage ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité. Oui, monsieur le président.

(Les amendements identiques nos 27 et 41, sous-amendés et modifiés par la suppression du gage, sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 9 tombe.

Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 7, deuxième rectification, 39 rectifié et 13 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune et faisant l’objet de sous-amendements.

Les amendements nos 7, deuxième rectification, et 39 rectifié sont identiques.

La parole est à M. Louis Giscard d’Estaing, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du plan.

M. Louis Giscard d’Estaing, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du plan. L’amendement n° 7, deuxième rectification, vise à rehausser le seuil permettant aux chefs d’entreprise de bénéficier de l’intéressement et des plans d’épargne salariale. Reprenant la définition européenne de la PME, il le fait passer de 100 à 250 salariés. Dans la situation actuelle, les chefs d’entreprise et les mandataires sociaux des entreprises de moins de 100 salariés bénéficient déjà de l’intéressement et de l’épargne salariale. Il s’agit donc d’un amendement de cohérence.

M. le président. La parole est à M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, rapporteur pour avis.

M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, rapporteur pour avis. Dans le débat fort intéressant que nous avons eu hier soir, j’avais évoqué l’article L. 3312-3 du code du travail et expliqué que, soucieux du parallélisme des formes, nous avions adopté, pour la participation, les mêmes normes et règles que pour l’intéressement. Or nous parlons ici de l’intéressement. Cet amendement n’a donc qu’un seul objet : faire passer le seuil de 100 à 250. Nous sommes dans une logique d’incitation, de soutien aux différentes modalités de l’association capital-travail, que ce soit la participation, l’intéressement, ou – même si le texte n’en parle pas – l’actionnariat salarié.

Hier soir, à propos de la participation, nous avons parlé du chef d’entreprise et de son conjoint salarié ou de son conjoint associé. Nous reprenons ici le même principe, pour inciter le chef d’entreprise à faire bénéficier davantage de salariés d’un accord. Je vous remercie par avance de nous aider dans cet effort.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Je voulais proposer de fixer le seuil à 500, mais c’est peut-être un peu ambitieux. En définitive, il me semble que le chiffre de 250 est préférable et je retire mon amendement.

(L’amendement n° 13 rectifié est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d’un sous-amendement n° 1813.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Nous n’allons pas reprendre le débat d’hier soir. (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP.) Mais, si vous insistez, nous y sommes prêts, car nous ne sommes pas fatigués ! Je rappellerai simplement la forte opposition du groupe socialiste à cette disposition. Les arguments de M. Ollier – ceux de ce matin comme ceux de cette nuit – me semblent déplacés. Pour développer l’intéressement et la participation, dit-il, il faut prévoir une carotte pour les chefs d’entreprise, les mandataires sociaux et les conjoints collaborateurs. Il me semble que cette argumentation ne tient pas. J’ai déposé un sous-amendement pour maintenir le seuil en dessous de 250.

M. le président. La parole est à M. Patrick Ollier.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. J’ai du mal à comprendre votre position, monsieur Eckert. Cette nuit, pendant près de trois quarts d’heure, vous avez expliqué que nos propositions étaient un encouragement à la création de niches fiscales. Après tout, chacun a le droit de penser ce qu’il veut, même s’il a tort. Toujours est-il que, cette nuit, vous étiez contre. Et voilà que, ce matin, vous êtes pour. Sans doute la nuit porte-t-elle conseil.

M. Jean Mallot. Ne faites pas l’âne ! Vous avez parfaitement compris !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Monsieur Mallot, je vous prie d’être poli ! Si quelqu’un fait l’âne, ici, je ne suis pas sûr que ce soit moi. Le respect est dû à chacun dans cet hémicycle. Moi, je ne vous ai pas insulté. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Alain Néri. Vous déformez ce que nous disons !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Je veux que le compte rendu de nos débats précise que vous venez de me traiter d’âne !

M. Jean-Marc Ayrault. Ne soyez pas politicien !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Monsieur Ayrault, je vous serais reconnaissant de faire régner un minimum de courtoisie dans le groupe que vous présidez !

M. Alain Vidalies. Vous êtes au Parlement depuis assez longtemps et vous êtes assez intelligent pour savoir comment se déroule un débat d’amendements ! Mais, si vous voulez que nous y passions encore trois jours, continuez comme cela !

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. Hier donc, monsieur Eckert, vous étiez contre le relèvement du seuil. Aujourd’hui, vous dites que 100, ce n’est pas suffisant, qu’il faut aller à 150. D’accord, bravo, mais allons encore plus loin, car le seuil que vous proposez n’est pas pertinent : il faut le fixer à 250.

M. le président. La parole est à M. Gérard Cherpion, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour donner l’avis de la commission sur le sous-amendement n° 1813 et sur les amendements nos 7, deuxième rectification, et 39 rectifié.

M. Gérard Cherpion, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Le débat de cette nuit a montré que l’harmonisation du seuil à 250, pour se conformer à la définition européenne de la PME, était nécessaire. La commission rejette donc le sous-amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Même avis.

S’agissant des amendements, je lève le gage.

M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.

M. Jean-Marc Ayrault. Le président Ollier vient de déraper. Comme nous ne sommes qu’en début de séance, on peut se demander ce que cela donnera cette nuit. Je demande donc une suspension de séance. J’espère que nous en reviendrons ensuite à un débat apaisé, abordant des questions de fond, notamment celle du SMIC. Ce débat est extrêmement important : ne le troublons pas.

M. le président. Je vais d’abord mettre les amendements aux voix.

(Le sous-amendement n° 1813 n’est pas adopté.)

(Les amendements identiques nos 7, deuxième rectification, et 39 rectifié, modifiés par la suppression du gage, sont adoptés.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à neuf heures quarante-cinq, est reprise à neuf heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

 M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 28.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Gérard Cherpion, rapporteur. L’abondement de la participation n’est autorisé que vers les plans d’épargne pour la retraite collectifs – les PERCO – et non vers les PEE et les PEI, puisque la participation est indisponible pendant cinq ans. Dans ces conditions, il paraît cohérent, comme c’est déjà le cas en matière d’intéressement, de permettre aux entreprises d’inciter, par le biais de l’abondement, les salariés à investir tout ou partie de leur participation dans un PEE ou un PEI pour une durée minimale de cinq ans.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Très favorable. En élargissant le dispositif des PERCO aux PEE et aux PEI, cet amendement est tout à fait dans l’esprit du projet de loi.

Le Gouvernement lève le gage.

(L'amendement n° 28, modifié par la suppression du gage, est adopté.).

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements identiques, nos 29 rectifié, 42 et 10 rectifié.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances.

M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur pour avis. Ces amendements ont été adoptés en termes identiques par les trois commissions.

Il s’agit de simplifier les conditions dans lesquelles les règlements des plans d’épargne interentreprises peuvent être modifiés. Aujourd’hui, l’unanimité est nécessaire, d’où une procédure lourde faisant obstacle aux modifications qui seraient souhaitables pour le bon fonctionnement des PEI. Notre amendement permet de simplifier la gestion de ces plans en évitant la consultation systématique de l’ensemble des entreprises adhérentes, grâce à la fixation de règles de majorité qualifiée. Une telle disposition existe déjà pour les fonds communs de placement d’entreprise.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour soutenir l’amendement n° 42.

M. Patrick Ollier, rapporteur pour avis. La commission des affaires économiques a, elle aussi, adopté un amendement de simplification pour les PEI de réseau. Je me réjouis que M. Cherpion et M. Giscard d’Estaing aient déposé des amendements identiques et j’espère que l’Assemblée les votera à l’unanimité.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Il s’agit d’un amendement de simplification. Avis favorable.

(Les amendements identiques nos 29 rectifié, 42 et 10 rectifié sont adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 30 et 15 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 30.

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Cet amendement vise à assouplir les modalités d’adhésion des salariés aux plans d’épargne pour la retraite collectifs en permettant que les règlements de ces plans comportent des clauses d’adhésion automatique de l’ensemble des salariés. Naturellement, les règlements négociés de ces plans où figureront ces formules d’adhésion collective automatique devront comprendre une clause permettant aux salariés émettant un avis contraire de ne pas adhérer au PERCO.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n° 15 rectifié.

M. Dominique Tian. Je tiens à souligner l’importance de cet amendement, qui vise à instaurer un principe d’adhésion automatique de tous les salariés au PERCO. Pour autant, le dispositif n’est pas contraignant puisque les salariés auront la possibilité de refuser cette adhésion automatique.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Le salarié a le libre choix. Cet amendement, dans la logique d’une épargne retraite, est dans l’esprit du texte. Je salue le travail qui a été mené sur cette question, notamment par Dominique Tian.

Le Gouvernement émet un avis favorable et lève le gage.

(L'amendement n° 30, modifié par la suppression du gage, est adopté.)

M. le président. En conséquence, l'amendement n° 15 rectifié tombe.

Je suis saisi de plusieurs amendements identiques, nos 53 à 73.

M. le président. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Cet amendement concerne le tarif réglementé du gaz et de l’électricité. Il permet aux particuliers qui emménagent dans un domicile dont l’occupant précédent avait renoncé aux tarifs réglementés pour les prix libres de bénéficier de nouveau des tarifs réglementés.

Le choix des prix du marché étant irréversible, les dispositions actuelles pénalisent durement les consommateurs concernés, d’autant que les Français viennent de battre un nouveau record : selon la dernière étude de l’INSEE, publiée en 2006, sur la consommation des Français, la part de leur budget que les ménages ont consacrée en 2005 au logement, à son chauffage et à son éclairage a atteint le record historique de 24,7 %.

La première ouverture du marché de l’énergie a entraîné une explosion des coûts pour les entreprises et on peut craindre le même phénomène pour les particuliers. C’est pourquoi, dans le cadre d’un projet de loi en faveur du pouvoir d’achat, il est important de réaffirmer la liberté pour les consommateurs de choisir leurs fournisseurs de gaz et d’électricité.

Chacun aura compris la teneur de cette proposition ; aussi n’irai-je pas plus avant, souhaitant simplement que chacun d’entre vous l’approuve.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 53 à 73 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements identiques, nos 432 à 452.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Cet amendement est très important. Il a pour objet de répondre à une préoccupation largement partagée sur ces bancs, ainsi que par M. Séguin, Premier président de la Cour des comptes. Dans le rapport d’Yves Bur, issu des travaux de la mission présidée par Gérard Bapt, figure quasiment la même proposition. Yves Bur préconise en effet l’instauration d’une flat tax – que les amoureux de la langue française me pardonnent cette expression ! – et notre amendement a justement pour objet d’instaurer une contribution sociale de 5 % appliquée sur les sommes versées au titre de l’intéressement à la charge de l’employeur, cela afin d’abonder le fonds de réserve pour les retraites qui peine à grossir, car il souffre de la crise financière – mais je n’irai pas plus loin sur ce point car ce serait s’écarter de notre propos. J’ajouterai simplement ceci : notre assemblée s’honorerait de faire une avancée sur cette niche fiscale. Nous vous donnons l’occasion de passer à l’acte en adoptant cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Marcel Rogemont, pour répondre au Gouvernement.

M. Marcel Rogemont. Je souhaiterais faire une observation importante. La multiplication des exonérations de cotisations sociales pose un grave problème pour le financement de la sécurité sociale. Je ne reviendrai pas sur les différentes études menées sur le sujet, particulièrement par la Cour des comptes, en l’occurrence par le président Séguin – qui, pour être, à la différence de vous, un gaulliste social, n’est pas un socialiste vraiment affirmé – mais il est évidemment anormal que des rémunérations sans cesse plus importantes soient exonérées de cotisations, surtout si l’on souhaite alimenter le Fonds de réserve pour les retraites. Actuellement, on met celui-ci sous le boisseau pour le piller éventuellement dans quelques mois. Il est donc essentiel que notre Assemblée jette un regard sur le fonctionnement de ce Fonds de réserve et trouve des solutions pour l’abonder. Cette taxe de 5 % sur les revenus de l’intéressement permettra à nos enfants de percevoir une retraite.

Cette question doit, en conséquence, être analysée avec sérieux et vigilance.

(Les amendements identiques nos 432 à 452 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements identiques, nos 1168 à 1189.

La parole est à M. Jean Mallot.

M. Jean Mallot. Je défends évidemment cet amendement sans prétendre faire le contraire ; je ne ferai donc pas l’âne !

Nous proposons d’insérer un article ainsi rédigé : « L’ensemble des impositions au titre de l’impôt sur le revenu dues par un contribuable au titre de la levée d’une des options attribuées conformément à l’article L. 225-177 du code de commerce et de la revente des titres acquis dans ce cadre ne sont pas prises en compte pour l’application du plafonnement de l’imposition prévu à l’article 1649-0 A du code général des impôts. »

Nous souhaitons que les revenus tirés des stock-options ne soient pas pris en compte dans le plafonnement du bouclier fiscal – M. Tian lui-même comprend mes propos ! Cette mesure aura plusieurs conséquences, dont la moralisation des pratiques en matière de stock-options. De ce fait, le groupe UMP devrait très logiquement voter cet amendement. En effet, quelques-uns de ses membres sont allés dans ce sens dans différents rapports. De plus, le Président Sarkozy a, pas plus tard qu’hier, appelé de ses vœux un certain nombre de mesures de moralisation à l’encontre de patrons dont les pratiques sont regrettables, pour rester dans le langage diplomatique… Car je me méfie…

Le bouclier fiscal, a pour objet, vous le savez, de faire échapper à l’impôt celles et ceux qui ont le plus de facultés contributives pour le payer.

M. Jean-Frédéric Poisson. Ce n’est pas cela, le bouclier fiscal !

M. Jean Mallot. Nous avons démontré à longueur de séances le caractère injuste et totalement inacceptable de ce dispositif. En outre, compte tenu de l’insuffisance des ressources budgétaires – et sociales – de la République, il est vital de trouver des ressources supplémentaires pour financer des dispositifs tels que le RSA,... qui sera discuté un jour dans cet hémicycle.

Nous souhaitons, en conséquence, que les impositions dues pour la levée de ces options au titre de l’impôt sur le revenu ne soient pas soumises au plafonnement du bouclier fiscal.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. La commission a repoussé cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Même avis.

(Les amendements identiques nos 1168 à 1189 ne sont pas adoptés.)

Article 3

M. le président. Sur l’article 3, plusieurs orateurs sont inscrits.

La parole est à M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Cet article crée une nouvelle commission consultative. Cela devient une habitude, chaque texte de loi en instituant au moins une. Bien entendu, on n’en supprime aucune, ce qui entraîne une accumulation avec des chevauchements et des redondances, le tout aux frais des contribuables. Cette manie de créer des comités Théodule à tout va pose plusieurs problèmes. Tout d’abord, la décision publique est difficilement lisible. Au milieu de ce fatras de commissions qui rendent des avis, des rapports, nous ne savons plus trop bien qui fait quoi. Le président Méhaignerie, que je salue, l’a bien exposé, lors des débats sur l’offre valable d’emploi. Dans ce domaine, après avoir mis en place le Conseil national de l’emploi, la Commission nationale de la négociation collective, le Conseil d’orientation pour l’emploi, nous avons créé un Haut Conseil du dialogue social. Avons-nous besoin d’une commission supplémentaire ?

Cela pose aussi un problème de perte de contrôle des élus sur les choix politiques.

M. Marcel Rogemont. Exactement !

M. Lionel Tardy. Quand on confie une mission à un comité, même si celui-ci n’est que consultatif, il est difficile ensuite d’aller contre son avis sans se justifier. Je ne parle même pas des autorités administratives indépendantes : là, le dessaisissement est total. Il revient aux élus de décider et surtout d’assumer les choix en ne se cachant pas derrière l’avis de la commission trucmuche.

Cela soulève également un problème au regard des finances publiques. Je l’ai évoqué en juillet dans le cadre des discussions sur l’offre valable d’emploi. Le Comité d’orientation pour l’emploi nous coûte 800 000 euros par an. Depuis sa création, en 2005, il a rendu trois rapports et trois avis. Ne pourrait-il pas servir davantage et se prononcer, par exemple, sur le niveau du SMIC ?

Vous me répondrez bien entendu, monsieur le ministre, que cette commission du SMIC ne coûtera rien. C’est faux. Cela nécessite un minimum de secrétariat dont les membres ne sont certes pas rémunérés, mais voient leurs frais remboursés.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Non !

M. Lionel Tardy. Pendant qu’ils siègent dans cette commission, ils ne font pas le travail pour lequel ils sont rémunérés. J’aimerais connaître le coût de certaines réunions obtenu en additionnant le salaire horaire de chacun des participants. On aurait de grandes surprises.

Mes chers collègues, il est temps de réagir et de mettre le holà à cette frénésie de création de commissions. C’est pourquoi je vous propose de ne pas voter la création de cette commission du SMIC qui n’apporte rien d’autre qu’un supplément de complexité.

M. Jean Mallot. Le débat prend tournure !

M. le président. La parole est à M. le ministre du travail.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Je répondrai dès maintenant, ce qui m’évitera d’avoir à le faire lors de la discussion des amendements.

J’avais la même position que vous, lorsque j’étais assis à cette place, monsieur Tardy et j’ai toujours la même aujourd’hui, en tant que ministre. Les experts en question sont des économistes. Ils sont indépendants et ne seront donc pas rémunérés. Il n’y aura pas de perte de revenus à compenser puisqu’ils perçoivent une rémunération par ailleurs. Il n’y aura ni administration ni secrétariat ni locaux. Est-on capable de créer une autre organisation sans coût supplémentaire ? A priori, non, mais nous avons le droit d’essayer de trouver des solutions pour y parvenir. Quand une réunion se tiendra – et je me tourne vers le Directeur général du travail –, un agent de la Direction générale du travail en établira le compte rendu.

