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Commission des affaires européennes

mardi 5 octobre 2010

17 h 45

Compte rendu n° 164

Présidence de M. Pierre Lequiller, Président de la Commission des affaires européennes

Audition, ouverte à la presse, conjointe avec la Commission des finances, de M. Algirdas Šemeta, commissaire à la fiscalité et à l’union douanière, à l’audit et à la lutte antifraude

COMMISSION DES AFFAIRES EUROPEENNES

Mardi 5 octobre 2010

Présidence de M. Pierre Lequiller,

Président de la Commission des affaires européennes

La séance est ouverte à 17 h 50

Audition, ouverte à la presse, conjointe avec la Commission des finances, de M. Algirdas Šemeta, commissaire à la fiscalité et à l’union douanière, à l’audit et à la lutte antifraude

Le Président Pierre Lequiller. C’est avec grand plaisir que nous accueillons M. Algirdas Šemeta, commissaire européen chargé de la fiscalité, de l’union douanière, de l’audit et de la lutte contre la fraude, pour une audition qui devrait être conjointe avec la Commission des finances. Celle-ci n’ayant toutefois pas encore terminé ses travaux, je ne puis vous assurer de la présence de nos collègues même si je l’espère bien entendu vivement.

Monsieur le commissaire, nous sommes principalement intéressés par votre point de vue sur les problèmes liés à la fiscalité mais je gage que nos collègues auront également à cœur de vous entendre, par exemple, sur la réforme de l’Office européen de lutte anti-fraude (OLAF). Nous sommes d’autant plus vigilants sur toutes ces questions que nous réfléchissons à une possible convergence fiscale entre l’Allemagne et la France.

Précisément, est-il selon vous possible de renforcer encore l’harmonisation des taux de TVA ? Quelles sont les perspectives de révision de la directive « épargne » alors que la discussion semble bloquée et que la bonne application de ce texte constitue pourtant la contrepartie à la libre circulation des capitaux en Europe ? Quid des projets européens de taxation du secteur financier, de la fiscalité verte – je songe, notamment, à la taxe carbone – et de l’établissement d’une assiette commune pour l’impôt sur les sociétés ? Enfin, sur ces sujets où la coopération à vingt-sept est plus difficile que sur d’autres, ne conviendrait-il pas d’envisager le recours à une coopération renforcée ?

M. Algirdas Šemeta, commissaire à la fiscalité et à l’union douanière, à l’audit et à la lutte antifraude. Je suis ravi d’être parmi vous et je vous remercie de vos propos introductifs, Monsieur le président. Je serai quant à moi très heureux de répondre à l’ensemble de vos questions, qu’elles concernent la fiscalité, bien entendu, mais aussi l’union douanière ou la lutte contre la fraude, secteurs qui relèvent également de ma compétence.

Je concentrerai mon intervention liminaire sur trois points principaux.

Tout d’abord, je considère que la situation économique que nous connaissons implique de réaliser des efforts fiscaux supplémentaires au niveau européen.

La crise offre en effet une opportunité de redéfinir notre système fiscal. En Europe, il convient de mettre en place des mesures de rigueur et d’austérité budgétaires, à charge pour les Etats membres de l’Union de définir les moyens permettant d’assurer la rentrée de recettes fiscales tout en encourageant l’emploi, l’investissement et le développement d’une économie moderne fondée sur la connaissance. À cet égard, il ne me semble pas inintéressant d’envisager un glissement de la taxation du travail à une taxation de la propriété ou de la consommation, ou encore à une fiscalité écologique, dès lors que de telles initiatives seront prises collectivement : une coordination me paraît en effet indispensable pour que les réformes soient équitables.

En outre, le secteur financier fournir une contribution plus substantielle aux finances publiques. Faut-il taxer les transactions ou les institutions financières ? L’Union peut-elle agir seule ? Comment éviter une délocalisation des activités financières en cas de taxations excessives ? Ce sont là autant de questions décisives auxquelles nous sommes confrontés et sur lesquelles la Commission va proposer prochainement des orientations.

Deuxième point : en quoi la fiscalité peut-elle contribuer à une croissance durable ?

