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N° 505

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 décembre 2007.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION
ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE

sur l’exécution des décisions de justice pénale concernant les personnes majeures

ET PRÉSENTÉ

PAR M. Étienne BLANC

Député

en conclusion des travaux d’une mission d’information présidée par

M. Jean-Luc WARSMANN1

Député.

——

La mission d’information sur l’exécution des décisions de justice pénale est composée de : M. Jean-Luc Warsmann, président ; Mme Delphine Batho, M. Christian Vanneste, vice-présidents ; M. Étienne Blanc, Mme Michèle Tabarot, rapporteurs ; MM. Jacques-Alain Bénisti, Serge Blisko, Marcel Bonnot, François Calvet, Christophe Caresche, Éric Diard, Nicolas Dupont-Aignan, Guy Geoffroy, Claude Goasguen, Philippe Houillon, Mme Maryse Joissains-Masini, MM. Jean-Christophe Lagarde, Jérôme Lambert, Bruno Le Roux, Arnaud Montebourg, Bertrand Pancher, Dominique Raimbourg, Jacques Valax, François Vannson, Michel Vaxès, Philippe Vuilque.

INTRODUCTION 7

CHAPITRE 1ER : RECONNAÎTRE L’IMPORTANCE DE L’EXÉCUTION DES DÉCISIONS DE JUSTICE PÉNALE 12

I. ÉVALUER L’EXÉCUTION DES DÉCISIONS DE JUSTICE PÉNALE 12

II. CRÉER UN CODE DE L’EXÉCUTION DES PEINES 14

CHAPITRE 2 : FAVORISER LA PRÉSENCE DES PERSONNES PRÉVENUES À L’AUDIENCE ET AMÉLIORER L’EFFICACITÉ DE LA SIGNIFICATION DES DÉCISIONS 16

I. LES JUGEMENTS CONTRADICTOIRES À SIGNIFIER : DES JUGEMENTS PARTICULIÈREMENT DIFFICILES À METTRE À EXÉCUTION 16

II. ENCOURAGER LA PRÉSENCE DES PRÉVENUS À L’AUDIENCE OU LA REPRÉSENTATION EN VERTU D’UN MANDAT EXPRÈS 19

III. AMÉLIORER L’EFFICACITÉ DE LA SIGNIFICATION DES DÉCISIONS 20

A. DÉMATÉRIALISER LES ÉCHANGES D’INFORMATIONS ENTRE LES JURIDICTIONS ET LES HUISSIERS DE JUSTICE 20

B. AMÉLIORER LE DEGRÉ DE DILIGENCE DES HUISSIERS 21

C. SIMPLIFIER LES MODALITÉS DE SIGNIFICATION 22

D. SIMPLIFIER LA SIGNIFICATION DES DÉCISIONS DANS UN RESSORT AUTRE QUE CELUI DE LA JURIDICTION QUI A PRONONCÉ LE JUGEMENT 24

CHAPITRE 3 : DONNER UNE RÉELLE EFFICACITÉ À LA CHAÎNE PÉNALE 25

I. DÉMATÉRIALISER LA CHAÎNE PÉNALE 25

A. D’UN SYSTÈME DE GESTION DE DONNÉES... 26

1. La nécessité d’une installation rapide et pilotée de Cassiopée dans toutes les juridictions 26

a) Une installation rapide 26

b) Une installation pilotée 28

2. La nécessité d’assurer la communication de Cassiopée avec les autres applications informatiques de la chaîne pénale 29

B. … À UN SYSTÈME DE GESTION DOCUMENTAIRE 31

1. Les progrès de la dématérialisation des procédures 31

2. Le nécessaire partage des dossiers entre les intervenants de la chaîne pénale : vers le dossier judiciaire unique 31

II. ACCÉLÉRER L’INSCRIPTION DES DÉCISIONS AU CASIER JUDICIAIRE 32

A. ACCÉLÉRER LA TRANSMISSION DES DÉCISIONS PAR LES JURIDICTIONS AU CASIER JUDICIAIRE 33

1. Doter les greffes correctionnels des effectifs nécessaires pour enregistrer les décisions en temps réel 34

2. Enregistrer les décisions en temps réel 35

B. ACCÉLÉRER L’ENREGISTREMENT DES DÉCISIONS PAR LE CASIER JUDICIAIRE 36

CHAPITRE 4 : AMÉLIORER LA MISE À EXÉCUTION ET LES CONDITIONS D’EXÉCUTION DES DÉCISIONS DE JUSTICE PÉNALE 38

I. GÉNÉRALISER LES BEX 38

A. LES VERTUS DES BEX 38

1. Le BEX, lieu d’exécution ou de commencement d’exécution de la décision 39

2. Le BEX, lieu d’explication de la décision 41

3. Le BEX, lieu d’information et d’indemnisation de la victime 42

B. L’INDISPENSABLE GÉNÉRALISATION DES BEX 44

1. À toutes les juridictions correctionnelles de première instance 45

2. À toutes les audiences 46

3. Faut-il généraliser les BEX en appel ? 47

C. AMÉLIORER L’EFFICACITÉ DES BEX 47

1. Doter les BEX de personnels suffisants 48

2. Faciliter l’organisation du BEX en adaptant le déroulement des audiences correctionnelles 49

II. AMÉLIORER LA MISE À EXÉCUTION DES PEINES PRONONCÉES 49

A. AMÉLIORER LE RECOUVREMENT DES AMENDES 50

1. Faciliter le paiement spontané des amendes 50

a) Reconnaître au relevé de condamnation pénale valeur de titre exécutoire et améliorer l’échange d’informations entre tribunaux et trésoreries 50

b) Achever l’installation des urnes de paiement par chèque et des terminaux de carte bancaire dans tous les BEX 52

c) Permettre le paiement des amendes en espèces 53

2. Améliorer le recouvrement contentieux des amendes 55

a) Permettre aux services du Trésor public d’accorder des remises gracieuses sur le paiement des amendes forfaitaires majorées 55

b) Étendre le champ d’application de l’opposition au transfert du certificat d’immatriculation 56

B. AMÉLIORER L’EXÉCUTION DES PEINES DE SUSPENSION OU D’ANNULATION DU PERMIS DE CONDUIRE 57

C. PERMETTRE LE PAIEMENT DU DROIT FIXE DE PROCÉDURE AU BEX 58

III. AMÉLIORER LES CONDITIONS D’EXÉCUTION DES PEINES PRIVATIVES DE LIBERTÉ 59

A. METTRE EN PLACE ET ÉVALUER LES QUARTIERS COURTES PEINES 59

B. FAVORISER L’ACCÈS À L’ENSEIGNEMENT ET À LA FORMATION PROFESSIONNELLE EN DÉTENTION 60

1. Encourager le recrutement des enseignants en milieu pénitentiaire 61

2. Coordonner l’action des autorités compétentes en matière de formation professionnelle 62

3. Faciliter l’accès à l’enseignement et à la formation professionnelle pour les détenus occupant un emploi 63

C. DÉVELOPPER LE TRAVAIL EN DÉTENTION 63

CHAPITRE 5 : FAVORISER LE DÉVELOPPEMENT DES AMÉNAGEMENTS DE PEINE ET DES PEINES ALTERNATIVES À L’EMPRISONNEMENT 66

A. ACCÉLÉRER LA MISE EN œUVRE DES AMÉNAGEMENTS DE PEINE ET DES PEINES ALTERNATIVES À L’EMPRISONNEMENT 68

1. Accélérer la préparation des aménagements de peine pour les personnes incarcérées 68

2. Accélérer la mise en œuvre des aménagements de peine et des peines alternatives à l’emprisonnement pour les personnes non incarcérées 71

B. POURSUIVRE L’ÉVOLUTION ENGAGÉE DANS LA RÉPARTITION DES RÔLES DES JAP ET DES SPIP 72

1. Améliorer l’efficacité de l’action des SPIP 73

a) Clarifier les conditions d’intervention des SPIP 73

b) Poursuivre l’évolution renforçant le rôle de décision des SPIP 74

c) Redéfinir les modes d’intervention des SPIP 77

d) Renforcer les moyens des SPIP 79

2. Renforcer la fonction de contrôle du JAP 80

a) Développer et améliorer la communication entre les JAP et les SPIP 80

b) Donner au JAP les moyens d’un contrôle effectif sur l’action des SPIP 82

C. ENCOURAGER LES MESURES D’AMÉNAGEMENTS DE PEINES 83

1. Doter la justice des structures d’accueil nécessaires au développement des aménagements de peine 84

a) Améliorer la répartition des places de semi-liberté 84

b) Développer les quartiers courtes peines et les centres pour peines aménagées 86

2. Encourager le développement des aménagements de peine existants 88

a) Encourager les aménagements de peine avant leur mise à exécution 88

b) Encourager les aménagements de peine en cours d’exécution 89

3. Étendre les possibilités d’aménagements de peine 93

a) Élargir le champ d’application de l’article 723-15 du code de procédure pénale aux peines d’emprisonnement inférieures ou égales à deux ans 93

b) Élargir les critères d’octroi de la semi-liberté et de la libération conditionnelle 94

c) Réformer la NPAP pour permettre son développement 96

D. FACILITER L’EXÉCUTION DE LA PEINE DE TRAVAIL D’INTÉRÊT GÉNÉRAL 99

1. Accroître le nombre de places et diversifier les postes de TIG 100

2. Alléger la procédure d’habilitation à l’accueil de personnes condamnées à un TIG 101

EXAMEN EN COMMISSION 103

SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS 107

LISTE DES DÉPLACEMENTS DE LA MISSION D’INFORMATION 117

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA MISSION D’INFORMATION 126

LISTE DES ABRÉVIATIONS UTILISÉES 130

ANNEXE : FORMULAIRES D’EXPLICATION REMIS AUX CONDAMNÉS PAR LE TGI DE BOGIGNY 131

Mesdames, Messieurs,

« Plus le châtiment sera prompt, plus il suivra de près le crime qu’il punit, plus il sera juste et utile » (2). Cette idée, affirmée il y a deux siècles et demi par Cesare Beccaria, a malheureusement été longtemps ignorée par le droit pénal français, qui privilégiait la sévérité de la sanction encourue à l’effectivité de la sanction prononcée.

Pendant longtemps, l’exécution des décisions de la justice pénale a été la grande oubliée de la chaîne pénale. Au cours des deux dernières décennies, l’attention du Gouvernement, du Parlement, des magistrats, des pénalistes, de l’opinion, s’est concentrée sur l’instruction, la diversification des modes de poursuite et des sanctions encourues ou encore l’amélioration des droits des victimes, mais l’exécution des peines est longtemps restée à l’écart des préoccupations. Tout se passait comme si l’ensemble des acteurs intéressés par le droit pénal et la procédure pénale considérait que, une fois les poursuites engagées, l’affaire jugée et la peine prononcée, la paix civile était rétablie et la justice pénale avait achevé son intervention.

Ce désintérêt pour l’exécution des sanctions a abouti à une situation absurde, qualifiée par les représentants de syndicats de magistrats de « justice virtuelle » (3) ou « justice fictive » (4). Les services de police et de gendarmerie mettaient en œuvre des moyens importants pour élucider des infractions, la justice poursuivait, jugeait, condamnait, mais la question de savoir si la décision prononcée était exécutée et, si elle était exécutée, quand et comment elle l’était, était laissée de côté.

Ainsi, le taux de recouvrement de l’ensemble des amendes prononcées par ordonnance pénale ou par jugement correctionnel n’est-il aujourd’hui que de 50 %. La moitié des amendes prononcées par les juridictions n’est donc pas recouvrée. Certes, le taux global de recouvrement des amendes a progressé au cours des dernières années et s’établit désormais à 76 %, grâce aux progrès réalisés entre 2003 et 2007 en matière d’amendes forfaitaires majorées issues des contrôles automatiques de vitesse et grâce à l’augmentation des paiements volontaires qu’ont permis la mise en place des bureaux de l’exécution des peines (BEX) et la création de la réduction de 20 % en cas de paiement volontaire dans le mois suivant la condamnation. En revanche, le taux de recouvrement contentieux, qui a chuté de treize points en 10 ans, passant de 44,4 % en 1995 à 31,6 % en 2004 (5), ne peut être considéré que comme très insuffisant.

Pour les peines d’emprisonnement, les outils statistiques actuellement disponibles ne permettent pas de recueillir des informations fiables pour l’ensemble des peines prononcées au plan national. Néanmoins, on peut indiquer que, selon les informations fournies à votre rapporteur, 78,3 % des peines d’emprisonnement ferme prononcées en 2004 par les sept juridictions franciliennes (6), avaient été exécutées à la date du 1er septembre 2007. Pour les peines de travail d’intérêt général (TIG), 89,9 % des peines prononcées en 2004 ont été exécutées (7). Une peine d’emprisonnement sur cinq et un TIG sur dix ne sont donc pas exécutés près de trois ans après leur prononcé.

Les délais de mise à exécution des peines ont, eux aussi, atteint une durée excessive, qui, dans les cas extrêmes, peut faire perdre tout sens à la mise à exécution de la sanction : en 2004, le délai moyen de mise à exécution d’une peine d’emprisonnement ferme était de 7,2 mois, celui du travail d’intérêt général de 4,9 mois ; le délai moyen de recouvrement des amendes pénales était, quant à lui, de 6,2 mois.

Cette situation d’inexécution ou de retard dans l’exécution d’une large proportion des peines prononcées a contribué à décrédibiliser durablement l’action de la justice. Les services de police et de gendarmerie ont pu avoir le sentiment que leur travail n’aboutissait pas à des sanctions effectives. L’opinion et les victimes d’infractions, voyant que l’auteur d’une infraction était condamné mais que sa peine n’était pas exécutée, ont pu douter de l’efficacité de la justice. Les auteurs d’infractions eux-mêmes ont pu ressentir, dans nombre de cas, ce qu’il est devenu commun de nommer le « sentiment d’impunité ».

Mais la question de l’exécution des peines n’est pas uniquement quantitative, elle est aussi qualitative. En effet, il n’est pas seulement souhaitable et nécessaire que les peines soient effectivement et rapidement mises à exécution, il est aussi indispensable qu’elles le soient dans des conditions leur permettant d’atteindre leur double but de protection de la société et de réinsertion de la personne condamnée. Or, si avant une période très récente les conditions d’exécution des peines privatives de liberté n’intéressaient que ponctuellement les autorités politiques et l’opinion (8), que dire de l’absence quasiment totale d’intérêt montré à l’égard des peines exécutées en milieu ouvert ? Les conditions d’exécution des TIG ou des peines d’emprisonnement assorties d’un sursis avec mise à l’épreuve (SME), bien que très fréquemment prononcées et présentées comme de bonnes mesures, ne donnaient lieu à aucune évaluation.

Ce n’est que récemment que la question de l’exécution des décisions de la justice pénale est réellement devenue une préoccupation des différents acteurs de la chaîne pénale. Le rapport de M. Jean-Luc Warsmann sur les peines alternatives à la détention, les modalités d’exécution des courtes peines, la préparation des détenus à la sortie de prison, remis le 28 avril 2003 au garde des Sceaux, a enfin permis de placer cette question sur le devant de la scène, en mettant à jour la situation catastrophique de l’exécution des peines et en proposant des mesures concrètes d’ordre législatif, réglementaire ou pratique pour améliorer les taux et les délais de mise à exécution des peines ainsi qu’une politique ambitieuse de développement des aménagements de peine (9).

L’essentiel des préconisations formulées dans ce rapport a été mis en œuvre par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité et par ses décrets d’application, mais aussi par des évolutions organisationnelles au sein des juridictions. Les réformes mises en œuvre ont permis d’améliorer de façon significative l’exécution de certaines peines. La création des bureaux de l’exécution des peines (BEX), couplée à la réduction de 20 % du montant de l’amende en cas de paiement volontaire dans le délai d’un mois suivant la décision (10), a permis d’accroître de façon très encourageante – bien que, pour l’instant, de façon imparfaitement mesurable – les taux de recouvrement des amendes. L’obligation pour les juridictions de délivrer à l’issue de l’audience une convocation devant le juge de l’application des peines (JAP) en cas de condamnation à une peine d’emprisonnement inférieure ou égale à un an ou une convocation devant le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) dans un délai compris entre 10 et 30 jours (11) a permis de développer les aménagements de peine et d’améliorer les délais de mise à exécution des mesures de suivi en milieu ouvert.

Néanmoins, l’exécution des peines peut et doit encore être améliorée. La chaîne pénale connaît encore des ruptures qui nuisent à l’exécution des décisions de la justice pénale. C’est dans le but d’identifier ces ruptures et de proposer des solutions pour les réduire que la commission des Lois de l’Assemblée nationale a décidé, le 26 juillet 2007, de créer une mission d’information sur l’exécution des décisions de justice pénale. Cette question de l’exécution des décisions se posant de manière certes aussi aiguë mais dans des termes différents pour la justice des majeurs et pour la justice des mineurs, la commission a décidé que cette mission donnerait lieu à des travaux et déplacements communs, mais avec des orientations propres à chaque problématique, et à deux rapports distincts, celui sur la justice des mineurs étant confié à Mme Michèle Tabarot et celui sur la justice des majeurs étant confié à M. Étienne Blanc.

La mission d’information a réalisé en trois mois, du 30 août au 29 novembre 2007 :

—  25 auditions ;

—  10 déplacements dans des tribunaux de grande instance (TGI), au cours desquels elle a généralement rencontré les chefs de juridiction, les magistrats du parquet chargés de l’exécution des peines, les JAP et les représentants des SPIP d’une part, et les magistrats du parquet chargés des mineurs, les juges des enfants et les représentants de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) d’autre part ;

—  6 déplacements dans des établissements relevant de l’Administration pénitentiaire, dont un établissement pénitentiaire pour mineurs, et un déplacement dans un établissement de placement de mineurs ;

—  un déplacement au service du casier judiciaire national à Nantes.

La mission a également étudié avec le plus grand intérêt les contributions des magistrats de liaison sur l’exécution des décisions de justice pénale dans le pays dans lequel ils sont en fonction ; ces contributions très approfondies lui ont fourni des éléments d’information appréciés et utiles, qui ont largement nourri sa réflexion.

Ce travail intense, riche d’enseignements sur le fonctionnement de notre justice et sur la qualité de ses personnels, a permis aux membres de la mission de constater que des progrès substantiels avaient été accomplis depuis trois ans en matière d’exécution des décisions de justice pénale, mais que le chemin était encore long avant que la situation de l’exécution des décisions puisse être considérée comme satisfaisante.

Dans le domaine de la justice des majeurs, les points de rupture dans la chaîne pénale, entendue au sens le plus large, de l’engagement des poursuites à l’exécution de la décision, sont nombreux. Pour ne donner que quelques exemples, il y a rupture lorsqu’une décision contradictoire à signifier ne peut, faute de signification à personne, devenir définitive et être mise à exécution. Il y a rupture lorsqu’un jugement n’est pas dactylographié et enregistré avant plusieurs semaines ou plusieurs mois. Il y a rupture lorsque le condamné ne peut se présenter au BEX, celui-ci n’étant pas accessible pour l’audience au cours de laquelle il a été condamné, ou lorsque le condamné ne peut pas s’acquitter de la peine d’amende à laquelle il a été condamné au BEX. Il y a rupture lorsque le début d’exécution d’une mesure de SME ou de TIG est différé de façon excessive, ou lorsqu’un aménagement de peine décidé par le JAP ne peut être mis en place faute de place disponible.

La mission d’information sur l’exécution des décisions de justice pénale s’est attachée, tout au long de ses travaux, à identifier ces points de rupture et à rechercher des solutions concrètes pour les supprimer ou les réduire. Ces points de rupture existent dès le stade de l’audience, notamment lorsque le jugement rendu en l’absence du prévenu est contradictoire à signifier : ces ruptures devraient être réduites en favorisant la présence des prévenus à l’audience et en améliorant l’efficacité de la signification des décisions (Chapitre 2). Ces points de rupture existent aussi même lorsque le jugement est contradictoire, en raison du défaut de fluidité de la chaîne pénale : donner une réelle efficacité à la chaîne pénale doit, dès lors, être un objectif prioritaire pour améliorer l’exécution des décisions de justice pénale (Chapitre 3). Ces points de rupture se manifestent encore au stade de la mise à exécution et de l’exécution des décisions de la justice pénale, qu’il convient d’améliorer (Chapitre 4). Enfin, des points de rupture entravent le développement des aménagements de peine et des peines alternatives à l’emprisonnement, qui doit constituer une priorité pour la justice et l’Administration pénitentiaire (Chapitre 5).

Mais au préalable, avant même d’évoquer ces points de rupture dans la chaîne pénale, il apparaît indispensable de corriger l’indifférence qu’a toujours connue l’exécution des décisions de justice pénale, au détriment de l’intérêt de la société, des victimes et de la crédibilité de la justice, en reconnaissant enfin l’importance particulière de l’exécution des décisions de justice pénale (Chapitre 1er).

L’objectif commun à toutes les propositions formulées par la mission d’information est de faire en sorte que, à l’issue de la présente législature, l’exécution des décisions de justice pénale ne soit plus en France un problème mais une réalité pour 100 % des décisions.

CHAPITRE 1ER : RECONNAÎTRE L’IMPORTANCE DE L’EXÉCUTION DES DÉCISIONS DE JUSTICE PÉNALE

L’exécution des décisions de justice pénale a pendant trop longtemps été considérée comme une matière secondaire. Deux indices traduisent ce désintérêt : l’absence d’évaluation de l’exécution des décisions de justice pénale et le manque de lisibilité des dispositions relatives à l’exécution des peines au sein du code de procédure pénale et du code pénal. L’évaluation de l’exécution des décisions de justice pénale et la création d’un code de l’exécution des peines doivent aujourd’hui être des priorités, marquant l’importance particulière que les pouvoirs publics souhaitent voir reconnue à ce domaine aussi essentiel que les poursuites, l’instruction ou le jugement dans la chaîne pénale.

I. ÉVALUER L’EXÉCUTION DES DÉCISIONS DE JUSTICE PÉNALE

La question de l’exécution des décisions de justice pénale est devenue, depuis quelques années seulement, un sujet d’intérêt et de réflexion. Pourtant, si les informations recueillies auprès des juridictions et les statistiques disponibles relatives aux juridictions franciliennes montrent effectivement qu’un certain nombre de peines ne sont pas exécutées ou sont exécutées tardivement, le manque de statistiques nationales permettant d’évaluer l’exécution des décisions de justice pénale pose de sérieuses difficultés.

L’amélioration de l’exécution des décisions pénales constitue certes un objectif du programme « Justice judiciaire » dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Deux indicateurs de performance ont été choisis, le taux de mise à exécution et le délai moyen de mise à exécution pour quatre types de peines : l’emprisonnement ferme, le travail d’intérêt général, le sursis avec mise à l’épreuve et l’amende (indicateurs 4.1 et 4.2).

En outre, le développement des aménagements de peine a été retenu comme objectif du programme « Administration pénitentiaire ». Un indicateur relatif au pourcentage de personnes placées sous écrou et condamnées bénéficiant d’un aménagement de peine a été mis en place.

Ces objectifs et indicateurs appellent plusieurs remarques. Tout d’abord, la significativité des indicateurs est actuellement faible, puisqu’ils ne sont élaborés qu’à partir des données des sept juridictions franciliennes et non de l’ensemble des juridictions françaises. Cette insuffisance devrait, selon le ministère de la justice, être normalement résolue à partir de 2008 ou 2009 avec l’entrée en service du système informatique Cassiopée. Outre le fait que la mise en place d’un système informatique performant est une priorité pour améliorer l’efficacité de la justice pénale, la nécessité de disposer de statistiques nationales suffisamment détaillées pour permettre d’évaluer l’exécution des peines rend indispensable un déploiement de Cassiopée dans les meilleurs délais.

Ensuite et surtout, il apparaît que la pertinence des objectifs et la précision des indicateurs retenus peuvent prêter à discussion. En effet, ils ne permettent pas d’évaluer de façon aussi précise qu’il serait souhaitable l’exécution des décisions de justice pénale, tant sur un plan quantitatif que qualitatif.

Sur un plan quantitatif, il apparaîtrait utile, compte tenu des difficultés particulières de mise à exécution des jugements contradictoires à signifier – sur lesquelles nous reviendrons – ainsi que des jugements par défaut, de distinguer les délais et les taux d’exécution en fonction de la nature du jugement. Une telle distinction permettrait de mesurer précisément l’évolution des délais et taux d’exécution pour les jugements contradictoires, les jugements contradictoires à signifier et les jugements par défaut et d’évaluer la pertinence des solutions retenues pour améliorer l’exécution de ces différents types de décisions.

Sur un plan qualitatif, le choix de ne retenir que quatre peines (emprisonnement ferme, travail d’intérêt général, sursis avec mise à l’épreuve et amende) pour les indicateurs relatifs à l’exécution des peines apparaît trop restrictif. En effet, d’autres peines, telles que la suspension ou l’annulation du permis de conduire ou les confiscations d’objets ayant servi à commettre l’infraction, sont quantitativement importantes, tandis que de nouvelles peines, telles que le suivi socio-judiciaire ou le stage de citoyenneté, ont été créées au cours des dernières années. Une évaluation de l’exécution de l’ensemble des peines prévues par le code pénal apparaît tout aussi indispensable que celle des quatre peines retenues.

Concernant la peine de suivi socio-judiciaire, les conditions de son exécution feront l’objet d’une étude approfondie dans le cadre des travaux à venir de la mission d’information sur l’exécution des décisions de justice pénale. Dès lors, la mission estime particulièrement nécessaire que l’exécution de cette peine donne lieu à une évaluation extrêmement précise par le Gouvernement.

Enfin, la fixation dans le programme « Administration pénitentiaire » d’un objectif relatif au développement des aménagements de peine peut se comprendre dans le sens où il est indispensable que l’Administration pénitentiaire, dont la mission ne se limite pas à la garde et à la sécurité mais consiste aussi à favoriser la réinsertion sociale des personnes qui lui sont confiées par l'autorité judiciaire, doit s’investir pour permettre le développement des aménagements de peine. Toutefois, les décisions d’aménagement de peine ne relèvent pas de la compétence de l’Administration pénitentiaire mais de celle des juges de l’application des peines ou du tribunal de l’application des peines, sauf lorsqu’elles sont ramenées à exécution par le directeur du SPIP en cas de silence du JAP dans le cadre de la « nouvelle procédure d’aménagement de peine » (NPAP), en application de l’article 723-24 du code de procédure pénale.

Assigner un objectif à une administration qui n’a pas à titre principal la maîtrise des décisions ne semble pas correspondre à la logique de performance et de responsabilisation de la LOLF. Cependant, certaines évolutions tendant à renforcer le rôle des SPIP dans le domaine des aménagements de peine seront proposées par la mission. Le développement des aménagements de peine devrait donc devenir un objectif partagé entre la justice judiciaire et l’Administration pénitentiaire.

Afin de mesurer les évolutions des aménagements de peine mis en œuvre par les juridictions de l’application des peines et par les SPIP, la mission estime nécessaire que le développement des aménagements de peine devienne un objectif tant pour le programme « Justice judiciaire » que pour le programme « Administration pénitentiaire », mais aussi que les différents aménagements de peine soient distingués au sein de chaque objectif.

Proposition n° 1

Modifier les objectifs et les indicateurs fixés en application de la loi organique relative aux lois de finances, afin de permettre une évaluation quantitative et qualitative efficace de l’exécution des décisions de justice pénale.

II. CRÉER UN CODE DE L’EXÉCUTION DES PEINES

Les dispositions relatives à l’exécution des peines sont aujourd’hui regroupées dans le Livre cinquième du code de procédure pénale intitulé « Des procédures d’exécution », comptant plus de cent articles numérotés de 707 à 803-4. Les articles réglementaires, de trois natures différentes (décrets en Conseil d’État, décrets simples et arrêtés), sont encore plus nombreux : il s’agit des articles R. 57-1 à R. 249-8, D. 48 à D. 599 et A. 38-2 à A. 53. Certaines dispositions, relatives à la semi-liberté et au placement sous surveillance électronique, qui constituent des modalités d’exécution de la peine d’emprisonnement, figurent également dans le code pénal.

Ces dispositions ont été insérées dans ces deux codes au fur et à mesure de la prise d’importance de l’exécution des décisions de justice pénale, sans que l’architecture et la cohérence d’ensemble des dispositions soient véritablement établies. Leur place dans le code de procédure pénale est d’ailleurs, pour certaines de ces dispositions, discutable : certaines règles sont effectivement des règles de procédure, mais d’autres sont de véritables règles de fond. Par exemple, au sein des dispositions relatives à la libération conditionnelle cohabitent des dispositions sur les conditions de fond que doit réunir le condamné pour bénéficier de cet aménagement de peine (article 729) et des dispositions de procédure relatives à la juridiction compétente (article 730) ou aux modalités d’exécution de la mesure (article 732).

Surtout, l’organisation de ces dispositions les rend difficilement lisibles tant pour le justiciable que pour les magistrats chargés de l’exécution et de l’application des peines et les personnels des SPIP et de l’Administration pénitentiaire. Ce manque de lisibilité du droit de l’exécution des peines est souligné par l’ensemble des personnes entendues par la mission et critiqué par la doctrine : « L’ajout répété de règles partielles et le plus souvent contradictoires, selon l’orientation des politiques répressives du moment, engendre de multiples difficultés juridiques qui sont le plus souvent inutiles » (12).

En conséquence, la mission formule le vœu – soutenu par les interlocuteurs de la mission, par le comité d’orientation restreint de la loi pénitentiaire (13) ainsi que par une partie de la doctrine (14) – que l’organisation de ces dispositions soit rationalisée et que soit créé un code spécifique relatif à l’exécution des peines.

Le code de l’exécution des peines regrouperait l’ensemble des dispositions relatives d’une part à la mise à exécution des sanctions, d’autre part à l’application des peines, ainsi que les règles relatives aux juridictions et services chargés de la mise en œuvre de ces dispositions. L’expression « exécution des peines » apparaît comme la plus adaptée, dans la mesure où « le droit de la peine comprend deux ensembles : celui de la mise à exécution de la peine et celui de l’application de la peine, dominé par le principe d’individualisation » (15).

Proposition n° 2

Créer un code de l’exécution des peines.

CHAPITRE 2 : FAVORISER LA PRÉSENCE DES PERSONNES PRÉVENUES À L’AUDIENCE ET AMÉLIORER L’EFFICACITÉ DE LA SIGNIFICATION DES DÉCISIONS

L’inexécution ou l’exécution tardive des décisions de justice pénale commence, pour les jugements dits contradictoires à signifier, avec les difficultés particulières de signification de ces décisions.

Afin d’atténuer les inconvénients liés à la nécessité de la signification pour les jugements contradictoires à signifier, il apparaît nécessaire de chercher à limiter le nombre de ces jugements en encourageant la présence des prévenus à l’audience, et d’améliorer l’efficacité de la signification des décisions pour les cas où le jugement contradictoire à signifier n’aura pu être évité.

I. LES JUGEMENTS CONTRADICTOIRES À SIGNIFIER : DES JUGEMENTS PARTICULIÈREMENT DIFFICILES À METTRE À EXÉCUTION

Les taux et les délais d’exécution des décisions de justice pénale varient dans des proportions considérables selon que le jugement a été rendu contradictoirement ou qu’il est contradictoire à signifier.

Le jugement est contradictoire lorsque le prévenu est présent à l’audience ; le jugement est également contradictoire lorsque le prévenu est absent mais qu’il est représenté par un avocat, soit que la juridiction ait accepté sa demande formulée par lettre à être jugé en son absence (article 411, alinéa 2 du code de procédure pénale), soit qu’après avoir refusé la demande du prévenu à être jugé en son absence, la juridiction se prononce lors de l’audience de renvoi à laquelle le prévenu ne s’est pas présenté mais y a été représenté (article 411, alinéa 4 du code de procédure pénale).

Le jugement est contradictoire à signifier dans trois situations :

—  si la citation a été délivrée à personne ou s’il est établi que la personne a eu connaissance de la citation mais que le prévenu est absent sans avoir fourni d’excuse valable (article 410 du code de procédure pénale) ;

—  si le prévenu a demandé à être jugé en son absence mais que la juridiction a demandé sa comparution personnelle, et que le prévenu et son avocat sont absents à l’audience de renvoi (article 411, alinéa 5 du code de procédure pénale) ;

—  si la citation n’a pas été délivrée à personne et s’il n’est pas établi que la personne a eu connaissance de la citation, mais qu’un avocat se présente pour assurer la défense du prévenu (article 412, alinéa 2 du code de procédure pénale).

Les jugements contradictoires à signifier doivent donner lieu à signification par huissier. Les règles relatives au délai d’appel applicable à ces jugements ont été substantiellement modifiées par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, afin de les mettre en conformité avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme en matière de droit à un procès équitable.

Ainsi, désormais, les articles 398 et 398-1 du code procédure pénale prévoient que le délai d’appel pour les jugements contradictoires à signifier commence à courir à compter de la signification de la décision, quel qu’en soit le mode (à personne, à mairie, à domicile ou à parquet), sauf si la décision est une condamnation à une peine d’emprisonnement ferme ; dans ce dernier cas, le délai d’appel ne commence à courir qu’à compter de la date à laquelle le prévenu a eu connaissance de la condamnation. La condamnation à une peine d’emprisonnement ferme ne devient définitive qu’à l’expiration du délai d’appel de dix jours, lequel ne commence à courir que lorsque la personne a pu être trouvée et a pu se voir signifier personnellement la décision.

Cette règle, protectrice du droit au procès équitable et qui ne saurait être remise en cause, pose néanmoins de très sérieux problèmes pratiques que les magistrats et les greffiers des services de l’exécution des peines entendus lors des déplacements de la mission sont unanimes à dénoncer. En effet, la nécessité de la connaissance de la signification empêche de facto la mise à exécution d’une part substantielle des décisions contradictoires à signifier. Les changements d’adresse des personnes condamnées – qu’ils soient la conséquence d’un déménagement ou qu’ils soient délibérés pour échapper à la justice – sont fréquents, de même que les défauts de réclamation des lettres recommandées avec avis de réception.

En outre, les parquets sont unanimes à dénoncer le faible degré de diligence des huissiers de justice pour signifier les décisions, a fortiori lorsque les requêtes de signification proviennent d’un autre parquet que celui de la juridiction dans le ressort de laquelle ils sont installés. Les délais de signification peuvent parfois atteindre plus de six mois, selon les informations données à votre rapporteur.

En conséquence, les taux d’exécution des jugements contradictoires à signifier sont beaucoup plus faibles que ceux des jugements contradictoires, et les délais beaucoup plus longs. Selon les informations fournies à votre rapporteur concernant les peines prononcées par les sept juridictions franciliennes, les taux d’exécution des peines prononcées par jugement contradictoire à signifier sont inférieurs de près d’un tiers à ceux des peines prononcées par jugement contradictoire, tandis que les délais d’exécution des jugements contradictoires à signifier sont deux à trois fois plus longs que ceux des jugements contradictoires.

Taux et délai moyen de mise à exécution au 31 décembre 2005
des peines prononcées en 2004 par les sept juridictions franciliennes
en fonction de la nature du jugement

 

Jugement contradictoire

Jugement contradictoire à signifier

Taux
(en %)

Délai
(en mois)

Taux
(en %)

Délai
(en mois)

Emprisonnement ferme

90,9

4,3

60,7

11,3

Sursis avec mise à l’épreuve

91,4

4,5

54,2

12,4

Amende

73,6

4,5

44,2

10,7

Source : Ministère de la Justice

Ces jugements contradictoires représentent une part importante de l’activité des juridictions correctionnelles : en 2004, 16 % des 421 104 condamnations prononcées par les tribunaux correctionnels, soit 68 648 jugements, étaient des jugements contradictoires à signifier. Il n’est pas acceptable que ces décisions restent inexécutées, et il est donc essentiel de trouver des remèdes aux difficultés de signification de ces décisions.