M. Lionel Tardy. Je n’ai pas dit autre chose !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. En général, vous dites autre chose !

En outre, cette commission ne se réunira pas tous les mois, encore moins toutes les semaines.

La vraie question est simple : veut-on dépolitiser la question de la fixation du SMIC ? La réponse est oui. Comment cela se passe-t-il aujourd’hui ? Le ministre du travail que je suis rencontre les membres de la Commission nationale de la négociation collective. Or je sais tout avant qu’ils n’arrivent, parce qu’ils ont tout dit dans la presse. Les uns estiment qu’il ne faut surtout pas augmenter le SMIC plus que le taux d’inflation, tandis que les autres considèrent qu’il faut lui donner un coup de pouce. À vous de prendre la décision : quel bel exercice ! Il n’y a là aucune dimension économique. Désormais, la CNNC se prononcera à partir des propositions de quelques experts indépendants. Ses membres n’entreront donc pas dans la salle en me répétant ce qu’ils ont dit le matin à la radio ou dans la presse. C’est exactement ainsi qu’ont procédé différents pays étrangers. Pierre Méhaignerie s’est beaucoup intéressé à ce qui se passe en Angleterre, notamment. Voilà dans quelle voie nous voulons avancer.

Par ailleurs, j’ai de la mémoire : il y a quinze jours, un certain nombre de parlementaires UMP m’ont demandé de dresser la liste des commissions, groupements ou organismes de mon ministère dont l’utilité pourrait être aujourd’hui remise en cause. Nous avons commencé ce travail et réfléchissons à d’éventuels regroupements et allégements dans le fonctionnement de ces organismes. J’admets que l’on estime qu’une nouvelle création n’est plus possible, mais quand le besoin s’en fait sentir, je veux juste qu’on le prenne en considération. Vous nous avez demandé de nous engager à ce qu’il n’y ait pas de coût supplémentaire : message bien reçu. Depuis deux ans, et j’aurai l’occasion d’y revenir, il n’y a pas eu de coup de pouce au SMIC, ce que j’assume. En effet, cela ne concerne que 15 % des salariés et oublie les 85 % restants, ce qui est inacceptable. Mais une chose est certaine : dépolitiser la question de la fixation du SMIC : oui ; enlever la responsabilité politique : certainement pas. Le ministre du travail devra fixer l’évolution du SMIC. Telle est ma conception de la responsabilité politique. Je suis sûr que c’est également la vôtre, monsieur Tardy.

Je tenais à préciser ce point important et vous redis : « Message bien reçu », monsieur Tardy !

M. Francis Vercamer. Très bonne explication, monsieur le ministre !

M. le président. La parole est à M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. L’intervention du ministre Xavier Bertrand après celle de notre collègue Tardy est effectivement très instructive et elle éclairera les propos des orateurs inscrits, comme moi, sur cet article 3.

Cet article comprend deux mesures : un changement de date et la création d’une commission.

Faut-il, tout d’abord, vraiment une session extraordinaire pour changer une date et créer une commission ? C’est un sujet que nous avons souvent abordé lors de nos débats depuis le début de la semaine. Poser la question, c’est y répondre. Il n’y a naturellement nul besoin de réunir le Parlement en session extraordinaire, il n’est pas davantage utile de déclarer l’urgence sur un texte pour prendre des mesures aussi peu essentielles.

Fixer la date de fixation du SMIC au début de l’année plutôt qu’au milieu nous paraît effectivement une bonne mesure. Fallait-il pour autant y consacrer un article ? Pour ma part, je suis convaincu que non. Cela ne doit toutefois pas obérer la pertinence d’une telle mesure. Je ne crois donc pas que cet aspect de l’article puisse poser le moindre problème dans cette enceinte.

Il n’en va pas de même de la commission. Nous avons tous bien compris, en entendant les explications quelque peu curieuses du ministre Bertrand, que le Gouvernement semblait y tenir, nonobstant les raisons de ne pas l’accepter, exposées par notre collègue et auxquelles beaucoup d’entre nous, je le pense, souscrivent. Cet article 3 tend donc à créer une commission indépendante. Vous aurez remarqué, mes chers collègues, que, quand une commission se crée dans notre République, elle est rarement qualifiée de dépendante. Je vous suggère, puisque la loi ne doit pas être bavarde, qu’à l’avenir, qu’il s’agisse de propositions ou de projets, on récuse le qualificatif d’indépendant et que l’on considère, par principe, qu’une commission l’est. Ou si on veut préciser qu’une commission est indépendante, il faut préciser de qui et de quoi. Comment les « experts » qui la composent pourraient-ils ne pas être soumis, de par leur histoire, leur culture, leur métier, leurs amitiés, leurs convictions philosophiques, politiques, voire religieuses, à des influences autres que celle de la raison supérieure, comme si je ne sais quel être divin les avait touchés du doigt, leur permettant de n’être victimes d’aucun travers humain que peuvent générer l’engagement, la conviction, la passion à l’occasion, l’exigence, l’injustice ?

Prétendre donc que cette commission serait indépendante n’aurait d’autre sens que de rassurer celles et ceux qui pourraient en douter et ne ferait que renforcer les doutes de ceux qui estiment qu’aucune commission, quelle que soit sa composition, n’est indépendante. Tout cela est affaire humaine avec les imperfections que cela comporte nécessairement. Imaginer une quelconque indépendance à l’égard de tout parce que cette commission, créée dans ce projet de loi et défendue par le ministre Xavier Bertrand, aurait à traiter du SMIC, serait soit prendre les membres de la représentation nationale pour des benêts, soit faire preuve d’une très grave illusion, pour ne pas dire d’une naïveté coupable, quand on exerce les fonctions de ministre de la République ! Cette commission ne sera pas plus indépendante que celles qui l’ont précédée et que toutes celles qui lui succéderont.

M. le président. Il va falloir conclure, monsieur Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Ce que nous craignons, c’est qu’il ne s’agisse d’exonérer le Gouvernement de son refus de donner un coup de pouce au SMIC, au motif que cela ne concerne que 15 % des salariés. Bel argument avancé par le ministre ! Pour ne pas ignorer 85 % des salariés, il refuse de donner un coup de pouce au SMIC, ce qui revient à en ignorer 100 %.

M. le président. Il faut vraiment conclure, monsieur Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Cette commission ne sera pas indépendante. Le ministre apprendra dans la presse, comme avant, ce que les supposés experts indépendants ont pu penser. Soit cette commission a pour but de faire en sorte que le SMIC ne corresponde plus au minimum vital nécessaire,…

M. le président. Monsieur Cahuzac !

M. Jérôme Cahuzac. …soit elle est là pour justifier le fait que le salaire minimum est un élément de la compétitivité et non un élément de la dignité du travail.

Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons accepter sa création et nous rejoignons les arguments de M. Tardy.

M. Benoist Apparu. Tout ça pour ça !

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. C’est un article extrêmement important. J’avais qualifié votre projet de loi d’inégalitaire, de partial et de dangereux : nous voici devant ce qui justifie l’emploi du mot « dangereux ».

Je me réjouis que l’UMP ait retrouvé sa voix ce matin. Nous n’avions pas entendu d’orateur venant de ses rangs, sinon, parfois, pour retirer des amendements. Je me réjouis donc des propos de M. Tardy même si mon argumentation n’est pas aussi populiste. Le coût de la commission n’est pas forcément le meilleur argument pour dénoncer les dangers de l’article 3 mais, après tout, d’où que viennent les soutiens, quand il s’agit de résister à un danger grave, ils sont toujours bons à prendre.

Ce qui m’inquiète particulièrement, c’est que cette disposition entre finalement dans votre stratégie globale qui, depuis des mois, vise à démonter tout un ensemble de dispositifs. Code du travail, organisation des journées de travail, financement des dispositions sociales, vous n’avez cessé de démonter tout ce qui a été mis en place au fil des années, depuis 1950 en ce qui concerne le SMIC, revu à diverses occasions pour différentes raisons. Voici aujourd’hui un petit pas de plus. Quand nous demandons d’améliorer la transparence et de soumettre les stock-options et les bonus aux contributions sociales, vous nous répondez qu’il ne faut pas avancer par petits pas mais prendre une mesure radicale. En revanche, en matière de droit du travail, vous y allez petit à petit. Votre efficacité est néanmoins redoutable – et redoutée par l’ensemble de nos concitoyens.

Nous ne nions pas que le débat est ouvert dans notre pays. Un certain nombre d’économistes, experts en tout genre, remettent effectivement en cause l’existence du SMIC ou, à tout le moins, son montant et son application en fonction de la nature des salariés. Or, pour nous, le SMIC est un socle indispensable à la protection des revenus du travail, ce qui est bien l’objet du texte. Il s’agit de protéger l’ensemble des travailleurs en sorte que chacun puisse trouver, en contrepartie de son travail, un minimum nécessaire pour assurer sa vie, quand ce n’est pas, parfois, sa survie vu les augmentations de prix que l’on connaît.

Je me demande donc si le débat n’est pas orchestré et si, après les interventions à la radio ou les conférences, vous ne voulez pas faire un pas de plus par le biais de cette commission. Certes, si l’on adopte l’amendement de notre rapporteur, celle-ci deviendrait un groupe d’experts plus ou moins rattachés à un organisme existant, mais, quoi qu’il en soit, il vous faut prendre votre responsabilité, monsieur le ministre. La responsabilité politique, et, sur ce point, je rejoins M. Tardy, consiste à décider à un moment donné. C’est au gouvernement de décider s’il donne ou non un coup de pouce – mais ce n’est pas seulement d’un coup de pouce qu’il s’agit : le SMIC doit au minimum suivre l’inflation, donc l’indice d’augmentation des prix de l’INSEE, et, comme c’est le cas actuellement, la moyenne de l’augmentation du salaire moyen ouvrier. Il y a donc là un risque considérable.

Vous donnez à cette commission la consigne de prendre en compte un certain nombre de critères. Elle doit conduire une analyse économique sur les évolutions du marché du travail, l’évolution de la productivité, le partage de la valeur ajoutée, la compétitivité des entreprises, l’évolution des salaires minima dans les pays comparables, les interactions entre salaire et emploi, la structure des salaires et l’évolution des prix. C’est tout un programme ! Il faudra mettre les plus brillants universitaires et économistes au travail et les réunir tous les jours pour parvenir à fixer le SMIC en prenant autant d’éléments en considération.

M. le président. Monsieur Eckert, il va falloir conclure.

M. Christian Eckert. Vous nous avez dit, monsieur le ministre, que vous mettiez en place un dispositif plus souple de fixation du SMIC. Cela confirme nos craintes. C’est votre volonté, assumée. Ce n’est pas la nôtre et nous combattrons violemment cet article.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Les critères légaux restent.

M. le président. La parole est à M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales. Le sujet est important. Je comprends les arguments du ministre, je partage les observations faites par M. Tardy et les interrogations que l’on peut avoir sur tous les bancs.

M. Jean-Pierre Brard. C’est du Méhaignerie dans le texte ! (Sourires.)

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles. Il faut arriver à une synthèse ! (Rires.)

Pourquoi puis-je partager les objectifs du ministre ? Dans tous les rapports faits ces dernières années, que ce soit le rapport Camdessus ou le rapport Attali, chez des économistes de droite ou de gauche, et même chez des personnalités du centre, de la gauche ou de la droite, on constate qu’une réflexion est en cours sur le SMIC dans la mesure où nous avons tous dit que la forte évolution des dernières années avait entraîné un sentiment de déclassement chez une partie des salariés dont les salaires s’étaient rapprochés du SMIC.

Il y a en France une autre solution, que j’ai toujours défendue, avec d’autres, pour lutter contre l’inégalité majeure qu’est le chômage et revaloriser les salaires tout en prenant en compte la compétitivité de l’industrie française. Ce sont les prestations complémentaires, cela a été la prime pour l’emploi.

Il faut une vraie réflexion européenne sur le SMIC. Je défends ce dernier mais la France ne doit pas ignorer ce qui se passe autour d’elle, et elle doit d’ailleurs convaincre d’autres pays, dont l’Allemagne, d’aller vers un salaire minimum. C’est dans ce contexte qu’un grand débat scientifique européen est nécessaire, et c’est le sens de la création de ce comité d’experts.

La réflexion de M. Tardy, je la fais totalement mienne. Les politiques publiques en France ne souffrent pas d’une insuffisance de moyens, mais d’un empilement de structures, d’une complexité des procédures et d’une illisibilité d’un grand nombre d’actions. C’est un problème franco-français. Aux yeux de nos partenaires européens, la France est sur-administrée et sous-organisée.

Je souhaite donc, monsieur le ministre, et vous avez ouvert une perspective, que l’ensemble du Gouvernement nous propose de vrais projets de simplification et que, dans les ministères, l’on supprime un certain nombre d’organismes dont le coût est élevé. Je soutiendrai la proposition du Gouvernement mais je lui demande de s’engager précisément à ce que d’autres commissions soient supprimées. Sinon, les politiques sont illisibles.

Mes chers collègues, le débat sur le SMIC n’est pas franco-français, il est européen. Nous devons veiller à la compétitivité de l’économie française – nous avons tout de même perdu des parts de marché.

M. Roland Muzeau. Il faut tirer l’Europe vers le haut !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles. Par ailleurs, nous sommes le seul pays dans lequel 20 % des personnes qui travaillent sont au niveau du SMIC.

M. Roland Muzeau. C’est la faute aux patrons !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles. Dans cette même perspective, je suis prêt à travailler sur le problème de l’allégement des charges sociales sur les bas salaires…

M. Alain Néri. Des cotisations sociales !

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles. …dans la mesure où celles-ci ont tendance à orienter vers le SMIC un certain nombre de salaires du fait du « gap » de croissance.

Voilà la raison pour laquelle ce débat est important. Il mérite une vraie réflexion et une analyse mais je crois que, si le Gouvernement s’oriente vers une simplification des multiples commissions, l’amendement du rapporteur et l’article 3 méritent d’être soutenus.

M. le président. La parole est à Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. Le président Méhaignerie vient de placer le débat sur le terrain qui importe : le SMIC doit-il rester l’un des éléments clés de notre système social, autour duquel s’organise le système de rémunération, ou devons-nous, au nom d’un certain nombre de critères, celui de la compétitivité internationale en étant un mais pas le seul, accepter une pression à la baisse du SMIC, quitte à ménager des revenus annexes ou des compensations sociales pour garantir le revenu des salariés ?

C’est un débat majeur et il serait effectivement utile que nous ayons une réflexion au niveau européen, d’autant qu’un certain nombre de pays qui avaient fait preuve d’une grande réserve à l’égard d’une telle idée se sont engagés dans la voie de la création d’un salaire minimum - je pense en particulier à la Grande-Bretagne. Et si l’on regarde au-delà des frontières européennes et que l’on se tourne vers les États-Unis, on s’aperçoit que ce pays, qui est le pays par excellence de l’économie libérale, a fait le choix, lui aussi, au cours des années récentes, non pas de créer l’équivalent d’un SMIC, puisqu’il en avait déjà un, mais de le revaloriser de façon substantielle.

Cela dit, à partir du moment où nous disons que nous devons nous prononcer sur la place que nous accordons au SMIC dans notre système économique, ne faisons pas comme si cet article avait pour seul objectif de créer une commission, dont les avis seront peut-être suivis et peut-être pas.

Personnellement, je n’entre pas dans le débat sur l’empilement des structures administratives, bien que j’en fasse moi aussi la critique. Au-delà, ce qui me paraît préoccupant, c’est de savoir quel rôle effectif jouera l’avis donné par cette commission.

De deux choses l’une. Ou bien c’est un avis parmi d’autres et l’on se demande alors pourquoi fixer des critères aussi précis dans cet article, pourquoi faire référence à l’évolution des salaires minima applicables dans d’autres pays ou à la compétitivité internationale – d’autant que les services des ministères de l’économie et du travail tiennent, je l’espère, compte de ces éléments lorsqu’ils prennent leurs décisions, sans qu’il soit besoin de commission. C’est alors un avis purement consultatif qui ne remet absolument pas en cause les critères d’automaticité qui figurent dans le code du travail. Ou bien cet avis sera pris en compte et pèsera dans la décision, et on se demande alors ce qu’il restera, sinon aujourd’hui mais en tout cas demain, du mécanisme d’indexation du SMIC en fonction de l’inflation. Nous avons soit un luxe de précisions, soit des omissions qui ne peuvent pas être totalement involontaires.

Nous sommes au cœur d’un débat sur la compétitivité de notre économie et sur la conception de ce que doit être la juste rémunération des salariés dans notre pays. Vouloir traiter cette question par le biais de la création d’une commission dont l’intérêt reste tout à fait relatif me paraît très préoccupant. Le silence étant à ce point assourdissant, on peut craindre le pire. Il nous semble que c’est la première étape vers un démantèlement du SMIC, dont nous ne voulons pas. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Il y a des moments où il est important de remettre les pendules à l’heure. L’article comporte deux dispositions : le choix du 1er janvier au lieu du 1er juillet pour la revalorisation du SMIC – je remercie M. Cahuzac pour les propos qu’il a tenus tout à l’heure sur cette question – et la création d’un groupe d’experts. Nous ne touchons pas à une seule virgule de l’article du code du travail concernant le SMIC.