La stratégie « Europe 2020 » présentée par la Commission européenne vise à mettre en œuvre un programme de croissance durable mais, comme l’a souligné M. Mario Monti, les obstacles fiscaux sont à ce jour trop nombreux pour assurer un bon fonctionnement du marché unique. J’insisterai, en la matière, sur quatre priorités que je m’assigne.

Il convient, tout d’abord, d’élaborer une base commune quant à l’impôt sur les bénéfices, la vingtaine ou la trentaine de systèmes existants entraînant des distorsions de marché considérables, pour ne pas parler de coûts administratifs parfois prohibitifs. Le projet d’assiette commune consolidée pour l'impôt des sociétés (ACCIS) vise à apporter une solution effective à ce problème.

Par ailleurs, le système de TVA doit également être révisé afin de créer un contexte plus propice au développement économique et d’éviter le plus possible la fraude fiscale.

De surcroît, il faudra examiner la nature des obstacles fiscaux auxquels se heurtent les citoyens européens exerçant leur droit de travailler, de se déplacer ou de passer leur retraite dans des Etats membres dont ils ne sont pas les ressortissants.

Enfin, la révision de la directive sur la fiscalité de l’énergie doit quant à elle permettre de créer un système plus cohérent, notamment par rapport aux objectifs européens de lutte contre le réchauffement climatique.

Troisième point, enfin : comment éviter les fraudes mais, également, la concurrence fiscale déloyale entre Etats membres ?

Nous devons non seulement poursuivre nos efforts pour lutter contre ce type de concurrence au sein de l’Union mais, également, travailler avec l’ensemble de nos partenaires internationaux. Si la promotion des investissements visant à augmenter les recettes fiscales me semble raisonnable dans le cadre de programmes de consolidation budgétaire, il me paraît tout aussi indispensable d’éviter, au niveau européen, l’adoption de politiques nationales trop agressives, qui risqueraient de déstabiliser celles des autres Etats membres – nous entretenons sur ce point un dialogue permanent avec tous les pays de l’Union. Enfin, je considère que le code de bonne conduite en matière de fiscalité des entreprises doit être revu afin de le rendre plus efficace.

Le bon recouvrement de l’impôt est une nécessité d’autant plus cruciale que la fraude fiscale prive les Etats membres de milliards d’euros chaque année et, ce, au détriment des contribuables honnêtes. A ce titre, l’Union européenne doit poursuivre ses efforts en faveur d’une bonne gouvernance en favorisant la transparence et l’échange d’informations. La Commission a présenté des propositions ambitieuses afin d’améliorer la coopération entre les différentes administrations fiscales auxquelles le secret bancaire, notamment, ne devra plus être opposé.

Au final, peut-on estimer que nos efforts d’harmonisation fiscale vont dans la bonne voie ? Sur ce plan-là, nous devons faire preuve de souplesse et de créativité afin de trouver des solutions pragmatiques permettant notamment de concilier fiscalité et croissance durable. Chaque Etat membre est en effet impliqué, les propositions fiscales européennes nécessitant l’unanimité au sein du conseil des ministres des finances. Dans un certain nombre de cas, l’harmonisation me paraît néanmoins absolument nécessaire dès lors que nous voulons profiter des avantages d’un marché unique tout en améliorant notre compétitivité.

Quoi qu’il en soit, et même s’il est toujours difficile de trouver le juste équilibre, je gage que de nouveaux instruments verront le jour afin d’accroître la coordination entre les Etats membres dans un monde économiquement de plus en plus intégré. Chacun se rend bien compte, en effet, que faire cavalier seul ne permettrait pas d’atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés. En l’occurrence, le groupe dédié à l’examen des politiques fiscales que j’ai créé et auquel participent des représentants des ministères des finances européens me semble être la bonne structure pour évoquer l’ensemble de ces problèmes.

Le Président Pierre Lequiller. Je vous remercie.

M. Jacques Myard. Si l’harmonisation complète des taux – d’ailleurs impossible – ne s’impose pas comme en atteste l’exemple américain où les différences peuvent être très importantes d’un Etat à l’autre, pourquoi ne parvient-on pas néanmoins à établir une modalité commune de calcul de la base, notamment s’agissant de l’impôt sur les sociétés, quitte à ce que s’exerce ensuite l’inévitable concurrence fiscale ?

