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PROJET DE LOI

autorisant l’approbation de l’avenant à la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume d’Arabie Saoudite en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu, sur les successions et sur la fortune

NOR : MAEJ1123309L/Bleue-1

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ÉTUDE D’IMPACT

I. - Situation de référence et objectifs de l’accord ou traité

Contexte général

À la suite des affaires bancaires survenues au printemps 2008 (affaires de la banque LGT au Liechtenstein et UBS aux Etats-Unis) et de la crise financière, 17 Etats réunis à Paris, sur l’initiative de l'Allemagne et de la France, ont alerté la communauté internationale sur nécessité de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales par le développement de la transparence fiscale dans l’ordre économique mondial. Ils ont alors demandé à l'OCDE de “réactualiser" sa "liste noire" des paradis fiscaux non coopératifs.

Depuis le G20 de Washington en novembre 2008, la France joue un rôle moteur dans le processus de sécurisation du système économique mondial à travers la mise en place de dispositifs d’échanges d’information efficaces.

Le G20 de Séoul en novembre 2010 a ouvert la présidence française du groupe. La France s’est fixée comme objectif de poursuivre et renforcer le processus engagé.

Dès lors, l'introduction dans ses conventions fiscales d’un dispositif d’échange de renseignements conforme aux standards internationaux est une priorité et la condition préalable à toute autre négociation fiscale avec ses partenaires.

Dans ce contexte, il est apparu indispensable d’introduire un tel dispositif dans la convention signée le 18 février 1982 entre la France et l’Arabie saoudite, également membre du G20.

Situation actuelle de l'Arabie saoudite

Les dépôts dans le système bancaire saoudien atteignaient 257,31 Mds USD fin novembre 2010, soit près de 60% du PIB. Le risque qu’une partie de ces dépôts soient directement issus de l’évasion fiscale semble limité. En effet, le contrôle exercé par la banque centrale (SAMA) est d’autant plus régulier, professionnel et exigeant que la crise traversée par la National Commercial Bank à la fin des années 1990 a été vécue comme un véritable traumatisme. De l’avis de l’ensemble des observateurs, l’efficacité des contrôles opérés la place au premier rang des banques centrales de la région, devant celles de Bahreïn et Dubaï.

En revanche, la « Global Financial Integrity » estime que 33,5 Mds USD sortiraient illégalement chaque année d’Arabie saoudite par le biais de fausses facturations liées aux échanges. Compte tenu de la faible fiscalité saoudienne, certaines multinationales peuvent en effet être tentées de surfacturer certaines exportations à destination du Royaume pour minimiser leurs bénéfices dans des pays où la pression fiscale est plus forte. La SAMA semble assez démunie face à ce phénomène.

Le système bancaire joue un rôle essentiel dans l’accompagnement du développement de l’économie saoudienne réelle en général, de l’économie hors hydrocarbures en particulier, leur activité étant le plus souvent limitée au marché intérieur. Il est particulièrement actif dans le crédit aux entreprises, le développement des prêts personnels et des crédits à l’économie étant encore relativement limité par la difficulté qu’ont les banques à faire valoir leurs droits devant les juridictions locales et par le tarissement de la souscription de titres de dette publique avec le désendettement de l’Etat.

Alors que l’Arabie saoudite (dont le PIB représente environ 435 Mds USD) peut être considérée comme un des pays les plus peuplés et une des économies les plus puissantes du Moyen-Orient, le nombre de banques qui opèrent sur le marché reste relativement faible puisqu’il est limité à vingt et une (dont cinq banques à capitaux étrangers, quatre banques islamiques, deux succursales de la Gulf International Bank et une succursale de chacune des banques suivantes : Emirates Bank, BNP Paribas, National Bank of Kuwait, Deutsche Bank, Bank Muscat, National Bank of Kuwait, JP Morgan Chase et National Bank of Pakistan). Le système bancaire saoudien peut être considéré comme sain et solide. Sa situation en matière de capitalisation et de provisionnement est considérée comme satisfaisante.