M. Alain Vidalies. C’est beaucoup plus habile que cela !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. N’alimentons pas une boîte à fantasmes sur ces questions : il n’y a ni annualisation, ni modification des critères légaux. Nous faisons quelque chose de simple. Avec un rendez-vous au 1er juillet, rien ne se passe pendant les deux mois qui suivent, car on ne négocie pas les salaires pendant les congés d’été.

M. Roland Muzeau. Ni le restant de l’année !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Les choses n’avancent, au mieux, qu’à la rentrée. En revanche, si la date est fixée au 1er janvier, comme il n’y a pas de congés en janvier ni en février, on peut s’y mettre tout de suite.

M. Roland Muzeau. Et ensuite, vous annualisez !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Quant à la création du groupe d’experts, elle ne modifie en rien la législation sur le SMIC.

Il y a eu des époques où le SMIC était en danger – je n’y reviendrai pas –, mais nous ne changeons rien, aujourd’hui, aux critères légaux. Je tenais à le préciser pour rassurer ceux qui pouvaient témoigner d’un début d’inquiétude.

M. Jean-Pierre Brard. Ubu de Saint-Quentin !

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Il s’agit d’un débat important et, en même temps, d’une très grande hypocrisie. Cet article ne peut susciter que le fou rire ou des protestations : qu’est-ce que cette commission d’experts indépendants qu’on introduit dans le circuit pour donner des indications au Gouvernement et à la Commission nationale de la négociation collective ? Cela n’a aucun sens !

Pourquoi inscrire un tel dispositif dans la loi ? C’est tout de même curieux : vous pouviez créer vous-même cette commission par décret ! Lorsque nous avons codifié à droit constant, vous avez voulu nous donner des leçons à ce sujet – cette codification pose d’ailleurs un problème, qui tient au déclassement de la CNNC.

Apparemment, donc, cette commission ne sert à rien, et si nous en restons à une lecture au premier niveau, la réaction de M. Tardy est la bonne.

Cependant, nous ne sommes pas forcés d’en rester à l’apparence des choses, car, comme toujours, le diable se cache dans les détails. Le processus ne s’inscrit pas dans l’analyse que vous en avez faite, monsieur le ministre. Il suffit, pour s’en convaincre, de lire ce qu’écrit le Conseil d’analyse économique, à qui revient la paternité de cette initiative : « Cette commission remettrait chaque année à la CNNC et au Gouvernement un avis sur le niveau souhaitable de revalorisation du SMIC à partir d’un ensemble d’informations pertinentes produites à sa demande – à sa demande ! – par les administrations compétentes et/ou des laboratoires de recherche ». Ce groupe d’experts commandera donc des données à l’administration ; une telle procédure ne peut manquer de générer des coûts supplémentaires.

C’est donc d’une véritable usine à gaz qu’il s’agit. Mais surtout, c’est la perspective d’une remise en cause des modalités de calcul du SMIC, et la perspective d’un SMIC jeune, voire d’un SMIC « première année d’emploi ». Il suffit de lire le rapport du CAE dans son intégralité pour comprendre que ce serpent de mer va resurgir.

Quant aux critères – compétitivité, partage de la plus-value… – à partir desquels ce groupe d’experts sera censé travailler, je suppose, monsieur le ministre, que vous les prenez déjà en considération et que vous ne faisiez pas n’importe quoi jusqu’à présent.

M. Jean-Pierre Brard. Hélas non !

M. Alain Vidalies. Depuis des années que vous appartient la décision d’augmenter ou non le SMIC, vous ne prenez tout de même pas cette décision au saut du lit, au hasard ou en interrogeant une cartomancienne !

M. Jean-Pierre Brard. Il a sa boule de cristal !

M. Alain Vidalies. Je suppose que vous travaillez déjà à partir des notes de l’INSEE et de toutes les autres études d’experts. Si vous procédiez différemment, ce serait grave – mais je ne vous fais pas ce procès. En outre, vous dites vous-mêmes que la revalorisation est une décision politique. Dès lors, pourquoi avez-vous besoin de cette commission ?

Cela étant dit, restons-en au premier niveau, monsieur Tardy, car c’est celui sur lequel nous sommes tous d’accord, et, par conséquent, supprimons cette commission. Nous aurons au moins avancé, même si nos raisons divergent, et nous éviterons d’accroître les dépenses publiques en rejetant la création d’une commission inutile. Par ailleurs, nos craintes quant aux conséquences possibles d’une telle procédure seront ainsi dissipées. Nous nous associerons donc à tout ce qui permettra de supprimer cette étonnante commission.

M. le président. La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Il y a effectivement lieu de s’interroger très sérieusement sur la création de cette commission. La nouvelle codification avait déjà déclassé la Commission nationale de la négociation collective dans le domaine réglementaire. Créer, à présent, une nouvelle commission à côté de la CNNC porte atteinte au statut de cette dernière, alors même que l’on prétend enrichir son rôle grâce à de meilleures connaissances. Celles qu’elle possède actuellement sont amplement suffisantes, et une telle création affaiblira en outre le poids des partenaires sociaux dans la réflexion sur le sujet.

Les règles de fixation du SMIC sont claires, opposables à tous, simples ; un grand nombre d’experts n’est pas nécessaire pour appliquer les textes concernant la revalorisation. En outre, la procédure actuelle repose, au-delà de l’indexation sur l’inflation, sur une capacité de décision autonome. Il s’agit d’une décision strictement politique, et lorsque j’entends M. Bertrand affirmer que cette commission d’experts permettra de dépolitiser la revalorisation, j’y vois donc un soupçon de malice.

Par ailleurs, je fais miennes les réflexions de M. Tardy, qui parlait de « comité Théodule ». Si cette commission ne sert à rien, inutile de la créer, a fortiori dans la loi ! Mais si elle sert à quelque chose, il y a de quoi s’interroger. L’intervention de M. Méhaignerie tout à l’heure était fort instructive. En raison des augmentations du SMIC, nous a-t-il dit, un nombre toujours croissant de gens se retrouve au salaire minimum, donc déclassé. Dès lors, me semble-t-il, il ne faut pas créer le RSA, car ce dispositif déclassera davantage encore les trois millions de personnes qui touchent actuellement des revenus très modestes – trop modestes – ; au lieu d’augmenter la PPE, nous les enfermerons dans le RSA ! Je n’entame pas ce débat plus qu’il n’est nécessaire, puisque nous y reviendrons tout à l’heure.

Sur le plan économique, le SMIC est-il trop élevé ? On finit par s’interroger, car il semble que le souhait du Gouvernement soit que les augmentations du SMIC soient moins automatiques – tel n’est-il pas, au fond, le but recherché avec la création de cette commission ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Non ! Les augmentations sont prévues dans la loi.

M. Marcel Rogemont. Vos experts réfléchiront sur l’opportunité de l’automaticité.

Dans une étude menée au Royaume-Uni, que j’ai là, les chercheurs « tentent de comprendre » pourquoi la spectaculaire augmentation du SMIC décidée par Tony Blair en 1999 n’a produit aucun effet sensible sur l’emploi. En d’autres termes, on demande aux experts de vérifier le bien-fondé d’une accusation a priori !

En conclusion, soit mes craintes sont justifiées, et le mieux, alors, est de retirer cette disposition ; soit elles ne le sont pas, et nous n’avons guère besoin d’un « comité Théodule », pour reprendre l’expression de M. Tardy.

M. le président. La parole est à M. Jean Mallot.

M. Jean Mallot. M. Méhaignerie a posé tout à l’heure une partie importante des termes du débat. S’agissant de la compétitivité de la France, Marisol Touraine a déjà répondu ; je n’y reviendrai pas.

En ce qui concerne, en revanche, le sentiment de déclassement des trop nombreux salariés qui perçoivent le SMIC, ou à peine plus, il y a deux façons de répondre à ce problème. Il y a, tout d’abord, la façon des libéraux : « Démantelons le SMIC, et ses conséquences néfastes disparaîtront », tandis que les rémunérations seront tirées vers le bas. C’est cohérent avec leur idéologie.

La seconde manière, conforme à nos positions, consiste à dire que tout relèvement du SMIC doit être accompagné d’une négociation collective – notamment d’une conférence annuelle salariale –, et être répercuté sur l’ensemble des grilles salariales. Dans cette démarche, nous sommes cohérents avec les différents rôles que le législateur, donc la société, a souhaité confier au salaire minimum en tant qu’élément constitutif majeur de notre contrat social.

À cet égard, je citerai à nouveau le texte fondateur de ce contrat social après-guerre, le programme du Conseil national de la Résistance, qui évoque « la garantie d’un niveau de salaire et de traitement qui assure à chaque travailleur et à sa famille la sécurité, la dignité, la possibilité d’une vie pleinement humaine ». C’est le premier rôle du salaire minimum.

S’agissant de son second rôle, M. Cherpion cite dans son rapport, page 21, le rapporteur du Sénat pour la loi de 1970 créant le salaire minimum de croissance : le salaire minimum, écrivait-il, devait déjà permettre aux salariés une « participation plus étroite à l’expansion générale de l’économie ». On retrouve là la dynamique économique qui, à de nombreuses reprises dans notre histoire, a prouvé son efficacité. C’est le cercle vertueux : l’augmentation du revenu suscite un accroissement de la consommation et réciproquement, ce qui fait tourner plus vite l’ensemble de la machine. Tout le monde a compris que nous sommes, nous aussi, attachés au rôle que joue le salaire, et donc le salaire minimum puisqu’il en est un élément constitutif majeur.

Enfin, je m’efforce de comprendre où veut en venir M. le ministre, sachant qu’il procède régulièrement par glissements successifs. Nous avons eu l’occasion, lors de débats sur différents textes, de constater l’efficacité de cette méthode. Vous vous souvenez, mes chers collègues, de l’examen du texte sur la démocratie sociale et la réforme du temps de travail, adopté en juillet dernier ; vous avez vu comment le Gouvernement et son mécanicien, M. Bertrand, ont instrumentalisé – les organisations syndicales parlaient même de manipulation – la fameuse position commune sur la représentativité pour introduire par ce procédé une inversion de la hiérarchie des normes, instaurer une concurrence directe entre entreprises portant sur les conditions de travail, les normes sociales, voire la rémunération et organiser le dumping social. Si le ministre avait l’intention, sous couvert de ce projet de loi, de faire la même chose avec le SMIC, ce serait la preuve d’une grande cohérence. Mais nous espérons que ce ne sera pas le cas.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Cet article est évidemment très important. Il est dommage que M. Alpha et Oméga – c’est-à-dire M. Laurent Wauquiez – ne soit pas présent, lui qui nous a expliqué, en commission, la dangerosité et la malfaisance du SMIC. Mais il faut dire que Laurent Wauquiez est toujours en période d’apprentissage : il n’a pas encore toute la rouerie de Xavier Bertrand, malgré les cours intensifs que celui-ci lui donne.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Je ne suis pas sûr que ce soit un compliment dans votre bouche, monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard. La rouerie en soi n’est pas digne d’éloge, monsieur le ministre. Mais je constate – là, c’est un compliment – que vous êtes un expert – en matière de rouerie ou de perversité, je vous laisse le choix.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Je vous ai beaucoup observé quand j’étais député, monsieur Brard ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard. Nicolas Sarkozy et ses plus fidèles et dévoués ministres nous parlent tout le temps de réforme. Aussi, je livre à votre réflexion, monsieur le ministre, cette citation : « Les réformes ne sont pas des adoucissants. Elles doivent être des préparations. Toute réforme ne vaut que comme degré vers le but suprême ». Qui écrivait cela ? Un auteur que le Président de la République n’a peut-être jamais lu, mais qu’il cite souvent : Jaurès ! C’est exactement ce que vous faites. La réforme, c’est en effet une balise dans un cheminement.

L’article 3 porte l’ambition de « moderniser la procédure de fixation du SMIC » pour « favoriser », selon l’exposé des motifs, « une évolution du SMIC davantage en phase avec les conditions économiques et le rythme des négociations salariales ». Vous proposez ainsi tout à la fois de créer une commission indépendante d’experts – comme si les salariés avaient besoin d’experts pour se rendre compte qu’à la fin du mois, ils n’arrivent pas à joindre les deux bouts ! –, chargée de remettre chaque année un rapport à la Commission nationale de la négociation collective et au Gouvernement sur les évolutions souhaitables du SMIC, et d’avancer le calendrier de la revalorisation annuelle du 1er juillet au 1er janvier. C’est une vraie révolution.

Mais si vous éprouvez le besoin d’inscrire cette commission dans la loi bien que sa mission ne soit en apparence pas très importante, c’est parce que cette réforme participe du formatage idéologique que vous essayez d’imposer à notre société. Il faut dire que Nicolas Sarkozy, pour prendre une référence qui n’est sûrement pas la sienne, est un vrai stakhanoviste.

Sous des dehors de simples aménagements techniques, les deux mesures prévues à l’article 3 visent à la remise en cause, à peine voilée, du SMIC – Laurent Wauquiez a été très clair sur ce point en commission. Elles font, de fait, écho à des revendications formulées de longue date par le MEDEF, auquel vous ne sauriez rien refuser.

Vous nous dites que la modification du calendrier de revalorisation du SMIC va apporter une lisibilité accrue aux partenaires sociaux au niveau des branches, pour relever les grilles de minima conventionnels, et au niveau des entreprises, pour négocier des augmentations salariales. Comme si la date de fixation du SMIC constituait un obstacle à la négociation ! Comme si les difficultés à négocier dans certaines branches n’avaient d’autre motif que le refus farouche et obstiné des organisations patronales de se mettre en conformité avec la loi ! Avouez, monsieur Bertrand, que cette mesure ne vise au fond qu’à préparer l’annualisation du SMIC !

M. Roland Muzeau. Eh oui !

M. Jean-Pierre Brard. Cela permettra d’éclairer plus vivement nos débats.

M. le président. Monsieur Brard, il va falloir conclure.

M. Jean-Pierre Brard. C’est tout de même un sujet très important, monsieur le président, et je pense que l’on peut y consacrer un peu de temps. Cela évitera d’avoir par la suite recours à des astuces de procédure.

Que se passe-t-il actuellement le 1er juillet ? Nous partons tous en vacances, nous mettons la radio, et qu’entend-on ? Que le Gouvernement a refusé de donner un coup de pouce au SMIC. Cela a alors un coût politique. Il en irait tout autrement si c’était annoncé le 1er janvier. En effet, ce jour-là, de quoi parle-t-on ? On parle des étrennes que l’on n’a pas eues à cause de votre politique, des souliers de Noël qui étaient vides et dont les semelles sont trouées, de la disparition des oranges de notre enfance.

M. Jean Mallot. On n’a même plus de souliers !

M. Jean-Pierre Brard. En effet, vous savez comme nous que, de plus en plus souvent, au niveau des branches professionnelles, les négociations salariales portent sur les revenus annuels. C’est l’annualisation que vous souhaitez, mais à laquelle la plupart des organisations syndicales de salariés se déclarent hostiles parce qu’elle constitue un élément de flexibilisation de la rémunération.

M. le président. Monsieur Brard, il faut conclure.

M. Jean-Pierre Brard. Je vais vers ma conclusion, monsieur le président.

M. le président. Il faut vraiment y aller !

M. Jean-Pierre Brard. On y va toujours !

M. le président. Vous avez largement dépassé votre temps de parole, monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Pour l’instant, c’est vous qui me faites digresser, monsieur le président. (Sourires.)

Je disais qu’en ramenant la date de revalorisation du SMIC du 1er juillet au 1er janvier, monsieur le ministre, vous ne poursuivez d’autre objectif que celui d’affaiblir le SMIC et d’ouvrir la voie à la possibilité d’y intégrer les primes – une revendication déjà ancienne des organisations patronales.

Je reviendrai au cours de la discussion sur la fameuse commission d’experts, mais, pour que le ministre ait le temps d’y réfléchir, je voudrais dès maintenant proposer des candidats : Mme Parisot, M. Ghosn, M. Mulliez, M. Afflelou, M. Tapie,…

M. le président. Monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard. …M. Kessler, M. Seillière de Laborde, M. Forgeard, M. Tchuruk, Mme Russo…

M. le président. Monsieur Brard, je dois vous interrompre. Il y a un règlement et je l’applique.

M. Jean-Pierre Brard. Chacun fait son travail, monsieur le président. Le vôtre, c’est de présider…

M. le président. C’est pourquoi j’interromps votre intervention.

La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Roland Muzeau et M. Jean-Pierre Brard. On y reviendra !

M. Francis Vercamer. Ce débat sur l’article 3 est extrêmement intéressant. Je souhaite tout d’abord intervenir en réponse à ce qu’a dit M. Tardy. Certes, le coût est un élément à prendre en compte pour la création de cette commission. Il ne doit pas être négligé. Néanmoins, ou bien cette commission est nécessaire, et son coût paraît dès lors un élément d’appréciation accessoire, ou bien elle ne l’est pas, auquel cas son coût serait de toute façon trop important, et autant alors la supprimer, comme le veut le groupe socialiste.

M. Jean-Pierre Brard. M. de La Palice est au Nouveau Centre !

M. Francis Vercamer. Mais nous, au Nouveau Centre, nous ne partageons absolument pas les fantasmes du groupe socialiste : nous ne pensons pas que cette commission va en profiter pour créer un SMIC jeune, ou imposer je ne sais quelle autre proposition qui hante l’esprit de nos collègues.

Notre préoccupation, c’est bien sûr l’évolution des salaires, mais c’est surtout l’évolution du pouvoir d’achat. En effet, si les prix s’accroissent plus vite que le SMIC, le pouvoir d’achat se réduit. Pour nous, l’important est que celui-ci s’améliore, non pas seulement que le SMIC augmente.