Une solution suggérée par certains interlocuteurs de la mission pour remédier aux difficultés de signification des décisions contradictoires à signifier aurait consisté à mettre en place un système d’élection de domicile, sur le modèle de ce qui existe dans le cadre de l’instruction. En début de procédure, à un moment où le prévenu se trouve devant un officier de police judiciaire ou un représentant du ministère public, il serait informé que toute signification ou notification faite à l’adresse qu’il déclare sera réputée faite à personne. Il serait également informé qu’il est tenu de déclarer à l’autorité judiciaire tout changement d’adresse.

Pour séduisant qu’il soit, ce système du domicile élu ne serait cependant pas applicable aux jugements contradictoires à signifier, car il serait contraire à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme en matière de droit à un procès équitable. C’est en effet pour se conformer à cette jurisprudence que la loi du 9 mars 2004 a modifié les règles applicables à la signification de ces jugements, pour prévoir que la signification doit nécessairement être faite à personne dès lors qu’a été prononcée une peine d’emprisonnement ferme.

Dès lors, il apparaît que pour pallier les difficultés de signification des jugements contradictoires à signifier, deux pistes sont envisageables : d’une part, encourager la présence des prévenus à l’audience ou la représentation en vertu d’un mandat exprès, et d’autre part, améliorer l’efficacité de la signification des décisions.

II. ENCOURAGER LA PRÉSENCE DES PRÉVENUS À L’AUDIENCE OU LA REPRÉSENTATION EN VERTU D’UN MANDAT EXPRÈS

De la même façon que la réduction de 20 % du montant de l’amende en cas de paiement volontaire dans le mois suivant la condamnation, prévue depuis la loi du 9 mars 2004 par l’article 707-2 du code de procédure pénale, a permis d’améliorer le taux de recouvrement des amendes, une incitation financière à être présent à l’audience, ou à défaut à s’y faire représenter dans des conditions telles que le jugement sera pleinement contradictoire, pourrait permettre de limiter le nombre de jugements contradictoires à signifier.

Pour pouvoir inciter l’ensemble des prévenus à être présents ou représentés, l’incitation devrait porter sur le montant du droit fixe de procédure dû par chaque condamné en application de l’article 1018 A du code général des impôts. Pour les procédures devant le tribunal correctionnel, ce droit est actuellement fixé à 90 euros.

Afin d’inciter le prévenu à se présenter à l’audience, la mission propose de prévoir une majoration du droit dû à 180 euros si le prévenu est absent. Cette solution aurait également une valeur symbolique forte, puisque l’attitude « anormale » consistant à ne pas se présenter aux convocations de la justice serait sanctionnée.

Toutefois, la rigueur de cette solution devrait être atténuée lorsque la personne condamnée, bien qu’absente à l’audience, s’acquitte du paiement du droit fixe de procédure dans le mois suivant le moment où elle a eu connaissance de la décision, la majoration étant alors écartée.

En outre, afin de permettre à l’effet incitatif de fonctionner, les citations à comparaître devront comprendre l’information de la majoration du droit fixe de procédure en cas de non-comparution ou de non-représentation à l’audience.

Proposition n° 3

Encourager la présence des prévenus à l’audience :

—  en prévoyant une majoration du droit fixe de procédure à 180 euros si le condamné n’a pas comparu personnellement à l’audience, dès lors que la citation a été délivrée à personne ou qu’il est établi que le prévenu a eu connaissance de la citation, sauf s’il est jugé en son absence dans les conditions prévues par l’article 411, alinéas 1 et 2, du code de procédure pénale (demande par lettre à être jugé en son absence et avocat présent et entendu) ;

—  en faisant figurer les informations concernant cette majoration sur les citations à comparaître.

III. AMÉLIORER L’EFFICACITÉ DE LA SIGNIFICATION DES DÉCISIONS

L’amélioration de l’efficacité de la signification des décisions est la deuxième solution envisagée par la mission pour pallier les inconvénients des jugements contradictoires à signifier. En effet, moins la procédure de signification est efficace et rapide, plus la mise à exécution de la décision est éloignée de la décision, et moins la peine exécutée a de sens.

Actuellement, les significations manquent d’efficacité en raison de quatre maux :

—  Le mode de communication entre les parquets et les juridictions est archaïque : une dématérialisation des échanges d’informations apparaît indispensable.

—  Pour plusieurs raisons, le degré de diligence des huissiers de justice pour signifier les décisions pénales est parfois insuffisant et doit être amélioré.

—  Les modalités de signification exigées des huissiers sont trop complexes et doivent être simplifiées.

—  La signification présente une difficulté particulière lorsqu’elle doit être effectuée dans un ressort autre que celui de la juridiction qui a prononcé le jugement, en raison de l’obligation de faire transiter la requête en signification par le parquet territorialement compétent ; cette exigence doit être supprimée.

A. DÉMATÉRIALISER LES ÉCHANGES D’INFORMATIONS ENTRE LES JURIDICTIONS ET LES HUISSIERS DE JUSTICE

Les transmissions d’informations entre les juridictions et les huissiers de justice, et notamment les transmissions de requêtes en signification, sont aujourd’hui encore réalisées par échanges de dossiers sur papier. Ces transmissions ajoutent fréquemment au délai normal de signification des délais injustifiés qu’il est nécessaire de supprimer.

La dématérialisation de la chaîne pénale grâce à l’application Cassiopée, dont l’installation dans les juridictions est en cours (16), doit également inclure les huissiers de justice, dont les actes de signification constituent un maillon essentiel dans la chaîne pénale en vue de l’exécution des décisions. Les parquets devraient pouvoir transmettre les requêtes en signification aux huissiers de justice par l’intermédiaire d’un module de dialogue partagé. Les huissiers devraient pouvoir imprimer eux-mêmes la décision à signifier après avoir reçu la requête du parquet. Enfin, les huissiers devraient informer le parquet mandant de l’accomplissement des différentes formalités de signification, afin que celui-ci puisse suivre en temps réel les progrès de la signification.

En conséquence, la mission estime nécessaire que tous les échanges d’informations entre les juridictions et les huissiers de justice soient dématérialisés avant le 31 décembre 2009.

Proposition n° 4

Dématérialiser les échanges d’informations entre les juridictions et les huissiers de justice avant le 31 décembre 2009.

B. AMÉLIORER LE DEGRÉ DE DILIGENCE DES HUISSIERS

Les magistrats du parquet chargés de l’exécution des peines estiment fréquemment que les huissiers de justice ne se montrent pas toujours assez diligents pour procéder à la signification des jugements contradictoires à signifier. Outre les difficultés liées à la signification de décisions dans des zones du territoire dans lesquelles les huissiers peuvent craindre de se rendre pour des raisons de sécurité, ce faible degré de diligence peut aussi s’expliquer par le faible niveau de rémunération des significations : une somme forfaitaire de 4,50 euros pour les diligences ordinaires, à laquelle s’ajoute une somme de 6,86 euros en cas de délivrance à personne (articles R. 181 et 182 du code procédure pénale).

Ces sommes peuvent apparaître faibles au regard des recherches que peuvent demander certaines significations. En outre, comparées aux rémunérations tirées de la signification des actes en matière civile, ces faibles rémunérations en matière pénale expliquent la tendance des huissiers à délaisser ces significations, au détriment de l’exécution des décisions de justice pénale. Une augmentation de ces sommes, qui devrait se faire par voie réglementaire, devrait donc être envisagée.

Proposition n° 5

Revaloriser les sommes allouées aux huissiers de justice pour les significations effectuées en matière pénale.

En contrepartie de cette revalorisation, un délai pour accomplir les diligences nécessaires à la signification pourrait être imposé aux huissiers. Actuellement, ce n’est que lorsque l’huissier a épuisé l’ensemble des diligences à accomplir en vertu des articles 555 à 559 du code de procédure pénale que le parquet peut requérir un agent ou officier de police judiciaire pour rechercher la personne et lui donner connaissance de l’exploit de l’huissier. Cela signifie qu’en cas d’inaction prolongée de l’huissier, et sauf en cas de découverte fortuite de la personne condamnée, la signification peut attendre pendant une durée indéterminée. Imposer un délai aux huissiers pourrait permettre d’empêcher ces situations de significations en attente. Passé ce délai, le parquet pourrait soit notifier lui-même la décision soit faire procéder à la recherche de la personne à fins de notification de la décision.

Un délai de 45 jours pourrait être envisagé : il permettrait à la fois de laisser aux huissiers le temps matériel de procéder aux diligences prévues par le code de procédure pénale – et notamment à l’envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception qui, compte tenu de la double présentation et de la conservation de la lettre pendant une durée de 15 jours par le bureau de poste, nécessite en moyenne trois semaines – tout en accélérant les significations.

Proposition n° 6

Imposer aux huissiers de justice un délai de 45 jours pour accomplir les diligences nécessaires à la signification des décisions, à l’expiration duquel la signification peut être effectuée par le ministère public ou par un officier ou agent de police judiciaire.

C. SIMPLIFIER LES MODALITÉS DE SIGNIFICATION

Actuellement, les articles 555 à 560 du code de procédure pénale prévoient que « l’huissier doit faire toutes diligences pour parvenir à la délivrance de son exploit à la personne même du destinataire ». Si la personne visée est absente de son domicile, une copie est remise à une personne résidant à ce domicile. Dans ce cas, l’huissier informe l’intéressé de cette remise par lettre recommandée avec avis de réception et peut également adresser par lettre simple une copie de l’acte.

Si l’huissier ne trouve personne au domicile de la personne, il doit, après avoir vérifié l’exactitude du domicile, remettre une copie de l’exploit à la mairie et en informer l’intéressé par lettre recommandée avec avis de réception. Si la personne est sans domicile ou résidence connus, l’huissier remet une copie de l’exploit au parquet du procureur de la République du tribunal saisi. Ce n’est que lorsqu’il n’est pas établi que la personne a reçu l’une ou l’autre des lettres recommandées ou après délivrance de l’exploit au parquet que le procureur de la République peut requérir des services de police ou de gendarmerie qu’ils recherchent la personne afin de lui donner connaissance de l’exploit.

La mission considère que l’efficacité de ces formalités pourrait être renforcée par deux mesures :

—  Les articles 557 et 558 du code procédure pénale prévoient que, en cas de remise d’une copie de l’exploit à une personne résidant au domicile du destinataire ou à mairie, l’huissier doit en informer la personne par lettre recommandée avec avis de réception et qu’il peut également lui adresser par lettre simple copie de l’acte accompagnée d’un récépissé, dont le renvoi signé par la personne intéressée vaut signification à personne.

En revanche, ces textes ne prévoient pas la possibilité pour l’huissier de laisser, après son déplacement au domicile, un avis de passage. En matière civile, cet avis de passage est prévu par les articles 655 et 656 du nouveau code de procédure civile, lorsque l’huissier remet l’acte à une personne résidant au domicile du destinataire ou lorsque personne ne peut ou ne veut recevoir l’acte. La mission propose que cette possibilité de laisser un avis de passage soit étendue à la matière pénale, afin d’accroître les chances d’atteindre la personne à laquelle la décision doit être notifiée.

Le dépôt de cet avis de passage, qui serait pour l’huissier une simple faculté au même titre que la lettre simple prévue par les articles 557 et 558 du code de procédure pénale, aurait pour objet d’inviter la personne visée à prendre contact avec l’huissier, afin de déterminer un rendez-vous pour permettre la signification. Ce rendez-vous pourrait alors avoir lieu soit au domicile de la personne soit à l’étude de l’huissier, cette dernière possibilité étant la seconde proposition formulée par la mission.

—  Actuellement, le code de procédure pénale ne prévoit pas la possibilité pour l’huissier de procéder à la signification de la décision en un lieu autre que le domicile de la personne concernée. Or, compte tenu de la nécessité de donner à l’huissier le plus grand nombre possible de moyens de parvenir à la signification, cette possibilité apparaîtrait très utile. En matière civile, l’avis de passage déposé en cas d’absence de la personne a pour objet de l’inviter à se présenter à l’étude de l’huissier pour retirer l’acte.

De la même façon, en matière pénale, le condamné pourrait être invité par l’avis de passage à prendre contact avec l’huissier pour convenir d’un rendez-vous pour procéder à la signification, qui pourrait avoir lieu, le cas échéant, à l’étude de l’huissier.

Proposition n° 7

Simplifier les modalités de signification des décisions pénales :

—  en permettant aux huissiers de justice de laisser un avis de passage ;

—  en permettant aux huissiers de justice de recevoir les personnes condamnées pour procéder à la signification.

D. SIMPLIFIER LA SIGNIFICATION DES DÉCISIONS DANS UN RESSORT AUTRE QUE CELUI DE LA JURIDICTION QUI A PRONONCÉ LE JUGEMENT

Un dernier obstacle complique la signification des jugements contradictoires à signifier et entrave leur mise à exécution. Actuellement, les parquets sont tenus, lorsque la personne condamnée a son domicile dans le ressort d’un autre tribunal de grande instance que celui qui a prononcé la décision, de transmettre la requête en signification au parquet du domicile de la personne condamnée.

Cette obligation est considérée par l’ensemble des magistrats du parquet chargés de l’exécution des peines comme un facteur de ralentissement des significations. En effet, dans la majorité des cas, la signification des décisions prises par une autre juridiction ne semble pas constituer une priorité pour les parquets. Au manque de diligence des huissiers s’ajoute le manque de diligence des parquets pour faire signifier les décisions prises par une autre juridiction.

Dès lors, cette obligation de transmettre les requêtes en signification de décisions au parquet du domicile de la personne devrait être supprimée afin de permettre à tout parquet de saisir tout huissier de justice en tout point du territoire d’une requête en signification de décision.

Proposition n° 8

Supprimer l’obligation pour le parquet de la juridiction ayant prononcé la décision de transmettre la demande de signification au parquet du domicile de la personne condamnée.

CHAPITRE 3 : DONNER UNE RÉELLE EFFICACITÉ À LA CHAÎNE PÉNALE

Dans une période récente, la diversification des modes de poursuite, avec la création des procédures de composition pénale, d’ordonnance pénale délictuelle et de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), a permis d’améliorer le taux de réponse pénale et de donner à la phase de l’engagement des poursuites une meilleure fluidité. Les magistrats du parquet reconnaissent la pertinence et l’utilité de cette diversité des modes poursuite, les critiques entendues portant surtout sur la lourdeur excessive de certaines procédures et sur l’augmentation du nombre de faits poursuivis sur le fondement de ces nouvelles procédures, qui conduit parfois à des difficultés d’audiencement.

En revanche, la chaîne pénale donne le sentiment de rester grippée non seulement au stade de l’audience mais aussi au stade de l’inscription des décisions au casier judiciaire national. Même si certains progrès notables doivent être soulignés dans ce dernier domaine, il apparaît que les heurts et les retards dans la chaîne pénale ne pourront être réduits que par la dématérialisation de cette chaîne et par la poursuite des efforts pour accélérer l’enregistrement des décisions par le casier judiciaire.

I. DÉMATÉRIALISER LA CHAÎNE PÉNALE

Les applications informatiques utilisées par les juridictions pénales sont aujourd’hui totalement obsolètes. Les juridictions franciliennes utilisent un système dénommé « Nouvelle chaîne pénale », tandis que toutes les autres juridictions utilisent les systèmes « Mini-pénale » et « Micro-pénale ». À ces applications utilisées pour les poursuites, l’audiencement et la saisie des décisions s’ajoutent d’autres applications spécifiques : « Winstru » ou « Instru » pour l’instruction, « Wineurs » pour les juges des enfants, « EPWin » pour les services de l’exécution des peines et « APPI » pour les services de l’application des peines.

Le principal défaut de ces divers outils, outre une ergonomie dépassée ne correspondant plus aux outils informatiques actuels, réside dans leur absence d’interconnexion qui contraint les différents utilisateurs aux stades successifs de la chaîne pénale à ressaisir plusieurs fois des informations (identité du prévenu, qualification des faits, peines prononcées…) déjà saisies par d’autres utilisateurs en amont.

Par ailleurs, malgré des efforts récents, les juridictions ont également pris un retard considérable en matière de dématérialisation des procédures et croulent encore sous d’épais dossiers de procédures, dont la quasi-totalité du contenu pourrait être dématérialisée. La dématérialisation apparaît indispensable afin, d’une part, de faciliter l’échange de documents entre les services de police et de gendarmerie, les services du tribunal, les huissiers de justice, le Trésor public, les SPIP et l’Administration pénitentiaire, et d’autre part, de simplifier l’accès au dossier pour les parties, en évitant les pertes de temps et de moyens provoquées par les photocopies de documents.

La mise en service de l’application « Cassiopée » programmée à compter du début de l’année 2008 devrait améliorer le fonctionnement de la chaîne pénale en permettant le partage des données et en évitant des ressaisies d’informations, mais ne répondra pas en l’état au besoin d’une dématérialisation des procédures. C’est pourquoi il sera nécessaire que Cassiopée évolue sans tarder d’un système de gestion de données, tel qu’il a été conçu, vers un système de gestion documentaire.

A. D’UN SYSTÈME DE GESTION DE DONNÉES...

Un système de gestion de données est un système informatique permettant le partage d’informations entre les différents utilisateurs d’une application. Dans le cas de Cassiopée, l’application permettra aux différents acteurs judiciaires d’accéder aux informations préalablement saisies telles que l’identité de la personne poursuivie, l’identité de la partie civile, la qualification des faits poursuivis, les peines prononcées et l’état de l’exécution de ces peines. La mise en place de Cassiopée, attendue depuis longtemps, doit aujourd’hui être réalisée dans les meilleurs délais.

Cependant, Cassiopée ne concernera pas l’ensemble des acteurs de la chaîne pénale : en amont, les services de police et de gendarmerie, et en aval, les JAP et les SPIP continueront d’utiliser leurs propres applications. Pour assurer la fluidité de la chaîne pénale, la communication de ces applications avec Cassiopée devra être assurée.

1. La nécessité d’une installation rapide et pilotée de Cassiopée dans toutes les juridictions

Engagé depuis 2001, le projet Cassiopée est attendu avec impatience mais aussi parfois avec inquiétude dans les juridictions. Pour répondre à cette attente et à cette inquiétude, l’installation de Cassiopée devra être non seulement rapide mais également bien pilotée.

a) Une installation rapide

Les juridictions ont trop longtemps été contraintes de travailler avec un outil informatique dépassé et inadapté à leurs besoins. La mission a pu constater dans l’ensemble des juridictions qu’elle a visitées la pénibilité du travail des greffiers des greffes correctionnels, contraints de saisir sur des écrans à l’ergonomie obsolète des informations déjà saisies plusieurs fois en amont et sans pouvoir les sauvegarder. Ces conditions de travail anachroniques expliquent pour partie le retard pris par certaines juridictions dans la frappe des jugements, qui a pu aller dans certaines juridictions jusqu’à deux ans. Des affectations de vacataires ont permis de résorber, selon les juridictions, tout ou partie de ce retard ; mais seule la mise à disposition d’un outil informatique performant, associée à une forte volonté d’enregistrer les décisions en temps réel, permettra d’éviter que ne réapparaissent de tels retards préjudiciables à la fluidité de la chaîne pénale et donc à l’exécution des décisions.

Au stade de l’exécution des peines, la mission a également constaté l’absence d’informatisation de la plupart des services de l’exécution des peines, qui indiquent sur des fiches cartonnées d’un autre âge l’état d’exécution des peines prononcées, sans disposer d’aucun outil informatique de recherche ou d’alerte. Comment espérer un suivi effectif des parquets sur l’exécution des décisions sans outil informatique performant ?

L’ensemble des personnels judiciaires entendus par la mission attend beaucoup de Cassiopée, non seulement en termes de qualité des conditions de travail mais aussi en termes d’efficacité. Bien qu’il ait été engagé en 2001, le projet Cassiopée va seulement voir le jour à la fin de l’année 2007, en raison de difficultés initiales de pilotage du projet.

Compte tenu de la situation désastreuse précédemment décrite, la mise en service de Cassiopée ne pourra que constituer un progrès. Les données saisies sur une procédure au stade de l’engagement des poursuites ne devront plus être à nouveau saisies par les intervenants ultérieurs, qu’il s’agisse du juge d’instruction, du juge des libertés et de la détention, du greffe correctionnel ou du service de l’exécution des peines. Chaque intervenant complétera la base de données sans avoir à ressaisir et vérifier les données inchangées.

En outre, Cassiopée comprendra un système d’édition de documents : les citations à comparaître, les ordonnances des juges d’instruction, les relevés de condamnation pénale et les jugements seront préremplis à partir des données enregistrées dans la base de données.

L’application sera également dotée d’un système d’agenda permettant la mise en place d’alertes, ainsi que d’un système de production de statistiques et de tableaux de bord.

Enfin, la recherche et la consultation sur les procédures de l’ensemble des juridictions seront possibles, ce qui pourra faciliter des recoupements et vérifications de données mais aussi rendre possible la signification de citations ou de décisions émises par une autre juridiction.

Tous ces progrès doivent pouvoir bénéficier à l’ensemble des juridictions dans les meilleurs délais. Le plan de déploiement élaboré par la direction des services judiciaires du ministère de la justice prévoit trois phases :

—  une phase d’expérimentation dans quatre TGI (Angoulême, Caen, Rouen et Bordeaux) jusqu’à la fin du premier trimestre 2008 ;

—  une phase de pré-généralisation aux dix TGI du ressort des cours d’appels de Caen et Rouen au deuxième trimestre 2008 ;

—  une phase de généralisation aux 161 autres tribunaux (hors juridictions franciliennes) dans un délai de 18 mois, qui doit suivre un rythme de trois TGI par semaine et s’achever en novembre 2009.

Le respect de ces délais est, aux yeux de la mission, une nécessité absolue. Compte tenu des crédits conséquents ouverts entre 2001 et 2009 pour la mise en œuvre de ce projet, qui s’élèvent à 45,8 millions d’euros, dont 8,37 millions d’euros de crédits de paiement pour la seule année 2008, l’achèvement du déploiement du projet dans les délais prévus doit être réussi.

La « Nouvelle chaîne pénale » utilisée dans les juridictions franciliennes, conçue plus récemment que les applications utilisées dans les autres juridictions, est dans une situation d’obsolescence moins marquée, raison pour laquelle son remplacement par Cassiopée n’est prévu qu’une fois achevée dans l’ensemble des autres juridictions. Compte tenu de l’importance des juridictions franciliennes, la mission est consciente de la difficulté qu’il y aurait à vouloir anticiper le déploiement de Cassiopée dans ces juridictions. Toutefois, la coexistence de deux systèmes informatiques distincts et non connectés ne saurait perdurer.

Afin que les juridictions franciliennes puissent bénéficier des progrès qu’apportera Cassiopée tant en termes de fluidification de la chaîne pénale qu’en termes d’échanges d’informations entre les juridictions, la mission estime indispensable que le déploiement de Cassiopée dans ces juridictions soit réalisé sitôt le déploiement dans les autres tribunaux achevé, soit dès le début de l’année 2010, et qu’il soit terminé au plus tard le 30 juin 2010.

Proposition n° 9

Dématérialiser la chaîne pénale :

—  en ayant achevé l’installation Cassiopée dans les juridictions non franciliennes au plus tard le 31 décembre 2009 ;

—  en installant Cassiopée dans les juridictions franciliennes avant le 30 juin 2010.

b) Une installation pilotée

Pour pouvoir améliorer effectivement les conditions de travail et l’efficacité d’une institution, un outil ou des méthodes de travail nouveaux doivent être acceptés, compris et appropriés par leurs utilisateurs. Les difficultés rencontrées lors de la mise en service du logiciel « APPI » (Application des peines, probation et insertion), traduites par les réticences initiales de certains utilisateurs, relevées par la Cour des comptes (17) et confiées à votre rapporteur, illustrent l’importance de l’information et de la formation et doivent guider le ministère de la justice dans le pilotage de l’installation de Cassiopée.

Malgré la mise en place par le ministère de la justice d’un site intranet consacré à Cassiopée, les magistrats et les greffiers s’estiment de façon générale trop peu associés à la conception de cet outil et trop peu informés de l’avancement du projet et du calendrier de mise en place. Une plus grande transparence et une meilleure association des acteurs de la chaîne pénale dans la conception du projet auraient sans doute été souhaitables. Mais à l’heure du déploiement de Cassiopée, l’essentiel réside dans l’information et la formation qui devront être assurées au bénéfice des utilisateurs de l’application.

Pour les utilisateurs de Cassiopée autres que les magistrats (18), sont prévues une formation générale de deux jours et une formation spécifique d’une journée en fonction du poste occupé. Pour les magistrats, est prévue une formation d’une demi-journée, limitée à la consultation des dossiers. Après le déploiement de l’application dans chaque tribunal, une assistance sur site sera maintenue pendant une durée d’une semaine et une assistance à distance restera accessible.

La mission souhaite que ces durées de formation et ces modalités d’assistance soient, si nécessaire, adaptées en fonction des enseignements qui pourront être tirés des phases d’expérimentation et de pré-généralisation. L’importance de l’enjeu de l’implantation de Cassiopée mérite qu’une attention particulière soit accordée à la formation et à l’assistance, et que les efforts nécessaires soient fournis pour que ce logiciel tant attendu constitue un progrès effectif dans la chaîne pénale.

Proposition n° 10

Renforcer l’information et la formation des utilisateurs de Cassiopée.

2. La nécessité d’assurer la communication de Cassiopée avec les autres applications informatiques de la chaîne pénale

L’application Cassiopée a été conçue pour couvrir la chaîne pénale de l’engagement des poursuites à la mise à exécution des décisions par le service de l’exécution des peines. En revanche, elle ne couvre ni l’activité des services de police et de gendarmerie, ni l’enregistrement des décisions par le service du casier judiciaire national, ni l’application des peines, ni l’échange d’informations avec le Trésor public et les huissiers de justice.

Pourtant, le partage d’informations entre l’ensemble des acteurs de la chaîne pénale entendu au sens le plus large apparaît absolument indispensable afin d’assurer un fonctionnement aussi fluide que possible de cette chaîne. En effet, ces différents acteurs ont également beaucoup à gagner en temps et en efficacité en disposant d’informations déjà saisies et vérifiées dans le système Cassiopée.

Actuellement, cette communication entre le système Cassiopée et les autres systèmes informatiques de la chaîne pénale ne doit être réalisée que dans un deuxième temps, après le déploiement complet de Cassiopée. Compte tenu de l’importance que revêt cette communication de Cassiopée avec les autres applications de la chaîne pénale entendue au sens large, ce délai ne paraît pas acceptable à la mission. Celle-ci estime que Cassiopée, présenté comme une « application communicante », doit être mis en connexion avec les autres applications avant la fin de son déploiement, c’est-à-dire avant le 31 décembre 2009. Ce n’est qu’à cette condition que Cassiopée améliorera réellement la fluidité de la chaîne pénale en facilitant l’échange d’informations entre les enquêteurs et les services judiciaires et en évitant à tous les acteurs de cette chaîne concourant à l’exécution de la décision des ressaisies aussi fastidieuses qu’inutiles.

Enfin, dans un troisième temps, lorsque Cassiopée aura été déployé dans l’ensemble des juridictions et que sa communication avec les autres applications sera réalisée, la mission formule le vœu que les applications des acteurs relevant du ministère de la justice (Service du casier judiciaire national, JAP, Administration pénitentiaire et SPIP) soient intégrées au système Cassiopée, qui constituerait l’application unique de l’ensemble de la chaîne pénale.

Proposition n° 11

Assurer, avant le 31 décembre 2009, la communication de Cassiopée avec les applications utilisées par tous les acteurs de la chaîne pénale :

—  Gendarmerie nationale : JUDEX et Icare ; police nationale : Ardoise et STIC ;

—  Service du casier judiciaire national ;

—  Trésor public ;

—  Huissiers de justice ;

—  JAP et SPIP : APPI ;

—  Administration pénitentiaire : GIDE.

B. … À UN SYSTÈME DE GESTION DOCUMENTAIRE

La mise en service de Cassiopée dans les juridictions, à condition que la formation des personnels soit correctement assurée et que sa communication avec les autres applications de la chaîne pénale soit réalisée rapidement et efficacement, sera nécessairement un progrès pour la fluidité de la chaîne pénale.

Toutefois, la dématérialisation des procédures engagée dans la période récente ne saurait constituer au mieux qu’une solution transitoire avant la mise en place d’un système de gestion documentaire.

1. Les progrès de la dématérialisation des procédures

Le chantier de la dématérialisation des procédures a été engagé récemment, à la suite d’un rapport d’audit de modernisation remis en novembre 2006 (19). Une circulaire du ministère de la justice a défini les modalités de mise en œuvre, à titre expérimental dans un premier temps, de la dématérialisation des procédures (20).

Depuis le début de l’année 2007, la moitié des TGI ont été dotés de matériels de numérisation permettant de transformer les documents reçus des services de police et de gendarmerie en fichiers électroniques et de travailler ensuite à partir de supports informatiques. Les avantages à attendre de la dématérialisation sont indéniables, tant pour les services de police et les services judiciaires que pour les justiciables : échanges entre les intervenants facilités, délivrance de copies de dossiers instantanée, travail analytique sur le dossier simplifié et accéléré, délais de traitement réduits, diminution du coût de traitement des dossiers.

Toutefois, pour utile qu’elle soit, cette solution de la dématérialisation ne peut être regardée que comme une solution temporaire, la solution dont a besoin le système judiciaire étant un véritable « dossier judiciaire unique » accessible depuis le logiciel Cassiopée.

2. Le nécessaire partage des dossiers entre les intervenants de la chaîne pénale : vers le dossier judiciaire unique

Si la dématérialisation des procédures associée à la mise en place d’un système de gestion de données constitue un progrès incontestable par rapport à la situation actuelle de juridictions croulant sous des tonnes de dossiers sur papier, l’évolution de Cassiopée vers un système de gestion documentaire est considérée comme absolument indispensable par la mission.

Dans le futur système qui résultera de la mise en service de Cassiopée et de la dématérialisation, les utilisateurs consultant un dossier devront opérer des allers et retours entre la base de données regroupant les informations relatives à ce dossier (identité du prévenu, qualification des faits, peines prononcées…) et le dossier contenant les pièces numérisées. Cassiopée n’étant pas un système de gestion de documents, ses utilisateurs ne pourront pas, par exemple, à partir de l’écran indiquant les caractéristiques du jugement et les peines prononcées, accéder directement à ce jugement.

Dès lors, la transformation de Cassiopée en système de gestion de données et de gestion documentaire apparaît indispensable pour permettre à tous les intervenants de la chaîne pénale, des enquêteurs aux SPIP en passant par le parquet, la juridiction de jugement et les JAP, de disposer d’un dossier judiciaire unique. Seule la mise à disposition d’un tel outil permettra des gains optimisés d’efficacité des acteurs de la chaîne pénale et une réelle fluidification de celle-ci.

Le système Cassiopée a été présenté à votre rapporteur comme un système évolutif, relativement aisément transformable. La mission estime que ce chantier de la transformation de Cassiopée doit être mené parallèlement à son déploiement dans les juridictions et que l’objectif doit pouvoir être atteint dans un délai de deux ans, soit avant le 31 décembre 2009.

Ce chantier du dossier judiciaire unique doit être considéré comme absolument prioritaire eu égard à l’importance de l’objectif de fluidification de la chaîne pénale. La mission estime donc indispensable que le ministère de la justice opère dès l’année 2008 les redéploiements de crédits nécessaires pour réaliser l’objectif fixé de dématérialisation complète de la procédure pénale avant la date du 31 décembre 2009.

Proposition n° 12

Mettre en place le dossier judiciaire unique avant le 31 décembre 2009.

II. ACCÉLÉRER L’INSCRIPTION DES DÉCISIONS AU CASIER JUDICIAIRE

L’inscription des décisions de la justice pénale au casier judiciaire national revêt une importance considérable pour les juridictions tant au stade de l’engagement des poursuites qu’à celui de l’audience correctionnelle dans une perspective d’individualisation des peines, ainsi que lors de l’examen d’un éventuel aménagement devant le JAP. En effet, la connaissance par les juridictions de l’existence de condamnations antérieures est un élément décisif pour les parquets sur la réponse à donner à une infraction commise : une procédure de composition pénale ou de CRPC sera plus facilement envisageable pour l’auteur d’une infraction n’ayant jamais été condamné, alors qu’une procédure de comparution immédiate pourra être préférée pour une personne ayant déjà fait l’objet de plusieurs condamnations. Lors de l’audience, la connaissance du contenu du casier judiciaire est non seulement indispensable pour qualifier un éventuel état de récidive et prononcer les peines prévues par la loi, mais aussi pour individualiser la peine prononcée. Enfin, le JAP doit, au jour de sa décision sur un éventuel aménagement, pouvoir disposer des informations relatives au casier judiciaire de la personne condamnée pour prendre sa décision.

Le service du casier judiciaire national remplit parfaitement cette mission d’information des juridictions en temps réel, puisqu’il délivre chaque année plus de deux millions de bulletins n° 1 à destination des autorités judiciaires, avec un délai de réponse tout à fait satisfaisant d’une heure à compter de la réception de la demande. De plus, un projet d’accès direct des juridictions au bulletin n° 1 doit être prochainement lancé, qui permettra aux juridictions d’éditer elles-mêmes les bulletins sans avoir à en faire la demande.

La rapidité de l’inscription des décisions au casier judiciaire doit donc être une priorité pour la justice : rien ne sert à une juridiction de recevoir une fiche de casier judiciaire incomplète, alors qu’une ou plusieurs condamnations ont pu être prononcées dans les mois précédant la demande. Le délai d’inscription au casier judiciaire est la somme de deux délais : d’une part, le délai de transmission des décisions par les juridictions au service du casier judiciaire national, d’autre part, le délai d’enregistrement par le casier judiciaire national à compter de la réception de la fiche de décision. Ces deux délais doivent être réduits pour atteindre un objectif d’enregistrement des décisions en un mois au plus à compter du prononcé de la décision avant le 31 décembre 2009.

A. ACCÉLÉRER LA TRANSMISSION DES DÉCISIONS PAR LES JURIDICTIONS AU CASIER JUDICIAIRE

Le délai moyen de transmission des décisions par les juridictions au service du casier judiciaire national est actuellement de quatre mois. Ce délai s’explique par les difficultés connues par les greffes pour dactylographier et enregistrer les décisions après les audiences. Ce délai, bien qu’encore trop long, constitue pourtant une amélioration par rapport à la situation antérieure : en effet, certaines juridictions ont connu des délais de dactylographie des jugements, et donc de transmission au casier judiciaire, atteignant parfois deux ans.

À Bobigny, le stock de décisions en attente d’enregistrement, qui était de 7 000 à la fin de l’année 2006, a été réduit à 3 500 au 1er octobre 2007. À Bourg-en-Bresse, des renforts du greffe ont permis en un an de réduire de moitié le stock de décisions en attente, passé de 3 800 à 1 900. Mais si le flux des décisions prises depuis le début de l’année 2007 est dorénavant enregistré dans un délai d’un mois pour permettre la mise en œuvre des articles 474 et 723-15 du code de procédure pénale, en revanche l’enregistrement des décisions en stock concerne aujourd’hui des décisions rendues il y a dix-huit mois. L’apurement du stock de décisions à Bourg-en-Bresse n’est prévu que pour la fin de l’année 2008.

