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N° 3234

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 mars 2011.

PROPOSITION DE LOI

visant à compenser l’entrave à la vie professionnelle
des personnes en situation de
handicap,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Louis COSYNS, Dino CINIERI, Jean-Marie MORISSET, Louis GUÉDON, Jean-Michel COUVE, Jean-Michel FERRAND, Alain MARLEIX, Maryse JOISSAINS-MASINI, Jean-Pierre DUPONT, Étienne MOURRUT, Patrice CALMÉJANE, Michel VOISIN, Jean-Pierre DECOOL, Josette PONS, Dominique DORD, Didier QUENTIN, Philippe Armand MARTIN, Jean-Charles TAUGOURDEAU, Jean-Marc NESME, Jean-Yves COUSIN, Jean-Luc REITZER, Christian ESTROSI, René-Paul VICTORIA, Christian MÉNARD, Bruno SANDRAS, Olivier DASSAULT, Jean-François CHOSSY, Alain FERRY, Éric STRAUMANN, Lionnel LUCA, Bernard PERRUT, Marc BERNIER, Jean-Paul ANCIAUX, Frédéric REISS, Jean AUCLAIR, Lucien DEGAUCHY, Patrice MARTIN-LALANDE, Marianne DUBOIS, Philippe BOËNNEC, Bernard DEPIERRE, Jacques REMILLER, Jean-Pierre NICOLAS, Claude GOASGUEN, Claude BODIN, André WOJCIECHOWSKI, Michel HEINRICH, Francis SAINT-LÉGER, Patrick BEAUDOUIN, Georges MOTHRON, Geneviève LEVY, Loïc BOUVARD, Marcel BONNOT et Valérie BOYER,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Pour les personnes en situation de handicap, l’accès aux transports publics est un enjeu fondamental. D’abord parce l’autonomie et l’indépendance supposent que la liberté d’aller et venir ne soit pas entravée. Ensuite parce que l’accès au transport public est, pour des millions de nos concitoyens touchés par le handicap, le passage obligé pour trouver le chemin de l’emploi.

En matière d’intégration professionnelle, la quatorzième semaine pour l’emploi des handicapés a récemment mis en lumière une amélioration sensible de la situation. En effet, malgré la persistance d’un taux de chômage deux fois supérieur à celui des valides, les embauches de travailleurs en situation de handicap ont fortement progressé au premier trimestre 2010. De la même façon, le nombre des employeurs qui n’ont, malgré les quotas fixés par la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, pris aucune mesure pour favoriser l’embauche des salariés handicapés a diminué de 56 % en 2010.

Trouver un emploi, c’est bien, pouvoir se rendre sur son lieu de travail pour remplir ses obligations professionnelles, c’est mieux. Pour les personnes en situation de handicap, l’accès à l’emploi implique l’accessibilité réelle de nos transports publics.

En vertu de son article 45-1, la loi du 11 février 2005 a donné dix ans à la France pour que les services de transport collectif y soient rendus accessibles aux personnes handicapées ou à mobilité réduite. Cette mise en accessibilité devra être effective au plus tard le 12 février 2015 (soit dix ans après la promulgation de la loi), elle devra s’appliquer aussi bien aux nouvelles lignes qu’aux réseaux existants. Malgré les efforts engagés, force est de constater que cette accessibilité complète des services de transport collectif ne sera pas achevée à horizon 2015. Très clairement, l’obligation imposée à l’État restera lettre morte si des mécanismes contraignants ne sont pas mis en place.

Face à ce constat, je souhaite donner un nouveau souffle au principe d’accès aux transports publics. Cette volonté repose sur un certain nombre de fondements juridiques.

– L’article 2 de la loi d’orientation sur les transports intérieurs et la loi du 29 juillet 1998 d’orientation relative à la lutte contre les exclusions dans son article 133 affirment le principe du « droit au transport ».

– L’article 45 de la loi du 11 février 2005 pose le principe de la continuité de l’accessibilité de la chaîne de déplacement. Fondée sur une « conception universelle », la loi prévoit que « la chaîne de déplacement est organisée pour permettre son accessibilité dans sa totalité aux personnes handicapées et à mobilité réduite ».

– La loi n° 2007-1224 du 21 août 2007 sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs a permis de garantir un service minimum dans les transports en commun, consacrant ainsi l’un des principes cardinaux de notre droit public, celui de continuité du service public.

Les personnes en situation de handicap sont des citoyens à part entière. Un citoyen à part entière ne peut se résoudre à ce que la loi ne soit qu’incantatoire, à ce que les principes s’effacent devant les faits. Les bases légales abondent et, pourtant, pour des millions de Français, emprunter les transports en commun est tout simplement impossible. Pour eux, l’accessibilité par tout et pour tous est un droit virtuel. Pour toutes ces raisons, et pour accélérer le lancement de nouveaux investissements de mise en accessibilité des transports en commun, je souhaite créer un mécanisme de compensation du préjudice subi par une personne en situation de handicap, celui de l’impossibilité matérielle de se rendre sur son lieu de travail.

– Concrètement, au cas où il est impossible pour une personne handicapée (situation définie par l’article L. 114 du code de l’action sociale et des familles) ou une personne à mobilité réduite (situation définie par la directive 2001/85/CE du Parlement européen), de se rendre sur son lieu de travail pour y assumer ses obligations professionnelles, elle peut demander à l’établissement public responsable une réparation financière, à hauteur de la perte de salaire journalière occasionnée.

Cette situation d’impossibilité matérielle peut être entendue soit comme celle résultant de la non mise en accessibilité des systèmes de transports et leur intermodalité, soit comme celle résultant d’une situation de forte perturbation voire de blocage du trafic qui, malgré le service minimum, rend les transports en commun impraticables pour les personnes non valides.

PROPOSITION DE LOI

Article 1er

L’impossibilité matérielle d’emprunter les transports publics, sous réserve qu’elle constitue une entrave à la vie professionnelle et entraîne des conséquences dommageables sur la situation financière d’une personne en situation de handicap ou d’une personne à mobilité réduite, lui ouvre le droit à demander à l’entreprise en charge du service public, une compensation à hauteur de la perte de salaire journalière occasionnée.

Article 2

Les modalités de la présente loi sont déterminées par un décret en Conseil d’État.

Article 3

Les charges qui pourraient résulter de l’application de la présente loi pour les personnes publiques en charge des transports publics sont compensées à due concurrence par le relèvement de la dotation globale de fonctionnement et par la création de taxes additionnelles aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


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