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N° 3665

——

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale 13 juillet 2011.

RAPPORT D’INFORMATION

DÉPOSÉ

en application de l’article 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES FORCES ARMÉES

en conclusion des travaux d’une mission d’information
constituée le 1er décembre 2010 
(1)

sur le contrôle de l’exécution des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation »
pour l’
exercice 2010

ET PRÉSENTÉ PAR

M. Patrick BEAUDOUIN,

Député.

——

La mission d’information sur le contrôle de l’exécution des crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » pour l’exercice 2010 est composée de : M. Patrick Beaudouin, rapporteur, MM. Jean-Jacques Candelier, Francis Hillmeyer, Alain Marty, Georges Mothron et Jean-Claude Viollet.

S O M M A I R E

_____

Pages

INTRODUCTION 5

I. — UNE CONSOMMATION DES CRÉDITS AU PLUS PROCHE DE LA LOI DE FINANCES INITIALE 7

A. LES PROGRAMMES 169 ET 158 : DES DÉPENSES PAR NATURE CONTRAINTES, OFFRANT PEU DE MARGES DE MANœUVRE 7

1. Les pensions militaires d’invalidité et la retraite du combattant 7

2. Les droits liés aux pensions militaires d’invalidité et les actions de solidarité 10

3. L’indemnisation des victimes de la Seconde Guerre mondiale 12

B. LE PROGRAMME 167 : UNE ANNÉE DE TRANSITION 13

1. La direction du service national en pleine restructuration 14

2. Une année mémorielle exceptionnelle 15

II. — LA MONTÉE EN CHARGE PROGRESSIVE DES NOUVEAUX DISPOSITIFS 17

A. L’ALLOCATION DIFFÉRENTIELLE SERVIE AUX CONJOINTS SURVIVANTS 17

B. LA MAJORATION DES PENSIONS DES VEUVES DES PLUS GRANDS INVALIDES 17

C. LA CARTE DU COMBATTANT OPEX 18

D. LA CAMPAGNE DOUBLE AUX ANCIENS D’ALGÉRIE 19

EXAMEN EN COMMISSION 21

INTRODUCTION

La présente mission d’information complète le dispositif de contrôle d’exécution des crédits de la commission de la défense nationale et des forces armées et lui permet d’effectuer désormais un contrôle continu de l’ensemble des programmes budgétaires qui relèvent de sa compétence, ceux de la mission Défense mais aussi ceux de la mission interministérielle « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

Depuis la réforme du règlement de l’Assemblée nationale, consécutive à la réforme constitutionnelle de 2008, la répartition des compétences des commissions permanentes a été sensiblement modifiée et la commission de la défense est saisie pour avis de l’intégralité des programmes de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

Cela signifie que sont entrés dans son champ de compétence, outre l’examen du programme 167 « Liens entre la Nation et son armée », les programmes 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » et 158 « Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale ».

Ces deux programmes présentent la particularité d’avoir pour finalité principale le versement de prestations, indemnisations, pensions ou retraites, à différentes catégories de bénéficiaires. La construction de ces budgets dépend donc essentiellement de deux paramètres : le montant de ces prestations et l’évolution statistique des populations.

Il est donc fondamental pour les parlementaires, appelés à examiner ces budgets chaque année, de comprendre comment ils sont construits et comment ils sont exécutés. De leur exécution dépendent en effet les marges de manœuvre disponibles pour augmenter le niveau de certaines de ces prestations ou les étendre à de nouvelles catégories de bénéficiaires.

Cela est précisément l’objet de cette mission d’information, mieux informer le Parlement sur les exécutions passées afin de préparer la discussion budgétaire à venir.

Pour élaborer ce rapport, les membres de la mission ont rencontré les principaux responsables de l’administration du ministère de la défense et des anciens combattants mais aussi ceux de la direction du budget du ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État.

Le rapport présente les principaux résultats de l’exécution du budget de la mission pour l’année 2010, le premier à avoir été intégralement soumis à la commission de la défense, et fait le point sur la montée en charge de dispositifs entrés récemment en vigueur et qui, pour la plupart, ont animé les dernières discussions budgétaires.