Le pays ne compte qu’un nombre extrêmement réduit de fondations, la plupart du temps liées à des membres de la famille royale : Fondation du roi Abdel Aziz pour les surdoués, Fondation du roi Fayçal, Fondation charitable du prince Sultan, Fondation du roi Abdallah, Fondation du roi Khaled, etc. Aucun trust n’est autorisé à s’établir dans le royaume, la législation locale ne reconnaissant pas encore ce type de structure.

Fin 2010, le nombre de Français immatriculés en Arabie saoudite atteignait 4 774, dont environ 2 250 installés à Riyad, 1 500 à Djedda, 500 dans les autres grandes villes de l’Ouest et 488 dans la province Est. Le nombre d’immatriculés connaît depuis quelques années des évolutions positives en raison notamment des percées commerciales de nos entreprises (Total, ADPi, Véolia, GdF-Suez, notamment). Avec les Français « de passage », on peut estimer que le nombre total de nos ressortissants dépasse les 5 000. Le tiers à la moitié des Français immatriculés sont des binationaux, dont l’autre nationalité est souvent celle d’un pays arabe (Liban, Syrie, Maghreb). La majorité de ces binationaux réside dans le pays depuis plus d’une dizaine d’années. Plus des trois quarts font partie de la communauté des affaires et y ont été envoyés par des entreprises françaises. La France dispose d’un peu plus de 60 implantations permanentes employant environ 20 000 salariés.

* L'accord signé avec l'Arabie saoudite le 18 février 2011 est un avenant à la convention fiscale franco-saoudienne du 18 février 1982, actuellement en vigueur1.

* L'accord est une « copie » du modèle OCDE.

L’avenant (article 1) insère un article relatif à l’échange de renseignements conforme à celui du modèle de l’OCDE. Il ajoute en outre (article 2) une stipulation au Protocole de la convention inspirée de celle proposée au paragraphe 12-3 des commentaires du modèle de l'OCDE sous l'article 26. Celle-ci permettra, si la législation des deux Etats et si l’autorité compétente de l’Etat qui fournit les renseignements l’autorisent, d'élargir à des fins autres que fiscales l’utilisation des renseignements obtenus (par exemple la lutte contre le blanchiment de capitaux, la corruption, le financement du terrorisme).

II. - Conséquences estimées de la mise en œuvre des accords

Conséquences économiques et financières

Les conséquences de la mise en œuvre d’un accord d’échange d’information sur l’économie du pays devraient rester limiter. Toutefois, si les estimations avancées par la « Global Financial Integrity » sont exactes (33,5 Mds USD de surfacturation aux filiales de multinationales présentes en Arabie saoudite, chiffre qui semble toutefois étonnamment élevé compte tenu du faible nombre d’entreprises étrangères, notamment françaises, présentes dans le pays), il pourrait se traduire par un accroissement de la rentabilité de certaines entreprises locales à participation française.

Peu de ressortissants français sont implantés dans le pays depuis longtemps. L’échange d’informations permettra en tout état de cause de mieux connaître les revenus perçus par les personnes exerçant une activité professionnelle en Arabie saoudite et soumises à des obligations fiscales en France, ainsi que les impôts auxquels celles-ci sont éventuellement soumises.

Conséquences juridiques

L’ordonnancement juridique n’est pas affecté par cet avenant.

Toutefois, l’introduction dans la convention de la clause d’échange de renseignements offre la possibilité à la France de demander aux autorités de l’autre Partie contractante toute information utile à la bonne application de sa loi fiscale interne et de transmettre ces informations aux autorités concernées, y compris les autorités juridictionnelles et administratives.