M. Jean-Pierre Brard. C’est l’échelle mobile des salaires !

M. Francis Vercamer. J’en viens au problème de l’échelle salariale. Chacun a constaté, depuis vingt ou vingt-cinq ans, le tassement du nombre de Français qui bénéficient du SMIC. En effet, celui-ci a augmenté, mais l’échelle salariale n’a pas suivi. C’est d’ailleurs l’objet des articles 4 et 5 du projet de loi et c’est pourquoi, à mon avis, ils sont liés à l’article 3. Il faut donc commencer par le commencement, travailler d’abord sur le SMIC avant de traiter de l’échelle des salaires. Aussi sommes-nous favorables à la création d’une commission - ou d’un groupe d’experts - chargée de se prononcer sur l’évolution souhaitable du SMIC.

M. Alain Vidalies. Mais elle existe déjà : c’est la Commission nationale !

M. Francis Vercamer. À titre personnel, je suis plutôt partisan de la création d’une commission parce qu’il faut un certain formalisme et, surtout, il faut que les éléments qui permettent au dialogue social de s’instaurer soient indiscutables. M. le ministre a raison de dire qu’il y a aujourd’hui une pression sociale permanente sur les négociations relatives à l’évolution du SMIC : les éléments d’information sont contestés, qu’ils viennent ou non du Gouvernement, et on ne sait pas vraiment d’où proviennent les analyses. La commission du salaire minimum de croissance aura au moins l’avantage de fournir des éléments indiscutables aux partenaires sociaux et au ministre, dans le cadre du dialogue social nécessaire et indispensable pour établir le SMIC.

Par ailleurs, je suis d’accord avec M. Méhaignerie : créer une nouvelle commission devrait avoir comme conséquence d’en supprimer un certain nombre d’autres dès lors devenues obsolètes.

Enfin, monsieur le ministre, si le Nouveau Centre partage votre avis concernant la création de cette commission, vous comprendrez qu’une telle réforme ne vous exonérera évidemment pas de votre responsabilité politique. Il reviendra toujours, en dernier ressort, au ministre du travail de fixer l’évolution du SMIC, mais cela dans le cadre d’un dialogue social et en fonction d’éléments pérennes et indiscutables.

M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. Cet article relatif au SMIC est bien évidemment inacceptable pour nous. Il ne peut être rangé au rayon des accessoires d’organisation ou de méthodologie nouvelle, comme s’il visait seulement à simplifier le processus d’élaboration du SMIC sans toucher – M. Xavier Bertrand vient de le répéter – au mécanisme, ni à ce qui garantit ce revenu perçu par plusieurs millions de nos concitoyens. Cette version de M. le ministre est peut-être bonne à endormir les enfants le soir, mais certainement pas les salariés.

Cet article est inacceptable parce qu’il rend le niveau et les modalités de fixation du SMIC responsables des difficultés économiques que vit notre pays. Une telle affirmation est non seulement fausse, mais méprisante pour les millions de nos concitoyens condamnés, toute leur vie de salarié, de l’embauche à la retraite – quand ils ne passent pas par la case licenciement – à ne vivre qu’avec le SMIC.

Je lis attentivement les documents publiés par l’UIMM et la revue du MEDEF…

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Ah, c’est vous ! (Sourires.)

M. Roland Muzeau. …– que je reçois, comme vous tous. Cela me passionne parce que j’y découvre à l’avance les projets gouvernementaux. Quand j’ai donc pris connaissance des propositions du MEDEF, autrement dit du carnet de route donné au Gouvernement, j’ai constaté que le patronat s’était assez bien moulé dans les pratiques des organisations de salariés : il rédige son cahier de revendications – dont il vous adresse visiblement un double, monsieur le ministre. Et le Président de la République, spectateur assidu des Journées d’été du MEDEF, ne manque pas d’y répondre toujours positivement.

M. Jean Mallot. Bien sûr !

M. Roland Muzeau. Dans ce cahier de revendications figure toujours, et en excellente place, la remise en cause du SMIC au nom de sa pseudo-rigidité ; y figure également l’exigence de l’annualisation du SMIC, ce qui aggraverait encore le sort réservé aux salariés. Il est bien dommage que mon collège Jean-Pierre Brard n’ait pas pu poursuivre son propos sur ce point.

M. Jean-Frédéric Poisson. N’exagérons rien !

M. Roland Muzeau. Mais il va se rattraper, soyez-en sûr, monsieur le ministre.

Nul ne peut ignorer le refus obstiné du patronat de réévaluer les grilles de rémunération dans les dizaines de branches – d’où l’écrasement de la hiérarchie des salaires, noté d’ailleurs dans le rapport. N’oublions pas non plus que sept embauches sur dix se font sur la base du SMIC, et beaucoup d’entre elles à temps partiel imposé – ainsi dans la grande distribution, secteur par excellence des bas salaires.

Alors que signifie la commission d’experts indépendants prévue par ce projet de loi ? En fait, rien de rassurant. Les experts indépendants, qu’il s’agisse des retraites ou des salaires, ne sont indépendants de rien et, quand vous les choisissez, vous le faites avec beaucoup de talent. Le rapporteur se déclare lui-même très dubitatif face à la création d’une énième structure de réflexion et de proposition…

M. le président. Il va falloir conclure, monsieur Muzeau.

M. Roland Muzeau. Justement, je terminais, monsieur le président.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Dommage !

M. Roland Muzeau. Tout cela ne nous rassure pas mais, au cours des débats, nous reviendrons sur ces commissions. Nous rappellerons quels experts vous avez choisis dans nombre de domaines et comment ils ont tous, et certains plus que d’autres, failli à leur mission.

Vous nous reprochez aussi de ne pas faire confiance aux employeurs. Je dois reconnaître que vous n’avez peut-être pas tout à fait tort, mais je vous rappelle ce qu’un célèbre cinéaste a dit à ce sujet : il existe des patrons progressistes comme il existe des poissons volants ; mais ils ne sont pas, et de loin, la majorité de l’espèce.

M. Jean-Pierre Brard. Très bien vu !

M. Roland Muzeau. Il me semble que cette formule devrait éclairer la suite de nos débats et ramener les choses à leur exacte mesure, qu’il s’agisse de l’indépendance de certains experts ou de la position du patronat, totalement scandaleuse puisqu’elle consiste à considérer que la seule solution viable dans notre pays est un SMIC moins élevé, moins structuré et qui ne serait plus revalorisé selon les règles aujourd’hui connues et opposables à tous…

M. le président. Monsieur Muzeau, il faut vraiment conclure.

M. Roland Muzeau. J’ai fini, monsieur le président ! L’annualisation du SMIC contenue dans ce texte est un risque majeur qui entraînera d’autres conséquences dramatiques.

M. le président. Nous en venons à la discussion sur les amendements.

Je suis saisi d’un amendement n° 1500.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. C’est un amendement de suppression, monsieur le président. Tout à l’heure, je n’ai pas pu m’exprimer autant que je l’aurais souhaité pour développer toute mon argumentation. Aussi, voudrais-je revenir sur la fameuse commission.

Évidemment, dès que Mme Parisot demande quelque chose, M. Bertrand se met à genoux. Il défère. Néanmoins, pour que M. Bertrand puisse gérer cela devant l’opinion publique, que fait Mme Parisot ? Elle place la barre plus haut encore, pour montrer que M. Bertrand ne peut pas la sauter complètement. (Sourires) Alors, il essaie de trouver, avec Mme Parisot, une façon de présenter publiquement les choses de manière à se donner le beau rôle : il tente de faire croire que Mme Parisot est excessive alors qu’ils se sont mis d’accord sur l’objectif – le démantèlement du SMIC en l’occurrence.

D’ailleurs, monsieur le ministre, vous saisissez l’occasion offerte par la création de cette instance pour modifier sans le dire vraiment le périmètre des éléments d’appréciation à prendre en considération pour décider de l’augmentation ou non du SMIC. Ainsi, l’alinéa 7 définit la commission comme suit : « À cette fin, elle conduit une analyse économique sur les évolutions du marché du travail, en particulier l’évolution de la productivité » – qui est déjà l’une des plus élevées du monde –, « le partage de la valeur ajoutée » – on sait comment vous procédez : un cheval, une alouette –, « la compétitivité des entreprises » – qui selon vous et M. Ghosn n’est jamais suffisante –, « l’évolution des salaires minima dans les pays comparables » – on connaît votre position sur ce point : ce que vous appelez le coût du travail est toujours trop élevé –, « les interactions entre salaires et emploi, la structuration des salaires » et – ce critère n’arrive qu’en dernier lieu – « l’évolution des prix. »

Cette combinaison de critères est conçue pour barrer la route au fameux coup de pouce, et fermer la porte à toute évolution significative du SMIC.

Monsieur le ministre, nous avons affaire à une offensive de grand style de la droite et, comme il ne faut jamais sous-estimer un adversaire politique, reconnaissons qu’avec Nicolas Sarkozy, nous sommes devant une vraie entreprise de démolition de notre État fondé sur des systèmes de solidarité.

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles. Ce n’est pas le cas !

M. Jean-Pierre Brard. Comment, monsieur Méhaignerie ?

M. Pierre Méhaignerie, président de la commission des affaires culturelles. Ce n’est pas le cas !

M. le président. Monsieur Brard, vous êtes le seul à avoir la parole.

M. Jean-Pierre Brard. Merci, monsieur le président, de rappeler M. Méhaignerie à l’ordre. Gentiment.

Monsieur le président, monsieur le ministre, cela nous renvoie aux fondamentaux. Grâce à Nicolas Sarkozy, on est en train de montrer à ceux qui croyaient que la lutte des classes était terminée, qu’en fait elle n’a jamais disparu…

M. le président. Monsieur Brard, je vous interromps une minute pour annoncer que, sur le vote de l’amendement n° 1500, je suis saisi par le groupe SRC d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

M. Jean-Pierre Brard. Je voudrais soumettre cette réflexion, ou plutôt cette définition, au ministre : « Le minimum du salaire est le prix naturel du travail. Et qu’est-ce que le minimum du salaire ? C’est tout juste ce qu’il faut pour faire produire les objets indispensables à la sustentation du salarié, pour le mettre en état de se nourrir tant bien que mal et de protéger tant soit peu sa race. »…

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard. …c’est-à-dire pour fournir la main-d’œuvre dont les propriétaires du capital ont besoin afin de développer leur propre richesse, en en partageant le moins possible.

M. René Couanau. Nous sommes au XIXe !

M. Jean-Pierre Brard. Certainement, monsieur Bertrand, aurez-vous reconnu l’auteur…

M. le président. Monsieur Brard…

M. Jean-Pierre Brard. …de ce texte. Il s’agit de Karl Marx dans La misère de la philosophie, page 209.

M. Daniel Garrigue. Quel verset ?

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. La commission est évidemment défavorable. L’article porte sur deux points : la date de la fixation qui fait l’unanimité, et la création de ce groupe d’experts dont nous allons parler dans l’amendement suivant. Donc, avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Même avis.

M. le président. La parole est à Mme Pascale Crozon.

Mme Pascale Crozon. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, j’ai le sentiment de participer à un débat bizarre, décalé, surréaliste au regard des problèmes rencontrés par les Français.

Le sujet est pourtant important, car il y urgence. Alors que, pendant la campagne électorale, le Président de la République avait promis d’être le président du pouvoir d’achat, nos concitoyens ont de plus en plus de mal à boucler leurs fins de mois. Les promesses n’ont pas été tenues, sauf pour les plus aisés bien sûr, parce que les caisses sont vides, nous a-t-on dit. Mais si elles sont vides, monsieur le ministre, c’est parce que vous les avez vidées avec le bouclier fiscal à 50 %, la réduction de l’ISF et des droits de succession. Un an plus tard, le pouvoir d’achat poursuit son déclin. Je vous rappelle que, cette année, les mesures précitées ont coûté 7,7 milliards d’euros à l’État.

Mme Claude Greff. C’est vraiment n’importe quoi !

Mme Pascale Crozon. C’est dans ce contexte que vous refusez de prendre vos responsabilités en ce qui concerne l’augmentation du SMIC. Vous bottez en touche en créant notamment une commission d’experts indépendants qui viendra nous donner son avis sur le SMIC.

Mme Claude Greff. Arrêtez de dire n’importe quoi !

Mme Pascale Crozon. Je vous rappelle le montant du SMIC, madame la députée : 1 321,02 euros !

M. Jean-Pierre Brard. Votre personnel de maison est concerné !

M. Roland Muzeau. Écoutez donc !

Mme Pascale Crozon. Comment peut-on vivre avec cela en faisant face à l’augmentation des loyers, des produits de première nécessité, de l’essence, etc. ? Présidente d’une SEM de logement, je constate que depuis un ou deux ans, la situation des personnes qui nous soumettent des dossiers ne cesse de se dégrader. Les salaires sont de plus en plus bas – le SMIC et souvent moins. Ces personnes rencontrent donc d’énormes difficultés pour se loger dans le secteur privé. Ce n’est pas parce que vous aurez constitué un groupe d’experts pour discuter du SMIC que le problème sera réglé. Monsieur le ministre, prenez vos responsabilités ! Il est nécessaire d’augmenter les salaires et de ne pas avoir recours à des mesures aléatoires, parce que les Français souffrent et qu’il faut agir très rapidement, le plus rapidement possible.

M. Jean-Pierre Brard. Je demande la parole, monsieur le président.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur l’amendement n° 1500.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

(L’amendement n° 1500 est rejeté.)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, d’habitude j’apprécie votre façon de présider, mais j’avoue que ce que vous venez de faire me choque. Le Gouvernement veut escamoter le débat et on comprend bien pourquoi. Vous m’avez refusé la possibilité – qui n’est pas de droit, j’en conviens, mais qui fait partie de l’usage dans cette assemblée – de répondre à la commission. À notre collègue, vous avez donné fort légitimement la possibilité de répondre au Gouvernement... qui n’avait rien dit. (Sourires). Il était donc d’autant plus légitime que je réponde au rapporteur qui avait dit quelque chose.

Monsieur le président, nous avons besoin de débattre de cette affaire au fond car ce qui est en jeu là, c’est toute une vision de la société, toute une conception du développement économique. Le Gouvernement veut tout asseoir sur le développement de l’offre ; nous sommes pour garantir les rémunérations et la satisfaction des besoins par le développement de la demande. Le Gouvernement s’inscrit dans le modèle soviétique : on produit des chaussures…

Mme Claude Greff. Des souliers !

M. Pierre Cardo. C’est merveilleux !

M. Jean-Pierre Brard. …parce que c’est conforme au plan, sans se soucier de satisfaire les besoins sociaux.

Monsieur le président, vous ne m’avez pas donné satisfaction tout à l’heure. C’est pourquoi, au nom de notre groupe, je demande une suspension de séance pour nous réunir, puis nous concerter avec le groupe socialiste. Nous avons donc besoin de quarante-cinq minutes.

M. le président. Monsieur Brard, je voudrais vous faire remarquer que cela fait déjà plus d’une heure que nous discutons de cet article. J’ai laissé parler tout le monde. Vous avez parlé beaucoup plus que votre temps.

M. François Cornut-Gentille. C’est exact !

M. le président. Vous êtes même celui qui a parlé le plus longtemps. Je crois que vous pouvez difficilement dire que le président ne vous a pas donné la parole. Néanmoins, vous demandez une suspension de séance. Je vous accorde cinq minutes. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Pierre Brard. On va en redemander. On verra qui sera le chat et qui sera la souris !

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures quinze, est reprise à onze heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour un rappel au règlement, je suppose…

Rappel au règlement

M. Jean-Pierre Brard. Juste un mot sur le déroulement de nos travaux.

Pierre Méhaignerie a fait tout à l’heure une intervention importante, comme d’habitude. La conclusion n’était certes pas fameuse, lorsqu’il a déclaré être d’accord avec le Gouvernement. Mais il a posé la question de l’Europe. Or il est clair qu’un SMIC européen qui, sans être uniforme, pose des balises est nécessaire. Mais il faut pour cela une volonté politique, y compris pour s’opposer au dumping social et fiscal.

M. Jean Mallot. Tout à fait !

M. Jean-Pierre Brard. Lundi de la semaine dernière, nous avons reçu les présidents des commissions des finances de l’Union. Quelles horreurs n’avons-nous pas entendues ! Au nom de l’indépendance nationale de Malte, de l’Estonie, de la Lituanie ou de la Pologne, sans parler du Luxembourg, nous devrions abdiquer la nôtre et consentir au démantèlement de nos systèmes !

Comme le suggère l’intervention de Pierre Méhaignerie, il faut poser des questions au niveau de l’Union. Et l’on se demande ce que fait Nicolas Sarkozy ! Il se promène aux quatre coins de la planète, semant au vent des interventions que l’on ne comprend guère et qui n’aboutissent à rien. Mais dès qu’il faut défendre la France et l’Union, notamment en demandant l’instauration de droits à ses frontières pour protéger nos systèmes, il n’y a plus personne !

Le ministre sait-il quelque chose sur l’harmonisation européenne, qui est au cœur de notre sujet ?

M. Jean-Frédéric Poisson. Le ministre sait tout, mais il ne dira rien ! (Sourires.)

M. le président. Afin de ne pas laisser le sentiment que certains font de l’obstruction – et je suis sûr que telle n’est pas votre intention, monsieur Brard (« Oh non ! » sur les bancs du groupe UMP) –, je suggère que nous avancions dans la discussion.

Reprise de la discussion

M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 31 et 1782.