I. — UNE CONSOMMATION DES CRÉDITS AU PLUS PROCHE DE LA LOI DE FINANCES INITIALE

Conformément à la programmation triennale, les crédits de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » suivent une trajectoire régulière de baisse. Cette baisse ayant suivi de près celle des effectifs des bénéficiaires, cela n’a pas empêché l’augmentation du montant de certaines prestations.

Évolution des crÉdits consommÉs de la mission « Anciens combattants »

(en millions d’euros)

Programme

2007

2008

Écart 2008

2007

2009

Écart 2009

2008

2010

Écart 2010

2009

167

Liens entre la nation et son armée

265,48

161,31

- 39,24 %

154,31

- 4,34 %

138,38

- 10,32 %

169

Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

3 418,59

3 291,588

- 3,72 %

3 187,74

- 3,15 %

3 175,76

- 0,38 %

158

Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale

144,64

138,90

- 3,97 %

125,201

- 9,86 %

109,06

- 12,89 %

TOTAL

3 828,72

3 591,80

- 6,19 %

3 467,26

- 3,47 %

3 423,20

- 1,27 %

Source : RAP 2010.

A. LES PROGRAMMES 169 ET 158 : DES DÉPENSES PAR NATURE CONTRAINTES, OFFRANT PEU DE MARGES DE MANœUVRE

1. Les pensions militaires d’invalidité et la retraite du combattant

Le programme 169 comprend l’essentiel des crédits de la mission (3 175 761 euros sur 3 423 205), qui eux-mêmes sont consacrés au financement de ses deux principaux dispositifs : les pensions militaires d’invalidité et la retraite du combattant.

Il s’agit là de deux dépenses de « guichet », c’est-à-dire du versement de prestations dont le montant est fixé à l’avance. La seule source d’écart possible entre la budgétisation et l’exécution est donc une évolution différente du nombre de bénéficiaires par rapport à la prévision.

Dans les faits, on constate un écart très faible entre l’évolution statistique prise en compte dans la budgétisation et la réalisation constatée.

• Les pensions militaires d’invalidité

Les effectifs des bénéficiaires de pensions militaires d’invalidité suivent une trajectoire régulière de baisse, d’un peu plus de 15 000 par an. L’année 2010 n’a pas fait exception puisque 16 000 sorties ont été précisément enregistrées. L’écart entre l’exécution et la programmation est par conséquent très faible, 1,35 %.

Évolution des crédits et des effectifs des pensions militaires d’invalidité

(crédits en millions d’euros)

 

LFI ou Triennal

Exécution

Écart Exécution

LFI

Écart Exécution

LFI en %

Effectifs

prévus LFI ou triennal

Effectifs

constatés

2007

2 044,00

2 050,33

+ 6,33

+ 0,31 %

 

364 152

2008

1 966,00

1 940,50

- 25,50

- 1,30 %

346 553

350 262

2009

1 842,00

1 857,00

+ 15,00

+ 0,81 %

325 352

336 272

2010

1 790,00

1 765,90

- 24,10

- 1,35 %

318 262

320 272

Source : direction du budget.

Évolution des crédits et des effectifs des pensions militaires d’invalidité

Source : direction du budget.

L’exécution budgétaire des pensions militaires d’invalidité risque de subir, dans les années qui viennent, l’impact indirect de la décristallisation « totale » des pensions civiles et militaires de retraite décidée par la loi de finances pour 2011. Celle-ci prévoit en effet la décristallisation des situations familiales, ce qui entraînera des demandes de pensions de réversion pour les veuves d’anciens titulaires de pensions militaires d’invalidité.

Le financement de la décristallisation des pensions civiles et militaires de retraite ne dépend pas des crédits de cette mission mais du programme 743, compte spécial Pensions. 1 200 dossiers ont été reçus à ce jour, provenant essentiellement des pays d’Afrique subsaharienne, une moitié étant constituée de demandes nouvelles, l’autre de demandes de révisions. Cela témoigne d’une très forte réussite du dispositif de communication sur place. L’Algérie, le Maroc et le Tunisie, dont est issu l’essentiel des effectifs concernés par la décristallisation, n’ayant bénéficié pour l’instant que de mesures de communication très limitées, le volume des demandes va probablement s’accélérer dans les mois qui viennent.

