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mis en distribution

le 16 octobre 2008


N° 1118

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 septembre 2008.

PROPOSITION DE LOI

visant à améliorer la protection des personnes âgées devant les instances pénales,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Olivier JARDÉ, Jean-Pierre ABELIN, Martine AURILLAC, Pierre-Christophe BAGUET, Claude BIRRAUX, Valérie BOYER, Brigitte BARÈGES, Jacques Alain BÉNISTI, Étienne BLANC, Claude BODIN, Jean-Yves BONY, Loïc BOUVARD, François CALVET, Pierre CARDO, Dino CINIERI, Geneviève COLOT, Jean-Yves COUSIN, Jean-Michel COUVE, Henri CUQ, Olivier DASSAULT, Jean-Pierre DECOOL, Bernard DEFLESSELLES, Lucien DEGAUCHY, Richard DELL’AGNOLA, Stéphane DEMILLY, Bernard DEPIERRE, Jacques DOMERGUE, Dominique DORD, Raymond DURAND, Daniel FASQUELLE, Jean-Michel FERRAND, Philippe FOLLIOT, Yves FROMION, Jean-Pierre GRAND, Guy GEOFFROY, François-Michel GONNOT, Didier GONZALÈS, François GOULARD, François GROSDIDIER, Pascale GRUNY, Jean-Claude GUIBAL, Michel HERBILLON, Françoise HOSTALIER, Jacqueline IRLES, Denis JACQUAT, Patrick LABAUNE, Yvan LACHAUD, Colette LE MOAL, Michel LEJEUNE, Maurice LEROY, Claude LETEURTRE, Thierry MARIANI, Muriel MARLAND-MILITELLO, Franck MARLIN, Alain MARTY, Jean-Claude MATHIS, Jean-Philippe MAURER, Gérard MILLET, Jean-Marie MORISSET, Jean-Marc NESME, Bertrand PANCHER, Dominique PERBEN, Nicolas PERRUCHOT, Bernard PERRUT, Henri PLAGNOL, Jean-Luc PRÉEL, Frédéric REISS, François ROCHEBLOINE, Francis SAINT-LÉGER, Rudy SALLES, Bruno SANDRAS, Michel SORDI, Guy TEISSIER, Catherine VAUTRIN, Christian VANNESTE, François VANNSON, Isabelle VASSEUR, Patrice VERCHÈRE, André WOJCIECHOWSKI et Michel ZUMKELLER,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

D’après les données disponibles qui ressortent des enquêtes de victimisation menées depuis une dizaine d’années, 5 % des personnes de plus de 65 ans et 15 % des plus de 75 ans subissent des actes de maltraitances, en France.

Les négligences représentent une forme fréquente de cette maltraitance qui atteint une couche de la population de plus en plus nombreuse en pourcentage du fait de l’allongement de la vie : privation de soins, d’hygiène, d’aliments et de biens matériels (vêtement, chauffage, mobilier adapté). Cette forme de maltraitance tend à s’installer dans la durée et entraîne une souffrance et de graves répercussions physiques et psychiques chez la personne âgée. Cette dernière est rarement apte à pouvoir les dénoncer. On retrouve cette maltraitance aussi bien en institution que chez les personnes âgées à domicile.

Actuellement, le droit pénal appréhende mal cette forme de maltraitance et ne permet pas de donner une réponse satisfaisante au trouble grave apporté à l’ordre public touchant à la dignité de nos aînés.

Une prévention du phénomène et une protection de cette population fragile passent par une répression accrue des déviances à leur encontre.

Les incriminations existantes couvrent les actes positifs de maltraitance telles les violences ou les extorsions (abus de faiblesse).

Par les articles 223-3 et 223-4 du code pénal, le délit de délaissement d’une personne hors d’état de se protéger, notamment en raison de son âge est entendu juridiquement comme supposant un acte positif d’abandon avec une volonté délibérée d’abandonner définitivement la victime. Les négligences, même graves, dans l’aide à la vie quotidienne d’une personne âgée ne paraissent pas entrer dans cette définition. Des poursuites pénales n’ont pu aboutir sur ce fondement dans des cas où le traitement infligé à la personne âgée, par ses proches apparaissaient pourtant constituer une atteinte intolérable à la dignité humaine.

Par ailleurs, les délits non intentionnels (blessures ou homicide involontaire, risque causé à autrui, omission de porter secours) nécessitent la démonstration d’un préjudice et d’un lien de causalité entre la négligence et le préjudice. Cette démonstration est délicate dans la mesure où il est extrêmement difficile de dire si l’état de santé dégradé ou le décès de la personne âgée est lié aux négligences ou simplement à la vieillesse.

Ainsi, à l’instar du délit de privation de soins et d’aliments qui existe concernant les mineurs (article 227-15 du code pénal puni de sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende), nous proposons une incrimination équivalente pour protéger les personnes âgées ou plus généralement les personnes dépendantes.

Il convient cependant de préciser quel lien doit exister entre l’auteur et la victime et quelle victime doit être protégée par cette nouvelle incrimination.

Plutôt que de restreindre l’infraction dans le cadre familial (lien de filiation) ou institutionnel (contrat), il convient de retenir une notion empirique liée à une situation de fait : avoir la charge quotidienne d’une personne. Cette notion paraît appropriée puisqu’il s’agit de réprimer la maltraitance dans la vie quotidienne.

Les personnes à protéger sont celles qui sont dans une situation de dépendance dans les actes de la vie quotidienne. Ainsi, c’est cette notion de dépendance, plutôt que celle de vulnérabilité que l’on suppose de retenir. Cette dépendance peut être liée à l’âge mais également à l’état physique ou psychique de la personne, ce qui permet de protéger par cette nouvelle infraction les personnes handicapées.

Tels sont les motifs pour lesquels il vous est demandé de bien vouloir adopter la proposition de loi suivante visant à insérer un nouvel article dans la section VI du chapitre II du titre II du livre deuxième du Code pénal afin de rendre possible cette protection pour les personnes âgées.

PROPOSITION DE LOI

Article unique

Après l’article 222-18-2 du code pénal, il est inséré un article 222-18-3 ainsi rédigé :

« Art. 222-18-3. – Le fait, pour toute personne assumant quotidiennement la charge d’une personne dépendante en raison de son âge ou de son état psychique ou physique, de priver celle-ci d’aliments ou de soins au point de compromettre sa santé, est puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende. »


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