L’amendement n° 31 fait l’objet d’un sous-amendement n° 1817 rectifié.

La parole est à M. Gérard Cherpion, rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 31.

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Il est nécessaire de prévoir une procédure d’évaluation des revenus et du marché du travail préalablement à la fixation annuelle du SMIC. Cette évaluation doit être confiée à un groupe d’experts : chacun en est d’accord.

Cet amendement reprend une préoccupation exprimée dans le texte tout en allégeant ses modalités de mise en œuvre : à l’heure où de nombreux rapports administratifs dénoncent la multiplication des instances consultatives et la complexité institutionnelle qui en résulte, il ne semble ni opportun ni nécessaire de créer une nouvelle commission.

Il est préférable de confier cette mission indispensable à une structure légère – un groupe d’experts désigné à cet effet – qui relèverait d’un organisme déjà existant. La commission propose que cet organisme soit le Conseil de l’emploi, des revenus et de la cohésion sociale, le CERC. Structure composée de quelques membres seulement, le CERC effectue d’ores et déjà des analyses économiques portant sur les évolutions des revenus et de l’emploi.

M. Jean-Frédéric Poisson et M. Lionel Tardy. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur pour avis, pour défendre l’amendement n° 1782.

M. Louis Giscard d'Estaing, rapporteur pour avis. Mon amendement est identique. Je partage la préoccupation de Lionel Tardy, maintes fois exprimée aussi par le président Méhaignerie : ne créons pas de nouvelle structure. Le ministre, je crois, est également de cet avis.

S’agissant de la fixation du SMIC, au sujet de laquelle on entend souvent les économistes à la radio ou à la télévision, il me paraît très utile que ceux-ci puissent s’exprimer dans un rapport public.

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert, pour défendre le sous-amendement n° 1817 rectifié.

M. Christian Eckert. Nous souhaitions exclure de l’article la création de ce groupe d’experts. À défaut, je propose de compléter l’alinéa 5 de l’amendement n° 31 par les mots : « , notamment les conditions dans lesquelles sont désignés les experts visés ci-dessus garantissant leur indépendance. »

J’ai supprimé la mention « et leur nombre », qui figurait dans le sous-amendement initial : si ce nombre n’est pas fixé, je ne vois pas pourquoi on le ferait par décret. M. Cherpion, d’ailleurs, en est d’accord.

En elle-même, la mesure ne nous satisfait guère, mais elle rendra le dispositif « moins pire ».

M. Jean Mallot. En effet, cela limitera les dégâts.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur ce sous-amendement ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Favorable.

M. le président. Sur le vote du sous-amendement n° 1817 rectifié, je suis saisi par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public. (« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Maintenez-vous cette demande, monsieur Brard ?

M. Jean-Pierre Brard. Et comment ! La gauche marche sur deux pieds : les jambes de bois, c’est en face !

M. le président. Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements et le sous-amendement en discussion ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Favorable aux amendements, sur lesquels souffle aussi l’esprit de M. Tardy.

Avis favorable également au sous-amendement.

Ce consensus est la preuve que nous pouvons parfois nous rejoindre.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Pour ce qui est du consensus, monsieur le ministre, on voit que vous n’allez pas souvent au concert ! C’est en effet la note qui en fait l’originalité, comme dans la Flûte enchantée, où le prince, au réveil, est interrogé par Papageno, lequel fait entendre une voix différente.

Groupes d’experts, commissions : tout ça, c’est du vent !

M. Jean Mallot. De la flûte !

M. Jean-Pierre Brard. Ou plutôt du pipeau ! (Sourires.) J’imagine d’ailleurs volontiers Xavier Bertrand en soliste avec cet instrument.

Je représente mon groupe au comité « France 2025 », dédié à la prospective et présidé par Éric Besson. Les experts qui y siègent ont tous été élevés à la même tétine ! Il n’est même pas besoin de leur donner des consignes, tant ils sont imbibés de l’idéologie dominante. Incapables de se regarder dans le miroir, ils ne peuvent mesurer à quel point leurs prévisions ont toujours été fausses et nous mènent dans le mur. Et que nous proposent-ils pour le futur ? Reproduire les recettes passées, qui ont échoué.

En réalité, vous vous abritez derrière un comité d’experts qui pensent comme vous, sorte de préservatif qui vous permet d’éviter tout débat public. Ensuite, au nom de la neutralité de l’État, vous exposerez leur position. Or le cœur du problème est de savoir comment répartir la richesse produite par le travail : donnera-t-on davantage aux actionnaires ou aux salariés ? Doit-on encore déstabiliser le système en alimentant la bulle financière ou distribuer davantage pour la consommation, laquelle pourra entraîner l’emploi et le développement économique ? Si le ministre consent à m’écouter…

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Je vous prête l’oreille droite !

M. Jean-Pierre Brard. Je sais, vous êtes sourd de la gauche.

Mais j’aimerais que vous me répondiez, monsieur le ministre. Faute de quoi nous nous verrons obligés d’approfondir le débat.

M. le président. Nous allons maintenant procéder au scrutin public sur le sous-amendement n° 1817 rectifié.

M. Jean-Pierre Brard. Rappel au règlement !

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

(Le sous-amendement n° 1817 rectifié est adopté.)

(Les amendements identiques nos 31 et 1782, modifiés par le sous-amendement n° 1817 rectifié, sont adoptés.)

M. le président. Cette adoption fait tomber un certain nombre d’amendements...

M. Jean-Pierre Brard. Je demande la parole pour un rappel au règlement.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le président, l’organisation du débat prend un tour qui ne nous convient pas du tout. Nous sommes sur un sujet extrêmement important et nous n’avons pas abusé de notre temps de parole depuis lundi, M. le ministre pourra en convenir. Nous aurions pu être plus bavards. Nous n’avons pas voulu l’être et là on nous bâillonne. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Nous avons demandé un scrutin public sur l’amendement, mais il nous a été refusé alors que la feuille verte était arrivée au plateau.

M. le président. Non, monsieur Brard ! Je ne peux pas vous laisser dire ça ! Je vous ai donné la parole à chaque fois que vous l’avez demandée. Quant à votre demande de scrutin public, elle a été formulée alors que j’avais déjà appelé le vote !

M. Jean-Pierre Brard. Sur le sous-amendement !

M. le président. J’avais appelé le vote sur l’amendement aussi !

M. Jean-Pierre Brard. Ça c’est votre façon de présider, mais on vote séparément sur un texte, puis sur l’autre ! C’est comme cela dans toutes les assemblées, et vous le savez bien puisque vous avez quelques responsabilités par ailleurs !

En outre, l’adoption de l’amendement n° 31 ayant fait tomber notre amendement n° 1501, ce qui nous nous prive de notre droit d’expression, je vous demande, au nom de mon groupe, une suspension de séance.

M. le président. Monsieur Brard, vous ne pouvez faire en permanence de l’obstruction ! Je vais suspendre la séance pour trente secondes.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à onze heures trente-cinq, est reprise.)

M. le président. La séance est reprise.

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements identiques, nos 1669 rectifié à 1690 rectifié.

La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri. Cet important amendement vise à réécrire l’article du code du travail relatif à la définition du salaire minimum interprofessionnel de croissance en regroupant dans cet article les principes en vigueur qui confèrent à la fixation du SMIC son indexation sur l’indice national des prix à la consommation, la prise en compte de l’augmentation moyenne de salaires, et qui garantissent à l’ensemble des salariés dont les rémunérations sont les plus faibles, leur pouvoir d’achat et leur participation au développement économique, en évitant que le salaire minimum de croissance ne prenne du retard sur l’augmentation moyenne des salaires. Ces principes tendent à éliminer toute distorsion entre la progression du SMIC et l’évolution des conditions économiques générales et des revenus.

Vous comprendrez que cet amendement soit particulièrement important dans la situation où nous nous trouvons. En effet, alors que nous connaissons une urgence sociale, que les travailleurs enregistrent une baisse considérable de leur pouvoir d’achat, n’arrivent plus à joindre les deux bouts avec leur salaire et ne peuvent plus faire vivre dignement leur famille – comme l’a rappelé Jean Mallot, c’était pourtant un engagement du Conseil national de la Résistance auquel nous souhaitons tous être fidèles ! –, comment ne pas être stupéfait quand on entend dire ici que le SMIC est trop élevé ? Comment peut-on oser dire cela alors qu’il est de 1 321 euros brut par mois, ce qui fait 1 000 euros net, soit 6,84 euros de l’heure ! Avez-vous réfléchi deux minutes ?

M. Roland Muzeau. Non !

M. Alain Néri. Et je ne parle pas des gens qui sont contraints à un temps partiel subi et doivent parfois se contenter d’un salaire de 600 à 700 euros par mois ! Comment peut-on, dans ces conditions, faire face à l’envolée des prix des denrées alimentaires, à l’augmentation du prix de l’essence – il est pour l’instant stabilisé, mais pour combien de temps  ? Vous rencontrez certainement comme moi, dans vos permanence, des citoyens qui sont aujourd’hui devenus des travailleurs pauvres. En effet, comment peut-on, avec 1 000 euros par mois, payer un loyer de l’ordre de 400 euros et les 300 euros nécessaires pour se rendre à son travail là où il n’y a pas de transports publics collectifs ? Et les travailleurs pauvres le sont encore plus dans les zones défavorisées où il n’y a pas de transports en commun ! Vous nous dites, monsieur le ministre, que le SMIC a connu une augmentation forte. Mais de qui se moque-t-on ? L’augmentation a été de 8 centimes d’euro de l’heure au 1er juillet, soit 0,9 % ! Et s’il a connu une hausse de 2,1 %, comme vous le dites, c’est tout simplement parce qu’il existe des règles qui obligent à l’augmenter.

Or, si vous créez cette commission Théodule, que même la majorité condamne, c’est en réalité parce que vous ne voulez plus appliquer aucun critère et l’on peut même penser que le SMIC régressera puisqu’il est précisé que cette commission se prononcera sur son évolution souhaitable en fonction, notamment, de l’évolution de la productivité, du partage de la valeur ajoutée, de la compétitivité des entreprises, de l’évolution des salaires minima dans les pays comparables. Mais savez-vous de combien est le SMIC au Portugal ? Il est à 400 euros ! Allez-vous prendre cette somme comme référence pour fixer le montant du SMIC en France ? C’est inacceptable ! Comment voulez-vous que les travailleurs aient confiance en l’Europe que vous nous proposez ? Ce qu’ils veulent, c’est une Europe sociale qui refuse tout recul social. Nous voulons bien que l’Europe se préoccupe du montant du SMIC à condition que cela ne s’accompagne pas d’un recul social. Pour qu’il y ait une harmonisation sociale, il faut qu’il y ait une harmonisation fiscale.

Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous proposons ces amendements qui visent à protéger le droit des citoyens et des travailleurs à la sécurité et à la dignité de vie de leur famille. C’est indispensable si l’on veut maintenir la cohésion sociale dans ce pays.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Les critères légaux de fixation du SMIC restant inchangés, la commission a repoussé ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Même argumentation que la commission.

(Les amendements identiques nos 1669 rectifié à 1690 rectifié ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements identiques, nos 1691 rectifié à 1712 rectifié.

La parole est à Mme Gisèle Biémouret.

Mme Gisèle Biémouret. Cet amendement vise à faire en sorte que le SMIC s’applique de manière uniforme dans l’ensemble des branches professionnelles et des professions. Je pense aux salariés qui interviennent dans les métiers de services, plus particulièrement de services à la personne. Comme l’a rappelé Alain Néri, le SMIC horaire est de 6,84 euros. Il serait indécent de trouver ce montant trop élevé. Pour vous donner une idée de ce que représente une telle somme, je vous dirai que c’est le prix de quatre ou cinq boites de sardines, selon la marque et la qualité. Je ne voudrais pas que l’on puisse penser que ces salariés qui interviennent tous les jours auprès de nos enfants, de nos parents, ne créent pas de richesses, ont un travail peu rentable. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. La commission a repoussé ces amendements.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Identique à celui de la commission.

(Les amendements identiques nos 1691 rectifié à 1712 rectifié ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements identiques, nos 1713 rectifié à 1734 rectifié.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements correspondent à notre préoccupation de bien définir le rôle de la Commission nationale de la négociation collective et la méthode actuelle de fixation du SMIC. Il y aura maintenant un nouveau groupe d’experts qui sera indépendant, grâce à l’un de nos amendements que vous avez généreusement adopté – je crois que c’est le premier que vous avez retenu –, mais nous souhaitions inscrire dans la loi le rôle de la Commission nationale de la négociation collective, car elle associe les partenaires sociaux. Pour avoir participé à certaines des auditions réalisées par M. Cherpion, j’ai en effet mesuré que certains membres de cette commission insistaient sur leur rôle.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Les missions de la Commission nationale de la négociation collective figurent déjà dans le code et elles sont inchangées. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Même avis que la commission. Ces amendements sont satisfaits.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Je voudrais illustrer le propos que je tenais tout à l’heure. C’est une sorte de flash-back, pour continuer dans les allégories cinématographiques de Roland Muzeau. Je veux simplement faire une citation pour montrer aux deux ministres ici présents à quel point leur groupe d’experts est un attrape-nigaud.

Voici ce que l’on peut lire dans Le Canard enchaîné de cette semaine : « Champion incontesté des stratèges de haut vol : Patrick Artus, directeur de la recherche et des études de Natixis. Il s’est vu interviouvé, le 11 septembre par Challenges, le 12 par Le Revenu, le 13 par Investir, le 15 par Les Echos, le 16 par La Tribune, etc. Ce voyant n’avait-il pas déclaré, en 2007, après le sauvetage de la banque Bear Stearns : " Le pire de la crise financière est passé. C’est fini. " Puis, en avril dernier : " La Réserve fédérale américaine a donné le signal de la reprise. " Avant de lancer cet oracle fulgurant, à la veille du krach – dans Challenges du 28 août dernier – : " L’affaire des subprimes est dans le rétroviseur. " »

Vous voyez bien que tous ces experts sont surtout compétents pour prévoir le passé ! Votre groupe d’experts est donc un alibi destiné uniquement à soustraire le débat sur le SMIC à la confrontation politique. Nous ne pouvons que refuser tout ce qui va dans le sens de la confortation de votre texte.

M. le président. Je n’ai jamais entendu dire que Le Canard enchaîné était le journal officiel !

M. Marcel Rogemont. Il officialise beaucoup de choses !

(Les amendements identiques nos 1713 rectifié à 1734 rectifié ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements identiques, nos 642 à 662.

La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Pour que chacun soit éclairé sur ce que nous sommes en train de faire, notamment avec la nouvelle procédure de fixation du SMIC et le recours aux experts, je voudrais faire référence à deux articles du travail relatifs à ce que peut déjà faire la Commission nationale de la négociation collective.

Le premier article est le R. 2272-6 : « La commission nationale peut créer en son sein des groupes de travail pour l’étude des questions particulières et faire appel à des experts. » Autant dire que nous avons créé une procédure d’expertise préalable destinée à une commission dont le code du travail prévoit déjà qu’elle puisse faire appel à des experts.

Quant à l’article R. 2272-11, il précise : « Les sous-commissions », dont l’une est compétente pour donner son avis sur la fixation du SMIC, « peuvent créer, en leur sein, des groupes de travail pour l'étude de questions particulières et faire appel à des experts. » Par conséquent, il existe déjà deux instances qui peuvent faire appel à des experts : la sous-commission consultée par le Gouvernement et la commission nationale. Et voilà que nous créons une nouvelle expertise au-dessus de ces deux premiers niveaux d’expertise. C’est la cerise sur le gâteau !

M. Jérôme Cahuzac. C’est ridicule !

M. Alain Vidalies. Comme démarche ubuesque, on peut difficilement trouver mieux !

M. Marcel Rogemont. C’est du Kafka !

M. Alain Vidalies. Je tenais à mettre en rapport ce que prévoit déjà notre droit et ce qui nous est proposé aujourd’hui. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Jean-Pierre Brard. Il faut bien expertiser les experts !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Cet amendement est satisfait par l’amendement n° 31, qui non seulement préserve mais renforce même le pouvoir de la CNC. En effet, celle-ci continue à rendre au Gouvernement un avis motivé sur la fixation du SMIC, mais le Gouvernement devra en outre se justifier devant d’elle s’il s’écarte du rapport rédigé par le groupe d’experts.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Monsieur Vidalies, un recours à des experts dans de telles conditions s’est-il déjà produit ?

M. Alain Vidalies. Vous l’inscrivez dans la loi ! Si vous ne l’utilisez pas, à quoi bon le créer ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Tout simplement, il faut institutionnaliser ce groupe ! (« Non » ! sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Nous pensions initialement en faire une commission d’experts. Mais le message qui nous a été adressé – notamment par M. Tardy, M. Giscard d’Estaing ou M. Cherpion – a été entendu. Il n’y a donc pas de redondance.

Toutefois, si nous faisions appel à ces experts, alors que nous ne l’avons jamais fait par le passé, je serais le premier surpris.

M. Jean-Pierre Brard. Nous vous prenons les doigts dans le pot de confiture !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Non, monsieur Brard : vous pouvez regarder mes doigts. Mais, en la matière, vous en parlez en expert – c’est le cas de le dire ! Je comprends mieux, à présent, tous les reproches que vous nous adressez sur la politique et la République des experts !

M. le président. La parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. Quand le texte viendra au Sénat, vous aurez un problème, monsieur le rapporteur, puisque l’amendement que vous avez fait voter n’est pas codifié. Je le relève afin que cette observation figure au Journal officiel.

