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N° 1087

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 juillet 2008.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 146 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN

relatif aux rapports particuliers de la Cour des comptes
sur les comptes et la gestion des opérateurs de l’audiovisuel extérieur

ET PRÉSENTÉ

par M. Patrice MARTIN-LALANDE,

Député.

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COMMUNICATION DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL 5

A.– LES OBSERVATIONS DE LA COUR DES COMPTES REJOIGNENT LE CONSTAT DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL 9

1.– La stratégie poursuivie : entre instabilité et incohérence 9

a) La responsabilité des pouvoirs publics : des choix différés 9

b) L’État a mal calibré les moyens financiers mis à disposition de l’audiovisuel extérieur 11

c) La mesure des résultats de l’audiovisuel extérieur reste incertaine 12

2.– Le pilotage des opérateurs : des objectifs insuffisamment précis, parfois contradictoires 14

a) CFI : des objectifs changeants 14

b) RFI : des réformes différées ou incomplètes 15

c) TV5 : des priorités relativement claires, mais imparfaitement suivies 17

d) France 24 : un mode de financement baroque 18

B.– VERS UNE REFONDATION DE L’AUDIOVISUEL EXTÉRIEUR FRANÇAIS : LES CONDITIONS DU SUCCÈS 21

1.– La réforme amorcée 21

a) Le temps de la réflexion : le rapport Benamou/Lévitte 21

b) Le moment de l’action : la mission Pouzilhac/Ockrent 26

2.– Les obstacles à lever 31

a) Faire entrer la société holding « Audiovisuel extérieur de la France » dans le capital de France 24 et de RFI 31

b) Donner sa place à la spécificité francophone : le « partenaire » TV5 33

3.– Les clefs de la réussite 34

a) En finir avec la dispersion des cibles : mieux choisir les zones géographiques et bien identifier les publics et les médias qui les desservent 34

b) Ne pas précipiter la réforme : procéder par « touches » permettra d’enclencher une dynamique vertueuse 37

c) Ne pas rater le tournant du multimédia : pour un rapprochement des compétences et une meilleure cohérence des supports 37

d) Veiller à la réalité des synergies en empêchant la dérive des coûts de la réforme 39

e) Le pilotage de l’audiovisuel extérieur de la France : l’épaisseur de la holding, la responsabilité de l’exécutif et le contrôle du Parlement 40

EXAMEN EN COMMISSION 43

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 55

ANNEXE : RAPPORTS PARTICULIERS DE LA COUR DES COMPTES RELATIFS AUX COMPTES ET À LA GESTION DES OPÉRATEURS DE L’AUDIOVISUEL EXTÉRIEUR 57

1.– Lettres de M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes 59

2.– France 24 75

3.– Radio France Internationale 163

4.– TV5 Monde 281

5.– Canal France international 351

Votre Rapporteur spécial tient à remercier la Cour des comptes d’avoir, à sa demande, fait en sorte de rendre compatibles les délais de contradiction et de publication de ses enquêtes avec l’agenda des travaux de la commission des Finances. Il saisit l’occasion pour se réjouir du resserrement des liens entre la Cour et le Parlement.

COMMUNICATION DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

Le sujet n’est pas neuf : depuis de trop nombreuses années, ministres et parlementaires jouent l’Arlésienne pour appeler à une rénovation ou à une refondation de l’audiovisuel extérieur de la France. À tel point que, parmi ceux qui observent depuis longtemps les évolutions du secteur audiovisuel, le scepticisme l’emporte souvent, face à toute tentative nouvelle de réforme.

Définir les objectifs, le périmètre et les moyens de l’audiovisuel extérieur français n’est effectivement pas une chose aisée : programmation généraliste, média d’information ou moyen d’influence culturelle ? Outils français ou francophones, bilatéraux ou multilatéraux ? Chaîne(s) de télévision, radio ou internet ? Diffusion en français (éventuellement sous-titré) ou en langue étrangère ?

Il est indéniable que le panorama simple, dessinant un audiovisuel extérieur composé de trois opérateurs complémentaires (Radio France Internationale pour la radio, TV5 pour la télévision et Canal France International pour la coopération audiovisuelle), a largement été remis en cause par l’émergence de nouveaux intervenants et l’évolution profonde des supports de diffusion.

France 24 est avant tout une chaîne d’information dont la cible n’est pas la France et la langue pas forcément française… là où un organe comme TV5 Monde se présente comme un opérateur de la francophonie et une chaîne généraliste et multilatérale. La réflexion devient plus subtile encore quand on analyse le rôle d’opérateurs comme Medi 1 (1) ou Monte-Carlo Doualiya (2) et quand on envisage d’y inclure des chaînes comme ARTE (3) ou Euronews (4). Sans oublier le rôle joué par le prestataire d’informations internationales qu’est l’Agence France–Presse.

Votre Rapporteur spécial considère que la cohérence du dispositif de l’audiovisuel extérieur repose incontestablement sur quatre opérateurs clefs : une entreprise multilatérale (TV5 Monde), une filiale majoritaire de France Télévisions (Canal France International), une société nationale de programme (Radio France Internationale) et une filiale à parité de TF1 et France Télévisions (France 24), chacune dotée de sources de financement, de procédures budgétaires et de modes d’exercice de la tutelle de l’État distincts.

Peu de temps après son élection, le Président de la République a exprimé la volonté de réformer cet ensemble composite. La démarche qu’il a initiée au milieu de l’année 2007 est désormais entrée dans sa phase opérationnelle : l’outil capitalistique à travers lequel la réforme doit se mettre en place a été créé ; des dirigeants ambitieux et compétents ont été nommés à la tête de cette société holding provisoirement baptisée « Audiovisuel extérieur de la France ».

Pourtant, le Parlement se situe en marge de ce processus. Certes, un certain nombre de parlementaires, à commencer par votre Rapporteur spécial, ont été auditionnés par l’Élysée lors de la mission conduite en 2007. Certes, les projets de loi de finances, octroyant aux opérateurs les crédits budgétaires nécessaires à leur fonctionnement et à leur développement, sont examinés et votés par chaque assemblée, qui peut les amender.

Mais la mise en place du cadre juridique et capitalistique de la réforme relève très largement du domaine réglementaire et échappe aux députés comme aux sénateurs. L’éphémère attention accordée, en 2003, par la présidence de la République et le Gouvernement au rapport de notre collègue M. Christian Kert, au nom de la mission d’information commune présidée par M. François Rochebloine (5), ne peut que renforcer ce sentiment de marginalisation du Parlement, même si c’est un député (M. Bernard Brochand) qui a piloté – mais en dehors du Parlement – le projet de chaîne française d’information internationale et le choix d’une formule « public–privé » rapprochant TF1 et France Télévisions (6).

C’est pour l’ensemble de ces raisons que le présent rapport d’information cherche à pallier l’absence relative du Parlement dans la conduite de cette importante réforme.

Dans le cadre de travaux conduits à la demande de votre commission des Finances, la Cour des comptes a transmis à l’Assemblée nationale un ensemble de rapports sur les différentes sociétés qui composent l’audiovisuel extérieur :

– le résultat de contrôles sur les comptes et la gestion des trois opérateurs « historiques » de l’audiovisuel extérieur – TV5 Monde, Canal France International (CFI) et Radio France Internationale (RFI) – pour les années 2000 à 2006 ;

– des observations sur les comptes et la gestion de la « dernière née » des sociétés audiovisuelles, la chaîne française d’information internationale (CFII), baptisée France 24 depuis août 2006, pour les exercices 2005 à 2007.

Inédits, ces quatre rapports de la Cour des comptes (7) sont publiés en annexe au présent rapport : votre Rapporteur spécial considère, en effet, que ces travaux – dont il a mesuré, lors des auditions, le caractère incontestable – constituent la source d’enrichissement dont doivent se nourrir le débat parlementaire et la réflexion publique sur l’audiovisuel extérieur de notre pays.

Les travaux de la Cour des comptes viennent ainsi compléter et éclairer ceux de votre Rapporteur spécial (8) (9), qui aboutissaient à des conclusions similaires.

AUDIOVISUEL EXTÉRIEUR : LE TEMPS DE LA RÉFORME

Extrait du « rapport spécial 2008 » de M. Patrice Martin-Lalande (10)

Comme votre Rapporteur spécial le rappelait déjà l’an dernier, l’audiovisuel français extérieur fait l’objet de nombreuses critiques liées à l’empilement des structures, aux coûts de fonctionnement, à l’adéquation insuffisante des modes de communication aux usages de chaque région du monde ou encore à l’absence de synergies entre des intervenants dont les missions sont pourtant complémentaires. Si des synergies sont possibles entre tous ces acteurs, elles ne peuvent se mettre en œuvre sans une unification du discours de l’État–actionnaire, dont la stratégie et les orientations apparaissent souvent opaques voire contradictoires. 

[…]  Les scénarios de rapprochement et les options de réorganisation de l’audiovisuel extérieur sont multiples. Quel est le bon schéma institutionnel ?

Comme viennent le rappeler les difficultés actuelles de la BBC, souvent prise en modèle et pourtant contrainte à un plan d’austérité très coûteux en emplois, il n’existe pas de réponse unique et inattaquable à cette question lancinante dans la réflexion sur le système audiovisuel français. Comme en témoignent les très nombreux rapports publiés ces dernières années sur l’audiovisuel extérieur.

Plusieurs options pertinentes – plus ou moins compatibles les unes avec les autres – ont été évoquées :

– l’accélération radicale des synergies permettant une mutualisation des fonctions entre les sociétés existantes (ressources humaines, informatique…) ;

– la création d’un « portail commun » d’accès aux sites internet des sociétés (lesquelles continueraient à capitaliser sur le rayonnement international de leur marque propre) ;

– la reconstruction de l’audiovisuel public autour de la marque emblématique du service public national, France Télévisions, elle-même partie prenante au capital de quasiment toutes les sociétés ;

– la création d’une société holding intégrant l’ensemble des acteurs (France 24, RFI et TV5 Monde), pilotée depuis l’agence des participations de l’État, en maintenant – ou pas – la place de France Télévisions dans cet ensemble nouveau, ce qui permettrait de renforcer la vision stratégique de l’État–actionnaire tout en lui offrant un éventuel outil de pilotage de sociétés comme ARTE, Euronews, Canal France International ou les filiales de RFI (dont Monte Carlo Doualiya) ;

– le repositionnement stratégique de chaque société dans la chaîne de production et d’édition des programmes (l’information pour France 24, la diffusion pour TV5…) indépendamment du support médiatique de diffusion (radio, internet, télévision) ;

– la fusion de France 24, TV5 et RFI ;

– la fusion des rédactions de RFI et de France 24 au sein d’une nouvelle entreprise ;

– la sortie de Canal France International (CFI) du périmètre de l’audiovisuel extérieur, par exemple en l’intégrant à l’Institut national de l’audiovisuel.

Dans l’attente à la fois des recommandations du comité de pilotage élyséen fin 2007 et des conclusions définitives de la Cour des comptes au deuxième trimestre 2008, votre Rapporteur spécial ne prendra pas position immédiatement sur un schéma particulier de réorganisation institutionnelle – et ce d’autant plus que la question de l’organisation (fusion, synergies, holding) ne doit être réglée qu’une fois définies les priorités et les missions que l’on cherche à donner à l’audiovisuel extérieur de notre pays –, mais rappellera un certain nombre d’éléments de constat et d’orientations incontournables.

*

* *

A.– LES OBSERVATIONS DE LA COUR DES COMPTES REJOIGNENT LE CONSTAT DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

La lecture des rapports de la Cour des comptes – publiés en annexe – fait apparaître un certain nombre de dominantes dans les erreurs et les défauts dont souffre encore la politique audiovisuelle de la France : ces conclusions rejoignent le constat unanime d’une déficience stratégique d’ensemble et d’un pilotage défaillant des opérateurs audiovisuels (11).

1.– La stratégie poursuivie : entre instabilité et incohérence

a) La responsabilité des pouvoirs publics : des choix différés

Longtemps, la stratégie retenue en matière de politique audiovisuelle extérieure est restée celle définie en avril 1998 dans le cadre du Conseil de l’action audiovisuelle extérieure (CAEF) : clarification des rôles respectifs de CFI (recentrée sur son rôle de banque de programmes) et de TV5 (tenue pour être le « navire amiral » de l’audiovisuel extérieur et dont les moyens devaient être accrus) d’une part ; exploitation de leurs synergies grâce à une présidence commune d’autre part. Ces grands axes étaient complétés par une politique d’aide à la présence de chaînes françaises sur les bouquets satellitaires et un soutien à l’organisme professionnel de promotion à l’exportation des programmes télévisuels, TV France international.

La mise en œuvre de cette politique a été lente et inégale. Comme le rappelle la Cour des comptes, la priorité budgétaire affichée en faveur de TV5 ne s’est pas concrétisée. Il a fallu attendre cinq ans pour que soit mis fin au rôle de diffuseur de CFI, avec l’arrêt de la chaîne destinée à l’Afrique (CFI-TV). Décidée dans son principe en 1998, la montée de France Télévisions dans le capital de CFI n’a été effective qu’en 2003. Des synergies attendues d’une coopération plus étroite entre CFI et TV5 (effectivement dotées à partir de 1998 d’une présidence commune), notamment pour la commercialisation, la diffusion par satellites, les achats de programmes… aucune ne s’est matérialisée. Quant à l’aide à la présence sur les bouquets satellitaires internationaux de chaînes françaises, son coût élevé (19,4 millions d’euros pour la période 1998–2002) avait été souligné (12).

En dépit des limites apportées à sa mise en œuvre, la stratégie définie en 1998 est restée néanmoins la référence, jusqu’à ce que le projet de chaîne d’information internationale, souhaité par l’ancien Président de la République le 12 février 2002, se matérialise. Le processus s’est étalé sur trois ans, de l’appel à projets lancé en mars 2003 jusqu’à la signature en décembre 2005 de la convention entre l’État et la nouvelle société. Cependant, beaucoup ont observé que ce projet a été marqué par de fortes réserves de la part des administrations en charge de l’audiovisuel extérieur, particulièrement le ministère des Affaires étrangères. Celui-ci jugeait que les coûts élevés d’une chaîne disposant d’une capacité de production propre d’information sur le modèle de CNN ou d’Al Jazeera excédaient les moyens que la France pouvait y consacrer et craignait que, même dans le format allégé reposant principalement sur l’achat externe d’images d’information qui a finalement vu le jour, France 24 n’obère gravement son budget, déjà soumis à de sérieuses contraintes.

Les années 2003–2005 ont ainsi été pour la politique audiovisuelle extérieure des années d’incertitude et de débat, au cours desquelles le ministère des Affaires étrangères, seul ou conjointement avec le ministère de la Culture et de la communication, s’est efforcé de suggérer des alternatives au projet de chaîne d’information internationale, sous la forme d’une offre renforcée d’information sur TV5 ou d’une évolution volontariste de la chaîne européenne Euronews.

Parallèlement, dans le contexte de la guerre d’Irak de 2003, l’objectif de dispenser une information télévisuelle française à destination du monde arabe est apparu plus urgent. La réflexion sur une « chaîne arabe » a rencontré le projet de l’opérateur de la radio Medi 1, qui émettait depuis longtemps au Maroc en français et en arabe avec le soutien de la France, de développer une télévision d’information continue bilingue, Medi 1 Sat. C’est dans ce contexte que la France a été amenée à soutenir ce projet, en 2005, par une participation publique au capital de la société et un prêt conventionné de l’Agence française de développement. Les ambitions de la France en matière d’information télévisuelle internationale s’incarnaient ainsi dans un projet spécifique à destination du monde arabe… alors que le projet France 24, qui comportait une part d’émissions en arabe, était dans sa phase de définition finale.

Au total et comme le montre bien la Cour des comptes, France 24 s’est développée en marge du dispositif existant de l’audiovisuel extérieur, plutôt qu’en synergie ou dans une complémentarité organisée avec lui. Le projet a été volontairement développé sur un modèle inédit de partenariat entre opérateurs publics et privés et a bénéficié d’un traitement budgétaire distinct, les crédits de subvention de France 24 étant rattachés au Premier ministre dans un programme dédié au sein du budget général de l’État.

La focalisation des débats stratégiques sur la télévision s’est effectuée au détriment de Radio France Internationale, qui avait tenté de s’y associer en déposant, conjointement avec France Télévisions, un projet pour le développement de la chaîne d’information internationale en mars 2003, qui a été écarté. Il n’a pas été suffisamment prêté attention, par les autorités de tutelle, à sa situation et à sa place dans le dispositif.

Ce n’est que depuis l’été 2007 et le lancement d’une réflexion interministérielle d’ensemble sur l’audiovisuel extérieur que les questions de l’inscription de France 24 dans ce dispositif et de la cohérence d’ensemble de celui-ci, y compris RFI, ont été véritablement posées. Les débats des années 2003–2005 ont, en outre, tendu à différer le traitement des questions urgentes et délicates qui se posaient parfois aux opérateurs existants.

b) L’État a mal calibré les moyens financiers mis à disposition de l’audiovisuel extérieur

Considérée globalement, l’action audiovisuelle extérieure a vu ses dotations budgétaires sensiblement augmenter au cours des six dernières années, sous l’effet principal de la création de France 24 : le total des crédits des programmes Audiovisuel extérieur et Chaîne française d’information internationale du budget général de l’État (mission Médias) et du financement de RFI sur la redevance audiovisuelle, est passé de 215 millions d’euros en 2002 à 281 millions d’euros en 2007, soit + 31 %.

De cette forte progression du budget de l’audiovisuel extérieur, on ne saurait retirer une impression d’aisance budgétaire puisqu’elle a été entièrement absorbée par la montée en charge de France 24 : or, celle-ci n’est pas terminée, comme on le précisera plus loin dans ce rapport ! La réalité est celle d’une tension persistante sur les ressources : on a voulu trop faire, sans s’en donner pleinement les moyens, y compris par la rationalisation de l’usage des moyens existants.

Plus précisément, on peut observer que les budgets de CFI, RFI et TV5 ont progressé de façon très modérée au cours des six dernières années. De 2002 à 2007, les financements publics français en euros courants sont passés :

– pour CFI, de 22,03 à 19,50 millions d’euros (soit – 11,4 %) ;

– pour RFI, de 120,90 à 126,16 millions d’euros (soit + 4,4 %) ;

– pour TV5, de 63,32 à 67,68 millions d’euros (soit + 6,9 %).

Les ressources nécessaires au développement des trois opérateurs n’ont pu être dégagées au cours de la période que par redéploiement ou grâce à leurs ressources propres. D’après la Cour des comptes, celles-ci ont surtout concerné TV5, passant pour cette société de 8,9 millions d’euros en 2002 à 10,5 millions d’euros en 2007 ; mais elles ont accusé une forte baisse dans les premiers mois de 2008, dans le contexte de l’annonce d’une suppression possible de la publicité sur France Télévisions, les espaces publicitaires de TV5 étant pour l’essentiel commercialisés avec ceux des chaînes du groupe par leur régie commune.

L’évaluation des résultats de ces entreprises doit tenir compte de l’évolution contenue de leurs ressources publiques. Leur situation financière, sans être alarmante, est tendue :

– en loi de finances initiale pour 2008, la subvention du ministère des Affaires étrangères à CFI a été réduite de 2 millions d’euros par rapport à 2007, dans le contexte d’une baisse de ses coûts de diffusion ;

– RFI a enregistré en 2006 une perte exceptionnelle de 11 millions d’euros liée à la renégociation, par ailleurs génératrice d’économies à terme, du contrat de diffusion qui la liait à TDF : une recapitalisation de la société avant la fin de l’année 2009 sera donc nécessaire ;

– TV5 a principalement financé son développement par des économies sur les frais de diffusion. Comme le souligne la Cour des comptes, il ne reste qu’une zone où une telle option existe de façon réaliste – l’Europe – où l’option de renoncer à l’analogique pourra être exercée en 2009 et générer une économie annuelle de l’ordre de 3 millions d’euros. Cependant, la multiplication des modes de diffusion implique des coûts croissants qui l’absorberont très largement.

Une marge de réduction de ses coûts de diffusion existe également à CFI, qui pourrait renoncer aux satellites pour le transport de ses programmes destinés à ses télévisions partenaires, au bénéfice de l’internet.

Enfin, on observe que, partout, les frais de personnel ont progressé plus rapidement que les subventions publiques, ce qui était logique compte tenu de la faible progression de celles-ci, mais a rigidifié leurs structures de coûts.

c) La mesure des résultats de l’audiovisuel extérieur reste incertaine

Comme votre Commission le rappelait encore récemment à l’occasion de l’examen du dernier projet de loi de règlement (13), la culture de la performance et l’importance de la mesure des résultats (notamment ceux de l’audience) n’ont toujours pas été appréhendées à leur juste mesure : c’est particulièrement vrai en matière d’audiovisuel extérieur et très contradictoire avec l’esprit même de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) (14).

Dans un contexte général de plus en plus concurrentiel, la mesure des résultats de l’audiovisuel extérieur reste incertaine. Dans les pays développés où la mesure directe de l’audience est possible, les chaînes internationales sont souvent à la limite des seuils techniques de mesure (15). Au surplus, CFI, RFI et TV5 consacrent à leurs études d’audience des montants faibles (moins de 1 % de leurs ressources) et qui ont eu tendance à diminuer depuis 2002.

Les mesures par CFI de l’impact de sa banque de programmes auprès des chaînes utilisatrices sont incertaines, puisque la reprise par celles-ci de ses programmes lui a longtemps été connue par leurs seules déclarations (16). De façon assez comparable, une grande incertitude entoure les reprises de ses programmes en espagnol par les radios partenaires de RFI en Amérique latine.

Les performances globales dont TV5 fait état se divisent entre un « bassin d’audience potentiel » (le nombre de téléspectateurs initialisés), indicateur d’un objectif assigné à TV5 qui est l’extension mondiale de son offre, et les mesures d’audience proprement dites, qui ne sont directement effectuées qu’en Europe. Ailleurs, une cinquantaine de villes, où les résultats ne sont actualisés qu’au rythme de six à huit par an, servent de test, leurs résultats étant extrapolés au reste du monde de façon peu certaine.

La Cour des comptes montre bien qu’au cours des années récentes, les deux indicateurs d’audience potentielle (évaluée aujourd’hui à 178 millions de foyers) et d’audience réelle (74 millions de foyers) ont crû rapidement, mais en partie sous l’effet de facteurs mécaniques et méthodologiques. Là où ces chiffres se prêtent à une véritable analyse, c’est-à-dire en Europe, le premier croît plus vite que le second : cela tendrait à montrer que le développement tous azimuts de l’offre de TV5 doit désormais faire place à une politique plus ciblée d’identification de ses publics et de consolidation de son audience effective.

Quant au nombre d’auditeurs réguliers de RFI dans le monde (écoutant la radio au moins une fois par semaine), il était estimé en 2005 à 44 millions, dont 56 % sur le continent africain et 24 % au Proche et Moyen-Orient. En termes de part de marché, RFI attire jusqu’à 35 % de « l’audience veille » (17) dans les capitales d’Afrique francophone, mais ne dépasse 2,5 % dans aucune des dix autres capitales mondiales objets de sondages réguliers.

Par ailleurs, les mesures d’audience sur l’internet font apparaître un nombre de visites en forte croissance pour RFI et TV5, qui atteignent, avec respectivement 2 et 3 millions de visiteurs mensuels chacun, des niveaux comparables à ceux de sites de médias de premier rang comme celui du Figaro, des Échos ou de L’Express.

Enfin, la mesure de l’audience de France 24 reste délicate : dix-huit mois après son lancement, la chaîne d’information continue diffusait 24 heures sur 24 deux programmes en français et en anglais, ainsi qu’un programme destiné à l’Afrique du Nord et au Moyen-Orient composé de 4 heures d’émission par jour en arabe, complétés respectivement par ses programmes en français et en anglais. France 24 est diffusée en mode exclusivement numérique, par satellite et par câble en Europe, en Afrique et au Moyen-Orient. Elle est accessible par l’internet dans le monde entier. D’après les informations recueillies par votre Rapporteur spécial, France 24 dispose de mesures d’audience dans douze pays, tant en termes de téléspectateurs que de parts de marché. La situation apparaît très contrastée : la part de marché de France 24 atteignant 21,3 % de celle des chaînes d’information en Afrique francophone et 15,5 % au Maghreb… contre seulement 4,6 % en Europe (où la BBC et CNN se situent entre 25 et 30 %).

2.– Le pilotage des opérateurs : des objectifs insuffisamment précis, parfois contradictoires

Les défaillances de l’impulsion stratégique, les hésitations et les choix différés de la politique audiovisuelle extérieure ont pesé sur les objectifs assignés aux quatre sociétés de l’audiovisuel extérieur français.

a) CFI : des objectifs changeants

Il ressort des quatre enquêtes de la Cour des comptes que CFI est l’entreprise à laquelle la tutelle a imprimé les plus nombreux changements de cap : banque de programmes destinés aux télévisions étrangères à sa création en 1989, elle est ensuite devenue une chaîne de télévision aux ambitions mondiales, avec un signal par continent, avant d’être contrainte d’abandonner sa diffusion directe au Moyen-Orient en 1997, puis en Amérique, en Europe et en Asie dans le cadre de la décision du CAEF d’avril 1998 qui la recentrait sur sa fonction historique de banque de programmes, sauf en Afrique. CFI poursuivra jusqu’en 2003 la diffusion d’une chaîne destinée au public africain, auprès duquel elle rencontrait un certain succès, grâce à une programmation adaptée.

Outre son rôle maintenu de banque de programmes, la société s’est vue confier, à partir de 2002, une nouvelle mission de coopération audiovisuelle à destination des pays en développement, principalement d’Afrique. Favorisée par l’implication de France Télévisions qui fournit des experts pour l’accomplissement de missions sur place, cette activité de CFI devrait, selon le ministère des Affaires étrangères, prendre progressivement le relais d’une activité de banque de programmes dont le succès implique de voir peu à peu les pays bénéficiaires de programmes gratuits français sortir d’une logique d’aide et s’adresser au marché pour les acquérir. De la rapidité de cette transition et du volume d’actions de coopération dont pourra être chargée CFI, dépendra à moyen terme l’avenir de cette société.

Enfin, en 2005, CFI a été chargée par sa tutelle de réaliser grâce à une filiale créée à cet effet un portail internet « Idées de France », dont le ministère des Affaires étrangères souhaitait faire un moyen de diffusion multilingue des débats d’idées et de la production éditoriale audiovisuelle français. Le financement prévu ayant été supprimé de la loi de finances initiale pour 2006 à l’initiative du Sénat, la filiale a été dissoute en mai 2006 et ses personnels licenciés, le coût de l’opération s’élevant à 2,3 millions d’euros correspondant pour l’essentiel à la subvention initiale du ministère des Affaires étrangères.

b) RFI : des réformes différées ou incomplètes

Corroborant le constat dressé depuis plusieurs années déjà par votre Rapporteur spécial, l’enquête de la Cour des comptes fait parfaitement apparaître que RFI, société de programmes dont le personnel relève de la convention collective de l’audiovisuel public, a été « victime » de la dualité de tutelle de la direction du développement des médias (DDM) et de la direction de l’action audiovisuelle extérieure du ministère des Affaires étrangères, correspondant à une dualité de financement, via un programme du budget général de l’État (dépendant du Quai d’Orsay) et via l’affectation d’une partie du produit de la redevance audiovisuelle. La double tutelle s’est avérée inefficace et paralysante, rendant impossible la mise au point d’un contrat d’objectifs et de moyens (COM), pourtant obligatoire, ou à tout le moins d’un document d’orientation commun des deux ministères à destination de RFI.

RFI a ainsi fait l’objet d’une moindre attention des pouvoirs publics alors qu’elle était la société de l’audiovisuel extérieur dont la situation appelait les arbitrages les plus nécessaires de leur part. Alors que les diagnostics sur l’offre d’émissions en langues étrangères de RFI convergent depuis longtemps pour estimer que des choix, d’ailleurs difficiles, sont à faire en matière de langues de diffusion, en fonction de l’évolution géopolitique et de celle des techniques de diffusion, les conséquences à en tirer en ont été constamment différées.

Comme le met au jour la Cour des comptes (cf. encadré ci-après), il a fallu attendre la fin du mandat du précédent président de RFI, M. Jean-Paul Cluzel, pour qu’une restructuration de l’offre en langue étrangère soit proposée en réponse aux inquiétudes manifestées par les administrations de tutelle. En sens inverse, la même année, ce sont les tutelles qui ont opposé une fin de non-recevoir à la question de la restructuration des rédactions en langues étrangères, accompagnée d’un plan social, que le nouveau président de RFI leur avait, pour la première fois, posée en toute clarté. Devant ce refus, l’utilité de chacune des 17 langues de RFI a été confirmée. Si certaines d’entre elles ont été déclarées prioritaires, aucune réallocation de moyens significative n’a été effectuée en conséquence. Au contraire, des efforts nouveaux ont été consentis sur l’Europe et la diffusion en espagnol, qui ne faisaient pas partie de ces priorités.

RFI OU LES DÉFICIENCES DE LA DÉCISION POLITIQUE :

Extrait du rapport particulier de la Cour des comptes (18)

M. Antoine Schwarz, PDG de RFI depuis le 2 juin 2004, a rapidement proposé les grandes lignes d’un projet de réforme pour l’essentiel conforme aux attentes des tutelles. Les objectifs affichés étaient ambitieux, prévoyant notamment une numérisation de la production, une refonte des rédactions et une accentuation de la diffusion locale, les suppressions de postes de salariés en CDI pouvant aller de 70 à 150 selon les hypothèses retenues. Initialement, les tutelles ont réagi plutôt favorablement à cette démarche, dont les grandes lignes ont été présentées lors du conseil d’administration du 23 juin 2004.

Le Président de RFI sollicitait l’accord des tutelles sur les grandes orientations proposées avant de travailler à leur finalisation. Pourtant, les tutelles exprimèrent, dès une réunion du 19 août 2004, des doutes sur les propositions de réforme formulées par le nouveau président. La tonalité générale de leurs réactions témoigne alors des contradictions auxquelles elles sont confrontées. Elles souhaitent une réforme d’ampleur de RFI, mais elles ne disposent pas des moyens financiers nécessaires à sa mise en œuvre. Les tutelles ont rapidement précisé la double contrainte qui s’imposait au nouveau président : l’évolution des financements publics demeurerait limitée et les économies internes devraient être réalisées sans recours à la procédure du plan de sauvegarde de l’emploi.

Le resserrement de la contrainte budgétaire, à laquelle RFI était déjà soumise depuis plusieurs années, s’est manifesté très rapidement. Dès la première réunion de travail avec le nouveau président de RFI, la DDM lui précisa que la société bénéficierait, l’année suivante, de la plus faible augmentation parmi les opérateurs de l’audiovisuel public relevant de la redevance. Le Quai d’Orsay l’informait, à la même occasion, que la subvention du ministère des Affaires étrangères ne devrait progresser que de l’ordre de 1 %. La contrainte budgétaire sera à nouveau renforcée par la suite avec une diminution de 3,5 % de cette subvention, le gel de la réserve de précaution et une progression des crédits de la redevance allouée à RFI de 1,2 % contre 2,57 % en moyenne pour l’ensemble du secteur dans le cadre de la préparation du budget 2007.

L’opposition des tutelles à un plan de sauvegarde de l’emploi a considérablement limité les capacités de redéploiements internes de RFI. Les motivations de ce refus semblent plus politiques que financières, dans la mesure où aucune évaluation sérieuse du coût d’un tel plan n’avait été réalisée et que la direction du budget du ministère des Finances y semblait plutôt favorable.

L’enquête de la Cour des comptes confirme que la décision de ne pas autoriser RFI à recourir à des licenciements économiques dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi a été prise au niveau politique. Le président de RFI a été contraint de limiter ses ambitions dans un contexte de fortes tensions sociales.

C’est ce qui explique que le projet de contrat d’objectifs et de moyens 2006–2009, présenté aux tutelles en juin 2005, ne proposait plus de hiérarchisation claire des missions et objectifs de RFI, limitait les redéploiements à 19 ETP sur trois ans et sollicitait une progression importante des financements publics (4,3 % en moyenne sur la période). La réaction des tutelles, très négative, conduira à l’arrêt des discussions sur le COM dès l’automne 2005.

Les tutelles n’ont pas su, dans ce contexte, préciser les priorités stratégiques de RFI. Les tensions sociales récurrentes au sein de l’entreprise, alimentées par les perspectives ouvertes par son nouveau président, ont amené le ministère des Affaires étrangères à adopter une position de retrait sur la finalisation des choix stratégiques attendus, en particulier en matière de langues de diffusion. Les services du Quai d’Orsay craignaient, en particulier, que la définition de priorités en matière de langues étrangères n’ait pour conséquence de lui faire assumer publiquement les conséquences d’une réforme à venir des rédactions de RFI. La position prudente et attentiste adoptée par ce ministère contribuera à affaiblir un peu plus la direction de RFI. Elle se traduira par des renvois réciproques de responsabilités du président de RFI, en attente d’indications claires sur les langues prioritaires, et des services du ministère des Affaires étrangères, ne souhaitant pas les formuler compte tenu du contexte social de l’entreprise.

Parallèlement, RFI a mené deux réformes qui n’ont pas produit les résultats attendus. Les gains de productivité escomptés de la numérisation de la production ne se sont pas matérialisés, tandis que ceux liés à la réduction de la diffusion en onde courte ont été, jusqu’en 2000, principalement absorbés par la hausse des frais de personnel. Ceux, moindres, enregistrés depuis, ont été accompagnés d’une réduction en termes réels des subventions publiques. La restructuration des rédactions reste suspendue à une implication forte et convergente de la direction et de ses tutelles. La réorganisation envisagée en 2001 pour mettre fin à l’isolement de chacune d’elles et permettre de rapprocher rédactions en français et en langues étrangères, qui apparaît toujours souhaitable et relève de la responsabilité de l’entreprise, reste à accomplir.

c) TV5 : des priorités relativement claires, mais imparfaitement suivies

En dépit d’une gouvernance complexe liée à son caractère multilatéral, TV5 Monde a bénéficié d’une direction stratégique claire. La conférence de Niagara-sur-le-Lac a retenu fin 2001 quatre objectifs pour le plan stratégique 2001–2004 : l’optimisation du réseau mondial de distribution, le développement du sous-titrage, l’amélioration de la qualité des programmes et le développement d’une information mondiale de référence. De ces objectifs, le troisième, l’amélioration de la qualité des programmes a été relégué en dernière position, dans un contexte où l’augmentation des coûts et la progression modérée du budget de TV5 le rendait très difficile à poursuivre. En 2005, ces objectifs ont été complétés par trois priorités géographiques : l’Afrique, le monde arabe et l’Europe francophone.

TV5 a ainsi été destinataire d’une feuille de route relativement lisible. Elle a poursuivi l’extension de son réseau de diffusion, dans le cadre d’une politique de développement mondial, voulue dès l’origine, et dont le critère était de pouvoir recevoir la chaîne où que l’on soit dans le monde. Les marges de manœuvre qu’elle a pu dégager ont été principalement consacrées au sous-titrage – dont l’entreprise et ses mandants ont estimé qu’il était la condition nécessaire de sa pénétration dans les zones autres que celles de la francophonie active – et à la préservation de sa présence sur les réseaux câblés face à une concurrence accrue.

En revanche, il y avait sans doute une contradiction entre cette politique de présence mondiale aux objectifs relativement indifférenciés et l’identification de trois orientations géographiques, que TV5 a, à ce jour, peu traduites en priorités actives. La priorité géographique de fait de la chaîne reste l’Europe non francophone… où ses coûts de programmes et de diffusion sont les plus élevés.

L’enquête de la Cour des comptes révèle que, s’il y avait ainsi des contradictions intrinsèques à ces différents axes stratégiques, la principale est bien celle qui a opposé le développement de l’information sur TV5 et le projet de chaîne d’information internationale voulu parallèlement par la France. Les dirigeants de TV5 ont, de 2002 à 2005, développé leur offre d’information, qui a représenté jusqu’au tiers de la grille, structurant celle-ci autour de rendez-vous à l’heure ronde (ce qui a d’ailleurs entraîné la perte de droits correspondant aux programmes en stock les plus longs qui n’entraient pas dans ce format), TV5 s’orientant ainsi vers un modèle inédit de « chaîne info/généraliste ».

Il a fallu attendre 2006 pour que les contraintes de ce modèle soient assouplies et que l’information soit réduite dans la grille, sans toutefois que l’on observe de décrue sensible du volume de moyens que la chaîne lui consacre (116 ETP dont le tiers a été recruté entre 2002 et 2005). La direction, mais aussi sa tutelle directe, le ministère des Affaires étrangères, ont laissé l’offre d’information se développer au-delà de la priorité assignée par les cinq partenaires de la chaîne, dans le contexte du débat interne autour du projet France 24 qui s’est poursuivi jusqu’à son lancement effectif en 2006.

d) France 24 : un mode de financement baroque

Dernière née de l’audiovisuel extérieur, France 24 est organisée de façon à tirer pleinement parti des potentialités du numérique dans ses modes de production de l’information. À la mise en place de bureaux permanents à l’étranger dotés de moyens de production propres, elle a préféré la formule souple et moins coûteuse d’un réseau de correspondants. Comme le montre bien le rapport de la Cour des comptes, ce mode de fonctionnement combiné au recrutement de journalistes bilingues et très majoritairement jeunes, ont situé la chaîne française d’information internationale à part dans le dispositif de l’audiovisuel extérieur.

Sur le plan juridique et financier, aussi, le lancement de France 24 a reposé sur un montage qui la distingue des autres opérateurs audiovisuels. Ce montage a consisté à confier la réalisation de la chaîne à une société privée détenue à parité par un actionnaire public (France Télévisions) et un actionnaire privé (TF1) et régie par un pacte d’actionnaires leur conférant un pouvoir de co-décision (… et donc de blocage en cas de désaccord) sur les principales décisions stratégiques de la société.

En revanche, le budget et l’intégralité des risques financiers sont assumés par l’État, qui s’est engagé par convention à assurer sur cinq ans à la société un niveau de financement assorti d’une clause d’indexation favorable. La convention ne prévoit ni le développement de ressources propres, ni l’intéressement des actionnaires aux performances de la société.

On signalera que l’enquête de la Cour des comptes fait clairement apparaître que c’est la direction de France 24 qui a fait le choix, avalisé par les pouvoirs publics, d’en faire une chaîne mettant en œuvre en parallèle des programmes distincts en français et en anglais (puis en arabe), plutôt que d’offrir un programme en français entrecoupé de « décrochages » en langues étrangères comme cela était prévu au départ. Ce choix, qui a permis de clarifier l’offre de France 24, a été heureux. Il a facilité la montée en puissance rapide de France 24, qui peut être considérée en soi comme un succès.

Mais ce développement a un coût… qui pèse d’autant plus lourdement vu le contexte actuel des finances publiques. D’autant plus que, comme votre Rapporteur spécial l’a déjà dénoncé l’an dernier (19), il faudra ajouter, aux 70 millions d’euros de la subvention de France 24 pour 2008, 18,5 millions d’euros non budgétés en loi de finances initiale (20).

En effet, dans la loi de finances initiale, il n’est prévu de doter le programme Chaîne française d’information internationale que de 70 millions d’euros cette année : or, la convention de subvention signée entre l’État et la chaîne (en exécution d’un avenant du 24 juillet 2006) a fixé le budget de France 24 à 88,5 millions d’euros pour 2008. Votre Rapporteur spécial déplore cette contradiction, qui ne pourra se résoudre autrement que par des abondements en gestion… et donc probablement par des annulations de crédits au détriment d’autres politiques et d’autres organismes !

Car l’État et France 24 ont bien signé un contrat pour la période 2008–2010, lequel fixe précisément le montant de la dotation que l’État s’est engagé à apporter à la chaîne, à savoir 88,5 millions d’euros en 2008 et 91,7 millions d’euros en 2009. Au surplus, votre Rapporteur spécial tient à attirer l’attention sur le fait que la convention de subvention précise que 25,3 millions supplémentaires devront être apportés en 2009 à la chaîne au titre d’une extension de la zone de diffusion à l’échelle mondiale (hors Amérique latine) et au passage à une diffusion en arabe sur 24 heures… ce qui porterait la subvention de l’État à France 24 à 117 millions d’euros en 2009.

Cette convention fixe même un financement étatique atteignant 122,6 millions d’euros en 2010, montant correspondant à une diffusion véritablement mondiale de France 24, incluant l’Amérique latine (1,5 million d’euros), et à la montée en puissance du projet stratégique de la chaîne. Elle prévoyait effectivement que la chaîne, au-delà des zones prioritaires où elle émet aujourd’hui, étende sa diffusion à l’Asie et au continent américain et à d’autres langues étrangères dont l’espagnol, mais – comme le rappelle opportunément la Cour des comptes – sans que ces priorités soient clairement énoncées et hiérarchisées entre elles.

La direction de France 24 juge désormais prioritaire le développement de son offre en arabe (qu’elle souhaiterait faire passer à 24 heures quotidiennes) et sa diffusion en anglais sur les continents asiatique et nord américain. Ces développements, compte tenu du mécanisme d’indexation, porteraient donc le budget de France 24 à plus de 130 millions d’euros en 2010 (dont près de 123 millions d’euros de subvention de l’État), soit un quasi doublement par rapport aux besoins initialement estimés de la chaîne en 2006.

L’amélioration de l’offre de France 24 et l’élargissement de son audience potentielle entraîneront donc nécessairement un renchérissement du coût des achats de programmes. Aux yeux de votre Rapporteur spécial, cette perspective impose que les diverses hypothèses de développement envisagées soient rapidement clarifiées entre France 24 et l’État.

Le rapport de la Cour des comptes fait apparaître qu’une hausse des besoins de financement de la chaîne sera nécessaire quels que soient les choix retenus, et ce, même en deçà du chiffre de 133 millions d’euros. Or France 24 se situe dans un secteur où ses concurrentes tirent une part de leur financement du développement de ressources propres, qu’il s’agisse de la publicité sur l’antenne ou sur l’internet, du sponsoring ou d’autres formes de partenariat.

Dans ces conditions, la question se pose de savoir si France 24 a vocation à être financée dans la durée et de façon quasi-exclusive sur fonds publics, comme c’est le cas aujourd’hui. Interrogée sur ce point par la Cour des comptes lors de son contrôle, la direction de la chaîne a estimé qu’elle pourrait à terme s’autofinancer à hauteur de 40 %... quand les représentants de l’administration se montraient plus prudents, citant des chiffres allant de 20 % à 30 %. Les estimations de la chaîne se fondent notamment sur l’anticipation – à une échéance encore malaisée selon elle à déterminer – de ressources importantes issues des nouveaux usages de la téléphonie mobile.

Ces avis convergent en tout cas pour reconnaître qu’une part de financement sur ressources propres mérite d’être prévue. Il est souhaitable qu’un objectif clair et partagé soit défini entre les pouvoirs publics et l’entreprise, en même temps que seront précisés les axes de son développement stratégiques et la contribution financière de l’État à leur réalisation.

En tout état de cause, il importe que des critères permettant de juger de la réussite de la stratégie adoptée par France 24 soient fixés à cette occasion. À cet égard, la Cour des comptes relève avec pertinence que les dispositifs de mesure mentionnés tant par 1’entreprise que par les pouvoirs publics, s’ils reposent sur des critères convergents (le contenu, la notoriété, l’image, la distribution et le référencement, les audiences et les parts de marché, les recettes publicitaires…), ne comportent pas encore les objectifs chiffrés qui les rendraient opérationnels dans le dialogue stratégique entre l’État et la société et dans l’évaluation de sa performance.

*

* *

B.– VERS UNE REFONDATION DE L’AUDIOVISUEL EXTÉRIEUR FRANÇAIS : LES CONDITIONS DU SUCCÈS

1.– La réforme amorcée

a) Le temps de la réflexion : le rapport Benamou/Lévitte

Afin d’en terminer avec les querelles de ministères et les velléités de réforme restées incantatoires à ce jour, le Président de la République a décidé que la refondation de l’audiovisuel extérieur serait pilotée depuis l’Élysée et associerait l’ensemble des tutelles.

Une « mission de concertation et de propositions sur l’audiovisuel extérieur » s’est ainsi mise en place. À l’issue d’une longue série d’auditions, au cours desquelles votre Rapporteur spécial a été entendu le 25 octobre 2007, un rapport a été présenté, en décembre 2007, par Jean-David Lévitte, conseiller diplomatique et sherpa du Président de la République, et Georges-Marc Benamou, conseiller à la présidence de la République pour la culture et l’audiovisuel (21).

Ce rapport définit l’ambition de la réforme : permettre à la France d’être une « grande puissance médiatique » par une présence accrue dans le domaine de la production et de la diffusion de l’information planétaire, par les réseaux via l’association des trois modes de diffusion complémentaires (internet, télévision et radio) et par la force de son message.

L’objectif consiste à offrir une alternative à un choix largement binaire : entre les médias anglosaxons et les médias du Golfe, il reste une place pour un « alter-média global », comme le désigne le rapport Benamou/Lévitte, fondé sur les valeurs de la France et de la francophonie. Bref, entre CNN, BBC et Al Jazeera, la France peut et doit offrir une alternative et une marque forte.

Une double mission est alors assignée à l’audiovisuel extérieur français :

– une mission d’influence : la France doit rivaliser avec les grands médias internationaux (les chaînes de télévision internationales américaines et du Golfe, la BBC, mais également les nouvelles puissances montantes, en particulier la Chine).

La France ne peut se satisfaire de la position qui est la sienne aujourd’hui. Face aux débats et aux informations parfois réducteurs, un regard spécifiquement français sur l’actualité peut trouver sa place. Cet objectif passe impérativement par une production autonome d’images nourrissant l’information internationale : ce positionnement éditorial ouvrira la porte à l’élaboration d’une information plus rigoureuse et plus nourrie ;

– une mission culturelle : à côté des médias anglo-saxons ou arabes, la France doit promouvoir plus efficacement ses valeurs : diversité culturelle, démocratie et confrontation des opinions, défense du multilatéralisme, laïcité, art de vivre…

Le rayonnement de la culture française est aujourd’hui indissociable de notre influence audiovisuelle. Assurer une présence de notre culture dans tous les nouveaux médias, c’est aussi développer l’usage de la langue française sur la planète. Cette exigence culturelle qui singularise notre action audiovisuelle favorise de facto la cohabitation des cultures, au-delà même des spécificités linguistiques.

Pour autant, les moyens à mettre en œuvre sont beaucoup plus difficiles à définir que les objectifs de la réforme. Cette dernière bute nécessairement sur le constat – unanimement partagé – de l’excessive complexité de l’organisation de l’audiovisuel extérieur, complexité qui s’observe d’ailleurs tant du côté des actionnaires que de celui des médias comme le montre le schéma ci-contre :

Ce schéma fait notamment apparaître l’enchevêtrement des participations capitalistiques et la complexité de l’actionnariat (direct et surtout indirect) de l’État.

La place occupée par France Télévisions, pourtant tenue à l’écart de la réorganisation en cours de l’audiovisuel extérieur, est également frappante… Elle mérite, à tout le moins, une clarification.

CLARIFIER LA PLACE DE FRANCE TÉLÉVISIONS

Extrait du « rapport spécial 2008 » de M. Patrice Martin-Lalande (22)

Votre Rapporteur spécial a déjà eu l’occasion de souligner la place singulière de France Télévisions dans le paysage de l’audiovisuel extérieur.

Rappelons la complexité des circuits financiers en général. Si ARTE–France est financée grâce à la redevance audiovisuelle, RFI est dotée à la fois par affectation du produit de la redevance et par subvention budgétaire… alors que TV5 Monde n’est subventionnée que par le programme Audiovisuel extérieur. Quant à France 24, elle bénéficie d’un financement assuré par un programme dédié au sein de la mission Médias mais contraint par les termes mêmes d’une convention signée par l’État. Les circuits de financement se complexifient encore quand on considère la place qu’occupe France Télévisions (elle-même affectataire de l’essentiel du produit de la redevance) dans ce système.

France Télévisions est, en effet, au cœur de presque tous les dispositifs capitalistiques des opérateurs extérieurs. Le groupe public participe ainsi à hauteur de 4,2 millions d’euros dans le budget de TV5 Monde, dont il possède 47,5 % du capital, et il détient 45 % du capital social de ARTE–France, cette dernière étant actionnaire à hauteur de 12,5 % dans TV5 Monde, de 11 % dans France 4 et de 25 % dans CFI… CFI dont France Télévisions détient les 75 % restant depuis quatre ans et vers lequel le groupe a transféré toutes ses activités de coopération télévisuelle. France Télévisions détient de plus, à parité avec TF1, la société anonyme France 24, ainsi que 23,7 % de Euronews (23).

La réforme de l’audiovisuel extérieur doit régler la question de la place que doit tenir France Télévisions. Rappelons plus en détail les relations que cette dernière entretient avec trois acteurs clefs du paysage audiovisuel.

– France Télévisions et TV5 Monde :

Détenant 47,4 % du capital de TV5 Monde, le groupe France Télévisions en est son actionnaire principal. Cela se traduit par une présence au conseil d’administration de TV5 Monde de quatre personnes issues du groupe (sur les neuf administrateurs représentant les chaînes actionnaires).

Les représentants de France Télévisions participent, en outre, aux réunions préparatoires des conseils que la direction de TV5 Monde organise pour les tutelles (ministère des Affaires étrangères et DDM) et ont été souvent associés aux réunions gouvernementales, des hauts fonctionnaires ou des ministres responsables de TV5 Monde.

Par ailleurs, France Télévisions contribue au budget de TV5 Monde grâce à un apport financier annuel (4,2 millions d’euros en 2007, soit 6 % de la contribution française, sur un budget initial consolidé de 91,9 millions d’euros).

France Télévisions est également le premier fournisseur de programmes de TV5 Monde (en 2006, les chaînes du groupe ont contribué à près de 26 % à ses programmes). Comme le prévoit le cahier des charges de ses chaînes, elle met à disposition de TV5 Monde gratuitement (pour ce qui est des droits producteurs) les programmes de flux dont elle possède les droits en propre. S’agissant des coproductions, le groupe propose systématiquement aux producteurs d’inclure dans les contrats la cession des droits de diffusion à TV5 Monde… sans que cela soit très efficace.

Les relations entre France Télévisions et TV5 Monde ne sont pas toujours faciles et restent marquées des difficultés qui peuvent naître de divergences d’intérêt ou de stratégies entre la chaîne francophone et son actionnaire dominant.

En étant filiale de France Télévisions, TV5 Monde répondait au souci des pouvoirs publics d’adosser l’opérateur extérieur à l’audiovisuel public national. Pour autant, France Télévisions semble n’avoir jamais intégré cette évolution et sa participation capitalistique n’en fait pas un actionnaire actif, impliqué et déterminant.

France Télévisions ne considère pas réellement TV5 Monde comme un instrument de sa politique internationale… tout en conservant le regret de ne pas voir l’action télévisuelle extérieure de la France relever directement de sa compétence et en déplorant de ne pas être suffisamment associée à la réflexion actuelle des pouvoirs publics sur la réforme de l’audiovisuel extérieur.

France Télévisions et France 24 :

Quatre conventions de collaboration avaient été conclues avec France 24 par France 2, France 3, RFO et AITV dès la fin 2006 et le début 2007. Il s’agit de conventions courantes (à raison de leur objet), établies aux conditions de marché. L’ensemble des prestations fournies à France 24 par les chaînes le sont systématiquement à titre onéreux. Elles portent sur quatre volets principaux.

En premier lieu, la fourniture d’images d’actualité en provenance de l’ensemble des éditions d’information des trois chaînes : le mécanisme retenu est celui d’un forfait, dont le montant annuel global pour le groupe a été fixé à 1 million d’euros en 2007 et 2008 (hors AITV). La répartition entre les trois chaînes – établie en fonction des reprises constatées sur France 24 depuis son lancement – est indicative et fait l’objet d’une péréquation en fin d’année (en fonction des flux effectivement constatés sur France 24 sur l’ensemble de l’année, au travers d’un système de traçabilité en cours de mise en œuvre).

En deuxième lieu, la fourniture par l’agence AITV (service de RFO) de sujets « monitoring » (en français et en anglais), en provenance d’Afrique.

En troisième lieu, la fourniture de reportages tirés des magazines d’information et documentaires des trois chaînes (le tarif établi dans les conventions est conforme aux prix de marché).

En dernier lieu, la fourniture de prestations spécifiques par les rédactions du groupe : duplex sonore, duplex vidéo, reportage sur le territoire métropolitain et ultramarin, reportage à l’étranger…

Les tarifs établis dans les conventions sont conformes aux prix de marché. Les conventions couvrent également la fourniture d’images de sport (provenant des émissions régulières ou des retransmissions d’événements sportifs), l’accès aux images des « voyages officiels » (captation des activités officielles du Président de la République et du Premier ministre), ainsi que la fourniture d’images d’archives de moins d’un an via France Télévisions Distribution.

Les conventions respectent les règles professionnelles en vigueur relatives aux droits d’auteur des journalistes, ainsi qu’à la signature des collaborateurs impliqués dans la fabrication des sujets et reportages. La durée des quatre conventions est alignée sur celle de la convention de subvention conclue entre France 24 et l’État jusqu’au 31 décembre 2010. Une clause de rendez-vous est fixée en octobre 2008 afin de fixer les conditions financières encadrant les années 2009 et 2010.

– France Télévisions et Canal France International :

France Télévisions est devenue actionnaire à 75 % de CFI en juillet 2003 après la signature d’un protocole d’accord entre le ministère des Affaires étrangères, France Télévisions et ARTE–France, qui organise les relations entre les actionnaires et l’unique bailleur de fonds de CFI. Aux termes de ce protocole, le Quai d’Orsay s’engageait à financer l’intégralité des missions qu’il confie à CFI, les actionnaires ne pouvant en aucun cas être appelés à couvrir les déficits constatés au titre de l’exécution de ces missions. En ce qui concerne le management, il était prévu que le Président soit nommé sur proposition du ministère des Affaires étrangères et que le directeur général le soit sur proposition de France Télévisions, en accord avec le Quai d’Orsay et ARTE–France.

Dès les premières semaines de 2004, le Président de France Télévisions a confirmé sa décision de confier à CFI toutes les actions de coopération précédemment réalisées par la direction internationale du groupe.

Ce souhait, partagé par les responsables du ministère des Affaires étrangères de voir CFI devenir le seul instrument de la coopération audiovisuelle des chaînes publiques françaises s’est traduit par la signature d’une convention–cadre qui organise la mise à disposition des personnels volontaires pour participer, en qualité d’experts, à des missions de coopération organisées par CFI, et par le détachement de collaborateurs de France Télévisions pour renforcer les équipes de CFI et multiplier les actions de coopération.

Outre le détachement de plusieurs cadres, l’apport de France Télévisions à CFI est de deux natures. D’une part, depuis fin 2004, l’ensemble des actions de coopération et d’assistance internationales du groupe sont menées sous l’égide de CFI. France Télévisions a, semble-t-il, joué le jeu, avec notamment la signature en septembre 2004 d’une convention très favorable à CFI organisant le recours à l’expertise des collaborateurs de France Télévisions. En 2006, 743 journées–experts ont ainsi été utilisées par CFI pour ses opérations de formation, ce qui a représenté un apport en nature estimé à 250 000 euros de la part de France Télévisions. Des tensions sont cependant apparues qui posent la question d’une remise en cause de la contribution de France Télévisions à l’effort public de coopération internationale.

D’autre part, conformément à leur cahier des missions et des charges, les chaînes du groupe France Télévisions mettent gratuitement à disposition de CFI, pour les pays relevant de l’action culturelle, l’ensemble des programmes dont elles détiennent en propre les droits. France Télévisions s’emploie également à préserver la clause dite de « distribution culturelle » dans ses contrats de coproduction. En 2006, France Télévisions a mis 335 heures à la disposition de CFI, ce qui représente seulement 6 % de l’offre globale de ce dernier.

Dans le cadre de la réforme de notre dispositif audiovisuel extérieur, le ministère des Affaires étrangères plaide pour que CFI devienne une véritable agence de coopération dans le domaine des médias. Mais d’autres solutions sont possibles, par exemple en intégrant CFI à l’INA. En tout cas, l’adossement à France Télévisions, qui a permis de rationaliser les multiples actions de coopération menées par le groupe en matière de télévision, trouve aujourd’hui ses limites : manque d’investissement de France Télévisions dans sa filiale, conflits de personnes à répétition, frustration d’un actionnaire majoritaire qui ne finance pas sa filiale. Désormais, la convergence technologique milite pour un regroupement multimédia de l’ensemble des actions de coopération.

b) Le moment de l’action : la mission Pouzilhac/Ockrent

La réforme initiée par la mission Benamou/Lévitte est entrée dans sa phase opérationnelle avec la création d’une société holding ayant vocation à regrouper l’ensemble des participations publiques dans ces sociétés, à l’exception de CFI dont la vocation de coopération serait affirmée et sortirait du périmètre de l’audiovisuel extérieur, votre Rapporteur spécial ayant déjà eu l’occasion de dire qu’il plaidait pour un rapprochement de CFI avec l’INA (24). L’objectif poursuivi reste de mieux coordonner cet ensemble disparate qu’est l’audiovisuel extérieur et d’y réaliser des synergies importantes 

Pour ce faire, l’État a acheté une société « coquille » permettant de lancer le processus en fournissant une personnalité morale, des statuts, des locaux, des commissaires aux comptes (25)… Cette « start up », a bénéficié d’une dotation en capital fournie par l’Agence des participations de l’État.

C’est ainsi que, le 4 avril 2008, la société par actions simplifiée « SNCF-A2 », dont l’État est seul propriétaire du capital de 37 000 euros, a modifié sa dénomination sociale pour devenir la société « Audiovisuel extérieur de la France » (AEF).

Ses statuts ont été mis à jour, AEF devenant une société anonyme dont l’objet est ainsi défini :

OBJET DE LA SOCIÉTÉ « AUDIOVISUEL EXTÉRIEUR DE LA FRANCE »

Statuts mis à jour le 4 avril 2008

La société a pour objet, en France et à l’étranger :

(a) de créer, organiser, promouvoir et commercialiser des chaînes de télévision, des stations de radiodiffusion et/ou des sites ou portails internet en vue notamment :

(i) de contribuer à la diffusion de la culture française et francophone par la conception, la programmation et la diffusion d’émissions de télévision et de radio ou de sites et portails internet, en français ou en langue étrangère, destinées aux auditoires étrangers ainsi qu’aux Français résidant en France ou à l’étranger ;

(ii) de développer des programmes d’information relatifs à l’actualité française, francophone et internationale ;

(b) de réaliser toutes prestations se rapportant à la conception, la création, la fabrication, la réalisation, la production, l’édition, la promotion, la commercialisation et la distribution de contenus (informations, programmes et/ou séquences audiovisuelles), ainsi que d’effectuer toutes opérations relatives à la coordination de ces contenus ;

(c) d’accomplir tout acte d’achat, de vente, de production, de coproduction, de commercialisation, de promotion, de programmation, de diffusion et de mise à disposition de tous contenus (informations, programmes et/ou séquences audiovisuelles) ;

(d) d’assurer l'ensemble des opérations de régisseur de publicité, de promouvoir et d’assurer toutes les formes d’opérations publicitaires, existantes ou à créer, utilisant le réseau de diffusion des médias (chaînes de télévision, chaînes de radiodiffusion, sites internet ou tous autres médias) dans lesquelles la société a, directement ou indirectement, des intérêts ;

(e) de prendre, d’acquérir, d’exploiter ou de céder tous procédés et brevets concernant les activités se rapportant à l’un des objets précités ;

(f) de participer de manière directe ou indirecte à toutes opérations se rattachant à l’un des objets précités, par voie de prise de participations, de création de sociétés ou d’entreprises nouvelles, d’apport, de souscription ou d’achat de titres ou de droits sociaux, de fusion, d’association ou de toute autre manière ; et

(g) généralement, de se livrer à toutes opérations industrielles, commerciales, financières, mobilières ou immobilières se rattachant directement ou indirectement, à l’un quelconque des objets précités.

Les membres du conseil d’administration de la société Audiovisuel extérieur de la France ont été nommés par un décret du 14 avril 2008 pour une durée de 5 ans (26). Le premier conseil d’administration s’est réuni le 15 avril 2008 dans les locaux du nouveau siège social, situé au 18 rue Pasquier à Paris.

CONSEIL D’ADMINISTRATION DE LA SOCIÉTÉ HOLDING

Décret du 14 avril 2008 portant nomination au conseil d’administration de la société Audiovisuel extérieur de la France

1. En qualité de représentants de l’État :

– Mme Anne Gazeau-Secret, directrice générale de la coopération internationale et du développement du ministère des Affaires étrangères et européennes ;

– M. Gérard Errera, secrétaire général du ministère des Affaires étrangères et européennes ;

– M. Rémy Rioux, sous-directeur des transports et de l’audiovisuel à l’Agence des participations de l’État ;

– M. Emmanuel Hamelin, inspecteur général des affaires culturelles ;

– Mme Laurence Franceschini, directrice du développement des médias ;

– M. Vincent Berjot, administrateur de l’INSEE.

2. En qualité de personnalités choisies en raison de leur compétence :

– Mme Hélène Carrère d’Encausse ;

– M. Alain Duplessis de Pouzilhac ;

– M. Jean-Michel Goudard ;

– Mme Christine Ockrent ;

– M. Benoît Paumier ;

– M. Hubert Védrine.

Puis les dirigeants, désignés par le Président de la République dès le mois de février, ont été nommés. Par un décret du 24 avril 2008, M. Alain de Pouzilhac, président du directoire de France 24, a été nommé président-directeur général de la société Audiovisuel extérieur de la France, avant de devenir président de RFI (27) et de TV5 Monde (28). Par décision du conseil d’administration de la société holding, Mme Christine Ockrent en est devenue directrice générale déléguée.

Votre Rapporteur spécial considère que la création de cette société va dans le bon sens et devrait permettre d’unifier et clarifier la tutelle des entreprises : des objectifs stratégiques clairs et compatibles entre eux pourront, par ce biais, être assignés aux entreprises et assortis d’une responsabilisation accrue de leurs dirigeants dans un cadre qui leur donne une visibilité pluriannuelle sur leurs objectifs et leurs moyens. De plus, cette société holding permettra de rapidement mutualiser certaines fonctions, à commencer par les fonctions « support » des opérateurs audiovisuels.

Mais beaucoup d’incertitude et de flou entourent encore la mise en œuvre de la réforme.

Votre Rapporteur spécial s’étonne notamment de ce qu’aucune lettre de mission n’ait été adressée à l’équipe dirigeante… qui se trouve ainsi en situation de devoir définir elle-même les priorités stratégiques et les moyens opérationnels de l’action audiovisuelle extérieure de la France.

M. Alain de Pouzilhac a indiqué à votre Rapporteur spécial que la mission qui lui était confiée trouvait ses bases dans un communiqué de la présidence de la République (cf. ci-dessous) et dans deux entretiens de M. le Président de la République : le premier avec lui, le second avec Mme Christine Ockrent.

UN COMMUNIQUÉ DE L’ÉLYSÉE POUR « LETTRE DE MISSION »

Communiqué de la présidence de la République – 20 février 2008 

Création de l’entité France Monde, présidée par M. Alain de Pouzilhac

La France dispose d’une politique audiovisuelle internationale ancienne, dynamique mais éclatée en plusieurs organismes travaillant de façon autonome et non coordonnée : TV5 Monde, chaîne à caractère multilatéral, RFI, et, depuis 2006, France 24. Le moment est venu, dans la logique des accords passés parfois de longue date avec nos partenaires français et francophones, de recomposer cette offre publique autour d’un bouquet de chaînes et de services. La nouvelle organisation est destinée à renforcer la force et l’efficacité de chacune de ces entités.

Après information préalable de ses partenaires coactionnaires des sociétés TV5 Monde et France 24, le Président de la République charge M. Alain de Pouzilhac, président du directoire de France 24, de préparer la constitution d’une société holding dénommée France Monde, destinée à réunir les participations de l’État dans RFI, TV5 Monde et France 24.

M. Alain de Pouzilhac a vocation à présider cette nouvelle entité, qui sera investie de la mission de moderniser et de dynamiser l’audiovisuel extérieur public français et francophone. Mme Christine Ockrent en serait nommée directrice générale.

Sur la base des conclusions du comité de pilotage établi à la demande du Président de la République, M. Alain de Pouzilhac est chargé de préparer la mise en place rapide de cette nouvelle entité France Monde et de définir son plan opérationnel assorti d’un plan d’affaires (2009–2013), après concertation approfondie avec l’ensemble des acteurs de l’audiovisuel extérieur public français et francophone.

Ce plan, qui sera remis au Président de la République ainsi qu’au Premier ministre, définira une stratégie de groupe adaptée à l’ère numérique, s’appuyant sur les trois antennes audiovisuelles et radiophoniques – France 24, RFI et TV5 Monde, dont le caractère multilatéral sera respecté et préservé – ainsi qu’une offre de services numériques réunis dans un portail internet commun.

Fait plus insolite encore et partiellement contradictoire avec le communiqué de l’Élysée du 20 février 2008, on peut légitimement s’étonner de ce que les pouvoirs publics aient autorisé M. Alain de Pouzilhac à annoncer qu’il n’était pas lié par le rapport Benamou/Lévitte. Lors de sa prise de fonction à la présidence de RFI, le nouveau président a également annoncé l’absence de tout licenciement consécutif à un plan social, renvoyant l’adaptation de la force de travail de RFI au futur plan stratégique.

Ces déclarations ont évidemment été relayées dans la presse, les nouveaux dirigeants déclarant ainsi : « À ce jour, nous n’avons reçu de notre actionnaire, l’État, aucune recommandation concernant les effectifs. (…) Lors de nos nominations, le Président de la République nous a dit que nous n’étions pas tenus par le rapport Benamou. Et, effectivement, plusieurs des dispositions, comme la mise en place d’une news room commune ou la restructuration de RFI, ne nous conviennent pas » (29).

M. de Pouzilhac a indiqué à votre Rapporteur spécial que le choix de s’écarter des conclusions du rapport Benamou/Lévitte résultait également de l’issue des négociations avec les partenaires francophones au sujet de TV5, au cours desquelles une note écrite du Quai d’Orsay aurait entériné l’abandon des conclusions du rapport élyséen : malgré les engagements du président de la société holding, cette note n’a pas été transmise à votre Rapporteur spécial, qui s’attachera, conformément aux pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 57 de la LOLF, à obtenir les informations nécessaires à la compréhension de la démarche de l’État.

Votre Rapporteur spécial ne doute néanmoins pas que le travail de qualité mené par la « mission de concertation et de propositions sur l’audiovisuel extérieur », qui ne saurait être rayé d’un trait, soit in fine profitable. Si certaines conclusions de ce rapport – celles qui ont pu crisper ou décevoir – peuvent probablement être écartées, l’essentiel de ce travail doit être mis à profit pour relancer l’audiovisuel extérieur. Votre Rapporteur spécial sera attentif à comparer les conclusions du rapport Benamou/Lévitte avec les orientations finalement proposées par Alain de Pouzilhac et Christine Ockrent, une fois validées par les tutelles.

En effet, le président de la société holding et sa directrice générale doivent à présent établir un document stratégique pour les années 2009–2013, décliné au niveau de la holding comme de chaque opérateur et comportant un volet de financement pluriannuel.

Ce plan d’action stratégique, qui s’articulera avec le rattachement des opérateurs audiovisuels à la société holding à l’issue du processus juridique et social (idéalement en fin d’année), constituera la base de négociation du futur contrat d’objectifs et de moyens (COM) de l’audiovisuel extérieur.

Par ailleurs, le nom « France Monde » n’ayant pu être conservé (sauf à payer une somme de 15 millions d’euros pour pouvoir l’utiliser), le lancement d’une consultation doit permettre de trouver, dès septembre, un nouveau nom pour la société holding… autre que le très austère « Audiovisuel extérieur de la France ».

2.– Les obstacles à lever

a) Faire entrer la société holding « Audiovisuel extérieur de la France » dans le capital de France 24 et de RFI

Deux questions capitalistiques urgentes doivent être résolues, qui sont un préalable à tout développement nouveau dans la réforme en cours : celle de la prise de contrôle par la société Audiovisuel extérieur de la France du capital de France 24 d’une part, de RFI d’autre part.

En effet, la volonté exprimée par les pouvoirs publics de confier à la société holding le portage des participations publiques dans les sociétés de l’audiovisuel extérieur, de façon à permettre d’en unifier la direction stratégique, rend inéluctable une évolution de l’actionnariat de France 24.

Comme le souligne le rapport de la Cour des comptes, l’accord des deux actionnaires étant requis préalablement à toute modification de l’actionnariat, cette évolution ne se réduira probablement pas à un simple apport à la holding des parts de France 24 détenues par France Télévisions et amènera à remettre en cause l’équilibre institutionnel et sans doute l’ensemble du dispositif actuel.

Les pouvoirs publics négocient actuellement avec TF1 le rachat de sa participation dans France 24 pour la rétrocéder à la société holding : d’après les informations recueillies par votre Rapporteur spécial, les négociations se sont entamées à partir d’exigences atteignant 90 millions d’euros… pour une participation acquise par TF1 pour 17 500 euros (montant correspondant à la valeur nominale des titres).

Comme l’affirme clairement la Cour des comptes, cette perspective met en lumière le paradoxe d’un montage initial où la société, bien que financée sur fonds publics, est néanmoins détenue par des actionnaires qui n’encourent aucun risque financier réel dans sa gestion. Pire, le développement de France 24 se trouve, dans les faits, entravé par la nature particulière de ce montage, TF1 s’opposant, par exemple, à la reprise de France 24 sur l’ADSL, dont les bouquets de télévision diffusent aujourd’hui la chaîne d’information LCI.

En l’absence d’une clause de retour à l’État de l’investissement qu’il a ainsi consenti, votre Rapporteur spécial rejoint la Cour des comptes pour estimer nécessaire que le caractère original du montage d’origine soit pris en compte d’une façon qui reflète sa réalité économique et préserve les intérêts patrimoniaux de l’État.

Et ce, d’autant plus que le montant qui sera arrêté entre TF1 et l’État vaudra pour le rachat de la participation de France Télévisions dans France 24… ouvrant ainsi la voie à une atténuation considérable de la place (précédemment décrite) que France Télévisions occupe au sein de l’audiovisuel extérieur. En effet, si la société holding détient 49 % du capital de TV5 Monde et 100 % de celui de France 24, France Télévisions ne conservera plus qu’une part minoritaire de TV5 Monde (en vertu de l’accord passé avec les partenaires francophones) et 75 % de Canal France International (sauf réforme de cette dernière, par exemple par rapprochement avec l’INA).

D’autre part, l’entrée de la société Audiovisuel extérieur de la France dans le capital de RFI implique de lever un obstacle législatif. C’est ce qui explique que le 10 juin 2008, l’Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement au projet de loi de modernisation de l’économie (LME) modifiant la loi de 1986 relative à la liberté de communication afin de permettre à l’État de détenir « indirectement » la totalité du capital de RFI (30). Cette disposition, en attente d’adoption définitive par les deux assemblées et de promulgation au Journal Officiel, est un préalable nécessaire à une détention directe du capital de RFI par la société holding.

b) Donner sa place à la spécificité francophone : le « partenaire » TV5

Votre Rapporteur spécial a, depuis longtemps, la conviction que TV5, qui est un outil singulier au sein de l’audiovisuel extérieur, doit être traitée – du moins dans un premier temps – en marge d’une réforme dont l’enjeu premier est le rapprochement de RFI et de France 24.

Rappelons, en effet, que TV5, seule chaîne au monde sur laquelle on ne diffuse aucune production d’origine anglo-saxonne, est un média généraliste, multilatéral et francophone, qui associe une dizaine de chaînes de télévision partenaires (31). Elle est adossée à ces chaînes publiques, dont les programmes de flux assurent l’essentiel de la programmation. Celle-ci est complétée par des achats (cinéma, fiction TV, documentaires, sport) et par quelques productions propres notamment dans le domaine de l’information ou encore dans le cadre d’opérations spéciales. Une place particulière est faite aux productions africaines.

C’est au fond ce qui explique, au terme d’un psychodrame très médiatisé, le compromis diplomatique auquel sont parvenus les États francophones en avril dernier : TV5 sera un « partenaire »… et non pas une filiale de la société holding, formule qui doit être comprise, pour cette dernière, comme fixant à 49 % le plafond de sa détention du capital de TV5 Monde (32).

D’autre part, Mme Marie-Christine Saragosse a été nommée directrice générale de plein exercice, faisant ainsi obstacle à la duplication de l’équipe Pouzilhac/Ockrent (aux fonctions de président–directeur général et de directrice générale déléguée) au sein de TV5.

Pour autant, ce compromis n’empêchera pas la société Audiovisuel extérieur de la France de promouvoir des synergies avec les opérateurs exclusivement français. Mais la stratégie poursuivie apparaît ici moins clairement. L’épisode du début de l’année 2008 pose, en tout cas, la question d’une modification du système de financement – incroyablement complexe (33) – de TV5 et de la mise en cohérence des exigences des partenaires francophones avec la réalité de leur implication.

3.– Les clefs de la réussite

a) En finir avec la dispersion des cibles : mieux choisir les zones géographiques et bien identifier les publics et les médias qui les desservent

La nécessité de faire des choix dans les zones géographiques, les publics et les médias qui les desservent est inéluctable au vu des données budgétaires, sans cesse rappelées par les travaux de la Cour des comptes comme par ceux de votre commission des Finances.

Ces cibles, ainsi que l’arbitrage qui doit les accompagner entre l’affectation prioritaire de moyens à l’audiovisuel extérieur ou aux autres vecteurs à l’international de notre langue, de notre culture et de nos idées, sont à déterminer au niveau politique : la cohérence du dispositif et l’aptitude à opérer ces choix dépendront non seulement de la mise en place réussie de la holding de l’audiovisuel extérieur, mais aussi d’une tutelle ministérielle capable d’en orienter l’action et d’en mesurer l’efficacité dans la durée.

Les incohérences et atermoiements stratégiques, précédemment décrits, ont abouti à une absence de pilotage par cibles et finalement à une dispersion des moyens audiovisuels extérieurs. Comme le montrent, par exemple, les rapports de la Cour des comptes sur TV5 Monde et RFI, deux zones prioritaires pour l’avenir de la francophonie – le Maghreb et l’Afrique subsaharienne – ne l’ont pas été au même degré pour l’audiovisuel extérieur :

– au Maghreb, ce sont les débordements (et le piratage) des chaînes de télévision nationales qui assurent pour l’essentiel la présence télévisuelle française, de façon d’ailleurs précaire. RFI y est peu présente, l’instrument radiophonique essentiel de la politique audiovisuelle française étant Medi 1 qui émet depuis Tanger à destination du Maroc et de l’Algérie ;

– quant à l’Afrique subsaharienne, si elle représente bien pour RFI la priorité en termes de moyens de diffusion et rédactionnels, TV5 Afrique ne représente que 10 % des coûts de TV5, autant que chacun des signaux Asie et Amérique latine, et le tiers des coûts des deux signaux européens de la chaîne. Son offre a été peu enrichie en programmes destinés à l’Afrique.

Au-delà des priorités par zone, l’audiovisuel extérieur n’a pas de définition commune de ses publics cibles et reste une politique de l’offre. Le passage à une politique plus différenciée, renonçant à une présence universelle de chacun des médias paraît inévitable dans le contexte budgétaire actuel. Cette ambition implique donc une meilleure définition des publics visés : mieux cerner les publics à atteindre, avoir une approche géographique plus fine, zone par zone, pays par pays, optimiser les modes de diffusion…

MIEUX APPRÉHENDER LES CIBLES :

PUBLICS VISÉS, ZONES GÉOGRAPHIQUES ET MÉDIAS PRIVILÉGIÉS

Les préconisations du rapport Benamou/Lévitte

L’approche des publics visés ne pouvant être globale, la stratégie doit être segmentée en fonction des six différents types de publics à atteindre :

– les décideurs qui savent aller chercher parmi les innombrables médias ceux qui répondent le mieux à leurs besoins. Une offre monolithique de type « chaîne de télévision » ou « chaîne de radio » ne semble pas pouvoir les satisfaire. À destination de cette cible, l’internet, accompagné de dispositifs d’alerte, de newsletters personnalisées, de contenus transmis sur mobiles, serait plus adapté à leurs modes de consommation ;

– le grand public n’est atteignable qu’en passant par des médias locaux. Seule RFI, pour la radio, paraît en mesure de jouer ce rôle en Afrique francophone puisqu’elle est assimilable, dans cette zone, à un média local. En télévision, il est difficile de viser le grand public, sauf à disposer de moyens financiers considérables, dans la mesure où, partout dans le monde, le grand public regarde la télévision dans sa propre langue ;

– les élites francophones, qui restent quantitativement limitées en dehors de l’Afrique francophone, sont les cibles naturelles de TV5 Monde et de RFI ;

– les publics jeunes et féminins doivent faire l’objet de plus d’attention, en particulier dans les grands pays émergents (Inde, Chine, Brésil, Mexique) et, pour le public féminin, en Afrique et dans certains pays d’Asie (Corée, Japon). Atteindre ce public nécessitera la mise en œuvre d’une stratégie de niche au travers de chaînes thématiques ;

– les enseignants et les « apprenants » de français sont partout un public particulièrement réceptif, qui se montre très attentif à toutes les nouvelles offres de programmes en français ;

– les expatriés ont désormais un accès relativement facile à l’ensemble des sites des médias nationaux français. Les enquêtes font clairement apparaître que l’audiovisuel extérieur ne devrait plus à l’avenir prendre en compte ce public, mais concentrer ses efforts en direction des publics étrangers.

De plus, il faut mettre en œuvre une approche plus fine de chaque zone géographique. Les études permettent de distinguer quatre ensembles géographiques correspondant à autant de priorités de notre politique audiovisuelle extérieure :

– l’Europe occidentale, le Maghreb et l’Afrique subsaharienne francophone restent considérées comme prioritaires compte tenu de nos intérêts comme de l’histoire. L’objectif est d’y toucher les décideurs mais aussi, dans la mesure du possible, le grand public du fait d’une communauté de destins passés et futurs qu’il convient de nourrir ;

– l’Europe orientale, le Proche et Moyen Orient, l’Afrique non francophone : régions dont la proximité géographique et les enjeux stratégiques qu’elles représentent (relations de l’Union européenne avec ses voisins immédiats, projet d’Union méditerranéenne, stabilité du Moyen Orient et de l’Afrique) imposent une politique ambitieuse ;

– l’Asie : la Chine et l’Inde réunissant un tiers de l’humanité, il est fondamental d’y exercer une influence plus importante et d’y promouvoir certaines valeurs. D’autres pays, par leur puissance économique et démographique (Indonésie, Japon, Australie) ou par leur proximité historique et culturelle avec la France (Vietnam, Laos, Cambodge) impliquent aussi une présence attentive ;

– les Amériques : l’un des objectifs majeurs pour notre action extérieure est de nouer des liens plus directs et plus fréquents avec les élites politiques, économiques et culturelles, en Amérique du Nord évidemment (partenariat transatlantique avec les États-Unis, francophonie avec le Canada/Québec), mais également en Amérique latine, région qui souffre d’un déficit d’implication de la France alors même que notre pays dispose d’un capital de sympathie considérable et sous exploité, pour des raisons historiques, culturelles ou même politiques.

Enfin, il convient d’utiliser efficacement trois vecteurs de diffusion :

– l’internet, à l’exception de certaines régions africaines, et dans une moindre mesure, du monde arabe, est un vecteur parfois plus efficace que la télévision pour exercer notre influence sur les élites. Toutes les études démontrent que, parmi les élites économiques et intellectuelles et, de plus en plus, parmi les classes moyennes, l’utilisation de l’internet se banalise et se développe de façon exponentielle, y compris dans les pays émergents ou en développement. L’utilisation de l’internet doit donc être placée au cœur de la réforme, en dynamisant les sites de TV5 Monde, France 24 et RFI, en mettant en place un portail commun et en accélérant la diffusion de ces trois médias sur l’internet ;

– la télévision reste partout dans le monde le média dominant auprès du grand public. On peut donc légitimement s’employer à maintenir les antennes existantes (modernisées et mieux adaptées à leurs publics) en s’appuyant sur deux types de programmations complémentaires : une chaîne multilingue exclusivement informative (France 24) et une chaîne en français à dominante culturelle (TV5 Monde) ;

– la radio, média relativement déclinant dans les pays développés et émergents, reste à moyen terme un vecteur puissant en Afrique subsaharienne et dans les pays en situation de crise ou de post-crise. Ainsi, RFI doit renforcer son rôle de média de référence dans les pays d’Afrique francophone et consolider cette position sur l’ensemble du continent.

Au-delà, on peut légitimement se demander si l’audiovisuel extérieur n’a pas, au cours des années, occulté les autres outils de l’action culturelle extérieure, potentiellement complémentaires d’ailleurs.

Il est peut-être temps de reconsidérer les autres moyens d’influence culturelle extérieure et, vu la réalité du contexte budgétaire, arbitrer au sein des moyens à consacrer à la politique audiovisuelle extérieure en donnant plus d’importance à d’autres vecteurs d’influence comme l’enseignement du français à l’étranger ou l’action culturelle extérieure.

b) Ne pas précipiter la réforme : procéder par « touches » permettra d’enclencher une dynamique vertueuse

À en croire le projet annuel de performances de la mission Médias présenté au Parlement par le Gouvernement lors du projet de loi de finances pour 2008, l’audiovisuel extérieur vise deux objectifs majeurs : rendre les programmes audiovisuels français les plus accessibles possible aux publics étrangers et à nos compatriotes expatriés ; favoriser la diversité culturelle et la démocratisation des pays du Sud en soutenant la modernisation de leurs médias. Intimidante est cette mission au regard du quotidien dans lequel les opérateurs de l’audiovisuel extérieur se débattent parfois pour assurer leur survie et boucler leur budget chaque année ! 

On se doit d’être honnête : l’échec des réformes successives de l’audiovisuel extérieur tient à l’extraordinaire complexité des mécanismes et à l’invraisemblable enchevêtrement des problématiques. Une progression par étapes s’impose : le « big bang » de l’audiovisuel extérieur doit se construire.

Ainsi, avant de dire ce que doit être et ce que doit faire la nouvelle structure, il faut être au clair sur les questions à régler pour chaque société avant de passer à l’étage de la société holding… sauf à condamner cette dernière à n’être qu’une couche de plus qui observe de loin.

Le respect de cet ordre logique des choses est une condition du succès ou de l’échec du chantier actuel de réforme. Votre Rapporteur spécial considère, de ce point de vue, que le Parlement doit faire apparaître le chemin critique restant à parcourir au niveau de chaque société audiovisuelle.

c) Ne pas rater le tournant du multimédia : pour un rapprochement des compétences et une meilleure cohérence des supports

Comme votre Rapporteur spécial a souvent eu l’occasion de le dire, il faut opter résolument pour l’architecture multimédia. Afin d’assurer le rayonnement de ses idées, de sa culture et de sa langue dans le monde, la France doit s’appuyer sur les trois médias de masse audiovisuels, complémentaires par leurs modes de consommation : la radio, la télévision satellitaire et l’internet. Si chacun des trois médias dispose d’atouts propres et permet plus particulièrement de toucher des publics et des zones spécifiques, c’est leur mise en cohérence qui constitue la clef du développement des opérateurs de l’audiovisuel extérieur.

C’est ainsi que le modèle traditionnel de la radio internationale, né de la guerre froide et sur lequel repose encore largement l’organisation de RFI, ne correspond plus à l’état du monde ni aux modes de consommation actuels de la radio. Il doit être fondamentalement remis en question afin de mieux coller aux attentes de publics beaucoup plus exigeants qu’auparavant, dans le contexte d’une offre médiatique sans cesse croissante, en concurrence directe non plus seulement avec les autres grandes radios internationales, mais aussi avec des radios locales très professionnelles et surtout avec les médias plus récents (télévision, internet, téléphone mobile) qui traversent désormais les frontières et dont la consommation progresse chaque année de façon soutenue.

Votre Rapporteur spécial relève, de surcroît (… et depuis trop longtemps), qu’il n’existe aucune politique de la présence française sur l’internet ni aucun outil performant pour diffuser les valeurs de la France, ses débats, ses messages, ses positions, son regard sur le monde… Or, l’internet, par ses caractéristiques techniques, économiques et sociologiques, est devenu en quelques années un média transfrontière encore plus efficace que la télévision et la radio.

Le nouveau modèle du « média global » implique donc de développer une offre sur tous les supports et tous les réseaux. Le rapport Benamou/Lévitte avançait l’idée d’une plateforme numérique devenant la colonne vertébrale du nouvel audiovisuel extérieur, alimentée par les antennes de télévision et de radio, et conduisant à une offre des programmes « à la carte », des déclinaisons thématiques et des services nouveaux (comprenant, par exemple, l’apprentissage du français ou des services aux voyageurs).

Si l’idée de « news factory » a été écartée par les nouveaux dirigeants des opérateurs audiovisuels extérieurs, c’est pour privilégier une démarche inverse, qui partirait du terrain pour finalement aboutir à un rapprochement des compétences et des métiers. Un idéal pourrait être de conjuguer la polyvalence et le dynamisme reconnus aux équipes de France 24 à l’expérience et à la hauteur de vue reconnues à celles de RFI. Le premier enjeu sera plus prosaïquement de permettre aux professionnels de la radio de s’approprier les outils de l’internet, en rendant compatibles les technologies utilisées à RFI et en convainquant les journalistes – une fois réglée la question des droits d’auteur – du bien-fondé d’une évolution multimédia qui s’impose partout.

De même, la stratégie « internet » poursuivie jusqu’à présent peut être améliorée. Malgré les efforts réels des diffuseurs, le bilan se révèle relativement peu satisfaisant. Certes, les audiences des sites de RFI, France 24 et TV5 Monde sont significatives (environ 5,5 millions de visiteurs uniques sur les 12 derniers mois) et les moyens budgétaires conséquents (budgets cumulés d’environ 13 millions d’euros). Chaque site présente des points forts : la vidéo et la polyvalence des journalistes de l’équipe éditoriale pour France 24 ; la musique francophone pour RFI ; la météo, les services aux voyageurs, l’apprentissage des langues et le dictionnaire multimédia pour TV5 Monde. Mais les moyens humains demeurent disparates, en raison notamment de la faible imprégnation de la culture internet parmi les journalistes de RFI et l’absence de rédaction importante dédiée à l’internet à TV5 Monde.

Le rapport Benamou/Lévitte préconisait de rapidement réadapter les contenus éditoriaux (titres, textes, intégration de moteurs de recherche et d’hypertexte), de signer les accords d’entreprise nécessaires à la « reprise pluri–média » des reportages en respectant les droits d’auteurs des journalistes, de promouvoir l’aspect communautaire de la nouvelle politique éditoriale au-delà de l’information et des services (relations directes mais contrôlées avec les internautes), d’intégrer la téléphonie mobile dans la stratégie de développement et, vu la nature de l’internet, de promouvoir un multilinguisme maîtrisé.

Votre Rapporteur spécial considère que ces préconisations restent pertinentes et méritent d’être mises en œuvre. Une promotion intense (par la radio, les deux télévisions et un référencement systématique sur tous les moteurs de recherche) de la nouvelle politique internet s’impose afin de marquer la rupture nette avec le passé et d’insister fortement sur le renouveau et la modernité.

d) Veiller à la réalité des synergies en empêchant la dérive des coûts de la réforme

Au terme des auditions qu’il a menées et à un moment du processus de réforme où la mesure la plus concrète est la création d’une nouvelle structure (la société holding), votre Rapporteur spécial est fondé à s’interroger sur la réalité des économies et des synergies qui sont si souvent mises en avant. Comme le fait observer la Cour des comptes, il n’est pas inutile de rappeler que le rapprochement de CFI et TV5, la montée de France Télévisions dans le capital de CFI et la création même de France 24 ont été, en leur temps, accompagnés de l’annonce de synergies et d’une cohérence renforcée du dispositif qui ne se sont pas réalisées !

À ce stade, les dirigeants de la holding travaillent avec le souci de ne « pas dépasser le budget global actuel » (34), lequel se caractérise – comme on l’a précédemment expliqué – par une obscure clarté… Par ailleurs, il serait regrettable de perdre de vue les gains de productivité et d’allégement de la charge publique qu’une telle réforme (reposant sur des économies d’échelle et un renforcement des synergies entre des acteurs dispersés) est, par nature, susceptible d’apporter. Votre Rapporteur spécial a plutôt le sentiment qu’à ce stade de la réforme, la dimension financière fait l’objet d’une appréhension pour le moins approximative, ce que l’état de nos finances publiques ne peut admettre.

Certes, on doit accepter que les bénéfices budgétaires des synergies attendues ne puissent se manifester à très court terme. Pour autant, le chiffrage des synergies potentielles semble parfois particulièrement volontariste : le rapport Benamou/Lévitte l’estimait, partir de 2012, à 26 millions d’euros par an… auquel pourraient s’ajouter 30 millions d’euros de recettes commerciales nouvelles par an, liées à la mise en place d’une approche groupée exploitant pleinement le potentiel de l’internet (35).

En tout état de cause, il est évident que la réforme, si elle aboutit, porte en elle des synergies en termes :

– de production de l’information ;

– de mise en commun et diversification des activités internet (services interactifs, plateforme communautaire…) ;

– de distribution et commercialisation (regroupement au niveau de la structure cible pour proposer une offre coordonnée et obtenir de meilleures conditions commerciales) ;

– de transport de signaux (les dépenses pourront être réduites avec le basculement vers le numérique) ;

– de fonctions « support » (les finances, le juridique, les études, la régie publicitaire, la direction des technologies seront mutualisées au niveau de la structure cible) ;

– ou encore d’immobilier, avec la recherche d’un rapprochement des implantations immobilières des différentes sociétés. 

Ce dernier point devra faire l’objet d’une attention particulière. Votre Rapporteur spécial considère que les synergies sur l’information et sur la diffusion impliquent une implantation unique. En effet, les implantations des sociétés de l’audiovisuel extérieur sont aujourd’hui géographiquement éclatées : Maison de la Radio pour RFI, Issy-les-Moulineaux pour France 24, avenue de Wagram pour TV5 Monde, avenue de Wagram pour CFI et Malakoff pour l’agence internationale d’images de télévision (AITV).

Votre Rapporteur spécial fait observer que le déménagement programmé de RFI, dans le cadre de la réhabilitation de la Maison de la Radio, fournit une occasion unique de regroupement géographique des équipes de RFI et de France 24. Il est essentiel de la saisir.

e) Le pilotage de l’audiovisuel extérieur de la France : l’épaisseur de la holding, la responsabilité de l’exécutif et le contrôle du Parlement

Alors que la création de la mission interministérielle Médias en 2007 devait, dans la logique de la LOLF, permettre aux différentes administrations chargées d’engager la dépense publique en matière d’audiovisuel extérieur de travailler de façon plus concertée, un constat d’échec s’est vite imposé : les frontières entre la direction du développement des médias, le ministère de la Culture, le ministère des Affaires étrangères et le ministère du Budget sont restées trop rigides.

La mise en place de la société holding est, de ce point de vue, une opportunité unique. De même, on peut se réjouir de la suppression, à compter de 2009, de la dualité de financement ministériel, un programme unique – piloté par le seul ministère de la Culture et de la communication – étant amené, dans le prochain projet de loi de finances, à regrouper l’ensemble des financements aujourd’hui dispersés (36).

Pour autant, les errements du passé sont toujours susceptibles d’être reproduits. Le ministère des Affaires étrangères restant légitime à intervenir dans des choix comportant une dimension diplomatique et d’influence forte (37), votre Rapporteur spécial juge donc essentiel de mettre en place un véritable pilotage politique, à côté du pilotage opérationnel par la société holding.

Il est plus que jamais crucial d’unifier le discours de l’État–actionnaire et d’assurer la cohérence du pilotage des opérateurs audiovisuels, qu’il s’agisse des circuits de financement ou encore de l’harmonisation des conventions collectives. Le conseil de l’Audiovisuel extérieur de la France (CAEF) n’a pas été réuni depuis 1996 : il n’est probablement plus l’outil adapté. Mais un lieu d’arbitrage politique, distinct du conseil d’administration de la société holding, demeure une nécessité.

Votre Rapporteur spécial considère, en effet, que la politique extérieure de l’État ne se définit pas dans le conseil d’administration d’une société où siègent des personnalités extérieures à l’État, même si cette société est à 100 % publique. Sinon, il ne servirait plus à rien de négocier avec elle un contrat d’objectifs et de moyens (COM) : le relevé des décisions du conseil d’administration y suffirait ! Quant à la présence de responsables administratifs des services de l’État au sein de ce conseil d’administration, elle n’exonère pas le Premier ministre et ses ministres de prendre, à leur niveau, les décisions politiques qui ont tant fait défaut à l’audiovisuel extérieur jusqu’ici.

Votre Rapporteur spécial n’a pas d’idée arrêtée sur la forme juridique de cet outil de pilotage mais souhaite une prise de conscience de sa nécessité par les différents acteurs (actionnaires comme salariés) de l’audiovisuel extérieur. Cette prise en conscience est indispensable pour donner une feuille de route – claire et fiable – à la société qui pilote les opérateurs… et pour lui en garantir les moyens.

Ces derniers resteront octroyés par le Parlement, lequel peut trouver, dans la programmation pluriannuelle des finances publiques qui sera présentée par le Gouvernement à l’automne, un outil de pilotage budgétaire nouveau et plus ambitieux. Les crédits de l’État étant désormais amenés à être définis sur trois ans, votre Rapporteur spécial considère que l’occasion doit être saisie pour donner une visibilité stratégique de plus long terme au nouvel ensemble audiovisuel.

Enfin, la question de l’absence de parlementaires au conseil d’administration de la société holding mérite d’être posée. Si la loi prévoit que des représentants du Parlement siègent au sein du conseil d’administration de RFI (38) comme de celui de France Télévisions (39), on peut se demander pourquoi il n’en a pas été de même pour la société Audiovisuel extérieur de la France. Est-ce pour éviter que les parlementaires soient en quelque sorte « juges et parties » ? À moins qu’il ne faille plus maintenir des représentants du Parlement au sein des conseils d’administration de France Télévisions ou de RFI ?

Quoi qu’il en soit, votre Rapporteur spécial annonce son intention, dans le prochain projet de loi de finances, de déposer un amendement permettant de réintroduire le nouvel ensemble audiovisuel extérieur dans le champ du contrôle parlementaire : il est, en effet, impératif que les futurs COM de l’audiovisuel extérieur soient systématiquement transmis aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat, afin que les parlementaires puissent se prononcer sur des orientations lourdes de conséquences pour les finances publiques.

Rappelons que le Parlement est aujourd’hui impliqué, en amont et aval, de la procédure des contrats d’objectifs et de moyens des sociétés audiovisuelles comprises dans le périmètre de la loi de 1986 relative à la liberté de communication (ce qui inclut RFI… mais pas TV5, ni France 24, ni a fortiori la société holding).

D’une part, l’adoption d’un amendement présenté, fin 2005, par votre Rapporteur spécial avait permis une plus grande implication du Parlement en amont du processus de signature des COM, les projets étant désormais adressés aux commissions permanentes concernées de l’Assemblée nationale et du Sénat. Ces projets peuvent ainsi faire l’objet d’un débat au Parlement et les commissions peuvent formuler un avis sur ces projets de contrat dans un délai de six semaines.

D’autre part, l’article 53 (modifié, il y a quatre ans, par un amendement adopté à l’initiative de votre Rapporteur spécial) de la loi de 1986 dispose que « le Président de la société France Télévisions présente chaque année devant les commissions chargées des affaires culturelles et des finances de l’Assemblée nationale et du Sénat un rapport sur l’exécution du contrat d’objectifs et de moyens ». Une transposition de cette procédure au futur COM de l’audiovisuel extérieur, permettant à l’équipe dirigeante de la société holding Audiovisuel extérieur de la France de venir débattre devant les commissions des Affaires culturelles, des Affaires étrangères et des Finances réunies, serait également pertinente.

EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa séance du 22 juillet 2008 à 15 heures, votre Commission a procédé à l’examen de la communication de votre Rapporteur spécial sur des rapports particuliers de la Cour des comptes relatifs aux comptes et à la gestion des opérateurs de l’audiovisuel extérieur.

Le Président Didier Migaud : J’ai le plaisir, avec M. Patrice Martin-Lalande, Rapporteur spécial du budget des médias, d’accueillir M. Jean Picq, président de la troisième chambre de la Cour des comptes, MM. Gilles Andréani, conseiller maître, Thomas Lesueur, auditeur, ainsi que Mme Maïa Wirgin, auditrice. Je me réjouis particulièrement de ce rapprochement entre la Cour des comptes et le Parlement : nous avons en effet sollicité l’assistance de la Cour afin de disposer d’une analyse des comptes et de la gestion de ces opérateurs et quatre rapports particuliers ont été transmis par le Premier président, M. Philippe Séguin, lesquels ont été immédiatement remis à M. Martin-Lalande afin qu’ils nourrissent – en plus des nombreuses auditions qu’il a menées – le rapport d’information sur les sociétés de l’audiovisuel extérieur qu’il s’apprête à présenter.

M. Jean Picq, président de la troisième chambre de la Cour des Comptes : Ce travail que nous avons accompli – en moins de six mois – est en effet une « première » dans les relations entre la Cour des comptes et le Parlement, la commission des Finances ayant accepté de modifier son agenda afin de pouvoir disposer d’une base de travail solide fondée sur le contrôle des quatre sociétés dites de l’audiovisuel extérieur : CFI, TV5, RFI et France 24. Peut-être s’agit-il d’ailleurs d’une première application, par anticipation, du nouvel article 47-2 de la Constitution ?

Quatre aspects importants me semblent devoir être en l’occurrence soulignés.

Sur le plan budgétaire, tout d’abord, nous remarquons que la cherté d’une politique ne garantit pas la richesse d’une société. Les dotations de l’action audiovisuelle extérieure, en effet, ont augmenté sensiblement au cours des six dernières années. Le total des crédits des programmes 115 et 116, auquel s’ajoute le financement par la redevance, est ainsi passé entre 2002 et 2007 de 215 à 281 millions, ce qui représente une progression de 31 %. À cela s’ajoutent également 16 millions résultant de l’application de la convention liant l’État à France 24. Le financement de ces entreprises s’élève donc à près de 300 millions. Cette forte progression a été presque entièrement absorbée par la montée en charge de France 24 alors que la tension sur les ressources n’en est pas moins persistante. Les subventions accordées aux autres sociétés – TV5, CFI et RFI – ont quant à elles progressé de façon modérée : sans être alarmante, leur situation financière est également tendue, toutes devant faire face à des besoins de financement qui ne permettent pas d’envisager une stabilisation de leur budget à court terme.

RFI a ainsi connu une perte exceptionnelle de 11 millions en 2006 liée à la renégociation, par ailleurs génératrice d’économies à terme, du contrat de diffusion qui la liait à TDF ; une recapitalisation est nécessaire. Par ailleurs, des coûts de restructuration doivent être également prévus en raison de choix de langues et de zones de diffusion trop longtemps différés. TV5 a financé son développement en réalisant des économies sur les frais de diffusion mais il ne reste qu’une zone, l’Europe, où une telle option existe si la société décide de renoncer à l’analogique en 2009 ; sans projet de développement particulier, le maintien de sa présence à son niveau actuel exige la poursuite de sa politique de sous-titrage ; les besoins d’enrichissement de sa grille de programmes sont par ailleurs manifestes.

France 24, enfin, est en phase de montée en puissance. Les développements envisagés par la convention – extension de la durée du programme arabophone, extension géographique de la diffusion aux Amériques et, éventuellement, diffusion en espagnol – combinés au mécanisme d’indexation pourraient porter son budget à 133 millions en 2010. Au total, il ne faut donc pas exclure l’hypothèse d’un financement du secteur de l’audiovisuel extérieur à hauteur de 350 millions.

Si, par ailleurs, la Cour des comptes n’est pas la mieux placée pour juger de l’efficacité du dispositif lui-même, elle n’en a pas moins formulé quelques remarques essentielles. La présence de RFI est importante en Afrique subsaharienne mais plus inégale ailleurs ; ses langues et ses priorités géographiques de diffusion méritent donc d’être repensées. TV5 est, quant à elle, une chaîne généraliste mondiale dont le réseau constitue le principal atout mais la qualité de ses programmes est souvent critiquée ; elle a de plus été entraînée vers un format hybride information/généraliste qui a certes été clarifié dans le sens d’un retour à sa vocation initiale mais sans que ses moyens d’information aient été pour autant réduits. France 24 est une chaîne d’information moderne relativement économe qui repose principalement sur la fourniture externe d’images et le recours à un réseau de correspondants non permanents. CFI, enfin, est une banque gratuite de programmes à laquelle s’ajoute une vocation récente de coopération dont on ne sait pas si elle prendra le relais d’une activité de banque vouée au déclin dès lors que de plus en plus de pays accèdent à une offre de programmes payante.

La présence de programmes français, en outre, ne coïncide pas toujours avec nos priorités stratégiques : TV5 est ainsi une chaîne francophone très investie en Europe alors que l’avenir de la francophonie se joue plutôt en Afrique ; RFI, de surcroît, n’a pas suffisamment réorienté son offre depuis la fin de la guerre froide et est insuffisamment présente au Maghreb ; ses modes de présence au Moyen-Orient, par ailleurs, doivent être redéfinis. De manière générale, c’est la présence des chaînes nationales françaises, par débordement ou par piratage, qui tient lieu de politique audiovisuelle extérieure en Afrique du Nord ; le passage à la télévision numérique risque, du reste, de créer un « trou noir » pour la présence audiovisuelle dans cette zone.

Enfin, les résultats de ces sociétés ne sont pas assez mesurés : outre qu’elles consacrent moins de 1 % de leurs chiffres d’affaires à l’évaluation de leur audience, les différentes mesures tendent plutôt à valoriser l’offre – le nombre de foyers initialisés – ou la notoriété.

Le pilotage politique et administratif de l’audiovisuel extérieur, en outre, est divisé et d’une efficacité inégale. La gestion de TV5 et CFI par le ministère des Affaires étrangères n’a pas permis d’imposer à TV5 les priorités géographiques qui avaient été décidées ni d’organiser de vraies synergies avec CFI. De plus, la forte opposition du Quai d’Orsay au projet de chaîne d’information internationale a conduit à mettre en place une offre renforcée d’information sur TV5.

RFI, quant à elle, est financée par le ministère des Affaires étrangères mais également par le ministère de la Culture à travers la redevance ; il est notable que des arbitrages sur les langues et les zones de diffusion n’ont pas été rendus. France 24 a été budgétairement rattachée au Premier ministre mais il s’agit d’une entreprise privée qui n’a pas eu de tutelle particulière et dont les choix stratégiques, souvent heureux, ont été opérés par sa direction. Enfin, France Télévisions n’a pas joué le rôle d’orientation stratégique qui aurait pu être le sien auprès de TV5 et CFI.

J’ajoute qu’à la suite des décisions prises par le chef de l’État, des travaux de la commission Benamou et de la nomination de M. Alain de Pouzilhac à la présidence de la société Audiovisuel extérieur de la France, de France 24, de RFI et de TV5, une holding permet désormais de centraliser l’ensemble des questions qui se posent. Enfin, des incertitudes demeurent et des priorités devraient inspirer selon nous l’action publique.

Une première inquiétude a trait à l’évolution de l’actionnariat de France 24. M. le Premier président Philippe Séguin a conclu ainsi la lettre qu’il a transmise à la Commission au début du mois de juillet : « La perspective du changement d’actionnariat met en lumière le paradoxe d’un montage initial où la société, bien que financée sur fonds publics, est néanmoins détenue par des actionnaires qui n’encourent aucun risque financier réel dans sa gestion. En l’absence – que l’on peut regretter – d’une clause de retour à l’État de l’investissement qu’il a ainsi consenti, la Cour souligne la nécessité que le caractère original du montage d’origine soit pris en compte lors de son éventuel dénouement d’une façon qui reflète sa réalité économique et préserve les intérêts patrimoniaux de l’État. »

Une seconde inquiétude concerne le pilotage de la holding par l’État. Si, en effet, le rassemblement de l’ensemble des subventions de l’État à l’audiovisuel extérieur dans un seul programme budgétaire – et ce d’autant plus que pourrait être supprimé le financement de RFI par la redevance – va dans le sens d’une plus grande lisibilité de la politique et des financements de l’État, comment seront décidées les orientations stratégiques, géographiques et linguistiques ?

La troisième inquiétude concerne le rôle de la holding dans l’allocation des ressources de chaque entité. Les instruments de pilotage seront-ils entièrement dirigés vers la holding, qui serait libre de répartir les ressources publiques entre ses sociétés filiales, ou les financements de chacune d’elle seront-ils individualisés dans le programme « audiovisuel extérieur » ? De la même façon, y aura-t-il un contrat unique d’objectifs et de moyens au niveau de la holding ou l’État sera-t-il amené à assigner des objectifs spécifiques à chaque société ?

Trois priorités nous semblent par ailleurs décisives.

La restructuration de RFI et la mobilisation de chacune des sociétés contrôlées – TV5, CFI, RFI – sur de véritables projets est essentielle. Ces sociétés, en effet, ont pâti des nombreuses remises en chantier de l’architecture d’ensemble de l’audiovisuel extérieur. Si leurs atouts sont reconnus, elles ne s’en trouvent pas moins confrontées à une nécessaire redynamisation. S’agissant de TV5, le projet devra en outre emporter l’adhésion des partenaires de la France.

Par ailleurs, des choix politiques doivent être opérés en terme de zones, de publics et de moyens. Le périmètre de l’audiovisuel extérieur est aujourd’hui excessif compte tenu des moyens affectés à cette politique : la contrainte budgétaire commande de passer d’une logique de l’offre et de la présence universelle de médias français sans doute trop nombreux à une politique ciblée qui réponde à une demande mieux définie.

Enfin, si les synergies sans cesse annoncées et jamais réalisées doivent être un cap essentiel pour le management, elles impliquent néanmoins un coût d’entrée et ne pourront se réaliser qu’à terme.

De telles priorités ne dispensant pas les sociétés d’un effort de maîtrise des coûts, la Cour formule deux préconisations. Ces sociétés doivent tout d’abord avoir des objectifs de ressources propres, en l’occurrence et à terme, selon la direction de France 24, à hauteur de 40 %. L’absence d’un tel objectif dans le plan de financement initial de cette chaîne est d’autant plus injustifiée que celle-ci a réalisé au cours de son premier exercice un produit de 4,3 millions. Les ressources propres de TV5, quant à elles, sont passées de 8,9 à 10,5 millions de 2002 à 2007.

En outre, s’il est normal d’anticiper les coûts de restructuration et d’achèvement de la montée en puissance de France 24, il est impératif de les inscrire dans un cycle pluriannuel de ressources dans lequel, à ces surcoûts qui peuvent être considérés comme un investissement de départ, succédera une phase de « retour » budgétaire sous forme de synergies ou d’une croissance des ressources propres. Ce cycle devrait être formalisé dans un contrat pluriannuel.

La France a hérité dans le domaine de l’audiovisuel extérieur d’un ensemble disparate constitué en strates successives où chaque société a été l’objet d’attentions prioritaires : d’abord RFI, pilier le plus ancien de cette politique qui a manqué depuis longtemps d’un ensemble d’orientations de la part des pouvoirs publics ; CFI, qui a aspiré à devenir une chaîne mondiale de télévision au début des années 90 et est aujourd’hui ramenée à un rôle modeste de banque de programmes et de coopérations : TV5, chaîne francophone mondiale devenue à la fin des années 90 la pièce centrale du dispositif audiovisuel extérieur ; France 24, enfin, chaîne d’information continue conçue en marge d’un système qu’elle complète plus qu’elle ne s’y intègre.

Ce dispositif, que l’on peut juger trop étendu, est aujourd’hui un fait acquis. Il doit être resserré, les différents intervenants doivent avoir des rôles mieux définis et les résultats d’audience être mieux évalués. Cela implique d’abord de stabiliser un secteur laissé dans l’incertitude, de remobiliser des personnels parfois démoralisés et d’assigner à chacun des objectifs clarifiés. La mise en place de la holding n’est pas une fin en soi : il s’agit d’un moyen permettant d’atteindre ces objectifs dans la cohérence et la durée.

Le Président Didier Migaud : Je vous remercie.

Votre Rapporteur spécial : Je me réjouis de la coopération intervenue en la matière entre l’Assemblée nationale et la Cour des comptes qui nous a transmis, dans le cadre de travaux conduits à la demande de notre Commission, trois rapports et un relevé d’observations définitives concernant les différents outils de l’audiovisuel extérieur public.

Déjà, en 2004, mon rapport d’information sur les conventions collectives des personnels de l’audiovisuel public s’appuyait sur une enquête de la Cour des comptes : il s’agissait, d’ailleurs, à l’époque, de la première demande d’enquête formulée par notre commission des Finances au titre de l’article 58 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances – LOLF –, prolongeant la mission constitutionnelle d’assistance de la Cour des comptes au Parlement.

De la même manière, au début de l’année, mon rapport d’information sur le bilan de la réforme de la redevance était rédigé sur le fondement de l’expertise de la Cour des comptes, à qui le Président Migaud avait commandé, toujours en application de l’article 58 de la LOLF, une communication utile et remarquée.

Faute de réponses précises de la part des autorités compétentes sur le coût de restructuration de RFI – sinon l’annonce, de la part du président Alain de Pouzilhac, qu’il n’y aurait pas de licenciement consécutif à un plan social –, disposeriez-vous, monsieur le président Picq, d’éléments précis sur ce coût, hormis la recapitalisation nécessaire de la société due à la perte de 11 millions d’euros entraînée par la renégociation du contrat de diffusion qui la liait à TDF ?

Par ailleurs, le budget de l’audiovisuel extérieur public, que vous avez estimé à 350 millions d’euros si les tendances actuelles se poursuivent, permettra-t-il, selon vous, de renforcer l’influence de la France au même titre, par exemple que les politiques en matière d’action culturelle, de développement de l’enseignement du français à l’étranger ou d’accueil d’étudiants étrangers en France ?

Concernant le manque d’adéquation que vous avez évoqué entre les objectifs stratégiques de la France et les outils de l’audiovisuel extérieur public, une mesure de l’efficacité de l’outil audiovisuel existe-elle et dispose-t-on d’éléments de comparaison avec d’autres pays ?

Quant au pilotage administratif et politique – d’une « efficacité inégale », selon votre formule –, les pouvoirs publics ne précisent pas la façon dont il sera organisé. Pour autant, il ne me semble pas que le conseil d’administration de la holding soit le lieu où l’on puisse définir la politique de l’audiovisuel extérieur de la France, mais plutôt celui où on l’applique. A quel niveau devrait selon vous s’effectuer ce pilotage ?

Le Président Didier Migaud : Pour reprendre une autre de vos formules, monsieur le président, comment faire pour ne pas avoir « une politique chère » à « l’efficacité inégale » et pour avoir « des sociétés moins appauvries » ?

M. Jean Picq : La Cour des comptes n’avait pas pour mission d’évaluer le coût de restructuration de RFI. Elle devait non pas s’intéresser à l’avenir, mais constater le présent. C’est ce qu’elle a fait en chiffrant le coût nécessaire de la recapitalisation à 11 millions d’euros et en soulignant deux éléments : d’une part, s’agissant du mode de diffusion, les économies espérées en équivalent temps plein avec le passage au numérique se sont transformées en embauches supplémentaires ; d’autre part, concernant les zones de diffusion et les langues, toute décision inspirée par le souci de cibler davantage l’offre implique forcément un coût, comme l’ont souligné les présidents Cluzel et Schwartz, qu’il s’agisse de la reconversion des journalistes concernés, de la formation ou encore de l’aide au départ.

S’agissant de l’évolution du budget de l’audiovisuel extérieur public, lequel est aujourd’hui de 300 millions d’euros, les besoins de financement s’additionnent. Ainsi, pour TV5, même sans plan majeur de développement, le simple fait de maintenir une politique de sous-titrage ou d’enrichir les programmes de la chaîne a un coût. De même, pour France 24, le budget devrait être susceptible de passer de 80 à 133 millions d’euros d’ici à 2010. Voilà notamment pourquoi la Cour a estimé à 350 millions d’euros les besoins de l’audiovisuel extérieur public à cet horizon.

En matière de benchmarking – ou plutôt de parangonnage, pour faire plaisir à notre Premier président – l’affichage des résultats d’audience par les sociétés étrangères – M. Gilles Andréani répondra sur ce point – implique vraisemblablement une part d’intox. Pour autant, les dépenses d’études des sociétés de l’audiovisuel extérieur public français sont modestes et tendent plus à valoriser un potentiel d’audience qu’à mesurer la réception, même si l’exercice est parfois délicat. Il y a là une part de poker menteur que les professionnels de l’audiovisuel seraient plus à même de décrypter.

Quant au pilotage des opérateurs audiovisuels, une holding, en effet, gère et n’est pas en charge des choix politiques et diplomatiques du pays. Je ne sais si le Conseil de l’audiovisuel extérieur de la France – CAEF –, qui ne s’est pas réuni depuis longtemps, est le lieu de la décision politique et des arbitrages, mais une holding permet à tout le moins de disposer d’un lieu unique pour rendre compte et pour apprécier les enjeux politiques, financiers et diplomatiques. La Cour ne peut donc que constater qu’il existe deux niveaux différents de pilotage, l’un d’animation, l’autre de prise de décisions politiques.

Concernant la situation financière des entreprises, l’augmentation du budget de l’audiovisuel n’a profité qu’à la montée en charge de France 24, ce qui a laissé les autres, sans modifier ni leurs programmes ni leur structure, dans une situation financière plus tendue.

M. Gilles Andréani, conseiller maître : En matière d’études d’audience, les comparaisons internationales sont très difficiles – on sait seulement que la BBC dépense deux fois plus que les autres en pourcentage de son chiffre d’affaires à mesurer son audience. Il est cependant dans la nature de TV5 et de France 24, plus que pour les autres sociétés, de chercher à mesurer leur notoriété plus que leur audience.

La stratégie affichée de France 24 – qui dépense à cet effet presque deux fois plus en pourcentage du chiffre d’affaires que les autres – a en effet été, dans les premiers dix-huit mois de son lancement, de promouvoir d’abord la notoriété de la chaîne, avant de la faire regarder.

En Europe, des procédés, comparables à ce qui existe en France avec Médiamétrie, permettent d’obtenir des résultats d’audience qui situent TV5 à des niveaux très modestes en Allemagne ou en Belgique. Ailleurs, les mesures sont faites par sondage et par extrapolation à partir d’un échantillonnage de grandes villes du monde, mais le rapport relatif à TV5 insiste sur le caractère très lent du renouvellement du cycle des sondages.

Le rapport ayant trait à France 24 contient des éléments de comparaisons internationales, mais les chiffres ont été communiqués par la chaîne elle-même. En tout état de cause, le niveau de financement d’Al Jazira est opaque, et concernant les deux grandes chaînes internationales de la BBC – BBC News et BBC World – il est difficile de reconstituer un budget probant car la maison mère prend à sa charge nombre de frais. La Cour ne peut donc qu’avouer son impuissance pour l’établissement de comparaisons internationales.

Selon notre estimation cependant, la France n’est pas très éloignée du Royaume-Uni et de l’Allemagne en niveau de la dépense globale publique pour les études d’audience.

Le Président Didier Migaud : Nous en venons à la présentation du projet de rapport d’information sur l’audiovisuel extérieur de la France.

Votre Rapporteur spécial : L’objectif du rapport d’information est de réintroduire le Parlement dans la conduite de la réforme de l’audiovisuel extérieur, dont il est largement exclu. C’est ce qui explique que des enquêtes aient été demandées à la Cour des comptes l’année dernière sur les différentes sociétés qui composent l’audiovisuel extérieur. Si, entre-temps, le Président de la République a confié une mission à deux de ses collaborateurs, MM. Benamou et Lévitte, pour réfléchir avec d’autres à la réforme de l’audiovisuel extérieur, et si la décision a été prise de constituer une holding et de nommer ses deux dirigeants, la réforme est cependant loin d’être achevée. Aussi est-il utile de rendre publics les travaux de la Cour des comptes et de les assortir de nos propres réflexions.

Ces dernières pourraient d’ailleurs se traduire – lors de l’examen du prochain projet de loi de finances ou du projet de loi sur l’audiovisuel qui prendra en compte certaines mesures préconisées par la Commission pour la nouvelle télévision publique – par le dépôt de plusieurs amendements.

Un premier amendement pourrait obliger à la transmission systématique du projet de contrat d’objectifs et de moyens de l’audiovisuel extérieur aux commissions parlementaires compétentes afin, comme pour l’audiovisuel hexagonal, de permettre au Parlement d’exprimer sa position avant la signature et, au Gouvernement, de faire connaître à ce dernier les objectifs qu’il assigne à l’audiovisuel extérieur.

Un autre amendement permettrait également inscrire dans la loi le principe d’une audition annuelle et systématique du président de la société holding de l’audiovisuel extérieur, de façon que, de la même manière que les commissions des Finances et des Affaires culturelles entendent chaque année un exposé du président de France Télévisions suivi d’un débat sur la mise en œuvre de son contrat d’objectifs et de moyens, nous puissions avoir un suivi du pilotage administratif et politique de l’audiovisuel extérieur – le politique ne se résumant pas en l’occurrence à l’exécutif, mais comprenant aussi le législatif.

La réforme est donc entrée dans sa phase opérationnelle avec la transformation d’une structure, dont l’État était seul propriétaire du capital, en une société rebaptisée « Audiovisuel extérieur de la France » – AEF –, ce qui a permis de créer la holding dans laquelle figureront à terme les outils de l’audiovisuel extérieur de la France, lorsque certaines questions liées à l’actionnariat auront été réglées. Ses deux dirigeants, M. Alain de Pouzilhac, président, et Mme Christine Ockrent, directrice générale, ont alors été nommés.

Il convient maintenant que les synergies à attendre de la mise en cohérence de l’audiovisuel extérieur soient quantifiées et évaluées afin de ne pas tomber dans des errements comme pour la numérisation de RFI. De même, les cibles géographiques, les publics visés ainsi que les médias à privilégier doivent être mieux définis, car le nouveau modèle du média global permet de sortir de l’organisation fondée sur une seule technologie de diffusion.

Par rapport aux autres formes d’influence de la France dans le domaine international, un comparatif est certainement à élaborer entre cet outil que constitue l’audiovisuel et les autres outils disponibles. Il conviendra également de vérifier la réalité des économies qui auront été exigées dans le cadre du contrat d’objectifs et de moyens de la société holding, afin d’éviter ce qui est arrivé avec la numérisation.

Concernant l’actionnariat, l’entrée d’AEF dans le capital de RFI impliquait de lever un obstacle législatif, ce qui a été réalisé avec l’adoption d’un amendement au projet de loi de modernisation de l’économie, permettant à l’État de détenir indirectement la totalité du capital de RFI. Cette disposition, en attente de promulgation, est un préalable nécessaire à une détention directe du capital de RFI par la société holding.

S’agissant de TV5, après le « psychodrame » dû à l’idée d’intégrer la chaîne au sein de l’audiovisuel extérieur français – nos partenaires francophones ayant en effet apprécié de manière inégale cette initiative que certains ont pu considérer comme une mainmise de la France sur cette société multilatérale –, la confiance semble aujourd’hui revenue : TV5 sera considéré comme un « partenaire » et non une filiale de la société holding – cette dernière ne détenant pas plus de 49 % du capital –, et Mme Marie-Christine Saragosse en a été nommée directrice générale de plein exercice.

Pour autant, ce compromis devra permettre à la fois de ménager la souveraineté de nos partenaires – même si la France supporte l’essentiel de la charge de TV5 – et de promouvoir des synergies avec les autres éléments de l’audiovisuel extérieur français.

Quant à l’actionnariat de France 24, composé de France Télévisions et de TF1 à la suite d’une participation acquise pour 17 500 euros chacune, les pouvoirs publics négocient avec la chaîne privée le rachat de sa participation, mais les prétentions de celle-ci vont au-delà de ce que l’État peut se permettre – sans parler des aspects moraux de la question. Ces négociations seront peut-être menées en lien avec ce que TF1 espère retirer des assouplissements en matière de publicité liés à la nouvelle directive européenne Services médias audiovisuels – SMA – et de la suppression partielle de la publicité sur France Télévisions.

Pour ce qui est du pilotage administratif et politique, on ne peut que s’étonner de l’annonce faite par Alain de Pouzilhac, par ailleurs excellent président, de l’abandon du rapport Benamou, alors que ce dernier constitue la première tentative d’une définition d’une politique cohérente de l’État en matière d’audiovisuel extérieur. Seules les autorités politiques en charge de l’audiovisuel extérieur de la France pourraient en décider ainsi. Ce travail devra être comparé au plan d’action stratégique pour les années 2009-2013 que doivent élaborer M. Alain de Pouzilhac et Mme Christine Ockrent.

On ne peut se contenter, comme lieu de définition de la politique extérieure de la France en matière d’audiovisuel, du conseil d’administration de la holding, même si des représentants de l’État y siègent. Les mois qui viennent seront donc importants pour arrêter la forme et le rôle de cet outil de pilotage.

En résumé, un pas en avant a été franchi. Alors que nombre de rapports antérieurs, y compris ceux que j’ai rédigés, dénonçaient un certain immobilisme dans le domaine de l’audiovisuel extérieur, la réforme est cette fois-ci lancée. Le cap est bon, et si des problèmes continuent de subsister concernant les modalités de réalisation de la réforme, ils pourront certainement être résolus lors du vote du projet de budget, et je tiens à nouveau à remercier la Cour des comptes de sa contribution au débat.

M. Jean-François Mancel : Je remercie M. le président Picq ainsi que M. Martin-Lalande pour la pertinence de leurs observations. Je suis assez étonné et préoccupé de constater que l’audiovisuel extérieur n’est pas complètement intégré au sein des différentes politiques du ministère des Affaires étrangères. Pire : la France ne semble pas considérer ce secteur comme un outil de sa politique étrangère. Qui prend les décisions en la matière ? A cela s’ajoute que la direction du ministère des Affaires étrangères censée être responsable de l’audiovisuel extérieur disparaîtrait, le ministère de la Culture et de la communication récupérant pour lui seul cette responsabilité. En outre, le pilotage de ce domaine ne pourrait-il être inclus dans l’éventuel Conseil de l’action extérieure de l’État envisagé dans le Livre blanc remis à M. le ministre des Affaires étrangères par M. Alain Juppé ? Enfin, ce Conseil ne pourrait-il pas jouer le même rôle que l’ancien conseil interministériel de l’audiovisuel ?

Votre Rapporteur spécial : Je partage ces préoccupations : il serait en effet paradoxal que le seul ministère de la Culture et de la communication ait en charge la politique de l’audiovisuel extérieur, lequel constitue par ailleurs un élément important de notre politique étrangère. Il me semble en revanche souhaitable que le nouveau Conseil exerce son activité d’une manière différente de l’ancien tant ce dernier ne donnait guère satisfaction. Je vous propose de poursuivre notre dialogue dans le cadre de la discussion du budget et de la loi sur l’audiovisuel. Quoi qu’il en soit, un versant interministériel s’impose.

Le Président Didier Migaud : C’est en effet le bon sens.

M. Jean Picq : Je tiens à souligner la diversité de ce secteur : les quatre sociétés que j’ai évoquées constituent quatre mondes à part entière. Entre CFI, petite structure en voie d’appauvrissement et TV5 ou France 24, les différences sont immenses et ce serait une erreur de croire à une fusion magique ! La restructuration est délicate et exige beaucoup de prudence de la part de la holding : le chemin sera long.

En outre, piloter, ce n’est pas gérer. L’audiovisuel est une affaire de professionnels. C’est à eux de s’intéresser aux synergies, à la valorisation et aux objectifs ! Étant par ailleurs soumis à des contraintes politiques – l’action de la France – et financières, il faut que les dirigeants veillent à la réalisation des objectifs et que les arbitrages politiques et financiers soient rendus au niveau adéquat. La holding doit pouvoir favoriser une telle organisation.

Le Président Didier Migaud : Je vous remercie. D’autres initiatives s’inscriront en effet dans le cadre de la prochaine loi de finances initiale ou du texte relatif à l’audiovisuel.

Consultée, la Commission a autorisé la publication du rapport d’information de votre Rapporteur, auquel seront joints les quatre rapports de la Cour des comptes ainsi que les lettres de transmission de M. Philippe Séguin.

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LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Cour des comptes

– M. Jean Picq, président de la troisième chambre

– MM. Gilles Andréani et Guy Mayaud, conseillers maîtres

– Mmes Valérie Charolles et Maïa Wirgin, MM. Thomas Lesueur et Alain Fontanel, auditeurs

Services de l’État

– Mme Laurence Franceschini, directrice du développement des médias (DDM)

– Mme Emmanuelle Bensimon, sous-directrice de la communication audiovisuelle à la direction du développement des médias

– Mme Valérie Bidegain di Rosa, conseillère technique au cabinet du ministre des Affaires étrangères et européennes

– M. Richard Boidin, directeur de l’audiovisuel extérieur au ministère des Affaires étrangères et européennes

– M. Étienne Fiatte, sous-directeur radio, télévision et journalisme à la direction de l’audiovisuel extérieur du ministère des Affaires étrangères et européennes

– M. Bruno Bézard, directeur général de l’Agence des participations de l’État (APE)

– M. Rémy Rioux, sous-directeur à l’Agence des participations de l’État

Secteur audiovisuel

– M. Alain de Pouzilhac, président de la société Audiovisuel extérieur de la France, de France 24, de Radio France Internationale et de TV5 Monde

– Mme Christine Ockrent, directrice générale de la société Audiovisuel extérieur de la France et de Radio France Internationale, administratrice de TV5 Monde

– M. François Bonnemain, président de TV5 Monde de 2006 à 2008, président de Canal France International

– M. Antoine Schwarz, président de Radio France Internationale de 2004 à 2008

– M. Jean-Paul Cluzel, président de Radio France, président de Radio France Internationale de 1995 à 2004

– M. Pierre Louette, président directeur général de l’Agence France Presse (AFP)

– M. Jean-Pierre Vignolle, directeur général de l’Agence France Presse

– M. Antoine Ludier, directeur administratif et financier de l’Agence France Presse

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ANNEXE :

RAPPORTS PARTICULIERS DE LA COUR DES COMPTES RELATIFS AUX COMPTES ET À LA GESTION DES OPÉRATEURS DE L’AUDIOVISUEL EXTÉRIEUR

1.– Lettres de M. Philippe Séguin, Premier président de la Cour des comptes

2.– France 24

3.– Radio France Internationale

4.– TV5 Monde

5.– Canal France international

Le Premier Président

Paris, le 25 avril 2008

Monsieur le Président,

Comme la Cour s’y était engagée dans la lettre que je vous ai adressée le 31 octobre dernier, vous trouverez ci-joints les rapports particuliers relatifs aux comptes et à la gestion des trois opérateurs historiques de l’audiovisuel extérieur pour les années 2000 à 2006, TV5 Monde, Canal France International (CFI) et Radio France Internationale (RFI). Tous ces travaux ont donné lieu à contradiction écrite et à auditions. Cet envoi sera complété par la communication courant juin du rapport sur France 24, qui a dû être différé pour disposer des comptes 2007, deuxième exercice d’activité de la société.

La Cour répond ainsi à votre souhait de disposer de ces travaux pour nourrir la réflexion de la Mission d’évaluation et de contrôle envisagée sur l’audiovisuel extérieur.

Dans cette perspective, il lui a semblé utile d’accompagner cet envoi d’observations de synthèse sur la politique audiovisuelle extérieure, qui tirent leur matière des contrôles des trois sociétés et des travaux sur l’exécution des lois de finances. Elles pourront être complétées à la lumière des conclusions du contrôle de France 24. Ces observations portent sur quatre points: la stratégie poursuivie par l’Etat, le pilotage des trois entreprises concernées, leurs résultats financiers et d’audience et les choix à faire dans le contexte de la réforme en cours.

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Monsieur Didier Migaud

Président de la Commission des finances

de l’Assemblée nationale

Palais Bourbon

126, rue de l’Université

75355 Paris 07 SP

1) Une stratégie instable ; des choix différés

Concluant un précédent cycle de contrôles sur l’audiovisuel extérieur dans une insertion au rapport public 2003, la Cour insistait sur la croissance des crédits et la dérive des coûts, notamment l’augmentation non maîtrisée des charges de personnel de RFI (+51% entre 1992 et 1999) ; relevant la complexité du dispositif institutionnel et le risque de redondance des efforts publics, elle s’inquiétait du développement sur TV5 d’une offre d’information excessive au regard des perspectives ouvertes par la création d’une chaîne française d’information ; elle préconisait une politique plus cohérente impliquant les acteurs de l’audiovisuel national, en particulier France Télévisions ; enfin, elle appelait à la formulation de priorités claires quant aux objectifs géographiques et aux publics visés, ainsi qu’aux moyens notamment de diffusion, à propos de laquelle elle soulignait la redondance des capacités et les avantages du numérique.

Jusqu’à cette date, la stratégie retenue en matière de politique audiovisuelle extérieure restait pour l’essentiel celle définie en avril 1998 dans le cadre du Conseil de l’action audiovisuelle extérieure (CAEF): clarification des rôles respectifs de CFI (recentrée sur son rôle de banque de programmes), et de TV5 (« navire amiral » de l’audiovisuel extérieur dont les moyens devaient être accrus) et exploitation de leurs synergies grâce à une présidence commune. Ces grands axes étaient complétés par une politique d’aide à la présence de chaînes françaises sur les bouquets satellitaires et un soutien à l’organisme professionnel de promotion à l’exportation des programmes télévisuels, TV France international.