Cela pourrait entraîner un dépassement de l’enveloppe budgétaire prévue par la loi de finances pour 2011 et la programmation triennale : 82 millions d’euros en 2011, 100 millions en 2012 et 150 millions à terme, pour 32 000 bénéficiaires, dont 18 000 au Maghreb.

• La retraite du combattant

L’année 2010 a été marquée par l’augmentation de deux points, de 41 à 43 points, de la retraite du combattant au 1er juillet 2010. Dans le même temps, les effectifs ont baissé de 53 471 par rapport à 2009 : il y a eu 4 966 entrées et 58 437 sorties, ce qui était très proche des hypothèses retenues, 60 000 sorties.

Au final, l’exécution constatée est très proche de la budgétisation, 600 000 euros seulement n’ayant pas été dépensés, soit moins de 0,08 % des crédits inscrits. La programmation 2010 a donc été la plus juste de ces dernières années.

Évolution des crédits et des effectifs de la retraite du combattant

(crédits en millions d’euros)

 

LFI ou Triennal

Exécution

Écart Exécution

LFI

Écart

Exécution

LFI en %

Effectifs prévus LFI ou triennal

Effectifs

2007

770,00

761,42

- 8,58

- 1,11 %

 

1 487 095

2008

775,00

761,00

- 14,00

- 1,81 %

1 544 487

1 443 681

2009

764,00

777,56

+ 13,56

+ 1,77%

1 386 095

1 393 201

2010

799,00

798,40

- 0,60

- 0,08 %

1 335 681

1 338 201

Source : direction du budget.

Évolution des crédits et des effectifs de la retraite du combattant

Source : direction du budget.

2. Les droits liés aux pensions militaires d’invalidité et les actions de solidarité

• Les soins médicaux gratuits

Les bénéficiaires potentiels de soins gratuits sont les invalides titulaires d’une pension militaire d’invalidité ou de victime de guerre, soit un peu plus de 230 000 personnes. Néanmoins, moins d’un tiers d’entre eux utilisent leur carnet de soins, pour un coût moyen annuel par bénéficiaire de 672 euros.

Évolution des crédits et des effectifs des soins médicaux gratuits

(crédits en millions d’euros)

 

LFI ou Triennal

Exécution

Écart

Exécution

LFI

Écart

Exécution

LFI en %

Effectifs

2007

79,50

71,12

- 8,38

- 10,54%

86 326

2008

75,00

69,98

- 5,02

- 6,69%

83 124

2009

66,00

62,48

- 3,52

- 5,33%

80 063

2010

67,33

51,76

- 15,57

- 23,12%

77 026

Source : direction du budget.

La sous-consommation constatée s’explique par la tendance à la baisse de la consommation des soins médicaux gratuits observée depuis plusieurs années, et par des facteurs conjoncturels liés à la réforme en cours du ministère de la défense et des anciens combattants.

La gestion de ces soins a ainsi été transférée en cours d’année de la direction des ressources humaines du ministère de la défense et des anciens combattants (DRH-MD) à la caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS). Les délais de reprise des dossiers par la CNMSS et l’absence de facturation du service de santé des armées pour des raisons techniques ont induit le report des dépenses de 2010 sur 2011, pour un montant évalué à 6,3 millions d’euros, minorant ainsi artificiellement la consommation 2010.

La marge dégagée sur les soins médicaux gratuits a permis de compenser, dans une large mesure, une consommation supérieure à la prévision sur les frais de gestion de la CNMSS.

• Les remboursements de prestations de sécurité sociale

Évolution des crédits et des effectifs des remboursements de prestations de sécurité sociale

(crédits en millions d’euros)

 

LFI ou Triennal

Exécution

Écart

Exécution

LFI

Écart

Exécution

LFI en %

Effectifs

2007

163,63

172,99

+ 9,36

+ 5,72 %

23 338

2008

172,04

156,13

- 15,91

- 9,25 %

18 134

2009

142,90

143,65

- 0,75

+ 0,52 %

16 684

2010

129,30

136,79

+ 7,49

+ 5,79 %

15 894

Source : direction du budget.