J’ajoute que si nous ne voulons pas aller au-devant de difficultés considérables, il importe que le G 20 se saisisse de la question – fût-elle particulièrement délicate – d’une taxation financière internationale.

M. Philippe Cochet. Ce point me semble en effet particulièrement important et vous avez un grand rôle à jouer en la matière, Monsieur le commissaire.

S’agissant de la concurrence fiscale au sein de l’Union, je souhaiterais connaître le « Top 5 » des « élèves » les plus loyaux et celui de ceux qui ne le sont pas.

Enfin, pouvez-vous nous communiquer un calendrier précis de la mise en œuvre des différentes réformes ?

M. Robert Lecou. La réforme de l’OLAF qui doit être menée à terme à la fin de 2011 n’implique-t-elle pas de rendre l’Office indépendant de la Commission ? Si tel était le cas, ne serait-il pas opportun de créer un Parquet européen, comme l’autorise désormais le traité de Lisbonne ?

M. Algirdas Šemeta. S’agissant de l’élaboration d’une base commune – notamment pour l’impôt sur les sociétés puisqu’en dépit du marché unique, nous ne dénombrons en l’occurrence pas moins de 27 bases différentes –, nous avons encore des progrès à réaliser. Nous y travaillons donc, notamment dans le cadre d’un séminaire qui se déroulera le 20 octobre et auquel participeront des experts des Etats membres ainsi que l’ensemble des parties concernées. Nous nous efforcerons par ailleurs de formuler de nouvelles propositions au début de l’année prochaine tant ce problème est prioritaire pour M. Barroso, comme il a eu l’occasion de le dire lors de son discours sur l’état de l’Union européenne. Je veillerai personnellement à ce que ce dossier soit traité dans les meilleures conditions.

En ce qui concerne la TVA, la législation européenne est censée être harmonisée mais des exemptions, des exceptions et des exonérations n’en demeurent pas moins. Sans doute le moment est-il donc venu de faire le point sur l’ensemble des systèmes en vigueur, notamment dans le cadre du Livre vert qui est en préparation. Dans un second temps, nous pourrons discuter des obstacles à l’harmonisation persistant en la matière au sein de l’Union et des moyens de les lever – je songe, notamment, à la mise en place d’une structure commune permettant de lutter contre la fraude et de résoudre les nombreux problèmes administratifs que rencontrent les entreprises pour calculer leur TVA. Je compte particulièrement sur la France pour nous aider à élaborer une stratégie globale dans le cadre de ces « états généraux ».

La fiscalité dans le secteur financier – très largement sous-taxé par rapport à d’autres car non assujetti à la TVA – constitue quant à elle une question d’une grande actualité sur laquelle la Commission proposera rapidement des orientations. Voulons-nous donc remédier à cette situation et, si oui, comment ? L’ECOFIN s’est réuni à deux reprises à ce sujet et deux grandes perspectives semblent se dessiner : en l’occurrence, la mise en place de deux taxes, respectivement sur les transactions financières – dite FTT – et sur l’activité financière, laquelle serait une sorte de transposition de la TVA à ce secteur. Au sein du Conseil européen, nul ne rejette a priori cette idée – chacun connaît l’importance des recettes fiscales en jeu – à condition qu’elle soit appliquée dans le monde entier et que, dans le cas contraire, les risques de délocalisations soient sérieusement évalués. Il va de soi qu’avant de formuler des propositions de ce type à la Commission, nous devons étudier l’ensemble des paramètres.

S’agissant de la lutte contre la concurrence fiscale déloyale, de nouveaux efforts doivent être consentis. D’ores et déjà, des instruments existent qui permettent d’y faire face – je pense, notamment, au code de conduite sur la fiscalité des entreprises approuvé par les Vingt-Sept – et qui ont d’ailleurs permis de mettre au jour 400 régimes suspects, dont une centaine se sont révélés contestables. Cependant, il me semble qu’au bout de dix ans, il est temps de réexaminer les cinq critères définissant cette concurrence dommageable de manière à cerner le plus exactement possible les domaines dans lesquels elle s’exerce, les décalages existants entre les différents systèmes fiscaux contribuant aux tra nsferts des capitaux. Je ferai en tout cas de mon mieux pour que les Vingt-Sept se mettent d’accord sur l’élargissement du « cadre d’harmonisation ».

