Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF
Retour vers le dossier législatif


 61

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 4 juillet 2007.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES, FAMILIALES ET SOCIALES SUR LE PROJET DE LOI (n° 4) en faveur du travail, de l’emploi, et du pouvoir d’achat

PAR M. Dominique TIAN

Député.

——

Voir les numéros : 58, 59 et 62

INTRODUCTION 5

TRAVAUX DE LA COMMISSION 9

I.- AUDITION DU HAUT COMMISSAIRE AUX SOLIDARITÉS ACTIVES CONTRE LA PAUVRETÉ 9

II.- EXAMEN DES ARTICLES 29

Avant l’article 1er 29

Article 1er Mesures destinées à favoriser l’augmentation de la durée moyenne du travail 30

Article 8 : Définition du revenu de solidarité active (RSA) 73

Article 9 : Expérimentation du RSA pour les bénéficiaires du revenu minimum d’insertion 86

Article 10 : Expérimentation du RSA pour les bénéficiaires de l’allocation de parent isolé (API) 91

Articl  11 : Éligibilité à l’expérimentation 95

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 97

ANNEXES 101

ANNEXE 1 : Définition et régime applicable aux heures supplémentaires et complémentaires 101

ANNEXE 2 Salariés du livre VII du code du travail et heures supplémentaires 107

ANNEXE 3 : Simulations relatives aux gains pour le salarié et pour l'employeur des mesures relatives aux heures supplémentaires 112

INTRODUCTION

La commission des affaires culturelles, familiales et sociales s’est saisie pour avis des articles du projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat concernant les mesures destinées à accroître le pouvoir d’achat des salariés et, dans un certain nombre de situations, également de lutter contre la pauvreté au travail. Il s’agit, d’une part, de l’article 1er qui permet d’améliorer la rémunération des heures supplémentaires, d’autre part, des articles 8 à 11, qui prévoient des mesures très importantes pour expérimenter le revenu de solidarité active (RSA) : l’objectif est de garantir que l’activité ou l’accroissement de leur activité conduisent à une amélioration effective de la situation des bénéficiaires de minima sociaux. M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, spécialement chargé de ce dossier par le Président de la République, a d’ailleurs présenté de façon détaillée ces mesures devant la commission.

S’agissant des dispositions relatives aux heures supplémentaires, désormais, le produit de chaque heure ainsi travaillée se traduira par une augmentation significative du revenu net à la disposition des salariés. Les entreprises bénéficient de même d’une diminution substantielle du coût du travail.

Il ne peut être envisagé d’examiner ces mesures sans garder à l’esprit l’ambition plus vaste – le véritable souffle, devrait-on dire – au fondement du présent projet de loi : la relance de l’économie.

« Pour retrouver le rythme nécessaire de création d’emplois, une croissance plus forte est indispensable. Mais c’est l’emploi qui, pour l’essentiel, crée la croissance, même s’il est bien vrai que celle-ci générera, à son tour, de nouveaux postes de travail ». Ces lignes, extraites du rapport établi par le groupe de travail présidé par M. Michel Camdessus qui, dès 2004, invitait au « sursaut », sont plus que jamais d’actualité.

Car c’est bien à un dynamisme nouveau et à une réforme nécessaire qu’invite, en ce début de législature, le présent projet de loi.

La relance de l’économie, objectif affiché dès la première ligne du texte, passe de fait par une véritable réhabilitation du travail dans la triple dimension qu’il revêt : valeur, outil d’amélioration du pouvoir d’achat, instrument de lutte contre le chômage.

Dans cette large perspective, l’augmentation de la durée moyenne du travail constitue une condition nécessaire pour une diminution durable du chômage ainsi que l’augmentation du rythme de la croissance.

À l’évidence, la France n’a pas encore su rattraper son retard en matière de temps de travail, comme l’illustrent bien les comparaisons internationales.

La durée légale hebdomadaire du travail des salariés à temps complet en France (35 heures) est inférieure aux durées légales ou conventionnelles des autres pays : 38,2 heures en Allemagne, 38,5 heures en Espagne, 38 heures en Italie, 38,4 heures aux Pays-Bas et 36,4 heures au Royaume-Uni.

En France, compte non tenu des salariés sous le régime du forfait en jours, la durée hebdomadaire collective moyenne du travail des salariés à temps complet s’établit, à la fin du quatrième trimestre 2006, à 35,6 heures.

En outre, la durée travaillée par semaine en France est plus faible que dans la plupart des autres pays, comme l’illustre le tableau suivant.

Nombre d’heures de travail par semaine, y compris les heures supplémentaires, de l’ensemble des personnes en emploi à temps plein (2004)

Allemagne

39,8

Lituanie

39,4

Autriche

42,4

Luxembourg

40,1

Belgique

39,1

Malte

40,6

Chypre

40,4

Pays-Bas

38,8

Danemark

39,2

Pologne

41,5

Espagne

40,4

Portugal

40,1

Estonie

41,1

République tchèque

41,3

Finlande

39,2

Royaume-Uni

42,7

France métropolitaine

38,9

Slovaquie

40,5

Grèce

40,9

Slovénie

41,7

Hongrie

40,8

Suède

39,9

Irlande

39,2

UE

40,3

Italie

39,2

Etats-Unis

42,0

Lettonie

42,6

   

Source : Eurostat, enquête européenne sur les forces de travail

Le constat est sans appel. Il est d’ailleurs révélateur qu’une étude de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE, octobre 2005) ait mis en évidence le fait que quelque 2,8 millions d’actifs ayant un emploi souhaiteraient effectuer des heures supplémentaires, avec une augmentation correspondante de leur rémunération.

Sans doute, depuis quelques années, des actions ont été conduites pour inverser cette tendance et agir sur ce levier que constitue la volonté des salariés de pouvoir accroître leur durée du travail afin d’augmenter en conséquence leur niveau de rémunération.

Le contingent d’heures supplémentaires a ainsi été relevé par un décret en date du 21 décembre 2004 au niveau de 220 heures par an et par salarié. En outre, la loi du 31 mars 2005 portant réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise a assoupli et modernisé les modalités de fonctionnement du compte épargne-temps et créé un régime de temps choisi favorisant le travail au-delà du contingent d’heures supplémentaires.

37 % des salariés à temps complet ont effectué des heures supplémentaires au moins une fois au cours de l’année 2004. De 2003 à 2004, la part des salariés réalisant des heures supplémentaires déclarées au moins une fois au cours de l’année a connu une hausse sensible de 15 points. Toutefois, le volume annuel moyen d’heures par salarié concerné reste de l’ordre de 55 heures en moyenne en 2004 comme en 2003. Ce volume illustre aussi, au regard du niveau du contingent d’heures supplémentaires, le fait qu’il existe une véritable marge pour du travail en plus, aujourd’hui inaccompli faute d’incitation suffisante.

Ce bref état des lieux montre combien il est indispensable d’encourager encore le travail supplémentaire. C’est l’objet de l’article 1er du projet de loi. Les principaux moyens utilisés sont les suivants : création d’une exonération d’impôt sur le revenu au titre du temps supplémentaire travaillé ; institution d’un dispositif d’allègement des cotisations salariales et patronales au titre de ces mêmes heures ; modification du mode de calcul de la réduction de charges sociales dite « allègement Fillon » afin de neutraliser l’effet négatif sur cet allègement du recours aux heures supplémentaires.

L’objectif est donc bien, au total, d’encourager le travail de tous les salariés, quelles que soient les modalités d’aménagement du temps de travail et quel que soit le secteur d’activité concerné.

Selon les informations transmises par les services du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi au rapporteur, le coût de l’ensemble de ces mesures serait de l’ordre de près de six milliards d’euros en année pleine, soit à partir de 2009.

*

Mesure sociale tournée vers certains de nos concitoyens en grande difficulté économique, l’expérimentation du revenu de solidarité active (RSA) trouve également une place légitime dans le présent projet de loi qui a pour objet de revaloriser le travail.

1,2 million de nos concitoyens perçoivent aujourd’hui le revenu minimum d’insertion (RMI). Le RMI, dans son intitulé même, met l’accent sur l’insertion nécessaire de ses bénéficiaires. Pourtant, les politiques visant à favoriser le retour à l’emploi de ces personnes ont largement échoué. Force est en effet de constater que le nombre de bénéficiaires n’a cessé d’augmenter depuis la création du RMI, même si l’on doit se féliciter du recul constaté pendant les premiers mois de l’année 2007.

Comment garantir, dans tous les cas de figure, que ceux qui travaillent ont un revenu plus élevé que ceux qui ne travaillent pas, que toute heure travaillée en plus apporte effectivement un plus ?

Le débat sur l’équilibre à trouver entre les revenus d’assistance – et notamment les minima sociaux destinés à assurer un revenu de base à tous – et ceux du travail, qui doivent rester attractifs, n’est pas nouveau. Des réflexions approfondies ont été conduites ces dernières années sur la question, en particulier par Mme Valérie Létard et MM. Henri de Raincourt et Michel Mercier, sénateurs, ainsi naturellement que par la commission « Familles, vulnérabilité, pauvreté » présidée par M. Martin Hirsch. Les mécanismes d’« intéressement » développés pour intéresser financièrement les bénéficiaires de minima sociaux à un retour à l’activité ont montré diverses limites : ils sont complexes, ne s’appliquent que temporairement et seulement en cas de reprise d’emploi et pas de continuation d’une activité peu rémunératrice. Les termes du débat sont encore compliqués par la présence des « droits connexes », c’est-à-dire les avantages divers (exonération de diverses impositions, tarifs spéciaux ou gratuité pour les services publics, aides et secours divers…) qui sont souvent attribués sur la base du statut de bénéficiaire de telle ou telle allocation plutôt que sur celle des ressources effectives ; ces droits connexes suscitent nombre d’effets de seuil décourageant l’accroissement de l’activité rémunérée.

Il s’agit donc de dépasser cette opposition assistance/revenus du travail en mettant en œuvre un concept, le RSA, dont l’ambition à terme est de permettre à chacun de vivre dignement de son travail en améliorant les revenus des « travailleurs pauvres » sans peser sur le coût du travail. Le RSA aurait vocation à se substituer à l’ensemble des minima sociaux, à la prime pour l’emploi, voire aux aides au logement, et ce pour tous ceux dont les revenus propres sont insuffisants.

Dans un premier temps, une mesure aussi novatrice nécessite une expérimentation. La démarche sera, conformément aux dispositions constitutionnelles sur l’expérimentation, limitée à tout ou partie du territoire de départements volontaires, limitée également à trois années et évaluée ; son efficacité pourra donc être mesurée. Elle ne concernera également que deux catégories de bénéficiaires de minima sociaux, ceux qui perçoivent le revenu minimum d’insertion (RMI) ou l’allocation de parent isolé (API) ; à terme, cependant, un dispositif tel que le RSA, s’il doit être généralisé, a vocation à s’appliquer à tous les « travailleurs pauvres », percevant ou non un minimum social, afin de ne pas alimenter d’injustices, vraies ou ressenties, entre ceux qui ne vivent que de leur travail et ceux qui bénéficient aussi d’allocations de solidarité.

Le présent projet de loi est l’un des premiers présentés par le gouvernement en ce début de législature, ce qui montre bien l’importance essentielle attachée par le Président de la République, le Premier ministre, l’ensemble des membres du gouvernement et la majorité à la relance du pouvoir d’achat et à la lutte contre la pauvreté par la revalorisation du travail. La commission des affaires culturelles, familiales et sociales en a débattu avec passion, en particulier à l’occasion de l’audition du haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- AUDITION DU HAUT COMMISSAIRE AUX SOLIDARITÉS ACTIVES CONTRE LA PAUVRETÉ

La commission a procédé à l’audition commune avec la commission des finances, de l’économie générale et du plan, ouverte à la presse, de M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, sur le projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat au cours de sa séance du mercredi 4 juillet 2007.

Après que les commissaires ont observé une minute de silence à la mémoire de Paul-Henri Cugnenc, député de l’Hérault, décédé la nuit précédente, le président Pierre Méhaignerie a donné la parole à M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté.

M. Martin Hirsch, haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, a fait observer que les articles 8 à 11 du projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat – si celui-ci est adopté – permettront d’expérimenter, dans des départements volontaires, un dispositif qui est le fruit du travail d’une commission ayant réuni, notamment, deux parlementaires, Mme Paulette Guinchard et M. Laurent Wauquiez, et des représentants des syndicats et des associations.

Cette commission cherchait à résoudre le problème de la pauvreté des enfants : comment réduire celle-ci en privilégiant le retour au travail des parents ? Elle a publié un rapport, qui contient une quinzaine de résolutions et qui relève une difficulté majeure : dans un certain nombre de cas, la possibilité de travailler ne permet pas de sortir de la pauvreté.

Pour les personnes qui bénéficient des minima sociaux, la sortie du système est coûteuse : par exemple, une personne bénéficiaire du revenu minimum d’insertion (RMI), qui perçoit environ 440 euros par mois et une allocation, si elle reprend un travail à mi-temps – rémunéré à moins de 500 euros par mois –, ou si elle conclut un contrat d’avenir – dont la durée est plafonnée à vingt-six heures et qui est rémunéré à hauteur de 650 ou 700 euros par mois –, perdra le droit à certaines aides. Il devient alors presque rationnel de ne pas chercher à reprendre un travail. D’autres personnes, qui travaillent pourtant, vont se retrouver dans une situation de très grande pauvreté, d’où une certaine amertume.

Enfin, il existe de nombreuses situations intermédiaires : certains, en s’occupant de personnes âgées ou handicapées quelques demi-journées payées au Smic, par exemple quatre jours par semaine, percevraient ainsi 350 euros par mois. Mais comme cette somme est presque entièrement déduite de leurs prestations, ils ne gagneraient en fait pas un centime de plus que s’ils ne travaillaient pas.

Autre cas de figure : une personne bénéficiaire du RMI, qui avait eu l’opportunité de travailler pendant un été, a reçu ensuite une demande de remboursement de la caisse d’allocations familiales, qui avait recalculé la moyenne de ses revenus en prenant en compte ses revenus de l’été.

Il s’agit de répondre à ce genre de situations. Le dispositif proposé doit donc satisfaire à trois objectifs :

– Le premier est de garantir à toute personne qui reprend un travail que ses ressources vont augmenter, et cela dès la première heure travaillée, sans recréer de nouveaux effets de seuil, qu’il s’agisse d’un temps partiel ou d’un plein temps, et de façon durable. Les mécanismes existants permettent parfois de cumuler différents types de revenus, mais au bout d’un an, les ressources diminuent : l’effet en est évidemment délétère.

– Le deuxième objectif est de disposer d’une arme « anti-travailleurs pauvres ». Parfois, le temps de travail du salarié est contraint, sa qualification insuffisante et ses charges de famille telles qu’il se retrouve en dessous du seuil de pauvreté. Ainsi, sur un total de 2,5 millions de travailleurs pauvres, un tiers est constitué d’intermittents : il s’agit d’une pauvreté due à la précarité ; les situations de temps partiel subi correspondent au deuxième tiers : le plus souvent, des femmes sont concernées ; le troisième tiers est constitué de salariés travaillant à plein temps, avec des charges de famille importantes. Certaines armes ont été imaginées pour sortir ces travailleurs de la pauvreté au travail, à l’image de la prime pour l’emploi ou des négociations salariales. Mais la solidarité doit pouvoir compléter les revenus du travail.

– Le troisième objectif est de simplifier. Le code des droits contre l’exclusion, ouvrage de 800 pages, a recensé le nombre d’aides auxquelles un allocataire du RMI peut théoriquement prétendre : on en dénombre 51 ! Aucun allocataire ne peut effectivement prétendre à toutes et aucun spécialiste du droit social ne peut les connaître toutes. Toutefois elles existent, peuvent se neutraliser, disparaître, d’autant que certaines sont liées à un statut. Le système est donc d’une grande complexité.

À la complexité des aides s’ajoute la complexité des acteurs. Il y en a une douzaine : l’allocataire du RMI aura à faire au conseil général, au centre communal d’action sociale, à la caisse d’allocations familiales (CAF), à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM), à l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE), aux Assédic, à l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), etc. Le circuit pourra durer quelques mois avant que l’intéressé puisse faire valoir ses droits de façon effective et qu’on puisse lui parler de travail.

Il faut encore ajouter la complexité des situations. On a souvent classé les gens par catégories : allocataires du RMI, bénéficiaires de l’allocation de parent isolé, personnes relevant d’un autre dispositif ou minimum social, etc.

Ces situations sont difficiles pour les personnes concernées mais aussi pour celles qui sont censées les aider – services sociaux, entreprises, élus – et pour l’ensemble du pays, qui compte plus de situations de pauvreté qu’il ne devrait en dénombrer. Il faut remarquer également que les minima sociaux ont été conçus principalement pour ceux qui sont dans l’incapacité de travailler, et non pour ceux auxquels la société est incapable de procurer un travail leur permettant de vivre dignement.

C’est dans ce contexte qu’a été conçu le revenu de solidarité active. On passe de l’idée d’une allocation différentielle où les aides viennent compléter les revenus du travail, à celle selon laquelle les aides décroissent, mais moins vite que ne croissent les revenus du travail. Il est possible de faire un parallèle avec le bouclier qui concerne les salaires les plus élevés, où l’on fait en sorte de ne pas prélever plus qu’une certaine partie des revenus. Présentement, il se trouve que certains allocataires du RMI, qui reprennent un travail, se voient prélever 100 % de leur revenu supplémentaire. L’idée d’un bouclier consistera à garantir au bénéficiaire du RMI qui reprend un travail rémunéré à hauteur de 500 euros par mois qu’il conservera effectivement 60 % ou 70 % de cette somme, ce pourcentage restant à définir. Il reviendra ensuite aux différents services de recalculer les aides correspondantes.

Tel est le principe du RSA, conçu au départ par la commission précitée comme une prestation qui devait se substituer et non se rajouter au RMI, à l’allocation de parent isolé, aux primes et différents mécanismes d’intéressement, à la prime pour l’emploi et qui avait vocation à s’articuler ou se fondre avec l’allocation aux adultes handicapés (AAH) et l’allocation de solidarité spécifique (ASS). En effet, les problèmes que rencontrent les personnes handicapées sont équivalents à ceux que connaissent les allocataires du RMI : certaines, qui bénéficient de l’AAH, conviennent qu’elles auraient la possibilité de travailler à quart de temps mais qu’elles ne le font pas pour éviter qu’on ne déduise la rémunération correspondante du montant de leur allocation.

Il convient de simplifier les modalités de mise en œuvre de ces différentes primes, mais aussi certains droits connexes, qu’ils dépendent de l’État ou des collectivités locales. Les barèmes devraient être harmonisés et s’appliquer en fonction non des statuts des intéressés mais de leurs ressources. Des travaux parlementaires ont été menés en la matière aussi bien à l’Assemblée nationale qu’au Sénat pour simplifier et rendre plus juste le dispositif.

Cela demande du temps et de nombreuses concertations sont requises : ces dispositifs sont gérés par des institutions et des collectivités différentes ainsi que des budgets différents ; ils sont enchevêtrés, mais ne peuvent être « détricotés » trop rapidement. D’où la nécessité de trouver une méthode évitant d’aller « dans le mur », sur le plan financier comme sur le plan opérationnel.