La mise en oeuvre de cette politique a été lente et inégale. La priorité budgétaire affichée en faveur de TV5 ne s’est pas concrétisée. Il a fallu attendre cinq ans pour que soit mis fin au rôle de diffuseur de CFI avec l’arrêt de la chaîne destinée à l’Afrique CFI-TV. Décidée dans son principe en 1998, la montée de France Télévisions dans le capital de CFI n’a été effective qu’en 2003. Des synergies attendues d’une coopération plus étroite entre CFI et TV5, dotées à partir de 1998 d’une présidence commune, notamment pour la commercialisation, la diffusion par satellites, les achats de programmes, aucune ne s’est matérialisée. Quant à l’aide à la présence sur les bouquets satellitaires internationaux de chaînes françaises, son coût élevé (19,4 millions d’euros pour la période 1998-2002) avait été relevé par la Cour ; sans doute utile dans la phase de transition des années 1990 où se constituaient ces bouquets, elle a été arrêtée en 2003, avec la cession par CFI de sa participation dans PORTINVEST, opérateur du bouquet LeSat destiné à l’Afrique.

En dépit des limites apportées à sa mise en œuvre, la stratégie définie en 1998 est restée néanmoins la référence, jusqu’à ce que le projet de chaîne d’information internationale, souhaité par le Président de la république le 12 février 2002, se matérialise. Le processus s’est étalé sur trois ans, de l’appel à projets lancé en mars 2003 jusqu’à la signature en décembre 2005 de la convention entre l’Etat et la nouvelle société France 24. Cependant, ce projet a été marqué par de fortes réserves de la part des administrations en charge de l’audiovisuel extérieur, particulièrement le ministère des affaires étrangères. Celui-ci jugeait que les coûts élevés d’une chaîne disposant d’une capacité de production propre d’information sur le modèle de CNN ou d’Al Jezira excédait les moyens que la France pouvait y consacrer et craignait que, même dans le format allégé reposant principalement sur l’achat externe d’images d’information qui a finalement vu le jour, France 24 n’obère gravement son budget, déjà soumis à de sérieuses contraintes.

Les années 2003-2005 ont ainsi été pour la politique audiovisuelle extérieure des années d’incertitude et de débat, au cours desquelles le ministère des affaires étrangères, seul ou en conjonction avec le ministère de la culture, s’est efforcé de suggérer des alternatives au projet de chaîne d’information internationale, sous la forme d’une offre renforcée d’information sur TV5 ou d’une évolution volontariste de la chaîne européenne Euronews, aidée par la France jusqu’en 2002.

Parallèlement, dans le contexte de la guerre d’Irak de 2003, l’objectif de dispenser une information télévisuelle française à destination du monde arabe est apparu plus urgent. La réflexion sur une « chaîne arabe » a rencontré le projet de l’opérateur de la radio Medi 1, qui émettait depuis longtemps au Maroc en français et en arabe avec le soutien de la France, de développer une télévision d’information continue bilingue, Medi 1 Sat. C’est dans ce contexte que la France a été amenée à soutenir ce projet en 2005 par une participation publique au capital de la société et un prêt conventionné de l’Agence française de développement. Les ambitions de la France en matière d’information télévisuelle internationale s’incarnaient ainsi dans un projet spécifique à destination du monde arabe, alors que le projet France 24, qui comportait une part d’émissions en arabe, était dans sa phase de définition finale.

Au total, France 24 s’est développée en marge du dispositif existant de l’audiovisuel extérieur, plutôt qu’en synergie ou dans une complémentarité organisée avec lui. Le projet a été volontairement développé sur un modèle inédit de partenariat entre opérateurs publics et privés et a bénéficié d’un traitement budgétaire distinct, les crédits de subvention de France 24 étant rattachés au Premier Ministre dans un programme spécial.

La focalisation des débats stratégiques sur la télévision s’est effectuée au détriment de Radio France Internationale, qui avait tenté de s’y associer en déposant conjointement avec France Télévisions un projet pour le développement de la chaîne d’informations internationale en Mars 2003, qui a été écarté. Il n’a pas été suffisamment prêté attention par les tutelles à sa situation et à sa place dans le dispositif.

Ce n’est que depuis l’été 2007 et le lancement d’une réflexion interministérielle d’ensemble sur ce dispositif que la question de l’inscription de France 24 dans ce dispositif et de la cohérence d’ensemble de celui-ci, y compris RFI, a été véritablement posée. Les débats des années 2003-2005 ont en outre tendu à différer le traitement des questions que posaient les situations, parfois difficiles, des opérateurs existants.

2) Trois sociétés aux objectifs insuffisamment précisés

Les hésitations et les choix différés de la politique audiovisuelle extérieure ont pesé sur les objectifs stratégiques assignés aux trois sociétés de l’audiovisuel extérieur.

CFI : des objectifs changeants

Des trois entreprises examinées CFI est celle à laquelle sa tutelle a imprimé les plus nombreux changements de cap: banque de programmes destinés aux télévisions étrangères à sa création en 1989, elle est ensuite devenue une chaîne de télévision à ambitions mondiales, avec un signal par continent, avant d’être contrainte d’abandonner sa diffusion directe au Moyen-Orient en 1997, puis en Amérique, en Europe et en Asie dans le cadre de la décision précitée du CAEF d’avril 1998 qui la recentrait sur sa fonction historique de banque de programmes, sauf en Afrique. CFI poursuivra jusqu’en 2003 la diffusion d’une chaîne destinée au public africain, auprès duquel elle rencontrait un certain succès, grâce à une programmation adaptée.

Outre son rôle maintenu de banque de programmes, la société s’est vue confier, à partir de 2002, une nouvelle mission de coopération audiovisuelle à destination des pays en développement, principalement d’Afrique. Favorisée par l’implication de France Télévisions qui fournit des experts pour l’accomplissement de missions sur place, cette activité de CFI devrait, selon le Ministère des affaires étrangères, prendre progressivement le relais d’une activité de banque de programmes dont le succès implique de voir peu à peu les pays bénéficiaires de programmes gratuits français sortir d’une logique d’aide et s’adresser au marché pour les acquérir. De la rapidité de cette transition, et du volume d’actions de coopération dont pourra être chargée CFI, dépendra à moyen terme l’avenir de cette société.

Enfin, en 2005, CFI a été chargée par sa tutelle de réaliser grâce à une filiale créée à cet effet un portail Internet « idées de France » dont le Ministère des affaires étrangères souhaitait faire un moyen de diffusion multilingue des débats d’idées et de la production éditoriale audiovisuelle français. Le financement prévu ayant été supprimé du PLF 2006 à l’initiative du Sénat, la filiale a été dissoute en mai 2006 et ses personnels licenciés, le coût de l’opération s’élevant à 2,3 M€ correspondant pour l’essentiel à la subvention initiale du Ministère des affaires étrangères.

RFI : des réformes différées ou incomplètes

Société de programmes dont le personnel relève de la convention collective de l’audiovisuel public, soumise à une double tutelle de la Direction du développement des médias et de la Direction de l’action audiovisuelle extérieure du Ministère des affaires étrangères, correspondant à un double financement, par ce dernier et par la redevance, RFI a fait l’objet d’une moindre attention des pouvoirs publics alors qu’elle était la société de l’audiovisuel extérieur dont la situation appelait les arbitrages les plus nécessaires de leur part. La double tutelle s’est avérée inefficace et paralysante, rendant jusqu’à ce jour impossible la mise au point d’un contrat d’objectifs et de moyens, pourtant obligatoire, ou à tout le moins d’un document d’orientation commun des deux ministères à destination de RFI.

Alors que les diagnostics sur l’offre d’émissions en langues étrangères de RFI convergent depuis longtemps pour estimer que des choix, d’ailleurs difficiles, sont à faire en matière de langues de diffusion, en fonction de l’évolution géopolitique et de celle des techniques de diffusion, les conséquences à en tirer en ont été constamment différées. Il a fallu attendre la fin du mandat du précédent président de RFI pour qu’une restructuration de l’offre en langue étrangère soit proposée en réponse aux inquiétudes manifestées par les administrations de tutelle. En sens inverse, en 2004, ce sont les tutelles qui ont opposé une fin de non-recevoir à la question de la restructuration des rédactions en langues étrangères, accompagnée d’un plan social, que le nouveau Président de RFI leur avait pour la première fois posée en toute clarté. Devant ce refus, l’utilité de chacune des 17 langues de RFI a été confirmée. Si certaines d’entre elles ont été déclarées prioritaires, aucune réallocation de moyens significative n’a été effectuée en conséquence. Au contraire, des efforts nouveaux ont été consentis sur l’Europe et la diffusion en espagnol, qui ne faisaient pas partie de ces priorités.

La société a, parallèlement, mené deux réformes qui n’ont pas produit les résultats attendus. Les gains de productivité escomptés de la numérisation de la production ne se sont pas matérialisés, tandis que ceux liés à la réduction de la diffusion en onde courte ont été, jusqu’en 2000, principalement absorbés par la hausse des frais de personnel ; ceux, moindres, enregistrés depuis, ont été accompagnés d’une réduction en termes réels des subventions publiques. La restructuration des rédactions reste suspendue à une implication forte et convergente de la direction et de ses tutelles. En revanche, la réorganisation envisagée en 2001 pour mettre fin à l’isolement de chacune d’elles et permettre de rapprocher rédactions en français et en langues étrangères, qui apparaît toujours souhaitable et relève de la responsabilité de l’entreprise, reste à accomplir.

TV5 : des priorités relativement claires, mais imparfaitement suivies

Des trois entreprises, TV5 Monde est celle qui a eu la direction stratégique la plus claire, en dépit d’une gouvernance complexe liée à son caractère multilatéral. La conférence de Niagara-sur-le-Lac a retenu fin 2001 quatre objectifs pour le plan stratégique 2001-2004 : l’optimisation du réseau mondial de distribution, le développement du sous-titrage, l’amélioration de la qualité des programmes et le développement d’une information mondiale de référence. De ces objectifs, le troisième, l’amélioration de la qualité des programmes a été relégué en dernière position, dans un contexte où l’augmentation des coûts et la progression modérée du budget de TV5 le rendait très difficile à poursuivre. En 2005, ces objectifs ont été complétés par trois priorités géographiques : l’Afrique, le monde arabe et l’Europe francophone.

TV5 a ainsi été destinataire d’une feuille de route relativement claire. Elle a poursuivi l’extension de son réseau de diffusion, dans le cadre d’une politique de développement mondial, voulue dès l’origine, et dont le critère était de pouvoir recevoir la chaîne où que l’on soit dans le monde. Les marges de manœuvre qu’elle a pu dégager ont été principalement consacrées au sous-titrage, dont l’entreprise et ses mandants ont estimé qu’elle était la condition nécessaire de sa pénétration dans les zones autres que celles de la francophonie active, et à la préservation de sa présence sur les réseaux câblés face à une concurrence accrue. En revanche, il y avait sans doute une contradiction entre cette politique de présence mondiale aux objectifs relativement indifférenciés et l’identification de trois orientations géographiques, que TV5 a à ce jour peu traduites en priorités actives. La priorité géographique de fait de la chaîne reste l’Europe non francophone, où ses coûts de programmes et de diffusion sont les plus élevés.

S’il y avait ainsi des contradictions intrinsèques à ces différents axes stratégiques, la principale est bien celle qui a opposé le développement de l’information sur TV5 et le projet de chaîne d’information internationale voulu parallèlement par la France. Les dirigeants de TV5 ont, de 2002 à 2005, développé leur offre d’information, qui a représenté jusqu’au tiers de la grille, structurant celle-ci autour de rendez-vous à l’heure ronde (ce qui a d’ailleurs entraîné la perte de droits correspondant aux programmes en stock les plus longs qui n’entraient pas dans ce format), TV5 s’orientant ainsi vers un modèle inédit de chaîne info/généraliste. Il a fallu attendre 2006 pour que les contraintes de ce modèle soient assouplies et que l’information soit réduite dans la grille, sans toutefois que l’on observe de décrue sensible du volume de moyens que la chaîne lui consacre (116 ETP dont le tiers a été recruté entre 2002 et 2005). La direction, mais aussi sa tutelle directe, le Ministère des affaires étrangères, ont laissé l’offre d’information se développer au-delà de la priorité assignée par les cinq partenaires de la chaîne, dans le contexte du débat interne autour du projet France 24 qui s’est poursuivi jusqu’à son lancement effectif en 2006.

3) Des marges de manoeuvre financières réduites ; des résultats d’audience difficiles à mesurer

Les moyens mis en œuvre par les trois sociétés pour réaliser les objectifs qui leur ont été assignés sont analysés en détail dans les rapports définitifs joints. De façon générale, on peut observer que les budgets de CFI, RFI et TV5 ont progressé de façon très modérée au cours des six dernières années(40). Les ressources nécessaires au développement des trois opérateurs n’ont pu être dégagées au cours de la période que par redéploiement ou grâce à leurs ressources propres. Celles-ci ont surtout concerné TV5, passant pour cette société de 8,9 M€ en 2002 à 10,5 M€ en 2007 (mais elles ont accusé une forte baisse dans les premiers mois de 2008, dans le contexte de l’annonce d’une suppression possible de la publicité sur France Télévisions, les espaces publicitaires de TV5 étant pour l’essentiel commercialisés avec ceux des autres chaînes du groupe par leur régie commune).

L’évaluation des résultats de ces entreprises doit tenir compte de l’évolution contenue de leurs ressources publiques. Leur situation financière, sans être alarmante, est tendue. En LFI 2008, la subvention du MAE à CFI a été réduite de 2 M€ par rapport à 2007, dans le contexte d’une baisse des ses coûts de diffusion. RFI a enregistré en 2006 une perte exceptionnelle de 11 M€ liée à la renégociation, par ailleurs génératrice d’économies à terme, du contrat de diffusion qui la liait à TDF : une recapitalisation de la société avant fin 2009 sera nécessaire. Enfin, TV5 a principalement financé son développement par des économies sur les frais de diffusion et il ne reste qu’une zone où une telle option existe de façon réaliste, l’Europe, où l’option de renoncer à l’analogique pourra être exercée en 2009 et générer une économie annuelle de l’ordre de 3 M€ (mais la multiplication des modes de diffusion implique des coûts croissants qui l’absorberont très largement). Une marge de réduction de ses coûts de diffusion existe également à CFI, qui pourrait renoncer aux satellites pour le transport de ses programmes destinés à ses télévisions partenaires, au bénéfice d’Internet. Enfin, dans les trois sociétés, les frais de personnel ont progressé plus rapidement que les subventions publiques, ce qui était normal compte tenu de la faible progression de celles-ci, mais a rigidifié leurs structures de coûts.

Dans un contexte général de plus en plus concurrentiel, la mesure des résultats de l’audiovisuel extérieur est incertaine. Dans les pays développés où la mesure directe de l’audience est possible, les chaînes internationales sont souvent à la limite des seuils techniques de mesure (en France, la dizaine de chaînes d’information nationales et internationales disponibles sur le câble et le satellite ne dépassent pas ensemble 2% d’audience). Ailleurs, des enquêtes qualitatives sont nécessaires, qui ne donnent qu’une idée approximative de l’audience, et ne sont parfois que des enquêtes de notoriété. En revanche, la diffusion sur Internet est mesurable par l’organisme émetteur dans toutes ses dimensions. Sous ces réserves, on peut relever d’abord que CFI, RFI et TV5 consacrent à leurs études d’audience des montants faibles (moins de 1% de leurs ressources) et qui ont tendu à diminuer depuis 2002.

Les mesures par CFI de l’impact de sa banque de programmes auprès des chaînes utilisatrices sont incertaines, puisque la reprise par celles-ci de ses programmes lui a longtemps été connue par leurs seules déclarations, un système de filigranage électronique destiné à lui fournir un retour direct se mettant progressivement en place. De façon assez comparable, une grande incertitude entoure les reprises de ses programmes en espagnol par les radios partenaires de RFI en Amérique latine.

Les performances globales dont TV5 fait état se divisent entre un bassin d’audience potentiel (le nombre de téléspectateurs initialisés) indicateur d’un objectif assigné à TV5 qui est l’extension mondiale de son offre, et les mesures d’audience proprement dites, qui ne sont directement effectuées qu’en Europe ; ailleurs, une cinquantaine de villes, où les résultats ne sont actualisés qu’au rythme de six à huit par an, servent de test, leurs résultats étant extrapolés au reste du monde de façon peu certaine. Au cours des années récentes, les deux indicateurs (audience potentielle évaluée aujourd’hui à 178 millions de foyers et audience « réelle » à 74 millions) ont crû rapidement, mais en partie sous l’effet de facteurs mécaniques et méthodologiques. Là où ces chiffres se prêtent à une véritable analyse, c'est-à-dire en Europe, le premier croît plus vite que le second : cela tendrait à montrer que le développement tous azimuts de son offre doit désormais faire place à une politique plus ciblée d’identification de ses publics et de consolidation de son audience effective de la part de TV5.

Le nombre d'auditeurs réguliers de RFI dans le monde (écoutant la radio au moins une fois par semaine) était estimé en 2005 à 44 millions, dont 56% sur le continent africain et 24% au Proche et Moyen-Orient. En termes de part de marché, RFI attire jusqu'à 35% de l'audience veille (auditeurs ayant écouté la radio la veille du sondage soit une audience quasi-quotidienne) dans les capitales d'Afrique francophone, mais ne dépasse 2,5% dans aucune des dix autres capitales mondiales objets de sondages réguliers.

Enfin, les mesures d’audience sur Internet montrent un nombre de visites en forte croissance pour RFI et TV5, qui atteignent, avec respectivement 2 et 3 millions de visiteurs mensuels chacun, des niveaux comparables à ceux de sites de médias de premier rang comme celui du Figaro, des Echos ou de l’Express.

4) Des choix difficiles à faire ; une cohérence à définir

a) Un premier arbitrage est celui des moyens à consacrer à la politique audiovisuelle extérieure au regard d'autres vecteurs de la langue et de l'influence françaises tels que l'enseignement du français à l'étranger ou l'action culturelle extérieure. Considérée globalement, l'action audiovisuelle extérieure a vu ses dotations budgétaires sensiblement augmenter au cours des six dernières années, et ce sous l'effet de la création de France 24 : le total des crédits des programmes 115 et 116, et du financement sur redevance de RFI, est passé de 215 M€ en 2002 à 281 en 2007 soit +31%(41). De cette forte progression du budget de l'audiovisuel extérieur, qui en a fait un secteur prioritaire par rapport aux autres outils de l'action culturelle extérieure, on ne saurait retirer une impression d'aisance budgétaire, puisqu'elle a été entièrement absorbée par la montée en charge de France 24. Or celle-ci n'est pas terminée: à la subvention de France 24 pour 2008, il faut ajouter 16 M€ dus en exécution d'un avenant de 2006 à la convention la liant à l'Etat, mais non budgétés en LFI. La réalité est celle d'une tension persistante sur les ressources : on a voulu trop faire, sans s'en donner pleinement les moyens. Des choix politiques seront donc à opérer, en termes de zones et de publics, et de moyens.

Deux zones prioritaires pour l'avenir de la francophonie, le Maghreb et l'Afrique subsaharienne, ne l’ont pas été au même degré pour l’audiovisuel extérieur :

- au Maghreb, ce sont les débordements (et le piratage) des chaînes de télévision nationales qui assurent pour l'essentiel la présence télévisuelle française, de façon d'ailleurs précaire; RFI y est peu présente, l'instrument radiophonique essentiel de la politique audiovisuelle française étant Medi 1 qui émet depuis Tanger à destination du Maroc et de l'Algérie.

- si l'Afrique subsaharienne représente bien pour RFI la priorité en termes de moyens de diffusion et rédactionnels, TV5 Afrique ne représente que 10% des coûts de TV5, autant que chacun des signaux Asie et Amérique latine, et le tiers des coûts des deux signaux européens de la chaîne ; son offre a été peu enrichie en programmes destinés à l'Afrique.

Au-delà des priorités par zone, l'audiovisuel extérieur n'a pas de définition commune de ses publics cibles, et reste une politique de l'offre. Le passage à une politique plus différenciée, renonçant à une présence universelle de chacun des médias paraît inévitable dans le contexte budgétaire actuel.

b) Un deuxième problème est celui de la cohérence du dispositif de l'audiovisuel extérieur, qui repose sur quatre opérateurs principaux: une entreprise multilatérale (TV5), une filiale majoritaire de France Télévisions (CFI), une société nationale de programme (RFI), et une filiale à parité de TF1 et France Télévisions (France 24), chacune dotée de sources de financement, de procédures budgétaires et de modes d'exercice de la tutelle de l'Etat distincts. La création annoncée de la holding de l’audiovisuel extérieur qui regrouperait l'ensemble des participations publiques dans ces sociétés (à l'exception de CFI dont la vocation de coopération serait affirmée et sortirait du périmètre de l'audiovisuel extérieur) vise à résoudre ce problème de façon à mieux coordonner cet ensemble disparate et à y réaliser des synergies importantes. Or, ce diagnostic est ancien, et il n'est pas inutile de rappeler que le rapprochement de CFI et TV5, la montée de France Télévisions dans le capital de CFI et la création même de France 24 ont été en leur temps accompagnés de l'annonce de synergies et d'une cohérence renforcée du dispositif qui ne se sont pas réalisées.

Sur la base des contrôles que la Cour vient d'effectuer, il lui semble que cinq recommandations peuvent être formulées dans la perspective de la mise en œuvre de la réforme annoncée :

Ÿ A court terme, la clarification des missions et des priorités de chacune des trois entreprises contrôlées, accompagnée d'une réorientation correspondante de leurs moyens, lui semble plus urgente et, sur la base des expériences antérieures, plus pertinente que la recherche rapide entre elles de synergies de grande échelle. Il en va différemment des domaines tels que les études d'audience, la vente d’espaces publicitaires ou la commercialisation, dont la mise en commun est à l'évidence souhaitable pour éviter d'agir en ordre dispersé et relativement aisée.

Ÿ Il doit être tenu compte de la présence internationale de France Télévisions et de sa contribution actuelle à l’audiovisuel extérieur : fourniture de programmes à TV5 et à France 24, et d’experts pour les actions de coopération de CFI.

Ÿ Les trois sociétés dont la Cour vient d'achever le contrôle ont subi le coup des trop nombreuses remises en chantier de l'architecture d'ensemble de l'audiovisuel extérieur et des incertitudes qu'elles ont suscitées. Elles doivent être redynamisées autour de projets d'avenir qui s'appuient sur leurs atouts reconnus et, notamment, pour RFI et TV5, leur notoriété. S’agissant de TV5, le projet devra en outre emporter l’adhésion des partenaires de la France.

Ÿ La tutelle des entreprises doit être unifiée et clarifiée : des objectifs stratégiques clairs et compatibles entre eux doivent être assignés aux entreprises, assortis d’une responsabilisation accrue de leurs dirigeants dans un cadre qui leur donne une visibilité pluriannuelle sur leurs objectifs et leurs moyens, tout en maîtrisant la dépense publique.

Ÿ La nécessité de faire des choix dans les zones géographiques, les publics et les médias qui les desservent est inéluctable au vu des données budgétaires. Ces choix, ainsi que l'arbitrage qui doit les accompagner entre l'affectation prioritaire de moyens à l'audiovisuel extérieur ou aux autres vecteurs à l'international de notre langue, de notre culture et de nos idées, sont à faire au niveau politique: la cohérence du dispositif et l'aptitude à faire ces choix dépendra non seulement de la mise en place réussie de la holding de l’audiovisuel extérieur, mais aussi d'une tutelle ministérielle capable d'en orienter l'action et d'en mesurer l'efficacité dans la durée.

***

La Cour souhaite que ces rapports particuliers - qui sont aussi adressés aux dirigeants des trois sociétés et à leurs tutelles - puissent éclairer les choix à venir. Les observations de synthèse qui accompagnent la présente communication sont destinées en priorité à votre commission qui a formellement souhaité cette contribution d’un type nouveau aux travaux du Parlement. Toutefois, dans la perspective des auditions auxquelles la commission des finances procédera, il serait utile qu’elles puissent être connues des autres destinataires des trois rapports particuliers. C’est pourquoi je compte leur en faire parvenir copie sous quinzaine.

La Cour se réserve de revenir dans ses prochaines communications publiques sur la question de l'audiovisuel extérieur.

Je vous prie d’agréer, Monsieur le président, l’expression de ma considération distinguée.

Philippe SÉGUIN

Le Premier Président

Paris, le 11 juillet 2008

Monsieur le Président,

Par lettre du 25 avril dernier, je vous ai transmis les rapports relatifs à trois opérateurs de l’audiovisuel extérieur, TV5 Monde, Canal France International et Radio France Internationale, accompagnés d’une note de synthèse sur la politique audiovisuelle extérieure. Je vous prie de bien vouloir trouver ci-joint le quatrième et dernier rapport de la Cour sur ce sujet, relatif à la société France 24. Détenue à parité par France Télévisions et TF1, elle n’est pas une entreprise publique, et la Cour l’a contrôlée pour les exercices 2005 à 2007 sur la base de l’article L 111-7 du code des juridictions financières qui vise les organismes bénéficiaires de concours publics.

Ce contrôle m’amène à compléter sur les points suivants les observations de synthèse que je vous ai communiquées le 25 avril.

Dix-huit mois après son lancement, la chaîne d’information continue France 24, diffuse 24 heures sur 24 deux programmes en français et en anglais, ainsi qu’un programme destiné à l’Afrique du Nord et au Moyen-Orient composé de 4 heures d’émission par jour en arabe, complétés respectivement par ses programmes en français et en anglais. France 24 est diffusée en mode exclusivement numérique, par satellite et par câble en Europe, en Afrique et au Moyen-Orient. Elle est accessible par internet dans le monde entier. Dernière née de l’audiovisuel extérieur, la chaîne est organisée de façon à tirer pleinement parti des potentialités du numérique dans ses modes de production de l’information. A la mise en place de bureaux permanents à l’étranger dotés de moyens de production propres, elle a préféré la formule souple et moins coûteuse d’un réseau de correspondants.

Monsieur Didier MIGAUD

Président de la Commission des finances

De l’Assemblée nationale

Palais bourbon

126 rue de l’Université

127 75355 Paris 07 SP

Ces modes de fonctionnement, le recrutement auquel elle a procédé ab initio de journalistes bilingues, et très majoritairement jeunes, ont situé la chaîne française d’information internationale à part dans le dispositif de l’audiovisuel extérieur. Sur le plan juridique et financier, aussi, elle a reposé sur un montage qui la distingue des autres sociétés chargées de la mise en œuvre de cette politique. Il a consisté à confier la réalisation de la chaîne à une société privée détenue à parité par un actionnaire public France Télévisions et un actionnaire privé, TF1 et régie par un pacte d’actionnaires leur conférant un pouvoir de co-décision (et donc de blocage en cas de désaccord) sur les principales décisions stratégiques de la société. En revanche, le budget et l’intégralité des risques financiers sont assumés par l’Etat, qui s’est engagé par convention à assurer sur cinq ans à la société un niveau de financement assorti d’une clause d’indexation favorable. La convention ne prévoit ni le développement de ressources propres, ni l’intéressement des actionnaires aux performances de la société.

C’est la direction de France 24 qui a fait le choix, avalisé par les pouvoirs publics, d’en faire une chaîne mettant en œuvre en parallèle des programmes distincts en français et en anglais (puis en arabe), plutôt que d’offrir un programme en français entrecoupé de « décrochages » en langues étrangères comme cela était prévu au départ. Ce choix, qui a permis de clarifier l’offre de France 24, a été heureux. Il a facilité la montée en puissance rapide de France 24, qui peut être considérée en soi comme un succès.

Par delà le lancement réussi de la chaîne, la Cour souhaite mettre l’accent, pour l’avenir, sur trois séries d’interrogations ayant trait à la stratégie, au mode de financement et à l’actionnariat de la chaîne.

1) Sur le plan stratégique, la chaîne voit s’ouvrir plusieurs voies pour son développement. Projet à dimension mondial, il n’a pas achevé sa montée en puissance. La convention de subvention prévoyait que la chaîne, au-delà des zones prioritaires où elle émet aujourd’hui, étende sa diffusion à l’Asie et au continent américain et à d’autres langues étrangères dont l’Espagnol, mais sans que ces priorités soient clairement énoncées et hiérarchisées entre elles. Ces développements ne sont pas les seuls concevables. Pour sa part, la direction de France 24, juge prioritaire le développement de son offre en arabe (qu’elle souhaiterait faire passer à 24 heures quotidiennes) et sa diffusion en anglais sur les continents asiatique et nord américain. Ces développements, compte tenu du mécanisme d’indexation, porteraient le budget de France 24 à 133 M€ en 2010 (et la subvention de l’Etat à 125 M€, soit un quasi doublement par rapport aux besoins initialement estimés de la chaîne en vue de son lancement en 2006). Cette évolution est à mettre en regard de la subvention que l’Etat s’est engagé à verser à la chaîne en 2008 soit 86 M€. En tout état de cause, l’amélioration de l’offre de France 24 et l’élargissement de son audience potentielle entraîneront un renchérissement du coût des achats de programmes. Selon la Cour, cette perspective impose que les diverses hypothèses de développement envisagées soient rapidement clarifiées entre France 24 et l’Etat.

2) Quels que soient les choix qu’ils retiendront, une hausse des besoins de financement de la chaîne sera nécessaire, même s’il se situe en-deçà du chiffre de 133 M€ correspondant à l’estimation des priorités identifiées à ce stade par la société. Or celle-ci se situe dans un secteur où ses concurrentes tirent une part de leur financement du développement de ressources propres, qu’il s’agisse de la publicité sur l’antenne ou sur internet, du sponsoring ou d’autres formes de partenariat. Dans ces conditions, la question se pose de savoir si France 24 a vocation à être financée dans la durée et de façon quasi-exclusive sur fonds publics, comme c’est le cas aujourd’hui. Interrogée sur ce point par la Cour lors de son contrôle, sa direction a estimé qu’elle pourrait à terme s’autofinancer à hauteur de 40% quand les représentants de l’administration se montraient plus prudents, citant des chiffres allant de 20% à 30%. Les estimations de la chaîne se fondent notamment sur l’anticipation –à une échéance encore malaisée selon elle à déterminer- de ressources importantes issues des nouveaux usages de la téléphonie mobile.

Ces avis convergent en tout cas pour reconnaître qu’une part de financement sur ressources propres mérite d’être prévue. Il est souhaitable qu’un objectif clair et partagé soit défini entre les pouvoirs publics et l’entreprise, en même temps que seront précisés les axes de son développement stratégiques et la contribution financière de l’Etat à leur réalisation.

En tout état de cause, il importe que des critères permettant de juger de la réussite de la stratégie adoptée par France 24 soient fixés à cette occasion. A cet égard, la Cour note que les dispositifs de mesure mentionnés tant par l’entreprise que par les pouvoirs publics à l’occasion du présent contrôle, s’ils reposent sur des critères convergents (le contenu ; la notoriété ; l’image ; la distribution et le référencement ; les audiences et parts de marché ; les recettes publicitaires), ne comportent pas encore les objectifs chiffrés qui les rendraient opérationnels dans le dialogue stratégique entre l’Etat et la société et dans l’évaluation de sa performance.

3) Enfin, la volonté exprimée par les pouvoirs publics de confier à une société holding le portage des participations publiques dans les sociétés de l’audiovisuel extérieur, de façon à permettre d’en unifier la direction stratégique, rend inéluctable une évolution de l’actionnariat de France 24. L’accord des deux actionnaires étant requis préalablement à toute modification de l’actionnariat, cette évolution ne se réduira probablement pas à un simple apport à la holding des parts de France 24 détenues par France Télévisions et amènera à remettre en cause l’équilibre institutionnel et sans doute l’ensemble du dispositif actuel.

Cette perspective met en lumière le paradoxe d’un montage initial où la société, bien que financée sur fonds publics, est néanmoins détenue par des actionnaires qui n’encourent aucun risque financier réel dans sa gestion. En l’absence, que l’on peut regretter, d’une clause de retour à l’Etat de l’investissement qu’il a ainsi consenti, la Cour souligne la nécessité que le caractère original du montage d’origine soit pris en compte lors de son éventuel dénouement d’une façon qui reflète sa réalité économique et préserve les intérêts patrimoniaux de l’Etat.

Je vous prie d’agréer, monsieur le Président, l’assurance de ma considération distinguée,

Philippe SÉGUIN

Cour des comptes

Troisième chambre

releve d’observations definitives

France 24

Exercices 2005 à 2007

SOMMAIRE

Introduction 79

1. Compétence de la Cour 79

2. Présentation générale 79

3. Remarque introductive 79

PARTIE I :  La stratégie de France 24 80

I. La stratégie et son cadre institutionnel 80

A. la stratégie de France 24 a connu une réorientation majeure des les premieres semaines de son existence 80

1. L’élaboration de la convention de subvention a suscité diverses interrogations juridiques qui ont pesé sur sa rédaction 80

2. Principales caractéristiques de la convention initiale 82

3. Deux avenants contractuels ont significativement modifié le contenu de la convention initiale 85

4. La décision de diffuser France 24 en France a conduit à exclure tout adossement de la chaîne aux régies publicitaires de ses actionnaires 87

B. les relations entre les actionnaires 88

1. L’accord des deux actionnaires est indispensable pour l’adoption des décisions relevant du conseil de surveillance 88

2. L’évolution de l’actionnariat est strictement encadrée 89

3. Les dispositions financières préservent les actionnaires de tout risque financier 89

C. les relations avec les pouvoirs publics 91

1. Le financement inscrit en loi de finances n’a pas été ajusté aux montants dus en application de la convention et de ses avenants 91

2. Le dispositif de suivi de la subvention est limité 92

3. L’absence d’indicateurs de performance 93

4. Un audit biennal offre certaines garanties à l’Etat 95

5. Le gouvernement n’a pas souhaité soumettre France 24 au contrôle d’Etat 95

II. la stratégie mise en œuvre par la chaîne : France 24 après un an d’antenne 97

A. Une montee en puissance rapide 97

1. Les contraintes d’infrastructure 97

2. L’enjeu du recrutement 99

B. une chaîne multilingue 100

1. Une ligne éditoriale précisément définie et ciblée 100

2. Une chaîne unique multilingue 101

C. dernière née de l’audiovisuel 102

1. Des modes de production et de diffusion fondés sur les nouvelles technologies dont la société a pu tirer pleinement parti 102

2. Un mode de production qui repose largement sur des prestations extérieures 103

D. Une zone de diffusion qui n’est pas stabilisée 104

1. Une zone de diffusion qui ne couvre actuellement ni l’Amérique ni l’Asie 104

2. Des modes de diffusion reposant principalement sur le satellite 104

3. Des ambitions affichées en matière de développement 106

PARTIE II :  Les coûts et les moyens mis en œuvre 108

I. Analyse financière 108

A. Un compte de résultat qui traduit la rapide montée en puissance de la société 108

1. Les produits d’exploitation 109

2. Les charges d’exploitation 110

3. Les résultats 113

B. Un bilan largement dépendant de la subvention d’investissement octroyée par les pouvoirs publics 114

1. L’actif 114

2. Passif 116

3. Les annexes aux états financiers 116

II. Régularité et environnement de contrôle 116

A. France 24 s’est engagée à faire évoluer ses procédures relatives aux immobilisations incorporelles 116

B. Un mode de comptabilisation des subventions futures qui a varie 117

C. Autres points d’attention en matière comptable et financière 117

1. Le régime applicable en matière de TVA 117

2. La situation fiscale de France 24 118

3. Le traitement des immobilisations corporelles 118

D. Un processus comptable de qualité 119

1. Un suivi rapide et régulier 119

2. Les contrôles externes 120

3. Le contrôle interne comptable 120

III. les budgets et les grands equilibres financiers 121

A. Dès l’origine, la convention a négligé trois aspects importants de flux financiers attendus par la chaîne 121

1. Des conditions d’indexation généreuses 121

2. Une construction qui a fait l’impasse sur l’apport des produits financiers 122

3. Des perspectives de ressources propres à préciser 124

B. Les perspectives financières de France 24 a horizon 2010 125

1. Des perspectives d’évolution des charges très dynamiques 125

2. Quel modèle de financement ? 126

C. Les réalisations budgétaires 127

1. Une construction budgétaire en partie décalée par rapport au format défini par la convention 127

2. La société s’est écartée du cadre défini par la convention 128

IV. les moyens mis en œuvre 131

A. Analyse globale et compâraisons internationales 131

B. La campagne promotionnelle 133

1. Une stratégie de communication dont le budget a augmenté de 150 % 133

2. La soirée de lancement 135

3. La campagne de publicité internationale et multisupports 136

4. Des « road shows » dans certains pays de diffusion de la chaîne 136

C. les programmes 136

1. Des coûts variables selon les types de programmes 136

2. Des coûts qui devraient progresser à périmètre constant 140

3. Des développements envisagés en matière d’enrichissement des programmes et de développements linguistiques 141

D. la distribution 142

1. Analyse des coûts du réseau 142

2. Des développements à prévoir 142

3. Des synergies envisageables avec d’autres acteurs de l’audiovisuel extérieur 143

E. les frais de personnel 144

1. Les diverses composantes de l’effectif 144

2. Un dynamisme prévisible des coûts unit aires de main d’œuvre 145

3. Une gestion qui se distingue du reste de l’audiovisuel public extérieur 145

PARTIE III :  Les résultats et la performance 146

I. Les études menées par France 24 146

A. les moyens de mesure déployés 146

1. Le baromètre international de suivi 147

2. Les autres études 149

B. les résultats obtenus 150

1. La notoriété et l’exposition de la chaîne 150

2. L’audience du site internet France24.com 153

II. les synergies developpées avec les actionnaires 154

A. L’appui significatif des actionnaires lors de la phase de montée en puissance de la chaîne 154

B. En phase d’exploitation, des synergies avec les actionnaires en définitive moins importantes qu’escompté 156

1. Les images d’actualité 156

2. Les correspondants 159

3. Les magazines 159

INTRODUCTION

Compétence de la Cour

En application des articles L 111-7 et R 133-4 du code des juridictions financières (CJF), la Cour est compétente pour contrôler les comptes 2005-2006 à 2007 de la société anonyme à directoire et conseil de surveillance FRANCE 24. En effet, cette société a bénéficié au cours des exercices considérés d’une subvention versée par l’Etat qui a représenté plus de 50 % de ses ressources annuelles.

Présentation générale

France 24 est une société anonyme détenue à parité entre ses deux actionnaires, France Télévisions et TF1. Ses modes de financement et ses orientations stratégiques sont fixés par une convention de subvention dans laquelle l’Etat s’engage à financer l’activité de la société dont l’objet est de constituer une chaîne d’information internationale présentant un regard spécifiquement français sur l’actualité.

Lancée en décembre 2006, la chaîne diffuse actuellement en trois langues, l’anglais, le français et l’arabe, à raison d’une programmation 24 heures sur 24 dans les deux premières langues et d’une programmation quotidienne de 4 heures dans la dernière. Elle est accessible au niveau mondial sur internet mais uniquement en Europe, en Afrique et au Proche et Moyen Orient en mode télévisuel.

Le budget de la chaîne, soit 70 M€ initialement prévus pour son lancement, s’élève désormais à environ 95 M€. La chaîne a perçu en 2007 une subvention publique de 85,8 M€ qui constitue 95% de ses produits d’exploitation. Du côté des charges, les coûts de la société sont marqués par le niveau des achats et charges externes qui représentent près des deux tiers des coûts d’exploitation, France 24 ayant largement recours à des prestataires extérieures, dont ses actionnaires, que ce soit pour alimenter son antenne ou pour assurer son fonctionnement technique.

Remarque introductive

Le présent contrôle a été diligenté en janvier 2008 par la Cour dans le cadre d’un ensemble de travaux qu’elle conduit à la demande du Parlement sur les différentes sociétés qui composent l’audiovisuel extérieur. Dans le cas de France 24, le contrôle n’a porté que sur deux exercices.

Compte tenu du temps de développement qu’exige une chaîne de télévision, la Cour a conscience que ce bref délai impose de la prudence dans la formulation des appréciations. C’est dans cet esprit qu’elle formule les observations provisoires suivantes sur les aspects stratégiques, les questions financières et les résultats.

PARTIE I :  LA STRATÉGIE DE FRANCE 24

LA STRATÉGIE ET SON CADRE INSTITUTIONNEL

LA STRATÉGIE DE FRANCE 24 A ÉTÉ MODIFIÉE DÈS LES PREMIERES SEMAINES DE SON EXISTENCE

France 24 a été créée en novembre 2005. Sa dénomination sociale initiale était « chaîne française d’information internationale » (CFII), mais une modification des statuts intervenue en août 2006 a entériné l’inscription en raison sociale de la marque « France 24 » créée pour dénommer la chaîne. Par simplification, c’est cette dernière dénomination qui sera utilisée dans la suite du présent rapport, y compris pour décrire des opérations intervenues avant cette modification statutaire.

La fondation de cette entreprise est l’aboutissement d’un long processus dont seules les principales étapes sont ici brièvement rappelées.

A l’issue d’une consultation publique organisée du 19 mars au 22 avril 2003 ; une mission parlementaire a été confiée à M. Brochand, député, visant à « examiner la mise en œuvre du projet de création d’une chaîne internationale d’information ». Dans son rapport, M. Brochand a préconisé la création d’une société détenue à parts égales par France Télévisions et TF1, financée par l’État à hauteur de 70 millions d'euros dont une part, estimée à 15 M€, devait provenir de redéploiements dans le cadre d’une rationalisation de l’audiovisuel extérieur.

Sur cette base, les deux groupes audiovisuels ainsi sollicités ont, le 18 décembre 2003, adressé au gouvernement une étude détaillée présentant leur projet de chaîne. Ce projet n’a toutefois été formellement approuvé par le Premier ministre qu’un an après, le 9 décembre 2004. Il a conduit à l’élaboration conjointe par les futurs actionnaires et l’Etat d’un projet de convention de subvention comportant un cahier des charges. Ce projet de convention a été soumis aux autorités de contrôle du respect des règles de la concurrence au titre des aides d’Etat (direction générale de la concurrence de la commission européenne) et au titre du contrôle des concentrations (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes).

L’accord obtenu de ces autorités a permis la conclusion de la convention de subvention le 29 novembre 2005, en même temps qu’était constituée la société bénéficiaire. Cette convention a depuis fait l’objet de deux avenants modificatifs dont le premier, intervenu dès le mois de juillet 2006, a confirmé une réorientation stratégique de la chaîne dont le principe était acquis depuis le 10 avril 2006.

L’élaboration de la convention de subvention a suscité diverses interrogations juridiques qui ont pesé sur sa rédaction

L’élaboration de la convention de subvention s’est inscrite dans un cadre juridique exigeant qui a fait craindre aux parties à la convention, les actionnaires, TF1 et France Télévisions, d’une part, et l’Etat, d’autre part, qu’une rédaction maladroite puisse conduire soit, eu égard aux modalités de la passation du contrat, à une requalification de ce dernier en délégation de service public ou en marché public, soit au rejet du projet par les autorités de régulation de la concurrence, tant françaises que communautaires.

Ces incertitudes ont pesé sur la rédaction du texte et expliquent certaines des caractéristiques principales de la convention qui seront présentées dans la suite du rapport, en particulier le faible encadrement de l’activité de la chaîne par l’Etat.

Le risque de requalification en délégation de service public

Une première incertitude a été rapidement maîtrisée. Elle portait sur le risque d’une requalification du contrat en délégation de service public, qui a toutefois été jugé négligeable, les délégations de service exigeant, suivant leur définition légale, la perception d’une rémunération « substantiellement liée aux résultats de l’exploitation du service. » Or, aucun mécanisme de ce type n’est prévu dans la convention.

Le risque de requalification en marché public

La seconde incertitude portait sur le risque d’une requalification du contrat en marché public. Deux critères principaux permettent de distinguer les subventions et les marchés publics. D’une part, un critère fondé sur l’existence de contreparties directes au profit du financeur qui sont caractéristiques d’un marché public et sont révélées, dans le contrat, par la mention de prestations déterminées et individualisées destinées à la personne publique. D’autre part, un critère tiré de l’initiative du projet en cause, qui, dans le cas d’une subvention, doit résulter de la volonté de l’organisme subventionné, et non de celle du financeur.

Les conséquences possibles d’une requalification en marché public portaient essentiellement sur trois aspects : la sanction de l’absence de mise en concurrence préalable ; l’assujettissement des subventions versées à la TVA ; et l’application des règles de paiement de la prestation non plus par avance mais après service fait.

Pour parer ce risque, le préambule de la convention comprend une mention soulignant que la puissance publique apporte son concours financier au projet élaboré par TF1 et France Télévisions. L’Etat s’est en outre astreint à ne pas décrire de façon trop détaillée ses exigences en matière de conduite du projet par les opérateurs et les attentes de la puissance publique en contrepartie de sa contribution.

Les risques attachés au respect des règles de concurrence

La saisine de la direction générale Marché intérieur et services (DG MARKT) de la Commission européenne au titre du contrôle des aides d’Etat a, elle aussi, imposé des adaptations de la convention de subvention. C’est à la suite de contacts avec cette direction générale, préalables à sa saisine formelle, que le préambule du projet de convention a été modifié pour expliciter le fait que l’Etat confiait à la CFII « une mission d’intérêt général. » C’est aussi la Commission européenne qui a indirectement imposé les dispositions visant à restreindre les possibilités de distribution de bénéfices aux actionnaires et prévoyant l’hypothèse d’une réduction de la subvention au cas où il s’avérerait que son montant est excessif ou que la société n’a pas respecté ses engagements vis-à-vis de l’Etat.

Pour conforter le dossier présenté devant la DG MARKT, les actionnaires ont fait appel à un cabinet de conseil (Booz Allen Hamilton) chargé de montrer que le projet s’inscrivait pleinement dans le respect des règles posées par les textes communautaires et de la jurisprudence applicable en matière d’aides d’Etat.

Des études d’un coût élevé financé sur des fonds d’origine publique

Les incertitudes juridiques suscitées par le montage retenu ont amené les deux actionnaires et l’Etat à s’entourer dans un premier temps chacun de conseils juridiques, puis à faire conjointement appel à un cabinet de conseil en stratégie.

Les interventions des différents conseils juridiques ont eu lieu au cours de la phase de négociation du projet de convention (détaillée ci-après), entre fin 2003 et 2005. L’Etat n’a toutefois fait appel à un cabinet d’avocat (en l’espèce Clifford et Chance,) que pour se mettre en mesure de répondre aux observations formulées par les conseils juridiques des deux futurs actionnaires qui alléguaient les risques juridiques évoqués ci-dessus.

Les frais d’avocat engagés par les actionnaires ainsi que la facture du cabinet de conseil en stratégie choisi par ces derniers pour conforter le dossier présenté devant les autorités européennes de contrôle de la concurrence, ont été englobés dans les frais d’établissement facturés à France 24 lors de sa création, de sorte que c’est la subvention publique qui a financé l’ensemble des charges correspondantes.

En définitive, ces différents conseils ont représenté pour France 24 un coût total de 811 188 € HT qui se décompose ainsi :

- honoraires du conseil juridique de France télévisions : 228 722 €

- honoraires des conseils juridiques de TF1 : 129 985 €

- honoraires des conseils juridiques de l’Etat : 150 481 €

- honoraires du conseil en stratégie (commun FTV/TF1) : 302 000 €

Au demeurant, il convient de souligner que les questions abordées par les avocats conseils, qu’il s’agisse du régime des aides d’Etat ou de la distinction entre marché public, délégation de service public et subvention publique, portaient sur des sujets sur lesquels l’Etat n’est pas totalement dépourvu de capacités propres d’expertise.

Les difficultés juridiques identifiées et les points de débat introduits par les différents conseils sollicités ont pesé sur la rédaction de la convention de subvention et ont restreint la capacité de l’Etat à introduire des dispositions contraignantes à l’égard de ses cocontractants.

Principales caractéristiques de la convention initiale

Le premier projet de convention de subvention a été établi d’un commun accord entre la DDM et les futurs actionnaires le 18 décembre 2003. Les délais de saisine des autorités de la concurrence et les aléas du projet ont toutefois conduit l’Etat et les actionnaires de l’entreprise à peine créée à ne signer cette convention, adaptée à différentes reprises pour parer les risques évoqués ci-dessus, qu’en novembre 2005, soit deux années après le dépôt de leur projet par lesdits actionnaires.

La convention signée diffère toutefois sur certains aspects du projet initialement soumis par les groupes TF1 et France Télévisions. En effet, l’offre déposée en 2003 prévoyait un décrochage en anglais de 4 h00, après six mois d’antenne, et aucune diffusion sur le territoire français. Cette offre nécessitait selon les candidats le versement d’une subvention de 70 M€ par an. Or, la convention de financement retient ce montant mais n’exclut plus la diffusion en France et ne mentionne pas de durée quotidienne du décrochage en anglais ni dans d’autres langues.

Ce décalage explique que la société a cherché à réintégrer dans la négociation de l’avenant 1 (voir ci-dessous) les surcoûts induits, selon elle, par les choix opérés par l’Etat postérieurement au dépôt de leur offre par les actionnaires.

Les caractéristiques générales de la convention initiale sont les suivantes.

Montant de la subvention

La convention est conclue pour une durée  de cinq années et peut être prorogée d’un commun accord pour une nouvelle durée de cinq années.

Les subventions allouées s’élèvent à 360 M€ sur cinq années, hors développements et indexation, et pour la zone de diffusion Europe/Moyen-Orient/Afrique.

-  Plan pluriannuel de financement de la CFII (hors indexation)

En M€

Investissement

Fonctionnement

2005

13

2
(frais d’établissement)

2006

12

53

2007 à 2010

 

280
(hors indexation)

TOTAL

25

335

360 (hors indexation)

Source : convention de subvention du 29 novembre 2005 – version initiale

Le montant de cette subvention peut toutefois être modifié, en hausse comme en baisse, dans différentes hypothèses.

Une révision en baisse est prévue à l’initiative de l’Etat en cas de retard significatif dans l’exécution du projet, de modification substantielle des caractéristiques essentielles du projet sans l’accord préalable de l’Etat ou au terme d’un audit indépendant prévu tous les deux ans à compter de la diffusion de la chaîne. Toute décision de l’Etat sur ce point doit faire l’objet d’une décision écrite et motivée notifiée à la société. En outre, en cas de modification substantielle du projet, l’Etat doit, préalablement à toute réduction de la subvention, assigner à la société un délai raisonnable permettant à cette dernière de reprendre l’exécution normale du projet.

Une révision à la hausse est possible sur demande agréée de la société dans quatre hypothèses : un accroissement de la zone géographique de diffusion ; une augmentation du nombre de langues de diffusion ; un renforcement des moyens éditoriaux ; la nécessité de mobiliser des moyens éditoriaux exceptionnels pour faire face à l’actualité.

Sur le fondement de cette disposition, France 24 a proposé une réorientation stratégique et demandé une hausse de la subvention versée par l’Etat (infra : développements relatifs aux avenants à la convention de financement).

Résiliation de la convention

La résiliation de la convention est possible, sans indemnité, à l’initiative de l’Etat en cas de manquement aux obligations essentielles prévues par la convention ou en cas de changement dans l’actionnariat de la société non agréé par l’Etat. Dans une telle hypothèse, la convention ne prévoit pas d’indemnisation de l’Etat par les actionnaires à raison de leurs manquements, mais simplement un remboursement des subventions allouées qui n’auraient pas été utilisées pour la mise en œuvre du projet.

La résiliation de la convention est également ouverte pour un motif d’intérêt général moyennant indemnisation des actionnaires au titre des conséquences financières directes et indirectes qu’ils subiraient du fait de cette résiliation.

Stratégie et pilotage du projet subventionné

Le suivi du projet s’effectue au moyen d’un ensemble d’objectifs et d’indicateurs relatifs aux programmes, à la distribution de la chaîne et à son organisation et sa gestion (infra).

La stratégie est fixée par la convention qui détermine, dans sa version initiale :

• le public visé : si la convention fait état des populations en général, elle met l’accent sur les décideurs politiques et économiques, les professionnels des médias et plus largement les téléspectateurs réguliers des chaînes d’information nationales et internationales ; de fait, France 24 concentre sa stratégie de diffusion autour du public des leaders d’opinion ;

• la ligne éditoriale : elle doit refléter la diversité de l’actualité mondiale, permettre de la mettre en perspective tout en faisant preuve de réactivité ; elle comporte des éléments qui identifient la chaîne comme spécifiquement française, sans donner une place prépondérante aux événements nationaux ; elle s’attache à présenter l’actualité de la construction européenne et des organisations internationales et celle des pays dont les autres chaînes d’information ne rendent pas souvent compte, notamment  dans les pays du Proche et du Moyen Orient et en Afrique ;

• la grille des programmes : continue, 24 heures sur 24, elle comporte en principe deux bulletins d’information par heure et des magazines et émissions de plateau tournés vers l’actualité, soit, selon l’annexe à la convention, 8760 heures annuelles de programmes avec 36 journaux minimum par jours et 380 heures de programmes propres hors journaux par an ;

• l’approvisionnement en programmes : en moyenne un quart au moins des contenus sont produits spécifiquement pour France 24, qui dispose d’un réseau de correspondants dans les principales villes du monde et peut faire appel aux correspondants de TF1 et FTV, des contrats lui donnant libre accès moyennant rémunération forfaitaire aux images d’actualité de TF1, France 2, France 3 et LCI ; la chaîne produit également en propre des émissions et des programmes et peut reprendre ceux de ses actionnaires  ;

• les langues de diffusion : le français et les principales langues étrangères, dont l’anglais et l’arabe, puis l’espagnol selon la convention initiale, avec la capacité de recourir pour ce faire au doublage et au sous-titrage ;

− les zones de diffusion : la chaîne a vocation à diffuser dans l’ensemble du monde ; sa zone de diffusion initiale est l’Europe, l’Afrique et le Proche et Moyen Orient ; seront desservies ultérieurement l’Asie, l’Amérique latine et l’Amérique du nord

− Les mesures d’audience : la société procédera aux études permettant de mesurer sa réception et son audience dans les zones desservies.

Deux avenants contractuels ont significativement modifié le contenu de la convention initiale

Le premier avenant a consacré la réorientation stratégique demandée par la chaîne

Sitôt constituée en société, France 24 a entrepris d’affiner sa stratégie et d’organiser sa montée en puissance. Dans cette perspective, les dirigeants de la chaîne se sont servis d’une étude réalisée « dans 12 pays, sur 24 000 personnes et qui montrait les nouvelles attentes, les nouveaux comportements, les nouvelles attitudes des consommateurs dans le monde. » Ils ont aussi effectué une analyse de la concurrence et des cibles, assortie d’une étude pays par pays sur les langues, « d’où il est ressorti que plus de 85 % des leaders d’opinion du monde ne parlaient, ni ne comprenaient le français. »

Ce dernier constat a conduit le directoire à proposer au conseil de surveillance une stratégie qui s’écarte sur un point fondamental du cahier des charges fixé à la chaîne : l’anglais devait, selon le directoire, constituer la langue principale de la chaîne, et non le français. Cette stratégie a été, dans son principe, approuvée par les membres du conseil de surveillance lors de leur première réunion, le 30 janvier 2006.

Une grille de programmes élaborée dans le cadre de cette stratégie réorientée a ensuite été adressée à la direction des médias qui a demandé en mars 2006 à France 24 de replacer la langue française comme langue principale de la chaîne, conformément à la convention de subvention.

L’Etat a toutefois simultanément fait part de son intérêt pour une montée en puissance plus rapide qu’initialement prévu de la diffusion en anglais, en acceptant désormais l’hypothèse d’une diffusion de la chaîne sur deux canaux, dont l’un multilingue.

A l’issue des négociations, le Premier ministre a, le 10 avril 2006, adressé une lettre à France 24 exprimant son accord pour la diffusion de la chaîne sur deux canaux, l’un en français à destination de l’Europe, du Maghreb et de l’Afrique, le second, multilingue, à dominante de langue anglaise, mais réservant 25 % du temps d’antenne à la reprise du signal en langue française. Cet accord était assorti de diverses recommandations, portant en particulier sur l’unité de la rédaction et la négociation de partenariats avec les principaux acteurs de l’audiovisuel extérieur français.

Cet accord de principe s’est traduit par la signature d’un premier avenant modificatif le 24 juillet 2006 confirmant les éléments de la lettre du 10 avril et précisant qu’un décrochage en langue arabe devait être proposé dans les sept mois suivant le démarrage de la diffusion du programme multilingue.

Ce premier avenant a modifié le montant de la subvention publique en augmentant sa base, en valeur 2005, de 10 M€ (soit en réalité 10,7 M€ dès l’année de conclusion de l’avenant – cf. ci-dessous les modalités d’actualisation).

Simultanément, la subvention 2006, initialement fixée à 65 M€, a été réduite de 18 M€ pour tenir compte du retard pris sur le rythme prévu d’exécution des dépenses conformément à une disposition de la convention initiale qui prévoyait alors que la subvention de l’Etat serait réduite « dans l’hypothèse où la société ne serait pas en mesure d’engager les dépenses inscrites à son budget ».

Cependant, en dépit de sa mise en œuvre dès la première année d’existence de l’entreprise, cette règle d’ajustement du montant de la subvention sur sa consommation effective par la société a été supprimée dans ce même premier avenant.

La définition des zones prioritaires de diffusion était aussi modifiée pour tenir compte de l’existence de deux programmes distincts. Si l’Europe et l’Afrique constituaient des zones cibles à la fois pour le programme français et le programme multilingue, en revanche, le Maghreb n’était concerné que par le programme Français et le Proche Orient que par le programme multilingue. En outre, la convention était modifiée pour permettre à France 24 d’être diffusée dans les autres zones « en fonction des opportunités qui pourront se présenter sur ces marchés. »

L’estimation du surcoût de la réorientation stratégique

L’impact financier de l’aménagement de l’offre a fait l’objet de travaux d’évaluation conduits par la société elle-même. Les modalités envisageables pour l’adaptation de l’offre (répartition des programmes entre les langues ; nombre de canaux de diffusion ; organisation des rédactions) ont elles-mêmes fait l’objet de nombreuses hésitations qui sous-tendent les différentes simulations budgétaires successivement produites par la chaîne.

Dès janvier 2006, France 24 a ainsi cherché à évaluer le coût supplémentaire d’une diffusion en France et d’une simple augmentation de la durée quotidienne des programmes en langue anglaise sur un canal unique et multilingue.

Le surcoût estimé de la diffusion en France a été chiffré à 7 M€, correspondant :

- au coût des 4 satellites supplémentaires nécessaires à la diffusion en France métropolitaine et outre-mer (1,3 M€) ;

- au renchérissement du coût d’approvisionnement en images tant auprès des maisons mères que des agences d’images.

Le surcoût d’une extension de la diffusion de la chaîne en langue anglaise a fait l’objet de cinq hypothèses dont l’impact budgétaire variait de + 1 M€ à +20,3 M€. Dans l’hypothèse la plus onéreuse, deux canaux de distribution coexistaient, l’un pour une chaîne exclusivement en Français, le second pour une chaîne exclusivement en Anglais, ce qui correspond pour l’essentiel au projet ultérieurement retenu.

Par conséquent, en janvier et février 2006, France 24 estimait que le surcoût des choix opérés par l’Etat (diffusion en France) et de la réorientation proposée par la chaîne (deux canaux de diffusion), dans l’hypothèse la plus onéreuse, allait induire un besoin de financement supplémentaire annuel de 27 M€.

La chaîne a cependant rapidement constaté que son évaluation du coût de la diffusion en France (estimée à 7 M€) était largement infondée, le coût des images demeurant en définitive inchangé et le surcoût de diffusion étant très limité, dès lors que, selon les termes mêmes de la convention de subvention, le gouvernement avait décidé de ne diffuser France 24 qu’en Europe, ce qui excluait implicitement les DOM et TOM, nonobstant la mention d’une diffusion « sur le territoire français ».

Par conséquent, fin février 2006, France 24 a réduit sa demande globale de financement supplémentaire à 5 M€. Son projet se limitait alors à la mise en œuvre d’un canal unique, multilingue, à prédominance de langue anglaise et diffusé sur le territoire français (en plus des zones cibles initialement retenues).

A cette estimation s’ajoutait le coût supplémentaire de différentes options demandées par l’Etat dont la plus onéreuse concernait la création éventuelle d’un décrochage en Français d’une durée de 6 à 14 h (soit 8 à 11 M€ de surcoût).

Lorsque, après de nouvelles discussions, la décision fut prise de créer deux canaux, l’un francophone, l’autre multilingue, France 24 proposa deux hypothèses d’organisation :

- Deux rédactions distinctes chapeautées par une direction de l’information commune. L’impact budgétaire global du surcoût induit par un avenant rédigé en ce sens était alors estimé entre 18 et 20 M€.

- Une rédaction unique, bilingue, chargée de concevoir indifféremment en français et en anglais la grille des programmes. L’impact budgétaire induit par cette organisation était nettement plus faible puisqu’il s’établit entre 8 et 10 M€.

C’est cette dernière option qui a été retenue par le Premier ministre et que consacra la conclusion de l’avenant 1.

Le deuxième avenant a parachevé la réorientation stratégique en dédiant à l’anglais le canal multilingue

L’avenant n°2 à la convention, en date du 26 février 2007, modifiera une troisième fois le contenu linguistique de France 24 en faisant du programme multilingue un programme constitué à 100% en langue anglaise.

L’insertion de France 24 dans le paysage audiovisuel est en outre précisée : France 24 ne devra pas fragiliser la position de TV5 monde ; par ailleurs, la chaîne pourra être diffusée en France. A cet égard, deux modes de diffusion sont cités (le câble et le satellite42), la diffusion hertzienne et la diffusion par voie ADSL de France 24 sur le territoire national n’étant donc pas mentionnées.

La configuration des programmes et de leur zone de diffusion a donc sensiblement évolué au travers de ces deux avenants que ce soit pour permettre une diffusion en France, selon des modalités toutefois encadrées, ou encore pour consacrer l’existence de deux programmes, l’un en français et l’autre en anglais. Dans le même temps, les conditions financières de la convention ont été révisées, l’Etat augmentant son soutien à France 24 de 10 M€ en base annuelle.

La décision de diffuser France 24 en France a conduit à exclure tout adossement de la chaîne aux régies publicitaires de ses actionnaires

Le projet de convention de financement avait été soumis aux autorités de contrôle de la concurrence avant sa signature par les parties (cf. ci-dessus). Les modifications apportées par l’avenant 1 étant substantielles, tant en ce qui concerne la diffusion en France, désormais explicitement stipulée, que la modification du projet éditorial (l’émission en définitive sur deux canaux simultanés) nécessitaient de vérifier auprès des autorités concernées que leur autorisation initiale demeurait valable. Après que le président du conseil de surveillance eut mentionné cette nécessité au Premier ministre dans une lettre du 23 mai 2006, les avocats de France 24 ont notifié à la DGCCRF, le 7 septembre 2006, le contenu de l’avenant 1. Pour prévenir le risque de renforcement de la position dominante de TF1 sur le marché publicitaire43 que présentait le projet dans l’hypothèse où la régie publicitaire du groupe privé interviendrait dans la commercialisation des programmes de la chaîne d’information internationale, une lettre d’engagement des actionnaires en vue de la modification du pacte les liant a été établie. Par cet engagement, auquel est explicitement subordonnée l’autorisation accordée par la DGCCRF, les actionnaires de France 24 décident d’« internaliser la régie de ses espaces publicitaires. » C’est en vertu de cet engagement qu’a été créée la filiale de France 24, France 24 advertising, destinée à permettre à la chaîne de mener « sa propre politique commerciale en matière de vente d’espaces publicitaires. »

Il apparaît donc que la présence de TF1 au capital de France 24 a privé celle-ci de l’adossement de ses recettes publicitaires non seulement à la régie publicitaire du groupe privé, pour les raisons évoquées ci-dessus, mais aussi à celle de France Télévisions, ce qui n’était pas imposé par la DGCCRF, mais a résulté, ainsi que l’a indiqué France 24 en réponse aux observations provisoires de la Cour, d’un accord des deux actionnaires qui « ont jugé équitable d’appliquer le même traitement à leurs régies respectives. »

LES RELATIONS ENTRE LES ACTIONNAIRES

L’accord des deux actionnaires est indispensable pour l’adoption des décisions relevant du conseil de surveillance

France 24 est une société anonyme à directoire et conseil de surveillance. Ses statuts sont complétés par un pacte d’actionnaires conclu le 29 novembre 2005, le jour même de la signature avec l’Etat de la convention de subvention. Au demeurant, la signature d’un tel pacte constituait une condition suspensive de l’entrée en vigueur de la convention de subvention.

Le directoire, composé de trois personnes physiques désignées par le conseil de surveillance, assure la direction collégiale de la société. Le pacte d’actionnaires prévoit que le président du directoire est « une personnalité qualifiée indépendante des deux actionnaires » et que les deux autres membres sont élus, l’un, ayant la qualité de directeur général en charge de la gestion, de la technique et des contrats de distribution, sur proposition des membres du conseil de surveillance représentant le groupe TF1, l’autre, ayant la qualité de directeur général en charge de l’information et des programmes, sur proposition des membres du conseil de surveillance représentant le groupe France Télévisions. La rémunération des membres du directoire est fixée par le conseil de surveillance.

Le conseil de surveillance est, quant à lui, composé de six membres, trois désignés sur proposition de TF1, les trois autres l’étant sur proposition de France Télévisions.

Le Président du conseil de surveillance est élu sur proposition et parmi les membres du conseil désignés sur propositions de France Télévisions, le vice-président étant élu dans les mêmes conditions parmi les membres représentant TF1. Aucune règle d’alternance n’est prévue entre les deux groupes audiovisuels actionnaires. Les fonctions de membre du conseil de surveillance peuvent être rémunérées sous forme de jetons de présence dont le montant est déterminé par l’assemblée générale. Les fonctions de président et de vice-président peuvent être rémunérées. Le conseil de surveillance a cependant décidé que ces fonctions s’exerceraient à titre bénévole.

En principe, le conseil de surveillance statue à la majorité simple des membres présents ou représentés, la voix du président de séance étant prépondérante en cas de partage des voix. Toutefois, à titre dérogatoire, certaines décisions du conseil ne peuvent être prises qu’à la majorité des cinq sixièmes des membres présents et représentés, la voix du président de séance n’étant dans ce cas pas prépondérante. Cette dérogation s’applique en réalité à un nombre élevé de décisions importantes telles que l’adoption et la modification de la stratégie, du plan d’affaires, du budget, de la convention de subvention, des accords d’entreprise, du choix des commissaires aux comptes… Une telle disposition, destinée à imposer une gestion strictement paritaire de l’entreprise, était souhaitée par l’Etat qui y avait subordonné l’entrée en vigueur de la convention de subvention. Elle permet à chacun des deux actionnaires de bloquer les décisions du conseil de surveillance et le cas échéant, de préserver ses intérêts propres.

L’évolution de l’actionnariat est strictement encadrée

Les statuts de la société France 24 et le pacte d’actionnaires comportent des dispositions encadrant très strictement toute évolution de la détention du capital de l’entreprise.

Toute cession d’actions à un tiers est soumise à l’autorisation préalable du conseil de surveillance et ouvre un droit de préemption au bénéfice des autres actionnaires. Le pacte prévoit en outre que « les actions de la société ne seront pas transmissibles à une société non contrôlée au sens de l’art. L. 233-3 du code de commerce pendant une durée de deux ans à compter du lancement de la chaîne. » Le lancement de la chaîne étant intervenu le 6 décembre 2006, cette obligation lie les actionnaires jusqu’en décembre 2008, sauf dans l’hypothèse évoquée ci-dessous d’un blocage du conseil de surveillance sur le plan de rééquilibrage à adopter pour faire face à des difficultés financières rencontrées par l’entreprise.

En cas de cession de titres par un actionnaire, l’autre actionnaire peut également exiger le bénéfice d’un droit de sortie conjointe et le rachat de ses propres titres par le nouvel acquéreur, à due concurrence, aux mêmes conditions. Il est en outre précisé que tout acquéreur d’actions est tenu d’adhérer préalablement au pacte d’actionnaires. Enfin, il résulte de la convention de financement que le changement d’actionnaire, s’il n’est pas agréé par l’Etat, peut conduire celui-ci à résilier la convention de subvention.

Les dispositions financières préservent les actionnaires de tout risque financier

Sur le plan financier, le pacte d’actionnaires souligne que le financement de la société s’effectue principalement au moyen des subventions accordées par l’Etat et, à titre complémentaire, par les recettes commerciales de toutes natures. Les actionnaires conviennent ainsi qu’ils n’ont pas à financer l’action de la société qui doit voir ses budgets établis « de telle sorte qu’aucune [des parties au pacte] n’ait à subvenir aux besoins de la société de quelque manière que ce soit y compris pour ses besoins de trésorerie. » Les apports des actionnaires pour la constitution du capital de la société sont d’ailleurs très faibles (18,75 K€ chacun).

Une clause de sauvegarde des intérêts financiers des actionnaires prévoit aussi l’obligation pour le président du conseil de surveillance de convoquer une réunion destinée à prendre des mesures de rétablissement de l’équilibre financier et de résorption des pertes subies dans l’hypothèse où « la société dégage un résultat d’exploitation négatif ou une situation nette de trésorerie (sur une durée consécutive de trente jours) négative au cours de deux trimestres civils successifs. »

En pareille hypothèse, le conseil de surveillance est appelé à adopter un plan de rééquilibrage pouvant comporter des mesures telles que la « réduction de la couverture de la chaîne ; limitation des moyens techniques, humains, charges… »

Simultanément, la convention de subvention ne prévoit pour l’Etat une faculté de réduction de la subvention qu’en cas de « modification substantielle des caractéristiques du projet » (article 14.1). Cette disposition n’entrave cependant pas substantiellement la portée et les conditions de mise en œuvre d’un éventuel plan de rééquilibrage car les obligations fixées par l’Etat sont très imprécises dans leur formulation de sorte que l’entreprise peut réduire ses coûts sans contrevenir à la convention de subvention. Ainsi, les moyens humains nécessaires à la chaîne pour remplir sa mission n’étant pas évalués dans la convention, leur réduction ne saurait par entrer en contradiction avec les obligations qu’elle fixe. La qualité des programmes constitue aussi un important levier d’ajustement du volume de charges de l’entreprise, les reportages en direct pouvant par exemple être réduits ; voire supprimés, ce qui entraînerait par la même une baisse importante des coûts de programme ainsi qu’une baisse de leur qualité, mais ce dernier critère ne figure pas dans la convention de financement.

Il convient par ailleurs de souligner que le pacte d’actionnaires prévoit, dans l’hypothèse où le conseil de surveillance ne parviendrait pas à s’entendre sur un plan de rééquilibrage au terme de deux réunions du conseil de surveillance tenues à 15 jours d’intervalle, que les actionnaires peuvent alors transmettre leurs actions selon les modalités décrites ci avant, y compris au cours des deux premières années de diffusion de la chaîne. Le blocage est défini de façon très large par le pacte, celui-ci précisant qu’un blocage est constaté dès lors que l’accord ne sera pas trouvé sur un seul des aspects du plan, qu’il s’agisse « des mesures de rééquilibrage, leurs effets ou leur calendrier. »

D’autres garanties financières, précisées dans la convention de subvention, viennent réduire davantage encore les risques encourus par les actionnaires. D’une part, l’Etat s’engage, en cas de résiliation de la convention de subvention pour un motif d’intérêt général, « à indemniser la société ou ses actionnaires, au choix de ces derniers, de toutes les conséquences financières directes ou indirectes. » D’autre part, « l’État s’engage à indemniser la société ou ses actionnaires, au choix de ces derniers, de toutes les conséquences financières directes ou indirectes résultant du non-versement de la subvention prévue à la Convention. »

Inversement, la convention de subvention prévoit que, dans l’hypothèse, à ce stade non vérifiée, où les ressources commerciales dépasseraient le quart des recettes de la société, « une part raisonnable du bénéfice de l’exercice considéré pourra être distribuée aux actionnaires. ».

Enfin, en cas de cessation d’activité de la société, les actifs de la société reviendraient aux actionnaires, aucune clause de retour à l’Etat n’ayant été introduite en raison des risques de requalification en délégation de service public que de telles clauses auraient fait peser en cas de litige portant sur les modalités de passation du contrat de subvention.

Si une telle absence s’explique au regard des choix antérieurement opérés par l’Etat (adossement à des opérateurs en dehors du cadre classique de la délégation de service public), il n’en demeure pas moins qu’au fur et à mesure de son développement, France 24 se constitue un réseau de distribution, conquiert des parts de marché, constitue une marque mondiale et que sa valeur s’accroît sans que l’Etat puisse bénéficier d’un retour direct sur investissement.

LES RELATIONS AVEC LES POUVOIRS PUBLICS

Le financement inscrit en loi de finances n’a pas été ajusté aux montants dus en application de la convention et de ses avenants

La convention de subvention mentionne les différents éléments nécessaires au calcul de la somme due par l’Etat à France 24. Cette convention pluriannuelle constitue un engagement ferme de l’Etat qui doit logiquement se traduire par l’inscription des sommes correspondantes en loi de finances. Il apparaît toutefois qu’un décalage important subsiste entre les montants figurant au programme 116 « chaîne française d’information internationale » et les ressources allouées respectivement en 2005-2006, 2007 et 2008 à France 24, telles qu’elles résultent de la convention de subvention.

-  Comparaison du montant des subventions versées à France 24 en exécution des Lois de finances 2005 à 2008 (montant inscrit en LFI pour 2008) et des montants figurant en ressources dans les comptes de la société

Source : comptes de France 24 et documents budgétaires de l’Etat

En effet, la société a bénéficié d’un versement de 15 M€ en 2005, lors de sa création, et 63 M€ l’année suivante, soit un total de 78 M€. La convention initiale, pour sa part, mentionnait une subvention de 15 M€ en 2005 et 65 M€ en 2006. Le premier avenant a toutefois modifié ce montant pour 2006 en le réduisant à 47 M€, sans que l’Etat modifie simultanément l’exécution de son budget, de sorte qu’en définitive, les montants versés à la société en 2006 ont été supérieurs à ce que prévoyait la convention modifiée.

Les comptes de la société ont par conséquent enregistré au titre de son premier exercice (sur 13 mois couvrant 2005 et 2006) un total de 62 M€ de subvention correspondant aux montants pour 2005 et 2006 issus de l’avenant 1, alors que l’Etat a versé 78 M€ au cours de cette période, la différence, soit 16 M€, ayant été considérée comme versée en avance sur l’exercice 2007.

La situation s’est inversée en loi de finances 2007. En application de l’avenant 1, la somme due par l’Etat au titre de ce nouvel exercice n’était plus déterminée sur une base de 70 M€ mais de 80 M€ auxquels s’ajoutaient les effets de l’indexation, soit 85,8 M€. Or, l’Etat n’a fait figurer au programme 116 qu’une somme de 70 M€ qui sera légèrement amputée en exécution, de 0,458 M€. L’engagement de l’Etat n’est donc honoré qu’au bénéfice des 16 M€ de report de la subvention versée l’année précédente. Un solde légèrement négatif, de 0,258 M€, restait toutefois à verser en fin d’année (régularisé depuis lors).

Pour 2008, le montant de la dotation inscrite en Loi de finances initiale (70 M€) est nettement inférieur au montant dû en application de la convention de subvention (88,5 M€). En y ajoutant le solde négatif de l’exécution 2007, l’insuffisance de financement pour 2008 est ainsi portée à 18,758 M€.

Cette situation a provoqué l’inquiétude de France 24 qui a obtenu un engagement écrit du Premier Ministre garantissant à la chaîne que l’Etat honorerait ses engagements. Cette lettre a permis à la DDM d’obtenir du contrôleur financier que le versement de la première fraction de la subvention soit calculé en proportion de la somme due en application de la convention et non en proportion de la seule dotation budgétaire inscrite en loi de finances initiale.

La lecture des documents budgétaires de l’Etat se révèle par conséquent trompeuse : elle laisse penser que France 24 nécessite un budget d’environ 70 M€ depuis son lancement alors que son budget, en conformité avec la convention de financement, dépassait les 85 M€ dès la première année de diffusion et atteint déjà 88,5 M€ hors ressources propres.

Le dispositif de suivi de la subvention est limité

La singularité de France 24 dans ses relations avec les pouvoirs publics tient au fait qu’étant une société commerciale détenue à stricte parité par une entreprise privée et une entreprise publique, l’Etat n’y détient pas, fût-ce indirectement, plus de la moitié du capital ou des voix dans les organes délibérants et qu’il n’y exerce par conséquent pas une influence dominante, au sens de la directive du 25 juin 1980 relative à la transparence des relations financières entre les Etats membres et les entreprises publiques.

Les moyens d’action de l’Etat résultent dès lors exclusivement des dispositions introduites dans les textes constitutifs de la société et des engagements qu’elle a consentis. Les statuts de la société et le pacte d’actionnaires étant quant à eux silencieux sur ces aspects, ce sont uniquement les dispositions de la convention de subvention qui précisent les prérogatives de l’Etat en matière de suivi du projet et lui confèrent divers moyens d’action à l’égard de France 24.

S’agissant du suivi du projet, la convention précise que France 24 doit adresser à l’Etat, et déposer en Préfecture, dans les six mois suivant la clôture de l’exercice :

- les comptes sociaux ;

- un compte rendu financier présentant les écarts entre le budget prévisionnel et les dépenses constatées en fin d’exercice ;

- un rapport sur l’activité de la chaîne au cours de l’exercice écoulé.

Deux rencontres annuelles au minimum sont en outre prévues pour l’examen de la gestion et des comptes de la société. Des justifications complémentaires peuvent être demandées pour contrôler l’adéquation des dépenses au regard des objectifs de développement de la chaîne. Ces obligations résultent des dispositions de la loi du 12 avril 2000 sur les droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, applicables à toutes les subventions publiques, quel qu’en soit le montant, l’objet ou la nature de l’organisme bénéficiaire.

Le cadre juridique retenu par l’Etat l’a donc conduit à limiter aux règles minimales établies par la loi le suivi de l’utilisation de la subvention et à ne pas imposer à la société d’obligation supplémentaire de restitution en vue d’obtenir une information plus étendue sur sa gestion et l’utilisation de la subvention, en dehors de l’audit susmentionné.

L’absence d’indicateurs de performance

Le rapport d’activité mentionné ci-dessus porte « notamment sur le respect des indicateurs figurant en annexe 2 » de la convention de financement (voir tableau ci-dessous). Ces indicateurs, qui ont été retouchés à l’occasion de l’adoption de l’avenant n°1, constituent, avec l’annexe 1 consacrée aux « caractéristiques essentielles du projet développé par la société », l’essentiel du cahier des charges de France 24.

Rédigés dans des termes généraux, ces indicateurs permettent de préciser les attentes de l’Etat à l’égard du bénéficiaire de la subvention, mais ne lui permettent pas de disposer d’un retour précis d’information sur la performance de France 24.

De surcroît, les modifications apportées par l’avenant 1 à ces indicateurs vont systématiquement dans le sens d’un desserrement des contraintes à l’égard de France 24, en particulier la part de budget consacrée aux programmes propres qui est réduite de 7 à 5 M€ et la proportion de masse salariale dans le budget qui se trouve portée à 40 %. De telles adaptations ne sont cependant pas nécessairement infondées compte tenu de la réorientation stratégique apportée au projet à la demande de la chaîne elle-même.

Cependant d’autres paramètres auraient pu évoluer pour renforcer les exigences de l’Etat à l’égard de France 24. Tel n’a pas été le cas.

Ainsi, le critère de distribution n’a pas évolué. Il prévoyait comme indicateur de couverture le nombre de foyers recevant la chaîne et comme cible un volume de 17 millions de foyers au lancement de la chaîne en 2006 et jusqu’à 30 millions d’ici 2010. Or, dès la séance du conseil de surveillance du 30 janvier 2006, le directeur général en charge de la gestion précisait aux membres du conseil que le nombre de foyers disposant d’un équipement de réception numérique permettant de recevoir la chaîne en clair via les satellites « est passé de 17,7 M en 2003 à 38 M de foyers en 2005. » Dans le même temps, les foyers abonnés à des offres payantes avaient dépassé 25 M.

- Objectifs et indicateurs figurant en annexe 2 de la convention de subvention (modifiée) de France 24

Source : convention de financement

Les objectifs fixés dans la convention de subvention se fondent ainsi sur des données de 2003, issues de l’offre conjointe déposée par les actionnaires. Ces données n’ont pas été actualisées lors de la signature de la convention, ni lors de la signature des avenants, alors même que France 24 s’était spontanément fixée des objectifs réajustés en hausse pour tenir compte des évolutions constatées dans le taux d’équipement des foyers en matériel de réception numérique.

En définitive, faute d’actualisation dans la convention, France 24 dépassait déjà largement dès son lancement le volume de foyers de réception à atteindre en cible, en 2010.

Dans le même esprit, la convention prévoit que France 24 ne fasse procéder à des études permettant notamment d’évaluer l’impact de la chaîne sur les publics qu’elle vise qu’à « compter de la troisième année suivant le début de la diffusion des programmes. », autrement dit, à compter de fin 2008. La raison d’être de ce délai n’apparaît pas clairement et suscite d’autant plus l’interrogation que, dans la version initiale du projet de convention, établie fin 2003, un tel délai n’était pas prévu.

Or, il apparaît que dès le début de la diffusion de la chaîne, France 24 a fait réaliser différentes études dont la première, destinée à aider la chaîne à préciser les valeurs spécifiques pouvant être véhiculées par sa diffusion, a fait l’objet d’un contrat signé en juillet 2006, c'est-à-dire à une date proche de la signature du deuxième avenant à la convention de subvention.

Un audit biennal offre certaines garanties à l’Etat

Au titre des garanties dont dispose l’Etat, la faculté de faire réaliser un audit de la société par un organisme indépendant a été inscrite dans la convention de subvention. Un tel audit peut intervenir une première fois au terme de la deuxième année de diffusion, soit fin 2008, puis tous les deux ans. L’audit doit permettre de vérifier que les coûts de la chaîne sont comparables aux coûts d’une chaîne de télévision bien gérée, correctement équipée et comparable par la taille, le type de programmes et les publics, que les prestations échangées entre France 24 et ses actionnaires sont réalisées aux conditions du marché, enfin que les informations fournies dans les documents obligatoirement adressés à l’Etat sont cohérentes et pertinentes.

Dans l’hypothèse où l’audit établirait que France 24 a bénéficié de subventions manifestement excessives ou manqué à certaines de ses obligations essentielles (distribution illicite de bénéfices ; prestations vendues à un prix non-conforme au marché…), une réduction de la subvention pourrait intervenir.

Le gouvernement n’a pas souhaité soumettre France 24 au contrôle d’Etat

En dépit de ces dispositifs, les moyens d’action et de contrôle dont dispose l’Etat paraissent limités, d’autant que le gouvernement n’a pas soumis France 24 au contrôle économique et financier de l’Etat (CGEF) institué par le décret n°55-733 du 26 mai 1955. Ce texte prévoit en effet en son article 3 que peuvent être soumis au CGEF « les entreprises et les organismes dont la majorité des ressources provient, directement ou indirectement, séparément ou conjointement, du concours financier de l’Etat ou de ses établissements publics ». Un décret contresigné des ministres de l’économie, du budget et de la communication permettrait donc la mise en œuvre dudit contrôle.

L’exercice d’un tel contrôle, dont le décret l’instituant précise qu’il a pour objet « d’analyser les risques et d’évaluer les performances de ces entreprises et organismes en veillant aux intérêts patrimoniaux de l’Etat », permettrait au ministère de l’économie des finances et de l’emploi de disposer d’une information plus complète sur l’entreprise.

A l’occasion d’une réunion interministérielle tenue le 3 février 2005 sous la présidence du directeur du cabinet du Premier ministre, le représentant du ministère du budget a d’ailleurs demandé que la nouvelle société soit soumise au contrôle d’Etat. Cette demande a été rejetée au motif qu’il paraissait « impossible que des représentants de l’Etat siègent au conseil d’administration de la société car une stricte parité doit être garantie entre les deux actionnaires. » Il est toutefois relevé que le contrôleur d’Etat n’aurait eu d’entrée qu’avec voix consultative aux séances du conseil de surveillance.

Il apparaît en définitive que la décision de constituer France 24 s’est fondée sur un projet initial correspondant aux préconisations du rapport Brochand qui prévoyait une diffusion essentiellement en français et exclusivement à l’étranger, et le développement de synergies avec TV5 Monde visant à dégager 15 M€ d’économies. Or ce projet ne satisfaisait ni les futurs actionnaires, qui préféraient une diffusion principalement en anglais, ainsi qu’ils l’ont exprimé dès la première réunion du conseil de surveillance, ni l’Etat, qui dans l’intervalle de deux années entre la décision de principe et la signature de la convention, avait décidé d’imposer une diffusion de la chaîne en France. Par ailleurs, le développement de synergies avec TV5 Monde n’a pas été érigé en objectif et aucune économie n’en est résultée.

Quant au cadre institutionnel de la nouvelle société, constitué de ses statuts, du pacte d’actionnaires et de la convention de subvention, il comporte des dispositions exonérant pratiquement les actionnaires de tout risque financier mais, en revanche, offre peu de moyens de contrôle et de suivi à l’Etat. Cette situation est la conséquence directe du mode opératoire retenu par l’Etat, visant à s’appuyer sur de grands opérateurs audiovisuels français choisis par lui dans le cadre de la négociation d’une simple convention de subvention.

Au total, le dispositif retenu est particulièrement original. Il permet à un opérateur privé d’exploiter un investissement qu’il n’a pas financé, qui ne fait pas l’objet d’une clause de retour à l’Etat et dont la valeur figure néanmoins dans les comptes de l’opérateur et ceux de ses actionnaires. Le contrat ne comporte en outre pas d’incitation à l’égard de l’exploitant en vue du développement de ressources tirées de son activité. Enfin, le risque financier est exclusivement assumé par l’Etat dès lors que toute perte de la société l’autorise à prendre des mesures importantes de réduction des coûts, dans la seule limite du maintien des « caractéristiques essentielles du projet » figurant dans la convention de subvention, lesquelles caractéristiques demeurent très générales afin de prévenir une requalification des modalités de passation du contrat soit en délégation de service public, soit en marché public, et laissent en réalité à l’entreprise une grande latitude dans la gestion des ressources publiques qui lui sont confiées.

Interrogés sur ce dispositif, France 24 a souligné que ses actionnaires s’exposaient à des risques financiers même s’ils ne supportaient pas le poids financier de l’opération, en particulier dans l’hypothèse où les ressources diminueraient en application de la convention de subvention (hypothèses soit de non respect des critères qui y sont fixés ; soit de coûts engagés disproportionnés par rapport aux entreprises concurrentes) où si les coûts augmentaient au-delà des ressources disponibles. Dans ces différents cas de figure, France 24 souligne qu’en « application du droit commun des sociétés, les actionnaires devront couvrir les pertes de l’entreprise. »

La Cour maintient néanmoins que cette responsabilité de principe ne peut être mise en jeu que dans l’hypothèse, hautement improbable, d’une impuissance de la société à réduire ses charges.

LA STRATÉGIE MISE EN œUVRE PAR LA CHAÎNE : FRANCE 24 APRÈS UN AN D’ANTENNE

La stratégie mise en œuvre par France 24 s’est rapidement concrétisée par le lancement de la chaîne selon un format de chaîne unique multilingue qui la distingue de ses principales concurrentes. Dernière née de l’audiovisuel extérieur, France 24 n’a connu que l’ère du numérique et a donc pu, à la différence des autres sociétés de l’audiovisuel extérieur, concevoir d’emblée ses modes de production en fonction des potentialités offertes par les technologies numériques. La zone de diffusion des programmes de France 24, si elle a crû très rapidement, ne couvre aujourd’hui que l’Europe, le Proche et Moyen Orient, l’Afrique subsaharienne et deux villes des Etats-Unis, conformément à la convention de subvention.

UNE MONTEE EN PUISSANCE RAPIDE

L’offre conjointe élaborée par TF1 et France Télévisions mentionnait qu’à compter de la décision effective, un délai incompressible de 12 mois était nécessaire au lancement de la nouvelle chaîne.

La convention de subvention a par conséquent prévu, en son article 17.2, comme cause possible de résiliation l’absence de diffusion des programmes avant le 31 décembre 2006, soit 13 mois après la signature de la convention.

La diffusion des versions française et multilingue de France 24 a effectivement débuté le 6 décembre 2006 sur internet et le 7 décembre sur le câble et le satellite. Le site web de la chaîne, www.france24.com, a été lancé le 7 décembre. Le 2 avril 2007, 4 heures de diffusion quotidiennes en arabe se sont ajoutées à la programmation.

Entre la signature de la convention de subvention, le 29 novembre 2005 et le lancement effectif de la diffusion, il ne se sera donc écoulé que 12 mois consacrés en particulier au recrutement du personnel et à la mise en place des infrastructures techniques.

La réorientation stratégique suscitée par le directoire dans les premières semaines de constitution de la société a significativement renforcé les contraintes pesant sur le calendrier de lancement de la chaîne. En effet, des questions essentielles telles que l’effectif et le profil du personnel à recruter, la taille des locaux ou encore les caractéristiques des équipements techniques (nombre de plateaux…) sont restées en suspens dans l’attente d’une confirmation du soutien accordé par l’Etat à la nouvelle stratégie proposée.

Deux volets de la montée en puissance du projet méritent d’être approfondis : les questions d’infrastructure immobilière et technique et les ressources humaines.

Les contraintes d’infrastructure

Le choix des locaux

Le choix de l’immeuble ne pouvait attendre l’issue des débats stratégiques. La CFII a donc choisi de signer dès la fin du mois de janvier 2006 un bail de neuf années dont six fermes pour la location de deux étages d’un immeuble dénommé Aphélion sis à Issy-les-Moulineaux.

Un tel choix comportait certains risques d’erreur d’appréciation sur l’espace nécessaire au lancement de la chaîne. Cet écueil a été évité, d’une part, une introduisant une clause de sous-location ouverte au profit d’une société détenue à plus de 45 % par France 24 ou l’un de ses actionnaires et, d’autre part, en anticipant le format devant être atteint à moyen terme, fondé sur trois langues et susceptible d’être étendu à une quatrième.

Le choix de diffuser la chaîne sur deux canaux n’a pas significativement accru le besoin d’espace, mais a conduit France 24 à ne pas faire appel à un sous-locataire. La réorientation stratégique a essentiellement fait varier la durée de présence à l’antenne de chaque langue, laquelle suppose que des équipes puissent se succéder au sein des locaux, mais n’impose pas qu’un effectif plus important soit accueilli simultanément à un instant de la journée.

La perspective, encore incertaine, de création d’une rédaction hispanophone ne devrait pas non plus créer de difficultés insurmontables dans la mesure où les heures de diffusion des signaux en arabe et en espagnol seraient différentes. Là encore, les équipes seraient appelées à occuper successivement les mêmes locaux.

Si toutefois, des locaux supplémentaires s’avéraient nécessaires, France 24 serait en mesure de louer de nouveaux locaux dans un autre immeuble pour y installer les services marketing et communication de la chaîne, libérant ainsi 300 à 400 m2.

Le bail signé le 2 mars 2006 permet à France 24 de disposer de :

- 3135 m2 utiles de bureaux ;

- 651 m2 de locaux à usage de commerces (utilisés pour les studios) ;

- d’un accès au restaurant interentreprises installé dans l’immeuble ;

- de 83 places de parking.

Le bailleur ayant consenti une franchise sur les six premières années de 1,75 mois par an (soit environ 15 %), le loyer hors indexation de France 24 s’établit à 1 417 377,69 € HT, soit environ 350 € HT par mètre carré et par an.

Les travaux et le choix des prestataires techniques

La création de studios de télévision et l’installation d’une régie de diffusion ont entraîné la réalisation d’importants travaux d’aménagement des locaux, d’un coût total de 25 M€, entièrement financés par l’Etat.

Les travaux ont d’abord porté sur l’adaptation d’éléments affectant toute l’infrastructure de l’immeuble, au-delà des seuls locaux loués. Ces travaux étaient en particulier nécessaires pour renforcer le réseau électrique et installer un dispositif de climatisation de grande capacité. Ce lot a coûté 1,6 M€.

Les travaux ont ensuite porté sur l’aménagement intérieur des surfaces louées par France 24 (électricité ; climatisation ; matériel technique hors régie…) pour un total de 5,2 M€.

Il s’y est ajouté le coût des décors (studios ; newsroom…) et du mobilier de la chaîne, soit 1,1 M€.

Enfin, la fourniture et l’installation du matériel de production et de diffusion de la chaîne a exigé un investissement de 15,8 M€.

Ces travaux, entrepris à compter du 20 mars 2006, devaient s’achever le 29 août pour permettre l’accueil des équipes à compter du 15 septembre. Un léger dépassement d’un mois est intervenu dans la conduite du chantier, qui n’a toutefois pas entraîné de report de la date de lancement de la chaîne.

Le calendrier de ces travaux s’est ainsi révélé extrêmement tendu mais il a été géré sans remettre en cause les objectifs opérationnels de la chaîne.

L’enjeu du recrutement

La réorientation stratégique a également pesé sur le calendrier de recrutement des salariés de l’entreprise, le volume des programmes diffusés en langue anglaise et le nombre de canaux de diffusion de la chaîne ayant une incidence sur le volume et le profil des recrutements à effectuer.

Là encore, la chaîne a fait le choix d’anticiper sur son développement potentiel en ciblant, s’agissant spécifiquement de la rédaction, un profil de recrutement de salariés polyvalent, aptes à remplir les missions de la chaîne quelle que soit l’issue des négociations alors en cours sur sa stratégie.

France 24 a alors indiqué à ses actionnaires qu’elle souhaitait conclure des contrats de travail directement avec tous ses journalistes et qu’en conséquence, elle n’envisageait pas d’accepter de salariés détachés.

Sur cette base, une campagne de recrutement a été entreprise début avril 2006. Le profil attendu des candidats combinait une exigence linguistique (essentiellement la maîtrise du français et de l’anglais), une exigence technique (la capacité à utiliser les outils intégrés multimédias de la chaîne) et une première expérience dans le secteur audiovisuel.

Cette campagne de recrutement, mais aussi les candidatures spontanées reçues par la chaîne, lui ont permis de disposer d’environ 4500 curriculum vitae recueillis entre janvier et septembre 2006. Une présélection sous forme d’un premier entretien a été organisée pour 570 d’entre eux, dont 168 ont été en définitive recrutés (soit 1 pour 3 environ) à l’issue de tests d’anglais et de personnalité et d’un nouvel entretien avec le directeur général en charge de la rédaction et la directrice des ressources humaines.

L’attractivité de la chaîne, suggérée par l’afflux de candidature, s’explique, selon la directrice des ressources humaines, par le choix opéré d’offrir une rémunération attractive (mais jugée néanmoins adaptée aux qualifications) et de proposer d’emblée un contrat à durée indéterminée à des candidats pour l’essentiel récemment issus d’écoles de journalisme et dont la grande majorité ne disposait alors pas de contrat de travail à durée indéterminée.

En dépit de ce cadre favorable, la montée en charge des recrutements a été tardive, sans que cela retarde pour autant le lancement de la chaîne. Ainsi, fin juin 2006, 26 postes de journalistes étaient pourvus pour une cible alors fixée à 142, soit 15 %.

Une accélération du flux de recrutement est intervenue au cours de l’été, de sorte que le 15 septembre, 128 postes étaient pourvus sur une cible portée entre temps à 162, soit 79 %. Cette accélération a permis à la chaîne de disposer de 114 journalistes dès le mois de septembre (source : fichier de paye) et d’entreprendre les formations nécessaires. L’effectif de journalistes s’est par la suite renforcé (notamment du fait du lancement des programmes en arabe) pour atteindre 191 titulaires d’un contrat à durée indéterminée fin décembre 2007 (142 au lancement de la chaîne).

Un bilan dressé fin 2007 met en évidence le faible nombre de départs de journalistes de la chaîne : 22 démissions ou départs volontaires ont été enregistrés (dont 7 s’expliquent en réalité par un départ à l’étranger comme correspondant indépendant de France 24) et deux licenciements ont été prononcés. Toutes catégories confondues, le « turn over » de la chaîne s’est établi à 8,96 % en 2007.

L’âge moyen des 380 collaborateurs, dont 170 journalistes, 160 techniciens, 40 personnes dédiées à la distribution, était, à la date du lancement, de 32 ans en provenance de 35 nationalités avec trois langues de travail (français, anglais et arabe). Un an plus tard, soit fin 2007, France 24 comptait 470 collaborateurs au total, soit 310 salariés, auxquels il convenait d’ajouter une moyenne mensuelle de 30 équivalents temps plein en pigistes et intermittents et de 130 personnes travaillant pour France 24 en sous-traitance. La société estimait son effectif cible à 520 personnes, dont 260 pour la rédaction, 200 pour les fonctions techniques et 60 pour les fonctions supports.

Sur le plan de l’organisation, la société repose sur un directoire composé du président et des deux directeurs généraux de la société, chargés respectivement de l’organisation et de l’information. Les directions internet et nouveaux médias, de la communication et de la stratégie et du développement sont directement rattachées au président, les directions fonctionnelles l’étant au directeur général en charge de l’organisation (administration, finances et affaires générales ; juridique ; ressources humaines ; distribution ; technologies). La rédaction est rattachée au directeur général en charge de l’information Elle s’organise autour d’un directeur, de trois directeurs adjoints, chargés respectivement des news, des magazines et talk show et des contenus en arabe, et de cinq rédacteurs en chef.

UNE CHAÎNE MULTILINGUE 

Une ligne éditoriale précisément définie et ciblée

Un regard spécifiquement français sur l’actualité internationale

France 24 a pour mission de porter sur l’actualité internationale un regard spécifiquement français. Ces « valeurs françaises » sont définies par la charte de France 24 autour de trois axes :

- la présentation de la diversité des opinions, de la pensée et des approches, à travers des angles journalistiques originaux ;

- le sens du débat, de la confrontation et de la contradiction ;

- la tradition de la culture et de l’art de vivre à la française.

Au travers de cette volonté de proposer des angles d’approches divers, soumis à débat et réservant un équilibre entre les questions économiques et les questions culturelles, France 24 cherche également à se distinguer de l’offre d’information internationale proposée par ailleurs en particulier par CNN, BBC World et Al Jazeera. France 24 se présente ainsi autant comme une chaîne d’information en continu que comme une chaîne d’approfondissement donnant les clés de compréhension d’une actualité de plus en plus complexe et visant, pour reprendre la campagne publicitaire de la chaîne, à aller « au-delà de l’information ».

Une grille de programme qui se veut réactive et moderne

Sur ces bases, la grille de programmes repose sur une diffusion 24 heures sur 24, 365 jours par an avec des journaux à l’heure et à la demi-heure renouvelés en continu. En outre, la grille peut être à tout moment déstructurée pour rendre compte d’une information majeure (« breaking news »).

La grille se répartit en 33% de temps d’antenne pour les journaux, 47% pour les magazines, 11% pour les reportages, 5% pour la météo et 4% pour la publicité.

Les piliers principaux sur lesquels la société a choisi de mettre l’accent sont au nombre de cinq : l’actualité, l’économie, la culture, les sports et la météo. France 24 présente ainsi sa grille autour de trois types d’émissions :

- l’actualité (journaux, météo, reportages, bourse, revue de presse) ;

- les journaux thématiques quotidiens (économie, à la une, culture ; tout en images : sport, net, zooming, arts de vivre, personnalités)

- les magazines.

France 24 a également pour ambition de renouveler les codes traditionnels des chaînes d’informations mondiales en ayant en particulier recours à des formats courts. Les positionnements de CNN, BBC World et Al Jazeera font l’objet d’une veille stratégique ainsi que d’études qualitatives et quantitatives visant à évaluer la notoriété de France 24, son image et son exposition par rapport à ses concurrents principaux.

A cet égard, si France 24 se caractérise par l’importance accordée aux débats et magazines, elle a fait le choix de formats courts en la matière (12 à 17 minutes) qui la distinguent clairement des chaînes généralistes mais aussi de ses concurrentes directes dont les formats de magazines sont généralement de 45 à 50 minutes.

Une chaîne unique multilingue

Un multilinguisme au cœur de la stratégie de l’entreprise

La stratégie de la chaîne est fondée sur le multilinguisme avec un lancement simultané en français et en anglais : la perspective dans laquelle s’inscrit la chaîne est de toucher les décideurs du monde entier en leur offrant un point de vue français sur l’actualité internationale. Cette perspective se distingue donc clairement d’une optique dans laquelle la chaîne s’adresserait à la francophonie et qui emporterait alors comme choix l’usage exclusif de la langue française. Il s’agissait également, ce faisant, de proposer au travers de France 24 une chaîne d’information internationale en anglais qui n’était pas issue d’un pays anglo-saxon, comme c’est le cas de la version anglaise d’Al Jazeera également lancée à la fin 2006.

Le débat ayant existé au moment de la configuration du projet France 24 sur son contenu linguistique a néanmoins resurgi lorsque le Président de la République a déclaré à l’occasion de ses vœux à la presse, le 8 janvier 2008, qu’ « une chaîne publique, France Monde, qui garderait l’identité de chacun des participants, ne peut que parler français. » Cette déclaration a en effet pu être comprise par France 24 comme impliquant une remise en cause du cœur du projet qu’elle porte avec une rédaction entièrement bilingue.

Au-delà de cette priorité accordée par la chaîne à une diffusion en anglais et en français, le lancement de France 24 en langue arabe en avril 2007 pour quatre heures de diffusion quotidienne a fait de cette chaîne une des sept chaînes d’information internationale diffusant actuellement dans cette langue, l’exemple de France 24 ayant été suivi quelques mois plus tard par le lancement de BBC Arabic, en langue arabe avec cette fois 12 heures de diffusion quotidienne.

Une modalité de mise en œuvre particulière

La caractéristique sur laquelle France 24 met tout particulièrement l’accent dans ses présentations est le fait qu’il s’agit d’une chaîne unique déclinée en plusieurs langues et non pas de plusieurs chaînes d’information : « France 24 présente la particularité d’avoir deux langues de diffusion et de travail mais un seul langage qui ne change pas en fonction des cibles géographiques couvertes ou visées : le contenu des journaux est le même, les images identiques, les sujets et les reportages créés à parts égale en anglais et en français. France 24 n’est pas une chaîne française traduite en anglais ou en arabe44.»

L’alimentation de la grille de programmes est fondée sur ce concept de reprise multilingue qui emporte en particulier unicité de la rédaction et de la ligne éditoriale. Ainsi, les sujets d’antenne ou de reportage sont indifféremment créés en français, anglais ou arabe puis adaptés dans les autres langues avec le même angle éditorial. Cette caractéristique majeure se traduit dans l’organisation de la société et au plan budgétaire. Elle emporte notamment comme conséquence la possibilité de développer de nouvelles langues sans avoir à développer des contenus nouveaux, sauf en matière de traduction. C’est un élément essentiel pour expliquer la structure des coûts de la société et c’est également un élément de distinction par rapport à Al Jazeera et BBC Worldwide dont les contenus diffèrent entre les versions arabe et anglaise.

DERNIÈRE NÉE DE L’AUDIOVISUEL 

Des modes de production et de diffusion fondés sur les nouvelles technologies dont la société a pu tirer pleinement parti

Une rédaction internet intégrée

Conçue sur le mode d’une plateforme multimédia intégrée, la rédaction s’organise autour d’une salle de rédaction commune avec une rédaction internet intégrée. Le site france24.com a d’ailleurs été lancé avant la chaîne elle-même afin de signifier la convergence qui existe désormais entre la diffusion en broadcast et internet. Une quinzaine de collaborateurs est en charge de l’animation et de la hiérarchisation éditoriale du site mais celui-ci est alimenté par l’ensemble de la rédaction qui travaille indifféremment pour la chaîne ou le site. Outre les contenus diffusés sur la chaîne et leur organisation thématique et régionale, le site est axé sur la vidéo et permet aux internautes de réagir au contenu éditorial, par exemple des « blogs » de certains chroniqueurs et journalistes.

Des solutions techniques entièrement numériques

La chaîne a été conçue en format entièrement numérique. Sa création ex nihilo lui a permis de tirer pleinement parti des potentialités qu’offre ce mode de production en matière d’organisation, c’est-à-dire un mode de fonctionnement dans lequel le journaliste en charge d’un sujet est en capacité de choisir les images qu’il va utiliser, d’en faire directement le montage sur un format directement diffusable.

France 24 se présente ainsi comme « la première chaîne 100% informatisée », de la captation des images jusqu’à leur diffusion en un flux numérique continu. Ainsi, l’ensemble de la rédaction a accès depuis son poste de travail à toutes les images dont dispose la chaîne en haute résolution, soit environ 3000 heures d’images en permanence, et peut effectuer un pré-montage à partir de ces postes de travail, le montage lui-même étant réalisé sur 20 postes de montage répartis dans la salle de rédaction. Les reporters disposent d’un équipement qui permet le transfert automatique sur le système informatique des images qu’ils tournent et qui sont, pour le direct, transmises par satellite grâce au réseau Immarsat. Enfin, trois plateaux de taille réduite sont installés dans la salle de rédaction et servent à la présentation des journaux, soit un plateau par langue de diffusion. S’y ajoutent deux studios équipés de leur propre régie pour la réalisation des émissions.

Ce mode de production tirant pleinement parti des nouvelles technologies distingue France 24 des autres sociétés de l’audiovisuel dans la mesure où la chaîne a pu organiser d’emblée sa rédaction sur un mode numérique intégré.

Un mode de production qui repose largement sur des prestations extérieures

Une alimentation des programmes qui repose pour une part importante sur des prestations extérieures

L’alimentation de l’antenne de France 24 repose sur trois types de sources : les productions qu’elle réalise en propre, comme ses journaux, les productions qu’elle fait réaliser pour ses besoins, comme ses magazines qui sont achetés et, enfin les productions pour lesquelles elle utilise des images produites par d’autres. Les deux premières catégories de production sont assimilées à de la production propre dans la mesure où la chaîne en maîtrise entièrement la ligne éditoriale.

La répartition initialement prévue entre les différentes sources d’alimentation de l’antenne était d’environ trois tiers : un tiers de production propre, un tiers d’images en provenance des chaînes mères et un tiers d’images en provenance des agences d’image.

La convention de subvention prévoyait que le contenu éditorial propre de la chaîne serait progressivement accru pour atteindre 70% de production propre en 2010.

En 2007, les productions propres ont représenté 44% des programmes de France 24. Ces programmes sont réalisés par les équipes de France 24, et notamment par ses journalistes reporters d’image, par le réseau de correspondants que la chaîne s’est constitué à l’étranger ou par des producteurs fabriquant des programmes spécifiques pour la chaîne et dont elle maîtrise la ligne éditoriale. Le reste des programmes est produit à partir d’images d’agences, des maisons mères et d’autres correspondants. Ainsi, environ 150 heures d’image parviennent chaque jour à France 24, à partir de la bourse d’échange de l’UER, des grandes agences internationales et de ses actionnaires.

Un dispositif de présence à l’étranger réduit

Le réseau sur lequel s’appuie France 24 à l’étranger est original en ce qu’il ne comporte aucun salarié direct de la société installé à l’étranger. Il comporte trois cercles de correspondants plus ou moins proches : des correspondants privilégiés, des correspondants réguliers et des correspondants identifiés.

Les 36 correspondants privilégiés travaillent en priorité pour France 24, dont 3 en Amérique du Nord, 2 en Amérique du Sud, 3 en Afrique subsaharienne, 1 au Maghreb, 6 au Proche et Moyen Orient. Environ 200 correspondants réguliers sont issus des bureaux de France Télévisions et TF1, de certains bureaux de l’Agence France Presse, de RF1 et de RFO, et du « Global radio Network ». Enfin, la chaîne a identifié des correspondants occasionnels dans une cinquantaine de pays, soit environ 800 personnes.

UNE ZONE DE DIFFUSION QUI N’EST PAS STABILISÉE 

Une zone de diffusion qui ne couvre actuellement ni l’Amérique ni l’Asie

Outre internet et sa couverture mondiale, la chaîne est actuellement distribuée en Europe, au Proche et Moyen Orient et en Afrique subsaharienne ainsi que, pour les Etats-Unis dans les villes de New-York et Washington.

France 24 compte désormais quatre signaux de diffusion, respectivement en français, anglais, anglais-arabe et français-arabe, l’arabe étant diffusé à raison de 4 heures par jour entre 16H et 20H heure française qui correspondent aux pics d’audience au Moyen-Orient et au Maghreb. En fonction des zones de diffusion, c’est l’un ou l’autre de ces signaux qui est mis à disposition du public, en clair via le satellite, et sur des offres commerciales locales. Enfin, la totalité des canaux est disponible en direct et en continu sur le site web de la chaîne, et ce avec une couverture mondiale, sous réserve que les foyers disposent d’un équipement et d’un réseau en haut débit.

La couverture satellitaire en clair dont bénéficie la chaîne et les accords de référencement mis en place avec les opérateurs commerciaux permettent la réception de la chaîne au sein de près de 75 millions de foyers répartis dans 90 pays. Comparant ces chiffres à un marché potentiel de 80 millions de foyers équipés en numérique dans sa zone de couverture, France 24 estime ainsi qu’elle est présente auprès de plus de 90% de son marché potentiel (cette présence n’étant évidemment pas synonyme d’audience).

Des modes de diffusion reposant principalement sur le satellite

Les modes de diffusion de France 24 sont entièrement numériques. Ils reposent sur un réseau primaire satellitaire qui couvre l’intégralité des zones de diffusion prioritaires de la chaîne et permet l’accès en clair et gratuitement à tout foyer équipé. S’y ajoutent les accords que négocie la chaîne au cas par cas avec les opérateurs locaux du satellite et du câble pour figurer dans leurs bouquets numériques. De fait, c’est le mode de réception satellitaire qui domine au sein des foyers recevant France 24, en raison notamment du fait que tous les bouquets câblés sont loin d’être tous numériques.

Répartition des foyers recevant France 24 par mode de diffusion

Source : France 24

Par zone de diffusion, France 24 est disponible en Europe, en clair sur Hot-Bird 7A, Astra 1KR et Eurobird ainsi qu’auprès de 20 opérateurs du satellite, 19 opérateurs du câble et 5 opérateurs ADSL. En Afrique subsaharienne, France 24 est disponible dans ses deux versions sur le satellite NSS 7 bande C couvrant l’ensemble du continent ainsi qu’auprès de 6 opérateurs du câble, 2 opérateurs du satellite et 1 opérateur ADSL. Au Proche et au Moyen Orient, France 24 est disponible en clair sur Arabsat et Nilesat, permettant un accès direct à environ 20 millions de foyers et dispose en outre d’accords de distribution auprès de 3 opérateurs du câble et 3 opérateurs du satellite.

Aux Etats-Unis, France 24 est disponible dans sa version anglaise sur le réseau numérique de Comcast et en fréquence terrestre à Washington DC dans la perspective d’être accessible là où sont assurées les fonctions gouvernementales et internationales ; France 24 est d’ailleurs accessible à partir de l’ONU, de la Banque Mondiale, du FMI et du département d’Etat.

Enfin, France 24 a négocié des accords de référencement auprès des grandes chaînes hôtelières et d’Air France, mais n’est diffusée que dans les sites où la chaîne dispose d’un réseau primaire satellitaire, ce qui exclut donc l’Amérique et l’Asie.

S’il n’est pas prévu dans la convention de subvention que France 24 diffuse ses programmes par satellite en mode analogique ou par voie hertzienne en mode analogique ou numérique, France 24 est néanmoins présente en mode numérique hertzien terrestre à titre exceptionnel dans les grandes villes italiennes et à l’Ile Maurice, les opérateurs locaux ayant choisi dans ces zones de prendre en charge tout ou partie des coûts techniques de diffusion.

Concernant la diffusion de France 24 en France, si l’avenant n°1 à la convention a ouvert la voie à une diffusion par câble et satellite, sous réserve de la position des autorités de concurrence, la diffusion de France 24 par ADSL n’y est pas prévue. Un débat a eu lieu sur ce point au conseil de surveillance du 27 novembre 2006 puis à nouveau le 24 septembre 2007 à la demande de la société au motif que France 24 ne peut pas rivaliser avec ses concurrentes CNN, BBC et Al Jazeera en France. Ce projet a été rejeté après un vote ayant donné trois voix pour et trois voix contre, avec un partage très net entre les deux actionnaires, France Télévisions souhaitant que cette question soit traitée et TF1 estimant que l’avenir de France 24 était à l’international et non en France.

Au total, France 24 dispose d’une zone de couverture qui, si elle apparaît large après un an de fonctionnement, est loin d’être mondiale, sauf pour internet : elle exclut en effet l’essentiel du continent américain et toute l’Asie, conformément à la convention de subvention. Enfin, la visibilité de l’antenne en France fait débat entre les deux actionnaires de la société.

Des ambitions affichées en matière de développement

Les orientations du développement quinquennal de France 24 reposent sur une triple ambition :

- renforcer la production propre de la chaîne et son identité grâce à une augmentation graduelle des productions d’images propres et à un renforcement de la rédaction en termes de signatures et de chroniqueurs, dans l’optique que la chaîne produise en propre 70% de sa grille en 2010, conformément à l’objectif retenu dans la convention de subvention ;

- approfondir la stratégie de programmes en langues étrangères, avec l’arabe puis l’espagnol et des programmes en langues renforcés ;

- étendre la couverture géographique avec une diffusion en Asie et en Scandinavie et la création d’un signal français-anglais.

A cet égard, la convention de subvention faisait état d’un développement possible du réseau de diffusion de France 24 en Amérique du Nord à l’horizon 2008, en Amérique du Sud à l’horizon 2009 et en Asie/Pacifique à l’horizon 2010.

En 2008, France 24 a formulé des demandes budgétaires visant à passer à 12 heures de diffusion quotidienne en arabe et à élargir la diffusion de France 24 en Amérique du Nord. Dans le contexte des réflexions engagées sur l’évolution de l’audiovisuel extérieur français, l’Etat n’a pas souhaité suivre les propositions de développement faites par la société pour 2008.

Pour 2009, la société s’est fixée trois priorités qui sont autant de demandes financières adressées à l’Etat financeur, à savoir passer à une programmation 24 heures sur 24 en arabe et étendre sa zone de diffusion à l’Asie et à l’Amérique du Nord.

Ces demandes se fondent en particulier sur l’évolution de la situation concurrentielle de France 24, avec le lancement de BBC Arabic, dotée d’une programmation de 12H quotidienne, Al Jazeera ayant lui-même lancé sa version anglaise en novembre 2006, au moment où France 24 commençait à émettre en arabe, CNN ayant pour sa part quatre langues de diffusion.

En termes de zones de diffusion, l’intérêt majeur de la chaîne porte sur le marché asiatique, pour lequel elle estime qu’une demande existe, demande qu’elle aurait souhaité pouvoir satisfaire à l’occasion des jeux olympiques. A l’inverse, on en déduit que les développements en Scandinavie, en Amérique du Sud et en langue espagnole apparaissent, à ce stade, moins prioritaires.

Par rapport à la triple ambition de la chaîne d’enrichir sa grille de programme, ses langues de diffusion et ses zones de diffusion, le contexte budgétaire contraint des finances publiques conduira sans doute à effectuer des choix.

En réponse aux observations provisoires de la Cour, France 24 a confirmé que l’augmentation de la diffusion quotidienne en arabe constituait une priorité essentielle tout comme l’extension de la diffusion à l’Asie. Ce n’est qu’au-delà de ces développements qu’une offre en espagnol, couplée à une diffusion en Amérique du sud, devront être envisagés.

Au total, France 24 a connu une montée en charge très rapide sur un format dont elle souhaite poursuivre l’enrichissement, tant en termes de langues de diffusion, de grille de programmes que de zones de réception. Ce format correspond à la volonté de distinguer France 24 de ses principaux concurrents. Il confère à ce stade un incontestable dynamisme à la chaîne qui s’est construite en dehors des références historiques de l’audiovisuel extérieur.

La Cour relève néanmoins les débats persistants qui existent tant sur le contenu linguistique de la chaîne que sur ses modalités de diffusion en France. Ils sont le fruit de l’ambiguïté constitutive du concept de chaîne française d’information internationale, en ce qui concerne en particulier son marché de destination et la langue de diffusion privilégiée qui doit en découler.

Pour l’avenir, deux questions d’ordre distinct sont posées : d’une part, il s’agit de savoir si le format choisi par France 24, notamment en ce qui concerne ses modes de production et le recours important aux prestations extérieures qu’il suppose, se révèlera suffisant dans la durée pour répondre aux exigences de son public cible ; d’autre part, il s’agit de savoir dans quelle mesure les coûts de la chaîne pourront être contenus au fur et à mesure que la période de lancement fera place à une période de fonctionnement mature. La stratégie de la chaîne devra ainsi permettre de surmonter la tension qui peut exister entre ces deux exigences, de sorte à répondre aux attentes de son auditoire sans entraîner des besoins de financement qui ne pourraient pas être satisfaits.

Par rapport à ces interrogations, le président de France 24 a indiqué lors de son audition devant la Cour que la chaîne visait non seulement les « leaders d’opinion » traditionnels, dont la capacité à être des relais d’influence résulte directement de leur position sociale, mais aussi les « nouveaux leaders d’opinion », dont la capacité d’influence résulte notamment de leur présence dans les nouveaux médias (blogs ; sites internet ; communautés virtuelles). Le développement mondial de ces médias étant prévisible (très forte croissance mondiale attendue du nombre de détenteurs d’ordinateurs connectés à Internet et de téléphones portables d’ici 2015), les nouveaux leaders d’opinion constituent pour France 24 une cible privilégiée susceptible en outre d’entraîner la perception de recettes commerciales significatives issues de la distribution de la chaîne sur ces nouveaux modes de diffusion, notamment la télévision mobile personnelle (TMP). Dans cette perspective, et partant d’une grille reposant déjà sur des format courts, la chaîne développe actuellement des formats très courts de programmes (journaux de 2’30’’) dont elle estime qu’ils seront mieux adaptés à la consommation via ces nouveaux réseaux et au profit de cette population-cible.

LES COÛTS ET LES MOYENS MIS EN œUVRE

Sont successivement examinés les comptes, sous l’angle de leur analyse financière puis de leur régularité, et les budgets, au regard d’abord de leur conformité avec la convention de subvention, au regard enfin des moyens dont ils supposent la mise en œuvre.

ANALYSE FINANCIÈRE

Depuis le lancement de France 24, les comptes ont été produits au titre de deux exercices : un premier exercice de 13 mois recouvrant la période du 29 novembre 2005 au 31 décembre 2006 dont les comptes ont été approuvés par l’assemblée générale le 31 mai 2007 et un exercice de 12 mois en 2007, l’assemblée générale d’approbation des comptes s’étant tenue fin mars 2008. Les comptes de la société sont consolidés dans ceux de France Télévisions et de TF1. En sus de ses comptes annuels, France 24 produit des comptes trimestriels qui sont transmis à ses seuls actionnaires.

UN COMPTE DE RÉSULTAT QUI TRADUIT LA RAPIDE MONTÉE EN PUISSANCE DE LA SOCIÉTÉ

Les comptes de résultats traduisent la rapide montée en puissance de l’activité de la société, dont les charges et produits d’exploitation ont presque triplé entre 2006 et 2007, passant, pour les produits d’exploitation, de 35 M€ à 92 M€ et, pour les charges d’exploitation, de 35 M€ à 99 M€.

Ils témoignent également de l’optique dans laquelle la société a été constituée. En gestion, le montant des dépenses de la société est en effet fixé en fonction du niveau de la subvention attendue des pouvoirs publics de sorte à conduire à l’équilibre. Ce fut exactement le cas en 2006, l’exercice 2007 se traduisant, quant à lui, par un résultat net comptable après impôts très légèrement déficitaire (-0,025M€).

Par grandes masses, les produits d’exploitation correspondent, en 2007, à hauteur de 95% à la subvention d’exploitation versée par l’Etat. Les charges d’exploitation se répartissent entre 61% d’autres achats et charges externes, 28% de masse salariale, 5% d’amortissements, 3% d’autres charges et 3% d’impôts, taxes et versements assimilés.

-  Compte de résultat

K€

2006

2007

Produits d'exploitation

35 069

91 580

chiffre d'affaires

169

4 460

subvention d'exploitation

34 898

86 933

reprise sur amortissements et provisions

2

187

K€

2006

2007

Charges d'exploitation

35 240

98 987

autres achats et charges externes

25 226

60 698

impôts, taxes et versements assimilés

1 140

2 532

masse salariale

8 287

27 683

 

salaires et traitements

6 040

20 115

charges sociales

2 247

7 568

dotation aux amortissements et provisions

452

5 379

 

amortissements

364

5 146

provisions

88

233

autres charges

135

2 695

Résultat d'exploitation

-171

-7 407

produits financiers

887

1 240

charges financières

4

40

Résultat financier

883

1 200

produits exceptionnels

363

5 146

charges exceptionnelles

   

Résultat exceptionnel

363

5 146

impôts sur les bénéfices

-1 075

1 036

Résultat net

0

-25

Source : états financiers de France 24

Les produits d’exploitation

La subvention d’exploitation versée par les pouvoirs publics représente 99,5% des produits d’exploitation en 2006 et 95% de ceux-ci en 2007, le chiffre d’affaires s’établissant ainsi en 2007 à 5% des produits d’exploitation.

La subvention d’exploitation

La subvention versée par l’Etat à France 24 a vocation à être comptabilisée dans les produits d’exploitation pour ce qui concerne la subvention de fonctionnement et au passif du bilan de la société quant à la subvention d’investissement. Les immobilisations qui sont ainsi acquises donnent lieu à des amortissements qui sont financés par une reprise de subvention d’investissement de même montant et qui figure dans les produits exceptionnels. Dans ce cadre général, le soutien financier apporté par l’Etat à la société se traduit au plan comptable par trois séries d’écritures concernant les produits d’exploitation, les produits exceptionnels et le passif du bilan.

En 2006, la société a perçu une subvention d’exploitation de 37 M€ et une subvention d’investissement de 25 M€. La subvention d’exploitation a été comptabilisée à hauteur de 34,9 M€ dans les produits d’exploitation, le solde, soit 2,1 M€ correspondant à des charges décalées sur l’exercice suivant, a donné lieu à la comptabilisation d’un produit constaté d’avance de même montant. La subvention d’investissement de 25 M€ a été comptabilisée au passif pour un montant de 24,6 M€ à la clôture  et s’est accompagnée de la comptabilisation d’un produit exceptionnel de 0,4M€ pour financer les dotations aux amortissements de l’exercice.

En 2007, la société a comptabilisé une subvention d’exploitation de 86,9 M€. Ce montant correspond au montant attendu au titre de la convention de subvention, soit 85,8 M€, diminué de 1 M€ transformés en subvention d’investissement et augmenté de la reprise de 2,1 M€ des charges décalées de l’exercice précédent. Il est à noter qu’au 31.12 de l’exercice 2007, la société n’avait effectivement perçu que 85,5 M€ au titre de son exploitation, un solde de 289 K€ restant à verser par l’Etat sur la subvention 2007. Néanmoins, la totalité du produit de la subvention attendu sur l’exercice a été comptabilisée. France 24 a par ailleurs perçu la subvention d’investissement de 1 M€ attendue. Pour financer les amortissements correspondant aux immobilisations acquises grâce à la subvention d’investissement antérieure, une reprise de subvention de 5,1 M€ a été opérée et figure dans les produits exceptionnels.

Le chiffre d’affaires

Entre 2006 et 2007, le chiffre d’affaire croît fortement pour s’établir à 4,46 M€ fin 2007 contre 0,2 M€ sur l’exercice précédent ; il est composé de 4,33 M€ de publicité et de 0,13 M€ de prestations de services.

Outre les recettes publicitaires de la chaîne, le chiffre d’affaires comprend les produits liés aux échanges commerciaux, qui correspondent pour l’essentiel aux spots publicitaires diffusés sur la chaîne en échange de son référencement dans les chaînes hôtelières.

Les charges d’exploitation

Entre 2006 et 2007, les charges d’exploitation ont évolué plus fortement que les produits d’exploitation : + 181% contre +161% pour ces derniers. L’augmentation est particulièrement marquée pour la masse salariale qui progresse de 234%, mais aussi pour les dotations aux amortissements et pour les autres charges. Le principal poste de charges, les autres achats et charges externes, a progressé moins vite que la moyenne.

Les achats et charges externes

- Autres charges et charges externes

K€

2006

2007

Etudes et prestations de service, soit :

1 374

13 598

prestations techniques

336

3 456

traduction

62

1 228

agessa

27

20

correspondants étrangers reportage

949

8 894

Matières et fournitures non stockées

639

828

Sous-traitance générale, dont :

4 148

19 158

information et transmission

1 412

7 187

satellite

42

3 225

référencement

456

4 391

Locations, charges locatives, entretien, réparations

3 007

3 020

Assurances

46

88

Divers (618,627,628), dont :

192

1 467

documentation générale

171

1 313

Personnel extérieur à entreprise

2 673

8 888

Rémunération intermédiaires et honoraires

5 697

4 022

Publicité, relations extérieures

6 564

5 789

Transport, déplacement, missions, réceptions, postes et télécom

885

3 841

Total

25 225

60 699

Source : états financiers de France 24

Les autres charges et charges externes représentent 61% des charges d’exploitation. Ce niveau élevé tient, d’une part, au fait que la société acquiert un certain nombre de ses programmes à l’extérieur, d’autre part au fait qu’elle sous-traite une large palette d’activités.

Activités sous-traitées

France 24 sous-traite en effet :

• l’accueil,

• la sécurité,

• le nettoyage,

• le courrier,

• la maintenance technique du bâtiment,

• l’infogérance,

• l’exploitation de ses trois régies de production-diffusion et de ses deux régies de production.

Une part de ces activités sous-traitées l’est avec les actionnaires de France 24.

Prestations effectuées par les deux actionnaires

Une convention d’assistance a été conclue avec TF1 au titre de laquelle cette société apporte une assistance pour la comptabilité, les finances, la gestion, les ressources humaines, la paye, les affaires juridiques et l’informatique ; s’y ajoute un mandat de gestion de la trésorerie de France 24. Avec France Télévisions, la convention d’assistance porte sur une assistance éditoriale, technique et juridique.

-  Facturations reçues des actionnaires

(en K€)

2005-2006

2007

TF1

FTV

TF1

FTV

conventions temporaires d'assistance

288

220

 

 

-ressources humaines

60

 

 

 

-juridique

40

60

 

 

-technique

60

60

 

 

-rédaction

 

100

 

 

-comptabilité et bureautique

128

 

 

 

Frais d'établissement

700

700

 

 

Licences logiciels gestion

308

 

 

 

Location bâtiment temporaire

450

 

 

 

Détachements DG opérationnel et DAF

269

 

 

 

Service médical

12

 

 12

 

Convention trésorerie

10

 

10

 

Convention image (13 mois)

 

 

700

1000

Pool voyages officiels

 

 

 

60

Image Afrique AITV (13 mois)

 

 

 

300

Magazine Sport

 

 

1002

 

Total

2037

920

1734

1360

Source : France 24, réponses aux questionnaires

La part prise par les activités sous-traitées, en particulier avec les actionnaires de France 24 et tout spécialement avec TF1, implique que la société dispose d’un cadre très clair concernant les modalités de réalisation de cette sous-traitance, au plan juridique, technique et financier.

Situation au regard des règles régissant la commande publique

France 24 est une société privée créée pour remplir une mission d’intérêt général et dont l’activité est financée majoritairement par un pouvoir adjudicateur soumis au code des marchés publics. Dans ces conditions, elle est soumise aux dispositions de l’ordonnance n°2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics.

En conséquence, les contrats de sous-traitance  supérieurs au seuil de 210 K€HT (avant le 31 décembre 2007) et au seuil de 206 K€HT depuis sont passés par voie d’appels d’offres avec publication préalable au journal officiel de l’Union européenne (appel d’offre restreint pour la maintenance technique et l’exploitation des régies).

Les contrats inférieurs à ce seuil sont conclus par voie de consultation privée, y compris pour la sécurité qui ne rentre pas dans la liste des prestations soumises à publicité préalable.

Il convient de noter que les contrats ayant pour objet l’achat, le développement, la production ou la coproduction de programmes audiovisuels font partie des secteurs qui sont exclus du champ d’application de ces règles.

Masse salariale

La masse salariale représente 28% des charges d’exploitation de la société en 2007. Son évolution entre 2006 et 2007 témoigne de la politique de recrutement active de la société, dont l’effectif a été entièrement constitué au cours de la période. Les composantes de la masse salariale sont analysées plus avant, dans la partie consacrée aux coûts de la société. Au plan comptable, elles n’appellent pas de remarques particulières : une provision pour indemnités de fin de carrière est comptabilisée au passif, le stock de congés payés et RTT non pris en fin d’exercice étant comptabilisé annuellement.

Les résultats

Résultat d’exploitation

Entre 2006 et 2007, le résultat d’exploitation se dégrade fortement et passe de -0,2 M€ à -7,4 M€. Cette situation s’explique en large partie par le fait que les dotations aux amortissements qui apparaissent dans les charges d’exploitation trouvent leur contrepartie dans les produits exceptionnels au travers de la reprise de la quote-part de subvention d’investissement affectée aux biens ainsi amortis. Si l’on neutralise cet effet, le déficit d’exploitation est ramené à 2,3 M€ pour 2007.