Cette situation s’explique par deux facteurs : l’insuffisance des personnels des greffes correctionnels et l’inadaptation du matériel informatique utilisé par les juridictions. La mission estime nécessaire que les greffes correctionnels soient dotés d’effectifs suffisants pour enregistrer les décisions en temps réel, ce que le logiciel Cassiopée devra permettre.

1. Doter les greffes correctionnels des effectifs nécessaires pour enregistrer les décisions en temps réel

Les greffes correctionnels ont trop longtemps connu une situation d’insuffisance de personnels qui a nui à la rapidité d’enregistrement des décisions et, par là même, empêché la mise à exécution rapide des décisions. Les recrutements opérés entre 2002 et 2007 ont permis une augmentation de 10 % des effectifs de greffiers, passés de 7 696 à 8 480. Ces augmentations d’effectifs, ajoutées aux recrutements de vacataires, ont permis aux juridictions de rattraper une partie de leur retard d’enregistrement des décisions et, pour quelques-unes d’entre elles, d’engager une dynamique d’enregistrement en temps quasi-réel.

Il n’en demeure pas moins que la situation des greffes demeure très tendue, seul le très fort dévouement au service public des fonctionnaires permettant de maintenir l’équilibre fragile dans lequel se trouvent les juridictions. En conséquence, l’amélioration des effectifs des greffes correctionnels doit être poursuivie.

Concernant l’emploi des vacataires, les recrutements effectués au cours des trois dernières années pour résorber les retards des greffes correctionnels et des services de l’exécution des peines sont regardés comme positifs, même si l’usage consistant à ne les recruter que pour des périodes de deux mois renouvelées plusieurs fois est très critiqué. Cet usage est hérité d’une recommandation ancienne du ministère de la justice destinée à éviter le paiement de cotisations chômage par l’administration. Ces cotisations, qui ne sont dues que pour les contrats d’une durée supérieure à deux mois, sont prélevées sur l’enveloppe globale servant à financer les vacations, raison pour laquelle la justice s'efforce d'échapper à cette règle de droit commun en multipliant les contrats de deux mois.

La mission estime cette pratique contraire à l'intérêt tant des juridictions que des vacataires : les fonctions des greffes correctionnels sont très techniques et nécessitent un temps de formation compris, d’après les informations fournies par les greffiers, entre 15 jours et un mois. Lorsque la personne s'est familiarisée avec ses fonctions, son contrat s'achève et il faut de nouveau former quelqu'un. En outre, ce mode de gestion des ressources humaines apparaît peu soucieux de la grande précarité imposée aux vacataires.

Un mode de recrutement des vacataires à la fois plus efficace pour le service public et plus respectueux de la stabilité des personnes employées est donc indispensable. Le droit de la fonction publique permet des recrutements de vacataires pour une durée maximale de dix mois au cours de douze mois consécutifs (21). La mission estime dès lors indispensable que la durée des contrats des vacataires ne soit plus fixée avec pour objectif unique d’éviter le paiement des cotisations chômage, mais en prenant en considération les besoins de la juridiction, et en allant jusqu’à la durée maximale de dix mois si nécessaire. Le ministère de la justice pourrait, en outre, étudier dans son budget le versement des cotisations chômage correspondant aux vacataires qu’il prévoira d’employer.

Proposition n° 13

Doter les greffes correctionnels de personnels suffisants pour enregistrer les décisions en temps réel :

—  en améliorant les moyens en personnels des greffes correctionnels ;

—  en recourant aux recrutements de vacataires en fonction des besoins des juridictions.

2. Enregistrer les décisions en temps réel

L’autre handicap des greffes correctionnels tient à la vétusté et à l’inadaptation, déjà signalées, des applications informatiques utilisées. La mise en service de Cassiopée, trop longtemps différée, dans l’ensemble des juridictions, juridictions franciliennes exceptées, avant le 31 décembre 2009, et sur l’ensemble du territoire avant le 30 juin 2010, simplifiera la tâche des greffes sur un plan matériel, en évitant les ressaisies inutiles et en proposant à l’utilisateur des éditions de documents prérenseignés.

Ces deux améliorations des moyens humains et matériels doivent permettre d’atteindre, avant le 31 décembre 2009, un objectif ambitieux mais réaliste de transmission des décisions au casier judiciaire dans un délai maximal de 15 jours à compter de leur prononcé.

Proposition n° 14

Enregistrer les décisions en temps réel, en vue de les transmettre au casier judiciaire dans un délai maximal de 15 jours à compter de leur prononcé avant le 31 décembre 2009.

B. ACCÉLÉRER L’ENREGISTREMENT DES DÉCISIONS PAR LE CASIER JUDICIAIRE

Le casier judiciaire a enregistré en 2006 près de 750 000 décisions prononcées par les juridictions. Le délai d’enregistrement des décisions par le service du casier judiciaire national est actuellement de 4,4 semaines à compter de la réception de la fiche de décision. Après avoir atteint un pic de 11 semaines en 2003, ce délai a aujourd’hui atteint un niveau qui peut être regardé comme encourageant. Ce délai est d’autant plus encourageant que, d’une part, le service du casier judiciaire national a connu une augmentation d’activité très sensible depuis 2005 en raison de la résorption d’une partie des stocks de décisions en attente d’enregistrement par les juridictions, et, d’autre part, que la perspective de le réduire rapidement à deux semaines est présentée comme réalisable dès le début de l’année 2008.

En outre, la mise en service de Cassiopée modifiera profondément le fonctionnement du casier judiciaire. Actuellement, les décisions sont transmises au casier judiciaire national sur papier, obligeant ses agents à un travail de préparation de l’enregistrement consistant à mettre en évidence les éléments de la décision à enregistrer et à un travail de saisie complète de toutes les données à enregistrer. Cassiopée permettra un gain de temps et d’efficacité dans l’enregistrement des décisions. En effet, une « passerelle » entre Cassiopée et l’application informatique du casier judiciaire national sera mise en place. Les éléments relatifs à l’identité de la personne condamnée et à la décision seront renseignés par le greffe de la juridiction et n’auront plus à être ressaisis, mais seulement vérifiés, par le service du casier judiciaire national.

Lorsque cette passerelle aura été mise en place, au plus tard le 31 décembre 2009, le rôle du casier judiciaire national évoluera vers un rôle de contrôle, d’une part, de l’identité de la personne avec les données du registre national de l’identité des personnes physiques pour les personnes nées en France ou avec ses propres données pour les personnes nées à l’étranger, d’autre part, de la régularité de la décision et notamment de la conformité de la peine prononcée avec la peine encourue.

Cassiopée devrait également permettre de réduire une part importante des difficultés présentées par certaines décisions : dans la mesure où les renseignements intégrés dans le système de gestion de données seront préformatés, les décisions dans lesquelles un élément est manquant (date ou lieu de naissance, durée de la peine, mode de comparution…) devraient se raréfier. Ces décisions, qui sont actuellement au nombre de 30 000 chaque année, obligent le casier judiciaire national à demander à la juridiction les informations manquantes. Le nombre des décisions comprenant une peine non encourue ou supérieure à la peine encourue, actuellement de 5 000 environ par an, devrait lui aussi diminuer sensiblement, puisque Cassiopée comprendra un système d’alerte permettant au greffe de prendre connaissance de la non-conformité de la décision au texte pénal et de régler la difficulté en amont, avant transmission au casier judiciaire.

Les progrès récents du casier judiciaire national en termes de délai d’enregistrement des décisions devront être confortés par la mise en service de Cassiopée et garantir en permanence un enregistrement dans un délai maximal de 15 jours à compter de la réception de la décision.

Le cumul de ces deux délais de 15 jours devra aboutir à un délai maximal d’un mois entre le prononcé de la décision et son enregistrement au casier judiciaire, cet objectif devant être atteint avant le 31 décembre 2009.

Proposition n° 15

Enregistrer les décisions au casier judiciaire national dans un délai maximal de 15 jours à compter de la réception de la décision.

CHAPITRE 4 : AMÉLIORER LA MISE À EXÉCUTION ET LES CONDITIONS D’EXÉCUTION DES DÉCISIONS DE JUSTICE PÉNALE

« L’exécution d’une peine prononcée est la garantie de la crédibilité de la justice pénale. Cette crédibilité est assurée par l’effectivité : une institution, pour être respectable et utile, doit fonctionner de manière réelle et effective » (22). La justice pénale, grâce à des progrès récents dans l’exécution des sanctions, a commencé à regagner de la crédibilité, même si de nouvelles avancées doivent être réalisées pour que la certitude et la promptitude de la sanction deviennent une réalité.

Dans son rapport sur les peines alternatives à la détention, les modalités d’exécution des courtes peines, la préparation des détenus à la sortie de prison, M. Jean-Luc Warsmann avait formulé l’idée que « lorsque le condamné est comparant, les premiers actes d’exécution doivent être accomplis dès l’audience ». Cette proposition s’est traduite notamment par la mise en place dans 176 TGI des bureaux de l’exécution des peines (BEX), qui ont permis des progrès considérables en termes de délai et de taux d’exécution des peines. Leur utilité est telle que leur généralisation est aujourd’hui une nécessité.

Outre la généralisation des BEX, d’autres progrès sont encore possibles pour améliorer la mise à exécution des peines prononcées, notamment des peines d’amende et de suspension ou de retrait de permis de conduire. Enfin, une amélioration des conditions d’exécution des peines privatives de liberté est elle aussi nécessaire, afin que ces peines puissent prendre pleinement leur sens et prévenir efficacement la récidive en favorisant la réinsertion des personnes détenues.

I. GÉNÉRALISER LES BEX

Malgré certaines difficultés d’installation qu’il conviendra de relever, les vertus des BEX sont unanimement reconnues par tous les acteurs de l’exécution des décisions de justice pénale. Leur généralisation est une nécessité, même si certaines améliorations sont possibles pour parfaire leur efficacité.

A. LES VERTUS DES BEX

Alors que l’objectif de la création des BEX était de permettre l’exécution complète ou un début d’exécution des peines prononcées immédiatement après l’audience, il est apparu à l’usage que les BEX avaient deux autres vertus, celle de permettre l’explication de la décision et celle de permettre l’information de la victime. De plus, à l’égard des victimes, le BEX ne doit pas seulement rester un lieu d’information, il doit aussi devenir le lieu de l’indemnisation.

1. Le BEX, lieu d’exécution ou de commencement d’exécution de la décision

La création des BEX avait pour objectif de porter remède à une situation absurde, caricaturale et décrédibilisante pour l’institution judiciaire : lorsqu’une peine d’amende était prononcée, le justiciable ne recevait un commandement de payer que plusieurs mois après l’audience ; en cas de condamnation à un SME ou à un TIG, la convocation n’était adressée là aussi que plusieurs mois après, alors que la situation personnelle et professionnelle de la personne condamnée pouvait avoir changé ; pis, en cas de condamnation à une peine d’emprisonnement ferme non assortie d’un mandat de dépôt à l’audience, la peine pouvait être mise à exécution plusieurs mois après l’audience, donnant à l’action de la justice une double image de lenteur incompréhensible et de manque de discernement dans les cas où la situation du condamné avait évolué.

Pour redonner du sens aux peines prononcées, la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a introduit dans le code de procédure pénale un nouvel article 707, dont le premier alinéa dispose que « les peines prononcées par les juridictions pénales sont, sauf circonstances insurmontables, mises à exécution de façon effective et dans les meilleurs délais ». L’exécution des peines « dans les meilleurs délais » est donc désormais la norme, cette expression devant être prise dans son sens le plus strict, c’est-à-dire, à chaque fois que possible, immédiatement après l’audience.

L’existence des BEX, après une phase d’expérimentation en 2004, a été consacrée par l’article D. 48-2 du code de procédure pénale, issu du décret n° 2004-1364 du 13 décembre 2004 modifiant le code de procédure pénale et relatif à l'application des peines.

Dans tous les tribunaux où ils ont été mis en place, les BEX, dont le taux de fréquentation est très satisfaisant, ont rendu possible soit l’exécution immédiate des peines soit un début d’exécution de celles-ci, sans rupture dans la chaîne pénale entre le prononcé de la peine et son exécution.

—  Tout d’abord, le taux de présentation au BEX peut d’ores et déjà être considéré comme très satisfaisant. Par exemple, le TGI de Bobigny, dans lequel l’accès au BEX est prévu pour les audiences de CRPC et d’ordonnances pénales, soit huit audiences hebdomadaires qui concernent chaque année 3 000 condamnés, le taux de présentation est de l’ordre des deux tiers, et le taux d’exécution immédiate des décisions atteint un tiers.

Ce taux de présentation au BEX après l’audience est particulièrement élevé dans le cadre des audiences de CRPC, atteignant selon les juridictions 90 à quasiment 100 %, ce qui s’explique par le fait que cette procédure suppose de la part du condamné la reconnaissance des faits et l’acceptation de la sanction. Cette procédure, que l’ensemble des magistrats du parquet et du siège rencontrés par votre rapporteur s’accordent à juger globalement satisfaisante et efficace, se voit ainsi confortée par le fait que les décisions prononçant des peines d’amende ou de suspension ou retrait du permis de conduire sont généralement exécutées très rapidement.

—  Pour les peines immédiatement exécutables telles que l’amende ou le retrait de permis de conduire, le BEX permet une exécution immédiate. Dans toutes les juridictions où ont été installés des terminaux de paiement par carte bancaire ou des urnes destinées à recevoir les paiements par chèque, la mission a pu constater que les justiciables étaient nombreux à se présenter après l’audience pour s’acquitter du montant de l’amende qui vient d’être prononcée (23).

Lorsque le BEX ne dispose ni d’un terminal de paiement par carte bancaire ni d’une urne pour les chèques, ce qui est malheureusement encore le cas dans une majorité de tribunaux (24), la personne condamnée à une amende se voit remettre un relevé de condamnation pénale (RCP) lui permettant, en principe et sous les réserves qui seront développées ci-après, de se présenter à la trésorerie et de s’acquitter du montant de son amende ou de demander un échelonnement du paiement sur examen de sa situation personnelle.

Couplée à la réduction de 20 % prévue depuis la loi du 9 mars 2004 par l’article 707-2 du code de procédure pénale en cas de paiement dans le mois suivant la décision, la possibilité de payer immédiatement l’amende soit au BEX soit à la trésorerie a indéniablement permis d’améliorer le taux de recouvrement des amendes, sans toutefois que les statistiques disponibles permettent de mesurer précisément l’augmentation de ce taux.

De même, et sous les réserves qui seront formulées ci-après, les peines de suspension et de retrait de permis de conduire sont largement exécutées au BEX. Cette possibilité ne peut être que considérée comme bénéfique pour le justiciable, qui a la possibilité de connaître immédiatement après l’audience les dates de début et de fin de la peine, compte tenu notamment d’une éventuelle suspension administrative dont la durée doit venir en déduction de la peine prononcée, et de commencer à l’exécuter au plus près de l’audience.

—  Pour les peines « non immédiatement exécutables », qui nécessitent la remise d’une convocation devant le JAP ou le SPIP, le BEX facilite l’application de l’article 474 du code de procédure pénale, qui prévoit la délivrance obligatoire à l’issue de l’audience d’une convocation dans un délai de 10 à 30 jours devant le JAP pour les peines d’emprisonnement ferme d’une durée inférieure ou égale à un an et devant le SPIP pour les peines de SME, de sursis assorti de l’obligation d’accomplir un TIG et de TIG.

En effet, si la délivrance de ces convocations est assurée, dans les tribunaux dans lesquels un BEX n’a pas été créé ou pour les audiences pour lesquelles l’accès au BEX n’est pas prévu, en marge de l’audience par le greffier correctionnel, cette solution n’apparaît pas pleinement satisfaisante puisqu’elle perturbe le déroulement de l’audience. En revanche, le BEX apparaît comme le lieu idéal pour la remise de ces convocations, qui peut se dérouler dans des conditions plus favorables qu’à l’audience et permettre une explication des peines à exécuter.

2. Le BEX, lieu d’explication de la décision

La deuxième vertu du BEX est qu’il favorise, dans un lieu plus propice que la chambre d’audience, l’explication de la décision, non seulement au condamné mais aussi à la victime de l’infraction.

En ce qui concerne les personnes condamnées, les magistrats du siège estiment que, même en s’efforçant de faire preuve de la plus grande clarté possible dans l’explication de la peine prononcée, la solennité et la tension de l’audience empêchent dans un très grand nombre de situations la compréhension de la décision. « Les personnes condamnées ne savent pas en sortant de l’audience à quoi elles ont été condamnées » est une phrase que la mission a entendue à l’occasion de chacun de ses déplacements dans les juridictions.

Les personnels des BEX reconnaissent également cette situation et sont conscients que leur rôle ne se limite pas à faire payer une amende ou à remettre une convocation, mais consiste aussi à expliquer la décision qui a été prise. Cette fonction est dans l’ensemble appréciée comme très valorisante par les personnels des BEX et ne peut être considérée par la mission que comme un progrès très significatif : une peine mieux comprise sera une peine mieux exécutée, qui pourra plus facilement prendre son sens et atteindre son but.

En outre, certaines juridictions, dont le TGI de Bobigny, ont établi des imprimés expliquant de façon remarquablement claire et succincte les obligations découlant du prononcé de la peine, indiquant les démarches à accomplir par le condamné et précisant les coordonnées des interlocuteurs du condamné pour l’exécution de sa peine (SPIP ou associations organisant les stages de citoyenneté ou de sensibilisation à la sécurité routière) (25). Cette initiative doit être saluée et mériterait d’être généralisée dans l’ensemble des juridictions.

3. Le BEX, lieu d’information et d’indemnisation de la victime

Le BEX a également pour mission de fournir à la victime de l’infraction qui s’était constituée partie civile des informations sur les moyens d’obtenir l’exécution de la décision d’indemnisation dont elle a bénéficié. Actuellement, les agents des BEX informent les parties civiles des différents moyens à leur disposition pour obtenir le paiement des dommages-intérêts, et notamment de la possibilité de saisir la Commission d’indemnisation des victimes d’infractions (CIVI) en application de l’article 706-15 du code de procédure pénale.

La mission estime que le rôle du BEX en matière d’information et d’indemnisation des victimes doit être accru : le BEX doit devenir le lieu où commence effectivement la mise à exécution du volet civil de la décision pénale, en lien avec le service d’aide au recouvrement des dommages-intérêts par les victimes d’infractions qui doit être prochainement créé.

La création de ce service, qui sera accessible à toutes les personnes ne remplissant pas les conditions d’indemnisation par la CIVI, devra permettre de rendre effectif le droit à l’indemnisation pour les victimes. Ce service aura pour mission de procéder pour le compte de la victime au recouvrement des dommages-intérêts et des frais auxquels l’auteur de l’infraction aura été condamné au titre de l’article 700 du nouveau code de procédure civile auprès de la personne condamnée, et versera à la victime une avance forfaitaire.

Lorsqu’il aura versé cette avance, le service d’aide au recouvrement pourra, après avoir recouvré la totalité de l’indemnisation pour le compte de la victime, exercer une action récursoire contre le débiteur pour obtenir le remboursement de cette avance. La mission estime que le plafond de cette avance devra être fixé, dans un premier temps, à un minimum de 3 000 euros, montant qui soit couvrira totalement le montant de l’indemnisation accordée, soit permettra à la victime de faire face à une partie des dépenses indues que l’infraction aura causées. Ce service sera financé, comme l’actuel fonds de garantie des victimes d’infractions, par les frais de recouvrement perçus sur les personnes condamnées, qui seront de l’ordre de 15 % du montant des dommages-intérêts, et sera bien évidemment gratuit pour la victime.

La mission estime qu’il est indispensable de procéder à une révolution culturelle fondamentale dans l’exécution du volet civil des décisions de justice pénale. De même qu’une peine non exécutée perd tout sens, une condamnation à des dommages-intérêts non exécutée fait perdre à la justice sa crédibilité pour la personne condamnée et à la victime sa confiance dans la justice. L’exécution effective du volet civil des décisions de justice pénale est tout aussi essentielle que l’exécution des peines prononcées.

Dès lors, la mission estime nécessaire, afin que les condamnations à des dommages-intérêts prononcées par les juridictions pénales soient effectivement exécutées, que la victime soit invitée à faire savoir, dès le stade de sa constitution de partie civile, si elle souhaite que le service d’aide au recouvrement soit saisi – sans qu’elle ait à formuler de nouvelle demande – en cas d’absence de paiement des dommages-intérêts dans les trente jours du moment où la décision est devenue définitive. En effet, il faut impérativement éviter que les démarches que doit actuellement effectuer la victime en vue d’obtenir l’indemnisation effective ne laissent la place à d’autres démarches administratives pour saisir le service d’aide au recouvrement. Si tel était le cas, le gain pour la victime serait infime.

Le service d’aide au recouvrement devra donc être saisi automatiquement et gratuitement, si la victime le souhaite, dès lors que le condamné n’aura pas payé les dommages-intérêts auxquels il a été condamné dans les trente jours de la décision définitive. Dans un souci de rapidité et de simplicité, les dossiers de demande d’assistance au recouvrement et d’avance sur l’indemnisation devront naturellement être transmis par les juridictions par voie dématérialisée.

Proposition n° 16

Rendre effectif le droit de la victime à obtenir le paiement des dommages-intérêts prononcés :

—  en accordant aux victimes saisissant le service d’aide au recouvrement une avance sur le montant de l’indemnisation dans la limite d’un montant fixé, dans un premier temps, à 3 000 euros ;

—  en prévoyant la saisine automatique et gratuite du service d’aide au recouvrement, si la partie civile le souhaite, lorsque le condamné n’a pas payé les dommages-intérêts auxquels il a été condamné dans les trente jours de la décision définitive.

Enfin, la mission estime également que devrait être réglée une difficulté qui, bien qu’elle ne relève pas stricto sensu de l’exécution des décisions de justice pénale, concerne cependant l’indemnisation des victimes d’infractions. Dans le cas de ces infractions particulièrement choquantes et gênantes pour nos concitoyens que sont les destructions volontaires de véhicules, notamment par incendie, dont notre pays connaît malheureusement de trop fréquents épisodes, les victimes ne peuvent prétendre à une indemnisation par la CIVI que si elles remplissent les conditions d’indemnisation fixés par l’article 706-14 du code de procédure pénale. Or ces conditions, qui s’appliquent pour toutes les infractions contre les biens ouvrant droit à indemnisation par la CIVI, apparaissent inadaptées dans le cas particulier des destructions volontaires de véhicules.

La première condition que doit remplir la victime de l’infraction est qu’elle ne puisse « obtenir à un titre quelconque une réparation ou une indemnisation effective et suffisante de son préjudice, et qu’elle se trouve de ce fait dans une situation matérielle ou psychologique grave ». Si le premier terme de cette condition – ne pouvoir obtenir à aucun titre une indemnisation – est fréquemment rempli par les victimes d’incendies de véhicules, dès lors que leur véhicule n’est assuré que pour les dommages aux tiers, en revanche le second terme est plus compliqué à établir. La CIVI, qui se montre stricte sur cette exigence de situation matérielle ou psychologique grave, refuse ainsi certaines demandes d’indemnisation lorsque la victime n’a pas un besoin impératif de son véhicule ou qu’elle peut utiliser un réseau de transports en commun jugé suffisant. La mission estime que, compte tenu de la nécessité pour un grand nombre de nos concitoyens de pouvoir disposer d’un véhicule, la gravité du préjudice devrait être présumée et que l’exigence de situation matérielle ou psychologique grave causée par l’infraction devrait être écartée.

La seconde condition que doit remplir la victime de l’infraction tient à ses ressources : ses ressources ne doivent pas dépasser le « plafond prévu par l’article 4 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique pour bénéficier de l’aide juridictionnelle partielle, compte tenu, le cas, échéant, de ses charges de famille ». Ce plafond est actuellement fixé à 1 183,61 euros par mois : toute personne dont les revenus sont supérieurs ne peut prétendre à l’indemnisation par la CIVI. Ce montant apparaît particulièrement faible ; certains de nos concitoyens ayant des ressources supérieures, dont le véhicule est brûlé, ne sont pas en mesure d’acquérir un nouveau véhicule dont ils ont pourtant besoin. La mission propose en conséquence de doubler ce plafond de ressources afin de permettre de réparer pour un plus grand nombre de victimes l’injustice que constitue la destruction volontaire de leur véhicule.

Enfin, l’article 706-14 du code de procédure pénale limite le montant de l’indemnisation pouvant être versé au triple du montant mensuel du plafond de ressources pour bénéficier de l’aide juridictionnelle partielle, soit 3 550,83 euros. Or ce montant peut s’avérer assez éloigné de la valeur réelle du véhicule et, surtout, très insuffisant pour permettre l’acquisition d’un nouveau véhicule correspondant aux besoins de la victime. En conséquence, la mission propose, pour les destructions volontaires de véhicules, que ce plafond d’indemnisation soit porté à un montant de 5 000 euros.

Proposition n° 17

Mettre en place un système d’indemnisation des propriétaires de véhicules victimes d’une destruction volontaire de leur bien, leur permettant d’obtenir sans frais une indemnisation par la CIVI dans la limite d’un plafond de 5 000 euros.

B. L’INDISPENSABLE GÉNÉRALISATION DES BEX

Le succès des BEX tant sur le plan de l’amélioration de l’exécution des décisions que sur celui de leur explication est indéniable. Dès lors, il convient de généraliser les BEX afin que ceux-ci soient accessibles à toutes les audiences de toutes les juridictions de première instance. La question de l’extension des BEX aux cours d’appel doit également être posée, bien que la mission estime ne pas disposer d’informations suffisantes pour y répondre.

1. À toutes les juridictions correctionnelles de première instance

Des BEX existent aujourd’hui dans 175 des 181 tribunaux de grande instance. Seules six juridictions de première instance ne disposent donc pas de BEX (26).

Les six juridictions du premier degré qui n’ont pu mettre en place de BEX invoquent des difficultés immobilières qui rendraient impossible l’installation d’un BEX. Parmi ces juridictions, la mission d’information a visité le TGI de Rouen et a effectivement pu constater un manque certain de place et la difficulté d’aménager des locaux classés, qui compliquent l’installation d’un nouveau bureau destiné à l’accueil du public.

En outre, les responsables du tribunal de Rouen estiment que le BEX n’est pas indispensable, dès lors que le service de l’exécution des peines ne connaît pas de retards de traitement des décisions à exécuter et que l’obligation de remise d’une convocation dans un délai de 10 à 30 jours prévue par l’article 474 du code de procédure pénale est respectée, cette convocation étant remise à l’audience.

Toutefois, ces arguments méconnaissent l’utilité du BEX tant en termes d’exécution ou de commencement d’exécution de la sanction qu’en termes d’explication. Le BEX, notamment, facilite le paiement de l’amende dans le délai d’un mois en évitant au condamné d’avoir à se présenter à la trésorerie pour payer l’amende, permet à la personne condamnée à un retrait de permis de conduire de commencer l’exécution de sa peine et de connaître précisément sa date de fin, et permet d’obtenir des informations sur les autres peines qui ont pu être prononcées.

Pour la mission, le BEX doit être considéré comme un service rendu au justiciable, qui lui permet non seulement d’exécuter ou de commencer à exécuter immédiatement sa peine mais aussi d’obtenir des informations sur la mesure qu’il va devoir exécuter. Dès lors, le principe d’égalité impose que l’accès à ce service soit possible pour l’ensemble des justiciables, quelle que soit la juridiction qui les a condamnés.

Pour ces raisons, la mission souhaite vivement que les six juridictions n’ayant pas mis de BEX en place le fassent, par exemple en réaménageant les locaux des services de l’exécution des peines pour rendre possible l’accueil du public sans nuire aux autres tâches de ce service. Un délai d’un an doit permettre d’atteindre cet objectif : chaque TGI devra donc disposer d’un BEX avant le 31 décembre 2008.

Proposition n° 18

Installer un BEX dans les six juridictions n’en ayant pas encore créé avant le 31 décembre 2008.

2. À toutes les audiences

Les BEX sont de création récente. Des moyens importants sur le plan humain ont été alloués au ministère de la justice pour permettre leur mise en place : grâce à une « enveloppe » de 29,5 millions d’euros votée dans la loi de finances pour 2005, ont été recrutés pour être affectés dans les BEX 7 greffiers en chef placés, 102 greffiers, 216 agents de catégorie C et 400 vacataires.

Toutefois, le délai nécessaire à la formation et à l’arrivée de ces personnels supplémentaires dans les juridictions a contraint la plupart des chefs de juridiction à opérer des choix entre les audiences pour lesquelles le BEX serait accessible et celles pour lesquelles le condamné ne serait pas invité à se présenter au BEX.

Dans la plupart des juridictions, ce sont les audiences pour lesquelles les probabilités de présentation au BEX étaient les plus fortes qui ont été retenues, à savoir les audiences de CRPC, d’ordonnance pénale contraventionnelle ou délictuelle, voire de juge unique. À Paris, le BEX est accessible à tous les condamnés, quel que soit le type de l’audience au cours de laquelle l’affaire a été jugée, mais seulement trois jours après la condamnation pour permettre l’enregistrement de la décision sur la « Nouvelle chaîne pénale » par le greffe correctionnel.

Cependant, dans la plupart des tribunaux, les BEX ont conservé des horaires d’ouverture indépendants des heures de fin des audiences. Si une audience pour laquelle le BEX est en principe accessible se termine au-delà de l’horaire de fermeture du BEX, le condamné ne pourra pas s’y présenter le jour même pour payer son amende, remettre son permis de conduire ou obtenir des explications sur la peine qui a été prononcée. La mise en place d’horaires étendus d’ouverture, par exemple de 9 heures à 19 heures à Bobigny, bien que très positive, ne permet pas de résoudre cette difficulté.

Une seule juridiction parmi celles que la mission a visitées, le tribunal de grande instance de Reims, a prévu l’accès au BEX pour toutes les audiences et immédiatement après la fin de celles-ci. Compte tenu des horaires parfois tardifs de fin des audiences, des aménagements dans les temps de travail et de repos des quatre agents affectés au BEX ont été nécessaires, et rendus possibles grâce au sens aigu de la disponibilité de ces agents. Mais cette accessibilité du BEX à tous les condamnés est considérée par l’ensemble des magistrats et fonctionnaires du TGI de Reims comme un service rendu aux justiciables, qui doivent pouvoir en bénéficier quelle que soit la nature de l’audience au cours de laquelle ils ont été condamnés.

Cette généralisation du BEX à toutes les audiences est, pour la mission, une nécessité. En effet, le principe d’égalité impose que tous les justiciables soient traités de façon égale et que le service rendu soit le même pour tous. L’accès au BEX doit donc devenir la norme, à toutes les audiences de toutes les juridictions du premier degré, ce qui devrait être rendu possible avec l’affectation de personnels suffisants et l’adaptation du déroulement des audiences que la mission appelle de ses vœux.

Proposition n° 19

Généraliser les BEX à toutes les audiences.

3. Faut-il généraliser les BEX en appel ?

En appel, l’existence d’un BEX reste exceptionnelle : en effet, seules neuf cours d’appel sur trente-cinq ont créé un BEX. La mission considère qu’une évaluation est nécessaire pour se prononcer sur leur utilité et sur la question de leur généralisation. En effet, l’utilité des BEX en appel paraît, au premier abord, moins évidente qu’en première instance, dans la mesure où la plupart des décisions d’appel sont rendues après mise en délibéré, lors d’une audience de renvoi à laquelle le prévenu n’est que très rarement présent.

Toutefois, les arguments développés ci-dessus sur l’égalité d’accès au service rendu par le BEX pourraient également être invoqués en faveur de l’existence du BEX en appel. Il n’y a en effet pas de justification a priori pour priver un justiciable condamné en appel qui serait présent lors du prononcé de la décision et souhaiterait payer son amende ou obtenir des informations sur les conditions d’exécution de sa peine du service dont bénéficie le condamné en première instance.

En conséquence, la mission ne peut que conclure à la nécessité d’évaluer l’utilité des BEX en appel, afin de permettre de décider de leur généralisation ou au contraire de leur abandon.

Proposition n° 20

Évaluer l’utilité des BEX en appel pour pouvoir décider leur généralisation.

C. AMÉLIORER L’EFFICACITÉ DES BEX

Si les BEX ont déjà permis d’améliorer de façon sensible l’exécution des décisions de la justice pénale, au point que leur généralisation à toutes les audiences de toutes les juridictions du premier degré est aujourd’hui souhaitable, leur efficacité peut cependant être améliorée, en les dotant de personnels suffisants et en facilitant leur fonctionnement par une adaptation du déroulement des audiences correctionnelles.

1. Doter les BEX de personnels suffisants

Les personnels affectés dans les BEX sont soit des greffiers, soit des fonctionnaires de catégorie C, soit des vacataires. La mission estime que les affectations de fonctionnaires au sein des BEX doivent être ajustées pour permettre le bon fonctionnement de ces services, tandis que les recrutements de vacataires doivent être rationalisés conformément à la proposition déjà formulée au sujet des greffes correctionnels.

Les chefs de juridiction entendus par la mission lors de ses déplacements ont unanimement reconnu que les moyens en personnels affectés en vue de la création des BEX ont permis de mettre en place cette réforme d’organisation particulièrement utile sans mettre en péril l’équilibre des juridictions.

Plusieurs chefs de juridiction ont cependant signalé à la mission que leurs services souffraient d’une grande fragilité, toute absence d’un greffier ou d’un fonctionnaire de la juridiction étant susceptible de faire exploser les délais de traitement. En effet, les vacances temporaires de postes sont rarement remplacées, les affectations de greffiers placés étant souvent décidées sans préparation et tardivement.

En outre, la généralisation des BEX à toutes les audiences aura pour conséquence inévitable d’allonger les horaires d’ouverture des bureaux et rendra donc indispensable l’affectation de nouveaux personnels pour permettre leur bon fonctionnement.

En conséquence, la mission invite les services du ministère de la justice à évaluer les recrutements nécessaires à la généralisation des BEX à toutes les audiences et à l’extension de leur amplitude horaire d’ouverture. Les recrutements de 209 fonctionnaires de catégorie B +, B et C en équivalent temps plein travaillé prévus par le projet de loi de finances pour 2008 permettront déjà de répondre partiellement aux besoins des juridictions, mais devront vraisemblablement être complétés en 2009.

Concernant l’emploi des vacataires, la mission estime que, comme pour les greffes correctionnels, les juridictions doivent pouvoir avoir recours à la souplesse de recrutement que permet l’emploi de ces vacataires, pour pouvoir faire face à des vacances de postes ou à des surcroîts temporaires d’activité. La mission estime nécessaire que ces vacataires soient recrutés conformément aux règles du droit de la fonction publique et avec pour seule priorité l’intérêt du service, en effectuant des recrutements pour des durées de dix mois lorsque la situation le justifie.

Proposition n° 21

Permettre le bon fonctionnement des BEX, en y affectant les personnels nécessaires, compte tenu notamment des contraintes liées à l’amplitude horaire d’ouverture du BEX.

2. Faciliter l’organisation du BEX en adaptant le déroulement des audiences correctionnelles

L’efficacité des BEX peut également être renforcée par une mesure d’organisation judiciaire simple et concrète, que toutes les juridictions n’ont pourtant pas encore mise en place. En effet, pour éviter un afflux massif de condamnés vers le BEX à la fin d’une audience, il apparaît nécessaire que les audiences soient découpées en plusieurs délibérés. Cette pratique, qui s’est déjà développée dans certaines juridictions, par exemple à Reims, permet au condamné de voir un agent du BEX sans attente excessive et sans contraindre les agents à rester présents trop longtemps après la fin de l’audience.