Sur le plan financier, il s’agit d’aider les gens à trouver un travail à la hauteur de leurs capacités et de ce qu’on peut leur offrir, mais aussi qui leur permette de s’en sortir. Le travail est conçu comme un socle fondamental. Si l’on fait disparaître les effets de seuil précédemment évoqués, il devrait être possible de permettre à certains de passer d’une situation où ils ne travaillent pas à une situation où ils travaillent – quitte à ce que ce soit à temps partiel dans un premier temps – et de permettre à d’autres, qui travaillent à temps partiel, de travailler à temps plein. Au total, le volume d’heures travaillées serait donc augmenté pour chacun. Cela devrait engendrer des économies en matière de prestations sociales. Cependant, pour permettre ces économies, il faut d’abord consentir à un certain investissement, établir les barèmes et la nature des prestations au bon niveau, sans déstabiliser, dans le même temps, d’autres dispositifs.

Sur le plan opérationnel, les personnes en difficulté rencontrent différentes catégories d’obstacles : les premiers sont liés à l’environnement économique, aux effets de seuil, à la conjoncture économique, à la situation de l’emploi ; les seconds sont liés à leurs propres difficultés, qu’elles concernent l’emploi, le logement, la formation, la santé, les transports, la garde des enfants, le surendettement, etc. Il est possible de déterminer douze ou quinze problèmes fréquents. La plupart des personnes en rencontrent trois ou quatre, qu’il faut traiter en même temps. Or les politiques publiques ne sont plus armées pour cela et ces personnes se trouvent renvoyées d’une administration à l’autre. Il convient donc de créer des dispositifs davantage centrés sur les personnes, plus réactifs, plus fluides et plus rapides. Pour cela, il faut mobiliser les différents services qui ont chacun à gérer leur propre dispositif. Opérationnellement, il est important de modifier les habitudes.

Le pari est double : miser sur la simplification des prestations, pour rendre plus fluide le dispositif institutionnel ; miser sur l’organisation d’expérimentations sur des territoires volontaires.

Le sujet a déjà été travaillé et certains effets de la loi n° 2006-339 du 23 mars 2006 relative au retour à l’emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux ont été mis en évidence. Sur le premier territoire où un travail a été réalisé – le département de l’Eure – il a été décidé qu’un jour donné, les nouveaux allocataires du RMI trouveraient en face d’eux les représentants de la caisse d’allocations familiales (CAF) et d’autres institutions ; qu’il faudrait non plus trois mois, mais trois jours pour mettre au point un contrat d’insertion ; que ces nouveaux allocataires du RMI pourraient bénéficier immédiatement de la couverture maladie universelle (CMU) ; que dès le premier jour, la question du travail serait évoquée, car l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) était aussi présente, avec les offres d’emploi disponibles. Grâce à ce dispositif, le taux de conclusion de contrats d’insertion est ainsi passé de 30 % à 90 %.

Il est aujourd’hui proposé de travailler en deux étapes, en commençant par une étape expérimentale, consolidée et même considérablement renforcée par le présent texte. Elle permettrait de préparer et de faire vivre les expérimentations, tout en favorisant la concertation sur les choix à faire s’agissant de la grande réforme des minima sociaux. Cette phase comporte quatre éléments :

– Premièrement, dans les départements volontaires, sur la partie du territoire choisie comme lieu d’expérimentation, tous les allocataires du RMI ayant une activité pendant cette période – qu’ils la reprennent ou qu’ils en accroissent la durée – se verront garantir un revenu supérieur à celui qu’ils percevraient s’ils ne travaillaient pas ; et cela, sans distinctions entre les allocataires car le dispositif doit être simple et accessible à tout le monde.

– Deuxièmement, les bénéficiaires de l’allocation de parent isolé (API), qui ne bénéficient pas des mécanismes d’insertion, et sont souvent de futurs allocataires du RMI, devraient bénéficier d’un dispositif « miroir » de celui dont bénéficient les allocataires du RMI : en effet, les allocataires du RMI dépendent des conseils généraux, ceux de l’API de l’État. Il serait souhaitable que l’État puisse faire bénéficier les allocataires de l’API du revenu de solidarité sans que l’on attende qu’ils soient sortis du dispositif API.

– Troisièmement, l’État contribuera au financement de ces expérimentations. Les départements pionniers, qui avaient trouvé la démarche intéressante, se sont dits prêts à les financer eux-mêmes, en attendant des jours meilleurs. Mais dès lors que cette démarche s’inscrit dans une réforme globale – d’intérêt local mais aussi d’intérêt national –, il a semblé normal au gouvernement que l’État participe de tous les points de vue à ces programmes d’expérimentation, en particulier en mobilisant les différentes administrations ou les différents établissements publics qui relèvent de sa compétence, la réussite de ces expérimentations devenant l’un de leurs objectifs, en simplifiant juridiquement les dispositifs concernés et en prenant financièrement en charge une partie du surcoût.

– Quatrièmement, les conditions dans lesquelles les départements pourront se porter volontaires doivent être précisées. L’article 142 de la loi de finances pour 2007 a entrouvert la porte de ces expérimentations ; il a conduit dix-sept départements à s’engager dans cette démarche. Il est proposé à ces départements de compléter leur dossier d’ici au 30 septembre s’ils souhaitent bénéficier des modifications que pourrait adopter le Parlement avec le présent texte.

Il est prévu également que les départements qui n’ont pas été intéressés par le premier dispositif, mais qui le seraient par le dispositif renforcé, puissent s’inscrire d’ici au 30 septembre. Néanmoins, leur nombre sera limité à une dizaine. Au-delà, les départements prioritairement retenus seront ceux connaissant le plus de difficultés, et donc ayant le potentiel fiscal le plus faible. Reste à savoir si c’est le bon critère ; il sera possible d’en discuter. Cette phase d’expérimentation devrait durer trois ans, voire moins, si la réforme peut entrer en vigueur plus rapidement, peut-être dès la fin de l’année prochaine.

Telle est l’économie générale de ce dispositif, dont il sera bien sûr rendu compte de l’état d’avancement.

Un débat a suivi l’exposé du haut commissaire.

M. Dominique Tian, rapporteur pour avis, après avoir remercié le haut commissaire pour la précision de son intervention, a estimé que le dispositif proposé, fondé sur le principe de l’expérimentation, est simple à comprendre et très réactif, facile à mettre en place très rapidement. Il est cependant regrettable que le haut commissaire n’ait pas parlé davantage de la réforme des minima sociaux.

Par ailleurs, quels sont les fonds dont il pourra disposer ? Le nombre des personnes concernées étant évalué à 55 000 dans le dossier de présentation et le surcoût par personne étant estimé entre 1 000 et 1 200 euros, le coût total de l’expérimentation s’élèverait à au moins 55 millions d’euros. Le gouvernement doit rapidement préciser les moyens qui seront consacrés à la mesure.

Enfin, il serait souhaitable de profiter de l’évaluation qui sera faite du RSA pour l’élargir au RMI : quelles sont les personnes qui font appel au RMI, pourquoi certaines y restent des années, pourquoi certaines ne cherchent pas à en sortir, pourquoi certaines sont plus facilement employables que d’autres ? Refusent-elles toute activité ou ne peuvent-elles pas en prendre une ? Il convient d’aller plus loin dans cette évaluation des allocataires du RMI, qui représentent plus d’un million de personnes en France.

Le président Pierre Méhaignerie a demandé au haut commissaire d’évoquer des cas concrets. Quel sera, avec le RSA, le revenu d’une personne qui travaille à deux tiers de temps et qui n’a pas d’autres revenus ? Que sera-t-il pour une personne qui travaille 18 heures, mais qui travaille ailleurs, plus ou moins légalement ?

M. Gilles Carrez, rapporteur de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, après avoir appuyé la demande de présentation de cas concrets, a demandé si l’on pourrait prendre en compte, dans certaines expérimentations, les aides au logement, celles-ci pouvant représenter près du tiers des revenus des bénéficiaires de minima sociaux, et à peine moins que les allocations stricto sensu. La même question vaut pour la prime pour l’emploi.

Par ailleurs, l’optimisme du rapporteur pour avis doit être salué, car la mise en place du RSA ne sera sans doute pas si simple. Cela demandera beaucoup d’ingénierie sociale. Tout dépendra du degré d’organisation et de motivation des départements. Cela pose la question de la participation de ces derniers, et de leur choix. Le critère de priorité proposé pour choisir les départements candidats à l’expérimentation, s’ils étaient plus de dix, est le potentiel fiscal ; ce critère ne paraît pas le plus pertinent. La motivation vient souvent des avantages financiers. L’État est prêt à partager avec les départements les surcoûts. Mais jusqu’à quelle hauteur ? La moitié ou un peu plus ? Cela étant, le dispositif proposé est formidable et on ne peut qu’y adhérer. Il est très complémentaire de l’article 1er du texte, relatif aux heures supplémentaires. Cet article 1er concerne ceux qui ont un emploi et dont on désire valoriser le travail. Quant à ceux qui n’ont pas d’emploi mais qui en cherchent un, ils sont concernés par les derniers articles du texte.

M. Didier Migaud, président de la commission des finances, de l’économie générale et du plan, a également demandé des précisions sur les modalités de contribution de l’État aux dispositifs d’expérimentation, sur la répartition des coûts entre l’État, les départements et d’autres partenaires et sur le montant global de l’expérimentation, la généralisation du RSA étant évaluée entre 4 et 8 milliards d’euros.

Le haut commissaire a tout d’abord insisté sur la distinction à faire entre le dispositif cible, à savoir la future réforme déjà préfigurée, et les premières étapes expérimentales qui n’intéressent qu’une partie de la population concernée et certaines aides. Puis, en réponse aux intervenants, il a apporté les précisions suivantes :

– Il s’agit d’éviter, dans le dispositif cible, de recréer des effets de seuil et des iniquités après les avoir supprimés. D’où un dispositif relativement simple concernant toutes celles et tous ceux dont les ressources de travail sont inférieures à un certain niveau, compte tenu de leur situation de famille. Leur revenu pourrait être complété jusqu’à un niveau correspondant à peu près au seuil actuel de sortie de la prime pour l’emploi, qu’elles soient passées ou non par les minima sociaux. Encore faut-il déterminer à partir de quelle quantité de travail on ne doit plus être dans la pauvreté, ce qui relève d’une décision politique.

– Lorsque ce dispositif a été imaginé, son coût global a été estimé entre 6 et 8 milliards d’euros, tout compris, mais sans prendre en compte les effets d’économies induits qui sont liés à la reprise de travail ; or certains pays qui ont mis en œuvre des systèmes de même nature, comme le Canada ou d’autres pays anglo-saxons, se sont rendu compte que l’investissement initial était remboursé. Le travail sera repris et l’on procédera à certaines simulations, qui pourront être étayées par des travaux de terrain.

– Concernant l’expérimentation, des documents seront distribués aux commissaires. On y voit qu’une personne seule au RMI reçoit un peu moins de 400 euros par mois. Si elle se remet à travailler à quart de temps, elle reçoit actuellement, la première année, 514 euros. Dans le nouveau dispositif, elle passera de 514 à 564. Si elle est à mi-temps, elle recevra 740 euros, à trois quarts de temps 916 euros et à plein temps 1 112 euros.

Le président Pierre Méhaignerie a demandé si les personnes concernées conserveraient les avantages indirects liés au RMI.

Après avoir précisé qu’elles les conserveraient tant qu’elles percevront une fraction de RMI, le haut commissaire a poursuivi ses réponses :

– Effectivement la mise en place ne sera pas simple. Il faudra modifier les habitudes et un texte, un décret ou une circulaire ne sauraient suffire. Cependant la démarche proposée prend en compte cette complexité. On continuera ce que l’on a commencé à faire, c’est-à-dire à faire bouger les services publics : ceux qui se trouvent dans les départements concernés pourront témoigner qu’il se passe quelque chose et que l’on arrive à simplifier les procédures, à lever les préalables, sans s’arrêter au premier obstacle. L’accompagnement est également important et il faudra veiller à ce que l’État y consacre de l’argent. Ce n’est pas aux départements de redéployer des travailleurs sociaux pour assurer tout le travail d’animation, d’accompagnement, d’impulsion, de coordination, de simplification, etc. L’aller et retour entre le niveau local et le niveau national devra être fluide : on doit pouvoir y arriver.

– Les allocataires du RMI constituent des populations tout à fait hétérogènes de par leur situation familiale, leur âge, leurs problèmes. Ils n’ont en commun que le niveau de leurs ressources : moins de 450 euros par mois. Par exemple, il y a environ 60 000 bénéficiaires du RMI à Paris : 15 000 ou 20 000 appartiennent au secteur du spectacle, 3 000 ou 4 000 au secteur de la communication. Ils sont évidemment assez différents des personnes que l’on peut rencontrer à Louviers ou dans les zones rurales de la Côte d’Or. Pour autant, si on les aide à régler leurs problèmes, les uns et les autres partagent la même aspiration à occuper une place digne dans la société.

Il ne faut donc pas commencer par les cataloguer, mais faire en sorte que la logique des droits et des devoirs et des engagements réciproques soit mise en œuvre. Notre niveau d’exigence doit correspondre à ce que l’on peut demander aux personnes et ce que l’on peut leur offrir. Dans de nombreux endroits, les personnes n’ont pas été accompagnées pendant deux ou trois ans ; il n’est pas possible de leur dire que, demain matin, on va leur demander quelque chose. Il faut aussi que l’État et les différents services se mettent en mesure de les recevoir et de leur répondre.

L’année prochaine, on aura une idée plus claire des dispositifs adaptés. Certes, on peut prévoir une évaluation plus précise des allocataires, mais il faut se méfier des clichés car les parcours sont assez compliqués. Il est frappant de constater que ceux qui vivent de leur travail chez Emmaüs sont plutôt issus du tiers de bénéficiaires du RMI souvent jugés inaptes au travail. Voilà pourquoi il convient d’avancer avec prudence et se méfier des catalogages.

– S’agissant de la prise en charge et de la répartition des coûts entre les différents partenaires, il convient d’être le plus complet et le plus précis possible. On peut distinguer deux cas de figure. Celui des personnes qui reprennent un travail mais bénéficient actuellement d’un intéressement à la reprise d’activité insuffisant (parce que leur horaire mensuel de travail est inférieur à 78 heures) ou inexistant parce qu’ils sont titulaires d’un contrat d’avenir ou d’un contrat insertion-revenu minimum d’activité : pour cette catégorie-là, soit à peu près 20 % des bénéficiaires du RMI, le surcoût unitaire annuel du revenu de solidarité active serait, pour les départements volontaires, de 1 200 à 1 300 euros. Celui des personnes sortant de tout dispositif d’intéressement, actuellement, après un an de travail, ce qui est trop court : il faut éviter que les intéressés ne « replongent » et le surcoût est alors plus important, de l’ordre de 2 600 euros.

En moyenne, le surcoût unitaire serait un peu inférieur à 2 000 euros. Si on estime que 25 départements vont participer à l’expérimentation sur une partie de leur territoire, avec environ 3 000 allocataires du RMI chacun, cela fait 75 000 personnes concernées. Si 20 % d’entre eux bénéficient du RSA, soit 15 000, et si le coût moyen est de 2 000 euros sur l’année, cela fait un total de 30 millions d’euros.

L’État propose de prendre en charge la moitié de ce surcoût direct pour les départements, soit 15 millions d’euros, de financer la totalité de l’expérimentation parallèle sur l’API, ainsi que des travaux d’évaluation, d’ingénierie et d’accompagnement. Ainsi, sur une enveloppe globale qui ne devrait pas dépasser 25 millions d’euros, il y aurait : 15 à 17 millions de contribution aux départements ; 3,5 à 4 millions pour la prise en charge du RSA des bénéficiaires de l’API ; les 3 à 5 millions restants servant à prendre en charge l’accompagnement, l’ingénierie, l’évaluation, etc.

M. Denis Jacquat s’est déclaré favorable au RSA dans la mesure où le dispositif est expérimental et repose sur le volontariat des départements. Dans sa philosophie, le RSA rejoint le postulat selon lequel les revenus du travail doivent être supérieurs à ceux de l’assistance. Lors de l’institution du RMI, qui eut lieu dans la même salle de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, une grande discussion s’était instaurée sur son appellation : « RM » (revenu minimum) ou « RMI » (revenu minimum d’insertion) ? La majorité des commissaires de l’époque, estimant que ce revenu devait être un marchepied vers l’emploi pour les personnes qui en étaient éloignées, avait opté pour la seconde appellation. Or l’insertion professionnelle s’est révélée très difficile à réaliser. Certains allocataires du RMI exercent une activité annexe : travail au noir, voire travail à l’étranger dans les départements frontaliers. Il serait bon de revenir à l’esprit primitif du RMI, à savoir le donnant-donnant, c’est-à-dire qu’en échange du versement de l’aide, les personnes qui le peuvent effectuent une activité d’intérêt collectif. Où en est-on dans ce domaine ? Dans le cadre des grands projets de ville (GPV) des équipes pour l’insertion ont convoqué les bénéficiaires du RMI un par un et sont parvenues à leur trouver des activités.

Mme Martine Carrillon-Couvreur a demandé des précisions, premièrement, sur le financement du dispositif – quelle est la durée prévue de l’engagement financier de l’État ? Quelle sera la répartition des responsabilités entre celui-ci et les départements ? –, deuxièmement, sur la façon d’agir contre l’éparpillement des acteurs quand deux ministères et un haut commissariat sont concernés par la question de la pauvreté et, troisièmement, sur les publics concernés. N’y a-t-il pas un risque que le RSA ne profite qu’aux personnes les plus proches de l’emploi, et donc qu’il y ait une « dualisation » du public du RMI ? Comment répondre à la situation de l’ensemble de ces personnes, en particulier de celles qui sont les plus éloignées de l’emploi et qui se trouvent dans les situations les plus précaires ? Comment garantir que le RSA ne deviendra pas un instrument supplémentaire du traitement social du chômage partiel, l’ensemble des politiques d’aides financières et d’aide aux personnes n’étant pas « revisité » dans le cadre du projet de loi proposé ?

M. Jean-Pierre Brard, considérant que M. Martin Hirsch est un homme honorable, qui d’ailleurs n’a pas accepté d’être ministre, ce qui constitue une ligne de partage pour les ventres affamés qui étaient à l’affût de trois lentilles ministérielles, a craint qu’il ne soit le Henri Dunant du XXIe siècle, rappelant que cet humaniste suisse, effrayé par les conséquences de la guerre qu’il avait pu constater à Solferino, a été à l’origine de la création de la Croix-Rouge.

Puis, il a évoqué le problème des loyers, considérant que dans une commune comme Montreuil, les gens sont livrés, pieds et poings liés, à des aigrefins. Cette question fait-elle l’objet de réflexions ? Enfin, le parallèle ayant été fait entre les deux « boucliers », fiscal et social, il est intéressant de comparer les montants en cause – 15 milliards d’euros de cadeaux fiscaux d’un côté, 25 millions pour le RSA de l’autre : ce rapport de 1 à 600 entre ce qui est fait pour les pauvres et les riches permet de juger la politique du gouvernement actuel.

M. François Baroin a présenté les observations suivantes :

– Le critère retenu pour la sélection des départements candidats, à savoir le potentiel fiscal, est dangereux, surtout pour ceux qui ont été fortement touchés par les délocalisations, car cela va engendrer un dispositif quasiment commercialisé des personnes qui sont dans une grande pauvreté. Cela mérite une discussion sérieuse.

– Le RSA a plusieurs murs porteurs. L’un d’eux, sur lequel le peuple a reçu une assurance du Président de la République, porte sur la contractualisation des engagements réciproques, au regard de l’emploi, entre celui qui touche une allocation et l’État. Or, pour les bénéficiaires de l’API, il est prévu, à l’article 10, que ces engagements réciproques seront précisés par voie réglementaire ; un point aussi important ne peut être renvoyé à un texte réglementaire et doit être discuté dans l’hémicycle.

– Les maisons de l’emploi font désormais partie de la « tuyauterie » de la cohésion sociale. Certaines existent déjà, d’autres se mettent en place. Comment le dispositif du RSA va-t-il s’insérer dans ce contexte ?