Pourront être requis tous renseignements vraisemblablement pertinents pour la détermination, l'établissement et la perception des impôts, pour le recouvrement et l’exécution des créances fiscales sur les personnes soumises à ces impôts, ou pour les enquêtes ou les poursuites en matière fiscale pénale à l’encontre de ces personnes. Les demandes pourront concerner toute personne ou entité, y compris les fondations. De plus, le Royaume d'Arabie saoudite ne pourra pas opposer un éventuel secret bancaire ni subordonner la délivrance de l’information à l’existence d’un intérêt pour l’application de sa propre législation fiscale. Ainsi, la capacité de la France dans sa lutte contre la fraude et l’évasion fiscales devrait s’en trouver renforcée.

A cet égard, l’Arabie saoudite n’a pas encore été, à ce stade, évaluée par le Forum Mondial de l’OCDE sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales, bien que la 1ère phase de cette évaluation (examen des outils de droit interne permettant la mise en œuvre concrète des engagements et, le cas échéant, détermination des évolutions internes nécessaires) était prévue pour le second semestre 2010. Le lancement de cette 1ère phase devrait intervenir d’ici la fin 2011. La 2ème phase de cette évaluation (effectivité de l’échange de renseignements) est quant à elle prévue pour le 1er semestre 2014.

Le traitement et la protection des données à caractère personnel et des autres informations fournies par les Parties seront, pour la France, assurés conformément à :

- la loi n° 78-17 modifiée du 6 janvier 1978 dite « Informatique et Libertés » ;

- la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995, relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, en particulier l'article 26 ;

- la Convention du Conseil de l’Europe pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, adoptée à Strasbourg le 28 janvier 1981.

Conséquences administratives

La mise en œuvre de l’échange de renseignements sera gérée par la sous-direction du contrôle fiscal de la direction générale des finances publiques et par les directions de contrôle fiscal nationales et interrégionales au niveau déconcentré. Ces services sont déjà en charge de la mise en œuvre de l’assistance administrative dans le cadre communautaire ou en application des conventions fiscales existantes. Au regard des volumes d’informations déjà échangés, l’entrée en vigueur de l’avenant à la convention fiscale entre la France et l'Arabie saoudite ne devrait pas entraîner de surcharge administrative substantielle.

III. - Historique des négociations

Dès 2008, la France a sollicité l'Arabie saoudite en vue d'introduire les stipulations de la dernière version de l'article 26 du modèle de l'OCDE dans la convention fiscale franco-saoudienne du 18 février 1982.

Lors d'une première rencontre entre les autorités compétentes française et saoudienne, le 26 janvier 2009, à Paris, l'Arabie saoudite a exprimé le souhait d'une renégociation plus complète de la convention afin d'adapter la rédaction de ce texte aux évolutions des modèles de l'OCDE et de l'ONU.

Les autorités compétentes ont ainsi convenu d'ouvrir les négociations.

Néanmoins, à l'issue de deux tours de négociation, qui se sont respectivement déroulés à Riyad en mai 2009 et à Paris en mai 2010, les délégations ne sont pas parvenues à s'accorder sur les modalités d'une réécriture complète du texte.

Dans ces conditions, les autorités compétentes françaises ont convaincu leurs homologues saoudiens d'amender en priorité la convention en vue d'y introduire un article relatif à l'échange de renseignements conforme aux derniers standards internationaux.

IV. - Etat des signatures et ratifications

* Signature.

L'avenant a été signé à Paris le 18 février 2011 par Madame Christine Lagarde, ministre de l’économie, des Finances et de l'Industrie et Monsieur Ibrahim Abdulaziz Al-Assaf, ministre des finances du Royaume d'Arabie saoudite.

* Processus de ratification par le pays signataire.

L’Arabie saoudite n’a pas à ce jour notifié à la France l’achèvement des procédures internes requises pour l’entrée en vigueur du présent avenant.

1 http://www.impots.gouv.fr/portal/deploiement/p1/fichedescriptive_2176/fichedescriptive_2176.pdf


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