L’exécution budgétaire a été globalement conforme aux prévisions qui intégraient la reprise d’un avoir de 6,86 millions d’euros de la gestion précédente.

• La rente mutualiste

Évolution des crédits et des effectifs des majorations de rente mutualiste

(crédits en millions d’euros)

 

LFI ou Triennal

Exécution

Écart

Exécution

LFI

Écart

Exécution

LFI en %

Effectifs

2007

217,40

224,04

+ 6,64

+ 3,05 %

427 590

2008

226,47

231,13

+ 4,66

+ 2,06 %

425 614

2009

239,08

226,30

- 12,78

- 5,35 %

423 356

2010

247,00

255,43

+ 8,43

+ 3,41 %

418 164

Source : direction du budget.

L’exécution, supérieure à la prévision de la LFI s’explique principalement par le règlement des impayés issus de la gestion 2009, 12,08 millions d’euros.

• La réparation des conséquences sanitaires des essais nucléaires français

Cette action a été créée en 2010 pour prendre en charge les indemnisations versées sous forme de capital aux victimes des essais nucléaires français, conformément à la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010. Le décret d’application n’ayant été publié qu’en milieu d’année, le 11 juin 2010, l’année 2010 a été essentiellement consacrée à la mise en place du dispositif.

Le comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) a été installé mais n’a pu se réunir qu’à six reprises. Il a instruit 135 dossiers sur les 455 reçus mais aucune indemnisation n’a encore été versée.

Aucune dépense n’a par conséquent été mise en œuvre en 2010. Les 10 millions ont été réinscrits pour 2011. Il est probable que ce montant sera insuffisant pour couvrir les indemnisations à venir nécessitant un abondement en cours d’année, comme le secrétaire d’État à la défense et aux anciens combattants s’y était engagé lors du débat budgétaire de l’automne dernier.

3. L’indemnisation des victimes de la Seconde Guerre mondiale

Le programme 158 finance les dispositifs d’indemnisation mis en place en faveur des victimes de la Seconde Guerre mondiale ou de leurs ayants cause. Il met en œuvre l’indemnisation de trois catégories de victimes :

- les victimes de spoliations intervenues du fait de législations antisémites (décret n° 99-778 du 10 septembre 1999) ;

- les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites (décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000) ;

- les orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie (décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004).

L’instruction des dossiers est réalisée soit par la commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations (CIVS) pour ce qui concerne les spoliations, soit par les services du ministère de la défense et des anciens combattants pour ce qui concerne l’aide aux orphelins.

Les décisions accordant ou refusant les mesures de réparation financière sont prises par le Premier ministre. La mise en paiement est confiée, par les trois décrets, à l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC).

Évolution des crédits et des effectifs des indemnisations
des victimes de la Seconde Guerre mondiale

(crédits en millions d’euros)

 

LFI ou Triennal

Exécution

Écart

Exécution

LFI

Écart

Exécution

LFI en %

2007

152,88

144,64

- 8,24

- 9,14 %

2008

146,50

138,90

- 7,60

- 5,19 %

2009

105,40

125,20

+ 19,80

+ 18,79 %

2010

96,96

109,06

+ 12,10

+ 12,48 %

Source : direction du budget.

Comme en 2009, les crédits prévus en loi de finances initiale ont été insuffisants, la prévisibilité budgétaire des différents dispositifs étant très difficile. Les montants versés dépendent en effet de déterminants très difficilement modélisables : flux de nouveaux bénéficiaires d’une rente ou d’un capital chaque année, nombre de crédirentiers, montant des dossiers d’indemnisation de spoliations, stock des recommandations d’indemnisation…

ExÉcution, par action et par titre, des crÉdits du programme 158

(en euros)

Action

Titre

LFI

Consommation

LFI - consommation

01 - Actes antisémites

2

2 050 000

1 803 213

246 787

3

600 000

600 341

- 341

6

49 592 255

48 773 533

818 722

Total Action 1

52 242 255

51 177 087

1 065 168

02 - Actes de barbarie

6

44 717 854

57 875 936

- 13 158 082

Total Action 2

44 717 854

57 875 936

- 13 158 082

Total programme 158

96 960 109

109 053 023

- 12 092 914

Source : direction du budget.