Par ailleurs, monsieur le ministre, allons au bout de l’absurdité : vous nous objectez que les experts mentionnés dans le code n’ont jamais été utilisés par la commission.

M. le président. C’est déjà presque un aveu, monsieur Vidalies !

M. Alain Vidalies. Mais, monsieur le ministre, que n’avez-vous pas utilisé la suite des dispositions prévues par le code ? Car j’avais laissé de côté l’article R. 2272-13 du code du travail. (Sourires sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Il dispose que « la sous-commission des salaires est assistée dans ses travaux par un expert nommé par le ministre chargé du travail, sur proposition de l'Union nationale des associations familiales ». (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Régis Juanico. Montrez-vous vos mains, monsieur le ministre ! (Sourires.)

M. Alain Vidalies. Il y a mieux : « Le ministre chargé du travail nomme dans les mêmes conditions deux autres experts appelés à suppléer cet expert. » (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Nous avons donc un expert à la commission principale et un autre à la sous-commission, dont vous relevez qu’elle n’est jamais réunie. Vous pourrez en outre nommer deux suppléants, en plus de ceux que j’ai évoqués.

M. Jérôme Cahuzac. C’est ridicule !

M. Alain Vidalies. Ou bien nous sommes effectivement en plein ridicule ou bien il y a derrière ces dispositions une démarche politique. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)

M. Marcel Rogemont. On va bientôt manquer d’experts !

M. le président. La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. J’assume la démarche politique qui consiste à dépolitiser une réflexion tout en conservant la responsabilité politique. Pourquoi l’Angleterre a-t-elle réussi à le faire sans que cela déclenche des passions ?

M. Jérôme Cahuzac. Mais nous avons déjà des experts !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Chacun sait qu’il suffit que je désigne un expert pour provoquer un tollé sur les bancs de l’opposition ! Je peux même écrire par avance les éléments de langage dont elle se servira !

En l’espèce, nous pourrons choisir ces experts en toute transparence.

M. Roland Muzeau. Qui est ce « on » ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Vous voulez les choisir vous-mêmes ?

M. Marcel Rogemont. C’est une proposition ? Je l’accepte !

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. N’ayez pas de tels réflexes à l’encontre des experts ! Certains de ceux que nous avons nommés, il y a quelques années, sont devenus vos collègues.

M. Jérôme Cahuzac. Qu’est-ce que cela prouve ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Leur indépendance a été tant de fois remise en cause ! On ne peut tout de même pas leur interdire d’avoir des idées. Si, ensuite, ils décident de sauter le pas et de les assumer, comment leur en vouloir ? Évitons donc d’entrer dans de tels débats.

Nous souhaitons disposer, en plus de l’avis qui nous est donné, d’une réelle expertise. Les textes actuels offrent certaines possibilités, mais ils ne sont ni suffisamment institutionnels, ni suffisamment clairs. Nous faisons donc un choix. L’opposition a le droit de ne pas être d’accord avec nous.

(Les amendements nos 642 à 662 ne sont pas adoptés.)

M. Marcel Rogemont. Je demande que figure au compte rendu la proposition que m’a faite le ministre, de nommer les experts.

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements identiques, nos 32 et 663 à 683.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. En commission, nous avons souhaité qu’il soit précisé dans le texte que, à partir du 1er janvier 2010, l’indexation du SMIC sera fixée le 1er juillet de chaque année. Une telle mesure n’est pas sans inconvénients. J’ai été sensible, en effet, aux arguments développés par M. Muzeau.

Mais nous tenons également à être rassurés sur un autre point. Une revalorisation doit également intervenir le 1er juillet 2009, ce que nos amendements proposent de rappeler. Ce sont, en somme, des amendements de précision, qui ont été acceptés par la commission.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Avis favorable.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. On comprend tout l’intérêt que présente, pour le Gouvernement, la date du 1er janvier. Une fois l’annualisation pratiquée, les salariés n’auront qu’à s’incliner. Or nous entrons manifestement dans une période d’inflation. Celle-ci servira en quelque sorte à mettre en place une nouvelle répartition des richesses, au détriment de ceux qui les produisent et au bénéfice de ceux qui les exploitent. Nous ne pouvons pas suivre le Gouvernement sur ce terrain, puisqu’il propose de remplacer le système actuel par un autre, qui sera encore moins avantageux pour les salariés.

(L'amendement nos 32 et 663 à 683 sont adoptés.)

(L'article 3, modifié par les amendements adoptés, est adopté.)

M. le président. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l’article 3.

Après l’article 3

M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements identiques, nos 180 à 200.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. À ce stade de la discussion, je veux rappeler quelle a été notre position au cours du débat. Contrairement à ce qui a été affirmé ici ou là, nous avons tenu à utiliser le premier texte de la session extraordinaire pour formuler certaines propositions sur les revenus du travail et le pouvoir d'achat de nos concitoyens. C’est ce à quoi tendaient nombre de nos amendements portant article additionnel après l’article 2, qui ont été longuement débattus.

Nous avons également déposé plusieurs séries d’amendements portant articles additionnels après l’article 3. Ils reprennent des propositions du groupe socialiste qui figuraient, pour la plupart, dans une proposition de loi que la majorité a refusé d’examiner lorsque, à la faveur d’une niche parlementaire, nous l’avions engagée à le faire.

Le Président de la République prononcera en fin d’après-midi, à Toulon, un débat qui sera retransmis à la télévision.

M. Roland Muzeau. Il ne parle qu’à l’UMP !

M. Christian Eckert. Cela étant, nous aurions pu prolonger notre séance de travail, afin que le projet de loi puisse prendre en compte certaines des propositions que M. Sarkozy ne manquera pas de formuler sur la moralisation des stock options, la transparence…

M. Roland Muzeau. Très bien !

M. Christian Eckert. …ou la contribution sociale des stock options.

M. le président. C’est la raison pour laquelle vous avez voté la réforme des institutions, monsieur le député : pour pouvoir entendre plus facilement le Président de la République.

M. Christian Eckert. Permettez-moi de penser pour moi-même, monsieur le président.

Je souhaitais effectuer une mise au point afin d’éviter toute méprise sur l’attitude que nous adopterons désormais dans le débat. Si nous consentons à défendre plus sommairement certains amendements, afin que l’Assemblée puisse aborder prochainement l’examen des articles 4 et 5, c’est pour permettre à chacun de nous de se rendre à Toulon afin d’écouter le Président de la République en fin de journée (Exclamations sur les bancs des groupes SRC et GDR), tout en sachant que certains resteront ici pour participer à la suite de nos travaux.

Nous aurions pu prolonger la discussion en épluchant les amendements qui portent notamment sur le dispositif de Robien, la TIPP ou la franchise médicale, et qui vont être appelés prochainement. Nous aurions ainsi fait œuvre utile pour nos concitoyens, dont la majorité aurait pris les préoccupations en compte, si elle avait accepté de voter nos amendements.

Qu’on ne se méprenne pas : si nous les défendons plus rapidement désormais, ce n’est pas parce que nous n’y croyons pas. Et nous ne voulons pas nous entendre reprocher, dans les heures, qui viennent de ne formuler aucune proposition ou de nous cantonner à une obstruction systématique. Car nous serions tout disposés à continuer à défendre pied à pied nos amendements.

M. le président. Nous vous remercions de cette intervention, à laquelle nous sommes sensibles.

La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Je m’associe aux propos de M. Eckert. Nous attendons en effet l’intervention du Président de la République, qui contiendra peut-être des propositions visant à améliorer le projet de loi que nous examinons depuis lundi. Je pense que les membres de la majorité regretteront de ne pas avoir voté certains de nos amendements, dont le principe sera peut-être repris par le Président.

Par les amendements nos 180 à 220, nous souhaitons appeler l’attention du Gouvernement sur l’impact du dispositif « de Robien ». L’État contribue davantage à cet investissement qu’à la construction de HLM, financée par un PLUS. Son effort profite à ceux qui investissent dans ce dispositif – alors que même cette niche fiscale ne comporte aucune contrepartie sociale –, tandis que les organismes de HLM ou les collectivités territoriales qui souhaitent construire reçoivent de sa part une aide moins importante que celle qu’il accorde à l’investissement lucratif.

C’est donc pour moraliser les relations entre le Gouvernement et les organismes de HLM que nous soutenons ces amendements.

M. le président. La parole est à M. Jérôme Cahuzac.

M. Jérôme Cahuzac. Le débat juridique entre M. Vidalies et le ministre, auquel nous venons d’assister, prouve que certaines dispositions de ce texte sont à tout le moins superfétatoires, sinon dangereuses. Dans tous les cas de figure, la question méritait d’être examinée dans des conditions plus sérieuses que celles que nous avons connues au cours de cette session extraordinaire.

Deuxièmement, mes chers collègues, je vous ai engagés à voter la question préalable afin que nous passions en réalité au véritable sujet de cette session : le RSA.

J’avais alors indiqué très clairement que si cette motion de procédure était repoussée, nous ferions notre travail pour amender un texte qu’il était indigne d’inscrire en session extraordinaire, alors qu’il pouvait parfaitement faire l’objet d’amendements à des textes que nous examinerons en session ordinaire. Il s’agissait bien, pour le pouvoir exécutif et pour sa majorité, d’occuper quelques jours avant d’en venir au vrai sujet qui est le RSA. C’est une manque de respect à l’égard du Parlement et nous ne pouvions accepter qu’il soit instrumentalisé de cette façon.

M. Eckert vient d’indiquer quelle sera désormais la position de notre groupe, que tous ses membres respecteront, cela va de soi. Je retire donc les amendements nos 201 à 221.

(Les amendements nos 201 à 221 sont retirés.)

M. le président. Je suis saisi de quarante-huit amendements identiques, nos 1050 à 1097.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 1050 à 1097, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements identiques, nos 159 à 179.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 159 à 179, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements identiques, nos 138 à 158.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 138 à 158, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

 M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 46.

La parole est à M. Lionel Tardy.

M. Lionel Tardy. Cette fois, il s’agit d’un amendement qui vaut la peine qu’on s’y attarde quelques instants. (Murmures sur les bancs des groupes SRC et GDR.) Il vise à harmoniser les dates de changements des taux de prélèvement sociaux pour faciliter la vie des chefs d’entreprise.

M. Roland Muzeau. Et la vie des salariés ?

M. Alain Néri. Les salariés, il s’en fiche !

M. Lionel Tardy. Nous allons en parler.

Retenir le 1er janvier paraît la meilleure solution, car très souvent les sociétés civiles commencent leur exercice au début de l’année civile. M. Charié avait déjà défendu cette disposition lors de l’examen du projet de loi de modernisation de l’économie, avec le soutien du président Ollier. Nous l’avions adoptée, mais le Sénat l’a supprimée. J’en présente une version améliorée pour tenir compte des remarques de M. Novelli, notamment en ce qui concerne le versement transport. S’agissant des prélèvement de l’AGIRC et de l’ARCCO, fixés par voie conventionnelle, il est sans doute possible d’inciter ces organismes à s’aligner sur la date du 1er janvier.

L’adoption de cette mesure réduira, certes, la marge de manœuvre du pouvoir réglementaire en ce qui concerne la date d’entrée en vigueur des changements de taux. Mais elle constituerait une réelle simplification pour des milliers de chefs d’entreprise pour lesquels éditer une feuille de paye est devenu une opération trop complexe…

M. Roland Muzeau. Les malheureux !

M. Lionel Tardy.… pour la réaliser eux-mêmes.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion. rapporteur. La commission est évidemment d’accord avec le principe. Mais sa mise en application nécessite d’abord une expertise. Elle a donc émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Outre cette question de l’expertise – et je ne sais pas si les études d’impact qu’on demande constamment au Gouvernement ont été faites –, il faut se demander dans quel texte cette disposition trouvera le mieux sa place. C’est probablement le PLFSS, ce qui d’ailleurs ne nous facilitera pas la tâche. Outre mon avis, il faudra alors celui d’Eric Woerth. Mais c’est un sujet important…

M. Lionel Tardy. Fondamental.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Je vous laisse cette appréciation.

Avis défavorable. Le sujet doit être abordé dans le cadre du PLFSS. M. Tardy, avec la constance qu’on lui connaît, y reviendra certainement.

M. Lionel Tardy. D’accord.

M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau.

M. Roland Muzeau. M. Tardy a la sincérité de dire que son objectif est uniquement de faciliter la vie des chefs d’entreprise. Mais où les choses ne vont plus, c’est quand il ne peut mentionner aucune étude d’impact sur les répercussions pour l’État et pour les régimes sociaux. Cette demande, que M. Tardy réitère avec constance, provient des organismes patronaux. Il est évident – je ne suis pas parmi les naïfs qu’on trouve sur certains bancs – qu’elle ne peut être sans effet sur les comptes sociaux.

Plus gênant encore, le ministre, en renvoyant cette disposition au PLFSS, laisse entendre qu’il travaillera avec M. Woerth à l’y faire inscrire. Si ce devait être le cas, ce serait un nouveau coup porté aux comptes sociaux.

M. Lionel Tardy. Je retire l’amendement.

(L'amendement n° 46 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements identiques, nos 222 à 242.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 222 à 242, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de quarante-huit amendements identiques, nos 1002 à 1049.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Nous avions fait différentes propositions pour que les plus-values sur les stock options donnent lieu soit à une redistribution au titre de l’intéressement, soit en faveur du fonds de réserve des retraites ou des régimes sociaux. Peut-être, à Toulon, le Président de la République proposera-t-il un certain nombre de mesures allant dans notre sens. Les 700 à 800 millions des franchises médicales sont peu de chose en comparaison des trois milliards que pourrait rapporter la contribution sur les plus-values de stock options. Vous pourriez donc anticiper sur ces possibles décisions en adoptant notre amendement n° 1002.

(Les amendements identiques nos 1002 à 1049, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements identiques, nos 243 à 263.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 243 à 263, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements identiques, nos 1581 à 1602.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 1581 à 1602, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements identiques, nos 1603 à 1624.

La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 1603 à 1624, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements identiques, nos 1625 à 1646.

La parole est à M. Marcel Rogemont.

M. Marcel Rogemont. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 1625 à 1646, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements identiques, nos 1647 à 1668.

La parole est à Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 1647 à 1668, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Nous en arrivons à l’article 4.

Article 4

M. le président. La parole est à M. Xavier Bertrand, ministre du travail.

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Laurent Wauquiez exprimera l’avis du Gouvernement lors de l’examen des articles 4 et 5.

Nous débats ont duré longtemps, très longtemps – je n’y reviens pas. Néanmoins, à quelques occasions, on a entendu s’exprimer des différences de fond. Je pense à l’intervention de M. Balligand sur l’article 2. Nous assumons tout à fait notre décision de laisser les salariés disposer des sommes versées au titre de la participation. Néanmoins, c’est lorsque ce type de différence s’exprime que le débat prend tout son intérêt.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, inscrit sur l’article 4.

M. Jean-Pierre Brard. C’est avec peine que nous voyons M. Bertrand nous quitter. (Rires sur de nombreux bancs.)

M. Xavier Bertrand, ministre du travail. Une peine partagée, croyez-le bien.

M. Jean-Pierre Brard. Mais le parti-État étant désormais reconstruit, il faut bien aller pointer aux meetings de l’UMP, comme on le faisait à la messe dans notre enfance.

Cet article est un des éléments d’un texte dont nous avons démontré, depuis lundi, qu’il n’a nullement pour objectif d’améliorer les revenus du travail, mais de limiter progressivement le poids du salaire, que le Gouvernement ne veut pas voir augmenter, en le complétant par d’autres revenus qui ne seront pas soumis aux cotisations sociales.

Avec l’article 4, le masque tombe définitivement. Le président de la République a dit à New York qu’il fallait punir les responsables de la crise ; il a dit aussi qu’il fallait punir les patrons voyous. Mais ce ne sont là que discours. Par cet article, on va pénaliser les patrons réticents à engager le dialogue social. S’ils ne négocient pas d’accords, ils perdront 10 % des exonérations de cotisations sociales. Mais 10 %, ce n’est rien ! Ce n’est pas une pénalisation, c’est un encouragement donné à certains patrons à ne pas perdre de temps à négocier, puisque cela ne leur coûtera que 10 % des exonérations.

Un article aussi scandaleux montre à quel point vous êtes les laquais du MEDEF, dont vous satisfaites la moindre exigence. Bien entendu nous voterons contre et, pour reprendre la formule de M. Cherpion, nous ferons le « SAV », le service après vote, pour expliquer dans le pays comment vous vous consacrez uniquement à servir les besoins des détenteurs du capital au détriment des salariés.

M. le président. La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Notre président de groupe, Jean-Marc Ayrault, m’a communiqué un certain nombre d’informations concernant la suite de nos débats, en raison desquelles il lui est nécessaire de nous consulter. La volonté que j’évoquais tout à l’heure de nous rendre tous disponibles pour écouter le Président de la République à Toulon ne semble pas faire l’accord. Notre intention de débattre des articles 4 et 5 est entière et il ne s’agit pas d’un artifice de procédure, mais je suis amené à vous demander, au nom de notre groupe, une suspension de séance d’une demi-heure.

M. le président. La suspension est de droit.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à douze heures quinze, est reprise à douze heures trente.)

M. le président. La séance est reprise.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour un rappel au règlement.

M. Jean-Pierre Brard. Mon intervention concerne le déroulement chaotique de nos travaux.

Le Gouvernement a voulu que soit convoquée une session extraordinaire qui relève du théâtre et de la communication. Elle n’était pas nécessaire et a pour seul objet de mettre en scène certains projets de loi.

