Accueil > Documents parlementaires > Propositions de loi
La version en format HTML, à la différence de celle en PDF, ne comprend pas la numérotation des alinéas.
Version PDF
Retour vers le dossier législatif

N° 3673

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 juillet 2011.

PROPOSITION DE LOI

visant à rendre le vote obligatoire, à reconnaître le vote blanc et à assurer que les candidats élus le soient à la majorité absolue des suffrages,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Rudy SALLES,

député.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’instauration du suffrage universel en 1848, fut l’une des conquêtes majeures de la République.

Cependant, on constate que le taux d’abstention lors des élections est perpétuellement en hausse. Nonobstant la forte mobilisation lors des élections présidentielles de 2007, les derniers rendez-vous électoraux (élections régionales de mars 2010, cantonales de mars 2011) ont confirmé la tendance lourde et inquiétante du développement de l’abstention. En effet, le taux d’abstention s’élevait pour le premier tour des élections régionales à 53,7 %, et à 55 % pour les dernières élections cantonales.

Ces taux d’abstention limitent la représentativité des élus et sont en conséquence une menace pour la démocratie.

Pour pallier cette absence de participation d’une partie de l’électorat, il semble opportun de rendre le vote obligatoire et d’assortir cette obligation d’une sanction pécuniaire. En effet, bien que l’inscription sur les listes électorales soit obligatoire et automatique (art. 11-1 du code électoral), le vote aux élections ne l’est pas.

Différents pays ont fait le choix du vote obligatoire. La Belgique notamment a mis en place cette obligation depuis 1893 avec une sanction pénale constituée par une amende et des mesures administratives. Il en va de même pour l’Australie, le Luxembourg, la Turquie, la Grèce mais aussi l’Autriche et certains pays d’Amérique latine.

Le vote obligatoire ne peut être appliqué sans avoir pour corollaire la reconnaissance juridique du vote blanc. En effet, les citoyens étant appelés à voter obligatoirement doivent pouvoir conserver la possibilité de ne choisir aucun candidat. En conséquence, des bulletins blancs doivent être mis à la disposition des votants dans chaque bureau de vote et être décomptés sans pour autant être comptabilisés dans le nombre des suffrages pris en compte pour le calcul des majorités électorales.

Par ailleurs, la possibilité, lors de différentes élections telles que les élections législatives et l’élection des conseillers généraux, qu’il y ait plus de deux candidats présents au second tour porte également atteinte à la représentativité des élus. En effet, dans ce type d’élection, où le score nécessaire pour atteindre le second tour doit être de 12,5 % ou de 10 % du nombre des électeurs inscrits, plusieurs candidats peuvent accéder au second tour et le vainqueur peut être élu alors qu’il n’a obtenu qu’une majorité relative.

Il serait en conséquence opportun, pour faire en sorte que le candidat élu bénéficie d’une majorité absolue, d’appliquer le système en vigueur pour l’élection présidentielle aux autres élections en permettant aux deux seuls candidats ayant obtenu le plus de suffrages d’accéder au second tour.

***

Le chapitre premier de la proposition de loi rend le vote obligatoire.

L’article premier inscrit ce principe à l’article L. 1 du code électoral. L’obligation de prendre part au vote vaudrait tant pour les élections que pour les référendums. Cet article renvoie à un décret en Conseil d’État la fixation de la liste des motifs qui justifient la non participation au vote.

L’article 2 inscrit dans les dispositions pénales du code électoral la sanction du non respect de l’obligation de vote. La peine encourue sera une contravention de la première classe.

Afin que la contravention punissant le fait de s’abstenir soit dissuasive, l’article 3 modifie la liste des peines complémentaires aux contraventions prévues par le code pénal. Il crée ainsi la peine complémentaire d’interdiction des droits civiques, civils et familiaux pendant une durée de trois ans au plus. Une circulaire de politique pénale sera à même de prévoir que ces peines complémentaires seront réservées aux seuls cas de récidive.

Le chapitre 2 prévoit le décompte spécifique des bulletins blancs, en dehors des bulletins nuls.

Pour ce faire, l’article 4 prescrit que des bulletins blancs sont déposés dans les bureaux de vote, au même titre que les autres bulletins de vote. De surcroît, il prévoit que les bulletins blancs sont distingués des bulletins nuls, afin qu’ils puissent être comptabilisés de manière spécifique.