Résultat financier

Le résultat financier s’élève à 0,9 M€ en 2006 et à 1,2 M€ en 2007, les produits financiers ayant ainsi augmenté de 40% entre les deux exercices. Ceux-ci sont liés au calendrier de versement des subventions publiques, qui a notamment conduit à la constitution d’un volume initial de trésorerie important au sein de France 24, analysé en détail dans la section suivante du présent rapport.

Résultat exceptionnel

Le résultat exceptionnel de 0,4 M€ en 2006 et 5,1 M€ en 2007 tient à la comptabilisation dans les produits exceptionnels de la contrepartie des subventions d’investissement qui viennent financer les dotations aux amortissements figurant dans les charges d’exploitation.

D’une manière générale, les conventions comptables ont pour effet que le résultat net équilibré obtenu par la société résulte d’un résultat d’exploitation déficitaire compensé par un résultat exceptionnel excédentaire, décalage que la société pourrait retraiter le cas échéant dans la présentation de ses soldes intermédiaires de gestion.

Résultat net

Le résultat net globalement équilibré sur les deux exercices est obtenu après la comptabilisation d’une charge d’impôt sur les sociétés de 1,1 M€ en 2006 et d’un produit de 1 M€ en 2007 au titre du carry back de l’année précédente.

Affectation des résultats

L’article 22 des statuts de France 24 prévoit les règles d’affectation des bénéfices : le bénéfice servira à doter la réserve légale et à constituer toute forme de réserve que l’assemblée générale jugerait opportun de constituer, le surplus éventuel étant réparti entre les actionnaires sous forme de dividende.

La convention de subvention est encore plus précise. Elle prévoit en effet à son article 7 que les bénéfices seront réinvestis dans la société. Néanmoins, au cas où les recettes publicitaires dépasseraient un quart des recettes totales, « une part raisonnable du bénéfice de l’exercice considéré pourra être distribuée aux actionnaires en fonction des efforts qu’ils auront accomplis pour contribuer à ce résultat ».

Au total, le compte de résultat de la société traduit sa rapide montée en puissance et la recherche de l’équilibre financier qui préside à l’élaboration de ses budgets. Au niveau des produits, il est marqué par un financement sur subvention publique à hauteur de plus de 95%. Au niveau des charges, il se caractérise par l’importance des achats externes et notamment des activités sous-traitées.

UN BILAN LARGEMENT DÉPENDANT DE LA SUBVENTION D’INVESTISSEMENT OCTROYÉE PAR LES POUVOIRS PUBLICS

L’actif

Entre 2006 et 2007, le total de l’actif se réduit fortement, passant de 149 M€ à 58 M€. Cette situation tient pour l’essentiel à un changement de méthode de comptabilisation des subventions publiques à venir, exposé plus loin (p.43).

Corrigé de l’effet dû au changement de méthode de comptabilisation des subventions futures, l’actif de la société continue néanmoins à se réduire, de 3,7 M€ entre 2006 et 2007, du fait de la baisse de la valeur nette des immobilisations corporelles (-2 M€), ainsi que des valeurs mobilières de placements (-11 M€) et des disponibilités (-14 M€).

L’actif immobilisé se compose d’immobilisations corporelles et d’un faible volant d’immobilisations financières. France 24 n’a comptabilisé en 2006 et 2007 aucune immobilisation incorporelle.

-  Actif et passif

Actif (K€)

2006

2007

 

Immobilisations incorporelles nettes

0

0

 

 

valeur brute

 -

 -

 

 

amortissements

 -

 -

 

Immobilisations corporelles nettes

22 569

20 490

 

 

valeur brute

22 933

25 999

 

 

amortissements

364

5 509

 

Immobilisations financières

469

507

 

 

dont titres de participations

37

37

Total actif immobilisé

23 038

20 997

 

Stock et en-cours

433

573

 

 

Avances et acomptes versés

433

573

 

Créances

76 883

13 092

 

 

dont clients

232

5 356

 

 

dont Etat subvention à recevoir

 87 654

 

 

Divers

47 805

22 279

 

 

Valeurs mobilières de placement

33 667

22 203

 

 

Disponibilités

14 138

76

 

Comptes de régularisation

688

565

 

 

Charges constatées d'avance

688

565

Total actif circulant

125 809

36 509

 

Divers

 

 

Total actif

148 847

57 506

Passif (K€)

2006

2007

 

 

capital social

37

37

 

 

réserve légale

 

 

 

 

report à nouveau

 

 

 

 

résultat de l'exercice

 

-25

 

Situation nette

37

12

 

 

subventions d'investissement

24 636

20 490

Total capitaux propres

24 673

20 502

Provisions

88

249

 

 

pour risque

 

 

 

 

pour charges

88

249

Dettes

124 085

36 756

 

 

financières

541

4 355

 

 

d'exploitation

29 258

30 120

 

 

diverses

6 632

2 281

 

 

Produit constaté d'avance

87 654

 

Divers

 

 

 

Total passif

148 846

57 507

Source : états financiers de France 24

Passif

Les subventions d’investissements

Les subventions d’investissements apparaissent dans les capitaux propres pour un montant de 24,6 M€ en 2006 et 20,5 M€ en 2007. En 2007, les capitaux propres sont ainsi inférieurs à l’actif immobilisé alors qu’ils lui étaient supérieurs en 2006 et sont composés de façon quasi-exclusive de la subvention d’investissement accordée par les pouvoirs publics.

Les provisions

Le montant des provisions à la clôture 2007 s’élevait à 250 K€ dont un tiers lié aux indemnités de fin de carrière.

Les annexes aux états financiers

La filiale France 24 advertising

La filiale a été créée en 2006 avec un capital de 0,037 M€ apporté par France 24. Elle n’a pas eu d’activité en 2006. En 2007, son chiffre d’affaires s’élève à 2,99 M€ et son résultat à 0,02 M€. Elle prend en charge les activités liées à la publicité diffusée sur France 24. Le rapport spécial des commissaires aux comptes sur les conventions réglementées précise pour l’exercice 2007 que la convention liant France 24 et sa filiale n’a pas fait l’objet d’une autorisation préalable du conseil de surveillance de France 24, cette autorisation n’ayant été donnée qu’a posteriori.

Les engagements hors bilan

Les comptes 2007 comportent en annexe des éléments chiffrés sur les engagements hors bilan, soit 5,9 M€ de charges pour 2008 (1,4 M€ pour les contrats avec les agences de presse, 3,1 M€ pour les contrats satellitaires et 1,4 M€ de loyers) et un engagement reçu en matière de subvention publique de 70 M€.

Au total, le bilan de l’exercice 2006 apparaît atypique, celui de 2007 constituant une base plus pertinente pour l’étude de la société qui révèle une très grande dépendance du bilan par rapport à la subvention d’investissement octroyée par les pouvoirs publics. A cet égard, le fonds de roulement de la société dépendra de l’éventuel versement de subventions d’équipement, sujet qui n’a pas été pris en compte dans les simulations financières associées à la convention et qui est aujourd’hui réglé en marge de cette dernière.

RÉGULARITÉ ET ENVIRONNEMENT DE CONTRÔLE

FRANCE 24 S’EST ENGAGÉE À FAIRE ÉVOLUER SES PROCÉDURES RELATIVES AUX IMMOBILISATIONS INCORPORELLES

En réponse aux observations provisoires de la Cour portant sur les immobilisations incorporelles, France 24 s’est engagée à faire évoluer ses pratiques comptables sur différents aspects :

- la marque « France 24 » fera l’objet d’une comptabilisation en immobilisations incorporelles ;

- lors de son prochain inventaire des immobilisations à l’été 2008, France 24 essaiera, dans la mesure du possible, de distinguer, pour les installations techniques et informatiques dont elle dispose, la part relevant des immobilisations corporelles de celle relevant des immobilisations incorporelles ;

- la procédure d’inventaire des programmes à la clôture de l’exercice sera formalisée afin de garantir l’absence de programmes prêts à diffuser en stock, programmes dont la valeur doit dès lors figurer à l’actif de la société.

UN MODE DE COMPTABILISATION DES SUBVENTIONS FUTURES QUI A VARIE

En 2006, la société a fait le choix de faire apparaître dans son actif circulant une créance sur l’Etat au titre de la subvention à percevoir pour l’exercice suivant. Cette créance trouvait sa contrepartie dans la comptabilisation au passif d’un produit constaté d’avance de 87,6 M€.  Cette convention comptable a été abandonnée en 2007. Les comptes font désormais état de la subvention inscrite en loi de finances (70 M€) dans les engagements hors bilan, l’annexe aux comptes précisant toutefois : « il est à noter que l’Etat s’est engagé auprès de France 24 par lettre officielle à honorer la totalité de ses engagements contractuels pour l’année 2008, soit 88,5 M€ ».

La solution retenue en 2007 permet d’avoir une lecture plus pertinente du bilan et s’appuie au plan comptable sur le fait que le montant des fonds qui seront versés par l’Etat lors de l’exercice suivant ne peut être connu avec exactitude.

AUTRES POINTS D’ATTENTION EN MATIÈRE COMPTABLE ET FINANCIÈRE

Le régime applicable en matière de TVA

Par un courrier en date du 17 février 2004, le service de la Direction de la Législation Fiscale a répondu à une demande formulée par la Direction du Développement des Médias sur le traitement fiscal applicable en matière de TVA au concours financier versé par l’Etat à la Chaîne Française d’information internationale.

La réponse de la DGI décrit l’hypothèse où CFII bénéficiera d’une subvention portée au budget général de l’Etat : «  Il doit être considéré, au vu du projet de convention (…), que le versement de cette subvention, qui assurera la plus grande part du financement de cette chaîne, ne constitue ni la contrepartie d’un service rendu à l’Etat, ni le complément de prix d’une opération imposable. Dans ces conditions, la subvention qui sera versée par l’Etat à la Chaîne Française d’information internationale ne sera pas imposable à la TVA. De plus il sera admis que la perception de cette subvention non soumise à la TVA n’affecte pas les droits à déduction de la Chaîne Française d’information internationale. »

Fort de cette lettre, CFII devenue France 24 bénéficie de plus de 15 M€ de remboursements, du fait notamment des droits à déduction nés des investissements effectués à hauteur de 26 M€, mais aussi de l’ensemble des facturations reçues de ses fournisseurs.

- Remboursements de TVA à France 24

Demandes de remboursement effectuées (en €)

TVA au titre du

2006

2007

Total 

trimestre 01

332 687

2 810 738

 

trimestre 02

966 114

1 726 947

 

trimestre 03

926 418

2 651 020

 

trimestre 04

3 504 157

2 545 778

 

Total

5 729 376

9 734 483

15 463 859

Remboursement obtenu (en €)

 

2006

2007

2008

Total 

 

2 225 219

10 694 869

2 545 778

15 463 869

Source : Cour des Comptes et France 24

Cette application du droit constitue pour France 24 un avantage financier important.

La situation fiscale de France 24

A la clôture du premier exercice, fin 2006, un écart important existe entre le résultat comptable nul et la présentation fiscale bénéficiaire de + 3,2 M €. Le motif tient au décalage de certains coûts de lancement reportés sur l’exercice 2007. Du fait de cette décision de gestion, la société a dû réintégrer ces charges comptabilisées mais non engagées, et non déductibles fiscalement en 2006. Elle a donc dégagé un bénéfice.

Symétriquement, en dénouant ces opérations en 2007, la société a déduit de son résultat fiscal ces mêmes sommes. Le résultat comptable est déficitaire de 24.730 €. Compte tenu d’autres ajustements, le résultat fiscal devient déficitaire de 3.1 M€. La société s’est prévalue dans sa déclaration fiscale correspondant à l’exercice 2007 d’un « carry back » de 1M€ en se fondant sur l’article 220 quinquies du code général des impôts.

Le traitement des immobilisations corporelles

Processus de comptabilisation

Lors de son premier exercice de 13 mois, la société a procédé à un premier classement comptable au fur et à mesure de la mise en place des installations, de l’acquisition de biens et de la réception du parc informatique et vidéo. De ce travail, il a résulté un classement par grandes masses, qui a été repris et affiné l’année suivante.

Ainsi, lors de l’exercice 2007, les données ont été regroupées en agencements aménagement et constructions, matériel vidéo, matériel divers, installations générales et agencements, agencements informatiques, matériels informatiques, et machines de bureau.

Les immobilisations corporelles sont évaluées à leur coût d’acquisition, lorsqu’il est identifié, ou au coût moyen lorsque pour des produits identiques, les tarifs facturés ont été différents en fonction du nombre de quantités commandées. Les vérifications effectuées montrent que les coûts portés sur les fiches individuelles des biens immobilisés sont totalement conformes au marché passé et aux agrégats de biens comptabilisés.

Méthode d’amortissement

Les immobilisations corporelles sont amorties selon le mode linéaire en fonction de la durée d’utilisation de l’entreprise.

Sur le livre des états d’amortissements comptables, chaque bien est numéroté, recensé physiquement et affecté d’un numéro. Les amortissements dotés en 2006 s’élèvent à 363 572 €. En 2007, le calcul des amortissements effectués par le logiciel de gestion du parc des immobilisations a justifié une dotation de l’exercice à hauteur de 5.146.349 €. Cette somme inclut un rattrapage de l’insuffisance constatée au titre de l’année antérieure.

Traitement des honoraires d’architecte

Les honoraires d’architecte ne figurent pas au sein des immobilisations corporelles ; ils ont été inscrits à un compte de frais d’« honoraires ». Ils s’élevaient à :

- 78.100 € HT pour le cabinet Ory, cabinet imposé par le bailleur pour les aménagements touchant l’infrastructure lourde du bâtiment.

- 210.000 € HT pour le cabinet GERP architectes, en charge de l’aménagement intérieur des locaux, incluant la phase d’études et celle de travaux.

Pour justifier ce mode de comptabilisation, l’entreprise se prévaut d’une interprétation nouvelle du Nouveau Plan Comptable Général § 310-10 : « dans les comptes individuels, les droits de mutation, honoraires ou commissions et frais d’actes, liés à l’acquisition, peuvent sur option, être rattachés au coût d’acquisition de l’immobilisation ou comptabilisés en charges ».

Or, s’agissant de l’évaluation des coûts d’entrée des immobilisations corporelles, tous les coûts directement attribuables doivent être rapportés aux coûts d’entrée de l’immobilisation. L’article 321-2 du règlement n° 99-03 du CRC indique que le coût d’acquisition retenu dans l’avis comprend deux éléments : « le prix d’achat y compris les droits de douane et taxes non récupérables, après déduction des remises, rabais commerciaux et escomptes de règlement (non compensés dans le PCG), et tous les coûts directement attribuables engagés pour mettre l’actif en état de marche pour fonctionner selon l’utilisation prévue par la direction ».  La liste des coûts directement attribuables comporte les honoraires de professionnels comme les architectes, géomètres, experts, évaluateurs, conseil.

Les honoraires d’architectes ne peuvent donc être comptabilisés en charges dès lors qu’ils ne sont pas liés à une acquisition mais portent sur des travaux d’agencement. Ils doivent être pris en compte dans les actifs corporels en 2006.

UN PROCESSUS COMPTABLE DE QUALITÉ

Un suivi rapide et régulier

Le calendrier budgétaire et comptable est le suivant :

• avril : les comptes n-1 présentés par le directoire et arrêtés par le conseil de surveillance sont approuvés par l’assemblée générale puis présentés à la direction des médias ;

• juillet : une actualisation du budget de l’année n et le budget de n+1 sont présentés par le directoire au conseil de surveillance qui les valide et les transmet à la direction des médias ;

Un reporting budgétaire mensuel et un arrêté comptable trimestriels sont par ailleurs effectués. La société est donc en mesure de détecter rapidement les écarts par rapport à la trajectoire de dépenses qu’elle s’est fixée.

Les contrôles externes

Les comptes de la société sont audités par deux cabinets de commissaires aux comptes (Mazars & Gérard et Ernst & Young), l’un choisi par TF1 et l’autre par France Télévisions. Ces cabinets ont certifié les comptes 2006 sans formuler de réserves. En outre, la convention de subvention a prévu deux mécanismes, déjà mentionnés, afin de permettre à l’Etat de contrôler le bon usage de la subvention versée à la société (articles 10.1 et 10.2). Ainsi, la société adresse à l’Etat un compte rendu d’exécution annuel (rapport d’activité, compte rendu financier et comptes de l’exercice). Et, à l’issue de la deuxième année de diffusion puis tous les deux ans, un audit par un organisme indépendant sélectionné par l’Etat portera sur les coûts de France 24 « afin de vérifier que ceux-ci sont comparables aux coûts qu’exposerait une chaîne de télévision de taille comparable à la société et ayant le même type de programmes et de publics, bien gérée, adéquatement équipée et maintenant en bon état de fonctionnement ses locaux et équipements ». Cet audit indiquera également si les prestations effectuées par les fondateurs sont rémunérées selon les conditions normales de marché et si les tarifs pratiqués par la chaîne pour la vente de ses espaces publicitaires sont conformes aux conditions de marché.

Le contrôle interne comptable

L’équipe de la direction administrative et financière est restreinte. Elle comporte 11 personnes dont 7 en charge des questions financières : 4 dans le pôle comptabilité et 3 dans le pôle contrôle de gestion. L’équipe de contrôle de gestion est située au sein des services opérationnels (la rédaction et les services techniques).

Elle s’appuie sur un système d’information intégré, comportant quatre modules (la paye, la comptabilité générale, le contrôle de gestion et les immobilisations). Il n’existe donc pas d’écart entre les écritures comptables et budgétaires, cette caractéristique permettant d’expliquer en large partie comment la société parvient à fournir rapidement un reporting budgétaire mensuel, produit le 15 du mois suivant, et des comptes trimestriels remontant 5 jours après la fin du trimestre chez les actionnaires de France 24. Le système d’information a été fourni par TF1, dans le cadre d’une convention d’assistance signée avec cette dernière.

Par ailleurs, les mécanismes d’engagements au sein de la société font l’objet de peu de procédures écrites. Une note interne a été produite concernant les notes de frais et frais de mission et diffusée à l’ensemble des collaborateurs, tous ces engagements étant centralisés auprès de la direction financière. Un tableau a été fourni à la Cour qui détaille le circuit des visas pour l’engagement de différentes dépenses et prévoit au minimum une double signature au sein de la société.

Les procédures mises en œuvre sont rapides et n’appellent pas d’observations en elles-mêmes. La Cour observe toutefois qu’aucune procédure de révision comptable, hormis celle résultant du contrôle légal des commissaires aux comptes, n’est mise en œuvre au sein de France 24. Une telle démarche contribuerait au renforcement du contrôle interne comptable.

LES BUDGETS ET LES GRANDS EQUILIBRES FINANCIERS

DÈS L’ORIGINE, LA CONVENTION A NÉGLIGÉ TROIS ASPECTS IMPORTANTS DES FLUX FINANCIERS ATTENDUS PAR LA CHAÎNE

Trois questions apparaissent insuffisamment prises en compte dans les plans de financement associés à la convention de subvention : elles ont trait aux conditions d’indexation de la subvention, aux conditions de versement des subventions de l’Etat et à l’évolution des ressources propres.

Des conditions d’indexation généreuses

La convention de subvention fixe à son article 8 les modalités d’indexation de la subvention de l’Etat selon la formule suivante :

subvention n = subvention n-1[0,50X(ICHTTS-IMEn-2/ICHTTS-IMEn-3) +0,36(EBIQn-2/EBIQn-3) +0,10(TCHn-2/TCHn-3) +0,04(ICCn-2/ICCn-3)]

avec :

• ICHTTS-IME = indice du coût horaire du travail tous salariés du secteur des industries électriques et mécaniques 

• EBIQ = indice du prix à la production de l’industrie et des services aux entreprises « énergie, biens intermédiaires, biens d’équipement »

• TCH = indice des prix à la consommation pour l’ensemble des ménages

• ICC = indice du coût de la construction

Dans les faits, l’application des clauses d’indexation a conduit à des augmentations des subventions annuelles de respectivement 7,29% en 2007 et 3,10% en 2008, une estimation encore provisoire pour 2009 conduisant à une indexation de 3,47%.

L’indice du coût du travail dans les industries électriques et mécaniques a augmenté de 3% en 2005, 2,7% en 2006 et 2,4% en 2007 (donnée provisoire à fin septembre 2007). L’indice du prix à la production pour le secteur énergie, biens intermédiaires et biens d’équipement a cru de 4,8% en 2005, 3,6% en 2006 et 4,7% en 2007 (donnée provisoire à fin décembre). L’indice des prix à la consommation a évolué de 2,7% en 2005, 1,4% en 2006 et 4,5% en 2007. L’indice du coût de la construction a progressé de 2,4% en 2005, 7% en 2006 et 2,8% en 2007. En dehors de la volatilité de ces évolutions annuelles qui correspondent effectivement aux données publiées par l’INSEE, il apparaît clairement que les tendances d’évolution de ces indices se situent largement au dessus de la tendance d’évolution des ressources de l’Etat et laissent prévoir, à mécanisme d’indexation inchangé, une croissance annuelle de l’ordre de 3% à 3,5% par an des subventions accordées à France 24, soit de l’ordre de 3 M€ supplémentaires chaque année.

Ce mécanisme d’indexation apparaît généreux pour trois séries de raisons.

Premièrement, les indicateurs retenus ne reflètent que partiellement la réalité des coûts supportés par la société. Ainsi, il est prévu d’indexer la subvention pour moitié sur l’évolution du coût horaire du travail dans le secteur des industries électriques et mécaniques. Pourtant, la convention initiale limite à 30% des coûts la masse salariale de la société, cette contrainte ayant été desserrée à 40% à la suite de son premier avenant. Il n’y a donc pas de raison pour que 50% des coûts de la société soient indexés sur l’évolution du coût horaire de la masse salariale. De plus, l’indicateur retenu en l’espèce concerne le secteur des industries électriques et mécaniques et là encore la pertinence de ce choix est discutable. Le deuxième élément d’indexation, à savoir l’indice des prix à la production de l’industrie et des services aux entreprises « énergies, biens intermédiaires, biens d’équipement » pose le même type de difficulté. L’indexation de la subvention à hauteur de 36% sur cette donnée ne trouve pas de justification précise ; mais surtout le choix du secteur des « énergies, biens intermédiaires, biens d’équipement » peut se discuter par rapport à celui des services aux entreprises en général. Les deux données restantes, portant pour 10% sur l’évolution générale des prix à la consommation pour 4% sur l’évolution de l’indice des prix à la construction, peuvent être analysées de manière similaire.

En réponse aux observations provisoires de la Cour, France 24 a souligné qu’elle faisait appel à des sous-traitants pour des prestations dans lesquelles la masse salariale représentait une part essentielle et qu’il était par conséquent logique d’indexer la subvention en tenant compte de cette masse salariale. La Cour observe toutefois qu’il serait alors cohérent de réintégrer ces prestations sous-traitées dans le plafond de masse salariale.

Deuxièmement, les conditions de mise en œuvre du mécanisme d’indexation apparaissent critiquables. En effet, il a été prévu d’indexer le soutien financier de l’Etat dès l’année 2007 inclus alors qu’il s’agissait là de la première année de fonctionnement de la chaîne. Plus encore, lors de la renégociation de la convention, le soutien supplémentaire apporté au titre de l’année 2007 a immédiatement fait l’objet d’une indexation. Enfin, l’indexation sur une base 2005 a conduit à constater la première année d’exercice de la société une indexation double qui s’est traduite par une augmentation de 7,29% de la subvention lors de sa première année de versement. Ce mécanisme d’indexation immédiat induit de fait une distorsion entre les chiffres présentés par la convention et la réalité du soutien financier de l’Etat qui était immédiatement attendue.

Troisièmement, la formule d’indexation n’est pas assortie de mécanismes visant à inciter la société à réaliser des efforts de productivité. A activité constante, les coûts de la chaîne sont ainsi supposés progresser sans qu’il n’y ait lieu d’inciter la société à rechercher en son sein des redéploiements. Ce présupposé est d’autant plus discutable que la convention prévoit par ailleurs les conditions dans lesquelles l’Etat financera le développement d’activités nouvelles. Il aurait donc été justifié d’introduire un indicateur de productivité au sein du mécanisme d’indexation de la subvention de base45.

Une construction qui a fait l’impasse sur l’apport des produits financiers

L’annexe 4 fixe l’échéancier de versement des subventions de l’Etat, soit :

• 40% au 15 février ;

• 20% au 15 mai ;

• 20% au 15 août ;

• 20% au 15 novembre.

Ces conditions apparaissent d’autant plus favorables qu’elles se sont accompagnées d’un calendrier de versement des subventions initiales également favorable : 15 M€ versés en décembre 2005, 40 M€ au 15 février 2006. Cette situation explique largement le niveau de la trésorerie et des produits financiers dégagés par France 24. Or, elle était prévisible au moment de la signature de la convention qui n’en a cependant pas tenu compte.

Cet échéancier de versement de la subvention publique a pour effet que France 24 dispose en moyenne sur l’année de 4 mois d’avance de trésorerie. Pour un budget de 70 M€ et avec des taux courts à 3%, ceci représente un produit financier attendu de 0,7 M€ ; si l’on fait l’hypothèse d’un versement de 88 M€ et d’un rendement sur les marchés à court terme de 3,5%, le résultat financier net s’établit à 1 M€46

Il est vrai néanmoins qu’en pratique l’Etat a souvent versé avec retard les échéances de subventions attendues.

-  Echéancier des versements de l’Etat

 

CONTRAT

REALISE

 

 

montant

date prévue

montant

date effective

Commentaire

2006

subvention d'investissement

13

30.12.05

13

30.12.05

 

subvention d'exploitation

2

30.12.05

2

30.12.05

 

 

Subv. d'investissement

12

15.02.06

12

21.04.06

2 mois retard

subvention d'exploitation

14

15.02.06

21,2

21.04.06

2 mois retard

 

subvention d'exploitation

7

15.05.06

 

 

1 mois avance

 

subvention d'exploitation

7

15.08.06

4,4

11.09.06

1 mois retard

 

subvention d'exploitation

7

15.11.06

9,4

22.11.06

 

 

Total

62

 

62

 

 

2007

subvention d'exploitation

34,3

15.02.07

16

29.12.06

2 mois avance

 

 

 

18,4

18.04.07

2 mois retard

 

subvention d'exploitation

17,2

15.05.07

17,2

12.06.07

1 mois retard

 

subvention d'exploitation

17,2

15.08.07

17,2

7.09.07

1 mois retard

 

CONTRAT

REALISE

 

 

Contrat montant

date prévue

Réalisé

montant

date effective

Commentaire

 

subvention d'exploitation

17,2

15.11.07

13,7

26.11.07

 

 

 

 

2

31.12.07

1 mois retard

Subv. d'investissement

 

 

1

31.12.07

1 mois retard

Total

85,8

 

85,5

289 K€ non versés au 31.12.07

Source : France 24, réponse au questionnaire

On note toutefois que malgré ces retards la situation de trésorerie de la société lui a permis d’enregistrer des produits financiers très significatifs sur les exercices 2006 et 2007. Cette situation pourrait évoluer si la société devait à l’avenir procéder à l’autofinancement de ses investissements et puiser sur sa trésorerie. Si ce n’était pas le cas, le maintien des conditions de versement des subventions publiques procurerait à France 24 des revenus financiers récurrents.

Les questions ayant trait à la trésorerie auraient donc mérité d’être approfondies lors de la signature de la convention, de ses avenants ou de son suivi, que ce fût pour revoir le calendrier de versement des subventions publiques ou pour tenir compte des produits financiers attendus dans les perspectives financières associées à la convention.

Des perspectives de ressources propres à préciser

Si l’article 6 de la convention prévoit que « la société tire une grande part de son financement des subventions prévues à l’article 8 », France 24 doit néanmoins s’efforcer de développer ses ressources propres. L’existence de ressources publicitaires qui peuvent être d’un montant significatif fait ainsi partie des présupposés de la convention : c’est une des missions de l’audit extérieur que de vérifier que les prix de vente pratiqués par la chaîne pour ses espaces publicitaires sont conformes au prix du marché et l’Etat est habilité, selon les termes de la convention, à demander la restitution à la société des sommes qui auraient été perdues du fait de prix pratiqués inférieurs au marché.

Pourtant, les ressources propres de la société, et en particulier ses ressources publicitaires, ne sont pas mentionnées de façon précise dans les équilibres financiers de la convention. Le point de savoir à quoi ces ressources peuvent être affectées pour financer les projets de développement de la société ou son fonctionnement n’est pas évoqué.

Interrogée sur cette question, la société répond que face à ces projets de développement, chiffrés dans la convention de subvention à 20 M€ à l’horizon 2010 et en base 2005, elle prévoit des ressources propres nettes d’un montant de 6 M€ à l’horizon 2010 (soit 10 M€ de chiffre d’affaires publicitaire et 4 M€ de charges de régie47), correspondant à une contribution nette de la publicité à 6% du budget.

Ces prévisions, à tout le moins prudentes en matière de ressources propres, mériteraient en tout état de cause de faire l’objet de discussions dans le cadre de la renégociation de la convention de subvention qui devrait débuter prochainement pour les années 2010 à 2015.

Pour l’avenir et dans la mesure où la société devrait disposer d’un volet de ressources publicitaires en partie prévisible, la mobilisation de ces ressources pour le fonctionnement et le développement de la chaîne devraient figurer dans le corps de la convention avec des indications portant sur les montants attendus à cet égard et l’usage qui leur serait réservé.

LES PERSPECTIVES FINANCIÈRES DE FRANCE 24 A HORIZON 2010

Des perspectives d’évolution des charges très dynamiques

Les charges de la société, fixées à 70 M€, puis à 80 M€, à son lancement fin 2006, seront portées à un minimum de 105 M€ et jusqu’à 133 M€ si tous les développements souhaités par la société et prévus par la convention étaient mis en œuvre, soit un doublement du budget après 3 ans de fonctionnement.

En effet, le seul jeu du mécanisme d’indexation prévu par la convention et le rebasage opéré à l’occasion de son avenant ont pour effet de faire passer le montant de la subvention publique attendu par la société de 70 M€ initialement (porté ensuite à 80 M€) à 95 M€ en 2010 et, ce, sans tenir compte d’aucun développement nouveau, soit une augmentation de 35% de la subvention publique à horizon 2010.

Toujours sans développement nouveau, si l’on tient compte des ressources publicitaires attendues à hauteur de 6 M€, le budget de la société dépassera en tout état de cause les 100 M€ en 2010. Enfin, si l’on ajoute les produits financiers et les reprises de subventions d’équipement figurant au compte de résultat de la société, le niveau minimum de charges que France 24 enregistrera en 2010 sans être en déficit serait de l’ordre de 105 M€. Ce montant minimum apparaît au demeurant prudent au regard du niveau des charges de la société retracées à son budget l’année de son lancement, soit 94,5 M€.

Si tous les développements envisagés par la convention étaient mis en œuvre, le niveau de subvention publique correspondant, évalué dans la convention à 100 M€ en base 2005, serait porté à 119 M€ en 2010 (compte tenu d’une indexation annuelle de 3,5% sur 5 ans). A ce montant, il convient d’ajouter les ressources propres apportées par la publicité, les produits financiers ainsi que les reprises de subventions d’investissement, soit un total d’environ 12 M€, portant le budget de France 24 à plus de 130 M€ à échéance 2010.

Enfin, si on se fonde sur la demande budgétaire de la société pour 2009, qui comporte une réévaluation du coût de certains des développements envisagés par la convention, le budget de France 24 à échéance 2010 s’élèverait à 133 M€.

Ainsi, le budget de la société dépassera en tout état de cause les 100 M€ en 2010 et pourrait atteindre jusqu’à 133 M€ à cette échéance si tous les développements envisagés par la convention étaient mis en œuvre. Ces montants témoignent de la dynamique introduite au sein de la convention de subvention par le double jeu du mécanisme d’indexation et des orientations du développement quinquennal.

D’une manière générale, la convention de subvention ne contient pas de plan de financement global, avec une trajectoire faisant masse sur la durée, en termes de dépenses, des questions d’investissement et de fonctionnement et, en termes de ressources, des subventions publiques et des autres formes de produits que la société pourrait mobiliser. Cette absence de plan de financement a pu masquer la perspective d’un quasi doublement de ses besoins financiers à l’horizon 2010.

Quel modèle de financement ?

La prudence manifestée au niveau de la convention quant aux ressources propres de la société peut s’expliquer par le fait qu’il s’agissait d’abord de lancer une nouvelle chaîne dont la réussite et, partant, les ressources publicitaires, étaient aléatoires. Mais, dès lors que la société entrera dans une période d’activité plus régulière, même si elle demeure en croissance, il conviendra de fixer ses équilibres financiers globaux en prenant en compte les ressources que France 24 pourra elle-même susciter, que ce soit en termes de gains de productivité, de produits financiers ou de ressources publicitaires.

Pour l’avenir, la révision de la convention à l’issue de la première période d’activité de 5 ans de la société, ou toute autre forme d’engagement que l’Etat prendrait envers France 24, devrait permettre d’introduire un mécanisme de recherche de gains de productivité au sein de la formule d’indexation et s’accompagner d’un tableau de financement global faisant état des ressources financières et publicitaires attendues par la chaîne en sus de ses ressources publiques.

La perspective que la société puisse trouver en son sein une partie des ressources nécessaires à son développement serait ainsi clairement ouverte. En effet, et s’agissant en particulier des ressources publicitaires, France 24 œuvre dans un secteur où ses principales concurrentes voient souvent une part importante de leurs financements apportée par de telles ressources, qu’il s’agisse de la publicité sur l’antenne, de la publicité sur internet, du sponsoring ou encore des partenariats qui peuvent être négociés48.. S’il était naturel que le lancement de la chaîne ne repose pas sur un tel mécanisme de financement, la part à réserver dans la durée aux ressources publiques et aux ressources publicitaires dans le mode de financement de France 24 est une question qui mérite d’être posée.

Interrogés sur ce point, la société, ses actionnaires et les tutelles ont tous convenu qu’il était effectivement possible de prévoir une part de ressources propres dans le financement de France 24. Ils ont néanmoins eu des réponses sensiblement différentes concernant le chiffrage de cette part. Les actionnaires ont souligné la prudence nécessaire : TF1 estime que la part des ressources publicitaires de France 24 est susceptible de représenter, dans 10 ans, 17 à 20 % des recettes de la chaîne. France Télévisions indique seulement qu’une progression rapide du chiffre d’affaires publicitaire est envisageable mais cite l’exemple d’Euronews dont, après 15 années, les recettes publicitaires ne représentent que le 1/3 des recettes. De même, les tutelles (direction du budget et direction du développement des médias) ont indiqué qu’une cible de 20 à 30 % des recettes propres correspondait à la situation observées au sein des chaînes comparables.

Seule France 24 a développé une vision plus ambitieuse en indiquant que ses ressources propres pourraient atteindre 40 % de son budget, décomposées comme suit :

- 15 à 20 % des recettes seraient issues de la commercialisation d’espaces publicitaires ;

- 20 % à terme des recettes seraient obtenues grâce à la présence de la chaîne sur les nouveaux moyens de diffusion (télévision mobile personnelle) qui constituent selon elle un important gisement de croissance dans l’avenir et sont susceptibles de lui procurer d’importantes ressources, sous réserve d’un développement de France 24 conforme aux prévisions figurant dans la convention de subvention.

LES RÉALISATIONS BUDGÉTAIRES

Une construction budgétaire en partie décalée par rapport au format défini par la convention

La construction budgétaire retenue par France 24 ne fait pas apparaître deux programmes en son sein mais une seule antenne. Ce parti pris, cohérent avec la stratégie effectivement développée par la chaîne apparaît néanmoins en contradiction avec l’avenant n°1 à la convention qui prévoit la réalisation de deux programmes principaux et s’accompagne d’une construction budgétaire dissociant les coûts communs à ces deux programmes et les coûts spécifiques qui peuvent leur être associés. C’est ce dont témoigne la structure budgétaire retenue en 2006 et maintenue en 2007.

Ce n’est donc pas en fonction du découpage prévu par la convention que se réalise le suivi budgétaire quotidien au sein de France 24, témoignant des écarts qui peuvent exister entre les objectifs issus de la convention et la stratégie effectivement mise en œuvre par la société.

Pour assurer la cohérence entre la convention et les pratiques de la société, il conviendrait ainsi soit que la chaîne situe son suivi budgétaire dans le cadre prévu par la convention, soit qu’elle fasse évoluer celui-ci dans le sens de la stratégie de mutualisation qu’elle développe effectivement.

-  Budget 2006 (prévisionnel et réalisé)

Budget (en M€)

Budget 2006

Réalisé 2006

Ecart

EXPLOITATION

     

Subvention d'exploitation

37

37

0

Produits constatés d'avance

 

-2,1

-2,1

Reprise de subvention d'investissement

1

0,4

-0,6

Recettes publicitaires

 

0,2

0,2

Produits financiers

0,6

0,8

0,2

PRODUITS

38,6

36,3

-2,3

Antenne

10,2

5,8

-4,4

Technologie

6,6

5,4

-1,2

Distribution

2,4

1,8

-0,6

Frais généraux

6,4

7

0,6

Création&lancement

9

15,2

6,2

Aléas&IS

3,5

1,1

-2,4

CHARGES

38,1

36,3

-1,8

RESULTAT

0,5

0

-0,5

INVESTISSEMENT

     

Subvention d'investissement

25

25

0

Investissements bâtiment

6,9

6,4

-0,5

Investissements techniques

17,3

15,4

-1,9

Investissements décor et mobilier

0,8

1,1

0,3

Total investissements

25

22,9

-2,1

Source : France 24 ; réponses au questionnaire

La société s’est écartée du cadre défini par la convention

France 24 a néanmoins procédé à un découpage de ses réalisations budgétaires par antenne dans le cadre des demandes formulées par les rapporteurs, réalisations qui seront analysées en détail dans la section consacrée aux coûts. A ce stade, la question est de savoir si la ventilation analytique des coûts présentée par France 24 pour 2007 aboutit à des résultats qui sont conformes à la convention de subvention. Pour ce faire, les quatre tableaux suivants présentent successivement :

• la structure du budget figurant en annexe à la convention telle qu’elle ressortit au niveau des dépenses réelles de 2007, soit 93,7 M€ et non 82 M€ comme dans la convention de subvention ;

• la structure effective des dépenses 2007 ; il est fait l’hypothèse, favorable à l’entreprise, que la somme correspondant au carry back (1M€) minore les dépenses de direction et fonctionnement. Par ailleurs, il a été considéré que, malgré les terminologies différentes du budget et de la convention, les découpages effectués étaient identiques : les dépenses de programmes prévues par la convention correspondent aux dépenses d’antenne suivies par le budget, la technique à la technologie, la distribution dans les zones prioritaires à la distribution et les dépenses de direction et fonctionnement aux catégories fonctionnel et lancement du budget de France 24 ;

• l’écart en montant entre le budget prévu et le budget réalisé ;

• l’écart en %.

-  Réalisation budgétaire 2007

au regard de la convention de subvention

Budget prévu au titre de la convention en base coûts d'exploitation 2007 réels

 

 

Total

Moyens communs

Antenne francophone

Antenne anglophone

Antenne arabophone

Programmes

45,7

30,9

6,9

6,9

1,1

Technique

27,4

14,9

5,7

5,7

1,1

Distribution dans zones prioritaires

9,1

4,6

1,1

2,3

1,1

Direction&fonctionnement

11,4

11,4

0,0

0,0

0,0

Total

93,7

61,7

13,7

14,9

3,4

Budget réel 2007

 

Total

Moyens communs

Antenne francophone

Antenne anglophone

Antenne arabophone

Programmes

40,4

25,2

6,5

6,0

2,9

Technique

26,4

17,3

4,4

4,4

0,5

Distribution dans zones prioritaires

12,1

8,9

1,0

1,5

0,6

Direction&fonctionnement

14,8

14,3

0,0

0,0

0,5

Total

93,7

65,7

11,9

11,9

4,5

           

Ecart réel par rapport au budget

         

 

Total

Moyens communs

Antenne francophone

Antenne anglophone

Antenne arabophone

Programmes

-5,3

-5,7

-0,4

-0,9

1,8

Technique

-1,0

2,4

-1,3

-1,3

-0,6

Distribution dans zones prioritaires

3,0

4,3

-0,1

-0,8

-0,5

Direction&fonctionnement

3,4

2,9

0,0

0,0

0,5

Total

0,0

4,0

-1,8

-3,0

1,1

Ecart en %

 

Total

Moyens communs

Antenne francophone

Antenne anglophone

Antenne arabophone

Programmes

-12%

-18%

-5%

-12%

154%

Technique

-4%

16%

-23%

-23%

-56%

Distribution dans zones prioritaires

32%

95%

-12%

-34%

-47%

Direction&fonctionnement

30%

25%

0%

0%

0%

Total

0%

6%

-13%

-20%

31%

Source : données budgétaires de France 24 retraitées par la Cour

Il apparaît ainsi des écarts significatifs entre la structure des coûts prévue par la convention et les réalisations budgétaires pour 2007. D’une manière générale, les dépenses de programmes sont inférieures à ce qui était prévu alors que les dépenses de direction et de fonctionnement sont sensiblement supérieures. De même, les frais techniques sont moins élevés qu’escompté alors que les dépenses de distribution le sont plus. Au total, les charges liées à la confection des programmes occupent une part plus faible que prévue dans la structure de coûts de France 24 alors que les charges liées à la distribution et à la valorisation de ceux-ci sont plus élevées.

Pour ce qui est enfin des coûts associés à chacune des langues de programmation, il apparaît un surcoût important en pourcentage mais faible en montant concernant l’antenne arabophone alors que l’antenne francophone et surtout l’antenne anglophone présentent des coûts moins élevés qu’escompté.

Cette situation était déjà apparente en 2006 : le tableau de la section précédente concernant le suivi budgétaire de cet exercice faisait déjà apparaître des coûts d’antenne et de technique inférieurs aux prévisions et des coûts de fonctionnement supérieurs. On note en particulier que les frais de lancement sont nettement supérieurs aux prévisions.

Enfin, par rapport aux indicateurs fixés dans le texte même de la convention et dont le respect est validé lors des conseils de surveillance de la société, les trois séries d’indicateurs soulèvent les observations suivantes :

Premièrement, la structure budgétaire globalisée ne comporte pas de recoupement permettant de suivre de manière directe le premier indicateur, à savoir un minimum de 7 M€ consacré à la production de programmes propres hors journaux, cette rubrique n’apparaissant pas dans le suivi budgétaire organisé selon une logique de métier en ce qui concerne l’antenne.

Deuxièmement, la structure budgétaire permet en revanche de suivre l’autre indicateur fixé en termes chiffrés, à savoir 2 M€ minimum alloués au référencement et au marketing. A ce titre, les réalisations 2007 sont très largement supérieures à ce chiffre puisque le réalisé 2007 s’élève à 7,3 M€, ces dépenses étant par ailleurs clairement distinctes de celles qui sont liées au lancement de la chaîne qui bénéficient d’une rubrique particulière et se sont élevées à 3,1 M€ en 2007, tout comme les frais de communication d’un montant de 1 M€ en 2007.

Troisièmement, par rapport à la structure des coûts, à savoir 50% minimum pour les programmes et la technique, 40% maximum pour la masse salariale et 15% maximum pour les frais généraux, France 24 remplit ses objectifs dans la mesure où ceux-ci ont été modifiés par l’avenant n°1 à la convention. Pour ce qui est des frais généraux, une question est de savoir ce que recouvre exactement cette notion ; si l’on tient compte de la rubrique « fonctionnel » de la ventilation analytique des coûts de France 24, celle-ci correspond à 12,2 M€ de dépenses en 2007 soit 13%. Il convient toutefois de noter que si l’on ajoutait les frais de communication figurant sous la rubrique « lancement de la chaîne », le cap des 15% de frais généraux serait franchi. Pour ce qui est de la masse salariale reflétée par les comptes de l’entreprise, celle-ci représente 28% des charges d’exploitation en 2007, soit un niveau qui aurait été compatible avec la première version de la convention, limitant à 30% les frais de personnels de la société. Il est toutefois à noter qu’une part importante de sous-traitance se traduit par des personnels de fait mis à disposition et que la masse salariale indiquée dans les comptes ne reflète donc pas la totalité des engagements pris par la société en matière de personnel. Enfin, en ce qui concerne les frais de programme et de technique, ceux-ci représentent 71% des coûts de la société en 2007, l’indicateur fixé par la convention étant largement atteint. Les programmes constituent quant à eux 43% des coûts suivis au plan analytique, ce qui montre tout l’intérêt qu’a revêtu pour France 24 l’ajout des dépenses techniques dans le calcul de cet indicateur lors de la négociation du premier avenant à la convention.

Au total, la chaîne ne dispose pas d’un suivi budgétaire cohérent avec la structure budgétaire prévue par la convention, ce qui ne permet pas d’avoir une lecture simple de la manière dont elle met en œuvre ladite convention au plan budgétaire.

Les données analytiques fournies montrent à cet égard que la société s’est écartée du cadre défini dans la convention en matière de structure de coûts. D’une manière générale, les dépenses de programmes occupent une part moins importante qu’escompté au bénéfice des dépenses liées à la distribution et au fonctionnement de la chaîne, qui portent en particulier les frais de communication.

LES MOYENS MIS EN œUVRE

ANALYSE GLOBALE ET COMPÂRAISONS INTERNATIONALES

Dès la première année de fonctionnement à part entière de la chaîne, les perspectives financières associées à son « déploiement maximal » ont été atteintes, avec des coûts de 95 M€ avant impôt sur les sociétés, répartis entre 43% de frais d’antenne, 28% de coûts techniques, 13% de coûts de distribution et 17% de dépenses fonctionnelles et de lancement.

Dans ce total, les dépenses liées aux différents programmes linguistiques sont évaluées à 4,5 M€ pour 4 heures quotidiennes d’arabe et à 11,9 M€ pour chacune des versions, françaises et anglaises, de la chaîne 24 heures sur 24. Néanmoins, il ne s’agit là que des dépenses directement imputables à chacune des versions linguistiques de la chaîne. Si l’on cherche à estimer un coût complet et si on répartit les moyens communs de la chaîne sur ses différents programmes linguistiques au prorata de leurs durées quotidiennes de diffusion, on obtient un coût complet pour les 4 heures en arabe de 9,5 M€ et un coût complet de l’ordre de 43 M€ pour la version anglaise ou française de la chaîne.

-  Ventilation analytique des coûts

 

2006

2007

(en M€)

 

communs

français

anglais

arabe

total

Antenne

5,8

25,2

6,5

6

2,9

40,4

Personnel

3,8

7,2

4,3

3,8

2

17,2

images&correspondants

0,7

5,6

2

2

0,3

9,9

magazines externes

0,8

5,9

 

 

0,5

6,4

magazines internes

 

3

 

 

 

3

interprètes et frais mission

 

2,1

0,2

0,2

0,1

2,6

Autres

0,5

1,4

 

 

 

1,4

Technologie

5,4

17,3

4,4

4,4

0,5

26,4

Personnel

3

9,4

2,5

2,5

0,5

14,8

Amortissements

0,4

4,1

 

 

 

4,1

transmissions news

0,3

 

1,9

1,9

 

3,7

production&maintenance

 

1,8

 

 

 

1,8

Autres

0,2

0,4

 

 

 

0,4

réseau&licence

1,5

1,6

 

 

 

1,6

Distribution

1,8

8,9

1

1,5

0,6

12,1

Personnel

0,4

0,7

 

 

 

0,7

Satellites

0,4

 

1

1,5

0,6

3,2

Référencement

0,4

4,4

 

 

 

4,4

Marketing

0,5

2,9

 

 

 

2,9

bande passante

0,1

0,4

 

 

 

0,4

Autres

 

0,5

 

 

 

0,5

Fonctionnel

7

12,2

0

0

0

12,2

Directoire

2

2,4

 

 

 

2,4

compta&gestion

0,4

0,6

 

 

 

0,6

services généraux

2,5

5,2

 

 

 

5,2

juridique

0,2

0,4

 

 

 

0,4

communication

0,2

1

 

 

 

1

DRH&planning

0,3

0,8

 

 

 

0,8

taxes

1,1

1,2

 

 

 

1,2

coordination internet

0,2

0,6

 

 

 

0,6

Lancement

15,1

3,1

 

 

0,5

3,6

programmes

1,7

 

 

 

 

0

antenne-site web

 

0,1

 

 

 

0,1

technique

0,6

0,4

 

 

 

0,4

bâtiment

1,7

 

 

 

 

0

direction et frais généraux

2,7

 

 

 

 

0

rh-recrutements et planning

1,1

0,3

 

 

 

0,3

communication

7,3

2,3

 

 

 

2,3

dont lancement arabe

 

 

 

 

0,5

0,5

total avant IS

35,1

66,7

11,9

11,9

4,5

94,7

impôt sur les sociétés

1,1

 

 

 

 

-1

total général

36,2

 

 

 

 

93,7

Source : France 24 ; réponse aux questionnaires

Ces coûts peuvent se comparer à ceux que France 24 estime pour ses principaux concurrents étrangers ou pour les autres acteurs de l’audiovisuel national, à savoir :

CNN (CNN domestique et international) 800 M€

Al Jazeera (en 2 langues) 300 M€

Deutsche Welle 120 M€

BBC World (en une langue, sans le web porté par la BBC) 90 M€

BBC Arabic (12 heures quotidiennes) 27 M€

ITV 40 M€

BFM 25 M€

LCI 60 M€

Selon France 24, la chaîne est à même de concurrencer les autres chaînes d’information internationales, malgré un budget moindre grâce à une organisation innovante et très intégrée (une rédaction unique multi-support et multilingue). Indépendamment de toute appréciation sur la qualité des antennes, ces comparaisons doivent néanmoins être interprétées avec prudence : France 24 n’est pas encore parvenue à maturité et ne dispose pas encore d’un réseau de distribution mondial qui viendrait peser sur ses coûts.

Ainsi, l’étude réalisée au sujet du projet de chaîne française d’information internationale et produite auprès de la commission européenne, si elle compare le budget initial de France 24 et celui de ses principales concurrentes le fait dans la perspective de montrer que la société pratiquera une gestion de ses coûts « assimilable à la bonne gestion d’une entreprise moyenne ».

LA CAMPAGNE PROMOTIONNELLE

France 24 a mené en 2006 une réflexion sur la stratégie de communication à adopter pour son lancement. Cette réflexion lui a, selon elle, « permis de prendre en compte les contraintes économiques ou structurelles imposées par un cahier des charges strict et la volonté de faire naître une marque mondiale capable de séduire un public de plus en plus exigeant et sceptique face au monde de l’information. »

Une stratégie de communication dont le budget a augmenté de 150 %

France 24 a ainsi considéré que la stratégie de la chaîne approuvée par l’Etat impliquait un « positionnement haut de gamme et ambitieux » et que « le nom France 24 supposait de promouvoir la marque France avec précaution. » France 24 a cependant estimé que les étapes de sa gestation et la perception de « projet politique » dont elle faisait l’objet de même que son statut de chaîne privée financée sur des fonds publics étaient autant d’éléments qui pouvaient conduire à fragiliser sa légitimité et à la considérer comme exprimant la voix de la France.

La stratégie de promotion et de communication de France tient par ailleurs compte du fait, selon ses dirigeants, qu’elle « ne dispose pas des moyens traditionnellement alloués aux lancements de grandes marques mondiales. »

La convention de subvention est quant à elle peu précise sur ce sujet. Le point 9 de l’annexe 1 précisant « les caractéristiques essentielles du Projet développé par la société » mentionne simplement que « la société se dotera des moyens nécessaires à la mise en œuvre d’opérations de promotion commerciale dans chaque zone de diffusion, en concertation avec les distributeurs locaux. Elle mettra en place les outils marketing nécessaires, éventuellement adaptés au contexte local. Elle organisera également des opérations de promotion visant à obtenir le meilleur référencement possible dans le plan de service des distributeurs locaux de services audiovisuels. » Aucun indicateur de suivi ne vient préciser l’ampleur du budget à consacrer à ces opérations.

L’offre initiale des deux actionnaires mentionnait la nécessité de prévoir un « effort intense de promotion de la CFII, à la fois d’un point de vue produit et marque. » Deux objectifs étaient soulignés :

- obtenir le référencement de la chaîne dans le plan de service des opérateurs commerciaux ;

- faire la promotion de la chaîne pour asseoir sa notoriété auprès des distributeurs comme des téléspectateurs.

Dans le contexte de ce cadrage imprécis, la chaîne a en premier lieu fait réaliser en août 2006 une étude visant à caractériser « les valeurs de la France ». Elle en a déduit les caractéristiques à faire ressortir dans sa programmation et son « ton » pour affirmer son identité de chaîne exposant un point de vue spécifiquement français sur l’actualité.

Le « cœur de la stratégie de France 24 » a visé à obtenir une médiatisation permanente du projet en amont de son lancement afin de pallier le manque allégué de moyens financiers disponibles pour assurer une campagne publicitaire d’envergure lors dudit lancement. La chaîne revendique d’ailleurs dans ses réponses à la Cour d’être née et d’avoir été lancée « comme un produit marketing ».

Dans cette perspective, des journalistes ont été invités à plusieurs reprises avant l’inauguration de l’antenne : pendant les travaux ; lors de la réunion d’intégration des journalistes ; à l’occasion du MIPCOM de Cannes (marché international des contenus audiovisuels). France 24 a par ce biais obtenu une couverture médiatique lui permettant d’exprimer sa modernité, de souligner son caractère alternatif face aux grands médias internationaux et d’affirmer sa légitimité.

- Frais de lancement de France 24

Source : France 24

Alors que le budget initial de la chaîne, approuvé en janvier 2006, prévoyait 2,6 M€ de frais de lancement et de marketing, un budget détaillé de lancement de l’antenne a été présenté aux membres du conseil de surveillance à l’occasion de sa séance du 27 novembre 2006, soit 10 jours seulement avant l’inauguration de l’antenne. Ce budget détaillé s’élevait à 2 M€ (hors soirée inaugurale, budgétée en sus à 1,2 M€) ainsi répartis : 50 % consacrés à la télévision, 25 % à la presse écrite et 25 % à l’affichage extérieur.

Les membres du conseil ont alors approuvé, sur proposition du président du directoire, d’allouer 3 M€ supplémentaires à la campagne de promotion, portant ainsi son budget à 5 M€ (soit un total de près 6,3 M€ en y ajoutant le coût de la soirée inaugurale), ce qui n’est pas a priori excessif au regard de l’ambition du projet (une chaîne présente d’emblée sur trois continents) et de la concurrence qui s’exerce dans le secteur.

Cette modification budgétaire n’a toutefois pas fait l’objet d’une information préalable auprès de la tutelle. Après la clôture de l’exercice, la société a justifié auprès de celle-ci « l’effort de promotion engagé sur l’ensemble des pays auprès des leaders d’opinion pour assurer la plus grande notoriété possible dès le lancement des chaînes en vue d’en faciliter le référencement et la reprise par les distributeurs de chaînes de télévision. »

De surcroît, le budget ne fait pas directement apparaître l’effort global consacré par France 24 à sa communication et sa promotion. Des dépenses contribuant à cet objectif figurent en effet, pour des montants significatifs (0,9 M€ en 2006 ; 7,3 M€ en 2007), dans les coûts de distribution et (voir ci-dessus le tableau n°13). Au total France 24 a ainsi consacré à sa communication, son référencement et à son marketing une somme de 8,2 M€ en 2006 et 9,6 M€ en 2007.

La soirée de lancement

A l’occasion du démarrage de ses émissions, France 24 a choisi d’exprimer sa modernité en effectuant un « coup médiatique » : lancer en direct et en exclusivité la chaîne sur Internet pendant 24 heures (le lancement de la chaîne en diffusion satellitaire et par réseaux câblés s’est effectué le lendemain soir) à l’occasion d’une réception de prestige organisée aux Tuileries à Paris.

Le coût de cette soirée de lancement s’est élevé à 1,35 M€, soit un montant équivalent à celui consacré à la campagne de presse internationale dans 19 pays (trois ou quatre insertions par titre sur une semaine). Les retombées médiatiques de l’opération sont difficiles à évaluer. Il apparaît toutefois, selon le recensement qu’en a fait France 24, que l’évènement a été évoqué non seulement dans les journaux télévisés de 20h00 des deux actionnaires, mais aussi dans de nombreux pays : au Japon, en Chine, aux Etats-Unis et dans tous les pays « couverts » par la chaîne, suivant le recensement qu’en a fait France 24.

- Principaux coûts exposés à l’occasion
de la soirée de lancement de France 24

Source : France 24

Quelques jours avant la tenue de l’évènement, les modalités d’organisation et le budget prévisionnel de cette soirée ont été portés à la connaissance du conseil de surveillance qui les a approuvés. 

La campagne de publicité internationale et multisupports

Parallèlement au lancement, une campagne de publicité a été menée. La presse écrite, les chaînes de télévisions internationales et l’affichage extérieur et dans les aéroports ont été les principaux vecteurs de déclinaison de spots et pages publicitaires visant à exprimer la valeur ajoutée de la nouvelle chaîne et son identité. L’image représentant l’Afrique flottant telle un iceberg dont la partie immergée serait visible par transparence et accompagnée du slogan « Au-delà de l’information » illustre cette démarche de création. Le budget de cette campagne dans la presse écrite s’est élevé à 2,14 M€ (1,34 M€ dans la presse internationale ; 0,8 M€ dans la presse française). La campagne audiovisuelle (1,02 M€ dont télévision 0,81 M€ et radio 0,21 M€) a même été diffusée par les principaux concurrents de France 24 : CNN ; BBC World, Al Jazeera. Enfin, l’affichage extérieur et dans les aéroports dans 10 pays européens et d’Afrique du Nord a coûté 541 K€, soit un total pour les différents vecteurs précités de 3,7 M€.

Sous l’angle géographique, cet investissement publicitaire a porté sur une vingtaine de pays. La France s’est vue consacrer 32 % de l’investissement contre 68 % à l’international. La presse écrite a bénéficié de 58 % des montants investis, la télévision 22 % et l’affichage en extérieur (dont aéroports) 13 %.

Des « road shows » dans certains pays de diffusion de la chaîne

Postérieurement au lancement, la stratégie de médiatisation de la chaîne s’est poursuivie par l’organisation de « road shows » dans onze pays, essentiellement en avril 2007, lors du lancement du canal arabe, puis en octobre 2007, peu avant le premier anniversaire de la chaîne. Le principe de l’opération consistait à tenir une conférence de presse dans la capitale d’un pays cible de la chaîne, cet « évènement » animé par le président de France 24 ou l’un de ses directeurs généraux permettant de susciter une couverture médiatique locale et d’accroître la notoriété de la nouvelle chaîne. Ces « road shows » ont coûté 900 K€. Il convient d’y ajouter le coût d’une vaste enquête d’opinion ayant pour thème « les européens et l’immigration » dont les résultats relatifs à chacun des pays dans lesquels était organisée une conférence de presse ont été rendus publics à cette occasion. Le coût de cette enquête confiée à TNS SOFRES a été englobé dans le coût du contrat de réalisation du baromètre de suivi de France 24 et ne peut donc pas être identifié en tant que tel.

LES PROGRAMMES 

Des coûts variables selon les types de programmes

Les coûts de grille par types de programmes

Les programmes représentent un coût direct de 40,4 M€ en 2007, soit 43% des coûts de la société, auxquels on peut choisir ou non d’ajouter les frais techniques liés à la mise à l’antenne des programmes, soit 26,4 M€ représentant 28% des coûts de la société.

Par grandes catégories, les magazines représentent 46% du temps d’antenne, 40% du volume produit pour seulement 23% des coûts de grille. A l’inverse, les journaux constituent 33% du volume de l’antenne pour 45% des volumes produits et 54% des coûts de la grille.

- Répartition des coûts de grille

En volume et en valeur

(en K€)

coût total

antenne

technique

heures de production/an

heures de diffusion /an**

Magazines

15 456

13 384

2 072

650

3 994

Journal

35 794

23 057

12 737

728

2 912

Météo

585

585

0

73

436

Bourse

378

378

0

5

23

Divers*

14 550

2 988

11 562

177

1 373

Total

66 763

40 392

26 371

1 633

8 738

* coûts transverses dont internet, bureautique, production technique, maintenance

** la différence entre les heures produites et les heures diffusées tient aux multidiffusions

En part et en €

 

% heures produites /an

% temps d'antenne

% des coûts

coût à la minute diffusée en €

coût à la minute produite en €

Magazines

40%

46%

23%

65

396

Journal

45%

33%

54%

205

819

Météo

4%

5%

1%

22

134

Bourse

0%

0%

1%

269

1212

Divers*

11%

16%

22%

177

1369

Total

100%

100%

100%

127

681

Source : données France 24, retraitements Cour

La variabilité des coûts de grille de France 24 selon les types de programmes se traduit par des coûts à la minute diffusée ou produite très différenciés selon qu’il s’agit de journaux ou de magazines avec un coût nettement moindre pour les magazines. Le coût est particulièrement faible pour les magazines de débats, les talks, dont les frais de production sont effectivement réduits, en dehors de la mise à disposition d’un studio d’enregistrement et d’un animateur, la chaîne ne payant pas ses intervenants contrairement à la pratique répandue chez ses principales concurrentes étrangères.

Les coûts d’achat des images

Cette variabilité des coûts de grille se retrouve au niveau des coûts d’achat des images de la chaîne.

La valeur d’une image dépend de la combinaison de plusieurs paramètres :

- image immédiate, image légèrement différée, image d’archive ;

- image exclusive, image quasi-exclusive, image non exclusive ;

- image triée, analysée, commentée ou image brute à trier, analyser et commenter.

Doivent également être pris en compte la souplesse d’utilisation de la source et le volume des images qu’elle met à disposition de son client.

C’est dans ce contexte que les prix facturés pour les différentes sources d’image qu’utilise France 24 doivent être analysés. Ces sources reposent sur les maisons mères (TF1 et FTV dont les relations avec France 24 sont analysées dans la dernière section du rapport), les agences (Reuters, APTN, AFP, AITV, INA, UER), les sociétés de production et les correspondants de France 24 à l’étranger.

Les coûts liés à ces différentes sources d’image apparaissent dans le tableau suivant qui synthétisent les critères qualitatifs mis en avant par la chaîne dans une note qualitative allant de * à ****.

Il ressort de ces données une grande variabilité des coûts d’alimentation de l’antenne, avec des coûts minimaux et maximaux se situant dans un rapport de 1 à 2,6. Les coûts les plus élevés ne sont par ailleurs pas exposés pour les images ayant le plus grand impact qualitatif, ainsi que le montre le cas de France Télévisions avec des images qui obtiennent la meilleure note qualitative tout en étant les moins chères, mises à part les images d’archives de l’INA.

-  Coût d’achat des images

Source : France 24

Les coûts négociés avec les agences

France 24 a négocié avec les agences des forfaits annuels d’utilisation des fils d’images. Ces forfaits permettent à la chaîne de puiser dans le volume d’images disponibles au sein de ces agences pour fabriquer ses propres programmes (Reuters, APTN, AFP, AITV, UER). Il n’existe pas au sein de la chaîne de procédure de comptage des images d’agences utilisées dans le cadre de ces forfaits, cet élément n’étant pas pris en compte dans l’établissement des tarifs des agences. Celles-ci raisonnent en effet sur la couverture de la chaîne, en termes d’auditoire, pour déterminer leurs tarifs. Le coût à la minute utilisée qui apparaît dans le tableau suivant correspond donc au rapport entre le forfait négocié par la chaîne et le nombre d’heures d’images disponibles dont on déduit un coût à la minute disponible.

Celui-ci fait apparaître des tarifs relativement bas et comparables s’agissant de Reuters et APTN, ce niveau de prix étant lié au fait qu’il s’agit d’images non exclusives, vendues brutes, sans tri, commentaire et analyse.

Les images de l’AITV et de l’AFP s’apparentent à des images d’agences dans la mesure où elles sont accessibles à tous moyennant paiement mais présentent la particularité d’être triées, analysées et commentées et de se présenter sous forme de prêt à diffuser (PAD), qui plus est dans deux langues. Ceci peut expliquer la différence de prix constatée avec les images d’agences, bien que l’AITV se distingue par des coûts à la minute utilisée particulièrement élevées, notamment au regard du nombre d’heures diffusées, France 24 ayant mis en place une procédure manuelle de comptage des images de l’AITV utilisées.

Les images de l’UER sont accessibles aux seuls membres de l’UER et se présentent sous forme de sujets prêts à diffuser, avec des coûts qui apparaissent ainsi peu élevés comparativement aux autres catégories d’images. En matière d’échanges d’images, France 24 met particulièrement l’accent sur le fait qu’elle est désormais le premier contributeur du club d’échange d’images internationales EVN (Eurovision News exchange).

Enfin les images d’archive de l’INA se distinguent par une tarification à la diffusion avec un coût de 340 € à la minute diffusée.

-  coûts négociés avec les agences

Source

Nombre langues

Forfait K€

Nombre heures diffusées

Coût minute diffusée €

Nombre heures disponibles

Coût par minute utile €

Reuters

APTN

AFP

AITV

UER

INA

1

1

2

2

1

1

408

250

204

330

170

8

688

340

3.500

2.600

250

90

1.000

2.0

1.6

13.6

61.1

2.8

Source : France 24 (nb : ces coûts diffèrent de ceux qui sont présentés dans les comptes de la société pour ce qui est des contrats d’agence sur l’exercice 2007 ; les différences sont liées à un périmètre différent pris en compte pour l’AFP, le tableau précédent ne tenant compte que du contrat image, à l’exclusion des abonnements aux dépêches et aux rubriques sonores et internet de l’AFP ; la différence portant sur les images Reuters et APTN tiennent à périmètres différents mais aussi à des dates d’effet différentes)

Les images des correspondants et des sociétés de production

Enfin, France 24 diffuse des sujets produits par ses correspondants, commandés au cas par cas. Il s’agit d’images d’actualité, exclusives, triées, analysées et commentées pour lesquels les tarifs appliqués par France 24 sont de 850 € par minute pour une langue de diffusion, 1075 € par minute pour un reportage en deux langues de diffusion et 1250 € par minute pour un reportage en trois langues de diffusion.

Au total, le coût des achats d’image et des travaux de correspondants s’est élevé à 16,3 M€ en 2007.

Des accords annuels ont enfin été conclus avec des sociétés de production afin qu’elles fournissent des magazines exclusifs et prêts à diffuser à la chaîne. Pour la chaîne, le tarif s’élève à 1000 € par minute en moyenne pour ce type de programmes.

Des coûts qui devraient progresser à périmètre constant

Les coûts de grille d’une chaîne comme France 24 sont pour une part importante des coûts fixes, liés à l’alimentation de l’antenne en images d’actualité et à la production de magazines offrant un regard particulier sur cette actualité. C’est dans cette perspective que la société suit en tous cas la consommation de ses budgets de programmes, étant entendu qu’une actualité particulièrement chargée donnera lieu à une pression sur les coûts face à laquelle le seul élément d’ajustement à court terme est la diminution des liaisons (duplex, satellites,…) qui permettent de nourrir en direct l’antenne mais pour un coût élevé.

A périmètre constant, les coûts de la grille devraient en toute hypothèse progresser. En effet, les tarifs consentis par les agences d’images vont augmenter dans des proportions déjà connues, ces contrats étant pluriannuels et se fondant sur une estimation de l’audience du média qui utilise les images. Ainsi, entre les seules années 2007 et 2008, le coût des images d’agences augmentera de 20%. Et les contrats allant jusqu’à 2010 prévoient une augmentation de plus de 80% des prix pratiqués en quatre ans.

-  Evolution à venir du coût des abonnements auprès des agences

 

2007

2008

2009

2010

% évolution 2007/2008

% évolution 2007/2010

AFP

676

775

 

 

13%

nc

APTN

210

270

320

380

22%

81%

Reuters

220

330

360

410

33%

86%

Total

1106

1375

680

790

20%

nc

Source : comptes de France 24

Des développements envisagés en matière d’enrichissement des programmes et de développements linguistiques

Par ailleurs, le coût de la grille devrait augmenter à l’avenir compte tenu de la volonté de la chaîne de renforcer ses langues de diffusion et d’enrichir sa grille de programmes.

L’enrichissement de la grille de programmes passe, selon les termes de la convention, par une augmentation de la part de production propre de la société qui devrait se situer à 70% à l’horizon de 2010, à comparer aux 44% de production propre sur l’exercice 2007. Cet enrichissement passe également par le recours à des « signatures » comme il en est fait mention dans la convention de subvention.

Enfin, le développement de la stratégie linguistique fait l’objet pour 2009 d’une demande de la chaîne de passer à 24 heures de programmations quotidiennes en arabe pour un coût supplémentaire de 11,8 M€, ce qui porterait le coût directement attribué par France 24 à cette langue de diffusion à 16,3 M€ que la chaîne compare avec les 27 M€ de BBC arabic pour seulement 12 heures de diffusion quotidienne. Néanmoins, pour être complets, ces coûts devraient comporter une quote-part des frais d’antenne et de technique non dissociables en termes de langues de diffusion. Ils devraient également tenir compte des autres fonctions de la société, et en particulier la diffusion et les fonctions supports. Dans ce schéma, et sur la base prudente des coûts connus pour 200749, on obtient un coût de grille total d’environ 26 M€ pour la diffusion en arabe, correspondant à 11,8 M€ directement attribuables à cette langue et une quote-part de 14 M€ de dépenses communes de programmes. Quant au coût complet intégrant, à hauteur de 8 M€ supplémentaires, la diffusion et les fonctions supports, il serait de l’ordre de 34 M€. France 24 a en outre indiqué en réponse aux observations provisoires de la Cour que sur ce montant de 34 M€, 16,3 M€ seraient financés par la subvention de l’Etat, le reliquat l’étant grâce aux synergies de l’organisation mises en place.

LA DISTRIBUTION 

Analyse des coûts du réseau

La fonction de distribution représente 12,1 M€ dans les coûts de France 24 en 2007. L’analyse montre que les frais techniques stricto sensu y occupent une part moins importante que les frais commerciaux.

Ainsi, le réseau primaire de distribution par satellite sur lequel repose la diffusion de France 24 représente un coût de 3,2 M€ pour 11 capacités satellitaires couvrant l’Europe, l’Afrique et le Proche et Moyen Orient. Par ailleurs, les frais liés à la bande passante nécessaire à la réception du site internet de France 24 dans le monde entier s’élèvent à 0,4 M€. Les frais technique au sens strict représentent ainsi 3,6 M€.

Les frais de personnel et de fonctionnement du service en charge de la distribution s’élèvent à 1,2 M€. Le reste des frais, soit 7,3 M€, est lié à des coûts de référencement et de marketing. En matière de diffusion, ces frais correspondent en premier lieu aux dépenses que France 24 doit engager pour être référencée sur les bouquets du câble et du satellite, soit 2,1M€, auxquels s’ajoutent 0,6 M€ consacrés à la stratégie de référencement dite hors domicile (principalement les hôtels) et 0,5 M€ de frais de marketing liés à la diffusion. Pour la réception par internet, les frais engagés concernent à hauteur de 1,7 M€ le référencement de France 24.

On constate ainsi que des frais liés à la communication et au marketing figurent au sein des frais liés à la distribution, ce que le découpage analytique du budget de France 24 ne laissait pas présager. Il apparaît également que le réseau primaire de distribution de France 24 par satellite représente un quart des dépenses de distribution alors qu’il apporte la moitié des téléspectateurs de la chaîne.

Des développements à prévoir

La durée des contrats négociés en ce qui concerne la distribution par satellite permet de connaître au préalable les coûts qui seront exposés par la chaîne sur ce segment. A périmètre constant, les frais de diffusion par satellite vont augmenter de 10% entre 2007 et 2008 et devraient rester stables en 2009.

-  Coût du réseau primaire satellitaire

(k€)

2007

2008 et 2009

% évolution

Yes/DBS

250

250

0%

NSS7

358,333

430

20%

ARABSAT

202,083

242,5

20%

NILESAT

225

225

0%

ASTRA 1

838

1005

20%

EUTELSAT/HOT BIRD

800

800

0%

EUTELSAT/KABELKIOSK

125

125

0%

Total

2798

3078

10%

Source : comptes de France 24

Interrogée sur la question de savoir combien coûterait la mise en place d’un réseau de diffusion disposant d’une couverture mondiale, la chaîne renvoie à son dossier de demande budgétaire pour 2009, dans lequel l’extension de la distribution de la chaîne au niveau mondial fait l’objet d’un chiffrage à hauteur de 13,5 M€, correspondant à 10 M€ de frais de distribution supplémentaires, 3,3 M€ de frais de grille nouveaux et 0,2 M€ de dépenses en matière de technologies.

Si l’on se concentre toutefois sur le simple objectif de disposer d’un réseau de distribution primaire par voie satellitaire couvrant l’ensemble du monde, il apparaît que les coûts exposés par France 24 seraient réduits de moitié. En effet, la direction de la distribution de la chaîne estime le coût d’un réseau primaire satellitaire mondial à environ 10 M€, à comparer aux 3,2 M€ de coût actuel du réseau primaire de France 24, soit un effort financier nouveau à consentir inférieur à 7 M€. A titre d’illustration, le coût d’une couverture satellitaire sur l’ensemble de l’Amérique du Nord serait de l’ordre de 3 M€ et celui d’une couverture pour le continent asiatique de l’ordre de 2 M€.

Certes, il ne s’agit là que des coûts techniques permettant de disposer d’un réseau satellitaire en clair au niveau mondial mais il n’est pas inutile de relever qu’à ce stade la moitié des foyers recevant France 24 utilisent ce mode de diffusion, les bouquets satellitaires et surtout les bouquets câblés représentant une part plus modeste des foyers qui reçoivent la chaîne.

Des synergies envisageables avec d’autres acteurs de l’audiovisuel extérieur

Si c’est par son réseau de diffusion satellitaire en clair que France 24 atteint la moitié des foyers qui réceptionnent la chaîne, c’est aussi par ce moyen qu’elle pourra donner une portée réellement mondiale aux accords de référencement qu’elle négocie, en particulier avec les grandes chaînes hôtelières puisque la chaîne a en tout état de cause besoin d’une couverture satellitaire dans un pays pour être accessible, ne serait-ce que dans ces hôtels. De même, la reprise de France 24 sur les bouquets satellitaires ou câblés se fait à partir d’un signal satellitaire initial. En ceci, le réseau primaire satellitaire initie toute la chaîne de diffusion de France 24.

La négociation de capacités sur ce réseau primaire, tout comme la négociation d’accords mondiaux avec les principales chaînes hôtelières passent par un nombre réduit de contacts et de contrats. En revanche, la présence d’une chaîne comme France 24 au sein des bouquets locaux du câble et du satellite impliquerait des négociations locales avec chacun des bouquets pressentis qui supposeraient, pour être conduites de façon réellement efficace, une représentation dans chacun des pays concernés.

Dans ce contexte particulier se pose la question d’un rapprochement des différents acteurs de l’audiovisuel extérieur français permettant de mutualiser leur présence auprès des acteurs locaux du câble et du satellite. France 24 a ainsi proposé à TV5 Monde de mettre en commun les moyens et ressources utilisés pour la distribution des services de télévision (représentants locaux, bases de données des distributeurs, connaissance des contraintes locales). Cette proposition a trouvé un début de réalisation mais a tourné court à la suite d’un désaccord stratégique entre France 24 et TV5 sur le paiement du référencement auprès des opérateurs de distribution.

Sous réserve du règlement de cette question stratégique, une représentation commune de différentes marques, en l’occurrence TV5 et France 24, dotées chacune de leur propre ligne éditoriale, semble être pratiquée par les grands groupes télévisuels mondiaux. Elle devrait poser d’autant moins de difficultés dans le cas de TV5 et de France 24 que cette dernière diffuse uniquement sous format numérique : elle ne peut donc pas prétendre prendre place dans les réseaux analogiques saturés, mais seulement dans les bouquets numériques pour lesquels le problème de la place disponible ne se pose pas dans les mêmes termes. A cet égard, la migration des bouquets câblés d’un mode de transmission analogique à un mode de transmission numérique représente pour France 24 un enjeu majeur, le maintien de modes de transmissions analogiques sur une large partie des réseaux câblés mondiaux ne laissant pour l’instant à la chaîne qu’un rôle marginal sur ce type de diffusion.

LES FRAIS DE PERSONNEL 

Les diverses composantes de l’effectif

Fin mars 2008, France 24 comptait 325 salariés en contrat à durée indéterminée alors que la société estime son besoin en personnel pour pouvoir fonctionner normalement à 520 personnes. De fait, une différence importante apparaît entre les salariés de la société, soit environ 200 journalistes, 50 techniciens et 50 personnes affectées aux fonctions support, et le personnel travaillant effectivement pour la chaîne qui est d’au moins 150 unités supplémentaires, compte tenu de l’importance des fonctions sous-traitées ou confiées à des pigistes et intermittents.

Ainsi, pour la seule exploitation technique et les fonctions supports, 130 personnes en équivalent temps plein sont employées par les sociétés auxquelles France 24 sous-traite ces fonctions. De même, un volant d’environ 30 pigistes et intermittents en équivalent temps plein travaille de façon régulière pour la chaîne.

Enfin, le réseau de correspondants à l’étranger de France 24 a été constitué de différents cercles plus ou moins rapprochés, mais qui ne reposent pour aucun d’entre eux sur une relation fondée sur des contrats de travail à durée indéterminée de droit français. C’est sur la base de piges ou de rémunérations de prestations de service que se matérialisent les relations avec les correspondants de France 24 à l’étranger. 9 salariés de France 24 ont au demeurant démissionné de la société pour créer leur entreprise à l’étranger, entreprise à laquelle France 24 garantit un chiffre d’affaires minimum.

Ce mode de gestion peut poser question au regard des seuils applicables en matière de droit du travail au sein de la société, et notamment de l’éventuel franchissement du seuil de 500 personnes, France 24 ayant, sur le modèle de ses maisons mères, fait le choix de ne compter dans son effectif que ses propres salariés, à l’exclusion des prestataires de service. Il peut également poser question quant au mode de relation contractuel retenu par France 24 avec son cercle privilégié de correspondants à l’étranger et les requalifications qui pourraient être demandées à ce titre.

L’accroissement prévisible des coûts de main d’œuvre

En 2007, France 24 a conduit sa première négociation annuelle obligatoire ; elle a à ce titre procédé à une augmentation collective de 1,4% de tous ses salariés ayant au moins un an d’ancienneté et un salaire inférieur à 3000 € ; la société a en outre accordé des augmentations individuelles à hauteur de 2,8% de sa masse salariale. Au total, ces différentes mesures ont abouti à une progression moyenne des salaires de 4,2%.

C’est un niveau d’augmentation que la société estime devoir reconduire à l’avenir, considérant qu’elle fait travailler une main d’œuvre qualifiée et mobile qu’il faut savoir conserver dans un secteur en plein développement et où les profils bilingues sont très recherchés. L’importance des augmentations salariales est, selon la société, à mettre en regard du niveau initial des salaires, plus élevé que dans le secteur public, cette différence pouvant trouver sa justification dans une situation inégale au regard du temps de travail négocié au plan conventionnel50, mais moins élevé que dans les chaînes privées généralistes.

Ainsi, en 2007, les salaires bruts moyens s’étageaient entre 2 115€ et 2 260€ selon les niveaux de qualification pour les non cadres, entre 3 235€, 4 718€ et 7 547€ pour les cadres, allant de la qualification la plus basse aux cadres dirigeants. Enfin, pour les journalistes, les rémunérations se situaient entre 2 611€ (coefficient 100-110, correspondant à 54% de l’effectif journaliste de France 24), 3 900 € (coefficients 120-150 correspondant à 28% de l’effectif), 5 250 € (pour les 10% de l’effectif situé entre les coefficients 170 et 200) et 6 900 € (pour les coefficients les plus élevés correspondant à 8% de l’effectif, soit 16 personnes).

Une gestion qui se distingue du reste de l’audiovisuel public extérieur

France 24 applique trois conventions collectives, celle des journalistes, celle des chaînes thématiques et celle de la publicité. Aucune d’entre elles ne comporte de mécanisme de progression de carrière du type de ceux qui sont organisés par les conventions de l’audiovisuel public. La gestion des ressources humaines au sein de France 24 se réalise donc dans un cadre beaucoup moins contraint que dans les autres sociétés de l’audiovisuel public et se rapproche de fait de ce qui existe au sein des sociétés privées du secteur. En ceci, le mode de gestion des ressources humaines de France 24 se distingue nettement du reste de l’audiovisuel extérieur.

LES RÉSULTATS ET LA PERFORMANCE

Au terme du deuxième exercice comptable de France 24, et compte tenu notamment de la faible couverture des critères de suivi de la convention de financement, les moyens d’évaluation de la performance de la chaîne sont limités.

On relèvera néanmoins d’emblée que les critères fixés cette convention ont été respectés par France 24 en 2007.

-  Tableau de suivi de la réalisation des critères de la convention de subvention pour l’année 2007

Critères

Convention

Année pleine

Réalisé

2007

Budget production programmes propres hors JT

Budget référencement/marketing Distribution

Coût grille de programmes (antenne & technique)

Frais Généraux (DAG, DG…)

Masse salariale

 Min 5 M€

 Min 2 M€

 Sup 50%

 Inf 15%

 Inf 40%

13.3

7.4

71%

13%

29%

Nbre de foyers couverts au lancement

Nbre de foyers couverts fin 2010

Min 17 M

Min 30 M

74 M

n/a

Nbre heures minimal annuel programmes hors JT en 1ere diffusion

Min 380 H

900 H

Source : France 24

Dans ce contexte, l’analyse se fondera, d’une part, sur les études commandées par France 24 et, d’autre part, sur les éléments d’appréciation disponibles pour évaluer l’appui effectivement fourni par ses actionnaires à France 24.

LES ÉTUDES MENÉES PAR FRANCE 24

LES MOYENS DE MESURE DÉPLOYÉS

France 24 a d’emblée mis en place un important dispositif d’étude et de suivi de sa notoriété et de son exposition.

- Coût des principales études
commandées par France 24 en 2006-2007

Source : France 24

Le baromètre international de suivi

Le principal élément de ce dispositif est une étude conduite en trois vagues successives, du lancement de France 24 à la fin de la première année de sa diffusion. Intitulée « baromètre international de suivi de France 24 », cette étude a eu un coût élevé51 : 612 K€ [soit, à titre de comparaison, un montant équivalent au budget consacré en 2006 aux études par TV5 Monde].

Une étude de notoriété

La principale caractéristique de cette enquête confiée au département « stratégies d’opinion/pôle société » de la société TNS/SOFRES52 est d’être très ciblée : elle vise exclusivement les « leaders d’opinion »53 de cinq pays-cibles de France 2454, et de 12 pays-cibles55 pour la troisième vague. Les questions portent sur la notoriété et l’image de France 24 et de ses principales concurrentes, y compris TV5 Monde et Euronews.

Les données relatives à la notoriété de France 24 permettent de mesurer tant la notoriété spontanée de la chaîne 24 et de ses concurrentes que leur notoriété globale, agrégeant notoriété spontanée et notoriété assistée56.

L’image de France 24 fait ensuite l’objet de questions approfondies portant sur les qualités de la chaîne. Ces données permettent de situer les résultats de France 24 par rapport à ses concurrentes sur des questions telles que l’honnêteté et l’impartialité de l’information, l’indépendance de la chaîne ou encore son ouverture sur le monde et sa capacité à éveiller la curiosité des téléspectateurs.

L’absence de réelle mesure d’audience

L’enquête ne comprend pas de mesure d’audience à proprement parler. France 24 considère toutefois que les données recueillies permettent de déduire des audiences en se fondant sur une estimation du nombre de « leaders d’opinion » dans les différents pays étudiés.

Sans procéder à de telles déductions, ces études comportent des données utiles pour mesurer l’exposition de France 24 et les habitudes de consommation des personnes interrogées à l’égard des chaînes d’information internationale. Ainsi, pour chaque chaîne citée par l’enquêteur, la personne sondée doit préciser à quelle fréquence elle la regarde. Il est tiré de ces réponses un indicateur d’exposition exprimant la proportion d’individus de la cible qui regardent « régulièrement, de temps en temps » ou qui ont déjà regardé « au moins une fois » la chaîne concernée.

Ces études fournissent des données utiles pour appréhender la progression de l’exposition de France 24 auprès des « leaders d’opinion ». Encore est-il nécessaire de distinguer, d’une part la consommation régulière et occasionnelle, qui s’apparente à une mesure d’audience, et, d’autre part, la consommation ponctuelle intervenue à une époque indéterminée, qui ne correspond donc pas à une consommation active. Or, les résultats présentés par France 24 agrègent ces différentes données dans une rubrique de synthèse mentionnant la proportion de personnes interrogées qui « regardent » la chaîne.

Par ailleurs, il convient de relever que les pays retenus dans l’échantillon (à l’exception de la Tunisie et des pays d’Afrique subsaharienne) ont fait l’objet d’une importante action de communication sur place au cours de la première année de diffusion de la chaîne. De même, tous les pays de l’échantillon ont en outre été visés par les campagnes de publicité menées dans la presse internationale, écrite et télévisée. Les études ont été conduites peu de temps après la clôture de ces campagnes de promotion. Ainsi, par exemple, la deuxième vague du baromètre correspond à des mesures intervenues en mai 2007. En mars 2007, la France a fait l’objet d’une campagne radio de notoriété (budget : 176 K€) et les quatre autres pays de l’échantillon ont été visés par une campagne télévisée (budget 244 K€) sur des chaînes nationales pour trois d’entre eux (Royaume-Uni ; Italie et Sénégal) et Al Jazeera pour ce qui concerne l’Algérie. Ce dernier pays a en outre fait l’objet d’une opération de communication sur place en avril, à l’occasion du lancement des émissions en arabe.

- Dates et zones géographiques cibles des campagnes de publicité et des mesures de notoriété conduites par France 24

Source : France 24

La conduite d’études de notoriété à la suite d’opérations de communication est légitime dans le cadre d’une démarche marketing. Mais la portée et la signification des résultats obtenus dans un tel contexte doivent être analysés qu’avec prudence.

Les autres études

L’étude EMS

France 24 s’est aussi abonnée à l’étude EMS (European Media and Marketing Survey), outil de référence du marché, qui porte sur la consommation de medias des foyers les plus aisés dans 16 pays d’Europe de l’Ouest. Les résultats de ces études ne devraient être connus qu’en juin 2008. Le contrat conclu avec EMS a fixé à 228 K€ le coût de cet abonnement en 2008 (prestation qui correspond à la mise à disposition et à l’exploitation des données collectées en 2007). Parmi les études auxquelles France 24 s’est abonnée, cette étude est la seule à constituer une véritable mesure d’audience. Elle ne porte toutefois que sur le territoire européen.

L’audience du site internet

Le suivi de l’audience du site internet fait l’objet d’un contrat spécifique conclu avec la société Médiamétrie. Les données présentées dans l’étude mensuelle fournie à France 24 dans le cadre de ce contrat sont issues d’un panel couvrant 10 pays57. La fréquentation mensuelle du site internet de France 24 et des ses principaux concurrents y est retracée. A cette prestation dont le coût annuel est de 27 K€ s’ajoute une étude ponctuelle menée en mai 2007 analysant le profil sociodémographique des visiteurs du site internet de France 24 au cours du mois considéré. Le coût de cette étude s’est élevé à 5,5 K€.

Autres études

D’autres études d’évaluation doivent être mentionnées pour mémoire :

- sur l’habillage de France 24 ;

- sur l’exposition des chaînes internationales d’information auprès des leaders d’opinion à Washington DC ;

- sur l’avis porté par des leaders d’opinion européens sur les différentes sources d’information (presse écrite et audiovisuelle) disponibles.

* * *

Il apparaît ainsi que France 24 a consacré des moyens non négligeables à la réalisation d’études mais que ces moyens ont été concentrés sur des études de notoriété et d’exposition dont le coût est plus élevé que les études médiamétriques, dans les régions où ces dernières sont disponibles Il est cependant rappelé que la convention de subvention n’impose pas à ce stade d’étude d’audience à France 24, une telle obligation n’intervenant qu’au terme de la deuxième année de diffusion de la chaîne, fin 2008. D’ores et déjà, France 24 s’est mise en mesure de pouvoir fournir des chiffres d’audience à cette échéance (grâce à l’étude EMS), mais ces audiences porteront sur le seul territoire européen.

Il est d’ailleurs à noter sur ce point que la société TNS a annoncé, dans un communiqué diffusé en mars 2008, la création d’un nouvel outil de mesure d’audience des médias en Afrique, dénommé Africascope. Cet outil permet, selon le communiqué de presse de la société, de mesurer des audiences et « d’étudier la consommation, l’équipement et l’opinion » des consommateurs cibles des souscripteurs de l’enquête. Dans un premier temps, cette étude est conduite dans seulement trois pays : Sénégal, Côte d’Ivoire et Cameroun.

France 24 ne figure cependant pas parmi les souscripteurs fondateurs de ce dispositif, contrairement à RFI, TV5 Monde, CFI, Canal + Horizons et France Télévisions publicité internationale. La raison évoquée par France 24 est que cette étude ne comporte pas d’informations sur ses concurrents directs.

LES RÉSULTATS OBTENUS

Après seulement 18 mois de diffusion effective, la Cour souligne que l’analyse des résultats de la chaîne ne peut être effectuée qu’avec la plus grande prudence.

La notoriété et l’exposition de la chaîne

L’analyse des résultats de France 24 ne peut à ce stade se fonder que sur son « baromètre international de suivi », seul instrument couvrant à la fois, fut-ce très partiellement, l’Europe et l’Afrique. Les résultats présentés ci-dessous sont issus de la troisième vague d’étude, réalisée en mars et avril 2007, dont l’échantillon de pays ciblés est significativement élargi par rapport aux deux vagues précédentes et qui porte sur un total de 12 pays. Parmi ceux-ci, seuls la Tunisie, la Côte d’Ivoire et le Gabon n’ont pas fait l’objet d’action de communication sur place à l’occasion du lancement de la chaîne ou ultérieurement.

France 24 a communiqué ses résultats auprès du grand public sous la forme d’une campagne d’affichage. Elle a par ailleurs adressé à sa tutelle une note dans laquelle elle mentionne, à titre de comparaison, les résultats des trois concurrents qu’elle se reconnaît (CNN International, BBC World et Al Jazeera). Cette présentation lui permet d’affirmer qu’elle est première en Afrique, 2ème « au Maghreb et au Proche Orient (Maroc, Algérie, Tunisie, Egypte)» et 3ème en Europe.

La présentation par France 24 de ses résultats

« Les résultats de France 24 montrent que le multilinguisme est essentiel pour conquérir des parts de marché :

1/ pour l’arabe :

Sur le Maghreb et le Proche-Orient (Maroc, Algérie, Tunisie, Egypte), après 1 an, France 24 est 2ème derrière Al Jazeera et devant CNN et BBC World. (Etude TNS Sofres janvier 2008)

Les leaders d’opinion qui nous regardent (Algérie, Maroc, Tunisie, Egypte)

Al Jazeera : 83,3 % France 24 : 56,4 % CNN : 52,6 % BBC World : 47,9 %

Notre part de marché mensuelle (Algérie, Maroc, Tunisie, Egypte)

Al Jazeera : 19,7 % France 24 : 13,6 % CNN : 12,3 % BBC World : 11,4 %

2/ pour l’anglais :

Sur internet, France 24, avec 4 millions de visiteurs uniques en moyenne par mois, est le site le plus international des chaînes d’information avec plus de 80 % de son audience en dehors de la France. L’audience de France 24.com est 17 fois supérieure à celle d’Al Jazeera et 44 fois supérieure à celle d’Euronews. Ces chiffres sont issus de l’étude Nielsen Médiamétrie, réalisée dans des pays à dominante de langue anglaise : Etats-Unis, Royaume-Uni, Allemagne, Japon, Australie, Suisse etc.

En Europe, après 6 mois, France 24 est 3ème devant CNBC et Al Jazeera et derrière CNN et BBC World (étude EOLS, juin 2007, fournie par la BBC). Nos meilleures parts de marché sont réalisées dans des pays qui nous regardent en anglais (Portugal, Irlande, Suisse, Pologne…)

Les leaders d’opinion qui nous regardent

CNN : 48 % BBC World: 43% France 24 : 13 % CNBC : 12 % Al Jazeera : 8 %

Notre part de marché mensuelle (Algérie, Maroc, Tunisie, Egypte)

CNN : 28,5 % BBC World: 25% France 24 : 7,5 % CNBC : 7,3 % Al Jazeera : 4,5 %

3/ pour le français

En Afrique (Sénégal et Côte d’Ivoire), France 24 est leader (Etude TNS Sofres janvier 2008)

Les leaders d’opinion qui nous regardent

France 24 : 71 % CNN : 58,5 % BBC World: 38,5 % Al Jazeera : 31 %

Notre part de marché mensuelle (Algérie, Maroc, Tunisie, Egypte)

France 24 : 18,2 % CNN : 15 % BBC World: 9,9 % Al Jazeera : 8 %”

Source : document transmis à l’Etat par M. de Pouzilhac

En réalité, si les résultats mis en avant par France 24 dans cette région sont pleinement vérifiés au Maroc, en Tunisie et en Algérie, les données issues de l’étude menée en Egypte montrent en revanche que la chaîne française y est distancée par tous ses concurrents directs.

-  Notoriété globale et spontanée des chaînes d’information internationale dans 12 pays

Source : étude TNS Sofres pour France 24 – février 2008

Pour autant, il convient de souligner que les résultats obtenus par France 24 auprès de « leaders d’opinion » des pays visés par l’étude sont positifs, compte tenu du caractère récent de la chaîne et de l’ampleur de la concurrence sur le segment de l’information internationale. Ainsi, la notoriété de France 24 est-elle partout (sauf en Allemagne) supérieure à celle de la Deutsche Welle.

Simultanément, ces études mettent en évidence l’important écart que devra combler France 24 pour se hisser au niveau de TV5 Monde dont la notoriété est très forte, y compris dans les pays non francophones, et dont l’importance de l’exposition auprès des élites en Afrique francophone doit être soulignée. Euronews obtient également de très bons résultats dans ces études.

Il est par ailleurs constaté l’absence de corrélation entre les moyens de communication déployés et les résultats obtenus. Les taux les plus faible de notoriété et d’exposition sont en effet relevés dans les Etats européens et en Egypte, en dépit des efforts de communication qui y ont été déployés. Inversement, les meilleurs résultats sont obtenus en Afrique subsaharienne, qui n’a pourtant quasiment pas fait l’objet d’action de promotion (sauf en ce qui concerne le Sénégal).

- Proportion d’individus interrogés qui déclarent avoir regardé la chaîne au cours des trente derniers jours (indice d’exposition)

Source : étude TNS Sofres pour France 24 – janvier 2008

S’agissant de l’indice d’exposition, la faiblesse relative des résultats obtenus par France 24 en Europe (6 ou 7 % des personnes interrogées au Royaume-Uni, en Allemagne et en Espagne déclarent avoir regardé France 24 au cours des 30 derniers jours) – sauf en France et en Italie, pour lesquelles l’indice d’exposition est respectivement de 25 et 23 % - mais aussi en Egypte (19 % d’indice d’exposition), en particulier lorsqu’ils sont comparés à des chaînes plus anciennes telles que CNN, BBC, TV5 Monde ou encore Euronews (qui recueillent dans ces pays entre 29 et 80 % d’indice d’exposition), s’explique à l’évidence par la concurrence importante qui s’y exerce. Un tel résultat met cependant en exergue, a contrario, les résultats très positifs obtenus par la chaîne auprès des « leaders d’opinion » au Sénégal, au Gabon, en Côte d’Ivoire, mais aussi au Maghreb.

Les données disponibles ne permettent pas de faire la part de la notoriété et de l’exposition des différents canaux de la chaîne et, partant, de savoir en quelle langue est regardée France 24 par les personnes interrogées.

Toutefois, une autre étude menée auprès des leaders d’opinion par la BBC et dont les résultats ont été cédés à France 24 (étude EOLS) permet de disposer de données de nature similaire58 exprimées par nationalité de la personne interrogée.

- Proportion d’individus interrogés qui déclarent avoir regardé la chaîne au cours des trente derniers jours (indice d’exposition)

Source : étude EOLS pour BBC, fournie par France 24– juin 2007

Ces données confirment que l’exposition de France 24 est significativement plus importante auprès des francophones (35 % des français interrogés, 18 % des belges et luxembourgeois) qu’auprès des allemands (1 % d’exposition) ou des britanniques (7 % d’exposition) auprès desquels le canal anglophone de la chaîne doit pourtant constituer un atout de pénétration qui se heurte pour l’instant à la concurrence des chaînes d’information anglo-saxonnes qui sont naturellement très regardées (BBC World bénéficie d’une exposition de respectivement 38 et 35 % auprès de ces deux nationalités et CNN de 43 et 32 %).

Compte tenu du lancement récent de la chaîne, de l’absence de recul, des caractéristiques des études évoquées dont l’objet n’est pas de mesurer des audiences (mais la notoriété et l’exposition), de leur petit nombre, il serait prématuré et imprudent de conclure quant à la part de marché de France 24, suivant ses différentes langues de diffusion dans des zones au demeurant fortement concurrentielles.

L’audience du site internet France24.com

Les études d’audience du site internet commandées par la chaîne portent sur dix pays59 et s’appuient sur des panels constitués par la société Nielsen (qui constitue selon France 24 la référence du marché dans le domaine du marketing). Ces études mettent en évidence des aspects très positifs, notamment la part élevée des internautes situés en dehors du territoire national (environ 80 %), nettement plus marquée que pour les concurrents directs de la chaîne (CNN et BBC notamment).

Certains résultats obtenus par la chaîne sont même spectaculaires. Ainsi, selon cette étude, le site internet de France 24 est en Allemagne, deux fois plus consulté que ceux de la BBC, de CNN ou de la Deutsche Welle.

Ce bon résultat n’est cependant pas entièrement corroboré par l’étude EOLS précitée, qui porte aussi sur les sites internet, et qui met en évidence, au contraire, que le site de France 24 est 3 à 4 fois moins visité par les leaders d’opinion que ceux de la BBC ou de CNN. Cette dernière étude révise d’ailleurs aussi à la baisse l’indication précitée quant à la part élevée d’internautes situés à l’étranger, les données fournies par EOLS montrant que 47 % des visiteurs du site sont des Français, ce qui confirme néanmoins qu’une majorité des internautes se connectent de l’étranger.

Les flux de trafic enregistrés sur le serveur internet de France 24 indiquent quant à eux, de mars à mai 2008, une fréquentation moyenne d’environ 1 630 000 visiteurs uniques. France 24 souligne toutefois que cette donnée est partielle et incomplète pour diverses raisons techniques (en particulier l’absence de référencement – « taggage »- des pages d’archives et de certaines pages en arabe et l’absence de décompte des consultations de vidéos). La chaîne estime ainsi que « seul Nielsen peut donner une idée précise et fiable de l’audience d’un site et permettre une comparaison sur des bases absolument identiques. »

LES SYNERGIES DEVELOPPÉES AVEC LES ACTIONNAIRES

M. Brochand soulignait dans son rapport remis au Premier ministre en septembre 2005 portant sur la création de la chaîne française d’information internationale : « Le projet TF1-France Télévisions présente de sérieux atouts :

• Il réunit les deux principaux acteurs français en matière d’information internationale télévisée.

• Il offre à la chaîne des perspectives éditoriales intéressantes, reposant notamment sur les importantes capacités des deux groupes en matière d’information internationale (réseaux internationaux, équipes dédiées aux reportages internationaux, accès aux EVN).

• Il présente des garanties financières solides, et responsabilise explicitement les opérateurs sur le respect de l’épure budgétaire fixée.»

La convention de financement confirme que le choix du projet résulte notamment de la présence au capital des deux principaux opérateurs audiovisuels français, le contrat précisant que « l'État a décidé d'apporter son concours au Projet du fait notamment de la qualité de ses promoteurs. »

Il convient dans ces conditions de mesurer l’apport des actionnaires au fonctionnement de France 24, en distinguant la phase de montée en puissance et la phase de diffusion et en confrontant le projet présenté et sa mise en œuvre effective.

L’APPUI SIGNIFICATIF DES ACTIONNAIRES LORS DE LA PHASE DE MONTÉE EN PUISSANCE DE LA CHAÎNE

L’appui fourni par les actionnaires de France 24 a, pour l’essentiel, pris la forme de conventions d’assistance temporaire à durée déterminée.

-  Domaine, durée et montant des prestations d’assistance effectuées par les actionnaires de France 24 en 2006

Source : France 24

Le bien fondé de ces différents montants est difficile à évaluer mais ne paraît pas excessif dans la mesure où la faculté ainsi offerte à France 24 de faire appel à l’expertise des responsables en place au sein des deux groupes actionnaires a permis à l’équipe dirigeante de disposer sur ces différents sujets de documentations, d’analyses et de commentaires et de faire appel aux moyens humains des actionnaires pour mener à bien différentes actions. Cet appui en phase de lancement a permis d’engager très rapidement la recherche des locaux de la chaîne et de lancer la consultation européenne pour la recherche de prestataires techniques. Autrement dit, il a permis à France 24 de démarrer sans délai son activité et en définitive de tenir le calendrier de son lancement.

A cet appui formalisé s’est ajouté un ensemble de prestations fournies essentiellement par le groupe TF1, qui ont permis à France 24 de bénéficier de façon souple et réactive de l’infrastructure technique et fonctionnelle nécessaire à sa montée en puissance.

La fourniture par TF1 de logiciels de gestion (comptabilité ; gestion des ressources humaines) a ainsi permis de disposer dès la création de la société des outils nécessaires à sa gestion. Le directeur administratif et financier et le directeur des ressources humaines par intérim étant, dans le cadre du pacte d’actionnaires et de la convention d’assistance temporaire, issus de TF1, le recours à ces outils facilitait les choses d’autant que France Télévisions avait indiqué être en cours de changement de son système d’information et que par ailleurs l’adoption d’un système d’information spécifique aurait exigé un temps important de mise en place et de paramétrage. Dans ces conditions, la solution fournie par TF1 était la seule réellement envisageable.

Il peut toutefois être observé que le coût de cession des licences, fixé à 308 K€, est assez élevé pour des logiciels appartenant en propre au groupe TF1 et dont l’extension du nombre d’utilisateurs n’entraîne par conséquent en principe pas de coût marginal significatif. Interrogée sur ce point, France 24 n’a pas été en mesure de préciser si ces logiciels étaient amortis dans les comptes de sa société mère.

Le groupe TF1 a aussi fourni les premiers locaux occupés par France 24 de janvier à octobre 2006. Ceux-ci, d’une superficie de 365 mètres carrés, ont été sous-loués par la chaîne Eurosport qui a dans ce cadre également fourni différents biens et services associés tels que la mise à disposition de matériel informatique et de télécommunication, la gestion du courrier et des réseaux, la reprographie et l’impression, le restaurant inter entreprises… Ces différentes prestations ont été facturées par Eurosport pour un montant total de 459 K€ dont 195 K€ de loyer, 76 K€ de frais d’aménagement des locaux et 145 K€ de frais informatiques

Le tarif de location des locaux temporaires a été fixé à 440 euros hors taxes par an par mètre carré soit un niveau conforme au marché locatif de bureaux à Issy-les-Moulineaux.

Les autres prestations fournies, en particulier les frais de cloisonnement et les services informatiques, se sont en revanche révélées onéreuses. Ainsi, la location mensuelle de chaque ordinateur personnel fixe a été facturée 470 €60 par mois, ce montant comprenant non seulement la fourniture du matériel mais également les prestations associées (mise à disposition des logiciels et administration du réseau notamment). Là encore, les délais de lancement imposés à la chaîne ne lui laissaient pas le temps de mettre en place un service informatique et l’appui du groupe TF1 était la seule solution envisageable, sauf à faire appel à une société spécialisée dont les coûts se seraient révélés, selon France 24, encore supérieurs à ceux induits par la solution retenue.

Au-delà de ces prestations facturées, la présence d’opérateurs au capital de France 24 a permis à diverses reprises de trouver des solutions à des difficultés techniques qui se présentaient, en utilisant en particulier les moyens de transmission et de réception des deux groupes audiovisuels. A titre d’illustration, peu avant l’heure du lancement officiel de la chaîne, les conséquences d’une rupture de câble de diffusion ont pu être rapidement palliées par une dérivation du signal via le dispositif technique de France Télévisions.

EN PHASE D’EXPLOITATION, DES SYNERGIES AVEC LES ACTIONNAIRES MOINS IMPORTANTES QU’ESCOMPTÉ

Les images d’actualité

Le projet initial de TF1 et France télévisions soulignait la faculté qui serait offerte à la CFII d’accéder aux images d’actualité des maisons mères. Il était même souligné qu’il était « capital que la rédaction de la CFII puisse accéder aux images des chaînes mères dans les meilleurs délais ». Le projet prévoyait en outre la désignation de « responsables interface CFII au sein des rédactions des maisons mères » chargés de communiquer avec un « coordinateur images maisons mères » intégré à la rédaction de la CFII.

Au total, les images des journaux des maisons mères devaient représenter 30 % des images diffusées par la chaîne. Sur le plan qualitatif, ces images sont quasi exclusives, car elles ne sont utilisées qu’au sein des deux maisons mères, contrairement aux images d’agence.

Outre les images d’actualité, les maisons mères devaient fournir des émissions hors journaux telles que les débats, d’une part, et les autres magazines, d’autre part, respectivement pour 57 % et 38 % du temps d’antenne consacré à ce type d’émission.

Peu après la constitution de France 24, des conventions de fourniture d’images ont été signées avec TF1, France 2, France 3 et RFO dont le contenu est décrit ci-après.

Le dispositif de coordination des rédactions n’a pas été mis en place

Contrairement à ce que mentionnait l’offre initiale, les « responsables interface CFII au sein des rédactions des maisons mères » n’ont pas été désignés. Cette fonction n’a, selon France 24, pas été admise par les différentes rédactions qui ne souhaitaient pas que le contenu de leurs conférences puisse être porté à la connaissance de France 24. La chaîne a d’ailleurs fait observer qu’un tel correspondant n’existe pas entre les rédactions de France 2 et France 3 et qu’au sein du groupe TF1, une fusion des rédactions de TF1 et LCI s’amorce, mais qu’elle n’intervient que près de 15 ans après la création de cette dernière.

Cet échec met en évidence les obstacles auxquels se heurte toute volonté de faire fonctionner en équipe des rédactions distinctes fonctionnellement et hiérarchiquement, même lorsqu’il s’agit, comme en l’espèce, de rapprocher des équipes en amont de l’antenne. Un tel constat, dans l’optique de la réorganisation de l’audiovisuel extérieur, ne peut que susciter le scepticisme quant aux synergies susceptibles d’être développées par la mutualisation des rédactions dans une « news factory ».

La convention conclue avec TF1 pour la fourniture d’images

La convention d’accès aux images de TF1 porte en réalité sur des archives récentes et non sur les images les plus récentes. En effet, ces images ne sont disponibles pour France 24 que passé un délai de 24 heures après leur diffusion sur TF1 et/ou LCI. Pour une chaîne d’information continue, un tel délai prive ces images d’une grande partie de leur intérêt. A cet égard, le contrat conclu ne correspond pas à ce que laissait entendre l’offre initiale de TF1 et France Télévisions qui prévoyait des « contrats forfaitaires d’accès aux images d’actualité ». Toutefois, le stock d’images ainsi rendu accessible est important et utile pour les journalistes de France 24 : ce stock est d’environ 25000 heures couvrant plus de vingt années, TF1 restant, au contraire de France Télévisions, propriétaire de ses archives.

En paiement de cet accès aux archives de TF1, la convention prévoit un montant forfaitaire de 700 K€ en 2007 et un ajustement en 2008 sur la base des flux réels d’utilisation, qui devaient être tracés, à partir d’un coût minute de 315 €HT révisé dans les mêmes conditions que la convention (ie prenant en compte les éléments de la formule d’indexation analysée ci-dessus dont les composants ne sont pas tous directement liés à la production d’images d’actualité).

Sur la base d’un coût à la minute de 315 €, le forfait 2007 correspondait à 2 222 minutes soit environ 37 heures d’images d’archives. Contrairement à ce que prévoyait la convention, il n’a pas été procédé à un point d’étape en octobre 2007 sur les volumes d’images de TF1 réellement diffusées par France 24 et la convention a été reconduite aux mêmes conditions. Il est vrai que le dispositif de traçage des images en provenance de TF1 n’a été mis en œuvre qu’à compter de la dernière semaine d’août et que le recul manquait par conséquent en octobre pour apprécier la réalité des flux exploités. Les données provisoires indiquaient cependant déjà clairement une sous-consommation importante des images par rapport au forfait.

L’extrapolation à partir des données disponibles (soit de la fin août à la fin décembre 2007) du volume annuel d’images en provenance de TF1 diffusées par France 24 aboutit en effet à une consommation annuelle légèrement inférieur à 16 heures soit environ 43 % du volume estimé qui a fondé la fixation du forfait de 700 K€.

Sous réserve que la pertinence de cette extrapolation soit vérifiée, le coût réel des images fournies par TF1 et diffusées par France 24 se serait établi à 729 € la minute.

En réponse aux observations provisoires de la Cour, TF1 a fait observer :

- d’une part, que la diffusion de France 24 en France, imposée par l’Etat, l’a conduite à estimer qu’une concurrence en résultait pour sa filiale LCI et à refuser par conséquent de mettre à disposition la chaîne internationales ses images datant de moins de 24 heures ;

- d’autre part, que le « droit de puisage » accordé à France 24 était illimité au sein des 25 000 heures mises à disposition et que la décision d’utiliser ou non ces images relevait de la libre appréciation de France 24.

La Cour prend acte de ces explications et déplore à cet égard que la renégociation de la convention de fourniture d’images, prévue dans le contrat initial, n’ait pas été effectuée sur la base des consommations réelles.

La convention conclue avec les chaînes du groupe France Télévisions pour la fourniture d’images

Les images fournies par les chaînes du groupe France télévisions sont facturées au forfait la première et la deuxième années, pour un montant de 1 M€ réparti entre France 2 (730 K€), France 3 (220 K€) et RFO (50 K€). Ce forfait a été fixé en retenant un prix de 600 € la minute multidiffusée et une consommation prévisionnelle de 28 heures. Les images sont disponibles dès leur diffusion sur une des chaînes du groupe et restent accessibles pendant une année, soit un stock disponible de 1500 heures environ, selon France 24.

La consommation de ces images a fait l’objet d’un suivi précis dès le démarrage de l’antenne en raison du droit à rémunération dont bénéficient les journalistes du service public en tant qu’auteurs à raison de la diffusion de leur travail à l’antenne, lequel exige un minutage détaillé de l’exploitation qui en est faite. Ce suivi fait apparaître que la consommation d’images de France télévisions par France 24 a été en 2007 de 2070 minutes soit 34h30 soit environ 23 % de plus que le volume estimé initial.

Par conséquent, le coût réel des images fournies par France Télévisions s’est établi en 2007 à 483 euros la minute.

- Comparaison du coût théorique et réel à la minute des images d’actualité fournies à France 24 par ses actionnaires

Source : France 24 et contrats de fourniture d’images

Il apparaît ainsi qu’en 2007, en dépit d’un coût facial plus faible pour les images de TF1 que pour celles de France Télévisions, cette différence visant à tenir compte du fait que les images d’actualité de TF1 n’étaient pas accessibles avant un délai de 24 heures, la consommation de ces deux sources d’images par France 24 a abouti, dans le cadre des forfaits conclus, à ce que la chaîne d’information paye les images d’archive de TF1 50% plus cher que les images d’actualité de France Télévisions.

France 24 a fait valoir que l’exploitation à l’antenne des images de TF1 ne reflétait pas l’ampleur de leur exploitation par la rédaction qui puise quotidiennement, selon la chaîne, environ 30 minutes d’images pour concevoir et monter des sujets qui, au terme de ce processus, n’en comportent qu’une quantité réduite. Un tel décalage entre le volume d’images puisées et le volume d’images diffusées ne s’observe pas pour France Télévisions dans la mesure où, d’une part, les images de France Télévisions sont utilisées pour leur immédiateté, et donc diffusées comme des sujets entiers prêts à l’emploi, et, d’autre part, le stock d’images disponibles est plus faible.

A l’appui de sa réponse, France 24 a aussi souligné qu’un salarié de France 24 est en permanence détaché au sein de la documentation de TF1 pour l’approvisionnement de la chaîne d’information en images puisées dans le stock mis à disposition.

Les correspondants

Le réseau des correspondants des deux groupes actionnaires constituait un autre élément positif mis en avant dans le projet initial : « les correspondants et les infrastructures des chaînes mères, TF1, France 2 et France 3 constituent un atout incomparable, à partir duquel la CFII constituera un premier cercle de correspondants.. » La suite de l’offre distinguait sur ce point un deuxième cercle de correspondants dits « fidélisés » devant intervenir pour la chaîne depuis « un certain nombre de villes stratégiques pour la couverture de l’actualité internationale et dans lesquelles les chaînes mères ne sont pas présentes. » Un troisième cercle, plus informel, était aussi mentionné.

L’offre comportait toutefois une restriction majeure : « il est entendu que les maisons mères conservent la priorité en cas d’actualité "chaude" qui réclame la disponibilité immédiate de leurs correspondants. »

En pratique, il est vite apparu que le recours aux correspondants des chaînes actionnaires n’était pas satisfaisant.

France 24 a donc rapidement cherché à constituer son deuxième cercle de correspondants. La particularité de ce deuxième cercle réside dans le fait qu’il s’agit de correspondants indépendants liés par contrat à la chaîne qui leur assure un minimum garanti de chiffre d’affaires contre un volume mensuel d’images prêtes à diffuser, les volumes de productions supplémentaires par rapport à ce forfait étant rémunérés sur la base d’une grille tarifaire elle aussi contractuelle. Ce dispositif est plus souple pour France 24 que si elle constituait un réseau de correspondants permanents à l’image des autres chaînes françaises. A l’heure actuelle, ce réseau est constitué d’une centaine de personnes qui fournissent 5 % des programmes diffusés par France 24.

France 24 ne s’appuie donc pas principalement sur le réseau des bureaux et correspondants de ses actionnaires.

Les magazines

L’offre présentée par les actionnaires prévoyait, en complément des journaux, la production par France 24 d’un ensemble d’émissions inédites permettant de construire l’identité de la chaîne. L’offre indiquait qu’au-delà « des productions inédites, les programmes de la CFII sont renforcés par la reprise d’émissions existantes. Il peut s’agir d’émissions emblématiques des sociétés mères, tout comme des productions éventuellement acquises auprès de tiers. »

Il était ainsi envisagé de reprendre tout ou partie d’émissions telles que « 7 à 8 » (TF1) ; « questions d’actu » (LCI) ; « envoyé spécial » (France 2) ; Pièces à convictions » (France 3) ; « C’est dans l’air » (France 5). D’autres émissions, à caractère culturel celles là, étaient également citées.

Une réserve importante était toutefois mentionnée : « un nombre significatif d’émissions de France Télévisions et TF1 sont produites par des producteurs extérieurs. Les conditions de reprise de ces programmes et reportages devront par conséquent être négociées avec ces derniers. »

Lors de l’élaboration de la grille, cette réserve s’est révélée dirimante. Il est ainsi apparu à France 24 qu’une production directe de ses émissions et l’acquisition de programmes inédits devait être privilégiée. Les magazines sous-traités acquis par France 24 représentent ainsi actuellement 17 % de l’antenne.

Ainsi, tant pour la fourniture d’images que pour le réseau des correspondants et les magazines, les perspectives mises en avant dans l’offre conjointe de TF1 et France Télévisions ont dû être réévaluées à la baisse lors de l’élaboration de la grille et après le lancement de la chaîne.

Il convient d’ajouter à ce constat le rappel de l’impossibilité pour France 24 de s’appuyer sur l’une ou l’autre des régies publicitaires de ses chaînes mères, alors qu’un tel montage n’était pas exclu dans l’offre conjointe de TF1 et France Télévisions.

Au total, les synergies entre la chaîne et ses actionnaires se sont révélées sensiblement moins importantes qu’annoncé (France 24 considère pour sa part que « dans les faits, ces synergies ne sont pas moins importantes, elles sont différentes »). Ces synergies ont en outre un coût pour France 24 et constituent un chiffre d’affaires complémentaire, certes modeste, pour ses actionnaires.

Par ailleurs, en application des règles applicables aux participations, les actionnaires ont procédé à une intégration proportionnelle des comptes de France 24 dans leurs comptes consolidés.

CONCLUSION

Dix-huit mois après son lancement, la chaîne d’information continue France 24, diffuse 24 heures sur 24 deux programmes en français et en anglais, ainsi qu’un programme destiné à l’Afrique du Nord et au Moyen-Orient composé de 4 heures d’émission par jour en arabe, complétés respectivement par ses programmes en français et en anglais. France 24 est diffusée en mode exclusivement numérique, par satellite et par câble en Europe, en Afrique et au Moyen-Orient. Elle est accessible par internet dans le monde entier. Dernière née de l’audiovisuel extérieur, la chaîne est organisée de façon à tirer pleinement parti des potentialités du numérique dans ses modes de production de l’information. A la mise en place de bureaux permanents à l’étranger dotés de moyens de production propres, elle a préféré la formule souple et moins coûteuse d’un réseau de correspondants.

Ces modes de fonctionnement, le recrutement auquel elle a procédé ab initio de journalistes bilingues, et très majoritairement jeunes, ont situé la chaîne française d’information internationale à part dans le dispositif de l’audiovisuel extérieur. Sur le plan juridique et financier, aussi, elle a reposé sur un montage qui la distingue des autres sociétés chargées de la mise en œuvre de cette politique. Il a consisté à confier la réalisation de la chaîne à une société privée détenue à parité par un actionnaire public France Télévisions et un actionnaire privé, TF1 et régie par un pacte d’actionnaires leur conférant un pouvoir de co-décision (et donc de blocage en cas de désaccord) sur les principales décisions stratégiques de la société. En revanche, le budget et l’intégralité des risques financiers sont assumés par l’Etat, qui s’est engagé par convention à assurer sur cinq ans à la société un niveau de financement assorti d’une clause d’indexation favorable. La convention ne prévoit ni le développement de ressources propres, ni l’intéressement des actionnaires aux performances de la société.

C’est la direction de France 24 qui a fait le choix, avalisé par les pouvoirs publics, d’en faire une chaîne mettant en œuvre en parallèle des programmes distincts en français et en anglais (puis en arabe), plutôt que d’offrir un programme en français entrecoupé de « décrochages » en langues étrangères comme cela était prévu au départ. Ce choix, qui a permis de clarifier l’offre de France 24, a été heureux. Il a facilité la montée en puissance rapide de France 24, qui peut être considérée en soi comme un succès.

Par delà le lancement réussi de la chaîne, la Cour souhaite mettre l’accent, pour l’avenir, sur trois séries d’interrogations ayant trait à la stratégie, au mode de financement et à l’actionnariat de la chaîne.

1) Sur le plan stratégique, la chaîne voit s’ouvrir plusieurs voies pour son développement. Projet à dimension mondial, il n’a pas achevé sa montée en puissance. La convention de subvention prévoyait que la chaîne, au-delà des zones prioritaires où elle émet aujourd’hui, étende sa diffusion à l’Asie et au continent américain et à d’autres langues étrangères dont l’Espagnol, mais sans que ces priorités soient clairement énoncées et hiérarchisées entre elles. Ces développements ne sont pas les seuls concevables. Pour sa part, la direction de France 24, juge prioritaire le développement de son offre en arabe (qu’elle souhaiterait faire passer à 24 heures quotidiennes) et sa diffusion en anglais sur les continents asiatique et nord américain. Ces développements, compte tenu du mécanisme d’indexation, porteraient le budget de France 24 à 133 M€ en 2010 (et la subvention de l’Etat à 125 M€, soit un quasi doublement par rapport aux besoins initialement estimés de la chaîne en vue de son lancement en 2006). Cette évolution est à mettre en regard de la subvention que l’Etat s’est engagé à verser à la chaîne en 2008 soit 86 M€. En tout état de cause, l’amélioration de l’offre de France 24 et l’élargissement de son audience potentielle entraîneront un renchérissement du coût des achats de programmes. Selon la Cour, cette perspective impose que les diverses hypothèses de développement envisagées soient rapidement clarifiées entre France 24 et l’Etat.

2) Quels que soient les choix qu’ils retiendront, une hausse des besoins de financement de la chaîne sera nécessaire, même s’il se situe en-deçà du chiffre de 133 M€ correspondant à l’estimation des priorités identifiées à ce stade par la société. Or celle-ci se situe dans un secteur où ses concurrentes tirent une part de leur financement du développement de ressources propres, qu’il s’agisse de la publicité sur l’antenne ou sur internet, du sponsoring ou d’autres formes de partenariat. Dans ces conditions, la question se pose de savoir si France 24 a vocation à être financée dans la durée et de façon quasi-exclusive sur fonds publics, comme c’est le cas aujourd’hui. Interrogée sur ce point par la Cour lors de son contrôle, sa direction a estimé qu’elle pourrait à terme s’autofinancer à hauteur de 40% quand les représentants de l’administration se montraient plus prudents, citant des chiffres allant de 20% à 30%. Les estimations de la chaîne se fondent notamment sur l’anticipation –à une échéance encore malaisée selon elle à déterminer- de ressources importantes issues des nouveaux usages de la téléphonie mobile.

Ces avis convergent en tout cas pour reconnaître qu’une part de financement sur ressources propres mérite d’être prévue. Il est souhaitable qu’un objectif clair et partagé soit défini entre les pouvoirs publics et l’entreprise, en même temps que seront précisés les axes de son développement stratégiques et la contribution financière de l’Etat à leur réalisation.

En tout état de cause, il importe que des critères permettant de juger de la réussite de la stratégie adoptée par France 24 soient fixés à cette occasion. A cet égard, la Cour note que les dispositifs de mesure mentionnés tant par l’entreprise que par les pouvoirs publics à l’occasion du présent contrôle, s’ils reposent sur des critères convergents (le contenu ; la notoriété ; l’image ; la distribution et le référencement ; les audiences et parts de marché ; les recettes publicitaires), ne comportent pas encore les objectifs chiffrés qui les rendraient opérationnels dans le dialogue stratégique entre l’Etat et la société et dans l’évaluation de sa performance.

3) Enfin, la volonté exprimée par les pouvoirs publics de confier à une société holding le portage des participations publiques dans les sociétés de l’audiovisuel extérieur, de façon à permettre d’en unifier la direction stratégique, rend inéluctable une évolution de l’actionnariat de France 24. L’accord des deux actionnaires étant requis préalablement à toute modification de l’actionnariat, cette évolution ne se réduira probablement pas à un simple apport à la holding des parts de France 24 détenues par France Télévisions et amènera à remettre en cause l’équilibre institutionnel et sans doute l’ensemble du dispositif actuel.

Cette perspective met en lumière le paradoxe d’un montage initial où la société, bien que financée sur fonds publics, est néanmoins détenue par des actionnaires qui n’encourent aucun risque financier réel dans sa gestion. En l’absence, que l’on peut regretter, d’une clause de retour à l’Etat de l’investissement qu’il a ainsi consenti, la Cour souligne la nécessité que le caractère original du montage d’origine soit pris en compte lors de son éventuel dénouement d’une façon qui reflète sa réalité économique et préserve les intérêts patrimoniaux de l’Etat.

troisieme chambre

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51697

rapport particulier

(art. L. 135-3 et R. 133-3 du code des juridictions financières)

RADIO FRANCE INTERNATIONALE

(RFI)

Exercices 2000 À 2006

Le présent rapport, qui a fait l’objet d’une contradiction avec les personnes et les organismes concernés, a été délibéré par la Cour des comptes les 20 mars et 10 avril 2008

   
 
 

SOMMAIRE

INTRODUCTION 167

PARTIE I :  LA STRATÉGIE DE RFI FACE À UN MONDE EN MUTATION 168

I. RFI ET SON ENVIRONNEMENT : LA REMISE EN CAUSE DU MODÈLE TRADITIONNEL DE RADIO INTERNATIONALE 168

A. RFI, UNE RADIO INTERNATIONALE DE SOUVERAINETE 168

1. Les missions et l’organisation de RFI 168

2. Les contours de la radio actuelle 171

B. UN DIAGNOSTIC PARTAGÉ SUR LA NÉCESSITE DE REDÉFINIR LES MISSIONS DE RFI 175

1. (R)évolutions technologiques 176

2. Bouleversements géopolitiques 177

II. LA GOUVERNANCE DE RFI NE CONSTITUE PAS UN CADRE PROPICE AUX RÉFORME 178

A. UNE TUTELLE MULTIPLE ET DIVISÉE 178

1. Une tutelle éclatée qui reflète dans la dualité des financements publics de RFI 178

2. Le caractère dérogatoire de la procédure de nomination du président de RFI 180

3. Les limites des indicateurs de performance utilisés 181

B. LES CARACTÉRISTIQUES DE LA GOUVERNANCE INTERNE DE RFI 185

1. Les faiblesses de la gouvernance stratégique et financière 185

2. Les lourdeurs de la gouvernance sociale de RFI 187

III. LES PRIORITÉS STRATÉGIQUES ASSIGNÉES À RFI N’ONT PAS PU ÊTRE REDEFINIES 190

A. LA CONCLUSION D’UN COM S’EST HEURTÉ JUSQU’EN 2004 A DES DÉSACCORDS SUR LES MOYENS 190

1. Les désaccords récurrents sur les moyens financiers de RFI ont contribué à bloquer la préparation du COM 190

2. L’absence de proposition de redéploiements significatifs n’a pas permis la finalisation du projet de COM 191

B. LES TUTELLES N’ONT PAS SOUTENU LE PROJET DE REFORME DU NOUVEAU PRÉSIDENT 194

1. Le nouveau PDG de RFI a rapidement proposé les grandes lignes d’un projet de réforme pour l’essentiel conforme aux attentes des tutelles 194

2. Les conditions d’une réforme en profondeur de RFI dans le cadre d’un COM n’ont pas pu être réunies 197

C. LES DÉVELOPPEMENTS ENGAGÉS PAR RFI APPELLENT DES ARBITRAGES 201

1. La diversification des modes de diffusion 202

2. L’extension de la couverture de certaines zones a été engagée 204

PARTIE II :  LES RÉFORMES ENTREPRISES FACE À LA DÉGRADATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE 207

I. UNE SITUATION FINANCIÈRE TENDUE 207

A. LE RÉSULTAT DE RFI : UNE PROGRESSION DES CHARGES PLUS DYNAMIQUE QUE CELLE DES RECETTES DEPUIS 2000 207

1. La faible progression des ressources de l’entreprise 208

2. La croissance des dépenses de personnel et de fonctionnement demeure plus dynamique que l’évolution des ressources 211

3. Les économies de frais de diffusion ont limité mais non enrayé l’effet de ciseau entre les recettes et les charges de RFI 217

B. LE BILAN DE RFI : UNE RECAPITALISATION NÉCESSAIRE 224

1. Le fonds de roulement structurellement négatif de RFI 225

2. La trésorerie dégagée par le cycle d’exploitation 228

3. La nécessaire recapitalisation de RFI 229

C. OBSERVATIONS EN VUE DE L’AVIS SUR LES COMPTES 230

1. La gestion des changements d’applications comptables 231

2. La comptabilisation des provisions 232

3. L’absence de valorisation des reprises des radios partenaires 233

4. La comptabilisation des refacturations aux filiales 233

5. L’audit interne 235

II. LA NUMÉRISATION DE RFI N’A PAS PERMIS LES GAINS DE PRODUCTIVITÉ ATTENDUS 236

A. LA NUMÉRISATION DE LA PRODUCTION ET DE LA DIFFUSION DE RFI 236

1. Le processus de numérisation de RFI a été plus long que prévu en raison notamment des difficultés techniques et sociales rencontrées 236

2. Les choix technologiques initiaux relatifs au processus de numérisation de RFI ont été remis en cause en cours de réalisation 238

B. L’ÉVOLUTION DE L’ORGANISATION DU TRAVAIL QUI DEVAIT ACCOMPAGNER LA NUMÉRISATION DE LA PRODUCTION N’A PAS PERMIS DE DÉGAGER LES GAINS DE PRODUCTIVITÉ ESCOMPTÉS 241

1. La numérisation de la production induit une évolution des métiers susceptible de générer des gains de productivité 241

2. La numérisation de la production n’a permis à ce jour aucun gain de productivité 242

III. LA RÉFORME DES LANGUES NE PERMET PAS UN REDÉPLOIEMENT AU PROFIT D’OBJECTIFS PRIORITAIRES 247

A. L’ANCIENNETÉ DES DÉBATS SUR LES LANGUES ÉTRANGÈRES 247

1. Le débat sur le choix des langues parlées par RFI 248

2. L’adéquation entre les objectifs, les résultats et les moyens des rédactions 250

3. La qualité et l’unité éditoriale des programmes 251

B. LA REDUCTION PROGRESSIVE DES AMBITIONS DE RÉFORME 254

1. La régionalisation envisagée en 2001 : un projet resté presque sans suite 254

2. La restructuration des rédactions en français et en langues étrangères et le recentrage des langues : le rendez-vous manqué de l’automne 2004. 255

3. La réforme de 2006 : la « relégitimation » de l’ensemble des rédactions 256

C. BILAN ET PERSPECTIVE DE LA RÉORGANISATION DE 2006 259

1. L’adaptation de l’offre et des moyens des rédactions en langues 259

2. La réorganisation de la rédaction en français et le « bi-média » 262

3. Préparation de l’avenir ou réforme introuvable ? 267

CONCLUSION 272

ANNEXE 1 : INCIDENCES DES CONVENTIONS COLLECTIVES ET ACCORDS COLLECTIFS SUR LA GESTION DE RFI 274

ANNEXE 2 : CHRONOLOGIE DE LA RÉFORME DES LANGUES 278

INTRODUCTION

Le présent rapport, établi en application de l’article L. 133-1 du code des juridictions financières, porte sur les comptes sociaux et la gestion de la société nationale de programme Radio France Internationale (RFI) pour la période 2000 à 2006. Les informations recueillies sur l’exercice 2007 ainsi que certains éléments relatifs aux huit filiales de RFI61, et notamment sa filiale en langue arabe Monte Carlo Doualiya (anciennement RMC-MO), ont été intégrées en tant que de besoin dans l’analyse de la gestion.