Par ailleurs, il importe de parvenir à l’adoption d’un code de bonne conduite avec des pays extérieurs à l’Union – je songe, par exemple, à la Suisse, au Liechtenstein ou à d’autres centres financiers importants mais, également, aux pays en voie de développement auxquels l’Union européenne est la première à apporter son aide et qui pourraient fort bien se rallier à ces principes fiscaux.

S’agissant de l’OLAF, un nouveau directeur général sera bientôt nommé et j’ai quant à moi remis un rapport au Parlement et au Conseil européens proposant un certain nombre de réformes. Au vu de la réponse qui me sera faite, mes services rédigeront une proposition législative sur laquelle un accord sera, je l’espère, trouvé dans le courant de l’année prochaine.

En l’état, nous devons résoudre les problèmes existants au sein de l’Office afin de le rendre plus efficace, puis il conviendra d’envisager les relations qu’il pourrait entretenir avec d’autres institutions dont le traité de Lisbonne prévoit la création – je songe, en effet, à la mise en place d’un Parquet européen.

M. Jean Gaubert. Je vous remercie, Monsieur le commissaire, pour toutes ces précisions.

Qu’en est-il du rapport entre la base de l’IS et le niveau des services rendus aux entreprises ? Les patrons de Toyota n’ont-ils pas justifié une installation d’usine dans notre pays, malgré la pression fiscale que l’on connaît, parce que celle-ci leur semble compensée par l’existence de bons services, dans le domaine de la voirie ou dans celui de la formation par exemple ? Il s’agit là d’un élément important de la compétitivité des Etats.

Par ailleurs, pourriez-vous être plus précis quant aux taxes envisagées pour le secteur financier ? Transactions virtuelles et réelles seront-elles également taxées ? Dans ce cas-là, les banques ne seront-elles pas amenées à réformer leur système de fonctionnement ?

En outre, quelle est votre conception des rapports entre l’union douanière et le reste du monde ? Quid de la préférence communautaire à cet égard ? Les règles sociales, sanitaires et environnementales de l’Union sont-elles ou non discriminantes en matière commerciale ? Quelles sont vos relations avec votre homologue chargé des négociations à l’OMC ?

M. Jérôme Lambert. Je suis d’accord avec vous de même qu’avec la Commission européenne, Monsieur le commissaire, s’agissant en particulier de la sanction des écarts de compétitivité entre Etats membres, même s’ils sont difficiles à mettre en évidence tant ils touchent de nombreux domaines, qu’ils soient fiscaux, sociaux ou environnementaux.

Par ailleurs, que pensez-vous de l’application d’un taux réduit de TVA aux travaux sur l’habitat et à la restauration, telle que nous la connaissons en France ?

Enfin, pouvez-vous affirmer qu’ont bel et bien disparu, au sein de l’Union, paradis fiscaux et secret bancaire ? Qu’en est-il donc du Luxembourg ou des îles Anglo-normandes ?

M. Thierry Carcenac. Comment l’Union envisage-t-elle de remédier au caractère de plus en plus formel des échanges interétatiques de renseignements fiscaux ?

En outre, quelle est l’évolution du programme européen « Douane 2013 », tant en ce qui concerne les douanes communautaires que les systèmes d’information transeuropéens ?

M. Algirdas Šemeta. Ne nous méprenons pas : on ne réglera pas tous les problèmes de compétitivité au sein de l’Union européenne d’un coup de baguette magique fiscale. Il reste beaucoup à faire, notamment dans le cadre de la stratégie Europe 2020. Votre compatriote Michel Barnier présentera bientôt le Nouvel acte pour le marché unique – Single Market Act –, qui comporte des dispositions de toutes natures. L’approche fiscale n’est pas la seule pertinente.