M. Marcel Rogemont a d’abord indiqué que l’Agence nouvelle des solidarités actives estime à 30 % la fraction des bénéficiaires du RMI susceptibles de bénéficier du RSA. Qu’est-il prévu pour les 70 % restants ? Le coût du dispositif est important et l’engagement de l’État intéressant. Cependant, lorsque ont été lancés les contrats d’avenir, il était convenu qu’une moitié relèverait de l’État, l’autre moitié du conseil général. Or, en Ille-et-Vilaine, le conseil général finance 71 % des contrats actuellement. Quelles assurances sont données qu’il y aura un financement pérenne et clair de l’État au moins pendant la période de l’expérimentation ?

Par ailleurs, si l’on comprend bien le dispositif, un travailleur à temps partiel qui ne gagne pas beaucoup d’argent doit d’abord percevoir le RMI pour bénéficier du RSA. N’est-on pas en train de créer de nouveaux effets de trappe de pauvreté et des injustices ? Enfin, l’expérimentation est prévue sur trois ans. Cela signifie-t-il qu’il n’y aura pas de généralisation du processus avant ?

Mme Marie-Anne Montchamp, tout en s’interrogeant sur le fait que l’allocation aux adultes handicapés (AAH) puisse être considérée comme un minimum social, a estimé que l’égalité des droits des personnes handicapées implique que ces dernières ne soient pas tenues à l’écart du dispositif proposé, d’autant que les mécanismes de compensation facilitent leur accès à l’emploi et que les entreprises adaptées qui sont censées accueillir ces personnes dans l’emploi ont des ressources limitées. Il apparaît d’autant plus important d’envisager une expérimentation ciblée sur le public handicapé que les progrès techniques font que même des personnes très lourdement handicapées peuvent, si elles le veulent, accéder à l’emploi.

Mme Marisol Touraine, saluant l’optimisme de M. Martin Hirsch, s’est cependant déclarée dubitative quant à la portée exacte du dispositif et a souhaité avoir des précisions sur les points suivants :

– Il semble y avoir une sorte de confusion entre ce que le haut commissaire a appelé le dispositif cible et le projet de loi proposé. Au moment où la loi étendra l’expérimentation à l’ensemble du territoire national, le public concerné sera-t-il toujours limité aux allocataires du RMI et de l’API ou bien couvrira-t-il l’ensemble des travailleurs pauvres ? Par ailleurs, comment une personne passant d’un mi-temps à deux tiers de temps ou à un temps plein peut-elle bénéficier du dispositif proposé s’il faut percevoir le RMI ?

– Quelle est la durée prévue pour le dispositif ? L’ensemble des conventions d’expérimentation seront-elles identiques, de même durée ?

– Le RSA ne donnant pas en soi un emploi, une coopération est attendue de la part des employeurs ; qu’en sera-t-il ?

– Plus généralement, enfin, la France est l’un des rares pays à avoir neuf minima sociaux. L’objectif est-il que le RSA se substitue, en partie, à ces derniers ou de créer un dispositif différent de lutte contre la pauvreté indépendamment de la question des minima sociaux ?

M. Charles de Courson, se fondant sur l’expérience de la Marne, département qui met en œuvre l’expérimentation prévue par l’article 142 de la loi de finances pour 2007, a estimé que le champ de l’expérimentation pourrait utilement être élargi à des dérogations à un certain nombre de dispositions du code du travail relatives, d’une part, au contrat d’avenir et, d’autre part, au contrat d’insertion-revenu minimum d’activité. Par ailleurs, serait-il possible d’intégrer au RSA expérimental la prime pour l’emploi – que tout le monde souhaite voir « branchée » sur la feuille de paye et non sur l’impôt – et d’autres droits connexes, comme les aides au logement, les exonérations de taxe d’habitation ? Enfin, ne serait-il pas souhaitable, comme cela était sur le point d’être voté en 1997, d’éclater l’API entre un RMI et une allocation d’insertion liée à la signature d’un contrat ? Le contrôle de cette aide pose en effet des problèmes.

M. Pierre Morange a insisté sur le fait que la complexité des situations, des acteurs et des aides impose une maîtrise de l’information et a rappelé que, à la suite des travaux de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de finances de la sécurité sociale, il a déposé un amendement, qui a été voté, tendant à établir un numéro d’identification – le NIR – commun à toutes les caisses sociales – congés payés, Assédic, ANPE, etc. –, figurant dans un fichier informatique commun et croisé avec le fichier du fisc. Cela permet à la fois d’améliorer le service rendu à chacun des assurés, de s’assurer qu’il n’y a pas détournement de l’argent public à vocation sanitaire et sociale et de constituer une base de données efficiente pour la mise en œuvre du dispositif proposé.

Mme Muriel Marland-Militello a souligné que, si la population des bénéficiaires du RMI est très hétérogène, celle des personnes chargées du soutien ne l’est pas moins, chacun défendant en outre son « pré carré ». Y aura-t-il un référent unique par allocataire du RMI, comme cela est en train de se mettre en place dans les maisons départementales des personnes handicapées, un tel référent étant le seul garant d’une simplification du système ?

M. Etienne Pinte a signalé que beaucoup de communes apportent des aides sociales en fonction des revenus des intéressés. Ces aides seront-elles prises en compte ? A défaut, il y aurait un risque que leur perte vienne amputer l’augmentation du revenu des personnes bénéficiant du RSA.

M. Gérard Bapt a indiqué que les aides des communes sont par définition dispersées et portent sur tous les aspects de la vie des allocataires du RMI et posé les questions suivantes :

– Quelles sont les compétences respectives de M. Martin Hirsch et de Mme Christine Lagarde ?

– Le milliard d’euros que les départements attendent de l’État au titre de la compensation du transfert du RMI pourra-t-il être honoré ?

– Par ailleurs, le projet de loi permet de réserver le RSA aux personnes résidant depuis six mois dans les départements concernés. Cela ne va-t-il pas à l’encontre du développement de la mobilité, dont l’insuffisance est souvent citée comme un frein à l’emploi, d’autant qu’une frontière départementale peut couper un même bassin d’emploi, voire une même communauté de communes située sur deux départements différents ?

M. Christophe Sirugue a observé que le RSA est un outil et qu’il ne crée pas d’emplois potentiels. Qu’est-il prévu pour que les entreprises s’impliquent en ce domaine ? Si le public concerné est celui qui se trouve le plus proche de l’emploi, ne peut-on pas considérer que le RSA relève de la mission du service public de l’emploi ? Pourquoi faut-il, dans ces conditions, qu’il y ait un surcoût financé par les collectivités départementales ? Concernant la substitution du RSA aux autres minima sociaux, cette éventualité est-elle à prévoir dans des délais courts ou ne sera-t-elle à considérer qu’au terme de l’expérimentation ?

Par ailleurs, l’ADF – l’Assemblée des départements de France – est plus que réservée sur la prise en compte du potentiel fiscal pour le choix des départements expérimentateurs. Des éléments à caractère démographique seraient préférables, comme le taux de bénéficiaires du RMI inclus dans le RSA dans la population totale.

Enfin, au regard de l’expérience, la question financière doit être abordée. Qu’en est-il en effet du milliard d’euros qui n’a pas été versé aux départements au titre de la compensation du transfert du RMI ? De même, M. Jean-Louis Borloo, alors qu’il appartenait au gouvernement de M. Dominique de Villepin, s’était engagé à ce que l’État finance les surcoûts afférents aux contrats d’avenir à hauteur de 12 % du montant d’un RMI de base : il n’en est plus question… Dans le présent projet de loi, pourquoi est-il écrit que l’État, pour 2007, « peut prévoir » – et non « prévoira » – la prise en charge d’une partie du coût de l’expérimentation mentionnée ? Pourquoi n’est-ce qu’une possibilité et pourquoi n’est-ce prévu que pour 2007 ?

M. Roland Muzeau a fait remarquer que, si le principe du RSA n’est pas contesté, il est loin de faire l’unanimité puisque l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux (UNIOPSS), ATD Quart-Monde et Le Secours Catholique s’insurgent contre le fait que, pour la première fois, la question des revenus n’est pas prise en compte, estiment que c’est un retour en arrière très préoccupant et souhaitent qu’il y ait une concertation. Celle-ci semble difficile puisque le texte doit être discuté dans quelques jours. En outre, aucun bilan n’a été fourni sur la loi du 23 mars 2006 pour le retour à l’emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux, qui a institué des primes forfaitaires de 150 euros, de 225 euros et de 1 000 euros, selon les situations des personnes concernées. Il aurait été utile avant d’aborder la présente discussion.

Par ailleurs, comment éviter que le RSA n’encourage la multiplication des offres de travail à temps partiel, et leur corollaire, à savoir une pression sur les salaires et les grilles professionnelles ?

Enfin, la Fédération nationale des ambulanciers privés (FNAP) proteste contre les propos tenus dans un autre cadre par le haut commissaire sur la couverture de santé au-delà d’un certain seuil et sur l’instauration d’une franchise d’une journée sur les arrêts de travail.

M. Benoist Apparu a demandé pourquoi les droits connexes, accordés par les collectivités territoriales comme par l’État, ne sont pas pris en compte dans l’expérimentation alors qu’ils jouent un rôle très important dans la comparaison des niveaux de vie entre allocataires sociaux et travailleurs. Même en dehors de cela, si le RSA avec reprise d’emploi à plein temps offre un niveau de revenu supérieur au SMIC, est-il légitime que les personnes au SMIC depuis cinq ou dix ans soient moins bien rémunérées que celles au RSA en sortie de RMI ?

M. Patrick Lebreton a approuvé le principe du retour à l’activité des allocataires de minima sociaux. Cependant, l’expérience des contrats d’avenir à La Réunion a montré les limites de cet exercice. Il est vrai que la situation y est particulière : la population active représente 308 956 personnes sur un total de 770 000 habitants ; le nombre de chômeurs atteint 93 900 et celui de bénéficiaires du RMI 73 000. Y aura-t-il un dispositif particulier pour l’outre-mer en matière de RSA ?

Le président Pierre Méhaignerie a tout d’abord rappelé que, selon les départements, le taux de signature des contrats d’insertion avec les bénéficiaires du RMI varie entre 10 et 90 %. La motivation et la mobilisation des acteurs locaux sont donc une condition essentielle de la réussite de toute politique dans ce domaine. S’agissant des personnes au RMI, les enquêtes montrent également que 30 %, gravement handicapées, ne reprendront pas le travail, 20 % sont des jeunes en attente d’un emploi qui ne demandent pas d’accompagnement particulier, et 40 % pourraient travailler. Pour ces dernières se pose le problème de la mobilisation puisque 400 000 offres d’emploi sont non pourvues.

M. Jacques Delors, dans le rapport qu’il a conduit dans le cadre du Conseil de l’emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC), a écrit que le problème français est que le salaire direct a peu augmenté ces dernières années, alors que le salaire social et différé est de plus en plus important. Comment faire en sorte que ce déséquilibre ne soit encore plus fort dans les prochaines années ? Le même rapport apprend que le quintile de la population française aux revenus les plus faibles voit, par les prestations, augmenter de 56 % son revenu, tandis que le quintile le plus aisé voit, par la fiscalité, son revenu diminuer de 21 %. Il faut remettre toutes ces données en perspective par rapport aux pays européens.

Enfin, dans l’analyse, souvent polémique, des relations entre les collectivités locales, notamment les départements, et l’État, deux vérités ne doivent pas être séparées. La première est que l’État transfère des responsabilités sans en donner toujours les moyens. La seconde – qu’il ne faut pas oublier – est qu’il prend de plus en plus en charge une partie importante des impôts locaux par les dégrèvements et exonérations qui lui sont imposés par le Parlement. Il faut arrêter d’accuser sans cesse l’État. La taxe d’habitation payée effectivement par les citoyens rapporte 11 milliards d’euros quand les dotations d’État aux collectivités, tout compris, s’élèvent à 79 milliards d’euros. Il est des vérités qu’il est bon de rappeler si l’on veut que les responsabilités soient tenues à tous les échelons.

Le haut commissaire a apporté les réponses suivantes aux intervenants :

– La question concernant le temps laissé à l’expérimentation avant la généralisation est liée à celle sur les disparités pouvant exister entre les situations. Lors d’une expérimentation, une population est concernée tandis que l’autre ne l’est pas. Cela est tolérable sur un temps pas trop long et pour un écart pas trop important. Il faut trouver une cote pas trop mal taillée. Avec une durée d’expérimentation de trois ans, un engagement de cette durée pourra être pris avec les personnes ; c’est nécessaire, il est impossible de demander aux gens de se mobiliser sur une période inférieure.

Cela ne signifie par pour autant que la réforme globale n’interviendra qu’après ce délai. Le Premier ministre et le Président de la République estiment qu’elle doit avoir lieu avant et envisagent de revenir devant le Parlement dans un an ou dix-huit mois avec pour objectif une application de la réforme au 1er janvier 2009. D’ici là, des éléments d’appréciation et d’évaluation pourront être recueillis. Des évolutions ont eu lieu au cours des derniers mois dans les premiers départements expérimentaux et peuvent déjà être mesurées. Des calages financiers et opérationnels seront disponibles. Deux cas de figure se présenteront alors : soit on considérera que les expérimentations doivent être poursuivies et les départements expérimentaux pourront continuer des règles différentes pendant les deux années suivantes, soit on considérera que la généralisation ne rend plus nécessaires les dérogations qui leur étaient appliquées et ils seront réintégrés dans le droit commun. La richesse des questions posées lors de la présente audition montre l’ampleur de la tâche à accomplir, surtout si l’on veut parvenir à un dispositif plus simple et plus cohérent.

– Pour ce qui concerne les allocataires de l’AAH, un certain nombre d’associations vont être reçues prochainement pour faire part de leur vision des choses. Si des dispositions peuvent être ajoutées dans le projet de loi sans trop de difficultés, cela donnera lieu à débat, mais il n’a pas été jugé bon d’inclure des mesures à ce sujet trop tôt dans le texte pour ne pas anticiper sur ces réunions et ne pas laisser les associations en dehors du processus.

– Le projet ne concerne que les allocataires du RMI et de l’API car ils sont dans des mécanismes dont on maîtrise et peut faire évoluer rapidement les paramètres, tandis qu’il est impossible d’inventer de toutes pièces un dispositif d’ensemble pour les travailleurs pauvres. On a préféré ouvrir le chantier avec une expérimentation limitée et réfléchir en même temps à l’intégration future d’éléments comme la prime pour l’emploi, plutôt que de faire du bricolage qui ne fonctionnerait pas. Un examen de ce qui est jouable est prévu, sans préjugé. La seule expertise dont on dispose actuellement réside dans les différents rapports rédigés sur le sujet.

– Il en va de même pour les droits connexes et les prestations des communes. Il serait bon que, dans les départements volontaires, les communes concernées puissent s’impliquer, spontanément ou en se rattachant au département par une convention. Si, dans certains endroits, on parvient, de la région jusqu’à la commune, à « mettre au carré » les différentes prestations pour parvenir à une harmonisation – comme pour le transport en Île-de-France – ce sera utile pour les autres. On ne dispose pas d’une connaissance exhaustive des différentes prestations, d’où l’inutilité de pousser le Parlement à légiférer sur des terrains mal connus. En revanche, toutes les informations que l’on pourra acquérir sur la manière dont les choses se passent dans les communes et sur les conséquences induites par certains changements et, notamment, par l’alignement de certains critères sur d’autres plus généraux seront utiles pour la suite. Cela permettra de déterminer si, dans le respect de l’autonomie des collectivités locales, une loi doit caler le dispositif ou s’il suffit de donner des lignes directrices aux communes. Ce sera un autre chantier important de l’année qui vient.

– Doit-on développer pour les allocataires du RMI des activités professionnelles d’intérêt collectif ? Le but du RSA est de permettre aux personnes percevant les minima sociaux de retrouver un vrai emploi avec un vrai salaire et une vraie protection sociale et, lorsque cette dernière n’est pas suffisante, de la compléter. Il n’est pas question de créer des dispositifs spécifiques dans lesquels elles n’auraient pas le statut de salarié, à la fois pour ne pas les rendre marginales à vie et pour ne pas faire de la concurrence déloyale vis-à-vis des salariés. C’est pourquoi le dispositif proposé se fonde sur un complément et un vrai travail de droit commun. Cela étant dit, d’autres points sont à envisager, notamment les articulations avec les contrats aidés. En concertation avec Mme Christine Lagarde, une uniformisation des différents contrats est à rechercher. La loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale permet déjà à des départements de faire des expérimentations sur une sorte de contrat unique d’insertion, attendu de longue date.

– Différents instruments permettent à un allocataire du RMI de pouvoir prétendre soit à un emploi sans aide, soit à un emploi avec le complément du RSA, soit à des emplois aidés bien « formatés », soit à d’autres dispositifs d’accompagnement plus spécialisés. On a fait trop de généralisations en se fixant pour objectif que 100 % des gens s’orientent dans telle direction alors qu’on n’était pas capable de suivre et les travailleurs sociaux se plaignent de ce que les textes législatifs, au lieu de les aider, ajoutent encore un instrument de plus.

Mais il s’agit de travailler pour 100 % des allocataires de minima sociaux. Il n’est pas question de se concentrer sur les 30 % les plus « employables ». Au demeurant, la dualisation dénoncée des bénéficiaires de minima sociaux, de même que les difficultés entre allocataires sociaux et travailleurs pauvres, qui envient certains de leurs avantages, existent déjà. Le RSA, qui s’intéresse aux charnières entre les allocataires de minima sociaux et les travailleurs pauvres, qui met de la fluidité entre les différents dispositifs et qui doit, si l’on travaille bien, faire en sorte qu’il n’y ait pas de différenciation entre la personne qui sera passée ou non par la « case » RMI, est un instrument anti-dualisation,  anti-lutte entre les travailleurs très pauvres et les pauvres qui, à l’heure actuelle, se livrent, sur les plans social et politique, une bataille terrible.

– L’accompagnement financier de l’État durera le temps de l’expérimentation. Le gouvernement verra avec l’Assemblée des départements de France, à l’aide des fichiers disponibles, si le chiffrage correspond bien et si l’enveloppe prévue permet de financer la moitié du surcoût. Quant à ce qui s’est passé au moment des transferts de compétences, le grand chantier sur les minima sociaux qui sera ouvert permettra de voir où en sont les compteurs. Il sera proposé d’avoir un regard indépendant sur les éléments de différends financiers entre l’État et les départements pour ne pas s’engager dans une réforme globale sans avoir traité les problèmes. Cela impose de s’y atteler dès la rentrée, ce qui sera proposé aux membres des deux commissions ainsi qu’au Premier ministre et au Président de la République.

– Le haut commissaire a pleinement la charge de la réforme des minima sociaux, en liaison avec le ministère de l’intérieur puisque les collectivités locales sont concernées. Par ailleurs, dans le décret d’attribution, qui pour une fois n’est pas sibyllin, il est clairement indiqué que le haut commissaire est en charge de la réforme des contrats aidés avec la ministre de l’économie, des finances et de l’emploi. À cela s’ajoutent des programmes de lutte contre la pauvreté et d’expérimentation et d’innovation sociales. De manière plus générale, il n’y a pas que deux départements ministériels et le haut commissariat qui s’occupent de pauvreté. Traiter le problème à la racine engage beaucoup plus de ministères.

– Si le critère du potentiel fiscal est considéré comme mauvais, il faut le changer, avec deux contraintes seulement : passer le crible du Conseil constitutionnel et empêcher que ne soit dépassé le nombre de dix départements volontaires nouveaux. Si la référence à la proportion d’allocataires du RMI semble plus appropriée, cela ne posera aucune difficulté.