La société Radio France Internationale (RFI) a été créée dans ses formes actuelles en 1975, dans un monde où les frontières entre Etats étaient moins franchissables qu’aujourd’hui et les grands équilibres internationaux largement marqués par la Guerre Froide. RFI était alors conçue comme le seul média capable de traverser aisément les frontières, pour faire valoir le point de vue de la France auprès des auditeurs étrangers et promouvoir la francophonie.

Près de vingt années après la chute du mur de Berlin, l’environnement de RFI a profondément évolué. L’avènement de nouveaux moyens techniques de diffusion et la recomposition du paysage international contribuent à remettre en cause le modèle de radio internationale sur lequel RFI, comme ses homologues étrangers, a été fondée. Depuis sa création, RFI a elle aussi changé. Le passage au tout info, la numérisation de la production et de la diffusion, la réorganisation des rédactions en français et en langues étrangères et le développement de son site Internet sont autant d’éléments qui donnent à RFI un nouveau visage, loin des bandes magnétiques et de la diffusion exclusive en ondes courtes qui rythmaient, il y a quelques années encore, le quotidien de l’entreprise.

Dans ce contexte, le rapport se propose tout d’abord d’examiner dans quelle mesure la stratégie de RFI a su s’adapter à ce nouveau contexte. De fait, RFI et ses administrations de tutelles ont entrepris, sans y parvenir, de redéfinir les missions et les contours de l’entreprise. Ces difficultés sont à la fois le symptôme et la conséquence des dysfonctionnements de la gouvernance de RFI, qu’elles ont également contribué à amplifier. Dans un second temps, le rapport s’attache à examiner si, face à la dégradation de la situation financière de RFI depuis le début de la décennie, les réformes entreprises ont permis d’adapter son offre et de dégager des marges de développement.

A l’heure où le paysage audiovisuel extérieur français fait l’objet de réflexions nombreuses et d’un projet de réforme de grande envergure – qui n’a toutefois pas été rendu public à l’heure du dépôt de ce rapport – l’instruction s’est attachée à examiner le fonctionnement interne de RFI et d’apporter un diagnostic étayé sur son évolution au cours de la période, qui apparaît comme un préalable nécessaire à toute réforme plus large.

PARTIE I : LA STRATÉGIE DE RFI FACE À UN MONDE EN MUTATION

Depuis plus d’une décennie désormais, les missions traditionnelles de RFI sont remises en cause par l’évolution des moyens techniques de diffusion et du paysage politique international. Qualifiée de « défi » ou de « crise » existentielle selon les interlocuteurs, cette situation de transition appelle une vision claire et partagée de ce que doit être RFI dans le monde contemporain.

Face à ces mutations de grande ampleur, les modes de gouvernance de RFI apparaissent particulièrement peu propices aux réformes. De fait, l’entreprise et ses tutelles ne sont pas parvenues, au terme de sept années de discussions, à adopter un contrat d’objectifs et de moyens. Si des développements ont néanmoins été engagés au cours de la période, ceux-ci renforcent plus qu’ils ne résolvent la nécessité de redéfinir les missions et les objectifs stratégiques de RFI.

RFI ET SON ENVIRONNEMENT : LA REMISE EN CAUSE DU MODÈLE TRADITIONNEL DE RADIO INTERNATIONALE

RFI, UNE RADIO INTERNATIONALE DE SOUVERAINETE

Les missions et l’organisation de RFI

Les missions statutaires de RFI

Les missions de RFI ont été énoncées par la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication en ces termes62 : « La société nationale de programme dénommée Radio France Internationale est chargée de contribuer à la diffusion de la culture française par la conception et la programmation d'émissions de radio en français ou en langue étrangère destinées aux auditoires étrangers ainsi qu'aux Français résidant à l'étranger. Cette société assure une mission d'information relative à l'actualité française et internationale ».

Aux termes de la loi, les missions de RFI sont donc définies de manière large, que ce soit en terme d’objectifs – diffuser la culture française, de public – les auditoires étrangers et les Français résidant à l’étranger, ou de contenu de ses programmes – l’actualité française et étrangère.

Ces éléments ont été repris dans le décret du 31 décembre 1982 modifié portant statut de RFI63, et précisés dans le cahier des missions et des charges de RFI adopté en 198864, qui énonce trois missions principales :

- Une mission d’influence, définie à l’article 4, destinée à « faire comprendre le point de vue de la France face aux événements du monde contemporain » tout en garantissant « l’honnêteté, l’indépendance et le pluralisme de l’information » ;

- Une mission de promotion de la francophonie, définies aux articles 6 et 7, comme la « promotion et l’illustration de la langue française », le fait de « favoriser la diffusion à l’étranger de la culture française et de marquer son caractère francophone », et de « participer au dialogue des cultures » ;

- Une mission d’information et de divertissement des Français à l’étranger, également énoncée à l’article 7.

A ces trois missions principales s’ajoutent quatre missions particulières, relatives à la communication du gouvernement65, l’expression du parlement, les campagnes électorales et les actions culturelles et de coopération.

Le projet annuel de performance (PAP) qui détaille les crédits budgétaires attribués à RFI par la loi de finances, ses objectifs et ses indicateurs de résultat, assigne quant à lui à RFI l’objectif de « conforter la présence française et francophone dans le paysage audiovisuel mondial ».

Le caractère général du texte législatif et le caractère prolifique de ses textes d’application ont donc dessiné, dès l’origine, les contours d’une radio internationale aux missions multiples et ayant pour champ d’action rien moins que le monde entier.

L’organisation de RFI : une radio internationale émettant surtout depuis Paris

Pour remplir ses missions, RFI s’est historiquement construite autour de rédactions basées à Paris et d’un réseau de correspondants permanents ou occasionnels répartis dans le monde, auxquels se sont progressivement ajoutées des filiales locales.

Les effectifs de RFI basés à Paris s’élèvent en 2007 à 1127 ETP tous statuts confondus, auxquels s’ajoutent neuf envoyés spéciaux permanents dans huit pays66, soit 1136 ETP au total. Ils sont répartis entre la présidence, le secrétariat général qui regroupe les fonctions « support » (Directions des affaires financières, des ressources humaines et des affaires juridiques), et trois directions générales adjointes, l’une « stratégique » et les deux autres « métiers » : la direction générale ajointe du développement et des affaires internationales (DDAI), la direction générale adjointe des antennes et de l’information (DAI) et la direction générale adjointe des technologies et systèmes d’information (DTSI).

-  Effectifs de RFI 2000-2007 par directions (en ETP)

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Part 2007

Présidence

27

29

33

34

32

35

35

38

3,4 %

Secrétariat général

73

74

81

87

75

72

73

80

7,1 %

DGDAI

28

26

37

33

33

34

40

46

4,0 %

DTSI

186

197

209

216

224

227

224

223

19,6 %

Rédaction en français*

425

425

454

443

441

450

455

461

40,6 %

Rédactions en langues**

285

295

301

300

290

289

289

286

25,2 %

Piges non ventilées

18

23

8

9

5

2

4

2

0,2 %

Total

1 041

1 069

1 124

1 122

1 101

1 109

1 120

1 136

 

(*) Dont direction de la musique jusqu’en 2005 et direction des magazines jusqu’en 2006.

(**) Dont CDI en détachement auprès des filiales jusqu’en 2006

Source : Données RFI retraitées (effectifs CDI, CDD, piges et cachets)

Pour produire ses contenus, RFI s’appuie également sur un réseau de près de 600 correspondants (dont 85 en France) dans 120 pays. Sur ce total, une cinquantaine de correspondants sont très réguliers (réalisant 2 à 4 « papiers » par semaine), 230 réguliers et 313 occasionnels. L’ensemble des correspondances à l’étranger s’élevait, en 2007, à 17 468 piges soit 74 ETP67, répartis comme suit par zones géographiques :

-  Répartition des correspondants selon le nombre de piges annuelles et des correspondances par zones géographique (2007)

 

Nombre de correspondants

 

Part du total des piges

104 piges et + (> 2 par semaine)

49

Afrique sub-saharienne

21,1 %

52 à 99 piges (1 à 2 par semaine)

61

Moyen-Orient Maghreb

5,2 %

24 à 51 piges (2 à 4 par mois)

88

Europe

44,7 %

12 à 23 piges (1 à 2 par mois)

81

Amérique latine

4,4 %

1 à 11 piges (< 1 par mois)

313

Amérique du Nord

6,6 %

   

Asie et Océanie

18 %

Total correspondants

592

Total piges annuelles

17 468

Source : d’après Tableau des correspondances 2004-2007 de RFI

En leur sein, 51,7 % des correspondances relevaient en 2007 de la direction de l’information en français, et 44,8 % de la direction des langues étrangères, le reste relevant des antennes monde et multimédia.

Ce modèle de radio produite majoritairement depuis Paris s’est progressivement enrichi par la création de filiales produisant l’information localement, avec ou sans le concours des rédactions parisiennes :

-  Panorama des filiales de RFI

 

Date de création

Forme juridique

Siège

Capital social

Part RFI

Subvention 2006

Monte Carlo Doualiya

1970*

SA de droit monégasque

Monaco

2 286 000 €

99,9 %

3 500 000 €

Radio Paris Lisbonne

1988*

SA de droit portugais

Lisbonne

301 037 €

82,23 %

508 400 €

RFI Roumanie

1995**

SARL de droit roumain

Bucarest

536 173 €

100,00 %

684 100 €

RFI Bulgarie

1993

Société unipersonnelle de droit bulgare

Sofia

195 921 €

100 %

262 700 €

Aeriel

1999

SARL de droit hongrois

Budapest

11 796 €

50 %

 

RFI Deustchland

2000

SARL de droit allemand

Leipzig

25 000 €

100 %

42 000  €

RFI Beta Serbie

2006

SARL de droit serbe

Belgrade

500  €

49 %

42 833  €

RFI Maroc

2005

SA de droit marocain

Casablanca

26 891  €

51 %

14 500  €

Entrée au capital de RFI en (*) 1996 et (**) 1998.

Source : RFI

Ainsi, sur les dix neuf langues étrangères parlées à RFI, quinze sont produites exclusivement à Paris (dont une, l’arabe, par la filiale Monte Carlo Doualiya68), l’une l’est exclusivement par une filiale locale (le bulgare par RFI Bulgarie) et trois sont produites à la fois à Paris par des rédactions de RFI et par des filiales locales (portugais, roumain et serbo-croate).

Les contours de la radio actuelle

Le point commun des différentes missions énoncées par les textes constitutifs de RFI est de l’ériger en radio « internationale ». En tant que telle, RFI diffère doublement d’une radio traditionnelle. En premier lieu, contrairement à une radio nationale émettant dans une langue unique, la production de RFI est réalisée non seulement en français – au titre de sa mission de promotion de la francophonie et d’information des Français de l’étranger, mais aussi en langues étrangères, au titre de sa mission d’influence. En second lieu, contrairement à une radio en continu produisant 24h de programmes, la radio est diffusée en direction de tous les fuseaux horaires du globe, ce qui se traduit à la fois par un volume de production supérieur (55h par jour en 2007), et par la multi-diffusion de la plupart des programmes69.

Sur ce fondement, l’analyse des zones géographiques couvertes par RFI et des volumes horaires de chacune de ses langues dessinent les contours d’une radio de « souveraineté », marquée par la prépondérance des zones traditionnelles d’influence de la France (l’Afrique et le Moyen-Orient) et la multiplicité de programmes de très courte durée, mis en place lorsque les ondes courtes constituaient encore le seul média capable de traverser les frontières nationales70.

Les zones de couverture de RFI dans le monde

Les zones géographiques couvertes par RFI peuvent être appréciées à travers deux critères, sa capacité de diffusion par zones et son audience. Le premier quantifie la présence de RFI du point de vue de l’émetteur, et dépend du volume de programmes et du nombre d’émetteurs implantés dans chaque pays. Le second quantifie la présence de RFI du point de vue du récepteur, et mesure le nombre d’auditeurs des signaux envoyés par RFI dans chaque zone.

Chacun de ces critères se heurte à des difficultés méthodologiques de mesure, qui rendent impossible toute quantification fiable et exhaustive de la présence de RFI dans le monde. Pour autant, les indicateurs disponibles permettent de distinguer la présence relative de RFI sur chacun des continents et, en leur sein, dans certaines régions.

Pour quantifier la répartition de la diffusion de RFI par zone, une première approche consiste à examiner la structure des dépenses de diffusion, telle que la société l’a mise en place grâce aux clés analytiques introduites en 2004 :

Source : Cour des comptes, à partir des comptes sociaux de RFI et Monte Carlo Doualiya

Selon ces premières données, tous modes de diffusion confondus, l’Afrique sub-saharienne représente 71 % des dépenses, le Maghreb et le Moyen-Orient 20 % et les quatre autres continents les 9 % restant. Cette approche, qui détermine le poids des différentes zones dans le budget de RFI, ne permet pas pour autant d’en déduire la couverture des zones, tant le coût des modes de diffusion diffère. Il convient donc de la compléter par une analyse des volumes diffusés dans les différentes zones.

Parmi les cinq modes de diffusion des programmes, seuls les volumes diffusés en ondes courtes, ondes moyennes et FM font l’objet d’un suivi précis. A l’exception de l’Amérique latine, la diffusion en ondes courtes, ondes moyennes et FM représente néanmoins la plus grande part du volume radiodiffusé par RFI, et permet donc de donner une estimation fiable de la répartition des programmes diffusés dans le monde entre les différents continents :

Source : Cour des comptes à partir du suivi des ondes courtes et moyennes et la liste des relais FM.

Ainsi, l’Afrique et le Moyen-Orient totalisent plus de 95 % du nombre d’heures diffusées en ondes courtes et moyennes. Pour les relais FM, l’Afrique sub-saharienne totalise 64,3 % des relais implantés, l’Europe 10,8 %, l’Amérique 9,6 % et le proche et le Moyen-Orient 8,3 %. L’analyse détaillée des pays où sont implantés des relais FM et les radios partenaires met quant à elle en évidence la prépondérance des pays appartenant à la zone d’influence traditionnelle de la diplomatie française, notamment l’Afrique francophone, le proche et le Moyen-Orient et, de manière moins marquée, les pays de l’ex-Indochine, les pays d’Amérique latine et les pays d’Europe de l’Est71.

Les différents modes de diffusion et leur mesure

La mesure de la capacité de diffusion de RFI par zone se heurte à plusieurs difficultés méthodologiques. En effet, si le nombre d’heures produites par langues fait l’objet d’un suivi précis – au moins depuis 2004 – aucune quantification exhaustive du nombre d’heures diffusées dans chaque zone n’est aujourd’hui disponible, en raison des disparités des modes de diffusion.

- pour les ondes courtes, le programme est diffusé par tranches d’une heure, conformément au mode de diffusion des émetteurs en « heures fréquences ». Le signal, envoyé vers le ciel et reflété par les couches ionosphériques, atteint des zones situées jusqu’à 3500 km, voire 7000 km voire 9000 km par rebond sur la surface terrestre. Ce mode de transmission permet d’identifier des zones touchées à l’échelle d’une région, mais non d’un pays. L’indicateur pertinent pour apprécier la présence de RFI assurée par ce vecteur est donc le nombre d’heures fréquences émises par continent, suivi par RFI de manière précise. Sont aujourd’hui diffusés en ondes courtes le français, l’anglais, le portugais, l’espagnol, le russe, le persan, le mandarin, le cambodgien, le lao et le vietnamien. Toutefois, afin d’intégrer Monte Carlo Doualiya dans l’analyse, le nombre d’heures de diffusion en arabe en ondes moyennes à destination du Moyen-Orient a été ajouté aux heures ondes courtes de RFI. En effet, bien qu’en ondes moyennes, l’émetteur de MCD a un mode de couverture zonale qui s’approche davantage des ondes courtes que de la FM.

- Pour la FM et les ondes moyennes (hors MCD), la diffusion est faite 24h sur 24, avec en alternance le programme général en français de RFI, des décrochages en français et en langues propres à chaque zone et le fil musical de RFI. Le nombre de relais FM par zones constitue donc un indicateur homogène et pertinent pour apprécier la diffusion de RFI par ce vecteur dans chaque région du monde. Cet indicateur est au demeurant assez fin puisqu’il précise le pays de localisation des émetteurs.

- Certains programmes de RFI sont diffusés par satellites. L’indicateur pertinent est alors le volume de diffusion sur ce canal, rapporté au nombre de pays couverts par l’émetteur. Si le chiffrage du volume diffusé par chaque satellite est connu, aucun chiffrage du nombre de pays couverts n’est aujourd’hui disponible. Par suite, il est impossible de quantifier la diffusion de programmes sur ce vecteur.

- RFI fait également appel, pour sa diffusion, à des radios partenaires. Celles-ci passent des conventions de reprises d’un volume variable de programmes de RFI, en général en langues étrangères mais également, parfois, en français. L’indicateur pertinent pour ce mode de diffusion serait en théorie le volume de reprises, mais celui-ci ne fait l’objet d’aucune quantification fiable. Le seul chiffre disponible est le nombre de radios partenaires avec lesquelles RFI a conclu des conventions.

- Enfin, la diffusion sur Internet s’est fortement développée. Si celle-ci fait l’objet d’un suivi précis et fiable en terme d’audience, aucun suivi n’est en revanche possible en terme de diffusion, celle-ci étant, par définition, destinée à l’ensemble des zones. Seuls des volumes de bande passante par zone pourraient être comparés par zones, mais ceux-ci ne sont pas quantifiés comme tels.

Par delà les questions méthodologiques qu’elles soulèvent (voir infra), les données disponibles sur l’audience de RFI confirment ces tendances. Ainsi, au terme de la dernière étude réalisée sur les audiences de RFI dans le monde en 2006-200772, l’Afrique sub-saharienne totalise 56 % des auditeurs, le Moyen-Orient et le Maghreb 26,6 %, le continent américain 9,2 %, l’Europe 4,7 %, l’Asie 3,4 % et l’Océanie 0,1 %.

Ces chiffres recouvrent toutefois de fortes disparités en terme de parts de marchés. Ainsi, alors qu’en Afrique, RFI se situe fréquemment dans les premières radios écoutées au niveau national73, sa filiale à Lisbonne n’est pas classée dans les vingt premières radios de la ville.

Les langues parlées par RFI

La production de RFI en langues est héritée du modèle traditionnel de radio internationale diffusée en ondes courtes. La majorité des langues de RFI demeure ainsi façonnée selon le principe des « heures fréquences » et caractérisée par une multitude de rédactions produisant moins de cinq heures de programmes par jour.

RFI compte aujourd’hui, outre le français, dix-neuf langues étrangères : l’albanais, l’allemand, l’anglais, l’arabe, le brésilien, le bulgare, le cambodgien, le créole, l’espagnol, le laotien, le mandarin, le persan, le polonais, le portugais, le roumain, le russe, le serbo-croate, le turc et le vietnamien.

- Evolution de la production journalière moyenne de RFI (en heures)

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Français

25,00

25,00

25,32

24,17

23,98

23,92

25,75

25,08

17 langues RFI

34,46

33,25

31,96

31,96

31,86

31,48

29,62

29,62

Total RFI (hors filiales)

59,46

58,25

57,29

56,13

55,83

55,39

55,37

54,70

Source : rapports d’activités (pour 2000 à 2004) et données du service des programmes (2005-2007)

La production de RFI en français et en langues, initialement proche de 60h par jour, s’établit aujourd’hui à 55 heures. Si l’on ajoute Monte Carlo Doualiya (15h50) et RFI Bulgarie (11h40), celle-ci s’élève à 83 heures. Sur ce total, l’information représente 70 % des programmes, et les magazines 30 %.

Au sein de ce volume global, les volumes produits dans chaque langue sont très hétérogènes, et vont de 30 minutes par jour pour le laotien74 à 4h45 par jour pour l’anglais, 16h30 pour l’arabe et 25h pour le français, dont 8h destinées à l’Afrique :

La faiblesse du volume produit quotidiennement par chaque rédaction en langue étrangère ne s’oppose cependant pas à la diffusion de programmes en continu, tels que la permettent les relais FM ou ondes moyennes. La programmation est alors composée à partir du programme en français (dit programme monde), du fil musical, et de « décrochages », composés de programmes en français propres à la zone concernée ou de programmes en langues étrangères.

Ce « mixage » est programmé au sein de RFI au moyen d’une « cabine numérique », où sont composées les différentes grilles à partir des signaux disponibles dans les différentes langues. Ainsi, il y a potentiellement autant de grilles que de relais FM et OM implantés dans le monde.

Par ailleurs, outre le français et l’arabe, sept langues de RFI sont diffusées sur un site Internet « actif »75 (espagnol, brésilien, polonais, persan, chinois, laotien et turc).

UN DIAGNOSTIC PARTAGÉ SUR LA NÉCESSITE DE REDÉFINIR LES MISSIONS DE RFI

L’adaptation de RFI à son environnement est co-substantielle à sa mission d’information. Elle fait même l’objet d’un article spécifique dans le cahier des missions et des charges de 1988 (article 9), aux termes duquel « la société veille à s'adapter aux mutations engendrées par les techniques nouvelles ». De fait, RFI a évolué depuis sa création, tant en terme d’offre de programmes que de supports de diffusion.

Néanmoins, l’ampleur des évolutions géopolitiques et technologiques des quinze dernières années a été telle que le modèle traditionnel dont est issue RFI est aujourd’hui mis en question, tant en ce qui concerne la production de contenu que sur les modes de diffusion.

(R)évolutions technologiques

Le premier grand type de bouleversement qui affecte RFI concerne l’évolution des modes de diffusion de l’information. Depuis le début des années 90 en effet, les ondes courtes –qui constituent le cœur historique des radios internationales– n’ont cessé de régresser au profit de modes de diffusion plus performants76. L’avènement de la diffusion par satellite et de l’Internet a ainsi fait perdre à l’onde courte le monopole qu’elle détenait sur la diffusion transnationale, bien que ces nouveaux modes de diffusion ne bénéficient pas encore d’une couverture comparable, dépendant notamment de l’équipement des ménages et du développement du parc de récepteurs.

Cette situation de transition a été relevée en ces termes par le ministère des Affaires étrangères dans une note du 9 octobre 2001 : « En termes stratégiques, RFI se situe depuis quelques années à une période charnière délicate, qui impose des efforts d’adaptation coûteux et difficiles. Les modes anciens de diffusion (onde courte) sont en forte régression et les modes nouveaux (satellite, Internet) mettront au moins une décennie à trouver leur public. Dans l’intervalle, RFI est condamnée à la recherche de relais FM, toujours, et de plus en plus difficiles à obtenir, notamment en dehors de l’Afrique (contraintes de régulation, interdictions législatives, encombrement de la bande FM) ».

Cette évolution technologique a pour autre corollaire une concurrence renforcée entre les différents médias internationaux, notamment la télévision. Longtemps tributaire de marchés nationaux cloisonnés, la télévision est en effet le premier bénéficiaire du développement de la diffusion par satellite, qui lui permet désormais de traverser les frontières aussi aisément que la radiodiffusion. L’évolution du poids relatif de RFI, TV5 et de France 24 dans l’audiovisuel extérieur en est l’illustration.

Ces éléments posent aujourd’hui deux questions fondamentales pour l’avenir de RFI. La première concerne la part que devront occuper les différents modes de diffusion dans l’offre de RFI. Aujourd’hui, les ondes courtes représentent encore 74 % du budget total de diffusion de l’entreprise, alors que ce mode de diffusion est unanimement jugé inadapté pour la plupart des zones du monde et que le contrat de RFI avec son principal opérateur – TDF – arrive à échéance en 2011.

La seconde concerne l’adaptation de l’offre actuelle de RFI – qui reste aujourd’hui fortement déterminée par son mode de diffusion historique en ondes courtes – aux nouveaux modes de diffusion de la radio, en continu et en multimédia.

Bouleversements géopolitiques

Les événements géopolitiques des vingt dernières années contribuent eux aussi à mettre en cause le modèle de radio de « souveraineté » tels qu’il découle des textes constitutifs de RFI et de ses modes de production et de diffusion historiques. La portée de ces bouleversements pour RFI est qualifiée avec plus ou moins de précision par l’entreprise et ses administrations de tutelles, mais tous s’accordent à considérer que la recomposition des relations internationales depuis la fin de la guerre froide remet en cause les fondements sur lesquels RFI a été créée.

Ainsi peut-on lire dans la note du ministère des Affaires étrangères du 9 octobre 2001 : « En ce qui concerne les émissions en langues étrangères, qui sont une dimension essentielle de l’influence de RFI, la chaîne doit fonctionner avec un dispositif hérité de la guerre froide qui n’est plus adapté aux réalités géopolitiques d’aujourd’hui ».

La nécessité d’adapter RFI à l’évolution de son environnement géopolitique est également exprimée par les deux présidents successifs de RFI au cours de la période. Ainsi, M. Jean-Paul Cluzel, indiquait-il dans une note du 20 septembre 2001 : « La libéralisation politique et juridique des paysages audiovisuels nationaux, notamment dans l’ancienne Europe communiste, en Amérique latine, et en Afrique, a permis le développement de médias écrits, de télévisions et de radios nationales de grande qualité ; mais l’ouverture des frontières a en même temps ouvert le champ au déploiement international de grands groupes ; RFI et TV5 en ont profité, mais pas à la même échelle que les grands médias anglo-saxons ou allemands ».

M. Antoine Schwarz, quant à lui, a introduit sa première note d’orientation stratégique, datée du 28 juillet 2004, en ces termes : « L’actualisation des missions de RFI ne nécessite pas qu’un toilettage de textes : depuis quinze ans, plusieurs éléments ont modifié les données de la communication internationale. Au niveau géopolitique, on a assisté à la fin de la tension Est-ouest, à la constitution de l’Union européenne, à l’accumulation des malheurs de l’Afrique, à l’aggravation des tensions au Moyen-Orient, à l’expansion du terrorisme international, à l’émergence d’un monde multipolaire. Au niveau technologique, la radio n’est plus le seul média à franchir les frontières : la télévision par satellite et Internet sont diffusés dans le monde entier sans passer par la contrainte politique des autorisations locales. La radio conserve à l’évidence sa pertinence comme outil de communication internationale mais elle exige, plus qu’auparavant, une définition stricte et appropriée de ses objectifs ».

L’évolution des moyens techniques de diffusion et du contexte international appellent donc une redéfinition des missions et de l’activité de RFI.

LA GOUVERNANCE DE RFI NE CONSTITUE PAS UN CADRE PROPICE AUX RÉFORME

Dans ce contexte mouvant, les conditions d’exercice de la tutelle par le ministère des Affaires étrangères et la direction du développement des médias d’une part, et les particularismes de la gouvernance interne de RFI d’autre part, constituent un cadre peu propice aux réformes.

UNE TUTELLE MULTIPLE ET DIVISÉE

Une tutelle éclatée qui reflète dans la dualité des financements publics de RFI

La multiplicité des administrations de tutelle

La tutelle de RFI repose à titre principal sur le ministère des affaires étrangères (direction de l’audiovisuel extérieur77) et la direction du développement des médias, service du premier ministre mis à disposition du ministre de la culture et de la communication78. Le directeur de la DAE et le sous directeur en charge de la communication audiovisuelle de la DDM sont traditionnellement membres du conseil d’administration de RFI. Le directeur de la coopération internationale et du développement du ministère des Affaires étrangères (DGCID) est par ailleurs responsable du programme 115 « Audiovisuel extérieur » où figure une partie des crédits publics versés à RFI.

Les services du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi et du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique jouent toutefois un rôle important. La direction du budget est membre du conseil d’administration et l’Agence des participations de l’Etat (APE) participe aux réunions préparatoires des conseils d’administration. Le contrôleur d’Etat, membre du service du contrôle général économique et financier (CGEFI), assiste par ailleurs aux réunions du conseil d’administration sans toutefois pouvoir prendre part aux votes79.

Les modalités de financement de RFI par l’Etat posent des problèmes récurrents

Le financement public de RFI par l’Etat relève à la fois du programme 115 « Audiovisuel extérieur » de la mission interministérielle « Médias » (la subvention versée à ce titre par le ministère des affaires étrangères a représenté 55 % des ressources publiques de RFI en 2007) et du compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public », alimenté pour l’essentiel par la redevance audiovisuelle (les sommes allouées à ce titre à RFI en 2007 ont représenté 45 % de ses ressources publiques)80.

Cette dualité pose la question de la clé de répartition entre les deux sources de financement public de RFI. Le ministère des affaires étrangères assurait 70 % de ce financement en 1995, la redevance en finance aujourd’hui plus de 45 % (voir infra). Le ministère des affaires étrangères explique ce désengagement par les contraintes budgétaires auquel il est soumis depuis plusieurs années81. Plusieurs documents internes mettent par ailleurs en avant les risques, pour le ministère, d’une clef de répartition fixe, comme RFI et la DDM semblaient le souhaiter en 2001-200282.

La DDM, au contraire, semble regretter l’absence de règles précises de répartition des financements quand elle souligne que « la subvention annuelle de RFI est déterminée lors de la construction du projet de loi de finances sur la base de ses besoins et en collaboration avec le MAE. Il n’existe pas de clef de répartition. Néanmoins, pour 2007 et en conférence budgétaire, la Direction du développement des médias a proposé une progression de la subvention du MAE et de la redevance identiques de façon à ne pas réduire la part de la contribution du MAE. Or celle-ci décline quand même en fonction des arbitrages budgétaires et de régulations. »

L’absence de règle de partage des financements entre la redevance et le ministère des affaires étrangères pénalise RFI en la privant de visibilité sur les financements à venir et en incitant chaque administration à réduire ses propres financements83. Il serait souhaitable de parvenir à concilier de manière plus opérationnelle les deux logiques complémentaires de RFI, à la fois société nationale de programmes et opérateur de l’audiovisuel extérieur, chacune impliquant des charges spécifiques.

RFI a subi, par ailleurs, l’instabilité de l’architecture budgétaire en mode LOLF. Celle-ci témoigne de la difficile répartition des responsabilités entre les administrations compétentes. Le financement de RFI par le ministère des affaires étrangères a ainsi été successivement rattaché aux programmes suivants84 :

- le programme 185 « Rayonnement culturel et scientifique » de la mission ministérielle « Action extérieure de l’Etat » à l’occasion du passage à la LOLF ;

- le programme 115 « Audiovisuel extérieur » de la mission ministérielle « Action extérieure de l’Etat » dans le cadre de la LFI 2006 ;

- le programme 115 « Audiovisuel extérieur » de la mission interministérielle « Médias » qui regroupe aussi les programmes 116 (qui finance exclusivement France 24) et 180 dont la DDM est responsable dans le cadre de la LFI 2007.

La création de la mission interministérielle « Médias » a pour objectif d’améliorer la concertation des différentes administrations compétentes en matière d’audiovisuel extérieur. Elle doit permettre selon le PAP 2007 « une politique plus lisible pour le Parlement et l’opinion publique (…) et une coordination permanente entre les administrations (DGCID, DDM, Budget, trésor). »

Le caractère dérogatoire de la procédure de nomination du président de RFI

Aux termes de l’article 47-3 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986, le président de RFI est nommé par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, à la majorité de ses membres, parmi les représentants de l’Etat au sein du conseil d’administration de la société. La loi n° 2000-719 du 1er août 2000 a étendu à cinq ans la durée des mandats des présidents des sociétés de programme et donc de RFI85.

Cette procédure diffère du droit commun des autres sociétés nationales de programmes puisque le CSA est contraint de choisir le président de RFI parmi les représentants de l’Etat au sein du conseil d’administration, alors qu’il nomme les présidents des sociétés nationales de programme parmi les personnalités qualifiées qu’il a lui-même choisies, conformément à l’article 47-1 de la loi du 30 septembre 1986.

Parmi les quatre représentants de l’Etat nommés au CA de RFI, trois sont désignés au sein de leur administration pour exercer leur rôle de tutelle par le ministre en charge du budget, le ministre des affaires étrangères et le ministre en charge de la communication. Le quatrième représentant de l’Etat, désigné par le premier ministre, a – conformément à l’usage – vocation à exercer les fonctions de Président86. Les représentants de l’Etat au sein des conseils d’administration des entreprises publiques doivent en outre, sauf exceptions restrictives, être « fonctionnaires de l’Etat de catégorie A ou agents contractuels de l’Etat d’un niveau équivalent, en activité ou en retraite, âgés de trente ans au moins ou ayant huit ans de services publics »87. Les possibilités de choix du CSA sont ainsi doublement restreintes car il ne peut en réalité nommer que le représentant de l’Etat au CA nommé par le premier ministre qui, de surcroît, est nécessairement un fonctionnaire ou un contractuel de droit public.

Le CSA est par ailleurs contraint, par les dispositions de l’article 47-4 de la loi du 30 septembre 1986, de motiver son « choix ». Il procède au préalable à une audition du seul représentant de l’Etat au conseil d’administration nommé par le premier ministre au cours de laquelle « le candidat » se contente de remettre son curriculum vitae et de décrire, pour l’essentiel, son parcours professionnel. Le CSA fait ainsi un usage particulièrement restrictif de ses attributions – déjà fortement limitées – en matière de nomination du président de RFI88. Le caractère dérogatoire de la procédure de nomination du président de RFI, qui donne dans les faits au gouvernement un pouvoir de décision, est traditionnellement justifié par les « missions de souveraineté » confiées à cette société.

Faut-il un alignement sur le droit commun des sociétés nationales de programme qui permettrait en théorie d’élargir les possibilités de choix du CSA et de renforcer la crédibilité de RFI ? Faut-il assumer la nomination du président de la société par le gouvernement, responsable de la politique audiovisuelle extérieure ? La Cour s’interroge en tout cas sur l’opportunité de maintenir le régime actuel, caractérisé par une faible transparence et un rôle symbolique du CSA.

Les limites des indicateurs de performance utilisés

Le suivi de l’audience au sein de RFI

La politique d’études mise en place par RFI se fixe pour objectifs « de mesurer l’action de développement du groupe en fonction de ses missions, d’éclairer ses orientations stratégiques par des analyses prospectives et d’assurer un retour en provenance des auditeurs vers les différents acteurs de la radio »89.

Pour atteindre ces objectifs, RFI s’appuie sur des études quantitatives et qualitatives dont l’objet est à la fois de mesurer les niveaux d’audience et de les expliquer. La mesure du trafic Internet ainsi que l’analyse des courriels auditeurs (près de 200 000 par an) permet de compléter ces analyses. RFI a développé depuis 2004 uns base de données de 15 000 panélistes auditeurs de RFI dont la consultation annuelle permet de recueillir des réactions sur les nouvelles grilles de programme.

Le groupe RFI commande chaque année entre 20 et 30 sondages d’audience répartis sur les différents continents. Les sondages sont réalisés dans le cadre d’études nationales de référence (l’équivalent de Médiamétrie en France) ou d’études spécifiques en co-souscription ou non avec d’autres radios internationales et d’autres partenaires de l’audiovisuel extérieur français (TV5 voire CFI).

- Evolution du budget Etudes de RFI 2003-2007

 

2003

2004(1)

2005

2006

2007(2)

Budget alloué

490 00

387 619

359 655

413 625

395 190

Budget consommé

461 129

226 464

302 910

342 750

322 424

Etudes quantitatives

391 977

177 925

283 410

289 710

276 251

 

85 %

79 %

94 %

85 %

86 %

Etudes qualitatives

69 152

48 539

19 500

53 040

46 173

 

15 %

21 %

6 %

15 %

14 %

Taux de réalisation

94 %

58 %

84 %

83 %

82 %

(1) Annulation reports 2004 : 123 000 € (Sondage RD Congo, étude quali 4 pays  Afrique, sondage Luanda-Angola)

(2) Annulation reports 2007 : 47 000 € (Sondage et étude quali Cameroun, sondage Guinée Conakry)

Source : Budgets et comptes de RFI

L’efficacité de la politique d’études de RFI a été sensiblement améliorée depuis le début des années 2000 avec une professionnalisation des équipes et, plus récemment, un suivi continu des tendances d’audience veille radiophonique90 et de trafic Internet dans quatorze capitales réparties sur l’ensemble des continents (le « baromètre RFI ») :

- Baromètre RFI sur l’audience radio et le trafic Internet 2003-2006

Régions

Villes

2003

2004

2005

2006

2006/2005

RADIO (audience veille en %)

Afrique

Dakar

16 %

19 %

17 %

14 %

- 14,4 %

Yaoundé

-

29 %

25 %

35 %

50,7 %

Bamako

-

27 %

23 %

26 %

21,2 %

Kinshasa

 

 

23 %

24 %

9,5 %

Europe

Ile de France

1,8 %

2,0 %

2,0 %

2,0 %

0,5 %

Lisbonne

0,3 %

0,1 %

0,2 %

0,3 %

51,5 %

Moscou

-

0,1 %

0,1 %

0,1 %

0,0 %

Bucarest

4,4 %

0,4 % (*)

0,4 %

0,4 %

2,9 %

Asie

Pékin

-

0,2 %

0,2 %

 

 

Phnom Penh

0,0 %

-

2 %

 

 

Amérique latine (partenariats)

Mexico

-

1,3 %

0,1 %

 

 

Argentine

-

0,1 %

1,0 %

 

 

Proche et Moyen-Orient

Beyrouth

4,5 %

5,7 %

5,70 %

2,50 %

- 82,5 %

Amman

5,0 %

5,5 %

1,40 %

1,50 %

8,3 %

Internet (nombre de visites)

Afrique

 

907 000

1 900 000

2 587 000

4 442 000

71,7 %

Europe

 

4 548 000

7 081 000

11 760 000

15 915 000

35,3 %

dont France

 

2 443 000

4 305 000

7 112 000

9 406 000

32,3 %

Asie

 

779 000

1 261 000

2 041 000

3 482 000

70,6 %

Amérique latine

 

221 000

447 000

648 000

943 000

45,5 %

Amérique du nord

 

3 908 000

4 169 000

5 055 000

7 487 000

48,1 %

Proche et Moyen-Orient

 

275 000

264 000

400 000

486 000

21,5 %

Océanie

 

161 000

259 000

294 000

229 000

-22,1 %

TOTAL

 

10 799 000

15 381 000

22 785 000

32 984 000

44,8 %

Source : D’après les documents RFI - (*) Changement de méthodologie

Les possibilités offertes par la technologie Internet permettent par ailleurs un suivi fin de l’audience sur ce vecteur, non seulement par zones mais aussi par langues. Ainsi, depuis 2007, la direction des études présente un suivi semestriel du nombre moyen de visites mensuelles par rédactions et par pays.

Les éléments suivants peuvent toutefois être soulignés :

- le budget études de RFI demeure limité (0,4 % du chiffre d’affaires en 2003) au regard de celui de ses principaux concurrents (entre 1,4 % et 2 % du chiffre d’affaires pour la Broadcasting Board of Governors américaine et la BBC britannique en 2003). Il est de surcroît en diminution de 19,3 % entre 2003 et 2007 ;

- le choix des zones étudiées ne respecte pas leur importance relative dans l’audience de RFI. Le baromètre annuel comporte quatre capitales européennes et trois africaines sur quatorze alors que l’audience en Europe de RFI ne représente que 4,7 % de son audience totale et celle en Afrique 56 % ;

- le rattachement en 2006 du service « relations auditeurs » à la direction de la communication a eu pour effet de priver la direction des études de données utiles pour une meilleure compréhension des attentes du public. Il revient de fait à donner la priorité à la communication interne sur l’analyse critique des retours auditeurs avec le risque de brouiller les messages. La lettre interne « Pêle mails » préparée par la direction de la communication met par exemple en valeur à plusieurs reprises dans ses numéros de 2007 l’émission « Plein Sud » qui obtient pourtant une audience inférieure à 1 % à Dakar, Lomé et Kinshasa. La valorisation en interne des retours auditeurs pourrait utilement être complétée par une analyse plus précise des flux de courriers et de leur signification ;

- RFI ne dispose toujours pas d’une estimation fiable de son audience radiophonique par modes de diffusion et par langues, à l’instar de ce qui a été mis en place pour la diffusion Internet. La seule synthèse complète aujourd’hui disponible date du rapport de l’inspection générale des finances en décembre 200391 (voir infra). Celle-ci avait été réalisée à partir de données fournies par RFI, complétées par des extrapolations de l’audience Internet, des courriels reçus et des sondages partiels disponibles par langues. Une autre synthèse, réalisée par la direction de RFI en avril 2005, donne des résultats plus actualisés mais incomplets.92

Les limites d’un indicateur de résultat reposant sur une audience mondiale

Le projet annuel de performance (PAP) a retenu l’audience mondiale régulière de RFI93 comme indicateur de performance associé à l’objectif de « conforter la présence française et francophone dans le paysage audiovisuel mondial ».

-  Evaluation de l’audience mondiale régulière de RFI en 2005

 

Nombre d'auditeurs réguliers

Part dans l'auditoire total

Europe de l'Ouest

1 500 000

3,4 %

Europe de l'Est

550 000

1,3 %

Maghreb

1 200 000

2,7 %

Afrique noire francophone

23 300 000

53,0 %

Afrique noire anglophone

1 300 000

3,0 %

Amérique du nord

350 000

0,8 %

Amérique centrale et du sud

3 700 000

8,4 %

Proche et Moyen-Orient

10 500 000

23,9 %

Asie du Sud-ouest

450 000

1,0 %

Asie du Nord, Sud-est et Chine

1 050 000

2,4 %

Océanie

40 000

0,1 %

Total

43 940 000

 

Source : GEDA, janvier 2005

L’audience mondiale régulière de RFI, estimée à 44 millions de personnes, est calculée par le Groupe d’études de Démographie appliquée (GEDA) suivant une méthodologie renouvelée en 2005 compte tenu des critiques émises par les précédents rapports de l’Inspection générale des finances et de la Cour. Le calcul repose sur une centaine de sondages multi continents lancés par RFI entre 2002 et 2004 et, pour les pays non sondés, par extrapolation à partir d’une collecte de données démographiques et l’application de taux d’audience de pays comparables ou géographiquement proches. 

L’indicateur choisi pose problème à plusieurs titres :

- il incite RFI à accroître son audience globale par une couverture mondiale la plus large possible alors même que la priorité devrait être « d’optimiser l’impact de ses programmes, zone par zone, à partir d’une analyse lucide de ses forces et de ses faiblesses » comme le souligne pourtant le PAP 2008 ;

- il repose obligatoirement sur des approximations et des choix méthodologiques contestables faute de pouvoir financièrement réaliser des études régulières dans un nombre suffisant de pays de diffusion. Le GEDA est ainsi contraint de réaliser des extrapolations discutables à partir par exemple du taux d’écoute en Egypte et au Pakistan pour l’Iran ou du taux de Madagascar pour les Comores dont le taux est ensuite appliqué à Bangui en République Centrafricaine. L’évaluation de l’audience de RFI en Amérique latine (3,7 millions soit 8,4 % du total) est encore plus sujette à caution dans la mesure où des sondages ont été réalisés sur l’audience de quelque radios partenaires dans trois pays (Argentine, Brésil, Mexique) qui reprennent les programmes de RFI, les taux obtenus étant ensuite appliqués aux radios partenaires comparables d’autres pays de la région ;

- il ne permet pas de distinguer la part respective du français et des différentes langues étrangères dans l’audience globale de RFI.

LES CARACTÉRISTIQUES DE LA GOUVERNANCE INTERNE DE RFI

Les faiblesses de la gouvernance stratégique et financière

Le conseil d’administration de RFI ne joue pas toujours son rôle d’orientation et d’évaluation stratégique

Le conseil d’administration de RFI est composé, en application des dispositions de l’article 47-2 de la loi du 30 septembre 1986, de douze membres dont deux parlementaires désignés par l’Assemblée Nationale et le Sénat, quatre représentants de l’Etat, quatre personnalités qualifiées nommées par le CSA et deux représentants élus du personnel94.

L’article 17 des statuts de la société précise que le Conseil d’administration définit « les lignes générales de l’action de la société, dans le respect du cahier des missions et des charges. Il veille à la bonne marche des services et à l’observation des dispositions législatives et règlementaires applicables à la société ainsi qu’à la qualité des programmes (…). Il approuve l’orientation générale des programmes, l’état prévisionnel des recettes et des dépenses, (…). Il est consulté sur les conventions et accords collectifs de travail des personnels, sur l’organisation générale de la société, sur la grille des programmes. Il arrête le bilan, le compte de résultat et le rapport de gestion de l’exercice ».

Le conseil d’administration de RFI ne remplit pas pleinement ses fonctions telles qu’elles sont définies par les statuts de la société. La fréquence de ses réunions ne lui permettait pas, jusqu’en 2004, de définir les lignes générales de l’action de la société et de veiller à la bonne marche des services. Il ne s’est réuni que deux fois par an entre 2000, 2001 et 2002 et trois fois en 2003 mais la première réunion s’est tenue le 30 juin pour approuver le budget de l’année en cours. Il se réunit désormais trois fois par an

Le mode de fonctionnement du conseil d’administration de RFI n’est pas non plus favorable à la prise de décisions stratégiques. L’approbation du budget de l’exercice en cours d’exécution était, jusqu’en 2004, le seul point marquant de l’ordre du jour et des discussions de la réunion. Le premier débat stratégique a été organisé à partir d’une présentation des résultats d’une étude sur l’audience de RFI lors du CA du 6 novembre 2003, mais sans donner lieu à aucun vote. A compter de cette date, les questions stratégiques seront abordées à plusieurs reprises au sein du conseil sans que les échanges permettent de définir des axes stratégiques et des orientations précises. Le blocage des discussions préparatoires au contrat d’objectifs et de moyens entre RFI et ses tutelles amènera les représentants de l’Etat au CA à limiter leurs interventions au minimum nécessaire (voir infra).

Les appréciations portées par les tutelles sur le fonctionnement du conseil d’administration témoignent d’une différence de perspective :

- le ministère des affaires étrangères a indiqué « juger satisfaisants le fonctionnement du CA et la qualité des informations transmises (…) et ne pas rencontrer de difficultés à obtenir les informations demandées à RFI, notamment de la part de la direction financière (…) à l’exception des informations relevant  du service des études, qui sont difficiles à obtenir et d'une qualité inégale » ;

- la direction du développement des médias a souligné que « RFI ne parvient généralement pas à transmettre des documents préparatoires au conseil satisfaisants et dans des délais raisonnables. Les dossiers transmis sont très rarement complets (en particulier s’agissant des documents comptables). La société n’accompagne que ponctuellement ses tableaux financiers de commentaires expliquant les principales évolutions. Toutefois, il convient de signaler que les tutelles ont engagé avec la société un travail de remise à plat des documents (comptes de résultat prévisionnels notamment) et que la société accomplit cette tâche avec bonne volonté (…). Hormis pour les questions relatives aux ressources humaines, les tutelles éprouvent en outre des difficultés à obtenir des réponses aux questions soulevées en conseil d’administration (cf. le bilan de RFI marine ou encore l’étude demandée sur le projet de filiale serbe en 2006). »

Les carences du contrôle de gestion

Le rapport de l’Inspection générale des finances avait souligné les carences du contrôle de gestion et du suivi de l’activité de RFI. L’incompatibilité et les différences de nomenclature entre le système de paie et le système comptable interdisaient un rapprochement satisfaisant des données sur le personnel et les dépenses, avec pour résultat des tableaux de bord difficilement utilisables.

Un effort notable a été réalisé pour remédier aux carences du contrôle de gestion dues à la fois aux faiblesses des systèmes informatiques et aux procédures en vigueur. Un système d’information financière plus performant, opérationnel depuis le début de l’année 2004, devait permettre un rapprochement des données et une meilleure ventilation des dépenses. Une autre amélioration a été apportée en juin 2007 par le rattachement à la DAF des cinq administrateurs chargés du suivi des dépenses des directions opérationnelles de RFI.

Le dispositif mis en place95, et actuellement en vigueur, traduit de réels progrès en matière de comptabilité analytique et de contrôle de gestion mais il ne permet toujours pas un suivi efficace des coûts complets et de l’activité.

En effet, la ventilation fonctionnelle des frais de structure et des dépenses de diffusion demeure partielle. Mais surtout, le contrôle de gestion interne est affaibli par une organisation éclatée entre plusieurs services. La direction des affaires financières assure le suivi de l’ensemble des dépenses hors personnel. Les dépenses de personnel relèvent quant à elles de la compétence du contrôleur de gestion de la direction des ressources humaines. Enfin, le suivi de l’activité de chaque rédaction est partagé, au sein de la direction générale de l’antenne et des programmes, entre la direction de la rédaction en français, celle des langues étrangères et la direction de la programmation sans qu’aucun service n’en soit réellement responsable.

Le poids de la gestion des relations sociales au sein de RFI (voir infra) peut justifier que la DRH dispose elle même d’une connaissance très fine des dépenses de personnel de RFI. De même, il paraît logique que le suivi de l’activité soit réalisé par les rédactions. Toutefois, l’absence d’unification des méthodes de travail utilisées et de coordination du réseau des contrôleurs de gestion rend impossible la synthèse des principaux éléments d’activité et de coûts caractérisant la gestion de l’entreprise. Il incombe au secrétariat général de mettre en place des procédures lui permettant d’animer le réseau, d’unifier les méthodes de travail, d’évaluer les contrôleurs de gestion et de présenter les données de manière consolidée. La mise en place d’un comité d’audit permettrait également de renforcer le pilotage interne96.

Les lourdeurs de la gouvernance sociale de RFI

La co-gestion au sein de RFI contribue à freiner les réformes internes

Les relations sociales au sein de RFI relèvent à la fois de la gestion paritaire des carrières en vigueur dans les administrations publiques, et de la logique de négociation collective du droit commun du travail. Cette double appartenance a pour effet de multiplier les instances de concertation et de négociation entre la direction de l’entreprise et les représentants et délégués du personnel. Il en résulte une pratique de « co-gestion » sur tout ce qui relève de l’organisation et des conditions de travail (rémunération, avancements, promotions, congés, rythmiques,…)97. Aucun changement ayant des incidences sur les salariés ne se réalise, selon les cas, sans un accord formel ou sans débat prolongé conduisant au consensus.

On constate la présence au sein de RFI de sept organisations syndicales (CGT, FO, CFDT, CGC, CFTC, SNJ, SNJ-CGT), dont aucune n’a à elle seule la majorité de signature ou même une minorité de blocage. Si la CFDT est le premier syndicat de l’entreprise, FO est le mieux représenté au sein des personnels techniques, le SNJ et le SNJ-CFDT ont à eux deux la majorité des voix au sein des journalistes, rien ne pouvant être entrepris sans eux. L’absence de syndicat majoritaire a constitué à n’en pas douter un facteur de complexité, la direction étant contrainte de négocier avec plusieurs organisations syndicales avec un risque de surenchère. La proximité géographique avec Radio France, les personnels partageant un même bâtiment doté d’une cantine commune, a par ailleurs sur RFI un effet de contagion immédiat des revendications et des avantages obtenus par les salariés de Radio France.

Les représentants du personnel au sein des instances paritaires bénéficient d’une légitimité relativement forte en raison de taux de participation élevés aux élections professionnelles, en particulier au sein des agents techniques.

- Taux de participations aux élections des instances paritaires

 

Ouvriers/employés

Cadres

Journalistes

Délégués du personnel

68 %

79 %

55 %

Comité d’entreprise

69 %

80 %

56 %

Source : RFI – élection de mai 2005

La vie de l’entreprise est rythmée par les nombreuses réunions des institutions représentatives du personnel prévues par le code du travail et des commissions paritaires dont le fondement est dans la convention collective. Le Comité d’entreprise se réunit quinze fois par an depuis plusieurs années, une même réunion pouvant durer plusieurs jours avec un total de 109 heures de discussion au sein de cette enceinte en 2006. Les réunions entre la direction et les délégués syndicaux (35 en 2006) et les délégués du personnel (12) sont elles aussi nombreuses. Le CHSCT est longuement consulté dès qu’une réforme touche de près (numérisation) ou de loin (réforme des rédactions) aux conditions de travail des salariés de l’entreprise. Les réunions annuelles des commissions paritaires compétentes en matière d’avancements et de promotions sont une bonne illustration de la mécanique de co-gestion en vigueur à RFI. Ces réunions durent, selon les années, entre 30 et 45 heures réparties sur quatre jours consécutifs pour se terminer le dernier jour tard dans la soirée (22h30 en 2007 mais 4 heures du matin les années précédentes).

La multiplication et la durée des phases de concertation et négociation au sein de la société ont pour premier effet d’allonger la durée des réformes internes. Les années 2002 et 2003 ont par exemple été marquées par les discussions, au sein des CE/CHSCT et avec les délégués syndicaux, sur la mise en place d’une nouvelle organisation du travail pour les techniciens. La réforme des rédactions en langues étrangères, lancée à l’automne 2004, n’a quant à elle abouti qu’en octobre 2006, après huit comités spécifiquement consacrés au sujet, dont deux étalés sur 4 jours.

Les négociations avec les représentants et délégués du personnel ont également un impact important sur le contenu même des réformes finalement mises en œuvre (voir infra). La mise en place, à partir de 1996 et surtout de 2000, d’un dispositif de pilotage de la performance sous la forme d’entretiens annuels d’objectifs et de primes variables pour les cadres de RFI est un autre exemple. Les organisations syndicales ont obtenu que le compte rendu d’entretien avec les appréciations portées et les objectifs fixés ne soit pas transmis à la direction des ressources humaines98. Les chefs de service ont de surcroît tendance, selon la DRH, « à donner le maximum de la prime aux cadres placés sous leur responsabilité » privant le dispositif de tout caractère incitatif99.

- Fréquence des réunions paritaires au sein de RFI

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Comité d’entreprise

14

14

12

15

15

15

15

17

CHSCT

10

6

5

10

11

7

16

14

Délégués du personnel

12

12

12

12

12

12

12

12

Délégués syndicaux

/

/

48

53

36

35

35

28

Source : Bilan social de RFI (2000-2007)

Les symptômes d’un climat social dégradé

La tension sociale au sein de RFI, perceptible à la lecture des comptes rendus des différentes réunions des instances du personnel, se manifeste par le recours régulier à des procédures de « défiance » à l’égard de la direction.

Chaque année, plusieurs préavis de grève sont déposés par une ou plusieurs catégories de personnel. Les mots d’ordre portent, selon les cas, sur des projets de réforme de la direction (la numérisation en 2003 et 2004, la réforme des langues en 2004 et 2006), ou sur des revendications salariales ou statutaires (demande d’alignement sur les primes obtenues par les journalistes de Radio France en 2004, réduction des emplois précaires en 2006). Le nombre apparemment peu élevé de jours de grève à RFI (tableau 10) correspond en fait à des arrêts de travail fréquents, de courte durée, et de petits groupes d’agents, à l’origine de perturbations importantes. Le taux d’absentéisme élevé (8 % pour les journalistes et 5,8 % pour les personnels techniques et administratifs en 2006) est une indication complémentaire des tensions sociales au sein de l’entreprise.

- Nombre de jours de grève à RFI

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

/

257

193

208

568

131

871

Source : Bilan social de RFI (2000-2007)

Les représentants des salariés au sein du Comité d’entreprise ont eu, de 2000 à 2007, recours chaque année à un Cabinet d’audit pour évaluer – pour leur compte - la situation financière de l’entreprise. Ils ont eu par ailleurs mis en œuvre la procédure d’alerte100 à deux reprises (2004 et 2006) et émis un vote de défiance vis-à-vis de la direction à une occasion (novembre 2004).

LES PRIORITÉS STRATÉGIQUES ASSIGNÉES À RFI N’ONT PAS PU ÊTRE REDEFINIES

L’absence d’orientations stratégiques avait déjà fait l’objet d’une observation dans le précédent rapport de la Cour. Cette question se pose avec une acuité nouvelle au cours de la période considérée, eu égard aux défis auxquels l’entreprise doit faire face et à l’obligation de conclure un contrat d’objectifs et de moyens posée par la loi n° 2000-719 du 1er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication101.

Initiées en 2002 sur la base d’un projet présenté M. Jean-Paul Cluzel, alors président de RFI, les discussions sur le COM n’avaient, en décembre 2007, toujours pas abouti. Cette absence continue de vision partagée entre l’entreprise et ses tutelles sur ses objectifs stratégiques et ses moyens recouvre néanmoins deux périodes distinctes, correspondant aux deux présidences successives de RFI. Jusqu’en 2004 en effet, la conclusion du COM achoppe sur un désaccord récurrent sur la question des moyens alloués à l’entreprise. A partir de juin 2004, les discussions se heurtent à l’impossibilité de définir clairement les priorités de l’entreprise, sur la base desquelles aurait pu être opéré un redéploiement de ses moyens.

LA CONCLUSION D’UN COM S’EST HEURTÉ JUSQU’EN 2004 A DES DÉSACCORDS SUR LES MOYENS

Les désaccords récurrents sur les moyens financiers de RFI ont contribué à bloquer la préparation du COM

Les financements attribués par l’Etat à RFI évoluent depuis le milieu des années quatre-vingt dix plus lentement que les ressources des autres sociétés de l’audiovisuel extérieur ou national. La contrainte budgétaire à laquelle RFI est soumise tend à se renforcer au début des années 2000 en raison essentiellement de la progression particulièrement lente de la subvention du ministère des affaires étrangères (voir infra).

M. Jean-Paul Cluzel, PDG de RFI de décembre 1995 à mai 2004, a régulièrement cherché à desserrer la contrainte budgétaire invoquée par les tutelles dans la phase de préparation budgétaire en s’efforçant d’obtenir du premier ministre des arbitrages favorables. Ainsi a-t-il obtenu une augmentation de la dotation de l’Etat de 6 M€ dans le cadre de la préparation du budget 2002102 et des financements complémentaires dans le cadre des lois de finances rectificatives, pour 2000 et 2001, notamment pour financer le passage aux 35 heures.

Dans le cadre de la préparation du budget 2003, le président de RFI s’est opposé à plusieurs reprises à ses tutelles en leur soumettant trois projets de budget en contradiction avec les instructions qui lui avaient été transmises. Le premier projet de budget était présenté en déficit avec un montant de charges de fonctionnement qui « ne correspondait pas à une présentation sincère et prudente »103. Le deuxième, communiqué aux tutelles à l’issue d’une réunion de cadrage organisée le 16 janvier 2003, était toujours en déficit, contrairement à la demande conjointe des représentants des ministères des affaires étrangères et de la culture et de la communication. Les trois tutelles adressèrent alors un courrier commun au président de RFI pour exiger « un projet de budget prévoyant des conditions réalistes de réalisation d’un équilibre s’inscrivant dans le cadre des ressources allouées sans prélèvement sur fonds de roulement »104. Le troisième projet de budget élaboré par RFI ne respectait pas ces instructions dans la mesure où il prévoyait à la fois une ponction sur le fonds de roulement (3,37 M€) et l’utilisation d’une subvention 2002 du ministère des affaires étrangères (0,4 M€) non reconductible.

Un arbitrage interministériel a évité que les tutelles ne rejettent, comme elles envisageaient de le faire105, le projet de budget présenté lors du CA du 30 juin 2003.

Les difficultés rencontrées dans la préparation du budget de RFI ont contribué à limiter la portée de l’autorisation budgétaire du fait de l’adoption de plus en plus tardive du budget par le conseil d’administration. Les budgets 2000 et 2001 ont été approuvés à la fin du premier trimestre de l’année en cours, le budget 2002 n’a été approuvé que le 1er octobre et le budget 2003 le 30 juin. L’absence, une partie de l’année, de cadrage financier formel de l’activité de RFI a pu, dans une certaine mesure, donner à son président une plus grande marge d’action. Les risques de cette situation ont néanmoins été jugés suffisamment élevés par les tutelles pour qu’elles demandent par écrit au président de RFI « de suspendre jusqu’à nouvel ordre tous les projets de diversification ou de développement qui nécessiteraient un financement public récurrent »106.

L’absence de proposition de redéploiements significatifs n’a pas permis la finalisation du projet de COM

Le projet de COM 2002-2006 préparé par RFI

Le projet de « contrat d’objectifs et de moyens entre l’Etat et RFI 2002-2006 » transmis aux tutelles le 12 janvier 2002 par M. Cluzel s’inscrivait dans la continuité des missions de RFI. Les 17 articles du document listaient de manière linéaire les différentes activités de RFI sans hiérarchie en termes de zones, de supports ou de langue de diffusion.

La note stratégique jointe en annexe posait clairement les déterminants de cette approche en soulignant que « l’ensemble de ces catégories de population constituent aujourd’hui l’auditoire de RFI. Faire le choix entre telle ou telle de ces catégories se traduirait immanquablement par une baisse de l’audience de RFI. En outre, le cahier des charges, tel qu’il existe, impose à RFI de répondre à l’ensemble des demandes diversifiées ». Cette orientation impliquait selon le projet de COM deux choix « une régionalisation croissante des programmes (…) et une présence de RFI sur une gamme d’outils de diffusion diversifiés ». Il prévoyait de deux nouvelles rédactions en langue étrangère (haoussa et swahili), la numérisation et l’enrichissement qualitatif des programmes, le développement du site Internet, la présence renforcée sur les différents moyens de diffusion internationale, la promotion de la langue français et le renforcement des actions à l’égard des communautés étrangères en France (projet de quatre nouveaux relais FM en France).

Le financement du projet de COM reposait, pour l’essentiel, sur une augmentation du financement de l’Etat de 2,7 % par an en moyenne sur cinq ans selon RFI107 et une subvention d’investissement exceptionnelle de 4,57 M€ sur 2002-2003. Le COM ne prévoyait pas d’économies ou de redéploiements substantiels au cours de la période. M. Cluzel précisant que « les économies potentielles ne peuvent être que limitées. Les suppressions de rédactions en langues étrangères, régulièrement évoquées afin de financer les nouvelles langues prévues par le COM se traduiraient, outre un coût financier important, par un coût social. Il serait en effet difficile de justifier pourquoi certains personnels de RFI seraient les seuls de tout l’audiovisuel public à être concernés par un plan de licenciements. L’opportunité de réduire l’autre grand poste de dépenses de RFI, à savoir les dépenses de diffusion, ne me semble pas non plus réaliste. Une réduction du dispositif ondes courtes serait à la fois coûteuse (coût exorbitant de renégociation des accords passés avec TDF) et peu opportune »108.

Le blocage des discussions sur la question des redéploiements de moyens

Les tutelles de RFI vont porter une appréciation très critique sur ce projet, le directeur de la DAETC soulignait que « le projet n’apporte aucun élément véritablement nouveau, chaque nouvelle technologie s’ajoute aux anciennes sans s’y substituer »109, et le sous directeur de la direction du budget, membre du CA de RFI, insistait sur le fait que « RFI retient dans ses propositions une hypothèse de continuité pendant 5 ans de ses missions et du cadre juridique actuel de l’audiovisuel. (…) Ce faisant, RFI propose la poursuite de sa politique de régionalisation des contenus et de présence sur tous les supports sans réellement hiérarchiser ses priorités selon l’auditoire et la zone géographique concernée. (…) Le projet se situe évidemment dans une logique de moyens purement cumulative. Un ciblage plus fin doit permettre de limiter les vecteurs de diffusion en cohérence avec les priorités géographiques et diplomatiques reconnues »110.

Le désaccord entre RFI et les tutelles, en particulier le ministère des affaires étrangères, s’est cristallisé sur les redéploiements à engager dans le cadre de la réforme des rédactions de langues, ce dernier considérant que l’offre de programmes en langues étrangères de RFI n’était plus adaptée et que des redéploiements étaient nécessaires pour financer de nouveaux programmes (voir infra).

A cette période, la fermeture de certaines rédactions ainsi que ses conséquences sociales et financières ont été explicitement envisagées par les services du ministère des Affaires étrangères111. Le ministre des affaires étrangères a lui-même indiqué, dans un courrier du 30 octobre 2000 au président de RFI : « Il me parait indispensable que RFI engage une véritable politique de redéploiement (…). Je vous propose que, sur la base d’un plan (…) discuté avec mes services, nous préparions ensemble la prochaine échéance budgétaire, afin de vous garantir les moyens d’une expansion maîtrisée »112. Selon le ministère, cette lettre serait restée sans suite, de même que « la suggestion minimale faite par le département de ne plus employer de pigistes pour les langues sans impact réel et d’en réduire progressivement la voilure ».

Pour le ministère des Affaires étrangères, la perspective de redéploiements internes à partir d’une réforme des langues étrangères aurait été écartée par le président de RFI compte tenu de ses conséquences sociales potentielles. Le compte-rendu d’entretien avec le ministre délégué à la coopération et à la francophonie indique ainsi que « le Président de RFI n’a pas paru très déterminé à avancer sur ce dossier. Il craignait que la suppression de certaines langues de diffusion ait des répercussions sur la situation sociale de son entreprise et n’obère la réforme, beaucoup plus fondamentale à ses yeux, du passage au numérique, qu’il comptait achever avant l’automne 2004 » 113. Selon la même note, M. Cluzel aurait surtout paru soucieux de préserver le consensus social de son entreprise.

Au total, les désaccords financiers récurrents entre RFI et les tutelles ainsi que les réticences du président à réaliser des redéploiements au sein des rédactions en langues étrangères ont contribué à bloquer les travaux préparatoires du COM. Les discussions sur le projet de COM seront suspendues à la fin de l’année 2002, moins d’un an après leur lancement.

La préparation conflictuelle du projet de budget 2003 de RFI cristallisera les désaccords entre M. Cluzel et les tutelles. Le choix est fait, dès le premier trimestre 2003, de demander à l’inspection générale des finances de procéder à « un audit de RFI en vue de l’élaboration de son contrat d’objectifs et de moyens » qui devra porter sur « l’analyse des orientations stratégiques et la situation budgétaire de l’entreprise »114. L’audit sera effectivement lancé au courant de l’été 2003 et achevé au début du mois de février 2004115 ce qui ne permettra pas de relancer les négociations sur le COM avant le départ de RFI de M. Jean-Paul Cluzel.

M. Cluzel a indiqué à la Cour qu’il avait proposé oralement à plusieurs reprises aux tutelles, plus particulièrement aux responsables des cabinets du premier ministre et du ministre de la culture et de la communication, de mettre en œuvre des redéploiements, dès lors que leur financement serait assuré par l’Etat.

Il reconnaîtra pour la première fois de manière explicite, dans une note confidentielle en date du 23 avril 2004, la nécessité de redéployer les moyens des rédactions des langues étrangères de RFI116. Cette note, adressée aux nouveaux ministres des affaires étrangères et de la culture et de la communication nommés le 30 mars 2004, s’inscrivait dans le prolongement du rapport de l’Inspection générale des finances remis quelques semaines plus tôt et dont les conclusions avaient été approuvées par les tutelles.

Peu après, le 12 mai 2004, M. Cluzel quittait ses fonctions à RFI et était nommé à la présidence de Radio France.

LES TUTELLES N’ONT PAS SOUTENU LE PROJET DE REFORME DU NOUVEAU PRÉSIDENT

Le nouveau PDG de RFI a rapidement proposé les grandes lignes d’un projet de réforme pour l’essentiel conforme aux attentes des tutelles

Les nouvelles orientations stratégiques et de moyens présentées à l’été 2004

M. Antoine Schwarz, PDG de RFI depuis le 2 juin 2004, a transmis le 28 juillet à ses tutelles une note intitulée « la stratégie de RFI – premières réflexions ». Elle a pour objectif « après deux mois d’immersion dans l’entreprises (…) d’esquisser le cadre dans lequel pourrait se situer l’action des prochaines années ». Il constatait d’emblée que « telle qu’elle ressort de son cahier des missions et des charges, la mission de RFI est quelque peu datée ». Il proposait de « clarifier les choix stratégiques et d’assurer la mobilisation des personnels » dans le cadre d’un projet d’entreprise assimilable à une convention d’objectifs et de moyens.

Les objectifs affichés par le président de RFI étaient ambitieux dans la mesure où ils visaient à :

- « revalider les missions et les priorités stratégiques » dans le cadre d’une réflexion générale sur les cibles, les contenus et les zones géographiques ;

- « définir les conditions du redéploiement des moyens » dans le cadre de la numérisation de la production, d’une refonte des rédactions et de l’accentuation de la diffusion locale, « les suppressions de postes de salariés en CDI pouvant aller de 70 à 150 » selon les hypothèses retenues. S’il était possible, selon M. Schwarz, de réduire le nombre de licenciements secs (primes au départ volontaire, mesures d’âge dans le cadre de la procédure de cessation d’activité), « il y aurait lieu en toute hypothèse de prévoir un plan de sauvegarde de l’emploi » ;

- « tracer les pistes de développement » en matière de supports, d’Internet, de diffusion en arabe avec la filiale RMC-MO et de positionnement en Europe.

Les orientations proposées par M. Schwarz dans sa note du 28 juillet 2004 répondaient aux principales préoccupations des tutelles exprimées à plusieurs reprises sous la présidence précédente.

Initialement, les tutelles ont réagi plutôt favorablement à la démarche adoptée par M. Schwarz, dont les grandes lignes ont été présentées lors du CA du 23 juin 2004. A l’issue de cette réunion, le représentant du MAE au CA soulignait que « rompant avec les pratiques de son prédécesseur, M. Schwarz a tenu à mettre sur la table toutes les questions en suspens, mêmes les plus délicates comme la dérive salariale ou les grandes difficultés de la numérisation de RFI. Il a souhaité que le lien déjà fort entre RFI et le Département se nourrisse d’orientations stratégiques établies en commun.117 »

Dans un compte-rendu partagé de leur première réunion de travail, le 19 août 2004, avec le nouveau Président de RFI, la DDM et la DAETC soulignaient qu’elles partageaient « les principaux constats sous jacents à la démarche proposée par Antoine Schwarz : la nécessité de poursuivre la rénovation de l’offre de programme engagée par Jean-Paul Cluzel s’agissant du programme en français et aborder la question des programmes en langues étrangères dans une perspective stratégique, le caractère inéluctable de la numérisation qui doit permettre de dégager des gains de productivité et la nécessité de réfléchir à l’affectation de ces gains de productivité à un développement de la production ou à une réallocation des moyens.118 » La DDM indiquait par ailleurs que les propositions du président s’inscrivent dans la continuité des conclusions du rapport IGF et des évolutions proposées par les tutelles au début des années 2000119. A l’issue d’un entretien distinct avec le Président de RFI en septembre 2004, la direction du budget observait à son tour : « les trois chantiers mis en exergue par la nouvelle direction vont dans un sens favorable. Il convient désormais d’en expliciter les conditions et de réfléchir à un calendrier prévisionnel pour leur mise en œuvre. » 120 

Les premières critiques des tutelles sur la méthode adoptée par RFI augurent des blocages à venir

Le Président de RFI sollicitait, dans sa note du 28 juillet 2004, l’accord des tutelles sur les grandes orientations proposées avant de travailler à leur finalisation121. Il y précisait en particulier « qu’aucune simulation n’avait encore été effectuée, dans l’attente d’un accord des autorités de tutelles sur le principe même » d’un plan de sauvegarde de l’emploi. M. Schwarz concluait sa note en soulignant que « lorsque les choix sont clairs, chaque année perdue pour les effectuer coûte financièrement et psychologiquement. Ne faut-il pas profiter d’un nouveau mandat pour permettre à l’entreprise de se développer sur les meilleures bases possibles ? ».

Les tutelles exprimèrent, dès de la réunion du 19 août 2004, des doutes sur les propositions de réforme formulées par le nouveau président. La tonalité générale de leurs réactions témoigne déjà des contradictions auxquelles elles sont confrontées. Elles souhaitent une réforme d’ampleur de RFI mais elles ne disposent pas des moyens financiers nécessaires à sa mise en œuvre. Le MAE avait déjà souligné dans une note du 23 juin : « il convient de rester prudent, la raréfaction des moyens budgétaires est la borne infranchissable de toutes ces intentions aussi louables soient-elles. (…) Je propose que la DATC accompagne l’impulsion voulue par M. Schwarz, en la relayant entre autres auprès des directions géographiques concernées, mais que notre vigilance budgétaire continue de s’exercer de la manière la plus stricte »122.

La DDM soulignait de son côté : « le document présenté par Antoine Schwarz suscite toutefois certaines interrogations : la DDM, tout en saluant le caractère volontariste du calendrier proposé, note la difficulté politique à articuler tout à la fois l’annonce d’une progression de la ressource publique allouée à RFI qui sera la plus faible de l’ensemble de l’audiovisuel public et celle d’un plan social : les observateurs et les personnels ne manqueraient pas d’établir un lien entre les deux, alors même que ce lien n’existerait pas (…). La démarche du président de RFI consiste clairement à solliciter la discussion avec les administrations de tutelle sur son projet d’entreprise (…). Cependant, de nombreux points sont encore imprécis (…). La société doit pouvoir démontrer que les économies dégagées et ses capacités de redéploiement permettront la mise en œuvre de ses projets »123.

La négociation d’un contrat d’objectifs et de moyens est le cadre retenu par les tutelles pour finaliser le projet de réforme proposé par M. Schwarz124.

Les conditions d’une réforme en profondeur de RFI dans le cadre d’un COM n’ont pas pu être réunies

Les tutelles n’ont soutenu les réformes proposées par le nouveau président

Les tutelles ont rapidement précisé la double contrainte qui s’imposait au nouveau président : l’évolution des financements publics demeurerait limitée et les économies internes devraient être réalisées sans recours à la procédure du plan de sauvegarde de l’emploi125.

Le resserrement de la contrainte budgétaire, à laquelle RFI était déjà soumise depuis plusieurs années, s’est manifesté très rapidement. Dès la première réunion de travail avec le nouveau président de RFI, la DDM lui précisa que la société bénéficierait, l’année suivante, de « la plus faible augmentation de tous les opérateurs de l’audiovisuel public relevant de la redevance ». La DAETC l’informait à la même occasion que la subvention du MAE ne devrait progresser que « de l’ordre de 1 % »126. La contrainte budgétaire sera à nouveau renforcée par la suite avec une diminution de 3,5 % de la subvention du MAE, le gel de la réserve de précaution et une progression des crédits de la redevance allouée à RFI de 1,2 % contre 2,57 % en moyenne pour l’ensemble du secteur dans le cadre de la préparation du budget 2007.

L’opposition des tutelles à un plan de sauvegarde de l’emploi a considérablement limité les capacités de redéploiements internes de RFI. Les motivations de ce refus semblent plus politiques que financières dans la mesure où aucune évaluation sérieuse du coût d’un tel plan n’avait été réalisée et que la direction du budget du ministère des finances y semblait plutôt favorable. Les réponses faites à la Cour par le directeur de la DAETC confirment que la décision de ne pas autoriser RFI à recourir à des licenciements économiques dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi a été prise au niveau politique.

Cependant, la nécessité de recourir à un plan de sauvegarde de l’emploi pour mener à bien une réforme en profondeur de RFI sera reconnue ultérieurement, sans ambiguïté, par l’ensemble des acteurs127.

Les travaux préparatoires à une éventuelle réforme de l’audiovisuel extérieur pourrait permettre de dénouer dans les mois à venir la quadrature du cercle à laquelle RFI est confrontée. Le directeur de la DAETC du ministère des affaires étrangères a ainsi précisé au cours de l’instruction : « Nos nouvelles autorités ont autorisé les administrations concernées par la tutelle de RFI à s'engager dans l'élaboration d'un COM avec éventuelle adoption d'un plan de sauvegarde de l'emploi. Nous travaillons depuis six mois avec RFI sur ces bases. Ce travail aurait pu être fait avant, encore fallait-il avoir tous les feux verts ! ».

Le président a été contraint de limiter ses ambitions dans un contexte de fortes tensions sociales

Le président de RFI avait annoncé, dans sa note du 28 juillet 2004, une démarche en trois étapes : une large consultation du personnel (juillet), un travail avec les tutelles sur les options stratégiques (septembre-octobre) et deux conseils d’administration spécifiques (stratégie en novembre, budget en décembre).

Cependant, le contexte de RFI, au deuxième semestre 2004, était particulièrement tendu avec le télescopage d’une série de dossiers : le projet de chaîne internationale auquel RFI ne semble plus devoir être associé128, les tensions relatives à la réorganisation de la production dans le cadre de la numérisation (voir infra), l’ « affaire Ménargues »129 du nom du directeur général adjoint chargé des antennes et de l’information et vice-président de RMC-MO ayant démissionné en octobre 2004, et les questions de l’emploi précaire et des écarts de rémunération avec les autres entreprises de l’audiovisuel public, en particulier Radio France130.

Le « projet d’entreprise 2005-2008 », issu de groupes de travail, fut présenté à l’ensemble des salariés le 9 novembre 2004 après avoir été transmis aux tutelles qui n’ont pas formellement exprimé leur point de vue. Le document dressait un état des lieux et proposait cinq axes et priorités de travail : revalider les missions de RFI, rechercher l’efficacité, gagner de nouveaux auditoires, développer les synergies et optimiser les ressources.

Les organisations syndicales virent dans ces propositions une remise en cause des missions traditionnelles de RFI et une menace sur l’emploi, permanent ou non. Elles déposèrent un préavis commun131 de grève pour le 19 novembre 2004, date à laquelle devait se tenir le conseil d’administration de RFI essentiellement consacré à la présentation du projet d’entreprise. La décision du président de RFI d’annuler la tenue de ce conseil a permis de lever le préavis de grève mais n’a pas empêché le vote d’une motion de défiance132. Signe d’un climat particulièrement tendu, les délégués intersyndicaux ont demandé à plusieurs reprises à être reçus par les administrations de tutelle, lesquelles ont refusé.

Dans ce contexte, M. Schwarz a été contraint de limiter ses ambitions de réforme tant en ce qui concerne leur portée que leur calendrier de mise en oeuvre. Un communiqué de la direction le 18 novembre 2004 précisa : « le document intitulé projet d’entreprise 2005-2008 est une base de travail qui a été présentée dans une version préliminaire. Elle sera prochainement modifiée dans le cadre de la concertation en cours. Le projet d’entreprise ne dissimule aucun plan de sauvegarde de l’emploi (…) et son élaboration sera conditionnée à l’avancement des différents chantiers concernant l’organisation de l’entreprise. »

Le projet de contrat d’objectifs et de moyens 2006-2009, que le président de RFI a présenté aux tutelles au mois de juin 2005, était caractérisé par son manque d’ambition au regard des premières orientations stratégiques proposées. Il ne proposait plus de hiérarchisation claire des missions et objectifs de RFI, limitait les redéploiements à 19 ETP sur trois ans et sollicitait une progression importante des financements publics (4,3 % en moyenne sur la période). La réaction des tutelles, très négative, conduira à l’arrêt des discussions sur le COM dès l’automne 2005133.

Les tutelles n’ont pas su, dans ce contexte, préciser les priorités stratégiques de RFI

Les tensions sociales récurrentes au sein de l’entreprise, alimentées par les perspectives ouvertes par son nouveau président, ont amené le ministère des affaires étrangères à adopter une position de retrait sur la finalisation des choix stratégiques attendus, en particulier en matière de langues de diffusion. Les services du ministère craignaient en particulier que la définition de priorités en matière de langues étrangères n’ait pour conséquence de lui faire assumer publiquement les conséquences d’une réforme à venir des rédactions de RFI134.

La position prudente et attentiste adoptée par ce ministère contribuera à affaiblir un peu plus la direction de RFI. Elle se traduira par des renvois réciproques de responsabilités du président de RFI135, qui attend des indications claires sur les langues prioritaires, et des services du ministère des affaires étrangères136, qui ne souhaitent pas les formuler compte tenu du contexte social de l’entreprise.

Le directeur de la DDM résumera cette contrainte en indiquant que « le projet d’entreprise du Président de RFI de juillet 2004, s’inspirant largement des conclusions du rapport de l’IGF du 7 avril 2004 (suppression de 70 à 150 postes) s’est heurté à une opposition des tutelles, notamment du MAE»137

La volonté de l’Etat, à l’automne 2006, de relancer les travaux préparatoires du COM de RFI ont amené les différentes tutelles à se concerter afin de rédiger une lettre d’orientations stratégiques adressée au président de RFI138. Le projet finalisé en octobre 2006, apparemment en dehors de toute concertation avec M. Schwarz, préconisait notamment l’optimisation de l’impact des programmes zone par zone, une réorganisation en profondeur de l’offre en langues étrangères conformément à des priorités par zone (Afrique, proche et moyen orient, autres régions du monde), une plus grande coordination de la ligne éditoriale des différentes antennes, la modernisation de la gestion de l’entreprise. Le courrier signé par les ministres de la culture et de la communication et des affaires étrangères ayant été modifié par rapport au projet conjointement arrêté par les quatre administrations, la direction du budget et l’APE demanderont à leurs ministres de tutelle de ne pas signer la version transmise. Un nouveau désaccord – interne cette fois ci aux tutelles – sur les moyens financiers à mobiliser a ainsi contribué, une nouvelle fois, à bloquer les discussions préparatoires au COM139.

Les services du ministère de l’économie et des finances souligneront d’eux même que « la situation de l’Etat deviendrait inconfortable quant à sa volonté de fixer clairement les objectifs qu’il entend assigner prioritairement à RFI, si un nouveau courrier au président de l’entreprise ne lui parvenait pas, désormais, dans les meilleurs délais ». Aucun courrier précisant des orientations stratégiques n’a depuis été adressé au président de RFI.

RFI est désormais, avec RFO, la seule entreprise de l’audiovisuel public à ne pas être dotée d’un contrat d’objectifs et de moyens contrairement aux dispositions de l’article 53 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 modifiées par la loi n° 2000-719 du 1er août 2000140. Les évolutions géopolitiques, technologiques et économiques auxquelles RFI est confrontée depuis une vingtaine d’années rendent pourtant particulièrement nécessaire la définition d’axes prioritaires de développement adossés à des moyens financiers adaptés. Le dernier document d’orientation stratégique conclu entre l’Etat et RFI, signé le 20 décembre 1989 soit un mois après la chute du mur de Berlin, couvre la période 1989-1995. Depuis cette date, RFI est dans un vide stratégique que la Cour avait relevé dans son dernier rapport pour le regretter soulignant qu’il contribuait à fragiliser l’entreprise. La signature d’un contrat d’objectifs et de moyens implique que les tutelles, en particulier le ministère des affaires étrangères, s’engagent envers RFI et arrêtent des choix stratégiques, toutes choses qu’elles ont repoussées de manière régulière depuis une dizaine d’années141.

La finalisation des objectifs stratégiques de RFI dans le cadre d’un contrat d’objectifs et de moyens pourra utilement être accompagnée d’une révision du décret n° 88-66 du 20 janvier 1988 portant approbation du cahier des missions et des charges de RFI. Les missions de RFI y sont en effet décrites de manière imprécise et linéaire, cautionnant la dispersion des moyens et des objectifs qui ne sont pas hiérarchisés.

LES DÉVELOPPEMENTS ENGAGÉS PAR RFI APPELLENT DES ARBITRAGES

L’absence d’accord entre l’entreprise et ses tutelles sur un contrat d’objectif et de moyens n’a pas empêché la réalisation de certains développements qui ont fait évoluer le poids relatif des différents modes de diffusion, et l’attention accordée aux différentes zones du monde couvertes par la radio.

A de rares exceptions près, ces projets n’ont toutefois fait l’objet d’aucune validation formelle ni même d’une discussion préalable avec les tutelles. Cette situation renforce la nécessité dans laquelle se trouvent les tutelles et l’entreprise d’aboutir à une vision partagée des orientations stratégiques de RFI et de son avenir.

La diversification des modes de diffusion

Dès les années 90, RFI a fortement diminué sa diffusion en ondes courtes. Depuis 2000, celle-ci a connu deux baisses significatives, en 2004 et surtout en 2006, à l’occasion de la renégociation du contrat TDF (voir infra). Le nombre d’heures fréquence émises est ainsi passé de 493 h par jour en 1993 à 198 h par jour en 2004 (dont 166h via TDF), et à 115 h par jour en 2006 (dont 92h via TDF).

Source : RFI. Document DAI sur la diffusion en ondes courtes d’avril 2007 et note de la direction générale d’octobre 2005 sur la renégociation du contrat TDF.

Face au recul des ondes courtes, RFI a engagé depuis longtemps une diversification de ses modes de diffusion, à travers quatre vecteurs principaux : l’implantation de relais FM, l’utilisation de radios partenaires, la diffusion par satellites et Internet. L’évolution de la structure du budget de diffusion sur la période 2004-2006 en témoigne :

- Evolution de la structure des dépenses de diffusion de RFI

 

Montant des dépenses ( € courants)

Part dans le total

 

2004

2005

2006

2004

2005

2006

Ondes courtes

22 549 610

21 539 044

16 103 055

80 %

79 %

74 %

Satellites

2 075 721

1 894 013

2 089 641

7 %

7 %

10 %

FM

2 812 775

2 956 084

3 093 320

10 %

11 %

14 %

Ondes moyennes

578 807

541 271

408 287

2 %

2 %

2 %

Autres

143 804

185 712

151 342

1 %

1 %

1 %

Total

28 160 717

27 116 124

21 845 645

100 %

100 %

100 %

Source : comptabilité analytique RFI

Depuis 2000, le nombre de relais FM qui s’élevait alors à 64, a plus que doublé et s’établit en 2007 à 142 (auxquels s’ajoutent 11 relais de Monte Carlo Doualiya). Depuis 2002, entre 9 et 15 relais sont ouverts chaque année.

En complément de relais FM propres, ou dans les zones où l’implantation de ces relais était trop coûteuse, RFI a développé le recours aux « radios partenaires ». Fondé sur la mise à disposition de programmes, ce mode de diffusion convient en particulier pour les programmes courts. Cependant, le caractère déclaratif des reprises rend aléatoire la mesure de ses résultats en terme de diffusion et d’audience.

S’agissant de la diffusion par satellite, RFI utilise plus de 20 satellites de diffusion directe ou de transport.

Dans le cas particulier de l’Iran, où les télévisions par satellites ont un fort taux de pénétration alors que les perspectives d’ouverture des relai FM aux radios internationales demeurent faibles, RFI ambitionne de développer un mode de diffusion original de ses programmes, par le biais d’une chaîne de télévision « statique », sur le modèle des chaînes déjà mises en œuvre dans les hôtels internationaux dans le cadre du partenariat existant aujourd’hui entre RFI et le groupe Accor.

Enfin, RFI a développé sa présence sur Internet. Initialement considéré comme un moyen de diffusion complémentaire de l’onde courte et de la FM et comme un support d’information sur les moyens de recevoir la station dans les différentes zones du monde, le site Internet de RFI, ouvert en 1996, s’est fortement développé. La fréquentation du site selon les zones géographiques142 diffère de celle des auditeurs radio. Ainsi, en 2007, l’Afrique ne représente que 12,4 % des visites (contre 56 % de l’audience radiophonique), le Proche et le Moyen-Orient 2,1 % (contre 26,6 %), tandis que l’Europe totalise 51,4 % des visites (contre 4,7 %) et, en son sein, 30 % pour la France, l’Amérique du Nord 20,8 % et l’Asie 8 %. L’Amérique latine et l’Océanie représentent quant à elles respectivement 3 % (contre 8,4 %) et 0,6 % (contre 0,1 %) :

Source : GEDA 2005 pour l’audience radio, étude Xiti mai 2007 pour Internet.

Si ces développements constituent des alternatives aux ondes courtes ou à la FM dans les zones où celles-ci ne sont pas développées, ils n’en suscitent pas moins des divergences entre l’entreprise et ses tutelles, sur le coût, l’opportunité et le poids respectif des différents vecteurs de diffusion et sur les zones de diffusion.

Ainsi, l’expérimentation par RFI d’un nouveau mode de diffusion satellitaire Worldspace a suscité plusieurs interrogation au conseil d’administration143 : « [le système] fonctionne de manière plus simple puisqu’il s’agit d’une diffusion directe des programmes par satellite et qui donne de bons résultats techniques. Malheureusement, il faut des postes de radios spécifiques et ce parc est, pour l’instant, limité ». De même, ainsi que l’a indiqué le président de RFI à la Cour, le recours aux radios partenaires – dont les reprises de programmes et l’audience sont méconnues – n’est pas entièrement satisfaisant.

La nécessité de répondre à ces interrogations apparaît d’autant plus urgente aujourd’hui qu’avec la renégociation du contrat TDF (voir infra), la contrainte liée au poids des ondes courtes dans le budget de RFI sera levée dès 2011, soit dans quatre ans.

L’extension de la couverture de certaines zones a été engagée

Après l’arrêt de la diffusion en ondes courtes dans la zone à la fin des années 90, le fort développement des radios partenaires depuis 2004 a eu prioritairement lieu en Amérique latine. Celles-ci représentent près de la moitié des radios partenaires de RFI (215 sur 467). Ce développement a fait l’objet de peu de débats au sein du conseil d’administration, le développement des radios partenaires étant considéré comme « gratuit ». Celui-ci a pourtant un coût de gestion des contrats de partenariat, et devrait avoir un coût de suivi des reprises (qui est aujourd’hui neutralisé par l’absence de suivi de la diffusion des programmes, en dehors des radios partenaires principales).

Le projet « Viva America », formalisé en juillet 2006, propose un développement plus ambitieux à destination de la zone, basé sur la production locale des contenus. Face à l’impossibilité financière de faire passer la production en espagnol de 4 à 24h, l’idée est « d’éclater la fabrication de la majorité des programmes sur tous les points de l’Amérique, reliés au studio de diffusion par voie numérique ». Le projet prévoit la mise en place d’une rédaction spécifique de 40 personnes à Montevideo. Outre la production de contenus et la coordination des correspondants dans les différents pays de la zone, la rédaction serait chargée de la gestion de l’antenne. Combinant la production en espagnol de RFI et les contenus produits localement pour un format en continu de 24h, le programme serait ensuite diffusé à l’échelle continentale, en fonction des possibilités techniques offertes dans chaque pays. Le projet prévoit des décrochages spécifiques pour la publicité locale, afin de développer les ressources propres de la station.

Au cours des dernières années, RFI a également développé ses programmes à destination de l’Europe, notamment par le biais des filiales, comme en témoigne l’évolution des subventions qui leur ont été versées au cours de la période :

- Evolution des subventions de RFI à ses filiales 2000-2006

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2006 / 2000

Monte Carlo Doualiya

2 407 933

2 967 851

2 529 618

1 300 000

2 650 000

2 850 000

3 500 000

45,4 %

Radio Paris Lisbonne

341 920

491 001

441 102

520 110

503 900

512 000

508 400

48,7 %

RFI Roumanie

139 330

353 547

383 431

418 250

545 800

558 900

684 100

391,0 %

RFI Bulgarie

109 502

156 839

194 655

236 630

244 500

242 300

262 700

139,9 %

RFI Deustchland

6 666

38 564

36 500

31 819

51 620

46 169

42 000

530,0 %

RFI Beta Serbie

0

0

0

0

0

0

42 833

 

RFI Maroc

0

0

0

0

0

0

14 500

 

Total

3 005 352

4 007 802

3 585 306

2 506 809

3 995 820

4 209 369

5 054 533

68,2 %

Source : Comptes sociaux de RFI (compte 628)

Le maintien de la filiale de RFI au Portugal a fait l’objet de critiques récurrentes des représentants de l’Etat au conseil. Dans une note du 28 mai 2007, le directeur de l’audiovisuel extérieur du ministère des Affaires étrangères indique ainsi au président de RFI « le très ferme souhait du ministère des Affaires étrangères de mettre un terme aux dépenses de RFI en faveur d’une station dont l’impact – comme le souligne notre ambassade à Lisbonne – ne justifie pas un coût qui restera trop élevé malgré les efforts que vous avez entrepris ».

Le renforcement des autres filiales européennes, et la création en 2006 d’une filiale à Belgrade (RFI Beta) en revanche, n’a pas fait l’objet d’une validation formelle du conseil, ni d’un véritable débat entre les administrations de tutelle.

L’entreprise s’est également récemment engagée dans un projet de radio paneuropéenne financé par la Commission européenne. Le consortium « Euradio », composé de 16 radios européennes dont RFI et trois de ses filiales européennes (RFI Roumanie, RFI Bulgarie et RPL), co-présidé par le président de RFI et de président de la DW, a ainsi remporté l’appel d’offre lancé en juillet 2007. Le consortium n’ayant pour l’heure pas d’existence légale, c’est le président de RFI qui a signé, le 11 décembre 2007, un contrat de service avec la direction générale de la communication de la Commission. Ce projet, annoncé par un communiqué de presse, n’a à la connaissance de la Cour fait l’objet d’aucune discussion au sein du conseil d’administration.

Le seul dossier sur lequel les tutelles, et en leur sein le ministère des Affaires étrangères, se sont prononcées avec clarté, concerne le développement de RFI au Moyen-Orient. La volonté de RFI et la position du ministère sur ce dossier ne sont pas nouvelles. Déjà en 2003, le ministère indiquait : « [Sur] l’intention déclarée par voie de presse de TV5 et RFI de créer deux journaux télévisés en arabe, le Département n’a pas été consulté. Sans y être hostile, il attend avec perplexité d’en connaître les coûts et se demande si les deux partenaires se sont bien mis d’accord sur la responsabilité éditoriale. Peut-être conviendrait-il de souligner auprès de M. Cluzel que ce projet n’a a priori pas de lien (contrairement à ce qu’il a fait savoir) avec le projet du Département d’une chaîne arabe en partenariat avec les marocains (sur le modèle de MEDI 1) pour lequel une étude de faisabilité a été lancée par le cabinet du ministère ». En dehors de cette initiative, le dossier n’a toutefois pas connu de débouchés concrets avant 2005.

Dans la perspective de l’ouverture de la radio et de la télévision marocaines à la concurrence en 2006, RFI a manifesté, fin 2005, son intérêt pour un réseau de 7 à 10 fréquences afin d’y diffuser son programme en français. Dans ce but, et afin de répondre aux exigences réglementaires marocaines, RFI a procédé à la création d’une filiale, la société franco-marocaine de radiodiffusion, le 21 décembre 2005. La candidature de RFI a finalement été retirée à la demande du ministère des Affaires étrangères, invoquant la concurrence entre Medi 1 et RFI, et les réticences marocaines à l’égard de RFI. Après l’échec de cette tentative, RFI a en 2007 entrepris des démarches auprès d’investisseurs privés dans le but de créer une nouvelle radio marocaine.

L’ensemble de ces projets de développements a été transmis aux tutelles en vue d’un conseil d’administration qui devait se tenir le 18 septembre 2007 spécifiquement sur le sujet. Ce conseil a été annulé à la demande des tutelles.

PARTIE II : LES RÉFORMES ENTREPRISES FACE À LA DÉGRADATION DE LA SITUATION FINANCIÈRE

Au cours de la période, la hausse des charges de RFI, notamment de personnel, a été plus dynamique que l’évolution de ses ressources, induisant un effet de ciseau que les économies de diffusion réalisées en 2004 et 2006 n’ont permis de compenser que partiellement. L’équilibre financier de l’entreprise, déjà fragilisé par le cumul des déficits d’exploitation et le sous-financement de ses investissements, a par ailleurs été fortement bouleversé par la perte exceptionnelle consécutive à la renégociation du contrat TDF en 2006, rendant nécessaire la recapitalisation de l’entreprise.

Dans ce contexte, RFI a entrepris deux réformes de structure, destinées à optimiser l’allocation de ses moyens techniques et journalistiques : la numérisation de la production et de la diffusion et la réforme des langues étrangères, auxquelles s’ajoute la mise en place du « bi-média » au sein de la rédaction en français. La présente partie s’attache à retracer le déroulement de ces réformes et à évaluer leurs résultats, qui présentent pour les deux premières au moins un écart significatif avec les ambitions initialement affichées.

I. UNE SITUATION FINANCIÈRE TENDUE

Si l’adaptation de ses missions et de son activité à l’évolution de son environnement constitue un défi majeur pour RFI, l’entreprise doit également faire face au nécessaire rétablissement de sa situation financière, qui est demeurée tendue tout au long de la période.

Par ailleurs, la renégociation du contrat de TDF a été à l’origine d’un déficit exceptionnel en 2006 qui, ajouté au rebasage des provisions, rend nécessaire une recapitalisation de la société.

LE RÉSULTAT DE RFI : UNE PROGRESSION DES CHARGES PLUS DYNAMIQUE QUE CELLE DES RECETTES DEPUIS 2000

Le résultat de RFI au cours de la période a été marqué par une diminution de ses ressources réelles, tandis que ses charges d’exploitation ont continué de croître, en dépit d’une forte diminution des coûts de diffusion. Ces évolutions contraires ont pesé sur le résultat d’exploitation de l’entreprise, déficitaire depuis 2001. 

- Compte de résultat de RFI 2000-2006 (en euros)

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

achats et variation de stocks

2 647 622

2 813 557

2 805 833

3 087 864

3 241 363

3 376 834

239 658

services extérieurs

39 183 579

39 273 277

40 804 140

38 896 617

35 368 882

34 718 673

47 229 238

autres services extérieurs

11 755 604

15 164 227

15 124 502

13 711 409

13 397 495

13 836 410

Impôts et taxes

3 584 151

3 828 401

4 034 309

4 279 291

4 083 154

4 032 329

4 333 083

charges de personnel

52 811 077

56 543 833

62 258 774

63 016 989

64 266 842

66 540 793

69 347 338

DAP

4 412 951

4 209 343

4 407 876

5 522 023

5 470 636

5 055 697

6 154 822

Autres charges

2 790 516

2 904 666

3 060 283

3 206 141

4 017 367

3 745 394

4 037 028

Total charges exploitation

117 185 500

124 737 304

132 495 717

131 720 334

129 845 739

131 306 130

131 341 167

redevance

49 301 722

48 961 620

51 251 181

52 320 759

53 022 292

53 731 368

55 865 218

Subvention MAE

69 525 198

68 906 956

70 080 000

70 200 000

71 420 000

72 010 000

69 540 000

publicité

2 367 339

2 069 726

2 278 698

2 700 881

2 490 616

2 440 156

749 647

autres ventes et services

1 847 672

1 781 802

1 638 236

1 963 412

2 075 382

2 019 097

3 506 580

Reprises sur provisions

689 619

544 403

220 879

1 567 582

110 800

69 916

265 702

Autres produits

217 636

221 333

62 983

215 469

100 487

258 169

549 894

Total produits exploitation

123 949 186

122 485 840

125 531 977

128 968 103

129 219 578

130 528 706

130 477 041

Résultat d'exploitation

6 763 686

-2 251 464

-6 963 740

-2 752 231

-626 162

-449 339

-48 530

charges financières

1 645 997

791 994

2 314 624

1 572 878

122 974

64 596

399 373

Produits financiers

534 313

623 714

575 197

2 416 535

352 102

407 604

627 664

Résultat financier

-1 111 684

-168 280

-1 739 427

843 658

229 128

343 008

228 291

charges exceptionnelles

93 319

108 210

1 220 663

486 853

74 738

85 492

11 092 368

Produits exceptionnels

25 138

1 071 864

2 274 859

986 221

532 566

626 331

193 960

Résultat exceptionnel

-68 181

963 654

1 054 196

499 368

457 828

540 839

-10 898 408

impôts sur bénéfice

30 490

30 490

30 000

30 000

30 000

30 000

0

Résultat de l'exercice

5 553 331

-1 486 580

-7 678 971

-1 439 206

30 794

76 423

-11 534 243

Source : Comptes sociaux RFI

La faible progression des ressources de l’entreprise

L’évolution des ressources publiques de RFI

Les ressources publiques de RFI, qui constituent 96% de l’ensemble de ses ressources, sont réparties entre une quote-part de la redevance audiovisuelle et une subvention du ministère des affaires étrangères au titre de l’audiovisuel extérieur.

De 2000 à 2006, les ressources d’exploitation de RFI sont passées de 123,9 M€ à 130,5 M€, soit une hausse de 5,3 %. En leur sein, la part du produit de la redevance a augmenté, passant de 39,8 % à 42,8 %, et celle de la subvention du ministère des Affaires étrangères a diminué, passant de 56,1 % à 53,3 %. Si l’on inclut la subvention versée par le ministère des Affaires étrangères à la filiale Monte Carlo Doualiya – qui a diminué de 4,7 % sur la période – l’évolution des ressources du groupe est ramenée à 4,9 %.

- Produits d’exploitation de RFI 2000-2006 en euros courants

 

2 000

2 001

2 002

2 003

2 004

2 005

2 006

2006 / 2000

Redevance

49 301 722

48 961 620

51 251 181

52 320 759

53 022 292

53 731 368

55 865 218

13,3 %

% produits

39,8 %

40,0 %

40,8 %

40,6 %

41,0 %

41,2 %

42,8 %

 

Subvention MAE

69 525 198

68 906 956

70 080 000

70 200 000

71 420 000

72 010 000

69 540 000

0,0 %

% produits

56,1 %

56,3 %

55,8 %

54,4 %

55,3 %

55,2 %

53,3 %

 

Autres produits

5 122 266

4 617 264

4 200 796

6 447 344

4 777 286

4 787 338

5 134 281

0,2 %

% produits

4,1 %

3,8 %

3,3 %

5,0 %

3,7 %

3,7 %

3,9 %

 

Total RFI

123 949 186

122 485 840

125 531 977

128 968 103

129 219 578

130 528 706

130 477 041

5,3 %

Subvention MCD

4 268 572

4 268 572

4 270 000

4 270 000

4 870 000

4 270 000

4 070 000

- 4,7 %

Total groupe

128 217 758

126 754 412

129 801 977

133 238 103

134 089 578

134 798 706

134 547 041

4,9 %

Source : Comptes sociaux RFI et comptes Monte Carlo Doualiya

Cette progression des ressources de RFI en euros courants recouvre une diminution des ressources de l’entreprise en euros constants. Ainsi, exprimés en date de valeur 2000, la redevance n’augmente que de 3,1 %, la subvention du ministère des affaires étrangères diminue de 9 %, et le total des produits d’exploitation de RFI diminue de 4,2 % entre 2000 et 2006. En incluant la subvention versée à Monte Carlo Doualiya (dont la diminution est portée à 13,3 %), le montant des ressources du groupe diminue de 4,5 % en euros constants sur la période.

Si le montant des ressources publiques de RFI a peu progressé, sa part parmi les autres opérateurs de l’audiovisuel public financés par la redevance est demeurée stable, représentant 2,1 % de la redevance audiovisuelle.

- Répartition de la redevance entre opérateurs de l’audiovisuel public 2002-2007 (en M€ HT)

 

2002

part / total 2002

2007

part / total 2007

2007 / 2002

Dotation FTV

1 669,00

69,0 %

1 879,52

68,8 %

12,61 %

Dotation ARTE-France

183,53

7,6 %

209,92

7,7 %

14,38 %

Dotation Radio France

446,92

18,5 %

508,20

18,6 %

13,71 %

Dotation INA

68,22

2,8 %

78,80

2,9 %

15,51 %

Dotation RFI

51,25

2,12 %

56,53

2,07 %

10,30 %

Total Redevance audiovisuelle

2 418,92

 

2 732,97

 

12,98 %

Source : Compte de concours financier - Avances à l'audiovisuel public (cat. 71). Direction du budget.

De même, la part de RFI dans les crédits du ministère des Affaires étrangères alloués à l’audiovisuel extérieur est restée stable, et a même connu une légère hausse sur la période, passant de 42,7 à 43,7 % des subventions du ministère aux opérateurs, et de 45,3 % à 46,6 % si l’on inclut la subvention à Monte Carlo Douliya.

- Crédits du MAE à l’audiovisuel extérieur 2002-2007 (en M€)

 

2002

part / total 2002

2007

part / total 2007

2007 / 2002

TV5 Monde

59,43

36,2 %

63,48

40,8 %

6,8 %

CFI

22,10

13,5 %

18,53

11,9 %

- 16,2 %

RFI

70,08

42,7 %

67,90

43,7 %

- 3,1 %

SOMERA Monte Carlo Doualiya

4,27

2,6 %

4,53

2,9 %

6,1 %

Autres (dont CIIRT Médi1-Sat)

8,10

4,9 %

1,02

0,7 %

- 87,4 %

Total Crédits MAE

163,98

100,0 %

155,46

100,0 %

- 5,2 %

(1) Hors dégel de fin de gestion 2006 de 1,13 M€ (qui constitue toutefois une ressource comptable 2007).

Source : exécution budgétaire chapitre 42-14, article 10 et programme 115 « Audiovisuel extérieur »

En revanche, la création de la chaîne française d’information internationale en 2006 a fortement diminué la part de RFI dans l’audiovisuel extérieur tous financements confondus144. Celle-ci diminue en effet de 3,1 % sur la période alors que le montant total des crédits augmente de 32,7 %, et sa part passe de 42,7 % à 30,2 %. A l’échelle de l’Etat donc, la part de la radio dans l’audiovisuel extérieur diminue au profit de celle de la télévision qui passe ainsi de 49,6 % en 2002, à 67,3 % en 2007145.

- Crédits de l’audiovisuel extérieur tous financements confondus (M€)

 

2002

2003

2004

2005

2006

2007

part / total 2002

part / total 2007

TV5 Monde

59,43

61,40

62,49

62,92

62,11

63,48

36,2 %

28,2 %

CFI

22,10

21,95

22,04

20,75

18,93

18,53

13,5 %

8,2 %

RFI

70,08

70,20

71,42

72,01

70,67

67,90

42,7 %

30,2 %

SOMERA RMC-MO

4,27

4,27

4,87

4,27

4,07

4,53

2,6 %

2,0 %

Autres

8,10

3,74

2,38

3,65

1,58

1,02

4,9 %

0,5 %

France 24

     

15,00

63,00

69,54

0,0 %

30,9 %

Total audiovisuel extérieur

163,98

161,55

163,20

178,60

220,36

225,00

100,0 %

100,0 %

Source : exécution budgétaire programmes 115 (ex chapitre 42-74) et 116.

La diminution des remboursements de TVA

Au titre de ses missions internationales, RFI est placée sous le régime visé à l’article 259 B du code général des impôts pour une partie de son activité. Il en résulte un régime fiscal mixte en matière de TVA.

S’agissant des recettes, la subvention du ministère des Affaires étrangères est exonérée de taxe. A l’inverse, la redevance audiovisuelle est versée à RFI TVA incluse au taux de 2,1 %. Cette TVA est collectée en tenant compte d'une réfaction pour les Dom.

En dépenses, la subvention des Affaires étrangères constitue la contrepartie d’opérations ouvrant droit à déduction de TVA, en vertu de l’article 271 V du même code. Ainsi, RFI bénéficie de remboursements de la TVA déductible facturée à ses fournisseurs. Ces remboursements constituent un complément de ressources publiques lié à la subvention du ministère des Affaires étrangères.

Depuis 2000, les remboursements de crédits de TVA ont constamment diminué, passant de 8,94 M€ en 2000 à 6,08 M€ en 2006, soit une baisse de 2,9 M€ :

- Remboursement de crédits de TVA 2000-2006

2000

8 939 626

2001

7 297 900

2002

7 467 543

2003

7 676 613

2004

6 753 404

2005

6 724 187

2006

6 077 784

Source : compte RFI 445670 "crédit de TVA"

Cette baisse est liée au ralentissement des achats TTC après une période d’accroissement des investissements de 2000 à 2003, et à l’augmentation de la part des recettes taxables de la société, induisant une hausse de la TVA collectée et une baisse des remboursements. La diminution des remboursements de crédits de TVA contribue donc à diminuer les aides indirectes de l’Etat à l’entreprise.

La croissance des dépenses de personnel et de fonctionnement demeure plus dynamique que l’évolution des ressources

Les dépenses de personnel ont augmenté de 31,3 % entre 2000 et 2006 soit une croissance moyenne annuelle de 4,6 %. L’écart avec le taux de croissance des ressources d’exploitation de RFI sur la période (5,2 % soit 0,86 % de croissance moyenne annuelle) atteint 26,1 points. La part des dépenses de personnel dans l’ensemble des charges d’exploitation de RFI augmente régulièrement au cours de la période. Elle est passée de 45,1 % en 2000 à 52,8 % en 2006 ce qui contribue à rigidifier les dépenses de fonctionnement et éclaire les enjeux du débat sur le redéploiement des moyens de RFI (voir infra).

La progression des charges de personnel n’a toutefois pas été linéaire au cours de la période. Ainsi, les charges ont augmenté de 17,9 % entre 2000 et 2002, soit une progression moyenne annuelle de 8,6 %, contre 11,4 % de 2002 à 2006, soit une progression moyenne annuelle de 2,7 %.

En valeur, les dépenses de personnel de RFI ont augmenté de 16,5 M€ et les charges de fonctionnement hors diffusion de 8,3 M€ entre 2000 et 2006, contre 6,5 M€ pour les ressources. La totalité des économies réalisées sur les frais de diffusion (10,7 M€) a ainsi été utilisée pour financer la hausse des dépenses de personnel.

- Evolution des charges de personnel et de leur part dans le total des charges d’exploitation

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2006 / 2000

Charges de personnel

52 811 077

56 543 833

62 258 774

63 016 989

64 266 842

66 540 793

69 347 338

31,3 %

Coûts de diffusion

31 992 866

32 306 611

33 008 078

31 207 314

27 665 829

26 914 456

21 270 162

-33,5 %

Autres charges

32 381 557

35 886 860

37 228 865

37 496 031

37 913 068

37 850 881

40 723 667

25,8 %

Total charges exploitation

117 185 500

124 737 304

132 495 717

131 720 334

129 845 739

131 306 130

131 341 167

12,1 %

 Part personnel / total

45,1 %

45,3 %

47,0 %

47,8 %

49,5 %

50,7 %

52,8 %

 

Source : Comptes sociaux RFI

L’augmentation des charges de personnel de 4,6 % par an en moyenne sur la période s’explique pour les deux tiers par la progression des rémunérations de 3,1 % par an en moyenne, et pour un tiers par la progression des effectifs, de 1,4 % par an en moyenne.

La croissance de la rémunération moyenne des personnels en place explique près des deux tiers de la hausse de la masse salariale

La rémunération moyenne des personnels en place (RMPP) a augmenté de 24,2 % entre 2000 et 2006, ce qui correspond à un taux de croissance moyen de 3,1 % par an. Bien que l’indicateur RMPP ne soit qu’une estimation de l’évolution de l’ensemble des rémunérations146, il permet d’estimer raisonnablement que la croissance du niveau des rémunérations explique environ les deux tiers de l’augmentation des charges de personnel sur la période.

De même que les charges de personnel, l’évolution de la RMPPP connaît deux phases distinctes au cours de la période. De 2000 à 2002, la RMPP a augmenté de 6,3 %, soit 3,1 % de croissance moyenne annuelle. De 2002 à 2006, la progression a été ramenée à 11,3 %, soit 2,8 % de croissance moyenne annuelle.

La RMPP des journalistes est sensiblement plus dynamique que celle des PTA avec des taux de croissance respectifs de 26,53 % et 21,85 % de 2000 à 2006. Ces évolutions différenciées se retrouvent à Radio France ; elles pèsent toutefois plus particulièrement sur les charges de RFI qui emploie une proportion particulièrement importante de journalistes (48 % des effectifs). La valeur du point d’indice des salariés des conventions collectives de l’audiovisuel public et des journalistes n’ayant pas évolué depuis 1997, la croissance de la RMPP est due principalement aux mesures suivantes147 :

- mesures générales s’appliquant à l’ensemble des personnels (journalistes et PTA) : elles n’apparaissent qu’à partir de 2004 avec la prime de 850 euros par agent allouée dans le cadre d’un protocole de sortie de grève et l’accord d’entreprise relatif au déroulement de carrière des personnels techniques et administratifs (2006) ;

- mesures catégorielles s’appliquant à l’une ou l’autre catégorie de personnel : revalorisation des différentes primes versées à chaque catégorie de personnel (exemple de la prime d’expertise ou de sujétion) et mise en place en 2005 pour les journalistes d’un nouvel accord salarial (NIS) avec un effet important sur la RMPP148 ;

- mesures individuelles : certaines sont automatiques sous l’effet du GVT (avec un effet report en année pleine) ou non automatiques dans le cadre des Commissions paritaires (promotions et avancements) ou de changements éventuels de groupes de qualification.

Les déterminants de l’évolution de la RMPP sont très différents selon les catégories professionnelles de RFI :

- les mesures générales expliquent 22,1 % de l’augmentation de la RMPP des journalistes mais seulement 9,3 % de celle des PTA ;

- les mesures catégorielles expliquent, à l’inverse, 22 % de l’augmentation de la RMPP des PTA mais seulement 11,2 % de celle des journalistes. Pour l’année 2000 néanmoins, les mesures catégorielles liées aux accords sur la réduction des disparités de rémunération dans l’audiovisuel public expliquent la moitié de la hausse de la RMPP totale ;

- les mesures individuelles permettent d’expliquer plus de la moitié de l’augmentation de la RMPP des journalistes (52,4 %) comme des PTA (53,7 %). Le poids des mesures automatiques liées à l’ancienneté est plus élevé pour les PTA (28,7 % des mesures individuelles) que pour les journalistes (22,4 %). Il ne représente toutefois, pour les journalistes comme pour les PTA, qu’une faible proportion (entre 11 et 15 %) de l’augmentation de la RMPP. L’impact de la convention collective de la communication et de la production audiovisuelles sur les salaires (voire annexe 1) est moins lié aux mesures automatiques qu’elle prévoit qu’au cadre de négociation paritaire mis en place et aux nombreux accords d’entreprises qu’il induit (102 à RFI).

La RMPP de l’ensemble des personnels de RFI a évolué sur la période 2000-2006 à un rythme comparable à celle de Radio France (voire annexe 1). La rémunération des personnels de RFI, comme de Radio France, a augmenté beaucoup plus rapidement que l’inflation (12,3 %) au cours de la période 2000-2006.

- Evolution de la RMPP de RFI

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

 

2000-2006

PTA

                 

effet report N-1

0,76

0,60

0,54

0,88

0,87

-0,5

-0,69

 

/

mesures générales

dont mesures pérennes

/

/

/

/

/

/

/

/

1,08

/

1,03

/

0,64

0,64

 

2,03

mesures catégorielles

dont mesures pérennes

2,74

/

0,52

0,42

0,06

0,07

0,27

0,27

-0,01

-0,01

-0,09

-0,09

0,11

0,18

 

4,80

mesures individuelles

dont mesures automatiques

1,40

0,77

1,39

0,79

1,78

0,79

1,73

0,83

1,19

0,82

1,55

0,71

1,9

0,74

 

11,74

RMPP PTA

4,54

2,51

2,38

2,89

3,13

1,99

1,97

 

21,85

Journalistes

                 

effet report N-1

0,55

0,46

0,6

0,54

0,3

-0,11

-0,64

 

/

mesures générales

dont mesures pérennes

/

/

/

/

/

/

/

/

0,92

/

1,94

0,91

/

/

 

5,84

mesures catégorielles

dont mesures pérennes

2,63

0,08

2,04

1,99

0,32

0,04

0,53

-0,01

-0,3

0,01

-0,05

-0,05

1,32

1,32

 

2,98

mesures individuelles

dont mesures automatiques

1,66

0,81

1,62

0,87

2,43

0,83

1,98

0,79

1,56

0,74

1,95

0,73

2,30

0,68

 

13,94

RMPP Journalistes

4,84

4,12

3,35

3,06

2,46

3,73

2,99

 

26,53

                   

TOTAL RMPP

4,69

3,31

2,86

2,97

2,79

2,86

2,49

 

24,19

Indice des prix INSEE

1,60

1,60

1,80

1,60

1,70

1,70

1,70

 

12,30

Source : Données CIASP (2000-2006)

La hausse des effectifs explique environ un tiers de l’augmentation de la masse salariale

L’effectif total de RFI a augmenté de 104,5 ETP entre 2000 et 2007 soit une croissance de 8,7 % et un taux de croissance moyen annuel de 1,7 %. Si l’on inclut les postes créés en 2000, le nombre d’ETP créés au cours de la période s’élève à 159,5. La hausse des effectifs sur la période 2000-2006 explique environ un tiers de l’augmentation de la masse salariale. Là encore, la progression des effectifs est contrastée au cours de la période. En hausse de 7,9 % de 2000 à 2002 (soit 3,9 % de croissance moyenne annuelle), les effectifs ont augmenté de 3,9 % de 2002 à 2006 (soit 0,9 % par an en moyenne).

Il convient cependant de souligner la part prise par la réduction du temps de travail dans la hausse des effectifs au début de la période. L’accord sur les 35h conclu à RFI le 2 février 2000 a en effet prévu la création de 61 ETP, dont 31 journalistes et 30 PTA. Les recrutements, débutés à compter du 1er avril 2000, se sont étalés sur les deux exercices suivants. Les recrutements liés aux 35h n’expliquent toutefois qu’une partie de la hausse des effectifs au cours des trois premiers exercices. De 1999149 à 2002, les effectifs sont passés de 976 à 1112 ETP, soit une hausse de 136 ETP. L’accord sur la réduction du temps de travail n’explique donc à la hausse des effectifs qu’à hauteur de 45 % de 1999 à 2002.

La croissance des effectifs sur la période 2000-2007 est due pour environ les deux tiers à l’augmentation du nombre de journalistes (+ 70,94 ETP) et pour plus d’un quart à celle des salariés sous protocole V150 et des stagiaires rémunérés (+ 29,65 ETP au total). Les effectifs des PTA sont, pour leur part, restés relativement stables (+ 3,92 ETP) au cours de la période. La structure par métiers des effectifs a évolué avec une diminution de la part relative des agents occupant des fonctions administratives dans des proportions comparables à la hausse de la proportion de journalistes au sein de RFI (voire annexe 1).

- Evolution des effectifs de RFI par métiers et par types de contrats

 

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Journalistes

                 

CDI

314,10

337,70

339,49

340,78

339,65

342,53

342,27

347,93

394,93

CDD longs

10,27

11,30

16,20

14,37

16,39

16,37

20,18

25,47

26,33

CDD courts

22,40

20,05

18,97

27,98

27,56

24,40

26,11

29,06

19,03

Pigistes

103,57

104,55

115,37

125,56

122,44

114,50

116,21

112,09

104,25

Total

450,33

473,60

490,03

508,69

506,02

497,80

504,76

514,55

544,54

PTA

                 

CDI

348,60

381,09

390,20

393,39

393,86

386,85

384,61

383,78

410,76

CDD longs

18,60

16,02

12,94

18,31

11,37

11,39

18,27

21,59

13,42

CDD courts

54,58

57,78

63,37

66,29

74,77

75,69

76,33

73,37

52,18

Cachetiers

58,63

57,33

56,85

58,88

54,42

55,53

55,13

50,74

39,78

Total

480,42

512,22

523,36

536,87

534,42

529,46

534,34

529,48

516,14

Autres

                 

protocole V

39,28

39,45

39,06

43,37

50,68

54,27

54,50

57,48

55,18

fonctionnaires

2,88

2,76

3,75

4,50

3,43

1,50

1,00

1,00

1,00

stagiaires

2,85

2,65

2,12

18,41

16,31

18,16

18,76

17,54

18,33

Total

45,02

44,86

44,93

66,28

70,42

73,93

74,26

76,02

74,51

                   

TOTAL

975,76

1 030,69

1 058,32

1 111,84

1 110,86

1 101,18

1 113,36

1 120,05

1 135,19

Source : Données RFI retraitées

La répartition des effectifs par type de contrat témoigne d’une augmentation suivie d’une baisse du taux d’emplois précaires (CDD courts/longs, pigistes et cachetiers). Le protocole d’accord signé le 11 avril 2006 entre la direction de RFI et les organisations syndicales, suite à plusieurs préavis de grève, prévoit un plan d’intégration 2006-2008 qui bénéficiera à 101 salariés. La titularisation de ces effectifs aura un triple effet à la hausse sur la masse salariale avec le reclassement des personnes concernées à des niveaux de rémunération plus élevés, le passage d’une partie d’entre eux de temps partiel à temps plein et l’augmentation concomitante des CDD de remplacement en raison de droits à congés et récupération plus élevés pour les titulaires de CDI. L’augmentation sensible (+29,65 ETP) des emplois rattachés au protocole V de la convention est justifiée par RFI par la nécessité de se doter d’une expertise technique (système d’information, contrôle de gestion, encadrement) à des niveaux de qualification et de rémunération non prévus par la convention collective.

L’effet inflationniste des mécanismes d’intégration et de remplacement a été confirmé par la direction du budget : « Le recours aux CDD pour compenser les congés des CDI semble particulièrement contestable et constitue immanquablement un cercle vicieux (…). Alors que RFI s’était engagé lors de l’adoption du budget 2007 à ne pas remplacer certains départ à hauteur de 10 ETPT, la trajectoire en emplois pour 2007 ressort à +20 ETPT par rapport à 2006, soit un écart de 30 ETPT par rapport aux prévisions initiales. Cette situation explique le dérapage de + 1,8 M€ (+ 3,2 %) sur les dépenses de personnel permanent, non compensé par les économies sur personnel variable (- 0,9 M€ soit - 9 %) ».

- Taux de précarité à RFI

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Journalistes

28,7 %

30,7 %

33,0 %

32,9 %

31,2 %

32,2 %

32,4 %

27,5 %

PTA

25,6 %

25,4 %

26,7 %

26,3 %

26,9 %

28,0 %

27,5 %

20,4 %

Source : Cour des comptes

La progression des autres charges de fonctionnement courant

A l’exception des dépenses de diffusion, les dépenses de fonctionnement courant ont suivi une progression analogue à celle des dépenses de personnel. Entre 2000 et 2006, elles ont ainsi progressé de 25,8 %.

En leur sein, on retiendra notamment l’évolution des dépenses de loyer et charges locatives, passées de 5,59 M€ à 6,58 M€ entre 2000 et 2006, soit une hausse de 17,7 %. Celles-ci recouvrent les loyers et charges payés par RFI à Radio France pour les locaux occupés au sein de la Maison de la Radio, à un bailleur privé pour les locaux du bâtiment « Tripode » situé en face et occupés par certains agents administratifs et techniques, et les loyers des correspondants à l’étranger. Cette progression globale recouvre en réalité une forte disparité entre les deux principaux locaux de RFI. En effet, alors que les charges afférentes à la Maison de Radio France ont crû de 4,2 %, celles du tripode ont augmenté de 45,6 %, faisant passer la part de ce dernier dans le total de 32,6 % à 40,6 %. Ces évolutions contrastées recouvrent d’une part une hausse des surfaces louées au Tripode et le transfert

d’une partie des charges de restauration dans le loyer du Tripode en 2003, et d’autre part la diminution des surfaces louées au sein de la Maison de la Radio dans le cadre des travaux de réhabilitation et la diminution des charges locatives facturées par Radio France à partir de 2005.

On relève, à titre incident, que le bail entre RFI et Radio France pour l’occupation de la Maison de la Radio, qui a expiré le 31 décembre 2002, n’a jamais été formellement renouvelé. Au terme d’un projet communiqué à la Cour, le nouveau bail serait conclu pour une durée de trois, six ou neuf années entières et consécutives commençant à courir le 1er janvier 2003, soit jusqu’aux 31 décembre 2005, 2008 et 2011. En l’absence de signature du projet, on peut toutefois considérer que RFI est libre de tout engagement à la Maison de Radio France et pourrait opter pour une éventuelle relocalisation. Tel n’est pas le cas en revanche de la location du Tripode, qui a fait l’objet de trois baux séparés. Outre que la multiplicité des baux n’a sans doute pas favorisé la maîtrise des coûts de location, les termes des différents baux en cours varient : octobre 2012 pour le rez-de-chaussée, mars 2008 pour le 4e étage et février 2014 pour le 5e étage.

Les économies de frais de diffusion ont limité mais non enrayé l’effet de ciseau entre les recettes et les charges de RFI

Au cours de la période, RFI a enregistré une diminution de plus d’un tiers de ses coûts de diffusion, qui représentaient en 2000 plus de 27 % des charges d’exploitation. Cette baisse n’a toutefois pas suffi à compenser la progression des autres charges, notamment de personnel. Le total des charges d’exploitation de RFI progresse ainsi de 12,1 % au cours de la période.

Combinée à la faible progression de ses ressources courantes, la hausse des charges est à l’origine d’un déficit d’exploitation persistant au cours de la période.

La baisse des coûts de diffusion et la renégociation du contrat TDF

Les coûts de diffusion ont fait l’objet de deux diminutions, en 2004 et en 2006151. La première a été réalisée par une baisse du volume d’heures fréquences152 payées à l’opérateur TDF, comparable à ce qui avait été réalisé une première fois en 1998153. La seconde procède d’une démarche nouvelle, engagée par l’entreprise au cours de l’exercice 2005 et qui a aboutit à la renégociation du contrat TDF.

Les termes du contrat unissant RFI à la société TDF depuis le 19 avril 1991 ont été critiqués à maintes reprises, notamment par le dernier rapport de la Cour. Conclu dans le souci de financer le renouvellement des émetteurs de TDF qui jouissait alors du statut d’entreprise publique et d’un monopole sur la diffusion hertzienne des programmes, ce contrat comportait en effet plusieurs clauses particulièrement défavorables à RFI, notamment sa durée (20 ans), ses tarifs, et l’octroi d’un prêt sans intérêt de 230MF par RFI à TDF. Le contrat était par ailleurs assorti de conditions de révision du nombre d’heures fréquences achetées et de sortie du contrat particulièrement lourdes, et dont le terme excédait même la durée du contrat lui-même154.

La libéralisation du marché des télécommunications155 et la suppression programmée du monopole de TDF156 ont donné lieu, dès 2003, à l’examen des possibilités d’évoquer le caractère léonin de certaines clauses et de procéder à une renégociation du contrat. Dans une note du 10 décembre 2003 (rédigée dans le cadre de l’audit de l’Inspection générale sur RFI), la direction des affaires juridiques du ministère de l’économie et des finances estimait toutefois « il apparaît que le contexte du contrat de radiodiffusion conclu entre RFI et TDF ne permet pas d’envisager une action fondée sur l’un de ces instruments juridiques (…). Dès lors, seule la voie consensuelle est envisageable pour chercher un rééquilibrage du contrat ».

C’est à l’initiative de l’entreprise qui fut relancée la réflexion en 2005, à la suite de plusieurs décisions de justice ayant reconnu l’abus de position dominante de la société TDF157. Une première étude juridique fut commandée par le secrétariat général de RFI à un cabinet privé afin d’examiner les possibilité de renégociation ou de rupture du contrat sur le fondement des dispositions contractuelles ou des règles concurrentielles. L’étude, remise le 29 juillet 2005, privilégiait également la piste de la renégociation : « La question reste ouverte de savoir si [la loi de 2003] a entraîné un bouleversement dans l’équilibre du contrat ». En revanche, aux termes des décisions de justice récentes, « il semble bien exister une possibilité de contraindre TDF à revenir sur les droits qu’elle tire du contrat de 1991 ».

En octobre 2005, RFI a réalisé une étude interne sur les scénarios de rupture ou de renégociation du contrat envisageables, et leur incidence financière. Dans les deux hypothèses, l’économie nette dégagées était d’environ 31 M€ sur la période 2006-2011, tenant compte d’un dédit de 33 M€ en valeur 1989 (soit 44,6 M€ en valeur 2006), de la perte en cas de rupture de la part du prêt de 27,4 M€ octroyé par RFI à la société TDF restant à rembourser (soit 16,5 M€) et du montant des économies, évaluée entre 79 M€ et 95,1 M€ selon que le contrat était dénoncé ou rompu. Dans ces deux hypothèses, était également prévu la souscription d’un emprunt par RFI pour financer le remboursement du dédit au cours du premier exercice suivant la renégociation du contrat, auquel une charge financière de 3 M€ était associée.

Au terme de nombreux échanges entre les deux entreprises158, c’est finalement l’option de la renégociation du contrat qui a été choisie. Le contrat TDF a été modifié par avenant le 5 juillet 2006 selon les modalités suivantes :

- le terme du contrat a été ramené à la date unique de 2011, tant pour l’utilisation des ondes, l’application des pénalités que pour le remboursement de l’emprunt de TDF à RFI ;

- le nombre d’heures fréquence (166 h) a été ramené à 92h, avec la possibilité de reventiler les sources d'émission à partir de 2010 en maintenant constant le chiffre d'affaire (frais diffusion + dédit compris) ;

- le prix des heures fréquences a été réduit à 220€/H fréquence pour tous les émetteurs (soit une baisse de 18,5 %) et l’évolution des prix fixée à 2 % par an - la modification du volume et du prix permettant de ramener les frais de diffusion à 46,6 M€ sur la période, soit une économie de 80 M€ par rapport au contrat initial ;

- le dédit versé à la société TDF en contrepartie du contrat a été réduit à 34,7 M€, et son versement lissé sur la période de manière dégressive. Ce lissage a permis l’économie des charges financières liées à l’emprunt initialement envisagé pour couvrir le besoin de trésorerie nécessaire au paiement du dédit au cours d’un seul exercice ;

- en contrepartie, RFI a consenti à TDF un abandon partiel de sa créance, à hauteur de 10,9 M€ sur les 16,5 M€ restant à rembourser. Le remboursement de la différence (5,6 M€) a été rééchelonné sur la période 2006 à 2011.