La consommation de l’action 1 « Indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’occupation » est ainsi inférieure de 1,13 million d’euros à la prévision, le coût des dossiers traités ayant été moins important que prévu.

L’écart est en revanche beaucoup plus significatif avec l’action 2 « Indemnisation des victimes d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale » puisque la consommation a été supérieure de 13,16 millions aux prévisions, le nombre de dossiers traités ayant été supérieur aux prévisions. Cet écart a nécessité un abondement supplémentaire de 12,26 millions d’euros en loi de finances rectificative.

B. LE PROGRAMME 167 : UNE ANNÉE DE TRANSITION

À la différence des deux précédents programmes, le programme 167 « Liens entre la Nation et son armée » ne verse pas de prestations à une population de bénéficiaires. Les marges de manœuvre ne sont néanmoins pas beaucoup plus importantes car son exécution est soumise aux évolutions démographiques des jeunes participant chaque année à la Journée défense et citoyenneté (anciennement Journée d’appel et de préparation à la défense – JAPD).

1. La direction du service national en pleine restructuration

Les crédits de l’action 1 de ce programme permettent de financer, pour l’essentiel, l’organisation et la mise en œuvre, par la direction du service national (DSN), de la JADP sur 250 sites : alimentation des jeunes, des animateurs et encadrants, transports des jeunes, évaluation des acquis de la langue française et formation au secourisme.

Ils financent également les besoins de dépense de personnel de la DSN et des organismes de métropole et d’outre-mer qui lui sont rattachés ainsi que la gestion des archives militaires individuelles (29 millions de dossiers).

2010 a été la deuxième année de mise en œuvre opérationnelle de la réforme de la chaîne du service national, engagée en 2008. La restructuration 2008-2012 vise à optimiser les structures déconcentrées et à rationaliser le fonctionnement de la DSN en mutualisant la fonction d’administration et de soutien avec les bases de défense nouvellement créées.

Dans le même temps, 1 800 000 dossiers d’archives ont été reversés en 2010 au bureau central des archives militaires de Pau (BCAAM) et 1 323 000 dossiers ont été numérisés. Le transfert de ce service vers le service historique de la défense (SHD) sera réalisé le 1er janvier 2012.

Exécution, par action et par titre, des crédits du programme 167

(en euros)

Action

Titre

LFI

Consommation

LFI - consommation

01 - JDC

2

119 676 401

106 681 347

12 995 054

3

25 576 445

20 721 575

4 854 871

5

34 693

0

34 693

6

45 000

46 683

- 1 683

Total Action 1

145 332 539

127 449 604

17 882 935

02 - Politique de mémoire

2

720 312

0

720 312

3

2 527 239

3 115 143

- 587 904

5

3 363 239

0

3 363 239

6

3 497 300

7 827 737

- 4 330 437

Total Action 2

10 108 090

10 942 880

- 834 790

Total programme 167

155 440 629

138 392 484

17 048 145

Source : ministère de la défense et des anciens combattants.

La sous-consommation de l’action 1 s’explique par deux phénomènes principaux, la réorganisation en cours de la DSN et un effet démographique :

- le nombre de jeunes présents s’est révélé sensiblement inférieur à la prévision (725 347 présents contre 780 000 prévus) induisant une moindre dépense de 1,2 million d’euros répartie sur les frais d’alimentation des jeunes, du transport et du secourisme ;

- la diminution des dépenses de formation et de déplacement du personnel, ainsi que celle des surfaces concernées, du fait de la réforme de la DSN.

L’excédent de ressources de près de 13 millions d’euros sur le titre 2 (dépenses de personnel) a été redéployé pour couvrir les insuffisances sur le titre 2 d’autres programmes du ministère.

L’excédent de ressources de 4,3 millions en crédits de paiements sur les autres titres a permis de mobiliser des crédits supplémentaires pour la politique de mémoire dans le cadre du 70e anniversaire de l’appel du 18 juin 1940 et pour l’accélération de la rénovation des sépultures de la Grande Guerre.