Toutefois, la création d’une assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés améliorerait la situation. Cela accroîtrait la compétitivité de l’Union européenne, dans la mesure où il serait plus facile pour une entreprise de s’implanter dans un autre Etat membre, et cela favoriserait les investissements directs étrangers.

Je suis d’accord avec vous : la fiscalité n’est qu’un facteur parmi d’autres intervenant dans la décision d’une entreprise de s’implanter dans un pays européen. Ainsi, bien que les prélèvements obligatoires y soient particulièrement élevés, la France peut obtenir la préférence des investisseurs étrangers sur des pays à la fiscalité attractive, mais au système juridique défaillant.

S’agissant de l’union douanière, je travaille à la mise en œuvre du code des douanes communautaire modernisé, qui doit entrer en vigueur au plus tard le 24 juin 2013. J’ai demandé à mes services de définir une feuille de route, dont je contrôle régulièrement l’état d’avancement.

Il s’agit d’un projet complexe, qui intéresse non seulement les administrations douanières mais aussi les intervenants sur les marchés internationaux, et qui nécessite des investissements importants en termes d’infrastructures et de systèmes informatiques. Nous avons engagé un dialogue permanent avec les milieux d’affaires, par l’intermédiaire de groupes de contact spécialisés. Sachez que je fais tout mon possible pour que les délais soient tenus.

Une autre priorité pour l’Union européenne, c’est l’amélioration de la protection des droits de propriété intellectuelle. Nous examinons actuellement plusieurs propositions tendant à renforcer la législation en la matière. Je me suis récemment rendu en Chine, qui est l’un des principaux pourvoyeurs de produits de contrefaçon. Malgré une certaine bonne volonté des autorités chinoises, il n’est pas facile de progresser sur ce sujet. Nous nous sommes mis d’accord sur un plan d’action et sur la nécessité d’inclure de nouveaux objectifs dans le projet Smart & Secure Trade Lanes (SSTL). Les autorités douanières chinoises étudient également la possibilité de créer un statut équivalent à celui d’opérateur économique autorisé (AEO). Ce projet semble en bonne voie.

Pour être franc, je ne crois pas à l’efficacité des taux réduits de TVA. Je pense qu’ils provoquent trop souvent des effets d’aubaine et qu’il existe des instruments plus pertinents et plus efficaces. Il reste que la législation européenne en prévoit la possibilité. Lorsque la directive de 2009 sur les nouveaux critères d’éligibilité aux taux réduits de TVA est entrée en vigueur, j’étais le ministre des finances de mon pays ; je me rappelle qu’il avait été bien difficile de se mettre d’accord sur les services et sur les entreprises susceptibles d’en bénéficier !

Pour l’instant, je n’ai pas de solution de remplacement. Toutefois, j’ai entrepris la rédaction d’un livre vert sur le sujet ; j’engagerai ensuite des discussions avec les Etats membres afin d’examiner comment améliorer le système actuel de la TVA.

S’agissant des paradis fiscaux, nous avons élaboré un ensemble de directives visant à faciliter les échanges d’informations. Pour sa part, la Commission a toujours été favorable à l’échange automatique d’informations, principe que nous promouvons non seulement à l’échelle européenne, mais aussi à l’échelle mondiale. Ainsi, lors d’une récente visite à Hongkong et à Macao, j’ai essayé de convaincre mes interlocuteurs que seul un tel dispositif pourrait régler les problèmes d’évasion fiscale.

Il existe donc déjà des directives européennes, qu’appliquent aussi bien le Luxembourg que l’Autriche. Toutefois, nous estimons que, dans ce domaine, l’Union européenne doit être exemplaire. C’est pourquoi je m’emploie à ce que ces directives soient plus largement appliquées. Mes échanges bilatéraux avec les ministres des finances des Etats membres ont permis des avancées, qui devraient se concrétiser sous la présente présidence belge – tout au moins sur certains aspects.

S’agissant du secret bancaire, le système actuel est en effet insuffisant. Le Conseil vient d’autoriser la mise en place du système Eurofisc, visant à améliorer les échanges d’informations entre les Etats membres. Si la Commission soutient bien entendu cette initiative, nous estimons qu’il convient de se doter rapidement d’un dispositif de lutte contre la fraude à la TVA, qui est l’un des principaux fléaux en matière fiscale. Des propositions sont actuellement en cours d’élaboration.