– Il n’y a aucun inconvénient à ce que la question de la contractualisation des engagements des bénéficiaires de l’API soit précisée dans la loi plutôt que d’être renvoyée à un décret. Le législateur sera ainsi assuré de son effectivité.

– Le dispositif proposé a pour but non pas de créer de nouvelles institutions mais de se glisser dans les différentes institutions existantes, comme les maisons de l’emploi. Dans les départements volontaires, il n’est pas besoin d’envoyer avec accusé de réception des lettres avec entête du préfet pour réunir autour d’une même table les différentes institutions et les différents organismes. Il suffit de dire qu’on va se battre pour mettre en place des dispositifs de retour à l’emploi plus efficaces. Et quand on précise qu’il ne va pas y avoir un dispositif imposé d’en haut mais que l’on va partir des obstacles rencontrés sur le terrain, discuter avec les travailleurs sociaux, faire des groupes d’allocataires du RMI et prendre en compte les problèmes de mobilité, de santé et de garde d’enfant, il se passe quelque chose qui suscite une mobilisation. Les élus ont toute leur place dans cette procédure, à la fois en présentant des remontrances au gouvernement quand les choses n’avancent pas et en faisant en sorte que le dispositif puisse fonctionner dans leur département.

– Pour éviter que les entreprises ne se plaignent du nombre d’offres d’emploi restées insatisfaites et les allocataires du RMI de l’impossibilité d’avoir accès à ces emplois, il est procédé, dans les départements volontaires, à des distributions de questionnaires, à des mobilisations et à des engagements d’entreprises parallèlement à un accompagnement des allocataires du RMI afin de comprendre, en visant des populations restreintes, pourquoi tant d’emplois restent vacants. Les raisons peuvent être que les intéressés ne sont pas assez bien payés, qu’ils nécessitent une qualification ou encore que les problèmes de transport ne sont pas résolus.

– Les employeurs disent parfois être prêts à prendre des travailleurs non qualifiés mais ne le font pas si le déclenchement de la formation se fait deux ans après. Il faut donc démarcher les régions, les organismes paritaires collecteurs agréés (OPCA) des fonds de la formation professionnelle, faire avancer les choses. Si l’on ne peut faire venir des entreprises nouvelles, il est possible de contribuer à la mise en place d’un environnement et de prestations plus favorables au retour à l’emploi et au besoin de main-d’œuvre.

– Le RSA risque-t-il d’accroître la précarité et le nombre d’emploi à temps partiel ? Ce sujet difficile a été débattu avec les syndicats et les associations, qui ne sont pas aussi négatives que le prétend M. Roland Muzeau, en particulier Le Secours Catholique et ATD Quart-Monde. L’UNIOPSS est plus éloignée de ces sujets, mais toutes seront consultées. Le risque, que l’on n’a pas le droit de prendre, est de maintenir des marches trop hautes qui laissent des gens en dehors du monde du travail. Quand la seule possibilité est de démarrer par un temps partiel, on n’a pas le droit de le refuser. Un travail de négociation sociale sera ensuite nécessaire pour éviter les dérives vers cette catégorie de travail. Cela fera l’objet d’un examen de près pendant l’année qui vient, afin de surmonter le problème du temps partiel qui est parfois aussi imposé par certains dispositifs publics obligeant à un horaire de travail fixé à vingt-six heures.

– Outre-mer, il existe un dispositif l’allocation de retour à l’activité (ARA) qui nécessitera peut-être l’institution d’un RSA-ARA.

– La condition de résidence d’une certaine durée dans les départements expérimentateurs est conçue pour éviter que des personnes ne déménagent pour profiter du RSA expérimental, plus attractif que le droit commun. La durée de résidence exigée ne pourra excéder six mois, mais rien n’empêchera un département de l’établir à quinze jours, un mois ou trois mois : ce n’est donc pas un obstacle à la mobilité.

– La question du logement devra naturellement être traitée. Un grand débat avait eu lieu dans la commission « Familles, vulnérabilité, pauvreté » sur l’intégration des aides au logement dans le RSA. Les acteurs du logement y étaient plutôt réfractaires et s’étaient déclarés plus favorables à une définition de l’articulation entre les deux aides, certains revenus sans RSA pouvant être inférieurs au loyer lui-même.

– S’agissant des indemnités journalières maladie, il faut rappeler qu’avec moins de trois ans d’ancienneté, dans le cas de certains contrats et dans les emplois de service d’aide à domicile, un travailleur ne bénéficie pas de la garantie de maintien du salaire. Le système social concourt ainsi à la précarité, à la dualisation. Certaines personnes qui travaillent se retrouvent, lorsqu’elles sont en congé maladie, avec des ressources inférieures au RMI. Il y a sans doute un rééquilibrage à rechercher entre les personnes pour lesquelles la couverture maladie peut fonctionner dès le premier jour à taux plein et celles qui peuvent rencontrer des difficultés de trois à onze jours, tout en plafonnant le reste à charge car certaines personnes peuvent avoir des dépenses de santé de plusieurs milliers d’euros.

– Enfin, la possibilité que le revenu d’un bénéficiaire de minimum social reprenant un emploi excède le SMIC existe déjà. En effet, dans le dispositif d’intéressement en vigueur, une personne au RMI qui reprend directement un emploi au SMIC à plein temps a, pendant les trois premiers mois, une possibilité de cumul intégral du RMI et du salaire, donc temporairement un revenu supérieur de plusieurs centaines d’euros supérieur au SMIC. Dans le RSA, il y aura un peu moins de cent euros d’écart, ce qui n’est pas insupportable pour un temps limité. Le but est que, à chaque fois, l’augmentation du travail se traduise vraiment par un surcroît de revenu. Toutes ces questions devront être remises à plat dans la réforme générale.

Le président Pierre Méhaignerie a cité le cas de la ville de Perpignan où l’on compte 7 000 bénéficiaires du RMI. Le maire de cette ville a fait remarquer qu’il aura beaucoup de difficulté, si au RMI viennent s’ajouter trois mois de travail dans le maraîchage, la viticulture ou le tourisme et, demain, le RSA, sans compter les droits connexes qui représentent souvent 300 ou 400 euros, pour trouver cinquante personnes pour occuper des emplois durables dans l’industrie ou le bâtiment ! Cette question est posée aux parlementaires dans toutes les réunions et doit recevoir une réponse alors que la main-d’œuvre va manquer dans de nombreux secteurs. Une expérimentation à l’échelle de Perpignan permettrait de voir comment éviter ces contournements.

Le haut commissaire a répondu qu’il serait intéressant de voir s’il est possible d’élaborer un dispositif adapté à une branche professionnelle en fonction d’un certain nombre d’engagements qu’elle serait capable de prendre et que le législateur pourrait, si nécessaire, fixer dans un texte. Dans un premier temps, il faut travailler avec les employeurs et les branches professionnelles, telles que le bâtiment, l’agroalimentaire et les transports pour voir ce qu’il est possible de faire en ce sens.

Le président Pierre Méhaignerie a remercié le haut commissaire pour ses nombreuses réponses aux députés présents.

II.- EXAMEN DES ARTICLES

La commission a procédé à l’examen pour avis des articles dont elle s’est saisie (articles 1er et 8 à 11) du projet de loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat au cours de sa séance du mercredi 4 juillet 2007.

Avant l’article 1er

La commission a examiné un amendement de Mme Martine Billard disposant que le refus du salarié d’effectuer des heures supplémentaires à l’initiative de son employeur ne peut être considéré comme une faute ou un motif de licenciement.

Mme Danièle Hoffman-Rispal a souligné que ce nouveau régime d’heures supplémentaires s’appliquera également dans les petites et moyennes entreprises, et notamment aux femmes, majoritaires, par exemple, dans le petit commerce. Or les contraintes de la vie familiale ne sont pas prises en compte par le projet de loi. C’est pourquoi il est important d’éviter qu’un salarié qui refuserait d’effectuer des heures supplémentaires ne soit sanctionné par un licenciement.

M. Dominique Tian a précisé que ce projet de loi est principalement un texte portant création d’exonérations fiscales et sociales, non un projet tendant à réformer l’organisation du temps de travail : de ce fait, le présent amendement n’est pas très opportun. En tout état de cause, il existe en la matière des règles jurisprudentielles, à l’image de celle rappelée dans un arrêt du 20 mai 1997 par la chambre sociale de la Cour de Cassation, selon laquelle le refus d’exécuter des heures supplémentaires ne peut être considéré comme fautif lorsqu’il est exceptionnel et motivé par le fait que le salarié n’a pas été prévenu suffisamment tôt.

M. Michel Liebgott a contesté l’opportunité de la présente réforme, qui repose sur une logique d’individualisation des rapports entre l’employeur et le salarié, soulignant qu’il aurait été plus opportun de recourir à la signature d’accords de branche et de parvenir ainsi à un meilleur équilibre entre les différentes parties. Le rapport de forces est de fait déséquilibré dans l’entreprise : un salarié ne peut ni exiger, ni refuser de faire des heures supplémentaires.

Par ailleurs, on ne peut que déplorer l’absence d’étude d’impact de ce texte dans les différents secteurs économiques. En effet, il existe des secteurs d’activité chroniquement en sous-effectifs, comme le bâtiment. Mais en s’appliquant à tous les secteurs indifféremment, ce projet de loi risque de créer des comportements opportunistes, de la part d’entreprises qui n’ont pas nécessairement toujours besoin de telles incitations financières, en particulier là où les salariés effectuent déjà des heures supplémentaires. Les syndicats ne s’y sont d’ailleurs pas trompés, puisqu’ils se sont tous opposés à ce projet de loi, à l’exception de la CFTC, que ce soit à la Caisse nationale d’allocations familiales (CNAF), à la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) ou à la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV), .

Le rapporteur pour avis a rappelé que le recours aux heures supplémentaires est aujourd’hui déjà encadré : par exemple, le niveau du contingent par salarié est fixé à 220 heures par an et la durée hebdomadaire maximale du travail à quarante-huit heures.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la commission a rejeté l’amendement.

Pour les mêmes raisons, suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la commission a rejeté un amendement de Mme Martine Billard insérant le même dispositif dans le code rural.

Article 1er

Mesures destinées à favoriser l’augmentation de la durée moyenne du travail

L’article 1er du projet de loi se donne pour objectif, conformément à l’annonce qui figure dans l’exposé des motifs, de « diminuer le coût du travail pour les entreprises qui augmentent la durée du travail de leurs salariés, tout en incitant ces derniers à travailler plus par la garantie d’une augmentation substantielle de leurs revenus ».

La durée légale du travail a été fixée à trente-cinq heures par semaine par la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail. L’accomplissement d’heures de travail au-delà de cette durée conduit le salarié à effectuer des heures supplémentaires et, au-delà, des heures choisies. Par ailleurs, les salariés à temps partiel ont la possibilité d’effectuer des heures complémentaires au-delà de l’horaire fixé par le contrat de travail.

Dans le droit positif, la rémunération des heures supplémentaires, complémentaires ou choisies entre intégralement dans l’assiette de l’impôt sur le revenu et des cotisations et contributions sociales.

Le présent article a pour objet principal de prévoir une exonération d’impôt sur le revenu des salaires versés aux salariés au titre du temps supplémentaire travaillé ainsi que d’assurer un allègement de cotisations sociales au profit des employeurs et des salariés au titre de ces mêmes heures, dans le but de favoriser une augmentation de la durée moyenne du travail. Il procède également à un aménagement du calcul du dispositif de réduction générale des cotisations patronales dit « allègement Fillon », créé par la loi du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l’emploi.

Le champ d’application du dispositif se veut aussi large que possible, de façon à pouvoir concerner l’ensemble des situations de travail « excédentaire » par rapport à la durée légale du travail (donc l’ensemble des salariés) : les heures définies comme « supplémentaires » (au sens de l’article L. 212-5 du code du travail) ne sont donc pas les seules concernées. Sont également pris en considération les régimes de temps choisi. En outre, sont inclus dans ce dispositif les différents types de situations d’aménagement du temps de travail, qui impliquent des définitions diverses des « heures supplémentaires ».

1. Le régime de l’exonération d’impôt sur le revenu

L’ensemble des développements consacrés par le présent rapport à ce nouveau régime ont vocation à préciser surtout le champ d’application de l’exonération et les principales conditions y afférentes (davantage que de s’attacher à l’économie purement fiscale du dispositif traité au premier chef par la commission des finances) : ces éléments concernent en effet également le régime des réduction et déduction sociales créées par ce même article 1er et que la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a vocation à analyser de manière plus particulière.

Le présent article crée, en premier lieu, une nouvelle exonération d’impôt sur le revenu, concernant les rémunérations versées aux salariés au titre des heures supplémentaires de travail effectuées.

À cet effet, les alinéas 1 et 2 de cet article 1er insèrent dans le code général des impôts un nouvel article 81 quater, après l’article 81 ter, soit à la suite d’articles du code consacrés à différents régimes d’affranchissement de l’impôt sur le revenu.

a) Le champ d’application de l’exonération d’impôt sur le revenu

L’alinéa 3 définit l’objet auquel est applicable la nouvelle exonération fiscale. Il s’agit du temps de travail supplémentaire, déterminé de la manière la plus large possible. Le régime de la majoration des heures supplémentaires est le plus significatif s’agissant de la création de dispositifs d’exonération. C’est donc lui qui, dans les différentes situations, sera décrit par priorité. Les considérations concernant la durée du travail – qui dépendent des règles nombreuses relatives aux maxima du temps de travail autorisé, au régime d’intervention de l’inspecteur du travail ou encore à la prise de repos compensateur obligatoire – n’ont qu’une importance seconde pour déterminer les effets des exonérations et ne seront, dans un souci de meilleure lisibilité, pas traitées de manière exhaustive.

 En premier lieu, l’exonération s’applique aux salaires versés aux salariés au titre des heures supplémentaires que l’on peut dire « de droit commun », telles qu’elles sont définies, s’agissant des salariés auxquels sont applicables les dispositions du code du travail, à l’article L. 212-5 du code du travail, et s’agissant des salariés du secteur agricole, à l’article L. 713-6 du code rural. Ce dernier article porte transposition, pour l’essentiel, des dispositions de l’article L. 212-5 (1).

Les heures supplémentaires se définissent comme les heures effectuées au-delà de la durée légale du travail telle qu’elle est fixée par l’article L. 212-1 du code du travail, à trente-cinq heures (ou de la durée considérée comme équivalente, le cas échéant). Ces heures présentent les caractéristiques suivantes :

– Leur paiement est majoré. Le taux de la majoration est fixé librement par accord de branche ou d’entreprise, mais doit être au moins de 10 %. En l’absence d’accord, ce taux est de 25 % pour les huit premières heures supplémentaires et de 50 % ensuite (donc à compter de la quarante-quatrième) (2).

– Le nombre des heures supplémentaires est décompté et ce décompte entraîne l’application de deux régimes différents, selon que l’on se trouve en deçà ou au-delà d’un certain contingent (3). En application de l’article L. 212-6 du code du travail, ce contingent est fixé par décret. Le décret du 21 décembre 2004 l’a fixé à 220 heures par an et par salarié (130 heures en cas de mise en œuvre d’un régime de modulation du temps de travail) (article D. 212-25 du code du travail). Un accord collectif de travail peut cependant prévoir un contingent différent, fixant un volume d’heures supérieur ou inférieur.

 L’exonération s’applique également aux heures choisies mentionnées aux articles L. 212-6-1 du code du travail et L. 713-11-1 du code rural (ce dernier article étant la transposition, aux salariés du secteur agricole, du dispositif prévu à l’article L. 212-6-1).

Les heures choisies ont été créées par la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005 portant réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise.

Leur mise en œuvre est subordonnée à l’existence d’un accord collectif de travail et d’un accord entre l’employeur et le salarié. Il s’agit d’heures travaillées au-delà du contingent d’heures supplémentaires tel qu’il est défini en application de l’article L. 212-6.

Mais alors que les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent ne peuvent l’être qu’après autorisation de l’inspecteur du travail, et donnent lieu à repos compensateur obligatoire, les heures choisies échappent à ce régime.

En revanche, elles donnent lieu à une majoration spécifique et, le cas échéant, à d’autres contreparties, notamment en termes de repos, fixées par accord collectif. En tout état de cause, le taux de la majoration ne peut être inférieur au taux applicable pour la rémunération des heures supplémentaires dans l’entreprise concernée.

Ces heures choisies ainsi définies et la majoration à laquelle elles donnent lieu entrent dans le champ d’application de l’exonération d’impôt sur le revenu.

Au total, l’ensemble des heures supplémentaires est donc pris en considération, qu’il s’agisse des heures supplémentaires « traditionnelles », effectuées au sein ou en sus du contingent, ou des heures choisies, par définition réalisées au-delà du contingent. Mais le projet est plus précis encore dans la mesure où il prend en considération les différents types d’aménagement du temps de travail et, partant, les heures supplémentaires compte tenu des diverses définitions qui peuvent leur être données.

 L’exonération fiscale concerne les heures supplémentaires effectuées par des salariés dont la répartition de la durée du travail est organisée par cycle. Comme dans les cas précédents, l’article 1er vise à la fois la disposition applicable de façon générale aux salariés (article L. 212-7-1 du code du travail) et celle applicable dans le secteur agricole (article L. 713-8 du code rural).

L’article L. 212-7-1 du code du travail ouvre en effet la possibilité à une entreprise qui connaîtrait des variations d’activité à la fois habituelles et prévisibles d’organiser le travail de ses salariés au sein d’un cycle. Le cycle est une période brève, multiple de la semaine, au sein de laquelle la durée du travail est répartie de façon fixe et répétitive. Ainsi, les semaines comportant des heures au-delà de trente-cinq heures doivent être strictement compensées au cours du cycle par des semaines comportant une durée hebdomadaire inférieure à cette norme. La durée du cycle ne peut excéder quelques semaines (huit à douze au maximum en pratique).

L’article L. 212-7-1 prévoit la possibilité du recours au cycle dans trois cas : lorsque l’entreprise fonctionne en continu, comme il en va dans les secteurs de la sidérurgie, de la chimie ou du verre, par exemple ; lorsque cette possibilité est ouverte par décret (c’est le cas dans les hôpitaux privés) ; quand le recours au cycle est prévu par accord collectif, fixant la durée maximale du cycle.

Dans le cas de la mise en œuvre d’une organisation du travail par cycles, le régime « de droit commun » des heures supplémentaires est applicable. Le déclenchement du décompte des heures supplémentaires est le dépassement de la durée moyenne de trente-cinq heures calculée sur la durée du cycle de travail. Au-delà, les majorations de salaire, régimes d’information de l’inspecteur du travail ou d’autorisation et prises de repos compensateur sont applicables.

Décompte des heures supplémentaires : exemple en cas d’aménagement
du temps de travail par cycle

À titre d’exemple, pour un cycle de douze semaines, toute heure comprise entre 420 heures (12 x 35 heures) et 468 heures (12 x 39 heures) est une heure supplémentaire majorée à 25 % ; toute heure comprise entre 468 heures (12 x 39) et 516 heures (12 x 43) est majorée à 25 % ; toute heure excédant 516 heures est une heure majorée à 50 %.

 De même que l’application de l’exonération vaut pour les heures supplémentaires effectuées dans les cas où la durée du travail est répartie par cycles, de même elle vaut lorsqu’est mis en œuvre un dispositif de modulation de la répartition, qu’il s’agisse de l’ensemble des salariés en application de l’article L. 212-8 du code du travail, ou des salariés agricoles conformément à l’article L. 713-15 du code rural.

À la différence du cycle, la répartition de la durée du travail mise en œuvre dans le cadre d’un dispositif de modulation ne présente pas nécessairement de caractère de répétition à l’identique.