2. Une année mémorielle exceptionnelle

Les crédits de cette action relèvent de la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (DMPA). Ils permettent de financer les commémorations (organisation des neuf cérémonies nationales, célébration des anniversaires décennaux) ainsi que la préservation et la valorisation des hauts lieux de mémoire et des sépultures de guerre.

Globalement, en crédits de paiement, la consommation de l’action a été supérieure de 49 % aux crédits de la loi de finances initiale.

La consommation sur l’activité « Actions de mémoire », supérieure de 57 % à la dotation, a été marquée par le début des commémorations correspondant au 70e anniversaire de la Seconde Guerre mondiale, avec la célébration de l’appel du 18 juin 1940. L’organisation de cette commémoration n’était pas encore finalisée au moment de l’élaboration du projet de loi de finances pour 2010, ce qui explique l’imprécision de la prévision.

De même, les dépenses de l’activité « Création et entretien des lieux de mémoire » ont été supérieures de 57 % à la prévision. Cette surconsommation a été justifiée par la perspective du centenaire de la Grande Guerre et par l’opportunité que présentaient des initiatives de partenariats État/collectivités locales pour le développement du tourisme de mémoire.

La réallocation de crédits à partir de l’action 1 du programme a permis de financer la totalité des commémorations prévues.

II. — LA MONTÉE EN CHARGE PROGRESSIVE DES NOUVEAUX DISPOSITIFS

Outre le bilan de la consommation des crédits des différents programmes, la mission d’information est l’occasion, pour les parlementaires, de faire le point sur la montée en charge des dispositifs récemment mis en œuvre.

A. L’ALLOCATION DIFFÉRENTIELLE SERVIE AUX CONJOINTS SURVIVANTS

L’allocation différentielle a été créée, en 2007, par amendement parlementaire, au profit des conjoints survivants des anciens combattants les plus en difficulté.

Le montant plafond de cette prestation, initialement fixé, le 1er août 2007, à 550 euros par mois, a été porté à 800 euros au 1er janvier 2010, puis à 817 euros au 1er avril 2010, ce qui représente au total une augmentation de 48,5 % en moins de trois ans.

Pour l’année 2010, 5 634 dossiers ont été instruits par l’ONAC et 4 537 ont été déclarés éligibles, ce qui représente une somme de 5,065 millions d’euros, soit une hausse de 12 % des dossiers éligibles et de 21 % des crédits consommés.

Conformément à ce qu’avait envisagé le secrétaire d’État à la défense et aux anciens combattants lors du débat budgétaire de l’automne dernier, cette allocation a été portée à 834 euros au 1er avril 2011.

Sur le même modèle, et conformément à l’amendement parlementaire à la loi de finances pour 2011, l’ONAC réalise une étude dans douze départements pour recenser les anciens combattants les plus démunis susceptibles de bénéficier d’une allocation différentielle. Le Gouvernement présentera au Parlement, avant le 30 septembre 2011, un rapport évaluant l’intérêt de créer une telle allocation. Cela sera donc discuté lors de la présentation du prochain projet de loi de finances.

B. LA MAJORATION DES PENSIONS DES VEUVES DES PLUS GRANDS INVALIDES

L’Assemblée nationale a adopté, à l’initiative de votre rapporteur, un amendement au projet de loi de finances pour 2011 pour permettre aux veuves des plus grands invalides de guerre, dont le montant de la pension est égal ou supérieur à 12 000 points, de toucher un supplément de pension.

Les conjoints survivants de très grands invalides se trouvent en effet fréquemment démunis lors du décès de l’ouvrant-droit, alors que le conjoint doit faire face seul aux frais du ménage et aux difficultés causées par le décès de l’invalide. Or il existe une disproportion considérable entre la pension que percevait l’invalide et celle qui est versée au conjoint survivant.

L’amendement adopté majore de 360 points les pensions des veuves concernées, ce qui leur permettra de voir leur pension réévaluée d’environ 1 000 euros.

La mesure, calculée sur la base d’une quarantaine de dossiers répertoriés, a nécessité un abondement de 250 000 euros des crédits du programme 169. Depuis, une dizaine de dossiers supplémentaires ont été répertoriés par le ministère de la défense et des anciens combattants.