M. Gérard Voisin. Dans le cadre d’une politique européenne de l’environnement, les transporteurs routiers français pourraient avoir intérêt à réclamer une augmentation des taxes. Cette analyse, bien qu’iconoclaste, s’appuie sur des arguments sérieux dans l’objectif de défendre une profession aujourd’hui accusée de tous les maux.

Je suis chargé au sein de la Commission des affaires européennes d’un rapport sur les projets d’eurovignette, dans lequel je proposerai que toutes les taxes spécifiques au transport routier, comme la taxe à l’essieu ou la taxe sur les contrats d’assurance, soient intégrées dans les taxes environnementales dont s’acquittent les transporteurs routiers étrangers quand ils traversent la France. Le pavillon français est très intéressé par cette proposition, qui lui permettrait de retrouver une certaine compétitivité.

J’étudie en outre la possibilité, si la législation européenne le permet, d’intégrer une partie des cotisations sociales dans l’écotaxe qui sera prélevée à partir de 2012 sur les véhicules de plus de 3,5 tonnes empruntant notre réseau de routes nationales.

L’Allemagne a créé une TVA sociale. Nous pouvons nous inspirer de ce modèle pour faire supporter aux importations et au trafic de transit une partie du coût de notre protection sociale. Je crois que l’Europe le permet et je souhaite que nous utilisions toutes les possibilités qu’elle nous offre pour rétablir une vraie concurrence dans ce domaine.

M. Jean-Yves Cousin. Un élargissement du champ d’application de la TVA à tout ou partie du secteur des services financiers est-il envisageable ?

M. Algirdas Šemeta. Une nouvelle directive sur la fiscalité de l’énergie, qui concernera aussi le secteur des transports, est en cours d’élaboration. Actuellement, le niveau de taxation varie suivant le type de carburant utilisé. Notre souhaitons mettre en place un système plus logique, qui établisse une distinction entre la composante énergétique et la composante non énergétique d’un moyen de transport. Parmi les mesures envisagées figurent la taxation des émissions de CO2 et la taxation du contenu énergétique. Je dois reconnaître que nous n’avons pas beaucoup avancé sur ce sujet. En tout cas, j’ai pris bonne note de vos propositions.

S’agissant des services financiers, il semble difficile de leur appliquer la TVA directement, comme on le fait pour les autres biens et services. Encore faudrait-il savoir ce que l’on taxe !

Pour résoudre le problème, il a été proposé d’instaurer, soit une taxe sur les transactions financières, soit une taxe sur les activités financières, qui serait une sorte de substitut à une TVA aujourd’hui inexistante. Chaque système a ses avantages et ses inconvénients. Les arbitrages sont en cours et des propositions concrètes seront faites très prochainement.

Quoi qu’il en soit, la discussion sur l’avenir du système de la TVA reste ouverte.

Le Président Pierre Lequiller. Monsieur le commissaire, je vous remercie. Sachez que nous sommes convaincus de la nécessité de travailler en collaboration avec les institutions européennes, en particulier avec la Commission. Nous suivrons de près les questions abordées aujourd’hui.

M. Algirdas Šemeta. Il est en effet important que la Commission puisse travailler en liaison étroite avec les parlements nationaux et leur expliquer les politiques proposées à l’échelon européen, car les parlementaires peuvent avoir une influence déterminante sur leurs gouvernements à l’occasion de certaines décisions importantes. J’espère donc la poursuite de notre coopération.

La séance est levée à 19 h 05

Membres présents ou excusés

Commission des affaires européennes

Réunion du mardi 5 octobre 2010 à 17 h 45

Présents. - M. Philippe Cochet, M. Jean Gaubert, M. Jérôme Lambert, M. Robert Lecou, M. Pierre Lequiller, M. Jacques Myard, M. Gérard Voisin

Excusés. - M. Michel Diefenbacher, Mme Marietta Karamanli

Assistaient également à la réunion. - M. Thierry Carcenac, M. Jean-Yves Cousin