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N° 3260

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 mars 2011.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

tendant à la création d’une commission d’enquête relative au malaise constaté au sein de l’armée française en Afghanistan,

(Renvoyée à la commission de la défense nationale et des forces armées, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Jean-Claude BOUCHET, Élie ABOUD, Bernard CARAYON, Georges COLOMBIER, Marie-Christine DALLOZ, Jean-Pierre DECOOL, Paul DURIEU, Marie-Louise FORT, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, Jean-Paul GARRAUD, Lionnel LUCA, Jacques MYARD, Jean-Marc ROUBAUD, Daniel SPAGNOU, Michel TERROT, Jean UEBERSCHLAG, Christian VANNESTE et Patrice VERCHÈRE,

députés.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’intervention française en Afghanistan est légitime à condition qu’elle participe à la création d’un État stable, libre et respectant les droits de l’homme, tant dans ses institutions que dans ses pratiques sociales.

Tout comme la société française, l’armée doit trouver le positionnement juste de sa laïcité par rapport à l’islam.

En 2010, un aumônier militaire détaché au 2e REP en Afghanistan a remis un rapport de fin de mission clair, précis et lucide sur des incidents graves qui se sont passés en Afghanistan dans le sens où le respect de la dignité et de la liberté laïque de nos militaires, hommes et femmes, aurait été bafoué. Ce rapport devrait être la source d’une enquête dans le but de vérifier puis de mettre fin à de telles attitudes envers nos soldats qui ont, au même titre que tous les Français, le droit d’être traités en vertu des lois d’égalité et de dignité de notre République, où qu’ils soient dans le cadre d’une mission nationale.

Dans son rapport, l’aumônier militaire indique :

« (…) il y a en Afghanistan une volonté de l’armée française de créer un état d’esprit tout à fait déférent et bienveillant face à l’islam. Une crainte presque servile de déplaire à l’islam.

« Les informations, consignes, et règles de vie qui nous sont données sont parsemées de détails visant à surtout respecter la république islamique d’Afghanistan dans ses coutumes et ses lois. Ces consignes ne seraient jamais données en France car elles choqueraient les mentalités. Mais, sous le prétexte que “ils sont chez eux”, nous assistions à une démission de l’intelligence, une trahison de l’esprit, un bannissement effrayant de la conscience. »

À titre d’exemple, nous pouvons citer certains passages du rapport relatant de graves dérives :

« Me désolant, lors d’une patrouille, de voir une fillette de 10 ans accompagnée de son mari qui devait en avoir 50, j’eus comme réponse le fameux argument : “Ils sont chez eux.” Or jamais cette personne ne m’aurait répondu cela en “temps normal”. Mais, l’esprit embourbé dans l’obligation impérative de respecter la République islamique d’Afghanistan, ses coutumes et ses lois, elle s’interdisait toute critique et toute opinion… Il est évident que cette personne était choquée de voir cela, mais la conscience reformatée pour les six mois de mission, elle ne s’autorisait pas un jugement sur ce que le bon sens commun appelle d’ailleurs de la pédophilie.

« Une autre fois, ce fut une mère de famille, à terre, massacrée à coups de pied par son mari devant leurs enfants (les petits garçons seulement) qui poussaient des cris de joie à chaque fois que le coup portait à la tête. Évoquant le soir à table cet épisode qui avait marqué plus d’un soldat assistant à la scène, toujours cette même réponse, cette fois un peu désabusée : “Oh, écoutez, Padre, ils sont chez eux…”

« Ces comportements qui, en France, seraient qualifiés de “non-assistance à personne en danger”, sont le résultat de ces fameuses consignes, mais aussi du comportement de certains chefs qui obligent, par la conformité due à l’exemplarité instituée du chef, à un certain mimétisme, voire à une surenchère, et cela jusque dans les détails… »

D’autres faits rapportés sont aussi marquants :

– Dans le cadre des actions humanitaires menées par l’armée française en Afghanistan, des tapis de prière – financés par les contribuables français – sont distribués dans les villages ;

– Interdiction de boire ou fumer devant les musulmans (afghans ou non) durant le ramadan ;

– Obligation faite, dans les rencontres avec les Afghans, de ne pas parler des femmes, de ne pas regarder les femmes, de ne pas parler aux femmes ;

– Obligation faite aux femmes militaires de se couvrir la tête et les cheveux au nom du respect des valeurs de l’islam, aussi bien à l’intérieur du camp qu’à l’extérieur ;

– Présence imposée, aux obsèques de soldats français, d’autorités locales afghanes qui « restent assises, discutant et plaisantant durant la cérémonie ».

C’est pourquoi nous demandons la création d’une commission d’enquête.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Article unique

Conformément aux articles 140 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, il est créé une commission d’enquête composée de 30 membres chargée d’enquêter sur le malaise constaté au sein de l’armée française en Afghanistan et de réfléchir aux mesures permettant d’y remédier.


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