- Scénarios d’économies en cas de rupture ou renégociation du contrat TDF

   

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Total

contrat initial

Frais diffusion

20 077 000

20 478 540

20 888 111

21 305 873

21 731 990

22 166 630

126 648 145

Total charges

20 077 000

20 478 540

20 888 111

21 305 873

21 731 990

22 166 630

126 648 145

contrat renégocié

Frais diffusion (1)

7 550 000

7 701 000

7 855 020

8 012 120

8 172 363

8 335 810

47 626 313

Dédit

44 575 000

 

 

 

 

 

44 575 000

Intérêts emprunt RFI

1 283 518

943 570

586 230

210 608

 

 

3 023 926

Total charges

53 408 518

8 644 570

8 441 250

8 222 728

8 172 363

8 335 810

95 225 239

Différence

33 331 518

-11 833 970

-12 446 861

-13 083 145

-13 559 628

-13 830 820

-31 422 905

contrat dénoncé

Frais diffusion

5 000 000

5 100 000

5 202 000

5 306 040

5 412 161

5 520 404

31 540 605

Dédit

44 575 000

 

 

 

 

 

44 575 000

Perte emprunt

16 464 494

 

 

 

 

 

16 464 494

Intérêts emprunt RFI

1 283 518

943 570

586 230

210 608

 

 

3 023 926

Total charges

67 323 012

6 043 570

5 788 230

5 516 648

5 412 161

5 520 404

95 604 025

Différence

47 246 012

-14 434 970

-15 099 881

-15 789 225

-16 319 830

-16 646 226

-31 044 120

accord obtenu

Frais diffusion

7 387 600

7 535 352

7 686 059

7 839 780

7 996 576

8 156 507

46 601 874

Dédit (2)

7 387 600

6 781 817

6 148 847

5 487 846

4 797 945

4 078 254

34 682 309

Perte emprunt

10 866 566

 

 

 

 

 

 

Total charges

25 641 766

14 317 169

13 834 906

13 327 626

12 794 521

12 234 761

92 150 750

Différence

5 564 766

-6 161 371

-7 053 205

-7 978 247

-8 937 469

-9 931 869

-34 497 395

Source : Notes de RFI du 20 octobre2005 et du 2 février 2006 et Cour des comptes

(1) Application d’un taux d'évolution théorique de 2 % / an d'où l'écart avec la note RFI qui ne l’applique pas

(2) Dédit = ramené à 25,8 M€ sur la période 2006-2009 mais porté à 34,7 M€ sur la période 2006-2011 , d’où une divergence de chiffre avec la note de présentation de RFI.

L’accord finalement obtenu par l’entreprise avec TDF a fait l’objet d’une appréciation contrastée de la part de ses administrations de tutelles. Les économies dégagées ont été naturellement unanimement saluées, et jugées suffisamment conséquentes pour être ponctionnées à hauteur de 50 % dès l’exercice 2006, la subvention du ministère des Affaires étrangère passant de 72 M€ à 69,5 M€ après application de la réserve légale (dont RFI avait jusque là été relativement protégée). Cette opération a fait l’objet d’une contestation vigoureuse de la direction de RFI, qui l’a jugé à la fois peu responsabilisante s’agissant d’une négociation intégralement menée par l’entreprise, et peu conforme à son statut d’entreprise publique autonome.

L’abandon de créance consenti par RFI a en revanche été critiqué, notamment par l’Agence des participations de l’Etat. Dans sa réponse à la Cour, l’APE a ainsi indiqué : « Compte tenu du changement intervenu (fin du monopole de TDF), nous estimions qu’il était envisageable de remettre en cause la validité du contrat au motif qu'il était manifestement déséquilibré au profit de l'une des parties et que les conditions dans lesquelles il avait été conclu avaient été substantiellement modifiées ». De fait, sur ce point, l’accord obtenu par RFI est en deçà des scénarios envisagés initialement. Toutefois, cette perte est compensée par la diminution du dédit versé à TDF, et présente l’avantage par rapport à l’hypothèse initiale de limiter les effets de la renégociation sur la trésorerie à court terme. L’entreprise a par ailleurs vraisemblablement jugé ce choix moins risqué que l’action en justice qu’aurait impliquée une rupture, et potentiellement moins coûteuse eu égard aux délais de procédure.

Au total, les coûts de diffusion de RFI sont passés de 32 M€ en 2000 à 21,3 M€ en 2003, en baisse de 33,5 %. Leur part dans le total des charges d’exploitation est quant à elle passée de 27,3 % à 16,2 %.

L’effet de ciseau entre les ressources et les charges de RFI et l’apparition de résultats déficitaires récurrents

La tension entre la faible progression des ressources de RFI et la forte croissance de ses charges de personnel et charges de fonctionnement courant hors diffusion est à l’origine d’un déficit du résultat d’exploitation à partir de 2001. Compte tenu des résultats financiers et exceptionnels, le résultat net a été déficitaire au cours de quatre des sept exercices de la période.

-  Résultats de RFI 2000-2006

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Résultat d'exploitation

6 763 686

-2 251 464

-6 963 740

-2 752 231

-626 162

-449 339

-48 530

Résultat financier

-1 111 684

-168 280

-1 739 427

843 658

229 128

343 008

228 291

Résultat courant avant impôt

4 744 747

-3 185 480

-8 987 029

-3 691 625

-608 321

-434 416

-635 835

Résultat exceptionnel

-68 181

963 654

1 054 196

499 368

457 828

540 839

-10 898 408

Résultat de l'exercice

5 553 331

-1 486 580

-7 678 971

-1 439 206

30 794

76 423

-11 534 243

L’appréciation du résultat comptable de RFI au cours de la période doit cependant être nuancée à double titre.

En premier lieu, les résultats des exercices 2000 à 2002 sont particulièrement atypiques. L’exercice 2000 se solde par un excédent de 5,5 M€ (alors que l’exercice 1999 s’était clos sur un bénéfice de 49 014 €). En 2001 et 2002 à l’inverse, les exercices se soldent par un bénéfice de - 1,5 M€ et - 7,7 M€, avant de revenir à - 1,4 M€ en 2003 et à l’équilibre en 2004. En pratique, les résultats de ces trois exercices sont déformés par le mécanisme budgétaire spécifique retenu pour financer les coûts supplémentaires liés à l’application des 35 h, à l’accord sur la réduction des disparités salariales et au renouvellement d’un émetteur de Chypre.

Au cours de cette période, l’entreprise a en effet bénéficié, à trois reprises, d’un financement complémentaire en loi de finances rectificative, de 6,5 M€ en 2000, 1,5 M€ en 2001 et 0,41 M€ en 2002159. Dans les trois cas, les abondements réalisés en fin d’année étaient destinés à être en grande partie ou en totalité reportés sur l’année suivante. Ainsi, sur les 6,5 M€ versés en 2000, 4,99 M€ étaient destinés à être reportés en 2001 (dont 1,8 M€ n’ont pas été consommés et été eux-mêmes reportés sur 2002). Selon le même mécanisme, le second abondement inscrit en 2001 était destiné à être consommé en 2002 et l’abondement de 0,41 M€ accordé en 2002 destiné à être consommé en 2003. Ces crédits ont donc fait l’objet de reports en comptabilité budgétaire, venant abonder les ressources des exercices au cours desquels ils devaient être consommés.

En comptabilité générale, ces mouvements ont été enregistrés au cours de l’exercice au cours duquel ils ont été versés, c’est-à-dire 2000 pour le premier, et 2002 pour les deux autres (les crédits de la LFR 2001 ayant été versés avec retard). Aucune écriture comptable n’a cependant été passée afin de neutraliser la part des crédits destinés à couvrir des charges futures (voir infra). Par suite, le mode de comptabilisation des crédits votés en loi de finances rectificative a conduit à gonfler fortement le résultat comptable de RFI en 2000 et à le rendre déficitaire en 2001 et 2002. Une opération du même type a été réalisée en 2003 mais dans des proportions bien inférieure (0,41 M€).

Si on neutralise ces mouvements budgétaires, le résultat net de RFI est ramené à 0,59 M€ en 2000, 0,13 M€ en 2001 et - 4,7 en 2002. Ce dernier montant comprend toutefois des régularisations de charges à payer pour congés et de provisions pour risques, pour un montant total de 4,42 M€.

En second lieu, le déficit de l’exercice 2006 diffère des précédents, en ce qu’il est presque intégralement imputable à la perte exceptionnelle enregistrée en contrepartie de l’abandon de créance de TDF (voir supra).

- Résultats de RFI 2000-2006 hors mouvements budgétaires et exceptionnels

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Résultat net

5 553 331

-1 486 580

-7 678 971

-1 439 206

30 794

76 423

-11 534 243

Report vers 2001 (LFR 2000)

-4 985 083

4 985 083

         

Report vers 2002 (non consommés)

 

-1 843 000

1 843 000

       

Report vers 2002 (LFR 2001)

 

-1 524 000

1 524 000

       

Report vers 2003 (LFR 2002)

   

-410 000

410 000

     

Charge exceptionnelle

           

11 092 368

Résultat net retraité

568 248

131 503

-4 721 971

-1 029 206

30 794

76 423

-441 875

               

Résultat d’exploitation

6 763 686

-2 251 464

-6 963 740

-2 752 231

-626 162

-449 339

-48 530

Résultat d’exploitation retraité

1 778 603

-633 381

-4 006 740

-2 342 231

-626 162

-449 339

-48 530

Ainsi retraité, le résultat net de RFI au cours de la période varie entre - 1 M€ et 0,5 M€. Il n’en demeure pas moins déficitaire à trois reprises. Le résultat d’exploitation demeure quant à lui continûment déficitaire à partir de 2001, sous l’effet de ciseau entre la progression des charges et celle des ressources.

Ce phénomène, qui apparaît à partir de 2001, connaît une amplification en 2002 et demeure en 2003. La diminution des coûts de diffusion a permis d’en limiter l’ampleur à partir de 2004, mais sans parvenir à rétablir l’équilibre de l’exploitation. Ainsi, depuis 2001, RFI présente un déficit d’exploitation dont le montant à varié de - 3 M€ en 2001, à - 7,2 M€ en 2002, - 4,5 M€ en 2003, - 0,8 M€ en 2004, - 1,1 M€ en 2005 et - 1,7 M€ en 2006.

Au-delà des nuances apportées à l’appréciation de la situation financière de RFI au cours de la période, ces éléments soulèvent une question de principe sur l’application du principe de comptabilisation des produits et des charges en droits constatés et sur l’image des résultats de l’entreprise donnée par les comptes 2000 à 2003.

En effet, les compléments de redevance et de subvention du ministère des affaires étrangères accordés en loi de finances rectificative (6,5 M€ en 2000, 1,5 M€ en 2001 et 0,41 M€ en 2002) ont été enregistrés comptablement au cours de l’exercice où ils ont été versés alors même qu’ils étaient destinés à financer pour l’essentiel les dépenses des exercices suivants et ont été reportés partiellement en 2001 (à hauteur de 4,9 M€) et en totalité en 2002 et 2003.

Les annexes des comptes 2000 et 2001 tendent à accréditer l’idée que la méthode retenue a été validée par l’Etat lors de l’adoption des budgets et des comptes successifs. L’annexe des comptes 2000 indique ainsi que « la redevance a été comptabilisée selon les principes arrêtés en accord avec les tutelles » ; celle des comptes 2001 précise que « le produit de la redevance est déterminé par les encaissements reçus du service de la redevance ». Les procès verbaux des conseils d’administration aux cours desquels ont été approuvés les comptes concernés confirment que le principe de la comptabilité de caisse du produit de la redevance a été retenu en accord avec les administrations de tutelle.

Les commissaires aux comptes se sont rangés à cet état de fait. Ainsi, au cours du conseil du 30 juin 2003 consacré à l’approbation des comptes 2002, le commissaire au comptes a indiqué : « Il y a effectivement une perte de 7,6 millions d’euros [et] l’explication, par rapport à l’information du résultat budgétaire et le résultat comptable lui-même, provient d’éléments qui ressortissent de référentiels différents en matière budgétaire – ils sont ce qu’ils sont – et en matière comptable qui sont également ce qu’ils sont mais, bien évidemment, conformes aux règles de la comptabilité pour présenter les comptes qui sont soumis au conseil d’administration. Ces écarts existent ; ils ont été précisés pour les plus importants et je n’y reviendrai pas. Je voudrais simplement souligner qu’il s’agit d’écarts techniques qui n’appellent pas d’autres commentaires particuliers de la part des commissaires aux comptes ».

Or, les comptes de la SA RFI doivent être tenus selon les règles du plan comptable général (PCG), c’est-à-dire selon les principes de la comptabilité en droits constatés. Aux termes du PCG, sont rattachés à l’exercice les produits acquis à cet exercice, auxquels s’ajoutent éventuellement des produits acquis à des exercices précédents qui n’auraient pas fait l’objet d’un enregistrement comptable (article 313-1). Les produits comprennent les sommes à recevoir en contrepartie de la fourniture par l’entreprise de biens, travaux ou service (article 222-1). Lorsqu’une créance comptabilisée concerne un bien non livré ou une prestation non encore effectuée, le produit comptabilisé d’avance est éliminé des produits d’exploitation par l’intermédiaire d’un compte de régularisation (article 444-48).

Les compléments de redevance et de subvention du ministère des affaires étrangères accordés à RFI en 2000 et 2001 auraient donc dû être neutralisés sur le plan comptable à concurrence des montants destinés à couvrir les charges des exercices suivants par l’inscription, au passif du bilan, de produits constatés d’avance (compte 487), à l’instar de ce qui a été observé dans d’autres sociétés audiovisuelles publiques, notamment TV5.

Eu égard à l’incidence des méthodes de comptabilisation retenues sur le résultat des exercices 2000 à 2003, il est à tout le moins regrettable qu’aucune mention n’ait été faite de l’interprétation qu’il convenait de faire des résultats des exercices concernés dans les annexes aux comptes, alors même que ces éléments ont été mentionnés en commentaire général et assortis d’un tableau de passage du résultat budgétaire au résultat comptable dans le compte-rendu de gestion des exercices 2000, 2001 et 2002.

LE BILAN DE RFI : UNE RECAPITALISATION NÉCESSAIRE

La situation financière de RFI combine plusieurs caractéristiques. Le fort déséquilibre de son haut de bilan se traduit par un fond de roulement négatif, qui s’est fortement dégradé au cours de la période. Cette situation a été compensée par le cycle d’exploitation, qui permet de dégager un niveau de trésorerie confortable. Pour autant, le passage des capitaux propres à un niveau négatif en 2006 rend nécessaire leur reconstitution, conformément à la loi.

- Bilan de RFI 2000-2006 (en euros)

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Immos incorporelles

948 937

827 470

1 946 595

1 616 269

2 085 650

2 988 832

3 594 191

Immos corporelles

8 823 922

10 634 960

9 465 204

10 928 843

9 513 844

7 879 019

8 925 821

Immos financières

22 010 480

20 928 698

19 913 960

19 667 478

18 647 819

17 698 910

6 524 916

Actif immobilisé

31 783 339

32 391 128

31 325 759

32 212 590

30 247 313

28 566 761

19 044 928

Stocks

121 774

130 112

125 834

174 008

171 115

170 128

143 140

Créances d'exploitation

17 392 261

11 361 081

9 413 990

7 283 267

10 329 851

5 514 761

8 725 496

Créances diverses

 

 

 

3 229 741

2 695 868

3 447 265

4 563 286

VMP

8 093 988

14 752 264

14 805 136

8 085 946

12 160 938

20 167 989

17 991 899

Disponibilités

150 315

77 089

1 312 617

1 132 359

60 185

272 315

329 935

Charges const. d’avance

1 753 071

1 403 883

1 353 966

1 346 254

1 923 583

1 964 935

1 900 020

Actif circulant

27 511 409

27 724 429

27 011 543

21 251 574

27 341 540

31 537 393

33 653 776

Ecarts de conversion

7 047

17 374

10 287

2 628

2 546

6 576

923

Total Actif

59 301 795

60 132 931

58 347 589

53 466 791

57 591 399

60 110 730

52 699 627

Capital

1 524 490

1 560 000

1 560 000

1 560 000

1 560 000

1 560 000

1 560 000

Fonds de dotation

16 454 617

16 503 631

16 503 631

0

0

0

0

Réserves

882 585

995 713

995 713

12 043 625

12 043 625

12 043 624

12 043 625

Report à nouveau

49 014

5 404 690

3 918 109

-3 760 862

-5 200 068

-5 169 274

-9 108 615

Résultat de l'exercice

5 553 328

-1 486 581

-7 678 971

-1 439 206

30 794

76 423

-11 534 244

Subvention d'équipement

1 525 335

1 525 335

1 139 725

644 981

212 981

105 792

0

Capitaux propres

25 989 369

24 502 788

16 438 207

9 048 538

8 647 332

8 616 565

-7 039 234

Provisions pour risques

3 611 758

4 073 993

4 153 647

3 592 209

4 317 410

4 375 943

9 481 680

dettes financières

1 101 286

2 681 660

2 340 915

8 071 142

7 282 589

7 877 727

7 454 528

dettes d'exploitation

25 451 429

27 226 947

33 700 617

30 657 859

30 927 658

31 988 161

33 676 045

dettes diverses

3 042 825

1 647 542

1 687 864

2 084 710

6 415 367

6 964 891

7 989 398

produits const. d'avance

105 127

0

26 337

0

89

274 273

1 132 884

Dettes

29 700 667

31 556 149

37 755 733

40 813 711

44 625 703

47 105 052

50 252 855

Ecarts de conversion

0

0

0

12 333

953

3 170

326

Total Passif

59 301 794

60 132 930

58 347 587

53 466 791

57 591 399

60 100 730

52 695 627

               

Fonds de roulement

-2 182 213

-3 814 347

-10 733 905

-19 571 843

-17 282 571

-15 574 254

-16 602 482

Besoin fonds roulement

-11 032 023

-17 409 326

-25 868 564

-27 511 273

-29 601 911

-35 276 618

-33 685 241

Trésorerie

8 849 810

13 594 979

15 134 659

7 939 431

12 319 340

19 702 364

17 082 759

Source : Comptes RFI

Le fonds de roulement structurellement négatif de RFI

Tout au long de la période, RFI présente un fonds de roulement négatif qui pase de -2,2 M€ en 2000 à -19,6 en 2003 avant de revenir en 2006 à -16,6 M€. Plusieurs phénomènes concourent à cette situation, tant au sein de l’actif immobilisé que des capitaux permanents de l’entreprise.

Le premier facteur, historique, concerne l’octroi par RFI du prêt à l’entreprise TDF dans le cadre du contrat de diffusion en ondes courtes conclu en 1993. Comme l’avait déjà noté la Cour dans son précédent rapport, ce montage financier a contribué à déséquilibrer durablement le haut de bilan de RFI, en gonflant l’actif de l’entreprise. De fait, en 2000, l’emprunt TDF représentait 21,8 M€, soit plus de 40 % de l’actif immobilisé brut de RFI. Ce phénomène a cependant joué un rôle décroissant au cours de la période, à mesure des remboursements effectués par TDF. En 2006 surtout, dans le cadre de la renégociation du contrat, l’abandon d’une partie de la créance détenue sur TDF a permis de limiter le montant du prêt à 5,2 M€ et sa part dans l’actif de l’entreprise à 9 %.

Au cours de la période, c’est donc moins l’héritage des contrats de l’entreprise que le dynamisme des investissements, notamment en matière de logiciels et d’installations techniques, qui ont fait progresser l’actif immobilisé et ont pesé sur le fonds de roulement. Les immobilisations non financières passent ainsi de 31,8 M€ en 2000 à 50,4 M€ en 2006, soit une hausse de 58,5 % qui pèse fortement sur l’actif immobilisé total de RFI :

- Evolution des immobilisations brutes de RFI 2000-2006

M€

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2006 / 2000

Logiciels (20)

3,04

3,41

5,56

5,91

7,78

8,80

11,20

268,8 %

Matériel technique (215)

13,17

13,81

16,36

18,21

19,73

20,91

19,80

50,4 %

Mobilier, Informatique (218)

14,47

13,74

14,01

14,85

16,57

17,50

18,48

27,7 %

Immos en cours (23)

1,13

2,95

0,71

2,46

0,97

1,17

0,95

-16,5 %

Total immos non financières

31,81

33,90

36,64

41,42

45,04

48,37

50,42

58,5 %

Titres et créances (26-27)

22,09

21,05

19,97

20,05

19,01

18,01

6,79

-69,3 %

Dont prêt TDF

21,80

20,73

19,67

18,60

17,53

16,46

5,24

-76 %

Total Actif immobilisé brut

53,91

54,95

56,61

61,47

64,05

66,38

57,21

6,1 %

En troisième lieu, et à titre principal, la dégradation du fonds de roulement s’explique par la diminution continue des capitaux propres de l’entreprise, qui sont passé de 26 M€ à -7 M€ en 2006. Leur diminution s’explique en premier lieu par le cumul de résultats déficitaires de quatre des sept exercices de la période, notamment le déficit de 7,7 M€ constaté en 2002. En 2006, l’abandon de créance consenti à TDF dans le cadre de la renégociation du contrat se traduit par l’enregistrement, au compte de résultat 2006, d’une perte exceptionnelle de 10,7 M€. L’exercice enregistre un résultat déficitaire de -1,5 M€. Le déficit cumulé des résultats des exercices 2000-2006 s’élève à -16,5 M€.

Au cours de l’exercice 2003, la requalification du fonds de dotation en réserves d’une part, et en dettes financières vis-à-vis de l’Etat d’autre part, a également contribué à diminuer le fonds de roulement à hauteur de 6,46 M€.

Enfin, en 2006, un complément de provision a été enregistré au titre des indemnités de départ à la retraite, et comptabilisé en report à nouveau à hauteur de 4 M€. Au total, les capitaux propres de l’entreprises ont donc diminué de plus de 15 M€ au cours du dernier exercice, pour s’établir à -7 M€.

- Evolution des capitaux permanents de RFI 2000-2006

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Capitaux propres

25 989 369

24 502 788

16 438 207

9 048 538

8 647 332

8 616 565

-7 039 234

Dont Fonds dotation

16 454 617

16 503 631

16 503 631

0

0

0

0

Dont Réserves

882 585

995 713

995 713

12 043 625

12 043 625

12 043 624

12 043 625

Dont Report à nouveau

49 014

5 404 690

3 918 109

-3 760 862

-5 200 068

-5 169 274

-9 108 615

Dont Résultat exercice

5 553 328

-1 486 581

-7 678 971

-1 439 206

30 794

76 423

-11 534 244

Amortissements et provisions

22 121 751

22 561 707

25 283 294

29 256 732

33 805 143

37 812 883

38 164 946

Provisions pour risques

3 611 758

4 073 993

4 153 647

3 592 209

4 317 410

4 375 943

9 481 680

Capitaux permanents

51 722 878

51 138 488

45 875 148

41 897 479

46 769 885

50 805 391

40 607 392

Ainsi, les ressources stables de RFI ne permettent pas de couvrir ses emplois permanents. Ceux-ci sont financés en partie par les dettes d’exploitation de l’entreprise, dont le montant à la clôture de chaque exercice excède celui des créances. Si cette situation ne fait aujourd’hui pas peser un risque de liquidité sur l’entreprise, celle-ci présente toutefois une structure de financement inadaptée à ses investissements.

Les nouvelles modalités de calcul et de comptabilisation de la provision départ à la retraite (IDR)

Au cours de la période 2000-2006, les provisions pour risques inscrites au bilan de RFI passent de 3,6 M€ à 9,48 M€. Cette évolution s’explique essentiellement par l’augmentation de la provision pour indemnité de départ à la retraite, passée de 4,383 M€ en 2005 à 9,48 M€ en 2006, leur part dans le total des provisions s’établissant à 85,7 % (contre 61,5 % en 2000).

Auparavant, la société constatait directement en charge le coût ou le surcoût du départ en retraite. Le changement de méthode a consisté à utiliser des critères de calcul plus fins, conformément à la recommandation n° 2003-R.01 du Conseil National de la Comptabilité du 1er avril 2003, en vue d’harmoniser le calcul de ces provisions entre les sociétés de l’audiovisuel public. Est notamment réalisée une appréciation plus fine du taux de rotation du personnel avec un taux par tranches d’âge de 5 ans et non un taux standard unique moyen. Ont également été utilisés une grille déterminant le nombre de mois d’indemnité de salaires en fonction de l’ancienneté ; le dernier salaire perçu majoré de 1/12 comme base de salaire pour tenir compte du 13e mois ; la distinction entre le départ volontaire (indemnité ≥ indemnité légale de départ à la retraite) et la mise à la retraite (indemnité ≥ indemnité de licenciement) ; des indicateurs de taux d’actualisation, taux de progression des salaires, taux de charges sociales, âge de début de carrière, taux annuel de mobilité, ancienneté, type et âge de départ en retraite, table de mortalité.

L’application de ces critères à RFI a fait apparaître un taux de rotation beaucoup plus faible que le taux standard moyen utilisé jusque là. En outre, ont été inclus dans le périmètre les personnels en CDD ayant été intégrés en CDI (portant le nombre de personnes concernées de 796 à 894, soit + 102 bénéficiaires). Ce constat a eu pour conséquence mécanique d’alourdir les provisions à cet effet.

L’indemnité de fin de carrière et l’indemnité compensatrice de retraite ainsi calculées sont ensuite réparties sur chaque exercice passé et futur, en distinguant la part des engagements imputables aux exercices antérieurs (7,553 M€), l’actualisation au cours de l’exercice des engagements antérieurs (0,294 M€) et les charges aux titres des services de l’année (0,498 M€). Si les éléments au titre de l’exercice ont pu être comptabilisés en charge, les 7,553 M€ imputables aux exercices antérieurs ont été comptabilisé en débit du compte 119000 « report à nouveau » et en crédit du compte 153100 « provision engagement retraite ». La précédente provision de 3,537 M€ a quant à elle fait l’objet d’une reprise. Par différence, les deux comptes sont mouvementés à hauteur de 4 015 765 €.

Ce mode de comptabilisation est conforme à l’article 314-14 du plan comptable général relatif aux changements de méthodes comptables (règlement n° 2000-06 du CRC), dans la mesure où l’entreprise constate une perte inassignable à un exercice spécifique puisqu’elle résulte de l’ensemble des exercices antérieurs. Pour autant, ce il pèse fortement sur le niveau des capitaux propres, alors que ceux-ci sont déjà fortement diminués par l’abandon de créance constaté au cours du même exercice.

La trésorerie dégagée par le cycle d’exploitation

L’excédent des dettes d’exploitation sur les créances d’exploitation est à l’origine d’un besoin en fonds de roulement négatif, qui s’accentue au cours de la période.

-  Besoin en fonds de roulement de RFI 2000-2006

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Stocks

121 774

130 112

125 834

174 008

171 115

170 128

143 140

Créances exploitation

17 392 261

11 361 081

9 413 990

10 513 007

13 025 718

8 962 026

13 288 782

Dettes exploitation

-28 546 058

-28 900 519

-35 408 388

-38 198 289

-42 798 745

-44 408 772

-47 117 163

BFR au 31/12

-11 032 023

-17 409 326

-25 868 564

-27 511 273

-29 601 911

-35 276 618

-33 685 241

Source : Comptes RFI

Ce phénomène tient essentiellement au statut d’entreprise publique de RFI, à l’origine d’un décalage entre la date de recouvrement de ses créances sur l’Etat, et celle du paiement de ses dettes d’exploitation, notamment ses dettes fiscales et sociales. En effet, au 31 décembre de chaque année, la quasi-totalité des subventions publiques – qui représentent 96 % des créances d’exploitation de l’entreprise – est versée, tandis que le paiement des dettes est étalé dans le temps.

En dépit du fonds de roulement structurellement négatif de l’entreprise, celle-ci dispose donc d’une importante trésorerie, dont le montant s’élevait, fin 2006, à 17 M€. La trésorerie présente toutefois d’importantes variations infra-annnuelles, liées au rythme d’encaissement des ressources de RFI. Ainsi, en début d’année, dans l’attente des notifications des subventions, l’entreprise enregistre une diminution de sa trésorerie disponible. Celle-ci culmine au second semestre de l’année, après versement des subventions160.

Source : RFI

Un second déterminant explique la hausse du besoin en fonds de roulement négatif sur la période. La progression continue de l’activité de RFI est en effet à l’origine d’une forte hausse des dettes fiscales et sociales au cours de la période, alors que les dettes fournisseurs, elles, ont diminué sous l’effet du raccourcissement des délais de paiement.

La trésorerie importante dont dispose l’entreprise fait l’objet d’une gestion prudente qui s’appuie sur un tableau de bord prévisionnel des flux d’entrée et de sortie, également suivi par le Contrôle d’Etat.

-  Taux de rendement des valeurs mobilières de placement 2000-2006

 

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Valeurs mobilières

14 752 264

14 805 136

8 085 946

12 160 938

20 167 989

17 991 899

Produits O.PCVM

450 660

341 783

203 978

241 335

320 748

520 158

rendement Moyen

3,04 %

2,12 %

2,21 %

1,97 %

1,57 %

2,84 %

Taux EONIA (*)

4, 392

3,291

2,325

2,046

2,088

2,837

(*) Taux interbancaire de l'argent au jour le jour (moyenne mensuelle) source Banque de France.

Source : Comptes RFI

La nécessaire recapitalisation de RFI

Si l’ampleur de l’excédent des dettes d’exploitation sur les créances d’exploitation permet de couvrir la dégradation du fonds de roulement de RFI et assure une trésorerie aisée, l’apparition de capitaux propres négatifs au cours de l’exercice 2006 rend nécessaire une recapitalisation de l’entreprise.

En effet, conformément à l’article L. 225-448 du code de commerce, RFI a l’obligation de reconstituer ses capitaux propres à concurrence d’une valeur au moins égale à la moitié de son capital social, soit 4 M€, avant le 31 décembre 2009161. Eu égard au montant des capitaux propres au bilan 2006 (- 7 M€), c’est 11 M€ que RFI doit trouver dans l’intervalle.

Plusieurs voies sont aujourd’hui envisagées.

La première, qui a la préférence des administrations de tutelles, consisterait à affecter les économies de diffusion réalisées dans le cadre de la renégociation du contrat TDF à la reconstitution du niveau de fonds propres requis. Toutefois, comme l’a souligné l’Agence des participations de l’Etat au cours de l’instruction, « l’entreprise a redéployé l’économie dégagée en 2006 (5 M€). Les économies dégagées par l’avenant au contrat les années suivantes paraissent désormais insuffisantes (environ 0,5 M€ / an) pour reconstituer en totalité les capitaux propres dans les délais légaux. »

La seconde voie repose sur la réalisation par RFI de bénéfices suffisants, résultant notamment d’une hausse de la redevance et / ou de la subvention du ministère des Affaires étrangères.

La troisième voie, nettement privilégiée par RFI, consiste en une augmentation de capital à partir des ressources du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l'Etat » (CAS). Le redéploiement pour la remise à niveau de RFI des sommes issues de la liquidation de la SOFIRAD – qui seront affectés au CAS, dans la mesure où il s’agit de produits de cession - a été évoqué mais aucune décision officielle n’a été prise. Une telle décision suppose en outre qu’une solution soit trouvée s’agissant de la participation de la SOFIRAD dans la CIRT.

Il pourrait enfin être envisagé, le cas échéant, de transformer la dette financière de 5,6 M€ due par RFI à l’Etat (issue de la requalification du fonds de dotation en 2003), en augmentation de capital.

Cependant, quelle que soit la voie qui sera finalement retenue, l’amélioration de la situation financière de l’entreprise passe avant tout par un financement plus adapté de ses investissements, et la mise en œuvre de réformes internes capables de rétablir un résultat d’exploitation excédentaire de manière durable.

OBSERVATIONS EN VUE DE L’AVIS SUR LES COMPTES

Conformément aux obligations de la société, les comptes sont certifiés par deux cabinets de commissaires aux comptes, dont la durée du mandat est fixée à 6 ans. Pour les exercices 2000 à 2005, ont été mandatés les cabinets MBV (ancien cabinet Fouillet) et Deloitte. A l’expiration du mandat, et au terme d’un appel d’offres où cinq candidatures avaient été retenues, les cabinets MBV et Pricewaterhouse & Coopers ont chargés de la certification des comptes de la société à compter de l’exercice 2006 jusqu’en 2010.

La répartition des contrôles entre les deux cabinets varie selon les exercices. En 2007, le cabinet MBV a ainsi traité les parties fiscales et sociales, et le cabinet Price les parties consommation, clients et fournisseurs. La partie sociale et la réalisation des comptes combinés prescrits par l’Agence des participations de l’Etat (APE) depuis l’exercice 2004 font l’objet de co-audits.

Dans le cadre des travaux menés par les commissaires aux comptes, des demandes d’informations complémentaires ou d’adaptations aux nouvelles dispositions applicables aux sociétés ont été régulièrement formulées. Toutefois, aucune modification de grande ampleur n’a été exigée, à l’exception du changement de mode de calcul de l’indemnité de départ en retraite réalisé en 2006 à la demande du cabinet Price.

Au cours de la période considérée, les comptes de RFI ont été certifiés sans réserve. Les comptes sociaux et comptes consolidés de RFI de la période 2000-2006 ont tous fait l’objet d’une approbation par le conseil d’administration de juin (à l’exception des comptes 2001, présentés au conseil d’octobre 2002)162.

Les diligences effectuées au cours de l’instruction conduisent cependant à formuler les observations suivantes :

La gestion des changements d’applications comptables

Jusqu’en 1999, la comptabilité de RFI a été tenue dans le logiciel Comptarel. En raison des difficultés posées par ce logiciel pour le passage à l’an 2000, un nouveau logiciel a été mis en place à partir de l’exercice 1999, le logiciel Euro 400. En 2004, à l’occasion de la refonte des systèmes d’information budgétaire et comptable, un troisième logiciel a été déployé, le logiciel Agresso. Ce dernier autorise une plus forte intégration entre les circuits budgétaires et comptables de la dépense et a permis de déployer une comptabilité analytique163.

La bascule entre les deux applications réalisée le 1er janvier 2004 a soulevé deux difficultés. En premier lieu, lors de la clôture des comptes 2004 ont été constatées de nombreuses défaillances, notamment dans la reprise des comptes de tiers. La nouvelle chef du service comptable a alors procédé à une vérification systématique des reprises de soldes, dont une partie a été sous-traitée au cabinet d’expertise comptable Planade. Au cours de l’instruction, plusieurs contrôles de cohérence sur les données comptables 2004 entre l’ancienne et la nouvelle application ont pu être réalisés, tant sur les charges (dépenses de diffusion notamment), que sur les produits (refacturation aux filiales), les comptes de tiers et les immobilisations. Aucune anomalie n’a été décelée.

En revanche, la Cour a constaté l’absence de bascule dans la nouvelle application de l’historique comptable consigné dans l’ancienne. Aujourd’hui, les balances 2000 à 2006 ne sont plus accessibles que sur un poste informatique, consultable en lecture seule mais non

imprimable, et nécessitant des opérations de retraitement important pour reconstituer les comptes. La Cour souligne l’importance de la conservation de ces données, dont l’absence entraverait l’appréciation de l’évolution historique des comptes de la société.

La comptabilisation des provisions

La comptabilisation des provisions fait l’objet d’un suivi rigoureux dans les annexes des comptes de la société :

-  Evolution des provisions dans les comptes 2000-2006

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2006

/ 2001

Litiges

0

178 734

140 622

340 857

714 816

711 557

980 897

548,8 %

Ursaff

0

354 932

386 488

0

0

0

0

SPRE et SDM

0

976 841

976 841

0

0

0

154 000

15,8 %

chèques non débités

0

0

0

0

24 535

20 234

20 389

S/ risques et charges

1 384 892

1 510 509

1 503 952

340 857

739 351

731 791

1 155 286

76,5 %

pertes de changes

7046

16 727

9 121

2 627

1 713

5 744

923

5,5 %

Indemnités Retraite

2 219 818

2 546 757

2 640 573

3 248 724

3 576 344

3 537 361

8 127 450

319,1 %

Médaille du travail

0

0

0

0

0

101 046

198 020

 -

Sous-total

3 611 756

4 073 993

4 153 646

3 592 208

4 317 408

4 375 942

9 481 679

232,7 %

Stocks

6936

0

0

0

0

0

0

-

Comptes clients

363 063

392 908

479 803

337 612

330 670

645 719

772 031

196,5 %

créances exploit

188 595

816 555

2 100 318

33 498

33 498

33 498

33498

4,10 %

S/ Dépréciation actifs

558 594

1 209 463

2 580 121

371 110

364 168

679 217

805 529

44,2 %

TOTAL

4 170 350

5 283 456

6 733 767

3963318

4681576

5055159

10287208

194,7 %


Source : Comptes RFI

Comme évoqué dans la partie consacrée à l’analyse financière de RFI, les provisions pour indemnités de départ à la retraite ont fait l’objet, en 2006, d’un changement de méthode comptable à la demande des commissaires aux comptes. Par delà les conséquences qu’elles entraînent sur la structure des fonds propres de l’entreprise, ces modifications ont été réalisées conformément aux recommandations du Comité des normes comptables et n’appellent donc pas de commentaire particulier.

Parmi les autres évolutions significatives observées sur la période, les provisions pour litiges enregistrent une variation particulièrement forte à partir de 2004. Celle-ci s’explique par la hausse des litiges avec des salariés. Parmi eux, le litige qui a opposé M. Alain Ménarges à la société, suite à son licenciement en novembre 2005, fait l’objet d’une provision de 0,528 M€, soit 53% du total des provisions pour litiges.

Les provisions pour risques Urssaf ont été reprises en totalité en 2003, suite à un contrôle notifié en septembre 2003. Ce contrôle a laissé à la charge de la société un rappel de 270 876 €, largement couvert par la provision constituée fin 2002 à hauteur de 386 488 €. Depuis cette date la société a tiré parti de ce contrôle pour minimiser les risques en amont. Ont ainsi été modifiés le traitement des données sociales concernant les remboursements de frais de mission, la qualification des contrats, les rémunérations non intégralement soumises à

cotisations pour des rémunérations versées aux fonctionnaires détachés, l’application de taux réduits artistes du spectacle aux animateurs, les abattements supplémentaires applicables aux journalistes professionnels et la détermination des réductions de charges sur las salaires.

Les provisions pour dépréciation de créances clients enfin, stables de 2000 à 2004, ont plus que doublé entre 2004 et 2006 et s’établissaient à la fin de 2006 à 0,77 M€, soit près de 10 % du montant des créances clients à la même période (7,97 M€). Cette évolution est liée au provisionnement de trois créances douteuses, l’une sur une régie publicitaire ivoirienne (qui prétend avoir déjà réglé sa dette), l’autre sur l’ambassade de France à Bagdad (absence de commande formelle) et la dernière sur la société Africa Telecom, pour un montant de 310 529 €.

Au total, les provisions font l’objet d’un suivi et de reprises réguliers en fonction de l’évolution des dossiers.

L’absence de valorisation des reprises des radios partenaires

L’analyse des données disponibles sur les coûts de diffusion met en évidence l’absence de valorisation des reprises réalisées par les radios partenaires. Celle-ci s’explique à l’évidence par les difficultés de suivi des reprises évoquées précédemment.

Toutefois, eu égard à la part prise par les radios partenaires dans les modes de diffusion de RFI (notamment en Amérique latine), une telle valorisation aurait plusieurs avantages :

- en charge, elle permettrait d’améliorer la comptabilisation du coût complet de la diffusion, et de sa répartition par zones ;

- en produit, elle permettrait de valoriser les ressources potentielles que RFI pourrait tirer de ces reprises, dans la perspective d’une éventuelle tarification auprès des radios les plus importantes.

La comptabilisation des refacturations aux filiales

Dans son précédent rapport, la Cour des comptes avait relevé l’opacité des flux de trésorerie entre RFI et ses filiales. Depuis, ont été développés les « comptes courants internes » destinés à retracer les mouvements de trésorerie : à la notification des subventions, la comptabilité enregistre un débit du compte de charge 628 et un crédit du compte d’attente 451. Au paiement, le compte 451 est débité pour créditer le compte courant de la filiale. En revanche, le suivi des flux de biens et services entre RFI et ses filiales est limité à plusieurs titres.

Outre les subventions qu’elle verse à chacune de ses filiales164, RFI réalise pour le compte de celles-ci des achats, qu’elle refacture ensuite sur un compte de produits. Les achats réalisés sont traçables en comptabilité analytique au moyen des codes affaires, les produits refacturés sont quant à eux regroupés sur le compte 708986, au sein duquel on peut également procéder à une répartition par filiale.

La finesse des données ainsi disponibles est insuffisante. En effet, jusqu’en 2004, seul le montant global du compte 708986 est accessible. Il est dès lors impossible de reconstituer la répartition des produits refacturés par filiales.

Mais surtout, à partir de 2004, l’analyse des comptes de produits et de charges relatifs aux refacturations fait apparaître plusieurs incohérences :

-  Différence entre charges et produits refacturés 2004-2006

   

2004

2005

2006

Monte Carlo Doualiya

Subvention (628)

2 650 000

2 850 000

3 500 000

Total charges hors subvention

704 644

737 247

657 645

Produits activités taxables (708986)

-844 133

-839 733

-652 962

Différence

-139 489

-102 487

4 683

% sub

-5,3 %

-3,6 %

0,1 %

Aeriel

Subvention (628)

0

0

0

Total charges hors subvention

14 607

14 022

26 749

Produits activités taxables (708986)

-20 457

-30 363

-30 839

Différence

-5 850

-16 341

-4 090

% sub

 

 

 

RFI Deutschland

Subvention (628)

46 035

46 169

42 000

Total charges hors subvention

46 431

35 957

35 070

Produits activités taxables (708986)

-14 427

-14 584

-14 666

Différence

32 004

21 373

20 405

% sub

69,5 %

46,3 %

48,6 %

RPL

Subvention (628)

503 900

512 000

508 400

Total charges hors subvention

50 365

35 230

39 055

Produits activités taxables (708986)

-5 379

0

0

Différence

44 986

35 230

39 055

% sub

8,9 %

6,9 %

7,7 %

RFI Bulgarie

Subvention (628)

244 500

242 300

262 700

Total charges hors subvention

4 823

13 544

1 615

Produits activités taxables (708986)

0

0

0

Différence

4 823

13 544

1 615

% sub

2,0 %

5,6 %

0,6 %

RFI Roumanie

Subvention (628)

545 800

558 900

684 100

Total charges hors subvention

13 862

19 976

21 444

Produits activités taxables (708986)

0

0

0

Différence

13 862

19 976

21 444

% sub

2,5 %

3,6 %

3,1 %

Source : Comptes RFI

En premier lieu, alors que l’ensemble des filiales apparaissent dans les charges refacturées, seules trois d’entre elles font l’objet d’une refacturation enregistrée en produits : Monte Carlo Doualiya, Aeriel et RFI Deutschland. RPL, RFI Bulgarie et RFI Roumanie, elles, ne font l’objet d’aucune refacturation. Face à ce constat, le département comptable a fait valoir la faiblesse des montants en jeu. Tel est effectivement le cas en volume, puisque le montant des charges concernées ne dépasse pas 50 000€. Toutefois, ramenés aux montants des subventions versées aux filiales concernées, ces charges non refacturées peuvent représenter jusqu’à 9 % de hausse de la subvention notifiée.

En second lieu, au sein des trois filiales faisant l’objet de refacturation, on observe des écarts entre les charges constatées et les produits refacturés qui peuvent atteindre jusqu’à 69,5 % du montant de la subvention versée à la filiale (cas de RFI Deutschland 2004). Dans le cas d’espèce, la sous-évaluation des produits refacturés par rapport aux charges constatées s’apparente à une subvention indirecte, qui devrait apparaître comme telle dans les comptes consolidés.

Selon le service comptable, ces différences s’expliquent par la comptabilisation en charges de l’intégralité des dépenses au titre d’un code affaire, alors que seule une partie de la dépense est imputable à ce code en réalité. La différence est alors déduite du montant du produit refacturé à la filiale. Le cas de Monte Carlo Doualiya, dont les produits refacturés sont supérieurs aux charges, échappe toutefois à cette explication.

Les montants en jeu ne font pas peser de risque réel sur la sincérité des comptes de RFI et de ses filiales. Pour autant, dans un souci de suivi des coûts et eu égard au poids croissant que représentent les filiales dans le budget de la maison mère, le suivi des flux de biens et services entre RFI et ses filiales gagnerait à être clarifié et systématisé.

L’audit interne

La loi n° 2003-706 du 1er août 2003 sur la sécurité financière a introduit l’obligation pour les entreprises publiques de présenter un rapport annuel sur les procédures de contrôle et de sécurité interne. En pratique, deux rapports ont été présentés au conseil d’administration en 2005 et en 2006. Toutefois, leur contenu n’approchait qu’approximativement le thème du contrôle interne, et notamment du contrôle interne comptable.

Cette obligation a, depuis lors, été levée. En revanche, la charte de l’Agence des participations de l’Etat (APE) sur les relations avec les entreprises publiques a exprimé une recommandation sur la mise en place de comités d’audit et de contrôle interne au sein des entreprises publiques, assortie de rapports annuels.

La Cour relève l’intention exprimée à l’occasion du conseil de juin 2006 de maintenir le principe de ce rapport et encourage l’entreprise dans cette voie, qui ne peut que contribuer à l’amélioration de la qualité comptable de l’entreprise.

LA NUMÉRISATION DE RFI N’A PAS PERMIS LES GAINS DE PRODUCTIVITÉ ATTENDUS

LA NUMÉRISATION DE LA PRODUCTION ET DE LA DIFFUSION DE RFI

La numérisation de la production consiste à passer d’un mode analogique d’enregistrement des sons sur bandes magnétiques à un mode numérique d’encodage qui permet de transformer les sons en simples données informatiques. La numérisation de la diffusion radio recouvre quant à elle à la fois l’acheminement des programmes vers l’émetteur et sa retransmission, par voie terrestre ou satellitaire, jusqu’aux auditeurs165.

La numérisation représente pour RFI une réelle opportunité compte tenu des spécificités de son activité. La compression des sons permet une baisse des besoins en bande passante et avec elle une diminution du coût de transport satellitaire vers les émetteurs ondes courtes ou les relais locaux FM. Elle offre aussi la possibilité d’une plus grande régionalisation des antennes en facilitant les décrochages locaux du signal en français. Le stockage des sons sur un serveur informatique libère la radio des contraintes de la copie et rend possible la mutualisation des sons entre rédactions et avec les filiales. Elle permet d’alimenter de véritables banques de programmes pour les radios partenaires et de transformer les archives en banque de données facilitant notamment la diffusion Internet.

Dès 1998, RFI a engagé une réforme afin de mettre en place ces nouveaux modes de production et de diffusion. Ce n’est toutefois qu’en 2007, et selon des modalités différentes de celles qui avaient été envisagées au départ, que la réforme a été pleinement mise en œuvre.

Le processus de numérisation de RFI a été plus long que prévu en raison notamment des difficultés techniques et sociales rencontrées

La numérisation de la production et de la diffusion des programmes de RFI a été mise en œuvre par étapes après deux expérimentations successives. Les principales étapes de cette réforme sont les suivantes :

- décembre 1998 : première « expérimentation » de la numérisation de la production au sein de la rédaction latino-américaine sur support mini disques (NETIA) ;

- juillet 2002 : acquisition du logiciel intégré DALET pour la production et la diffusion ;

- août 2001-octobre 2002 : déploiement de DALET (production et diffusion) au sein des services Afrique et Sport de la rédaction en français dans le cadre d’une seconde « expérimentation » (première antenne numérique le 09/10/2002) ;

- mai-décembre 2003 : déploiement de DALET au sein de l’ensemble de la rédaction en français (production et diffusion numérisée à partir de juin 2004) ;

- juin 2003-février 2005 : déploiement par étapes de DALET au sein des 40 magazines de RFI (première diffusion numérique le 15/02/2005) ;

- mars-avril 2005 : déploiement de DALET (production et diffusion) au sein des rédactions en anglais, brésilien et lusophone ;

- octobre 2005 : acquisition du logiciel NETIA pour la diffusion ;

- octobre 2006-mars 2007 : déploiement de DALET dans l’ensemble des rédactions en langue étrangère.

Le processus de numérisation de la production de RFI s’est déroulé sur plus de huit ans si l’on prend en compte la première expérimentation lancée en décembre 1998, et sur près de six ans si l’on retient comme point de départ effectif la date d’acquisition du logiciel DALET. La numérisation de RFI a pu apparaître en avance sur celle de ses homologues lors du lancement de la première expérimentation même si la numérisation de France Info avait été achevée en 1999. L’utilisation par certaines rédactions des bandes magnétiques analogiques jusqu’à l’automne 2006 était par contre anachronique pour une radio de cette importance. Ce n’est qu’à partir de mars 2007 que la numérisation est généralisée et opérationnelle pour l’ensemble des installations techniques de RFI, soit avec trois ans de retard par rapport aux objectifs initiaux.

Le rapport de l’IGF soulignait déjà, il y a quatre ans, alors que l’échéance attendue était fin 2004, que « le calendrier de la numérisation aurait pu être plus serré ». Il aura fallu finalement trois ans de plus pour achever cette réforme en raison en particulier de deux blocages cumulatifs :

- sur le plan technique avec le constat au printemps 2005 des défauts techniques de DALET dans le cadre de la montée en charge de la production et de la diffusion. Les difficultés rencontrées ont contraint le comité de pilotage numérisation à reporter de plusieurs mois (février 2006) la numérisation de la diffusion de plusieurs rédactions produisant déjà en numérique (en français et plusieurs magazines). La numérisation de la production et de la diffusion des rédactions en langues étrangères non équipées a elle aussi été reportée à la fin 2006 ;

- sur le plan social avec le blocage des négociations sur la mise en place d’une nouvelle organisation du travail dans le cadre de la numérisation (voir infra). Le blocage fin 2003 des négociations sur l’extension de la fonction de technicien explique le déploiement relativement lent (mai-décembre 2003) de DALET au sein de la rédaction en français et surtout la mise en œuvre tardive de la numérisation de la production et de la diffusion une fois les matériels installés (juin 2004)166. Il aura fallu que le comité de pilotage de la réforme décide de découpler le déploiement des équipements de l’organisation du travail pour que la numérisation puisse être mise en œuvre au sein de la rédaction en français.

Les choix technologiques initiaux relatifs au processus de numérisation de RFI ont été remis en cause en cours de réalisation

La numérisation de la production et de la diffusion repose sur des choix technologiques structurants

La numérisation de la production et la diffusion radiophoniques implique un changement complet de technologie. La captation des sons doit pouvoir s’effectuer par des magnétophones numériques. L’habillage et le montage des reportages nécessitent la mise en place de logiciels de traitement des fichiers sons sur l’ensemble des postes de travail des journalistes, des techniciens et des chargés de réalisation. L’équipement des studios (consoles, tables de mixage et de montage) doit lui aussi être numérisé. La généralisation de l’encodage numérique des sons implique la mise en place d’un réseau informatique puissant et sécurisé afin de permettre le stockage, l’élaboration et la diffusion des programmes.

La direction de RFI a retenu le fournisseur DALET pour la numérisation de la production et de la diffusion de l’ensemble des rédactions et antennes à l’issue de plusieurs réunions aux résultats contradictoires.

Le choix difficile entre les deux principales sociétés du secteur, NETIA (fournisseur du système analogique alors utilisé par RFI) et DALET, s’est déroulé au cours des mois de juin et juillet 2001 après plusieurs jours de démonstration sur site des deux logiciels. Les instances mises en place ont préconisé des choix différents selon qu’elles étaient constituées ou non d’utilisateurs :

- un comité d’utilisateurs s’est prononcé le 21 juin 2001 en faveur de NETIA (13 voix pour, 3 contre). Il a réalisé au préalable une évaluation chiffrée des offres à partir de 15 critères pondérés regroupés en quatre thèmes (montage/mixage multipiste, atelier conduite/diffusion studio, atelier indexation, atelier acquisition/montage/mixage simple). Cette évaluation a donné une moyenne générale de 54,5 % pour NETIA et de 45,5 % pour DALET ;

- un comité mixte technique/utilisateurs de 7 cadres s’est prononcé le 22 juin 2001 en faveur de NETIA dans le cadre de l’examen des compléments d’information fournis par les deux sociétés à la demande de RFI ;

- un comité de pilotage exceptionnel réuni le 27 juin 2001 et rassemblant autour du PDG 20 responsables de RFI a finalement confirmé la décision de choisir DALET prise en comité restreint par le président et trois de ses proches collaborateurs. La décision finale a été prise par le président entouré de son équipe de direction sur la recommandation du directeur technique.

Il ressort des différents documents disponibles que le choix de DALET a été conçu comme un « choix stratégique de long terme avec un saut direct vers des technologies futures » et une compatibilité assurée avec le logiciel rédactionnel (Open média) récemment choisi. Les risques liés à la nécessité d’effectuer « un paramétrage important » du logiciel avec des possibles « dérapages de calendrier » étaient par ailleurs évoqués.

La proposition de contrat préparée par DALET le 14 juin et signée le 19 juillet 2001 ne mentionnait pas le montant de chacune des trois tranches prévues ni, a fortiori, celui du contrat pris dans son ensemble167. Les modalités d’activation des différentes tranches du marché n’étaient pas non plus précisées.

Le dossier d’appel d’offres du marché ainsi que son rapport de présentation n’ont pas pu être fournis par RFI à la Cour qui n’a en conséquence pas pu apprécier la décision prise. Le rapport de l’Inspection générale des finances soulignait déjà fin 2003 que « les éléments du choix technique en faveur du fournisseur DALET n’ont pas pu être explicités à la mission. La mission n’est pas en mesure d’apprécier la pertinence du choix effectué et s’interroge tant sur les raisons réelles de ce choix que sur l’incapacité de RFI à produire les documents qui permettraient de l’apprécier ».

L’absence de ces pièces contrevient à l’obligation faite aux entreprises de conserver leurs archives168. Elle met également en évidence la nécessité de mettre en place à RFI une véritable commission des marchés, dont les procédures permettraient de garantir la pleine transparence des choix réalisés dans les domaines les plus structurants, ainsi que le contrôleur d’Etat l’a appelé de ses vœux, dans son rapport 2006169 : « A tout le moins, RFI aura-t-elle réussi à remettre en ordre l’encadrement de son service informatique, même au prix d’une crise interne qui l’aura opposée à son directeur du développement technique et informatique, auteur d’un choix malheureux de titulaire du marché du système d’exploitation numérique. Son départ, la nomination d’un nouveau directeur chargé des nouvelles technologies et des systèmes d’information et le choix, en mai 2006, d’un nouveau titulaire du marché, auront mis fin à ce conflit. L’existence d’une commission des marchés dans l’entreprise aurait probablement pu l’éviter ».

Les défauts du logiciel DALET ont contraint RFI à revenir sur ses choix technologiques

La mise en place du logiciel DALET s’est faite de manière progressive au sein des différentes rédactions de RFI (voir infra). La généralisation progressive de la production et de la diffusion sous DALET au printemps 2005 a eu pour effet de multiplier incidents techniques (retards au démarrage, lenteurs de l’application, blocages et engorgements du serveur, virus et problèmes de sécurité) qui avaient débuté dès les premières installations du logiciel en 2003. Ils ont contribué à ralentir le travail des journalistes et techniciens et à perturber à plusieurs reprises la diffusion avec le remplacement au dernier moment d’émissions en direct par des rediffusions.

Le logiciel DALET s’est révélé à l’usage inadapté aux spécificités de l’activité de RFI qui diffuse simultanément trois antennes en français 24h sur 24, plus de 40 magazines et 30 heures hebdomadaires de programmes en langue étrangère. Le logiciel intégré de production et diffusion DALET sur une plateforme unique n’avait jusqu’alors pas fait l’objet, dans sa version 1.30 modifiée, d’une expérimentation dans une société comparable. Il a de surcroît dû faire l’objet d’un nombre important d’adaptations (34) avant et au cours de son installation, ce qui avait d’ailleurs été identifié comme un facteur de risque par les différentes commissions qui s’étaient réunies au cours de la phase de choix. C’est bien la version du logiciel qui est en cause et non la société DALET elle-même dont l’expérience en matière de numérisation est reconnue.

La version actualisée et plus performante du logiciel (1.40) a par ailleurs été fournie avec plus d’un an de retard par rapport à la date initialement prévue. Le logiciel n’a pas été en mesure de faire face à la montée en puissance des requêtes dans le cadre de la production et de la diffusion numérisées des magazines de RFI. Le double audit indépendant (consultants Microsoft) du réseau et de la plateforme serveur mis en place dans le cadre de la numérisation a permis de confirmer que les problèmes rencontrés étaient avant tout dus aux défauts du logiciel mal adapté aux spécificités de RFI en dépit des modifications qui y avaient été apportées.

Les défauts du système mis en place ont amené le comité de pilotage « déploiement numérique » à remettre en cause le choix d’un logiciel unique de production et diffusion en mode numérique. Le 7 juillet 2005, il a été décidé de séparer les plateformes de production et de diffusion, entre un premier serveur dédié à l’applicatif DALET limité à la seule production, et un second serveur spécialisé dans la diffusion avec le logiciel NETIA. L’appel d’offres lancé en octobre 2005 a permis de confirmer ce choix technique.

Le protocole transactionnel signé le 20 juillet 2007 entre RFI et la société DALET est une reconnaissance implicite des défauts du logiciel dans la mesure où il prévoit le versement par DALET « d’une somme de 200 000 euros au titre d’indemnisation transactionnelle forfaitaire et définitive » en contrepartie de laquelle « RFI prononce la recette sans réserve du marché ». La DDM a souligné, dans une réponse à une question parlementaire dans le cadre de la préparation de la loi de finances pour 2007, que « plusieurs choix de solutions techniques ont pénalisé l’entreprise dans son développement ». Le Président de RFI avait pour sa part indiqué lors du conseil d’administration du 3 juin 2005 que RFI s’interrogeait sur le fait « de savoir si nous avons finalement choisi le bon système. Nous avons choisi DALET plutôt que NETIA dans une version que nous sommes pratiquement les seuls à utiliser et que nous avons personnalisée. Manifestement cela ne marche pas, c’est vraiment grave de se trouver dans cette situation et de devoir envisager de sortir d’un système qui nous, je n’hésite pas à le dire, nous piège ».

Le surcoût pour RFI des défauts du logiciel DALET est difficile à évaluer. Dans le cadre de la préparation de la procédure contentieuse abandonnée à la suite de la signature du protocole transactionnel, il avait été estimé par RFI à 200 000 € au titre du préjudice matériel interne (perte de plus de 4 000 heures de travail170) et 831 249 € au titre du préjudice matériel externe (serveurs supplémentaires, coût des audits diligentés, contrat NETIA). Ce dernier montant correspond peu ou prou au coût des équipements et prestations liées à la numérisation de la production en 2006-2007 soit 843 406 €171. Le montant transactionnel finalement versé par DALET ne couvre ainsi qu’un cinquième des surcoûts évalués par RFI. Cependant, le président de RFI a précisé que « le montant du préjudice indiqué par RFI dans son projet d’assignation (était) bien entendu très surestimé ».

L’ÉVOLUTION DE L’ORGANISATION DU TRAVAIL QUI DEVAIT ACCOMPAGNER LA NUMÉRISATION DE LA PRODUCTION N’A PAS PERMIS DE DÉGAGER LES GAINS DE PRODUCTIVITÉ ESCOMPTÉS

La numérisation de la production induit une évolution des métiers susceptible de générer des gains de productivité

La numérisation devait permettre des gains de productivité dans le cadre d’une évolution des métiers et de l’organisation du travail

La numérisation de la production radio remet en question le partage traditionnel des tâches entre journalistes, techniciens et chargés de réalisation. Elle limite au strict minimum les tâches de manipulation des enregistrements et permet aux journalistes de récupérer directement, écouter et travailler un son depuis leurs postes de travail pour le mettre ensuite à disposition de l’antenne radio

La numérisation est l’occasion de repenser l’organisation du travail au sein des services, en particulier dans une radio comme RFI dont les habitudes de travail avaient peu évolué. Son organisation repose traditionnellement sur le modèle d’accompagnement technique des journalistes dit « 2+2 » avec un agent technique (chargé de réalisation) et un producteur en production et deux agents techniques (chargé de réalisation et technicien) pour la diffusion. La plupart des grandes radios en France (ex France Info, Europe1, RTL) et à l’étranger (BBC, DeutcheWelle) ont adopté le modèle « 2+1 » avec la présence, aux cotés du journaliste, d’un agent technique et du producteur pendant la phase de production et d’un seul agent technique lors de la diffusion. L’organisation du travail au sein de certaines radios privées, essentiellement musicales, repose sur le modèle « 1+1 » avec un seul technicien aux cotés du journaliste tant dans la phase de production que dans celle de diffusion.

Le passage du modèle « 2+2 » au modèle « 2+1 » est susceptible de permettre d’importants gains de productivité avec une réduction théorique des effectifs techniques de moitié. Aucune radio publique française n’a jusqu’ici généralisé le modèle « 2+1 », à l’exception de France Info qui l’a mis en place dès sa création.

Les économies d’emplois étaient au cœur du projet de numérisation pour la direction de RFI

La direction de RFI a étroitement associé, dès le lancement de la réforme, numérisation et gains de productivité. La numérisation a été identifiée comme l’occasion d’adopter le schéma 2+1 dans le cadre d’une fusion des métiers de chargé de réalisation et de technicien avec la création du nouveau métier de « technicien chargé de réalisation » (TCR). Elle devait ainsi permettre, selon la direction de RFI, de réaliser d’importantes économies en personnel172.

M. Cluzel rappelait au cours de la réunion du CE extraordinaire du 23 mars 2004 que « si nous voulons assumer et assurer le financement de la progression de la masse salariale de RFI, il est tout à fait normal de réaliser des gains de productivité ou alors cette société sera déficitaire comme la SFP. Nous avons donc le choix entre nous rationaliser ou finir comme la SFP. C’est un des buts de la numérisation ». La numérisation a ainsi toujours été présentée aux salariés comme une réforme structurelle indispensable et susceptible de dégager les moyens nécessaires au développement de la société dans le cadre d’une situation financière tendue (voir infra). Peu après sa nomination au poste de PDG de RFI, M. Schwarz a précisé vouloir inscrire ses actions « dans le droit fil des constats et recommandations effectuées par l’IGF dans son rapport de décembre 2003 » (pré-projet de COM de la nouvelle direction).

Les tutelles de RFI ont elles aussi eu l’occasion de confirmer à plusieurs reprises que la numérisation de RFI devait être l’occasion de gains de productivité et d’économies en personnel (voir infra). Les journalistes n’ont, en revanche, jamais été intégrés dans la réflexion sur les gains de productivité.

La numérisation de la production n’a permis à ce jour aucun gain de productivité

L’expérimentation de la nouvelle organisation du travail s’est traduite par une création nette de postes

La numérisation, à titre expérimental, de la production au sein de la rédaction Amérique latine en 1998 s’est faite à effectifs constants sans mise en place d’une nouvelle organisation du travail. La rédaction a continué à recourir à un chargé de réalisation pour l’ensemble de la phase de production et de diffusion et à un technicien pour la diffusion à l’antenne (modèle 2+2). La possibilité pour le journaliste de procéder à certaines tâches de production n’a pas été évoquée : le mixage des éléments par le journaliste seul, pourtant demandé par certains journalistes de la rédaction, a été rendu impossible par l’implantation sur les applicatifs informatiques d’un mot de passe auxquels seuls avaient accès les techniciens173.

La fonction technicien chargé de réalisation (TCR) a été mise en œuvre pour la première fois au sein des services Afrique et Sports à la fin de l’année 2002, dans le cadre d’une expérimentation de la nouvelle organisation du travail proposée par la direction (modèle 2+1). Le modèle cible n’a toutefois pas pu être mis en place tel quel, le document préparé par RFI en juin 2005 dans le cadre de la préparation du COM précisant que « l’organisation du travail en mode numérique a fait surgir des incohérences et des difficultés. Dans les faits les TCR n’ont pas repris l’intégralité des missions dévolues aux techniciens et aux chargés de réalisation. Leur changement de statut n’a pas intégralement fait disparaître la prédominance de leur métier d’origine. Ainsi, selon que le TCR était technicien ou chargé de réalisation certaines tâches ne sont plus exécutées ce qui a nécessité le recours à des renforts d’assistant d’édition réduisant d’autant les gains de productivité espérés. Les résumés « Loris » du logiciel de documentation ne sont par exemple plus exercés par les TCR mais par les assistants d’édition. » Ces difficultés ont amené la direction à affecter aux services Afrique et Sport, dès le début de l’expérimentation, l’équivalent de 4,4 ETP d’assistant d’édition afin d’effectuer les tâches que les TCR ne souhaitaient plus exercer selon qu’ils étaient à l’origine technicien ou chargé de réalisation174.

Alors qu’elle était censée permettre une réduction d’effectifs de 2,4 ETP au sein des rédactions Afrique et Sports, l’expérimentation de la fonction TCR s’est en réalité traduite par une création nette de postes de 1,9 ETP avec la mise en place de soutien d’assistants d’édition (4,4 ETP).

- Impact sur les effectifs de la numérisation des services Afrique et Sport

 

Avant

Heures ETP

Après

Heures ETP

Assistant de réalisation

216

7,6

/

/

Techniciens

68,25

2,4

/

/

TCR

/

/

214

7,5

Assistants d’édition

/

/

124,25

4,4

Total

284,25

10,0

338,25

11,9

Source : Données RFI (tableaux de service de l’année 2002 en h./semaine)

Les gains de productivité attendus de la numérisation ont régulièrement été revus à la baisse dans un contexte de fortes tensions sociales

L’évaluation par la direction des gains de productivité attendus de la réforme de l’organisation du travail a dès le départ pris en compte les contraintes sociales de l’entreprise. Le Président de RFI soulignait ainsi, lors du CE extraordinaire du 23 mars 2004, que la réforme proposée était « extraordinairement prudente, extraordinairement modeste et raisonnable. Nous proposons une réforme qui en termes de gains de productivité est extrêmement modeste par rapport aux normes appliquées aujourd’hui dans d’autres entreprises comme France Info, RTL, Europe 1 ou la Deutsche Welle. (…) Je me suis engagé auprès du CSA et du Gouvernement de l’époque sur le maintien de l’emploi permanent. Il n’y a pas de plan social, pas de diminution de l’emploi permanent mais simplement une modification des habitudes de travail. » Il précisait par la suite que les économies d’ETP dégagées affecteraient essentiellement les effectifs en CDD, « la garantie du maintien des emplois des personnels permanents étant prioritaire ».

Le rapport de l’IGF, qui avait estimé que la réduction des effectifs techniques pourrait atteindre jusqu’à 73 ETP, soulignait, en réponse à la contestation par RFI du bien fondé de ce chiffre, que « la démarche adoptée par RFI jusqu’à présent consistait à préserver le nombre de CDI et par conséquent à chiffrer les besoins à la hauteur du personnel à redéployer. La mission de RFI n’est pas, jusqu’à nouvel ordre, de préserver l’emploi ».

Le document préparé sous la direction d’Antoine Schwarz en juin 2005 dans le cadre de la préparation du COM précisait : « A la lumière de l’expérience sur le terrain social de l’évolution du dossier depuis 2003, RFI se situe toujours dans une perspective de gains de productivité mais reconsidérée de manière plus prudente si l’on reste dans un contexte de négociation et non de plan de sauvegarde de l’emploi »175.

Les négociations avec les syndicats sur la mise en place d’une nouvelle organisation du travail ont contribué à renforcer les contraintes pesant sur la réforme. Les différentes étapes des négociations ont eu pour conséquence de limiter l’impact de la réforme en termes de gains de productivité et, à l’inverse, d’en augmenter les coûts :

- l’accord cadre numérique du 27 mars 2003 qui définit la fonction de technicien chargé de réalisation (TCR) a précisé les avantages financiers attachés à ces postes. Il prévoit selon les cas l’accès à la grille de rémunération B21-l ou l’octroi d’une prime mensuelle brute d’un montant de 80 points d’indice et une bonification d’ancienneté de 360 jours ;

- l’opposition des syndicats et de nombreux agents techniques à la modification de leur contrat de travail dans un climat social tendu (vote négatif du CE et du CHSCT sur la réforme en décembre 2003, grèves perlées entre février et avril 2004176, multiplication des AG et des altercations de couloir) a contraint la direction à signer un accord d’entreprise pour être en mesure de mettre en place les TCR. Celle-ci est en effet assimilable, selon les avocats de RFI (note du 24 décembre 2003), à une modification « substantielle » des conditions de travail et ne peut donc intervenir que dans le cadre d’un accord d’entreprise ou au terme d’une procédure de licenciement impliquant un plan de sauvegarde de l’emploi (les effectifs concernés étant supérieurs à neuf) ;

- l’accord d’entreprise signé le 14 avril 2004 a prévu, dans le cadre du déploiement des TCR au sein de la rédaction en français, la mise en place d’un dispositif de soutien provisoire d’agents techniques à hauteur de 3 ETP soit 37 % des gains de productivité attendus (8 ETP). Cette concession, qui a permis la signature d’un accord minoritaire177, a pour conséquence de réduire les redéploiements attendus de la réforme sans que les modalités de sortie de la phase de « soutien provisoire » ne soient précisées. Le précédent de l’expérimentation de la fonction TCR au sein des services Afrique et Sports avec la création de postes de soutien éditorial (assistants d’édition) est une indication à la fois que la réforme peut induire des pertes plutôt que des gains de productivité et que le provisoire est de nature à devenir définitif. Par ailleurs, la signature de l’accord a eu pour contrepartie l’engagement de la direction178 de verser à l’ensemble des agents techniques une prime exceptionnelle de 850 euros par alignement sur un récent protocole de sortie de grève des journalistes179. Si l’accord a bien été signé par quelques syndicats (CFDT, CGC et CFTC), il n’a jamais pu être mis en œuvre, la très grande majorité des techniciens ayant suivi l’appel au boycott de l’accord lancé par FO.

Les tensions sociales au sein de l’entreprise et les négociations avec les organisations syndicales ont amené la direction de RFI à revoir régulièrement à la baisse les gains de productivité attendus de la réforme. Les différents documents disponibles permettent d’estimer, au-delà des différences de périmètres des évaluations réalisées, que la direction de RFI a été amenée à réduire ses ambitions de un à deux tiers selon les hypothèses retenues :

- les projections initiales de RFI, en 2001-2002, prévoyaient, pour l’ensemble des rédactions, une réduction des effectifs des agents techniques de 31 ETP sur un total de 184 techniciens et chargés de réalisation. La baisse attendue des effectifs était toutefois de moins de 20 ETP, compte tenu des créations de poste d’assistance technique prévues dans le cadre de la numérisation ;

- un document de synthèse sur la numérisation en date du 10 juin 2005 et préparé dans le cadre des discussions sur le COM évoquait des gains potentiels, selon les hypothèses, entre 10,5 et 19,5 ETP dans le cas d’une généralisation de la fonction TCR aux services info Monde, magazines et langues ;

- une évaluation préparée en vu d’une relance des négociations avec les organisations syndicales lors des réunions du CHSCT et du CE de décembre 2007 prévoit un gain de 11,5 ETP dans le cadre d’une extension de la fonction TCR aux seules rédactions Info Monde, espagnole, brésilienne et lusophone Afrique. Une nouvelle version de ce document prévoit un gain de 9,22 ETP pour la seule rédaction information Monde.

- Réductions d’effectifs attendues dans le cadre de la numérisation

RFI 2002

RFI 20051

RFI 20072

31,0

10,5-19,5

9,22

1 rédactions info monde, Afrique, Lusophone. 2 rédaction information monde

Source : Cour des comptes – RFI (en ETP)

Etat des lieux et perspectives

Le processus de numérisation de la production et de la diffusion de RFI s’est achevé sur le plan technique au printemps 2007. Les gains de productivité recherchés dans ce cadre n’ont pas été réalisés, aucune réduction d’effectifs techniques n’ayant été obtenue.

Au total, la numérisation a induit – à activité de production comparable – une création nette de 11,9 ETP alors que l’objectif affiché par la direction lors de son lancement était de réduire les effectifs d’au minimum 30 ETP180.

Les résultats à attendre aujourd’hui d’une éventuelle généralisation de la fonction TCR au sein de RFI sont difficiles à anticiper. Le bilan de l’expérimentation aux services Afrique et Sport ainsi que les dispositions des deux accords d’entreprises du 27 mars 2003 et du 14 avril 2004 incitent à rester prudent sur l’impact de la mise en place d’une nouvelle organisation du travail.

Pour autant, le débat sur les fonctions TCR a occulté plusieurs pistes de réforme susceptibles de permettre des gains de productivité au sein de RFI à l’avenir :

- La redéfinition du partage des tâches entre journalistes et techniciens a ainsi été fermement écartée par la direction dès le début de la numérisation ;

- L’optimisation des rythmiques de travail des techniciens et chargés de réalisation se heurte à l’absence de logiciel de planification permettant de comparer les coûts en effectifs des différentes options envisageables ;

- La question du format des émissions diffusées n’a jamais vraiment été abordée. Ce sont pourtant les choix de grille de programmes qui définissent les besoins en termes de techniciens et de chargés de réalisation. L’analyse du nombre d’heures de technicien par heure d’émission diffusée révèle des écarts très importants (de 160 à 3 655 %) qui ne semblent pas toujours se justifier par les caractéristiques des émissions.

- Nombre d’heures de techniciens par magazine

 

Nombre d’heures de technicien (préparation et diffusion)

Durée de l’émission diffusée (mn/sem)

Ration du nombre d’heure de technicien / h d’émission

La bande passante

60,92

100

3 655 %

Chronique A. Genestar

0,58

5

700 %

Sortir dans le Monde

2,08

20

625 %

Si loin si proche

1,83

20

550 %

Afrique +

1,83

20

550 %

Géopolitique

1,67

40

250 %

Plein Sud

7,08

200

212,5 %

Médias et archives africains

6,33

200

190 %

Les visiteurs

6,50

240

162,5 %

Reines d’Afrique

5,33

200

160 %

Source : Données RFI (cinq émissions les plus et les moins consommatrices de technicien de la grille hiver 2006-2007)

LA RÉFORME DES LANGUES NE PERMET PAS UN REDÉPLOIEMENT AU PROFIT D’OBJECTIFS PRIORITAIRES

L’ANCIENNETÉ DES DÉBATS SUR LES LANGUES ÉTRANGÈRES

Que l’on remonte à la création du « poste colonial » en 1931 ou à la nationalisation de la station au sein de la RTF en 1945, l’histoire de RFI a été jalonnée par la création et la suppression de ses rédactions en langues étrangères, au gré des événements internationaux et des disponibilités budgétaires181.

Depuis la création de la radio dans ses formes actuelles le 6 janvier 1975, les rédactions en langues ont cependant été en progression constante. Limitées en 1975 au français, à l’anglais et à l’allemand, après la suppression de 14 des 17 rédactions en langues de la direction des affaires extérieures de l’ORTF, les rédactions se sont développées et comptent aujourd’hui 19 langues :

- Evolution des rédactions en langues étrangères de RFI 1975-2007

Année

Ouverture de rédaction, d’antenne ou de filiale

1975

Chaîne Sud à destination de l’Afrique (français et anglais)

1976

Chaîne Ouest à destination de l’Amérique du nord et l’Amérique centrale (français)

1977

Chaîne Est et ouverture du portugais

1981-1986

Polonais (1981), Russe (1982), Roumain (1985), Serbo-croate (1986)

1982

Espagnol, brésilien, créole (Haïti)

1988

Création de Europe Lisboa (EPL)

1988-1991

Arabe (1988, filialisé en 1996 avec RMC-MO créée en 1970), Persan (1991)

1989-1993

Chinois (1989), vietnamien (1990), cambodgien et laotien (1993)

1993

Albanais, renforcement LSS

1993-2000

RFI Bulgarie (1993), RFI Roumanie (1995), Aeriel Hongrie (1999), RFI Deutschland (2000)

2006-2007

Société franco-marocaine de radiodiffusion (2005), RFI Beta à Belgrade (2006)

Source : D’après RFI

En dépit de cette progression continue du nombre de rédactions, les langues étrangères de RFI ont fait l’objet de débats précoces et d’arbitrages entre l’entreprise et ses tutelles182. En effet, la situation des langues de RFI est, à plusieurs titres, insatisfaisante : RFI compte nettement moins de langues que ses principales concurrentes183, la majorité de ses rédactions en langues étrangères produisent un volume insuffisant pour rencontrer un public, tandis que les « grandes » langues de RFI ou les langues jugées nécessaires n’ont pas les moyens de se développer. Au cours de la période considérée ici, soit depuis l’année 2000, les termes du débat ont néanmoins évolué. Initialement centrée sur le choix des langues à maintenir ou développer au sein de RFI, la réflexion a progressivement intégré la répartition des moyens alloués à chacune au regard de son audience, puis la qualité de leurs contenus.

Le débat sur le choix des langues parlées par RFI

La question des langues étrangères a été posée en 2001 à l’occasion de la négociation du premier projet de contrat d’objectifs et de moyens. A cette époque, la volonté de créer des émissions en langues vernaculaires était partagée par la direction de l’entreprise et par ses tutelles, mais les langues concernées n’étaient pas les mêmes. Ainsi peut-on lire dans les orientations stratégiques pour 2002-2006 présentées par le président de RFI en juin 2001 : « Il est absolument nécessaire d’ajouter, en complément des émissions en français, anglais et portugais, deux grandes langues vernaculaires, le haoussa, pour l’Afrique de l’ouest, et le swahili, pour l’Afrique orientale et australe. Ces émissions doivent permettre à RFI de résister à la concurrence des radios locales, mais également des autres radios internationales (BBC, DW, VOA) qui produisent déjà toutes des émissions dans ces langues ».

Une note du ministère des affaires étrangères du 9 octobre 2001 indique en réponse : « En ce qui concerne les émissions en langues étrangères, qui sont une dimension essentielle de l’influence de RFI, la chaîne doit fonctionner avec un dispositif hérité de la guerre froide qui n’est plus adapté aux réalités géopolitiques d’aujourd’hui. Très faible dans les langues d’Asie centrale (persan, turc) et inexistante dans le sous-continent indien (urdu, pashtoun, hindi) où elle est d’ailleurs très mal diffusée, RFI conserve des moyens surdimensionnés (polonais, allemand) ou sans impact réel (laotien, khmer) qu’elle apparaît incapable de supprimer et même d’ajuster. Fort heureusement, l’intégration récente de RMC Moyen-Orient lui a permis de prendre pied dans la zone arabophone où elle n’existait pratiquement pas jusque là ».

Les positions de l’entreprise et des administrations de tutelles divergeaient également sur le sort à réserver aux langues étrangères déjà existantes. Pour le président de RFI, « faire le choix entre telle ou telle catégories [d’auditeurs] se traduirait immanquablement par une baisse de l’audience de RFI (…). La base de programmes ne pourra être accrue en volume qu’à la marge, qu’il s’agisse de l’offre en français, ou de l’offre en langues étrangères, à l’exception cependant des émissions en swahili et de l’haoussa, qui constitueront bien des créations nettes de programmes ».

Pour le ministère des Affaires étrangères au contraire, ces créations devaient s’accompagner de la suppression de certaines langues, dont l’intérêt géopolitique avait évolué. Tel était le cas, notamment, de certaines langues de pays européens184. Dans les notes, courriers et procès verbaux des conseils d’administration de la période, sont le plus souvent remises en cause l’allemand, le polonais et, plus rarement, le cambodgien, le laotien et le créole.

L’ensemble de ces réflexions a pris appui, à l’époque, sur les études d’audience réalisées par la direction des études de RFI (voir supra). Celles-ci ont été rassemblées en novembre 2003 dans une étude sur l’audience de RFI dans le monde185, détaillant les résultats en termes d’audience des différentes rédactions par zones et par mode de diffusion. Bien qu’ayant un caractère moins précis que les sondages dans la mesure où elle reposait en partie sur des extrapolations, cette étude a permis de dresser un panorama global de l’audience de RFI dans les différentes zones.

Indépendamment des insuffisances méthodologiques des mesures d’audience précédemment évoquées, cette approche présentait, par nature, une limite. Centrées sur les résultats des rédactions existantes et les attentes des auditeurs, les études d’audience ont mis en évidence les forces des programmes à destination de l’Afrique et du Moyen-Orient, et la faiblesse de l’audience des rédactions situées hors de ces zones. N’étant toutefois jamais rapportées à l’organisation des rédactions elles-mêmes, ni à leurs moyens, celles-ci ne pouvaient permettre d’expliquer ces faiblesses ni d’orienter les choix stratégiques en matière de langues.

L’adéquation entre les objectifs, les résultats et les moyens des rédactions

Dans ce contexte, la remise en décembre 2003 du rapport de l’Inspection générale des finances réalisé à la demande des ministres de tutelles dans le cadre troublé du vote du budget 2003 (voir supra), a constitué une rupture186. En effet, le rapport rapproche les résultats d’audience du volume de production et des coûts de chaque rédaction. Sans en tirer de conclusion définitive sur chacune des langues, eu égard à la qualité inégale des estimations, le rapport met en évidence les écarts relatifs d’efficacité et d’efficience entre les différentes rédactions, et l’impact du nombre de langues sur les moyens et l’efficacité de chacune.

S’agissant des coûts de production, le rapport distingue trois catégories de rédactions : les « grandes rédactions » (RMC-MO, anglais, espagnol, chinois) dont le coût est compris entre 4,2 et 11,6M € ; les « petites » (albanais, turc, créole) dont le coût est inférieur à 1 M€ ; et les rédactions intermédiaires (les onze autres) dont le coût est compris entre 1,8 et 3,1 M€.

Rapportés au volume de production de chaque rédaction, ces coûts font apparaître que la rédaction en français est un peu moins efficiente que les rédactions en langues étrangères (32’54’’ contre 35’48 hebdomadaires par journaliste) et que de fortes disparités existent entre les langues (20’ par journaliste pour l’albanais contre plus de 40’ pour les rédactions lusophone, russe et roumaine).

Rapportés à l’audience estimée de chaque rédaction, les coûts de production mettent en évidence huit rédactions dont le coût par auditeur est particulièrement élevé (coût médian supérieur à 20€ / auditeur), alors même que leur productivité est, pour certaines, supérieure à la moyenne des rédactions en langues : l’albanais, le turc et le créole, le polonais, l’allemand, le russe, le laotien et le khmer. Ce phénomène est donc imputable selon les cas au coût élevé, à la faiblesse du volume de production ou à celle de l’audience des rédactions. Quatre rédactions en particulier, ont une audience particulièrement faible : l’albanais, le turc, le créole et le polonais.

En dépit de la lecture qui a pu en être faite par la suite, le rapport ne concluait pas à la nécessité de supprimer telle rédaction en particulier, mais sur la nécessité de faire des choix187. A moyens constants, la politique consistant à maintenir toutes les langues pèse en effet sur chacune, les plus réduites n’atteignant pas la taille critique suffisante pour obtenir une quelconque audience, les plus importantes n’étant pas dotées des moyens suffisants pour consolider leur position dominante par des développements appropriés. Quatre critères se dégageaient ainsi pour hiérarchiser les langues, qui seront repris par le président de RFI en mai 2005 : leur pertinence géopolitique, leur audience actuelle et potentielle, et leur coût.

La qualité et l’unité éditoriale des programmes

En avril 2005, une étude sur les langues réalisée par RFI a complété cette analyse. Elle détaille le coût, l’organisation et l’audience de chaque rédaction. Sont néanmoins exclues du périmètre RMC-MO et RFI Bulgarie.

Fondés sur des hypothèses de calcul distinctes de celles retenues par l’Inspection générales des finances, les coûts et les indicateurs de productivité présentés dans le rapport diffèrent des résultats de 2003, comme en témoigne le tableau ci-dessous. L’étude de 2005 rejoint néanmoins le précédent rapport sur « l’inégale adéquation entre choix des langues, audience et priorités stratégiques », et la faiblesse préoccupante de l’audience de certaines rédactions188.

Le ministère des Affaires étrangères en tire les conclusions suivantes, dans une note du 9 mai 2005 : « De fait, à la lumière de l’étude et indépendamment de la problématique Internet, on peut raisonnablement classer les langues de RFI en trois catégories : celles dont l’utilité est discutable : albanais, cambodgien, créole, laotien, persan, roumain, russe, slave du sud, turc, vietnamien. Soit 10 sur 17 ! ; celles à l’évidence inutiles, si ce n’est en tant que symbole : allemand et polonais ; celles dont l’utilité est incontestable : anglais, brésilien, chinois, espagnol, portugais (et arabe hors étude). »

L’intérêt de l’étude va toutefois au-delà. Dans la synthèse introductive du rapport, quatre constats supplémentaires sont en effet dressés :

- L’insuffisante coordination éditoriale dans la couverture d’une même zone entre les rédactions en langues et la rédaction en français ;

- L’inégale pertinence des contenus produits par les rédactions, notamment les horaires d’émission et les formats189 ;

- L’inégal professionnalisme des équipes, jugé d’autant plus préoccupant qu’aucune vérification des contenus n’est mise en œuvre190 ;

- L’insuffisante qualité des moyens de production et des vecteurs de diffusion et de promotion des programmes en langues, pesant lourdement sur leur audience.

L’étude de 2005 complète ainsi les termes du débat par une analyse de l’organisation et de la production de chaque rédaction, ainsi conclue : « Une seule voix, plusieurs langues, l’objectif n’est pas neuf à RFI mais il doit être renouvelé constamment en raison de l’évolution du monde. En ce sens, il semble prioritaire de valoriser enfin le potentiel humain et professionnel que constituent les rédactions en langues, d’adapter leur production et leur organisation aux nécessités du monde d’aujourd’hui (…). Dans le même temps, RFI doit s’attacher à parler au monde d’une seule voix et donc à traquer les dissonances entre les langues ».

L’ensemble des ces éléments permettent au ministère des Affaires étrangères de considérer, en mai 2005 : « L’ensemble est un outil très solide de réflexion. Avec [l’étude sur les langues] et le rapport de l’IGF, toutes les données ou presque sont disponibles pour prendre des décisions en connaissance de cause ».

- Calculs des coût complet, coût horaire et coût par auditeur des rédactions en langues dans les rapports de 2003 et 2005

 

Rapport IGF décembre 2003

Etude sur les langues avril 2005

 

coût complet (1)

audience médiane

production hebdo (2)

coût / auditeur médian

coût / minute produite (3)

coût complet (1)

production hebdo (2)

coût / minute produite

albanais

996 200

900

3,2

1 106,9

99,8

481 567

3,5

44,1

polonais

2 800 475

10 000

10,0

280,0

89,8

1 542 498

15,75

31,4

turc

286 823

2 000

0,9

143,4

102,1

134 465

1

43,1

laotien

1 841 165

19 000

6,4

96,9

92,2

841 726

7

38,5

russe

3 059 938

36 000

9,3

85,0

105,5

1 647 734

14

37,7

allemand

2 091 861

38 000

7,0

55,0

95,8

1 139 852

14

26,1

créole

171 385

5 000

0,5

34,3

109,9

99 268

0,5

63,6

cambodgien

2 011 546

100 000

6,4

20,1

100,7

965 638

7

44,2

roumain (2)

2 468 957

130 000

9,7

19,0

81,6

1 324 208

16,31

26,0

lss

2 581 585

141 000

8,3

18,3

99,7

1 661 712

17,5

30,4

brésilien

2 227 745

170 000

8,8

13,1

81,1

1 052 378

10,75

31,4

portugais

2 492 562

200 000

9,2

12,5

86,8

1 288 452

14

29,5

espagnol

6 185 744

500 000

16,8

12,4

118,0

3 103 907

28

35,5

vietnamien

2 655 047

310 000

8,4

8,6

101,3

1 315 026

14

30,1

persan

2 349 900

325 000

8,1

7,2

93,0

1 169 078

10,5

35,7

anglais

6 528 423

1 150 000

18,4

5,7

113,7

3 658 569

33,5

35,0

mandarin

4 261 207

1 108 800

12,8

3,8

106,7

2 467 306

21

37,7

échelon central

 

 

 

 

 

2 637 056

 

 

Total langues

45 010 563

4 245 700

144,2

10,6

100,0

23 893 384

228,3

33,5

RMC-MO

11 551 732

15 400 000

80,8

0,8

45,8

5 641 038

107,5

16,8

Total langues + RMC-MO

56 562 295

19 645 700

225,0

2,9

80,6

29 534 422

335,8

28,2

français + magazines

66 574 982

16 000 000

120,9

4,2

176,5

77 640 097

188,0

132,4

Total

123 137 277

35 645 700

345,9

3,5

114,1

107 174 519

523,8

65,6

(1) Dans le rapport IGF, le coût complet inclut le coût CDI et CDD hors PTA en CDD, les charges de fonctionnement (déplacements, missions, achats, services extérieurs, téléphones), les coûts de diffusion calculés au prorata de la production originale et les coûts de structures calculés au prorata des effectifs. Dans l’étude interne de 2005, il inclut le coût CDI et CDD totaux (PTA inclus) mais ni les charges de fonctionnement, ni les coûts de diffusion, ni les coûts de structure.

(2) Le rapport IGF retient les heures de diffusion originale. L’étude de 2005 décompte quant à elle les heures de diffusion globale.

(3) Le rapport IGF retenait comme indicateur de productivité le nombre de minutes hebdomadaires produites par journaliste. Afin de rapprocher ces résultats de l’étude de 2005, le volume de production a ici été ramené au coût des rédactions.

LA REDUCTION PROGRESSIVE DES AMBITIONS DE RÉFORME

A mesure que le diagnostic sur la situation des langues étrangères a progressé, celles-ci ont fait l’objet de tentatives de réforme. Ce n’est toutefois qu’en octobre 2006, après l’abandon de deux projets et l’allongement considérable de la concertation interne sur le troisième, qu’une réorganisation des langues étrangères a pu être adoptée191.

La régionalisation envisagée en 2001 : un projet resté presque sans suite

En dépit du débat opposant la direction de l’entreprise et ses tutelles sur les modalités de création de rédactions en langues haoussa et swahili, une réforme des rédactions en langues a été envisagée à partir de 2001, centrée sur l’organisation des rédactions et non sur leur nombre, à travers la « régionalisation des antennes »192.

Cette réforme se fondait sur les analyses d’audience de RFI dans les différentes zones du monde, leur composition sociologique et leurs attentes, telles que les sondages qualitatifs réalisés pouvaient les faire ressortir. A partir de ce panorama, les orientations stratégiques se fixaient pour objectif de maintenir ou d’accroître l’audience de la radio, le postulat étant qu’il était nécessaire de maintenir chacune des langues. Ainsi, les orientations présentées en juin 2001 et reprises dans le projet de COM pour 2002-2006 introduisaient la proposition de réforme de la manière suivante : « Maintenir ou accroître une large audience suppose d’accentuer encore l’orientation visant à placer l’auditeur au centre de la réflexion stratégique de la société (…). L’ensemble de ces catégories de population constitue aujourd’hui l’auditoire de RFI. Faire le choix entre telle ou telle de ces catégories se traduirait immanquablement par une baisse de l’audience de RFI ».

Pour atteindre l’objectif de hausse de l’audience, le projet envisageait deux voies : diversifier les modes de diffusion, et « régionaliser les programmes, tant en français qu’en langues étrangères [impliquant] une multiplication de l’offre disponible et donc de la production ». Pour permettre cette hausse de la production sans entraîner une forte croissance des coûts, le projet s’appuyait sur deux réformes internes : la numérisation de la production, destinée à faciliter la mutualisation des contenus, et la régionalisation des rédactions, destinée à favoriser les productions spécifiques pour chaque zone.

Le projet de régionalisation était présenté à l’article 3 du projet de COM. Il consistait à supprimer la distinction entre les directions de la rédaction en français et de la rédaction en langues étrangères, et à les regrouper en six entités régionales : l’Afrique francophone et le monde arabe (préfigurés par la chaîne Afrique et RMC-MO), l’Afrique anglophone et lusophone, l’Europe, l’Asie et l’Amérique latine.

Ce projet n’a pas été mis en œuvre. Dans sa réponse au rapport de l’IGF, le président de RFI a justifié cet état de fait dans les termes suivants : « Le rythme du chantier de régionalisation, qui peut apparaître de l’extérieur lent, s’explique d’abord par la durée des concertations nécessaires avec les partenaires sociaux (…). La difficulté du processus s’explique surtout par le fait que la régionalisation suppose d’importants mouvements de regroupement des rédactions, qui requièrent des travaux immobiliers extrêmement difficiles puisque RFI, locataire de Radio France, ne dispose dans ses emprises d’aucun local tampon qui faciliterait leur déroulement ».

En pratique, la réforme a été évoquée à deux reprises au comité d’entreprise. Elle n’a toutefois jamais été mise à l’ordre du jour, et n’a fait l’objet d’aucune consultation. Elle a finalement été reportée sine die par le président lors du comité du 11 décembre 2003 : « Pour des raisons immobilières, la réforme sur l’Afrique sera difficile. Il n’y aura pas d’autres régionalisations. La réponse est claire et nette ».

Dans sa note confidentielle du 23 avril 2004 transmise par le président de RFI à ses ministres de tutelles, la régionalisation n’était plus évoquée. La réforme des langues, en revanche, y tenait une place importante193. Mais moins d’un mois plus tard, le président de RFI était nommé président de Radio France.

La restructuration des rédactions en français et en langues étrangères et le recentrage des langues : le rendez-vous manqué de l’automne 2004.

Moins de deux moins après son arrivée dans l’entreprise, le nouveau président de RFI a proposé, dans sa note d’orientation du 24 juillet 2004, une nouvelle réforme des langues étrangères. Après avoir indiqué : « L’esprit général de la stratégie proposée anticipe sur les contraintes générales du budget de l’Etat. L’objectif est de conserver en valeur sur le moyen terme le niveau actuel des contributions de l’Etat à RFI, en affectant au développement de l’entreprise les économies qu’elle aura pu générer par le redéploiement de ses moyens », le président reprenait à son compte les conclusions du rapport de l’Inspection générale des finances sur la faiblesse de l’audience de la majorité des langues étrangères et l’inefficience de la répartition des moyens entre les rédactions : « [RFI] n’utilise que 18 langues étrangères (contre 35 à 50 [chez ses homologues étrangères]) et sur des durées quotidiennes trop faibles pour avoir une chance d’être efficace, c'est-à-dire atteindre un public significatif (…). La question des langues étrangères se pose aussi du point de vue de leur développement : ne faudrait-il pas faire des émissions dans certaines langues vernaculaires de l’Afrique (le swahili, l’haoussa) et augmenter la durée de celle qui utilisent les grandes langues étrangères (espagnol, anglais ) ? ».

Face à ce double constat, il proposait une réforme d’ensemble de l’organisation des rédactions, qui comportait – outre l’achèvement de la numérisation – trois volets :

- le rapprochement des rédactions en français et en langues autour de pôles régionaux de production, et la distinction entre la fabrication de l’information (les rédactions) et leur constitution en programmes selon les zones (les antennes)194 ;

- le développement de la production locale d’informations en langues, au moins pour les langues nouvellement créées ;

- La création de nouvelles langues (haoussa et swahili notamment), le renforcement des principales langues de RFI (anglais, chinois et espagnol), et la suppression des langues les moins prioritaires ou dont l’impact était réputé le plus faible, afin de dégager les moyens des développements envisagés.

En termes de moyens, le président procédait à une estimation des diminutions d’effectifs que pourrait permettre la restructuration des rédactions : « Cette réorganisation pourrait économiser plus de 10 % des postes, soit 40, tout en améliorant la qualité et la quantité de la production (…). Ce qui serait demandé en plus à l’Etat est le financement, à titre exceptionnel, de son plan social sur l’exercice 2005 ».

En dépit du refus par les tutelles du principe d’un plan de « sauvegarde de l’emploi » au mois d’août 2004, le président entama une concertation interne dès l’été afin de traduire ces orientations dans un « projet d’entreprise ». Sans faire explicitement référence à la suppression de langues, celui-ci était trop exclusivement centré sur le renforcement des quatre principales langues (anglais, portugais, espagnol et chinois) pour ne pas suggérer la volonté de supprimer des rédactions, comme le reconnaîtra plus tard le président lui-même devant le conseil d’administration : « Je suis parti sur l'a priori qu'effectivement, la diffusion de RFI dans 19 langues étrangères ne s'imposait sans doute plus. Pendant plusieurs mois, j'ai pensé qu'il y avait certainement des langues que l'on pouvait envisager de fermer. Je le dis ni plus ni moins. C'était l'opinion sous-jacente qui a été exprimée en novembre dans le cadre de notre version préliminaire du projet d'entreprise ».

Ainsi formulé, le projet d’entreprise a fait l’objet d’un préavis de grève le 17 novembre 2004 et donné lieu au vote de la motion de défiance (voir supra). Dans un communiqué du 24 novembre, la direction l’a retiré officiellement et annoncé la relance, de manière séparée, des trois chantiers de la numérisation, de la modernisation de la rédaction en français, et de la réforme des langues. Ainsi, l’opposition frontale entre la direction et les salariés sur la suppression de rédactions a eu raison, dès novembre 2004, du projet de réforme intégrée des rédactions en français et en langues. La réforme des langues, désormais prise isolément, été maintenue dans son principe. Sa conception a cependant été renvoyée à la remise préalable de l’étude interne sur les langues précédemment évoquée.

La réforme de 2006 : la « relégitimation » de l’ensemble des rédactions

En dépit des conditions d’abandon du projet d’entreprise en novembre 2004 qui ne pouvaient manquer de peser sur l’élaboration de la nouvelle réforme des langues, on pouvait considérer que la remise de l’étude sur les langues permettait de repartir sur des bases vierges. Telle a été la position affichée par le président lors de la présentation de l’étude au comité d’entreprise du 3 mai 2005 : « En ce qui me concerne, je ne prendrai pas d'orientation fondamentale sur le sujet avant d'avoir entendu ces réactions et éventuellement enregistré ces corrections. Autrement dit, il n'y a pas d’idées toutes faites ni d’a priori. J'avais des a priori au mois de novembre et je les ai exprimés, parfois longuement. Aujourd'hui, j'ai pris une attitude de recul. J'ai certes encore certaines idées mais je veux les appuyer sur des faits et je suis intellectuellement prêt à changer. (…) Vous savez bien que j’ai cette volonté de réforme mais ce n'est pas une réforme tous azimuts. A priori, il n'y a aucune réforme particulière. Je suis revenu à une opinion zéro pour chaque langue et je suis encore totalement ouvert à toute forme d'évolution ».

Dès le 31 mai 2005 toutefois, lors d’un second comité préalable à la présentation de l’étude sur les langues au conseil d’administration, le président de RFI indiquait : « Mon approche personnelle sur les langues a évolué au moins sur un point. Je considère à titre personnel que toutes les langues existantes à RFI ont leur raison d'être, inégale mais elles ont leur raison d'être. Je considère donc qu'il faut les conserver d'une manière ou d'une autre. Je considère que les langues dans leur ensemble sont la richesse et la spécificité de RFI et supprimer une langue serait un appauvrissement, et je ne le souhaite pas, en tout cas je ne le demanderai pas, je ne l’imposerai pas (…). Deuxième point sur lequel je n’ai pas évolué, nous devons faire nos réforme sur les langues sans toucher à l’emploi des CDI ».

Ce changement de position allait bien au-delà de la seule « remise à plat » du débat sur les langues. Il opérait un changement fondamental de perspective sur la réforme. Le maintien des langues et des effectifs permanents n’était plus en effet considéré comme une question ouverte mais comme un prérequis. Dès lors, l’objectif de la réforme consistait à retrouver une raison d’être à chaque langue et à adapter son offre et ses moyens, plutôt que de définir des missions in abstracto et d’en déduire les langues à maintenir, développer ou supprimer. Il ne s’agissait plus de « s’adapter à nos missions » comme l’indiquait le président lors du comité d’entreprise du 3 mai 2005, mais « d’adapter nos missions », comme il l’a exprimé au comité d’entreprise réuni le 30 juin 2005 : « Vous l'avez compris, l'exercice que nous faisons sur les langues consiste à chercher à actualiser les missions des langues. C'est un exercice de fond dans lequel nous tenons compte de l’acquis ».

Ce « glissement de sens » a été confirmé au cours de l’instruction par le président de RFI en ces termes : « Dès lors qu’aucune priorité stratégique claire n’avait été énoncée par les tutelles et que tout plan social était proscrit, il convenait d’agir en chef d’entreprise. La réforme a donc consisté à employer au mieux les personnels existants, et à redonner du sens à leur action en redéfinissant leurs missions de manière à englober toutes les rédactions dans le projet de l’entreprise. Une hiérarchisation des langues a néanmoins été mise en œuvre, dans l’adaptation de l’offre et des moyens de chaque rédaction. Mais en considérant que l’ensemble des langues devait être maintenu ».

Conformément à cette logique nouvelle, le document relatif aux « orientations générales sur la réorganisation du dispositif de RFI en langues étrangères » présenté en octobre 2005 indiquait en préalable : « La réorganisation envisagée n’implique la suppression d’aucune langue en tant que telle. Elles constituent, chacune pour ce qu’elle est, la richesse de RFI. RFI ne se privera donc d’aucune de ses 19 langues étrangères, même si, pour certaines d’entre elles, le mode traditionnel d’expression, aujourd’hui exclusivement radio, peut être appelé à évoluer ». Le président proposait ensuite une redéfinition des missions des langues, qui concernait l’ensemble des rédactions :

- la mission traditionnelle, destinée à combler le déficit démocratique de certains pays (Chine, Vietnam, Iran, Russie, pays arabes) ;

- une mission d’influence spécifiquement française (Afrique, Amérique latine, Turquie, Cambodge, Laos voir Portugal au titre de la défense de la lusophonie) ;

- une mission d’information européenne et internationale en langues pour les pays européens (Allemagne, Roumanie, Pologne, Bulgarie, Serbie, Croatie, Albanie).

Ces garanties et l’importance de la concertation interne n’ont pas suffi à emporter l’assentiment des représentants du personnel. Ainsi, la présentation des orientations stratégiques de la réforme aux comités d’entreprise du 29 septembre et du 3 octobre 2005 a donné lieu au vote d’une résolution refusant le vote en l’absence d’éléments chiffrés sur les perspectives de suppression de CDD et le financement des développements envisagés. Lors du comité suivant consacré au sujet, le 26 janvier 2006, a été votée une nouvelle résolution confirmant la première, tandis que le droit d’alerte du comité était déclenché. Trois rapports d’expertises ont ainsi été commandés aux cabinets Syndex et Tandem, dont le dernier sur la méthode employée pour mener la réforme. Parallèlement, ont été organisés, sous l’égide de la directrice des rédactions en langues étrangères, des échanges avec chaque rédaction afin de préciser la réorganisation de chacune d’entre elles. Comme pour l’étude sur les langues, le projet de réforme a fait l’objet d’une présentation pour information lors des comités des 8, 20 et 29 juin et du 4 juillet 2006. Il a finalement été soumis pour consultation au comité du 3 octobre 2006, et a donné lieu à un vote négatif.

La réduction des ambitions de la réforme n’a pas échappé aux tutelles, comme en témoigne la réserve exprimée par la direction du budget au conseil d’administration du 3 juin 2005 : « Vous avez dit « a priori toute langue est légitime ». Je comprends à travers ces mots qu’effectivement, c’est le patron de la société qui s’exprime à travers l’identité de RFI et, à travers ces mots, on comprend que RFI est une entreprise qui a une forte identité, une forte culture d’entreprise. Je voudrais simplement exprimer le fait que derrière la légitimité, mais je crois que vous avez également souligné ce point, il y a également la légitimité par rapport à la mission de RFI qui est une mission de service public puisqu’il s’agit d’un radio ayant une mission de service public. Cette dimension de service public doit rester au cœur de la réflexion qui anime ce débat, notamment sur les pertinences des langues ».

De même, lors du conseil d’administration du 10 octobre 2006 consacré à la réforme proprement dite : « C’est une démarche pragmatique. Nous partons de l’existant. C’est le bon sens. En revanche, aller, un peu trop directement à mon sens, vers la conclusion que la structure actuelle sur la partie du partage entre rédaction langue française, ensuite du partage entre les différentes rédaction en langues et l’existence même de chacun des 19 langues, affirmer que chacune des 19 langues ne doit pas évoluer à priori, puisque c’est bien quelque chose qui est posé en a priori de ce rapport, j’avoue, me laisse un peu sur ma faim. J’aurais préféré une analyse qui permette de se poser vraiment les questions (…). A chaque fois, on cherche à faire bouger les choses lorsque ce constat n’est pas satisfaisant tout en maintenant la structure (…) ».

Pour autant, et bien que la réforme n’ait fait l’objet que d’une information du conseil d’administration, sans vote formel, les tutelles ont semblé s’y résoudre. Ainsi peut-on lire dans une note MAE du 9 mai 2005 : « Comme cela était attendu, l’insistance est mise avec pertinence sur les débouchés du site Internet (lequel doit impérativement être musclé en langues), ce qui est donc une alternative, dès lors qu’un plan social est à proscrire ». Et dans une note de la DDM du 6 octobre 2006 : « L’ampleur [de cette réforme] reste relativement modeste. Toutefois, en l’absence de plan social et compte tenu du climat social complexe de la société, elle constitue un effort estimable ».

BILAN ET PERSPECTIVE DE LA RÉORGANISATION DE 2006

Compte tenu du contexte, la réforme finalement adoptée en octobre 2006 apparaît logique. Posant comme préalable le maintien des rédactions et de leurs effectifs permanents, la réorganisation se limite à adapter les formats et les horaires des programmes, les modes de diffusion, et les effectifs en CDD des rédactions.

Celle-ci est néanmoins doublement en retrait au regard des constats établis dans le rapport de l’Inspection des finances de 2003 et de l’étude sur les langues d’avril 2005, tant sur la coordination et l’harmonisation de la qualité des contenus entre les différentes rédactions, que sur l’allocation des moyens existants.

L’adaptation de l’offre et des moyens des rédactions en langues

La réforme consiste en premier lieu à adapter l’offre des différentes rédactions. Les modifications sont de trois ordres : six rédactions (turc, créole, laotien, polonais, roumain, serbo-croate) voient leur production radio diminuer et, pour les deux premières, recentrée sur la seule diffusion Internet. Pour le roumain, cette baisse de la production à Paris est compensée par la hausse de la production de la filiale locale.

Cinq rédactions (cambodgien, vietnamien, russe, allemand et espagnol) voient leur production maintenue (quoique les formats et horaires soient remaniés). Pour les trois premières est envisagée en complément la création d’un site Internet.

Enfin, la réforme prévoit l’augmentation de la production de six rédactions (anglais, portugais, brésilien, persan, mandarin et albanais) et, pour le persan, la création d’un site Internet. La hausse la plus remarquable concerne la rédaction en anglais, qui doit passer de 33,5 h à 91 h par semaine, soit 13h de programmes par jour contre 6 h auparavant. La hausse de la production en albanais est conditionnée à la mise en place d’un programme commun avec une radio locale (Radio Tirana). Au total, la production de RFI en langues doit passer de 221 h à 267 h par semaines, soit une hausse de 20 %.

- Evolution de la production par langues (en heures hebdomadaires)

 

Avant réforme

Après réforme

Différence

turc

1,0

0,0

- 100 %

créole

0,5

0,0

- 100 %

laotien

7,0

1,8

- 75 %

polonais

15,8

7,0

- 56 %

roumain

16,3

7,3

- 55 %

serbo-croate

17,5

10,0

- 43 %

cambodgien

7,0

7,0

0 %

vietnamien

14,0

14,0

russe

14,0

14,0

allemand

14,0

14,0

espagnol

28,0

28,0

lusophones

24,8

28,0

+ 13 %

persan

10,5

14,0

+ 33 %

mandarin

14,0

21,0

+ 50 %

anglais

33,5

91,0

+ 172 %

albanais

3,5

10,0

+ 186 %

Total

221,3

267,1

+ 20 %

Source : D’après le document présentant la réforme par langues, versions de juin et de septembre 2006.

Si la réforme pose comme préalable le maintien de l’ensemble des rédactions, la nouvelle répartition des volumes de production dessine néanmoins plusieurs lignes de force. Avec la hausse de la production en anglais et en portugais, la réforme tend à développer l’offre de RFI à destination de l’Afrique. Il en est de même pour les deux zones jugées prioritaires que sont la Chine et l’Iran. A l’exception du laotien en recul, la part de l’offre à destination de l’Amérique latine et de l’Asie du Sud-Est demeure inchangée. Enfin, à l’exception de l’albanais en progression et de l’allemand, la réforme opère une réduction globale des programmes en langues européennes.

Corollaire de la redéfinition de l’offre de programme, la réforme opère en second lieu une réallocation des moyens.

Sur le plan global, les effectifs des rédactions passent de 203,5 à 199 ETP. En leur sein, les CDI augmentent de 15 % et les CDD nets (hors diminution liée à l’intégration en CDI) diminuent de 20,8 %. La part des CDI dans l’effectif global passe ainsi de 76 % à 90 %.

L’augmentation des CDI correspond à deux phénomènes, les augmentations nettes et les intégrations de CDD. En premier lieu, dans sept rédactions (cambodgien, espagnol, laotien, persan, roumain, russe, vietnamien), le nombre de CDI est augmenté par transformation de temps partiels en temps pleins, à hauteur de 4,8 ETP. Cette hausse est toutefois presque compensée par le transfert de 3,5 ETP de quatre rédactions (albanais, allemand, polonais, roumain) dans les filiales locales ou au pôle Europe de la rédaction en français. Le transfert de l’unique CDI de la rédaction créole au pôle Europe fait disparaître la rédaction. En second lieu, et à titre principal, le nombre de CDI est augmenté à hauteur de 22,5 ETP par la mise en œuvre des accords d’intégration de personnels non permanents, dans 15 des 17 rédactions.

Symétriquement, la baisse des CDD s’explique pour partie par les intégrations (22,5 ETP), et pour partie par des diminutions nettes (4,3 ETP). Hors intégration, le recours aux CDD baisse donc de 20,8 %. Ce résultat est obtenu par la diminution, dans huit rédactions sur 17, du taux de remplacement des journalistes, par un remaniement des tableaux de service et, dans certains cas, une séparation entre production et présentation.

-  Evolution des effectifs de journalistes par langues

 

Avant réforme*

Après réforme

Différence

 

CDI

CDD

Total

CDI

Dont Intégration

CDD

Total

CDI

CDD nets**

Total

créole

0,50

0,98

1,48

0,00

 

0,00

0,00

-100 %

- 100 %

- 100 %

turc

1,00

1,03

2,03

1,00

 

0,00

1,00

0,0 %

- 100 %

- 50,7 %

polonais

11,00

2,32

13,32

11,00

1,00

0,00

11,00

0,0 %

- 100 %

- 17,4 %

laotien

5,70

2,20

7,90

7,00

1,00

0,00

7,00

22,8 %

- 100 %

- 11,4%

serbo-croate

8,00

3,11

11,11

9,00

1,00

1,17

10,17

12,5 %

- 44,7 %

- 8,5 %

roumain

8,50

2,21

10,71

10,50

1,50

1,20

11,70

23,5 %

69,2 %

9,3 %

allemand

7,00

3,38

10,38

7,00

1,00

2,61

9,61

0,0 %

9,7 %

- 7,4 %

vietnamien

8,50

3,30

11,80

10,00

1,00

1,31

11,31

17,6 %

- 42,9 %

- 4,1 %

russe

9,80

1,91

11,71

11,80

1,00

1,43

13,23

20,4 %

57,4 %

13,0 %

cambodgien

7,00

1,20

8,20

8,50

1,00

0,40

8,90

21,4 %

100,0 %

8,5 %

espagnol

21,57

7,00

28,57

26,07

4,00

3,50

29,57

20,9 %

16,7 %

3,5 %

lusophones

19,00

3,48

22,48

21,00

2,00

1,88

22,88

10,5 %

27,0 %

1,8 %

persan

8,50

4,15

12,65

11,00

2,00

2,26

13,26

29,4 %

5,3 %

4,9 %

mandarin

15,00

4,28

19,28

16,00

1,00

2,70

18,70

6,7 %

- 17,6 %

- 3,0 %

anglais

21,10

5,30

26,40

25,10

4,00

1,30

26,40

19,0 %

0,0 %

0,0 %

albanais

3,00

2,50

5,50

3,50

1,00

0,70

4,20

16,7 %

- 53,3 %

- 23,6 %

Total

155,17

48,35

203,52

178,47

22,50

20,47

198,94

15,0 %

- 20,8 %

- 2,3 %

(*) Effectifs 2005

(**) CDD « nets » i.e. ratio calculé hors intégration (total 2006 rapporté au total 2005 – intégrations).

Source : D’après le document présentant la réforme par langues, versions de juin et de septembre 2006.

Au niveau de chaque rédaction, l’évolution des moyens suit de manière variable l’évolution de la programmation : les six rédactions dont la production diminue voient leurs effectifs globaux diminuer par la baisse des CDD. La rédaction roumaine fait toutefois exception avec une hausse globale de ses effectifs de 9,3 %, reposant sur une création nette de 0,5 ETP en CDI et une intégration de 1,5 ETP en CDI alors que les CDD passent de 2,2 à 1,2 ETP.

Parmi les cinq rédactions dont le volume de production est inchangé, l’allemand et le vietnamien voient leurs effectifs globaux diminuer. Le russe, le cambodgien et l’espagnol voient quant à eux leurs effectifs globaux augmenter, par une hausse des CDD nets et, pour la rédaction espagnole, une création de 0,5 ETP en plus des quatre intégrations de CDD prévues. Cette hausse, justifiée dans les documents pour le russe et le cambodgien par la création du site Internet (quoique le raisonnement n’ait pas été appliqué pour le vietnamien), est moins compréhensible pour l’espagnol.

Enfin, s’agissant des rédactions dont la production est destinée à augmenter, les évolutions sont très diverses. Les rédactions lusophone et persane voient leurs effectifs augmenter par la hausse des CDD nets. Plus étonnamment, les effectifs des trois rédactions dont la production est supposée augmenter le plus stagnent ou diminuent, par une diminution de leurs CDD nets. La création de trois fonctions de chef édito au sein de la rédaction anglophone, et de 2 chefs édito au sein de la rédaction chinoise, doit permettre l’augmentation de la production à effectifs quasi constants.

L’évolution des moyens de chaque rédaction à court terme est complétée par des objectifs cibles d’effectifs permanents par rédaction à horizon 2009, décrits dans une note du 24 juillet 2006 : « Pour les six langues dont la production sera réduite [albanais, laotien, polonais, roumain, serbo-croate et allemand dans la version initiale], des objectifs cibles en termes d’effectifs sont fixés à l’horizon 2009. Ces objectifs sont d’ores et déjà connus de toute l’entreprise. La réduction des effectifs (17 à 23) sera effectuée par redéploiements internes, départs à la retraite et départs négociés ». En pratique, la production de l’allemand et de l’albanais n’a pas été diminuée, les effectifs après réforme revus à la hausse mais les effectifs cibles inchangés, portant de 20 à 26 les diminutions prévues sur ces six rédactions. Les projections ont par ailleurs été étendues à toutes les rédactions, à l’exception du turc, portant les diminutions globales d’effectifs prévues de 17 à 41 :

-  Perspective 2009 des effectifs journalistes CDI par langues

 

Effectif 2005

Après réforme

Perspective 2009

Différence

créole

1

0

0

 

turc

1

1

nc

nc

albanais

3

4

3 à 4

0 à +1

polonais

11

11

4 à 5

-6 à -7

roumain

9

11

4 à 5

-6 à -7

serbo-croate

8

9

4 à 5

-4 à -5

allemand

7

7

4 à 5

-2 à -3

laotien

6

7

4 à 5

-2 à -3

cambodgien

7

9

7 à 8

-1 à -2

vietnamien

9

10

9 à 10

0 à -1

russe

10

12

9 à 10

-2 à -3

persan

9

11

9 à 10

-1 à -2

mandarin

15

16

16 à 17

0 à +1

portugais

19

21

20 à 21

0 à -1

espagnol

22

26

22 à 26

0 à -4

anglais

21

25

22 à 30

-3 à -5

Total

155

178

137 à 161

- 17 à -41

Source : Réorganisation du dispositif en langues étrangères, versions de juin et de septembre 2006.

Cette projection des moyens esquisse des lignes de forces plus marquées que la nouvelle répartition de l’offre : les rédactions des langues européennes sont recentrées sur un effectif réduit ; les langues d’Asie du Sud-Est sont dotées d’effectifs relativement stables autour d’un effectif moyen de neuf journalistes – à l’exception du laotien – comme les rédactions russe et persane. Enfin, la nouvelle répartition met en évidence quatre grandes rédactions, le chinois, le portugais, l’espagnol et l’anglais.

La réorganisation de la rédaction en français et le « bi-média »

RFI a engagé fin 2005 une réorganisation des rédactions en français et Internet parallèle à celle des langues, et qui fait suite à la décision de conduire les réformes des rédactions en français et en langues de manière séparée en novembre 2004 (voir supra).

A l’instar de la réforme des langues étrangères, la réorganisation de la rédaction en français et la mise en place de l’antenne multimédia ont fait l’objet de longues discussions au comité d’entreprise195. Celles-ci se sont toutefois déroulées dans un intervalle de temps nettement plus réduit, et ont donné lieu à des votes moins défavorables aux réformes196. Initiée en octobre 2005, la réforme des antennes a été présentée au conseil d’administration lors de sa séance du 10 octobre 2006 et pris effet le 28 octobre 2006, avec l’entrée en vigueur de la grille d’hiver. L’antenne multimédia a quant à elle été mise en place à partir de février 2007 et son outil principal, le « RFIL », été déployé à l’automne 2007.

Ces réformes, destinées à mutualiser la production d’information à destination des différents supports de diffusion – radio et Internet – ouvrent des perspectives d’avenir pour RFI. Leur portée demeure toutefois aujourd’hui limitée, au sein même de la rédaction en français mais surtout dans les rédactions en langues.

Les ambitions de la réforme

Jusqu’en 2005, la rédaction en français de RFI était organisée en trois structures rédactionnelles : la direction de l’information, la direction des magazines et la direction Internet. Cette organisation posait le double problème de la cohérence éditoriale des contenus produits, les directions étant faiblement coordonnées entre elles, et de la déperdition des moyens, la production Internet étant réalisée par une équipe dédiée197, sans lien avec les journalistes radio alors même que les sujets traités étaient souvent les mêmes.

La réforme de la rédaction en français procède donc d’une double ambition : repenser les rapports entre production et diffusion des programmes d’une part, et repenser les relations entre production radio et production Internet d’autre part. Elle s’est déroulée en trois temps.

En octobre 2005, ont été créés au sein de la rédaction en français deux postes de directeurs d’antenne, l’un pour l’Afrique et l’autre pour le reste du monde. Distincts des directeurs de rédaction et des chefs de services régionaux chargés de coordonner la production, les directeurs d’antenne ont été chargés d’une fonction de stratégie et de prospective axée sur la programmation et la préparation de la grille. Pour remplir cette mission, ceux-ci pouvaient s’appuyer sur les travaux de la direction des affaires internationale et de la direction des études sur les résultats d’audience, les retours d’auditeurs et ceux du service du suivi d’antenne, rebaptisé direction du suivi et de la programmation. Parallèlement, a été créé à titre expérimental un « pôle Europe », regroupant le « desk Europe » du service international et les magazines consacrés à l’Europe (à l’époque, « Accents d’Europe » et un magazine sur les questions européennes).

Ces deux innovations ont largement préfiguré les axes de la réforme de la rédaction en français présentée un an plus tard dans un document intitulé « Organisation de la direction générale adjointe de l’information et des antennes », et réalisée en octobre 2006. La réforme procède en effet à la suppression des trois anciennes directions – de l’information, des magazines et d’Internet – correspondant aux contenus, et les remplace par quatre directions, distinguant la production d’information d’une part, et sa diffusion :

- Sont regroupés au sein d’une « direction de la rédaction en français » les anciens services de la direction de l’information ainsi que l’ensemble des magazines thématiques, répartis en 4 pôles régionaux (France, Afrique, Europe et International) et 4 pôles thématiques (Sports, Culture, économie, sciences) sur le modèle du pôle « Europe » créé en 2005 ;

- Sont répartis entre trois « directions d’antenne » Afrique, Monde et Multimédia, les deux directeurs d’antenne préexistants et l’ancienne rédaction Internet recentrée sur l’édition (c’est-à-dire la valorisation de la production) et la diffusion.

Au sein de ce nouvel ensemble, l’antenne multimédia fait l’objet d’un projet de réforme spécifique. Celle-ci est issue des réflexions d’un groupe de travail sur le développement du multimédia constitué par le président de RFI en mars 2006, dont le rapport a été rendu en juillet 2006 avec un double objectif : mieux valoriser la production de RFI en français et en langues, et améliorer le contenu du site Internet conformément aux attentes des internautes. Pour atteindre ces objectifs, la réforme comporte trois volets : la « multimédiatisation » de la production qui, de radio ou Internet, doit devenir « bi-média », la mise en place d’une antenne multimédia recentrée sur l’édition de contenus et non leur production, et la mise en place d’un outil de mutualisation des contenus : le RFIL.

Le système d’information RFIL est destiné à assurer l’interface entre les applications DALET (sons) et OpenMedia (textes). A ces deux éléments associés à chaque « papier » produit par la rédaction en français, peuvent être ajoutés des images ou liens hypertextes. A ce titre, RFIL sert de support pour transformer les anciens contenus sonores et textuels en véritables « dépêches multimédia ». En outre, RFIL comporte un système d’indexation des contenus qui en fait un outil de mise en commun des produits au sein de RFI. Il comporte enfin une interface avec l’application SEDNA de mise en ligne des contenus sur Internet, ce qui en fait le principal lien entre la direction de la rédaction en français chargée de la production (mais aussi, à terme, la direction des rédactions en langues étrangères), l’antenne multimédia chargée de l’édition (ainsi que les autres antennes Afrique et Monde) et la DTSI chargée de la diffusion.


Source : RFI, Rapport « RFI Bi-Media », Juillet 2006

Au total, la création des pôles a vocation à améliorer la cohérence éditoriale entre information et magazines, tandis que la séparation de la production et des antennes et la création de l’antenne multimédia doivent permettre une mutualisation des contenus produits sur le modèle de la « newsroom ».

Les premiers enseignements de la réforme : des résultats prometteurs mais partiels

Si le caractère très récent de la réforme ne permet pas d’en faire le bilan, plusieurs éléments appellent toutefois d’ores et déjà des observations. En effet, les modalités retenues pour l’organisation de la rédaction en français et de l’antenne multimédia, et les caractéristiques techniques de l’outil RFIL limitent la portée des réformes entreprises : la « multi-médiatisation » de la production en amont demeure aujourd’hui très partielle et nécessite un important enrichissement par l’antenne multimédia ; en corollaire, l’antenne multimédia reste aujourd’hui un pôle de production et pas seulement d’édition comme envisagé au départ ; l’outil RFIL quant à lui présente des potentialités fortes mais est aujourd’hui cantonné à un périmètre restreint. Enfin, et surtout, les rédactions en langues étrangères demeurent largement exclues de ce nouveau mode de production.

En premier lieu, la mise en place de contenus « bi-média » au sein d’une rédaction radio et Internet unifiée apparaît aujourd’hui incomplète. A titre d’exemple, si l’association de fichiers textes aux sons radio a été progressivement généralisée parmi les journalistes de RFI, celle-ci n’est que très rarement pratiquée par les pigistes, et notamment les correspondants à l’étranger. Par ailleurs, aucun texte n’est associé aux émissions en direct et aux interviews. Une grande part de la production radio de RFI nécessite donc, pour être transformée « dépêche multimédia » une retranscription, assurée par des scriptes au sein de l’antenne multimédia. Ce phénomène ne concerne pas seulement l’écriture des textes, mais aussi leur validation. Ainsi, alors que les fichiers sons font l’objet d’une validation des secrétaires de rédactions (SDR) de la rédaction en français (se traduisant, dans DALET, par la transformation des fichiers en « PDA », prêts à diffuser), la validation des textes est réalisée au sein de l’antenne multimédia par les responsables d’édition multimédia (REM). Il concerne également l’indexation des dépêches, qui n’est aujourd’hui réalisée par aucun journaliste et assurée par une équipe dédiée au sein de l’antenne multimédia, qui effectue la relecture des textes et leur indexation198.

Par ailleurs, l’ancienne séparation entre journalistes radio et journalistes Internet perdure aujourd’hui au sein de la rédaction en français. Les « papiers » destinés à être mis en ligne sur le site sont arbitrés au sein d’une conférence de rédaction commune le matin mais sont réalisés, au sein de chaque pôle, par des journalistes dédiés, le plus souvent issus de l’ancienne direction Internet. Le manque de formation multimédia des journalistes en place et l’absence de prise en compte de ces compétences dans les recrutements ne facilitent pas non plus le développement de la polyvalence.

Sur le plan juridique enfin, le passage à une production multimédia pleine et entière est subordonné à la conclusion d’un nouvel accord sur les droits d’auteurs. En effet, l’accord de 1999 actuellement en vigueur prévoit, outre la 1ère utilisation radio dont les droits sont cédés à RFI, une 2e utilisation limitée à Internet et assortie d’une rémunération assise sur les recettes publicitaires. Des discussions ont été lancées dès septembre 2006 sur un projet d’accord, largement inspiré de l’accord signé à Radio France en mars 2006, prévoyant l’extension de la 2e utilisation à tous les supports (podcasts, téléphone mobile, télétexte pour la télévision) en contrepartie d’une revalorisation de la rémunération199. Elles n’ont pas encore abouti.

En corollaire, l’antenne multimédia a été effectivement recentrée sur l’édition de contenus mais conserve une part importante de production. Outre la retranscription et la validation des textes associés aux sons par l’équipe RFIL et les responsables d’édition précédemment évoquée, des assistants multimédia assurent l’enrichissement des contenus (iconographie, liens vers d’autres sites, dossiers d’archives). Par ailleurs, l’antenne conserve une capacité de commande propre de piges à des correspondants, et produit des contenus spécifiques pour les pages thématiques du site (culture, sciences, sports et France) et les pages musicales. Aussi, les effectifs rattachés à l’antenne multimédia ont été substantiellement augmentés par rapport à l’ancienne direction Internet, dans le cadre de redéploiements internes.

- Organisation et effectifs de l’antenne multimédia (hors journalistes Internet spécialisés de la rédaction en français).

Service

Effectifs

 

1 Directeur d’antenne

2 secrétaires (PTA)

Rédaction Internet

1 Chef de rédaction Internet

News : 6 responsables d’édition multimédia (REM)

6 journalistes RFIL

2 scripts (PTA)

11 assistants multimédia (PTA)

Thématiques :

4 responsables d’édition multimédia (REM)

4 journalistes multimédia

2 assistants multimédia (PTA)

Multimédia

3 personnes (Nouveaux vecteurs)

Médias partenaires

11 personnes

RFI Musique

3 personnes (1 journaliste et 2 AMM)

Langue française

5 personnes

Total

51

Source : RFI – mai 2007

S’agissant de l’outil RFIL enfin, sa transformation en véritable « banque de données multimédia » est aujourd’hui loin d’être acquise. En effet, les retraitements nécessaires pour constituer les dépêches ont pour conséquence de limiter fortement le volume de la production de RFI présente sur RFIL. Ainsi, sur une production moyenne de 160 sons par jour, seule une trentaine de dépêches quotidiennes sont disponibles sur le RFIL et donc susceptibles d’être réutilisées.

Par ailleurs, les possibilités de partage de l’outil RFIL avec les filiales de RFI voire, comme cela est envisagé, avec des médias partenaires et notamment ceux de l’audiovisuel extérieur français, se heurtent à la question de la compatibilité des outils, RFIL étant construit autour des logiciels utilisés par RFI, DALET et Open Media. L’intégration de sons de Monte Carlo Doualiya, qui utilise le logiciel NETIA, n’apparaît par exemple pas possible en l’état.

Préparation de l’avenir ou réforme introuvable ?

Ajoutée au projet de création de deux rédactions locales en haoussa et en swahili évoquée précédemment, la réforme mise en place à l’automne 2006 conduit à s’interroger sur la portée des modifications apportées à l’organisation des langues, et sur la capacité de la réforme à clore les débats soulevés depuis 2000 sur le sujet. Trois éléments font plus précisément question.

1) Sur la question de la pertinence des différentes rédactions, la réforme apporte une réponse forte en affirmant que les langues existantes de RFI, par delà leur différence, sont toutes constitutives de l’identité et de la richesse de l’entreprise.

Pour autant, le choix des langues confirmé par la réforme – qui découle de l’héritage de RFI et non d’une définition a priori de ses priorités stratégiques – n’apparaît pas nécessairement adapté, ni même conforme à ses missions statutaires. Cette question a été soulevée par la direction du budget au conseil d’administration200.

2) Sur la répartition des moyens entre les différentes rédactions, force est de reconnaître que, en dépit du maintien de toutes les langues, la réforme opère une hiérarchisation plus marquée qu’auparavant. En ce sens, elle répond partiellement au souci d’améliorer l’adéquation entre les moyens, les priorités et les résultats des différentes rédactions. La réduction du périmètre des plus petites rédactions doit en effet permettre le développement des quatre principales.

Pour autant, à moyens constants, le maintien de toutes les langues ne règle pas la question du développement des langues nouvelles, sauf à généraliser le modèle des filiales locales.

