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N° 2737

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 juillet 2010.

PROPOSITION DE LOI

visant à mieux garantir le droit à l’éducation à la santé,
à responsabiliser les pouvoirs publics et les industries de jeux vidéo dans l’éducation à la santé et la protection des enfants
et des adolescents contre la cyberaddiction,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Patrick LEBRETON, Frédérique MASSAT, Michel LEFAIT, Victorin LUREL, Pascale GOT, Annick GIRARDIN, Jean-Yves LE DÉAUT, Michel LEZEAU, Christian HUTIN, Alain SUGUENOT, Josette PONS, Louis-Joseph MANSCOUR, Marcel ROGEMONT, George PAU-LANGEVIN, Serge LETCHIMY, Jean-Paul DUPRÉ, Jean-François CHOSSY, Armand JUNG, Chantal ROBIN-RODRIGO, Jean LAUNAY, Pascale CROZON, Michel MÉNARD, François ROCHEBLOINE, Marisol TOURAINE, Louis GUÉDON, Denis JACQUAT, Daniel FASQUELLE, Michel VOISIN, Guy DELCOURT, Jean-Pierre DECOOL, Guy MALHERBE et Jean-Pierre DUFAU,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

À l’occasion de la 16e session du Parlement des enfants qui s’est tenue le 5 juin 2010, l’école Les Alpinias de Petite-Île située dans l’académie de La Réunion a présenté une proposition de loi visant à mieux garantir le droit à l’éducation à la santé, à responsabiliser les pouvoirs publics et les industries de jeux vidéo dans l’éducation à la santé et la protection des enfants et des adolescents contre la cyberaddiction. Les délégués présents en session ont choisi de distinguer cette proposition en la désignant comme étant la seconde meilleure proposition présentée.

Afin de concrétiser ce travail de qualité, conduit par des usagers principaux de jeux vidéo, il est apparu opportun de présenter ce texte dans la présente proposition de loi. L’exposé des motifs ci dessous reprend le texte qui avait été rédigé par les enfants de la classe de l’école Les Alpinias de Petite-Île.

Les jeux vidéo sont devenus des éléments incontournables de notre environnement.

Comme de nombreuses autres activités, il suffit de ne pas en abuser pour profiter de leurs bienfaits... Jouer sur console, sur ordinateur, téléphone portable ou sur Internet à des jeux vidéo n’est pas complètement négatif, à condition d’en mesurer l’usage et la durée. Le jeu virtuel est, comme son nom l’indique, avant tout un jeu, donc un divertissement. Le monde virtuel est si fascinant qu’il permet de libérer la créativité, fertilise l’imagination et l’évasion tout en se déconnectant du stress et des tensions quotidiennes. Cette virtualité ludique est supposée bénéfique aux enfants : jouer au jeu vidéo augmente ses réflexes, aide à sa représentation spatiale, affûte son acuité visuelle. De plus, les victoires successives au sein d’un jeu pourraient aider ceux qui n’ont pas confiance en eux à développer une certaine estime de soi. Nous avons même pu lire que la pratique des jeux vidéo aiderait dans certaines thérapies.

Cependant les jeux vidéo ne sont pas sans danger.

Et il serait dommage que la passion devienne une addiction…

En effet, les enfants passent de nombreuses heures au quotidien devant les jeux vidéo. Certains plus de 2 heures ! D’où l’émergence de troubles du comportement et de pathologies sévères chez les adeptes des consoles de jeux. L’utilisation abusive des jeux vidéo peut présenter un réel danger. Le jeu peut rapidement dégénérer en dépendance. Les conséquences sont alors très graves : fatigue visuelle, asociabilité, agressivité, nervosité, vertiges, troubles de la conscience et de l’orientation, voire crises d’épilepsie et nausées, repli sur soi, échec scolaire, perte de la notion du temps, déshydratation et sous-alimentation. Les jeux vidéo excitent l’imaginaire des enfants qui se laissent envahir et n’arrivent plus à s’en passer. L’entourage ne compte plus durant le jeu et l’enfant risque de devenir « accro » à ce monde imaginaire en laissant toute autre activité de côté. Cet isolement peut même devenir un rituel qui entre profondément dans les habitudes de l’enfant.

On considère qu’une personne est « accro » aux jeux lorsqu’elle passe plus de 2 heures par jour sur l’ordinateur ou sur console. Nous avons réalisé une étude dans notre école auprès d’un échantillon d’enfants âgés de 8 à 12 ans. Elle montre que les enfants ont tendance à enfreindre les règles de sécurité pourtant données par leurs parents et à adopter des comportements à risque. 42 % des enfants ne respectent pas les temps de jeux et 60 % la classification par âge du système européen d’information sur les jeux (PEGI).

Comme on le sait, l’adolescence est une période de bouleversements physiques et psychiques. L’éducation à la santé vise à aider chaque jeune à s’approprier progressivement les moyens d’opérer des choix, d’adopter des comportements responsables pour lui-même comme vis-à-vis d’autrui. Elle permet ainsi de préparer les jeunes à exercer leur citoyenneté. L’action de l’école est de contribuer à développer cette capacité à décider par soi-même dans de nombreux domaines, y compris dans celui de la santé. Dans cette perspective, l’éducation à la santé, qui n’est pas seulement l’affaire de spécialistes, relève de l’action quotidienne des adultes en charge de l’éducation des enfants et des adolescents.

Alcool, tabac, drogue… Face à ces redoutables fléaux et risques pour la santé, force est de développer la prévention. Son but : changer le regard des jeunes porté sur les jeux vidéo pour lutter contre les risques d’addiction. Celle-ci passe notamment par l’élaboration de campagnes d’information, de prévention des risques sur la santé et de formation, véhiculées par les médias et relayées par des actions ciblées (à travers les écoles…).

Lorsque les jeux vidéo présentent un risque en matière de santé publique en raison de leur caractère potentiellement addictif, il est temps de penser à vos enfants et aux générations futures. Prenons dès aujourd’hui de nouvelles mesures pour lutter contre la cyberdépendance et préserver la dignité et l’intégrité des enfants. Les futurs citoyens que nous sommes pensons qu’il est nécessaire de mettre en place une réelle politique de modération que pourraient illustrer

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

Dans un délai de trois mois suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, un arrêté des ministres chargés de l’Éducation nationale et de la Santé fixe un programme d’éducation à la santé et de prévention des comportements à risques, en particulier l’usage abusif des jeux vidéo, dans les horaires et programmes de l’école primaire.

Article 2

Dans un délai d’un an suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, le ministre chargé de la santé présente dans un rapport déposé sur le bureau de l’Assemblée Nationale, un plan d’action permettant notamment de former et de sensibiliser les professionnels de l’addictologie aux problèmes d’utilisation excessive de jeux vidéo et favoriser leur intervention auprès des élèves et des familles dans le cadre d’actions de prévention.

Ce plan précise les actions de prévention, de diffusion d’informations et de conseils de vigilance diffusés dans les médias qui sont mises en œuvre.

Article 3

Dans un délai d’un an suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, le ministre chargé de la santé élabore une charte éthique qui amène l’industrie des jeux vidéo à s’orienter vers une politique du jeu responsable, en favorisant notamment des sessions de jeu plus courtes et marquées de pauses obligatoires de trente minutes, voire plus pour des jeux de longue durée.

Article 4

Les charges qui pourraient résulter pour l’État de l’application de la présente loi sont compensées à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits sur les tabacs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


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