Il s’agit d’un dispositif impérativement mis en place par accord collectif, qui a pour objet de faire varier la durée hebdomadaire du travail sur tout ou partie de l’année, à condition que la durée annuelle du travail n’excède pas 1607 heures. La modulation permet de ne pas considérer les heures effectuées au-delà de trente-cinq heures comme des heures supplémentaires dès lors qu’à la fin de l’année de référence la durée du travail n’excède pas 1607 heures. L’objectif est de compenser les semaines où la durée hebdomadaire est élevée par des semaines où la durée du travail est plus faible, en limitant le recours aux heures supplémentaires pendant la période haute de travail et au chômage partiel pendant les périodes basses.

Même si la modulation peut se définir comme un régime dérogatoire au régime normal des heures supplémentaires, les heures supplémentaires ne sont pas absentes des dispositifs de modulation.

L’article L. 212-8 dispose en effet expressément que constituent des heures supplémentaires (au sens du droit commun tel qu’il résulte de la lecture combinée des dispositions, rappelées plus haut, des articles L. 212-5, L. 212-5-1 et L. 212-6 du code du travail) les heures effectuées au-delà de la durée maximale hebdomadaire fixée par l’accord de modulation ainsi que, à l’exclusion de celles-ci, les heures réalisées au-delà de 1607 heures ou, le cas échéant, d’un plafond inférieur fixé par l’accord.

Les heures supplémentaires ainsi déterminées ouvrent droit à majoration. Le seuil de déclenchement est dans ce cas soit la limite hebdomadaire, soit la limite annuelle. Il arrive en effet que le plafond annuel soit dépassé, alors même que les horaires hebdomadaires sont restés dans la limite haute du plafond fixé par l’accord de modulation : c’est le cas par exemple lorsque les horaires, tout en restant en dessous de la limite supérieure fixée par l’accord de modulation, pendant les périodes de haute activité, se trouvent insuffisamment compensés par les creux d’activité. Pour déterminer le taux majoré applicable, il convient de diviser le nombre des heures supplémentaires effectuées au total dans l’année par le nombre de semaines travaillées, car le taux de majoration des heures supplémentaires dépend du nombre moyen d’heures supplémentaires : si ce nombre est égal ou inférieur à huit, le taux de majoration sera de 25 %. Il sera de 50 % s’il est supérieur à huit (4).

Décompte des heures supplémentaires : exemple en cas de modulation

Une entreprise applique un accord de modulation sur une base de 1607 heures avec une limite hebdomadaire de 45 heures, le nombre d’heures effectuées en fin d’année est de 1620 heures (1607 + 13 heures) et pendant l’année la durée hebdomadaire n’a pas dépassé 45 heures sauf pendant 2 semaines où elle a atteint 47 heures :

– 4 heures supplémentaires seront payées en cours d’année et majorées à 50 % (car au-delà des 8 premières heures supplémentaires) : en effet les heures au-delà de la limite supérieure constituent des heures supplémentaires et sont majorées ;

– 9 heures supplémentaires (13 - 4) seront payées en fin d’année et majorées à 25 %.

 La nouvelle exonération s’applique aussi aux salaires versés aux salariés dont la durée du travail a été aménagée en application de l’article L. 212-9 du code du travail, à savoir ceux dont la durée hebdomadaire du travail a été réduite en deçà de trente-neuf heures par l’attribution de journées ou de demi-journées de repos. Ce dispositif peut être établi soit sur une période de quatre semaines, soit sur l’année.

– Lorsqu’elle est mise en place sous forme de jours de repos répartis sur une période de quatre semaines, cette modalité de réduction du temps de travail ne nécessite pas d’accord de travail. Les journées ou demi-journées de repos acquises par le salarié sont équivalentes au nombre d’heures effectuées au-delà de trente-cinq heures hebdomadaires (ou de la durée conventionnelle si elle est inférieure).

Au total, la durée hebdomadaire moyenne du travail, appréciée sur une période de quatre semaines, doit être réduite à trente-cinq heures au plus. Cependant, rien n’interdit à l’employeur d’avoir recours à des heures supplémentaires.

Aux termes de l’article L. 212-9 du code du travail, deux seuils de déclenchement de ces heures supplémentaires sont alors mis en place.

D’une part, les heures effectuées au-delà de trente-neuf heures constituent des heures supplémentaires : les huit premières heures au-delà de trente-neuf heures, soit de trente-neuf à quarante-sept, donnent lieu à une majoration de salaire de 25 %, et les heures réalisées à compter de quarante-huit heures sont majorées de 50 % (sauf accord de branche prévoyant un autre taux).

D’autre part, à l’exclusion des heures effectuées au-delà de trente-neuf heures au cours d’une semaine civile ayant déjà donné lieu à paiement et repos compensateur, les heures excédant la durée hebdomadaire moyenne de trente-cinq heures, calculée sur quatre semaines, constituent également des heures supplémentaires. Les huit premières heures excédant la durée moyenne hebdomadaire, calculée sur quatre semaines, de trente-cinq heures, sont majorées de 25 %, les suivantes de 50 %.

Décompte des heures supplémentaires : exemple en cas d’attribution de jours au titre de la réduction du temps de travail (JRTT) sur quatre semaines

Un salarié travaille dans une entreprise dans un cadre de JRTT sur quatre semaines pour lesquelles ont été effectuées respectivement : 48, 42, 34 et 44 heures (soit, sur quatre semaines, 168 heures).

Deux seuils de déclenchement sont mis en place pour le calcul des heures supplémentaires :

– les heures effectuées au-delà de 39 heures seront traitées comme des heures supplémentaires au taux de 25 % : dans le cas présent, 17 sont ainsi décomptées ;

– les heures excédant 35 heures au-delà de la durée moyenne pratiquée pendant la période de 4 semaines (donc excédant le nombre de 140 heures) constituent également des heures supplémentaires : dans le présent exemple, on en dénombre 168 - 140 = 28. Il faut toutefois déduire de 28 les heures déjà comptabilisées comme heures supplémentaires en tant qu’elles ont été effectuées au-delà de 39 heures, soit 28 - 17 = 11.

Il y a lieu d’appliquer la même méthode de calcul que pour le cycle, donc les heures comprises entre 4 x 35 (140) et 4 x 43 (172) sont rémunérées à un taux de 25 %, et à un taux de 50 % ensuite.

Par ailleurs, l’ensemble des heures ayant la qualité d’heures supplémentaires sont imputées sur le contingent d’heures supplémentaires et nécessitent une autorisation de l’inspection du travail lorsqu’elles sont effectuées au-delà de ce contingent. Elles ouvrent droit au repos compensateur obligatoire.

– La réduction du temps de travail peut aussi être mise en place sous la forme d’attribution de journées ou demi-journées de repos sur l’année. Cette possibilité est toutefois subordonnée à la conclusion d’un accord collectif de travail.

Dans ce cas, deux types d’heures supplémentaires peuvent être effectuées.

D’une part, celles réalisées, sur une semaine donnée, au-delà de trente-neuf heures ou d’un plafond inférieur fixé par l’accord collectif de travail, les huit premières heures donnant lieu à une majoration de salaire de 25 %, les suivantes de 50 % (sauf accord de branche prévoyant un autre taux).

D’autre part, les heures supplémentaires sont, à l’exclusion des heures précitées, les heures qui excèdent une durée annuelle de 1 607 heures.

Pour l’ensemble des heures supplémentaires sont applicables les règles relatives au contingent et, partant, à l’autorisation de l’inspection du travail ainsi qu’à la prise de repos compensateur obligatoire.

Décompte des heures supplémentaires : exemple en cas d’attribution de jours au titre de la réduction du temps de travail sur l’année

Deux seuils de déclenchement sont mis en place pour le calcul des heures supplémentaires :

– les heures effectuées au-delà de 39 heures une semaine donnée seront traitées comme des heures supplémentaires ;

– les heures effectuées au-delà de 1 607 heures sont des heures supplémentaires. Le calcul de la durée annuelle s’effectue selon les mêmes modalités que dans le cadre de la modulation. Par exemple, si le salarié a effectué 1 620 heures, 13 heures seront payées en heures supplémentaires sous déduction, le cas échéant, de celles effectuées au-delà de 39 heures une semaine donnée.

S’agissant du cas où un accord collectif de travail prévoit à la fois une réduction du temps de travail par attribution de journées ou demi-journées et une modulation du temps de travail, la circulaire en date du 6 décembre 2000 a précisé que les seules heures supplémentaires effectuées en cours d’année seront celles accomplies au-delà des limites hebdomadaires fixées par l’accord et ce y compris dans le cas où ces limites sont supérieures à trente-neuf heures.

 La prise en considération des salaires versés aux cadres

La fin de l’alinéa 3 et l’alinéa 4 du présent article 1er prévoient des dispositions de nature à prendre en compte la spécificité de la situation des cadres.

Il existe en effet depuis la loi du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail une classification des cadres en trois catégories : les cadres dirigeants (dotés de responsabilités importantes, impliquant une grande indépendance dans l’organisation de l’emploi du temps, détenant un pouvoir de décision largement autonome et bénéficiant d’un niveau élevé de rémunération), auxquels n’est pas applicable la législation sur le temps de travail ; les cadres intégrés à une communauté de travail et soumis à ce titre à la législation du temps de travail « de droit commun » ; les cadres « autonomes ».

Cette dernière catégorie est définie de façon résiduelle, dans la mesure où elle a vocation à regrouper les cadres qui ne remplissent pas les critères leur permettant d’être classés soit dans la catégorie des cadres dirigeants, soit dans celle des cadres intégrés. Il s’agit de viser les cadres que l’on peut dire « à la mission », dont les horaires ne peuvent être contrôlés, ainsi que les cadres dont le temps de travail est aléatoire et ne peut être fixé à l’avance. C’est pourquoi l’article L. 212-15-3 du code du travail prévoit différents forfaits intégrant par avance des heures supplémentaires ou fixant un nombre de jours de travail en fonction du degré d’autonomie du cadre. Ces forfaits peuvent être de trois types :

– Tout cadre peut conclure avec son employeur, en application du I de l’article L. 212-15-3 du code du travail, une convention prévoyant un forfait en heures, sur une base hebdomadaire ou mensuelle. Ce forfait peut intégrer un volume d’heures supplémentaires. La rémunération versée au salarié doit alors être au moins égale à la rémunération qu’il percevrait compte tenu du salaire minimum conventionnel applicable dans l’entreprise et des majorations dues au titre des heures supplémentaires.

Pour autant, il est possible à un cadre de faire des heures supplémentaires en sus de l’horaire prévu par le forfait, dans les conditions de droit commun, donc avec application des règles relatives à la majoration et au contingent. Dans sa rédaction actuelle, le projet de loi ne fait toutefois pas référence à ces heures qui ne sont, il est vrai, pas expressément visées par la partie législative du code du travail. Il reste que l’article D. 212-25 du code du travail relatif au contingent d’heures supplémentaires ouvre expressément la possibilité d’application de ce contingent dans le cas d’une telle convention de forfait. En outre, la circulaire du 3 mars 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail prévoit aussi cette possibilité.

– En application du II de ce même article L. 212-15-3, un accord collectif de travail peut ouvrir la possibilité aux cadres et aux salariés itinérants non cadres dont la durée du travail ne peut être prédéterminée ou qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps pour l’exercice des responsabilités qui leur sont confiées, de conclure avec leur employeur une convention de forfait en heures sur une base annuelle.

L’article D. 212-25 du code du travail relatif au contingent d’heures supplémentaires (donc, par hypothèse, à la possibilité ou non d’effectuer des heures supplémentaires), ne prévoit pas son application aux cadres autres que ceux relevant d’une convention de forfait en heures sur une base hebdomadaire ou mensuelle, et le Conseil d’État a conforté cette solution dans un arrêt en date du 28 mars 2001 par lequel il reconnaît la possibilité d’exclure par décret les cadres soumis au forfait annuel en heures du champ d’application du contingent d’heures supplémentaires.

En revanche, depuis la loi du 31 mars 2005 portant réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise, le II de l’article L. 212-15-3 du code du travail ouvre la possibilité, sous la réserve qu’un accord collectif le prévoie, au salarié qui le souhaite, en accord avec le chef d’entreprise, d’effectuer des heures au-delà de la durée annuelle prévue par la convention de forfait. Ce « temps choisi » n’obéit pas au régime des heures supplémentaires, mais il doit faire l’objet d’une rémunération majorée. L’alinéa 3 de l’article 1er prévoit expressément l’applicabilité de la nouvelle exonération fiscale à l’ensemble de la rémunération de ce « temps choisi », dont le régime est voisin de celui des « heures choisies » effectuées par les salariés en application de l’article L. 212-6-1 du code du travail (cf. supra).

– Enfin, en application du III de l’article L. 212-15-3 du code du travail, un accord collectif peut ouvrir la possibilité aux cadres ou (depuis la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises) à condition qu’ils aient individuellement donné leur accord par écrit, aux salariés non cadres dont la durée du temps de travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d’une réelle autonomie dans l’organisation de leur emploi du temps pour l’exercice des responsabilités qui leur sont confiées, de conclure une convention de forfait en jours sur l’année. La convention fixe un nombre de jours travaillés maximum dans l’année, nombre égal au plus à 218 jours. Le même accord précise les modalités de décompte des journées et demi-journées travaillées et de prise des journées ou demi-journées de repos. Par construction, ce système ne laisse pas place aux heures supplémentaires.

Le plafond constitue un maximum qui ne peut être dépassé : plus exactement, le salarié qui dépasse le plafond fixé doit récupérer un nombre de jours équivalent à ce dépassement, et cela au cours des trois premiers mois de l’année suivante. En outre, le nombre de jours ainsi reporté sera à déduire du plafond annuel de l’année suivante.

En revanche, la loi du 31 mars 2005 a aussi prévu pour cette catégorie de forfait la possibilité d’un « temps choisi », puisqu’un accord collectif de travail peut ouvrir la faculté au salarié qui le souhaite, en accord avec le chef d’entreprise, de renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d’une majoration de son salaire. Ces journées devenues travaillées ne sont pas prises en compte dans le calcul des jours travaillés au regard du plafond annuel.

L’alinéa 4 de cet article 1er crée un dispositif destiné à assurer le bénéfice de l’exonération au temps choisi qui correspond aux journées de repos auxquelles le cadre a renoncé en contrepartie d’une majoration de salaire : aussi prévoit-il expressément que l’exonération est applicable à ces majorations, mais seulement à compter des jours décomptés au-delà du plafond de 218 jours. L’objectif poursuivi par l’établissement de cette condition est de déterminer un « minimum » légal qui constitue une garantie et prévienne les abus éventuels nés d’un recours systématique à cette procédure dans le seul but de bénéficier de l’exonération fiscale.

 L’alinéa 5 de cet article 1er ouvre la possibilité aux salariés à temps partiel de bénéficier de la nouvelle exonération fiscale au titre des heures complémentaires ainsi effectuées.

Les salariés à temps partiel ne peuvent en effet réaliser des « heures supplémentaires » au même titre que les salariés à temps complet.

En application des deuxième et troisième alinéas de l’article L. 212-4-3 du code du travail, le contrat de travail à temps partiel indique les limites dans lesquelles peuvent cependant être effectuées des « heures complémentaires » au-delà de la durée du travail fixée par le contrat ; mais ces heures ne peuvent être réalisées que dans la limite d’un dixième de l’horaire prévu au contrat. Il est précisé que les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail effectuée par un salarié au niveau de la durée légale du travail ou de la durée fixée conventionnellement.

Cependant, le premier alinéa de l’article L. 212-4-4 ouvre la possibilité à un accord collectif de travail de porter jusqu’au tiers de la durée fixée par le contrat de travail la limite dans laquelle peuvent être effectuées des heures complémentaires, sous la réserve que cet accord apporte des garanties relatives à : la mise en œuvre pour les salariés à temps partiel des droits reconnus aux salariés à temps complet (notamment l’égalité d’accès aux possibilités de promotion, de carrière et de formation) ; la fixation d’une période minimal de travail continue ; la limitation du nombre des interruptions d’activité au cours d’une même journée.

Les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail effectuée par un salarié à temps partiel à un niveau égal ou supérieur à la durée légale du travail (ou à la durée conventionnelle si elle est inférieure) ; à défaut, le contrat est requalifié en contrat à temps plein. Aussi les heures complémentaires ne peuvent être assimilées à des heures supplémentaires et le régime de celles-ci ne leur est donc pas applicable.

La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser que les heures complémentaires, effectuées dans la limite d’un dixième de l’horaire prévu au contrat, ne donnent notamment pas lieu à majoration de salaire (Cass. soc., 19 mars 1987, Société chaussures André C. Sylla (5)).

En revanche, lorsqu’un accord collectif a prévu une limite maximale d’heures complémentaires au-delà du plafond légal d’un dixième, jusqu’à un tiers de la durée prévue dans le contrat de travail, chacune des heures complémentaires effectuées au-delà du dixième donne lieu à une majoration de salaire de 25 %. Ainsi, à titre d’exemple, si le contrat fixe une durée hebdomadaire de 20 heures, les heures complémentaires seront majorées à partir de la 23e heure et ce jusqu’à la 26e heure.

Les heures complémentaires sont prises en compte pour le calcul des différents éléments relatifs au salaire, notamment la base de calcul de l’indemnité de congés payés ou la prime d’ancienneté en l’absence de dispositions conventionnelles contraires.

L’ensemble des éléments de rémunération versés au titre des heures complémentaires (leur paiement ainsi que, le cas échéant, au-delà des heures complémentaires effectuées dans la limite du dixième de l’horaire contractuel, leur majoration) entre donc dans le champ de l’exonération fiscale.

 L’alinéa 6 de cet article 1er inclut aussi dans le champ de l’exonération les salaires versés aux salariés par les particuliers employeurs au titre des heures supplémentaires qu’ils réalisent.

Le droit applicable aux particuliers employeurs résulte de l’application de la convention collective des salariés du particulier employeur, conclue le 24 novembre 1999, et applicable à tous les particuliers employeurs depuis le 13 mars 2000, date d’effet de son extension. Il s’agit de règles dérogatoires au droit commun tel qu’il figure dans le code du travail.

Ainsi, aux termes de l’article 15 de la convention collective, la durée du travail effectif est de quarante heures par semaine. Les salariés peuvent effectuer des heures supplémentaires, définies comme celles effectivement travaillées et réalisées au-delà de l’horaire hebdomadaire de quarante heures. Si l’horaire est régulier, la majoration pour heures supplémentaires est applicable lorsque le nombre d’heures de travail effectif dépasse ce seuil. Toutefois, si l’horaire est irrégulier, la majoration pour heures supplémentaires est applicable lorsque le nombre d’heures de travail effectif dépasse une moyenne de quarante heures hebdomadaires calculée sur un trimestre.

L’article 15 de la convention collective dispose que les heures supplémentaires ne peuvent excéder une moyenne de huit heures par semaine, calculée sur une période quelconque de douze semaines consécutives, sans dépasser dix heures au cours de la même semaine. Les heures supplémentaires sont rémunérées, ou récupérées dans les douze mois, suivant accord entre les parties. Elles donnent lieu en rémunération ou en récupération à une majoration de 25 % pour les huit premières heures et à une majoration de 50 % ensuite.

 Le statut des assistants maternels étant spécifique, l’alinéa 7 de l’article 1er dispose expressément que les salaires qui leur sont versés au titre des heures complémentaires et supplémentaires bénéficient également de l’exonération fiscale.