Cette mesure simple et de bon sens, qui devrait être préconisée par voie de circulaire, ne saurait être considérée comme relevant de l’appréciation de chaque président de chambre correctionnelle, malgré les opinions contraires de certains présidents de TGI. En sus de son intérêt purement pratique d’éviter la création de files d’attente devant le BEX, cette mesure aurait en outre le mérite d’associer les juridictions de jugement à l’exécution de la décision qu’elles prononcent, en leur faisant davantage percevoir que cette exécution peut et doit dans toute la mesure du possible être immédiate ou être commencée sans rupture après le prononcé de la décision.

La mission estime que l’efficacité du BEX dépend non seulement de son accessibilité à tous les condamnés mais aussi de la fluidité de son fonctionnement et que toutes les adaptations au déroulement des audiences nécessaires pour assurer cette fluidité doivent être prises.

Proposition n° 22

Permettre un fonctionnement fluide des BEX en permettant la présentation des condamnés au fur et à mesure de l’audience.

II. AMÉLIORER LA MISE À EXÉCUTION DES PEINES PRONONCÉES

Le BEX est un outil favorisant la mise à exécution des décisions de justice pénale, dont l’efficacité a été démontrée dès ses premiers mois de fonctionnement. L’exécution de deux peines parmi les plus fréquemment prononcées par les juridictions pénales et susceptibles d’être facilement exécutées au BEX, l’amende et la suspension ou l’annulation du permis de conduire, pourrait cependant être améliorée par diverses mesures juridiques et pratiques. En outre, il conviendrait de prévoir la possibilité pour tout condamné de s’acquitter auprès du BEX du montant du droit fixe de procédure attaché à toute condamnation pénale.

A. AMÉLIORER LE RECOUVREMENT DES AMENDES

En dépit de progrès récents, le taux global de recouvrement des amendes, de 76 % en 2007, ne peut être considéré que comme insuffisant. Surtout, ce taux global de recouvrement masque de très fortes disparités selon la nature de l’amende. Si le taux de recouvrement des amendes forfaitaires majorées s’élève à 82,5 % pour les amendes de circulation routière et même à 89 % pour les amendes issues des contrôles automatiques de vitesse, en revanche le taux de recouvrement des amendes prononcées par ordonnance pénale ou par jugement correctionnel stagne à 50 %. Que signifie une condamnation à une amende prononcée par une juridiction si elle n’est pas payée dans un cas sur deux ?

En outre, le taux de recouvrement contentieux a chuté de façon spectaculaire au cours des dix dernières années, passant de 44,4 % en 1995 à 32,3 % en 2006. Ce faible taux de recouvrement contentieux peut s’expliquer partiellement par l’augmentation du taux de recouvrement spontané : plus les débiteurs d’amendes paient spontanément, plus les débiteurs restants sont récalcitrants à payer ou insolvables. Si cet argument a une part de vérité, il n’en demeure pas moins que le taux de recouvrement contentieux peut et doit encore être amélioré.

Deux séries de mesures destinées à faciliter le paiement spontané, d’une part, et à améliorer le recouvrement contentieux, d’autre part, peuvent être proposées.

1. Faciliter le paiement spontané des amendes

L’un des apports essentiels du BEX a été, nous l’avons vu, de permettre le paiement immédiat de l’amende dès l’issue de l’audience. Cette possibilité, couplée à l’incitation de la réduction des 20 %, a permis au justiciable d’entrer dans une logique nouvelle, celle du paiement volontaire, à opposer à la logique ayant dominé jusqu’alors, celle de l’attente passive de la demande de paiement du Trésor public.

Toutefois, le dispositif mis en place pour améliorer le paiement spontané des amendes peut encore être perfectionné grâce à trois séries de mesures : l’attribution au relevé de condamnation pénale du statut de titre exécutoire et l’amélioration de l’échange d’informations entre tribunaux et trésoreries, l’installation des urnes et terminaux de carte bancaire dans tous les BEX et l’institution de la possibilité de payer une amende en espèces au BEX.

a) Reconnaître au relevé de condamnation pénale valeur de titre exécutoire et améliorer l’échange d’informations entre tribunaux et trésoreries

Tous les tribunaux ne permettent pas encore le paiement des amendes dans les locaux du BEX. Au 1er octobre 2007, seuls 63 terminaux de paiement par carte bancaire et 44 urnes de dépôt de chèques ont été installés, pour 175 BEX créés. Dans l’attente de l’installation de terminaux de paiement par cartes bancaires et d’urnes dans tous les BEX, préconisée par la mission, il apparaît cependant nécessaire d’améliorer la transmission des informations entre les juridictions et les trésoreries.

En effet, lorsque le BEX ne dispose pas des équipements nécessaires pour recevoir le paiement des amendes, le condamné se voit remettre un relevé de condamnation pénale (RCP) sur lequel figurent les peines auxquelles il a été condamné, notamment le montant de l’amende. Le condamné est ensuite invité à se présenter à la trésorerie du lieu de condamnation muni de ce RCP pour s’acquitter du montant de l’amende, ou à envoyer par courrier le paiement accompagné du RCP.

En outre, même lorsque le BEX dispose d’une urne ou d’un terminal de paiement par carte bancaire, il n’est pas en mesure d’accorder des délais de paiement, que seule la trésorerie peut décider après examen de la situation de la personne condamnée.

Dans ces deux situations, il apparaît indispensable que la trésorerie puisse, sans difficulté comptable, accepter les paiements volontaires effectués sur présentation d’un RCP. Or les trésoreries ont fait savoir à la mission que lorsqu’elles reçoivent un paiement volontaire à la suite d’une condamnation pénale, le RCP est considéré comme une simple information permettant d’accepter le paiement, mais pas comme un titre exécutoire permettant d’imputer l’opération sur un plan comptable. Le montant du paiement est alors placé sur un compte dit « d’attente », avant régularisation au moment de la réception de l’extrait-finances adressé par le greffe de la juridiction.

Outre ces difficultés pratiques d’imputation comptable, le paiement volontaire de l’amende auprès de la trésorerie suscite parfois une autre difficulté : la trésorerie n’informant pas la juridiction du paiement de l’amende, le greffe lui adresse toujours l’extrait-finances. Or il arrive dans certains cas que la trésorerie ne fasse pas le lien entre l’extrait-finances reçu et le paiement effectué sur présentation du RCP, et qu’elle émette un titre de paiement pour une amende déjà payée. Cette demande de nouveau paiement ne peut que surprendre désagréablement le justiciable, tout en l’obligeant à accomplir des démarches inutiles et parfois lourdes pour prouver qu’il s’est déjà acquitté du montant de l’amende.

Le préalable au règlement de ces difficultés réside dans la dématérialisation des transmissions des informations entre les trésoreries et les tribunaux : actuellement, seules les informations relatives aux amendes forfaitaires majorées et aux ordonnances pénales circulent – depuis peu – par voie électronique. En revanche, les informations relatives aux condamnations par les juridictions correctionnelles continuent d’être transmises sur support papier. Ce sont ainsi près de 500 000 extraits-finances qui sont adressés chaque année par les tribunaux aux trésoreries et qui donnent lieu à une ressaisie des informations par les services du Trésor public, induisant une perte de temps et un risque d’erreur non négligeables. Pour mettre fin à cette anomalie, la mission estime indispensable que l’interface de communication entre Cassiopée et le logiciel utilisé par les trésoreries soit réalisée avant le 31 décembre 2009.

Par ailleurs, pour éviter les deux difficultés de l’imputation comptable et de la demande de paiement malgré un paiement volontaire antérieur, la mission formule donc deux propositions : d’une part, que le RCP ait valeur de titre exécutoire afin de permettre l’enregistrement immédiat du paiement de l’amende par la trésorerie, d’autre part, que soit mis en place un système d’information mutuelle entre les trésoreries et les tribunaux sur le paiement de l’amende. Cette information existe déjà de facto lorsque le paiement est effectué au BEX, puisque la trésorerie reçoit des documents attestant le paiement. Elle devrait être mise en place en sens inverse des trésoreries vers les juridictions, afin d’éviter l’émission d’extraits-finances pour des amendes déjà payées.

Proposition n° 23

Fluidifier les relations entre les juridictions et les trésoreries :

—  en dématérialisant la transmission des informations entre les trésoreries et les tribunaux avant le 31 décembre 2009 ;

—  en reconnaissant au relevé de condamnation pénale valeur de titre exécutoire pour permettre l’enregistrement immédiat du paiement de l’amende par la trésorerie ;

—  en mettant en place une information mutuelle entre les trésoreries et les tribunaux sur le paiement de l’amende.

b) Achever l’installation des urnes de paiement par chèque et des terminaux de carte bancaire dans tous les BEX

Les mesures proposées ci-dessus afin de faciliter l’encaissement des amendes par les trésoreries et d’améliorer l’échange d’informations entre tribunaux et trésoreries doivent être mises en place pour les cas où le condamné ne peut effectuer le paiement qu’auprès de la trésorerie : soit lorsque le BEX ne dispose pas des équipements nécessaires pour recevoir le paiement ou lorsque le condamné souhaite payer son amende en espèces, soit lorsque le condamné demande le bénéfice de délais de paiement. L’octroi de délais de paiement ne saurait relever que de la seule compétence des agents du Trésor public, puisqu’elle suppose un examen complet de la situation fiscale et sociale de la personne.

Si le maintien du second cas de paiement auprès de la trésorerie est inévitable, la mission souhaite vivement que le premier cas disparaisse dans les meilleurs délais. En effet, la mission estime indispensable que tous les BEX soient en mesure d’accepter tous types de paiements, par carte bancaire, par chèque ou en espèces (27).

La mise en place des terminaux de paiement par carte bancaire et des urnes destinées à recevoir les paiements par chèques suppose la signature d’une convention entre la trésorerie et le tribunal. La mission souhaite que chaque juridiction ait conclu une telle convention prévoyant l’installation de ces deux dispositifs de paiement au plus tard le 31 décembre 2008, afin que chaque justiciable ait accès à la même facilité de paiement de son amende, quelle que soit la juridiction qui l’a condamné.

De plus, certaines juridictions ayant déjà conclu une convention ne sont équipées que d’un seul moyen de paiement. Ainsi, le BEX du TGI de Bobigny dispose d’un terminal de paiement par carte bancaire, mais pas d’une urne de paiement par chèque. Les raisons de sécurité invoquées pour expliquer cette absence d’urne de paiement par chèque ne sauraient justifier cette rupture d’égalité entre les justiciables, l’expérience des autres juridictions montrant que le paiement par chèque n’entraîne pas de risque particulier d’agressions au sein du tribunal. La mission estime donc que ces juridictions devront avoir modifié leur convention pour prévoir l’installation du dispositif manquant dans le même délai que celui imparti aux juridictions n’ayant pas encore conclu de convention.

Proposition n° 24

Achever la signature des conventions entre les trésoreries et les tribunaux pour permettre la généralisation de l’installation des urnes de paiement par chèque et des terminaux de carte bancaire dans tous les BEX, au plus tard le 31 décembre 2008.

c) Permettre le paiement des amendes en espèces

Actuellement, et sous réserve qu’ils disposent des équipements nécessaires, les BEX ne peuvent accepter que les paiements par chèques ou carte bancaire. Les paiements en espèces ne sont possibles qu’auprès des trésoreries. Or, certaines personnes condamnées peuvent ne pas disposer de chèques ou de carte bancaire, soit par manque de moyens, soit en raison d’une interdiction bancaire. Imposer à ces personnes de se rendre à la trésorerie est non seulement susceptible de les dissuader de payer une amende qu’elles étaient disposées à payer dès leur sortie de l’audience, mais surtout est source d’inégalité de traitement entre les personnes disposant d’un compte bancaire et de moyens de paiement et celles n’en disposant pas.

C’est pourquoi la mission estime nécessaire que le paiement des amendes en espèces auprès des BEX soit possible, tout en étant consciente des difficultés juridiques et pratiques que cette recommandation est susceptible de soulever.

Sur un plan juridique, l’obstacle empêchant aujourd’hui le paiement des amendes en espèces réside dans le fait que le BEX, lorsqu’il reçoit le paiement d’amendes en chèques ou carte bancaire, ne perçoit ces sommes qu’en qualité d’intermédiaire entre le condamné et le Trésor public. Les agents du BEX ne disposent pas de la qualité de régisseurs, contrairement aux agents du Trésor public. Dès lors, pour lever cet obstacle, il conviendrait de créer auprès des BEX des régies de recettes, comme l’article R. 946-4 du code l’organisation judiciaire en prévoit la possibilité (28).

Cette charge nouvelle pour les fonctionnaires des BEX exerçant les responsabilités de régisseurs ne doit pas être sous-estimée, mais le double objectif d’amélioration du taux de recouvrement des amendes et d’égalité de traitement des justiciables la justifie pleinement. Naturellement, cette nouvelle responsabilité devrait donner lieu à une indemnité de responsabilité, prévue par l’article R. 946-4 du code l’organisation judiciaire.

Sur un plan pratique, certains agents des BEX ont fait part à votre rapporteur de leurs réticences à recevoir des paiements en espèces, essentiellement pour des raisons de responsabilité et de sécurité. Les réticences liées à la responsabilité devraient être levées par l’institution des régies de recettes et l’attribution d’indemnités de responsabilité. Les réticences liées à la sécurité des locaux devront être levées par une sécurisation des juridictions en général et des locaux des BEX en particulier.

S’agissant de la sécurité de l’accès aux tribunaux, au 5 novembre 2007, 130 portiques sur les 154 prévus sont installés, soit 84 % d’entre eux. À la même date, 230 des 232 équipes de surveillance (soit 99 %) nécessaires à la mise en œuvre des dispositifs de sécurité sont en fonction. Ces mesures devraient permettre d’éviter l’introduction d’armes pouvant servir à des vols dans les BEX. En outre, pour garantir la sécurité des paiements effectués en espèces dans les BEX, des coffres devront être installés dans leurs locaux pour conserver les sommes jusqu’à leur remise à un agent du Trésor.

Proposition n° 25

Permettre le paiement des amendes en espèces auprès des BEX :

—  en créant auprès des BEX des régies de recettes en application de l’article R. 946-4 du code l’organisation judiciaire ;

—  en attribuant aux greffiers des BEX une indemnité de responsabilité en contrepartie de leurs compétences de régisseurs ;

—  en sécurisant les locaux des BEX.

2. Améliorer le recouvrement contentieux des amendes

Si le développement du paiement spontané au cours des dernières années est une évolution très positive, il importe également d’améliorer le recouvrement contentieux. En effet, un recouvrement contentieux efficace constitue non seulement le gage de la crédibilité de la justice pénale mais aussi une incitation au paiement spontané. Afin de renforcer l’efficacité du recouvrement contentieux des amendes pénales, deux mesures apparaissent nécessaires à la mission : d’une part, permettre aux services du Trésor public d’accorder des remises gracieuses sur le paiement des amendes forfaitaires ; d’autre part, étendre le champ d’application de l’opposition au transfert du certificat d’immatriculation.

a) Permettre aux services du Trésor public d’accorder des remises gracieuses sur le paiement des amendes forfaitaires majorées

Dans certaines situations, le paiement d’amendes accumulées par un même justiciable peut se révéler impossible, compte tenu de sa situation personnelle au moment de la commission de l’infraction ou de l’évolution de sa situation postérieurement à la commission de l’infraction. Si les services du Trésor public disposent de la faculté d’accorder des délais de paiement pour le paiement des amendes pénales, que ces amendes soient des amendes forfaitaires majorées ou prononcées par une juridiction, ils ne peuvent pas accorder de remises gracieuses, totales ou partielles, sur le paiement de ces amendes.

Or, les services fiscaux peuvent, en application de l’article L. 247 du livre des procédures fiscales, accorder de telles remises non seulement en matière d’impôts mais aussi en matière d’amendes fiscales. L’impossibilité pour les services fiscaux d’accorder des remises sur le paiement des amendes pénales peut s’expliquer par deux raisons :

—  D’une part, il serait contestable de permettre à une administration de remettre en cause une décision de l’autorité judiciaire ; cependant cet argument ne vaut que pour les amendes prononcées par les juridictions, mais pas pour les amendes forfaitaires majorées, dont il faut rappeler qu’elles représentent plus de 90 % des amendes mises en recouvrement par le Trésor public ;

—  D’autre part, à la différence des impôts, qui ne sanctionnent pas une faute et pour lesquels l’octroi de remises n’équivaut pas à une exonération de responsabilité mais est destiné à prendre en compte la gêne ou l’indigence du contribuable, les amendes pénales sanctionnent un comportement fautif : permettre une exonération totale ou partielle reviendrait à priver d’effet le caractère dissuasif de l’amende pour les personnes qui se savent incapables de payer une amende, voire à encourager l’organisation d’insolvabilité pour échapper au paiement des amendes. Mais cet argument n’est valable que pour les remises sur les impôts, et pas pour les amendes fiscales qui peuvent faire l’objet de remises, alors même qu’elles sanctionnent une faute du contribuable.

À l’heure actuelle, lorsqu’un condamné ne peut payer une ou plusieurs peines d’amende en raison d’une insolvabilité, les services du Trésor public ne peuvent in fine qu’inscrire l’amende en non-valeur, c’est-à-dire renoncer au paiement de l’amende. Au vu des arguments qui justifient l’impossibilité pour les services fiscaux d’accorder des remises sur le paiement des amendes pénales, il n’apparaît pas inconcevable de permettre aux services du Trésor d’accorder des remises sur les amendes forfaitaires majorées. En effet, ces amendes n’ayant pas été décidées par une juridiction, la faculté accordée aux services fiscaux ne contredirait pas une décision judiciaire. Par ailleurs, le fait que l’amende pénale sanctionne une faute n’est pas un argument dirimant, puisque des remises sont possibles sur les amendes fiscales.

En outre, deux arguments complémentaires justifient cette proposition. D’une part, sur le plan du sens de la peine, une décision partiellement exécutée est préférable à une décision non exécutée : la décision de justice est plus crédible si elle oblige le condamné à payer une partie de son amende dans la limite permise par ses capacités, plutôt que si elle ne donne lieu à aucun effort, même modeste, de sa part. D’autre part, de façon pragmatique, il est nettement préférable pour les finances publiques de recouvrer une partie, même minime, d’une amende, plutôt que de renoncer intégralement au paiement après avoir mis en œuvre des moyens coûteux de recouvrement forcé.

Proposition n° 26

Permettre aux services du Trésor public d’accorder des remises gracieuses sur le paiement des amendes forfaitaires majorées.

b) Étendre le champ d’application de l’opposition au transfert du certificat d’immatriculation

Le recouvrement contentieux des amendes suppose des moyens de contrainte forts pour obtenir le paiement des amendes ou, à défaut, en obtenir l’équivalent par le biais d’une saisie-vente mobilière. Parmi ces moyens de contrainte figure l’opposition au transfert du certificat d’immatriculation (OTCI). L’article L. 322-1 du code de la route permet au comptable du Trésor de faire opposition à la préfecture d'immatriculation à tout transfert du certificat d'immatriculation « lorsqu'une amende forfaitaire majorée a été émise et [qu’il] constate que le contrevenant n'habite plus à l'adresse enregistrée au fichier national des immatriculations ».

Cette dernière condition est en fait très restrictive : si une personne solvable refuse de payer une ou plusieurs amendes forfaitaires majorées dont elle est redevable, mais que son adresse est toujours celle enregistrée au fichier national des immatriculations, l’OTCI ne sera pas possible. La personne condamnée pourra vendre son véhicule sans avoir payé ses amendes, faisant perdre au Trésor public une de ses garanties de paiement.

En conséquence, la mission propose de supprimer la condition de l’article L. 322-1 du code de la route relative au domicile du contrevenant, afin de permettre le recours à l’OTCI, y compris lorsque le domicile du débiteur est celui enregistré au fichier national des immatriculations.

Proposition n° 27

Permettre le recours à l’opposition au transfert du certificat d’immatriculation lorsque le domicile du débiteur est celui enregistré au fichier national des immatriculations.

B. AMÉLIORER L’EXÉCUTION DES PEINES DE SUSPENSION OU D’ANNULATION DU PERMIS DE CONDUIRE

Les peines de suspension et d’annulation du permis de conduire figurent parmi les peines les plus fréquemment prononcées par les juridictions. En pratique, ces peines sont souvent précédées par une suspension administrative du permis de conduire décidée par le représentant de l’État dans le département en application de l’article L. 224-2 du code de la route. Or, la durée de cette suspension s’impute sur la durée de la suspension ou du retrait prononcés à titre de sanction par les juridictions. Celles-ci doivent donc connaître la date de début de la mesure de suspension pour pouvoir calculer précisément la date de fin de la peine et en informer la personne condamnée.

Cette information est généralement fournie par les services de police et de gendarmerie par le biais d’un imprimé transmis avec l’ensemble des pièces de procédure au moment de l’engagement des poursuites, mais il advient dans un certain nombre de cas que cet imprimé soit manquant. Les agents des BEX sont alors contraints de demander à la personne condamnée dans quel service de police ou de gendarmerie elle a remis son permis de conduire, et, si la personne n’est pas en mesure de fournir cette information, de la rechercher par eux-mêmes, afin de pouvoir se rapprocher de ce service et d’obtenir la date de début de la mesure de suspension. En dernier recours, les autorités judiciaires peuvent demander aux services du Fichier national des permis de conduire (FNPC) communication « sur leur demande » du « relevé intégral des mentions relatives au permis de conduire, applicables à une même personne », en application de l’article L. 225-4 du code de la route.

Ces recherches s’avèrent à la fois fastidieuses et inutiles, dans la mesure où un accès des BEX au FNPC pourrait leur permettre de disposer facilement et sans délai de l’information dont ils ont besoin. En conséquence, la mission propose de modifier l’article L. 225-4 du code de la route pour prévoir que les autorités judiciaires ne puissent pas simplement obtenir communication des informations du FNPC sur demande, mais qu’elles disposent d’un accès informatique en consultation à ce fichier.

Proposition n° 28

Donner accès au Fichier national des permis de conduire au BEX.

C. PERMETTRE LE PAIEMENT DU DROIT FIXE DE PROCÉDURE AU BEX

En application de l’article 1018 A du code général des impôts, « les décisions des juridictions répressives, à l'exception de celles qui ne statuent que sur les intérêts civils, sont soumises à un droit fixe de procédure dû par chaque condamné ». Ce droit, dont le montant varie en fonction de la juridiction qui a prononcé la décision (29), « est recouvré sur chaque condamné comme en matière d'amendes et de condamnations pécuniaires par les comptables du Trésor ».

En pratique, ce texte aboutit à une situation pour le moins absurde pour les finances publiques et injuste pour le justiciable. Une personne condamnée à une amende se présentant au BEX pour s’acquitter du montant de celle-ci, paiera en même temps que celle-ci le montant du droit fixe de procédure, sur lequel s’applique l’abattement de 20 % prévu par l’article 707-2 du code de procédure pénale. En revanche, la personne qui n’a pas été condamnée à une peine d’amende, mais qui est malgré tout redevable d’un droit fixe de procédure d’un montant de 22 ou 90 euros selon la nature de la décision de condamnation, ne pourra pas l’acquitter au BEX ni d’ailleurs bénéficier de l’abattement de 20 % en cas de paiement volontaire. Cette personne sera simplement informée par l’agent du BEX qu’elle recevra « prochainement » un avis de paiement du droit fixe de procédure.

La mission d’information a ainsi pu constater lors de sa visite au TGI de Bobigny, non sans un certain étonnement, que les agents du BEX étaient contraints de refuser les paiements du droit fixe de procédure par plusieurs justiciables condamnés à une peine autre qu’une peine d’amende. Comme dans le système de recouvrement qui existait pour les amendes avant la mise en place des BEX, cette rupture entre la condamnation et le recouvrement du droit fixe ne peut qu’aboutir à un amoindrissement du taux de recouvrement au fur et à mesure que l’impact de la condamnation s’éloigne. En outre, la rupture d’égalité entre les condamnés qui pourront bénéficier de la réduction de 20 % sur le montant du droit fixe de procédure et ceux qui seront exclus de ce bénéfice est caractérisée et choquante.

En conséquence, la mission propose, d’une part, une modification de l’article 1018 A du code général des impôts pour permettre le paiement du droit fixe de procédure auprès du BEX, qu’une peine d’amende ait été prononcée ou non, et, d’autre part, une modification de l’article 707-2 du code de procédure pénale pour prévoir que la réduction de 20 % s’applique non seulement à l’amende mais aussi au droit fixe de procédure en cas de paiement volontaire dans un délai d’un mois à compter du prononcé du jugement.

Proposition n° 29

—  Permettre le paiement dans tous les cas du droit fixe de procédure au BEX, même lorsque le redevable n’a pas été condamné à une amende ;

—  Prévoir le bénéfice de la réduction de 20 % sur le montant du droit fixe de procédure en cas de paiement volontaire dans un délai d’un mois à compter du prononcé du jugement.

III. AMÉLIORER LES CONDITIONS D’EXÉCUTION DES PEINES PRIVATIVES DE LIBERTÉ

Les peines privatives de liberté, lorsqu’elles sont exécutées dans les établissements pénitentiaires, doivent être exécutées dans des conditions telles qu’elles favorisent effectivement la réinsertion des personnes condamnées. À cette fin, il importe que trois chantiers importants soient poursuivis : la mise en place de quartiers courtes peines, qui devront être évalués avant de décider de leur éventuelle extension ; l’encouragement de l’accès à l’enseignement et à la formation professionnelle en détention ; le développement du travail en détention.

A. METTRE EN PLACE ET ÉVALUER LES QUARTIERS COURTES PEINES

La loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice a prévu un programme de construction de 2 000 places en quartiers courtes peines. Le programme consiste à créer des quartiers qui, tout en faisant partie intégrante des maisons d’arrêt, sont spécifiquement dédiés aux courtes peines. Ce nouveau dispositif concerne exclusivement les condamnés à des peines inférieures ou égales à un an, ce qui exclut les condamnés à de plus longues peines dont le reliquat serait inférieur ou égal à un an.

Les quartiers spécifiques courtes peines seront situés sur les emprises pénitentiaires des maisons d’arrêt, à proximité immédiate des autres quartiers de l’établissement ce qui permettra une mutualisation de certaines fonctions administratives, financières et du greffe.

Les trois premiers sites choisis sont les maisons d’arrêt de Fleury-Mérogis, où un quartier spécifique courtes peines de 120 places doit être réalisé en 2008, de Toulouse-Seysses, où 60 places sont prévues en 2008, et de Nantes, au sein du nouveau centre pénitentiaire prévu pour 2010, où 120 places sont également prévues. L’Administration pénitentiaire s’est par ailleurs engagée dans une démarche prospective, commandant des enquêtes et des études de faisabilité pour les autres constructions à venir.

Compte tenu de la spécificité des courtes peines d’emprisonnement et de la nécessité d’engager dès leur commencement une réflexion sur le projet de réinsertion du détenu en vue d’un aménagement de peine, la mission estime que ces quartiers courtes peines peuvent jouer un rôle tout à fait positif dans l’amélioration des conditions d’exécution des courtes peines d’emprisonnement. Il souhaite en conséquence que ces quartiers puissent être évalués après une année de fonctionnement, afin que puisse être tranchée la question de leur extension dans de nouvelles maisons d’arrêt.

B. FAVORISER L’ACCÈS À L’ENSEIGNEMENT ET À LA FORMATION PROFESSIONNELLE EN DÉTENTION

L’enseignement scolaire et la formation professionnelle sont des aspects essentiels de la réinsertion vers laquelle l’exécution des peines privatives de liberté doit tendre.

Les responsables de l’enseignement rencontrés dans les différents établissements pénitentiaires visités par la mission d’information ont tous insisté sur le faible bagage scolaire de la majorité des personnes détenues et sur la forte proportion d’illettrisme dans la population carcérale. De même, la formation professionnelle mise en place au sein des établissements vise à permettre l’accès à des formations qualifiantes et diplômantes, qui pourront contribuer directement à l’insertion socio-professionnelle du détenu à sa sortie de prison.

La loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a reconnu l’importance de l’enseignement et de la formation professionnelle dans le cadre d’une démarche de réinsertion, en prévoyant dans l’article 721-1 du code de procédure pénale la possibilité d’accorder une réduction de peine supplémentaire aux « condamnés qui manifestent des efforts sérieux de réadaptation sociale, notamment en passant avec succès un examen scolaire, universitaire ou professionnel traduisant l'acquisition de connaissances nouvelles, en justifiant de progrès réels dans le cadre d'un enseignement ou d'une formation ».

Pour ces raisons, l’accès à l’enseignement et à la formation professionnelle en détention doit être efficacement encouragé. Trois difficultés ont été signalées à la mission dans la mise en œuvre des actions d’enseignement et de formation professionnelle : des difficultés de recrutement des enseignants, des difficultés de répartition des compétences en matière de formation professionnelle à destination des personnes détenues, des difficultés d’accès à l’enseignement et à la formation pour les détenus occupant un emploi.

1. Encourager le recrutement des enseignants en milieu pénitentiaire

Les enseignements dispensés dans les établissements pénitentiaires sont assurés par des enseignants de l’Éducation nationale. Les responsables de l’enseignement des établissements visités par la mission ont signalé des difficultés de recrutement des enseignants en milieu pénitentiaire. Ces difficultés peuvent s’expliquer par deux facteurs : des problèmes liés à la qualification exigée des enseignants, des questions liées à la rémunération et un certain manque de reconnaissance des enseignants exerçant en milieu pénitentiaire.

La circulaire n° 2002-091 du 29 mars 2002 relative aux orientations de l'enseignement en milieu pénitentiaire prévoit que « les formations sont assurées en priorité dans les établissements par des instituteurs ou professeurs des écoles, des professeurs de l'enseignement secondaire qui doivent être formés aux méthodes d'évaluation, savoir individualiser les parcours et mettre en place des dispositifs pédagogiques pertinents sur une courte durée dans tous les domaines fondamentaux ». Si ce texte requiert des aptitudes particulières de la part des enseignants intervenant en milieu carcéral, il n’exige pas de diplôme particulier. Pourtant, en pratique, il semble que l’Éducation nationale ait tendance à exiger des enseignants candidats pour exercer en milieu pénitentiaire qu’ils soient titulaires d’un diplôme d’éducation spécialisée, dont l’obtention peut être longue et difficile sans qu’elle soit une garantie certaine d’aptitude à travailler en milieu fermé. Dès lors, il conviendrait, tout en maintenant une exigence de qualité élevée dans le recrutement des personnels, que l’éducation nationale ne fasse pas de la possession de ce diplôme une condition nécessaire pour exercer en milieu pénitentiaire.

Ensuite, les enseignants exerçant dans les établissements pénitentiaires bénéficient, en application d’un décret du 18 août 1971 (30), d’une indemnité d’enseignement en milieu pénitentiaire, dont le montant a été fixé par un arrêté du 9 septembre 2000 à 2 526 euros par an. Compte tenu de la spécificité et de la difficulté des fonctions exercées en milieu pénitentiaire, ainsi que de la nécessité d’attirer de nouveaux candidats de qualité vers cet enseignement, une revalorisation de cette indemnité devrait être envisagée.

Enfin, comme les personnels pénitentiaires, les enseignants exerçant en milieu pénitentiaire souffrent parfois d’un certain manque de reconnaissance de l’importance et de la qualité du travail qu’ils accomplissent dans des conditions difficiles. Il serait souhaitable que l’Éducation nationale et l’Administration pénitentiaire agissent de concert pour mieux faire connaître, non seulement parmi les enseignants mais aussi dans l’opinion publique, l’activité d’enseignement exercée dans les établissements pénitentiaires. Une telle action de communication aurait le double intérêt de valoriser les tâches des enseignants exerçant en milieu pénitentiaire et de susciter de nouvelles candidatures nécessaires à la poursuite du développement de l’enseignement en détention.

En dernier lieu, la mission souhaite attirer l’attention sur les difficultés causées par l’interruption des enseignements pendant les mois d’été, en raison des congés scolaires. Cette interruption des enseignements apparaît particulièrement problématique pour les condamnés à des courtes peines incarcérés pendant ces périodes, qui se trouvent privés non seulement de la possibilité de bénéficier d’un enseignement mais également d’une activité qui joue une importance considérable dans la vie en détention. En conséquence, la mission souhaite que soit engagée une réflexion entre les ministères de la Justice et de l’Éducation nationale pour résoudre cette difficulté.

Proposition n° 30

Encourager le recrutement des enseignants en milieu pénitentiaire :

—  en facilitant leur recrutement ;

—  en revalorisant l’indemnité d’enseignement en milieu pénitentiaire ;

—  en faisant connaître l’activité d’enseignement en milieu pénitentiaire.

2. Coordonner l’action des autorités compétentes en matière de formation professionnelle

Les acteurs intervenant dans le domaine de la formation professionnelle dans les établissements pénitentiaires sont multiples : l’État via les directions régionales de l’emploi, du travail et de la formation professionnelle (DRETFP), les régions, l’Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) ainsi que les partenaires privés dans les établissements à gestion mixte.

L’intervention des partenaires privés au sein des établissements à gestion mixte dans le domaine de la formation professionnelle peut être considérée comme un atout pour le développement de la formation en détention. Ainsi, au centre pénitentiaire de Meaux-Chauconin, la formation de chauffagiste mise en œuvre par le partenaire privé de l’établissement, dans un domaine relevant de la compétence du groupe auquel il appartient, est un exemple de la richesse que peuvent apporter les partenariats public-privé en termes de développement de l’offre de formation aux détenus.

En revanche, l’existence d’une pluralité d’acteurs compétents et le manque de coordination entre eux peuvent parfois être à l’origine de difficultés très préjudiciables à la mise en œuvre du droit à la formation professionnelle. Par exemple, la DRETFP de la région Rhône-Alpes a pris l’initiative de retirer les crédits alloués à l’AFPA pour ses interventions en détention, arguant du fait que la formation professionnelle des personnes détenues relevait prioritairement de la région, sans concertation préalable ni avec la région ni avec l’Administration pénitentiaire. Des actions de formation engagées à la maison d’arrêt de Lyon ont dû être interrompues suite au retrait de l’AFPA. Une meilleure coordination entre ces différents acteurs s’impose, afin d’assurer un développement optimal de la formation professionnelle en détention.

3. Faciliter l’accès à l’enseignement et à la formation professionnelle pour les détenus occupant un emploi

Si les formations peuvent être rémunérées, les crédits issus du programme « insertion, réinsertion, lutte contre l’illettrisme » se révèlent parfois insuffisants pour rémunérer l’ensemble des détenus en formation, comme ce fut le cas au cours de l’année 2006. Les détenus, qui ont besoin d’argent pour pouvoir « cantiner », indemniser les parties civiles ou envoyer de l’argent à leur famille, s’orientent en conséquence davantage vers l’exercice d’une activité de travail, au détriment de l’enseignement et de la formation professionnelle qui pourraient pourtant favoriser davantage leur réinsertion.

Si certains établissements, comme le centre pénitentiaire de Meaux-Chauconin, ont mis en place des « cours du soir » pour permettre aux détenus occupant un emploi de suivre des enseignements après leurs heures de travail, cette pratique n’est pas encore très répandue. La mission estime souhaitable que cette initiative puisse être étendue le plus largement possible.

Proposition n° 31

Faciliter l’accès à l’enseignement et à la formation pour les détenus occupant un emploi par l’organisation de cours du soir.

C. DÉVELOPPER LE TRAVAIL EN DÉTENTION

Au même titre que la formation professionnelle, le travail constitue un aspect essentiel de la vie en détention. En effet, ces activités, outre la rémunération qu’elles procurent, contribuent à maintenir un lien entre la société civile et les détenus, et concourent à maintenir leur équilibre personnel en détention.

