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PROJET DE LOI

autorisant la ratification d’un accord de partenariat et de coopération établissant

un partenariat entre les Communautés européennes et leurs Etats membres,

d’une part, et le Turkménistan, d’autre part

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ETUDE D’IMPACT

I. - Situation de référence et objectifs de l’accord ou traité

Cet accord de partenariat et de coopération (APC) succède à l’accord de commerce et de coopération signé entre la Communauté européenne et l’ancienne Union soviétique en décembre 1989. Après la reconnaissance des Etats issus de l’Union soviétique à la fin de l’année 1991, la Commission a pu engager des contacts exploratoires avec les autorités des nouvelles républiques indépendantes, afin de renégocier l’accord de 1989 sous formes d’accords de partenariat et de coopération. Ces derniers constituaient alors une « nouvelle génération » d’instruments juridiques au service des relations extérieures de la Communauté. Dépassant le champ des simples « accords de commerce et de coopération », ils ne prévoient toutefois pas, comme le font les accords de stabilisation et d’association avec les Balkans occidentaux, la possibilité d’une adhésion future à l’Union.

L’objectif d’un APC est de créer une base juridique unique pour l’ensemble des relations de l’Union européenne avec un pays donné (dialogue politique, droits de l’Homme, coopération culturelle et législative, immigration…) même si les clauses commerciales et économiques dominent. Il pose aussi les bases d’un renforcement continu des relations de l’UE avec ce pays au moyen des différents programmes d’action extérieure de l’Union. Dans le cas du Turkménistan, l’intérêt de l’APC est d’autant plus grand que ce pays n’est pas membre de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC).

A ce jour, des accords de ce type ont été signés avec la quasi-totalité des Etats de la CEI. La France a d’ores et déjà ratifié les accords signés avec la Russie, l’Ukraine, la Moldavie, le Kazakhstan, le Kirghizstan, l’Ouzbékistan, le Tadjikistan, l’Arménie, l’Azerbaïdjan, et la Géorgie. L’accord avec le Turkménistan complète donc le maillage d’accords conclus par l’Union avec les Etats d’Asie centrale au moment où l’UE assure la mise en œuvre d’une Stratégie pour l’Asie centrale, adoptée par le Conseil européen de juin 2007. La ratification de l’accord permettra donc d’établir avec le Turkménistan un niveau de dialogue politique et de coopération en phase avec le niveau de coopération établi entre l’UE et les quatre autres voisins d’Asie centrale du Turkménistan, en cohérence avec la volonté des deux Parties de renforcer leurs liens, notamment dans le cadre posé par la Stratégie de l’UE pour l’Asie centrale.

II. - Conséquences estimées de la mise en œuvre de l’accord ou convention

Les bénéfices essentiels de cet accord pour l’UE sont l’institutionnalisation et le renforcement du dialogue politique, le développement des relations commerciales, la mise en place d’un cadre juridique et réglementaire propice aux investissements et la promotion de la coopération régionale (avec l’objectif de désamorcer des tensions entre Etats de la région, notamment en matière de contrôle des frontières, de lutte contre les différentes formes de trafic, et de gestion de l’eau).

Conséquences économiques

L’accord traite largement des questions commerciales et d’investissements en reprenant les clauses standards des accords APC. Du fait que le Turkménistan n’est pas membre de l’OMC – ni même candidat – l’accord offre un cadre juridique sécurisé aux relations commerciales UE-Turkménistan. La mesure phare de l’accord est l’octroi réciproque du statut de la nation la plus favorisée. Cette mesure susceptible de développer les relations économiques entre l’UE et le Turkménistan aura cependant un impact relativement limité pour l’économie française vu le très faible volume de nos échanges avec ce pays. Il sera néanmoins positif, notre solde commercial avec le Turkménistan étant très largement positif.

Au niveau commercial, les relations entre la France et le Turkménistan sont en effet très limitées en volume bien que les statistiques du commerce extérieur donnent une vision limitée de ces relations car la plupart des commandes sont comptabilisées depuis Dubaï. En 2007 la France a exporté pour 37 M€ vers le Turkménistan (essentiellement de l'équipements mécaniques et de biens d'équipement). Depuis 10 ans, c'est principalement la réussite du groupe Bouygues (grands projets de constructions dans la capitale Achgabat) qui a permis de développer nos exportations et une présence économique française sur place : Vinci, DMT, Lafarge, Alstom et PME d’artisanat (céramique, luminaire, mobilier, tapisserie).

Les importations se limitent à 4 M€ (produits énergétiques et agricoles). C'est dans le domaine énergétique que se situe le plus large potentiel de croissance, le Turkménistan disposant de très larges réserves de gaz (prouvées et potentielles). La mise en exploitation de ces gisements on-shore et surtout off-shore en mer Caspienne nécessitera une expertise et du capital étranger (Total est ainsi déjà bien positionné).

Le climat des affaires reste difficile pour le secteur privé mais les réformes législatives permettent désormais aux investisseurs étrangers d’entrer sur les marchés, notamment ceux de l’énergie, en garantissant le droit à la propriété, à la terre et au rapatriement des profits. A long terme, la croissance économique soutenue du pays (notamment grâce à la rente énergétique) conjugué aux immenses besoins d'investissement (pétrochimie, eau mais aussi santé et éducation) devrait stimuler les Investissements Directs Étrangers dans le pays. L'accord UE-Turkménistan (titre IV notamment) permettra donc d'accompagner juridiquement ces évolutions et de favoriser la mise en œuvre des réformes.