Le débat budgétaire de l’automne prochain sera l’occasion de faire un nouveau bilan de ce dispositif et d’examiner les conditions de son extension à de nouvelles catégories de bénéficiaires.

C. LA CARTE DU COMBATTANT OPEX

L’attribution de la carte du combattant, initialement limitée aux deux guerres mondiales, à la guerre de Corée, au conflit indochinois, à la guerre d’Algérie et aux combats du Maroc et de la Tunisie, a été étendue aux opérations extérieures par la loi du 4 janvier 1993, codifiée dans le code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre.

Des arrêtés ministériels sont élaborés par le service historique de la défense (SHD) à partir des journaux de marches et opérations des unités engagées. Ils définissent les unités qualifiées de combattantes et procèdent à des relevés d’action de feu ou de combat sur les territoires, pendant des périodes et des opérations déterminées par un arrêté ministériel, mis à jour régulièrement.

Aucun texte ne définissant les actions de feu ou de combat dans le cadre des opérations extérieures, le SHD utilisait les critères antérieurement retenus pour l’Afrique du Nord. Or ces critères se référeraient essentiellement à des situations d’affrontement entre groupes armés, en décalage complet avec la réalité des activités d’interposition ou de maintien de la paix réalisées par les forces françaises depuis une quinzaine d’années.

C’est pour remédier à cette situation qu’à la suite des travaux d’un groupe de concertation composé de représentants des états-majors et du SHD, a été publié le décret n° 2010-1377 du 12 novembre 2010 définissant les conditions d’octroi de la carte du combattant en faveur des militaires engagés dans les opérations extérieures.

L’arrêté n° 80066/DEF/DAJ/D2P/EGL du 10 décembre 2010 dresse la liste des opérations extérieures terrestres, navales et aériennes constituant des actions de feu ou de combat. Peuvent désormais être qualifiées d’action de combat, l’intervention sur engin explosif, l’évacuation de personnes, le rétablissement de l’ordre, l’action de renseignement, la protection de l’espace aérien ou encore la lutte contre la piraterie, soit autant de missions plus en conformité avec la réalité de l’engagement de nos forces.

Il y a, aujourd’hui, un peu moins de 40 000 cartes du combattant OPEX. L’impact budgétaire de la modification des critères d’octroi de la carte a été estimé à 800 000 euros en hypothèse basse, 1,2 million d’euros en hypothèse haute d’ici quinze ans. L’impact budgétaire de cette mesure est naturellement différé dans le temps puisque le titulaire de la carte doit avoir atteint 65 ans pour percevoir la retraite du combattant.

D. LA CAMPAGNE DOUBLE AUX ANCIENS D’ALGÉRIE

Les bénéfices de campagne constituent une bonification d’ancienneté prévue par le code des pensions civiles et militaires de retraite. L’attribution de la campagne double signifie que chaque jour de service effectué par le militaire est compté pour trois jours dans le calcul de sa pension.

En substituant à l’expression « aux opérations effectuées en Afrique du Nord », l’expression « à la guerre d’Algérie ou aux combats en Tunisie et au Maroc », la loi du 18 octobre 1999 avait créé une situation juridique nouvelle : les personnes exposées à des situations de combat au cours de la guerre d’Algérie étaient susceptibles de bénéficier de la campagne double. Cela a été confirmé par le Conseil d’État dans sa décision du 17 mars 2010.

Le décret n° 2010-890 du 29 juillet 2010 tire les conséquences de cette situation nouvelle et accorde ce bénéfice de campagne aux militaires d’active et aux appelés pour toute journée durant laquelle ils ont pris part à une action de feu ou de combat ou ont subi le feu.

Il s’applique aux fonctionnaires et assimilés dont les pensions de retraite ont été liquidées à compter du 19 octobre 1999, date d’entrée en vigueur de la loi. Ces pensions sont révisées à compter de la demande des intéressés déposée postérieurement à la date d’entrée en vigueur du décret du 29 juillet 2010, auprès des services de l’administration qui a procédé à la liquidation de la pension de retraite. Elles n’ouvrent droit à aucun intérêt de retard.