Le statut des assistants maternels a fait l’objet récemment d’une réforme importante, avec l’adoption de la loi n° 2005-706 du 27 juin 2005 (portant modification des articles L. 421-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles, ainsi que des articles L. 773-1 et suivant du code du travail) et la conclusion d’une convention collective spécifique (convention collective nationale des assistants maternels du particulier employeur, conclue le 1er juillet 2004 et étendue par arrêté en date du 17 décembre 2004).

En particulier, la convention collective a fixé la durée hebdomadaire du travail des assistants maternels à quarante-cinq heures. La convention prévoit aussi que les heures complémentaires ne donnent pas lieu à majoration et sont donc rémunérées au salaire horaire brut de base. En revanche, les heures supplémentaires sont majorées, à partir de la quarante-sixième heure hebdomadaire, avec un taux librement négocié par les parties.

Le décret n° 2006-627 du 29 mai 2006 a introduit dans le code du travail un article D. 773-8 confortant ce régime. Il reprend les montants mentionnés par la convention collective pour préciser que la rémunération des assistants maternels ne peut être inférieure à 0,281 le montant du Smic par enfant et par heure d’accueil. De plus, il précise que les heures travaillées au-delà de quarante-cinq heures donnent lieu à une majoration dont le taux doit être fixé par une convention ou un accord de branche étendu, une convention ou un accord d’entreprise ou d’établissement, ou, à défaut, par accord entre l’assistant maternel et son ou ses employeurs.

 Conformément à l’annonce figurant dans l’exposé des motifs du projet de loi, « ce dispositif a vocation à bénéficier à l’ensemble des entreprises et des salariés, qu’ils soient du secteur privé ou du secteur public ». Aussi l’alinéa 8 de cet article 1er prévoit-il de manière très générale que les éléments de rémunération versés aux agents publics, qu’ils soient titulaires ou non, au titre des heures supplémentaires qu’ils réalisent ou du temps de travail additionnel effectif, entrent dans le champ d’application de la nouvelle exonération.

Cet alinéa renvoie à un décret le soin de fixer les modalités de mise en œuvre de cette disposition. La réglementation du temps de travail dans la fonction publique (qu’elle soit d’État, hospitalière ou territoriale) relève en effet de la compétence réglementaire.

 L’alinéa 9 de l’article 1er renvoie à un décret le soin de préciser les modalités de la prise en considération des salaires versés au titre des heures supplémentaires ou complémentaires aux salariés dont la durée du travail ne relève pas des dispositions du chapitre II du titre Ier du livre II du code du travail, ou du chapitre III du titre Ier du livre VII du code rural, autrement dit à ceux qui échappent au droit commun des heures supplémentaires ou complémentaires tel qu’il a été rappelé plus haut.

Les dispositions du code du travail relatives à la durée du travail s’appliquent en principe aux établissements industriels et commerciaux et leurs dépendances, de quelque nature qu’ils soient, publics ou privés, laïques ou religieux ; aux offices publics et ministériels et aux professions libérales ; aux sociétés civiles, syndicats professionnels, associations de quelque nature que ce soit ; aux établissements artisanaux et coopératifs et leurs dépendances ; aux établissements hospitaliers privés à but lucratif et non lucratif ; aux entreprises d’armement maritime.

En revanche, il convient par ailleurs de mentionner l’existence, dans le code du travail, d’un certain nombre de dispositions particulières consacrées à certaines professions, dont le régime juridique peut comporter des dispositions dérogatoires au droit du temps de travail défini par ailleurs dans le code : à titre d’exemple, l’article L. 721-16 du code du travail prévoit un dispositif de majoration particulier pour les heures effectuées au-delà de huit heures dans une journée par les travailleurs à domicile. De même, le statut des éducateurs familiaux, employés par des associations gestionnaires de villages d’enfants, est soumis, aux termes de l’article L. 774-1 du code du travail, à un régime du temps de travail expressément dérogatoire au droit commun tel qu’il figure au chapitre II du titre Ier du livre II du code du travail. La durée du travail est fixée par accord collectif en nombre de journées, sur une base annuelle. Pour ces professions, des dispositions réglementaires sont à prendre.

En outre, il faut mentionner l’existence de professions dont le statut n’est pas réglementé par le code du travail mais par un autre code. À titre d’exemple, le régime des accueillants familiaux est, depuis quelques mois (loi du n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale) inséré aux articles L. 444-1 et suivants du code de l’action sociale et des familles : il est aussi dérogatoire au droit commun du temps de travail.

Pour l’ensemble de ces situations dérogatoires au droit commun du temps de travail, le décret devra donc procéder aux adaptations nécessaires.

b) Les modalités de mise en œuvre de l’exonération fiscale

Les alinéas 10 à 26 de cet article 1er définissent les modalités de mise en œuvre de l’exonération fiscale.

 C’est ainsi que sont d’abord prévues un certain nombre de limites venant préciser la détermination des rémunérations faisant l’objet de l’exonération fiscale. Ces limites ne prennent pas en considération les éléments de rémunération des agents publics, qui relèveront d’un régime propre établi par décret (alinéas 10 et 11). En revanche, ils s’appliquent à la catégorie « résiduelle » telle qu’elle est mentionnée à l’alinéa 9 de l’article 1er, dont il est également prévu que le régime sera fixé par décret.

Ce dispositif de limitations vise d’abord à laisser la priorité à la négociation collective. En tout état de cause en effet, le taux de majoration de la rémunération pouvant être prise en compte pour l’exonération fiscale sera, au plus, égal au taux prévu par la convention collective ou l’accord professionnel ou interprofessionnel applicable (alinéa 12).

À titre subsidiaire, en l’absence de clause conventionnelle, le présent projet de loi prévoit des taux plafonds (alinéas 13 à 16) :

– pour les heures supplémentaires, les taux de 25 ou 50 % (selon que les heures concernées correspondent aux huit premières ou sont décomptées au-delà), tels qu’ils figurent aux articles L. 212-5 du code du travail et L. 713-6 du code rural ;

– pour les heures complémentaires, le taux de 25 % (applicable pour les heures effectuées au-delà du dixième de l’horaire prévu au contrat jusqu’à un plafond de plus d’un tiers de ce même horaire), tel qu’il est prévu à l’article L. 212-4-4 du code du travail ;

– pour les forfaits mentionnés au second alinéa du 1. du nouvel article 81 quater, à savoir dans le cas de « temps choisi » effectué pour les cadres au forfait jours sur une base annuelle, à « 25 % de la rémunération journalière déterminée à partir du rapport entre la rémunération annuelle et le nombre de jours convenus dans le forfait ».

On pourrait s’interroger sur le bien-fondé de l’établissement de tels plafonds. Sans doute, la loi ne prévoit pas de taux de majoration des jours travaillés lorsqu’un cadre renonce à un jour de repos, conformément au régime prévu au III de l’article L. 212-15-3 du code du travail. Il est donc nécessaire de prévoir une limite à l’exonération fiscale.

En revanche, la loi fixe le taux de majoration des heures supplémentaires (25 % ou 50 %) ainsi que celui des heures complémentaires (25 %). Il convient toutefois de se rappeler que, de manière générale en droit du travail, la loi fixe des normes auxquelles il est toujours possible de déroger dans un sens plus favorable au salarié : un employeur a donc la possibilité de rémunérer un salarié pour les heures supplémentaires que celui-ci a effectuées à un taux supérieur au taux légal, voire au taux conventionnel fixé par une convention de branche, conformément à la dénomination à laquelle certains juristes ont recours d’« ordre public social » (la définition du temps de travail effectif est une notion d’ordre public social, et à ce titre peut faire l’objet d’une négociation dans le respect du principe de faveur). Ces dispositions visent donc à préciser qu’en tout état de cause, l’exonération fiscale sera limitée par les plafonds fixés par la loi ou la convention collective.

L’alinéa 17, par coordination avec la perspective de dispositifs propres au statut des agents publics, précise qu’il faudra, s’agissant de ces régimes, tenir compte des dispositions spécifiques applicables aux agents concernés.

 Un certain nombre d’autres mesures encadrent le dispositif. Elles sont de quatre types :

– L’alinéa 18 précise que le bénéfice de l’exonération est subordonné au respect, par l’employeur, de l’ensemble des dispositions légales et conventionnelles relatives à la durée du travail.

– L’alinéa 19 a vocation à prévenir les effets de substitution. Il convient d’éviter en effet que l’employeur ne supprime certains éléments de rémunération, en proposant dans un avenir proche (moins de douze mois) du travail supplémentaire à des conditions financières avantageuses pour lui et le salarié. Il pourrait en effet être tentant pour une entreprise, anticipant les effets positifs de l’application de la nouvelle exonération pour le salarié en termes de revenu, d’en tirer argument pour supprimer certains éléments de rémunération existant par ailleurs, le revenu du salarié concerné restant in fine le même.

Pour cette raison, si un élément de rémunération « au sens de l’article 79 » du code général des impôts, à savoir « les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu », est supprimé, il faudra qu’un délai de douze mois s’écoule avant que ne puissent être versés des salaires majorés au titre d’un temps supplémentaire travaillé.

Ce type de dispositif prévaut d’ores et déjà, avec succès, en matière d’intéressement. Ainsi, l’article L. 441-4 du code du travail par exemple dispose que « les sommes attribuées aux bénéficiaires en application de l’accord d’intéressement ou au titre du supplément d’intéressement (…) ne peuvent se substituer à aucun des éléments de rémunération, au sens des mêmes articles, en vigueur dans l’entreprise ou qui deviennent obligatoires en vertu de règles légales ou contractuelles ».

– De même, les alinéas 20 et 21 prévoient une mesure destinée à éviter le recours systématique aux heures complémentaires en matière de temps partiel.

De manière à prévenir les abus de droit, le septième alinéa de l’article L. 212-4-3 du code du travail prévoit d’ores et déjà que lorsque, pendant une période de douze semaines consécutives ou pendant douze semaines au cours d’une période de quinze semaines, l’horaire moyen réellement effectué par un salarié a dépassé de deux heures au moins par semaine (ou de l’équivalent mensuel de cette durée) l’horaire prévu dans son contrat, celui-ci est modifié par l’ajout à l’horaire antérieurement fixé de la différence entre cet horaire et l’horaire moyen réellement effectué, sauf opposition du salarié intéressé.

L’alinéa 21 dispose que, dans ce cas, que l’on peut dire de dépassement régulier sur une longue durée de l’horaire contractuelle au moyen d’heures complémentaires, s’il s’avère que l’horaire contractuel n’a pas été ajusté – par exemple du fait de l’opposition du salarié qui voit un intérêt à profiter du régime favorable applicable aux heures complémentaires –, l’exonération fiscale n’est pas applicable et le bénéfice lui en est retiré.

Si, à l’inverse, le contrat a été modifié et que la durée contractuelle du travail reste ensuite stable pendant une certaine durée minimale fixée par décret, l’exonération est applicable. Cette durée minimale pourrait être fixée à un niveau établi entre six mois et un an, selon les informations transmises par les services du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi au rapporteur.

– Enfin, l’alinéa 22 prévoit que l’exonération fiscale sera inapplicable aux heures supplémentaires que l’on peut dire fictives, à savoir qui résulteraient de l’abaissement par une entreprise, après le 1er octobre 2007 de la durée hebdomadaire du travail, de manière à diminuer artificiellement le nombre d’heures habituellement travaillées dans le cadre de l’horaire collectif de travail, au profit de la création de nouvelles heures supplémentaires, qui leur reviendraient moins cher. L’exposé des motifs évoque, à cet égard, les « effets d’optimisation ».

Les situations visées sont celles du temps de travail modulé (article L. 212-8 du code du travail ; articles L. 713-14, L. 713-15 et L. 713-16 du code rural) et du temps de travail organisé avec attribution de journées ou demi-journées de repos à la suite de la réduction du temps de travail (article L. 212-9 du code du travail).

Il n’était en revanche pas nécessaire de viser la situation de l’aménagement du temps de travail par cycles, car les heures supplémentaires y sont en tout état de cause définies par rapport à une moyenne hebdomadaire de trente-cinq heures.

L’alinéa 23 renvoie, comme il est d’usage en matière d’exonérations fiscales, à un décret pour la fixation des modalités de l’accomplissement des formalités déclaratives, dans un certain nombre de cas particuliers :

– pour les salaires versés aux salariés par les particuliers employeurs au titre des heures supplémentaires (3. du I de l’article 81 quater) ;

– pour les salaires versés aux assistants maternels au titre des heures supplémentaires et complémentaires réalisées (4. du I de l’article 81 quater) ;

– pour les salariés versés aux salariés faisant l’objet d’une réglementation ou d’une législation particulière au titre des heures supplémentaires et complémentaires effectuées (6. du I de l’article 81 quater) ;

– pour les salariés pour lesquels il est fait usage des formalités de recouvrement spécialisées, dans les petites entreprises de moins de dix salariés, par le biais des « services emploi-entreprise » (à savoir avec la mise en œuvre d’une déclaration unifiée de cotisations sociales individualisée, ou la fourniture d’un titre emploi-entreprise) (articles L. 133-5 à L. 133-5-3 du code de la sécurité sociale) ;

– pour les salariés pour lesquels il est fait usage des formalités de recouvrement spécialisées, dans les très petites entreprises de cinq salariés ou moins, par le biais du chèque emploi pour les très petites entreprises (article L. 133-5-5 du code de la sécurité sociale) ;

– pour les salariés pour lesquels le chèque emploi-service universel (CESU) est utilisé (article L. 133-8 du code de la sécurité sociale) ;

– pour les salariés employés dans le cadre de la procédure du chèque-emploi associatif (article L. 133-8-3 du code de la sécurité sociale) ;

– pour les salariés gardant un enfant, dont la prise en charge a lieu par le biais de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE) (article L. 531-8 du code de la sécurité sociale) ;

– pour les salariés faisant l’objet d’un dispositif spécifique prévalant outre-mer (article L. 812-1 du code du travail).

S’agissant des dispositifs CESU et Pajemploi, ils devront, en pratique, être modifiés afin de permettre la déclaration des heures supplémentaires et complémentaires. Dans un avis que son conseil d’administration a rendu sur le projet de loi le 11 juin 2007, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) a préconisé la refonte des chéquiers et carnets CESU, « ce qui impliquera notamment un nouveau maquettage, une « cerfatisation », de nouveaux marchés ou des avenants aux marchés existants, la mise en place d’un nouveau traitement de lecture automatique des documents (LAD ) ». L’ACOSS insiste sur le fait que, « compte tenu de ces contraintes qui nécessiteraient au moins un délai de six mois de développement, il semble indispensable d’envisager un système de déclaration des heures supplémentaires et complémentaires dématérialisé ».

Ce nouveau dispositif devra en outre – aux termes de la même analyse des services de l’ACOSS – s’articuler avec l’assiette forfaitaire « gens de maison » et avec les exonérations applicables dans ce secteur. La question se pose aussi de sa mise en œuvre compte tenu de la prise en charge partielle ou totale des cotisations par la caisse d’allocations familiales ou la mutualité sociale agricole, dans le cadre du complément de mode de garde de la prestation d’accueil du jeune enfant (PAJE), de l’allocation de garde d’enfant à domicile (AGED) et de l’aide à la famille pour l’emploi d’une assistante maternelle agréée (AFEAMA).

c) Autres dispositions de nature fiscale

Aux termes de l’alinéa 24, l’inclusion de la référence à la nouvelle exonération (prévue à l’article 81 quater du code général des impôts) dans le 1. de l’article 170 du code général des impôts a pour effet d’intégrer à la déclaration annuelle des revenus le montant des revenus exonérés. Parallèlement, le même alinéa insère la référence à la nouvelle exonération dans le c du 1° du IV de l’article 1417 relatif à la définition du « revenu fiscal de référence ».

On rappellera en effet qu’en principe, les revenus exonérés n’ont pas à être présentés au moment de la déclaration d’imposition. Au cas présent, l’inconvénient de cette solution est que le revenu fiscal de référence étant établi en fonction du revenu imposable, elle conduit à sous-estimer les facultés contributives des intéressés et, partant, à fausser l’appréciation de ces facultés, pourtant requises pour l’appréciation du revenu fiscal de référence qui lui-même sert notamment à de nombreuses collectivités territoriales pour accorder un certain nombre de prestations. Les modifications proposées par cet alinéa 24 permettent donc à l’intéressé, au moment de sa déclaration d’impôt, de faire connaître le montant des sommes exonérées et de voir son revenu fiscal de référence ajusté en conséquence, sans pour autant que ce montant ne soit pris en compte, naturellement, pour l’établissement de l’impôt.

Cette intégration dans le revenu fiscal de référence de la rémunération des heures supplémentaires et complémentaires a au total pour effet, comme le résume l’exposé des motifs du projet de loi, de préserver l’économie d’autres avantages fiscaux ou sociaux soumis à condition de ressources dont bénéficieraient les salariés concernés.

Selon les informations transmises par les services du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi au rapporteur, « des mesures réglementaires neutraliseront dans le même esprit les ressources prises en compte pour l’attribution des prestations familiales, de l’allocation logement et de l’allocation aux adultes handicapés ».

Les alinéas 25 et 26 insèrent au 3° du B du I de l’article 200 sexies du code général des impôts la précision selon laquelle les revenus nouvellement exonérés sont retenus « pour l’appréciation du montant des revenus définis au a », c’est-à-dire pour l’appréciation du revenu devant être inférieur à un certain plafond pour permettre aux intéressés de bénéficier de la prime pour l’emploi.

Il s’agit, dans la même perspective que s’agissant du revenu fiscal de référence, d’assurer la prise en considération des sommes exonérées pour l’appréciation de l’attribution de la prime pour l’emploi. Il existerait en effet sinon un risque non négligeable, concernant en particulier des salariés rémunérés à un niveau inférieur au Smic, que le montant de la prime attribuée diminue.

2. La nouvelle réduction de cotisations salariales de sécurité sociale

Le présent projet de loi crée une réduction de cotisations salariales de sécurité sociale, définie dans un nouvel article L. 241-17 du code de la sécurité sociale, inséré à la fin d’une liste d’articles consacrés à diverses exonérations ou réductions de cotisations sociales (alinéa 27).

a) Le champ d’application

Ce nouvel article comprend un I (alinéas 28 et 29), relatif d’abord au champ d’application de la nouvelle réduction. Celui-ci est défini comme identique à celui de l’exonération fiscale prévue par le nouvel article 81 quater. Bien que le temps choisi ne soit pas expressément mentionné, il semble qu’il faille l’y inclure : peut-être serait-il souhaitable que la précision puisse être apportée par voie d’amendement. Il faut aussi souligner que le champ d’application des salariés concernés est donc aussi vaste que s’agissant de l’exonération fiscale.

En outre, les limites et conditions fixées par l’article 81 quater sont applicables : par « limites », on entend les plafonds mentionnés aux alinéas 10 à 17 ; le terme « conditions » désigne les quatre conditions figurant aux alinéas 18 à 22.

b) Les modalités du calcul de la réduction

La nouvelle réduction est définie comme une réduction de cotisations salariales de sécurité sociale proportionnelle à la rémunération du salarié. Il s’agit donc d’une réduction des seules cotisations au titre de l’assurance maladie et de la vieillesse, les « contributions » sociales n’étant pas affectées.

Cependant – c’est une particularité du dispositif qu’il ne faut pas sous-estimer – ce sont à la fois les cotisations et les contributions d’origine légale ou conventionnelle rendues obligatoires par la loi qui sont prises en considération pour fixer le taux de cette réduction. Il s’agit des cotisations et contributions dont le salarié est redevable au titre de cette heure.