Par ailleurs, la réforme aggrave plus qu’elle ne résout le problème des rédactions dont la petite taille ne permet pas d’atteindre un volume production suffisant pour intéresser un auditoire. La diffusion sur Internet ou par l’intermédiaire de radios partenaires de certaines langues ne doit pas se résumer au choix du moyen de diffusion le moins coûteux pour des rédactions dont la réforme n’a pu aboutir. Dans cette perspective, l’opportunité de maintenir des rédactions dans un format très réduit paraît contestable.

En effet, l’analyse de la fréquentation des sites Internet en langues montre que la diffusion sur Internet se fait aujourd’hui majoritairement au profit du site en français, qui totalise 85,7 % des visites mensuelles.

- Nombre moyen de visites mensuelles des sites en langues en 2007

Langue

Nombre de visites mensuelles

Part du total

Langue

Nombre de visites mensuelles

Part du total

Français

2 259 225

85,67 %

Serbo-croate

3 240

0,12 %

Arabe

106 123

4,02 %

Allemand

3 047

0,12 %

Chinois

73 596

2,79 %

Russe

2 779

0,11 %

Vietnamien

36 906

1,40 %

Portugais

2 221

0,08 %

Persan

33 648

1,28 %

Polonais

1 960

0,07 %

Cambodgien

30 570

1,16 %

Roumain

1 544

0,06 %

Espagnol

47 178

1,79 %

Créole

1 295

0,05 %

Brésilien

15 007

0,57 %

Albanais

641

0,02 %

Anglais

9 300

0,35 %

Turc

445

0,02 %

Laotien

7 374

0,28 %

Bulgare

367

0,01 %

     

Total

2 636 466

 

Source : Xiti, 1er semestre 2007 in Etude de fréquentation Internet, Direction des études de RFI, mai 2007

Pour 10 des 19 rédactions en langues étrangères, le trafic Internet ne dépasse pas 3240 visiteurs par mois. Pour la rédaction turque, destinée à être diffusée exclusivement sur Internet, le nombre de visites mensuelles s’établit à 445 (soit moins de 15 par jour), juste devant le bulgare (367). La diffusion Internet ne permet donc pas de développer l’audience de manière décisive pour les rédactions ayant déjà, au départ, une audience radiophonique faible.

L’analyse de la répartition des internautes par langues et par pays met au demeurant en évidence le fait que l’audience Internet complète mais ne se substitue pas à l’audience radiophonique.

-  Origine géographique des internautes des sites en langues

 

Visites mensuelles

Visites en provenance de la zone

1ère ou 2e zone d’origine

2e ou 3e zone d’origine

Arabe

106 123

34 939

Moyen-orient (1er rang)

32 654

Europe

27 323

Amérique nord

Chinois

73 596

52 874

Chine et Taïwan (1er)

10 334

France

5 712

Amérique nord

Espagnol

47 178

18 712

Amérique latine (1er)

16 506

Europe

11 130

Amérique nord

Brésilien

15 007

7 135

brésil (1er)

1 683

France

1 497

Portugal

Polonais

1 960

879

Pologne (1er)

299

France

286

Amérique nord

Roumain

1 544

503

Roumanie (1er)

318

Amérique nord

240

France

Allemand

3 047

1 442

Allemagne (1er)

491

France

284

Amérique nord

Turc

445

77

Turquie (2e)

125

France

73

Amérique nord

Bulgare

367

51

Bulgarie (3e)

85

France

80

Amérique nord

russe

2 779

408

Russie (3e)

746

France

530

Amérique nord

Serbo-croate

3 240

1 427

Europe hors France (3e)

767

Amérique nord

446

France

Vietnamien

36 906

3 363

Vietnam (3e)

17 453

Amérique nord

8 596

France

Cambodgien

30 570

525

Cambodge (4e)

15 879

Amérique nord

8 005

France

Anglais

9 300

385

Afrique (4e)

3 681

Amérique nord

1 256

France

Portugais

2 221

219

Afrique (4e)

1 070

Europe

576

Amérique nord

Créole

1 295

31

Haïti et st domingue (4e)

729

Amérique nord

263

France

Persan

33 648

1 271

Iran (6e)

10 045

Amérique nord

4 468

France

Albanais

641

18

Albanie (6e)

176

France

154

Amérique nord

Laotien

7 374

89

Laos (9e)

4 062

Amérique nord

1 827

France

Source : Xiti, 1er semestre 2007 in Etude de fréquentation Internet, Direction des études de RFI, mai 2007

Sur 19 langues étrangères, seules sept ont pour première cible l’auditoire du pays ou du continent où est parlée la langue à titre principal : l’arabe, le chinois, les langues sud-américaines – espagnol et brésilien – et trois langues européennes – le polonais, le roumain et l’allemand. Symétriquement, dans toutes les langues, on retrouve un poids prépondérant des internautes en provenance d’Europe (et en son sein de France) et d’Amérique du Nord. L’audience des sites Internet de RFI se trouve donc visiblement davantage parmi les diasporas des pays cibles, résidant en France ou à l’étranger, que parmi les habitants des pays eux-mêmes. Par suite, le report d’une partie de la diffusion vers Internet n’est pas seulement un choix technique, mais également un choix stratégique sur les publics cibles de la radio.

3) S’agissant de la qualité des contenus produits par les rédactions et de l’harmonisation de la ligne éditoriale de la radio dans son ensemble enfin, la réforme des langues telle qu’elle a finalement été mise en œuvre n’apporte pas de réponse probante. La séparation des réformes de la rédaction en français et des langues a en effet limité les possibilités de coordination entre les différentes langues.

Elle limite également les marges de mutualisation, tant des contenus que des moyens développés dans chaque zone. Or, dans ce domaine, des marges existent. Ainsi, pour la couverture du sommet de la francophonie à Bucarest en 2006, 28 personnes ont été mobilisées dont six techniciens et quinze journalistes. Parmi ces derniers, neuf journalistes appartenaient à la rédaction en français, et six aux rédactions en langues étrangères. La même année, 27 personnes ont été envoyées au festival de Cannes dont huit journalistes de la rédaction en français et sept des rédactions en langues étrangères. Ces chiffres montrent combien la mutualisation des moyens peut progresser dans la couverture des événements.

Or, en termes de moyens, les perspectives d’économies sur les coûts de diffusion apparaissent désormais très limitées. Après la renégociation du contrat TDF en 2006, les coûts de diffusion sont désormais rigides à horizon 2011. Au-delà de cette date, les marges d’économies sont incertaines, aucun vecteur de diffusion n’offrant à ce jour une alternative solide en Afrique, sur laquelle la diffusion en ondes courtes a été presque exclusivement concentrée.

La recherche de synergies et d’une plus grande coordination entre les rédactions en français et en langues étrangères apparaît donc plus que jamais nécessaire.

CONCLUSION

Au terme de ces constatations, il apparaît que la société nationale de programmes RFI exerce ses activités dans un contexte particulièrement difficile. L’absence d’orientations stratégiques explicites contribue à renforcer la crise existentielle d’une radio internationale confrontée à un monde en mutation et à la montée en puissance de la télévision, en particulier au sein de l’audiovisuel extérieur français. Sa situation financière reste marquée par la tension entre la croissance de ses charges et la faible progression de ses ressources, que ni les réformes entreprises, ni la baisse des coûts de diffusion n’ont permis de compenser. Aucune nouvelle baisse des coûts de diffusion n’est par ailleurs à attendre, à moyen terme, pour financer l’évolution des dépenses de personnel ou le coût social d’une restructuration de grande ampleur.

Dans ce contexte, la réforme en cours de l’audiovisuel extérieur constitue une opportunité réelle pour RFI, afin de rendre les arbitrages et donner l’impulsion qui ont manqué aux chantiers de la numérisation et des langues pour aboutir. Toutefois, la redéfinition des missions de RFI et ses conséquences en termes d’organisation interne apparaissent comme des préalables. Quels que soient le cadre institutionnel et le degré d’intégration des structures qui seront finalement retenus dans la holding de l’audiovisuel extérieur, plusieurs éléments constituent, pour la Cour, des conditions nécessaires à la réussite de toute réforme.

L’amélioration de la situation de RFI implique en premier lieu que l’Etat clarifie le rôle et la place qu’il entend donner à la radio au sein de l’audiovisuel extérieur. La définition des priorités stratégiques assignées à RFI en termes de zones géographiques, de publics, de programmes, de langues et de support de diffusion, ne peut être différée davantage au regard du coût social et financier du statu quo actuel. Seule l’affirmation d’une ambition claire pour la société pourra fournir un cadre à la conduite des changements qui s’imposent et remobiliser les personnels sur un projet d’avenir.

Les expériences antérieures de réforme menées à RFI incitent en second lieu à prendre la pleine mesure des changements à entreprendre et à la prudence dans l’évaluation des gains de productivité correspondants. La recherche de synergies aujourd’hui envisagée entre sociétés de l’audiovisuel extérieur suppose en effet de réaliser les gains de productivité que RFI n’est pas parvenue à trouver au terme de dix années de réformes. Cela passe notamment par la redéfinition des tâches respectives des techniciens et journalistes et une réelle mutualisation de la production en français et en langues.

Sauf à s’exposer aux mêmes infortunes, les réformes à venir devront en tout état de cause tenir compte du bilan des réformes entreprises par RFI au cours des dernières années, et des principales difficultés sociales, techniques et de pilotage auxquelles elles se sont heurtées. En particulier, l’histoire de RFI au cours des quinze dernières années montre combien toute réforme d’ampleur nécessite des moyens pour financer le surcoût initial d’une restructuration et une volonté dans la durée pour la mener à son terme.

Enfin, il conviendra que les gains de productivité attendus soient réinvestis dans le cadre d’une gouvernance rénovée au profit des projets de développement et d’adaptation de RFI à son environnement. Ceci suppose qu’ils ne soient pas absorbés par une hausse non maîtrisée des dépenses de personnel ni prélevés au profit du budget de l’Etat. La nécessaire recapitalisation de l’entreprise d’ici le 31 décembre 2009 offre à ce titre l’occasion d’obtenir des contreparties au redressement de sa situation financière, et de conforter la responsabilité de sa gouvernance, afin de ne pas risquer de renouveler les rendez-vous manqués de la dernière décennie.

*

* *

AVIS SUR LES COMPTES

Dans la limite des investigations auxquelles elle a procédé et des observations relatives à la signification des résultats des exercices 2000, 2001 et 2002 formulées aux pages 59 et suivantes du présent rapport, la Cour estime que les comptes annuels de la société Radio France Internationale pendant la période sous revue sont réguliers et sincères et donnent une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise.

______________

Fait et délibéré à la Cour des comptes, troisième chambre, sur le rapport de Mme Maïa Wirgin, M. Alain Fontanel, auditeurs, et les observations de M. Gilles Andréani, conseiller maître.

Présents : MM. Jean Picq, président, Guy Mayaud, Mme Anne Froment-Meurice, MM. Pascal Duchadeuil, Gilles Andréani, Jacques Tournier, Mmes Maud Colomé, Jeanne Seyvet, MM. Édouard Couty, Christian Sabbe, Yann Pétel, conseillers maîtres, MM. Louis Zeller, Jean Cadet conseillers maîtres en service extraordinaire, et Mme Maïa Wirgin, M. Alain Fontanel, auditeurs, rapporteurs.

Les vingt sept mars et dix avril deux mille huit.

Le Président de la Troisième Chambre

Jean PICQ

ANNEXE 1 : INCIDENCES DES CONVENTIONS COLLECTIVES ET ACCORDS COLLECTIFS SUR LA GESTION DE RFI

La gouvernance sociale de RFI et ses effectifs sont soumis comme les autres sociétés nationales de programme à :

- la convention collective nationale de travail des journalistes et son avenant audiovisuel (signé le 9 juillet 1983 par l’AESPA et les organisations syndicales SNJ, CFDT et CGT, FO y adhérant en janvier 1984) ;

- la convention collective de la communication et de la production audiovisuelles (signée le 31 mars 1984 par l’AESPA et les organisations syndicales CFDT, FO, et CGC, la CFTC y adhérant en 1986 et la CGT en 1984) ;

- une centaine d’accords d’entreprise signés depuis 1983.

L’examen des dispositifs conventionnels conduit aux remarques suivantes concernant l’évolution des rémunérations, la durée du travail, le paritarisme, la nomenclature des emplois :

I – L’évolution des rémunérations

1. Les « automatismes »

a) Le système salarial des PTA comporte une vingtaine de groupes de qualification au sein desquels se trouvent des échelons (« niveaux indiciaires »). Il instaure une double rémunération de l’ancienneté, par :

- une prime d’ancienneté (0,8 % par an du salaire de référence du groupe de qualification pendant les 20 premières années de carrière, 0,5 % de 21 à 30 ans). Cette seule prime représente 5,85 % de la masse salariale brute des personnels PTA (base 2006)

- des passages automatiques d’échelon.

Par ailleurs, des accords d’entreprise ont étendu des automatismes à des promotions fonctionnelles (passage d’un groupe de qualification à un autre), après un certain nombre d’années d’ancienneté passés sur les groupes de qualification :

- 6 ans sur le groupe de qualification B 7-0 : passage automatique sur le groupe de qualification B 10-0

- 9 ans sur le groupe de qualification B 10-0 : passage automatique sur le groupe de qualification B 18-0

- 10 ans sur le groupe de qualification B 18-0 : passage automatique sur le groupe de qualification B 21-1.

b) S’agissant des journalistes, l’avenant audiovisuel n’instaure pas d’automatismes ; ceux-ci ont été créés en 1994 par les accords dits « Servat » , suite au mouvement de grève ayant paralysé Radio France et RFI à l’automne 1994 au motif des disparités salariales avec France Télévision : une progression automatique est prévue au bout de 3, 5, 8 et 12 ans d’ancienneté.

Suite à un nouveau conflit et au bilan d’application de ces accords, un deuxième accord « Servat » a été conclu, augmentant le coût de ces automatismes par une revalorisation des paliers d’ancienneté.

Compte tenu de la proportion importante de journalistes (un peu plus de 45 % de l’effectif actuel), l’impact de ces accords a été important.

Par ailleurs, un protocole de fin de grève a été signé le 18 février 2004 par le SNJ et le SNJ/CGT prévoyant, comme à Radio France, un dispositif salarial complémentaire. Des négociations se sont donc ouvertes à RFI qui ont abouti à la mise en place de ce dispositif au 1er juillet 2005. Au titre de cet accord, les journalistes perçoivent en paie de décembre une fraction de leur salaire de qualification, hors ancienneté, fixée à 75 % en 2005 et 2006 (vraisemblablement 88 % en 2007 compte tenu des négociations salariales en cours).

A noter que Radio France a signé en 2006 un accord sur le règlement de la question des disparités salariales et l’évolution de carrière des journalistes créant, notamment, de nouveaux paliers d’automatismes. Les organisations syndicales de RFI ont demandé l’ouverture de négociations sur des bases identiques.

2. Les promotions fonctionnelles

Les conventions collectives applicables aux journalistes et aux PTA prévoient des pourcentages d’augmentation fixés à :

- 5 % pour les avancements ou promotions pécuniaires

- 7,5 % pour les promotions fonctionnelles

Ces mesures individuelles sont attribuées en commissions paritaires ; le nombre de mesures est déterminé dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire, dans le respect du cadrage salarial fixé chaque année par les tutelles.

Ce système se caractérise par :

- une absence de liberté de fixation des salaires, sauf à recourir pour l’encadrement aux dispositions du protocole V annexé à la convention collectif (dispositif dit « hors convention) ; 58 salariés sont concernés à RFI ;

- une assez forte rigidité, laissant peu de place aux promotions individuelles.

II – La durée du travail

1. Le passage aux 35 H.

Un accord sur la réduction du temps de travail a été signé en février 2000. Il s’est traduit :

- pour les personnels PTA : par l’attribution de 23 jours de RTT pour les non- cadres et de 18 jours de RTT pour les cadres : le nombre de jours travaillés oscille entre 193 et 202 en fonction des jours de fractionnement et d’ancienneté. Ce nombre de jours travaillés est réduit pour les personnels travaillant la nuit (environ 150 vacations/an).

- pour les personnels journalistes : par l’attribution de 20 jours de RTT : le nombre de jours travaillés est de 196. Ce nombre est réduit pour les journalistes travaillant en cycle, notamment les présentateurs qui, sur un rythme 4/5/5, travaillent un peu moins de 150 jours/an.

2. Rémunération du temps de travail

42 % des personnels PTA perçoit des heures supplémentaires.

La convention collective prévoit des taux de majorations identiques à ceux prévus par la loi pour les 8 premières heures et les heures suivantes. En ce qui concerne les heures de dimanche ou de repos hebdomadaire, elle prévoit 200 % du salaire horaire, 225 % pour les heures accomplies de minuit à 6 H.

RFI émettant 24 H./24, 7 jours/7, avec les contraintes d’organisation du travail qui en découlent, les heures supplémentaires constituent une part non négligeable du salaire, notamment pour les techniciens et les chargés de réalisation, et un élément permanent de leur rémunération.

Journalistes RFI

PTA RFI

Evolution des effectifs de RFI par métiers 2000-2007

 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Administratif

263,0

269,1

290,1

288,5

280,7

279,3

281,8

284,3

Chargé de réalisation

120,6

123,2

124,6

127,0

131,7

134,9

134,9

134,8

Technicien

129,2

133,4

140,2

140,8

138,2

147,8

155,5

147,0

Journaliste

467,2

483,2

506,0

507,9

495,0

496,2

497,1

529,4

Total

980,0

1008,8

1061,0

1064,3

1045,7

1058,2

1069,3

1095,5

ANNEXE 2 : CHRONOLOGIE DE LA RÉFORME DES LANGUES

Date

Document ou événement

9 octobre 2001

Note du MAE diagnostiquant l’inadéquation du dispositif des langues (faiblesse du persan et du turc, disproportion de l’allemand et du polonais, absence d’impact du cambodgien et laotien, absence en Inde).

Octobre 2002

Rapport d’un comité interne sur la régionalisation des rédactions en français et en langues (précisé dans un document de février 2003).

27 décembre 2002

Note du MAE favorable à la création de rédactions haoussa et swahili par suppression de langues devenues peu utiles telles le polonais ou l’allemand.

6 janvier 2003

Compte rendu d’entretien du PDG de RFI avec le ministre délégué à la coopération : proposition du ministre de création de langues par redéploiement et le refus du PDG.

Novembre 2003

Etude sur l’audience de RFI dans le monde par la Direction des études. Présentée au CA du 6 novembre 2003 (la dernière remonte à 1994).

Décembre 2003

Rapport de l’IGF préconisant la mise en œuvre du projet de régionalisation des rédactions en français et en langues en pôles régionaux et l’adaptation des langues à l’auditoire (chiffrage coût auditeur par langue)

28 juillet 2004

Note PDG de RFI proposant la régionalisation des rédactions en français et en langues (- 40 postes) et la possible suppression ou délocalisation de rédactions.

Septembre 2004

Séminaire interne de présentation du projet d’entreprise centré sur quatre langues prioritaires (anglais, arabe, espagnol et chinois) et développement de langues nouvelles par partenariats locaux.

18 novembre 2004

Préavis de grève sur la réforme des langues et les emplois précaires. Vote d’une motion de défiance par l’assemblée générale.

24 novembre 2004

Communiqué annonçant la suspension du projet d’entreprise, dissociant la réforme des rédactions et des langues et lançant une étude préalable sur les langues.

Avril 2005

Etude sur les langues réalisée par RFI. Conclusion de 4 pages annexée au rapport de M. Benhalla, expert indépendant ancien directeur de RFI suggérant la fermeture de plusieurs rédactions.

3-11-12-13 mai 2005

CE. Présentation de l’étude sur les langues au CE (24h de séance), affirmation par le président de son changement de position et de sa volonté de maintenir toutes les langues, calendrier (orientations juin, réforme à l’automne).

17-18 mai et 14 juin 2005

Elections du comité d’entreprise. Les syndicats craignent une présentation de l’étude au CA entre les deux tours, sans communication préalable au CE.

31 mai 2005

CE. Présentation du président de ses premières conclusions sur l’étude des langues en vue du CA du 3 juin : maintien des langues et des CDI, réforme selon 4 critères (géopolitique, audience actuelle, potentiel de diffusion, coût).

3 juin 2005

CA. Présentation de l’étude sur les langues, des conclusions (maintien des langues, 4 critères d’analyse) et des deux phases à venir : grands axes de la réforme puis réorganisation des rédactions langue par langue. Débat sur les langues nouvelles renvoyé au COM.

30 juin 2005

CE. Information du président sur les grands axes de réflexion de la réforme des langues annonçant le maintien de toutes les langues en les adaptant. Fil conducteur européen : hors Afrique, approche par partenariat avec d’autres radios internationales pour le russe, persan, chinois et l’arabe, et partenariats locaux et recentrage sur des contenus européens pour les langues européennes. Statu quo sur l’espagnol, le laotien, le khmer et le vietnamien. Bulletin quotidien sur Internet pour créole et turc. Vote d’une motion annonçant un projet de démantèlement des langues.

29 septembre-3 octobre 2005

CE. Information en vue d’une consultation sur la réorganisation des langues. Vote d’une résolution suspendant le vote dans l’attente d’informations chiffrées sur l’impact de la réorganisation sur les emplois et son coût.

6 octobre 2005

Note du PDG de RFI d’orientation générale sur la réforme des langues : relégitimer et redéfinir les tâches des langues. Pas de suppression de langue ni de CDI, baisse des CDD. 3 axes de développement : mission traditionnelle en cas de déficit démocratique (Chine, Vietnam, Iran, Russie, pays arabes), mission d’influence française (Afrique, Amérique latine, Turquie, Cambodge, Laos), mission d’information européenne pour les langues européennes.

28 octobre 2005

CA. Présentation des orientations générales de la réforme des langues. Accord des tutelles sur les trois missions des langues mais absence de vote et renvoi au COM.

26 janvier 2006

CE. Reprise de l’information en vue d’une consultation sur la réorganisation. Vote d’une résolution sur l’insuffisance d’information, la crainte d’un plan social et déclenchant le droit d’alerte avec demande d’expertise.

23 février 2006

CE. Choix des cabinets Syndex (rapport 21 mars) et Tandem (rapport 20 juin)

8-20-29 juin et 4 juillet 2006

CE. Information sur le projet de réorganisation des langues, langue par langue.

3 octobre 2006

CE. Consultation sur la réorganisation des langues. Vote négatif (2 abstentions, 5 votes contre, 1 refus de vote).

10 octobre 2006

CA. Information de la réforme de l’organisation des langues, sans vote.

troisieme chambre

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51575

   
   

rapport particulier

(art. L. 135-3 et R. 133-3 du code des juridictions financières)

TV5 MONDE SA

Exercices 1999 À 2006

Le présent rapport, qui a fait l’objet d’une contradiction avec les personnes et les organismes concernés, a été délibéré par la Cour des comptes les 20 mars et 10 avril 2008

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PARTIE I :  L’exercice de la tutelle et les orientations stratégiques de TV5 287

I. Les règles de gouvernance 287

A. Les organes de décision et de consultation 288

1. Rôle et composition des différents instances 288

2. Les principales orientations exprimées au sein de ces instances 289

3. Cinq présidents se sont succédé au cours de la période sous revue 290

B. Les règles de financement et de participation au capital 291

1. Le capital et sa composition 291

2. Le budget et sa structure 291

C. L’évolution des structures 295

1. Le bilan positif des réformes des structures de 2001 et 2004 295

2. La situation institutionnelle : une complexité préjudiciable 296

II. Les orientations stratégiques 296

A. La Charte de TV5 et le plan stratégique 296

1. Les plans précédents 296

2. Le plan stratégique actuel : 2006-2009 298

B. L’absence de contrat d’objectifs et de moyens 300

C. Le projet annuel de performance 301

1. Le volet performance 301

2. Le volet financier 301

3. Le pilotage de l’audiovisuel extérieur 301

III. La création de France 24 et le projet de reforme de l’audiovisuel exterieur 302

A. La création de France 24 a perturbé TV5 Monde 302

1. Les programmes d’information ont eu un rôle central dans la politique de développement de TV5 Monde au cours de la période sous revue 302

2. La coopération avec France 24 a tourné court 303

B. Les perspectives de TV5 Monde 303

1. L’arrivée de France 24 peut modifier les perspectives de TV5 Monde 303

2. L’évolution technique imposera à TV5 Monde une réflexion stratégique 304

C. Le projet de réforme de l’audiovisuel extérieur 305

1. Les relations avec les Etats partenaires se sont tendues 305

2. Le caractère tardif de la décision de rapprochement augmente indirectement le coût de la réforme 306

PARTIE II :  Les coûts et les moyens mis en œuvre par l’entreprise 309

I. Les comptes 309

A. Les comptes de capitaux propres 309

B. Les provisions 309

1. Les provisions pour risques 309

2. Les provisions pour charges 310

C. Les dettes 310

D. Les produits constatés d’avance et les reports de subvention 311

E. TV5 Monde ne valorise pas dans ses comptes les apports de programme des chaînes partenaires 312

F. La trésorerie 312

G. La masse salariale 312

II. Analyse globale de l’évolution budgétaire de TV5 Monde 313

A. Les coûts des programmes et les frais de structure ont fortement augmenté depuis 2003 313

B. Le plan stratégique 2006-2009 n’a pas ete dote des financements escomptés 313

III. Les publics et les zones geographiques ciblés :
le coût du sous-titrage
314

A. La cible francophone n’est pas jugée suffisante 314

B. Le sous-titrage permet de viser d’autres publics 314

1. Le sous-titrage a fait l’objet d’efforts budgétaires significatifs 314

2. Les limites techniques du sous-titrage restreignent sa portée réelle 316

IV. Le réseau de TV5 Monde a un coût élevé mais en diminution 316

A. Le réseau primaire de diffusion : une diffusion satellitaire mondiale dont les coûts se concentrent sur l’Europe 317

1. Une diffusion mondiale dont les coûts diminuent 317

2. La question de la diffusion analogique en Europe 318

B. Le réseau de distribution 320

1. Un réseau commercial à animer et piloter 320

2. L’accès au réseau de distribution est l’objet d’une concurrence croissante entre les chaînes de télévision 322

3. D’autres modalités de distribution se développent 323

4. Les coûts de la distribution sont très variables suivant les territoires 324

C. Les nouveaux modes de diffusion et de distribution 325

1. Un site internet conçu comme un média à part entière 325

2. Un site internet très populaire 325

3. Une veille active sur le « non linéaire » 326

V. Le coût des programmes s’est accru 326

A. Les attentes du public ne sont pas reellement connues 326

B. Une grille à visée généraliste 327

1. Des programmes pour tous publics 327

2. Des programmes adaptés aux différentes zones géographiques 328

3. Une grille élaborée avec les partenaires de TV5 Monde 329

4. Le coût des programmes augmente 330

C. La place de l’information dans la grille est un sujet récurrent de débats 331

1. Le développement de l’offre jusqu’en 2006 331

2. L’impact de la création de France 24 333

3. Le coût croissant de l’information 334

D. L’enseignement du français 334

VI. Les frais de structure : le nouveau siège 335

A. L’appel d’offres restreint 335

1. L’échéance ferme d’expiration au 15 juin 2006 de la prestation technique avec CJI résulte de la négociation conduite par TV5 Monde 335

2. L’appel d’offres restreint portait sur les moyens de diffusion mais également sur la mise à disposition de moyens immobiliers 336

B. Le choix du nouveau siège 336

C. Le coût du nouveau siège 337

1. TV5 Monde considère que son choix s’est porté sur la solution la plus économique 337

2. D’importants travaux ont été effectués 338

3. CFI a emménagé dans les locaux loués par TV5 Monde 338

VII. Les Ressources propres 339

A. Les abonnements 339

1. Aux Etats-Unis 339

2. En Amérique latine 339

B. La publicité 339

1. En France, Belgique et Suisse 340

2. En Europe 340

3. En Afrique 340

PARTIE III :  Résultats et évaluation de l’activité 342

I. La mesure de l’audience se heurte à des limites methodologiques et pratiques considérables 342

A. Le budget consacré aux études d’audience a diminué sur la période la plus recente 342

B. L’extrapolation de donnees sur laquelle repose le calcul de l’audience mondiale en réduit la fiabilité 342

C. TV5 Monde a fait évoluer la methode de determination de son audience mondiale 343

D. L’analyse des audiences imputables aux differents signaux est incertaine 344

E. Les indicateurs LOLF 344

II. La performance globale de l’entreprise 345

A. Les mesures d’audience presentent une image favorable de TV5 Monde 345

B. L’évolution des audiences en Europe éclaire différement la situation de TV5 Monde 345

C. Le coût par signal et par télespectateur révèle d’importants écarts
de rendement
347

CONCLUSION 349

PARTIE I : L’EXERCICE DE LA TUTELLE ET LES ORIENTATIONS STRATÉGIQUES DE TV5

TV5 est une chaîne de télévision née en 1983 de la coopération de radiodiffuseurs publics francophones réunis au sein d’un groupement d’intérêt économique. Elle se présente aujourd’hui comme la « première chaîne mondiale de télévision en français ». Elle se définit également comme « une chaîne multilatérale, généraliste et francophone à vocation mondiale ». Cette chaîne se compose en réalité d’un ensemble de sept signaux émis depuis Paris vers autant de zones géographiques : FBS (France, Belgique Suisse) ; Europe ; Orient ; Asie ; Afrique ; Etats-Unis ; Amérique latine. Il s’y ajoute le signal Québec-Canada, géré par une société dédiée indépendante de TV5 Monde : TV5 Québec-Canada.

TV5 est en outre un opérateur officiel de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), ainsi que le mentionne la Charte de la Francophonie du 15 novembre 1997. Cette qualification n’implique cependant ni financement (hormis une contribution à la production d’une émission de la chaîne), ni véritable orientation stratégique de la part de cette organisation internationale. Tout juste peut-on mentionner le fait que le cadre stratégique décennal (CSD) adopté en 2004 fixe des objectifs généraux et cite occasionnellement TV5 pour la mise en œuvre de certains d’entre eux. Le Président de TV5 Monde assiste aux conférences internationales de l’OIF.

Plus de 179 millions de foyers peuvent recevoir TV5 Monde par câble ou satellite, 24 heures sur 24, dans plus de 203 pays et territoires. La chaîne rassemble, selon ses études d’audience, 25,8 millions de téléspectateurs chaque jour (audience cumulée). Ces données font de TV5 Monde l'un des 3 plus grands réseaux mondiaux de télévision, aux côtés de MTV et de CNN.

TV5 Monde n’est toutefois pas simplement une chaîne de télévision. Alors qu’elle a été au départ uniquement créée pour permettre une exposition internationale des programmes audiovisuels de ses bailleurs de fonds et de leurs chaînes publiques de télévision, les programmes de TV5 Monde sont désormais l’expression la plus visible et la plus connue au plan mondial de la coopération francophone.

Cette identité et cette notoriété de TV5 Monde, mais aussi ce rôle qu’elle revendique de « vitrine de la francophonie », en font une entreprise singulière dont l’évolution est liée au devenir de la communauté de valeurs entre les pays francophones que cherche à incarner la chaîne.

LES RÈGLES DE GOUVERNANCE

TV5 Monde est dotée d’un statut de société anonyme depuis 1990. Ses actionnaires majoritaires sont aujourd’hui encore les radiodiffuseurs qui depuis l’origine lui fournissent des programmes.

A compter de ce changement de statut, cependant, une conférence des ministres responsables a été mise en place. Réunie tous les deux ans, cette conférence est précédée d’une « réunion des hauts fonctionnaires ».

Il en résulte un dispositif institutionnel dans lequel coexistent un organe statutaire, le conseil d’administration, et un organe intergouvernemental, la conférence des ministres.

Dans son précédent rapport, la Cour soulignait la « complexité et [le] dualisme des structures de commandement stratégique, au sein desquelles le ministère des affaires étrangères joue un rôle prépondérant. »

Au contrat de gestion, signé pour trois ans par les ministres responsables le 29 avril 1999 a succédé, le 19 septembre 2005, une « Charte fixant les missions principales et le cadre institutionnel de TV5» (ci-après « la Charte »). Cette Charte précise le rôle et la composition des différents organes décisionnels de TV5, entité dépourvue de personnalité juridique et qui s’appuie sur deux opérateurs, TV5 Monde SA et TV5 Québec Canada limited, dont la Charte précise la composition du conseil d’administration.

La Charte est signée par les ministres responsables de l’audiovisuel des différents gouvernements bailleurs de fonds. Ce document engage la France dans le cadre de ses relations diplomatiques et toute réorganisation du dispositif audiovisuel français ayant des conséquences sur la stratégie et le fonctionnement de TV5 Monde exige une concertation préalable avec les Etats partenaires de la chaîne.

LES ORGANES DE DÉCISION ET DE CONSULTATION

Rôle et composition des différents instances

La conférence des ministres

La conférence des ministres regroupe les ministres responsables des différents gouvernements bailleurs de fonds.

L’article 1.1 de la Charte dispose : « la conférence des ministres a pour rôle :

- de définir les orientations générales de TV5 ;

- de définir les priorités de développement géographiques de la chaîne ;

- d’avaliser le plan stratégique de TV5 Monde qui définit de façon quadriennale ses axes stratégiques de développement ;

- de fixer le niveau des contributions budgétaires permettant d’assurer la bonne marche et le développement de TV5 Monde ;

- de statuer sur l’entrée de nouveaux gouvernements bailleurs de fonds ;

- d’amender, si nécessaire, la présente Charte en accord avec les opérateurs. »

La Charte précise également que « la conférence se réunit tous les deux ans en phase avec le plan stratégique, la première conférence servant à l’adoption du plan et la seconde à son évaluation et à sa révision éventuelle. »

La conférence des ministres est également un lieu d’expression des gouvernements au sein duquel les partenaires de la France ont régulièrement exprimé leur attachement à TV5 et leurs inquiétudes liées à la création de France 24. La France y a systématiquement affirmé sa volonté de préserver TV5 et l’absence de concurrence entre les deux chaînes, y compris sous l’angle de leur financement.

La réunion des hauts fonctionnaires

La Charte indique que « la préparation et le suivi des conférences ministérielles sont assurés par les réunions des hauts fonctionnaires représentant les administrations des gouvernements bailleurs de fonds. Les hauts fonctionnaires se réunissent une fois l’an et, au besoin, sur des questions spécifiques. Une réunion est aussi organisée la veille de la conférence des ministres. » (art. 1.4)

Le conseil d’administration

La Charte précise la composition des conseils d’administration respectifs de TV5 Monde et de TV5 Québec Canada.

S’agissant de TV5 Monde, elle prévoit que siègent au conseil d’administration les radiodiffuseurs de la France (six sièges), de la communauté francophone de Belgique (un siège), de la Suisse (un siège), du Canada et du Québec (un siège en alternance ainsi qu’un poste d’observateur, également en alternance).

Le conseil d’administration « approuve le plan stratégique avant de le soumettre à la Conférence des ministres. Il s’assure également de la mise en œuvre des orientations et des paramètres généraux de la programmation de la chaîne. »

En matière budgétaire, le même dualisme existe entre le conseil d’administration et les organes intergouvernementaux (voir ci-dessous l’organisation budgétaire).

Le conseil de coopération de TV5 Afrique

Cette instance de concertation « a pour mandat de proposer des orientations générales en matière de programmes africains, de dresser l’état de la diffusion en Afrique, de promouvoir la présence africaine dans la grille générale de TV5, de faire état des projets de coproductions, de préconiser des achats, d’identifier des partenaires. ».

Ce conseil réunit une fois par an des représentants de six télévisions nationales africaines et les représentants des actionnaires de TV5 Monde, ainsi que du CIRTEF (Conseil International des Radios- Télévisions d'Expression Française).

Le conseil de coopération de TV5 Québec-Canada

Cette instance de concertation permet aux radiodiffuseurs partenaires d’avoir une vue globale de la diffusion du signal TV5 Québec-Canada. Elle a selon la Charte « pour mission d’être un lieu d’échanges et de réflexion sur l’adéquation entre les objectifs d’audience, de notoriété et d’aide à l’exportation de programmes francophones. » Ce conseil se réunit deux fois par an, autour des PDG de TV5 Québec-Canada (président) et de TV5 Monde, des représentants des chaînes partenaires de TV5 ainsi qu’un représentant du CIRTEF.

Les principales orientations exprimées au sein de ces instances

La première réforme des structures en 2000

La conférence des ministres du 27 octobre 2000 a décidé le principe d’une réforme des structures de TV5. Les travaux conduits à la suite de cette décision de principe ont abouti, à l’été 2001, à l’adoption d’un relevé de décision prévoyant le transfert à un seul opérateur, nommé TV5 Monde SA (nouvelle dénomination sociale de Satellimages SA), de la gestion de tous les signaux existants, à l’exception de TV5 Québec-Canada. La filiale TV5 ALCI, qui gérait le signal à destination de l’Amérique latine, était dissoute. La filiale TV5 USA, responsable du signal à destination des Etats-Unis, était maintenue pour conserver les avantages liés à son statut américain. Toutefois, cette filiale, dont l’actionnariat était diversifié, est désormais détenue à 100 % par TV5 Monde, qui en gère directement le signal.

Le plan stratégique de Niagara-on-the-lake en 2001

La conférence des ministres du 29 novembre 2001 à Niagara-on-the-lake (Canada) a entériné trois axes stratégiques pour TV5 pour les années 2002 à 2004 :

- « l’élargissement du public de la chaîne TV5 sur les cinq continents ;

- une programmation diversifiée et représentative de la Francophonie sous toutes ses couleurs et tous ses accents ;

- le développement d’une information mondiale de référence. »

La seconde réforme des structures en 2004

La conférence des ministres de février 2004 a permis une nouvelle évolution des structures et, en particulier, le passage à un rythme biennal des conférences ministérielles. Outre l’allègement des processus qu’elle induit, cette décision vise à renforcer le poids des conseils d’administration et le rôle des chaînes partenaires qui siègent en leur sein. Les conférences ministérielles sont ainsi recentrées sur leur fonction d’approbation et de suivi intermédiaire du plan stratégique quadriennal. Cette réforme figure désormais dans la Charte signée en septembre 2005.

La Charte de TV5 et le plan stratégique 2006-2009

Le plan stratégique 2006-2009 adopté en 2005 prend acte des réussites de TV5 Monde, notamment son identité forte et la puissance de son réseau de diffusion/distribution, tout en soulignant les défis qu’elle doit relever, en particulier la forte concurrence des chaînes locales en langue nationale et les évolutions technologiques dont les effets conjoints entraînent un risque croissant d’éviction de la chaîne des réseaux de distribution. Dans ce contexte, deux axes stratégiques ont été assignés à TV5 Monde:

- renforcer son accessibilité par la consolidation de son réseau, la multiplication de ses signaux et le développement du sous-titrage ;

- transformer une part croissante de son audience potentielle en audience réelle en rendant la chaîne plus attractive.

Cinq présidents se sont succédé au cours de la période sous revue

TV5 Monde a traversé une période d’instabilité marquée par la succession de cinq présidents à la tête de son conseil d’administration entre 2000 et 2007 :

- Jean STOCK jusqu’à la fin de l’année 2001 ;

- Serge ADDA jusqu’à son décès en novembre 2004 ;

- Marie-Christine SARAGOSSE, à titre intérimaire, jusqu’en avril 2005 ;

- Jean-Jacques AILLAGON jusqu’en avril 2006 (Mme SARAGOSSE ayant quitté ses fonctions de directrice générale en janvier 2006) ;

- François BONNEMAIN depuis avril 2006.

LES RÈGLES DE FINANCEMENT ET DE PARTICIPATION AU CAPITAL

A compter de 2002, le nom de « TV5 Monde » s’est substitué à « Satellimages TV5 ». Cette modification de nom commercial, d’enseigne et de communication traduisait une profonde évolution des modalités de l’organisation de l’ensemble TV5, sur les plans institutionnel, opérationnel, budgétaire et comptable.

Le capital et sa composition

TV 5 Monde est une filiale de France Télévisions, ARTE et l’INA, mais aussi de la RTBF (Belgique), la SSR (Suisse) et de Radio Canada et Téléquebec (Canada).

Les actionnaires sont les chaînes partenaires de TV5 Monde. Outre leur participation au capital, ces chaînes fournissent des programmes libres de droits destinés à être diffusés par TV5 Monde.

A la répartition du capital correspond celle des financements théoriques des partenaires : la France, via ses opérateurs audiovisuels, détient 66,5 % du capital et les Etats partenaires, via leurs chaînes de télévision, en détiennent chacun 1/9 soit 11,11 %. Les contributions budgétaires des Etats aux frais communs de la société sont calculées selon cette même proportion.

Les actionnaires individuels sont des responsables soit de TV5 Monde (cas de M. Bonnemain) soit de France Télévisions (MM Millot et Duhamel). La cession de ces actions entre personnes physiques permet la désignation parmi elles du président du conseil d’administration, également directeur général de TV5 Monde.

Le capital a peu évolué depuis 2000. Trois modifications doivent néanmoins être évoquées.

Au cours de l’année 2003, le CTQC (Consortium de télévision Québec Canada inc) a cédé les actions qu’il détenait à ses propres actionnaires : Radio Canada et Télé Québec. Cet échange n’a pas modifié l’équilibre entre les Etats partenaires.

En 2004, la France a procédé au rattachement de RFO au holding France Télévisions. Cette opération a eu pour corollaire la prise de contrôle des titres de TV5 Monde détenus par RFO par le groupe France Télévisions, ce qui a conféré à ce dernier la majorité absolue du capital de TV5 Monde.

Une telle prise de contrôle étant contraire à la Charte de TV5 et entraînant une consolidation des comptes de TV5 Monde dans ceux du groupe France Télévisions, ce dernier a cédé en 2005 à l’INA les actions détenues auparavant par RFO. L’INA détient donc 6,61 % du capital de TV5 Monde.

Le budget et sa structure

Un cadre budgétaire qui demeure complexe en dépit des évolutions intervenues au cours de la période sous revue

La procédure budgétaire au sein de TV5 Monde a été modifiée à plusieurs reprises mais demeure complexe. Ces évolutions successives ne permettent pas de procéder à une analyse continue de l’évolution budgétaire sur la période 2000-2007.

Avant le 1er août 2001

Jusqu’au 1er août 2001, avant la réforme des structures, les budgets étaient construits selon des clés déterminées pour chaque signal. L’enveloppe budgétaire globale était un agrégat des budgets des différents signaux. A cette époque, il y avait cinq signaux gérés par Satellimages-TV5 : Tv5 Europe, Tv5 Afrique, Tv5 Asie, Tv5 Orient, Tv5 F B S (France, Belgique, Suisse).

La société de droit français servait à l’époque de « boite aux lettres » pour le financement de la part française des signaux émis depuis le sol canadien par le CTQC, c'est-à-dire pour la partie des frais communs des budgets de la chaîne gérée par le CTQC, Consortium de télévision Québec Canada inc.

Trois signaux étaient alors émis et gérés depuis Montréal : Etats-Unis, Amérique latine et Canada. La France supportait 50 % des frais communs.

Cependant, en 1999, les Européens ont constaté diverses anomalies dans les facturations émises par les Canadiens qui entraînaient pour les antennes européennes des charges indues. Pour corriger ces anomalies, la quote-part des frais communs de TV5 Québec Canada incombant aux Européens a été prise en charge par la partie canadienne (935 K€ et 953 K € pour la France respectivement en 2000 et 2001) et n’apparaissait par conséquent plus dans le budget. Le reliquat d’arrérage a été remboursé à TV5 Monde en 2002 (640 K€ pour la France).

Depuis août 2001

A compter du 1er août 2001, et dans le cadre de la réforme des structures, la gestion des signaux Etats-Unis et Amérique latine a été « rapatriée » en France. Si les clés de répartition ont été simplifiées, le processus budgétaire demeure fondé sur une distinction entre des frais communs et des frais spécifiques qui alourdit le dispositif et en rend la compréhension difficile.

La distinction frais communs/frais spécifiques

Schématiquement, les ressources budgétaires de TV5 Monde se composent d’environ 10 % de ressources propres et 90 % de contributions des Etats partenaires versées soit directement (cas de l’essentiel de la contribution de la France) soit par l’intermédiaire d’un opérateur audiovisuel actionnaire de TV5 Monde (France Télévisions ; la RTBF pour la communauté francophone de Belgique ; la TSR pour la Suisse ; Radio Canada et Télé Québec)

En dépenses, une distinction très nette est faite au sein du budget de TV5 Monde entre des frais dits « communs » et des frais dits « spécifiques ».

Les frais communs correspondent à la part du budget dont le financement est assuré conjointement par tous les partenaires en proportion de leur participation au capital201. Ils se sont élevés en 2007 à 40,15 M€.

Par opposition, les frais spécifiques correspondent à des dépenses dont le financement n’est pas partagé et est assuré par l’un des partenaires.

Encore faut-il observer que les frais spécifiques assumés par la France figurent dans le budget de TV5 Monde, contrairement à ceux qui sont pris en charge par les autres pays, qui figurent dans les budgets de leurs opérateurs membres de TV5 Monde, et qui ne sont donc connus que sur une base déclarative.

En 2007, les frais spécifiques pris en charge par la France se sont élevés à 42,7 M€ et ceux financés par les autres pays à 2,87 M€ -soit un montant total de 45,57 M€- sensiblement supérieur à celui des frais communs.

Le détail des frais spécifiques assumés par la France en 2007 montre que cette catégorie est très hétérogène et que les comparaisons entre les contributions respectives des différents pays à la couverture de l’ensemble de ces frais ne peuvent être faites que sous bénéfice d’inventaire.

En effet, 67,7 % des frais spécifiques pris en charge par la France en 2007 correspondent à des conventions qu’elle a initialement acceptées et qui avaient pour objet –de manière explicite pour la première et de manière implicite pour l’autre- de tenir compte d’avantages spécifiques :

− Dès l’origine, il a été expressément convenu que la France prendrait à sa charge 50 % des frais de personnel et de fonctionnement de la chaîne en contrepartie de l’avantage économique inhérent à la localisation du siège de TV5 sur son territoire. Les frais spécifiques correspondant se sont élevés en 2007 à 10,8 M€.

− Par ailleurs, l’article 20.1 de la Charte de TV5 précise que « chaque gouvernement assume les coûts de libération des droits et frais spécifiques afférents à ses programmes nationaux », dont la diffusion comporte, pour le pays considéré, des avantages de divers ordres. Or, plus de 80 % des programmes diffusés par TV5 sont d’origine française. A ce titre, la France a pris en charge en 2007, 18,1 M€ de frais spécifiques (correspondant, pour l’essentiel, aux droits associés aux programmes fournis par France Télévisions).

A priori, les autres frais spécifiques assumés par la France en 2007 (soit 32,3 % du total des frais spécifiques qu’elle a pris en charge) ne correspondent pas, à une exception, au principe posé par l’article 20.1 de la Charte selon lequel « toute initiative unilatérale est considérée comme frais spécifiques ».

L’exception est celle du coût du signal TV5 Orient, dont la création a répondu à une « initiative unilatérale » de la France (3 M€ en 2007).

Les autres cas semblent correspondre à des initiatives partagées, mais que la France a accepté de financer seule, faute d’augmentation de la contribution financière de ses partenaires : ainsi en est-il de la diffusion d’un signal analogique en Europe (3,9 M€), de la distribution du signal Europe sur le réseau câblé allemand (2,9 M€), d’un sous-titrage supplémentaire (1,2 M€) et des frais de communication, de distribution et d’interactivité liés à Internet (2,8 M€).

Les frais spécifiques alourdissent considérablement le processus budgétaire et la lisibilité du budget


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202
La distinction frais communs / frais spécifiques impose un suivi distinct du coût des différentes actions conduites par la chaîne. Elle impose aussi des présentations différentes du budget suivant qu’on y retrace, ou non, l’origine des financements et leur imputation à ces deux types de frais. La réintégration, ou non, des frais spécifiques des pays partenaires dans les financements de la chaîne est aussi de nature à modifier la présentation des ressources de la chaîne.

Ces modalités différentes de présentation du budget ont pour corollaire la diversité des calculs envisageables pour caractériser les parts relatives des différents partenaires dans le financement de la chaîne.

Ainsi est-il souvent avancé que la France a assuré en 2007 83 % du financement de TV5 Monde. Cette proportion correspond aux seuls financements publics retracés dans le budget de la chaîne. En réintégrant les frais spécifiques déclarés par les Etats partenaires, la part française se réduit à 80 %. En prenant aussi en compte les ressources propres de la chaîne, cette part n’est plus que de 73 %.

En outre, comme indiqué plus haut, la prise en compte des frais spécifiques doit être relativisée.

Cependant, quelle que soit l’approche retenue, il apparaît qu’au fil du temps, le dispositif de financement adopté et les choix stratégiques effectués par la chaîne à l’initiative de la France ont conduit cette dernière à prendre en charge une part croissante et prépondérante du financement public de TV5 Monde.
Au demeurant, depuis 2005, la France souligne lors de chaque conférence des ministres ou réunion des hauts fonctionnaires qu’elle souhaite un rééquilibrage des contributions publiques.

La Cour considère que la complexité du cadre budgétaire et les débats que suscite la question des contributions financières respectives des différents bailleurs rendent souhaitable une clarification du dispositif de financement.


Un dispositif budgétaire mal exploité par le conseil d’administration

TV5 Monde adopte son budget tardivement. Cinq des sept derniers budgets ont été présentés au conseil d’administration au cours du deuxième trimestre de l’exercice. Un budget rectificatif intervient en outre en toute fin d’exercice, souvent en novembre, pour prendre en compte les montants définitifs des subventions (en particulier du fait des mesures de régulation budgétaire du gouvernement français) et procéder aux ajustements qui se sont révélés nécessaires au cours de l’exécution.

Ce calendrier résulte en partie du dispositif institutionnel. La Charte prévoit en effet que le conseil d’administration approuve un pré-budget correspondant aux orientations contenues dans le plan stratégique. Ce pré-budget est ensuite examiné par la Conférence des ministres ou, si celle-ci ne se réunit pas, par les gouvernements eux-mêmes ou les hauts fonctionnaires, par délégation. Le niveau des contributions des gouvernements bailleurs de fonds est alors fixé, en général en début d’exercice. Sur la base de ces contributions, le budget définitif est examiné poste par poste et approuvé par le conseil d’administration lors de sa réunion suivante, qui ne se tient souvent qu’au deuxième trimestre.

Un tel dispositif altère l’outil budgétaire. Adopté tardivement, il ne permet pas au conseil d’administration d’effectuer des arbitrages préalables, même si, ainsi que l’a souligné TV5 Monde en réponse à la Cour, l’approbation du pré-budget permet à ce conseil d’adopter les principaux paramètres budgétaires.

Le budget de TV5 Monde n’est en outre pas construit pour mettre en évidence les redéploiements envisageables en cas de difficultés de financement et permettre au conseil d’administration d’opérer des choix clairs. La structure même du budget, sa complexité, le fait que son périmètre n’est pas identique à celui de la comptabilité générale sont des facteurs aggravants. Tous ces éléments convergent pour priver d’efficacité l’instrument budgétaire et en faire une simple modalité de suivi de la gestion de l’entreprise par le conseil d’administration, dans une démarche plus caractéristique d’une administration publique que d’une société anonyme. Ce constat est confirmé par l’actuel président de TV5 Monde qui, selon le procès verbal du conseil d’administration du 5 octobre 2006, s’est déclaré « défavorable à l’établissement de budgets rectificatifs tels que TV5 les a connus ces dernières années. Il s’agit en effet selon lui d’un pilotage à vue qui n’est pas véritablement une prévision budgétaire. »

Sans contester l’existence d’un problème d’efficacité de l’instrument budgétaire, TV5 Monde a précisé que la cause principale en était l’incertitude pesant sur ses ressources publiques et que « seul un engagement budgétaire pluriannuel des Etats bailleurs de fond permettant à l’entreprise de disposer de visibilité et de stabilité budgétaire pourra mettre le conseil d’administration de TV5 Monde en mesure d’exercer pleinement ses prérogatives. »

Le ministère des affaires étrangères et européennes (MAEE) a aussi reconnu les insuffisances du dispositif budgétaire en soulignant qu’il a depuis plusieurs années posé la question des modalités de financement de TV5 Monde, estimant que la chaîne est « particulièrement désavantagée par rapport aux autres entreprises du secteur audiovisuel public national. »

L’ÉVOLUTION DES STRUCTURES

Le bilan positif des réformes des structures de 2001 et 2004

Les réformes de structure intervenues depuis 2000 ont simplifié le fonctionnement de TV5. Le nombre de réunions d’instances décisionnelles a été réduit et la composition de ces instances a été rendue homogène entre TV5 Monde et ses filiales. Les flux financiers croisés entre les opérateurs ont aussi été réduits, et les documents budgétaires ont été simplifiés par l’adoption d’une clé de financement unique.

L’unification de la gestion de sept des huit signaux a en outre permis de renforcer l’identité de la chaîne par la mise en œuvre de procédures identiques et la rationalisation de la politique d’achats de programmes qu’elle a rendue possible.

Plus globalement, la réforme a favorisé des économies d’échelle, tout en renforçant la réactivité de la chaîne (en particulier lorsqu’il est décidé de « casser l’antenne » en raison de l’actualité.)

La situation institutionnelle : une complexité préjudiciable

La coexistence d’un cadre de concertation multilatérale à caractère intergouvernemental et de structures normales de gestion d’une société anonyme ne garantit pas leur parfaite articulation et pèse sur la réactivité de la chaîne.

TV5 Monde reconnaît d’ailleurs que « le cumul de structures destinées à assurer son fonctionnement d'organisme multilatéral et de structures classiques de sociétés anonyme de droit privé français n'est pas optimal. S'il ne fait aucun doute que TV5 Monde a besoin pour son bon fonctionnement de toutes les instances représentées dans ces deux structures, leur coordination et la mise en cohérence de l'ensemble pourrait certainement gagner à être organisées dans le cadre d'une structure "ad hoc" »

Le MAEE souligne quant à lui la nécessité d’une réforme du lien entre TV5 Monde et la structure politique de pilotage que constitue la conférence ministérielle des gouvernements partenaires de TV5 Monde. Il considère que cette question est maintenant suspendue aux décisions qui seront prises dans le cadre de la réforme de l’audiovisuel extérieur.

Pour résoudre cette difficulté, TV5 Monde avait considéré, avant le lancement de la réforme de l’audiovisuel extérieur, que seul un traité pouvait permettre de créer un cadre adapté.

L'hypothèse de négociation d'un traité a cependant été écartée.

Dans une perspective un peu différente, l'hypothèse d'une transformation de TV5 Monde en société européenne a également été évoquée. Deux objectifs ont été avancés : préserver la société de la jurisprudence européenne relative aux aides d'État, permettre à la société TV5 Monde, de parvenir plus facilement à obtenir des subventions de la part de l'Union européenne et de ses différentes agences.

Lors de sa présentation à la réunion des hauts fonctionnaires, cette éventualité a, elle aussi, été écartée par les représentants français. Le contexte actuel de réforme de l’audiovisuel extérieur français reporte la réflexion sur ces différents aspects.

LES ORIENTATIONS STRATÉGIQUES

LA CHARTE DE TV5 ET LE PLAN STRATÉGIQUE

Les plans précédents

Le plan de Niagara-on-the-lake

Un plan stratégique a été adopté fin 2001 pour la période 2002-2004. Inscrit dans le cadre des trois priorités stratégiques arrêtées à la conférence des ministres de Niagara-on-the-lake, ce plan prévoyait en particulier :

- l’optimisation du réseau mondial de distribution ;

- le développement du sous-titrage avec en particulier l’ajout de quatre langues supplémentaires (russe ; polonais ; turc ; italien) aux huit existantes ;

- le renforcement de la qualité et de la diversité des programmes diffusés, moyennant des efforts des différents bailleurs de fonds ;

- le développement d’une information mondiale de référence par l’accroissement de la réactivité de TV5, le renforcement de ses capacités techniques et la réorganisation de son antenne.

Un bilan d’étape dressé à l’occasion de la réunion des hauts fonctionnaires du 11 juin 2003 mentionnait les « avancées formidables de la chaîne au cours des 18 derniers mois. » Ces avancées concernaient :

- la distribution et l’audience, en forte croissance, notamment grâce à la politique de sous-titrage ;

- le repositionnement de la chaîne par un changement de l’habillage, la refonte de la programmation et l’ajout d’émissions repères, produites par la chaîne elle-même ;

- un repositionnement de l’information avec notamment la suppression des « tunnels » (succession des journaux télévisés des chaînes partenaires), la refonte de la séquence de l’information et la production quotidienne de six grands journaux.

Le bilan de la mise en œuvre de ce plan dressé en décembre 2004 met l’accent sur la progression du réseau de distribution, et donc de l’audience potentielle de la chaîne. Le bilan souligne également la progression de l’audience réelle telle qu’elle peut être mesurée. Toutefois, l’objectif de développement du sous-titrage en polonais, turc et italien n’a pas été mis en œuvre, en dépit de son caractère prioritaire. En revanche, un sous-titrage en danois a été entrepris (alors qu’il n’était pas prévu), portant à dix les langues de sous-titrage.

Le rapprochement avec CFI

En 1998, le Gouvernement français a décidé de confier à la même personne la présidence de TV5 Monde (alors Satellimages) et de Canal France International (CFI), afin de favoriser le développement de synergies entre ces deux entreprises.

Près de 10 années après, aucun service commun n’a été mis en place entre CFI et TV5 Monde. Du point de vue de TV5 Monde, seul le recentrage de CFI sur l’activité de coopération est à mettre au crédit de cette présidence commune. Dès lors, il a été envisagé de mettre fin à la présidence commune des deux sociétés après le décès de Serge Adda, fin 2004. La présidence intérimaire qui a alors été mise en place était distincte et les deux entreprises envisageaient d’autant plus leur séparation que TV5 Monde lançait à cette époque un appel d’offres devant aboutir à un éventuel déménagement dans Paris pendant que CFI prospectait des locaux à Issy-les-Moulineaux.

La Cour observe qu’il a pourtant été décidé de maintenir une présidence commune lors de la nomination de M. Aillagon, qui a entraîné le maintien du projet de colocalisation des deux entreprises.

La Charte

La Charte est, selon TV5 Monde, « le cadre de référence de la coopération multilatérale qui règle le fonctionnement de TV5 Monde. Elle est également un cahier des missions et des charges de TV5 Monde et une Charte de l’antenne de TV5 Monde. »

Elle fixe ainsi notamment les missions et les principales orientations de TV5 en matière de publics cibles, de programmes, de distribution et de financement.

La première des missions générales que la Charte (chapitre 2/article 5) assigne à TV5 Monde est de "servir de vitrine à l'ensemble de la francophonie".

Le premier public cible de TV5 Monde est donc constitué par les francophones et ceux que le monde francophone au sens large intéresse, qu’ils soient nationaux, expatriés, voyageurs, professeurs, « apprenants » ou francophiles.

La Charte précise toutefois que TV5 doit veiller à « conquérir de nouveaux publics, francophones ou non francophones ». Cela implique que TV5 Monde puisse atteindre le plus grand nombre de téléspectateurs et qu’elle cherche, ainsi que l’y invite la Charte, « à accroître son rayonnement en cherchant à atteindre la plus grande audience. »

Les publics cibles ne font donc pas l’objet d’une hiérarchisation, non plus que les zones géographiques de diffusion/distribution. La Charte pose ainsi les principes d’une « logique de l’offre », avec comme objectif implicite la recherche d’une diffusion et d’une distribution extensives, par tous les moyens techniques, dans la seule mesure des possibilités budgétaires. Cette approche est confirmée par l’article 16.2 de la Charte, qui précise que TV5 « vise à atteindre le plus grand nombre de téléspectateurs ».

Le plan stratégique actuel : 2006-2009

Le plan stratégique 2006-2009 a été adopté à Bruxelles le 19 septembre 2005. Il était assorti d’un plan de financement prévisionnel qui n’a, en définitive, été adopté qu’à titre indicatif alors qu’il faisait partie intégrante du projet de plan stratégique. Or, les bailleurs de fonds n’ont, par la suite, pas augmenté leurs contributions dans les proportions exigées par ce plan de financement, de sorte que la chaîne a dû opérer des redéploiements pour mettre en œuvre le maximum des orientations retenues.

Des priorités géographiques et linguistiques sont affichées mais se révèlent inopérantes

La nouveauté réside dans le fait que des priorités géographiques sont assignées à la chaîne : l’Afrique, le Monde Arabe  et l’Europe francophone.

TV5 Monde doit également consolider son réseau de distribution et affiner la singularisation et la contextualisation de ses signaux.

S’agissant du sous-titrage, le plan stratégique fixe des priorités linguistiques de développement: « privilégier les grandes langues de civilisation : polonais ; roumain ; turc ; hébreu ; italien ; thaï ; vietnamien ; indonésien, en plus des dix langues déjà pratiquées. »

Les priorités géographiques et linguistiques ne couvrent toutefois pas les mêmes zones. Le bassin de pratique de la plupart des langues supplémentaires se situe en effet en dehors des cibles géographiques prioritaires : ce sont des langues d’Europe centrale et d’Asie, à l’exception de l’Italien. De même, les langues déjà présentes dans les sous-titrages de la chaîne (allemand, anglais, danois, espagnol « latino », français, néerlandais, portugais « brésilien », russe, suédois et arabe), ne correspondent pas particulièrement (à la notable exception de l’arabe) aux priorités géographiques. De fait, le plan de financement placé en annexe du plan stratégique confirme que les nouvelles langues de sous-titrage ne seront accessibles que sur les signaux « Europe » et « Asie ».

Ces différentes priorités sont donc cumulatives et conduisent TV5 Monde à privilégier cinq des sept signaux qu’elle gère, représentant plus de 94 % de son réseau de distribution. Les critères géographiques et linguistiques introduits dans le plan stratégique se révèlent donc inopérants pour arbitrer entre les régions de distribution en fonction des moyens budgétaires de TV5 Monde.

Le choix de privilégier l’Europe francophone (signal FBS) comporte en lui-même des contradictions. L’enjeu est essentiel selon le plan stratégique, car « l’Europe francophone est, paradoxalement, la zone où se joue tout simplement l’avenir de TV5 ». L’importance de cette zone s’explique par le fait qu’elle procure l’essentiel des recettes publicitaires de la chaîne (64 % en 2005 ; 58 % en 2006 ; 58 % en 2007) ; l’augmentation de ces ressources, favorable au développement de la chaîne, suppose l’amélioration de la qualité des programmes qui y sont proposés.

En effet, les difficultés rencontrées dans cette zone sont plus importantes qu’ailleurs : « la concurrence avec ses chaînes partenaires peut y être frontale ; les problèmes d’acquisition de droits y sont aigus. » Ces difficultés se traduisent par une programmation de moindre qualité (absence de cinéma et de sport en particulier) que sur les autres signaux et un positionnement de « chaîne de rediffusion nationale ouverte sur le monde, internationale et francophone » qui cible non pas le grand public, mais les catégories socio-professionnelles supérieures et les communautés francophones.

En contrepoint, il est observé que la présence de TV5 Monde dans cette zone est actuellement garantie par l’existence de clauses dites de « must carry » dans les cahiers des charges des câblo-opérateurs. Dès lors, la position de la chaîne ne saurait y être menacée à court terme.

Le plan de financement associé ne reflète pas directement les priorités géographiques du plan stratégique

Une estimation du besoin de financement complémentaire figurait en annexe du plan stratégique.

Cette estimation correspondait aux efforts envisagés par TV5 Monde, notamment dans le cadre de ses priorités linguistiques, avec des mesures nouvelles de renforcement du sous-titrage concernant le signal Europe (35 % du total des mesures nouvelles) et le signal Asie (14 %).

En revanche, les signaux correspondant aux priorités géographiques assignées à la chaîne étaient très peu renforcés sur un plan budgétaire : le signal Afrique se voyait affecter 2 % des ressources supplémentaires, le signal Orient 1 % et le signal FBS ne bénéficiait d’aucune ressource nouvelle. Paradoxalement, le signal Amérique latine, qui ne s’inscrit ni dans les priorités linguistiques ni dans les priorités géographiques, bénéficiait de 6 % des ressources supplémentaires envisagées.

En réponse à ces observations, TV5 Monde a souligné que les coûts des différentes mesures variaient suivant leur nature (le sous-titrage est très onéreux ; le coût de la diffusion varie significativement d’une zone à l’autre) indépendamment de l’importance stratégique que leur accorde la chaîne. Pour autant, elle a admis que « les critères introduits dans le plan sont peu opérants pour arbitrer entre les régions en fonction des moyens de TV5 Monde. »

Ce constat est partagé par le MAEE qui a indiqué dans sa réponse aux observations provisoires de la Cour, que celle-ci « a raison de souligner que ce plan stratégique ne dégage aucun critère géographique et/ou linguistique pour arbitrer entre les régions de distribution ou en fonction des moyens budgétaires de TV5 Monde. » La tutelle l’explique par le fait que le plan stratégique de 2006, adopté en septembre 2005, a été élaboré dans le respect de la Charte, « c'est-à-dire dans une logique de l’offre avec comme objectif implicite la recherche d’une diffusion et d’une distribution extensives, par tous les moyens techniques, dans la seule mesure des possibilités budgétaires. » Cette approche visait, selon le ministère, à « développer TV5 Monde tous azimuts et non pas dans une logique d’arbitrage en fonction de territoires ou de publics visés. »

L’information renforce encore sa place dans la grille

Le plan stratégique 2006-2009 s’inscrit dans la continuité du plan précédent sur de nombreux aspects : priorité au développement du sous-titrage ; volonté de consolidation du réseau ; renforcement de la qualité des programmes, en s’appuyant notamment sur l’information.

Sur ce dernier point, le président de TV5 Monde déclarait à la presse le 20 septembre 2005 : « il ne s’agit naturellement pas pour TV5 de prétendre remplir toutes les fonctions d’une chaîne d’information internationale continue. TV5 est attachée à son caractère généraliste, mais elle est incontestablement une chaîne internationale dont l’information fait autorité et occupe dans sa grille une place importante, 6 heures par jour, soit un quart du temps d’antenne ». Le président de TV5 Monde annonçait en outre que désormais « les 18 séquences quotidiennes d’information seront programmées à horaire strictement fixe. »

Par conséquent, la politique de renforcement du poids de l’information dans les programmes et d’affirmation du rôle stratégique de celle-ci dans l’offre de la chaîne s’est poursuivie dans le cadre de l’actuel plan stratégique, postérieurement à la décision de créer France 24.

L’ABSENCE DE CONTRAT D’OBJECTIFS ET DE MOYENS

La Cour avait préconisé, dans son précédent rapport, la conclusion d'un contrat d’objectifs et de moyens entre TV5 Monde et sa tutelle française. Cette recommandation n’a pas été suivie d’effets. En outre, le projet de plan de financement qui accompagnait le plan stratégique n'a pas été adopté, de sorte que TV5 Monde ne dispose d’aucun engagement pluriannuel de financement de ses bailleurs de fonds.

TV5 Monde s’est dite favorable à l’élaboration d’un contrat d’objectifs et de moyens multilatéral, tout en soulignant la difficulté de sa mise en place compte tenu du nombre d’interlocuteurs.

Un tel projet de contrat élaboré par la partie canadienne a été soumis à la réunion des hauts fonctionnaires du 5 octobre 2006. La discussion a mis en évidence les réserves de la partie française, qui a souligné, d’une part, l’incapacité des partenaires à présenter des garanties budgétaires sur trois ans et, d’autre part, le fait qu’en dehors de cet engagement, le contrat ne portait que sur des éléments déjà entérinés dans la Charte et le plan stratégique.

Cette question a une nouvelle fois été évoquée lors de la conférence ministérielle de Lucerne, en novembre 2007. Selon TV5 Monde, un consensus sur l’utilité d’un tel contrat a semblé apparaître. Aucune décision sur ce point n’a toutefois été prise.

Le MAEE considère pour sa part que « la réforme de l’audiovisuel extérieur est l’occasion pour TV5 Monde, et plus largement France Monde, d’exiger une visibilité à 3 ans sur les ressources qui lui sont affectées en fonction de ses objectifs. »

La direction des médias (DDM) estime cependant qu’un accord avec les partenaires non français de la chaîne sur un rééquilibrage des financements constitue un préalable à l’ouverture de négociations sur un contrat pluriannuel d’objectifs et de financement.

LE PROJET ANNUEL DE PERFORMANCE

Le financement de TV5 Monde par la France s’inscrit dans le cadre du programme 115 : audiovisuel extérieur. Ce programme, doté en 2007 de 159,2 M€, finance également les autres opérateurs de l’audiovisuel public extérieur (à l’exception de France 24) : CFI ; RFI ; Monté-Carlo Doualiya et Médi 1.

Le volet performance

Les objectifs généraux du programme 115 sont les suivants :

- « rendre les plus accessibles possible les programmes audiovisuels français aux publics étrangers et à nos compatriotes expatriés ;

- favoriser la diversité culturelle et la démocratisation des pays du Sud en soutenant la modernisation de leurs médias. »

Les deux objectifs spécifiquement assignés à TV5 Monde dans le cadre du programme 115 sont :

1 – conforter la présence française et francophone dans le paysage audiovisuel mondial. L’indicateur associé à cet objectif porte sur l’audience effective (audience cumulée hebdomadaire203) et l’audience potentielle (couverture de population) ainsi que le ratio de ces deux données. Cet indicateur est également retenu pour RFI.

2 – optimiser la gestion de l’audiovisuel extérieur français. L’indicateur retenu est le coût annuel (pour l’Etat) par téléspectateur de la chaîne (audience cumulée hebdomadaire).

Les résultats de TV5 Monde sont analysés dans la dernière partie du présent rapport.

Le volet financier

La subvention accordée à TV5 dans le cadre du programme 115 a augmenté de 5,1 % de 2006 à 2008 (projet de loi de finances).

On constate ainsi une croissance sensible de la subvention de l’Etat, même si les réserves de précaution rendent temporairement indisponibles (au cours de l’exercice) certaines ressources. Le PLF 2008 indique que cette croissance vise à financer le développement du sous-titrage. Cette hausse de 1,5 M€ en 2008, après 1,7 M€ en 2007, ne couvre cependant pas les besoins budgétaires supplémentaires tels que les estime TV5 (2,3 M€ en 2006 et 3,7 M€ en 2007).

TV5 Monde, quant à elle, considère que « le mécanisme de la réserve légale n’est pas compatible avec les nécessités de gestion d’une société commerciale. »

Le pilotage de l’audiovisuel extérieur

Dans sa présentation du projet annuel de performance, le MAEE reconnaît les difficultés rencontrées pour assurer une tutelle efficace de l’audiovisuel extérieur. La directrice générale de la coopération internationale et du développement (DGCID), responsable du programme 115, y souligne en effet qu’il est nécessaire de mettre en œuvre « un pilotage qui associe, au minimum, le ministère des affaires étrangères et européennes et le ministère de la culture et de la communication. » En effet, est-il précisé, « faute de structures formalisées, ce pilotage ne fonctionne pas aujourd’hui de façon satisfaisante. (…) Des réunions interministérielles ponctuelles, des consultations fréquentes entre services, ne suffisent pas à assurer une coordination apte à anticiper les problèmes et à impulser une véritable stratégie. » Le responsable du programme considère à cet égard que la création de la mission « Médias » constitue « une première réponse appropriée, se traduisant [notamment] par (…) une meilleure capacité, en cas de besoin, à peser sur les sociétés extérieures ou nationales et à arbitrer entre des positions parfois contradictoires. »

En réponse aux observations provisoires de la Cour, le MAEE a précisé qu’il est « toujours favorable à la mise en place d’une structure interministérielle afin d’encadrer, tant sur les choix stratégiques que sur les questions budgétaires, la direction de France Monde. » La DDM n’a quant à elle pas fourni d’éléments de réponse sur cette question.


LA CRÉATION DE FRANCE 24 ET LE PROJET DE REFORME DE L’AUDIOVISUEL EXTERIEUR

LA CRÉATION DE FRANCE 24 A PERTURBÉ TV5 MONDE

Les programmes d’information ont eu un rôle central dans la politique de développement de TV5 Monde au cours de la période sous revue

Le projet de création d’une chaîne internationale d’information continue est longtemps resté incertain204. Ce contexte avait conduit TV5 Monde à renforcer dès 1997 la place de l’information dans sa grille de programmes et à se fixer comme objectif stratégique, dès 2001, le développement d’une information mondiale de référence. Cette stratégie a été confortée au fil du temps par les bailleurs de fonds, au premier rang desquels le MAEE (direction de l’audiovisuel extérieur).

TV5 Monde a ainsi développé sa rédaction, conçu des journaux et des émissions d’information, développé une ligne éditoriale adaptée aux caractéristiques de son public et décidé à plusieurs reprises de « casser son antenne » lorsque l’actualité l’exigeait - cherchant ainsi à s’imposer sur le plan mondial comme une chaîne de référence en matière d’information. C’est cet objectif majeur des présidents successifs à partir de Jean Stock que le plan stratégique 2002-2005 a confirmé et souligné.

Cette politique a enregistré certains succès, en particulier lors de la couverture d’évènements internationaux (voir ci-dessous les développements relatifs aux programmes d’information).

C’est dans ce contexte que le gouvernement français a décidé en décembre 2004 de créer France 24, une chaîne française d’information internationale diffusée en continu et en trois langues.

Cette décision et les débats qui l’ont précédée ont été régulièrement évoqués au sein des instances dirigeantes de TV5 Monde, cette perspective suscitant des inquiétudes clairement exprimées par les représentants des Etats partenaires de la France.

La coopération avec France 24 a tourné court

La décision française a d’emblée fait craindre à TV5 Monde et à ses bailleurs de fonds non français une concurrence défavorable à la préservation des intérêts de la chaîne francophone. Les syndicats représentés au sein de la chaîne ont aussi exprimé leurs craintes à cet égard.

Dans ce contexte, TV5 Monde s’est à différentes reprises déclarée prête à coopérer avec France 24. En décembre 2005, son président précisait lors de la conférence des ministres qu’une collaboration volontaire de TV5 avec France 24 lui semblait possible si « trois règles minimales de bon comportement [étaient] respectées :

- l’égale sollicitude budgétaire de la République française à l’égard de la CFII et de TV5 ;

- la non agression de la CFII à l’égard des réseaux de distribution et de diffusion internationale de TV5 ;

- la non remise en cause de la responsabilité éditoriale de TV5 notamment quand elle fait de l’information. »

TV5 Monde a cependant observé dès 2006 qu’elle était soumise à une régulation budgétaire à laquelle échappait France 24, compte tenu de la conclusion d’un contrat d’objectif et de moyens (COM) entre l’Etat et cette dernière. TV5 Monde y a vu une atteinte au premier principe évoqué par son président.

L’intention de collaboration entre les deux sociétés s’est néanmoins manifestée par des réunions de travail entre les équipes, notamment celles en charge de la distribution et du marketing fin 2006 et début 2007.

Toutefois, un incident survenu début 2007 avec un distributeur commun de TV5 Monde et de France 24 en Israël (voir ci-dessous les développements relatifs au réseau de commercialisation) a conduit TV5 Monde à cesser sa démarche de coopération.

LES PERSPECTIVES DE TV5 MONDE

L’arrivée de France 24 peut modifier les perspectives de TV5 Monde

L’accès au réseau

France 24, qui s’est vu fixer des objectifs de diffusion évalués au moyen d’indicateurs mesurant le nombre de foyers susceptibles de recevoir la chaîne, s’appuie sur le réseau de correspondants commerciaux de TV5 Monde pour signer des contrats de distribution dans le monde entier. Cependant, alors que TV5 a construit son réseau sur 20 années et selon un principe de gratuité tant pour la chaîne que pour les téléspectateurs, France 24 a, au moins dans certains cas, accepté de payer pour être distribuée par des opérateurs de bouquets satellite ou des câblo-opérateurs.

Cette démarche commerciale de France 24 est susceptible d’induire plusieurs effets en retour sur TV5 Monde, dont l'action commerciale, fondée sur l’affirmation qu’une chaîne publique francophone n’a pas les moyens de payer pour sa distribution, est contrariée. Par ailleurs, les distributeurs peuvent considérer qu’une seule chaîne en langue française est suffisante dans leur offre et, par conséquent, faire un choix entre les deux chaînes au détriment de TV5 Monde.

Toutefois, jusqu’à présent, TV5 Monde n’a pas enregistré de refus de renouvellement de ses contrats de distribution, ou de demande de renégociation des conditions financières aboutissant à un surcoût par rapport au contrat précédent.

L’offre de programmes et l’audience

Bien que très différentes, TV5 Monde et France 24 ont des traits communs : le français (même si France 24 est également diffusée en Anglais et en Arabe) et l’offre d’information. Par conséquent, leur public cible est au moins partiellement commun, même si TV5 Monde vise une population plus large et plus variée que France 24, chaîne d’influence qui cible les strates sociales les plus éduquées des bassins de diffusion.

Ces traits communs font inéluctablement des deux chaînes des concurrentes pour la captation de l’audience, structurellement déjà très faible et diluée, de programmes français. Toutefois, là encore, aucune mesure tangible ne vient confirmer que l’audience de TV5 Monde est affectée par l’existence de France 24.

Les ressources publicitaires

Les ressources publicitaires de TV5 Monde sont faibles en dehors de la zone France, Belgique Suisse. La concurrence de France 24 est ici plus de nature à freiner la croissance de ces ressources qu’à les réduire. Mais, en tout état de cause, l’accès aux ressources publicitaires dans les zones de diffusion est aussi un domaine de concurrence entre les deux chaînes.

La Cour observe ainsi que France 24 est susceptible d’induire une concurrence nouvelle qui, à plusieurs égards peut, dans l’avenir, fragiliser la position de TV5 Monde. Elle observe toutefois que ces phénomènes demeurent hypothétiques et ne se sont pas encore traduits de façon mesurable.

L’évolution technique imposera à TV5 Monde une réflexion stratégique

Indépendamment du lancement de France 24, les échanges entre administrateurs font état d’interrogations sur l’avenir de la chaîne. En témoigne cette prise du position du président de TV5 Monde lors du conseil d’administration du 28 novembre 2006 (p. 93) : « La donne a changé. Aujourd’hui, le programme de TV5 est dans toutes les parties du monde confronté à l’offre de programmes d’autres chaînes francophones. Demain, les chaînes du service public français bénéficieront pour leur signal principal de la même distribution universelle. Si TV5 ne présente pas une offre de qualité, plus enracinée dans chacun de ces territoires, dans un terme très rapide, c’en est fini du concept de TV5 comme chaîne multilatérale francophone. Il ne faut pas se faire d’illusions. »

A plus long terme, TV5 Monde a d’ailleurs précisé dans sa réponse qu’elle considérait qu’à l'avenir, « la meilleure façon de cibler les publics variés de TV5 Monde, au-delà de l'accessibilité plus grande permise par le sous-titrage et la création de nouvelles chaînes régionales, résidera certainement dans la mise à disposition de déclinaisons thématiques simultanées. C'est déjà le cas en mode non linéaire sur JOOST205 (10 chaînes : documentaire, sport, langue française, éducation, art de vivre, culture, découverte, musique, information, fiction). »

Les experts chargés par la conférence des ministres de TV5 de réfléchir à l’avenir de la chaîne dans le cadre de la réforme de l’audiovisuel extérieur français ont, quant à eux, souligné les risques de « marginalisation que présentait l’évolution technologique du marché mondial » et la nécessité de réfléchir au positionnement et à l’identité éditoriale de TV5 Monde.

LE PROJET DE RÉFORME DE L’AUDIOVISUEL EXTÉRIEUR

Les relations avec les Etats partenaires se sont tendues

Le calendrier et les modalités d’élaboration du projet de réforme de l’audiovisuel extérieur français ont entraîné des prises de position très critiques de la présidente de la Confédération helvétique ainsi que de la ministre de la culture de la communauté francophone de Belgique.

Lors de la conférence des ministres de TV5 à Lucerne, le 9 novembre 2007, à l’issue d’une présentation de ses projets par la France, les ministres ont retenu 12 éléments considérés comme constitutifs de la chaîne, parmi lesquels le nom TV5 Monde, son caractère multilatéral, y compris dans son pilotage politique, sa nature généraliste, l’égalité des partenaires, la présence des journaux nationaux et la vision francophone de l’information.

Un rapport d’experts francophones a en outre examiné les conséquences d’un rapprochement entre TV5 Monde et France 24 dans quatre domaines : la distribution, la veille technologique, l’internet et l’information. Tout en soulignant les effets bénéfiques d’un tel rapprochement en termes de coût et d’efficacité, ils ont souligné les principes qui devraient présider à de tels rapprochements du point de vue de l’intérêt de TV5 Monde, laquelle devrait conserver :

− la maîtrise de sa distribution, même si elle était confiée à une structure commune ;

− un site internet propre au sein d’une éventuelle plate forme numérique commune ;

− une indépendance éditoriale en matière d’information, même si des synergies en matière de collecte et de production étaient mises en œuvre.

Ces conclusions ont été approuvées par la conférence des ministres de TV5. Sur cette base, et en réponse aux inquiétudes exprimées, la partie française s’est engagée à faire étudier par un groupe de travail intergouvernemental les modalités concrètes de rapprochement envisagées, afin de permettre à une nouvelle conférence ministérielle d’entériner, au premier trimestre 2008, les décisions qui en découleraient.

Les réactions très récentes de plusieurs partenaires francophones de la France traduisent un durcissement de leur position.

Le caractère tardif de la décision de rapprochement augmente indirectement le coût de la réforme

Après une longue période d’incertitudes, la décision de créer France 24 a été annoncée en décembre 2004, la convention liant l’Etat et la nouvelle société n’étant toutefois signée qu’un an plus tard, le 1er décembre 2005. Or, en mars 2005, TV5 Monde a décidé de lancer un appel d’offres destiné à choisir un nouveau prestataire pour sa régie technique et les locaux correspondants (voir ci-dessous les développements consacrés à ce sujet).

Dès cette époque, donc, les synergies aujourd’hui évoquées pouvaient être mises en œuvre avec d’autant plus d’efficacité que les moyens techniques nécessaires (régie de diffusion en particulier), ainsi que les locaux, pouvaient être définis conjointement pour les deux chaînes et favoriser leur coexistence à moindre coût. Tel n’a pas été le cas et le choix opéré par TV5 Monde, avec l’accord de sa tutelle, à l’issue de cette procédure, fait que la chaîne est aujourd’hui titulaire d’un bail ferme de 12 ans valable jusqu’en 2018, qui rend particulièrement coûteux et incertain tout projet de colocalisation avant ce terme des filiales d’un éventuel holding.

La Cour constate que la décision de créer France 24 n’a pas conduit à des décisions d’ajustement des frontières entre les opérateurs de l’audiovisuel extérieur, alors même que l’arrivée d’un nouvel opérateur modifiait sensiblement la situation et qu’elle rendait plus complexe l’articulation des stratégies entre les tutelles, elles mêmes distinctes, des différentes sociétés.

*

* *

En réponse aux observations provisoires de la Cour, TV5 Monde a exposé les mesures qu’elle juge, dans la continuité de son plan stratégique et dans le cadre de la Charte de TV5, nécessaires à son développement. Le coût de ce plan stratégique actualisé est évalué par la chaîne à 15 M€ annuels. Celle-ci ne précise toutefois pas les modalités de financement de ces mesures.

TV5 Monde considère ainsi qu’elle doit rester une chaîne mondiale et que d’éventuelles priorités géographiques se conçoivent sous l’angle d’un renforcement ciblé des moyens dédiés à une zone particulière. La chaîne estime cependant que toutes les zones actuelles de diffusion exigent une attention et des moyens renforcés.

Dans ce cadre, TV5 Monde convient avec la Cour que « l’analyse par signaux semble insuffisante et mériterait d’être affinée » et que « l’approche par pays suggérée par le relevé de constatations provisoires aurait très certainement un intérêt dans le cadre d’objectifs géographiques ciblés par pays. »

Le MAEE a pour sa part développé une vision différente en affirmant que « l’époque où TV5 Monde se devait d’assurer la diffusion des programmes francophones sur tous les territoires, en systématisant autant que possible le sous-titrage, est révolue » et en soulignant : « nous sommes aujourd’hui à l’heure des choix quant aux zones géographiques et/ou linguistiques à privilégier pour TV5 Monde, et cela dans la recherche d’une complémentarité indispensable avec France 24. »

Plus largement, le ministère de tutelle estime que « la réalité des marchés devenus de plus en plus concurrentiels couplée au caractère irréversible de la révolution numérique obligent à repenser les priorités stratégiques par une approche plus précise des coûts et des audiences par signal et par zone géographique. »

Quant aux possibilités de financement de cette nouvelle approche, le MAEE a précisé aux partenaires non français de la chaîne les quatre gisements de ressources complémentaires susceptibles de bénéficier à TV5 Monde. Les orientations suggérées par le MAEE peuvent être ainsi résumées :

- Un effort de rationalisation  par la mutualisation de fonctions qui doit « déboucher sur des économies significatives dont le montant ne peut encore être chiffré ».

- Une progression des ressources propres grâce à une régie publicitaire intégrée et « la pleine exploitation du potentiel de l’internet et des nouveaux médias ».

- Un financement multilatéral plus équilibré, la réforme devant être « l’occasion pour nos partenaires de réévaluer leur implication dans le financement multilatéral de la chaîne dans une optique positive ».

- Un partenariat élargi, soit auprès d’autres Etats francophones, soit auprès d’opérateurs privés qui seraient associés sur le plan opérationnel à certains développements de la chaîne.

La DDM a souligné dans sa réponse que l’ambition de TV5 Monde impliquait « un effort sans précédent qui doit aussi bien porter sur ses méthodes de travail, qu’il conviendrait de rationaliser, que sur ses modes de diffusion, qu’il faudrait démultiplier, et surtout sur ses programmes, qu’il serait souhaitable de rendre plus attrayants, plus cohérents et plus identifiables dans l’offre surabondante proposée au public international. »

La DDM a aussi précisé que la place de l’information doit être préservée mais qu’une étude d’opportunité sera réalisée sur la fonction de production de l’information « dans l’objectif de mutualiser cette fonction entre TV5 Monde, France 24 et radio France internationale. »

France Télévisions a pour sa part répondu à la Cour en formulant une interrogation au sujet de TV5 Monde : « la chaîne doit-elle systématiquement privilégier une stratégie de type service public, visant une couverture totale et à ce titre rester présente sur tous les supports – en particulier en réception directe satellite analogique ? Ou peut-elle parfois limiter sa pénétration tout en orientant sa politique marketing plus directement vers son public, en incitant ce dernier à adopter une démarche active, et à se tourner vers des opérateurs payants pour recevoir la chaîne ? Cette dernière approche, il est vrai, ne serait pas sans poser un problème de fond, car entrant en contradiction avec la Charte qui pose comme principe une politique de l’offre. Mais jusqu’à quelle limite, en particulier sur le plan financier, ces principes doivent-ils être systématiquement appliqués ? »

Sans fournir de réponse immédiate à ces questions, France Télévisions a clairement exprimé son souhait de jouer dans l’avenir un « rôle essentiel » et d’apporter une « contribution très forte » dans le pilotage du holding destiné à coiffer l’audiovisuel extérieur. Aussi, le groupe considère-t-il que ses relations avec la chaîne francophone « devront être réexaminées à la lumière des arbitrages qui seront rendus sur la participation de France Télévisions au capital de TV5 Monde. »

La Cour observe que les orientations dégagées par les tutelles françaises de TV5, qui reposent sur l’abandon d’une politique de l’offre tous azimuts, sur l’amélioration de la qualité des programmes et la démultiplication des modes de diffusion dans un univers de plus en plus concurrentiel, sur des économies hypothétiques et des ressources nouvelles aléatoires, ne seront pas aisément conciliables.


PARTIE II :
LES COÛTS ET LES MOYENS MIS EN 
œUVRE PAR L’ENTREPRISE

LES COMPTES

LES COMPTES DE CAPITAUX PROPRES

La situation nette de TV 5 Monde n'a pas cessé d'être positive au cours de la période sous revue. A compter de 2003, l’utilisation des subventions d’investissement a cependant eu pour effet de diminuer le total des capitaux propres. De ce fait, le montant total des capitaux propres diminue, en dépit des résultats bénéficiaires de chacun des exercices.

La corrélation entre les budgets initiaux et le réalisé, de même que le suivi qui en est opéré par la direction financière, montre une indéniable attention au maintien d’un résultat positif depuis 2000, en dépit des contraintes pesant sur les ressources ou les charges.

La Cour note cependant que la trésorerie de l’entreprise a diminué et que les contraintes financières qui ont suivi le déménagement ont rendu la situation budgétaire de TV5 Monde beaucoup plus tendue. La premier budget prévisionnel de 2008 faisait d’ailleurs apparaître une impasse de financement de 2,8 M€.

La persistance d’importantes incertitudes attachées en particulier aux risques en matière de propriété intellectuelle (B) et au devenir des comptes courants d’associés (C) (voir ci-dessous les développements consacrés à ces deux aspects) conduisent en définitive la Cour à réitérer le constat de faiblesse des capitaux propres et assimilés, ceux-ci s’élevant fin 2006 à 1,1 M€.

LES PROVISIONS

Les provisions pour risques

Elles correspondent pour l'essentiel à des risques liés à la diffusion des programmes de TV5 Monde.

Un risque est ainsi identifié à raison de la diffusion de TV5 Monde sur certains réseaux hertziens, alors que la chaîne n’a pas acquis les droits pour une telle diffusion de ses programmes. Cette diffusion hertzienne est limitée et résulte souvent d’initiatives extérieures à TV5 Monde. Il en va ainsi pour la diffusion au Liban, décidée par l’ambassade de France. Il en va de même pour certains territoires africains sur lesquels la diffusion hertzienne a été entreprise à l’initiative des autorités locales.

TV5 Monde considère que le risque encouru du fait de poursuites éventuelles par les ayants droit n’existe que pendant trois années. Ce risque était évalué à fin 2006 1.115.000 €.

La Cour considère que ce risque est particulièrement hypothétique dans la mesure où aucune demande n’a jamais été émise à ce titre auprès de la société. Sur le plan fiscal, cette provision n’a d’ailleurs pas été admise.

Un autre risque est identifié au titre de la rémunération équitable (droits phonographiques), pour lesquels la société ne reverse rien à la SPRE (société pour la perception et la rémunération équitable). En 2001, la provision était de 588 K€ ; elle s’élève en 2006 à 883 K€. Les sommes qui alimentent cette provision sont forfaitaires et fixées annuellement à 60.000 € depuis 2002.

TV5 justifie le maintien de cette provision par le fait qu’une négociation globale est en cours avec la SPRE via la médiation d’Acess (syndicat des chaînes du câble et du satellite).

Des provisions avaient aussi été constituées au titre des droits des réalisateurs. Cependant, elles ont été progressivement reprises entre 2001 et 2005.

De manière générale, la question du provisionnement des droits dus au titre de la propriété intellectuelle se heurte à d’importantes difficultés qui tiennent, d’une part, à la complexité d’un corpus juridique dont l’interprétation et la mise en application dans le contexte d’une diffusion mondiale de programmes audiovisuels s’avère particulièrement délicate, et, d’autre part, à l’incertitude quant à l’évaluation des montants qui seraient éventuellement dus au titre de ces droits.

Dans un tel contexte, la question des provisions pour risques doit faire l’objet d’une particulière vigilance et d’une révision de leur montant dès lors qu’un nouvel élément affectant l’évaluation du risque est connu.

Les provisions pour charges

Les provisions pour charges s’établissaient à 627.591 € fin 2006. Elles concernent essentiellement des litiges sociaux (indemnités de départ) ainsi qu’un contentieux important avec la société Cognacq Jay Images (CJI), à la suite de l’appel d’offres ayant conduit TV5 Monde à choisir un autre prestataire technique et à déménager.

Ce litige n’est pas provisionné : seuls les frais d’avocat ont fait l’objet d’une dotation, en dépit d’une demande de 8 M€ de dommages et intérêts. TV5 Monde justifie l’absence de provision par la conviction qu'elle ne peut perdre ce procès206.


LES DETTES

Les dettes de la société augmentent de 33 % sur la période et représentent 69 % du passif. Les dettes « fournisseurs » en représentent les trois-quarts (environ 17 M€ fin 2006). Elles sont principalement constituées des acquisitions de programme, des droits dûs aux sociétés d’auteurs, des loyers, des coûts de régie, des engagements auprès

des sociétés de diffusion par satellites, des prestations de sous-titrage et d’innombrables petits engagements pour la promotion locale et les frais engagés par les correspondants locaux. La comptabilité recense plus de 10.000 factures par an.

Les dettes sociales sont également importantes, avec plus de 5 M€ fin 2006.

L’importance de ces différentes dettes correspond cependant à des phénomènes récurrents de fin d’année.

Une dette particulière de nature financière doit être mentionnée. Elle résulte de l’existence de comptes courants ouverts aux débuts de TV5 au profit des partenaires du GIE Satellimages. A la transformation du GIE en SA, les montants correspondant à l’affectation des résultats bénéficiaires du GIE durant son activité (et tout particulièrement ceux résultant des excédents de subvention du MAE à l’époque de la dissolution du GIE en 1993), ont été inscrits dans ces comptes courants. Ils n’ont depuis jamais été soldés et, pour l’un d’entre eux (ouvert au nom de France 3), le solde est annuellement abondé d’intérêts.

Au 31/12/2006, ces comptes courants s’élevaient à 648 K€ pour "France 2", 715 K€ pour "France 3" et 108 K € pour la RTBF, 5 K€ pour le CTQC, soit un total de 1.476 K€.

Les réponses fournies par France Télévisions et TV5 Monde aux observations provisoires de la Cour confirment l’existence d’un désaccord persistant sur cette question. La chaîne francophone affirme que, lors de la liquidation du GIE, « les chaînes ont pris l’engagement de laisser ces comptes courants à la disposition de la société anonyme. L’abandon de créances n’a pas été officiellement réalisé en raison de problèmes de déductibilité fiscale. Cependant, l’esprit était bien de laisser ces sommes à TV5 ». La chaîne affirme aussi que les sommes correspondantes ont été provisionnées dans les comptes de France Télévisions et qu’une clôture de ces comptes courants n’aurait ainsi pas d’incidence sur les résultats de France 2 et France 3.

France Télévisions affirme quant à elle au sujet des comptes courants qu’elle détient qu’en « dépit de nombreuses relances ces sommes n’ont pas fait l’objet de remboursement. France Télévisions demande que ces comptes courants puissent être soldés. »

La Cour invite les tutelles à se concerter pour faciliter la résolution de cette question. A cet égard, le MAEE a précisé dans sa réponse que ce point « concerne très directement les actionnaires et en particulier France Télévisions et donc sa tutelle, la DDM ». La DDM pour sa part n’a pas fourni à la Cour de précisions sur ce point.

LES PRODUITS CONSTATÉS D’AVANCE ET LES REPORTS DE SUBVENTION

TV5 Monde régularise ses comptes en fin d’année, en inscrivant en produits constatés d’avance la valeur des programmes acquis mais non diffusés, ainsi que le montant de la subvention du MAEE non consommée.

S’agissant du stock de programmes, cette opération lui permet de rattacher la charge de leur acquisition au bon exercice. Toutefois, cette opération suppose une évaluation correcte de la valeur du stock de programmes.

S’agissant de la subvention d’exploitation, l’opération est plus contestable. Le montant à inscrire est calculé en fonction de l’exécution budgétaire. C’est ainsi qu’une sorte de « cagnotte » a été constituée au fil des années, pour atteindre plus de 2 M€ en 2005, à laquelle s’ajoute une subvention de 1 M€ versée par anticipation pour 2006, sur des crédits budgétaires de l’année 2005. Cette réserve a permis à TV5 Monde d’absorber sans mesure nouvelle spécifique le coût induit par le déménagement et est désormais quitte.

En réponse aux observations provisoires de la Cour, le MAEE a fait valoir que « le Parlement a été informé chaque année du montant des reports intervenus l’année précédente dans le cadre des réponses aux questionnaires parlementaires transmis au mois d’octobre. » Le MAEE a toutefois aussi reconnu qu’il « n’a en revanche jamais été possible d’informer le Parlement pas anticipation sur le versement de telles subventions exceptionnelles qui sont intervenues, par construction, en toute fin d’exercice. »

TV5 MONDE NE VALORISE PAS DANS SES COMPTES LES APPORTS DE PROGRAMME DES CHAÎNES PARTENAIRES

Les chaînes partenaires de TV5 Monde lui fournissent des programmes libres de droits. Ces apports en nature sont effectués à titre gratuit ; ils résultent par exemple des négociations que les chaînes France 2 ou France 3 mènent pour des diffusions sous leur antenne, avec des droits de diffusion repris par TV5 Monde. Les ayants droit sont rémunérés par TV5 Monde.

La valeur économique de ces programmes n’est toutefois pas retracée dans les comptes de TV5 Monde. Les règles comptables n’imposent pas une telle mention. Il serait pourtant concevable de retracer ces flux sous forme de subventions équilibrées par des charges de programmes.

Dans sa réponse aux observations provisoires de la Cour, le MAEE a estimé à 23,4 M€ le coût annuel récurrent d’acquisition de ces programmes.

LA TRÉSORERIE

La société disposait jusqu’en 2005 d’une abondante trésorerie, placée sur des valeurs sûres. Les produits de cession des valeurs mobilières ont rapporté en cumul sur 7 ans plus de 2,5 M€.

Le changement de siège social et le déménagement de la société ont eu une incidence importante sur le niveau de trésorerie disponible, qui s’est réduite entre fin 2005 et fin 2006 de plus de 45 %. La trésorerie de l’entreprise demeure toutefois positive pratiquement toute l’année, à l’exception d’une courte période (février/mars) précédant la réception du premier versement de la subvention publique.

LA MASSE SALARIALE

La masse salariale a enregistré une croissance de 72 % sur la période et les effectifs ont augmenté de 53 %, principalement au sein de la direction de l’information. Au sein de ces effectifs, le nombre d’intermittents et autres non permanents demeure élevé (99 en 2006) et leur proportion par rapport aux effectifs salariés reste constante sur la période, en dépit d’un plan réduction du recours à l’intermittence.

TV5 Monde a précisé, en réponse à la Cour, que la croissance de ses effectifs résultait de la forte expansion de la chaîne depuis 1999 et en particulier des conséquences de la réforme des structures intervenue en 2001, du renforcement de la place de l’information et, s’agissant des salariés permanents, du plan de résorption de l’intermittence engagé en 2004-2005. Selon la chaîne, la persistance d’un nombre élevé d’intermittents résulte de la croissance des productions d’émissions (magazines) assurées directement par la chaîne.

Par ailleurs, TV5 Monde souligne que l’évolution globale sur plusieurs années masque une inflexion intervenue à compter du second semestre 2006. Les modifications de grille (réduction du nombre de magazines) ont permis de constater en 2007 une légère réduction des effectifs et un ralentissement de la progression de la masse salariale.


ANALYSE GLOBALE DE L’ÉVOLUTION BUDGÉTAIRE DE TV5 MONDE

LES COÛTS DES PROGRAMMES ET LES FRAIS DE STRUCTURE ONT FORTEMENT AUGMENTÉ DEPUIS 2003

La croissance des dépenses sur la période 2003-2006 (environ 7 M€) est essentiellement imputable aux coûts des programmes, en croissance de 16 %, soit près de 6 M€. En leur sein, les frais de sous-titrage progressent de 56 %, soit 1,4 M€ de hausse.

Les frais de structure, dont une part importante est constituée par les frais de location du siège, sont également en vive hausse avec 57 % d’augmentation, soit 2,2 M€ de dépenses supplémentaires. Une partie de ces dernières résulte toutefois du surcoût ponctuellement induit en 2006 par le déménagement. Selon TV5 Monde, en neutralisant les effets du déménagement et ceux de la franchise de loyer obtenue sur 2006 et 2007, la progression des frais de structure s’établit à 22 % depuis 2003.

Inversement, les frais techniques sont quasiment stables sur la période (1 % d’augmentation, mais en baisse de 2005 à 2006).

Les dépenses de communication, globalement en hausse de 1 %, amorcent une baisse en 2006, en raison des difficultés budgétaires rencontrées par TV5 Monde.

LE PLAN STRATÉGIQUE 2006-2009 N’A PAS ETE DOTE DES FINANCEMENTS ESCOMPTÉS

La question du financement du plan stratégique 2006-2009 a été abordée tout au long de son élaboration. Le président de TV5 Monde affirmait ainsi, dès le mois de juin 2005 « ou bien les moyens de réaliser ce plan stratégique seront donnés à TV5, ou TV5 devra réussir à générer suffisamment de recettes nouvelles et de recettes propres, ou bien, ni l’une ni l’autre de ces hypothèses ne se vérifiera et TV5 devra se replier sur des perspectives plus modestes. » (PV du CA du 22 juin 2005).

Le plan de financement initial n’a pourtant pas été suivi par les bailleurs de fonds et la hausse des contributions publiques s’est révélée très inférieure à ce qu’escomptait TV5.

A l’occasion de la conférence des ministres du 9 novembre 2007, un rapport d’étape sur la mise en œuvre du plan stratégique a été dressé. En préambule, la chaîne y souligne que les priorités stratégiques qui lui ont été assignées n’ont pas été assorties du financement jugé nécessaire, estimé à 10,1 M€ (hors glissements techniques) sur les quatre années du plan.

Selon ce même rapport d’étape, la société a opéré des redéploiements qui ont notamment concerné certaines émissions propres à TV5 Monde dont la production a cessé. Les dépenses de reportage ont aussi été réduites, de même que les dépenses de communication.

TV5 Monde affirme que ces redéploiements et la franchise d’une demi année de loyer en 2007 ont permis de financer des mesures de sous-titrage dont le volume s’est accru de 10 %. Aucune nouvelle langue n’est toutefois venue étoffer l’offre existante et, en 2008, le financement de cette politique ne peut être assuré. Sur ce point, la conférence des ministres de Lucerne a conclu à la nécessité de réduire de plus de 2 M€ les prévisions de dépenses de TV5 Monde, ce qui a conduit la chaîne à décider, en concertation avec le MAEE, de mettre fin au sous-titrage en suédois et danois à compter de 2008.

Dans le domaine des programmes, la chaîne a mis en place une nouvelle offre destinée aux plus jeunes (cette offre avait été supprimée en raison de la difficulté à cibler suffisamment le créneau horaire adapté à cette population, compte tenu des fuseaux horaires couverts par chaque signal, et du fait de la qualité jugée insuffisante des programmes fournis par les partenaires). La réorganisation de l’offre d’information (suppression de certains bulletins d’information à heure fixe) a par ailleurs permis de réintroduire dans la grille des films, fictions, documentaires et magazines d’un format supérieur à 52’, renforçant ainsi la qualité des programmes proposés.

En revanche, le nombre de signaux n’a pas été augmenté, mais la régie de diffusion installée dans les nouveaux locaux de TV5 Monde depuis l’été 2006 offre à la chaîne la capacité technique de mettre en œuvre cette orientation.

En définitive, le plan stratégique n’a que très partiellement été mis en œuvre et, pour la première fois en 2008, la chaîne va faire régresser son offre en réduisant le nombre de langues de sous-titrage.

LES PUBLICS ET LES ZONES GEOGRAPHIQUES CIBLÉS : LE COÛT DU SOUS-TITRAGE

LA CIBLE FRANCOPHONE N’EST PAS JUGÉE SUFFISANTE

Depuis 2001, TV5 considère qu’elle ne saurait exclusivement cibler le public francophone. Son plan stratégique actuel souligne le potentiel linguistique limité de la francophonie, estimé à 185 millions d’individus, dont 110 millions (Français compris) ont le français comme langue maternelle ou de communication courante.

Ce potentiel d’audience est fortement dispersé géographiquement, et implique une distribution élargie qui s’étend actuellement à près de 180 millions de foyers, soit un potentiel de 600 millions de téléspectateurs.

Vis-à-vis des distributeurs commerciaux (opérateurs satellitaires ; câblo-distributeurs), la chaîne affirme avoir « du mal à faire valoir un public suffisamment nombreux (si limité aux seuls francophones) ou homogène (si élargi à toutes les catégories) » et estime que son

réseau de distribution serait menacé si son public cible était exclusivement francophone. Pour élargir son public à d’autres cibles, la chaîne a choisi de développer les programmes sous-titrés afin « de transformer une part croissante de son audience potentielle en audience réelle ».

LE SOUS-TITRAGE PERMET DE VISER D’AUTRES PUBLICS

Le sous-titrage a fait l’objet d’efforts budgétaires significatifs

Le sous-titrage est imposé par le marché de la distribution mais sa rentabilité est plus qu’hypothétique

TV5 Monde affirme que le sous-titrage d’un programme augmente son audience. En permettant de s’affranchir de la barrière linguistique, il multiplie, selon la chaîne qui se fonde sur des études audimétriques menées aux Pays-Bas et en Allemagne, par 2 à 5 fois son audience (cas d’une fiction diffusée avec sous-titrage incrusté par rapport à une diffusion sans sous-titrage).

Les distributeurs européens demandent à TV5 Monde de sous-titrer ses programmes pour la maintenir dans leur offre de base, ce qui permet à la chaîne de ne pas se retrouver reléguée dans « l’offre ethnique » des opérateurs, voire de s’en faire évincer ou de devoir payer son maintien. C’est ainsi sous la pression des distributeurs que le sous-titrage en Danois a été introduit en 2003.

Ces raisons expliquent que le sous-titrage soit devenu un des objectifs principaux de l’actuel plan stratégique.

Pour autant, même en se plaçant dans l’hypothèse d’un accroissement de l’audience, il est loin d’être acquis que les recettes publicitaires supplémentaires qui s’ensuivraient puissent compenser les coûts supplémentaires induits, directement et indirectement, par le sous-titrage. Par conséquent, l’axe stratégique développé par la chaîne suppose un financement supplémentaire en provenance de ses bailleurs de fonds.

La croissance des dépenses de sous-titrage

En dépit de la faible croissance de son budget, TV5 Monde a accru son effort de sous-titrage par redéploiement de ses budgets (coûts techniques notamment).

Les dépenses de sous-titrage ont ainsi progressé de 401 % entre 2000 et 2007, et sont passées de 3 % à plus de 10 % des dépenses de programmes, soit de 1,3 % à plus de 5 % du total des dépenses. Au cours de la même période, les frais de programmes ont progressé près de 3 fois plus que le total des dépenses, et les frais de sous-titrage près de 20 fois plus.

L’absence de mesure supplémentaire de financement conforme au plan stratégique a toutefois conduit TV5 Monde à ne pas développer l’offre de programmes sous-titrés dans les proportions initialement envisagées. Si le volume d’heures de programmes sous-titrés a quasiment doublé de 2005 à 2007, en revanche aucune nouvelle langue n’a été introduite.

Pour l’avenir, à compter de 2008, deux langues (Suédois et Danois) seront même supprimées de l’offre. En contrepartie, le Roumain sera introduit.

Le coût du sous-titrage réalisé par TV5 Québec-Canada est élevé

En application de la décision des Ministres prise dans le cadre de la réforme des structures d’août 2001, les opérations de sous-titrage en espagnol et en portugais pour le signal TV5 Amérique latine et en anglais pour le signal TV5 Etats-Unis sont réalisées par TV5 Québec-Canada à Montréal.

Le coût de ce sous-titrage est élevé : le coût standard de la minute facturée dans chacune de ces langues est actuellement de 16,5 Can$ la minute, soit 11,88 € la minute.

Les prospections effectuées par TV5 Monde montrent qu’une sous-traitance de ce sous-titrage dans des pays pratiquant les langues considérées dégagerait des marges budgétaires.

En effet, les tarifs proposés, convertis en euros, sont environ quatre fois moins élevés. Par rapport au volume actuel de programmes sous-titrés à Montréal, l’économie potentielle est de l’ordre de 400 000 €.

Les gouvernements du Canada et du Québec ont été saisis de la question, à l’occasion notamment de la réunion des hauts fonctionnaires du 12 décembre 2005 lors de la discussion sur le budget 2006. Ils se sont opposés à la remise en cause de l’accord initial, mais ont consenti deux années de suite un accroissement de leur contribution au budget de TV5 Monde au-delà de l’augmentation de 2,5 % systématiquement mise en œuvre par les pays partenaires de la France, pour un montant de 400 000 €.

Les limites techniques du sous-titrage restreignent sa portée réelle

TV5 Monde est sous-titrée en dix langues qui ne sont cependant jamais disponibles simultanément

TV5Monde est sous-titrée en dix langues207 inégalement réparties entre les différents signaux. Le sous-titrage rencontre toutefois des limites techniques mais aussi juridiques et financières, liées à la disponibilité des droits y afférents, qui affaiblissent l’efficacité de l’effort consenti. Hormis le signal Europe et, dans une moindre mesure, le signal Amérique latine, les contraintes techniques ne permettent en effet de diffuser qu’une seule langue de sous-titrage sur un territoire donné.

En Europe, d’autres moyens techniques sont disponibles : le télétexte et le DVB. Dans le cas du télétexte, c’est le téléspectateur qui choisit la langue de sous-titrage parmi celles proposées. Il en va de même pour les téléspectateurs recevant TV5 Monde directement par satellite. En revanche, dans le cas du système DVB, l’incrustation du sous-titrage dans le programme s’effectue à partir de la tête du réseau câblé de distribution, de sorte que l’ensemble des abonnés audit réseau n’a accès qu’à une seule langue de sous-titrage.

L’impact présumé positif du sous-titrage sur les audiences n’a pas empêché une forte érosion de l’audience de TV5 Monde au Danemark et en Suède

L’effet du sous-titrage sur les audiences est lui-même sujet à interrogations. L’affirmation de TV5 Monde selon laquelle un programme sous-titré dans la langue locale recueille entre deux et cinq fois plus d’audience s’appuie en effet sur des études audimétriques uniquement réalisées en Allemagne et aux Pays-Bas. Or l’évolution entre 2002 et 2007 des audiences au Danemark (où le sous-titrage a été introduit en 2003) et en Suède (où il existait précédemment) ne corrobore pas cette affirmation. Dans ces deux pays, d'une part, l'audience hebdomadaire cumulée a diminué (- 33 % au Danemark ; - 86 % en Suède) et le rapport entre l'audience cumulée et le nombre de foyers de réception s'est dégradé (- 6 points au Danemark ; - 92 points en Suède). Le coût élevé du sous-titrage (450 K€ par langue et par an en Europe) justifie d’ailleurs le choix opéré par TV5 Monde de supprimer ces deux langues de son offre à compter du 1er janvier 2008. En 2007, le sous-titrage a en effet représenté une dépense de 4,6 € par téléspectateur suédois et de 2,96 € par téléspectateur Danois.

Ainsi est-il a priori plus efficient de privilégier le sous-titrage à destination des pays dans lesquels l’audience est déjà importante, comme la Roumanie, la Pologne ou encore le Portugal.

LE RÉSEAU DE TV5 MONDE A UN COÛT ÉLEVÉ MAIS EN DIMINUTION

A l’occasion du conseil d’administration qui l’a désigné comme PDG de TV5 Monde, M. Bonnemain a affirmé (PV du 27 juin 2006) que « pérenniser et développer le réseau de diffusion et de distribution sur tous les vecteurs possibles est un axe capital de la stratégie de TV5 Monde. » Cet objectif est récurrent dans les plans stratégiques de TV5 Monde.

Le réseau d’une chaîne mondiale se compose d’un réseau primaire de diffusion composé de satellites destinés à acheminer le signal auprès des opérateurs du réseau secondaire, dit de distribution, qui commercialisent ce signal avec d’autres programmes dans le cadre de bouquets satellite ou par câble.

LE RÉSEAU PRIMAIRE DE DIFFUSION : UNE DIFFUSION SATELLITAIRE MONDIALE DONT LES COÛTS SE CONCENTRENT SUR L’EUROPE

Une diffusion mondiale dont les coûts diminuent

Le réseau de diffusion satellitaire de TV5 couvre le monde entier, à l’exception de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande, de la Polynésie et de l’ensemble des îles du Pacifique.

La couverture de diffusion évolue peu dans le temps. Elle est obtenue au moyen de 15 satellites et 2 fibres optiques qui transportent les 7 signaux émis depuis Paris par TV5 Monde jusqu’aux opérateurs locaux gérant la distribution de la chaîne sur des bouquets satellitaires ou des réseaux câblés (voir ci-dessous le réseau secondaire de distribution).

La constitution de ce réseau de diffusion s’effectue moyennant le paiement de la location des capacités de transport satellitaires nécessaires. Dans certains cas, cependant, les opérateurs de distribution satellitaire prennent en charge ces frais et permettent à TV5 Monde d’être diffusée gratuitement.

TV5 Monde a privilégié, pour des raisons d'économie, un mode de diffusion/distribution en numérique plutôt qu'en analogique partout où cela était, selon elle, possible (ie hors d’Europe).

Cette politique a entraîné une baisse globale des coûts de diffusion au cours de la période sous revue.

La multiplication des technologies sur une même zone ainsi que le chevauchement des zones de couverture par plusieurs satellites émettant le même signal représentent un coût pour TV5 Monde. En regard de ces coûts, chaque technologie correspond à un parc d’équipements qui peut être en croissance, à maturité ou en régression du fait de son obsolescence. La marge de manœuvre de la société réside dans le choix du développement, du maintien ou de l’abandon de telle ou telle technologie et dans la faculté soit d’assumer le coût, soit de redéployer l’économie qu’induit cette décision.

Ainsi, en Europe, la multiplication des satellites rendue nécessaire pour maintenir l’offre analogique et développer l’offre numérique a logiquement induit une hausse significative des coûts au cours de la période sous revue.

En contrepartie de son coût, la diffusion en tant que telle n'est à l'origine d'aucune recette directe. En effet, si celle-ci peut techniquement permettre une réception de la chaîne depuis presque partout dans le monde (moyennant parfois une parabole de grand diamètre et un matériel de réception adapté), en pratique, les téléspectateurs dans leur très grande majorité n’y ont effectivement accès que grâce à la reprise du signal par un distributeur. C’est par l’intermédiaire de ce dernier que les abonnements sont commercialisés et que des ressources d’abonnement sont reversées aux chaînes de télévision reposant sur un modèle économique payant.

Autrement dit, la stratégie de TV5 Monde consistant à exploiter le plus grand nombre de vecteurs possibles a un coût direct et significatif pour la chaîne, mais l’efficacité de ce dispositif est subordonnée à l’existence et au maintien d’un réseau de distribution adapté à ces différentes technologies.

La question de la diffusion analogique en Europe

En 2004, TV5 Monde a choisi de maintenir la diffusion analogique de son signal en Europe afin de ne pas perdre une partie substantielle de sa distribution, notamment en Allemagne

Les coûts de diffusion se concentrent sur l’Europe, qui représente plus de 60 % du coût total de la diffusion. Ce coût élevé s’explique par le maintien d’une diffusion analogique du signal Europe, rendu nécessaire selon TV5 Monde par le fait que, selon les estimations dont elle dispose, 70 % des réseaux de distribution câblés, du parc de téléviseurs et des récepteurs directs par satellite restent analogiques.

Cette situation correspond notamment au cas de l’Allemagne qui constitue à cet égard un enjeu spécifique pour TV5 Monde. Grâce à sa forte présence analogique, le signal Europe de la chaîne a un taux de pénétration de 73 % de l’ensemble des foyers allemands. Par ailleurs l’Allemagne représente 20 % de la distribution de TV5 en Europe et 12,6 % de sa distribution mondiale. Cette distribution en Allemagne se répartit comme suit : 18 millions de foyers au titre du câble (11,7 millions si l'on exclut les diffusions partielles) et 11 millions au titre de la réception directe par satellite, soit un total de 29 millions de foyers TV, mais dont 5 millions seulement sont numériques.

En dépit de son coût élevé (2,6 M€ par an), TV5 Monde est très attachée à la distribution sur le câble en Allemagne, en particulier dans les grandes villes où les réglementations municipales s’opposent souvent aux antennes paraboliques.

L’arrêt de la distribution de TV5 Monde sur le câble allemand entraînerait immédiatement, selon elle, une importante perte en termes d’audience. Or, si l’on excepte la zone France, Belgique, Suisse, l’Allemagne est le plus important bassin de réception de la chaîne en Europe (hors Russie). L’audience en Allemagne est dès lors utilisée pour extrapoler celle d’un certain nombre d’autres pays et se révèle indispensable à la commercialisation publicitaire paneuropéenne de la chaîne. TV5 Monde considère donc que de ne plus pouvoir présenter une distribution et une audience réelles en Allemagne handicaperait de façon importante la commercialisation de ses espaces publicitaires. Il s’en suivrait des réactions en chaîne, tant en termes de distribution que de commercialisation.

Le MAEE avait souligné, en réponse à la précédente communication publique de la Cour, « qu’il est très difficile d’envisager un retrait total ou partiel de TV5 du câble allemand, où la chaîne a conquis une position forte alors que la réception satellitaire reste marginale dans ce pays. »

Dans le cadre d’une réflexion menée par TV5 Monde et qui ne ciblait pas le seul cas de l’Allemagne, la question de l’abandon de la diffusion du signal analogique en Europe s’était posée en 2004, lors de la renégociation du contrat de diffusion alors en cours. TV5 Monde avait estimé que la suppression pure et simple de ce signal se traduirait par la perte de 51,2 millions de foyers en Europe, auxquels s’ajoutaient 3 millions de chambres d’hôtel et 8,9 millions de foyers qui, au Maghreb, recevaient également ce signal. En regard de ce total de 63 millions de foyers (chambres d’hôtel incluses), soit 46 % de la pénétration totale de TV5 Monde à l’époque, la chaîne estimait que la réception numérique par satellite ne concernait en Europe que 8,9 millions de foyers.

Sur la base de ces données, la chaîne a conclu à la nécessité de maintenir, en dépit de son coût élevé (plus de 3 M€ par an), la diffusion analogique sur l’Europe.

L’abandon de la diffusion analogique suppose une politique d’accompagnement des câblo-opérateurs

Un câblo-opérateur analogique peut recevoir un signal numérique et le convertir lui-même en signal analogique. L’équipement nécessaire pour une tête de réseau a un coût de l’ordre de 600 à 1500 € HT. Ce coût est parfois pris en charge par une chaîne choisissant de renoncer à sa diffusion satellitaire analogique. Le coût d’une telle opération peut toutefois être élevé du fait du grand nombre d’opérateurs de câble. Il doit par conséquent être mis en balance avec le coût du maintien d’une diffusion analogique du signal.

Appliquée à TV5 Monde, l’économie qui serait entraînée par cette interruption du signal analogique en 2010 (à la suite d’une dénonciation du contrat notifiée en 2009, ainsi que l’autorise le contrat en cours), dégagerait une ressource estimée à plus de 3 M€, soit l’équipement d’au moins 2000 câblo-opérateurs par an.

En revanche, les foyers bénéficiant actuellement d’une réception directe du signal analogique par satellite ne peuvent que très difficilement faire l’objet d’une politique similaire d’accompagnement et seraient vraisemblablement perdus pour la distribution de TV5 Monde dès l’arrêt du signal concerné.

Le PV de la conférence des ministres de février 2004 exprime l’enjeu qui s’attache à cette question, dans la mesure où il y est précisé que « le passage au numérique en Europe permettrait de récupérer 3 millions d’euros et de financer tout le plan de sous-titrage » (page 7)

La Cour observe qu’en 2004, l’étude de TV5 Monde s’est limitée à l’analyse de l’importance du parc analogique en Europe et n’a pas évalué les coûts correspondant à l'accompagnement des câblo-opérateurs dans cette mutation technologique (et donc au maintien de l’essentiel de son réseau de distribution). La société n’a donc pas, à l’époque, conduit l’étude économique globale correspondant à l’hypothèse de l’abandon de la diffusion analogique.

En préparation de l’échéance de 2009, TV5 Monde a précisé à la Cour avoir entrepris un travail de recensement pays par pays pour évaluer les réseaux qui utilisent actuellement le signal analogique. Des actions incitatives seront ensuite conduites pour favoriser la reprise du signal diffusé en mode numérique.

France Télévisions, se plaçant d’emblée dans la perspective d’un arrêt de la diffusion analogique, invite TV5 Monde à effectuer une « préparation minutieuse » de ce changement « afin de limiter les conséquences inévitables » de cet arrêt sur la pénétration et l’audience de la chaîne et note toutefois qu’il convient de ne pas « surestimer les conséquences négatives » d’une telle décision.

Le MAEE s’inscrit aussi dans cette perspective de l’arrêt de l’analogique en 2009 « même si cela doit avoir pour conséquence, au moins dans un premier temps, une diminution du nombre de foyers européens pouvant recevoir TV5 Monde. »

La Cour relève en définitive qu’à un peu plus d’un an de l’échéance, les études engagées par TV5 Monde sont encore peu avancées et qu’elles ne fournissent aucune indication quant aux avantages et inconvénients présentés par les deux options qu’offre le contrat. Elle invite TV5 Monde et ses tutelles à analyser sans délai, et de manière approfondie, l’ensemble des paramètres permettant d’éclairer le choix qui sera opéré en 2009 et d’accompagner ce choix des mesures les mieux adaptées au renforcement de l’efficience des moyens consacrés à la chaîne.

LE RÉSEAU DE DISTRIBUTION

TV5 Monde considère qu’aucune chaîne mondiale, « si elle veut avoir une chance d'être réellement vue, ne peut privilégier un mode de distribution (câble ou satellite) plutôt qu’un autre. Les deux modes sont complémentaires, bien que parfois en forte concurrence, et offrant des services différents. 

TV5 Monde comme toutes les chaînes mondiales se doit d’être sur un maximum de vecteurs de distribution, y compris les nouvelles technologies (adsl, IPTV, peer to peer) à partir du moment où il y a pour elle derrière un vrai potentiel d'audience. Ce sont en général les distributeurs, détenteurs de la décision finale de distribution qui savent le mieux évaluer ce potentiel. »

Les restrictions à une distribution "tous azimuts" sont donc essentiellement d'ordre juridique et économique. Elles concernent en particulier le coût d'acquisition des droits pour une diffusion hertzienne analogique ou sur la TNT dans de nombreux pays, les coûts de diffusion par satellite en mode analogique, ou encore les coûts d’accès à un bouquet de programme payant (Japon par exemple).

Un réseau commercial à animer et piloter

En principe, TV5 Monde n’est pas rémunérée par les distributeurs et ne paie pas sa présence au sein des bouquets de programmes proposés par ceux-ci

La distribution des signaux de télévision s’effectue par l’intermédiaire d’opérateurs locaux qui commercialisent un bouquet de programmes, soit via des plates-formes satellitaires, soit via des réseaux câblés ou par le moyen des nouvelles technologies (ADSL ; réseau de téléphonie mobile ; IPTV …).

TV5 Monde s’efforce d’obtenir des opérateurs de distribution par satellite une place dans l’offre gratuite. Elle ne demande aucune rétribution pour la mise à disposition de ses programmes, mais refuse le plus souvent de payer pour son référencement (29 contrats satellitaires sont dans ce cas, sur 48 contrats en vigueur). Dans certains cas, cependant, un accord peut être conclu, accordant à TV5 Monde une place au sein d’un bouquet de programmes en contrepartie d’un engagement en moyens de promotion et de communication destinés à la conquête et à la fidélisation des abonnés audit bouquet (3 contrats satellitaires concernés, tous destinés au signal Europe). A l’heure actuelle, 15 contrats satellitaires de distribution sont conclus à titre onéreux, notamment pour les signaux Europe (4 contrats), Orient (3 contrats) et Etats-Unis (3 contrats). Le coût élevé de tels contrats prive TV5 Monde de distribution au Japon, en Malaisie, en Indonésie et en Australie Nouvelle-zélande.

Les contrats de distribution par le câble sont extrêmement nombreux (3 000 environ pour une distribution à partir de près de 6 000 têtes de réseau) et concernent majoritairement les signaux Europe et FBS. Des contrats spécifiques sont également conclus pour la distribution de TV5 via les nouvelles technologies.

TV5 Monde s’appuie sur un réseau commercial

Le suivi de l’ensemble de ces contrats et la négociation de leur renouvellement exige l’animation d’un réseau commercial apte à défendre les intérêts de TV5 auprès des distributeurs. Le réseau commercial de TV5 Monde a pour fonction de suivre l’évolution des marchés locaux, de conduire des études de marché, d’effectuer des démarches auprès des distributeurs mais également auprès des autorités locales. Son existence permet en outre à TV5 Monde de réagir lorsqu’une menace d’éviction de la chaîne d’un réseau de distribution apparaît.

La direction du réseau commercial de TV5 Monde dispose de trois bureaux régionaux à Los Angeles, Buenos Aires et Hong Kong. Les directeurs de ces bureaux sont des salariés expatriés de la chaîne.

TV5 Monde a en outre confié un mandat de représentation à 36 agents répartis dans le monde entier. Ces agents représentent aussi d’autres chaînes mais, « chaque chaîne de TV5 Monde étant unique et singulière dans un format généraliste en français avec sous-titrage en 9 langues », l’entreprise considère qu’aucune situation de concurrence n’est jusqu’ici apparue, en conséquence de quoi le mandat confié ne prévoit aucune exclusivité de commercialisation.

Les agents en charge de la distribution gratuite et du marketing, (situation de la plupart des agents) sont rémunérés sous forme d’honoraires et de prise en charge de frais de fonctionnement forfaitaires. Les modalités sont fixées par contrat. Toute activité hors contrat fait l’objet d’une demande préalable, d’un devis avant accord définitif de TV5 Monde et bon de commande.

Les agents qui commercialisent la distribution de TV5 Monde ou ses espaces publicitaires perçoivent une commission sur le chiffre d’affaires qu’ils apportent, laquelle s’ajoute à leur rémunération de base.

La définition d’une politique commune de commercialisation avec France 24 est indispensable

Le réseau de commercialisation n’étant pas exclusif, les agents qui y contribuent sont libres d’accepter un mandat de représentation d’autres chaînes françaises ou étrangères. Dans ces conditions, aucun obstacle juridique ne s’oppose à une mutualisation de ce réseau commercial, notamment avec France 24.

En revanche, la politique de commercialisation des chaînes doit être harmonisée, sous peine d’introduire une concurrence préjudiciable entre elles au bénéfice tant des agents que des distributeurs.

Un incident de cette nature est intervenu il y a quelques mois. Pour être présente en Israël sur une plateforme satellitaire locale qui proposait déjà gratuitement TV5 Monde, France 24 a accepté de payer sa distribution. Quelques semaines après, à l’échéance du contrat avec TV5 Monde, l’opérateur a conditionné le renouvellement de celui-ci au paiement par celle-ci de sa distribution. TV5 Monde a obtenu un sursis de Juillet à décembre 2007, par avenant, grâce à la diffusion de la Coupe du Monde de rugby. La question est toujours en cours de négociation.

La divergence de stratégie commerciale entre TV5 Monde et France 24 est donc susceptible d’entraîner une croissance des coûts pour les chaînes françaises.

L’accès au réseau de distribution est l’objet d’une concurrence croissante entre les chaînes de télévision

Une logique de concurrence qui pousse à l’ouverture des programmes sous peine d’éviction

Avec le développement rapide et massif d’une offre télévisuelle locale, le marché de la distribution de chaînes internationales a évolué en profondeur au cours des dernières années. Dans ce contexte, la présence d’une chaîne comme TV5 Monde sur un réseau de distribution, même aux conditions pourtant favorables qu’elle propose (gratuité de la mise à disposition du signal), devient plus difficile. En tant que chaîne étrangère, le risque pour TV5 Monde est d’être classée en « chaîne ethnique » et de se voir exclusivement proposée en accès optionnel payant. TV5 Monde évite au maximum ce type de distribution qui ne lui permet pas d’atteindre tous ses publics-cibles et cantonne largement son audience aux seuls expatriés francophones.

La pression exercée par les distributeurs à l’occasion des renouvellements de contrats peut conduire la chaîne à introduire le sous-titrage dans la langue locale, ainsi qu’en témoigne le propos tenu par le PDG de TV5 devant la conférence des ministres du 19 septembre 2005 : « jusqu’à présent, la stratégie de sous-titrage n’a souvent fait que répondre à la menace d’éviction d’un signal de telle ou telle partie du monde (c’est la raison pour laquelle on a mis par exemple en place le sous-titrage en danois). »

La stratégie de sous-titrage apparaît ainsi s’être historiquement imposée moins comme une démarche volontariste de conquête d’audience que comme une réaction de défense et de préservation d’un réseau de distribution.

C’est essentiellement dans le cadre du développement de la distribution de signaux numériques que la concurrence se renforce. Ainsi, le développement récent d’une offre de distribution numérique en Amérique Latine ou en Europe (cas récent de la Roumanie) a fragilisé la position de TV5 Monde qui a dû intervenir, y compris via le réseau diplomatique, pour ne pas être évincée.

Dans la mesure où c’est également via la distribution numérique que le sous-titrage est techniquement le plus simple à mettre en œuvre, la question de l’abandon de la diffusion analogique, fort coûteuse, en Europe paraît cruciale pour l’avenir de la chaîne : la réaffectation au développement du sous-titrage des moyens ainsi libérés semble en effet susceptible de contribuer au maintien à terme d’une distribution de qualité.

TV5 Monde a exprimé son désaccord sur ce point et a affirmé que si la diffusion analogique en Europe est remise en question, c’est uniquement en raison des contraintes budgétaires que rencontre la chaîne.