En résumé, les clauses de cet accord en matière de commerce et d’investissements (élimination des discriminations en ce qui concerne les conditions de travail, de rémunération ou de licenciement ; traitement national ou statut de la nation la plus favorisée ; libéralisation progressive des services transfrontaliers ; liberté du transfert de paiements et de capitaux ; amélioration de la protection des droits de propriété intellectuelle, industrielle et commerciale) permettent d’envisager, proportionnellement aux échanges limités entre la France et le Turkménistan, un renforcement des relations économiques et la promotion des investissements.

Comme il est typique dans ce type d’accord, certaines clauses permettent d’en atténuer les éventuels impacts négatifs si le développement des échanges devaient mettre en danger un secteur ou une filière spécifique dans un ou plusieurs Etats membres de l’Union. Par ailleurs, les produits textiles ne sont pas couverts par cet accord. Ils font l’objet d’un accord sectoriel précédent appliqué depuis 1996.

Conséquences financières

L’assistance financière de l’UE au Turkménistan relève depuis 2007 de l’Instrument pour la Coopération et le Développement (ICD). Indépendamment de l’entrée en vigueur de l’accord, une enveloppe de 22M€ a été définie pour la période 2007-2010 dans le cadre du programme multi-annuel indicatif mettant en œuvre la Stratégie de l’UE pour l’Asie centrale. Cette aide soutient des projets dans les domaines prioritaires suivants :

• réduction de la pauvreté et amélioration des conditions de vie ;

• développement régional et local;

• réforme au profit du développement rural et des secteurs sociaux;

• bonne gouvernance et réforme économique ;

• démocratisation et bonne gouvernance (défense de la société civile, du dialogue social et de la démocratisation, de la réforme judiciaire et de l'État de droit, amélioration de l'administration publique et de la gestion des finances publiques);

• réformes réglementaires dans les domaines du commerce et des marchés et le renforcement des capacités administratives.

Sans être strictement liés, l’accord (titre X) et l’assistance financière bilatérale de l’UE se complètent et se renforcent mutuellement. L’accord consolidera le cadre politique et juridique de l’assistance communautaire en renforçant la convergence d’objectifs et de valeurs entre l’UE et le Turkménistan.

Conséquences sociales

Aucunes à prévoir en France. L’accord ne libéralise pas l’accès des Turkmènes au marché du travail communautaire et prévoit même de renforcer la lutte contre l’immigration clandestine (réadmission).

Conséquences environnementales

La stratégie de l’UE pour l’Asie centrale prévoit un soutien à hauteur de 16,2M€ (2007-2010) pour des projets environnementaux d’envergue régionale. Là encore, l’entrée en vigueur de l’APC avec le Turkménistan permettra à l’UE de mieux pouvoir coopérer sur une base régionale avec les pays de la région dans le domaine environnemental : gestion de l’eau, lutte contre la désertification.

Conséquences juridiques

Cet accord permet de clarifier, sur le plan juridique, les relations entre l’Union européenne et le Turkménistan puisqu’il remplacera le précédent accord signé en 1989 avec l’Union soviétique dont le Turkménistan n’était alors qu’une des républiques constitutives. Aux termes de l’article 100 du présent accord, ce dernier remplacera le précédent dès son entrée en vigueur.

D’un point de vue juridique, l’intégralité des dispositions de l’accord est issue de différents chapitres de la législation communautaire, déjà mis en œuvre par les Etats membres de l’Union. La ratification de cet accord n’engendrera en conséquence aucune modification de l’état du droit français, ni des dispositions de nature constitutionnelle, ni de celles de nature législative ou réglementaire.

Conséquences administratives

Aucunes

III. - Historique des négociations

Après la reconnaissance des Etats issus de l’Union soviétique à la fin de l’année 1991, la Commission a pu engager des contacts exploratoires avec les gouvernants des nouvelles républiques indépendantes, afin de renégocier l’accord de 1989 avec l’Union soviétique. L’Union européenne a adopté le 5 octobre 1992 des directives de négociation relatives aux accords devant être conclus avec les République de la Communauté des Etats indépendants. Les négociations portant sur l’APC avec le Turkménistan se sont achevées le 24 mai 1997 et l’accord a été signé à Bruxelles en mai 1998.

IV. - Etat des signatures et ratifications

A l’été 2009, treize Etats avaient ratifié le traité. Un état actualisé des ratifications est en ligne sur le site du Conseil de l’UE à l’adresse :

http://www.consilium.europa.eu/applications/Accords/details.asp?cmsid=297&id=1998010&lang=FR&doclang=FR

Il n’a pas encore été ratifié par les Communautés européennes notamment en raison d’un blocage du Parlement européen lié à l’absence de progrès du Turkménistan en matière de droits de l’Homme. Le Parlement européen a cependant donné le 22 avril dernier un avis favorable à la conclusion de l'accord intérimaire avec le Turkménistan sur le commerce et les mesures d'accompagnement. Il est à noter que l’ACP prévoit des dispositions plus précises en matière de droits de l’Homme et la mise en place d’un dialogue politique régulier au niveau ministériel qui peut offrir l’occasion d’évoquer avec les autorités turkmènes la situation politique du pays et spécifiquement la question des droits de l’Homme en évoquant des cas concrets.

IV. - Réserves

Le Gouvernement français n’envisage pas de faire de réserves.


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