Le travail en détention peut être effectué pour le compte de l’Administration pénitentiaire dans le cadre du service général ou du service de l’emploi pénitentiaire, ou pour le compte d’entreprises privées concessionnaires de l’Administration pénitentiaire ou titulaires des marchés de fonctionnement des établissements à gestion mixte, qui gèrent des ateliers de production. Ces entreprises font réaliser différents types de travaux à la population pénale, notamment des travaux techniques (montages, assemblages), du conditionnement ou du façonnage, pouvant être effectués par une main-d’œuvre à faible niveau de qualification.

En 2006, le travail en concession a occupé environ 16 % de la population pénale (40,9 % de l’effectif des détenus actifs rémunérés). Il emploie environ 8 891 détenus (en moyenne annuelle), pour un salaire mensuel moyen de 347 euros. Les orientations de l’Administration pénitentiaire pour développer le travail en détention s’articulent autour de deux axes :

—  améliorer les perspectives du travail pénitentiaire. À ce titre, un travail de fond s’inscrivant dans une approche globale est en cours, les principaux objectifs étant, notamment, de développer le principe du travail en continu, d’organiser un contrôle fiable du temps de travail, d’instaurer davantage de flexibilité pour faire face aux pics d’activité et améliorer le fonctionnement des ateliers, d’identifier les zones de travail susceptibles de faire l’objet d’une extension et de permettre un accès facilité des véhicules, afin de réduire les délais d’attente à l’entrée des établissements ;

—  augmenter le nombre et la qualité des emplois offerts. Afin de créer 2 000 postes de travail en production d’ici fin 2009, un objectif triennal a été fixé, avec des cibles annuelles pour chacune des directions interrégionales des services pénitentiaires.

Les échanges de votre rapporteur avec les personnels des établissements visités, les responsables des ateliers de production et les SPIP ont fait ressortir qu’un troisième axe de développement du travail pénitentiaire pourrait utilement être développé, en permettant l’ouverture d’ateliers par des entreprises d’insertion, destinés prioritairement aux détenus les plus éloignés de l’emploi. En effet, la nécessité d’attirer et de fidéliser les entreprises concessionnaires conduit les commissions de classement des détenus à privilégier pour les affectations dans les ateliers les détenus les plus aptes à assurer le minimum de productivité exigé par les entreprises.

Or, un grand nombre de détenus se trouvent dans une situation d’éloignement du marché de l’emploi incompatible avec le travail en atelier pour des entreprises concessionnaires. Une solution pourrait résider dans l’ouverture d’ateliers en détention par des entreprises d’insertion, définies par l’article L. 322-4-16 du code du travail comme des entreprises ayant « spécifiquement pour objet l’insertion par l’activité économique », qui elle-même a « pour objet de permettre à des personnes sans emploi, rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières, de bénéficier de contrats de travail en vue de faciliter leur insertion sociale et professionnelle ».

La mission propose donc de rendre possible l’ouverture d’ateliers dans les établissements pénitentiaires par des entreprises d’insertion : cet élargissement des entreprises susceptibles de fournir du travail pourrait permettre de développer davantage le travail en détention, tout en donnant accès au travail à des détenus fragilisés avec un encadrement adapté à leur situation.

Proposition n° 32

Permettre l’ouverture d’ateliers par des entreprises d’insertion pour les détenus les plus éloignés de l’emploi.

CHAPITRE 5 : FAVORISER LE DÉVELOPPEMENT DES AMÉNAGEMENTS DE PEINE ET DES PEINES ALTERNATIVES À L’EMPRISONNEMENT

Lors de son discours prononcé à Rouen le 25 juillet 2007 à l’occasion de la première conférence régionale sur le développement des aménagements de peine et des alternatives à l'incarcération, la ministre de la justice Mme Rachida Dati a affirmé qu’elle souhaitait « donner une véritable impulsion à la politique d'aménagement des peines. (…) Les sorties de prison qui ne sont pas accompagnées favorisent la récidive. Encourager les aménagements de peine, c'est favoriser la réinsertion ».

La loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a posé le principe, dans l’article 707 du code procédure pénale, selon lequel « les peines peuvent être aménagées en cours d’exécution pour tenir compte de l’évolution de la personnalité et de la situation du condamné. L’individualisation des peines doit, chaque fois que cela est possible, permettre le retour progressif du condamné à la liberté et éviter une remise en liberté sans aucune forme de suivi judiciaire ». L’encouragement de l’aménagement des peines privatives de liberté a été très clairement défini par le législateur comme une priorité.

Cette même loi du 9 mars 2004 a mis en application ce principe par diverses mesures destinées à favoriser le développement des aménagements de peine, considérés comme un moyen efficace de prévention de la récidive. Ainsi, l’article 723-15 du code de procédure pénale affirme-t-il le principe selon lequel les personnes non incarcérées condamnées à une peine d’emprisonnement ferme de moins d’un an doivent être convoquées devant le JAP en vue de la mise en place d’un aménagement de peine, sauf en cas de refus du condamné ou en cas d’urgence de procéder à l’incarcération. En application de l’article 132-57 du code pénal, le juge de l’application des peines peut également convertir une peine d’emprisonnement ferme de six mois au plus en sursis assorti de l’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général ou en jours-amende.

L’article 723-20 a posé ce même principe de l’aménagement de peine pour les détenus arrivant en fin de peine, en créant une nouvelle procédure originale, dite « Nouvelle procédure d’aménagement de peine » (NPAP). Les articles 723-2 et 723-7 du code de procédure pénale permettent également au JAP de substituer entre eux certains aménagements de peine décidés par la juridiction de jugement, afin d’adapter au mieux la mesure d’aménagement à l’évolution de la personnalité du condamné.

Mais, en dépit de l’affirmation du principe révolutionnaire selon lequel les peines ont vocation à être aménagées et de la volonté de développer les peines alternatives à l’emprisonnement, les aménagements de peine, à l’exception du placement sous surveillance électronique, ont tendance à stagner voire à régresser, et les alternatives à l’emprisonnement connaissent des difficultés d’exécution certaines.

Le prononcé des peines de travail d’intérêt général (TIG), qui sont les mieux connues des peines dites « alternatives » à l’emprisonnement, a, quant à lui, augmenté globalement de 25 % entre 2003 et 2005. Après plusieurs années consécutives de baisse, le nombre de TIG prononcés en tant que peine principale est en effet passé au cours de cette période de 9 059 à 12 830, tandis que le nombre de sursis-TIG passait de 8 822 à 9 545. Mais malgré cette augmentation, les JAP et les SPIP font état de difficultés croissantes à trouver des places de TIG disponibles et de réticences fréquentes des collectivités à accueillir effectivement des personnes condamnées à un TIG.

Deux circulaires en date des 27 avril 2006 et 27 juin 2007 (31) ont cherché à encourager les aménagements de peines, mais les progrès restent pour l’heure encore timides. Ces difficultés persistantes à développer les aménagements de peine et les peines alternatives peuvent s’expliquer notamment par une certaine méconnaissance de l’opinion sur leur utilité et leur efficacité. Les aménagements et les peines alternatives continuent à être trop souvent perçus comme des mesures de faveur accordées aux auteurs d’infractions, alors qu’ils constituent des mesures véritablement contraignantes pour les condamnés et protectrices pour la société en raison du contrôle exercé sur ces condamnés pendant toute la durée de l’aménagement (32). « L’individualisation et l’aménagement d’une peine privative de liberté ne doivent plus être perçus comme une édulcoration de la sanction pénale et un contournement de la décision rendue par la juridiction répressive. Ils doivent être, au contraire, considérés comme une volonté de l’institution judiciaire et de l’administration pénitentiaire de lutter, d’une part, contre les effets nocifs des peines d’emprisonnement les plus courtes, mises à exécution sans considération de la situation familiale et sociale du condamné et, d’autre part, d’inscrire les peines de plus longue durée dans un parcours de réinsertion permettant une réelle préparation à la sortie » (33).

Mais il existe aussi un certain nombre de blocages pratiques ou juridiques et de lourdeurs procédurales qui empêchent un plus large développement de ces aménagements de peine. C’est pour réduire ces blocages et lourdeurs que la mission propose plusieurs mesures – dont certaines sont également proposées par le Comité d’orientation restreint de la loi pénitentiaire, présidé par M. le procureur général Jean-Olivier Viout, dans son rapport remis le 19 novembre 2007 à Mme la garde des sceaux – tendant à accélérer la mise en œuvre des aménagements de peine et des peines alternatives à l’emprisonnement, à poursuivre l’évolution engagée dans la répartition des rôles des JAP et des SPIP, à encourager les mesures d’aménagements de peines et à faciliter l’exécution de la peine de travail d’intérêt général.

A. ACCÉLÉRER LA MISE EN œUVRE DES AMÉNAGEMENTS DE PEINE ET DES PEINES ALTERNATIVES À L’EMPRISONNEMENT

Selon que la personne est incarcérée ou non, la problématique des aménagements de peine et des peines alternatives à l’emprisonnement ne se pose pas dans les mêmes termes. Si la personne est incarcérée, il importe que la préparation d’un aménagement commence au plus près de l’incarcération, a fortiori si la peine à exécuter est courte. Si la personne n’est pas incarcérée, l’efficacité et la crédibilité de la sanction supposent que celle-ci soit mise en œuvre dans les délais les plus courts possibles.

1. Accélérer la préparation des aménagements de peine pour les personnes incarcérées

Lorsqu’une personne est incarcérée, sa peine a vocation, sauf exception, à être aménagée dans un délai qui varie en fonction du type d’aménagement et de sa situation pénale :

—  Les permissions de sortir peuvent être accordées, selon leur motif, le lieu d’incarcération, la durée de la peine prononcée et l’existence éventuelle d’un état de récidive, et sous réserve de l’existence d’une période de sûreté, soit dès le début de la peine, soit lorsque le condamné a accompli le tiers, la moitié ou les deux tiers de sa peine ;

—  Le placement à l’extérieur peut être décidé dès le début de la peine, sous réserve de l’existence d’une période de sûreté ;

—  La semi-liberté et le placement sous surveillance électronique peuvent être décidés pour les condamnés à une peine d’emprisonnement ferme d’une durée inférieure ou égale à un an, pour ceux dont la durée de peine restant à subir est inférieure ou égale à un an et pour ceux qui ont été admis au bénéfice de la libération conditionnelle sous condition d’être soumis à titre probatoire au régime de la SL ou du PSE ;

—  Enfin, la libération conditionnelle (LC) peut être accordée lorsque le condamné a accompli la moitié de sa peine, ou, s’il avait été condamné en état de récidive, les deux tiers de sa peine.

Ces délais devant être calculés en prenant en compte le crédit de réductions de peine et les réductions de peine supplémentaires, il va de soi que plus la peine est courte, plus les délais à partir desquels le condamné devient éligible aux différents aménagements de peine interviennent rapidement. Or la préparation d’un aménagement de peine, qui implique dans une majorité de situations des démarches longues et complexes – recherche d’hébergement, d’emploi, de formation, mise en œuvre de soins… – demande nécessairement du temps. Envisager le plus tôt possible les aménagements de peine est donc une nécessité pour ne pas perdre de temps dans leur préparation, mais également pour que le détenu puisse, au plus près de son entrée en détention, « s’approprier » sa peine et engager une dynamique qui lui permettra de préparer sa sortie.

Afin de garantir qu’aucune perte de temps n’empêchera la mise en place d’un possible aménagement en cours d’exécution de la peine d’emprisonnement, le JAP devrait pouvoir disposer au plus tôt d’éléments d’information sur la personne incarcérée. Ce recueil d’informations précoce permettrait au JAP et au SPIP d’avoir un aperçu de la situation familiale, sociale, sanitaire et professionnelle de la personne sans délai, et de pouvoir immédiatement l’orienter vers les dispositifs qui rendront l’aménagement de peine possible.

Ce diagnostic précoce devra apporter les réponses indispensables sur les atouts et les défauts de la situation de la personne dans l’optique d’un aménagement. Le condamné a-t-il un logement ? Si non, une orientation rapide vers une association d’aide à la recherche de logement pourra permettre de lever cette difficulté. Le condamné a-t-il des problèmes d’addiction ? Une prise en charge sanitaire immédiate devra être mise en place sans tarder. Le condamné est-il sans formation professionnelle ? Si oui, une orientation vers une formation apte à lui procurer un emploi devra lui être proposée sans délai.

Dès lors, la mission propose que soit réalisé par le SPIP, dans les 10 jours suivant l’incarcération, un rapport transmis au JAP sur la situation de la personne incarcérée. Ce rapport, dont la forme serait standardisée afin que sa rédaction ne constitue pas une charge inutilement lourde pour le SPIP, devra décrire sommairement la situation de la personne incarcérée en ce qui concerne les principaux critères d’accès aux aménagements de peine : logement, emploi, formation professionnelle, participation à la vie familiale, situation sanitaire.

En outre, depuis une circulaire du 21 juillet 2000 (34), les établissements pour peine doivent mettre en œuvre les « projets d’exécution des peines » (PEP), dont l’objectif est triple :

« 1° Donner plus de sens à la peine privative de liberté en impliquant davantage le condamné dans l’évolution de celle-ci pendant toute la durée de son incarcération ;

« 2° Définir des modalités de prise en charge et d’observation permettant une meilleure connaissance du détenu ; améliorer dès lors l’efficacité des actions visant à sa réinsertion et accroître la sécurité des établissements ;

« 3° Améliorer l'individualisation judiciaire et administrative de la peine en proposant au juge ou à l'autorité administrative compétente des éléments objectifs d'appréciation du comportement de chaque détenu sur lesquels ils peuvent asseoir leur décision. »

Dans certains établissements pour peines, les PEP ne sont pas utilisés, même si des dispositifs similaires et poursuivant le même objectif sont généralement mis en place. C’est par exemple le cas au centre pénitentiaire de Meaux-Chauconin, qui met en place un « régime différencié » consistant à adapter le régime de détention aux efforts fournis par chaque détenu et au respect de ses engagements.

Pour l’heure, l’objectif des PEP n’est pas à titre principal la préparation de la sortie : ils ont avant tout pour vocation d’être un moyen de suivi et d’évaluation des détenus et de gestion de la vie en détention, même si l’individualisation de la peine en est un élément. La mission considère toutefois qu’ils peuvent devenir un instrument parfaitement adéquat pour commencer au plus tôt la préparation des aménagements de peine. La mission préconise en conséquence que la mise en œuvre des PEP soit poursuivie, avec toutefois une accentuation de leur orientation vers la préparation de la sortie.

Enfin, les courtes peines étant celles pour lesquelles les pertes de temps dans la préparation de la sortie sont les plus préjudiciables, il importe que les PEP soient utilisés non seulement dans les établissements pour peine mais aussi dans les maisons d’arrêt, dans lesquelles sont exécutées les courtes peines. Cette mise en œuvre des PEP trouvera d’ailleurs sa place dans les quartiers courtes peines en cours de création, dont l’une des finalités est de permettre la mise en place d’un accompagnement plus important pour les détenus qui y seront affectés, et où les PEP devront être expérimentés.

Proposition n° 33

Accélérer la préparation des aménagements de peine pour les personnes incarcérées :

—  en faisant réaliser par le SPIP dans les 10 jours suivant l’incarcération un rapport transmis au JAP sur la situation de la personne incarcérée ;

—  en faisant davantage du projet d’exécution des peines l’instrument de la préparation des aménagements de peine au plus près de l’incarcération ;

—  en expérimentant les projets d’exécution des peines dans les quartiers condamnés des maisons d’arrêt, et prioritairement dans les quartiers courtes peines.

2. Accélérer la mise en œuvre des aménagements de peine et des peines alternatives à l’emprisonnement pour les personnes non incarcérées

L’article 474 du code de procédure pénale prévoit qu’« en cas de condamnation d'une personne non incarcérée à une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à un an ou pour laquelle la durée de détention restant à subir est inférieure ou égale à un an, il est remis au condamné qui est présent à l'issue de l'audience un avis de convocation à comparaître, dans un délai qui ne saurait être inférieur à dix jours ni excéder trente jours, devant le juge de l'application des peines en vue de déterminer les modalités d'exécution de la peine », et qu’en cas de condamnation à une peine d'emprisonnement assortie du sursis avec mise à l'épreuve, à une peine d'emprisonnement avec sursis assortie de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général ou à une peine de travail d'intérêt général, une convocation à comparaître devant le SPIP dans le même délai de dix à trente jours est remise au condamné.

Cet article vise à permettre dans un délai très bref la mise en place d’aménagements des peines d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à un an et le commencement de la prise en charge par le SPIP des personnes condamnées à des peines alternatives à l’emprisonnement. Pourtant, son application est encore, dans un trop grand nombre de cas, mise en échec par le fait que le jugement n’est, au jour de la convocation devant le JAP ou le SPIP, pas disponible dans le dossier qui leur a été transmis.

Or, la majorité des JAP et des responsables de SPIP entendus par la mission estime ne pas pouvoir décider d’un aménagement ou commencer une prise en charge sans disposer du jugement. La personne condamnée se présente alors à une audience ou à un entretien qui prend une tournure très formelle, pour être convoquée à nouveau dans un délai variable à l’expiration duquel le JAP ou le SPIP estiment qu’ils disposeront de la décision. Ce report retarde d’autant la possibilité d’aménagement ou le début du suivi de la peine alternative, créant une rupture dans l’exécution de la décision contraire au principe de la mise à exécution effective et dans les meilleurs délais posé par l’article 707 du code de procédure pénale.

La première solution à cette difficulté réside évidemment dans l’enregistrement des décisions en temps réel, préconisée précédemment (35). Mais dans l’attente de la mise en œuvre effective de cette préconisation, qui ne sera rendue possible que par l’entrée en service de Cassiopée, ainsi que pour toutes les situations – qui devront devenir exceptionnelles – où le jugement n’aura pu être dactylographié au jour de la convocation devant le JAP ou le SPIP, il importe que la mise en place d’un aménagement ou le début de la prise en charge ne soient pas différés.

Pourtant, le dossier de la personne condamnée contient toujours, à défaut de jugement, les notes d’audience et le relevé de condamnation pénale, qui doivent en principe contenir les informations nécessaires au JAP ou au SPIP pour accomplir leur mission, à savoir la qualification des faits pour lesquels la personne a été condamnée, une synthèse des déclarations faites à l’audience et la ou les peines qui ont été prononcées. La mission estime ces éléments suffisants pour permettre que la première audience devant le JAP ou le premier entretien avec le SPIP soient un « temps utile » dans la mise à exécution de la sanction et non un temps perdu.

Toutefois, la mission estime nécessaire que soit précisé dans le code de procédure pénale que, après expiration du délai d’appel, le RCP possède force exécutoire pour la mise en place d’un aménagement de peine ou le commencement de l’exécution des peines d'emprisonnement assortie du sursis avec mise à l'épreuve, d'emprisonnement avec sursis assortie de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général ou de travail d'intérêt général.

En outre, cette disposition devra également préciser que le RCP doit être authentifié par le greffier d’audience, afin de garantir sa conformité avec la décision prise par la juridiction.

Enfin, une réflexion devra être engagée par la Chancellerie sur le contenu du RCP, afin, le cas échéant, de le compléter pour permettre qu’il se substitue sans difficulté au jugement pour les JAP et les SPIP.

Proposition n° 34

Donner force exécutoire au relevé de condamnation pénale pour permettre la mise en place immédiate d’un aménagement de peine par le JAP ou la mise à exécution immédiate d’une peine alternative à l’emprisonnement, même en l’absence de jugement dactylographié.

B. POURSUIVRE L’ÉVOLUTION ENGAGÉE DANS LA RÉPARTITION DES RÔLES DES JAP ET DES SPIP

Les rôles respectifs des SPIP et des JAP ont considérablement évolué au cours des dernières années. Les SPIP sont nés en 1999 de la fusion entre les services socio-éducatifs des établissements pénitentiaires et les comités de probation et d’assistance aux libérés (CPAL) implantés dans les tribunaux. Les services socio-éducatifs, auparavant placés sous la responsabilité du chef d’établissement pénitentiaire, et les CPAL, soumis à l’autorité des juges de l’application des peines, devaient être dégagés de ces deux tutelles pour être placés sous la responsabilité d’un seul directeur de SPIP, issu de l’Administration pénitentiaire.

Quant aux JAP, leur compétence et la nature de leur activité ont profondément évolué depuis la mise en place par les lois du 15 juin 2000 et du 9 mars 2004 de la juridictionnalisation de l’application des peines. Aux termes de l’article D. 49-27 du code de procédure pénale, « le juge de l'application des peines fixe les principales modalités d'exécution des peines privatives de liberté ou de certaines peines restrictives de libertés en orientant et en contrôlant les conditions de leur exécution, conformément aux principes fixés par l'article 707. Il est à cette fin assisté par la commission de l'application des peines, ainsi que par le service pénitentiaire d'insertion et de probation, que le magistrat mandate pour suivre les condamnés faisant l'objet d'une peine restrictive de liberté ».

Les travaux de la mission d’information ont fait apparaître qu’il serait nécessaire, afin de favoriser le développement des aménagements de peine, d’une part, d’améliorer l’efficacité de l’action des SPIP, d’autre part, de renforcer le rôle de contrôle du JAP.

1. Améliorer l’efficacité de l’action des SPIP

Avant de formuler des propositions en vue d’améliorer l’efficacité de l’intervention des SPIP, il importe en premier lieu de clarifier les conditions d’intervention des SPIP dans le cadre de l’article 474 du code de procédure pénale. Ce point réglé, un accroissement du rôle de décision des SPIP en matière d’aménagement de peine sera proposé, dans la droite ligne de l’évolution engagée dans ce domaine. Cette poursuite de l’évolution engagée dans la répartition des rôles respectifs des JAP et des SPIP ne pourra toutefois permettre un gain d’efficacité que s’il est assorti d’une redéfinition des modes d’intervention des SPIP et d’un renforcement de leurs moyens.

a) Clarifier les conditions d’intervention des SPIP

Aux termes du troisième alinéa de l’article 474 du code de procédure pénale, la personne condamnée à une peine d'emprisonnement assortie du sursis avec mise à l'épreuve, à une peine d'emprisonnement avec sursis assortie de l'obligation d'accomplir un travail d'intérêt général ou bien à une peine de travail d'intérêt général et qui est présente à l'issue de l'audience se voit remettre un avis de convocation à comparaître devant le SPIP, dans un délai qui ne saurait être inférieur à dix jours ni excéder trente jours.

L’application de cette disposition a donné lieu, à ses débuts, à deux interprétations divergentes de la part des JAP. En effet, certains JAP ont estimé que les SPIP n’étaient pas effectivement saisis par cette convocation et qu’ils ne pouvaient commencer la mise à exécution de la peine prononcée avant d’avoir reçu l’ordonnance de saisine du magistrat. En revanche, d’autres JAP ont considéré que les SPIP étaient valablement saisis de l’exécution de la mesure par la convocation remise à la personne condamnée en application de l’article 474, alinéa 3 du code de procédure pénale.

C’est bien cette dernière interprétation, conforme à l’intention du législateur, qui doit être retenue. Elle a été confirmée par le « Guide des bonnes pratiques entre le bureau de l’exécution des peines, le service de l’application des peines et le service pénitentiaire d’insertion et de probation », réalisé en concertation entre les services de la direction des affaires criminelles et des grâces, de la direction des services judiciaires et de la direction de l’Administration pénitentiaire, qui a été diffusé auprès des services intéressés en août 2007. « L’article 474 du code de procédure pénale a modifié les modalités de saisine du SPIP en ce qui concerne les mesures alternatives à l’incarcération. Depuis le 1er janvier 2007, (…) la remise d’une convocation devant le SPIP permet de débuter sans délai et pleinement l’exécution de la mesure, ce qui est l’esprit même de la loi, visant une prise en charge rapide des condamnés à l’issue de l’audience ».

Une adaptation du logiciel APPI va d’ailleurs être mise en place à compter du début de l’année 2008 pour tirer toutes les conséquences pratiques de cette saisine directe du SPIP par la convocation remise en application de l’article 474 du code de procédure pénale. En effet, dans la version actuelle de ce logiciel, les mesures ne peuvent être renseignées que par le secrétariat-greffe du JAP, même si la mesure peut être directement mise en œuvre par le SPIP. En conséquence, les SPIP peuvent commencer à exécuter la mesure, mais sans pouvoir renseigner le logiciel APPI tant que le secrétariat-greffe du JAP ne l’a pas fait. À compter du déploiement de la nouvelle version d’APPI, les SPIP auront donc la possibilité – et la responsabilité – de créer dans le logiciel les mesures dont ils seront saisis en application de l’article 474 du code de procédure pénale.

b) Poursuivre l’évolution renforçant le rôle de décision des SPIP

Dans la situation actuelle, si l’on excepte la procédure dite NPAP qui sera abordée plus loin, la répartition des compétences entre les JAP et les SPIP dans le domaine des aménagements de peine est la suivante : les JAP décident les mesures d’aménagements de peine, dont les SPIP assurent la conception, puis le contrôle et l’accompagnement. Cette répartition des rôles s’explique essentiellement par un attachement au parallélisme des formes dans la tradition juridique française : ce qui a été décidé par une autorité judiciaire ne peut être modifié que par une autre autorité judiciaire.

Pourtant, cette conception n’est pas unanimement partagée : dans certains pays, par exemple en Allemagne ou au Danemark, certains aménagements de peine peuvent être décidés par l’Administration pénitentiaire. Au Danemark, c’est même la libération conditionnelle, mesure témoignant du degré de confiance le plus élevé envers le condamné, qui peut être accordée par l’autorité administrative. Il convient de ne pas oublier non plus que, jusqu’en 1972, l’octroi de toutes les mesures de libération conditionnelle relevait de la compétence du ministre de la justice, avant que sa compétence ne soit restreinte aux mesures concernant les condamnés à des peines de plus de trois ans puis de cinq ans d’emprisonnement.

En outre, si la juridictionnalisation de l’application des peines constitue un progrès dans le sens où elle a permis de rendre plus transparentes les conditions d’octroi des mesures d’aménagement de peine, elle présente néanmoins l’inconvénient de soumettre à une procédure juridictionnelle certaines mesures relativement simples dont les SPIP pourraient sans difficulté majeure assumer la responsabilité.

Les échanges de votre rapporteur avec les représentants de SPIP montrent que ceux-ci seraient favorables à une plus grande autonomie pour la mise en place de certains aménagements de peine. Dans les faits, les aménagements et la mise en place des peines alternatives sont préparés et instruits par les SPIP, qui soumettent les dossiers au JAP. Si le contrôle juridictionnel exercé par le JAP ne doit pas être remis en cause, il apparaît néanmoins que le rôle du SPIP dans la conception des aménagements de peine et dans l’exécution des peines alternatives pourrait encore être accru, dans la continuité de l’évolution engagée par la loi du 9 mars 2004.

Pour certains aménagements ou certaines mesures d’exécution de peines alternatives, une nouvelle procédure pourrait être mise en place : le SPIP formulerait au JAP des propositions, auxquelles celui-ci pourrait s’opposer dans un délai de 48 heures. En l’absence d’opposition dans ce délai, la mesure serait considérée comme acceptée. En cas d’opposition du JAP, la procédure ordinaire juridictionnelle devant le JAP s’appliquerait, et donnerait lieu, le cas échéant, à débat contradictoire.

La mission estime que cette nouvelle procédure pourrait s’appliquer dans les trois cas suivants :

—  Tout d’abord, les « aménagements d’aménagements » devraient pouvoir relever de cette procédure. Actuellement, l’article 712-8 du code de procédure pénale dispose que « les décisions modifiant ou refusant de modifier les mesures mentionnées aux premier et troisième alinéas de l'article 712-6 ou les obligations résultant de ces mesures ou des mesures ordonnées par le tribunal de l'application des peines en application de l'article 712-7 sont prises par ordonnance motivée du juge de l'application des peines, sauf si le procureur de la République demande qu'elles fassent l'objet d'un jugement pris après débat contradictoire conformément aux dispositions de l'article 712-6 ». Le rôle des SPIP se limite, en application de l’article D. 575, alinéa 3 du même code à un rôle de proposition d’« aménagements ou modifications des mesures de contrôle, obligations ou conditions ».

Toute modification dans les conditions d’exécution – notamment dans les horaires – d’une mesure de semi-liberté, de placement à l’extérieur ou de placement sous surveillance électronique ne peut donc être décidée que par le JAP. Cette lourdeur est parfois contournée par certains JAP, qui prévoient dans leur décision accordant la mesure que la personne dispose d’un temps défini par la décision pour quitter le centre de semi-liberté, son lieu d’hébergement ou son domicile avant le début de son horaire de travail ou de formation et pour y revenir après la fin de cet horaire, en laissant à la direction de l’établissement d’accueil ou au SPIP le soin de définir précisément ces horaires.

Si le principe même de la décision d’aménagement doit rester de la compétence du JAP, sa mise en œuvre pratique et son aménagement éventuel pour tenir compte, par exemple, d’un changement d’horaire de travail ou de formation voire d’un changement d’emploi, doivent pouvoir être confiés au SPIP, sous le contrôle du JAP. Les articles 712-8 et D. 575 du code de procédure pénale devraient donc faire l’objet d’une modification en ce sens.

—  Ensuite, le lieu d’affectation d’un TIG pourrait suivre le même régime. En pratique, les relations avec les partenaires du lieu d’accueil du TIG sont le plus souvent développées par le SPIP. Ici encore, cette dissociation des rôles d’instruction et de décision contraint le SPIP à effectuer des allers et retours entre le JAP et l’établissement d’accueil, source de perte de temps et d’efficacité.

En conséquence, la mission estime que, si le JAP doit pouvoir fixer les orientations qu’il estime nécessaires quant au choix du lieu d’affectation du TIG et contrôler le respect de ces orientations dans le choix effectué, le choix même du lieu d’affectation doit pouvoir être proposé par le SPIP, sous réserve d’opposition du magistrat.

—  Enfin, le renouvellement des permissions de sortir pourrait lui aussi être confié au SPIP sous le contrôle du JAP. Les permissions de sortir constituent, de très loin, la mesure d’aménagement de peine la plus fréquemment prononcée : en 2005, 35 411 permissions de sortir ont été accordées.

D’une durée comprise entre un et cinq jours et ayant un objet strictement défini par les articles 723-3 et D. 142 à D. 147 du code de procédure pénale, ces mesures doivent être décidées par la commission de l’application des peines (CAP) qui, selon les établissements, se réunit entre une et huit fois par mois. Cette périodicité, à laquelle il faut ajouter le délai d’inscription au rôle de la CAP, rend relativement rigide la procédure d’octroi des permissions de sortir et peut rendre difficile l’obtention en urgence d’une permission de sortir justifiée par un motif pourtant légitime.

En outre, cette mesure apparaît peu risquée. Si le nombre d’infractions commises pendant la durée d’une permission de sortir ne peut être évalué, en revanche le taux de non-réintégration volontaire à l’issue de la permission est particulièrement faible : en 2005 il y eut 105 évasions pour 35 411 permissions, soit un taux d’à peine 0,3 %.

S’il apparaît nécessaire que la première permission de sortir d’une personne condamnée reste, comme aujourd’hui, accordée par le JAP après un examen des garanties présentées par le détenu, en revanche, les permissions de sortir suivant une première permission réussie pourraient être proposées par les SPIP et considérées comme accordées à défaut d’opposition du JAP dans le délai de 48 heures.

Le nouvel article D. 146-4 du code de procédure pénale, issu du décret du 16 novembre 2007 (36), constitue un premier pas dans la direction prônée par la mission. En effet, cet article permet au JAP qui « accorde une permission de sortir en vue de la préparation de la réinsertion sociale du condamné, notamment pour lui permettre de rencontrer une personne susceptible de l'employer après sa libération » ou « en vue du maintien des liens familiaux lorsque la durée de la peine restant à exécuter est inférieure ou égale à un an » de « décider que la date et les modalités d'exécution de la permission seront fixées et précisées par le directeur du service pénitentiaire d'insertion et de probation, après avis du chef de l'établissement pénitentiaire ». Cette nouvelle possibilité de délégation de compétence du JAP au SPIP pour la détermination de la date et des modalités de la permission de sortir est considérée par la mission comme un argument supplémentaire en faveur d’un accroissement du rôle décisionnel des SPIP en matière d’aménagements de peines.

Ces trois évolutions tendant à renforcer le rôle des SPIP auraient le double avantage de faciliter la mise en œuvre de ces aménagements ou peines alternatives et d’alléger la charge pesant sur les JAP. Elles permettraient aux JAP de consacrer une plus grande part de leur activité au développement des aménagements de peine nécessitant une préparation plus longue, tels que la semi-liberté ou la libération conditionnelle, ou au développement et au maintien d’un réseau de partenaires pour l’accueil de TIG.

Proposition n° 35

Permettre aux SPIP de proposer, sauf opposition du JAP :

—  les modifications des horaires des détenus en semi-liberté, en placement à l’extérieur ou placés sous surveillance électronique ;

—  le lieu d’affectation du TIG en fonction des orientations fixées par le JAP ;

—  le renouvellement des permissions de sortir.

c) Redéfinir les modes d’intervention des SPIP

La poursuite de l’accroissement du rôle décisionnel des SPIP dans les aménagements de peine ne saurait être envisagée sans que soit examinée la question des modes d’intervention des SPIP. En effet, il ressort des entretiens menés par votre rapporteur avec des JAP de nombreuses juridictions qu’une certaine méfiance existe souvent vis-à-vis de l’action menée par les SPIP. Les JAP ont le sentiment que les SPIP, bien qu’agissant sur mandat judiciaire, accompagnent et contrôlent les personnes qui leur sont confiées sans véritable cadre ni méthode clairement définis. En somme, chaque conseiller d’insertion et de probation accomplit sa mission avec le condamné « à sa façon ».

En outre, les JAP s’estiment généralement insuffisamment informés de la nature du suivi mis en place, du déroulement de la mesure et des résultats obtenus que ce soit sur le plan de l’emploi, de l’insertion, de la participation à la vie familiale ou de la mise en œuvre de soins. L’information assurée par les rapports semestriels sur l’exécution de la mesure, remis aux JAP en application de l’article D. 575 du code de procédure pénale, est considérée par les JAP comme trop inégale et insuffisante pour leur permettre d’évaluer la progression du condamné.

Enfin, les partages d’informations sur des pratiques innovantes développées par certains SPIP apparaissent trop rares. L’exemple du « suivi différencié », initié par le SPIP du Val-de-Marne, qui a permis d’obtenir des résultats encourageants, est à cet égard révélateur du manque d’échanges entre les SPIP. Cette méthode de prise en charge des condamnés consiste, après une période d’évaluation au cours de laquelle le besoin d’assistance et de contrôle de la personne est déterminé par un ou plusieurs travailleurs sociaux référents, à mettre en place un suivi dont l’intensité varie en fonction des résultats de l’évaluation initiale puis de l’évolution positive ou négative de la personne. Trois degrés de suivi sont distingués : un suivi intensif, comprenant un rendez-vous mensuel au moins, un suivi espacé, comprenant un rendez-vous trimestriel environ, et un suivi administratif, ne donnant lieu à un rendez-vous qu’en cas de nécessité ou d’incident. Le suivi peut, au cours de la mesure et en fonction de l’évolution de la mesure, être progressivement allégé ou au contraire intensifié.

Ce n’est qu’après plusieurs années de développement que cette initiative innovante a commencé à être connue des autres SPIP et expérimentée dans d’autres départements. Le SPIP de Seine-Maritime a ainsi mis en place un suivi différencié depuis le mois de septembre 2007 et estime que l’impact de cette méthode est très positif. Une telle innovation mériterait, à tout le moins, d’être évaluée, avant d’être, le cas échéant, expérimentée plus largement puis généralisée.