Le Parlement n’a pas à répondre aux convocations du Gouvernement dictées par les convenances personnelles de M. Hirsch. Le spectacle, censé commencer à l’heure dite, doit mettre en valeur le haut-commissaire et la politique qu’il incarne au nom du Gouvernement de M. Fillon. Le RSA est destiné à légitimer M. Hirsch, supplétif emblématique de Nicolas Sarkozy, de François Fillon et du Gouvernement le plus à droite et le plus réactionnaire que notre pays ait connu depuis la Libération.

Nous n’avons pas à servir la soupe à M. Hirsch, même si ce dernier a accepté, malgré un passé qui est tout à son honneur, de nous servir aujourd’hui une soupe claire.

Nous sommes décidés à aller au combat, aujourd’hui sur les revenus du travail et demain, sur le RSA. Nous n’accepterons pas de faire payer aux couches moyennes et modestes de la population les conséquences d’une politique qui aboutit à la création du RSA financé par la contribution de tous, sauf des plus riches.

Nous sommes prêts à siéger autant de temps qu’il le faudra, mais nous ne voulons pas que la prestation théâtrale de M. Hirsch soit déconnectée de l’examen, article par article, du fond du projet de loi sur le RSA. Nous défendons les petites gens qui souffrent alors que ceux qui défendent ce texte, et M. Hirsch au premier chef, cherchent à les embobiner. Nous ne nous prêterons pas à ce jeu-là.

Reprise de la discussion

M. le président. Sur l’article 4, la parole est à M. Alain Vidalies.

M. Alain Vidalies. L’article 4 pose la question du lien entre le montant des cotisations sociales des entreprises et les négociations sur les salaires.

Créer une pénalité pour les entreprises qui n’auraient pas engagé la négociation annuelle sur les salaires serait, selon certains, « une grande avancée ». Il s’agit plutôt d’une mesure qui relève de l’effet d’annonce. En effet, pour se conformer à la loi, il suffira de convoquer une réunion annuelle pour constater, après quelques minutes, qu’il n’y a pas d’accord. L’épée de Damoclès dont on nous parle aura alors disparu.

Il existe une divergence politique entre majorité et opposition car nous pensons que si, dans une économie de marché, le Gouvernement se contente de fixer le SMIC, laissant les autres sujets à la négociation contractuelle, la réussite de celle-ci et la conclusion d’accords ne sont pas indifférentes pour les pouvoirs publics. Nous souhaitons donc encourager les entreprises dans lesquelles sont signés des accords qui évitent que les salaires ne se concentrent autour du niveau du SMIC et permettent aux ouvriers, aux employés, aux techniciens et aux cadres de bénéficier de véritables carrières.

Ce qui compte ce n’est pas l’ouverture de négociations mais la conclusion d’un accord salarial. Dans les entreprises où un tel accord existe – et, heureusement, elles sont nombreuses –, le maintien des exonérations de cotisations sociales, qui relèvent bien des pouvoirs publics, se justifie. En revanche, lorsque aucun accord salarial n’a été signé, il convient, comme le suggère la Cour des Comptes, de réexaminer l’existence des abattements sur ce que la majorité qualifie de « charges » qui sont en fait des cotisations.

L’opposition considère donc que le mécanisme prévu par l’article 4 est un placebo. Si, pour nous, l’obligation purement formelle de négocier n’a pas d’intérêt particulier, nous sommes, en revanche, partisans de l’existence de véritables accords sur les salaires dans les entreprises.

M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements identiques, nos 705 à 725.

La parole est à M. Gérard Bapt.

M. Gérard Bapt. Un accord semble avoir été passé sur le déroulement de nos débats, je déplore toutefois que nous ne puissions discuter jusqu’au bout de la question pourtant majeure des allégements de charges, d’autant que le problème des niches sociales a déjà été évoqué lors de l’examen des deux premiers articles du projet de loi.

J’ai présidé une mission d’information commune sur les exonérations de cotisations sociales, dont le rapporteur était M. Yves Bur. Après quatre mois de travail et des dizaines d’heures d’auditions nous avons déposé un rapport d’information de plus de 300 pages. La discussion des articles 4 et 5 aurait été une bonne occasion de donner, par voie d’amendements, une traduction législative aux propositions adoptées à l’unanimité par la mission d’information commune. Les articles 4 et 5 s’inspirent certes de deux d’entre elles, mais ils relèvent plutôt du symbole : il aurait été possible d’aller plus loin.

M. Vidalies vient de dire les faiblesses de l’article 4. Quant à l’article 5 : il semble évident qu’il est nécessaire de revaloriser les minima de branche s’ils sont inférieurs au SMIC. Ce dernier point concerne sept branches professionnelles et 200 000 salariés pour lesquels la mesure n’est pas uniquement symbolique. Toutefois, ce projet de loi, sur lequel le Gouvernement a déclaré l’urgence, présenté comme un texte fondamental pour les revenus du travail et les comptes sociaux, aurait pu être l’occasion d’adopter des mesures plus fortes.

J’ai déjà interrogé M. Bertrand, mais M. Wauquiez peut-il nous donner son avis sur l’amendement qui prévoit une réduction des allégements de charges si aucun accord salarial nouveau n’est conclu dans l’entreprise après un certain temps ? Que deviennent les allégements de charges et des propositions du rapport Bur ?

Certes, nous débattrons à nouveau de ces questions en examinant le prochain PLFSS, mais, en somme, nous avons été convoqués en session extraordinaire pour débattre en urgence d’un projet de loi dont nous n’aborderons certains aspects essentiels que dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2009.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. La commission a repoussé les amendements nos 705 à 725. Ils prévoient en effet d’imposer une obligation aux partenaires sociaux alors que le projet de loi est incitatif.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État chargé de l’emploi. Défavorable. Je comprends la volonté de l’opposition d’aller plus loin que le dispositif du projet de loi qui incite à l’ouverture de négociations. Toutefois, le Gouvernement ne peut pas entrer dans une logique qui mettrait en place une police des salaires.

Je précise, par ailleurs, que le Parlement organise ses débats en toute indépendance. Il n’appartient pas au Gouvernement d’exercer une tutelle en la matière.

M. Jean-Pierre Brard et M. Roland Muzeau. Elle est bien bonne celle-là !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Il n’existe aucun « accord caché » sur l’organisation de nos discussions.

(Les amendements identiques nos 705 à 725 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements identiques, nos 684 à 704.

M. Christian Eckert. Défendus !

(Les amendements identiques nos 684 à 704, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 1502 rectifié et 44 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l’amendement n° 1502 rectifié.

M. Jean-Pierre Brard. « Le Gouvernement n’est pas favorable à la police des salaires » : on aura tout entendu dans ce débat ! Évidemment, il n’y est pas favorable : il l’a délégué au MEDEF ! Tandis que le Gouvernement se contente de fournir les guêtres, la conceptualisation de la police des salaires revient à Mme Parisot, à ses boys et à ses girls.

L’amendement 1502 rectifié traite du cas choquant et inadmissible des chefs d’entreprise qui croient pouvoir se dispenser de la négociation annuelle obligatoire sur les salaires. Cette attitude pour le moins désinvolte, voire méprisante, me rappelle irrésistiblement celle des maires qui considèrent qu’ils peuvent s’affranchir de l’obligation faite à leur commune de disposer de 20 % de logements sociaux parce que le sort des familles pauvres et sans toit ne les intéresse pas. Comme le dit M. Jean-Michel Fromentin, maire de Neuilly-sur-Seine : « Nous avons le droit de vivre entre nous. » Il demande donc, pour appliquer la loi, des délais qui ne sont généralement pas consentis aux petites gens.

Les deux attitudes relèvent la même indifférence méprisante pour ceux qui n’ont pas eu la chance de naître avec une petite cuillère en or dans la bouche.

M. Jean Mallot. En argent !

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur Mallot, la petite cuillère est en argent pour les « petits » riches ; pour les vrais riches, elle est en or, et au moins de l’or 18 carats.

C’est ce que j’appelle – et je vais tester sur vous, monsieur le secrétaire d’État, cette expression qui fait frémir M. Bertrand – un vieux réflexe de classe à l’égard de nos concitoyens qui n’ont que leur salaire ou les minima sociaux pour vivre – voire, souvent, pour survivre –, mais qui sont facilement taxés d’assistés ou de profiteurs par les adeptes du libéralisme économique.

Ces deux catégories de délinquants, patrons et maires, méritent d’être sanctionnés sévèrement, car ils manquent à la responsabilité sociale qui leur échoit aux termes de la loi que nous avons votée. La « tolérance zéro » ne doit pas être réservée aux seuls petits délinquants, sous peine de saper le respect dû par tous à la loi. Pourtant, force est de constater que ce gouvernement éprouve les plus grandes difficultés à sanctionner comme il convient les violations de la loi quand elles sont le fait de délinquants en col blanc, de personnes dont la droite est proche, sociologiquement et politiquement.

C’est pourquoi nous proposons de durcir sensiblement les sanctions qui s’appliquent en cas de non-respect de l’obligation annuelle de négocier sur les salaires. La réduction de 10 % des exonérations et réductions de cotisations sociales prévue dans le texte pour sanctionner les patrons délinquants nous paraît en effet extrêmement douce, à la limite de la complaisance. Nous proposons donc de porter de 10 % à 50 % le montant de la pénalité infligée.

J’attends avec intérêt vos réactions, monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire d’État : votre instinct de classe l’emportera-t-il sur l’esprit de justice ?

M. le président. Madame Louis-Carabin, peut-on considérer que l’amendement n° 44 rectifié est défendu ?

Mme Gabrielle Louis-Carabin. Oui.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Je rappelle à M. Brard que la négociation annuelle obligatoire date des lois Auroux de 1982,…

M. Jean-Pierre Brard. Oui, elle n’a pas été instituée par la droite !

M. Gérard Cherpion, rapporteur. …lesquelles prévoyaient, en cas de non-respect de cette obligation, une peine d’emprisonnement d’un an et une amende de 3 750 euros. Depuis 1982, cette règle n’a pas été appliquée, et cela n’a choqué personne.

Aujourd’hui, le Gouvernement souhaite inciter les partenaires sociaux à négocier, et il leur laisse, il est vrai, un peu de temps pour le faire. C’est pourquoi le texte prévoit de sanctionner l’absence de négociations pour une année civile par la diminution de 10 % du montant de l’exonération. Cela représente, par exemple, 450 euros par an et par salarié payé au SMIC. Cette mesure s’appliquant aux entreprises de plus de cinquante salariés, son impact financier n’est donc pas négligeable.

Aussi, je souhaite que ce montant soit maintenu pour la première année. En revanche, je proposerai, au nom de la commission, un amendement prévoyant une sanction plus sévère en cas de récidive.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Le rapporteur présentera en effet dans quelques instants un amendement visant à renforcer la progressivité du dispositif, donc son caractère incitatif.

Quant à la lutte des classes, monsieur Brard, je ne connais, pour ma part, que des concitoyens républicains.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Des concitoyens ! Et que faites-vous des Tapie, Mulliez, Forgeard et autres ? Moi, je ne connais que la devise « Liberté, égalité, fraternité ». Vous, vous êtes guidé par votre instinct de classe, par la solidarité de classe. Vous venez d’ailleurs de le reconnaître, monsieur le secrétaire d’État. Vous vous montrez ainsi tel que vous êtes, un homme de votre camp et de votre classe !

M. le président. Je vais mettre aux voix…

M. Alain Néri. Je demande la parole, contre le Gouvernement !

M. le président. …l’amendement n° 1502 rectifié.

M. Alain Néri. C’est scandaleux !

(L'amendement n° 1502 rectifié n'est pas adopté.)

(L'amendement n° 44 rectifié n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 1507 et 33, pouvant être soumis à une discussion commune.

L’amendement n° 33 fait l’objet d’un sous-amendement, n° 1818.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l’amendement n° 1507.

M. Jean-Pierre Brard. Si nous étions à la veille des vacances, je vous aurais suggéré, monsieur le secrétaire d’État, de suivre les recommandations du Président de la République – qu’il ne s’applique pas à lui-même, certes – et de lire Jaurès. Vous verriez combien votre conception de la citoyenneté est éloignée de la tradition républicaine.

L’article 4 prévoit la conditionnalité de certaines exonérations de cotisations patronales au respect de l’obligation de négociation annuelle sur les salaires lorsque l’entreprise y est assujettie. Dans le dispositif proposé, le non-respect de cette obligation pour l’année civile donnera lieu à une diminution de 10 % du montant de l’exonération.

En repoussant notre précédent amendement, par lequel nous proposions de porter à 50 % le montant de la pénalité, vous donnez le sentiment de vouloir couvrir les chefs d’entreprise peu scrupuleux qui feraient l’impasse sur le dialogue et la concertation salariale et syndicale.

Par notre amendement n° 1507, nous entendons donc réaffirmer l’obligation de négociation, qui ne doit pas rester une formalité. C’est la raison pour laquelle nous proposons qu’à défaut de conclusion d’un accord salarial durant deux années consécutives, la réduction générale de cotisation patronales soit supprimée.

La négociation est indispensable, mais nous savons tous qu’elle peut aboutir à un échec. Notre amendement entend donc inciter les parties à rechercher l’accord, plutôt que la palabre – palabre que le Gouvernement non seulement encourage, mais pratique lui-même, comme on l’a vu à la façon dont il s’est affranchi des accords conclus entre les syndicats et le patronat. Car tantôt le MEDEF est plus extrémiste que le Gouvernement, tantôt c’est le contraire

M. le président. La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 33.

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Si, à partir de la troisième année, aucune négociation n’a été engagée, on peut considérer qu’il s’agit, de la part de l’entreprise, d’une volonté délibérée de ne pas respecter ses obligations. C’est la raison pour laquelle la commission propose que, dès la troisième année, la diminution du montant de l’exonération de charges soit portée de 10 % à 100 %.

M. le président. La parole est à M. Alain Néri, pour soutenir le sous-amendement n° 1818.

M. Alain Néri. Je serai très bref, puisque nous avons conclu un accord entre gens de bonne compagnie, accord dont j’espère qu’il sera respecté par tous ; nous jugerons sur pièce.

En rejetant nos propositions, en particulier l’amendement de M. Brard, vous poursuivez votre entreprise de démantèlement systématique du code du travail, en particulier des lois Auroux, qui ont représenté une avancée considérable en 1982. Ce projet s’inscrit ainsi dans la droite ligne de la lettre de mission que vous a confiée le MEDEF, lequel n’a jamais accepté les avancées sociales.

Notre sous-amendement n° 1818 a pour objet de proposer une diminution progressive de la réduction des cotisations patronales en cas de non-respect de l’obligation annuelle de négocier les salaires effectifs. Cette diminution serait de 10 % la première année, de 50 % la deuxième année et de 100 % à compter de la troisième année. Convenez que cette proposition est tout à fait raisonnable. Si vous aviez la volonté de protéger véritablement les intérêts des salariés, vous adopteriez ce sous-amendement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission sur le sous-amendement n° 1818 ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement sur les amendements en discussion et sur le sous-amendement n° 1818 ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 33 du rapporteur. Il est important qu’une entreprise qui refuse ostensiblement de respecter son obligation annuelle de négocier soit fortement pénalisée, afin que s’exerce une véritable pression en faveur de la négociation.

Tout en reconnaissant les différences d’approche que nous pouvons avoir, les uns et les autres, sur le sujet, je rappelle que, dans ce domaine, les lois Auroux ne sont pas appliquées, car la sanction pénale qu’elles prévoient est disproportionnée. Notre objectif est donc de mettre en œuvre un dispositif plus pragmatique afin qu’il soit appliqué.

Par ailleurs, je suis obligé de vous rappeler que notre débat porte sur un projet de loi, qu’il est mené dans le respect des droits de l’opposition et qu’aucun accord n’a été conclu, accord qui ne serait d’ailleurs pas de mon ressort.

(L'amendement n° 1507 n'est pas adopté.)

(Le sous-amendement n° 1818 n'est pas adopté.)

(L'amendement n° 33 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements identiques, nos 747 à 767.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

M. le président. La commission est défavorable à ces amendements, de même que le Gouvernement.

(Les amendements identiques nos 747 à 767 ne sont pas adoptés.)

(L'article 4, modifié par l'amendement n° 33, est adopté.)

M. le président. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l’article 4.

Après l’article 4

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements identiques, nos 1558 à 1579.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 1558 à 1579 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements identiques, nos 768 à 788.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Si la majorité veut gagner du temps, elle doit adopter ces amendements. Ceux-ci prévoient en effet qu’il ne peut y avoir de salaire minimum professionnel inférieur au SMIC dans les conventions collectives de branche. Puisque c’est votre objectif, adoptez ces amendements !

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Défavorable.

(Les amendements identiques nos 768 à 788 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements identiques, nos 726 à 746.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

M. le président. La commission est défavorable à ces amendements, de même que le Gouvernement.

(Les amendements identiques nos 726 à 746 ne sont pas adoptés.)

Article 5

M. le président. La parole est à M. Roland Muzeau, inscrit sur l’article 5.

M. Roland Muzeau. L’article 5 vise, comme le précédent, à soumettre le bénéfice de la réduction générale de cotisations patronales de sécurité sociale au respect d’une condition salariale, mais cette fois au niveau de la branche. Le dispositif proposé nous est présenté par le rapporteur comme une sanction « à la fois simple, logique, efficace et proportionnée ». Or ce dernier terme nous laisse pour le moins dubitatifs.