Au contraire, selon France Télévisions, « l’arrêt de la diffusion analogique en 2009 peut constituer pour TV5 une réelle opportunité, à condition bien sûr que la chaîne assume pleinement les conséquences de ce choix volontariste. D’une part parce que les études marketing montrent une forte accélération de la migration analogique/numérique, en tout cas sur l’Europe de l’ouest, d’autre part parce qu tel choix permettrait d’apporter une partie du financement nécessaire à la réalisation des priorités stratégiques de la chaîne. »

Le MAEE, quant à lui, souscrit à l’idée que d’éventuelles économies induites par un arrêt de la diffusion analogique en Europe « devraient être réinjectées dans un renforcement de l’attractivité des programmes sur cette zone (sous-titrage et amélioration qualitative). »

La Cour prend acte des positions exprimées et observe toutefois que le redéploiement des économies obtenues sur les coûts de diffusion a été jusqu’à présent opéré en faveur du sous-titrage plus qu’en faveur de l’enrichissement des programmes, alors que l’exigence de qualité croît à mesure du développement de la concurrence.

Un coût de distribution susceptible de croître du fait des effets de concurrence

La concurrence de l’offre télévisuelle dans les pays dans lesquels TV5 Monde est distribuée est susceptible de renforcer le coût de la chaîne. La pression des opérateurs s’accroît pour imposer un paiement systématique pour le référencement de la chaîne. L’exigence d’un sous-titrage des programmes est aussi une source de coûts supplémentaires résultant, au moins partiellement, de cette concurrence. Il en va de même des actions commerciales conduites et financées par TV5 Monde à la demande des distributeurs en contrepartie de l’accès aux bouquets de programmes.

Plus largement même, la consolidation du réseau de distribution de la chaîne suppose le renforcement de la qualité et de la diversité de ses programmes, ce qui ne peut qu’entraîner une augmentation du coût de la grille.

Or, le coût supplémentaire résultant de la consolidation ou de l’extension du réseau de distribution n’est pas compensé par des recettes commerciales à due concurrence, car l’amélioration de l’audience, obtenue selon TV5 grâce à la politique des programmes et aux sous-titrages, n’a pas d’effets suffisants sur les ressources publicitaires.

En définitive, le coût de la distribution, et plus largement celui de la chaîne, se révèle donc tendanciellement croissant, alors même que celle-ci s’inscrit dans une stratégie de présence tous azimuts qui la conduit à affirmer : « du point de vue de l’entreprise, il n’y a pas de vrais critères pertinents qui puissent justifier la réduction de la distribution à partir du moment où sa Charte, son Plan d'action Stratégique, ses critères d'évaluation LOLF fixent à TV5 Monde l'objectif d’être accessible au plus grand nombre au niveau mondial et donc d’élargir sa distribution au maximum. »

Le maintien de cette stratégie exigerait à l’évidence que les bailleurs de fonds allouent à TV5 Monde des moyens croissants.

D’autres modalités de distribution se développent

La question de la distribution hertzienne en Afrique

La distribution en Afrique demeure limitée, en raison du faible taux d’équipement des foyers en antennes satellite aptes à capter le signal de TV5 Monde.

TV5 Monde est également distribuée sur le réseau hertzien dans plusieurs grandes villes et îles africaines, représentant plus d’un million de foyers. Ce mode de distribution, « hérité » de l’arrêt de CFI TV, est plus adapté au contexte local et a fait l’objet d’une demande de certains gouvernements (Centre afrique ; Cap vert ; Mauritanie et RDC). TV5 Monde y voit « un enjeu politique » (PV du CA du 6 avril 2005) mais cette question constitue également un enjeu financier du fait que le déploiement et le maintien en état d’un réseau hertzien induisent aussi des coûts supplémentaires qui ne peuvent pas être assumés par la chaîne.

En réponse aux observations provisoires de la Cour, le MAEE a clairement exposé que tout développement de la diffusion hertzienne en Afrique exigeait des financements significatifs que ni TV5 ni l’Etat français ne peuvent envisager de prendre en charge dans un proche avenir.

Les nouveaux supports de distribution

De nouveaux supports de distribution se développent, en particulier la réception de programmes sur téléphones mobiles et la télévision numérique terrestre.

La téléphonie mobile

TV5 Monde souhaite mettre en oeuvre tous les modes de distribution dès leur émergence. Ainsi, s’agissant de la téléphonie mobile, le conseil d’administration de la chaîne s’est-il prononcé en avril 2005 dans les termes suivants : « les administrateurs à l’unanimité souhaitent que ce mode de distribution par téléphonie mobile entre dans les priorités de développement de TV5 Monde. »

Ce type de distribution n’entraîne pas actuellement de droit supplémentaire à verser aux sociétés de gestion collective du réseau de téléphonie mobile. En effet, les droits sont conclus par les chaînes partenaires pour une diffusion sur tous supports (sauf en matière de droits de retransmission sportifs). Cette situation est néanmoins susceptible d’évoluer dans l’avenir, lorsqu’une économie de la diffusion sur réseau mobile se sera réellement mise en place.

La télévision numérique terrestre (TNT)

L’accession de TV5 Monde au réseau TNT français n’est pas un objectif du plan stratégique de la chaîne. Le développement de ce réseau de distribution et la concurrence qu’il engendre sur le marché français suscitent néanmoins des interrogations de certaines chaînes partenaires, attachées à la diffusion de leurs émissions sur le territoire français. Cependant, les chaînes françaises représentées au conseil d’administration de TV5 Monde (France Télévisions et Arte France) s’opposent à toute velléité de diffusion de celle-ci sur ce réseau numérique, pour des raisons de concurrence et de disponibilité des droits des programmes mis gratuitement à la disposition de TV5 Monde.

L’hypothèse d’un accès au réseau TNT a été étudiée dans le cadre de la préparation du plan stratégique. Le coût estimé d’une telle décision avait alors été évalué à 15 M€. Sur le plan juridique, TV5 Monde est éligible à une fréquence depuis l’entrée en vigueur de la loi du 5 mars 2007 relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, qui a levé l’interdiction faite aux opérateurs de télévision ayant un actionnariat étranger d’accéder à ce réseau de diffusion.

Les coûts de la distribution sont très variables suivant les territoires

L’analyse comparée des coûts de distribution par territoire ne peut pas toujours être effectuée sur des bases homogènes, du fait de la variété des modes de distribution et de la diversité des modèles économiques mis en œuvre.

Pour autant, et en dépit des biais ainsi induits, les données fournies par TV5 Monde permettent de calculer deux rendements de la distribution en en rapportant le coût aux foyers et aux audiences. Les dépenses de marketing doivent y être incorporées dans la mesure où ces frais résultent souvent des accords de distribution eux-mêmes et qu’ils contribuent aux audiences.

Le cas des Etats-Unis doit être mis à part : la distribution s’y effectue en effet sur abonnement et entraîne la perception de recettes reversées par les distributeurs à TV5 Monde.

Pour les autres territoires sur lesquels un rendement peut être calculé, celui-ci varie du simple au quadruple si l’on se fonde sur le nombre de foyers distribués (4 centimes au Royaume-Uni et 15 centimes en Afrique francophone). Mais ce même rendement, lorsqu’il est calculé à partir de l’audience mesurée par TV5 Monde, varie alors de 1 à 100. L’Afrique est la zone la moins coûteuse (4 centimes par individu regardant au moins 1 minute TV5 Monde par semaine).

La Cour observe que l’Allemagne et le Royaume-Uni sont au contraire des territoires nettement plus onéreux avec des coûts de distribution respectifs par téléspectateur de 2,17 et 4,49 €.

LES NOUVEAUX MODES DE DIFFUSION ET DE DISTRIBUTION

Un site internet conçu comme un média à part entière

Le site internet de TV5 Monde a été initialement développé pour mettre à la disposition des téléspectateurs du monde entier une grille de programmes correspondant au signal et au fuseau horaire du lieu de réception. Cette grille s’est enrichie d’informations autour des programmes, faisant du site internet un prolongement de l’antenne.

A partir de ce noyau, très classique pour une chaîne de télévision, d’autres rubriques ont été développées pour faire du site internet TV5.org « un média à part entière ». Le site présente ainsi neuf rubriques thématiques (Programmes ; Information ; Cinéma ; Musique ; Langue Française ; Cultures du monde Jeux et divertissements ; Football ; Sciences) qui permettent à TV5.org d’être un portail de la culture francophone.

Le site internet de TV5 Monde est aussi un relais essentiel de la mission d’enseignement du Français. Une rubrique est dédiée aux enseignants qui peuvent y trouver des outils pédagogiques. Une démarche d’autoformation est également proposée.

Enfin, différents outils et services contribuent au succès de ce site internet et lui assurent une fréquentation élevée. Il s’agit en particulier de la Météo internationale, du dictionnaire multifonctions et du traducteur en 25 langues. Un fil d’information dédié aux questions relatives à la francophonie est également proposé en provenance de l’AFP.

Ces différents services gratuits ont été développés au profit de TV5 Monde dans le cadre de partenariats et n’ont rien coûté à l’entreprise.

Un site internet très populaire

Le site Internet TV5.org a connu une croissance considérable de sa fréquentation. De 300 000 visites mensuelles en janvier 2003, il est passé à près de 5 000 000 de visites mensuelles en octobre 2007, soit deux fois plus que RFI et un niveau équivalent à Radio France (mais seulement un quart de l’audience du site de France Télévisions).

Un indicateur complémentaire d’audience est fourni par le nombre de pages vues, qui mesure l’intensité de la consultation du site. Cet indicateur révèle que, sur la même période, TV5.org est passé de 1 700 000 de pages vues à 30 165 000 de pages.

TV5 Monde archive sur son site tous les programmes qu’elle produit elle-même, et propose à la consultation ses différents journaux. Là encore, une importante progression des audiences peut être mise en évidence. Plus de 2 millions de vidéos étaient consultées en octobre 2007, contre 285 000 en janvier 2003.

Enfin, 260 000 abonnés reçoivent hebdomadairement la lettre d’information de TV5.

La popularité des sites internet est notamment mesurée par le moteur de recherche GOOGLE. Ce dernier, classe la page d’accueil du site TV5.org à l’échelon 8/10, c'est-à-dire à un niveau équivalent à des sites tels que Lemonde.fr ou Wikipédia.org.

En contrepartie, les moyens mis en œuvre pour proposer cette offre sont restés modestes. La progression du volume de bande passante utilisée par le site internet demeure raisonnable (4,7 Mbps en 2007 contre 2 Mbps en 2003). Le volume de stockage du site dans le même temps été multiplié par 25 (100 gigas octets en 2007 contre 4 en 2003). Le service en charge d’internet ne compte que sept personnes. L’essentiel des informations mises en ligne est traité directement par les différents services concernés de la chaîne, au moyen d’outils informatiques adaptés et simples d’utilisation, garantissant l’actualisation rapide des données présentes sur le site internet.

Une veille active sur le « non linéaire »

La distribution de programmes en mode « non linéaire » correspond aux différentes formes de consommation à la demande. Celle-ci peut être payante (VOD) ou gratuite (FOD), permettre le stockage du programme chez l’utilisateur ou lui laisser simplement un accès « en flux ».

Fidèle à la démarche qui l’anime depuis son lancement visant à exploiter d’emblée les nouveaux moyens de distribution, TV5 Monde a adopté une attitude proactive visant à promouvoir par ce biais sa ligne éditoriale et les programmes dont elle dispose en propre. TV5 Monde y voit le moyen de toucher de nouvelles cibles, répondre à de nouveaux modes de consommation, rentabiliser les moyens consacrés à ses programmes et à leur sous-titrage et, le cas échéant, obtenir de nouvelles ressources financières.

Dans cette optique, TV5 Monde est présente sur JOOST, service qui propose des programmes en provenance des chaînes de télévision du monde entier.



LE COÛT DES PROGRAMMES S’EST ACCRU

LES ATTENTES DU PUBLIC NE SONT PAS REELLEMENT CONNUES

TV5 Monde considère qu’elle « dispose de moyens limités pour explorer les attentes du public ». Le service de relations avec les téléspectateurs reçoit et répertorie les demandes et requêtes des téléspectateurs de la chaîne. Cependant, ceux qui s’expriment constituent rarement un échantillon représentatif. Afin d’approfondir la connaissance et les attentes du public, des études qualitatives sont donc régulièrement lancées avec l’appui d’instituts réputés.

Lorsqu’elle est en déplacement, l’équipe chargée de la distribution affirme « organiser parfois également des réunions de téléspectateurs, avec l’aide des attachés d’Ambassade et/ou des réseaux de l’Alliance Française. »

Cependant, TV5 Monde estime ne pas disposer de moyens budgétaires suffisants pour faire des études constituant un outil de gestion fiable. En effet, la dimension internationale de TV5 Monde complique et renchérit considérablement le coût des études qualitatives qui, pour un même pays, dépasse très souvent celui de la mesure des audiences. Dès lors, il est difficile de conduire ce type d’exercice sur une large échelle et donc de savoir si les enseignements recueillis sur deux ou trois villes s’appliquent aussi à d’autres pays.

UNE GRILLE À VISÉE GÉNÉRALISTE

Des programmes pour tous publics

TV5 Monde est une chaîne généraliste. Toutes les catégories de programmes sont donc représentées dans sa grille hebdomadaire, en proportions variables selon les signaux : magazines (21 à 26 %), divertissements (11 à 15 %), jeunesse (4 à 6 % sauf FBS), sport (1 à 3 % sauf FBS), information (13 à 16 %), culture (11 à 19 %), cinéma et fictions (12 à 22 %)208.

TV5 Monde affirme ainsi chercher « à promouvoir et valoriser la diversité des cultures : cinémas, musiques, arts plastiques, mais également art de vivre, styles, mode, décoration et gastronomie ».

Pour fidéliser ses publics, une politique de programmation régulière et de rendez-vous fixes a été mise en œuvre ainsi qu'une modularité de la grille pour contourner les décalages horaires (exemple du « multi prime time » en Asie) et une adaptation aux habitudes de consommation locales (exemple de la tranche d'information matinale aux USA).

Les difficultés budgétaires de TV5 Monde l’ont toutefois conduite à renoncer à différents projets envisagés en application du plan d'action stratégique et destinés à mieux cibler ses différents publics dans le cadre de la programmation. Parmi eux, trois projets abandonnés portant spécifiquement sur la programmation ont été cités par TV5 Monde :

− la mise en œuvre d’une programmation plus africaine, grâce notamment à la diffusion d’émissions produites par TV5 Monde ;

− des émissions propres également sur le signal FBS entre 18 H et minuit ;

− sur le signal Europe, l'acquisition de programmes fédérateurs d'audience et donc chers (sport / cinéma récent et populaire).

En revanche, de nouvelles grilles ont été mises en place en avril 2007, afin de « poursuivre encore la politique d'amélioration de la qualité de la programmation débutée fin 2005 ».

Les objectifs principaux de ces nouvelles grilles sont :

− le rajeunissement de la chaîne grâce à davantage de programmes jeunesse et une programmation thématique dédiée (« Tivi 5 ») – le budget supplémentaire consacré à ces programmes en 2006 est de 578 K€, soit une croissance de 119 % sur un an ;

− une réduction de l’offre d’information (journaux partenaires et journaux TV5 Monde) permettant d’assouplir la grille, auparavant contrainte par des programmes d’information à heures fixes ;

− une nouvelle politique d'approvisionnement en matière de films, fictions, documentaires et magazines, rendue possible notamment grâce à l’allongement de la durée des cases correspondantes.

TV5 Monde a ainsi abandonné des projets qui s’inscrivaient explicitement dans les priorités géographiques du plan stratégique au profit de programmes communs à l’ensemble des signaux.

Des programmes adaptés aux différentes zones géographiques

La contrainte des fuseaux horaires

Le fait que le signal Asie soit diffusé sur une aire recouvrant 7 fuseaux horaires (4 pour l’Afrique) rend très difficile la confection de grilles de programmes pertinentes et fédératrices d’audience. TV5 Monde souhaite ainsi pouvoir créer des « sous-signaux » de contenu identique mais diffusés à des horaires décalés, de façon à coïncider de la façon la plus étroite possible avec les attentes des téléspectateurs.

Pour l’Asie, l’annexe du plan stratégique a chiffré à 630 K€ (dont 400 pour le seul sous-continent indien) le coût prévisionnel de la création de ces sous-signaux. Un montant équivalent serait nécessaire pour doubler le signal Afrique.

Aucune de ces mesures de dédoublement n’a pourtant en définitive été mise en œuvre.
La singularisation des signaux

L’objectif énoncé par le PDG de TV5 Monde en 2005 vise « à ce que chacun des signaux soit réellement animé par une stratégie de programmes propres (sur la base du tronc commun) avec une identité adaptée à la fois aux singularités des territoires et aux attentes spécifiques des publics ainsi qu’aux caractéristiques de l’offre avoisinante » (PV conférence des ministres juillet 2005).

Globalement, l’adaptation porte, selon la chaîne, sur 20 % de la grille. Cette démarche se traduit de façon différente suivant les signaux. Ainsi, le contenu des grilles Asie, Europe, Orient et Amérique latine est-il très sensiblement le même. La singularisation du signal s’effectue par l’adaptation de l’agencement des cases horaires des programmes diffusés en fonction, tout particulièrement, des fuseaux horaires couverts.

Elle peut aussi résulter des aménagements du contenu de leur grille de programme. Le signal FBS s’inscrit dans une logique de contre programmation face à l’importante concurrence qui s’exerce sur son territoire de distribution. Ainsi, le programme de divertissement diffusé le samedi soir sur les autres signaux (et chez les concurrents de TV5 Monde) est programmé le dimanche soir sur le signal FBS.

Le signal Etats-Unis est quant à lui le seul à proposer une troisième « case » cinéma dans sa grille hebdomadaire et les films qui y sont diffusés peuvent coûter plus cher que sur les autres signaux, en raison du mode de distribution spécifique de ce signal.

Le signal Africain est le seul à s’appuyer sur la production locale pour alimenter sa grille. Par l’intermédiaire notamment du CIRTEF, TV5 Monde acquiert des films (un film africain sur quatre diffusés), des fictions (un créneau quotidien de diffusion d’un format de 52’) et des documentaires (une case hebdomadaire), pour un total d’acquisitions de 500 K€ annuels. TV5 Monde diffuse également des programmes sportifs spécifiques (stade Africa et Afrogoal). Le CIRTEF dispose de deux cases horaires hebdomadaires (« Sud côté court » et « reflets sud »). Enfin, un journal Afrique est produit quotidiennement (et diffusé sur tous les signaux) et une émission dénommée « Afrique presse » est diffusée hebdomadairement.

Ainsi, à l’exception de l’Afrique, les différents signaux ne disposent pas de programmes spécifiques et ciblés en fonction de leur contexte propre. Le succès d’audience rencontré en Afrique, selon les données dont dispose TV5 Monde, peut inciter la chaîne à développer davantage l’approche adoptée pour ce signal.

A cet égard, le président de TV5 Monde a appelé en décembre 2006 les pays partenaires de TV5 à « faire un effort dans le choix des programmes » afin que « la programmation corresponde davantage aux attentes des téléspectateurs. » Il a d’ailleurs également constaté lors de cette réunion que « le programme de TV5 Afrique n’atteint pas le niveau auquel il devrait parvenir. »

Une grille élaborée avec les partenaires de TV5 Monde

Un approvisionnement en programmes contraint par la programmation des chaînes partenaires et la disponibilité des droits

Tous les programmes diffusés par les partenaires de TV5 Monde ne sont pas susceptibles d’être diffusés par cette dernière. La fourniture des programmes par les partenaires n’est en outre pas toujours entièrement gratuite et TV5 Monde peut être amenée à payer directement des compléments de droits pour certains des programmes ainsi fournis.

Par ailleurs, les programmes proposés ne sont pas toujours adaptés aux besoins de TV5 Monde et ne sont parfois pas diffusables pour des raisons culturelles, en particulier sur les chaînes Asie et Orient.

De surcroît, les chaînes partenaires préservent des couloirs d’exclusivité de première diffusion et de rediffusion pour un certain nombre de programmes emblématiques de leur chaîne et repoussent d’autant la fenêtre de diffusion sur TV5 Monde (cas du signal FBS).

Actuellement, les programmes fournis par les chaînes partenaires représentent 40 % de l’antenne.

En matière d’acquisition directe de programmes, il est difficile pour TV5 Monde d’obtenir des droits de diffusion sur les territoires francophones où la situation entre les diffuseurs est très concurrentielle, ce qui impacte directement la programmation des chaînes TV5 FBS et TV5 Québec-Canada.

Pour l’acquisition des documentaires, des fictions et des films, TV5 Monde est confrontée à une problématique de segmentation nationale du marché. Les distributeurs et les producteurs se montrent néanmoins souvent favorables à la diffusion de leurs programmes sur TV5 Monde, qui constitue une vitrine de l’expression artistique audiovisuelle francophone et donc une forme de soutien à l’exportation des programmes.

Dans le domaine des droits sportifs, la situation concurrentielle est exacerbée compte tenu du montant des coûts d’acquisition et des exigences d’exclusivité des diffuseurs nationaux.

En définitive, TV5 Monde est confrontée à une situation de segmentation territoriale et technologique accrue des marchés qui engendre inexorablement des difficultés d'acquisition tant en raison de la moindre disponibilité des droits, de la complexité des négociations que de l'augmentation des coûts d’acquisition.

Ces contraintes s’exercent tout particulièrement sur le signal FBS. Or, selon la chaîne, le niveau d’audience sur ce signal est important à maintenir car, en dépit de la moindre qualité de ses programmes, il est « le plus porteur en termes d’écrans publicitaires » (PV réunion des hauts fonctionnaires – 25 mars 2002)

L’élaboration de la grille est une source de débats entre partenaires de TV5 Monde

L’élaboration des grilles est effectuée par la direction des programmes, en concertation avec la direction des réseaux commerciaux, et en liaison avec la direction de l’information, la direction des études, et les directions marketing régionales.

Les grilles sont soumises pour validation au Directeur Général Adjoint/Directeur de l’Antenne et au Président Directeur Général. Elles sont ensuite présentées au comité de programmes (et donc aux chaînes partenaires) puis au conseil d’administration.

Les seules « émissions » relevant d’une obligation de diffusion, inscrite dans la Charte, sont les journaux télévisés des pays partenaires (article 11).

Pour le reste, TV5 Monde insiste sur le fait que « les sept grilles sont élaborées en fonction de leur pertinence éditoriale et non des demandes des partenaires. Ces derniers effectuent des propositions, dans le cadre des règles de programmation de TV5 Monde (notamment prévues au chapitre 3 de la Charte) et des programmes recherchés par l'entreprise. Ces propositions peuvent ou non être retenues. Certaines émissions demandées par TV5 Monde sont refusées lorsque les droits ne sont pas disponibles ou encore quand un risque de concurrence existe entre la diffusion sur la chaîne partenaire et la diffusion sur TV5 Monde.»

Les procès-verbaux des conseils d’administration font cependant régulièrement état des récriminations des partenaires au sujet de l’horaire de diffusion de leur journal sur TV5 Monde, de la place réservée aux programmes qu’ils fournissent et des modalités d’élaboration et d’approbation de la grille. Ainsi, le procès-verbal du conseil d’administration du 12 décembre 2006 mentionne que le représentant de la RTBF « confirme la demande de plusieurs partenaires d’être partie prenante dans la construction des grilles. » Le représentant de la télévision suisse fait quant à lui « part de l’inquiétude de la TSR concernant son volume de présence sur TV5 Monde. »

Ces débats conduisent TV5 Monde à des compromis qui peuvent s’effectuer au détriment de la cohérence de la programmation. Par ailleurs, le développement de l’offre de programmes à la demande sur internet par les chaînes partenaires, notamment leurs journaux télévisés, pose la question à moyen terme de l’utilité objective du maintien de leur diffusion sur TV5 Monde. Ce sujet demeure cependant extrêmement sensible et le principe de diffusion de ces journaux a été réaffirmé en conclusion de la conférence des ministres de novembre 2007, tenue à Lucerne (Suisse).

Le coût des programmes augmente

La Charte de TV5 précise que « les radiodiffuseurs partenaires de TV5 contribuent à la fourniture libre de droits de programmes pour TV5. »

Cependant, la libération des droits pour TV5 Monde n’est pas toujours possible. Les chaînes partenaires ne parviennent en général qu’à fournir des émissions de plateau, des magazines et des documentaires. Parfois, au sein même d’une émission, par exemple « Envoyé spécial », des parties ne peuvent pas être reprises par TV5 Monde, car les agences qui les produisent commercialisent les reportages à l’étranger.

Dans certains cas, TV5 Monde peut être amenée à payer directement des compléments de droits de diffusion pour certains des programmes qui lui sont fournis.

TV5 Monde acquiert et produit par conséquent des programmes en propre. Les acquisitions et productions déléguées de programmes sont ainsi en croissance de 15 % de 2003 à 2006.

D’importants moyens supplémentaires ont été accordés au sport (+ 44 %) ainsi qu’aux programmes destinés à la jeunesse (+ 69 % après une forte diminution jusqu’en 2005).

Le cinéma et la fiction représentent une part très significative du coût de la grille : 21 % pour le cinéma et 23 % pour les fictions en y intégrant les suppléments de cachets versés aux société de perception et de répartition de droits au titre de la diffusion sur TV5 Monde.

Le coût horaire d’acquisition des programmes de cinéma, de fiction et de documentaires est en baisse sur la période sous revue, en dépit des bons résultats d’audience affichés par TV5 Monde.

L’augmentation du nombre de rediffusions de chaque film contribue à la baisse des coûts, notamment sur le signal Europe. Cependant, même en neutralisant ce levier d’économie, le coût horaire des programmes est en baisse, selon les signaux, de 20 à 30 % de 2003 à 2006.

Les droits d’auteur et droits voisins versés sont quant à eux globalement stables sur la période, (- 1 % à environ 5 M€). Cette stabilité masque toutefois des phénomènes contrastés. Une évolution à la baisse est constatée en Europe (- 40 %), en raison du fait que les câblo opérateurs allemands acceptent désormais progressivement de payer les droits au titre des œuvres distribuées par leur réseau. Auparavant, en dépit des conventions de Berne et de Rome sur les droits d’auteurs et les droits voisins, les droits étaient pris en charge par les radiodiffuseurs qui se substituaient ainsi aux distributeurs.

En revanche, les droits imputables indistinctement à l’ensemble des signaux augmentent de près de 600 K€, soit 19 % de hausse de 2003 à 2006.

LA PLACE DE L’INFORMATION DANS LA GRILLE EST UN SUJET RÉCURRENT DE DÉBATS

Le développement de l’offre jusqu’en 2006

TV5 Monde s’est dotée d’une capacité propre de production de programmes d’information à compter de la fin des années 1990 et le développement de cette offre a constitué l’un des axes stratégiques arrêtés en 2001 à la conférence de Niagara-on-the-lake.

La chaîne a, par la suite, enregistré certains succès en matière d’information, en particulier en ce qui concerne la couverture des attentats du 11 septembre 2001, à l’occasion desquels elle a « cassé son antenne » pour diffuser un programme d’information continue, et celle de l’intervention militaire américaine en Irak, qui lui a permis de constater que de nombreux téléspectateurs avaient apprécié la distance des commentaires et des analyses de sa rédaction multinationale.

Forte de ces succès, TV5 Monde a progressivement renforcé sa rédaction et la part d’antenne consacrée à l’information, les études démontrant que l’information est précieuse pour fidéliser les téléspectateurs. Le président Adda précisait ainsi en avril 2003, dans son compte rendu annuel aux administrateurs, que « l’enrichissement structurel de l’information est le plus grand chantier de TV5 qui mobilise la totalité de la rédaction et l’ensemble des rédactions des chaînes partenaires pour, étape par étape, faire de l’information de TV5 l’information mondiale de référence en français. »

Dans cette perspective, les « tunnels » de diffusion des journaux des partenaires ont été supprimés afin de faire de l’information la colonne vertébrale de la grille, avec des rendez-vous d’information répartis tout au long de la journée et l’introduction, en plus des journaux des quatre chaînes partenaires, de six grands journaux de 20 à 26’ produits par la rédaction de TV5 Monde auxquels s’ajoute le journal télévisé dédié à l’Afrique, désormais diffusé sur l’ensemble des signaux.

Le renforcement de la capacité d’information de TV5 Monde s’est appuyé sur les chaînes partenaires dont les reportages sont repris dans les éditions propres de TV5 Monde, et dont le réseau de 300 correspondants dans le monde est accessible à la rédaction de la chaîne. Pour améliorer l’attractivité de son offre, TV5 Monde s’est dotée de « grandes signatures » (C. Ockrent, C. Sérillon) chargées de nouveaux magazines consacrés aux questions internationales et de géopolitique. De grands rendez-vous d’actualité des chaînes partenaires sont également repris dans la grille, de même que sont développés des partenariats avec d’autres médias (Les échos ; Match-Tv ; Le Monde 2 et plus récemment Europe 1 pour le « grand rendez-vous »).

La rédaction de TV5 Monde a également entrepris de se délocaliser à l’occasion de grands évènements internationaux tels que le IXème sommet de la francophonie ou l’anniversaire du traité de l’Elysée.

Cette stratégie a consolidé l’image de la chaîne et sa notoriété. Elle a contribué à faire de TV5 Monde une marque mondiale. Des progressions d’audience, tant de la chaîne que du site internet, ont en outre été constatées, notamment durant la guerre en Irak.

L’ensemble de ces actions a été conduit avec l’assentiment du MAEE, cette démarche étant clairement évoquée dans les documents présentés par la chaîne à ses bailleurs de fonds. La France, premier contributeur au budget de TV5 Monde, a donc largement financé le développement de l’information sur la chaîne francophone.

En décembre 2004, la décision française de créer France 24 a fragilisé la stratégie de TV5 Monde en matière d’information et suscité des inquiétudes quant au financement de son développement futur. Cette décision est, en outre, intervenue à une période délicate pour TV5 Monde dont le président, Serge Adda, qui avait porté cette stratégie de développement de l’information, venait de décéder en novembre209. De surcroît, un nouveau plan stratégique pour la période 2006 à 2009 était en cours d’élaboration. Enfin, TV5 Monde venait de lancer l’appel d’offres qui aboutira à son emménagement dans son siège social actuel.

Quelques mois après, à l’occasion de la conférence des ministres de septembre 2005 et de l’adoption du plan stratégique actuel, le président de TV5 Monde (M. Aillagon) confirmait que « l’information est devenue l’axe structurant de la programmation des différents signaux de TV5 Monde. »

A cette date correspond l’apogée de l’offre d’information sur TV5. Celle-ci offrait en effet 14 éditions quotidiennes, dont 10 éditées par la chaîne elle-même et 4 par ses partenaires. L’ensemble représentait près de six heures de programmes par jour.

TV5 Monde décida alors, pour que l’information favorise mieux encore la fidélisation de l’audience, de diffuser ces rendez-vous à heure réellement fixe et de construire la programmation en conséquence. Le PDG de TV5 Monde a également annoncé la création d’un nouveau magazine d’information.

L’impact de la création de France 24

TV5 Monde considère que sa mission et celle de France 24 ne sont pas concurrentes

TV5 Monde considère que France 24 n’est pas une chaîne concurrente du fait que, selon elle :

« TV5 Monde demeure une chaîne généraliste (informer-éduquer-distraire), multilatérale et exclusivement en Français (d’une langue, des voix).

FRANCE 24 est une chaîne thématique (informer), unilatérale et en plusieurs langues (d’une voix, des langues). »

TV5 Monde considère ainsi qu’elle développe une ligne éditoriale singulière qui résulte de la diversité de ses partenaires, du caractère « grand public » de sa cible, et de sa diffusion mondiale. Elle vise, dans sa production d’information, à :

- « assurer une complémentarité internationale par rapport au regard national que portent les éditions des radiodiffuseurs partenaires ;

- porter un regard original et transnational francophone sur l'actualité internationale ;

- exploiter au mieux les sources d'information sur l'Afrique. »

Sa rédaction, bien que très majoritairement française, reflète également la diversité de la francophonie. TV5 considère que cette diversité des origines favorise l’évaluation permanente du niveau de complexité acceptable dans le traitement d’une information selon les zones de diffusion.

Dans ce contexte, TV5 Monde et ses bailleurs de fonds étrangers ont affirmé que l’indépendance éditoriale était un élément constitutif et non négociable de la chaîne et que « la contribution de la rédaction de FRANCE 24 pourrait se faire par la fourniture de sujets destinés à enrichir les JT de TV5 Monde, par une optimisation du recours aux correspondants à l’étranger. Une politique d’achat d’images et de dépêches d’agences pourrait être mise en place.»

Depuis l’arrivée du président actuel et la nomination d’un nouveau directeur de l’information, deux modifications principales ont été apportées :

- deux rendez-vous d’information ont été supprimés ;

- la contrainte d’une diffusion de tous les rendez-vous d’information à heure réellement fixe a été levée.

Parallèlement, quatre nouveaux magazines d’information produits par la chaîne sont en développement et seront mis à l’antenne dans les prochains mois.

Le lancement de France 24 a suscité des tensions sociales

En décembre 2006, le président de la chaîne, M. François Bonnemain, a fait l’objet d’une motion de défiance votée par le personnel de la rédaction. En février 2007, le directeur de l’information a démissionné à la suite d’une seconde motion de défiance, cette fois à son encontre. En avril, de nouvelles tensions sociales se sont exprimées lors de la nomination du nouveau directeur général adjoint, M. Yves d’Hérouville, et à l’occasion de la présentation des nouvelles grilles de programme de la chaîne, qui marque un retrait dans l’offre de programmes d’information de la chaîne.

Le coût croissant de l’information

Le choix opéré par la chaîne dès 1999 de passer d’une utilisation pure et simple des journaux des chaînes partenaires à l’élaboration d’une ligne autonome de traitement de l’information a renchéri les coûts de l’information.

La progression du budget consacré à l’information a ainsi été constante au cours de la période sous revue. Le personnel affecté à la production d’information représente en 2006 65 équivalents temps plein (ETP) auxquels s’ajoutent 51 ETP pigistes et intermittents, soit au total 116 ETP dont un tiers a été recruté entre 2002 et 2005. Le budget annuel total de la rédaction est supérieur à 10 M€.

Deux éléments principaux composent le coût de production de l’information :

- la masse salariale de la rédaction, en hausse de 60 % de 2002 à 2006 ;

- les frais de production et d’acquisition des informations.

Parallèlement, la place de l’information dans la grille et le volume d’heures de programmes d’information produits en propre ont progressé de 50,2 %.

L’ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS

Dans le cadre de sa mission de promotion de la langue française, TV5 Monde a développé des outils d’accompagnement pédagogique de certains de ses programmes. Ces outils, destinés à faciliter l’enseignement du Français, sont mis à disposition des enseignants et de ceux qui souhaitent se former via le site internet de TV5 Monde.

Les supports pédagogiques proposés par TV5 Monde sont utilisés par près de 30.000 professeurs dans le monde. Certains de ces outils sont destinés au travail en classe sous la conduite des enseignants, qui peuvent télécharger sur le site des fiches d'activités à réaliser avec leurs élèves et prêtes à être photocopiées. D'autres outils peuvent être utilisés par les élèves de façon autonome: ce sont des exercices interactifs dont les corrections sont immédiatement fournies en ligne.

Ce programme, baptisé "Apprendre et enseigner avec TV5 Monde", exploite des émissions diffusées par la chaîne et des contenus propres au site. Des organismes pédagogiques, comme le Cavilam (Centre d'approches vivantes des langues et des médias), et l’Alliance française y collaborent. Le MAEE et l’agence intergouvernementale de la francophonie le soutiennent.

Les internautes peuvent ainsi apprendre le français avec l'actualité grâce à l’émission "7 jours sur la planète", magazine d’information exprimé en « français simple », sous-titré et relayé sur internet avec des fiches pédagogiques et des exercices interactifs. D’autres émissions entrent également dans ce dispositif ("L'aventure pédagogique des cités du monde", "Un jour en Europe", "Paroles de clips", etc.) Une rubrique "langue française" du site offre en outre un dictionnaire qui vaut à TV5 Monde un nombre très élevé de consultations.

LES FRAIS DE STRUCTURE : LE NOUVEAU SIÈGE

L’APPEL D’OFFRES RESTREINT

L’échéance ferme d’expiration au 15 juin 2006 de la prestation technique avec CJI résulte de la négociation conduite par TV5 Monde

TV5 Monde avait auparavant son siège dans des locaux qui lui étaient sous-loués par la société Cognacq Jay Images (CJI), filiale de TDF, qui était alors également son prestataire technique pour la fourniture et la gestion de la régie de diffusion des différents signaux de la chaîne.

Le contrat de prestations techniques signé en mars 1999 arrivait à échéance le 16 octobre 2005. TV5 Monde a engagé des négociations qui ont abouti à la signature le 2 février 2005 d’un avenant prolongeant jusqu’au 15 juin 2006210 le contrat en cours. Cet avenant visait à laisser à TV5 Monde le temps de lancer une procédure de consultation pour le renouvellement des prestations techniques.

Par ailleurs, des locaux complémentaires, à usage administratif, faisaient l’objet d’un contrat de sous-location spécifique avec CJI. Ce contrat comportait une clause reconnaissant à TV5 Monde la faculté de le résilier à la date du 9 septembre 2006.

Une fois le contrat de prestations techniques ainsi prorogé, TV5 Monde a fait le choix de lancer, en mars 2005, trois procédures de consultation211, portant respectivement sur :

- le « trafic chaîne » (procédure négociée) ;

- le serveur central (procédure négociée) ;

- les prestations de production, post-production et diffusion.

Ces différentes prestations devaient débuter le 15 juin 2006, date ferme d’échéance du contrat avec CJI. Indépendamment de cette échéance, TV5 Monde souhaitait faire aboutir son appel d’offres dans les meilleurs délais car elle considérait que le dispositif qu’elle exploitait alors « était totalement « à bout de souffle », ne correspondait plus aux besoins de la chaîne et mettait l’entreprise dans une situation de risque permanent tant pour la diffusion des chaînes que pour la production des directs (journaux quotidiens). » Dans ces conditions, les dirigeants de l’entreprise souhaitaient obtenir au plus tôt le renouvellement du matériel de diffusion.

La chaîne considérait aussi que « les risques étaient encore accrus, du fait que l’immeuble était dans une zone inondable et que la vétusté des installations posait des problèmes d’alimentation électrique et de climatisation.»

L’appel d’offres restreint portait sur les moyens de diffusion mais également sur la mise à disposition de moyens immobiliers

Dans la mesure où les prestations techniques et les locaux faisaient jusqu’alors l’objet de contrats comportant des liens entre eux212, et afin de préserver l’égalité des candidats, TV5 Monde a précisé dans son appel d’offres restreint qu’il était nécessaire de prévoir dans la proposition la mise à disposition des moyens immobiliers indispensables au déploiement des prestations techniques, cette proposition devant être assortie d’un engagement de substitution accepté par le propriétaire de l’immeuble, permettant à TV5 Monde de signer directement le bail avec ce dernier.

Dans cette perspective, l’appel d’offres précisait que la prestation devait s’effectuer à Paris 7e, 8e, 15e ou 16e arrondissements. Toutefois, après que l’appel d’offre eût été publié, le président de TV5 Monde a décidé d’étendre la zone d’exécution possible de la prestation au 17ème arrondissement et à la ville de Boulogne-Billancourt.

A l’issue de la procédure d’appel d’offres, le contrat de prestations de production, post-production et diffusion a été attribué à la société Thomson, qui présentait, selon la commission d’appel d’offres, la proposition la plus performante du point de vue technique, et la moins onéreuse.

LE CHOIX DU NOUVEAU SIÈGE

Thomson proposait deux immeubles susceptibles de recevoir les installations proposées pour assurer les prestations techniques objet du contrat. Ces immeubles, tous deux situés à Boulogne-Billancourt, avaient pour appellation Le Phénicien et Le Prélude.

Un expert a alors été mandaté par TV5 Monde en octobre 2005 pour s’assurer que la proposition immobilière convenait à la chaîne au-delà des seules contraintes liées à l’exécution des prestations techniques objet de l’appel d’offres restreint. Cet expert a conclu à l’inadaptation des deux immeubles aux besoins de la chaîne.

Par ailleurs, TV5 n’a pas estimé possible de proroger une nouvelle fois son contrat avec CJI, compte tenu du fait que cette société avait perdu l’appel d’offres et que le matériel d’exploitation en usage était d’une vétusté jugée telle qu’un risque d’incident antenne paraissait trop élevé aux yeux de l’entreprise.

Au demeurant CJI avait indiqué qu’elle exigerait une somme très élevée (1,5 M€ minimum) en contrepartie de cette prorogation.

Considérant que ces éléments créaient une situation exceptionnelle, la chaîne a entrepris de prospecter directement le marché immobilier. L’immeuble du 131 avenue de Wagram, dans le XVIIème arrondissement de Paris, inoccupé depuis deux ans et déjà visité par TV5 Monde quelques mois auparavant, a été retenu après des négociations avec le propriétaire, et une fois que l’expert eût conclu, début novembre 2005, à la faisabilité technique d’une implantation à cet endroit.

Le délai entre la désignation de Thomson, et la signature d’un engagement ferme de location du siège actuel, avenue de Wagram, a été inférieur à un mois.

LE COÛT DU NOUVEAU SIÈGE

TV5 Monde considère que son choix s’est porté sur la solution la plus économique

TV5 Monde a négocié différents avantages et contreparties avec son bailleur

TV5 Monde a négocié deux avantages significatifs avec son nouveau bailleur, la Société Foncière Lyonnaise :

- la prise en charge de 3 M€ de travaux liés à l’aménagement de la partie technique des locaux ;

- une franchise de loyers de 15 mois répartis sur les exercices 2005, 2006 et 2007 (valeur 5,5 M€).

Elle a en outre négocié un bail de douze années fermes213. TV5 Monde y voit un avantage dans la mesure où elle se prémunit ainsi contre toute augmentation de loyer (hors indexation) pendant cette période. La chaîne a en effet souligné qu’elle a par le passé subi une forte hausse de loyer (+ 30 %) pour les locaux qu’elle sous-louait rue Cognacq-Jay, à l’occasion d’un renouvellement de bail à échéance.

Cependant, cette stabilité de l’entreprise dans les locaux loués constitue aussi un avantage pour le bailleur qui y trouve une contrepartie directe des concessions accordées.

Les dispositions essentielles du bail ont fait l’objet d’une approbation préalable, dans l’urgence (moins de 24 heures), du contrôleur général et financier et du directeur de l’audiovisuel extérieur du MAEE, le 10 novembre 2005.

Par rapport au précédent siège, le coût annuel global de la prestation technique et des locaux reste quasiment stable (respectivement 12,7 et 12,8 M€). Cette stabilité masque deux évolutions simultanées et contraires : une diminution du coût des prestations techniques et une croissance du coût des locaux.

S’agissant des locaux, le prix moyen au mètre carré est assez proche : le prix acquitté au m2 en 2006 pour le loyer brut était de 502 € au 19 rue Cognacq-Jay , et de 659 € au 15 rue Cognacq-Jay (locaux techniques). Dans l’immeuble du 131 avenue de Wagram, le prix « facial » annuel du loyer brut est de 4,4 M€ pour 7 649 m2 dont 1 566 m2 sont sous-loués à CFI. Ainsi, le prix « facial » au m2 est de 575,24 € annuel.

TV5 Monde considère même qu’en lissant sur la durée du contrat les avantages consentis par le bailleur en contrepartie de la durée du bail, le prix « économique » moyen du loyer sur les 12 années du bail est ramené à 482,63 € le m2, soit un prix moyen au m2 inférieur au prix précédemment payé au 19 rue Cognacq-Jay (locaux administratifs) et de 31 % à celui payé au 15 rue Cognacq-Jay (locaux techniques).

Sur la durée du bail, conclu pour 12 années, TV5 Monde considère ainsi que l’emplacement de l’avenue de Wagram est le plus économique.

Il convient cependant de noter que la superficie des locaux de Cognacq-Jay (environ 4600 m2) était sensiblement inférieure à celle des locaux de l’avenue de Wagram (plus de 6000 m2 hors CFI), soit 30 % de surface supplémentaire par personne dans le nouvel immeuble.

Le contrôleur général économique et financier a quant à lui précisé par écrit à la tutelle de l’entreprise que le choix opéré par TV5 « n’est pas la solution la plus économique » et que le refus de l’immeuble proposé par le prestataire se fonde sur des problèmes techniques mis en évidence par l’architecte, mais également sur le fait que « l’éloignement de Boulogne ne convenait pas aux salariés de TV5 Monde ». Nonobstant ces observations, le contrôleur a donné son accord à l’opération après s’être assuré de l’accord de la tutelle et « à condition que le budget 2006 de TV5 soit en mesure d’absorber une partie de ces surcoûts. »

Le coût du nouveau siège s’est révélé plus élevé que prévu

Deux événements postérieurs à la signature du bail ont de surcroît renchéri le coût de l’immeuble de l’avenue de Wagram et confirment, a posteriori, que l’estimation produite par la chaîne n’était pas parfaitement fiable. D’une part, les travaux réalisés par Thomson et refacturés à TV5 Monde se sont révélés plus onéreux que prévu (impact de 359 300 € par an soit 2,5 M€ sur 7 ans). D’autre part, TV5 Monde avait initialement prévu de ne pas occuper 500 mètres carrés et d’en laisser la charge à son prestataire technique, conformément à l’offre de ce dernier. Au fur et à mesure des travaux d’aménagement, l’espace nécessaire à TV5 Monde s’est révélé plus important qu’escompté, de sorte que cette surface de 500 mètres carrés est en définitive louée par TV5 Monde. Ce coût supplémentaire est d’environ 290 K€ par an, soit environ 3,5 M€ sur la durée du bail.

En définitive, la Cour observe que le coût du nouveau siège est plus élevé que ne l’avait initialement prévu TV5 Monde, sans toutefois se révéler excessif par rapport au marché immobilier dans l’arrondissement concerné.
D’importants travaux ont été effectués

Une fois arrêté le choix de l’immeuble, TV5 Monde a dû se prononcer sur les travaux d’aménagement à effectuer dans le bâtiment. La société VCF, dont l’offre n’a pas été retenue mais qui avait mentionné l’immeuble de l’avenue de Wagram dans sa proposition, avait évalué les travaux nécessaires à une somme d’environ 3,9 M€.

TV5 Monde a cependant souhaité des aménagements différents de ceux envisagés par le prestataire. La réalisation des travaux s’est alors révélée plus onéreuse que l’estimation fournie par VCF. Leur coût total s’est ainsi élevé à 7,75 M€ pour la partie technique, dont 3 M€ sont pris en charge par le bailleur (avantage consenti dans le cadre de la négociation).

A ces travaux techniques se sont ajoutés les aménagements de bureaux. Là encore, l’enveloppe estimative (1,5 M€) a été sous-évaluée. Les travaux d’aménagement se sont élevés à 2,35 M€, dont 200 K€ d’honoraires d’architecte.

CFI a emménagé dans les locaux loués par TV5 Monde

La société CFI, qui n’était pourtant pas confrontée aux mêmes difficultés techniques et immobilières que TV5 Monde, a suivi celle-ci lors de son déménagement et prend en charge une quote-part du loyer proportionnelle à l’espace qu’elle occupe dans l’immeuble. Le contrôleur général et financier a accepté ce choix dans la mesure où il était motivé par la volonté de « réaliser des économies en développant des synergies avec TV5 afin de rester aussi proche que possible des objectifs budgétaires généraux assignés à CFI ». Le contrôle n'a permis de déceler aucune synergie.


LES RESSOURCES PROPRES

TV5 Monde dispose de quatre types de ressources propres : les abonnements, la publicité, les produits financiers et les échanges marchandises. L’ensemble représente 10,5 M€ de recettes en 2006, en progression de 5 % par rapport à 2003.

LES ABONNEMENTS

La distribution par abonnement ne s’inscrit pas, en principe, dans l’objet de TV5 Monde qui vise à être accessible au plus grand nombre. La chaîne n’a, par conséquent, développé une telle approche que sur le continent américain (signaux Etats-Unis et Amérique latine). Les recettes d’abonnements pour les autres signaux sont marginales et concernent de rares cas de rétribution de la chaîne par le câblo-opérateur.

Le choix opéré pour le continent américain s’explique par les caractéristiques du marché local, qui ne permettaient pas d’envisager une présence gratuite. La distribution payante du signal a d’ailleurs ses exigences et ses coûts : elle réduit l’accès aux ressources publicitaires et suppose une offre de programmes largement sous-titrés.

Aux Etats-Unis

Les résultats obtenus aux Etats-Unis sont en progrès. Depuis la réorganisation des responsabilités au sein de TV5 et la prise en charge directe par TV5 Monde de ce signal auparavant géré depuis le Québec, la croissance des abonnements a été régulière. Le signal ne couvre pas encore entièrement les coûts qui lui sont budgétairement imputables, mais la filiale américaine de TV5 Monde finance sur ses ressources les frais de promotion et de commercialisation de la chaîne ainsi que l’essentiel des frais techniques. Le suivi de l’exécution budgétaire fait apparaître pour ce signal un autofinancement des frais directs à hauteur de 75 %.

En Amérique latine

En Amérique latine, l'évolution des recettes d’abonnement est plus instable. Le signal présente néanmoins un taux d’autofinancement de 19 % en 2006, très supérieur à celui enregistré pour d’autres signaux.

LA PUBLICITÉ

TV5 Monde a été autorisée à faire de la publicité en 1998. A compter de la régionalisation de ses signaux, la société a fait appel à trois régies externes différentes pour commercialiser ses espaces publicitaires :

- pour le signal FBS : la régie publicitaire de France Télévisions ;

- pour le signal Orient : une régie publicitaire située au Liban ;

- pour le signal Europe et Afrique : la régie publicitaire du groupe Canal +.

Par la suite, les contrats avec ces deux dernières régies ont été interrompus. Aucune régie n’acceptant de conclure de contrat sur la base de minima garantis, TV5 Monde a depuis 2003 fait le choix de commercialiser directement ses espaces publicitaires (sauf pour le signal FBS).

En France, Belgique et Suisse

Le signal FBS est le seul dont les ressources propres couvrent les charges directes. L’essentiel des recettes provient de la commercialisation d’espaces sur le territoire français. Ce résultat s’explique par le fait que la régie publicitaire de France Télévisions commercialise les espaces en regroupant l’ensemble des chaînes hertziennes et thématiques du groupe France Télévisions. C’est donc une quote-part du chiffre d’affaires ainsi réalisé qui est reversée à TV5 Monde.

En Europe

Ailleurs en Europe, la commercialisation d’espaces publicitaires se révèle ardue. Ces difficultés s’expliquent d’abord par le fait que les annonceurs adoptent une stratégie pays par pays et qu’il n’existe que peu d’entreprises organisant des campagnes de marque à l’échelle continentale. En outre, la question de la langue de diffusion de la publicité s’avère épineuse, dans la mesure où la diffusion dans une autre langue que le français pose un problème de cohérence avec la ligne éditoriale de la chaîne, même en cas de sous-titrage en français, et où une diffusion en français est peu attractive pour les annonceurs. En dépit des résultats d’audience de TV5 Monde, réputés meilleurs que ceux d’Euronews ou de la BBC, le potentiel de croissance de ce type de ressources en Europe est limité.

Le coût de la diffusion en Europe étant très élevé, le taux d’autofinancement de ce signal est faible : il s’élève à 9 % en 2006.

En Afrique

En Afrique, TV5 Monde est dans une situation contrastée. Les recettes commerciales qu’elle retire de sa diffusion sont en croissance, mais le coût de sa distribution s’accroît plus vite que ses recettes. En effet, alors que le signal africain était transporté gratuitement jusqu’en 2005 (et faisait même bénéficier la chaîne de recettes d’abonnement via le bouquet Multichoice jusqu’à fin 2002), ce transport est désormais effectué aux frais de la société (+ 274 K€ en 2005 et + 509 K€ en 2006).

De surcroît, la chaîne ne bénéficie que marginalement des recettes publicitaires supplémentaires qu’elle parvient à obtenir. Un accord conclu avec le CIRTEF prévoit en effet qu’une part des recettes est reversée à cet organisme (153 K€ en 2006) afin de financer un fonds de production Africaine. Or, TV5 Monde fait un effort significatif d’acquisition de programmes dédiés au signal Africain (2,4 M€ de charges spécifiques imputables à ce signal en 2006, soit presque autant que pour le signal Europe et quatre fois plus que pour le signal FBS).

L’accord avec le CIRTEF avait été conclu en 2000, alors qu’aucune recette publicitaire n’existait encore sur ce signal et que l’Afrique n’avait pas la place qu’elle occupe désormais dans la programmation de TV5 Monde. La société estime que le CIRTEF « ne semble pas avoir pris toute la mesure de ces évolutions. » et ajoute que « tant les négociations de contrats annuels que les discussions éditoriales sont de plus en plus difficiles. » TV5 Monde souhaite qu’une mission d’audit et de concertation sur ces questions soit entreprise sous l’autorité de la conférence des ministres.

TV5 Monde évoque en outre un risque fiscal attaché à cette question. Les reversements effectués au CIRTEF sont actuellement déduits fiscalement du résultat d’exploitation au titre des subventions commerciales exposées dans l’intérêt direct de l’entreprise. TV5 Monde estime cependant qu’elle s’expose au risque d’une requalification de ces subventions du fait qu’elle n’exerce aucun contrôle éditorial sur les productions financées par le CIRTEF et qu’elle ne bénéficie pas des droits de diffusion de ces productions sur son antenne. Elle revendique, pour l’heure sans succès, de tels avantages.

En réponse aux observations provisoires de la Cour, les tutelles ont précisé que l’annonce de mesures relatives à la réduction de la publicité sur les chaînes publiques ne concernait pas TV5 Monde.

Cependant, la chaîne francophone a fait valoir que ses ressources 2008, assises sur les recettes de la régie publicitaire de France Télévisions, étaient en diminution importante, de l’ordre, à ce stade, de 56 % sur le signal FBS, le plus important en termes de chiffre d’affaires.


RÉSULTATS ET ÉVALUATION DE L’ACTIVITÉ

LA MESURE DE L’AUDIENCE SE HEURTE À DES LIMITES METHODOLOGIQUES ET PRATIQUES CONSIDÉRABLES

La mesure de l’audience d’une chaîne mondiale est confrontée à d’importantes limites. Les techniques de mesure varient selon les pays, et les mesures elles-mêmes sont souvent inexistantes en dehors des pays occidentaux. Le coût de réalisation des enquêtes nécessaires pour pallier cette absence est élevé. En outre, les enquêtes peuvent elles-mêmes viser des objectifs différents : on distingue en particulier la mesure de la notoriété d’une chaîne de télévision de la mesure de son audience effective. Par ailleurs, le périmètre géographique couvert par chaque enquête étant nécessairement restreint, des techniques d’extrapolation doivent être mises en œuvre pour en inférer un résultat portant sur l’ensemble du territoire d’un pays.

LE BUDGET CONSACRÉ AUX ÉTUDES D’AUDIENCE A DIMINUÉ SUR LA PÉRIODE LA PLUS RECENTE

TV5 Monde appuie l’évaluation de son audience en Europe sur des études audimétriques (AGF en Allemagne ; Médiamétrie en France ; Eurodata dans de nombreux pays européens). En dépit des critiques qui s’élèvent périodiquement contre ce type de mesure, l’audimétrie reste aujourd’hui la méthode considérée comme la plus fiable pour mesurer l’audience des chaînes et la faire valoir sur le marché publicitaire.

De ce fait, les mesures audimétriques sont onéreuses et absorbent une part très significative (66 %) du budget d’études d’audience de TV5 Monde. Les études menées en Allemagne sont particulièrement coûteuses (134 K€ par an) et ont fait l’objet de questions écrites du contrôleur général et financier. TV5 Monde a argué du fait que ces études étaient fondées sur des échantillons plus larges qu’ailleurs et que la référence des audiences en Allemagne était indispensable à la commercialisation des espaces publicitaires ainsi qu’au maintien de la distribution de la chaîne, notamment sur le câble.

Ailleurs, c’est un budget modeste qui est consacré aux enquêtes : environ 900 K€ sur six années pour l’ensemble des cinq autres signaux gérés par TV5 Monde.

La Cour avait relevé lors de son précédent contrôle la faible part des charges correspondant aux mesures d’audience (221 K€ en 1998). Un effort a été fait sur ce point, mais il demeure très limité et mal réparti. De plus, le budget consacré à ces questions est en diminution de 23 % en 2006 par rapport à 2005. TV5 Monde affirme d’ailleurs qu’elle « ne dispose pas de moyens budgétaires suffisants pour consacrer plus d'argent aux études. » et fait observer que le plan stratégique ne prévoyait pas d'augmentation significative de ce poste de dépense.

L’EXTRAPOLATION DE DONNEES SUR LAQUELLE REPOSE LE CALCUL DE L’AUDIENCE MONDIALE EN RÉDUIT LA FIABILITÉ

Compte tenu du coût des mesures d’audience par enquête ponctuelle et du budget qu’elle y consacre, TV5 Monde ne dispose, selon elle, que de sept données nouvelles d’audience chaque année en moyenne pour les signaux extra européens.

Les études concernées sont menées dans des villes, souvent les capitales des Etats. Le résultat d’audience obtenu par TV5 Monde est rapporté à sa distribution dans la ville concernée (elle-même souvent difficile à déterminer avec précision). Ce ratio est ensuite appliqué à la distribution de la chaîne sur l’ensemble du pays, ce qui permet de calculer une audience nationale. Il n’est pourtant pas établi que le comportement des téléspectateurs d’une capitale soit strictement représentatif de celui de l’ensemble de la population.

Ce résultat national est conservé comme référence pour l’Etat considéré jusqu’à l’enquête suivante. La mesure d’audience de juin 2007 s’appuie ainsi, pour l’île Maurice, sur une enquête de 1996 et pour la Thaïlande sur une enquête de 2000.

TV5 Monde a regroupé les Etats en régions (Maghreb ; Afrique australe ; Afrique centrale…). Au sein de chaque région, les Etats pour lesquels aucune mesure d’audience n’est disponible se voient appliquer par extrapolation le taux d’audience du ou des Etats de la même région pour lesquels une enquête a eu lieu. Cette extrapolation s’appuie, là encore, sur une estimation du nombre de foyers recevant la chaîne. L’audience ainsi extrapolée représente 20 % de l’audience mondiale.

Cette technique permet à TV5 Monde d’afficher une audience dans tous les pays où elle est diffusée.

La validité des résultats ainsi obtenus est pourtant sujette à interrogations. Dans plusieurs régions, un ou deux pays seulement ont fait l’objet d’une enquête. Ces pays ne sont pas nécessairement les plus peuplés ni surtout les plus représentatifs. Ainsi, en Afrique australe, ce sont les études conduites sur les îles de Madagascar et Maurice qui permettent de calculer l’audience de TV5 Monde en Afrique du Sud ou en Angola. Le taux de francophones et probablement de francophiles dans ces différents Etats est pourtant très variable. Selon ces extrapolations, l’Afrique du Sud est supposée fournir 3,3 millions de téléspectateurs de TV5 Monde par semaine, soit trois fois plus que l’Allemagne et 25 % de plus que la France elle-même.

La fragilité de la démarche est également illustrée par l’évolution importante qui peut être constatée d’une étude à l’autre dans un même Etat. Ainsi, au Cambodge, l’étude menée en 2000, en même temps qu’en Thaïlande, avait mis en évidence une audience d’environ 296 000 téléspectateurs. Une nouvelle étude menée en 2005 a fortement réduit cette estimation en la ramenant à 95 000 téléspectateurs. Ce constat de forte diminution de l’audience n’a toutefois pas conduit TV5 Monde a entreprendre une autre étude en Thaïlande, de sorte que l’audience de la zone reste largement calculée à partir de l’audience évaluée dans ce pays en 2000. Dans le même ordre d’idées, l’audience de TV5 Monde en Irak a fait l’objet d’une étude en 2003, dans des conditions difficiles. La stabilité de l’audience de la chaîne depuis cette époque est loin d’être certaine dans une zone aussi troublée.

Enfin, d’année en année, TV5 Monde réévalue l’ampleur de sa distribution, selon des méthodes variables suivant les zones. Or, par construction, l’accroissement de l’estimation du nombre de foyers recevant TV5 Monde entraîne mécaniquement, dans la proportion déterminée par la dernière mesure d’audience disponible, une croissance de son audience.

TV5 MONDE A FAIT ÉVOLUER LA METHODE DE DETERMINATION DE SON AUDIENCE MONDIALE

TV5 Monde affiche une croissance considérable de son audience au cours des dernières années. En octobre 2002, la chaîne affirmait rassembler 37,2 M de téléspectateurs. En juin 2007, elle en affiche 73,8 M, soit une progression de 98 % en cinq ans. Depuis 2005 toutefois, cette audience ne progresse quasiment plus.

En réalité, l’audience présentée en 2002 ne couvrait que les territoires sur lesquels une étude avait été conduite. La croissance de l’audience de TV5 Monde constatée à compter de 2003 résulte ainsi, au moins partiellement, d’une part, du fait que des études ont été conduites dans des pays qui n’en avaient jusqu’alors jamais fait l’objet et, d’autre part, de la démarche d’extrapolation à toute la région des résultats d’audience obtenus sur un ou plusieurs des pays qui en font partie. A cet égard, la chaîne a précisé que ses audiences en 2003 ne mesuraient que 80 % de son audience globale. C’est à compter de 2005 que, par le jeu des extrapolations, l’ensemble de l’audience est « mesurée » par TV5 Monde.

Seule la mesure de l’audience en Europe est restée constante et fiable dans la durée et de ce fait autorise la comparaison (voir ci-dessous l’analyse de la performance).

L’ANALYSE DES AUDIENCES IMPUTABLES AUX DIFFERENTS SIGNAUX EST INCERTAINE

TV5 Monde émet des signaux via des satellites dont les empreintes se superposent aux marges, de sorte que certaines régions peuvent recevoir jusqu’à trois signaux différents en réception directe (cas du Maghreb et du sud de l’Europe).

Les audiences calculées pour une région sont logiquement rattachées au signal diffusé par TV5 Monde à destination de cette région.

Toutefois, dans le cas des pays du Maghreb, ce principe en apparence simple présente des difficultés de mise en œuvre. Le signal diffusé à destination du Maghreb est le signal Orient, sous-titré en arabe. Les signaux FBS et Europe y sont également reçus. Or, l’équipement des foyers dans cette région était il y a encore peu le plus souvent analogique, et par conséquent orienté vers le signal analogique européen de TV5. Il apparaît cependant que les équipements numériques se développent rapidement dans la région et autorisent désormais leurs possesseurs à capter le signal de leur choix.

La question qui se pose est donc de savoir à quel signal rattacher l’importante audience calculée au Maghreb qui représente 16,5 M de téléspectateurs, soit plus qu’en Europe non francophone.

En réponse à cette interrogation, TV5 estime que 80 % de l’audience au Maghreb (ainsi qu’au Liban) est imputable au signal Europe. C’est donc sur cette base que sont analysés les rendements des différents signaux (voir ci-après).

LES INDICATEURS LOLF

Les deux indicateurs de performance retenus dans le cadre de la mise en œuvre de la LOLF (présentés dans la première partie du présent rapport) font intervenir l’audience cumulée hebdomadaire.

Les grandes incertitudes que présentent les mesures d’audience privent cependant de pertinence les indicateurs présentés au Parlement.

Le rapport de performance précise le mode de calcul de l’audience en mentionnant que « TV5 Monde est réellement mesurée dans une soixantaine de pays qui totalisent 80 % environ du potentiel de réception de cette chaîne dans le monde. Pour obtenir un tableau chiffré complet de l'audience à travers le monde, la chaîne a développé un modèle d'extrapolation qui tient compte des spécificités de chaque zone. TV5 Monde est présent dans 163 millions de foyers soit une population totale de 603 millions de téléspectateurs potentiels (163 x 3,7) hors critère linguistique. »

Cette présentation occulte de facto les biais méthodologiques évoqués ci-dessus.

Dans sa réponse, TV5 Monde a souligné auprès de la Cour l’importance que revêt pour la commercialisation de ses signaux une présentation des mesures d’audience qui ne pénalise pas l’entreprise par rapport à ses concurrentes internationales. A cet égard, il est, selon la chaîne, « logique » de présenter « une image favorable de l’entreprise ». En revanche, TV5 Monde reconnaît qu’en l’absence d’enquête homogène sur les audiences, la méthode employée « n’est pas satisfaisante pour la mesure des performances de l’entreprise par ses bailleurs de fonds. »

LA PERFORMANCE GLOBALE DE L’ENTREPRISE

LES MESURES D’AUDIENCE PRESENTENT UNE IMAGE FAVORABLE DE TV5 MONDE

TV5 Monde analyse et présente sa performance de façon globale, tous signaux confondus, en calculant le coût, pour la France, par foyer de réception et par téléspectateur, résultant de l’existence de TV5 Monde. La croissance, en partie mécanique214, du nombre de foyers recevant TV5 Monde permet d’afficher une baisse sur la période de 16,6 % du coût de la chaîne par foyer. La croissance exceptionnelle de l’audience telle qu’elle est mesurée entraîne corrélativement une baisse spectaculaire du coût par téléspectateur qui diminue de 2,008 € à 1,052 €, soit une baisse de plus de 47 %.

Les faiblesses structurelles de cette présentation résultent directement des limites des mesures d’audience et de celles des instruments d’évaluation du nombre de foyers de réception. En outre, jusqu’en 2005, les données rapprochées relevaient de périmètres différents, les mesures d’audience ne couvrant qu’une partie du territoire mondial alors que les données de réception étaient mondiales.

En outre si, dans l’avenir, la stabilisation du niveau d’audience constatée depuis 2005 se confirme, les gains de productivité devront alors résulter d’une maîtrise des charges ou d’un développement des ressources propres et non plus de l’évolution du dénominateur du ratio présenté par la chaîne.

L’ÉVOLUTION DES AUDIENCES EN EUROPE ÉCLAIRE DIFFÉREMENT LA SITUATION DE TV5 MONDE

La mesure des audiences en Europe étant plus stable et plus solide sur le plan méthodologique que dans les autres régions du monde, une étude plus approfondie de leur évolution peut y être menée. Elle met en évidence une situation moins favorable215 que celle issue de l’approche globale, telle que la présente TV5 Monde.

En effet, en dépit des efforts de sous-titrage entrepris ces dernières années, l’audience de TV5 Monde en Europe a peu progressé. L’audience hebdomadaire cumulée qui s’établissait en 2002 à 16,6 M de téléspectateurs s’élevait en 2007 à 17,8 M de téléspectateurs (+ 7,23 %). Dans le contexte hautement concurrentiel du marché audiovisuel européen, ce résultat peut s’expliquer. Il est pourtant moins positif que ne le laissent penser les mesures d’audience globale de la chaîne. Par ailleurs, il convient d’observer que le réseau de distribution de TV5 Monde en Europe a, dans le même temps, progressé de 66 %. Le rapport entre l’audience cumulée hebdomadaire et le nombre de foyers de réception est par conséquent, en Europe, en recul de onze points.

- Mesures d’audience comparées
en octobre 2002 et juin 2007 (Europe)

Source : TV5 Monde

Il faut enfin souligner que les études d’audience ne permettent pas de savoir si l’audience est imputable au signal analogique ou au signal numérique, de sorte qu’il n’est pas possible de déterminer un coût du signal analogique par téléspectateur.

Ailleurs dans le monde, l’analyse de l’évolution de l’audience par foyer (sous réserve des aléas de méthode indiqués ci avant) révèle des situations contrastées. Au Maghreb, l’audience a progressé moins vite que la distribution. La situation contraire est constatée en Afrique de l’ouest, où l’audience a été multipliée par quatre alors que la réception n’a, au cours de la même période, été multipliée que par trois.

LE COÛT PAR SIGNAL ET PAR TÉLESPECTATEUR RÉVÈLE D’IMPORTANTS ÉCARTS DE RENDEMENT

TV5 Monde ne procède pas à la ventilation analytique de ses charges entre les différents signaux, il n’est donc pas possible d’apprécier dans le temps l’évolution du coût de chacun d’entre eux.

Pour 2006, TV5 Monde a néanmoins procédé à cette ventilation qui révèle des coûts de signaux extrêmement contrastés (voir tableau page suivante).

Le signal Europe est le moins cher lorsque ses coûts sont rapportés à sa distribution. Ce résultat favorable est néanmoins obtenu en considérant que 80 % des foyers du Maghreb susceptibles de recevoir TV5 Monde doivent être rattachés à ce signal, et non au signal Orient (supra). Il en va de même pour l’audience, ce qui réduit le coût du signal Europe par téléspectateur (y compris depuis le Maghreb) et lui permet d’être analysé comme l’un des plus faibles. Cette approche par signal mérite d’être affinée par pays, en déterminant l’ensemble des coûts directs et indirects qui lui sont imputables et en rapportant ces coûts à l’audience qui y est mesurée. Une telle approche appliquée à l’Allemagne révèle un coût par téléspectateur particulièrement élevé, autour de 3 €.

De ce point de vue, le signal le plus rentable est le signal Africain, dont le coût par téléspectateur est particulièrement faible par rapport aux autres.

Inversement, le signal Etats-Unis est très onéreux pour la chaîne. Après déduction des ressources propres tirées de la commercialisation de ce signal, son coût par téléspectateur demeure très élevé (9,8 €). Toutefois, la progression des abonnements révèle que ce coût est en diminution et que la chaîne va progressivement se rapprocher du coût résiduel par téléspectateur des autres signaux. Toute stagnation du volume des abonnements devrait néanmoins inciter TV5 Monde à s’interroger sur la viabilité de ce signal très particulier au sein de l’offre de l’entreprise.

Le coût du signal FBS par téléspectateur se révèle supérieur à la moyenne, alors même que ce signal ne propose ni sport, ni cinéma (particulièrement coûteux), qu’il est le mieux doté en ressources propres et qu’il est diffusé sur une zone exclusivement francophone.

* *

*

- Ventilation par zone des coûts 2006


CONCLUSION

Les principales constatations de la Cour à l’occasion de son contrôle sont les suivantes.

La stratégie de développement prônée par les présidents successifs de TV5 Monde, notamment Jean STOCK et Serge ADDA, a conduit la chaîne à renforcer son offre d’information à compter de 1999. Cette stratégie s’est poursuivie ultérieurement dans le contexte de la montée en puissance du projet de chaîne d'information internationale.

En dépit de la mention de critères géographiques dans son plan stratégique, TV5 Monde a développé une offre peu différenciée en termes de programmes d'une région à l'autre. La politique de sous-titrage, destinée à faciliter l'accès des publics à ses programmes, a été privilégiée comme instrument d’adaptation de l’offre et de renforcement de son audience, elle-même indispensable à la préservation de son important réseau de distribution.

Dans ce cadre, néanmoins, l’analyse des coûts par signal met en évidence la priorité donnée à l'Europe tant en termes de coûts de diffusion et de distribution que de mesures d’audience. Les ressources propres dégagées par TV5 Monde proviennent aussi pour l’essentiel de cette région.

La mesure des résultats d’audience de TV5 Monde se heurte à d’importantes limites tant méthodologiques que pratiques et souffre de son utilisation conjointe comme argument de commercialisation d’espaces publicitaires, d’une part, d’instrument de mesure de la performance, d’autre part. Au demeurant, TV5 Monde y a ces dernières années consacré des moyens limités et qui tendent à décroître.

L’action de TV5 Monde s’est inscrite dans le cadre d'une progression modeste de ses budgets publics (+ 1,3 % par an de 2002 à 2007) et d’une progression de ses ressources propres qui, bien qu’étant plus soutenue (+ 6 % par an sur la même période) demeure cependant accessoire (ces recettes représentent moins de 10 % du total de ses ressources).

Au regard du plan stratégique approuvé fin 2005 pour la période 2006-2009 et du plan de financement qu’il supposait et qui n’a pas été mis en œuvre, les résultats positifs enregistrés par l’entreprise doivent être pris en compte : progression de son réseau ; application partielle du plan stratégique, en particulier en matière de sous-titrage ; renforcement de la part du budget consacré aux programmes.

Le contexte actuel va néanmoins obliger TV5 à opérer des choix déterminants pour son avenir. Certains peuvent être entrevus dès à présent, même s’ils doivent être confirmés par une étude plus approfondie de leurs conditions de mise en oeuvre : la réduction du coût de production de l'information ; l’abandon de la diffusion satellitaire analogique en Europe à compter de 2010.

Au-delà, il apparaît désormais nécessaire de définir plus clairement les audiences et les régions prioritaires de TV5 Monde pour permettre un meilleur ajustement de l’offre à la demande, notamment sous l’angle des programmes, et renforcer l’efficience des moyens mis en œuvre par la chaîne francophone. Dans sa réponse à la Cour, France Télévisions suggère ainsi pour l’avenir « d’évaluer la rentabilité par zone, en terme de gain d’audience, d’investissements supplémentaires, que ceux-ci portent sur les contenus, le sous-titrage ou la politique marketing, par exemple pour mieux référencer la chaîne. Cette approche, sûrement difficile à modéliser, permettrait cependant de définir des priorités stratégiques prises sous l’angle géographique. »

Une telle démarche suppose la réunion de diverses conditions, au premier rang desquelles l’inscription du développement de TV5 Monde dans le cadre d’un nouveau pacte conclu entre les partenaires. Le caractère multilatéral de la chaîne doit ainsi se trouver conforté par une détermination concertée des priorités géographiques et des publics cible et la mise en œuvre de modalités rénovées de gouvernance de la chaîne. Corrélativement, sur le plan budgétaire, les règles contributives devraient être simplifiées et assorties, autant que possible, d’un engagement pluriannuel de financement.

AVIS SUR LES COMPTES

La Cour a exercé son contrôle sur les comptes annuels de la société anonyme TV5 Monde correspondant aux exercices 1999 à 2006.

Dans la limite des investigations auxquelles elle a procédé, et sous bénéfice des observations qui figurent dans le présent rapport, la Cour considère que les comptes de la société la société anonyme TV5 Monde pendant la période sous revue ont été réguliers et sincères et ont donné une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise.

______________

Fait et délibéré à la Cour des comptes, troisième chambre, sur le rapport de M. Thomas Lesueur, conseiller référendaire, et les observations de M. Gilles Andréani, conseiller maître.

Présents : MM. Jean Picq, président, Guy Mayaud, Mme Anne Froment-Meurice, MM. Pascal Duchadeuil, Gilles Andréani, Jacques Tournier, Mmes Maud Colomé, Jeanne Seyvet, MM. Édouard Couty, Christian Sabbe, Yann Pétel, conseillers maîtres, M. Louis Zeller, conseiller maître en service extraordinaire, et M. Thomas Lesueur, conseiller référendaire, rapporteur.

Les vingt mars et dix avril deux mille huit.

Le Président de la Troisième Chambre

Jean PICQ

Troisième Chambre

____

Troisième section

____

   

51584

 

RAPPORT PARTICULIER

(art. L. 135-3 et R. 133-3 du code des juridictions financières)

TRANSTELE CANAL FRANCE

INTERNATIONAL

Exercices 2000 à 2006

Le présent rapport qui a fait l’objet d’une contradiction avec les personnes et les organismes concernés, a été délibéré par la Cour des comptes le 20 mars 2008.

Sommaire

Introduction 355

1. Compétence de la Cour 355

2. Présentation générale 355

PARTIE I :  La stratégie et la Gouvernance 357

I. L’exercice de la gouvernance et de la tutelle 357

A. un positionnement particulier 357

1. Une société anonyme aux missions modifiées par trois fois depuis 2000 357

2. Une entrée tardive de France Télévisions au capital comme actionnaire majoritaire 358

3. Une présidence commune avec TV5 dont la pertinence a progressivement disparu 360

4. Des relations moins formalisées avec les autres acteurs de l’audiovisuel public 361

B. Une tutelle dont les attentes envers la société ont largement varié 362

1. Une tutelle assurée par le ministère des affaires étrangères 362

2. Des conventions annuelles qui témoignent de l’évolution des attentes formulées à l’égard de CFI 362

3. Un plan stratégique pluriannuel actuellement en suspens 363

II. La stratégie mise en œuvre par la société 363

A. Le lancement et l’arrêt du portail internet « Idées de France » 364

1. La création de la filiale Idées de France 364

2. La dissolution de la filiale - 365 -

B. Les autres missions de CFI 366

1. L’abandon de l’activité de diffusion 366

2. Le recentrage sur la banque de programmes 367

3. Le développement récent de la mission de coopération 371

PARTIE II :  Les coûts et les moyens mis en œuvre 374

I. LES COMPTES 374

A. le compte de résultat 374

1. Des résultats marqués par une forte volatilité 374

2. Des produits d’exploitation qui traduisent une dépendance accrue vis-à-vis des financements publics 374

3. Des charges d’exploitation en nette réduction 376

B. Le bilan et le tableau de financement 377

1. L’actif 377

2. Le passif 379

C. le tableau de financement et la tresorerie 382

1. Besoin en fonds de roulement 382

2. Trésorerie 382

II. Les coûts 383

A. La structure des coûts 383

1. Une structure des coûts fortement marquée par l’activité de banque de programmes 383

2. Des coûts unitaires de personnel en augmentation 383

3. Des frais de structure alourdis par un nouveau siège 385

B. Les coûts affectés aux métiers de CFI 387

1. Des coûts de production qui s’adaptent aux dotations budgétaires 387

2. Des coûts de diffusion qui pourraient encore baisser à l’avenir 388

3. Des coûts modestes lies à l’activité de coopération 389

PARTIE III :  Les résultats 391

I. Un contrôle de gestion qui s’est structuré dans la période récente 391

A. Systèmes d’information et comptabilité analytique 391

B. Procédure budgétaire 391

C. Contrôle de gestion 392

II. Des résultats difficiles a estimer 392

A. Les indicateurs de performance de la LOLF 392

B. Une audience appréciee selon des méthodes diverses pour la banque de programmes 393

1. Les taux de reprise 393

2. Les études de satisfaction 394

3. Le coût horaire de l’heure reprise 394

C. la difficulté qui entoure la mesure des performances de CFI en matière de coopération 395

1. Des résultats mal connus 395

2. Un suivi régulier 395

D. Un avenir incertain 396

INTRODUCTION

Compétence de la Cour

En application du code des juridictions financières, et notamment de ses articles L11-4, L133-2 et R133-1, la Cour des comptes est compétente pour contrôler les comptes 2000 à 2006 de la société anonyme TRANSTELE CANAL FRANCE INTERNATIONAL. En effet, la totalité du capital de la société est détenue depuis juillet 2003 par France Télévisions (75 %) et Arte France (25 %), organismes soumis au contrôle de la Cour, ceux-ci ayant pris la suite de la SOFIRAD qui détenait 99 % des actions de la société et était elle-même détenue à 100 % par l’Etat.

Présentation générale

La création de CANAL FRANCE INTERNATIONAL (CFI), le 1er janvier 1989, s’inscrivait dans les orientations du rapport DECAUX et répondait à la volonté de moderniser la diffusion culturelle vers l’Afrique francophone en envoyant dans cette zone, par satellite, l’éventail le plus large possible de produits de l’audiovisuel français. CFI était ainsi conçue comme une banque de programmes destinée aux professionnels, et prioritairement aux télévisions publiques « des pays du champ », pour leur permettre d’alimenter leurs antennes de produits francophones. Ces programmes étaient gratuitement mis à disposition de CFI par les chaînes publiques et privées françaises, dans le cadre des dispositions de leurs cahiers des charges.

Néanmoins, l’existence de capacités satellitaires, qui faisaient de CFI l’unique cas au monde d’une banque de programmes diffusant au moyen de satellites, a créé dès le départ une ambiguïté, en dotant CFI des infrastructures d’une chaîne de programmes internationale. Très rapidement, CFI a ainsi étendu son champ d’action géographique, les volumes horaires mis à disposition des chaînes partenaires et a surtout diffusé directement auprès du public. Cette distinction entre deux offres au sein de CFI, l’une à destination des professionnels (la banque de programmes CFI-pro) et l’autre à destination du public (la chaîne CFI-TV) a été autorisée et encouragée par les pouvoirs publics jusqu’en 1996-1997, faisant de CFI un outil majeur de l’audiovisuel extérieur.

A partir de 1997, des interrogations se sont fait jour sur la coexistence de ces deux missions et leur cohérence avec le dispositif d’ensemble de l’audiovisuel public français, et notamment avec TV5. Ces interrogations ont pris un tour aigu dans le contexte particulier créé par une inversion de canaux due à France Télécom, qui a entraîné la diffusion par CFI sur la chaîne ARABSAT d’une partie d’un film pornographique de Canal +. Il fut alors décidé, en avril 1998, par le ministre des affaires étrangères que « CFI (abandonnerait) son activité de diffusion directe, sauf, le cas échéant sur l’Afrique », et se concentrerait sur son activité de banque de programmes. Dans le même temps, il était décidé de créer une présidence commune entre CFI et TV5 et de rapprocher CFI de France Télévisions, en faisant entrer le groupe au capital de CFI.

RB51584/MJ

Dans le rapport particulier qu’elle avait consacré en 2001 à CFI, portant sur les exercices 1991 à 1999, la Cour avait considéré que le recentrage décidé en 1998 n’était qu’une réponse transitoire aux questions posées par l’orientation stratégique de la société. L’évolution qu’a connu CFI depuis confirme cette analyse.

D’une part, le recentrage décidé en 1998 a été particulièrement long à mettre en œuvre. D’abord renforcée par l’acquisition d’un bouquet satellitaire destiné à l’Afrique, l’activité de diffusion directe auprès du public de CFI n’a été supprimée qu’en 2003. C’est également à cette date que le changement d’actionnaires de la société est devenu effectif, France Télévisions et Arte France prenant la place de la SOFIRAD. CFI était ainsi rapprochée des diffuseurs nationaux dans la perspective d’un meilleur accès à leurs programmes pour les mettre gratuitement à disposition des télévisions publiques, et le cas échéant privées, des pays émergents. L’arrêt de la diffusion directe de CFI et le maintien d’une présidence commune entre CFI et TV5 visaient dans le même temps à limiter les risques de concurrence entre les deux sociétés.

L’évolution du rôle confié à CFI ne peut en effet se comprendre que dans le cadre plus général de la situation de l’audiovisuel extérieur français, marquée par la montée en puissance de TV5 comme chaîne francophone à destination de l’étranger, d’abord pour les pays « hors champ », puis progressivement pour l’Afrique francophone. Plus récemment, la création de France 24 est venue confirmer le fait que CFI n’est plus considérée par les pouvoirs publics comme un instrument de diffusion directe à l’étranger.

D’autre part, le recentrage de CFI sur son activité de banque de programmes s’est accompagné de la mise en avant de nouvelles missions. Ainsi, depuis 2002, CFI a progressivement étendu son activité de coopération internationale, auparavant réduite à quelques pays ; il s’agit de fournir des prestations de conseil, de formation, d’assistance technique et d’ingénierie aux télévisions qui sont partenaires de la banque de programmes. Sous l’impulsion du ministère des affaires étrangères, CFI s’est par ailleurs lancée en 2005 dans la création d’un portail internet dénommé « Idées de France », visant à rendre compte des débats d’idées qui traversent la société française. Lors du vote de la loi de finances pour 2006, le Parlement a supprimé les crédits destinés à cette action et la filiale créée par CFI pour porter cette activité a cessé ses activités en avril 2006, quelques mois après sa création.

Dans ses rapports d’activité, CFI se présente désormais comme l’opérateur de la coopération audiovisuelle publique française, en partenariat avec 103 chaînes de télévisions publiques ou privées dans 92 pays, dont 43 en Afrique. Elle dispose de 50 collaborateurs permanents installés à Paris et d’un budget annuel qui était de l’ordre de 19 M€ en moyenne durant la période sous revue, financé de façon quasi-exclusive par une subvention du ministère des affaires étrangères en décroissance depuis 2004.

Depuis 2000, CFI a ainsi été marquée par des évolutions notables de son champ d’intervention qui se sont traduites par l’arrêt de pans entiers d’activité. Cette évolution pose deux questions principales ayant trait aux coûts supportés par la collectivité pour assurer des missions finalement remises en cause et au devenir des deux missions actuellement dévolues à CFI en matière de banque de programme et de coopération télévisuelle.

PARTIE I : LA STRATÉGIE ET LA GOUVERNANCE 

L’EXERCICE DE LA GOUVERNANCE ET DE LA TUTELLE 

UN POSITIONNEMENT PARTICULIER

Une société anonyme aux missions modifiées par trois fois depuis 2000

CFI est une société anonyme. Ses statuts définissent son champ d’activité de façon très large, la société ayant «pour objet de réaliser pour elle-même et pour le compte de tiers, en France et à l’étranger, toutes opérations se rapportant à la communication audiovisuelle ou à la communication de tous types de contenus par tous moyens interactifs ». Quatre activités sont néanmoins plus particulièrement citées : la constitution, l’organisation et l’exploitation d’une banque internationale de programmes, principalement à destination des pays en développement ; l’étude, la création, l’achat et l’exploitation de tous moyens de réception et de distribution de programmes audiovisuels ; l’achat, la production et la coproduction de programmes audiovisuels de toute nature et notamment d’information ; la conception, l’organisation et la mise en œuvre d’actions de coopération audiovisuelle principalement à destination des pays en développement.

Depuis 2000, les statuts ont été modifiés à trois reprises, témoignant des évolutions des objectifs assignés à la société :

− en octobre 2002, trois missions principales sont retenues, parmi lesquelles figurent l’édition et la distribution de chaînes de télévision. En revanche, la coopération audiovisuelle n’est pas mentionnée ;

− en avril 2005, cinq missions principales sont fixées à CFI : si la mission d’édition et de distribution de chaîne de télévision est supprimée, en revanche, deux nouvelles missions sont ajoutées : les actions de coopération avec les pays en développement et la constitution de services interactifs destinés à favoriser l’influence des idées et débats français à l’international ;

− en octobre 2006, la mission liée au portail « Idées de France » est supprimée. C’est également à cette occasion que le visa préalable du contrôle d’Etat est prévu pour les dépenses supérieures à 150 000 euros216.

Les statuts ne fixent que des règles très générales s’agissant de la composition du conseil d’administration, celui-ci comportant au moins trois membres et au plus dix-huit. L’article 11 des statuts laisse la possibilité au conseil d’administration de choisir entre deux modalités d’exercice de la direction générale, celle-ci étant soit confiée au président du conseil d’administration soit assurée par une autre personne physique nommée par le conseil d’administration et portant le titre de directeur général. C’est actuellement cette deuxième solution qui prévaut.

Une entrée tardive de France Télévisions au capital comme actionnaire majoritaire

France Télévisions

L’actionnariat de la société est assuré par France Télévisions à hauteur de 75 % et d’Arte France à hauteur de 25 %. France Télévisions procède donc à une consolidation des comptes de sa filiale CFI par équivalence.

L’idée de rapprocher CFI des acteurs nationaux en matière d’audiovisuel a été évoquée dès la fin des années 1990 et a donné lieu à une décision du ministre des affaires étrangères en 1998, visant à adosser les opérateurs de l’audiovisuel extérieur aux opérateurs nationaux. La perspective d’une entrée de France Télévisions au capital de la société figurait donc parmi les points relevés dans le précédent rapport de la Cour, qui soulignait l’intérêt que pouvait revêtir une telle opération. Néanmoins, force est de constater qu’entre la décision d’adosser CFI aux opérateurs nationaux en 1998 et sa concrétisation en juillet 2003, il s’est écoulé cinq ans, délai qui témoigne des difficultés rencontrées.

France Télévisions a notamment souhaité disposer de toutes les garanties nécessaires sur l’existence d’un financement public durable de sa future filiale. Cet engagement a été pris par le ministère des affaires étrangères et est régulièrement mis en œuvre depuis. L’entrée de France Télévisions et d’Arte France au capital de la société s’est en effet accompagnée de la signature, le 10 septembre 2001, d’un protocole d’accord entre ces deux sociétés et le ministère des affaires étrangères, au terme duquel celui-ci s’est en particulier engagé à financer, par le biais de conventions annuelles, l’intégralité des missions qu’il confie à CFI, les actionnaires ne pouvant en aucun cas être appelés à couvrir les déficits constatés dans l’exercice de ces missions. Dans un avenant du 20 décembre 2002, une clause explicite de garantie de passif a été accordée par le ministère des affaires étrangères aux actionnaires de CFI. Elle est depuis mise en œuvre de manière régulière217.

Dans les faits, néanmoins, France Télévisions joue au sein de CFI un rôle qui va largement au-delà de la vérification de l’existence d’un financement adéquat par les pouvoirs publics.

En effet, outre les modes de financement de la société, le protocole d’accord signé par France Télévisions, Arte France et le ministère des affaires étrangères fixe la politique générale de la société et ses modalités concrètes de gouvernance. Ainsi, « la politique générale de CFI suit les orientations de la politique de l’audiovisuel extérieur » ; si France Télévisions et Arte France « mènent leur propre politique de partenariat avec des télévisions étrangères », elles conviennent avec le ministère des affaires étrangères « d’utiliser CFI comme instrument de renforcement de la coopération audiovisuelle de la France avec les télévisions étrangères ». Le protocole d’accord arrête par ailleurs la composition du conseil d’administration ainsi que l’organisation du management. Le conseil d’administration comporte huit personnes : quatre représentants de l’Etat (trois pour le ministère des affaires étrangères et un pour le ministère de la culture et de la communication) et quatre représentants des télévisions publiques (trois pour France Télévisions et un pour Arte France). Le Président de CFI est nommé sur proposition du ministère des affaires étrangères et son directeur général sur proposition de France Télévisions, en accord avec le ministère et Arte France.

Depuis 2003, l’arrivée de France Télévisions au capital de la société s’est traduite au plan des personnels par la nomination d’un certain nombre de cadres issus de la société publique, dont en particulier son directeur général et son directeur général adjoint. Elle a également conduit à la mise à disposition de CFI d’un vivier d’experts pour la réalisation des opérations de coopération dont la société a la charge, et ce, dans des conditions financières jugées avantageuses par CFI. Le souhait de voir CFI devenir l’instrument de la coopération audiovisuelle des chaînes publiques françaises s’est en effet manifesté par la signature, le 14 mai 2004, d’une convention cadre entre CFI et France Télévisions qui organise la mise à disposition des personnels volontaires pour participer, en qualité d’experts, à des missions de coopération organisées par CFI et par le détachement de collaborateurs de France Télévisions pour renforcer les équipes de CFI. Ainsi, en 2006, France Télévisions a contribué au tiers des missions de CFI (880 jours sur 2 500 jours), soit un équivalent d’environ 450 000 €, dont un salarié détaché218. Dans le même temps, la mise à disposition gratuite de programmes de France Télévisions pour alimenter la banque de programmes de CFI s’est poursuivie, quoiqu’à un rythme moindre que par le passé, avec 1 200 heures de programmes en 2007, soit 20 % des programmes de la banque de CFI.

Pour ce qui est plus précisément des relations entre CFI et la direction internationale de France Télévisions, le principe qui prévaut est celui de la réalisation des activités internationales par CFI dès lors que les partenariats envisagés ne se situent pas dans une perspective commerciale, c’est-à-dire en règle générale avec des pays en développement. On peut néanmoins regretter qu’une meilleure formalisation de ce principe ne permette pas de s’assurer de manière claire de l’absence de doublons ou à l’inverse de zones non couvertes par France Télévisions et sa filiale. De même, la nomination d’un directeur général adjoint issu de France Télévisions s’est réalisée dans des conditions complexes : France Télévisions a ainsi annoncé le 10 mai 2004 la nomination du directeur adjoint de sa direction internationale mais c’est finalement une autre personne issue, elle aussi, de France Télévisions qui a été nommée.

De fait, au moment où France Télévisions est effectivement entrée au capital de CFI, les réflexions sur l’audiovisuel extérieur se poursuivaient dans un sens qui allait moins directement vers l’adossement de l’audiovisuel extérieur aux opérateurs nationaux. La filialisation de CFI au sein de France Télévisions s’est finalement réalisée à un moment où il existait des doutes sur la pertinence d’une telle opération, puisque CFI était en train de mettre un terme à ses activités de diffusion en Afrique et que c’était justement ces activités qui avaient au départ justifié l’idée d’un rapprochement avec France Télévisions et qui suscitaient l’intérêt du groupe public.

Au total, il n’est pas contestable que France Télévisions joue son rôle d’actionnaire au sein de CFI, rôle qui revêt une importance qui peut être jugée de manière différente selon que l’on se place du point de vue de France Télévisions (pour qui CFI est une filiale de taille réduite) ou du point de vue de CFI (pour qui France Télévisions est l’actionnaire de référence). Ce rôle n’est certes pas sans ambiguïtés, en ce qui concerne notamment les fonctions respectives de CFI et de la direction internationale du groupe : une formalisation de leurs attributions respectives serait d’autant plus nécessaire que l’actionnariat de CFI serait élargi, imposant de fixer clairement les fonctions de CFI et celles des autres intervenants en matière de coopération internationale et de fourniture de programmes. Enfin, l’intervention de France Télévisions se réalise dans un cadre de gouvernance particulier, marqué par une forte intervention des autorités de tutelle. A cet égard, France Télévisions considère que « la situation actuelle est cohérente pour les deux entreprises bien que peu satisfaisante pour l’actionnaire principal », en estimant que CFI « pour l’essentiel échappe à son contrôle » et que « sur de nombreux sujets l’actionnaire principal n’a pas été entendu », citant le déménagement du siège, la diminution des coûts techniques et l’évolution de la masse salariale. Pour l’avenir et quel que soit le schéma retenu pour l’évolution de CFI, France Télévisions « souhaite être en mesure de jouer pleinement son rôle d’actionnaire et de membre du conseil d’administration, en participant à la définition des orientations et décisions de gestion stratégique de la société ».

Arte France

Il apparaît, à la lecture notamment des procès verbaux des conseils d’administration de la société, que la part prise par Arte France dans la gestion de la société et dans ses orientations stratégiques est modeste. Au demeurant, Arte France n’intervient pas en matière de coopération et la société Arte n’a pas pour vocation de réaliser des programmes de coopération dans un cadre francophone. Dans ce contexte, on peut s’interroger sur la pertinence du choix d’Arte France pour figurer dans l’actionnariat de CFI.

Un accord de coopération entre Arte France et CFI a néanmoins été signé le 10 janvier 2003. Cette convention annuelle, tacitement reconductible, prévoit un échange de prestations de services, CFI s’engageant à transporter gratuitement des programmes d’Arte vers les télévisions partenaires de cette chaîne en Europe centrale et orientale contre la fourniture gratuite par Arte France de 52 heures annuelles d’émissions à destination des télévisions partenaires de CFI dans la même zone géographique. Il convient de noter que l’éventuel abandon des faisceaux satellitaires de CFI en Europe centrale et orientale pourrait conduire à remettre en cause les termes de cette coopération.

Une présidence commune avec TV5 dont la pertinence a progressivement disparu

La présidence commune avec TV5 a été présentée sous l’angle des synergies potentielles existant entre les deux entreprises dont les missions initiales se recoupaient dans une large mesure. Néanmoins, au fur et à mesure que les champs d’activité respectifs des deux sociétés ont été clarifiés, le maintien d’une présidence commune semble avoir changé d’objet et s’être imposé comme un moyen de s’assurer non pas de l’existence de synergies entre les deux sociétés, mais au contraire de l’existence de missions clairement distinctes.

C’est ce dont témoignent les réponses apportées par TV5 et CFI à la Cour, réponses qui sont formulées en termes similaires : « la présidence direction générale commune a essentiellement servi à s’assurer que les axes stratégiques des deux entreprises soient complémentaires, et non concurrentes…Il n’est donc pas certain qu’une présidence commune soit encore pertinente pour l’avenir dans l’optique notamment d’un rapprochement de CFI avec les opérateurs traditionnels de la coopération… ». Aujourd’hui, la persistance d’une présidence commune apparaît donc anachronique. Le ministère des affaires étrangères partage cette analyse quant à la nécessité de mettre fin à une formule devenue sans objet.

Tous les acteurs s’accordent à dire que les synergies entre les deux sociétés sont mineures, voire inexistantes. De fait, les synergies qui auraient pu être réalisées en matière de diffusion n’ont pas été matérialisées et il semble même qu’elles n’ont pas été réellement recherchées. Au moment où la Cour réalisait son contrôle, CFI et TV5 ont d’ailleurs décidé de revoir les modalités d’affectation des dépenses de la présidence commune : auparavant partagées à égalité entre les deux sociétés, elles seront supportées à compter de 2008 à hauteur de 75 % par TV5 et de 25 % par CFI.

Dans le même temps, l’existence d’une présidence commune a été un argument fort pour que CFI accompagne TV5 dans son déménagement de Cognac-Jay à Wagram, opération dont il apparaîtra dans les analyses consacrées aux aspects financiers qu’elle se révèle coûteuse. Or, CFI avait un projet différent qui lui aurait permis de disposer d’espaces moins onéreux et localisés à proximité de France Télévisions. Mais cette alternative n’a pas été réellement expertisée.

Pour l’avenir, la question du maintien d’une présidence commune entre TV5 et CFI est donc clairement posée.

Des relations moins formalisées avec les autres acteurs de l’audiovisuel public

Les relations avec l’INA

Une convention cadre entre CFI et l’INA a été signée le 17 octobre 2005 afin d’organiser la mise à disposition de personnels de l’INA pour les missions de coopération de CFI. Cette convention récente est mise en œuvre dans un contexte où l’INA a manifesté son intérêt pour reprendre les activités de CFI du fait de sa propre activité de formation à l’international. L’international représente en effet 25 % du chiffre d’affaires en matière de formation de l’établissement, lequel souhaite conforter son statut de premier centre européen de formation aux métiers de l’audiovisuel. Or, le diagnostic que porte l’INA sur l’action audiovisuelle extérieure en la matière est celui d’un dispositif « éclaté et désorganisé en France, faible et illisible pour nos partenaires à l’étranger, » l’INA citant en particulier la coexistence de trois acteurs financés sur fonds publics dans ce domaine, à savoir l’INA, RFI et CFI. L’INA souhaite ainsi être placé au cœur d’un rapprochement entre ces trois acteurs et a formulé deux propositions alternatives :

− l’intégration de CFI et de la cellule formation de RFI à l’INA et la nomination concomitante d’un représentant du ministère des affaires étrangères au conseil d’administration de l’Institut ;

− l’intégration de la cellule formation de RFI dans CFI et l’entrée de l’INA à hauteur de 51 % au capital de CFI, les actionnaires minoritaires de CFI devenant RFI et France Télévisions.

CFI, son actionnaire et ses deux tutelles ont exprimé des réserves convergentes à l’égard d’une reprise de CFI par l’INA, insistant notamment sur la spécialisation de l’INA sur un segment de formation différent de celui de CFI, sur la double tutelle de l’INA qui en résulterait et sur les relations difficiles existant entre les deux sociétés, la convention n’ayant donné lieu à aucune application concrète. La Cour relève toutefois qu’à défaut d’être similaires, les actions de formation délivrées par CFI et l’INA peuvent être considérées comme complémentaires.

Les relations avec les autres opérateurs publics

L’INA n’est pas seul à conduire des activités que l’on peut assimiler à de la coopération, qu’il s’agisse de coopération technique ou de formation. RFI dispose ainsi d’une petite cellule dédiée à la formation de professionnels étrangers en matière de radio, terrain sur lequel CFI n’intervient pas. Radio France, au travers notamment de l’Union européenne de radio diffusion (UER), peut également répondre à des demandes ponctuelles émanant de gouvernements étrangers ou encore d’instances internationales.

A cet égard, la société, son actionnaire majoritaire et ses tutelles estiment qu’il serait désormais utile de rapprocher CFI des autres opérateurs de l’audiovisuel, par leur entrée au capital de la société, leur participation à son conseil d’administration ou la mise en œuvre de partenariats privilégiés. Ce rapprochement, qui ne devrait pas conduire à remettre en cause le lien privilégié tissé avec France Télévisions, pourrait concerner, selon une liste et des modalités qui ne sont pas encore arrêtées, RFI, l’INA et France Monde, mais aussi Radio France.

Au total, les attentes qui avaient été formulées à l’occasion du double adossement à France Télévisions pour l’actionnariat et à TV5 pour la présidence ne semblent pas avoir été pleinement satisfaites, laissant ouverte la question du positionnement pertinent de CFI au sein de l’audiovisuel extérieur.

UNE TUTELLE DONT LES ATTENTES ENVERS LA SOCIÉTÉ ONT LARGEMENT VARIÉ

Une tutelle assurée par le ministère des affaires étrangères

Bien que les statuts ou l’actionnariat de la société n’en fassent pas état, la tutelle de l’organisme repose pour l’essentiel sur le ministère des affaires étrangères. Cette présence forte est évidemment liée au fait que la subvention qu’accorde ce ministère à la société en assure le financement quasi-intégral.

La place prise par la direction de l’audiovisuel extérieur du ministère des affaires étrangères dans les orientations stratégiques de la société peut être illustrée par la réunion du 11 octobre 2007 qui s’est tenue entre le ministère, le directeur général de CFI et les représentants de son personnel. Comme en témoigne le procès-verbal de cette réunion, le directeur de l’audiovisuel extérieur a annoncé à cette occasion que CFI n’était pas concernée par la réforme en cours de l’audiovisuel extérieur, mais que le changement de ligne budgétaire (passage du programme audiovisuel extérieur 115 au programme aide publique au développement 209) était « acté dans ses principes », tout comme la refonte de l’actionnariat de CFI avec deux hypothèses, soit une reprise à 100 % par l’Etat, soit une entrée des autres acteurs majeurs de l’audiovisuel dans l’actionnariat, hypothèse actuellement privilégiée.

Des conventions annuelles qui témoignent de l’évolution des attentes formulées à l’égard de CFI

Chaque année, une convention est passée entre le ministère des affaires étrangères et CFI, qui fixe de manière relativement détaillée les attentes du ministère à l’égard de la société et le montant de la subvention qui lui sera versé. En cas de changement intervenant en cours d’exercice, un avenant à la convention est signé entre les parties.

L’étude des conventions passées entre 2000 et 2006 est révélatrice du degré fort de pilotage exercé par le ministère sur la société. Ces conventions s’inscrivent toutes dans le cadre de la volonté du ministère de « conforter la présence des programmes français sur les écrans de télévision du monde entier », CFI ayant à ce titre un rôle complémentaire et concerté avec les organismes professionnels chargés de promouvoir l’exportation des produits audiovisuels français (TVFI, Unifrance film). En 2002, a été ajouté à cet objectif général un deuxième volet concernant les actions de coopération.

Les attentes formulées à l’égard de la société varient nettement d’une année à l’autre, voire au sein d’un même exercice et peuvent se trouver en décalage temporel marqué avec les décisions prises par ailleurs. On note en outre que ces conventions sont notifiées à la société relativement tard dans l’année, au plus tôt en mars, et que le délai de notification a tendance à s’allonger dans la période récente. Le deuxième point saillant a trait au nombre important d’avenants passés entre le ministère et la société, qui témoigne là encore d’un faible degré de prévisibilité des orientations assignées à la société. Ainsi, sur les 7 exercices concernés, seuls deux n’ont pas fait l’objet d’un avenant et l’exercice 2000 a même donné lieu à la passation de deux avenants.

L’examen des conventions annuelles entre la société et le ministère des affaires étrangères permet donc de mesurer les revirements qui jalonnent leurs relations ainsi que les atermoiements parfois très longs entre une décision, son inscription dans la convention annuelle et sa mise en œuvre. Ce n’est ainsi qu’en 2002 que la mission de coopération est apparue dans la convention.

Un plan stratégique pluriannuel actuellement en suspens

Parallèlement aux conventions annuelles, des plans stratégiques ont été adoptés pour les périodes 2002-2004 et 2004-2006, permettant ainsi d’inscrire l’activité de CFI dans un cadre plus large que celui des conventions annuelles. L’adoption du projet élaboré pour la période 2006-2008 a été différée dans l’attente du résultat des réflexions engagées sur l’audiovisuel extérieur. En prévision d’un plan stratégique 2008-2010, la société a néanmoins lancé en interne un travail de réflexion sur les grandes lignes de son activité et la meilleure façon d’atteindre les objectifs qui lui sont fixés.

Au total, les conventions annuelles signées entre la société et le ministère paraissent utiles en ce qu’elles permettent de fixer les attentes du second à l’égard de la première. Néanmoins, la signature tardive de ces conventions et les multiples revirements dont elles témoignent quant aux missions assignées à la société n’ont pas placé cette dernière dans des conditions de gestion satisfaisantes. Il serait à cet égard hautement souhaitable que la société puisse inscrire ses relations avec les pouvoirs publics dans un cadre pluriannuel assorti de missions clairement définies.

LA STRATÉGIE MISE EN œUVRE PAR LA SOCIÉTÉ 

Si la période étudiée dans le précédent rapport de la Cour avait été marquée par une certaine stabilité dans les missions de CFI, tel n’est pas le cas depuis 2000 : les activités de la société ont été en effet profondément modifiées et ont connu divers « coups d’accordéon ». Ainsi, l’activité de diffusion a été définitivement supprimée en 2003, après avoir été dans un premier temps renforcée par l’acquisition d’un bouquet satellitaire. Une activité de portail internet à destination de l’international a été engagée puis interrompue à quelques mois d’intervalle en 2005-2006. La société se concentre désormais sur deux activités de banque de programmes et de coopération. L’orientation globale qui ressort de ces évolutions est celle du rétrécissement des fonctions de la société, avec toutefois des hésitations dont témoigne la création de la filiale « Idées de France », qui appelle un développement particulier.

LE LANCEMENT ET L’ARRÊT DU PORTAIL INTERNET « IDÉES DE FRANCE »

La création de la filiale Idées de France

Les ambitions d’Idées de France

Le portail internet Idées de France avait vocation à rendre compte des débats d’idées existant en France, en français mais aussi en langues étrangères et en particulier en anglais puis en arabe. Il ne s’agissait pas de fabriquer de l’information nouvelle, mais de donner accès à des contenus préexistants dans le cadre d’un portail multilingue. Plus précisément, le dossier ayant étayé la décision de création de ce portail mentionnait trois objectifs : faciliter l’accès des élites mondiales aux débats d’idées français, mettre en valeur l’importante production éditoriale du secteur audiovisuel public, proposer aux internautes un instrument de débat, autour notamment de « chats » et de forums thématiques. L’objectif était ainsi de faire d’Idées de France un média d’influence sans viser nécessairement le grand public.

Le projet avait fait l’objet d’études préalables, l’une portant sur les activités similaires de la BBC et l’autre étant une enquête de terrain réalisée auprès des ambassades de France pour identifier plus clairement les besoins. L’étude de marché fut réalisée auprès d’un millier d’étrangers dans 73 pays, avec 450 réponses exploitables qui montraient un besoin de mise en perspective des informations disponibles sur le net en matière de débat d’idées français. Concernant la BBC dont le site internet est très utilisé, la question était de savoir s’il fallait, pour réussir dans ce secteur, disposer d’un arrimage à un média existant. Or, un tel modèle de diffusion par un portail dédié qui ne bénéficiait pas de l’effet de notoriété des médias qu’il s’agissait de diffuser était sans précédent, posant la question de la pertinence d’un tel choix. A cette question, posée par le nouveau président de CFI lors du conseil d’administration du 7 juin 2005, le représentant du ministère des affaires étrangères avait répondu que la localisation d’Idées de France au sein de CFI permettrait d’établir des liens avec France Télévisions et Arte mais aussi France Culture et TV5.

Le portail devait être alimenté, d’une part, par des contributions des chercheurs, intellectuels, auteurs français, d’autre part, par la mise en valeur des productions éditoriales du secteur public audiovisuel, des centres de recherche et des administration (dans le respect des droits de propriété intellectuelle, avec au minimum des liens avec les sites utilisés) et, enfin, par des données de référence (cartes, tableaux, articles, encyclopédies fournissant la toile de fond de la mise en perspective des idées et des débats). A cet effet des partenariats avaient été préparés avec des éditeurs et l’AFP.

Le site a été effectivement lancé et rapidement référencé par les moteurs de recherche internationaux. En janvier 2006, il comptait environ 35 000 visiteurs par mois. Son potentiel était estimé à terme à un million de visites par mois, soit de l’ordre des résultats du site de RFI.

La création de la filiale

La constitution de ce portail était avant tout une initiative du ministère des affaires étrangères, portée par deux de ses ministres successifs, M. de Villepin et M. Douste Blazy, ce dernier ayant annoncé la création du portail le 17 juillet 2005 aux ambassadeurs de France et l’ayant présenté comme une priorité.

Sa localisation au sein de CFI sous la forme d’une filiale semble s’être imposée faute d’autre solution, le ministère ne souhaitant pas constituer une entité ad hoc sans l’adosser à un opérateur existant. Or, la composition de l’actionnariat de TV5 ne paraissait pas compatible avec l’idée de faire abriter ce portail rendant compte du débat intellectuel français au sein de cette entité. C’est ainsi qu’il a été décidé de créer une filiale au sein de CFI, en accord avec France Télévisions, afin de lancer ce portail internet et de précéder aux recrutements nécessaires à sa mise en place et à son fonctionnement.

Il convient de souligner que cette décision a été prise à un moment où CFI n’avait pas de Président, et que, durant la même période, CFI a sollicité l’accord du contrôle d’Etat pour confier à la société Lagardère Network International une étude relative à une chaîne française plurithématique internationale. Le contrôle d’Etat a refusé de se prononcer sur ce contrat dont la prise en charge par CFI répondait à une instruction de son autorité de tutelle. Le conseil d’administration de CFI du 5 avril 2005 a approuvé la création de la filiale et celui du 7 juin 2005 en a approuvé les statuts et en a nommé le directeur général.

Le plan d’affaires qui a servi de base à la décision de lancement de la filiale reposait sur les hypothèses suivantes : coût du fonctionnement en année pleine de la société de 2,6 M€ auquel s’ajoutait un besoin initial d’investissement de 0,35 M€. Les dépenses se répartissaient entre 37 % de charges de personnel, 18 % de dépenses de contenu, 18 % de dépenses de promotion, 14 % de loyers et frais techniques, 9 % de frais généraux et 5 % de réserve pour aléa. L’effectif cible était d’une quinzaine de personnes ; il a été très rapidement atteint.

Le ministère des affaires étrangères a financé entièrement cette structure à laquelle il a attribué une subvention de 1,5 M€ en 2005, subvention qui devait être portée à 2,6 M€ en année pleine et dont le financement était rendu possible par les économies réalisées au même moment sur les contrats de régie et de diffusion satellitaires.

La dissolution de la filiale

L’absence de crédits en loi de finances

Lors de la discussion sur le projet de loi de finances pour 2006 en novembre de la même année, les sénateurs ont refusé, conformément à la proposition de la Commission des finances, de voter les crédits destinés au fonctionnement du portail Idées de France. Les crédits prévus à cet effet ont été transférés sur le programme français de l’étranger et étrangers en France. La Commission mixte paritaire entre l’Assemblée nationale et le Sénat a confirmé la position de ce dernier. Il apparaît donc que le ministère des affaires étrangères, qui soutenait clairement cette opération, n’avait pas suffisamment souligné auprès des parlementaires l’importance qu’il attachait à cette initiative.

La dissolution d’Idées de France

Les crédits destinés au fonctionnement de la société n’ayant pas été votés, la dissolution de la société s’est rapidement imposée. Elle a été décidée lors du conseil d’administration de CFI du 17 janvier 2006, soit 6 mois après que ledit conseil ait approuvé les statuts de la filiale.

Entre temps, le ministère avait exploré différentes solutions visant à faire prendre en charge la filiale par d’autres structures que CFI, notamment dans le domaine de la coopération. Cette solution n’a toutefois pas été retenue, le transfert de l’activité de la filiale vers une autre structure étant apparu finalement difficile au regard des règles du code du travail et du niveau de rémunération des personnels d’Idées de France. La décision de dissolution pure et simple a alors été mise en œuvre dans des délais rapprochés. Il a donc fallu procéder au licenciement des personnels recrutés quelques mois plus tôt, dans des conditions qui ont été soigneusement examinées de sorte à en limiter les risques juridiques. La société a été dissoute le 17 mai 2006.

Les pertes financières liées à l’opération

Elles sont supérieures à 2,3 M€.

Aux charges d’exploitation de la filiale, financées pour l’essentiel par des dotations du ministère des affaires étrangères, et qui se sont élevées à 2 129 K€, dont 1 280 K€ de frais de personnel (ce dernier montant tenant compte du coût des licenciements des 15 salariés employés pendant quelques mois, soit 334 646 €), doivent en effet être ajoutés le coût des études préalables, prises en charge par CFI, qui s’est élevé à 85,2 K€ (23 K€ en 2003 et 62,2 K€ en 2004) et la perte, à hauteur de 310 K€, de la dotation en capital également prise en charge par CFI.

Ces pertes sont d’autant plus regrettables que la création au sein de l’audiovisuel extérieur d’un portail internet à destination de l’étranger est de nouveau à l’ordre du jour.

LES AUTRES MISSIONS DE CFI

L’abandon de l’activité de diffusion

A la suite de la décision prise à cet effet en 1998, l’arrêt de l’activité de diffusion de CFI à la fin de 2003, quels qu’en soient les vecteurs, est le signe de la volonté des pouvoirs publics de rationaliser la diffusion télévisuelle à l’étranger, dans la perspective qui commence à être alors clairement annoncée de la création d’une chaîne française d’information internationale.

L’activité de diffusion de CFI a eu deux formes durant la période sous revue : la chaîne CFI-TV et le bouquet satellitaire Le Sat.

CFI-TV

La chaîne CFI-TV correspondait à la diffusion satellitaire en clair de la banque de programmes de CFI dans la zone africaine. Dans ce cadre, les coûts de cette chaîne étaient présentés par CFI comme marginaux, correspondant de fait au coût marginal de transformation d’une banque de programmes en chaîne à part entière, avec notamment la réalisation d’un véritable journal télévisé à partir de la succession de sujets « non habillés » (le monitoring) diffusés sur la banque de programmes. Ce coût marginal était évalué à 1,6 M€ annuels.

En novembre 2003, il a été décidé de mettre un terme à la diffusion de CFI-TV qui a cessé d’émettre le 31 décembre 2003. La perspective était que TV5 Afrique pût récupérer l’audience de CFI-TV en reprenant une partie de ses programmes, et notamment les journaux préparés dans le cadre de l’AITV, afin de limiter les redondances qui pouvaient ainsi exister dans l’offre audiovisuelle publique française en Afrique. Il n’est pas aisé de porter un jugement sur la pertinence de ce choix, les instruments de mesure d’audience faisant largement défaut ou étant entachés de faiblesses importantes. Malgré ces faiblesses, on peut néanmoins regretter que ce choix n’ait pas été précédé d’une analyse détaillée de ses impacts potentiels en terme d’audience.

Le Sat

Le Sat est un bouquet satellitaire à destination de l’Afrique, lancé en 1994 par les pouvoirs publics sous forme d’une filiale de la Sofirad, Portinvest. Ce bouquet a été cédé à CFI en juin 2000 dans le cadre de la cession globale de la Sofirad, puis à nouveau cédé par CFI, en 2003 à un opérateur privé national, en l’occurrence le groupe Canal+219.

A ce stade, on peut constater que le portage du Sat par CFI ne s’est pas inscrit dans la durée, alors que l’acquisition du bouquet satellitaire par CFI avait été présentée comme une opération de long terme. Pour justifier ce changement de position des pouvoirs publics, il semble que le contexte budgétaire des années 2002 et 2003, marqué par la recherche d’économies ait conduit les tutelles de CFI a considérer que le secteur public n’avait pas les moyens d’accompagner dans la durée le développement de ce bouquet satellitaire.

Au total, cette opération aura permis de créer et développer un bouquet satellitaire français sur la zone africaine à partir de fonds publics et de le céder par la suite à un opérateur privé national, selon un schéma qui n’appelle pas en soi la critique et qui peut même être considéré judicieux. Du point de vue du portage de cette activité par CFI, on peut en revanche regretter que celui-ci n’ait pas été clairement identifié comme provisoire dès le départ, cette opération ayant constitué l’un des deux ‘coups d’accordéon’ qui ont marqué la stratégie de la société depuis 2000, l’autre étant la filiale Idées de France. Dans les deux cas, CFI s’est ainsi vu confier une activité nouvelle qui était présentée comme durable et qui lui a été finalement retirée.

Le recentrage sur la banque de programmes

Les partenaires visés

La banque de programmes concerne 103 chaînes partenaires, toutes généralistes, dans 92 pays en Afrique, Asie, Europe, Moyen Orient et Amérique. Conformément aux conventions annuelles liant CFI et le ministère des affaires étrangères, les pays potentiellement concernés sont ceux qui bénéficient de l’aide publique au développement220.

En 2006, les partenaires de CFI étaient les suivants :

− Afrique : 43 pays (62 organismes audiovisuels et 66 chaînes) ;

− Europe centrale et orientale : 21 pays (26 organismes audiovisuels et 57 chaînes) ;

− Asie : 16 pays (23 organismes audiovisuels et 44 chaînes) ;

− Monde arable : 12 pays (19 organismes audiovisuels et 25 chaînes).

L’auditoire potentiel était estimé en 2006 par CFI à 600 millions de téléspectateurs.

La liste des pays actuellement partenaires de CFI figure en annexe.

Par rapport à 2000, on constate sur toutes les zones concernées une augmentation du nombre de pays affiliés : CFI est passée globalement de 77 pays partenaires à 92 et de 132 chaînes partenaires à 192. L’émission vers l’Amérique latine a été en revanche supprimée. CFI a ainsi des partenariats qui vont au-delà de la zone de solidarité prioritaire au sein de laquelle l’aide publique française est engagée de manière sélective et concentrée, sans aller toutefois jusqu’à couvrir l’ensemble des pays bénéficiant de l’aide publique au développement tels qu’ils sont définis par le comité d’aide au développement de l’OCDE.

CFI propose en priorité ses programmes aux chaînes publiques qui ont une période de 10 mois pour les diffuser. Les chaînes privées partenaires de CFI disposent à la suite des télévisions publiques de 8 mois de droits de diffusion. Les droits de diffusion achetés par CFI couvrent en effet une période de 18 mois.

Le contenu de la banque de programmes

En matière de programmes fournis, CFI proposait en 2006 environ 5 500 heures de programmes, soit environ 15 heures de programmes par jour, répartis entre :

− 2 140 heures en Afrique en langues française, anglaise et portugaise, soit près de 40 % de son activité, et un peu moins de 6 heures de programme par jour en moyenne ;

− 1 055 heures en Asie en langues française et anglaise, soit un peu moins de 20 % de son activité ;

− 953 heures en Europe en langue française, le cas échéant, traduite ou sous-titrée par les télévisions partenaires, soit 17,5 % de son activité ;

− 835 heures dans le monde arabe en arabe, français et anglais, soit 15 % de son activité ;

− 475 heures en Haïti.

Essentiellement alimentée à l’origine par des programmes fournis gratuitement par les chaînes publiques françaises, CFI achète désormais aux producteurs et aux distributeurs français et africains la majorité des programmes qu’elle propose. Comme l’avait déjà relevé le précédent rapport de la Cour, l’achat de programmes s’avère paradoxalement moins onéreux que la transmission des programmes fournis gratuitement, ces derniers exigeant une gestion plus complexe et impliquant des reversements importants aux ayants-droit. Depuis le précédent contrôle de la Cour, CFI a en outre développé une politique d’aide aux producteurs indépendants africains, en finançant leurs productions par des achats et pré-achats.

En matière d’information, un monitoring quotidien est proposé en français et en anglais et concerne l’information internationale et l’information africaine. Ce monitoring, acheté à l’AITV, est une succession de courts reportages d’actualité, utilisées par les chaînes, en particulier d’Afrique francophone, pour nourrir d’images leurs journaux télévisés.

Par genres, les programmes se composaient en 2006 de :

− 1 600 heures d’information, soit environ un quart de la programmation ;

− 770 heures de retransmissions sportives, soit environ 15 % de la programmation ;

− le reste étant des programmes de stock (fictions, documentaires magazines).

Trois questions spécifiques appellent une attention particulière concernant la banque de programmes : le type de technologie utilisé, qui pourrait bénéficier du développement du réseau internet, les retransmissions sportives, en ce qu’elles n’ont pas de lien avéré avec la diffusion de contenus audiovisuels d’origine française et, enfin, la transition entre l’offre gratuite proposée par CFI et une offre payante pour les pays au fur et à mesure qu’ils se développent.

Les évolutions technologiques envisagées

CFI a une activité qui consiste pour sa banque de programmes à acheter des programmes qu’elle met à disposition de ses partenaires au travers d’une diffusion satellitaire. Le terme de banque de programmes n’est ainsi pas totalement adapté : il n’existe pas à proprement parler de « banque » disposant d’un stock de programmes accessible à tout moment et permettant aux télévisions partenaires de CFI de nourrir librement leur grille.

Un nouveau mode de transmission non-linéaire par fichier est à l’étude pour une mise en place en 2010, rendant l’expression de « banque de programmes » mieux adaptée et permettant de limiter les besoins en termes de diffusion satellitaires ainsi que les coûts qui y sont associés. La mise en œuvre de cette solution devrait en effet permettre de réduire fortement le besoin de faisceaux satellitaires : un fonctionnement reposant sur l’usage du web pourrait en effet prendre la place des diffusions satellitaires, sauf dans la zone africaine qui ne dispose pas pour l’heure des infrastructures de haut débit nécessaires. C’est une évolution qui est clairement envisagée par la société et dont il conviendra de s’assurer qu’elle est effectivement génératrice d’économies globales.

Les retransmissions sportives

Les retransmissions d’événements sportifs sont considérées par CFI comme des produits d’appel importants pour la banque de programmes. Le principe qui prévalait initialement dans ce domaine avait été édicté par le président de CFI en 2000 en ces termes : « les retransmissions sportives doivent être autofinancées et donc les droits couverts intégralement par les ressources propres tirées notamment de la publicité221. » Il semble toutefois que cet objectif a été réduit, CFI ne recherchant plus désormais qu’à compenser partiellement le coût des droits sportifs par ses ressources propres.

De fait, jusqu’à une période relativement récente, l’Afrique subsaharienne ne semble pas avoir constitué un marché solvable pour les retransmissions de manifestations sportives, permettant à CFI d’acquérir ces droits à faible coût et d’acquérir ainsi une notoriété importante sur ce continent. Néanmoins, la situation a évolué, rendant l’acquisition de droits pour les principales manifestations sportives très onéreuse, compte tenu notamment d’une politique d’achat de droits très agressive de la part de l’Afrique du Sud. Dans ce contexte, CFI a tout d’abord tenté de maintenir sa présence sur les principales manifestations sportives, puis s’est engagée dans deux orientations nouvelles : d’une part, la retransmission des sports les moins onéreux en lieu et place des compétitions des « grands sports » et, d’autre part, la participation à la retransmission des grandes manifestations en tant que prestataire technique de diffusion.

Cette dernière orientation paraît cohérente avec les moyens financiers limités dont dispose la société et avec son objet : CFI ne se positionne plus comme détenteur des droits de retransmission, mais elle aide la communauté africaine francophone à acquérir de tels droits de façon groupée (c’est en partie le sens de la mise en place d’un réseau entre les télévisions publiques francophones). CFI est également intervenue à deux autres titres : en tant que diffuseur et producteur, elle est l’intermédiaire technique qui assure le bon acheminement des retransmissions et la présence de commentaires pour les manifestations sportives dont les droits ont été directement acquis par les télévisions africaines.

La question de la gratuité et de la transition vers une offre payante

Lorsqu’un pays sort de la liste de ceux qui bénéficient de l’aide publique au développement ou du cadre prévu par la convention annuelle passée entre CFI et le ministère des affaires étrangères, la (les) chaîne(s) partenaires(s) de CFI cesse(nt) d’être éligibles à la fourniture gratuite des programmes de CFI. Une telle évolution s’est produite en Amérique latine et est en cours pour certains pays d’Europe centrale et orientale222.

La question se pose alors de savoir comment s’effectue la transition entre l’offre gratuite proposée par CFI et une offre de programmes payante. En effet, la vente de programmes audiovisuels est un marché dans lequel la France est présente et dispose d’une structure ad hoc, TV France Internationale223. Les exportations françaises dans ce secteur, à destination de pays situés dans toutes les zones du monde, s’élèvent à 220 M€ annuels.

Or, il apparaît qu’il n’existe pas de dispositif général et formalisé qui permettrait d’assurer un continuum entre l’offre gratuite proposée par CFI et l’offre payante que propose l’industrie française. Des progrès ont certes été enregistrés en la matière à l’occasion de l’arrêt de la diffusion de la banque de programmes de CFI dans certains pays d’Europe centrale et orientale mais il ne s’inscrivent pas encore dans un dispositif d’ensemble permettant à l’offre payante de prendre progressivement la place de la banque de programmes et de maintenir ainsi la présence de contenus audiovisuels d’origine française sur les chaînes concernées.

Au total, la question de l’utilité d’une banque de programmes gratuite diffusée par canaux satellitaire paraît posée : d’une part, l’évolution des moyens de communication pourrait justifier d’envisager des formats plus légers, reposant notamment sur l’usage des liaisons internet à haut débit là où elles existent ; d’autre part, au fur et à mesure que les pays partenaires de CFI se développent, le champ d’intervention de sa banque de programmes a également vocation à se réduire, comme c’est actuellement le cas en Europe centrale et orientale.

Le développement récent de la mission de coopération

Une activité nouvelle d’aide à la mise en place de médias dans les pays en développement

La réorientation de CFI vers une activité de coopération est récente : elle date de 2002, même si, dès l’origine, l’idée d’une banque de programmes en faveur des pays en développement avait une vocation de coopération. Cette mission de coopération de CFI est désormais explicite dans les conventions annuelles qui lient l’entreprise et le ministère des affaires étrangères et s’est traduite par un ensemble de réalisations dans des pays divers. La croissance de cette activité est rapide.

Le rapport d’activité pour 2006 de CFI fait ainsi état de 127 missions de conseil ou de formation dispensées sur le terrain, correspondant à 233 interventions ainsi réparties :

− Afrique et océan indien : 43 % ;

− Monde arabe : 19 % ;

− Asie et océanie : 24 % ;

− Europe centrale et orientale : 13 % ;

− Amérique latine : 1 %.

Ces actions concernent dans plus de la moitié des cas des formations (51 %), le deuxième volet correspondant aux expertises (38 %) et le reste (11 %) à de l’assistance technique. Ces missions sont assurées à hauteur de 30 % par du personnel de CFI, de 30 % également par des experts mis à sa disposition par France Télévisions, et pour le reste par des experts d’autres origines rémunérés par CFI pour des missions particulières. Les conventions avec France Télévisions et l’INA ont prévu les conditions matérielles et financières de mise à disposition d’experts par ces sociétés. Le montant journalier des frais dus par CFI par salarié mis à disposition est de 1 000€ pour l’INA, correspondant à un statut de chef de projet. Il s’étage de 300 à 1 000 € pour France Télévisions : 300 € pour un consultant, 500 € pour un chargé de projet et 1 000 € pour un responsable de projet.

La convention passée avec l’INA n’a jamais été mise en œuvre.

Une articulation avec les autres outils de l’aide au développement à préciser

La question principale qui se pose en la matière est de savoir comment s’articulent l’action de CFI et les outils de coopération dont dispose le ministère des affaires étrangères. Sur ce plan, le secteur de la coopération dispose avec le fonds de solidarité prioritaire d’un outil privilégié, qui lui permet de soutenir des projets de coopération quels qu’en soient les domaines d’intervention et qui couvre donc les domaines liés à l’audiovisuel. Or, le partage des rôles entre le fonds de solidarité prioritaire et CFI n’est actuellement pas clairement inscrit dans les textes et repose en fait pour l’essentiel sur les décisions prises chaque année au moment de la conclusion de la convention liant CFI et le ministère des affaires étrangères. La mission de coopération de CFI repose ainsi sur des bases qui sont encore fragiles.

A ce titre, deux modèles sont envisageables entre lesquels un choix doit être opéré : soit CFI est considérée comme l’intégrateur de l’offre publique d’aide française au développement en matière audiovisuelle et c’est à elle que les financements correspondants sont attribués, soit le ministère souhaite procéder de façon beaucoup plus large en recourant par exemple à des appels d’offre auprès des acteurs potentiellement concernés. La situation actuelle relève plutôt du premier cas de figure, mais si tel est le cas, il importe que ce point soit clarifié, non pas seulement pour CFI, mais pour l’ensemble de ses partenaires dans l’audiovisuel.

A cet égard, le ministère des affaires étrangères a fait part à la Cour, en mars 2008, de sa volonté d’élargir les missions confiées à CFI afin de faire évoluer la société vers une « véritable agence de coopération dans le domaine des médias ». Dans cette logique, l’ensemble des activités opérationnelles de coopération menées par la direction de l’audiovisuel extérieur du ministère serait susceptible d’être transférées à CFI224.

La deuxième question a trait à la très faible présence de CFI dans le cadre des actions multilatérales de coopération, alors que celles-ci constituent des enjeux importants. Ainsi, si CFI s’inscrit dans le cadre des actions bilatérales de coopération menées par la France, au travers notamment des conventions annuelles liant la société et le ministère des affaires étrangères, elle n’est en revanche pas réellement présente dans le cadre des actions multilatérales de coopération, ni d’ailleurs aux côtés des collectivités territoriales pour les actions de coopération qu’elles peuvent soutenir.

Enfin, cette orientation de CFI vers une activité d’aide au développement en matière audiovisuelle pose la question de la position de CFI au sein des programmes ministériels et d’un éventuel passage du programme audiovisuel extérieur (115) au programme aide publique au développement (209). Cette question mérite néanmoins d’être traitée de façon distincte de celle de l’actionnariat de CFI. Il serait en effet tout à fait envisageable que CFI conserve un actionnariat reposant sur France Télévisions, et élargi aux acteurs de l’audiovisuel national et extérieur, et voie, par ailleurs, ses crédits inscrits dans le budget de l’Etat au titre de l’aide au développement et non de l’audiovisuel extérieur.