Pour accroître la confiance des JAP dans l’action des SPIP, mais également pour améliorer l’efficacité des SPIP, une redéfinition de leurs méthodes d’intervention a été engagée par l’Administration pénitentiaire en vue de la rédaction d’un « référentiel des bonnes pratiques ». Cette démarche de clarification des méthodes des SPIP ne peut qu’être encouragée ; la mission souhaite que ce projet de référentiel, qui devra guider les travailleurs sociaux des SPIP dans leur action et permettre une meilleure évaluation des résultats, aboutisse avant le 30 juin 2008.

Proposition n° 36

Perfectionner les modes d’intervention des SPIP :

—  en favorisant le développement des modes d’intervention innovants expérimentés localement ;

—  en faisant aboutir le projet de référentiel de bonnes pratiques avant le 30 juin 2008.

d) Renforcer les moyens des SPIP

Si l’on ne peut contester l’augmentation très importante des moyens des SPIP au cours des cinq dernières années, le renforcement du rôle des SPIP souhaité par la mission exige un nouveau renforcement de leurs moyens.

Des recrutements très importants ont été réalisés entre 2002 et 2007 pour renforcer les SPIP. Le total des effectifs d’insertion et de probation est ainsi passé de 2 101 à 3 050 agents, tous grades confondus, représentant 2 885 équivalents temps plein travaillé (ETPT). Cette augmentation, qui était tout à fait indispensable, n’a toutefois pas permis aux SPIP de disposer de davantage de temps pour le suivi de chaque mesure qui leur est confiée ni à chaque agent des SPIP de voir le nombre de mesures dont il est saisi baisser significativement.

En effet, l’augmentation du nombre de mesures de milieu ouvert, passé de 125 000 en 2005 à 146 000 en 2007, les moyens consacrés à la préparation des projets d’insertion et d’aménagement de peine en milieu fermé, l’exécution d’un nombre considérable de mesures en attente ainsi que les nouvelles tâches confiées aux SPIP ont absorbé l’essentiel des nouveaux moyens qui leur ont été alloués, sans permettre d’améliorer ni les conditions de travail des agents ni la qualité du suivi mis en place.

De plus, une norme tacite assez communément répandue fixe à une fourchette de 80 à 100 le nombre de mesures que peut suivre un travailleur social. Or, dans un grand nombre de SPIP, chaque agent suit un nombre de mesures compris entre 100 et 200, au détriment de l’intensité et de la qualité du suivi. Une étude réalisée dans l’Indre en 2005 estimait que, compte tenu du nombre de dossiers confiés à chaque agent et des autres tâches qui leur sont confiées (comptes-rendus, réunions…) le temps disponible pour le suivi de chaque mesure était de 8 heures par an, soit un temps beaucoup trop faible pour assurer un suivi de qualité (37). D’autres SPIP ont fait le choix de privilégier la qualité du suivi en appliquant cette norme de 80 à 100 dossiers par travailleur, au détriment du taux et des délais d’exécution des mesures puisque ce choix aboutit à la constitution de stocks et à la mise en attente de mesures.

Cette obligation pour les SPIP de choisir entre qualité du suivi et rapidité de sa mise en place n’est pas satisfaisante. De plus, les propositions d’accroissement des responsabilités des SPIP formulées par la mission en vue de favoriser le développement des aménagements alourdiront d’autant les missions des SPIP ; elles ne sauraient être mises en place sans un renforcement conséquent de leurs moyens. C’est pourquoi la mission estime nécessaire une augmentation des effectifs des SPIP aussi ambitieuse que celle opérée entre 2002 et 2007 et correspondant à leurs besoins et aux évolutions à venir de leurs missions, et demande leur augmentation de 25 % au cours des cinq prochaines années.

Proposition n° 37

Poursuivre l’augmentation des effectifs des SPIP de 25 % dans les cinq prochaines années.

2. Renforcer la fonction de contrôle du JAP

La mission estime que le développement des aménagements de peine passe par un renforcement de l’autonomie des SPIP dans ce domaine. Mais cette autonomie accrue doit avoir une contrepartie : la fonction de contrôle du JAP doit être renforcée. À cette fin, la communication entre les JAP et les SPIP doit être développée et améliorée et le JAP doit avoir les moyens d’un contrôle effectif sur l’action des SPIP.

a) Développer et améliorer la communication entre les JAP et les SPIP

Comme nous l’avons indiqué précédemment, les JAP s’estiment souvent insuffisamment informés de l’action menée par les SPIP. En outre, certains JAP hésitent parfois à prononcer certains aménagements ou certaines peines alternatives de crainte que le suivi opéré par les SPIP soit insuffisant ou que la mesure ne puisse être exécutée dans des délais raisonnables faute de place disponible. Un développement et une amélioration de la communication entre les JAP et les SPIP apparaissent donc nécessaires.

—  Plusieurs initiatives récentes se sont déjà engagées dans cette direction : ainsi la mise en place des conférences régionales semestrielles sur le développement des aménagements de peine et des alternatives à l’incarcération, d’abord par la circulaire du 27 juin 2007 relative aux aménagements de peine et aux alternatives à l’incarcération puis par le décret du 16 novembre 2007 (38), devra permettre de développer les liens entre les JAP et les SPIP. La composition et les missions de ces conférences sont définies par le nouvel article D. 48-5-1 du code de procédure pénale.

Elles réuniront « les magistrats du siège et du parquet particulièrement concernés par le prononcé et la mise en œuvre des aménagements de peine et les responsables régionaux et départementaux des services de l’administration pénitentiaire » et « auront vocation à favoriser les échanges d’informations, à optimiser les moyens existants et à développer un réseau partenarial afin d’accroître les potentialités en matière d’aménagements de peine mais également d’alternatives à l’incarcération ». La mise en place d’un lieu d’échange entre les acteurs des aménagements de peine est une excellente initiative apte à favoriser la communication entre les JAP et les SPIP. Reste aux acteurs à s’approprier ce lieu d’échanges et à en faire le cadre d’un dialogue constructif et le vecteur d’une meilleure coordination entre tous les acteurs de l’aménagement des peines.

—  Une autre mesure initiée par la circulaire du 27 avril 2006 relative aux aménagements de peine et aux alternatives à l’incarcération en vue d’améliorer la communication des JAP et des SPIP réside dans la mise à disposition des magistrats par les directions régionales des services pénitentiaires de données relatives aux possibilités d’aménagements de peine offertes dans leur ressort. Ces directions doivent désormais fournir aux services de l’application des peines une cartographie mensuelle relative au nombre de places offertes sous les régimes du placement sous surveillance électronique (PSE) et de la semi-liberté (SL), et une information hebdomadaire sur les capacités d’accueil et le taux d’occupation relatifs aux mesures de PSE, de SL et de placement à l’extérieur ainsi que sur les capacités d’accueil en postes de TIG et dans les stages de citoyenneté.

Des initiatives visant à informer les JAP sur les possibilités effectives d’aménagements de peine avaient déjà été mises en place localement dans certains départements et avaient donné des résultats tout à fait encourageants. La systématisation de cette information est de nature à favoriser le développement des aménagements de peine, puisque les JAP, mieux informés des possibilités effectives d’aménagement et, le cas échéant, des délais de mise en œuvre des mesures, pourront décider de ces mesures avec la certitude qu’elles seront effectivement et rapidement exécutées. Dans un souci d’efficacité, la mission souhaite que le plus grand soin soit apporté à une mise à jour aussi rigoureuse que possible et en temps réel de cette information.

—  Enfin, bien qu’il ait été conçu dans le but de faciliter les échanges entre les JAP et les SPIP, le logiciel APPI ne semble pas, pour l’heure, être utilisé à plein comme un outil de communication permanente et efficace. Certaines difficultés de mise en service et certaines réticences initiales semblent avoir laissé dans les esprits tant des JAP que des SPIP des traces qui doivent aujourd’hui être effacées.

En effet, ce logiciel peut constituer un excellent moyen de communication, à la fois simple d’utilisation et rapide, entre les JAP et les SPIP. Il peut permettre d’échanger des informations succinctes, plus efficacement que par téléphone et plus rapidement que par la transmission physique de dossiers, notes ou rapports. Il constitue un premier pas vers la dématérialisation des procédures dont beaucoup est à attendre en termes de gains de temps et d’efficacité.

De plus, la réciprocité de la saisie initiale des informations relatives à une mesure, qui va être mise en place à compter du début de l’année 2008, afin de permettre aux SPIP de renseigner sur le logiciel les mesures dont ils sont directement saisis en application de l’article 474, alinéa 3 du code de procédure pénale, facilitera l’utilisation d’APPI, en contribuant à en faire un outil interactif de communication des JAP et des SPIP. Pour toutes ces raisons, il importe que le potentiel d’APPI soit utilisé pleinement par tous les acteurs de l’application des peines.

Proposition n° 38

Développer et améliorer la communication entre les JAP et les SPIP :

—  en renforçant le rôle des conférences régionales semestrielles sur le développement des aménagements de peine et des alternatives à l’incarcération ;

—  en améliorant l’information des JAP sur les possibilités d’aménagement de peine ;

—  en utilisant pleinement les potentialités du logiciel APPI.

b) Donner au JAP les moyens d’un contrôle effectif sur l’action des SPIP

Le renforcement de l’autonomie du SPIP doit avoir pour contrepartie un renforcement des moyens de contrôle de l’exécution des mesures. Une évolution du rôle du JAP est souhaitable : afin de pouvoir se consacrer davantage à la préparation des aménagements les plus lourds ou au développement d’un réseau de partenaires d’accueil de TIG, il doit conserver le rôle de juge décideur sur le principe des mesures mais également devenir un juge contrôleur sur l’exécution des mesures. Mme Nicole Maestracci, présidente du tribunal de grande instance de Melun et présidente de la FNARS (39) a résumé cette position lors de son audition en affirmant que « le rôle du JAP est d’être un superviseur des choix effectués par les SPIP ». Pour exercer efficacement ce rôle de superviseur, les JAP doivent pouvoir disposer d’informations fréquentes et fiables sur le déroulement de la mesure et l’évolution du condamné.

Actuellement, l’article D. 575 du code de procédure pénale dispose que les travailleurs sociaux des SPIP « proposent [au JAP] les aménagements ou modifications des mesures de contrôle, obligations ou conditions, et rendent compte de leurs violations. Ils lui adressent chaque semestre à compter de la saisine du service et à l'issue de la mesure de suivi un rapport d'évaluation ». Les SPIP sont donc astreints à une double obligation d’information : le signalement des incidents d’une part, et les rapports semestriels et de fin de mesure d’autre part.

Or il ressort des informations données tant par les JAP que par les SPIP que ces obligations sont à la fois trop lourdes pour les SPIP et insuffisantes pour les JAP. Si l’on excepte l’obligation de signalement des incidents, naturelle et indispensable, l’obligation de rapport semestriel s’avère extrêmement formaliste, très consommatrice en temps, les SPIP s’attachant généralement à fournir des informations aussi détaillées que possible sur les évolutions constatées au cours des six mois écoulés. La forme et le contenu des rapports semestriels en font autant de quasi-rapports de fin de mesure, faisant peser sur les SPIP une charge de travail très lourde et souvent réalisée au détriment de l’intensité du suivi des mesures elles-mêmes.

Pourtant, certains JAP estiment que cette périodicité semestrielle est insuffisante et que des informations moins exhaustives mais plus fréquentes seraient préférables. Comme l’indiquait Mme Nicole Maestracci lors de son audition, « le JAP, comme le juge des enfants, est le juge du temps qui passe ; il ne doit pas être qu’un juge de l’incident, mais doit pouvoir disposer d’une information régulière sur l’évolution du parcours du condamné ». Dès lors, la mission estime nécessaire que les SPIP fournissent aux JAP, à chaque fois que nécessaire, des informations sommaires sur l’exécution d’une mesure, par l’intermédiaire du logiciel APPI.

En outre, la mission a constaté que la forme des rapports semestriels n’était pas standardisée : chaque SPIP, voire chaque agent de SPIP, définit lui-même la forme et le contenu de son rapport. Ces disparités de présentation nuisent à la bonne information des JAP et ne leur permettent pas de disposer systématiquement de l’ensemble des informations dont ils ont besoin pour assurer un contrôle efficace de l’exécution de la mesure. Dès lors, la mission demande que la présentation des rapports semestriels soit simplifiée et uniformisée, afin de rendre le contrôle du JAP sur la mesure réellement efficace.

Proposition n° 39

Alléger et rendre plus efficaces les obligations d’information des SPIP en direction des JAP, en simplifiant et en uniformisant la présentation des rapports semestriels.

C. ENCOURAGER LES MESURES D’AMÉNAGEMENTS DE PEINES

En dépit des évolutions législatives issues de la loi du 9 mars 2004 traduisant une volonté politique forte d’encourager les aménagements de peine, ceux-ci ne sont pas encore assez développés. Si le nombre total d’aménagements de peine décidés entre 2000 et 2006 a augmenté globalement de 37 %, cette augmentation est essentiellement due à la progression du nombre de placements sous surveillance électronique. En revanche, les placements à l’extérieur ont baissé de 25 %, tandis que les placements en semi-liberté stagnaient et les libérations conditionnelles progressaient légèrement de 5 %.

Évolution du nombre d’aménagements de peine prononcés entre 2000 et 2006

Années

Placements à l'extérieur

Placements en semi-liberté

Placements sous surveillance électronique

Libérations conditionnelles

Total des aménagements

2000

3 339

6 757

13

5 361

15 444

2001

2 682

6 481

130

5 680

14 973

2002

2 550

6 527

359

4 812

14 248

2003

2 733

6 261

948

5 569

15 511

2004

2 221

6 819

2 911

6 180

18 131

2005

2 478

6 619

4 128

5 911

19 136

2006

2 528

6 751

6 288

5 648

21 215

Si l’essor du placement sous surveillance électronique doit être salué, de nouvelles solutions doivent être trouvées pour développer les autres aménagements de peine, afin d’éviter à chaque fois que cela est possible les incarcérations de courte durée et de limiter les sorties sèches tant pour les longues que pour les courtes peines. La première solution réside dans la création des structures d’accueil nécessaires au développement des aménagements de peine. D’autres solutions sont à rechercher dans un encouragement des aménagements existants ainsi que dans une extension des possibilités d’aménagements.

1. Doter la justice des structures d’accueil nécessaires au développement des aménagements de peine

Des constatations faites sur le terrain, il ressort que la mesure de semi-liberté pâtit d’un nombre de places inadéquatement réparti sur le territoire, certains centres ou quartiers étant sous-occupés et d’autres sur-occupés. Le développement des aménagements de peine pourrait également être amélioré par le développement des quartiers courtes peines et des centres pour peines aménagées, qui ne sont qu’au nombre de trois actuellement.

a) Améliorer la répartition des places de semi-liberté

À la date du 1er novembre 2007, le nombre de places de semi-liberté disponibles est de 2 203, dont 672 dans des centres de semi-liberté ou centres pour peines aménagées autonomes, pour 6 751 mesures exécutées en 2006. À cette même date, ces 2 203 places sont occupées par 1 773 condamnés en semi-liberté (40), le taux d’occupation de l’ensemble des places de semi-liberté disponibles étant de 78 % (41).

Malheureusement, ces places sont très inégalement et inadéquatement réparties sur le territoire : par exemple, les centres de semi-liberté de Lyon et de Montpellier ont respectivement des taux d’occupation de 120 % et 237,5 %, alors que ceux de Maxeville ou Montargis ont des taux d’occupation de 58,6 % et 55 %. Ces disparités révèlent une inadéquation de l’offre de places de semi-liberté avec les besoins locaux.

Cette inadéquation des places disponibles et des besoins est néfaste tant pour l’exécution des mesures de semi-liberté que pour leur prononcé même. En effet, la sur-occupation des centres de semi-liberté contraint les chefs de ces établissements à « doubler » voire « tripler » les chambres, c’est-à-dire à y installer deux lits au lieu d’un ou trois au lieu de deux. Ces conditions de détention accroissent le risque d’incidents au sein du centre, nécessairement difficiles à gérer pour le personnel compte tenu des effectifs plus limités en CSL qu’en établissement pénitentiaire classique.

Surtout, certains magistrats peuvent, au vu de ces taux d’occupation et des délais de mise à exécution que la sur-occupation peut entraîner, hésiter à prononcer une mesure de semi-liberté dont ils savent qu’elle sera exécutée dans de mauvaises conditions ou tardivement. Une meilleure répartition de ces places sur l’ensemble du territoire, afin de supprimer les places visiblement non utilisées mais surtout d’augmenter le nombre de places là où les besoins sont évidents, est donc indispensable.

En outre, la mission estime que le développement de ces places devrait se faire de préférence au sein des centres de semi-liberté (CSL) autonomes plutôt que dans des quartiers de semi-liberté (QSL) inclus dans le périmètre des établissements pénitentiaires. Ces CSL autonomes ne sont aujourd’hui qu’au nombre de treize, malgré leurs avantages sur les QSL tant en termes de coûts qu’en termes de fonctionnement.

En termes de coûts, les CSL sont nettement moins onéreux que les QSL, dont le coût de construction et de fonctionnement est le même que celui d’une place de détention ordinaire. En revanche, en raison du moindre degré de sécurité des CSL, justifié par la confiance dont bénéficie le condamné, et du nombre beaucoup plus réduit de personnels de surveillance, le coût constructif d’une place de CSL est évalué à 60 000 euros contre 100 000 euros pour une place en établissement pénitentiaire, tandis que les coûts de fonctionnement sont respectivement de 30 euros et 60 euros par jour.

Sur le plan du fonctionnement, les CSL ont également des avantages certains par rapport aux QSL. Tout d’abord, ils sont généralement situés en centre ville ou à proximité immédiate, et bien desservis par les réseaux de transports en commun, ce qui constitue un atout indéniable pour permettre au semi-libéré de se rendre facilement sur son lieu de travail ou de formation. Les établissements pénitentiaires récemment construits se trouvent, quant à eux, le plus souvent en périphérie des villes, et ne sont pas toujours aisément accessibles autrement qu’en voiture ; or, un grand nombre de détenus pouvant prétendre à une mesure de SL soit ne possèdent pas de véhicule soit ne disposent plus de leur permis de conduire.

Ensuite, la plupart des CSL sont ouverts 24 heures sur 24, ce qui ouvre aux semi-libérés un champ d’activités professionnelles plus large que s’ils effectuent leur peine en QSL, dans lesquels les contraintes de sécurité ne permettent pas une telle souplesse dans les horaires d’ouverture. Ce double avantage de la situation géographique et de la souplesse des horaires, ajouté à l’avantage en terme de coût, conduit la mission à demander que les nouvelles places de semi-liberté qui seront créées le soient prioritairement au sein de CSL autonomes.

Proposition n° 40

Adapter le nombre de places de semi-liberté aux besoins locaux, en privilégiant les centres de semi-liberté aux quartiers de semi-liberté.

b) Développer les quartiers courtes peines et les centres pour peines aménagées

La mission a déjà souligné toute l’importance qu’elle attache au développement et à l’évaluation des quartiers courtes peines. Les 300 premières places de quartiers courtes peines sur les 2 000 prévues doivent être créées avant la fin de l’année 2010. La mission d’information estime que ces quartiers devront jouer un rôle fondamental dans la préparation des aménagements de peine.

L’Administration pénitentiaire a également lancé depuis 2002 un programme de mise en service de centres pour peines aménagées (CPA). Ces centres, situés à Marseille, à Metz et à Villejuif, sont des établissements pénitentiaires recevant des détenus volontaires dont le reliquat de peine est inférieur à un an, afin de leur permettre de mettre en place un projet de réinsertion en vue d’une demande d’aménagement de peine. Leur objectif est d’accompagner le projet du détenu tout en lui laissant la responsabilité, avec l’aide des différents intervenants, d’élaborer ce projet.

Le public visé par les CPA est celui des détenus les moins insérés tant professionnellement que socialement, donc les moins à même de justifier d’une situation permettant de demander un aménagement de peine, mais souhaitant « mettre à profit » leur temps de détention pour amorcer une démarche d’insertion. À la différence des CSL ou QSL qui accueillent des détenus ayant bénéficié sur décision judiciaire d’un aménagement de peine, les CPA accueillent des détenus affectés à leur demande sur décision de l’Administration pénitentiaires en vue de préparer dans des conditions plus favorables qu’en maison d’arrêt un projet de sortie ou d’aménagement.

Ainsi, le CPA de Villejuif accueille 36 détenus, affectés sur décision de l’Administration pénitentiaire, qui vont suivre un « parcours » défini par la direction du centre en lien avec les JAP et le SPIP du Val-de-Marne. À la différence des CPA de Marseille et de Metz, le CPA n’est pas rattaché à un établissement pénitentiaire, les détenus étant hébergés dans des chambres et non en cellules. En outre, une antenne « mixte » du SPIP, compétente pour les mesures de milieu ouvert et de milieu fermé et composée d’un chef de service et de six travailleurs sociaux, a été installée dans les locaux du CPA.

Pendant une première phase de trois semaines, au cours de laquelle le détenu ne bénéficie ni de visites ni de permissions de sortir, le détenu rencontre les différents partenaires du CPA dans les domaines de l’insertion professionnelle, du logement et de la santé en vue d’établir un diagnostic de sa situation et d’élaborer un avant-projet d’insertion. Au terme de cette phase d’observation, le détenu est entendu par le JAP en vue de définir des objectifs d’insertion ; si le JAP juge l’avant-projet probant, il autorise la direction du centre à accorder au détenu des autorisations de sortie dans le cadre d’un placement extérieur, sur présentation de justificatifs, en vue de réaliser les démarches de soins, de recherche d’emploi ou de formation qu’exige le projet d’insertion. Dans un troisième temps, si les démarches du détenu pour mettre en œuvre son projet aboutissent, il pourra effectuer une demande d’aménagement de peine, qui aura toutes les chances d’être acceptée, lui permettant ainsi de bénéficier d’une sortie anticipée mais accompagnée et contrôlée.

Votre rapporteur considère le travail accompli au sein des CPA comme très encourageant. Il permet en effet, grâce à une forte responsabilisation des détenus et à un encadrement interdisciplinaire, de bâtir des projets crédibles d’aménagements pour des détenus qui, en maison d’arrêt, auraient très vraisemblablement attendu leur fin de peine pour sortir sans encadrement mais aussi sans projet de réinsertion.

Le nombre de places disponibles en CPA est actuellement de 109. Ajoutées aux 300 places de quartiers courtes peines prévues pour 2010, ces 109 places ne semblent pas tout à fait suffisantes pour favoriser le développement des aménagements de peines. La mission estime donc nécessaire que le nombre de places en quartiers courtes peines et en centres pour peines aménagées soit porté à 500 dans les trois prochaines années. Dans la mesure du possible et sous réserve de conserver à ces établissements un niveau de sécurité satisfaisant, la mission estime également souhaitable que les CPA soient adossés à des CSL, comme c’est le cas à Villejuif, afin de permettre aux détenus qui y sont affectés de bénéficier du même avantage de situation géographique mais aussi de limiter les coûts de construction et de fonctionnement à un niveau inférieur aux coûts en établissement pénitentiaire.

Proposition n° 41

Porter à 500 le nombre de places en quartiers courtes peines et en centres pour peines aménagées avant le 31 décembre 2010.

2. Encourager le développement des aménagements de peine existants

Les aménagements de peine peuvent être décidés avant la mise à exécution de la décision soit par la juridiction de jugement dès l’audience, soit par le juge de l’application des peines en application de l’article 723-15 du code de procédure pénale pour les peines d’emprisonnement ferme d’une durée inférieure ou égale à un an. Ils peuvent également être décidés en cours d’exécution de la peine par le juge ou le tribunal de l’application des peines. Des mesures peuvent être prises pour favoriser les aménagements à ces deux stades de la procédure.

a) Encourager les aménagements de peine avant leur mise à exécution

Des informations recueillies auprès des juridictions et des SPIP, il ressort que la mise en place d’un aménagement de peine par la juridiction de jugement ou par le juge de l’application des peines dans le cadre de l’article 723-15 du code de procédure pénale est, dans un grand nombre de cas, bloquée par l’absence d’hébergement stable de la personne condamnée. En effet, un grand nombre de personnes condamnées à de courtes peines d’emprisonnement sont dans une situation de précarité de logement jugée généralement incompatible par la juridiction ou le JAP avec le prononcé d’un aménagement de peine.

Pourtant, des solutions d’hébergement d’urgence par des associations pourraient être disponibles et permettre, par le prononcé par exemple d’un placement à l’extérieur ou d’un sursis assorti de l’obligation d’accomplir un TIG, d’éviter des incarcérations pour de courtes peines d’emprisonnement. Font simplement défaut à l’audience ou devant le JAP le temps nécessaire à la recherche d’une solution d’hébergement, ainsi que l’interlocuteur à même de proposer une telle solution.

Afin de permettre la recherche de ces solutions d’hébergement, la mission préconise la création, dans un premier temps sous une forme expérimentale, d’un dispositif de veille sociale judiciaire, qui assurerait une permanence lors de toutes les audiences correctionnelles – et jusqu’à la fin de celles-ci – et auprès des JAP. Ce dispositif pourrait s’inspirer quant à son organisation de celle du service éducatif auprès du tribunal pour enfants, qui a notamment pour mission d’assurer une orientation en urgence des mineurs et dont l’efficacité dans cette tâche est reconnue par les magistrats des juridictions pour mineurs. Sur un plan fonctionnel, il pourrait être adossé au dispositif de veille sociale prévu par l’article L. 345-2 du code de l’action sociale et des familles. Le recours au numéro de téléphone gratuit 115, qui assure la mise en œuvre concrète de cette veille sociale, pourrait permettre au service chargé de la veille sociale judiciaire de proposer à la juridiction une solution d’hébergement rendant possible l’aménagement de la peine dès son prononcé et évitant une incarcération courte.

Proposition n° 42

Expérimenter un dispositif de veille sociale judiciaire pour permettre la mise en place de solutions d’hébergement d’urgence et rendre possible l’aménagement des peines dès leur prononcé.

b) Encourager les aménagements de peine en cours d’exécution

La mise en place d’aménagements de peine en cours d’exécution bute actuellement sur deux obstacles. Tout d’abord, pour les courtes peines, la brièveté de l’incarcération rend nécessaire que la préparation d’un éventuel aménagement de peines soit commencée au plus près du début de l’exécution de la peine d’emprisonnement, ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui. Ensuite, les délais nécessaires à l’obtention des expertises nécessaires préalablement à toute décision d’aménagement pour les auteurs de certaines infractions privent de facto de la possibilité d’aménagement certains condamnés à de courtes peines.

—  L’article 723-15 du code de procédure pénale issu de la loi du 9 mars 2004 a affirmé le principe selon lequel, pour les personnes non incarcérées, les peines d’emprisonnement ferme d’une durée inférieure ou égale à un an doivent, sauf en cas de refus du condamné ou d’urgence à mettre la peine à exécution, être exécutées sous le régime du placement à l’extérieur, de la semi-liberté ou du placement sous surveillance électronique. L’exécution des courtes peines d’emprisonnement doit donc être l’exception et n’a en principe lieu que dans quatre cas : si la personne condamnée est déjà incarcérée au jour de la condamnation ; si elle refuse un aménagement de peine ; si aucun aménagement de peine ne peut être mis en place ; si le ministère public considère qu’il y a urgence à mettre la peine à exécution.

Cependant, lorsque les courtes peines d’emprisonnement ne peuvent être aménagées ab initio, il n’en demeure pas moins qu’elles restent susceptibles d’être aménagées en cours d’exécution, et que cet aménagement est souhaitable. Mais pour souhaitable qu’elle soit, la mise en place d’un aménagement s’avère extrêmement compliquée pour les courtes peines : les travailleurs sociaux des SPIP qualifient la recherche de solutions en vue d’un aménagement dans les maisons d’arrêt de « course contre la montre ». Le montage de projets d’hébergement, de formation, de soins ou d’embauche doit être réalisé dans des délais tellement brefs que, dans un grand nombre de cas, les projets d’aménagements ne sont prêts qu’à une date très proche de la sortie, ce qui dissuade trop souvent les détenus de les demander.

Une étude réalisée par la direction interrégionale des services pénitentiaires de Lyon sur 1 262 sorties de prison entre novembre 2005 et janvier 2006 montre la difficulté particulière de la mise en place d’aménagements pour les courtes peines : pour les peines d’une durée inférieure à trois mois, 65 % des sorties ont lieu sans accompagnement, alors que pour les peines d’une durée supérieure à douze mois, ce taux de « sorties sèches » est de 47 %.

La plupart des établissements pénitentiaires ont aujourd’hui créé des quartiers arrivants, dans lesquels les détenus sont affectés pendant les premiers jours de leur incarcération. Pendant ce séjour, les détenus rencontrent les différents intervenants de l’établissement : la direction, un travailleur social du SPIP, un médecin et/ou un infirmier de l’unité de consultation et de soins ambulatoire (UCSA) et du service médico-psychologique régional (SMPR). Ces entretiens ont pour objectif principal d’évaluer le comportement, l’état de santé et le degré d’insertion du détenu, en vue de préparer la vie en détention, notamment en l’affectant dans un quartier adapté à sa personnalité et aux faits pour lesquels il a été condamné et en l’orientant vers les soins ou les formations dont il peut avoir besoin.

En revanche, ces entretiens n’ont pas pour objet de commencer à recueillir des informations en vue d’un éventuel projet d’aménagement. Ce n’est que dans un deuxième temps, lorsque le détenu aura été affecté au sein de l’établissement, qu’il sera pris en charge par le SPIP pour examiner plus précisément les perspectives d’insertion et d’aménagement. Selon le nombre de détenus suivi par chaque travailleur social du SPIP intervenant en détention, cet examen de la situation du détenu peut intervenir assez tard après la date d’arrivée en détention ; ce délai retarde d’autant la préparation d’un éventuel aménagement, voire le compromet très sérieusement dans le cas des très courtes peines.

C’est afin d’éviter ces pertes de temps préjudiciables à la recherche de solutions en vue d’un aménagement de peine que la mission propose que la préparation de la sortie soit envisagée au plus près de la date d’incarcération. Dès l’incarcération, le détenu devrait se voir informé de sa date de sortie normalement prévue, compte tenu du crédit de réductions de peine, et de sa date de sortie possible s’il obtient un aménagement de peine. Un projet d’exécution de peine, prévoyant la mise en place des soins, des formations ou enseignements nécessaires, la recherche d’un hébergement et/ou d’un emploi, devrait lui être proposé, afin d’atteindre l’objectif de la mise en place d’un aménagement aussi tôt que possible, c’est-à-dire dès que le détenu y est éligible.

La mission estime que tous les moyens doivent être mis en œuvre pour que l’aménagement puisse avoir lieu à une date suffisamment éloignée de la date de « sortie sèche », pour que l’incitation à préparer sa sortie soit assez forte pour le détenu. La préparation de la sortie le plus en amont possible doit devenir le moyen de convaincre le détenu que l’aménagement de peine, pour contraignant qu’il soit en termes de contrôle, est une solution préférable à la sortie en fin de peine, non seulement en raison du temps de détention gagné mais aussi en raison de l’accompagnement dont il permet de bénéficier.

Proposition n° 43

Favoriser la préparation des aménagements de peines au plus près du début de l’exécution des peines d’emprisonnement.

—  Avant la loi n° 2007-1198 du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs, l’article 712-21 du code de procédure pénale prévoyait que les personnes condamnées pour des infractions sexuelles ne pouvaient bénéficier d’un aménagement de peine qu’après une expertise psychiatrique. Dans le but d’harmoniser les dispositifs pénaux, en utilisant une définition unique des personnes visées par les différentes mesures que sont l’injonction de soins dans le cadre du suivi socio-judiciaire, dans le cadre du sursis avec mise à l’épreuve, dans le cadre de la surveillance judiciaire ou dans le cadre des aménagements de peine, l’article 11 de la loi du 10 août 2007 a étendu cette condition d’expertise psychiatrique préalable à tout aménagement à l’ensemble des infractions pour lesquelles le suivi socio-judiciaire est encouru.

Cette disposition étant d’application immédiate, une expertise psychiatrique est désormais nécessaire pour toutes les infractions relevant du suivi socio-judiciaire :

—  actes de tortures ou de barbarie, viol ou autres agressions sexuelles (article 222-48-1 du code pénal) ;

—  crimes d’atteinte volontaire à la vie des personnes (article 221-9-1 du code pénal) ;

—  crimes d’enlèvement et de séquestration (article 224-10 du code pénal) ;

—  violences commises à l’encontre d’un conjoint ou concubin ou à l’encontre d’un mineur de quinze ans par une personne ayant autorité (article 222-48-1 du code pénal) ;

—  destruction, dégradation, détérioration d’un bien appartenant à autrui par substance explosive, incendie ou tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes (article 322-18 du code pénal).

Toutefois, les difficultés prévisibles d’application de cette disposition ont été signalées à votre rapporteur par l’ensemble des interlocuteurs de la mission. Certes, l’article D. 49-23 du code de procédure pénale, tant dans sa rédaction issue du décret du 13 décembre 2004 (42) que dans celle issue du décret du 16 novembre 2007 (43), permet au JAP de dire « par ordonnance ou jugement motivé, qu'il n'y a pas lieu d'ordonner une nouvelle expertise psychiatrique préalablement à une décision d'aménagement de la peine, dès lors que figure au dossier du condamné une expertise datant de moins de deux ans, y compris si celle-ci a été réalisée avant la condamnation ».

En outre, le décret du 16 novembre 2007 a pris en compte ces difficultés d’application prévisibles de l’article 712-21 du code de procédure pénale, en permettant au JAP d’accorder, dans certaines conditions et sauf pour les infractions les plus graves (44), un aménagement de peine sans expertise psychiatrique préalable. En application de l’article D. 49-23 du code de procédure pénale, le JAP peut, avec l’accord du procureur de la République et par décision motivée, accorder une permission de sortir sans expertise préalable. Il peut également accorder tout autre aménagement de peine dans les mêmes conditions par une décision spécialement motivée « faisant état de la non-nécessité d’une expertise au regard des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur ».

Il n’en demeure pas moins que l’application immédiate de la nouvelle rédaction de l’article 712-21 du code de procédure pénale a posé des difficultés transitoires qu’il aurait sans doute été souhaitable et possible d’anticiper davantage : en effet, certains aménagements de peine qui avaient été préparés avant l’été et n’attendaient plus pour être mis en place qu’une décision du JAP à la fin du mois d’août ou au début du mois de septembre ont dû être différés, parfois de plusieurs mois d’après les indications données à votre rapporteur par les responsables de SPIP et les JAP, dans l’attente de l’expertise prévue par l’article 712-21 et faute d’expertise datant de moins de deux ans dans le dossier du condamné. Certains projets d’aménagements devant intervenir en fin de peine ont même dû être purement et simplement abandonnés, faute de pouvoir obtenir l’expertise avant la fin de la peine. Le retard ou l’annulation de ces projets d’aménagements a pu, dans certains établissements comme celui de Meaux-Chauconin, engendrer de l’incompréhension et des frustrations que les personnels ont dû canaliser.

Surtout, cette nouvelle disposition risque de poser également des difficultés sur le long terme, si les délais pour disposer d’une expertise ne sont pas très nettement améliorés. En effet, certaines juridictions ont indiqué que les délais pouvaient atteindre trois mois, en raison d’un nombre d’experts psychiatres insuffisant dans le ressort du tribunal. De tels délais reviennent de facto à priver de toute possibilité d’aménagement les condamnés à de très courtes peines, ou font perdre à l’aménagement une partie de son attrait si l’expertise ne peut être remise au JAP qu’à une date trop proche de la libération théorique.