Tout d’abord, la situation actuelle est beaucoup moins brillante que ne le prétend le rapporteur. En effet, il n’est pas exact d’affirmer que « peu de branches sont aujourd’hui potentiellement concernées à raison de minima conventionnels structurellement inférieurs au SMIC. » Certes, il faut souligner les progrès réalisés depuis 2005 et, surtout, tardivement, en 2007. Mais il ne faut pas oublier que les dernières anomalies évoquées dans le rapport concernent tout de même dix-sept branches, soit environ un million de salariés.

Dans ces branches, où l’on parle pudiquement de « difficultés récurrentes de négociation salariale », la situation n’a guère évolué : les pressions exercées par le ministère du travail sont restées à peu près sans effet. Le dispositif proposé suffira-t-il à supprimer les derniers obstacles, qui sont dus avant tout à la farouche résistance de patrons peu disposés à lâcher du lest et à se mettre en conformité avec la loi ?

En tout cas, le mécanisme proposé ne nous semble pas assez sévère. En effet, le texte propose de laisser à nouveau aux branches actuellement concernées un temps d’adaptation, encore une fois beaucoup trop long.

L’entrée en vigueur du dispositif n’interviendra qu’en 2010, voire 2011. Le moins que l’on puisse dire est que le Gouvernement témoigne d’une certaine compréhension à l’égard des patrons dont les grilles salariales présentent des minima inférieurs au SMIC, qui se trouvent de fait placés dans une situation d’impunité totale. Vous faites preuve de beaucoup plus de zèle pour sanctionner les personnes privées d’emploi qui peinent à en retrouver un que pour sanctionner les patrons aussi peu scrupuleux que ceux dont il est question ici.

Vous donnez, du reste, avec la notion de salaire minimal de référence, une très surprenante base légale aux minima de branche inférieurs au SMIC. Nous sommes, pour notre part, favorables à des mesures beaucoup plus sévères et de portée immédiate. Il n’est pas acceptable, lorsque l’on prétend améliorer le pouvoir d’achat de nos concitoyens, de laisser perdurer encore plusieurs années des injustices aussi flagrantes que l’application de minima sociaux inférieurs au SMIC.

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 789.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard. Je souhaite revenir sur l’amendement n° 1512, sur lequel il y a encore des choses à dire.

Le ministre a tenu tout à l’heure des propos invraisemblables. Je n’en suis pas revenu, d’entendre un ministre de la république française constater que la loi n’est pas appliquée, et en tirer la conclusion que l’État doit mettre de l’eau dans son vin !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Il suffit de sortir dehors !

M. Jean-Pierre Brard. Vous pensez avant tout à protéger vos amis. C’est le règne des copains et des coquins, comme le montrent de nombreux exemples ! Et quand la loi n’est pas appliquée, que fait le Gouvernement – Mme Dati, en l’occurrence – sur le plan pénal ? Il renforce, il aggrave, il instaure même des peines planchers s’appliquant automatiquement. Mais dès lors qu’il s’agit de délinquants dans le domaine du droit du travail, vous abandonnez les mouvements de menton et oubliez les belles résolutions que vous affichez d’ordinaire. Cela ne peut pas durer.

M. Jérôme Cahuzac et M. Alain Néri. Il a raison !

M. Jean-Pierre Brard. La loi ne sera vraiment respectée par nos concitoyens que lorsque vous ferez régner l’égalité, monsieur le ministre. Or, vous ne faites que renforcer les inégalités, comme c’est le cas, une fois de plus, avec ce texte. Notre amendement a pour objet de vous aider à corriger vos faiblesses.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. La commission a repoussé ces amendements.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Supprimer l’article 5 reviendrait à accepter que les minima conventionnels soient durablement inférieurs au SMIC…

M. Jean-Pierre Brard et M. Roland Muzeau. Ce n’est pas vrai !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. …ce qui ne me paraît pas être l’objectif de M. Muzeau.

M. Jean-Pierre Brard. Sophisme puéril !

(Les amendements identiques nos 789 à 809, et 1512, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 34 de la commission des affaires culturelles.

Il s’agit d’un amendement de précision.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Favorable.

(L’amendement n° 34 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements identiques, nos 1735 à 1756.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 1735 à 1756, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 35 de la commission des affaires culturelles.

Il s’agit d’un amendement de rectification.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Favorable.

(L’amendement n° 35 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 36 de la commission des affaires culturelles.

Il s’agit d’un amendement de précision et de rectification.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Favorable.

(L’amendement n° 36 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 1783.

La parole est à M. Francis Vercamer.

M. Francis Vercamer. Cet amendement est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Gérard Cherpion, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Je demande à M. Vercamer de bien vouloir retirer cet amendement. À défaut, l’avis du Gouvernement sera défavorable.

M. Francis Vercamer. Je le maintiens.

(L’amendement n° 1783 n’est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 37 de la commission des affaires culturelles.

Il s’agit d’un amendement de coordination.

Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État. Favorable.

(L’amendement n° 37 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements identiques, nos 1757 à 1778.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 1757 à 1778, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements identiques, nos 1454 à 1475.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 1454 à 1475, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

(L’article 5, modifié par les amendements adoptés, est adopté.)

M. le président. Nous en venons aux amendements portant articles additionnels après l’article 5.

Après l’article 5

M. le président. Je suis saisi de vingt-deux amendements identiques, nos 1514 à 1535.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 1514 à 1535, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de vingt et un amendements identiques, nos 264 à 284.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 264 à 284, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi de plusieurs amendements identiques, nos 285 à 305.

La parole est à M. Christian Eckert.

M. Christian Eckert. Ces amendements sont défendus.

(Les amendements identiques nos 285 à 305, repoussés par la commission et par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

Explications de vote et vote sur l’ensemble

M. le président. Dans les explications de vote sur l’ensemble du projet de loi, la parole est à M. Christian Eckert, pour le groupe SRC.

M. Christian Eckert. J’espère que chacun aura compris, lors de ce débat, que, si le groupe socialiste s’est opposé à ce texte, c’est parce qu’il l’estime incomplet, partiel, parfois partial, et dangereux. C’est le cas, notamment, sur la question du SMIC, où les propos qui ont été tenus ne nous ont absolument pas rassurés.

L’examen de ce texte a été pour nous l’occasion de présenter les propositions des socialistes, pour améliorer les revenus mais aussi le pouvoir d’achat. Je pense notamment à des propositions d’ordre fiscal, ou portant sur les niches sociales, les taux de TVA, les franchises médicales, le bouclier fiscal. Le fait de devoir présenter ces propositions – que nous avons attendues en vain de la part du Gouvernement – a, certes, eu pour effet d’allonger un peu la durée des débats. Je précise toutefois que ceux-ci auraient pu durer encore plus longtemps si nous avions défendu tous nos amendements portant articles additionnels après l’article 3.

En tout état de cause, nul ne pourra dire que le groupe socialiste a fait de l’obstruction sur ce texte. C’était votre choix que de placer ce texte ayant, paraît-il, vocation à dynamiser les revenus du travail – ne s’agit-il pas plutôt de les dynamiter ? – en première partie de la session extraordinaire. Nous avons accepté votre décision, et il vous revient d’assumer la responsabilité de n’avoir pas répondu à nos attentes et à celles des Français.

Je veux remercier les rapporteurs, à commencer par mon voisin lorrain Gérard Cherpion, pour la grande courtoisie dont il a fait preuve lors des débats, ainsi que pour la précision de son travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Je remercie également les rapporteurs pour avis, en particulier Louis Giscard d’Estaing, qui a écrit dans son rapport des choses très intéressantes, ainsi que Patrick Ollier, même s’il défendait pour sa part des positions un peu plus éloignées des nôtres. Je remercie, enfin, les présidents de commission qui nous ont fait l’honneur de leur présence.

Nous avons eu un débat intéressant avec les ministres. Même si ceux-ci n’ont pas répondu à nos attentes, ni toujours été aussi attentifs que nous l’aurions souhaité, je les remercie d’avoir participé aux discussions.

Pour conclure, je remercie l’ensemble des collègues qui nous ont soutenus tout au long de ce débat, y compris ceux qui n’ont pu rester jusqu’à la fin. Nous voterons évidemment contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour le groupe GDR.

M. Jean-Pierre Brard. Monsieur le ministre, je regrette que vous n’ayez pas été présent plus souvent, car votre abord « frontal » permet une discussion plus aisée qu’avec votre collègue Xavier Bertrand, plus en rondeurs, mais souvent plus difficile à saisir qu’une anguille ou une savonnette ! (Sourires.)

Nous arrivons au terme de ce texte que le Gouvernement a voulu présenter lors d’une session extraordinaire, dans le cadre d’une grande mise en scène préparée durant l’été. Vous n’aviez pas prévu que le débat durerait si longtemps, et escomptiez sans doute faire passer ce texte ainsi que celui relatif au RSA, à l’esbroufe, en espérant que les Français se laisseraient aveugler par votre campagne de propagande. Comme je l’ai dit hier, le Gouvernement a quasiment doublé les crédits de propagande relatifs au pouvoir d’achat. Il faut bien cela pour faire croire à quelque chose qui n’existe pas !

Tout cela s’inscrit toujours dans la même logique : faire payer les gens modestes tout en épargnant les plus riches. À cet égard, l’aspect le plus significatif du texte sur les revenus du travail est la contrainte exercée sur le socle que constitue le salaire, et le début d’un mouvement de subsidiarisation du salaire, avec toutes les conséquences que cela induit. Vous remettez le SMIC en cause, ce qui constitue un événement d’ordre historique. Lors des travaux en commission, monsieur Wauquiez, vous aviez été beaucoup direct que Xavier Bertrand, puisque vous n’aviez pas hésité à reconnaître que le SMIC vous gênait beaucoup – un aveu avec lequel le MEDEF est sans doute en plein accord ! S’en prendre au SMIC, c’est remettre en cause un concept élaboré au fil de notre histoire, du Front populaire à 1968 en passant par la Résistance. Vous détruisez le socle de notre pays, la base de notre contrat social, mais vous en paierez la note ! N’oubliez pas que notre peuple est celui des jacqueries et que, contrairement aux apparences, il n’est jamais endormi ! Parfois, il réfléchit longtemps, mais on sait à quoi cela peut aboutir – et je ne fais pas seulement allusion à 1789.

M. Éric Raoult. Babeuf !

M. Jean-Pierre Brard. Le Gouvernement, qui n’est pas constitué de sots, réfléchit à la meilleure façon d’endormir la vigilance du peuple, qui est capable d’émotion, comme on disait au Moyen Âge. Pour cela, il faut donner le change par le discours. On proclame donc qu’il faut punir les responsables de la crise financière ! Cela n’empêche pas de partir en vacances sur leurs bateaux… Il faut punir les patrons voyous, responsables des suppressions d’emplois ! Cela n’empêche pas de les fréquenter – Carlos Ghosn, par exemple – et de dîner avec eux au Fouquet’s… (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Pierre Brard. Pourquoi protestez-vous ? Seriez-vous jaloux de ne pas avoir été invités ?

Mme Chantal Brunel. Ce n’est pas drôle, et cela n’a rien à voir avec le débat !

M. Jean-Pierre Brard. Vous « karchérisez » – pour parler en français appauvri, à la manière du Président de la République…

M. le président. Monsieur Brard, il va falloir conclure.

M. Jean-Pierre Brard. J’ai l’impression que j’écorche vos délicates oreilles, monsieur le président !

Vous « karchérisez », disais-je, le droit du travail, vous aggravez le rapport inégalitaire entre salariés et employeurs. Pour le pouvoir d’achat, vous vous contentez de discours, et vous vous acharnez à substituer l’individuel au collectif avec l’objectif clair d’affaiblir le mouvement social.

Mme Claude Greff. Et vous, que faites-vous ?

M. Jean-Pierre Brard. Nous jouons notre rôle de sentinelles au service du peuple contre les seigneurs d’aujourd’hui, et combattons aux côtés des Jacques qui défendent leur pouvoir d’achat comme ils brûlaient hier les châteaux.

Ce que vous voulez favoriser, c’est la répartition du fruit des richesses produites par le travail au bénéfice des dividendes. Mais on ne peut augmenter les dividendes sans réduire la part consacrée aux salaires. C’est pourquoi nous voterons contre votre texte scélérat ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

M. le président. La parole est à M. Francis Vercamer, pour le groupe NC.

M. Francis Vercamer. Nous arrivons au terme de l’examen de ce texte, qui a effectivement été beaucoup plus long que prévu et a été marqué par certaines prises de position un peu caricaturales. Je m’étonne que certains amendements aient allégrement passé le couperet de l’article 40, et j’espère qu’il en sera de même pour les amendements présentés par le Nouveau centre lors de l’examen de prochains textes.

La question essentielle qui se pose au sujet de ce texte est de savoir si les salariés français vont effectivement en bénéficier. Il comporte deux grandes parties : l’une qui prévoit de faire profiter les salariés des bénéfices de l’entreprise, l’autre qui porte plutôt sur la revalorisation salariale.

Sur la première partie, relative à l’intéressement, le Nouveau Centre soutient les propositions du Gouvernement, notamment celle du crédit d’impôt de 20 %, de nature à favoriser le développement du dispositif – même si l’objectif de doubler en quatre ans les montants distribués nous paraît très ambitieux.

Sur la participation, nous sommes plus mesurés. Pour nous en effet, la participation, c’est faire participer le salarié au capital de l’entreprise, et non lui fournir un moyen de consommer plus rapidement. Nous avons donc quelques craintes sur l’utilisation de ce déblocage, d’abord pour les entreprises, puisque souvent la participation est utilisée pour alimenter leurs fonds propres et que le déblocage risque d’avoir des conséquences sur leur gestion et leur trésorerie, mais aussi pour les salariés qui pouvaient, avec la participation, se constituer une épargne pour la retraite. Heureusement, plusieurs amendements ont corrigé le dispositif.

Concernant le SMIC et les salaires, le Nouveau Centre est très attaché au pouvoir d’achat, qui n’est pas uniquement lié au SMIC et à la revalorisation salariale, mais dépend de la différence entre la dépense et les revenus. Nous parlons ici des revenus du travail, mais il est également important de s’attacher à la diminution des dépenses.

La création d’un groupe d’experts me paraît donc essentielle pour obtenir des données claires sur l’espace économique et permettre aux partenaires sociaux une analyse indiscutable des faits sur lesquels asseoir le dialogue social.

M. Marcel Rogemont. Parce que l’INSEE ne suffit pas ?

M. Francis Vercamer. Il faut aussi revoir l’échelle des salaires. Depuis vingt ans, on tasse les salaires, et de plus en plus de Français sont au SMIC. Les classes doivent aussi bénéficier d’avancées, et il est important que le Gouvernement pousse les entreprises et les branches à négocier.

Cela étant, le groupe Nouveau Centre votera ce texte, qui nous paraît aller dans le bon sens pour les salariés.

M. le président. La parole est à M. François Cornut-Gentille, pour le groupe UMP.

M. François Cornut-Gentille. Je voudrais à mon tour féliciter le rapporteur, Gérard Cherpion, pour son excellent travail. J’insisterai également sur sa patience, qui nous a sans doute fait économiser quelques heures de débat supplémentaires.

Sur le fond, le parti socialiste a essayé de faire croire que nous prétendions résoudre à travers ce texte tous les problèmes de pouvoir d’achat. Cela n’a jamais été l’ambition du texte. Celui-ci est à la fois plus modeste et plus ambitieux. Cela vous gêne sans doute, mais il apporte indéniablement à des milliers de salariés travaillant pour des petites entreprises des améliorations concrètes en matière d’intéressement.

M. Alain Néri. Si vous vouliez améliorer la situation des salariés, il fallait voter nos amendements !

M. François Cornut-Gentille. Il améliore également la situation des salariés appartenant à des branches qui pratiquent des grilles où les départs salariaux sont inférieurs au SMIC. C’est une avancée sociale importante pour les salariés de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Mes chers collègues, nous avons passé beaucoup d’heures ensemble et je voulais vous remercier pour la courtoisie qui a présidé aux débats.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

M. le président. La parole est à M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État.

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. Les débats nous ont permis d’identifier deux points de divergence. Notre projet de loi repose d’abord sur le pari de la négociation, face à une démarche qui consiste à forcer davantage le dialogue social. Il entend aussi donner corps à une négociation salariale plus active et plus dynamique, face à un autre parti, défendu notamment par M. Brard, consistant à vouloir « scotcher » tout le monde au niveau du SMIC. Or ce qui me gêne dans votre position, monsieur Brard, ce n’est pas le SMIC, mais l’absence de négociations et le manque de perspective de progression salariale.

Je remercie évidemment le rapporteur Gérard Cherpion pour son travail extrêmement constructif, qui a enrichi le texte, notamment sur la négociation salariale. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Je remercie également la commission des affaires sociales dans son ensemble, son président, et les deux rapporteurs pour avis, Louis Giscard d’Estaing et Patrick Ollier.

Je salue enfin les interventions de l’opposition quand elles ont été constructives. J’ai toutefois été surpris des alternances de rythme qu’ont connu les débats, avec parfois une lenteur impressionnante et soudainement une accélération bouleversante aux articles 4 et 5.

M. Marcel Rogemont et M. Alain Néri. Ces propos sont indécents !

M. Laurent Wauquiez, secrétaire d'État. J’ai tendance à penser que l’Assemblée s’enrichit quand elle est le lieu de débats constructifs mais qu’elle appauvrit un peu plus son image quand ce n’est plus le cas.

2

Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi généralisant le revenu de solidarité active et réformant les politiques d'insertion.

La séance est levée.

(La séance est levée à treize heures vingt.)