Cette mesure ne peut s’appliquer aux pensions liquidées antérieurement au 19 octobre 1999, puisque ce n’est qu’à compter de cette date qu’a été reconnu officiellement l’état de guerre en Algérie, qui seul permet l’attribution de la campagne double. Le Gouvernement a décidé que le décret du 29 juillet 2010 serait applicable à compter du 19 octobre 1999, ce qui donne toute son effectivité à la loi du 18 octobre 1999 dans le respect du principe de non-rétroactivité des lois. Il ne peut réglementairement aller plus loin. 

Selon le rapport réalisé en 2005 par Christian Gal, inspecteur général des affaires sociales, sur les 1,75 million de personnes qui ont servi en Afrique du Nord entre 1952 et 1962, 297 525 seraient susceptibles de prétendre à l’attribution des bonifications de « campagne double » compte tenu du nombre d’annuités de services réunis, du temps passé en Afrique du Nord et du régime de retraite qui est le leur.

Le ministère de la défense et des anciens combattants n’a pu fournir à la mission d’information le nombre de bénéficiaires potentiels de la campagne double suite à la parution du décret du 29 juillet 2010. Des premières estimations pourront être fournies à partir du mois de septembre prochain, avant le débat budgétaire.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission procède à l’examen du rapport de la mission d’information sur le contrôle de l’exécution des crédits de la défense pour l’exercice 2010 au cours de sa réunion du mercredi 13 juillet 2011.

Un débat suit l’exposé du rapporteur.

M. Jean-Claude Viollet. Je souhaite féliciter la Commission pour son excellent travail concernant les budgets qui lui sont soumis. J’ai simplement une remarque de fond concernant la participation des anciens combattants à la réduction du déficit public. Ceux-ci sont des citoyens comme les autres puisqu’ils contribuent, avec la fiscalité, à la réduction du déficit public. Mais ils constituent également des exceptions : ils ont tout sacrifié pour la France, en payant parfois de leur sang. Nous ne pouvons donc leur demander de fournir un effort supplémentaire en participant à la réduction du déficit public. Aussi, j’aimerais que l’on bannisse de notre discours cette vision des choses. Ce sont, au contraire, les citoyens français qui doivent faire un effort de mémoire envers eux.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. J’admets que la formulation de ma phrase était inadéquate. Je voudrais souligner que la baisse des crédits de la mission est le fait de trois actions : la disparition programmée de la direction de statuts, des pensions et de la réinsertion sociale (DSPRS), la réforme en cours de la direction du service national et, surtout, la diminution des effectifs des bénéficiaires de cette mission. Les prestations versées aux anciens combattants n’ont donc pas connu de baisse, plusieurs d’entre elles ayant au contraire été revalorisées.

M. Dominique Caillaud. Le regroupement et la rénovation de nos cimetières en Algérie sont-ils financés par les crédits de cette mission ?

M. le président Guy Teissier. C’était une volonté du Président Chirac de rénover ces cimetières. Des communes participent également à cet effort : Marseille finance ainsi la rénovation du cimetière Saint-Eugène à Alger.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. L’entretien des cimetières est effectivement financé par cette mission. Il est effectué par l’ONAC, qui a repris les attributions de la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives (DMPA) dans ce domaine. Conformément à la volonté du Président Chirac, un programme d’entretien a été établi sur plusieurs années.

M. Michel Voisin. J’aimerais savoir si l’indemnisation des orphelins prévue par le décret de 2004 se poursuit et si de nouveaux dossiers sont traités chaque année. Il était initialement prévu d’indemniser un peu plus de 27 000 personnes.

M. Patrick Beaudouin, rapporteur. Il existe en fait trois décrets : le décret de 1999 pour les victimes de spoliations du fait des législations antisémites, le décret de 2000 pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites et le décret de 2004 pour les orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie. Les critères définissant les conditions d’accès aux différentes indemnisations sont très stricts mais beaucoup de dossiers continuent à être traités chaque année. Un peu plus de 50 000 personnes ont ainsi été indemnisées depuis le début de la campagne d’indemnisation.

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La Commission autorise, en application de l’article 145 du Règlement, le dépôt du rapport de la mission d’information en vue de sa publication.

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1 () La composition de cette mission figure au verso de la présente page.


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