Le chapitre 3 écarte la possibilité de triangulaires au second tour des élections, sur le modèle de l’élection présidentielle.

Ainsi, seuls les deux candidats ou les deux listes arrivés en tête au premier tour seront autorisés à déposer leur candidature pour le second. Les I à X de l’article 5 fixent respectivement ce principe pour les élections législatives, les élections cantonales, les élections municipales dans les communes de plus de 3 500 habitants, les élections sénatoriales, les élections régionales et les élections à l’Assemblée de Corse.

PROPOSITION DE LOI

Chapitre 1er

Du vote obligatoire

Article 1er

L’article L. 1 du code électoral est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le vote est obligatoire. Tout électeur doit prendre part aux opérations électorales et aux consultations par voie de référendum sauf cause légitime, dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État. »

Article 2

Après l’article L. 117-1 du même code, il est inséré un article L. 117-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 117-2. – La violation de l’obligation énoncée au second alinéa de l’article L. 1 est punie de l’amende prévue pour les contraventions de la première classe. Les peines complémentaires mentionnées au 12° de l’article 131-16 du code pénal peuvent être prononcée en même temps que la peine d’amende. »

Article 3

Le code pénal est ainsi modifié :

1° L’article 131-16 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« 12° L’interdiction des droits civiques, civils et de famille, selon les modalités prévues par l’article 131-26. »

2° Après le mot : « crime », la fin du septième alinéa de l’article 131-26 est ainsi rédigée : « , une durée de cinq ans en cas de condamnation pour délit et une durée de trois ans en cas de condamnation à une contravention. »

Chapitre 2

Du décompte des bulletins blancs

Article 4

Le code électoral est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article L. 58 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Des bulletins blancs y sont également déposées par le président du bureau de vote. »

2° Au premier alinéa de l’article L. 66, les mots : « blancs, ceux » sont supprimés.

3° Après l’article L. 66 du même code, est inséré un article L. 66-1 ainsi rédigé :

« Art L. 66-1. – Les bulletins blancs font l’objet d’un décompte spécifique. Ils n’entrent pas en compte pour la détermination du nombre de suffrages exprimés. »

4° À l’article L. 69 après le mot : « enveloppes » sont insérés les mots : « et des bulletins blancs ».

5° L’article L. 315 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Des bulletins blancs sont également tenus à la disposition des électeurs. »

Chapitre 3

De la qualification pour le second tour
des deux seuls candidats arrivés en tête au premier tour

Article 5

Le code électoral est ainsi modifié :

I. – Le quatrième alinéa de l’article L. 126 est supprimé.

II. – Les troisième, quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 162 sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé : « Seuls les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages au premier tour peuvent se maintenir au second. »

III. – Au dernier alinéa de l’article L. 193, le mot : « relative » est remplacé par le mot : « absolue ».

IV. –  Les trois derniers alinéas de l’article L. 210-1 sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé : « Seuls les deux candidats ayant obtenu le plus grand nombre de suffrages au premier tour peuvent se maintenir au second. »

V. – Le deuxième alinéa de l’article L. 264 est ainsi modifié :

1° La première phrase est ainsi rédigée : « Seules peuvent se présenter au second tour les deux listes qui ont obtenu le plus grand nombre de suffrages au premier tour. » ;

2° À la deuxième phrase, les mots : « que celles-ci ne se présentent pas au second tour et » sont supprimés.

VI. – La première phrase du dernier alinéa de l’article L. 294 est ainsi rédigée : « Au second tour de scrutin, l’élection a lieu à la majorité absolue, quel que soit le nombre de votants. »

VII. – Le dernier alinéa de l’article L. 299 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Seuls peuvent se présenter au second tour les deux candidats qui ont obtenu le plus grand nombre de suffrages au premier tour. »

VIII. – L’article L. 300 est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Seules peuvent se présenter au second tour les deux listes qui ont obtenu le plus grand nombre de suffrages au premier tour. »

IX. – Le deuxième alinéa de l’article L. 346 est remplacé par un alinéa ainsi rédigé : « Seules peuvent se présenter au second tour les deux listes ayant obtenu au premier tour le plus grand nombre de suffrages exprimés ».

X. – Le premier alinéa de l’article L. 373 est remplacé par un alinéa ainsi rédigé : « Seules peuvent se présenter au second tour les deux listes ayant obtenu au premier tour le plus grand nombre de suffrages exprimés ».


© Assemblée nationale