L’objectif de cette exigence d’expertise n’étant pas de freiner les aménagements de peine, mais de permettre au JAP de disposer au moment de sa décision de tous les éléments d’information, notamment psychiatriques, afin de pouvoir assortir, le cas échéant, la mesure d’aménagement d’une injonction de soins, il importe de trouver rapidement une solution pour remédier à cette difficulté pratique de l’insuffisance du nombre d’experts. Aussi la mission souhaite-t-elle que le ministère de la justice engage rapidement une concertation avec les représentants des psychiatres pour permettre d’augmenter le nombre d’experts, par exemple en rendant la fonction plus attractive. Cette augmentation du nombre d’experts devra aboutir à une réduction significative du délai de réalisation de l’expertise, afin de ne pas entraver la mise en place des aménagements de peine.

Proposition n° 44

Pour les infractions pour lesquelles le suivi socio-judiciaire est encouru, garantir que l’expertise préalable à un aménagement de peine soit réalisée dans un délai raisonnable.

3. Étendre les possibilités d’aménagements de peine

Outre la revitalisation des dispositifs d’aménagements de peine existants, le développement des aménagements de peine suppose aussi une extension des possibilités d’aménagements. Les possibilités d’aménagements peuvent être étendues par trois mesures : l’élargissement du champ d’application de l’article 723-15 du code de procédure pénale aux peines d’emprisonnement inférieures ou égales à deux ans, l’élargissement des critères d’octroi de la semi-liberté et de la libération conditionnelle et la modification de la procédure de la NPAP pour permettre son développement.

a) Élargir le champ d’application de l’article 723-15 du code de procédure pénale aux peines d’emprisonnement inférieures ou égales à deux ans

L’article 723-15 du code de procédure pénale prévoit que le JAP doit, préalablement à la mise à exécution à l’encontre d’une personne non incarcérée de toute peine d’emprisonnement ou d’un reliquat de peine inférieure ou égale à un an, convoquer le condamné en vue de « déterminer les modalités d'exécution de sa peine en considération de sa situation personnelle ». Ce n’est qu’en cas de refus de la personne condamnée, d’impossibilité de mettre en place un aménagement ou d’urgence à mettre la peine à exécution qu’une peine inférieure ou égale à un an devra être exécutée en détention.

Cette durée maximale d’un an d’emprisonnement a été retenue, lors de l’adoption de la loi du 9 mars 2004, comme étant le maximum de ce qui pouvait être considéré comme une courte peine. En pratique, les JAP et les SPIP ont tendance à considérer que les peines comprises entre un et deux ans constituent également des courtes peines, dont l’exécution aménagée pourrait, dans certains cas, être préférable à l’exécution en détention. Compte tenu de l’utilité avérée des aménagements de peine, la mission est favorable à l’extension du principe de l’aménagement aux peines comprises entre un et deux ans d’emprisonnement.

Un écueil devra cependant être évité dans la mise en place de ces aménagements des peines comprises entre un et deux ans d’emprisonnement, celui d’une durée excessive du placement sous surveillance électronique. En effet, les interlocuteurs de la mission ont tous signalé la difficulté particulière pour un condamné à être « son propre geôlier » (45) pendant une durée dépassant quatre à six mois. Passé cette durée, les condamnés ont de plus en plus de mal à supporter cette autocontrainte et les incidents tendent à se multiplier, en dépit souvent d’une amélioration générale de leur situation. Dès lors, les magistrats de l’application des peines devront prendre garde à éviter ces placements sous surveillance électronique trop longs et préférer, lorsque cela sera possible, la mise en place d’un parcours d’aménagement allant du régime le plus contraignant au régime manifestant la plus grande confiance : ainsi, un condamné pourra commencer l’exécution de sa peine sous le régime de la semi-liberté, la poursuivre en placement sous surveillance électronique et l’achever sous le régime de la libération conditionnelle.

Enfin, compte tenu de l’augmentation sensible que connaîtra le volume des courtes peines aménageables selon la procédure de l’article 723-15 du code de procédure pénale, la mission estime que la procédure suivie devant le JAP devra être allégée pour les très courtes peines d’emprisonnement d’une durée inférieure à six mois. Par exemple, pour toutes les peines inférieures à six mois, la mesure proposée par le SPIP pourrait être considérée comme acceptée dès lors que le parquet ne s’y oppose pas.

Proposition n° 45

Élargir le champ d’application de l’article 723-15 du code de procédure pénale aux peines d’emprisonnement inférieures ou égales à deux ans et alléger la procédure d’aménagement de peine pour les peines d’emprisonnement inférieures ou égales à six mois.

b) Élargir les critères d’octroi de la semi-liberté et de la libération conditionnelle

Les articles 132-25 du code pénal et 729 du code de procédure pénale définissent dans des termes similaires les conditions que doit remplir une personne condamnée pour être admise au régime de la semi-liberté ou à la libération conditionnelle :

—  la semi-liberté peut être prononcée « à l'égard du condamné qui justifie, soit de l'exercice d'une activité professionnelle, soit de son assiduité à un enseignement ou une formation professionnelle ou encore d'un stage ou d'un emploi temporaire en vue de son insertion sociale, soit de sa participation essentielle à la vie de sa famille, soit de la nécessité de subir un traitement médical » ;

—  la libération conditionnelle peut être décidée à l’égard des condamnés qui « manifestent des efforts sérieux de réadaptation sociale, notamment lorsqu’ils justifient soit de l’exercice d’une activité professionnelle, soit de l’assiduité à un enseignement ou à une formation professionnelle ou encore d'un stage ou d’un emploi temporaire en vue de leur insertion sociale, soit de leur participation essentielle à la vie de famille, soit de la nécessité de subir un traitement, soit de leurs efforts en vue d’indemniser leurs victimes ».

À titre préliminaire, votre rapporteur tient à souligner que, bien que la formation professionnelle figure parmi les critères d’octroi tant de la semi-liberté que de la libération conditionnelle, la mission estime que les aménagements de peines accordés pour suivre des formations restent insuffisants. En lien avec sa proposition précédente de développement des places en centres pour peines aménagées (46), la mission estime indispensable que les efforts en faveur de la formation professionnelle soient développés, non seulement pendant l’incarcération mais aussi dans le cadre d’aménagements de peine.

Surtout, il importe de remarquer qu’une différence rédactionnelle importante existe entre ces deux textes : le critère principal de la libération conditionnelle réside dans les efforts sérieux de réadaptation sociale, les critères de l’activité professionnelle, de la formation ou de la participation à la vie de la famille étant des indices permettant au JAP ou au TAP d’apprécier le caractère sérieux des efforts de réadaptation. L’adverbe « notamment » indique que cette liste d’indices n’est pas exhaustive et que d’autres éléments peuvent être pris en compte pour qualifier les efforts sérieux de réadaptation. En revanche, l’octroi de la semi-liberté exige que la personne condamnée se trouve dans l’un des cas visés par l’article 132-25 du code pénal : les critères de l’activité professionnelle, de la formation ou de la participation à la vie de la famille ne sont pas des indices mais bel et bien des conditions que le condamné doit remplir.

De cette différence rédactionnelle, l’on pourrait conclure que la recherche d’emploi – dès lors qu’elle est sérieuse et concrétisée par des démarches dont le condamné peut justifier – peut être prise en compte comme gage de réadaptation sociale, tandis qu’une semi-liberté ne saurait être accordée à un détenu effectuant une telle recherche. Dans les faits, cette différence de rédaction ne se traduit pas par une différence significative dans les jurisprudences des juridictions de l’application des peines : la recherche d’emploi est généralement considérée comme une garantie insuffisante pour justifier l’octroi tant d’une semi-liberté que d’une libération conditionnelle, même si certains JAP admettent parfois accorder
– contra legem – des semi-libertés pour recherche d’emploi.

Arguant du fait que « le statut de demandeur d’emploi est un statut social reconnu, non marginal et (malheureusement) courant » (47), un certain nombre de JAP et de SPIP demandent que les critères d’octroi de la semi-liberté et de la libération conditionnelle soient étendus à la recherche d’emploi. La mission estime cet argument recevable : dans le contexte socio-économique actuel, une recherche d’emploi active peut être le signe d’une réelle volonté d’insertion, tout autant que le suivi d’une formation ou d’un traitement. En effet, un condamné peut ne pas avoir besoin de formation préalablement à la recherche d’un emploi ni avoir besoin de suivre un traitement, mais peut avoir simplement besoin de temps et d’une certaine liberté de mouvement pour accomplir des démarches de recherche d’emploi. En outre, le caractère sérieux des démarches entreprises peut être contrôlé par le travailleur social du SPIP chargé du suivi de la mesure et par le JAP à qui il en sera rendu compte. Dans la mesure où elle peut éviter une « sortie sèche » et donc permettre la mise en place d’un accompagnement et d’un contrôle du condamné, l’extension des critères d’attribution de la SL et de la LC à la recherche d’emploi est regardée tout à fait favorablement par la mission.

Si, compte tenu de la différence de rédaction entre les deux articles, la modification de l’article 729 du code de procédure pénale n’apparaît pas totalement indispensable – les LC pour recherche d’emploi étant déjà juridiquement possibles – elle apparaît cependant souhaitable dans un souci de clarté et de maintien de la cohérence entre les deux dispositifs. La mission préconise donc la modification des articles 132-25 du code pénal et 729 du code de procédure pénale pour permettre l’octroi des mesures de semi-liberté et de libération aux demandeurs d’emploi.

Proposition n° 46

Élargir les critères d’octroi de la semi-liberté et de la libération conditionnelle à la recherche d’emploi.

c) Réformer la NPAP pour permettre son développement

Dans le but de limiter les « sorties sèches », la loi du 9 mars 2004 a créé une nouvelle procédure d’aménagement de peine dite « NPAP », dont les conditions et les règles de procédure sont définies par les articles 723-20 à 723-28 et D. 147-10 à D. 147-30 du code de procédure pénale. L’objectif de cette procédure était, pour les détenus approchant de leur fin de peine sans avoir demandé ou obtenu d’aménagement de peine, de créer un « sas de sortie », afin de faire en sorte que le plus grand nombre possible de condamnés sortent dans le cadre d’un aménagement.

La NPAP s’adresse aux condamnés à des peines comprises entre six mois et deux ans auxquels il reste trois mois d'emprisonnement à subir et aux condamnés à des peines comprises entre deux et cinq ans auxquels il reste six mois d'emprisonnement à subir. Pour chacun de ces condamnés, le SPIP doit examiner leur dossier « afin de déterminer la mesure d'aménagement de la peine la mieux adaptée à leur personnalité ». Après instruction du dossier, le directeur saisit le JAP d’une proposition d’aménagement, que ce dernier peut soit homologuer soit refuser d’homologuer dans un délai de trois semaines. À défaut de réponse du JAP dans ce délai, le directeur du SPIP peut, après notification au JAP et au procureur de la République, « décider de ramener à exécution la mesure d’aménagement ». Le procureur de la République peut dans un délai de vingt-quatre heures former un recours suspensif contre la mesure, tandis que le JAP peut soit substituer à la mesure décidée une autre mesure, soit la compléter ou la modifier.

Malgré son objectif louable, la NPAP n’a pas connu le succès escompté : le nombre d’aménagements accordés en application de cette procédure a reculé entre 2005 et 2006, passant de 450 à 374 aménagements, alors que dans le même temps le nombre total d’aménagements augmentait sensiblement. En 2006, les aménagements prononcés sur le fondement de la NPAP ont représenté moins de 2 % de l’ensemble des aménagements. Le début de l’année 2007 confirme la faible utilisation de la procédure : au cours des cinq premiers mois de l’année, la NPAP a donné lieu à 161 aménagements, soit à peine plus qu’au cours des cinq premiers mois de 2006 (136 mesures).

Les reproches adressés à la NPAP sont de deux ordres : d’une part, la procédure est jugée trop lourde et formaliste ; d’autre part, elle interviendrait trop tardivement dans l’exécution de la peine pour être véritablement incitative pour le détenu.

—  La lourdeur de la procédure de la NPAP a été signalée par l’ensemble des responsables de SPIP rencontrés par votre rapporteur. Certaines simplifications ont été apportées à la procédure par le décret du 3 mai 2007 (48), mais la procédure demeure indéniablement trop complexe pour être couramment et largement appliquée. Elle suppose en effet l’envoi de nombreuses lettres recommandées avec accusé de réception par les SPIP et impose de multiples allers et retours entre le SPIP, le condamné, le JAP et le ministère public.

Le SPIP doit recueillir le consentement écrit du condamné, avant de formuler une proposition au JAP ; s’il décide de ne pas présenter de proposition, le SPIP doit en informer le condamné par écrit (49), qui est en pratique adressé par lettre recommandée avec accusé de réception bien que les textes ne l’exigent pas. La requête doit être transmise au JAP par lettre recommandée avec accusé de réception, par remise contre récépissé au magistrat ou à son greffe ou par télécopie avec accusé de réception « si l’importance du dossier le permet » (50), ce qui est en pratique rarement le cas. En cas de silence du JAP à l’expiration du délai de trois semaines, la décision du SPIP de mettre à exécution la mesure d’aménagement doit être notifiée au JAP et au procureur de la République selon les mêmes formes que la proposition (51). Si, en raison d’un élément nouveau, le directeur du SPIP décide de ne pas ramener la mesure d’aménagement à exécution, il doit à nouveau en informer le condamné par écrit (52).

Le SPIP n’étant pas un requérant ordinaire auprès du JAP mais un partenaire privilégié, la mission estime ce formalisme des lettres recommandées avec accusé de réception superflu. Une transmission des requêtes et informations entre le SPIP et le JAP par voie électronique, via le logiciel APPI, serait plus efficace et plus rapide, à condition que celui soit adapté, le cas échéant, pour prévoir un mécanisme d’alerte lors d’un envoi de requête ou d’information. À l'égard du condamné, par définition détenu, une remise par un travailleur social du SPIP ou par un membre de l’établissement contre signature de l’écrit l’informant de la proposition ou de la décision du SPIP serait suffisante pour garantir son information et, le cas échéant, la possibilité de contester la décision.

—  L’autre raison invoquée pour expliquer le faible succès rencontré par la NPAP tient à la tardiveté de la possibilité de sa mise en œuvre. Cette tardiveté induit une faible attractivité de l’aménagement pour le condamné, mais aussi un faible intérêt de la mesure en termes de prévention de la récidive en raison de la brièveté du suivi.

Selon les informations fournies à votre rapporteur, plus des deux tiers des condamnés éligibles refusent d’entrer dans le processus de la NPAP, préférant sortir sans contrainte à la fin de leur peine que de sortir trois ou six mois plus tôt avec des obligations. Pour le condamné, le poids de l’aménagement n’est considéré comme « rentable » que s’il lui permet un gain significatif sur son temps de détention. Or un gain de trois mois de détention sur une peine d’emprisonnement de deux ans n’est pas perçu par une majorité de condamnés comme suffisamment incitatif. Pour regrettable qu’elle soit, cette attitude n’en est pas moins compréhensible ; elle est révélatrice du fait que les mesures d’aménagement sont perçues par les détenus comme très contraignantes, gage de leur efficacité.

En termes de prévention de la récidive, l’intérêt de la NPAP est aussi perfectible. Trois mois de semi-liberté, de placement extérieur ou de placement sous surveillance électronique constituent une durée de suivi significative pour une personne condamnée à six mois d’emprisonnement ; en revanche, si la peine prononcée était de deux ans, trois mois de suivi apparaissent bien courts pour assurer un accompagnement et un encadrement d’un condamné qui aura passé, compte tenu du crédit de réductions de peine, plus de quinze mois en détention auparavant. De même, un accompagnement de six mois pour un détenu condamné à une peine de cinq ans d’emprisonnement apparaît trop court pour une personne qui a accompli trois ans et demi de détention.

Pour ces deux raisons, la mission propose d’avancer le moment de la peine auquel le détenu devient éligible à la NPAP. Pour les condamnés à des peines comprises entre six mois et deux ans, la NPAP pourrait intervenir dans les six derniers mois de la peine au lieu des trois derniers actuellement. Pour les condamnés à des peines comprises entre deux et cinq ans, elle interviendrait dans les douze derniers mois de la peine au lieu des six derniers aujourd’hui.

Proposition n° 47

Relancer la nouvelle procédure d’aménagement de peine :

—  en simplifiant la procédure ;

—  en éloignant la date d’éligibilité à la NPAP de la fin de peine.

D. FACILITER L’EXÉCUTION DE LA PEINE DE TRAVAIL D’INTÉRÊT GÉNÉRAL

La peine de travail d’intérêt général est sans doute la mieux connue des peines alternatives à l’emprisonnement. Après plusieurs années consécutives de baisse, le nombre de TIG prononcés a commencé à progresser de nouveau à la suite de la loi du 9 mars 2004, passant de 10 225 peines prononcées en 2004 à 15 677 en 2006.

Le rapport de M. Jean-Luc Warsmann sur les peines alternatives à la détention, les modalités d’exécution des courtes peines, la préparation des détenus à la sortie de prison avait proposé de lancer un « programme national de relance du TIG » (53). Si certaines préconisations formulées par ce rapport n’ont malheureusement pas été suivies d’effet, d’autres en revanche ont été reprises par la loi du 9 mars 2004 et sont sans doute à l’origine de cette remontée du nombre de TIG prononcés. Ainsi, le condamné à une peine de TIG reçoit, à l’issue de l’audience ou lorsqu’il se présente au BEX, une convocation devant le SPIP dans un délai de 10 à 30 jours, afin de commencer au plus vite l’exécution du TIG. Ont également été adoptées la possibilité pour la juridiction de jugement de fixer l’emprisonnement encouru en cas de violation des obligations résultant du TIG et la possibilité pour le JAP de convertir les peines d’emprisonnement d’une durée inférieure ou égale à six mois en sursis assorti de l’obligation d’accomplir un TIG.

Par ailleurs, la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance a, dans le but d’augmenter le nombre de places de TIG disponibles, étendu le champ des organismes susceptibles d’accueillir des personnes condamnées à un TIG aux « personnes morales de droit privé chargées d’une mission de service public ».

Cependant, si les principaux obstacles juridiques au prononcé et à la mise à exécution rapide des TIG ont été levés, et si l’élargissement par la loi du 5 mars 2007 des catégories de personnes pouvant accueillir des personnes condamnées à un TIG ne peut qu’être approuvé, des difficultés pratiques subsistent dans leur mise à exécution effective : le nombre de places de TIG doit être augmenté et les postes offerts doivent être diversifiés, et la procédure d’habilitation doit être allégée.

1. Accroître le nombre de places et diversifier les postes de TIG

Les JAP et les SPIP entendus par la mission sont unanimes sur ce point : le nombre de places de TIG n’est pas suffisant pour permettre une exécution suffisamment rapide de la mesure. De plus, les places de TIG ne sont pas assez diversifiées ni dans leur contenu ni dans leurs modalités d’exécution. Les travaux d’entretien ou de réparation, souvent peu formateurs, restent les plus nombreux, tandis que les postes adaptés aux personnes relativement éloignées du marché du travail ou adaptés pour des femmes ne sont qu’exceptionnellement proposés. Les travaux pouvant être exécutés le soir ou pendant les congés de fin de semaine sont eux aussi trop rares, alors qu’ils seraient nécessaires pour des personnes disposant d’un emploi ou suivant une formation.

Les structures associatives accueillant des personnes condamnées à un TIG contribuent à l’exécution d’une mission de service public de la première importance. L’investissement des associations accueillant des personnes condamnées à un TIG et la qualité du travail qu’elles accomplissent doivent être signalés et reconnus. Compte tenu du temps et de l’énergie nécessaires pour constituer et pérenniser un réseau de partenaires susceptible d’accueillir des personnes condamnées à un TIG, il est indispensable que les SPIP disposent du temps et des moyens nécessaires pour assurer cette mission de prospection.

Si nombre de collectivités locales proposent des places de TIG, le nombre de celles accueillant effectivement des personnes condamnées à un TIG est beaucoup plus faible. En effet, lorsqu’elles sont sollicitées pour accueillir un tigiste, certaines collectivités invoquent régulièrement des difficultés passagères ou le profil de la personne proposée pour refuser de l’accueillir. En outre, un grand nombre de collectivités locales ainsi que la plupart des services de l’État ne proposent aucune place, ce que la mission considère comme une anomalie. Il est inconcevable que les personnes publiques ne participent pas à l’exécution de cette mission de service public.

L’exécution des peines constituant un élément de la prévention de la délinquance, les collectivités locales et les services de l’État doivent y prendre leur part. C’est la raison pour laquelle la mission propose que les contrats locaux de sécurité (CLS), qui peuvent être élaborés dans le cadre des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD), comprennent obligatoirement une disposition relative à l’accueil des personnes condamnées à un TIG par les collectivités et les services de l’État parties à ce contrat. Aux termes de l’article L. 2211-4 du code général des collectivités territoriales, un CLSPD doit être créé dans les communes de plus de 10 000 habitants et dans celles comprenant une zone sensible au sens de la loi du 4 février. Des conseils intercommunaux peuvent également être créés.

Le CLSPD, qui comprend, outre le maire de la commune, le préfet et le procureur de la République, le président du conseil général et des représentants des services de l'État désignés par le préfet, a notamment pour mission d’assurer « l'animation et le suivi du contrat local de sécurité » (54). Ce conseil comprend donc des représentants des personnes publiques susceptibles d’accueillir des personnes condamnées à un TIG et devrait, dans une perspective de prévention de la délinquance, intégrer dans les CLS une clause prévoyant que les services de l’État et les collectivités locales parties au contrat doivent proposer un nombre minimal de places de TIG, qui serait déterminé en fonction de la taille de la collectivité ou du service, et garantir l’accueil effectif des TIG lorsqu’ils sont sollicités par les SPIP, sauf motif impératif rendant cet accueil impossible.

Proposition n° 48

Inciter au développement dans les contrats locaux de sécurité de clauses prévoyant l’accueil de personnes condamnées à un TIG par les collectivités locales et les services de l’État.

2. Alléger la procédure d’habilitation à l’accueil de personnes condamnées à un TIG

Aux termes de l’article 131-8 du code pénal, les associations et, depuis la loi du 5 mars 2007, les personnes morales de droit privé chargées d’une mission de service public, doivent être habilitées à accueillir des personnes condamnées à un TIG. La procédure d’habilitation est définie par les articles R. 131-12 à R. 131-16 du code pénal. Les associations ou personnes morales de droit privé souhaitant obtenir l’habilitation doivent transmettre leur demande au JAP du ressort dans lequel elles envisagent de mettre en œuvre des travaux d’intérêt général. Celui-ci « procède à toutes diligences qu’il juge utiles » et « consulte le conseil départemental de prévention, qui a trois mois pour donner son avis ». Il communique ensuite la demande d’habilitation au président du tribunal, afin que l’assemblée générale des magistrats du siège et du parquet du tribunal statue sur la demande d'habilitation, après rapport du JAP et à la majorité des membres présents. L’habilitation accordée est valable pour une durée de trois ans. En cas d’urgence, le JAP peut, sur proposition ou après avis conforme du procureur de la République, habiliter provisoirement la personne morale, jusqu'à la décision de la prochaine assemblée générale.

Les JAP et les SPIP sont unanimes à dénoncer la lourdeur de cette procédure, qu’ils estiment aptes à dissuader certaines associations de demander l’habilitation. De fait, cette procédure est fréquemment contournée, la première habilitation étant presque systématiquement accordée en suivant la voie en principe réservée aux cas d’urgence : les JAP accordent eux-mêmes une habilitation provisoire qui est ensuite validée lors de l’assemblée générale suivante. En outre, l’utilité de cette procédure n’est pas démontrée, la pratique voulant que l’avis du JAP formulé devant l’assemblée générale soit toujours suivi, le contrôle sur l’aptitude du demandeur à accueillir des personnes condamnées à un TIG s’avérant purement formel.

Un allègement de la procédure d’habilitation à l’accueil de personnes condamnées à un TIG est donc nécessaire : l’habilitation devrait être accordée dans tous les cas pour une durée de trois ans par le JAP, qui en informerait le procureur de la République. Celui-ci pourrait, s’il l’estime nécessaire, saisir l’assemblée générale des magistrats du siège et du parquet du tribunal, soit au moment de l’octroi de l’habilitation, soit ultérieurement en vue de son retrait.

Proposition n° 49

Alléger la procédure d’habilitation à l’accueil de personnes condamnées à un TIG.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du jeudi 13 décembre 2007, la Commission a examiné les conclusions de la mission d’information sur l’exécution des décisions de justice pénale concernant les personnes majeures.

Après l’exposé du rapporteur, le Président Jean-Luc Warsmann a indiqué qu’après ce premier rapport d’étape, adopté à l’unanimité par la mission d’information, les travaux de cette dernière se poursuivront tout au long de la législature, notamment pour assurer le suivi des réponses qui seront apportées aux propositions présentées. Des thèmes d’étude méritent, par ailleurs, d’être approfondis, tels que les conditions d’exécution des suivis socio-judicaires, des mesures de travail d’intérêt général ou des sursis avec mise à l’épreuve. Dans ce cadre a été adressé aux différents départements un questionnaire visant à évaluer le fonctionnement des partenariats avec des instances privées, telles que les structures prenant en charge les stages de lutte contre les addictions. Il a relevé que certains centres d’alcoologie ne recevaient plus, par manque de moyens, de personnes condamnées par la justice et a regretté que des peines « intelligentes » deviennent en quelque sorte virtuelles, faute des moyens financiers nécessaires. Il a enfin rappelé qu’en janvier serait examiné le premier rapport du volet « mineurs » de la mission, établi par Mme Michèle Tabarot.

M. François Goulard a salué la qualité du rapport de M. Étienne Blanc dont les propositions nombreuses sont marquées par une démarche pragmatique et réaliste. Le rapport procède à une réelle évaluation du fonctionnement du service public de la Justice : il est en effet important que le législateur ne se contente pas de voter la loi pénale mais se soucie également des conditions dans lesquelles les peines prononcées sur le fondement de cette loi sont mises à exécution.

Trois points méritent d’être soulignés.

Le premier a trait au constat établi par le rapporteur de la défaillance du système informatique de la justice. M. François Goulard a rappelé que de telles difficultés ne sont malheureusement pas rares dans les grandes administrations. Les administrations publiques, telle celle du ministère des Finances qui a connu des soucis analogues, rencontrent des difficultés dans la mise en œuvre de leurs programmes informatiques faute de pouvoir recruter des personnels parfaitement qualifiés pour piloter ces outils, du fait des rigidités des modes de recrutement dans la fonction publique qui font prévaloir des logiques de corps. Le développement d’outils informatiques est donc aujourd’hui confié à des prestataires privés, sans réel contrôle public et au prix d’un grand gaspillage des deniers publics. Il serait utile de réfléchir aux moyens d’associer, au sein d’un partenariat public-privé, l’administration et un prestataire privé qui serait chargé de la conception, de la mise en œuvre et de la maintenance des outils informatiques, avec des obligations de résultats.

La deuxième remarque a trait à la déficience des huissiers de justice, constatée par la mission, en matière de contradictoire à signifier. Il a suggéré que soient en ces matières rapprochés les services de la Justice de ceux du Trésor, dont les huissiers, certes distincts des huissiers de Justice, savent pour leur part très bien repérer les contribuables qui sont redevables envers l’État. Reconnaissant l’originalité de sa suggestion, M. François Goulard a souhaité qu’elle soit étudiée pour améliorer la procédure de contradictoire à signifier.

M. François Goulard a enfin souligné l’importance cruciale de la question de l’effectivité du recouvrement des dommages et intérêts par les victimes d’infraction ; il s’agit d’une question d’intérêt public, qui relève aussi d’une politique sociale : pour toutes les affaires courantes, telles les destructions de véhicules, il est indispensable d’aider les victimes qui n’en ont pas les moyens à faire assurer le recouvrement de l’indemnisation.

Mme Delphine Batho a souligné que l’exécution des décisions de justice pénale est un domaine dans lequel le Parlement a déjà eu une influence importante, notamment s’agissant de la mise en œuvre des BEX. Elle a souhaité que les propositions du rapport de la mission rencontrent l’écoute du Gouvernement. Elle a regretté que s’agissant des mineurs, les mêmes progrès n’aient pas encore été constatés, comme le montrera le rapport du volet « mineurs » de la mission, qui sera présenté en janvier.

S’agissant des questions informatiques, elle a souligné le fait que le projet Cassiopée consiste dans une numérisation des documents existant sous forme papier et non en une réelle informatisation des procédures. Contrairement à M. Goulard, elle ne souhaite pas voir confier à des prestataires privés le soin de mettre en œuvre des programmes informatiques car, non spécialistes des procédures suivies par l’administration, ces prestataires pourraient mettre en œuvre des programmes inadéquats, comme cela a pu être le cas dans les services de santé. Il faut aussi prendre garde à ne pas mettre en œuvre des outils fondés sur des techniques dépassées, source d’un gâchis d’argent. Il est en revanche indispensable de prévoir l’instauration d’un numéro de procédure unique, qui suivrait la procédure des services de police et de gendarmerie à l’exécution de la peine. Une telle mesure permettrait d’avoir une réelle vision d’ensemble de la chaîne pénale et donnerait enfin aux chercheurs des données autorisant une réelle analyse des faits commis et de la réponse pénale qui y est apportée.

S’agissant de l’indemnisation des victimes, Mme Delphine Batho a déclaré partager le souhait de voir mieux indemnisées les victimes de dégradations volontaires de véhicules. Elle a rappelé qu’à la suite des événements de novembre 2005, de nombreuses collectivités locales ont mis en place des fonds d’indemnisation spécifiques.

Revenant sur les propositions de la mission en matière d’amélioration des conditions du travail et de la formation professionnelle en détention, elle a souhaité que la réflexion s’étende à l’ensemble du contenu de la peine, plaidant pour le développement d’une prise en charge de nature comportementale, à l’image de ce qui est pratiqué au Canada, qui enregistre de très bons résultats en matière de prévention de la récidive.

Après s’être réjoui de la qualité du travail de la mission, M. Arnaud Montebourg s’est demandé si les propositions relevant du domaine de la loi feraient l’objet d’une proposition de loi dans de brefs délais.

Il a indiqué que les propositions tendant à améliorer l’effectivité des décisions de justice et du versement des dommages et intérêts, impliquaient de s’interroger sur le rôle des huissiers de justice, étant précisé qu’aujourd’hui, la personne condamnée qui change de département échappe, dans les faits, aux obligations décidées par une juridiction. Il a estimé qu’une perte de confiance dans la profession d’huissier de justice pouvait être constatée.

Il a ajouté que l’amélioration de la mise en œuvre des décisions de justice reposait notamment sur le décloisonnement des différents fichiers contenant des données individuelles et qu’il n’était pas certain que les huissiers de justice soient les mieux à même d’effectuer cette tâche.

Il a jugé très important que la mission d’information ait traité du cas des victimes d’infractions pénales disposant de peu de moyens financiers, pour lesquelles l’effectivité de l’indemnisation de leur préjudice est primordiale.

Pour que les décisions de justice ne demeurent pas inappliquées, il a enfin estimé qu’il convenait de décloisonner les données individuelles et de mettre en place des outils informatiques vraiment opérationnels, dans le respect des principes fondamentaux auxquels doit tout particulièrement veiller la commission des Lois.

Le Président Jean-Luc Warsmann a rappelé que la détermination de la Commission de mener à bien ces réformes ne faisait pas de doute. Elle a d’ailleurs constitué cette mission d’information pour la durée de la législature afin de pouvoir assurer le suivi de ses propositions. Il conviendra donc de déposer prochainement une proposition de loi reprenant les propositions de la mission de nature législative.

Il a souligné que la non-exécution, ou l’exécution différée dans le temps, des décisions de justice rendait parfois la justice « virtuelle ». Il arrive même que des huissiers de justice conseillent à des victimes de ne pas engager de frais car les perspectives d’obtenir un dédommagement effectif sont dans certains cas inexistantes.

Il s’est enfin félicité du soutien unanime de la Commission à la proposition de la mission d’information tendant à améliorer l’indemnisation des victimes de dégradations de véhicules.

Sur la question de l’informatique, le rapporteur a souligné que la mission avait mesuré toute l’ampleur du problème et constaté que les responsabilités dans le domaine du pilotage des projets informatiques au sein du ministère de la justice étaient trop diffuses. Il a formulé le souhait que le projet Cassiopée ait enfin un pilote unique. Il a également indiqué que la proposition de la mission sur le dossier judiciaire unique était claire : ce dossier devra permettre à l’ensemble des acteurs de la chaîne pénale, des services de police à l’Administration pénitentiaire, non seulement de ne pas avoir à ressaisir à chaque étape de la procédure des informations déjà saisies en amont, mais aussi de disposer des pièces du dossier auxquelles ils doivent avoir accès.

En ce qui concerne les difficultés soulevées par l’absence de signification des décisions, le rapporteur a souligné que l’intérêt du justiciable commandait que la décision lui soit signifiée le plus rapidement possible et que la peine soit exécutée dans les meilleurs délais. Il est donc indispensable que des solutions, qui passeront notamment par la dématérialisation, soient trouvées pour que les significations de décisions ne soient plus différées comme elles le sont encore trop souvent actuellement.

Puis, conformément à l’article 145 du Règlement, la commission a autorisé le dépôt du rapport de la mission d’information en vue de sa publication.

SYNTHÈSE DES PROPOSITIONS

Reconnaître l’importance de l’exécution
des décisions de justice pénale

Proposition n° 1 :

Modifier les objectifs et les indicateurs fixés en application de la loi organique relative aux lois de finances, afin de permettre une évaluation quantitative et qualitative efficace de l’exécution des décisions de justice pénale.

Proposition n° 2 :

Créer un code de l’exécution des peines.

Favoriser la présence des personnes prévenues à l’audience
et améliorer l’efficacité de la signification des décisions

Proposition n° 3 :

Encourager la présence des prévenus à l’audience :

—  en prévoyant une majoration du droit fixe de procédure à 180 euros si le condamné n’a pas comparu personnellement à l’audience, dès lors que la citation a été délivrée à personne ou qu’il est établi que le prévenu a eu connaissance de la citation, sauf s’il est jugé en son absence dans les conditions prévues par l’article 411, alinéas 1 et 2, du code de procédure pénale (demande par lettre à être jugé en son absence et avocat présent et entendu) ;

—  en faisant figurer les informations concernant cette majoration sur les citations à comparaître.

Proposition n° 4 :

Dématérialiser les échanges d’informations entre les juridictions et les huissiers de justice avant le 31 décembre 2009.

Proposition n° 5 :

Revaloriser les sommes allouées aux huissiers de justice pour les significations effectuées en matière pénale.

Proposition n° 6 :

Imposer aux huissiers de justice un délai de 45 jours pour accomplir les diligences nécessaires à la signification des décisions, à l’expiration duquel la signification peut être effectuée par le ministère public ou par un officier ou agent de police judiciaire.

Proposition n° 7 :

Simplifier les modalités de signification des décisions pénales :

—  en permettant aux huissiers de justice de laisser un avis de passage ;

—  en permettant aux huissiers de justice de recevoir les personnes condamnées pour procéder à la signification.

Proposition n° 8 :

Supprimer l’obligation pour le parquet de la juridiction ayant prononcé la décision de transmettre la demande de signification au parquet du domicile de la personne condamnée.

