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le 19 janvier 2009


N° 1370

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 janvier 2009.

PROPOSITION DE LOI

visant à affecter les dividendes des entreprises
à la
garantie de l’intégralité des salaires des salariés subissant des périodes de chômage partiel,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais
prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Alain BOCQUET, Marie-Hélène AMIABLE, François ASENSI, Patrick BRAOUEZEC, Jean-Pierre BRARD, Marie-George BUFFET, Jean-Jacques CANDELIER, André CHASSAIGNE, Jacques DESALLANGRE, Jacqueline FRAYSSE, André GERIN, Pierre GOSNAT, Maxime GREMETZ, Jean-Paul LECOQ, Roland MUZEAU, Daniel PAUL, Jean-Claude SANDRIER et Michel VAXÈS,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La crise qui résulte de la financiarisation de l’économie et de l’explosion de la spéculation boursière frappe très lourdement le monde du travail. Fermetures et délocalisations d’entreprises, arrêts de productions, suppressions de milliers d’emplois intérimaires, chômage technique... Tout est mis à profit et en œuvre, à grande échelle, pour faire supporter par les salariés une situation provoquée par les comportements et les excès des marchés financiers. Partout dans le monde les Bourses s’affolent et des milliards d’euros partent en fumée. Plus qu’une crise financière, c’est l’échec d’un système économique et financier qui saute aux yeux. Mais ce n’est pas au monde du travail de régler la facture de la faillite de ce système.

De plus, on ne peut pas d’un côté, au nom de cette crise, dilapider des milliards d’euros aux frais du contribuable, pour venir au secours des milieux bancaires et boursiers. Et de l’autre rester sourd aux difficultés grandissantes de milliers de salariés et de leurs familles aujourd’hui condamnés au chômage technique et à la diminution de leur pouvoir d’achat.

C’est encore plus inacceptable quand on sait que le coût du chômage partiel repose en partie sur les contribuables puisque l’État se substitue aux entreprises pour assumer une part conséquente de la charge financière qu’il entraîne.

Comment ne pas déclarer alors là aussi « l’urgence » pour tous ces salariés victimes d’arrêts temporaires d’activité, et à qui l’on impose une diminution de salaire alors qu’ils ne demandent qu’à travailler ?

Comment ne pas prendre des mesures immédiates pour maintenir leur rémunération en pareille circonstance, alors que les grands groupes annoncent toujours des profits en hausse : + 12 % pour les entreprises du CAC 40 ?

Les salariés ne peuvent pas être la variable d’ajustement d’un capitalisme exclusivement soucieux de ses intérêts propres et de ses profits.

Renault qui brise l’outil de production de Sandouville et impose le chômage technique, ne garantit pas l’intégralité des salaires de ses personnels alors que le groupe réalise 2,4 milliards d’euros de bénéfices en 2007.

La presse, mais elle n’est pas la seule, l’a noté avec beaucoup de netteté : « les dividendes de Renault permettraient de financer une masse salariale de 30 000 salariés. Pour Renault, les dividendes distribués en 2007 ont été de 860 millions d’euros, soit de 3,80 € par action. Ils représentent 32 % du résultat net annuel consolidé et semblent être maintenus pour l’année 2009, malgré les difficultés économiques rencontrées. Prenons l’hypothèse d’un salaire moyen de 1 500 € euros sur 13 mois avec les charges sociales, soit un salaire annuel de 28 275 €, la distribution de dividendes de l’année dernière permettrait de financer une masse salariale annuelle de 30 000 personnes. Ce chiffre est à comparer avec le plan de restructuration actuel de 4 900 salariés ».

1 % des dividendes des actionnaires de Renault suffirait à maintenir le salaire des 20 000 employés du constructeur, concernés par le chômage technique à 100 %. Il en va de même pour le groupe PSA-Citroën qui a enregistré une multiplication par cinq de ses profits entre 2006 et 2007 pour atteindre 885 millions d’euros.

Dans la sidérurgie, ArcelorMittal a versé 2,2 milliards d’euros de dividendes aux actionnaires en 2008. Et d’ores et déjà on annonce le versement de 1,8 milliards de dividendes pour 2009.

Dans l’industrie pharmaceutique, l’entreprise Pfizer prétend supprimer 1 061 emplois en 2009 alors que son bénéfice net a triplé au troisième trimestre. Avec un cash-flow qui pourrait atteindre 13 milliards d’euros, ce groupe a de quoi voir venir la crise. En 2007, Pfizer a versé 5,5 milliards d’euros à ses actionnaires.

La crise n’est pas la même pour tout le monde quand, avec l’oreille favorable du gouvernement, grand patronat et milieux d’affaires multiplient les pressions et les décisions pour en tirer des avantages et une rémunération supplémentaires. Le diktat des dividendes toujours en faveur des mêmes, est insupportable au monde du travail.

Cette proposition vise à apporter une réponse immédiate, d’urgence, en faveur des salariés privés d’activité durant des périodes imposées de chômage partiel. Il s’agit ici de garantir l’intégralité de leur rémunération par l’affectation en priorité, des dividendes des entreprises.

Ce que l’État est capable de faire en peu de temps pour le système bancaire, boursier et le CAC 40, il doit le réaliser pour tous ces salariés. C’est le sens de cette proposition de loi.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Après le premier alinéa de l’article L. 232-12 du code de commerce, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les sommes distribuables sont au préalable, et prioritairement, affectées à la garantie de l’intégralité des salaires des salariés qui, tout en restant liés à leur employeur par un contrat de travail, subissent une perte de salaire imputable soit à la fermeture temporaire de la société qui les emploie, soit à la réduction de l’horaire de travail habituellement pratiqué. »

Article 2L’article L. 5122-1 du code du travail est complété par les mots :

« à l’exception des salariés dont l’employeur a constitué un bénéfice distribuable visé par les articles L. 232-10 et suivants du code de commerce, pour lesquels la rémunération est intégralement garantie par les sommes distribuables ainsi prioritairement affectées. »


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