Au total, il apparaît que les missions de CFI ont été profondément transformées depuis 2000 et que l’équilibre actuel a été obtenu après des revirements nombreux. En ce domaine, l’entreprise a su s’adapter aux évolutions stratégiques demandées par sa tutelle et soutenues par son actionnaire. Si le nouveau positionnement de la société sur une fonction non pas de rayonnement culturel mais d’aide aux pays en développement semble légitime, une telle orientation stratégique soulève néanmoins un certain nombre de questions qui engagent l’avenir de CFI, qu’il s’agisse de la place à réserver à terme à la banque de programmes gratuite de CFI auprès des pays en développement, sujet qui semble à tout le moins appeler à une clarification des conditions dans lesquelles s’effectue la transition entre l’offre gratuite de CFI et l’offre payante proposée par la profession dès lors qu’un pays est considéré comme solvable pour une telle offre, mais qu’il s’agisse également de l’articulation des activités de coopération de CFI avec les autres outils de l’aide au développement.

PARTIE II : LES COÛTS ET LES MOYENS MIS EN œUVRE

LES COMPTES

LE COMPTE DE RÉSULTAT

Des résultats marqués par une forte volatilité

Contrastant avec les constatations du précèdent rapport de la Cour, CFI renoue entre 2000 et 2003 avec les bénéfices, ainsi qu’en 2005. La société enregistre en revanche un résultat négatif au moment du recentrage de son activité, en 2004 ainsi qu’en 2006. Entre 2000 et 2006, les résultats d’exploitation et les résultats exceptionnels évoluent de manière très contrastée, le résultat bénéficiaire global de l’exercice 2003 étant par exemple lié à un résultat d’exploitation fortement négatif plus que comblé par le résultat exceptionnel dégagé par la cession de la filiale Portinvest. D’une manière générale, la forte volatilité du résultat d’exploitation et l’importance des résultats exceptionnels témoignent des évolutions marquées qui ont caractérisé l’activité de CFI durant la période.

-  Compte de résultat simplifié

En K €

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Résultat d'exploitation

-2 770

-498

97

-2083

48

107

-161

Résultat financier

384

363

118

126

164

-14

117

Résultat courant avant impôts

-2 386

-135

216

-1957

213

93

-43

Résultat exceptionnel

2 439

782

-1

2145

-273

-7

-94

Impôts sur les sociétés

11

19

19

19

18

18

18

Résultat net

42

627

20

169

-78

67

-157

Source : comptes financiers de CFI

Des produits d’exploitation qui traduisent une dépendance accrue vis-à-vis des financements publics

Equilibre d’ensemble

Les produits comptabilisés au titre du chiffre d’affaires sont de deux natures : la subvention du ministère des affaires étrangères et les ressources commerciales. En 2006, la subvention du ministère des affaires étrangères, d’un montant de 19,7 M€, est stable par rapport à son niveau de 2000 et représente 93 % du chiffre d’affaires. Les ressources commerciales s’établissent en 2006 à 1,5 M€, en décroissance de plus de 50 % par rapport à 2000. Dans le même temps, les autres produits d’exploitation ont fortement baissé. La dépendance de CFI par rapport aux financements publics s’est donc accrue durant la période.

- Taux de dépendance par rapport au financement public 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

68 %

82 %

82 %

87 %

92 %

90 %

92 %

Source : CFI, validé Cour des comptes

Depuis l’exercice 2000 (atypique, l’entreprise ayant constaté de fortes provisions et transferts de charges), la dépendance de CFI par rapport aux financements publics progresse pour s’établir à plus de 90 % depuis 2004.

-  Produits d’exploitation

En M€

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

évolution 2000/2006

Subvention du ministère des Affaires Etrangères

19,687

23,930

22,126

20,529

22,358

21,962

19,683

-0,02 %

Ressources commerciales

3,305

2,160

1,706

1,617

1,590

2,226

1,552

-53 %

Chiffre d'affaires hors taxes

22,992

26,090

23,832

22,147

23,948

24,188

21,236

-8 %

Production immobilisée

0,000

0,000

0,000

0,000

0,057

0,143

0,028

 

Reprises amortissements et pro-visions, transferts de charges

6,143

2,922

3,224

1,470

0,294

0,120

0,184

-97 %

Produits divers

0,031

0,078

0,045

0,000

0,000

0,014

0,002

-93 %

Produits d'exploitation

29,166

29,091

27,101

23,616

24,299

24,465

21,450

-26 %

Source : comptes financiers ; retraitement cour des comptes

Si la subvention versée par le ministère des affaires étrangères est globalement stable entre 2000 et 2006, elle a subi des variations importantes d’un exercice à l’autre : elle a progressé nettement de 2000 à 2001 (+ 4,243 M€) pour atteindre un point haut, puis décrû fortement entre 2002 et 2003 et à nouveau entre 2005 et 2006. Entre 2001 et 2006, le recul est de 17,74 %, compte tenu de la forte diminution du montant de la subvention en 2006.

La loi de finances pour 2008 a prévu une baisse supplémentaire de la subvention de 3 M€, dont le montant s’établit à 16,5 M€. Cette réduction tient compte d’une diminution des charges de l’entreprise, notamment en matière de diffusion satellitaire. Pour les années ultérieures, l’entreprise ne dispose d’aucune visibilité.

Concernant les ressources propres, leur baisse régulière, excepté durant l’exercice 2005, peut être rapportée à l’abandon de l’activité de diffusion. Force est néanmoins de constater que la diversification souhaitée des sources de financement de la société, en particulier par l’accès aux financements multilatéraux en matière de coopération, n’a pas encore porté ses fruits. A ce titre, deux personnes ont été chargées depuis 2007 d’élargir la recherche de fonds, notamment auprès de la commission européenne et des autres organismes internationaux.

Au total, s’agissant d’une société dont les charges fixes, et en particulier les charges de personnel, occupent une place importante et croissante, les perspectives de financement par les pouvoirs publics ont ainsi une importance cruciale.

Régime applicable en matière de TVA.

Par un courrier en date du 19 mars 2007, la direction de la législation fiscale a répondu à une demande de rescrit formulée par CFI sur le traitement fiscal applicable en matière de TVA à la subvention versée par le ministère des affaires étrangères : la subvention s’analyse comme une subvention complément de prix non soumise à la taxe en France en application de l’article 259 B du code général des impôts.

-  Remboursements de TVA

En K €

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Total

CFI

2 695

3 987

3 679

2 674

3 042

2 744

2 071

20 892

Idée De France

   

 

 

 

 

84

84

Source : CFI et Cour des Comptes

Ainsi, CFI, société exportatrice de programmes et de savoir faire audiovisuel, est subventionnée directement par le ministère des affaires étrangères, et indirectement par le ministère de l’économie, du fait du remboursement des crédits de taxes déductibles. Au total, sur l’ensemble de la période, l’incidence totale des remboursements de crédit de TVA est supérieure à une année de dotation budgétaire.

Des charges d’exploitation en nette réduction

Entre 2000 et 2006, les charges diminuent de 10 M€, soit une baisse de 32 %, répartie sur l’ensemble de la période et qui traduit la réduction du périmètre d’activité de CFI.

-  Charges d’exploitation

En K €

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Evolution 2000-2006

coûts des programmes achetés

     

3 776

3 338

2 935

2 596

-

autres achats et achats externes

17 893

17 819

17 564

12 566

12 305

11 072

10 266

-43 %

impôts et taxes

253

241

319

229

238

333

279

10 %

Salaires

3 133

3 268

3 204

3 069

2 887

2 708

2 873

-8 %

charges sociales

1 325

1 490

1 398

1 470

1 519

1 283

1 361

3 %

dotation amortissements sur programme

     

3 921

3 399

3 900

3 315

-

dotation amortissement

7 101

6 036

4 268

242

227

261

277

-96 %

provision sur actif circulant

65

144

161

16

29

90

28

-57 %

provision sur risque

1 569

53

   

58

15

15

-99 %

autres charges de gestion courante

597

538

89

411

250

1 759

601

1

Total

31 936

29 589

27 003

25 700

24 250

24 356

21 611

-32 %

Source : comptes annuels de CFI

La comparaison des comptes d’exploitation entre 2000 et 2006 est difficile, du fait de ventilations différentes entre les années sous revue. Deux lignes particulières correspondant aux coûts des programmes achetés et aux dotations aux amortissements afférentes apparaissent en effet en 2003, permettant d’apprécier avec une meilleure précision l’incidence annualisée du coût des programmes. Ce coût s’établit à 30 % des charges en 2005 et 28 % en 2006.

LE BILAN ET LE TABLEAU DE FINANCEMENT

L’actif

-  Actif

En M€

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Evolution 2000-2006

Immobilisations brutes

16,436

9,342

8,352

5,883

7,924

9,301

8,821

-46,33 %

Amortissements

-13,233

-6,825

-6,174

-4,816

-5,869

-7,136

-6,499

-50,89 %

Titres de participation

0,000

0,000

0,000

0,000

0,000

0,145

0,003

NS

Total immobilisations

3,203

2,517

2,178

1,067

2,055

2,310

2,325

-27,41 %

Avances et acomptes

1,039

0,014

0,008

0,004

0,017

0,032

0,067

-93,55 %

Créances clients

3,193

3,991

2,314

1,757

1,765

1,817

2,313

-27,56 %

Provisions pour clients douteux

-0,507

-0,620

-0,657

-0,628

-0,612

-0,670

-0,635

25,25 %

Autres créances d'exploitation

4,376

3,221

1,558

3,199

2,871

1,846

1,562

-64,31 %

Total créances

8,101

6,605

3,224

4,332

4,041

3,026

3,306

-59,19 %

Valeurs mobilières de placement

7,187

5,579

9,486

10,165

9,207

7,626

7,407

3,06 %

Placement à court terme

0,000

0,000

0,000

0,000

0,000

0,000

0,000

 

Banques

0,561

0,136

0,215

0,325

0,067

0,009

1,240

121,03 %

Total disponibilités

7,748

5,715

9,701

10,491

9,274

7,635

8,647

11,60 %

Charges constatées d'avance

0,366

0,435

0,458

0,307

0,405

0,470

0,164

-55,19 %

Ecart de conversion actif

0,044

0,003

0,036

0,067

0,060

0,039

0,072

63,64 %

Total comptes de régularisation

0,409

0,438

0,494

0,374

0,465

0,509

0,237

-42,05 %

TOTAL ACTIF

19,461

15,275

15,596

16,264

15,834

13,480

14,516

-25,41 %

Source : comptes annuels de CFI

L’actif immobilisé

Les immobilisations incorporelles sont constituées des programmes achetés par CFI. Ces droits suivent un régime spécifique d’amortissement ; la majorité d’entre eux sont diffusables pendant 18 mois. Tant que la période de droit de diffusion n’est pas commencée, ils sont comptabilisés dans les immobilisations incorporelles en cours ; si la période de diffusion a débuté, ils sont portés en immobilisations incorporelles. Ensuite, dès le premier acheminement aux TV partenaires, ils sont amortis en totalité. A coté de ces actifs incorporels, l’entreprise acquiert des programmes de flux qui ne sont pas inscrits au bilan, mais directement portés en charges : l’information, le sport et les magazines sportifs.

L’augmentation des immobilisations corporelles est liée à la réinstallation de l’entreprise dans ses nouveaux locaux de l’avenue de Wagram.

Au titre de ses immobilisations financières enfin, l’entreprise a détenu les titres de deux filiales au cours de la période sous revue : Portinvest et Idées de France.

Portinvest 

Créée en 1994 au sein de la SOFIRAD, Portinvest a été chargée en 1995 de constituer un bouquet numérique de chaînes francophones pour l’Afrique. Opérateur depuis 1997 du bouquet Le SAT, Portinvest commercialise celui-ci directement auprès des opérateurs locaux qui rediffusent le signal sur des réseaux câblés ou par Canal Horizons. Compte tenu d’une exploitation déficitaire, cette filiale était valorisée dans les comptes de CFI à 1F en 1999 (1 € en 2001).

Alors que l’exploitation s’était redressée, le ministère des affaires étrangères a envisagé la cession des activités de Portinvest à un opérateur privé sous réserve de certaines conditions garantissant, d’une part, que les objectifs d’intérêt général poursuivis par Portinvest continueraient d’être pris en compte, d’autre part, que l’investissement réalisé par l’Etat serait valorisé financièrement dans l’accord. Media Overseas et CFI ont donc engagé une négociation sur les conditions d’une reprise par la filiale de la première, Multi-TV AFRIQUE, des activités de la filiale de la seconde, Portinvest. En définitive, Portinvest a été cédée à le 28 juillet 2003. L’acheteur a pris l’engagement d’assurer la présence des chaînes publiques françaises en Afrique et le maintien des relations contractuelles existant avec les opérateurs de diffusion locaux.

Cette cession s’est effectuée au prix de 2 263 482 €, constituant sur le plan fiscal une plus value à long terme, et correspondant d’une part à la valorisation des 57 000 actions détenues par CFI (1 200 025 €), d’autre part à la situation nette de Portinvest à la date de cession (1 063 457 €). Elle a permis à CFI de dégager en 2003 un résultat exceptionnel du même montant.

La vente a été effectuée à un prix supérieur au montant de la subvention accordée en 1999 à cette opération par le ministère des affaires étrangères (5 MF, soit 0,76 M€) mais inférieur au prix estimé en octobre 2000 par un cabinet extérieur, compris entre 5,18 M€ et 6,71 M€. Néanmoins, par rapport aux conditions particulières de cette opération, il est difficile de porter une appréciation sur le prix auquel elle s’est réalisée. Pour aboutir à une fourchette de prix plus élevée, il aurait en effet fallu que la vente du réseau fût proposée sur le marché international, option qui n’était pas envisagée. En tout état de cause, cette cession exceptionnelle a permis d’apurer le résultat d’exploitation négatif de 2 M€ et a eu un réel effet d’aubaine conjoncturel pour les comptes de CFI.

Idées de France

CFI a détenu les 3 500 actions d’ Idées de France, d’un montant de 350 000 €, de mi 2005 à la cessation effective d’activité de la société, courant 2006. Ces actions ont été provisionnées dès la clôture du bilan 2005, en raison de l’arrêt du financement décidé par le parlement.

Le montant de la provision inscrite dans les comptes 2005 a néanmoins été limité à 205 246 €. Or, le contexte de cessation d’activité brutale de la filiale ne pouvait que difficilement laisser prévoir une quelconque valeur résiduelle comptable. Au 6 juillet 2006, le bilan de la société a été soldé par une perte 310 442 €, laissant à l’issue de ce seul et unique bilan 39 559 € de capitaux propres.

Actif circulant

Le volume des créances clients fluctue faiblement. Quant au montant des dépréciations, il ne varie pas. Au cours de la gestion 2007, CFI a fait procéder à un examen de ses créances anciennes par un cabinet extérieur. Celui-ci a estimé à 207 K€ le montant des créances irrécouvrables à passer en perte.

Le passif

-  passif

En M€

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Evolution 2000-2006

Capital

0,310

0,310

0,310

0,310

0,310

0,310

0,310

0 %

Réserves

0,006

0,008

0,031

0,031

0,031

0,031

0,031

416 %

Report à nouveau

0,000

0,040

0,835

0,735

0,904

0,825

0,892

-

Résultat de l'exercice

0,042

0,628

0,196

0,169

-0,078

0,067

-0,157

-473 %

Situation nette

0,358

0,985

1,372

1,245

1,166

1,233

1,076

200 %

Subvention à réaffecter

1,006

1,105

1,105

2,605

0,000

0,000

0,000

-

Subvention d'investissement

0,000

0,000

0,000

0,000

0,000

0,000

0,000

 -

Capitaux propres

1,364

2,090

2,477

3,850

1,166

1,233

1,076

-21 %

Provisions pour risques

2,834

1,289

0,981

1,251

4,871

4,805

4,483

58 %

Dettes d'exploitation

12,980

11,000

11,263

10,424

7,335

5,106

7,289

-43 %

Dettes diverses

2,263

0,883

0,835

0,734

0,014

0,000

0,000

-

Total des dettes

15,242

11,884

12,098

11,159

7,348

5,106

7,289

-52 %

Produits constatés d'avance

0,014

0,006

0,026

0,004

2,448

2,333

1,652

-

Ecart de conversion passif

0,007

0,006

0,014

0,001

0,001

0,003

0,015

-

Total comptes de régularisation

0,022

0,012

0,040

0,005

2,449

2,336

1,668

7 481 %

TOTAL PASSIF

19,461

15,275

15,597

16,265

15,835

13,480

14,516

-25 %


La recapitalisation de 2000

Le précédent rapport de la Cour notait que la situation nette de l’entreprise s’aggravait à partir de 1997 et qu’elle était négative à hauteur de 11,23 MF, avant affectation du résultat de l’exercice 1999. En 2000, ces pertes ont été pour l’essentiel apurées et le capital social reconstitué au minimum exigé par un apport de la SOFIRAD de 13,3 MF. Cet apport a été affecté à une augmentation de capital de même montant, suivie d’une réduction de ce même capital à 2 033 467 F, permettant d’absorber les pertes et de rétablir le capital. En 2001 et 2002, le compte de réserve a par ailleurs été progressivement porté à 10 % du capital.

L’adaptation des capitaux propres et des provisions en 2004.

Les « subventions à réaffecter » inscrites dans les capitaux propres à hauteur de 2,605 M€ ont été ramenées à 0 en 2004. Ce fait caractéristique de l’exercice est dû à l’incidence des changements de méthodes et de la présentation des états financiers de l’entreprise, en ce qui concerne la comptabilisation de certaines dettes inscrites au bilan. Deux types de reclassements ont été opérés : les subventions reportées ou mises en attente  ont été reclassées en produits constatés d’avance, et les charges à payer aux ayants-droit ont été reclassées en provisions pour risque.

Les provisions

-  Provisions pour risque et charge au 31.12 de chaque année

En K €

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Provision pour litige

111

149

-

-

327

282

30

Provision pour perte de change

44

3

36

67

60

38

72

Provision Indemnité de départ en retraite

-

-

-

238

-

-

-

Autres provisions pour risques et charges

2 678

1 136

945

945

4 484

4 484

4 381

s/s total

2 833

1 288

981

1 250

4 871

4 804

4 483

Source CFI / validé Cour des comptes

Provisions non déductibles

L’événement le plus saillant des provisions fiscalement non déductibles sur cette période concerne une provision pour retraites d’un montant de 238 k€ ; cette somme a été reprise dans son intégralité fin 2004, à la suite du versement à une société tiers des fonds bloqués nécessaires à la gestion des indemnités de fin de carrière.

Provisions pour litige

Une provision a été constituée en 2005 afin de faire face à un litige qui s’est ouvert avec Cognac-Jay Images au moment du changement de régie. Cette provision d’un montant de 267 k€ a été reprise en 2006 du fait d’un protocole d’accord transactionnel signé le 29/03/2006, qui normalise la fin de l’occupation des locaux de la rue Cognacq-Jay, jusqu’au départ de CFI le 15/06/2006. Dès lors, le poste de provision pour litiges mentionne seulement une assignation forcée en Afrique (15 k€) et un litige avec un salarié (15 k€).

Autres provisions pour risques et charges

Elles sont en large partie liées à l’activité de diffusion de la société, dont elles constituent une sorte de mémoire. En effet, l’essentiel de ces provisions est constitué des provisions pour suppléments de cachets dûs aux ayants droits de 1989 à 2002 (auteurs, artistes interprètes et réalisateurs). Elles résultent du reclassement des charges à payer.

Le rapport précédent de la Cour observait que de telles opérations de dotations et de reprises avaient fait l’objet par le passé d’un traitement complexe et asymétrique et concluait que leur impact sur les comptes financiers n’avait pas été totalement neutre. Cette appréciation reste valable pour la période sous revue, quoique sous une forme différente. En effet, les dernières provisions ont été dotées fin 2001 pour 302 k€, tandis que les dernières reprises ont été effectuées en 2002 à hauteur de 396 k€.

Mais, si la masse de ces anciennes charges à payer est maintenant figée, la lecture du bilan se trouve toujours influencée par le dispositif qui pèse sur la présentation du haut du bilan, au risque de laisser penser que la charge provisionnée est certaine. Or, au fil du temps, le risque encouru par CFI au titre de ces créances (dont les plus anciennes datent de 1996) est devenu de plus en plus hypothétique. En outre, selon le procès-verbal d’une réunion qui s’est tenue le 12 octobre 2007 entre CFI, la garantie de passif dont bénéficie CFI de la part du ministère des affaires étrangères au terme du protocole d’accord précité avec France Télévisions devrait être mise en œuvre et « une lettre d’engagement sera écrite par la tutelle afin de pouvoir pallier toutes demandes émanant d’un ayant droit (afin d’éviter) de mettre en péril les comptes de CFI ».

Aussi CFI a-t-elle fait part de son intention de reprendre ces provisions à la clôture de l’exercice 2007.

Le contrôle fiscal diligenté au cours de la période.

Il a porté sur les exercices 2002 et 2003 et a duré plus de 2 ans (de janvier 2005 à mai 2007). Le tableau suivant présente les redressements initialement notifiés et ceux qui ont été maintenus au terme des recours.

-  Contrôle fiscal

Exercice vérifié

Ayants droits (émission Tf1)

Rubrique « passif non justifié »

Rubrique « charges à payer »

Total notifié

Total en fin de procédure

2002

103248 +839766

=943.013

407 527

3 533 864

4 476 877

943 013

2003

0

9 556

0

9 556

0

Source : Cour des comptes

La notification portait sur trois objets, dont un seul a finalement été retenu :

− Le caractère déductible de la provision concernant les ayants droits (943.013 € au 31.12.2002) au motif que la provision était éventuelle et non précise. Ce motif de redressement sera maintenu dans la notification définitive.

− Un second ensemble portait sur un passif considéré comme injustifié, en l’occurrence sur de nombreux chèques établis sur des périodes anciennes et non débités, dont l’administration fiscale considérait qu’il s’agissait de créances périmées. Ce motif a été abandonné par l’administration fiscale en cours de procédure.

− Enfin, l’administration remettait en cause les charges à payer aux ayants-droit et les charges sociales liées, considérant que ces dettes n’ont pas d’existence certaine. Ces charges à payer seront finalement transformées en provisions (supra).

Au total, le redressement de l’impôt sur les sociétés dû par CFI s’est élevé à 104 159 €.

Les autres dettes

Du fait de sa perte d’activité en matière de diffusion, les dettes d’exploitation de CFI diminuent très nettement avec une césure perceptible entre les clôtures 2003 et 2004, les dettes passant de 11,1 M€ à 7,3 M€. La variation est forte en valeur absolue, mais aussi en pourcentage par rapport au total du bilan. Du fait de cette diminution et alors que les provisions demeurent à un niveau élevé, le ration dette / total bilan s’améliore.

-  Ratio dette sur bilan

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Ratio Dettes / Total bilan

78,3 %

77,8 %

77,6 %

68,6 %

46,4 %

37,9 %

50,2 %

Source : CFI validé Cour des comptes

LE TABLEAU DE FINANCEMENT ET LA TRESORERIE

Besoin en fonds de roulement

-  Besoin en fonds de roulement

En M €

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Dettes d’exploitation

12,980

11,000

11,263

10,424

7,335

5,106

7,289

Total des créances

8,101

6,605

3,224

4,332

4,041

3,026

3,306

BFR négatif

-4,879

-4,395

-8,040

-6,092

-3,294

-2,080

-3,982

Source : comptes de CFI

Le besoin en fond de roulement est constamment négatif sur la période.

Trésorerie

-  Trésorerie

En K€

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

variation

Placements

7 186

5 579

9 486

10 165

9 206

7 625

7 406

3,06 %

Disponibilités

562

135

215

325

66

9

1 240

120,68 %

Total

7 750

5 716

9 703

10 492

9 275

7 637

8 649

11,59 %

Source : comptes de CFI

La trésorerie de CFI a culminé à 9 ou 10 M€ à la clôture des exercices 2002, 2003, et 2004, somme qui représentait presque la moitié du chiffre d’affaires annuel. Si elle a diminué depuis 2004, il n’en reste pas moins que CFI dispose d’une trésorerie confortable par rapport à son niveau d’activité. Celle-ci s’explique principalement par les provisions pour risques liées aux suppléments de cachets. Or, ces provisions devaient être reprises à la fin de l’exercice 2007, libérant ainsi les sommes en cause de leur emploi potentiel.

La trésorerie de CFI est placée sur des SICAV à court terme gérées par le CIC et BNP PARIBAS : il s’agit de placements sécurisés, assurant une rémunération à un taux proche du marché monétaire EONIA.

Au total, depuis le précédent contrôle de la Cour, la situation nette de CFI telle qu’elle est retracée au bilan s’est assainie. Si la trésorerie de la société demeure confortable, CFI dépend de façon quasi-exclusive de financements publics, sur lesquels elle ne dispose d’aucune visibilité à moyen terme.

LES COÛTS

LA STRUCTURE DES COÛTS

Une structure des coûts fortement marquée par l’activité de banque de programmes

La structure des coûts de CFI telle qu’elle est retracée dans son budget durant la période sous revue fait apparaître quatre masses financières principales :

− les frais de siège, qui représentent un tiers des charges de la société. Ils regroupent les salaires et les charges, la location immobilière, les prestations de nettoyage, le standard téléphonique et l’accueil, les coûts de téléphonie, les honoraires, les impôts et taxes et les locations mobilières. Ce regroupement tient à un défaut de comptabilité analytique qui (jusqu’à la clôture 2006) ne permettait pas une répartition des salaires sur les principales lignes d’activité et interdisait ainsi d’avoir une vision analytique complète des charges affectées à chacun des métiers de la société.

− l’alimentation de la banque de programmes avec les achats de programmes, les acquisitions de droits sportifs et l’information, représente également un tiers des coûts budgétaires.

− les frais techniques et informatiques (22 % des charges) sont de fait largement liés à l’activité de banque de programmes, dans la mesure où l’essentiel de ces coûts est lié à la régie de diffusion et aux frais satellitaires. Ainsi, la somme de ces frais techniques et des coûts d’alimentation de la banque de programmes représente 55 % du total des charges de la société.

− la coopération ne compte que pour 9 % du total des coûts retracés au budget. Ce faible niveau peut être rapporté à la fois à la nouveauté de cette mission au sein de CFI, au fait qu’elle ne génère pas nécessairement des frais importants mais aussi à un défaut de comptabilité analytique, celle-ci ne permettant pas de rapporter les frais de personnel aux différentes activités de la société. CFI s’est engagée à procéder à une telle affectation à compter de 2008 qui lui permettra de mieux rendre compte de la nature de ses dépenses.

Des coûts unitaires de personnel en augmentation

Sur la période, les charges de personnel restent pratiquement inchangées en euros courants. Cette évolution apparaît de prime abord cohérente avec celle de l’activité de la société.

-  Charges de personnel

En M€

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007budget

Charges de personnel

4,458

4,758

4,602

4,539

4,406

3,991

4,233

4,559

Source : comptes financiers

Salariés

Néanmoins, un examen plus attentif de l’évolution respective de la masse salariale (traitements bruts hors charges, provisions et indemnités) et des effectifs montre que la très faible augmentation de la première (+3,27 %) est allée de pair avec une réduction des effectifs de 20 %. La progression de la masse salariale moyenne sur 7 ans (+28,36 %) correspond, selon la société à :

− la revalorisation des salaires des non-cadres de 6,29 % en moyenne annuelle, effectuée principalement en 2004, suite à l’arrêt de CFI-TV afin de redynamiser le personnel et d’établir une grille salariale plus équitable, tenant compte des qualifications des agents ;

− la modification de la structure de la masse salariale de CFI, celle-ci intégrant depuis 2004-2005 des experts, catégorie de personnel relativement plus chère que les salariés permanents de CFI ; cette dernière catégorie correspond aux nouveaux métiers développés par CFI, dans le cadre de son repositionnement ;

− la progression moyenne annuelle de 2,34 % des salaires des cadres.

-  Masse salariale moyenne par salarié

Source des tableaux : réponse au questionnaire CFI

NB : la dernière colonne correspond au taux moyen d’évolution annuel

Le dernier tableau correspond à l’évolution de la masse salariale moyenne par salarié225.

Intermittents

L’évolution des effectifs d’intermittents employés par CFI au cours de la période de revue fait apparaître une baisse régulière tant en effectifs qu’en volumes horaires.

- Intermittents

Année

Effectifs

Volume heures

2000

66

11 042

2001

27

6 104

2002

39

6 620

2003

48

8 943

2004

26

4 864

2005

10

2 182

2006

8

1 712

Source : CFI

Des frais de structure alourdis par un nouveau siège

En 2006, CFI a quitté les locaux de la rue Cognacq-Jay pour s’installer avec TV5 Monde, avenue de Wagram dans le 17ème arrondissement de Paris. Ce déménagement, réalisé sous l’impulsion de TV5 Monde, pose deux questions ayant trait, d’une part, aux coûts supportés à ce titre et, d’autre part, à la pertinence du choix ainsi opéré pour CFI.

La négociation conduite par TV5 Monde

Le bail a été souscrit par TV5 Monde auprès de SFL, Société Lyonnaise Foncière, pour 12 ans à compter du 01/03/2006, avec autorisation d’effectuer une sous-location soit à Thomson (ou une de ses filiales), soit à CFI. Notamment en contrepartie de la durée du bail, TV5 Monde a obtenu du bailleur une franchise de loyer de 15 mois et la prise en charge, à hauteur de 3 M€, des travaux d’aménagement requis par l’installation d’une chaîne de télévision (régie, câblage, studio, salle de projection,…). Le solde de ces travaux (supérieur à 4 M€) a été initialement financé par une filiale de THOMSON, qui refacture le coût à TV5 Monde en sept annuités.

Le loyer annuel prévu dans le contrat de bail est de 4,4 M€. Il est indexé sur le coût de la construction.

Les incidences de changement de lieu et de bail pour CFI.

Avant 2005, CFI louait des locaux au 15 et au 19 de la rue Cognacq-Jay :

- au n° 15, 410 m², au coût moyen de 534 € le m² puis de 658 € le m² ;

- au n° 19, 1 283 m², réduits en novembre 2005 à 930 m², avec un prix moyen au m² porté de 364 € à 564 €.

Avenue de Wagram, la surface louée est plus importante : CFI dispose de 1 566 m² sur 2 niveaux au lieu de 1 340 m² ; et le prix moyen de 2007 est fixé à 617 € le m².

Le tableau suivant retrace l’évolution du loyer supporté par CFI.

-  Loyers de CFI

 En K €

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

Evolution

2004-2008

15/19, rue Cognacq-Jay

560

582

850

1 099

984

955

 636

 

 

 

131, rue Wagram hors exceptionnel

-

-

-

-

-

-

 541

700

1 183

 

Exceptionnel

0

0

0

0

0

0

636

0

 

 

total

560

582

850

1 099

984

955

1 813

700*

1 183

20 %


Source : CFI /revu Cour des Comptes

*La somme de 700 k€ indiquée pour l’exercice 2007 sera revue à la hausse à la demande des Commissaires aux comptes qui souhaitent que l’effet de la neutralisation de 6 mois de loyer au titre de 2007 - tel qu’il est prévu sur le bail entre TV5 Monde et SFL- soit étalé sur la durée du bail. La charge de loyer sera probablement proche de 1 M€.

Ces données font apparaître 3 éléments :

- une augmentation de la surface louée de près de 17 %, alors que l’activité de CFI allait décroissant ;

- l’augmentation brute des loyers en année pleine entre 2004 et 2008 : +20 % ;

- une charge exceptionnelle liée au déménagement de 636 k€ pesant sur les comptes de 2006. Par ailleurs, concernant les travaux réalisés avenue de Wagram, CFI en a pris directement à sa charge 134 K€, tandis que TV5 Monde lui en refacturait 781 k€.

Ce surcroît de charges paraît d’autant plus contestable que les synergies entre TV5 Monde et CFI, invoquées à l’appui d’un déménagement commun, s’avèrent très faibles.

LES COÛTS AFFECTÉS AUX MÉTIERS DE CFI

Des coûts de production qui s’adaptent aux dotations budgétaires

L’achat de programmes

- Acquisitions brutes de programmes

 En K€

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Achats de programmes

 2 269

1 789

1 864

3 776

3 338

2 934

2 596

Acquisition d'incorporel sur l'exercice

 6 464

5 670

4 499

3 777

4 398

4 877

3 815

Total

 8 733

7 461

6 366

7 555

7 738

7 814

6 413

Perte de droits constatée

0

0

0

106

10

2

1

Source : compte financier et cour des comptes

Le tableau qui précède synthétise l’ensemble des droits acquis et des pertes constatées. Cette première approche fait masse des achats de flux (charges d’exploitation) et des achats portés dans les immobilisations incorporelles à l’actif et permet de rendre compte de l’ensemble des volumes bruts acquis sur la période. Un décrochage très net a lieu en 2006, année de réduction du budget. Les pertes de droits apparaissent faibles eu égard au repositionnement de la chaîne, fin 2003.

Une seconde approche, plus en conformité avec les résultats d’exploitation annualisés, agrège les achats de flux et les amortissements comptabilisés, suite aux diffusions ou acheminements effectifs vers les chaînes partenaires. Y sont réellement perceptibles deux baisses : l’une en 2002, année au cours de laquelle les comptes traduisent une première diminution des acquisitions de programmes de flux ; cette baisse trouve son explication dans le fait que CFI- TV n’a pas pu acquérir les droits de diffusion de la retransmission de la CAN (coupe d’Afrique des nations). La seconde baisse en 2006 est consécutive à la décision du ministère des affaires étrangères de geler une partie de la subvention.

-  coûts d’achats des programmes

En K€ 

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Total

9 053

7 465

5 902

7 697

6 737

6 834

5 911

Part des charges d’exploitation

28,35 %

25,23 %

21,86 %

29,95 %

27,78 %

28,06 %

27,35 %

Source : compte financier et cour des comptes

Toutefois, indépendamment de ces variations, le coût des programmes diffusés par Canal France international conserve sur cette durée de sept ans une certaine stabilité en pourcentage, et la proportion des achats de droits et des amortissements constatés, dans leur rapport aux totaux de l’exploitation, est très peu perturbée à compter de 2003, année de révision de la grille. Hormis l’inflexion de 2002, les droits demeurent stables et représentent entre 29 % ou 27 % des frais totaux d’exploitation, y compris en période d’ajustement aux restrictions budgétaires.

De ce point de vue, la société est non seulement capable d’adapter ses propositions programmatiques à ses dotations budgétaires, mais elle fait preuve également d’une gestion adaptée à ses capacités. Le nombre d’heures mises à disposition des chaînes partenaires est ainsi passé de 6 136 heures de programmes en 2005 à 5 345 heures de programmes en 2006.

Les droits sportifs

En 7 ans, le montant des droits sportifs acquis au cours d’une année a diminué de moitié, et le nombre total de programme d’événements sportifs est passé de 30 en 2000 à 14 en 2006. L’offre de tels programmes aux chaînes partenaires ne constitue donc plus une priorité.

-  Achats de droits sportifs

 En K€

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Achats de droits sportifs

1 266

1 385

1 277

877

719

1 050

618

Achats totaux

8 334

8 021

7 889

6 039

7 337

6 871

5 417

 Part des droits sportifs dans les achats

15,19 %

17,27 %

16,19 %

14,52 %

9,80 %

15,28 %

11,41 %

Source : rapport financier CFI et retraitement Cour des comptes

Au total, en ce qui concerne les programmes proposés sur la banque de programmes, il apparaît que CFI a su s’adapter à un contexte budgétaire de plus en plus contraint, qui l’a conduite, dans un secteur par ailleurs marqué par de fortes évolutions des tarifs pratiqués pour l’acquisitions de droits, à modifier la grille des programmes qu’elle proposait.

Des coûts de diffusion qui pourraient encore baisser à l’avenir

Deux éléments ont conduit à une réduction des coûts de diffusion qui devrait se poursuivre à l’avenir : d’une part, l’arrêt de la diffusion de la chaîne CFI-TV, et d’autre part, l’évolution des dispositifs technologiques, qui devrait permettre d’utiliser des moyens moins onéreux pour acheminer le contenu de la banque de programmes.

La régie

Le contrat en cours

Le contrat avec la nouvelle régie de diffusion (Vidéo Communication France) a été conclu le 14/04/2004, avec une prise d’effet le 01/10/2004. Le passage d’une diffusion à partir de magnétoscopes à une diffusion sur serveur a permis d’abaisser les coûts de maintenance et de minimiser les interventions humaines, réduisant de ce fait le nombre d'exploitants nécessaires au fonctionnement de la régie. L'absence de besoin de stockage est une autre source d’économie.

En 2003, le coût de la régie Cognac Jay Image s’était élevé à 3 449 k€. En 2006, celui de la nouvelle régie VCM n’était plus que de 2 037 k€ en 2006.

L’interrogation sur la nécessité d’une telle régie de diffusion

Localisée à Boulogne, cette régie de diffusion assure le fonctionnement de la banque de programmes. Toutefois, du fait des nouvelles possibilités offertes par la numérisation et internet, la société étudie actuellement de nouvelles modalités de trafic pour 2008 ou 2009 fondées sur internet et qui devraient permettre de diminuer les coûts techniques liés à la banque de programmes.

Les coûts satellitaires

Des coûts en baisse

Ces coûts passent de 4 491 k€ à 2 072 k€ entre les exercices 2000 et 2006, soit une diminution de plus de 50 %. Tous les contrats satellitaires qui expiraient avant 2005 ont été renouvelés en tenant compte de l'échéance du contrat Afrique, lequel avait été signé en 1995 pour une durée de 10 ans.

Un mode de diffusion qui pourrait être appelé à changer

Dans le cadre de l’activité de banque de programmes et non plus de diffusion directe d’une chaîne, la nécessité d’un acheminement par voie satellitaire paraît aujourd’hui d’autant moins évidente que le développement de modes de diffusion utilisant le réseau internet offre une alternative a priori crédible dans les zones qui sont couvertes par ce réseau. Aussi, la question du non renouvellement des contrats satellitaires de CFI lors de leur échéance est posée, au moins pour les zones qui sont couvertes par le réseau internet de façon satisfaisante, ce qui semble exclure à ce stade la zone africaine.

Les principaux enjeux chiffrés et leurs échéances sont les suivants :

- Echéance et valeur des contrats de diffusion

Zone géographique

Afrique et Amérique Latine 

PECO et PMO

Asie

Echéance

le 31/3/10

le 31/7/08

le 15/12/08

Coût annuel 

1,3 M€

0,4 M€

0,4 M€

Sources : données CFI

A cet égard, la tutelle de l’entreprise considère que les deux faisceaux couvrant l’Asie et l’Europe centrale et orientale et le Moyen-orient devront être clos lorsque les contrats arriveront à terme courant 2008. Cette perspective correspond à une réduction très significative de la couverture satellitaire actuelle pour la distribution de programmes et suppose qu’une solution alternative technique moins onéreuse soit mise sur pied dans l’intervalle.

Des coûts modestes lies à l’activité de coopération

En nette croissance entre 2005 et 2006, la coopération n’en représente pas moins une part encore modeste des coûts de CFI tels qu’ils apparaissent dans son budget.

-  Charges liées à la coopération

En K€ 

Réalisé 2005

Budget 2006

Réalisé 2006

Ecart réel budget en %

Part du total des charges 2006

coopération

1 507

1 857

1 936

4,25 %

8,96 %

Source : CFI budget

Ce chiffrage s’avère toutefois incomplet et ce à plusieurs titres : d’une part, le budget de CFI ne ventile pas les frais de personnel sur les différentes activités de la société, les frais de personnel permanent de CFI exposés au titre de la mission de coopération apparaissant dans ses frais de siège ; d’autre part, les personnels mis à disposition de CFI et qui ne sont pas rémunérés par elle ne sont pas pris en compte dans ce chiffrage, ce qui est en particulier le cas pour les missions sur le terrain d’une durée inférieure à 10 jours. Certains coûts de personnel d’expertise n’apparaissent donc pas dans les comptes. De même, si la société trouve dans une ambassade française une aide opérationnelle (prêt de salle, mise à disposition de véhicule), ces apports ne sont pas chiffrés.

Au total, durant la période sous revue, ne figurent dans le budget de CFI au titre de l’activité de coopération que les frais de personnel qui lui sont effectivement refacturés par ses partenaires et les frais de mission afférents aux déplacements effectués sur le terrain.

PARTIE III : LES RÉSULTATS

UN CONTRÔLE DE GESTION QUI S’EST STRUCTURÉ DANS LA PÉRIODE RÉCENTE

SYSTÈMES D’INFORMATION ET COMPTABILITÉ ANALYTIQUE

Depuis la fin 2004, le nouveau directeur administratif et financier s’est attelé à mettre en place des outils de gestion dans quatre grands secteurs : finances et compatibilité, ressources humaines, gestion des programmes audiovisuels, et suivi de l’activité de coopération. Pour la gestion financière et comptable et les ressources humaines, deux systèmes informatiques ont été mis en place : Agresso et Zadig. Le logiciel Agresso permet un suivi analytique qui n’existait pas auparavant, et le logiciel Zadig (importé de France Télévisions) autorise une gestion des contrats du personnel, de leurs congés, et automatise la procédure de paye des salariés. Pour ce qui est des métiers, le programme Louise permet d’opérer un suivi des contrats et des droits de diffusion, tandis que le métier lié à la coopération audiovisuelle, et l’ensemble des missions effectuées sont gérés par Filemaker.

Ces quatre outils ont été regroupés dans un infocentre. Ce système intègre les données des quatre logiciels et contribue à éclairer les décisions des responsables de CFI. Ces outils ont été déployés à compter de 2006 et l’infocentre en 2007.

Cette nouvelle organisation de gestion autorise un vrai pilotage de la société sur ses deux métiers principaux. Ces avancées notables ont été opérées au moment où la comptabilité analytique était introduite dans la gestion comptable. Il devient maintenant possible d’avoir des restitutions de comptes de résultat par destination. Ainsi, l’exécution budgétaire présente pour la première fois au 31/12/2006 en k€, un chiffrage comparatif entre le budget et le réalisé.

La comptabilité analytique appelle néanmoins une observation : si l’exécution budgétaire distingue les frais de programmes, le coût de l’information, les frais liés à la coopération, et les frais techniques et informatiques, une masse globale restitue parmi les «frais de siège » la masse salariale, sans que celle-ci soit réaffectée vers chacun des métiers exercés. C’est une limite forte de la comptabilité analytique de CFI. Suite au contrôle de la Cour, CFI s’est engagée à répartir ses salariés par centres de coûts à compter de 2008.

PROCÉDURE BUDGÉTAIRE

Le budget est prêt dès la fin de l’automne de l’année qui précède son exécution. Contrairement à TV 5 Monde, les budgets de CFI sont adoptés relativement tôt dans l’année.

Néanmoins, le budget ne peut pas être adopté avant que le Parlement ait voté les dotations. En outre, certaines années, les gels budgétaires sont très importants : tel est le cas de 2004, où le gel d’1 M€ n’a été annoncé que le 7 décembre. Inversement en 2003, le poste de « subvention à réaffecter » avait augmenté de 1,5 M€. Puis de nouveau en 2006, la subvention de base du ministère des affaires étrangères a diminué de 19,5 M€ prévus à 18,59 M€ et ce, du fait d’un nouveau gel d’1 M€ lié à la mise en réserve parlementaire. Cette réserve sera compensée très partiellement par un déblocage exceptionnel de 90 k€ en cours d’année. Ce gel a contribué au résultat déficitaire de l’exercice 2006.

La question se pose donc de savoir comment l’entreprise peut gérer de tels aléas. Alors que des exigences de performance sont formulées dans le cadre de la LOLF et dans un cadre budgétaire fortement contraint, CFI devrait disposer d’une certaine visibilité sur son avenir, dont l’adoption d’un plan stratégique d’une durée de deux ans constitue la forme minimale.

CONTRÔLE DE GESTION

Des procédures internes sont mises en œuvre pour le contrôle des achats, des achats de programme, des engagements sur contrat ainsi que le contrôle des notes de frais. Le respect de ces procédures est contrôlé par les commissaires aux comptes.

Pour les achats, un bon de commande est émis ; il comporte 3 volets et doit porter la signature du demandeur, du chef de service et du directeur général. L’un des volets est envoyé au fournisseur, un autre est communiqué au service financier, le 3° est conservé par le demandeur. Lorsque la commande est livrée et conforme à la commande, la facture est estampillée du « bon à payer » et rapprochée de la commande. Le paiement n’est engagé que si la facture porte le « bon à payer » du chef de service.

Pour ce qui est des achats de programmes, outre le directeur des programmes, la signature du directeur général est requise pour la validation de l’achat. Le paiement n’est engagé que si la facture porte le « bon à payer » du directeur des programmes.

Pour les engagements contractuels, outre la signature du directeur général, celle du directeur juridique est exigée. Lors de la mise en conformité de la commande et des pièces attestant l’achat, le directeur juridique et le directeur financier -qui sont destinataires de la copie du contrat- valident le déclenchement du paiement.

Au total, des progrès importants ont ainsi été accomplis en matière de gestion depuis la précédente intervention de la Cour.

DES RÉSULTATS DIFFICILES A ESTIMER

Par définition, CFI œuvre dans des zones où les instruments de mesure sont largement déficients. CFI n’ayant plus de mission directe de diffusion, ce n’est qu’au travers de la reprise de ses programmes par les télévisions partenaires que son activité de banque de programmes peut être appréciée. Par ailleurs, son activité de coopération la distingue des missions des autres acteurs de l’audiovisuel extérieur. Dans ces conditions, il n’est pas possible d’évaluer les résultats de CFI selon la même grille d’analyse que celle utilisée pour les autres acteurs de l’audiovisuel extérieur.

LES INDICATEURS DE PERFORMANCE DE LA LOLF

Le budget de CFI figure dans le programme 115 de la mission interministérielle « Médias ». Ce programme regroupe les crédits liés à l’audiovisuel extérieur, à côté du programme 116 qui correspond à la « chaîne française d’information internationale ». Au sein du programme 115, les dotations allouées à CFI figurent aux côtés de celles destinées à TV5, RFI, RMC Moyen-Orient, Médi 1 et Médi 1 sat. CFI représentait 12 % des crédits de paiement de ce programme en loi de finances initiale pour 2006 et 10,5 % en loi de finances initiale pour 2008.

Pour CFI, la LOLF retient deux indicateurs de performance : les taux de reprise par les télévisions partenaires des programmes fournis, indicateur qui concerne l’activité de banque de programmes et le coût journalier des actions de coopération, indicateur qui concerne la mission de coopération.

Le taux de reprise par les télévisions partenaires des programmes fournis par CFI mesure l’efficacité de la banque de programmes. Cet indicateur est construit à partir de deux séries de données :

− une enquête annuelle menée par CFI auprès de ses télévisions partenaires, mais qui présente le défaut d’être réalisée sur un mode déclaratif ;

− la possibilité d’effectuer des sondages pour connaître le taux effectif de reprise grâce à un nouveau dispositif dit de « watermarking » qui permet d’imprimer une marque imperceptible sur les programmes.

Le coût journalier des actions de coopération menées par CFI est un indicateur de nature plus financière, visant à inciter CFI à réaliser des actions de coopération à moindre coût. Cet indicateur est fourni automatiquement à partir de la base de données analytique des systèmes d’information dont s’est récemment dotée la société ; il se définit comme le ratio entre le montant cumulé des dépenses engagées par CFI au titre des actions de coopération et le nombre de jours effectués.

Il s’avère néanmoins que cette base de données ne permet pas d’affecter les salariés de la société aux différents métiers. Le coût journalier des actions de coopération menées ne rend pas compte dans ce cadre de l’ensemble des coûts, mais seulement de ceux qui sont liés aux personnels affectés par d’autres sociétés à l’activité de coopération de CFI. Pour l’avenir et de sorte à retenir un coût plus proche de la réalité concernant les activités de coopération, la société s’est engagée à élargir l’affectation de ses coûts aux différents métiers, en particulier en ce qui concerne les coûts des personnels salariés.

Au total, entre 2001 et 2006, la société aura engagé au titre des études 778 K€, moins en moyenne que le pourcentage que consacrent aux études les autres entreprises de l’audiovisuel extérieur.

-  Coût des études

(en K€)

2001

2002

2003

2004

2005

2006

coût des études

17

130

147

177

245

63

Source : CFI

UNE AUDIENCE APPRÉCIEE SELON DES MÉTHODES DIVERSES POUR LA BANQUE DE PROGRAMMES

Après le nombre de télévisions partenaires et leur localisation, l’indicateur le plus pertinent pour mesurer la performance d’une banque de programmes est le taux de reprise de ses programmes par ses utilisateurs.

Les taux de reprise

CFI établit annuellement un bilan d’activité de la banque de programmes qui mesure le taux de reprise par les télévisions partenaires. Le taux de reprise est mesuré chaque trimestre. Néanmoins, celui-ci est établi sur une base déclarative et, comme le précisent les bilans d’activité de CFI, « subordonné à la bonne volonté des télévisions partenaires et à la fiabilité des renseignements qu’elles communiquent à CFI. » Les taux de reprise de la banque de programmes par les partenaires de CFI, établis par zones géographiques, sont les suivants :

− Europe centrale et orientale : 99 % ;

− Monde arabe : 82 % ;

− Asie et océanie : 60 % ;

− Afrique francophone : 53 % ;

− Afrique anglophone : 50 % ;

− Afrique lusophone : 32 %.

Ce n’est donc pas avec ses partenaires les plus importants en volume que CFI a les meilleurs taux de reprise. Par ailleurs, au sein d’une même zone géographique, les taux de reprise s’avèrent très différenciés (par exemple entre 82 % de taux de reprise au Togo et 8 % à Djibouti pour l’Afrique francophone). En outre, ils fluctuent assez largement d’une année sur l’autre, avec des baisses sensibles entre 2005 et 2006 pour l’Afrique francophone et l’Afrique anglophone et des augmentations dans les pays d’Europe centrale et orientale et dans le monde arabe.

Etant donné les faiblesses intrinsèques d’un outil de nature déclarative, il est pratiquement impossible de tirer des conclusions des études ainsi présentées pour le passé. Un dispositif permettant de ‘tatouer’ les programmes de sorte qu’une lecture directe et objective des taux de reprise puisse être effectuée est en cours de mise en œuvre et apparaît essentiel pour permettre une réelle mesure des résultats de la banque de programmes226.

Les études de satisfaction

CFI fait par ailleurs régulièrement réaliser des études à des cabinets extérieurs227, afin de déterminer si les programmes qu’elle propose à ses partenaires correspondent aux attentes du public. Ces études, réalisées en général sur un format similaire, visent d’une part à disposer de données d’audiences tous médias confondus sur les zones concernées, afin notamment de déterminer la part d’audience du média qui reprend les programmes de CFI ; elles visent ensuite à connaître les attentes des téléspectateurs et en particulier le degré de confiance qu’ils accordent aux différents médias, qu’ils soient nationaux ou étrangers, radio ou télévision et l’intérêt qu’ils portent à la retransmission des événements importants au plan national, africain ou international ; elles comportent également une appréciation, sur la base d’un sondage, de l’intérêt des téléspectateurs pour différents types de programmes, y compris ceux fournis par CFI ; elles comportent enfin un aspect lié aux événements sportifs. Il s’agit ainsi d’éléments qui permettent à CFI de mieux cibler les programmes choisis pour alimenter la banque de programmes.

Le coût horaire de l’heure reprise

Sous ces réserves concernant les instruments de mesure de la reprise des programmes de CFI et celles qui ont été évoquées à propos des coûts associés aux différentes fonctions assurées par l’entreprise, le coût horaire de l’heure de programme reprise apparaît nettement différencié selon les régions et connaît des variations annuelles non négligeables.

-  Coût horaire de l’heure reprise par zones géographiques

 

2004

 

Afrique

PMO

PECO

Asie

Programmes de stock

2 494 887 €

202 746 €

416 945 €

284 356 €

Programmes de flux (info&sport)

2 288 475 €

183 054 €

366 108 €

500 660 €

Coût total de la grille

4 783 362 €

385 800 €

783 053 €

785 016 €

Nombre d'heures CFI reprises

15 275

583

8 860

1 607

Coût horaire de l'heure reprise

313 €

662 €

88 €

488 €

         
 

2005

 

Afrique

PMO

PECO

Asie

Programmes de stock

2 904 408 €

248 844 €

435 478 €

311 276 €

Programmes de flux (info&sport)

2 086 732 €

147 883 €

295 766 €

404 466 €

Coût total de la grille

4 991 140 €

396 727 €

731 244 €

715 742 €

Nombre d'heures CFI reprises

17 622

950

9 442

1 777

Coût horaire de l'heure reprise

283 €

418 €

77 €

403 €

         
         
 

2006

 

Afrique

PMO

PECO

Asie

Programmes de stock

2 368 498 €

206 365 €

420 577 €

319 317 €

Programmes de flux (info&sport)

1 793 280 €

140 004 €

280 007 €

382 915 €

Coût total de la grille

4 161 778 €

346 369 €

700 584 €

702 232 €

Nombre d'heures CFI reprises

15 177

708

11 186

1 335

Coût horaire de l'heure reprise

274 €

489 €

63 €

526 €

Source : CFI

LA DIFFICULTÉ QUI ENTOURE LA MESURE DES PERFORMANCES DE CFI EN MATIÈRE DE COOPÉRATION

Des résultats mal connus

Par définition, l’impact d’une mission de coopération ne peut s’établir de façon immédiate et uniquement quantitative, ce qui limite d’autant la capacité à porter un jugement en matière de performance sur les actions de coopération. C’est seulement en effectuant un suivi après un certain laps de temps que l’on peut déterminer les suites d’une mission de coopération. Il semble d’ailleurs que CFI ait le projet de développer un tel mode de suivi.

A défaut, il importe que les missions de coopération fassent l’objet d’un suivi grâce à des procédures bien établies permettant de connaître le déroulement de la mission, sur la base d’un rapport formalisé, présentant des conclusions et relayant les opinions des personnes formées sur la qualité de la formation qui leur a été délivrée. Tel est bien le cas à CFI.

Un suivi régulier

Les missions de coopération font l’objet d’une fiche projet qui donne lieu à un suivi avec un budget prévisionnel associé, rapporté à la dépense réelle, tenant compte à la fois des personnels de CFI et de ceux qui sont mis à sa disposition. Les objectifs de la mission, les moyens mis en œuvre et les résultats obtenus sont ainsi présentés selon un format standardisé.

L’examen de ces fiches projet228 montre que les formations délivrées par CFI sont très proches du terrain et portent sur des aspects très concrets des activités journalistiques : elles débouchent ainsi sur des préconisations précises pour l’organisation et le fonctionnement des télévisions partenaires. Dans les deux cas où la mission était gérée par CFI seule, il s’avère que les dépenses effectives ont été largement inférieures aux dépenses prévisionnelles : un quart des dépenses prévisionnelle pour la République démocratique du congo, soit 5 K€ au final pour 14 jours de missions, la moitié des dépenses prévisionnelles pour la mission en Mauritanie, soit 3,5 K€ pour 12 jours de mission.

La mission en Afghanistan revêtait un caractère particulier du fait de son inscription dans un projet coordonné au plan européen et elle a débouché sur des préconisations plus générales, à savoir le vote d’une nouvelle loi sur les médias, la définition d’une ligne éditoriale stabilisée et correspondant à la diversité de la population, la professionnalisation du management. Elle se conclut par dix préconisations qualifiées d’essentielles : création d’un établissement public autonome, définition d’une stratégie éditoriale nationale, formalisation de l’organigramme, ajustement des effectifs, construction d’un budget annuel, maintien d’une contribution pluriannuelle de l’Etat, création d’une régie publicitaire intégrée, création d’une direction des partenariats, recherche de nouveaux talents et compétences, plan pluriannuel de compétence. Sur les principaux sujets, des propositions concrètes sont avancées, avec notamment un organigramme cible, une grille de programme type et un budget prévisionnel.

Le suivi des activités de coopération est donc réalisé et permet de mesurer le caractère très appliqué des formations délivrées et des préconisations formulées. Ce souci du concret semble constituer une « marque de fabrique » de CFI, issue des liens tissés avec France Télévisions et dont il importe que la société conserve l’acquis.

CONCLUSION : UN AVENIR INCERTAIN

Au total, si l’existence d’un volet audiovisuel dans la politique de coopération française apparaît légitime et si la double mission exercée à cet égard par CFI en tant que banque de programmes gratuite et opérateur de missions sur le terrain revêt une certaine cohérence, la Cour ne peut que constater la fragilité de cette société, au passé marqué par de trop nombreux changements de priorités.

CFI est en effet désormais présentée par le ministère des affaires étrangères comme l’intégrateur de la coopération française à destination des pays en développement en matière audiovisuelle. Il est regrettable que ce repositionnement stratégique ait été mis en œuvre de façon si tardive et se soit réalisé après l’échec du projet « idées de France ». La question se pose de savoir si ce repositionnement stratégique n’est pas une ultime tentative pour conserver une raison d’être à une société qui a vu ses ambitions progressivement réduites.

Pour l’avenir, deux séries de questions sont posées qui ont trait aux deux missions assurées par CFI.

En ce qui concerne la banque de programmes gratuite, le nombre de pays qui en bénéficient devrait se réduire à mesure qu’ils se développent et acquièrent la capacité d’acheter ou de produire leurs programmes audiovisuels. A cet égard, les zones dans lesquelles CFI doit demeurer présente dans la durée mériteraient d’être précisées : avec 92 pays partenaires, l’action de CFI dépasse aujourd’hui le cadre des pays de la zone de solidarité prioritaire définie par le gouvernement français comme la zone au sein de laquelle l’aide publique française est engagée de manière sélective et concentrée et qui regroupe 55 pays, en particulier en Afrique subsaharienne. Pour certains de ces pays partenaires, la transition entre l’offre gratuite de CFI et l’offre commerciale proposée par l’intermédiaire des structures de promotion des exportations correspondantes doit être envisagée à terme plus ou moins rapproché, avec l’objectif de maintenir dans ces pays la diffusion de programmes français.

En ce qui concerne la mission de coopération, la Cour prend acte de la volonté du ministère des affaires étrangères de faire de CFI l’instrument de sa politique de coopération audiovisuelle et d’élargir ainsi le champ de compétence de la société au-delà de la télévision, en particulier vers la radio et le cinéma, en lui transférant les activités concernées actuellement conduites au niveau de la direction de l’audiovisuel extérieur. Encore faudrait-il que ces transferts d’activités soient précisés et assurent à la société, dans la durée, un volume d’activité suffisant, que les liens privilégiés qui existent actuellement entre CFI et France Télévisions soient maintenus et que des relations étroites soient établies avec les structures de formation des autres sociétés de l’audiovisuel public concernées.

Si ces conditions n’étaient pas réunies, la question de l’existence même de CFI serait posée.

*

* *

AVIS SUR LES COMPTES

La Cour a exercé son contrôle sur les comptes annuels de la société Canal France International correspondant aux exercices 2000 à 2006.

Dans la limite des investigations auxquelles elle a procédé et sous le bénéfice des observations qui figurent dans le présent rapport, la Cour considère que les comptes annuels de la société Transtélé Canal France International pendant la période sous revue ont été réguliers et sincères et ont donné une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise.

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Fait et délibéré à la Cour des comptes, troisième chambre, sur le rapport de Mme Valérie Charolles, rapporteure, et les observations de M. Gilles Andréani, conseiller maître, contre-rapporteur.

Présents : MM. Jean Picq, président, Guy Mayaud, Mme Anne Froment-Meurice, MM. Pascal Duchadeuil, Gilles Andréani, Jacques Tournier, Mmes Maud Colomé, Jeanne Seyvet, MM. Edouard Couty, Christian Sabbe, Yann Pétel, conseillers maîtres, M. Louis Zeller, conseiller maître en service extraordinaire, et Mme Valérie Charolles, rapporteure.

Les vingt mars et dix avril deux mille huit.

Le Président de la Troisième chambre

Jean Picq

ANNEXE : PAYS ACTUELLEMENT PARTENAIRES DE CFI

I – Afrique

III – Europe centrale et orientale

ANGOLA

ALBANIE

BENIN

ARMENIE

BOTSWANA

AZERBAIDJAN

BURKINA FASO

BELARUS

BURUNDI

BOSNIE-HERZEGOVINE

CAMEROUN

BULGARIE

CAP VERT

CROATIE

CONGO BRAZZA.

ESTONIE

COTE D’IVOIRE

GEORGIE

DJIBOUTI

KOSOVO

ERYTHREE

LETTONIE

ETHIOPIE

LITUANIE

GABON

MACEDOINE

GAMBIE

MOLDAVIE

GHANA

MONTENEGRO

GUINEE BISSAU

OUZBEKISTAN

GUINEE CONAKRY

ROUMANIE

KENYA

SERBIE

MADAGASCAR

UKRAINE

MALAWI

IV – Monde arabe

MALI

ALGERIE

MAURICE

EGYPTE

MAURITANIE

JORDANIE

MOZAMBIQUE

LIBAN

NAMIBIE

LIBYE

NIGER

MAROC

NIGERIA

PALESTINE

OUGANDA

QATAR

REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

SOUDAN

REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO

SYRIE

RWANDA

TUNISIE

SAO TOME

YEMEN

SENEGAL

V- Asie et Océanie

SEYCHELLES

BHOUTAN

SIERRA LEONE

BRUNEI

SWAZILAND

CAMBODGE

TANZANIE

FIDJI

TCHAD

INDONÉSIE

TOGO

LAOS

ZAMBIE

MONGOLIE

ZIMBABWE

MYANMAR

II – Amérique latine et caraïbes

NÉPAL

HAÏTI

SRI LANKA

PÉROU

VANUATU

(Source : CFI)

VIETNAM

1 () Medi 1 (Radio Méditerranée International) est une chaîne de radio généraliste bilingue (français/arabe) installée à Tanger et financée à 49 % par la CIRT (compagnie internationale de radio et télévision), société française filiale à 100 % de la SOFIRAD. La CIRT a pour fonction essentielle de gérer le personnel français détaché auprès de Medi 1, à savoir 18 personnes (journalistes et techniciens) : en 2008, il est prévu que le budget de l’État lui accorde une subvention de 1,07 million d’euros, destinée à financer les salaires et les charges sociales afférentes.

2 () Anciennement baptisée RMC–Moyen Orient, Monte-Carlo Doualiya est une station de radio publique française arabophone (à destination du Moyen Orient, du Golfe et du Maghreb), filiale à 100 % de RFI : le budget de l’État est censé la financer à hauteur de 4,77 millions d’euros en 2008.

3 () Précisons néanmoins, à toutes fins utiles, qu’ARTE est moins un organe extérieur de l’audiovisuel français que la réunion d’une chaîne française et d’une chaîne allemande. Son financement est entièrement adossé à la redevance audiovisuelle (223,33 millions d’euros en 2008).

4 () Euronews, société basée à Lyon, est détenue par un groupement de télévisions publiques européennes issues de l’UER.

5 () Voir le rapport de M. Christian Kert sur la création d’une télévision française d’information à vocation internationale (Doc. AN n° 857, XIIème législature, 14 octobre 2003). Voir également le rapport d’information de M. François Rochebloine sur l’organisation et le financement de l’audiovisuel extérieur (Doc. AN n° 3589, XIIIème législature, 17 janvier 2007).

6 () Par une lettre de mission du 26 juin 2003, le Premier ministre, M. Jean-Pierre Raffarin, a chargé M. Bernard Brochand de piloter le projet de chaîne française d’information internationale. Le 26 septembre 2003, notre collègue député a remis au Président de la République, M. Jacques Chirac, un rapport préconisant une association privé–public et une diffusion centrée sur l’international : ce rapport préconisait de rapprocher TF1 et France Télévisions – en écartant RFI – pour créer une chaîne détenue à parité par le groupe privé et le groupe public, provisoirement baptisée « Chaîne française d’information internationale » (CFII).

7 () Trois rapports particuliers sur TV5 Monde, CFI et RFI, ainsi qu’un relevé d’observations définitives sur France 24.

8 () Voir notamment les développements figurant dans le rapport spécial 2007 : « Une nécessaire refondation de l’audiovisuel extérieur » (rapport spécial de M. Patrice Martin-Lalande sur le projet de loi de finances pour 2007 : missions Médias et Avances à l’audiovisuel public, Doc. AN n° 3363, annexe n° 19, XIIème législature, 12 octobre 2006) : pages 47 à 69.

9 () Voir également ceux figurant dans le rapport spécial 2008 : « Le rayonnement international : réformer l’audiovisuel extérieur »  (rapport spécial de M. Patrice Martin-Lalande sur le projet de loi de finances pour 2008 : missions Médias et Avances à l’audiovisuel public, Doc. AN n° 276, annexe n° 26, XIIIème législature, 11 octobre 2007) : pages 94 à 108.

10 () Voir le rapport spécial 2008 précité (Doc. AN n° 276, annexe n° 26, 11 octobre 2007) : pages 94 à 97.

11 () Rappelons d’ailleurs que la Cour des comptes, concluant un précédent cycle de contrôles sur l’audiovisuel extérieur dans une insertion au rapport public 2003, avait déjà insisté sur la croissance des crédits et la dérive des coûts, notamment l’augmentation non maîtrisée des charges de personnel de RFI (+ 51 % entre 1992 et 1999). Relevant la complexité du dispositif institutionnel et le risque de redondance des efforts publics, elle s’inquiétait du développement sur TV5 d’une offre d’information excessive au regard des perspectives ouvertes par la création d’une chaîne française d’information. Elle préconisait une politique plus cohérente impliquant les acteurs de l’audiovisuel national, en particulier France Télévisions. Enfin, elle appelait à la formulation de priorités claires quant aux objectifs géographiques et aux publics visés, ainsi qu’aux moyens notamment de diffusion, à propos de laquelle elle soulignait la redondance des capacités et les avantages du numérique.

12 () Sans doute utile dans la phase de transition des années 1990 où se constituaient ces bouquets, elle a été arrêtée en 2003, avec la cession par CFI de sa participation dans PORTINVEST, opérateur du bouquet LeSat destiné à l’Afrique.

13 () Voir le rapport de M. Gilles Carrez sur le projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l’année 2007 (Doc. AN n° 1004, tome II, 25 juin 2008) : pages 227 à 235.

14 () Il est plus que curieux que le programme Audiovisuel extérieur (31,8 % des crédits de la mission Médias en 2007) ne dispose, en « mode LOLF » que de 2 objectifs et 4 indicateurs alors qu’il regroupe un tiers des crédits de la mission et s’appuie sur de nombreux acteurs aux problématiques fournies (TV5 Monde, Radio France Internationale, Monte Carlo Doualiya, Canal France International, Medi 1)... là où le programme Chaîne française d’information internationale est doté de 3 objectifs et 5 indicateurs pour seulement 14,2 % des crédits de la mission et un destinataire unique (France 24). Bref, quoique amélioré par rapport à l’an dernier, le dispositif de mesure de la performance du programme Audiovisuel extérieur apparaît encore insuffisant. Les indicateurs relatifs à l’audiovisuel extérieur doivent donc être améliorés de manière à être plus fiables et plus faciles à mesurer.

15 () En France, la dizaine de chaînes d’information nationales et internationales disponibles sur le câble et le satellite ne dépassent pas ensemble 2 % d’audience. Ailleurs, des enquêtes qualitatives sont nécessaires, qui ne donnent qu’une idée approximative de l’audience, et ne sont parfois que des enquêtes de notoriété. En revanche, la diffusion sur Internet est mesurable par l’organisme émetteur dans toutes ses dimensions.

16 () Un système de « filigranage électronique » destiné à lui fournir un retour direct se met néanmoins progressivement en place.

17 () Auditeurs ayant écouté la radio la veille du sondage soit une audience quasi quotidienne.

18 () Voir le rapport particulier de la Cour des comptes sur les comptes et la gestion de RFI pour les exercices 2000 à 2006, publié en annexe.

19 () Voir le rapport spécial 2008 précité (Doc. AN n° 276, annexe n° 26, 11 octobre 2007) : page 106.

20 () Dans un communiqué de presse publié le 16 juillet 2008, le Rapporteur spécial du Sénat, M. Claude Belot, estime ainsi que, compte tenu de l’échéancier de versement de la convention de subvention, sans abondement des crédits ouverts au budget 2008, il manquera, dès le 15 août 2008, 1,1 million d’euros à la somme que doit verser l’État à France 24 pour honorer ses engagements.

21 () Ce rapport, non publié, a été rédigé par des membres des cabinets et des administrations de la présidence de la République, du Premier ministre, du ministère des Affaires étrangères, du ministère de la Culture et de la communication et du ministère de l’Économie, des finances et de l’emploi. Il s’est appuyé sur une étude commandée au cabinet de conseil Altédia, portant sur les questions sociales liées à la réforme de l’audiovisuel extérieur.

22 () Voir le rapport spécial 2008 précité (Doc. AN n° 276, annexe n° 26, 11 octobre 2007) : pages 100 à 103.

23 () La RAI italienne en détient 21,3 %, la RTVE espagnole 18,5 %, la RTR russe 15,5 % et la SSR suisse 9 %.

24 () Quant aux actions de coopération actuellement exercées par CFI, elles pourraient l’objet d’un contrat d’objectifs établi entre le ministère des Affaires étrangères et l’INA, afin d’assurer leur pérennité. On pense aux actions de formation, de conseil, d’étude, d’assistance technique et de soutien à la production (127 missions en 2006). Avec cette réforme, l’INA disposerait d’une gamme complète de services, tant en matière de banque de programmes que de services de formation en matière audiovisuelle.

25 () On relèvera, du reste, qu’un arrêté du 18 juin 2008 a désigné la mission de contrôle économique et financier des sociétés du service public de la radio et de la télévision pour exercer, sur la société « Audiovisuel Extérieur de la France », le contrôle économique et financier de l’État prévu par le décret n° 55-733 du 26 mai 1955.

26 () Au demeurant, six représentants des salariés seront élus dans les conditions prévues par la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public.

27 () M. Alain de Pouzilhac a été nommé président directeur général de RFI par le Conseil supérieur de l’audiovisuel, le 30 juin 2008, Mme Christine Ockrent en devenant directrice générale déléguée.

28 () M. Alain de Pouzilhac a été nommé président de TV5 Monde le 29 avril 2008, Mme Marie-Christine Saragosse en devenant directrice générale exécutive.

29 () M. Alain de Pouzilhac et Mme Christine Ockrent, interviewés dans le Figaro du 8 juillet 2008.

30 () Dans sa version établie par la commission mixte paritaire le 17 juillet 2008, l’article 37 ter du projet de loi relatif à la modernisation de l’économie rédige ainsi le premier alinéa de l’article 47 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication : « L’État détient directement la totalité du capital des sociétés France Télévisions et Radio France et, directement ou indirectement, la totalité du capital de la société Radio France Internationale. Il assure au titre de cette dernière le rayonnement international de la France par les moyens appropriés ».

31 () Ces chaînes sont celles de France Télévisions dont RFO, ARTE France, RTBF, TSR, Radio Canada, Télé Québec et le CIRTEF (Conseil International des Radios–Télévisions d’Expression Française). TV5 Québec Canada est une chaîne à part, société purement canadienne qui a l’obligation légale de diffuser 15 % de programmes canadiens mais qui utilise plus de 60 % de programmes en provenance de France Télévisions, contre 30 % en moyenne pour les autres chaînes. Depuis la réforme des structures gestionnaires de la chaîne en 2001, seule la diffusion au Canada reste sous responsabilité de TV5 Québec Canada à Montréal, sur financement canado–québécois, tous les autres signaux étant gérés par TV5 Monde à Paris sur financement de l’ensemble des gouvernements partenaires.

32 () Au demeurant, si la société holding prend 49 % du capital de TV5 Monde, il faudra bien calibrer, dans la construction du budget 2009, le montant et la forme de la rémunération des programmes que France Télévisions fournissait jusqu’ici gratuitement et que TV5 Monde pourrait à l’avenir acheter.

33 () Le rapport de la Cour des comptes sur TV5 Monde, publié en annexe, est à cet égard très éclairant.

34 () Voir l’interview de M. Alain de Pouzilhac et Mme Christine Ockrent, précitée.

35 () Les recettes de publicité de TV5 Monde, France 24 et RFI ne représentent aujourd’hui que quelques millions d’euros. Elles sont faibles au regard des audiences significatives des opérateurs de l’audiovisuel extérieur (et quasiment absentes sur les portails internet).

36 () En 2009, la vision d’ensemble du budget de l’audiovisuel extérieur sera ainsi facilitée par la fusion, annoncée par le Gouvernement à l’occasion du récent débat d’orientation des finances publiques, des deux programmes de la mission Médias : le programme Chaîne française d’information internationale piloté par la DDM et le programme Audiovisuel extérieur piloté par le Quai d’Orsay. L’ensemble des dotations du budget général de l’État devraient ainsi être versées à la société holding.

37 () D’ailleurs, aux termes du décret de nomination du 14 juin 2008 précité, le Quai d’Orsay reste, paradoxalement, le ministère mieux représenté au sein du conseil d’administration de la société Audiovisuel extérieur de la France.

38 () Un député (M. Jean-Marc Roubaud) et un sénateur (M. Louis Duvernois) siègent au conseil d’administration de RFI.

39 () Un député (M. Christian Kert) et un sénateur (M. Louis de Broissia) siègent également au conseil d’administration de France Télévisions.

40 () De 2002 à 2007, les financements publics français en euros courants sont passés pour :

- CFI : de 22,03 à 19,50 M€ : -11,4%

- RFI : de 120,90 à 126,16 M€ : + 4,4%

- TV5 : de 63,32 à 67,68 M€ : + 6,9%

41 () Cette considération d'ensemble du budget de l'audiovisuel extérieur serait facilitée par une fusion des deux programmes 115 et 116, déjà préconisé par la Cour à l'occasion du rapport sur l’exécution de la loi de finances 2006.

42 « par satellite en mode numérique et par câble dans la mesure où elle dispose des droits de diffusion afférents »

43 Selon la décision de la DGCCRF, le groupe TF1 contrôle 50 à 60 % du marché publicitaire télévisuel sur le territoire français, contre 10 à 20 % pour France Télévisions.

44 Plaquette de présentation de l’entreprise

45 Un tel mécanisme supposerait que l’indexation à la hausse ne couvre pas la totalité des coûts de France 24 mais par exemple 90% d’entre eux et prévoit pour les 10% restant, la encore par exemple, une part de coûts fixes et une part de coûts en baisse traduisant un effort de productivité. Il pourrait également passer par la mise en facteur de la formule globale d’indexation par exemple d’un niveau de 0 ,98% traduisant un effort de productivité global annuel de la société de 2%.

46 ☻ Soit, dans le premier cas, 23,3 M€ placés à 3% et dans le second 29,3 M€ placés à 3,5%.

47 Ce chiffre d’affaires étant en outre obtenu tardivement, avec une montée en charge de la contribution nette de la publicité de 0,6 M€ en 2008 à 3 M€ en 2009. Ces hypothèses se situent à périmètre constant en termes de zones et de langues de diffusion.

48 CNN est entièrement financée sur ressources propres, la filiale CNN international étant toutefois déficitaire ; BBC World estime ses ressources propres à deux tiers de son budget, chiffre que France 24 considère devoir corriger pour tenir compte des coûts directement pris en charge par la BBC au bénéfice de BBC World, aboutissant à un partage à parts égales entre les ressources propres et les ressources publiques.

49 tels que récapitulés au tableau de la section A du présent chapitre, soit 42,5 M€ de coûts de grille communs qu’il conviendrait de répartir à hauteur d’un tiers sur le programme en arabe dès lors que sa durée de diffusion serait égale à celle des programmes en français et en anglais et 24,2 M€ de dépenses fonctionnelles non ventilées reparties selon la même clé entre les trois programmes de la chaîne.

50 1584 heures pour les non cadres, 215 jours pour les cadres au forfait et les journalistes en cycles et forfait jours, 219 jours pour les cadres et journalistes dirigeants.

51 Ce montant inclut une enquête sur l’immigration qui s’est substituée à la quatrième vague, initialement prévue, du baromètre.

52 Ce département est distinct du département « Médias », spécialisé notamment dans les mesures d’audience

53 L’échantillon de la première enquête comprend 500 personnes dont 201 cadres d’entreprise ; 78 hauts fonctionnaires ; 75 journalistes ; 70 élus ; 51 universitaire ; 25 artistes/intellectuels

54 France ; Royaume-Uni ; Italie ; Algérie ; Sénégal

55 outre les pays cités précédemment, l’étude porte sur l’Espagne, l’Allemagne, le Maroc, la Tunisie, la Côte d’Ivoire, l’Egypte et le Gabon

56 La notoriété est dite assistée lorsque les personnes interrogées ont pu prendre appui sur une liste fournie par l’enquêteur pour citer les chaînes de télévision qu’elles connaissent et qu’elles ont regardé. Elle est dite spontanée en l’absence d’une telle liste.

57 France, Royaume-Uni, Allemagne, Australie, Brésil, Espagne, Etats-Unis, Italie, Japon, Suisse

58 C'est-à-dire fondés sur une question du type « avez-vous regardé [liste de chaînes] au cours du dernier mois.

59 Allemagne, Australie, Brésil, Espagne, Etats-Unis, Japon, France, Italie ; Royaume-Uni ; Suisse

60 Soit la valeur à l’achat d’un ordinateur à usage bureautique

61 Somera (99,9 % du capital), Europa Lisboa (82,23 %), RFI Roumanie (100 %), RFI Bulgarie (100 %), Aeriel (50 %), RFI Deutschland (100 %), RFI Beta (49 %) et Société franco-marocaine de radiodiffusion (51 %).

62 Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, article 44, IV.

63 Décret n° 82-1240 du 31 décembre 1982 modifié, article 3, 1er alinéa : « La société a pour objet de concevoir et de programmer des émissions de radiodiffusion sonore destinées à la diffusion internationale, ainsi que de produire des œuvres et documents radiophoniques destinés à la distribution internationale. Elle inclut dans ses programmes des émissions à destination de l’étranger. »

64 Décret n° 88-66 du 20 janvier 1988 portant approbation du cahier des missions et des charges de RFI.

65 A ce titre, RFI a conclu une convention avec le ministère des Affaires étrangères sur l’information des Français de l’étranger en cas de crise, dans le cadre des plans de sécurité des postes diplomatiques.

66 Washington (depuis 1990), Beyrouth (1992), Dakar (1993), Johannesburg (1996), Moscou (2002), Jérusalem (2002), Pékin (2007), Atlanta (2007), Yaounde (2007). Le bureau d’Abidjan a été suspendu depuis le décès de Jean Hélène en 2003.

67 Selon le ratio appliqué par la DRH de RFI de 1 ETP = 235 piges.

68 Anciennement RMC-Moyen Orient, rebaptisée en 2006.

69 Celle-ci diffère de la simple rediffusion – qui consiste à diffuser plusieurs fois le même programme sur une antenne – en ce que les programmes peuvent être diffusés en première écoute sur plusieurs antennes différentes, s’apparentant à un programme original et non à une réutilisation au sein d’une grille donnée.

70 La diffusion de RFI en France, sur la FM et en ondes courtes, n’est pas abordée ici.

71 La palette des langues parlées par la BBC témoigne du même poids historique : sont ainsi parlées cinq langues du sous-continent indien et de nombreuses langues vernaculaires africaines.

72 Note de la direction des études de RFI de novembre 2007.

73 RFI est ainsi la première radio écoutée à Abidjan et Yaoundé, la deuxième à Lomé, Kinshasa et Nouakchott et, la troisième à Kotonou, avec entre 19 et 39 % de part du marché de l’audience veille des pays correspondants.

74 La production radio du créole (30 minutes hebdomadaires) et du turc (une heure hebdomadaire) a été supprimée en 2006 et limitée au seul support de diffusion internet.

75 Les autres rédactions ont une page indiquant les fréquences et horaires de diffusion mais non alimentées en continu.

76 Le principal problème des ondes courtes analogiques réside dans le fait que la transmission, basée sur le principe de la réflexion des ondes sur la couche ionosphérique, est fortement dépendante de la position du soleil. Par suite, les signaux sont émis par des antennes tournantes implantées à Issoudun et Montsinéry en Guyane pour TDF et 10 autres sites, selon des fréquences qui changent au fur et à mesure de la journée, rendant nécessaire, pour les auditeurs, un changement de fréquence à chaque heure. Par ailleurs, le signal est souvent de qualité médiocre, voire interrompu en fonction de la météo. La diffusion satellitaire, au contraire, ne nécessite aucune manipulation, le satellite étant statique par rapport à la Terre.

77 La DAE est le nouveau nom de la direction de l’audiovisuel extérieur et des techniques de communication (DAETC). La DAE est une direction de la direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID) qui « assure la promotion de l’action audiovisuelle extérieure » en vertu du décret n° 98-1124 du 10 décembre 1998 portant organisation de l’administration centrale du ministère des affaires étrangères, modifié par le décret n° 2006-271 du 8 mars 2006.

78 Le décret n° 2000-1074 du 3 novembre 2000 relatif à la direction de développement des médias précise que la DDM « est placée sous l’autorité du Premier ministre et rattachée pour sa gestion au secrétariat général du Gouvernement. Elle définit et met en œuvre la politique du Gouvernement en faveur du développement et du pluralisme des médias et des sociétés de l’information. (…) Elle suit les négociations relatives aux professions concernées. (…) Elle prépare et exécute les décisions relevant de la compétence du Premier ministre et relatives à la tutelle des organismes du secteur public de la communication audiovisuelle. (…) Elle participe à l’élaboration et à la mise en œuvre de l’action audiovisuelle extérieure de la France » (article 1er).

Cependant, lors du Conseil de modernisation des politiques publiques du 4 avril 2008, il a été décidé que la DDM serait rattachée au Ministère de la culture et de la communication, dans le cadre d’une direction générale du développement des médias et de l’économie culturelle.

79 En vertu des dispositions du décret du 25 octobre 1935 instituant le contrôle financier des offices et établissements publics autonomes de l'Etat et du décret n° 55-733 du 26 mai 1955 relatif au contrôle économique et financier de l'Etat.

80 La mission interministérielle « médias » est pilotée par le MINEFI mais sa présentation politique au parlement relève du ministre de la culture et de la communication.

81 La DAE a précisé au cours de l’instruction que « compte tenu de la stagnation globale des moyens de l'audiovisuel extérieur (…) qui ne permet plus de faire face à la progression des besoins réels des différents opérateurs, le montant alloué à RFI ne résulte pas d'un calcul mais d'un arbitrage par défaut entre les besoins insuffisamment couverts des différents opérateurs, au niveau du directeur de cabinet du ministre. (…) Le rééquilibrage entre les deux sources de financement sur la période résulte de facto de la stagnation [des moyens de l’audiovisuel extérieur] et de la plus grande dynamique de la redevance. Le partage MAE/redevance n'est donc pas décidé mais résulte des possibilités respectives, année après année, de chacun des ministères, de faire face aux besoins de RFI dans un contexte contraint ».

82 Note du directeur de la DAE en date du 9 octobre 2001 : « La fixation définitive, comme le souhaite le Ministère de la Culture et de la communication, d’une clé de répartition entre les deux administrations (60/40) ne résoudrait en rien les problèmes budgétaires que rencontre le MAE avec RFI. N’ayant, pour l’essentiel, aucun contrôle sur les dérives de charges structurelles de l’entreprise [notamment liées à la convention collective de l’audiovisuel public], le MAE se verrait simplement invité chaque année à en assumer 60 %, sans aucun lien avec l’évolution de ses propres dotations budgétaires ».

83 Le rapport général n° 78 (2006-2007) de M. Claude BELOT, fait au nom de la commission des finances, sur le PLF pour 2007 : Médias - compte spécial avances à l'audiovisuel public souligne que « le double financement de RFI par la redevance audiovisuelle et le ministère des affaires étrangères est une source d'insécurité financière : jusqu'en 2006 inclus, le MAE a justifié la faible augmentation des subventions de RFI par le dynamisme des ressources issues de la redevance audiovisuelle. Il semble que, dans le présent projet de loi de finances, la direction du développement des médias des services du Premier ministre ait choisi que la redevance audiovisuelle ne prenne plus en charge, à elle seule, la majeure partie de la progression du budget de RFI. Or la dotation de RFI provenant du MAE a pour la première fois diminué de 3,2 %, ce qui entraîne une baisse exceptionnelle des ressources publiques allouées à RFI de 1,2 %. »

84 Jusqu’à la mise en œuvre de la LOLF, la subvention du ministère des Affaires étrangères à RFI était comptabilisée sur le chapitre 42-14, article 10 « Subvention aux opérateurs de l’action audiovisuelle extérieure ».

85 M. Jean-Paul Cluzel a été nommé par le CSA à la présidence de RFI pour un premier mandat de trois ans le 2 décembre 1995. Il sera reconduit pour trois ans le 1er décembre 1998 puis, pour un mandat de cinq ans, le 28 novembre 2001. M. Antoine Schwarz a été nommé en 2004 par le CSA à la présidence de RFI pour un mandat de cinq ans expirant le 2 juin 2008.

86 La seule marge de choix offerte au CSA par l’article 47-3 de la loi du 30 septembre 1986 consiste à choisir lequel des représentants de l’Etat au sein du CA il souhaite nommer. Le choix est théorique dans la mesure où trois de ces quatre représentants exercent déjà des fonctions au sein de l’administration.

87 En vertu de l’article 3 du décret n° 2007-93 du 25 janvier 2007 modifiant le décret n° 94-582 du 12 juillet 1994 relatif aux conseils et aux dirigeants des établissements publics et entreprises du secteur public.

88 Cette observation s’ajoute aux critiques formulées par la Cour sur les procédures de nomination de droit commun dans le secteur audiovisuel public, notamment dans son rapport n° 2007-537.

89 Projet de COM 2006-2008 présenté en juin 2005.

90 L’audience « veille » désigne le nombre de personnes de plus de quinze ans ayant écouté RFI la veille du sondage et correspond donc à une audience quasi-quotidienne.

91 Rapport d’audit de Radio France Internationale n° 2003-M-070-01 de l’Inspection générale des finances, décembre 2003.

92 Les estimations d’audience des rédactions en lao et en turc ne sont pas renseignées.

93 L’audience régulière correspond au nombre de personnes de plus de quinze ans ayant écouté la radio dans la semaine précédent le sondage, soit une mesure de l’audience hebdomadaire.

94 Le CA de RFI est actuellement composé de M. Antoine Schwarz (président), MM. Jean-Marc Roubaud (député) et Louis Duvernois (sénateur), MM. Francis Balle, Pascal Chaignau, Mabousso Thiam et Mme Anne Coutard en tant que personnalités qualifiées nommées par le CSA et deux représentants du personnel. Les représentants de l’Etat sont M. Richard Boidin (DAE), Mme Emmanuel Bensimon (DDM) et M. Laurent Garnier (DB). Le contrôleur général économique et financier ainsi que trois représentants du Comité d’entreprise assistent par ailleurs aux séances du CA.

95 Le nouveau progiciel comptable (AGRESSO) a été mis en place après deux ans de travaux préparatoires (études préalables en 2002, cahier des charges et développements en 2003) pour un coût total de 1,27 M d’euros.

96 Le Comité d’audit est une préconisation de la Charte des relations avec les entreprises publiques élaborée par l’agence des participations de l’Etat en 2005.

97 La DDM a précisé au cours de l’instruction à propos de l’organisation interne de la société que « la direction de l’entreprise elle-même évoque souvent les difficultés qu’elle a à mettre en œuvre des réformes ou des changements en raison d’une sorte de « cogestion » régnant à RFI (accord nécessaire des syndicats sur tout type de décision) ».

98 Le seul document transmis est une attestation confirmant que l’entretien s’est tenu.

99 Quoiqu’il en soit, le montant maximum de la prime (1067,14 euros bruts) n’est pas incitatif.

100 La procédure prévue par les L. 434-6 et L.432-5 du code du travail permet aux membres du CE de mandater un cabinet d’audit dont les travaux sont financés sur le budget de la société.

101 Est ainsi inséré, dans la loi de 1986, un article 53-1, ainsi rédigé : « I. - Des contrats d’objectifs et de moyens sont conclus entre l’Etat et chacune des sociétés France Télévision, Réseau France Outre-mer, Radio France et Radio France Internationale, ainsi que la société ARTE-France et l’Institut national de l’audiovisuel. La durée de ces contrats est comprise entre trois et cinq années civiles. »

102 Note du directeur de la DAETC au ministre des affaires étrangères en date du 2 janvier 2002.

103 Note du directeur de la DDM au directeur de cabinet du ministre de la culture et de la communication en date du 10 janvier 2003.

104 Lettre des directeurs de la DDM, de la DAETC et du sous-directeur du budget adressée au PDG de RFI en date du 14 mai 2003.

105 Note du directeur de la DDM au directeur de cabinet du ministre de la culture et de la communication en date du 12 juin 2003 et note du directeur de la DGCID au directeur de cabinet du ministre des affaires étrangères en date du 16 juin 2003.

106 Lettre des directeurs de la DDM, de la DAETC et du sous-directeur du budget adressée au PDG de RFI en date du 14 mai 2003.

107 Le taux de 2,7 % suppose un rebasage préalable en LFI de 5,5 M€ de la subvention de l’Etat pour intégrer les financements accordés en loi de finances rectificative (report de l’excédent de l’exercice 2000 lui-même lié au financement en LFR 2000). En réalité, « l’augmentation de l’effort financier demandé aux pouvoirs publics est de 3,5 % par an en moyenne sur la période 2002-2006 » selon les calculs de la DDM (note sur le COM en date du 23 janvier 202).

108 Note du PDG de RFI aux tutelles sur « le financement du COM de RFI et le budget 2002 » en date du 30 novembre 2001.

109 Note interne de novembre 2001.

110 Note au directeur de cabinet du ministre de l’économie et des finances en date du 6 novembre 2001

111 Note du directeur de la DAETC au directeur de cabinet du ministre délégué à la coopération et à la francophonie en date du 23 décembre 2002 : « le ministère considère que la création de nouvelles langues de diffusion de RFI est absolument indispensable pour permettre à RFI de faire face aux nouveaux enjeux internationaux. Le MAE maintient que seule la fermeture de langues étrangères, devenues peu utiles, telles que le polonais voire l’allemand, pourra permettre, dans un contexte de fortes contrainte budgétaire, la création d’autres langues prioritaires. (…) La fermeture des rédactions étrangères aura même un coût, au début de la procédure, avant d’induire des économies. Cette inertie structurelle est, à terme, la plus vive menace qui pèse sur l’avenir de RFI ».

112 Lettre citée dans la note du 16 octobre 2001.

113 Note de compte rendu (en date du 8 janvier 2003) du Conseiller technique du cabinet du ministre délégué à la coopération et à la francophonie adressée au directeur de cabinet du ministre.

114 Note du directeur de la DDM au directeur de cabinet du ministre de la culture et de la communication en date du 13 mars 2003.

115 Cf. courriel de Laurence Auer au DAETC et DGCID en date du 24 juin 2003.

116 « L’immobilisme n’est pas sans conséquence. (…) Il faut donc renforcer notre dispositif dans des langues essentielles comme l’arabe ou le chinois, créer de nouvelles langues, notamment en Afrique et en Asie centrale, et passer à une vitesse supérieure pour l’Internet dans un maximum de langues étrangères. Pour financer, au moins en partie, cette adaptation aux besoins d’aujourd’hui, il n’est d’autre moyen que de redéployer significativement notre dispositif actuel de langues étrangères, encore aujourd’hui hérité de la guerre froide. Force est donc d’envisager la possibilité de fermer un certain nombre de langues existantes. Je souhaite donc sur ces bases recevoir mandat du gouvernement pour préparer au cours des mois à venir un plan de modernisation du dispositif linguistique de RFI. »

117 Courriel du directeur de la DAETC au directeur de cabinet du ministre et au directeur de la DGCID en date du 23 juin 2004.

118 Courriel de compte-rendu rédigé par le directeur de la DDM en date du 19 août 2004.

119 Note du directeur de la DDM au directeur adjoint du cabinet du ministre de la culture et de la communication en date du 17 novembre 2004 : « [les propositions de la note du 28 juillet 2004] sont en grande partie fondées sur les conclusions du rapport d’audit de RFI réalisé courant 2003 par l’IGF. Ces conclusions validaient, au demeurant, des pistes d’évolution qui avaient été envisagées dès 2001 lors de premières discussions entre les administrations de tutelle et la précédente présidence de la société  ».

120 Note de compte-rendu de la direction du budget (non datée).

121 « L’ensemble des projets évoqués comportent de nombreuses et lourdes implications en terme de gestion d’entreprise, (…) il va de soi que la Direction de RFI ne se sent pas autorisée à aller plus loin dans la voie proposée sans un accord de ses autorités de tutelles ».

122 Courriel du directeur de la DAETC au directeur de cabinet du ministre et au directeur de la DGCID en date du 23 juin 2004.

123 Courriel de compte-rendu rédigé par le directeur de la DDM en date du 19 août 2004.

124 Courriel du directeur de la DDM en date du 19 août 2004 : « Pour dissiper ces interrogations, la DATC et la DDM ont insisté sur la nécessité d’ouvrir simultanément et d’articuler fortement 4 chantiers : celui de la préparation du budget 2005, le chantier stratégique (langues, zones géographiques, modes de diffusion, contenus) qui est nécessaire, doit être articulé avec la mise en chantier d’un plan d’économies, de redéploiements et de synergies qui doit être immédiatement engagé et qui devra s’appliquer dès 2005 ; enfin, l’utilisation des gains de productivité doit être étudiée dans le cadre d’un chantier ressources humaines : la formule plan social est à proscrire, de nombreuses autres formules (utilisation des départs naturels, plan de formation, départs volontaires…) pouvant être mobilisées. Ces quatre chantiers auront vocation à converger dans le cadre d’un contrat d’objectifs et de moyens, dont l’élaboration et la conclusion doit demeurer un objectif pour l’entreprise, conformément à la loi. »

125 Cette dernière contrainte implique, juridiquement, de ne pas procéder à plus de neuf licenciements (article L.321-4-1 du code du travail)et, politiquement, limite de fait la possibilité de recourir aux licenciements économiques y compris pour un nombre de salariés inférieurs à neuf. Le plan de sauvegarde de l’emploi remplace dans le droit du travail l’ancien plan social en vertu de la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002.

126 Courriel de compte-rendu rédigé par le directeur de la DDM en date du 19 août 2004.

127 Note du directeur de la DAETC au directeur de la DGCID en date du 9 janvier 2006 : « Sur les questions concernant la masse salariale et les économies que doit trouver RFI, le rapport de l’IGF d’avril 2004, qui estime possible une baisse de plus de 70 ETP liée à la numérisation, reste pour les trois tutelles la référence fondamentale pour l’adoption d’un COM. Or Antoine Schwarz n’a jamais reçu l’autorisation de mettre en place un plan social, qui est le corollaire inéluctable. En effet, la marge de manoeuvre pour réduire significativement la masse salariale ne réside qu’illusoirement dans la réduction des CDD, dont une grande partie sont en fait de faux CDD, présents dans l’entreprise depuis de longues années et pouvant demander une intégration de fait. Des lors l’exercice d’élaboration d’un COM est extrêmement difficile, sauf à ce que le gouvernement assume explicitement la perspective d’un plan social à RFI ».

128 Le rapport Brochand de préfiguration de la CII remis au premier ministre le 22 septembre 2003 prévoit un rattachement de RFI à Radio France afin de réaffecter ses ressources à la nouvelle chaîne. Le premier ministre annonce le 9 décembre 2004 le lancement de la chaîne internationale pour 2005. Les statuts de la CII sont publiés au J.O. le 27 septembre 2005 et France 24 est officiellement lancée le 6 décembre 2006.

129 Les déclarations très polémiques de M. Alain Ménargues à l’égard de l’Etat d’Israël sur le LCI le 30 septembre 2004 dans le cadre de la promotion de son livre « Le mur de Sharon » ont amené le président de RFI à demander sa démission annoncée le 18 octobre 2004.

130 Voir CE extraordinaire du 14 octobre 2004 notamment.

131 Le préavis déposé par la CFDT, CGC, FO et SNJ-CGT, toutes catégories professionnelles confondues, porte sur « les menaces résultant du projet d’entreprise sur l’emploi, sur l’existence des langues à RFI et sur la non prise en compte de la promesse de verser une prime de 850€ aux PTA ».

132 Votée à 94,9 % par les 541 votants de l’assemblée générale qui s’est réunie le 18 novembre.

133 Note du directeur général de l’APE au ministre de l’économie et des finances en date du 12 décembre 2005 sur le projet de COM : « le projet s’apparente plus à une fuite en avant qu’à un véritable projet d’entreprise, alors qu’aucun effort d’économies significatif n’est envisagé par le management (…) pour contribuer au financement des développements proposés. Cette appréciation est partagée par les autres administrations de tutelle, qui ont suspendu les négociations sur le COM dans l’attente d’une meilleure visibilité. »

134 Courriel du directeur de la DAETC au directeur de la DGCID et au directeur de cabinet du ministre des affaires étrangères en date du 17 décembre 2004 : « la présidence de RFI a reculé sur tous les sujets qu’elle avait pourtant elle-même posés sur la table. C’est donc une présidence faible qui va devoir à l’avenir négocier le plan d’entreprise. Dans ces conditions, il nous faut absolument refuser d’être instrumentalisés dans le tri des langues de diffusion ; la sollicitation de nos postes n’est pas une bonne idée. En effet, le personnel de RFI pense, et ils l’ont répété vivement lors du CA de ce matin, que c’est le Département qui demande formellement la suppression de certaines langues ».

135 Intervention du président au CE du 31 mai 2005 : « Quels seront les critères que nous allons utiliser pour dessiner l’avenir de chaque rédaction en langue ? (…) Le plus important, c’est le critère géopolitique dont le prescripteur est notamment le ministère des affaires étrangères (…). Cette entreprise est détenue par l’Etat, nous sommes au service de l’Etat. Nous sommes totalement indépendants sur les contenus que nous diffusons. C’est autre chose, ce n’est pas la même notion de l’indépendance mais, sur le plus économique, nous sommes une société d’Etat, l’Etat a le droit de nous prescrire des missions sous le contrôle du parlement ».

136 Intervention du représentant du ministère des affaires étrangères sur l’étude sur les langues  au cours du CA du 3 juin 2005 : « Ce n’est pas une réforme, c’est préparer l’avenir pour que RFI soit dans de meilleurs postures en fonction des zones, en fonction des langues, c’est quelque chose qui est fondamental, c’est un projet d’entreprise. On appelle cela contrat d’objectifs et de moyens, tant mieux parce que cela nous sécurise, nous, fonctionnaires, mais c’est un projet d’entreprise (…). L’Etat doit, à un moment ou à un autre, et non le ministère des affaires étrangères, prendre ses responsabilité, c’est-à-dire nos autorités, et être interrogé comme il se doit par l’entreprise sur sa vision des choses. D’un autre côté, je le répète, RFI n’est pas une direction de l’Etat, RFI est une entreprise en soi et donc, c’est un processus de partenariat où chacun doit assumer ses responsabilités ». Lors du CA du 28 octobre 2005 sur la réforme des langues : « des zones entières en Afrique ne sont pas couvertes et il faudrait les couvrir dans les langues vernaculaires. Je ne dis pas qu’il faut le faire. Je n’impose rien, je participe à la réflexion collective (…).  Encore une fois, c’est un effort collectif de l’entreprise et nous le soutenons. Nous ne prenons pas parti pour juger le choix des langues diffusées. Ce serait totalement déplacé. D’autant que l’intérêt de l’entreprise va bien au-delà. Il y a des auditeurs, des consommateurs sur place, et le poste. Il faut le faire en concertation la plus large possible ».

137 Note au ministre de la culture et de la communication en date du 26 octobre 2005.

138 Une première tentative de lettre de cadrage, au moment même de la nomination du président Schwarz, avait été initiée par la DDM qui trouvait utile « de formaliser les orientations stratégiques que les administrations de tutelle souhaiteraient voir mises en place par le nouveau président de RFI ». L’idée était « d’adresser par exemple une feuille de route  à M. Schwarz sur la base des propositions de l’audit réalisé par l’IGF » (note du DDM au directeur de cabinet adjoint du MCC). L’opposition du ministère des affaires étrangères semble ne pas avoir permis de faire aboutir ce projet sans que les motifs aient pu être explicités (courriel interne à la DDM en date du 15 juin 2004 précisant « après un échange avec le MAE, il apparaît que le cabinet de Michel Barnier ne souhaiterait plus adresser de feuille de route »).

139 Selon une note conjointe du directeur du budget et du directeur général de l’APE aux ministres en date du 20 février 2007, « la formule introduite aurait pour conséquence une augmentation automatique de près de 4,0 % (contre 2,2 % sur la période 2002-2006) en moyenne annuelle de la ressource publique issue de la redevance audiovisuelle » .

140 L’article précise que « des contrats d’objectifs et de moyens sont conclus entre l’État et chacune des sociétés France Télévision, Réseau France Outre-mer, Radio France et Radio France Internationale, ainsi que la société ARTE-France et l’Institut national de l’audiovisuel  ».

141 La DDM a précisé au cours de l’instruction que « les négociations engagées en 2006 et 2007 sur le COM ont été retardées en raison de la situation difficile de la société. Toutefois, ces négociations ont repris en novembre 2007. Ce contrat devra permettre à RFI :

- de préciser et recentrer ses missions pour s’adapter aux attentes de publics beaucoup plus exigeants dans le contexte d’une offre médiatique démultipliée. Ainsi, parmi les grands axes du COM figureront la définition de zones prioritaires de diffusion sur lesquelles RFI devra concentrer ses efforts, une réorganisation de son dispositif en langues étrangères avec notamment le développement de son offre sur Internet, l’harmonisation de la ligne éditoriale de ses antennes ;

- d’assainir sa situation sociale et financière – via la modernisation de sa gestion et l’amélioration de son efficacité économique notamment ;

- de trouver sa place dans le dispositif audiovisuel public extérieur réformé. »

142 Il convient toutefois d’interpréter ces chiffres avec prudence. En effet, les origines géographiques des connexions sont estimées à partir des adresses IP, qui peuvent ne pas refléter la localisation géographique de l'internaute. Par ailleurs, 1,7 % des visites ont une origine indéterminée.

143 CA du 6 novembre 2003

144 La Chaîne française d’information internationale fait l’objet d’un programme séparé (n° 116) au sein de la mission médias dont le DDM est responsable.

145 Parts cumulées de TV5, CFI et France 24, hors subvention versée à la nouvelle chaîne de télévision Medi1-Sat filiale de la CIIRT.

146 Calculé dans le cadre des travaux de la Commission interministérielle d’audit salarial du secteur public (CIASP), elle ne couvre que les ETP relevant des conventions collectives de l’audiovisuel public et des journalistes soit 966,66 sur 1 135,19 ETP (85,15 % des effectifs).

147 Une quarantaine d’accords d’entreprise a été signé de 2000 à 2007 entre la direction et les organisations syndicales de RFI.

148 Le NIS est issu de l’accord de fin de grève signé en 2004 à RFI comme à Radio France, il prévoit un complément de prime annuelle calculé sur la base du traitement et de l’ancienneté.

149 Pour tenir compte des recrutements réalisés en 2000 au titre des 35h, il convient de prendre en compte l’évolution des effectifs de 1999 à 2002 (les chiffres indiqués ici représentant les effectifs au 31/12).

150 Protocole additionnel à la convention collective de la communication et de la production audiovisuelles (Tome III) qui ouvre la possibilité de recruter des agents hors grille salariale.

151 A ces deux éléments s’ajoute l’arrêt de la diffusion de Africa n° 1 qui a dégagé une économie de 1,37 M€, suite à la cession des titres détenus par Sofréa (filiale de la Sofirad) dans Africa n° 1 pour un montant de 450 MF CFA (0,7 M€) à une société gabonaise (N’Koussou Productions) en août 2006.

152 Unité de diffusion en ondes courtes : le signal étant envoyé vers le ciel et reflété par les couches ionosphériques, l’orientation de l’antenne et la fréquence de réception sont modifiées chaque heure en fonction de la position du soleil afin d’atteindre la zone cible.

153 Le volume d’heures fréquences diffusées par RFI est ainsi passé de 493 heures en 1993 à 198 heures fréquences en 2004, dont 166 à TDF et 32 à d’autres diffuseurs internationaux.

154 Le contrat comportait en réalité trois durées distinctes : 2011 pour les émissions, 2014 pour les pénalités et 2016 pour le remboursement d'emprunt

155 Voir notamment la directive 2002/77/CE du 16 septembre 2002 relative à la concurrence dans les marchés de réseaux et de services de communications électroniques.

156 Loi n° 2003-1365 du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Télécom.

157 Voir notamment la plainte déposée le 25 juillet 2003 au conseil de la concurrence par la société Towercast, filiale à 100 % du groupe radiophonique NRJ Groupe (premier diffuseur français privé de radios FM), contre TDF au motif que le contrat liant Radio France à TDF avait pour effet d’empêcher le libre jeu de la concurrence. La plainte a donné lieu à une injonction dudit conseil à TDF de « proposer, en concurrence avec tout autre opérateur, à toute société nationale de programmes qui en ferait la demande de nouvelles offres de diffusion » confirmée par l’arrêt du 8 janvier 2004 de la Cour d’Appel de Paris.

158 Un projet d’assignation en référé a même été préparé en décembre 2005, avant d’être abandonné suite à la relance des négociations.

159 Sur les 6,5 M€ de 2000, 5,8 M€ correspondaient à un complément de redevance destinés à financer les 35h et la réduction des disparités salariale et 0,69 M€ à un complément de subvention du MAE pour financer l’émetteur de Chypre. En 2001, les 1,5 M€ constituent un complément de redevance. En 2002, les 0,41 M€ complète le financement de l’émetteur de Chypre par le MAE.

160 Au cours de la période :
- le rythme de versement de la redevance a été modifié par la loi de finances du 30 décembre 2004, passant de huit versements par mois à un versement mensuel ;
- le délai de versement de la subvention du ministère des Affaires étrangères a été réduit par la mise ne place de procédures informatisées à partir de 2005.

161 Au plus tard à la clôture du deuxième exercice suivant celui au cours duquel la constatation des pertes est intervenue.

162 CA 19 juin 2001, 1er octobre 2002, 30 juin 2003, 23 juin 2004, 3 juin 2005, 13 juin 2006 et 20 juin 2007.

163 La société éditait déjà des budgets fonctionnels par service en 2000. La répartition des dépenses a néanmoins été affinée selon trois critères : les codes affaires, les codes produits (par programmes et par studio) et les codes régions.

164 Comptabilisées sur le compte 628 et identifiées par sous-comptes

165 La retransmission en mode numérique n’est actuellement possible que par l’intermédiaire de satellites. La diffusion terrestre par des émetteurs numériques pourrait intervenir en 2008, le gouvernement ayant récemment arrêté le format de compression (T-DBM standard européen). L’équivalent radio de la TNT sera diffusée sur la bande de fréquence III (actuellement empruntée par Canal+ pour sa diffusion en mode analogique) ce qui permettra de se substituer à la FM proche de la saturation, garantira un son de qualité et permettra de proposer des contenus multimédias.

166 Avec le rejet par le CHSCT (28/11/03) et le CE (19/12/03) de la nouvelle organisation du travail proposée par la direction de RFI suivi d’un appel du syndicat majoritaire des techniciens à ne pas répondre à l’appel à candidature pour les premiers postes de TCR à pourvoir à la rédaction en français lancé par la direction en mai 2004 (voir infra).

167 Chaque tranche prévoit les mêmes prestations (au nombre de sept) avec des quantités minimales et maximales variables et des prix unitaires différents, certains étant modifiés de manière manuscrite avec paraphe des signataires du contrat. Le coût minimal et maximal par prestation n’est pas calculé dans le contrat. Il est respectivement de 346 507 et 470 668 € pour la tranche 1, de 354 562 à 644 898 € pour la tranche 2 et de 435 233 à 699 437 € pour la tranche 3. Le montant total du marché est donc de 1 136 302 à 1 815 003 euros hors taxes.

168 Code du commerce, article L.110-4.

169 Rapport annuel 2006 de la mission de contrôle général économique et financier « Audiovisuel public », page 179.

170 En plus des blocages générés par le logiciel, les retards de déploiement ont contraint les techniciens de RFI à travailler simultanément sur des outils numériques de production et analogique de diffusion multipliant des opérations de transferts et de copies de fichiers informatiques sur bandes magnétiques.

171 Le montant total des dépenses d’équipement et prestations relatives à la numérisation de la production s’élève à 4 440 016 euros.

172 En réponse au précédent contrôle de la Cour, M. Cluzel avait indiqué le 14 novembre 2000 : « Le deuxième volet concerne la numérisation de la production elle-même. Son rythme de réalisation a été lui aussi volontairement décalé en raison de ses conséquences importantes sur les métiers des journalistes, techniciens et chargés de réalisation, mais aussi de la volonté de la direction de procéder à un réexamen de l’organisation du travail afin de tirer profit des changements technologiques (…). L’expérience d’autres radios ou télévisions de service public, où la numérisation ne s’est traduite jusqu’à présent par aucun gain substantiel, voire par un accroissement des charges, montre que seule une telle réorganisation du travail, menée parallèlement à la numérisation, peut permettre de réaliser à terme les gains de productivité nécessaires à la régionalisation des programmes et la montée en puissance du site Internet ».

173 Ce verrou a été supprimé par la suite sans que cette décision s’accompagne d’une réflexion sur l’évolution du métier de journaliste dans le cadre de la numérisation.

174 Les assistants d’édition assistent les journalistes ou les producteurs dans la production des émissions en veillant à la coordination des éléments nécessaires au passage à l’antenne et en réalisant des recherches (invités, documentation).

175 Le Président directeur général de RFI avait proposé aux tutelles, au mois de juillet 2004, la mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi dans une note restée sans réponse (voir supra).

176 Le premier déposé par FO le 27 février 2004 et le dernier par la CGT le 1er avril 2004. Le taux de gréviste était selon les jours de 7 à 30 % parmi les techniciens et les chargés de réalisation avec trois jours de grève à plus de 30 %.

177 Le syndicat FO majoritaire au sein des personnels techniques de RFI a refusé de signer l’accord.

178 RFI a précisé à la Cour que « lors du mouvement de grève PTA lié à la numérisation (en mars 2004), M. Jean-paul Cluzel s’engage à verser au personnel PTA la prime de 850 euros sous réserve de la signature de l’accord cadre numérique. Cet engagement, confirmé par P. Cavelier [DRH], a été pris devant la CFDT qui en a fait état lors des réunions de négociations sur le numérique. (…) A la demande de P. Cavelier une réunion a lieu le 14 mai 2004 avec les représentants du personnel PTA relative aux modalités de versement de cette prime. » La prime a finalement été versée en deux fois (décembre 2004 et janvier 2005) pour un coût total 1 125 850 euros.

179 Le mouvement de grève des journalistes de RFI au mois de février 2004 avait eu pour objectif d’obtenir les mêmes avantages salariaux que ceux accordés aux journalistes de Radio France en décembre 2003.

180 Il faut en effet ajouter aux 1,9ETP supplémentaires induits par l’expérimentation de la fonction TCR aux services Afrique et Sport, la création de 10 postes dits GPN qui assurent une assistance 24/24h aux usagers et assurent un suivi de l’exploitation et des accidents, l’encadrement des TCR et servent de relais de la DTSI. La création des postes GPN avait été anticipée contrairement à celle des assistants d’édition.

181 Peu après la création du « poste colonial » le 6 mai 1931 au cours de l’exposition universelle de Paris, sont diffusées les premières émissions en anglais et en espagnol. Début 1940, la station émet en 20 langues (installées dans les sous-sols du ministère des transmissions) : anglais, allemand, arabe, bulgare, danois, espagnol, grec, italien, japonais, néerlandais, norvégien, polonais, portugais, roumain, russe, serbo-croate, slovaque, suédois, tchèque et turc. Fin 1945, la station intégrée dans la RTF n’émet plus en russe et turc mais ajoute le hongrois et le slovène et, en 1946, le finnois. En 1947 sont supprimées les rédactions en slovène, suédois, norvégien, danois, serbo-croate, bulgare et roumain. Les trois dernières sont rétablies en 1949 mais le néerlandais et l’italien abandonnés, ainsi que le finnois en 1954. En 1958 est lancée une émission en yiddish puis en russe à partir de 1960. Le bulgare et le portugais sont à nouveau supprimés en 1969. Parallèlement, des émissions en langues pour les travailleurs immigrés vivant en France financées par le ministère du travail sont créées : espagnol, italien et portugais (1966), arabe et serbo-croate (1972), turc (1974), africains francophones (1975), cambodgien, laotien et vietnamien (1976). En 1972, les missions en arabe de l’ORTF sont transférées à la SOMERA. Suite à l’éclatement de l’ORTF, 14 des 17 rédactions en langues sont supprimées et, à la naissance de RFI, les reprises des émissions d’autres stations de Radio France représentent 50 % des programmes.

182 Dès 1982, le plan de développement quinquennal 1982-1987 proposait la création de rédactions en haoussa, swahili et amharique. Celui-ci n’a toutefois jamais été mis en œuvre sur ce point.

183 La Voice of America (VOA) compte aujourd’hui 44 langues, la BBC 33 langues (après la suppression, récente, de 8 langues européennes) et la Deutsche Welle 30 langues.

184 Une analyse similaire a été réalisée sur les rédactions européennes de la BBC dans le Government Green paper on future of BBC (2 mars 2005), selon laquelle la promotion des droits de l’Homme, de la démocratie et de la liberté d’expression qui a motivé la création des rédactions dans 16 langues des pays d’ex-Union soviétique et du bloc socialiste doit aujourd’hui s’orienter plus à l’Est et au Sud.

185 La dernière estimation globale sur l’audience de RFI dans le monde remontait à 1994.

186 Un précédent rapport des inspections générales des finances et des affaires étrangères avait déjà conclu en 1994 à l’éparpillement préjudiciable des moyens de RFI et suggéré la suppression des rédactions créole et albanaise, mais sans provoquer le changement de perspective opéré en 2003.

187 Le rapport indique ainsi : « La politique globale d’émissions en langues de RFI est à revoir ; cela passe par la régionalisation des antennes, mais aussi par le développement d’un volume pertinent d’émissions là où l’audience potentielle existe (…). RFI ne trouvera pas les moyens de développer les rédactions utiles sans réduire l’éparpillement, déjà signalé par l’IGF en 1994, entre de nombreuses rédactions à audience confidentielle ».

188 La même année, l’interruption pendant quatre semaines de la diffusion de RFI en Pologne suite à un incident technique n’a provoqué de réaction ni du public, ni du poste diplomatique.

189 Les études qualitatives réalisées par RFI ont ainsi fait ressortir, s’agissant de la rédaction en langues slaves du sud, le caractère « décalé » du vocabulaire utilisé qui, selon certains auditeurs, n’aurait pas pris acte du fait « que la guerre était finie » depuis 1995.

190 Les nominations successives de personnes non arabophones à la présidence de RMC-MO en est l’exemple le plus frappant. De fait, alors que la tenue de propos jugés partiaux par M. Ménargues en 2004 a entraîné une réponse immédiate de la direction de RFI, aucune réaction n’a jamais pu être exprimée sur les contenus en langues étrangères, en l’absence de traduction régulière des programmes.

191 On trouvera en annexe 2 une chronologie détaillée du déroulement des trois réformes.

192 L’intitulé du projet pourrait paraître ambigu mais révèle en fait le sens de la réforme. Il s’agit bien en effet d’une régionalisation des rédactions – c’est-à-dire de la production – mais selon les publics ciblés. Ce projet se distingue donc des réformes envisagées par la suite, consistant à dissocier la production – organisés par zones géographiques selon les sujets traités – et les antennes, organisées selon les publics.

193 « [Les] développements en langues étrangères passent par les orientations suivantes :

- renforcement des moyens de ces deux langues essentielles que sont l’arabe et le chinois (avec pour ce dernier l’ajout souhaitable du cantonais) ;

- amélioration des sites Internet dans les langues où RFI bénéficie de bonnes positions (vietnamien, persan, espagnol et brésilien ;

- création de nouvelles émissions en langues étrangères sur des niches adaptées aux priorités de la France : swahili et haoussa pour l’Afrique ainsi que langues locales africaines comme le wolof (Sénégal), le mandingue (Mali notamment) et le lingala (bassin du Congo), vraisemblablement par le moyen de traductions et transpositions de nos émissions en français réalisées sur place ;

- création de langues « de niche » dans des zones importantes pour l’influence française et européenne, comme l’Afghanistan (dari et pachtou) et le Caucase (azeri, arménien) à partir de production existantes de la DW avec laquelle notre coopération éditoriale serait renforcée au cas par cas, en fonction de la cohérence de nos objectifs diplomatiques ;

- enfin, fermeture, avec les nécessaires mesures sociales d’accompagnement de langues devenues obsolètes ou dont le potentiel est insuffisant : polonais, serbo-croate, albanais, et même peut-être le lao ».

194 Cette réforme diffère donc quelque peu de la réforme envisagée mais non mise en œuvre par son prédécesseur, qui incluait au contraire la production et l’antenne au sein de chaque « chaîne » régionale.

195 Après la création des postes de directeurs des antennes présentée au comité d’entreprise du 10 octobre 2005, la réorganisation des antennes a fait l’objet de deux informations aux comités des 10 et 12 octobre 2006 et d’une consultation au comité du 19 octobre 2006. La création de l’antenne multimédia a quant à elle fait l’objet de quatre passages devant le CHSCT, de trois informations du comité d’entreprise lors des séances du 27 novembre 2006, du 14 décembre 2006 et du 1er février 2007, et d’une consultation le 22 février 2007. Le projet RFIL a quant à lui fait l’objet de questions lors de la séance du 31 mai 2005 et d’une information le 27 septembre 2007.

196 6 votes contre et 6 abstentions pour la réorganisation des antennes, 0 votes contre et 8 abstentions pour la création de l’antenne multimédia.

197 Equipe composée de quinze journalistes et d’un volume moyen de 2 piges par jour de 4500 à 6000 signes, soit l’équivalent de 9 à 12 piges radios (de 1000 signes en moyennes).

198 Titre, résumé, auteur, type (desk, correspondants), nature (sons, enrobés, interview), région, pays, thème.

199 Versement d’un plancher forfaitaire de droits d’auteur fixé à 100€ par an (au prorata du temps passé à RFI pour les pigistes), versement d’une rémunération variable assise sur les recettes publicitaires au-delà du plancher et, en cas de recettes commerciales (ventes sur mobile par exemple), le reversement d’une part des recettes.

200 Conseil d’administration du 3 octobre 2006 : « J’avoue que je m’interroge, peut-être mon propos pourra-t-il choquer certains d’entre vous, sur la mission au sens du service public que vous décrivez avec beaucoup de conviction sur l’Europe. Il y a certes un créneau pour une radio plus européenne, plus centrée sur l’Europe au service des Européens. Cependant, aujourd’hui, cela rentre-t-il dans le contexte d’une mission de service public d’une radio comme RFI ? (…). En effet, le contexte financier de l’Etat au sens large est extrêmement restreint, serré. Nous devons nous interroger sur la réalité des missions de service public (…). De la même manière, j’ai un peu tiqué sur la mission dite de soutien à la diversité culturelle, sans déformer les propos du rapport. S’agissant de la langue portugaise, le soutien à la lusophonie, le Portugal est aussi un pays européen. Est-ce vraiment le rôle de RFI d’aller défendre la langue portugaise spécifiquement ? »

201 et, plus précisément, d’une clé de répartition dite des 9° : 6/9° pour la France et 1/9° pour chaque Etat partenaire (Belgique, Suisse et Canada).

202 Frais spécifiques non gérés par TV5 Monde compris.

203 Il s'agit du nombre de personnes ayant regardé TV5 Monde au moins une minute pendant la semaine.

204 Le projet de chaîne française d’information internationale, sur le point d’aboutir en 1997, prévoyait une fusion de TV5, CFI et RFI. Il a en définitive été abandonné au profit du renforcement de l’information sur TV5. Le 12 février 2002, le Président de la République a relancé le projet en déclarant publiquement: « Est-il compréhensible qu’année après année, nous en soyons encore à déplorer les insuffisances persistantes de l’information et de l’audiovisuel francophone sur la scène mondiale ? Certes, nous disposons avec l’agence France-Presse d’un remarquable outil d’information qu’il nous faut conforter sans cesse, notamment dans sa vocation mondiale. Certes, chacun s’entend à reconnaître les progrès récents accomplis par RFI, par TV5, par CFI, grâce aux efforts de leurs équipes et à la détermination des pouvoirs publics. Mais chacun constate que nous sommes encore loin de disposer d’une grande chaîne d’information internationale en français, capable de rivaliser avec la BBC ou CNN. Et les crises récentes ont montré le handicap que subissent un pays, une aire culturelle, qui ne disposent pas d’un poids suffisant dans la bataille de l’image et des ondes. Interrogeons-nous, à l’heure des réseaux hertziens, du satellite, de l’internet, sur notre organisation dans ce domaine et notamment sur l’éparpillement des moyens publics qui lui sont consacrés. »

205 JOOST est un service de distribution de programmes télévisés sur Internet.

206 L’évaluation des provisions relève de la libre appréciation par l’entreprise et ses conseils des risques encourus. Sur le fond, CJI a attaqué le contrat conclu par TV5 Monde avec Thomson sur le fondement d’infractions aux règles applicables en matière de marchés publics. Or, TV5 Monde ne relève pas du code des marchés publics, mais des dispositions de la n° 91-3 du 3 janvier 1991 soumettant la passation de certains contrats à des règles de publicité et de mise en concurrence. TV5 Monde considère qu’au regard de ces règles, moins formelles qu’en matière de marché public stricto sensu, l’exécution de son appel d’offre est régulière et, en particulier, qu’aucune rupture d’égalité entre les candidats ne peut être démontrée.

207 Neuf langues à compter de 2008.

208 Il s’y ajoute l’habillage et la publicité qui représentent 11 à 20 % du temps d’antenne.

209 Son successeur, M. Aillagon, ne sera nommé qu’en avril 2005 et démissionnera moins d’un an après. L’intérim consécutif à la mort de M. Adda a été assuré par la directrice générale, Mme Saragosse.

210 Cette échéance correspond à une prorogation du contrat âprement négociée par TV5 Monde et conclue par Cognacq Jay image avec l’espoir de remporter l’appel d’offre lancé par TV5 Monde.

211 Ces consultations s’inscrivent selon TV5 Monde dans le cadre non du code des marchés publics mais de la loi n° 91-3 du 3 janvier 1991 et de son décret d’application n° 92-311 du 31 mars 1992 soumettant la passation de certains contrats de fournitures, de travaux ou de prestation de service à des règles de publicité et de mise en concurrence.

212 Ainsi, le contrat de sous-location des locaux sis 15 rue Cognacq Jay (locaux techniques) signé le 29 mai 2002 mentionne-t-il que « le sous-locataire s’interdit de faire pénétrer toute personne morale ou physique pour y exercer une activité concurrente de celle de CJI. » Le contrat de sous-location des bâtiments du 19 rue Cognacq Jay (locaux administratifs de la chaîne) fait quant à lui explicitement référence aux prestations techniques délivrées dans le bâtiment voisin et précise que le contrat vise à « permettre une synergie fonctionnelle entre le dispositif technique et les services du preneur » tout en interdisant à TV5 Monde, notamment de « sous-louer de manière partielle ou totale les biens loués ».

213 L’article L. 145-4 du code de commerce dispose en matière de baux commerciaux que « la durée du contrat de location ne peut être inférieure à neuf ans. Toutefois, à défaut de convention contraire, le preneur a la faculté de donner congé à l'expiration d'une période triennale, dans les formes et délai de l'article L. 145-9. »

214 Elle résulte de l’accroissement du nombre de détenteurs d’équipements de réception ou d’abonnements au câble sans action particulière de marketing de TV5 Monde.

215 Cette étude s’appuie sur la comparaison de deux tableaux de mesure d’audience, l’un d’octobre 2002 et l’autre de juin 2007. Les données de réception prises en compte correspondent aux territoires sur lesquels des mesures d’audience sont disponibles à l’époque, le total de foyers est donc sensiblement moins élevé que dans le tableau présenté par TV5 Monde.

216 Lors du présent contrôle, il est apparu que les présidents de CFI et TV5 considéraient que les contrats concernant les achats de droits et de programmes n’avaient pas à être soumis au contrôle d’Etat, même si leur montant dépassait son seuil d’intervention. Le contrôle de la Cour aura ainsi fourni l’occasion au contrôle d’Etat de rappeler les modalités de son intervention auprès des deux sociétés.

217 Par exemple, à la suite du contrôle fiscal auquel a été soumise CFI, la société a fait part à la direction générale de la coopération internationale et du développement du ministère des affaires étrangères, le 13 février 2007, d’un risque éventuel de non recouvrement de certaines créances clients, portant sur un montant de 103 K€. Par courrier en date du 22 mars 2007, la direction générale a  confirmé « qu’elle s’engage(ait) à vous couvrir tout risque éventuel de non recouvrement de vos créances clients ». Selon la note du contrôle d’Etat qui accompagne l’instruction de ce dossier, cette pratique remonte à 2000 et portait au 27 avril 2007 sur un engagement total du ministère vis-à-vis de la société de 752 326 € au titre de provisions pour risque et de 161 469 € concernant le non recouvrement de certaines créances clients.

218 En 2008, France Télévisions n’a plus aucun membre de son personnel en détachement à CFI.

219 Les conditions financières dans lesquelles s’est réalisée cette opération sont examinées dans la section suivante.

220 La politique française en faveur du développement regroupe l’essentiel des actions en faveur des pays bénéficiant de l’aide publique au développement (APD) au sens du Comité d’aide au développement de l’OCDE. Dans sa dernière révision, datant de 2006, cette liste comporte plus de 120 pays et territoires allant des pays les moins avancés aux pays à revenu intermédiaire. Si cette liste, révisée tous les trois ans, s’est étendue après 1989, la dernière modification n’a conduit qu’à des changements mineurs.

Depuis 1998, le Gouvernement français a défini par ailleurs une zone de solidarité prioritaire (ZSP), au sein de laquelle l’aide publique française est engagée de manière sélective et concentrée. Selon une liste dont la dernière version a été arrêtée début 2002, cette zone comporte 55 pays, (relevant tous de la « liste OCDE ») et dont une large partie se situe en Afrique sub-saharienne.

221 Note du contrôle d’Etat du 13 mars 2000.

222 Au cours de son audition par la Cour, en mars 2008, le directeur de l’audiovisuel extérieur du ministère des affaires étrangères a confirmé ce principe, indiquant que la marque de succès de la banque de programme dans un pays était sa disparition et insistant sur la nécessité d’une transition ordonnée entre la diffusion gratuite et la diffusion payante.

223 Créée en 1994, cette association regroupe l’ensemble des exportateurs français de programmes audiovisuels, avec un budget de 4 M€.

224 Les missions concernées par un transfert de la direction audiovisuelle du ministère à CFI seraient :

- Au titre de la télévision, le fonds de soutien prioritaire « appui à la production audiovisuelle et aux télévisions », doté de 6,1 M€ sur 4 ans (Fonds image Afrique télévision, plan de soutien aux télévisions) ;

- Au titre de la radio, le fonds de soutien prioritaire « plan radio Afrique » doté de 2,4 M€ sur 4 ans ;

- Au titre des archives audiovisuelles, le fonds de soutien prioritaire « préservation des patrimoines audiovisuels et promotion de la diversité culturelle » doté de 4 M€ sur 4 ans ;

- Au titre du cinéma, le fonds de soutien prioritaire « appui à la structuration des filières des métiers de la production et de la distribution cinématographique en Afrique subsaharienne », doté de 8,5 M€ sur 4 ans (Fonds image Afrique cinéma, fonds court-métrage,…) ;

- Au titre des crédits dont dispose directement la direction de l’audiovisuel extérieur, le soutien à la professionnalisation des filières audiovisuelles et cinématographiques des pays du Sud, le soutien à la presse audiovisuelle démocratique et aux instances de régulation, pour lesquels 1,7 M€ de crédits sont disponibles en 2008.

Ces missions correspondent donc à un volume annuel de l’ordre de 7 M€ en 2008.

225 La diminution importante de la rémunération moyenne des journalistes entre 2000 et 2001 tient à ce que le salaire du président directeur général de l’époque était inclus dans la catégorie des journalistes jusqu’à son départ en 2001.

226 En mars 2008, le directeur général de CFI estimait devant la Cour que les résultats étaient désormais établis avec certitude dans deux zones, l’Europe centrale et orientale et 27 pays d’Afrique francophone.

227 Par exemple une étude portant sur le Sénégal réalisée en particulier sur Dakar, Pikine, Saint-Louis, Ziguinchor par la Sofres en mai 2006, une étude sur le Cameroun portant sur Douala, Yaoundé, et Bafoussam réalisée par Delphes en novembre 2006 ou encore une étude de IC&T de juillet 2005 portant sur le Bénin, avec comme villes étudiées Cotonou, Parakou, Abomey et Bohicon.

228 Mission en Mauritanie en avril-mai 2006 pour structurer la rédaction de la télévision mauritanienne dans le cadre de la préparation d’une campagne électorale, mission CFI/France Télévisions dans le cadre d’un consortium européen sur l’organisation de la radio télévision afghane conduite en août 2006, mission en mai 2006 en République démocratique du Congo dans le cadre de la préparation de la soirée électorale.


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