Donner une réelle efficacité à la chaîne pénale

Proposition n° 9 :

Dématérialiser la chaîne pénale :

—  en ayant achevé l’installation Cassiopée dans les juridictions non franciliennes au plus tard le 31 décembre 2009 ;

—  en installant Cassiopée dans les juridictions franciliennes avant le 30 juin 2010.

Proposition n° 10 :

Renforcer l’information et la formation des utilisateurs de Cassiopée

Proposition n° 11 :

Assurer, avant le 31 décembre 2009, la communication de Cassiopée avec les applications utilisées par tous les acteurs de la chaîne pénale :

—  Gendarmerie nationale : JUDEX et Icare ; police nationale : Ardoise et STIC ;

—  Service du casier judiciaire national ;

—  Trésor public ;

—  Huissiers de justice ;

—  JAP et SPIP : APPI ;

—  Administration pénitentiaire : GIDE.

Proposition n° 12 :

Mettre en place le dossier judiciaire unique avant le 31 décembre 2009.

Proposition n° 13 :

Doter les greffes correctionnels de personnels suffisants pour enregistrer les décisions en temps réel :

—  en améliorant les moyens en personnels des greffes correctionnels ;

—  en recourant aux recrutements de vacataires en fonction des besoins des juridictions.

Proposition n° 14 :

Enregistrer les décisions en temps réel, en vue de les transmettre au casier judiciaire dans un délai maximal de 15 jours à compter de leur prononcé avant le 31 décembre 2009.

Proposition n° 15 :

Enregistrer les décisions au casier judiciaire national dans un délai maximal de 15 jours à compter de la réception de la décision.

Améliorer la mise à exécution et les conditions
d’exécution des décisions de justice pénale

Proposition n° 16 :

Rendre effectif le droit de la victime à obtenir le paiement des dommages-intérêts prononcés :

—  en accordant aux victimes saisissant le service d’aide au recouvrement une avance sur le montant de l’indemnisation dans la limite d’un montant fixé, dans un premier temps, à 3 000 euros ;

—  en prévoyant la saisine automatique et gratuite du service d’aide au recouvrement, si la partie civile le souhaite, lorsque le condamné n’a pas payé les dommages-intérêts auxquels il a été condamné dans les trente jours de la décision définitive.

Proposition n° 17 :

Mettre en place un système d’indemnisation des propriétaires de véhicules victimes d’une destruction volontaire de leur bien, leur permettant d’obtenir sans frais une indemnisation par la CIVI dans la limite d’un plafond de 5 000 euros.

Proposition n° 18 :

Installer un BEX dans les six juridictions n’en ayant pas encore créé avant le 31 décembre 2008.

Proposition n° 19 :

Généraliser les BEX à toutes les audiences.

Proposition n° 20 :

Évaluer l’utilité des BEX en appel pour pouvoir décider leur généralisation.

Proposition n° 21 :

Permettre le bon fonctionnement des BEX, en y affectant les personnels nécessaires, compte tenu notamment des contraintes liées à l’amplitude horaire d’ouverture du BEX.

Proposition n° 22 :

Permettre un fonctionnement fluide des BEX en permettant la présentation des condamnés au fur et à mesure de l’audience.

Proposition n° 23 :

Fluidifier les relations entre les juridictions et les trésoreries :

—  en dématérialisant la transmission des informations entre les trésoreries et les tribunaux avant le 31 décembre 2009 ;

—  en reconnaissant au relevé de condamnation pénale valeur de titre exécutoire pour permettre l’enregistrement immédiat du paiement de l’amende par la trésorerie ;

—  en mettant en place une information mutuelle entre les trésoreries et les tribunaux sur le paiement de l’amende.

Proposition n° 24 :

Achever la signature des conventions entre les trésoreries et les tribunaux pour permettre la généralisation de l’installation des urnes de paiement par chèque et des terminaux de carte bancaire dans tous les BEX, au plus tard le 31 décembre 2008.

Proposition n° 25 :

Permettre le paiement des amendes en espèces auprès des BEX :

—  en créant auprès des BEX des régies de recettes en application de l’article R. 946-4 du code l’organisation judiciaire ;

—  en attribuant aux greffiers des BEX une indemnité de responsabilité en contrepartie de leurs compétences de régisseurs. ;

—  en sécurisant les locaux des BEX.

Proposition n° 26 :

Permettre aux services du Trésor public d’accorder des remises gracieuses sur le paiement des amendes forfaitaires majorées.

Proposition n° 27 :

Permettre le recours à l’opposition au transfert du certificat d’immatriculation lorsque le domicile du débiteur est celui enregistré au fichier national des immatriculations.

Proposition n° 28 :

Donner accès au Fichier national des permis de conduire au BEX.

Proposition n° 29 :

—  Permettre le paiement dans tous les cas du droit fixe de procédure au BEX, même lorsque le redevable n’a pas été condamné à une amende ;

—  Prévoir le bénéfice de la réduction de 20 % sur le montant du droit fixe de procédure en cas de paiement volontaire dans un délai d’un mois à compter du prononcé du jugement.

Proposition n° 30 :

Encourager le recrutement des enseignants en milieu pénitentiaire :

—  en facilitant leur recrutement ;

—  en revalorisant l’indemnité d’enseignement en milieu pénitentiaire ;

—  en faisant connaître l’activité d’enseignement en milieu pénitentiaire.

Proposition n° 31 :

Faciliter l’accès à l’enseignement et à la formation pour les détenus occupant un emploi par l’organisation de cours du soir.

Proposition n° 32 :

Permettre l’ouverture d’ateliers par des entreprises d’insertion pour les détenus les plus éloignés de l’emploi.

Favoriser le développement des aménagements de peine
et des peines alternatives à l’emprisonnement

Proposition n° 33 :

Accélérer la préparation des aménagements de peine pour les personnes incarcérées :

—  en faisant réaliser par le SPIP dans les 10 jours suivant l’incarcération un rapport transmis au JAP sur la situation de la personne incarcérée ;

—  en faisant davantage du projet d’exécution des peines l’instrument de la préparation des aménagements de peine au plus près de l’incarcération ;

—  en expérimentant les projets d’exécution des peines dans les quartiers condamnés des maisons d’arrêt, et prioritairement dans les quartiers courtes peines.

Proposition n° 34 :

Donner force exécutoire au relevé de condamnation pénale pour permettre la mise en place immédiate d’un aménagement de peine par le JAP ou la mise à exécution immédiate d’une peine alternative à l’emprisonnement, même en l’absence de jugement dactylographié.

Proposition n° 35 :

Permettre aux SPIP de proposer, sauf opposition du JAP :

—  les modifications des horaires des détenus en semi-liberté, en placement à l’extérieur ou placés sous surveillance électronique ;

—  le lieu d’affectation du TIG en fonction des orientations fixées par le JAP ;

—  le renouvellement des permissions de sortir.

Proposition n° 36 :

Perfectionner les modes d’intervention des SPIP :

—  en favorisant le développement des modes d’intervention innovants expérimentés localement ;

—  en faisant aboutir le projet de référentiel de bonnes pratiques avant le 30 juin 2008.

Proposition n° 37 :

Poursuivre l’augmentation des effectifs des SPIP de 25 % dans les cinq prochaines années.

Proposition n° 38 :

Développer et améliorer la communication entre les JAP et les SPIP :

—  en renforçant le rôle des conférences régionales semestrielles sur le développement des aménagements de peine et des alternatives à l’incarcération ;

—  en améliorant l’information des JAP sur les possibilités d’aménagement de peine ;

—  en utilisant pleinement les potentialités du logiciel APPI.

Proposition n° 39 :

Alléger et rendre plus efficaces les obligations d’information des SPIP en direction des JAP, en simplifiant et en uniformisant la présentation des rapports semestriels.

Proposition n° 40 :

Adapter le nombre de places de semi-liberté aux besoins locaux, en privilégiant les centres de semi-liberté aux quartiers de semi-liberté.

Proposition n° 41 :

Porter à 500 le nombre de places en quartiers courtes peines et en centres pour peines aménagées avant le 31 décembre 2010.

Proposition n° 42 :

Expérimenter un dispositif de veille sociale judiciaire pour permettre la mise en place de solutions d’hébergement d’urgence et rendre possible l’aménagement des peines dès leur prononcé.

Proposition n° 43 :

Favoriser la préparation des aménagements de peines au plus près du début de l’exécution des peines d’emprisonnement.

Proposition n° 44 :

Pour les infractions pour lesquelles le suivi socio-judiciaire est encouru, garantir que l’expertise préalable à un aménagement de peine soit réalisée dans un délai raisonnable.

Proposition n° 45 :

Élargir le champ d’application de l’article 723-15 du code de procédure pénale aux peines d’emprisonnement inférieures ou égales à deux ans et alléger la procédure d’aménagement de peine pour les peines d’emprisonnement inférieures ou égales à six mois.

Proposition n° 46 :

Élargir les critères d’octroi de la semi-liberté et de la libération conditionnelle à la recherche d’emploi.

Proposition n° 47 :

Relancer la NPAP :

—  en simplifiant la procédure ;

—  en éloignant la date d’éligibilité à la NPAP de la fin de peine.

Proposition n° 48 :

Inciter au développement dans les contrats locaux de sécurité de clauses prévoyant l’accueil de personnes condamnées à un TIG par les collectivités locales et les services de l’État.

Proposition n° 49 :

Alléger la procédure d’habilitation à l’accueil de personnes condamnées à un TIG.

LISTE DES DÉPLACEMENTS
DE LA MISSION D’INFORMATION

• 30 août 2007

Tribunal de grande instance d’Annecy

– M. Dominique Charvet, premier président de la cour d’appel de Chambéry

– M. Denis Robert-Charrerau, procureur général près la cour d’appel de Chambéry

– M. Pascal Vencent, président

– M. Philippe Drouet, procureur de la République

– M. Pierre Filliard, substitut du procureur en charge de l'exécution des peines

– Mme Frédérique Pointe, greffière en chef du Parquet

– Mme Blandine Chillet, greffière chargée de l'exécution des peines

Trésor public

– M. Pascal Camus, chef de poste de la Trésorerie d’Annecy

– Mme Anita Lechaux, chef du service recouvrement de la Trésorerie générale de Haute-Savoie

Service pénitentiaire d’insertion et de probation de Haute-Savoie, antenne d’Annecy

– M. Luc Duwat, directeur

– Mme Francine Maréchal, conseillère d'insertion et de probation

– Mme Sandra Dupont, conseillère d'insertion et de probation

– Mlle Jennifer Cursat, contractuelle

– Mme Brigitte Folliguet, conseillère d'insertion et de probation, antenne de Bonneville

– Mlle Johanne Thouvenin, conseillère d'insertion et de probation, antenne de Bonneville

– M. Frédéric Subileau, directeur du SPIP, antenne de Bonneville

Tribunal de grande instance de Bonneville

– M. Dominique Martin Saint-Léon, président

– Mme Aude Enderlin, substitut du procureur

– Mme Valérie Bouvier, directrice de greffe

– Mme Alexandra Bessodes, greffière en chef adjoint

– Mme Corine Pardo, greffière chargée de l’exécution des peines

Maison d’arrêt de Bonneville

– M. Régis Pascal, chef d’établissement

– M. Jean-Luc Golob, chef de détention

• 21 septembre 2007

Tribunal de grande instance de Grasse

– M. Jacques Lameyre, président

– M. Marc Desert, procureur de la République

– M. Michaël Darras, substitut du procureur

– M. Alain Guimbard, substitut du procureur

– Mme Caroline Gontran, vice-présidente chargée de l’application des peines

– Mme Estelle Sablayrolles, juge des enfants

– Mme Claude Danner, greffière en chef

– Mme Pascale Darras, greffière en chef

Tribunal de grande instance de Nice

– M. Jean-Michel Hayat, président

– M. Éric de Montgolfier, procureur de la République

– Mme Sylvie Tondu, vice-présidente chargée de l’application des peines

– Mme Nadège Mahé, présidente du tribunal pour enfants

– M. Côme Jacqmin, juge des enfants

– Mme Laurie Duca, juge des enfants

– Mme Chantal Daouze, chef de service de l’unité éducative de Nice-Est

– M. Alain Miraucourt, directeur du centre d’action éducative

Direction départementale de la jeunesse et des sports des Alpes-Maritimes

– M. Arnaud Wolf, directeur départemental

– M. Gérard Lanoir, directeur-adjoint

– M. Bernard Lecogne, directeur régional

Service pénitentiaire d’insertion et de probation des Alpes-Maritimes

– Mme Anne Gourier, directrice de l’antenne de Nice

• 24 septembre 2007

Tribunal de grande instance de Bobigny

– M. Philippe Jeannin, président

– M. François Molins, procureur de la République

– Mme Bénédicte Piana, première vice-présidente chargée du service pénal

– M. Patrick Poirret, procureur de la République adjoint

– M. Frédéric N’Guyen, vice-président chargé du service de l’application des peines

– Mme Barbara Kasparian, juge de l’application des peines

– M. Jean-Pierre Rosencsveig, vice-président chargé du tribunal pour enfants

– Mme Anne Dupuy, vice-présidente au tribunal pour enfants

– M. Fabien Dupuis, juge des enfants

– Mme Haffide Boulakkras, substitut du procureur chargé des mineurs

– Mme Bernadette Laurent, directrice du SPIP de Drancy

– Mme Mireille Stissi, directrice départementale de la Protection judiciaire de la jeunesse de Seine Saint-Denis

• 1er octobre 2007

Tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse

– Mme Dominique Rolin, présidente

– M. Jean-Paul Gandolière, procureur de la République

– M. Franck Taisne de Mullet, vice-procureur

– Mme Anne-Emmanuelle Bernard, juge de l’application des peines

– M. Jean Crollet, directeur de greffe

– M. Christian Gamelon, greffier en chef adjoint

• 4 octobre 2007

Tribunal de grande instance de Paris

– M. Jacques Degrandi, président

– M. Jean-Claude Marin, procureur de la République

– M. Bruno Laroche, premier vice-président en charge du service pénal

– Mme Françoise Van Schendel, vice-présidente responsable du service de l’application des peines

– Mme Florence Cassignard, vice-présidente chargée de l’application des peines

– Mme Françoise Chaponneaux, vice-procureur, chef de la section de l’exécution des peines

– Mme Naïma Rudloff, vice-procureur, chef de la section de traitement en temps réel

• 8 octobre 2007

Tribunal de grande instance de Reims

– M. Mario-Louis Craighero, président par intérim

– Mme Madeleine Simoncello, procureur de la République

– M. Georges Lateve, procureur-adjoint

– M. Vincent Dufourd, substitut du procureur

– Mlle Doriane Trombi, substitut du procureur

– M. Luc Puechberty, vice-président chargé de l’application des peines

– Mme Brigitte Langiny, juge des enfants

– Mme Delphine Jacquemet, juge des enfants

– Mme Laure Rivoiron, juge des enfants

– M. Claude Slodzian, directeur départemental de la Protection judiciaire de la jeunesse de la Marne

– M. Yossef Sekhiri, directeur du foyer d’action éducative

– M. Joël Bigayon, directeur de la maison d’arrêt de Reims

– Mme Nadine Delabre, directrice du SPIP de Châlons-en-Champagne

– M. Pascal Mohin, directeur du SPIP de Reims

– Mme Anne Delevallée, directrice de greffe

– M. Patrick Cernik, directeur de greffe adjoint

– M. Yohann Pettier, directeur de greffe adjoint

• 15 octobre 2007

Tribunal de grande instance de Rouen

– M. Bertrand Darolle, président

– M. Joseph Schmit, procureur de la République

– Mme Valérie de Saint-Félix, juge de l’application des peines

– Mlle Sylvie Dodon, greffière du service de l’exécution des peines

– M. Jean-François Filatre, greffier du service des audiences correctionnelles

– Mme Odile Marie-Saint-Germain, directrice du SPIP de Seine-Maritime

– Mme Slavic Bloch, directrice de l’antenne locale du SPIP de Rouen

– Mme Corine Autogue, vice-présidente du tribunal pour enfants

– Mme Marie-Valérie Albert, substitut du procureur chargé du service des mineurs

– Mme Séverine Cochet, greffière du service de l’exécution des peines

– Mme Raymonde Wawrzyniak, greffière du tribunal pour enfants

– Mme Mylène Flament, directrice des services de la protection judiciaire de la jeunesse

Centre éducatif fermé de Doudeville

– M. Xavier Mauratille, directeur départemental de la PJJ de Seine-Maritime

– M. Nicolas Dufort, directeur du centre

– M. Philippe Schindler, sous-directeur du centre

– Mme Colette Bloch, présidente de l’Association « Les Nids »

• 22 octobre 2007

Centre pénitentiaire de Meaux-Chauconin

– Mme Emmanuelle Jullien, directrice adjointe

– M. Jérémie Bosse Platière, directeur adjoint

– M. Alexis Hattinguais, chef de détention

– M. Hamid Karam, responsable local de l’enseignement

– M. Jean-François Descorps, chef d’unité privée (GEPSA)

– Mme Édith Donay, directrice d’insertion et de probation de Seine-et-Marne

– M. Raymond Jaubert, attaché d’administration et d’intendance

• 29 octobre 2007

Maison d’arrêt et centre de semi-liberté de Lyon

– Mme Danièle Boillée, directrice adjointe de la maison d’arrêt

– Mme Catherine Guignand, chef du département insertion et probation de la direction interrégionale des services pénitentiaires

– M. Alain Pompigne, directeur du SPIP du Rhône

– Mme Agnès Rauber, directrice adjointe du SPIP du Rhône

– M. Alain Choplin, directeur adjoint du centre de semi-liberté

Établissement pour mineurs de Meyzieu

– M. Paul Louchouarn, directeur interrégional adjoint des services pénitentiaires

– M. Philippe Juillan, chef d’établissement

– M. Jean-Christophe Senez, directeur-adjoint

– Mme Maryline Bruchon, chef du département sécurité et détention à la direction interrégionale des services pénitentiaires de Lyon

– Mme Marie-Thérèse Zossranieri, directrice du service éducatif

Tribunal de grande instance de Lyon

– M. Pierre Garbit, président

– M. Xavier Richaud, procureur de la République

– M. Michel Allaix, premier vice-président

– M. Edmond Duclos, vice-président chargé de l’application des peines

– M. Jean Varaldi, vice-procureur

– Mme Anne Boisgibault, vice-procureur

– Mme Jacqueline Denolly, greffière en chef

• 12 novembre 2007

Maison d’arrêt de Fresnes

– M. Bruno Hauron, directeur

– Mme Séverine Duter, directrice adjointe

– M. Philippe Aubry, chef de détention

– M. Claude Charamathieu, directeur du SPIP du Val-de-Marne

– M. Nicolas Guilliet, responsable local de l’enseignement

– Mme Céline Medjeber, responsable de la formation professionnelle

– M. Jean-Paul Salesse, responsable de la régie industrielle des établissements pénitentiaires

Centre de peines aménagées de Villejuif

– Mme Valérie Wirbel, directrice

– Mme Claudine Royer, vice-présidente chargée de l’application des peines du TGI de Créteil

– Mme Stéphanie Langlais, chef de service de l’antenne du SPIP de Villejuif

• 19 novembre 2007

Service du casier judiciaire national à Nantes

– M. Philippe Delarbre, sous-directeur de la Direction des affaires criminelles et des grâces, chef du service du casier judiciaire

– Mme Marie Lebras, chef du bureau des affaires juridiques

– Mme Joëlle Saunier, chef du bureau des affaires administratives et des ressources humaines

– M. Yves Batou, chef du bureau des affaires générales et traitements informatisés

– M. Laurent Rieuneau, chef du bureau des affaires informatiques

– M. Éric Serfass, chargé de mission

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES
PAR LA MISSION D’INFORMATION

Jeudi 13 septembre 2007

Ministère de la justice

Ÿ M. Marc Moinard, secrétaire général

Ÿ M. Jean-Marie Huet, directeur des affaires criminelles et des grâces

Ÿ M. Richard Dubant, chef du bureau de l’exécution des peines et des grâces

Ÿ M. Philippe Delarbre, chef du service du casier judiciaire national

Cour d’Appel de Bordeaux

Ÿ M. Pascal Faucher, vice-président placé auprès du Premier président

Jeudi 20 septembre 2007

Ÿ Mme Sophie Grimault, greffière, membre du Syndicat des greffiers de France

Jeudi 27 septembre 2007

Direction de la Protection judiciaire de la jeunesse

Ÿ M. Philippe-Pierre Cabourdin, directeur de la Protection judiciaire de la jeunesse

Ÿ M. Alain Birot, chef de l’inspection des services

Ÿ Mme Madeleine Mathieu, sous-directrice, missions de protection judiciaire et de l’éducation

Ÿ M. Denis Perrin, sous-directeur du pilotage et de l’optimisation des moyens

Association française des magistrats de la jeunesse et de la famille

Ÿ Mme Catherine Sultan, présidente

Ÿ Mme Martine de Maximy, vice-présidente

Jeudi 4 octobre 2007

Direction de l’Administration pénitentiaire

Ÿ M. Claude d’Harcourt, directeur de l’Administration pénitentiaire

Ÿ M. Laurent Ridel, sous-directeur des personnes placées sous main de justice, direction de l’Administration pénitentiaire

Ÿ M. Jean-Pierre Bailly, chef de bureau de politique sociale et d’insertion

Inspection générale de l’administration et Inspection générale des services judiciaires

Ÿ M. Yves Bertrand, inspecteur général de l’administration

Ÿ M. Dominique Luciani, inspecteur des services judiciaires

Ÿ M. Bruno Steinmann, inspecteur général adjoint des services judiciaires

Jeudi 11 octobre 2007

Syndicats de magistrats

Ÿ M. Bruno Thouzellier, président de l’union syndicale des magistrats

Ÿ Mme Emmanuelle Perreux, présidente du syndicat de la magistrature

Ÿ M. David de Pas, secrétaire général adjoint du syndicat de la magistrature

Ÿ M. Emmanuel Poinas, membre du bureau national du syndicat national des magistrats F.O.

Jeudi 25 octobre 2007

Association nationale des juges de l’application des peines

Ÿ M. Claude Gaultier, vice-président

Ÿ Mme Régine Morel, secrétaire générale

Observatoire national de la délinquance

Ÿ M. Alain Bauer, président

CNRS

Ÿ M. Pierre-Victor Tournier, directeur de recherche

Jeudi 8 novembre 2007

Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale « FNARS »

Ÿ Mme Nicole Maestracci, présidente de la Fédération

Ÿ Mme Juliette Laganier, chargée de mission

Fédération des Associations Réflexion Action Prison et Justice (FARAPEJ)

Ÿ M. Ange Legeard, président

Mercredi 14 novembre 2007

Ÿ M. Michel Franza, directeur général de l’Union nationale des Associations de sauvegarde de l’enfance, de l’adolescence et des adultes

Lundi 19 novembre 2007

Ÿ Maître Jean-Yves Le Borgne, président de l’Association des avocats pénalistes

Ÿ Maître Dominique Tricaud, avocat, membre du Conseil de l’ordre

Ÿ Maître Jean-Louis Keita, membre du Bureau de la Conférence des bâtonniers, ancien bâtonnier du barreau d’Aix-en-Provence

Jeudi 22 novembre 2007

Antenne des mineurs du barreau de Paris

Ÿ Maître Marie-Chantal Cahen

Direction générale de la comptabilité publique

Ÿ M. Étienne Effa, sous-directeur

Ÿ M. Alain Couderc, trésorier principal

Ÿ Mme Micheline Noslen, chef de secteur, pôle amendes

Mercredi 28 novembre 2007

Chambre nationale des huissiers de justice

Ÿ M. Guy Chezeaubernard, vice-président

Ÿ M. Jean-François Richard, trésorier

Ÿ M. Thierry Bary, délégué général

Jeudi 29 novembre 2007

Direction des services judiciaires

Ÿ M. Léonard Bernard de la Gâtinais, directeur des services judiciaires

Ÿ Mme Chantal Berger, sous-directrice, mission d’inspection des greffes

Syndicats des personnels de l’Administration pénitentiaire

Ÿ Mme Christine Joffre, secrétaire nationale de l’Union générale des services pénitentiaires-CGT

Ÿ M. Jérôme Marthouret, référent national pour les travailleurs sociaux pénitentiaires de l’Union générale des services pénitentiaires-CGT

Ÿ M. Paul Louchouarn, délégué régional du Syndicat national pénitentiaire Force-ouvrière-Direction (SNP-FO-Direction)

Ÿ M. Jean-Baptiste Peyrat, délégué régional du Syndicat national pénitentiaire Force-ouvrière-Direction (SNP-FO-Direction)

Ÿ M. Jean-Marc Saez, chargé de mission auprès du Syndicat national pénitentiaire Force-ouvrière-Direction (SNP-FO-Direction)

Ÿ M. Stéphane Barraut, secrétaire général adjoint de l’Union fédérale autonome pénitentiaire (UFAP)

Ÿ M. Claude Tournel, secrétaire général adjoint de l’Union fédérale autonome pénitentiaire (UFAP)

LISTE DES ABRÉVIATIONS UTILISÉES

AFPA Association pour la formation professionnelle des adultes

APPI Application des peines, probation et insertion (logiciel informatique utilisé par les JAP et les SPIP pour l’échange d’informations)

BEX Bureau de l’exécution des peines

CAP Commission de l’application des peines

CIVI Commission d’indemnisation des victimes d’infractions

CLS Contrat local de sécurité

CLSPD Conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance

CPA Centre pour peines aménagées

CPAL Comité de probation et d’assistance aux libérés

CRPC Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité

CSL Centre de semi-liberté

DRETFP Direction régionale de l’emploi, du travail et de la formation professionnelle

FNPC Fichier national des permis de conduire

JAP Juge de l’application des peines

LC Libération conditionnelle

NPAP Nouvelle procédure d’aménagement de peine

OTCI Opposition au transfert du certificat d’immatriculation

PEP Projet d’exécution de peine

PJJ Protection judiciaire de la jeunesse

PSE Placement sous surveillance électronique

QSL Quartier de semi-liberté

RCP Relevé de condamnation pénale

SL Semi-liberté

SME Sursis avec mise à l’épreuve

SMPR Service médico-psychologique régional

SPIP Service pénitentiaire d’insertion et de probation

TIG Travail d’intérêt général

TGI Tribunal de grande instance

UCSA Unité de consultation et de soins ambulatoire

ANNEXE : FORMULAIRES D’EXPLICATION REMIS AUX CONDAMNÉS PAR LE TGI DE BOGIGNY

1 La composition de cette mission figure au verso de la présente page.

2 () Cesare Beccaria, Traité des délits et des peines, Paris, 1773.

3 () M. Bruno Thouzellier, président de l’Union syndicale des magistrats, audition du 11 octobre 2007.

4 () Mme Emmanuelle Perreux, présidente du Syndicat de la magistrature, audition du 11 octobre 2007.

5 () M. Bernard Angels, Rapport d’information fait au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur l’enquête de la Cour des comptes portant sur le recouvrement des créances de contrôle fiscal et le recouvrement contentieux des amendes et des condamnations judiciaires, Sénat, Les rapports du Sénat, session ordinaire de 2006-2007, n° 381, déposé le 11 juillet 2007, p. 10.

6 () Paris, Évry, Créteil, Bobigny, Pontoise, Versailles et Nanterre.

7 () Données fournies par la direction des affaires criminelles et des grâces du ministère de la justice.

8 () Les deux rapports des commissions d’enquête de l’Assemblée nationale et du Sénat déposés en 2000 illustrent cet intérêt ponctuel pour les conditions d’exécution des peines d’emprisonnement ferme ; M. Jacques Floch, Rapport fait au nom de la commission d’enquête sur la situation dans les prisons françaises, Assemblée nationale, XIe législature, n° 2521, déposé le 28 juin 2000, et M. Guy-Pierre Cabanel, Rapport fait au nom de la commission d’enquête sur les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires en France, Sénat, session ordinaire de 1999-2000, n° 449, déposé le 29 juin 2000.

9 () M. Jean-Luc Warsmann, Rapport sur les peines alternatives à la détention, les modalités d’exécution des courtes peines, la préparation des détenus à la sortie de prison, La documentation française, 2003.

10 () Articles D. 48-4 et 707-2 du code de procédure pénale.

11 () Article 474 du code de procédure pénale.

12 () Martine Herzog-Evans, Juridictionnalisation de l’application des peines : le bilan, XVIIIème congrès de l’Association française de droit pénal, Revue pénitentiaire et de droit pénal, numéro spécial 2007, Le droit de l’exécution des peines, une jurisprudence en mouvement, page 179.

13 () Comité d’orientation restreint de la loi pénitentiaire, Orientations et préconisations, page 59.

14 () Philippe Bonfils, rapport de synthèse du XVIIIème congrès de l’Association française de droit pénal, Revue pénitentiaire et de droit pénal, numéro spécial 2007, Le droit de l’exécution des peines, une jurisprudence en mouvement, page 197.

15 () Jean Pradel, rapport introductif du XVIIIème congrès de l’Association française de droit pénal, Revue pénitentiaire et de droit pénal, numéro spécial 2007, Le droit de l’exécution des peines, une jurisprudence en mouvement, page 7.

16 () Sur les recommandations de la mission sur la dématérialisation de la chaîne pénale, voir infra, Chapitre 3, I. Dématérialiser la chaîne pénale.

17 () Cour des Comptes, Rapport public thématique, Garde et réinsertion – La gestion des prisons, 2006.

18 () Services du bureau d’ordre, du traitement en temps réel et de l’audiencement ; personnels des cabinets des juges d’instruction et des juges des libertés et de la détention ; personnels des cabinets des juges des enfants et des greffes des tribunaux pour enfants ; greffes correctionnels ; services de l’exécution des peines ; services des scellés ; services de l’accueil ; personnels des guichets unique de greffe.

19 () Inspection générale de l’administration, Inspection générale des services judiciaires, Inspection générale de la police nationale, Inspection de la gendarmerie nationale, Conseil général des technologies de l’information, Rapport d’audit de modernisation sur la dématérialisation de la chaîne pénale, novembre 2006.

20 () Circulaire SG/JUS A 0600-292 C du 9 octobre 2006 relative au plan de développement de la numérisation des procédures pénales.

21 () Article 7 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l’État pris pour l’application de l’article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État.

22 () Jean Pradel, rapport introductif du XVIIIème congrès de l’Association française de droit pénal, Revue pénitentiaire et de droit pénal, numéro spécial 2007, Le droit de l’exécution des peines, une jurisprudence en mouvement, page 7.

23 () À l’exception du TGI de Bourg-en-Bresse où, pour des raisons que la mission n’est pas parvenue à identifier, le nombre de paiements immédiats au BEX est particulièrement faible.

24 () Au 1er octobre 2007, seuls 63 terminaux de paiement par carte bancaire et 44 urnes de dépôt de chèques avaient été installés, pour 175 BEX créés.

25 () Voir Annexe.

26 () Aurillac, Cayenne, Digne les Bains, Rouen, Sens et Troyes.

27 () Sur les paiements en espèces auprès du BEX, voir infra, c).

28 () « Art. R. 946-4 – Des régies d'avances et de recettes, des régies d'avances ou des régies de recettes, fonctionnant dans les conditions prévues pour les régies d'avances et de recettes des organismes publics de l'État, peuvent être créées auprès de chaque secrétariat-greffe.

« Les attributions des régisseurs ainsi que les modalités de paiement et d'encaissement sont définies par arrêté conjoint du garde des sceaux, ministre de la justice, et du ministre chargé du budget et fixées dans le cadre de la réglementation des régies de l'État.

« Les attributions des régisseurs sont confiées à un fonctionnaire du secrétariat-greffe. Les régisseurs sont, pour l'ensemble des opérations qui leur sont confiées, tenus aux garanties et encourent les responsabilités définies par la réglementation des régies de l'État. Ils perçoivent une indemnité de responsabilité. »

29 () Le montant de ce droit est de :

- 22 euros pour les ordonnances pénales en matière contraventionnelle ou correctionnelle et pour les autres décisions des tribunaux de police et des juridictions de proximité ;

- 90 euros pour les décisions des tribunaux correctionnels ;

- 120 euros pour les décisions des cours d'appel statuant en matière correctionnelle et de police ;

- 375 euros pour les décisions des cours d'assises.

30 () Décret n° 71-685 du 18 août 1971 relatif à la rémunération des cours professés dans les établissements pénitentiaires et instituant une indemnité d’enseignement en milieu pénitentiaire.

31 () Circulaire JUS D 0630051 C du 27 avril 2006 relative aux aménagements de peine et aux alternatives à l’incarcération et circulaire JUS D 2007 30042 C du 27 juin 2007 relative aux aménagements de peine et aux alternatives à l’incarcération.

32 () Martine Herzog-Evans, Juridictionnalisation de l’application des peines : le bilan, XVIIIème congrès de l’Association française de droit pénal, Revue pénitentiaire et de droit pénal, numéro spécial 2007, Le droit de l’exécution des peines, une jurisprudence en mouvement, page 180.

33 () Comité d’orientation restreint de la loi pénitentiaire, Orientations et préconisations, page 39.

34 () Circulaire JUS E 0040058 C du 21 juillet 2000 relative à la généralisation du projet d’exécution de peine aux établissements pour peine.

35 () Proposition n° 14.

36 () Décret n° 2007-1627 du 16 novembre 2007 modifiant le code de procédure pénale (troisième partie : décrets) et renforçant le recours aux aménagements de peines et la lutte contre la récidive.

37 () Étude citée par la Cour des comptes, Rapport public thématique, Garde et réinsertion – La gestion des prisons, 2006, page 96.

38 () Décret n° 2007-1627 du 16 novembre 2007 modifiant le code de procédure pénale (troisième partie : décrets) et renforçant le recours aux aménagements de peines et la lutte contre la récidive.

39 () Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale.

40 () 227 places de semi-liberté sont également occupées par des condamnés n’ayant pas été placés en semi-liberté.

41 () 90 % si l’on inclut les 227 autres condamnés occupant des places de semi-liberté.

42 () Décret n° 2004-1364 du 13 décembre 2004 modifiant le code de procédure pénale (troisième partie : Décrets) et relatif à l'application des peines.

43 () Décret n° 2007-1627 du 16 novembre 2007 modifiant le code de procédure pénale (troisième partie : décrets) et renforçant le recours aux aménagements de peines et la lutte contre la récidive.

44 () Meurtres ou assassinats commis sur un mineur ou en récidive légale ; crimes de tortures et d'actes de barbarie ; viols ; délits d'agressions sexuelles ; délits de corruption de mineurs, de propositions sexuelles à un mineur, d'enregistrement, transmission, offre, diffusion ou consultation habituelle d'images pédopornographiques, de diffusion de messages violents ou pornographiques susceptibles d'être vus par un mineur et d'atteintes sexuelles sur mineur.

45 () M. Bruno Hauron, directeur de la maison d’arrêt de Fresnes.

46 () Proposition n° 41.

47 () Commission d’analyse et de suivi de la récidive, rapport pour l’année 2007, page 60.

48 () Décret n° 2007-699 du 3 mai 2007 modifiant le code de procédure pénale (troisième partie : Décrets) relatif au renforcement de l'équilibre de la procédure pénale et à la prévention de la délinquance.

49 () Article D. 147-18 du code de procédure pénale.

50 () Article D. 147-17, alinéa 4 du code de procédure pénale.

51 () Article D. 147-26, alinéa 2 du code de procédure pénale.

52 () Article D. 147-27, alinéa 2 du code de procédure pénale.

53 () M. Jean-Luc Warsmann, Rapport sur les peines alternatives à la détention, les modalités d’exécution des courtes peines, la préparation des détenus à la sortie de prison, La documentation française, 2003, page 30.

54 () Article D. 2211-1 du code général des collectivités territoriales.


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