Dans le droit positif, le montant des cotisations et contributions salariales dues pour chaque salarié concerné est défini dans les limites suivantes :

– taux de 0,75 % au titre de l’assurance maladie (2,55 % pour les départements d’Alsace-Moselle) ;

– taux de 6,75 % au titre de l’assurance vieillesse (part plafonnée de 6,65 %, part déplafonnée de 0,10 %) ;

– taux des cotisations acquittées au titre des régimes complémentaires, variables en fonction de différents paramètres, notamment le statut de cadre ou non : on retient généralement une moyenne de 3,8 à 8,9 % ;

– taux de 2,4 % au titre des cotisations d’assurance chômage ;

– taux de 7,5 % au titre de la contribution sociale généralisée (CSG – 5,10 % pour la CSG déductible du revenu imposable, 2,4 % pour la CSG non déductible du revenu imposable) ;

– taux de 0,50 % au titre de la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).

Au total, on trouve donc un montant d’environ 21,5 % (ne sont pas prises en considération les cotisations de prévoyance complémentaire et de retraite supplémentaire) : le taux de la réduction pourrait donc, selon les informations transmises par les services du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi au rapporteur, être fixé à ce même taux. La réflexion sur cette question est toutefois encore en cours. C’est à un décret que le même alinéa renvoie le soin de définir le taux de la nouvelle réduction.

Pour un Smic horaire brut majoré de 25 % (taux de majoration de droit commun d’une heure supplémentaire), soit 8,44 euros + 25 % = 10,55 euros, ce taux de 21,5 points représente 2,27 euros.

Il y aurait, si une telle hypothèse était retenue, exonération salariale totale, ce qui présente notamment l’avantage de placer sur un même plan l’exonération fiscale et la présente réduction salariale.


Exemple d’application de la nouvelle réduction salariale dans une entreprise de moins de vingt salariés

Soit un salarié rémunéré au Smic, effectuant 151,67 heures normales et 17,33 heures supplémentaires, donc un total de 169 heures.

La rémunération au titre des heures « normales » s’élève à 1254,28 euros, celle au titre des heures supplémentaires à 179,18 euros (base de 8,27 euros du Smic horaire).

La réduction de cotisations salariales est calculée au taux de 21,46 % (0,75 % de maladie, 6,7 5% de vieillesse de base, 3,8 % de retraite complémentaire, 2,4 % de chômage, 7,76 % de CSG-CRDS une fois qu'on tient compte de l'abattement de 3 % sur cette assiette) et vaut donc 179,18 x 21,46 euros = 38,45 euros.

Compte tenu de leur taux (0,75 % au titre de la maladie et 6,75 % au titre de la vieillesse), ce montant dépasse naturellement – par construction – les cotisations de sécurité sociale correspondant à ces heures supplémentaires, soit 7,5 % x 179,18 = 13,44 euros.

Comme le précise le projet de loi (cf. infra alinéa 30 de l’article 1er), il convient de prendre en compte le fait qu’effectuer des heures supplémentaires donne droit à une réduction des cotisations salariales de sécurité sociale au titre de l’ensemble de la rémunération mensuelle : l’imputation des 38,45 euros sur le total des cotisations de sécurité sociale (7,5 % x 1254,28 = 94,07 euros pour les heures « normales » auxquels on ajoute 13,44 euros pour les heures supplémentaires, soit un total de 132,52 euros) ne pose pas de problème : le niveau de la réduction atteint un montant de 132,52 - 38,45 = 94,07 euros.

L’alinéa 29 est relatif à la situation des salariés relevant des régimes spéciaux, tels qu’ils sont mentionnés à l’article L. 711-1 du code de la sécurité sociale (il s’agit de l’unique article du chapitre premier du titre consacré aux régimes spéciaux, chapitre dédié aux dispositions générales ; l’article renvoie à des décrets le soin de définir ces différentes organisations spéciales de sécurité sociale). Le but recherché est, conformément à la vocation de l’ensemble du dispositif, de veiller à une application de la réduction la plus universelle possible. Des dispositions particulières sont nécessaires eu égard à la diversité qui prévaut dans ces différents régimes, de manière à favoriser une certaine équité avec le régime général.

Il convient de garder à l’esprit notamment que les fonctionnaires civils et militaires de l’État ainsi que les magistrats relèvent d’une organisation spéciale de sécurité sociale, et que des règles spécifiques s’y appliquent. À titre d’exemple, pour l’État, l’assiette des cotisations sociales correspond au traitement brut indiciaire, à l’exception de toute prime ou indemnité ; ou encore, le taux de cotisations d’assurance maladie payé par l’État pour ses fonctionnaires est de 9,7 % alors que la part patronale des cotisations d’assurance maladie du régime général s’élève à 12,8 %. On peut enfin retenir que les heures supplémentaires effectuées dans les régimes spéciaux sont généralement rémunérées sous la forme d’indemnités ou de primes qui ne sont assujetties qu’à la contribution sociale généralisée et à la contribution au remboursement de la dette sociale ainsi que, dans les trois fonctions publiques, à une cotisation au régime additionnel obligatoire de retraite de 10 % dans la limite de 20 % du traitement.

Cet alinéa 29 renvoie à un décret le soin de définir les conditions dans lesquelles est réalisée cette application, en précisant cependant deux limites : la prise en considération du niveau des cotisations dont sont redevables les personnes relevant de ces régimes ; la limite « mentionnée au premier alinéa », à savoir la limite des cotisations et contributions d’origine légale ou conventionnelle rendues obligatoires par la loi dont le salarié est redevable au titre de cette heure.

L’alinéa 30 (paragraphe II du nouvel article L. 241-17) précise que la réduction de cotisations salariales est imputée sur le montant des cotisations salariales dues pour chaque salarié concerné au titre de l’ensemble de sa rémunération. Cet élément est essentiel car il signifie que la réduction est imputable sur l’ensemble de la rémunération (mensuelle) d’un salarié et pas seulement sur le montant de la rémunération versé au titre de l’heure supplémentaire réalisée. La portée de la réduction en est donc d’autant plus grande. À titre d’exemple, sur une heure supplémentaire rémunérée à hauteur du Smic majoré de 25 %, soit 10,55 euros, une exonération de 21,5 % représente un montant de 2,2 euros. Or les cotisations sociales (maladie et vieillesse) sont de 7,5 %, ce qui représente 79 centimes d’euros. On mesure la perte qu’il y aurait pour le salarié (2,2 euros - 79 centimes d’euros, soit 1,41 euro par heure) si celui-ci ne pouvait voir la réduction imputée sur l’ensemble de sa rémunération (voir aussi l’encadré présenté ci-dessus).

c) Les conditions de cumul

Aux termes de l’alinéa 31, le cumul de cette réduction avec le bénéfice d’autres dispositions ne peut être autorisé que dans des conditions fixées par décret, ledit décret devant prendre en compte le niveau des avantages sociaux attribués aux salariés concernés de façon à déterminer des solutions équitables. Il existe en effet une multitude de dispositifs différents de taux réduits ou d’assiettes forfaitaires : à titre d’exemple, les journalistes professionnels bénéficient d’un taux réduit égal à 80 % du taux de droit commun applicable ainsi que d’une déduction forfaitaire spécifique (DFS) pour frais professionnels de 30 % (qui représente 1,2 milliard d’euros d’assiette annuelle en 2006, selon l’ACOSS). Les mannequins et artistes du spectacle bénéficient d’un taux réduit égal à 70 % des taux de droit commun si le cachet est supérieur à 25 % du plafond mensuel de la sécurité sociale et d’une cotisation forfaitaire de vingt-cinq fois le plafond horaire en deçà. Ils bénéficient également de déductions spécifiques pour les frais professionnels (entre 10 et 25 %).

L’alinéa 32 a pour objectif d’assurer l’effectivité du dispositif, en subordonnant le bénéfice de la réduction d’impôt à la mise à disposition du service des impôts compétent de la direction générale des impôts et des agents chargés du contrôle (visés aux articles L. 243-7 du code de la sécurité sociale et L. 724-7 du code rural – il s’agit des contrôles URSSAF) « d’un document en vue du contrôle des dispositions du présent article ». Un tel document est déjà prévu, s’agissant de la réduction générale de cotisations patronales « Fillon », à l’article D. 241-13 du code de la sécurité sociale.

Un décret doit préciser les conditions de remise d’un tel document. Selon les informations transmises au rapporteur par les services du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi, « il s’agirait de prévoir par exemple : pour chaque salarié, le nombre d’heures complémentaires, supplémentaires ou choisies faites pendant la période de référence, le montant total de la réduction salariale et de la réduction patronale, ainsi que le rappel de la rémunération mensuelle brute versée… Pour les titres simplifiés, il s’agit principalement de l’ajout aux mentions obligatoires figurant sur les chèques des rubriques relatives aux heures supplémentaires et aux heures complémentaires ».

Le contrôle pourrait être recoupé avec celui réalisé par les inspecteurs du travail à partir du relevé d’heures des salariés existant par ailleurs dans toute entreprise.

À cet égard, l’ACOSS a rappelé, dans l’avis rendu sur le dispositif proposé par son conseil d’administration, à la suite de la réunion du 11 juin 2007, que les inspecteurs du recouvrement n’ont pas la charge du contrôle de l’application de la réglementation en matière d’heures supplémentaires, qui revient aux inspecteurs du travail. Néanmoins, l’ACOSS pointe que, lors des contrôles comptables d’assiette, les inspecteurs du recouvrement seront amenés à vérifier le bien-fondé des réductions de cotisations appliquées et préconise, à cet effet, la mise en place de « mécanismes permettant de vérifier que ce qui est porté sur le bulletin de salaire en tant qu’heures supplémentaires correspond bien à la réalité ». L’ACOSS ajoute : « dans la pratique, la bonne réalisation d’un tel contrôle par les inspecteurs de recouvrement dépendra des obligations déclaratives qui seront prévues par le décret ». En particulier, il pourrait être souhaitable que les employeurs aient l’obligation de tenir à disposition des inspecteurs des récapitulatifs mensuels permettant de contrôler les réductions salariales et patronales appliquées.

De fait, l’article 1er prévoit qu’un décret fixera aussi les obligations déclaratives particulières (« complémentaires », dit le projet de loi) dans les situations propres aux régimes déjà visés à l’alinéa 23 de l’article 1er (titre emploi entreprise, chèque emploi pour les très petites entreprises, CESU, chèque emploi-associatif, PAJE, outre-mer, dispositifs et régimes particuliers visés respectivement aux articles L. 133-5-3, L. 133-5-5, L. 133-8, L. 133-8-3 et L. 531-8 du code de la sécurité sociale et L. 812-1 du code du travail).

Au total, l’impact des mesures, de caractère fiscal et social, relatives aux heures supplémentaires a été analysé conformément à la présentation établie dans l’encadré suivant par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (avis en date du 11 juin 2007).



Source : Agence centrale des organismes de Sécurité sociale – Avis du conseil d’administration du 11 juin 2007 sur la partie relative aux heures supplémentaires du projet de loi portant sur le travail, l’emploi et le pouvoir d’achat.

3. La nouvelle déduction de cotisations patronales de sécurité sociale

Le projet de loi institue également une déduction forfaitaire des cotisations patronales. Le terme de déduction a été préféré dans ce cas à celui de réduction car, on le verra, les possibilités de cumul permettent une forme de « dépassement » du montant de la déduction par rapport au montant total des cotisations et charges supportées par l’employeur (cf. infra, commentaire de l’alinéa 35).

a) Le champ d’application de la déduction de cotisations sociales patronales (alinéa 33 de l’article 1er)

 Les salariés et employeurs concernés

D’une part, sont visées toutes les heures supplémentaires effectuées par les salariés mentionnés au II de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale : les heures complémentaires ont été délibérément écartées du dispositif par le gouvernement. Conformément aux explications transmises par les services du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi au rapporteur, « il convient en effet de ne pas inciter [les entreprises] à recourir davantage au temps partiel en contradiction avec l’objectif général d’augmentation de la durée moyenne du travail, et d’éviter en outre le maintien artificiel d’une durée de travail réduite qui serait susceptible de nuire aux intérêts des salariés à temps partiel ». En revanche, le temps choisi doit être considéré comme compris dans la référence aux heures supplémentaires, élément qu’il pourrait être opportun de préciser lors de la discussion. Il s’agit des salariés visés dans le champ d’application de la réduction générale de cotisations patronales dite réduction Fillon.

D’autre part, ne sont concernées que les heures supplémentaires qui entrent dans le champ d’application du I de l’article 81 quater du code général des impôts, tel qu’il a été défini plus haut.

De facto, les employeurs concernés sont ceux auxquels est applicable la réduction Fillon, à savoir :

– les employeurs du secteur privé entrant dans le champ d’application du régime d’assurance chômage (entreprises industrielles, commerciales, artisanales et agricoles, entreprises du secteur des services, professions libérales, offices professionnels, sociétés civiles, syndicats professionnels, associations et organismes de sécurité sociale n’ayant pas le statut d’établissement public) ;

– les établissements publics industriels et commerciaux des collectivités locales, les sociétés d’économie mixte, les entreprises nationales, pour les salariés dont l’emploi ouvre droit à l’allocation d’assurance chômage ;

– les employeurs relevant des régimes spéciaux des clercs et employés de notaires, des mines et des marins, pour leur personnel titulaire d’un contrat de droit privé et pour lequel l’employeur a opté pour le régime d’indemnisation du risque de privation d’emploi ou a conclu avec l’Assedic une convention de gestion de l’indemnisation de ce risque.

En revanche, ne bénéficient pas de l’allègement Fillon, et donc pas de la présente déduction (il y a adossement total des deux dispositifs l’un sur l’autre s’agissant du champ d’application), l’État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs, scientifiques ou culturels ; les chambres de commerce et d’industrie, de métiers et d’agriculture ; les particuliers employeurs.

Le choix de « restreindre » ainsi le champ des employeurs bénéficiant de la déduction s’explique, comme dans le cas de la réduction Fillon, par les objectifs poursuivis de diminution du coût du travail s’agissant prioritairement des bas salaires.

 Les cotisations concernées

La déduction s’impute sur le montant total des cotisations patronales, qui s’élèvent à 30,38 % de la rémunération versée (12,8 % au titre de la maladie, 9,9 % au titre de la vieillesse, 5,4 % au titre des allocations familiales et 2,28 % en moyenne au titre des accidents du travail).

Comme dans le cas de la réduction salariale, il semble que le projet vise à favoriser une imputation sur l’ensemble de la rémunération, ce que laisse penser la rédaction de l’alinéa 35. Mais une précision apportée au texte sur ce point pourrait être bienvenue, étant donnée l’importance de sa portée pratique.

b) Les modalités de calcul

Le même alinéa 33 de l’article 1er précise que cette déduction, dont le montant sera fixé par décret, a un caractère « forfaitaire ». L’objectif est de favoriser une certaine dégressivité de l’avantage, au profit, là encore, des plus bas salaires. Il est prévu que ce montant puisse être majoré dans les entreprises employant au plus vingt salariés.

D’après les informations transmises par les services du ministre de l’économie, des finances et de l’emploi, ce montant pourrait être de 1,5 euro dans les entreprises d’au plus vingt salariés et de 0,5 euro dans les autres entreprises.

La majoration accordée aux plus petites entreprises est destinée à compenser la disparition anticipée du dispositif dérogatoire de la majoration de 10 % des quatre premières heures supplémentaires pour les entreprises de vingt salariés au plus (cf. infra).

S’agissant des cadres soumis à une convention de forfait en jours sur une base annuelle en application du III de l’article L. 212-15-3 du code du travail, et ayant renoncé à des jours de repos en application du même article (cas visé au second alinéa du 1. du I de l’article 81 quater du code général des impôts), ceux-ci bénéficient d’une réduction forfaitaire égale à sept fois ce montant par jour de repos (alinéa 34 de cet article 1er).

c) Les règles de cumul applicables

L’alinéa 35 pose les conditions de cumul de cette déduction avec d’autres dispositifs. Ce cumul avec les autres dispositifs d’exonération n’est possible que dans certaines limites :

– la limite des cotisations patronales de sécurité sociale : autrement dit les cotisations versées au titre de l’assurance maladie, de l’assurance vieillesse, des allocations familiales et des accidents du travail ;

– la limite des contributions patronales recouvrées suivant les mêmes règles, restant dues par l’employeur : il s’agit de la contribution au Fonds national d’aide au logement (FNAL, en application de l’article L. 834-1 du code de la sécurité sociale), du versement transport (en application des articles L. 2531-2 et suivants du code général des collectivités territoriales) et de la contribution solidarité autonomie (en application de la loi n° 2004-616 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées) ;

– pour le reliquat éventuel, la limite des cotisations salariales de sécurité sociale précomptées, au titre de l’ensemble de la rémunération du salarié concerné.

Ces trois éléments semblent devoir être considérés comme s’additionnant les uns aux autres, pour constituer un plafond et ne pas faire l’objet de traitements différenciés. Dans cette perspective, la référence au « reliquat éventuel » ne paraît toutefois pas très probante. Par ailleurs, la référence aux « cotisations salariales » semble exclure, a contrario, les « contributions salariales », telles l’assurance chômage, la retraite complémentaire, etc.

En effet, dans la mesure où, pour les salariés des entreprises de moins de vingt salariés au Smic, il ne reste plus que la cotisation au titre des accidents du travail à exonérer, il pourra arriver que l’exonération dépasse les sommes dues en propre par l’employeur. Aussi, à la différence de ce qui se pratique dans le cadre des autres exonérations, le dispositif retenu prévoit d’autoriser les employeurs à imputer en trésorerie sur les cotisations sociales versées aux URSSAF le surplus de l’exonération patronale de sécurité sociale.

Mais il faut observer qu’en tout état de cause, un certain nombre de dispositifs d’exonérations de cotisations patronales (ce n’est pas le cas de l’allègement Fillon) prévoient expressément qu’ils ne peuvent se cumuler avec d’autres mesures de même nature.

L’objectif poursuivi par les rédacteurs du projet de loi serait le suivant : permettre le cumul de la nouvelle déduction avec la réduction Fillon lorsque l’employeur peut y prétendre ; dans le cas où l’employeur ne bénéficie pas de la réduction Fillon mais d’un autre dispositif (en général du fait d’une option en faveur d’une exonération plus avantageuse), permettre le cumul de la nouvelle déduction avec celui-ci. Cela suppose donc, par cohérence, de procéder à une modification des différents régimes prévoyant une incompatibilité de dispositifs d’exonération patronale avec toute autre déduction.

Exemple d’application de la nouvelle déduction patronale dans une entreprise de moins de vingt salariés

Soit un salarié rémunéré au Smic, effectuant 151,67 heures normales et 17,33 heures supplémentaires, donc un total de 169 heures.

La nouvelle déduction patronale est de 1,5 euro x 17,33 = 26 euros. Or le montant des cotisations patronales dues aux URSSAF dans cette entreprise pour l'ensemble des heures (heures normales et heures supplémentaires) n'est – compte tenu de l’allègement Fillon – plus que de 14,33 euros, qui correspondent à la cotisation au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles. Les contributions assimilées sont de 5,73 euros. Ce total (14,33 + 5,73 = 20,06 euros) ne suffit pas et il faudra que l'entreprise impute en trésorerie 26 - 20,06 = 5,94 euros sur le précompte de son salarié au titre des cotisations salariales.

Sur l’ensemble de ce dispositif, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), dans l’avis qu’elle a rendu sur l’avant-projet d’article à l’issue de la réunion de son conseil d’administration en date du 11 juin 2007, a été amenée à soulever certaines questions.

En effet, la nouvelle déduction est cumulable avec l’allègement Fillon. Or ces deux mesures doivent s’appliquer dans la limite de la somme des cotisations patronales, mais aussi salariales, restant dues au titre de la rémunération du salarié concerné. Pour l’ACOSS, « le projet de loi prévoit donc de permettre à l’employeur d’imputer en trésorerie le surplus de la réduction patronale sur les cotisations salariales à reverser à l’URSSAF ». Si cette possibilité ne soulève pas de difficultés particulières s’agissant du paiement et de la trésorerie (le montant dû au titre de la part salariale restant conséquent), elle est à même de causer des problèmes concernant la gestion comptable et l’enregistrement des écritures correspondantes, du fait de la différence de nature juridique entre les cotisations salariales et patronales (en particulier du fait de différences dans les rangs de priorité, ordre permettant d’affecter le paiement des différentes cotisations en cas de paiement partiel au moment de la déclaration des cotisations) : aujourd’hui en pratique, les systèmes de gestion séparent systématiquement ces deux types de cotisations. Quelle que soit la solution pratique retenue in fine (l’ACOSS propose trois types de scénarios), des évolutions des systèmes d’information substantielles devront être effectuées et ce dans des délais assez brefs.

Plus encore, l’ACOSS a procédé à un certain nombre de simulations. La principale conclusion qui en résulte est positive : dans toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, on constate une diminution du coût du travail (compte tenu de la baisse des cotisations patronales), et cela quel que soit le nombre d’heures supplémentaires (d’une à quatre)(6). Cela est dû au double effet de la déduction forfaitaire de cotisations patronales, mais aussi de la mesure de neutralisation du coût des heures supplémentaires dans la formule de calcul de l’allègement Fillon (Cf. infra). Les graphes présentés ci-après illustrent ces résultats.

Variation de la rémunération totale pour un salarié travaillant
entre 36 heures et 39 heures dans une entreprise de moins de 20 salariés n’ayant pas passé d’accord de réduction de temps de travail




Variation de la rémunération totale pour un salarié travaillant
entre 36 heures et 39 heures dans une entreprise de plus de 20 salariés ayant passé un accord de réduction de temps de travail




L’étude réalisée par l’ACOSS met aussi en évidence le fait que dans un certain nombre de situations (qui correspondent certes à « un nombre extrêmement limité de cas »), en particulier les situations où une très petite entreprise n’employant que des salariés payés au Smic ou très légèrement au-dessus et ayant un taux de cotisations au titre des accidents du travail très faible (taux inférieur à 1,3 %), le montant total de la déduction patronale excéderait celui des cotisations dues aux URSSAF (la réduction nouvelle étant forfaitaire).

L’alinéa 36 prévoit la déduction de cette nouvelle mesure de l’ensemble des sommes dues par les employeurs au titre des cotisations salariales et patronales, sommes désignées par cet alinéa comme « devant être versées par les employeurs aux organismes de recouvrement » : à savoir les unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (URSSAF) visées à l’article L. 213-1 du code de la sécurité sociale ainsi que les caisses de mutualité sociale agricole mentionnées à l’article L. 725-3 du code rural. Sont donc par cette disposition expressément autorisées toutes les opérations de déduction dans le cadre de ce nouveau dispositif, y compris la déduction du précompte salarial.

d) Autres conditions devant être respectées pour pouvoir prétendre au bénéfice de la déduction

Les alinéas 37 à 39 posent un certain nombre de conditions préalables au bénéfice de la nouvelle déduction :

– Aux termes de l’alinéa 37, le bénéfice de la nouvelle déduction est subordonné au respect des quatre conditions prévues au III de l’article 81 quater du code général des impôts, autrement dit celles prévues pour pouvoir prétendre au bénéfice de l’exonération fiscale créée par ce même article 1er : le respect des dispositions légales et conventionnelles relatives à la durée du travail ; la non-substitution d’éléments de salaire susceptibles de pouvoir bénéficier du nouveau régime fiscal et social à d’autres éléments de salaires au sein d’une période de douze mois ; l’absence d’accomplissement régulier d’heures complémentaires, sauf si elles sont prises en compte par l’horaire contractuel de travail ; l’absence de prise en considération des heures supplémentaires issues de la diminution de la durée hebdomadaire du travail en cas d’aménagement du temps de travail par modulation ou attribution de journées ou demi-journées de repos.

– L’alinéa 38 prévoit, s’agissant de l’application de la majoration particulière du montant de la déduction forfaitaire au profit des entreprises de vingt salariés ou moins, la nécessité du respect de la clause communautaire qui prévaut en matière d’aides publiques sous la dénomination de minimis.

Cette règle figure dans le Règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission européenne du 15 décembre 2006 concernant l’application des articles 87 et 88 du traité sur l’Union européenne. Elle dispense l’État de notifier à la Commission européenne les aides versées aux entreprises dont le montant n’excède pas un certain seuil. Ces aides peuvent être octroyées aux entreprises de tous secteurs mais ne doivent pas excéder le seuil de 200 000 euros par période de trois ans. Ce plafond s’applique quels que soient la forme et l’objectif des aides. Cette règle est applicable à compter du 1er janvier 2007 jusqu’au 31 décembre 2013.

– L’alinéa 39, enfin, fait obligation aux employeurs bénéficiant de la nouvelle déduction de se conformer aux obligations déclaratives qui prévalent s’agissant de la réduction salariale de cotisations sociales (voir supra alinéa 32 de cet article 1er).

4. Dispositions complémentaires

a) Une modification des modalités de calcul de « l’allègement Fillon ».

 Le projet de loi propose une modification des modalités du calcul de « l’allègement Fillon », réduction dégressive de cotisations sociales patronales mentionnée à l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale. Sans revenir sur une description détaillée de l’ensemble du dispositif, on rappellera que cet allègement s’est, depuis le 1er juillet 2003, substitué aux dispositifs de réduction dégressive des cotisations patronales de sécurité sociale sur les bas salaires (dite ristourne Juppé) et d’allégement des cotisations patronales de sécurité sociale lié à la mise en œuvre d’accords de réduction du temps de travail (dit allègement Aubry II).

L’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale précise que cette réduction est calculée à partir d’un coefficient fonction de la rémunération horaire du salarié concerné, calculée en divisant la rémunération mensuelle par le nombre d’heures rémunérées au cours du mois considéré.

Au 1er juillet 2005, le régime du calcul de la réduction est devenu définitif : les gains et rémunérations versés par toutes les entreprises, quelle que soit la durée du travail applicable, seront affectés d’un coefficient maximal de 0,26 pour un SMIC horaire (7), qui devient nul au niveau d’une rémunération au moins égale à 1,6 fois le SMIC.

En application de l’article D. 241-17 du code de la sécurité sociale, le coefficient est déterminé par application de la formule suivante :

C = (0,26 / 0,6) x (1,6 x SMIC x nombre d’heures rémunérées / rémunération mensuelle brute - 1).

 La création de ce nouvel allègement avait pour but de détacher l’aide de la réduction du temps de travail, lien porteur d’effets pervers, en particulier pour les salariés dont la durée effective du travail est supérieure à la durée légale. Contrairement à l’allègement de la loi Aubry II, celui-ci est en effet calculé en fonction du salaire horaire et non de la rémunération mensuelle. Il est donc entièrement neutre par rapport à la durée du travail : en particulier, le surcoût lié aux heures supplémentaires est réparti sur l’ensemble des heures et n’engendre plus qu’une très faible diminution des allègements (8). Faible, cette diminution existe toutefois.

En effet, dans le droit positif tel qu’il est notamment précisé par une circulaire administrative en date du 12 juin 2003, pour le calcul du coefficient précité, le nombre d’heures de travail rémunérées est celui auquel se rapporte la rémunération versée au cours du mois considéré : ce nombre d’heures figure au bulletin de salaire. Il s’agit d’un nombre d’heures « exhaustif », qui intègre les heures payées au taux normal mais aussi les heures dites supplémentaires, qui sont payées à un taux majoré. Ce nombre, toutefois, – qui figure au numérateur de la formule de calcul du coefficient – ne reflète en rien le fait que les heures supplémentaires sont majorées. De fait, la circulaire administrative du 12 juin 2003 portant application du titre III de la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l’emploi a bien précisé que « le nombre d’heures n’est (…) pas majoré à hauteur de la majoration applicable à la rémunération ».

Au contraire, la majoration est prise en considération, dans ce même calcul du coefficient, au sein de la rémunération mensuelle globale – qui elle figure au dénominateur. Cette forme de « distorsion » dans le traitement de la majoration des heures supplémentaires conduit à diminuer le montant du coefficient et, partant, le montant de l’allègement Fillon, conformément à l’exemple chiffré présenté ci-après.

Calcul du coefficient C pour l’allègement Fillon dans deux situations : avec ou sans heures supplémentaires

– Situation d’un salarié travaillant 35 heures pas semaine, rémunéré au taux horaire du SMIC, ne faisant aucune heure supplémentaire :

C = (0,26 / 0,6) x (1,6 x 8,44 (1) x 151,67 / 1280 (2) - 1) = 0,433 x 0,6 = 0,26

– Situation d’un salarié travaillant 35 heures pas semaine, rémunéré au taux horaire du SMIC, faisant quatre heures supplémentaires par semaine (soit environ dix-huit heures supplémentaires par mois) :

C = (0,26 / 0,6) x (1,6 x 8,44 x (151,67+18 (3) ) / (1280 + (10,55 x 18 (4) ) - 1) = 0,433 x (2291,22 / 1469,9 - 1) = 0,242

(1) Montant brut horaire du SMIC au 1er juillet 2007.

(2) Ce nombre est issu du produit du nombre d’heures effectuées sur le mois (151,67) par la rémunération horaire brute.

(3) Le nombre d’heures total étant pris en compte, on ajoute le nombre d’heures supplémentaires, mais celui-ci n’est pas majoré selon le taux de majoration qui leur est applicable (élément que le présent projet de loi vise précisément à modifier).

(4) On prend en considération dans le revenu mensuel l’ensemble de la rémunération afférente aux heures supplémentaires, y compris la majoration de 25 % (10,55 = 8,44 + 25 %).

Le problème posé vient de ce différentiel négatif entre les deux situations, selon que le salarié effectue ou non des heures supplémentaires. Conformément à l’explication figurant dans l’exposé des motifs du projet de loi, « les salariés les moins rémunérés sont les plus nombreux à effectuer des heures supplémentaires. Or, l’effet dissuasif lié au surcoût qu’elles occasionnent pour l’employeur est plus important lorsque le salaire est peu élevé, et serait encore aggravé si l’augmentation du nombre d’heures effectuées avait pour effet de réduire les allègements de charge consentis à l’employeur ».

Pour cette raison, le présent dispositif vise à apporter une forme de correctif au calcul du coefficient dans le cas où sont réalisées des heures supplémentaires, en intégrant au nombre d’heures prises en compte la majoration applicable aux heures supplémentaires, de façon à accroître le niveau du numérateur de la formule de calcul du coefficient, donc le niveau de ce coefficient et, partant, celui de l’allègement.

À dire vrai, ce n’est pas exactement le taux de la majoration des heures supplémentaires qui sera inclus dans le nombre d’heures figurant dans la formule du coefficient, mais une sorte d’équivalence horaire de ce taux (de même qu’en matière de repos compensateur, on procède à des équivalences en temps des taux de majoration : à titre d’exemple, une majoration financière horaire de 50 % correspond à une demi-heure). Ainsi, une heure supplémentaire majorée de 25 % en salaire comptera pour 1,25 heure dans la formule de calcul.

L’exemple suivant illustre le nouveau mode de calcul proposé et son effet positif sur le niveau du coefficient. 

Calcul du coefficient C pour l’allègement Fillon compte tenu d’heures supplémentaires avec ou sans intégration de la majoration dans le nombre d’heures pris en compte

– Situation d’un salarié travaillant 35 heures pas semaine, rémunéré au taux horaire du SMIC, faisant quatre heures supplémentaires par semaine (soit environ dix-huit heures supplémentaires par mois), sans prise en compte dans le total des heures effectuées de majoration au titre des heures supplémentaires :

C = (0,26 / 0,6) x (1,6 x 8,44 x (151,67+18) / (1280 + (10,55 x 18) - 1) = 0,433 x (2291,22 / 1469,9 - 1) = 0,242

– Situation d’un salarié travaillant 35 heures pas semaine, rémunéré au taux horaire du SMIC, faisant quatre heures supplémentaires par semaine (soit environ dix-huit heures supplémentaires par mois), avec prise en compte dans le total des heures effectuées de majoration au titre des heures supplémentaires :

C = (0,26 / 0,6) x (1,6 x 8,44 x (151,67+22,5 (1) ) / (1280 + (10,55 x 18 ) - 1) = 0,433 x (2351,99 / 1469,9 - 1) = 0,26

(1) Le nombre d’heures supplémentaires est majoré forfaitairement de 25 % (18 + 25 % = 22,5) de façon à intégrer les heures supplémentaires réalisées.

Au final, c’est donc à une neutralisation complète de l’effet négatif lié à la prise en compte des heures supplémentaires que l’on aboutit (la prise en compte des heures supplémentaires ne se faisant plus uniquement au niveau du dénominateur, s’agissant du revenu mensuel, mais aussi au niveau du numérateur, pour ce qui concerne le nombre d’heures prises en considération).

 C’est ainsi que les alinéas 40 et 41 de cet article 1er ont pour objet de modifier le premier alinéa du III de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, relatif au mode de calcul, en précisant que le coefficient prend en compte le nombre d’heures supplémentaires par une inclusion du « taux de la majoration qui est appliqué à leur rémunération, dans la limite des taux prévus au I de l’article L. 212-5 du code du travail et à l’article L. 713-6 du code rural », autrement dit dans la limite des taux « de droit commun » (voir supra : 25 % pour les huit premières heures supplémentaires, 50 % ensuite).

b) Une modification du régime de cumul de l’allègement Fillon avec d’autres dispositifs

Les alinéas 42 à 46 de cet article 1er procèdent à une modification du régime du cumul de l’allègement Fillon avec d’autres allègements sociaux.

Dans le droit actuel, le bénéfice de l’allègement Fillon est cumulable avec les exonérations prévues aux articles L. 741-4-1, L. 741-15-1 et L. 751-17-1 du code rural (3° du V de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale). Il s’agit des dispositions suivantes :

– l’exonération des cotisations à la charge de l’employeur au titre des assurances sociales pendant une durée annuelle fixée par décret et pendant deux ans à compter de l’embauche des rémunérations et gains versés aux salariés qui sont embauchés sous contrat de travail à durée indéterminée du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008 par les groupements d’employeurs, composés de personnes physiques ou de sociétés civiles agricoles (article L. 741-15-1 du code rural) ;

– l’application aux cotisations d’allocations familiales de l’exonération précitée (article L. 741-4-1 du code rural) ;

– l’application aux cotisations d’accidents du travail de l’exonération précitée (article L. 751-17-1 du code rural).

Les alinéas 43 et 44 de l’article 1er procèdent à la suppression de ce 3° du V de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale. Ces dispositions sembleraient en effet correspondre à une malfaçon rédactionnelle, le but poursuivi initialement étant d’ouvrir la possibilité de bénéficier successivement des différents dispositifs (ce que rien n’interdit), et non d’établir un régime de cumul entendu au sens strict.

Ces alinéas y substituent donc la possibilité du cumul de l’« allègement Fillon » « avec la déduction forfaitaire prévue à l’article L. 241-18 », autrement dit la nouvelle déduction de cotisations patronales dont l’alinéa 35 a déjà posé le principe du cumul avec d’autres allègements.

En outre, l’alinéa 45 prévoit l’abrogation du 4° du V de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, relatif à la possibilité de cumuler le bénéfice de l’allègement Fillon avec les dispositions suivantes (pour un motif identique à celui évoqué concernant les modifications entreprises par les alinéas 43 et 44) :

– l’exonération des cotisations à la charge de l’employeur au titre des assurances sociales pendant une durée annuelle fixée par décret et pendant deux ans à compter de la transformation du contrat des rémunérations et gains versés aux salariés dont le contrat de travail à durée déterminée a été transformé en contrat à durée indéterminée par un certain nombre d’employeurs
(article L. 741-15-2 du code rural) 
;

– l’application aux cotisations d’allocations familiales de l’exonération précitée (article L. 741-4-2 du code rural) ;

– l’application aux cotisations d’accidents du travail de l’exonération précitée (article L. 751-17-2 du code rural).

Enfin, par coordination, l’alinéa 46 substitue, dans le dernier alinéa du V de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, à la référence « 1° et 2° », la référence « 1° à 3° », de façon à prendre en compte, dans la désignation des possibilités de cumul, le cumul avec la nouvelle déduction telle qu’elle est mentionnée désormais au 3° du V de cet article L. 241-13 du code de la sécurité sociale.

c) Des modifications de dispositions du code rural pour coordination

Les alinéas 47 à 50 de cet article 1er procèdent à des modifications du livre II du code rural pour coordination :

– L’alinéa 48 insère dans l’article L. 741-4 du code rural la référence à l’article L. 241-18, soit à la nouvelle déduction patronale, de manière à ce qu’il soit précisé qu’elle aussi est « applicable[s] aux gains et rémunérations versés aux salariés agricoles ».

– L’alinéa 49 insère dans l’article L. 741-15 du code rural la référence aux articles L. 241-17 et L. 241-18 du code de la sécurité sociale, soit à la nouvelle réduction salariale et à la nouvelle déduction patronale, de manière à ce qu’il soit précisé qu’elles aussi sont « applicables aux cotisations dues au titre des salariés agricoles ».

– L’alinéa 50 substitue, dans les derniers alinéas des articles L. 741-15-1 et L. 741-15-2 du code rural, la référence à l’article L. 241-18 à la référence existante à l’article L. 241-13.

Ces deux articles L. 741-15-1 et L. 741-15-2 sont relatifs au régime de cumul des deux exonérations susmentionnées avec d’autres allègements existants. Conformément à la modification effectuée par les alinéas 42 à 45, la présente substitution supprime la possibilité de cumul de ces deux exonérations avec l’allègement Fillon et la rend possible avec la nouvelle déduction patronale.

d) L’anticipation de la fin de la dérogation relative au taux de majoration minoré des heures supplémentaires dans les petites entreprises

L’alinéa 51 de cet article 1er a pour objet l’abrogation du I de l’article 4 de la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005 portant réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise, ainsi que du III de ce même article en tant qu’il s’applique au I.

Le I de cet article 4 prévoit un dispositif dérogatoire concernant les heures supplémentaires effectuées dans les petites entreprises de vingt salariés ou moins, dispositif qui comporte deux éléments : l’établissement d’un taux de majoration dérogatoire ; l’institution d’un mode d’imputation des heures supplémentaires sur le contingent dérogatoire (9).

 Un taux de majoration dérogatoire

La loi Aubry II du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail prévoyait que le taux de bonification en repos ou de majoration de salaire des quatre premières heures supplémentaires passerait, pour l’ensemble entreprises, de 10 % à 25 % à compter du 1er janvier 2003, mécanisme transitoire pour le passage aux trente-cinq heures de l’ensemble des entreprises.

Mais la loi Fillon du 17 janvier 2003 relative aux salaires, au temps de travail et au développement de l’emploi a prolongé le régime transitoire, au profit des entreprises d’un à vingt salariés, jusqu’au 31 décembre 2005, de manière à prendre en compte les difficultés particulières rencontrées par les plus petites entreprises pour procéder à la réduction du temps de travail : le taux de majoration des quatre premières heures supplémentaires était donc fixé à 10 %, sauf accord collectif fixant ce taux à un niveau ne pouvant qu’être supérieur.

La loi du 31 mars 2005 a de nouveau prolongé le régime transitoire, jusqu’au 31 décembre 2008, mais pour les entreprises de 1 à 20 salariés à la date de promulgation de la loi, dans l’attente d’un accord collectif fixant un taux de majoration applicable aux heures supplémentaires.

C’est ainsi que le I de l’article 4 dispose que « dans l’attente de la convention ou de l’accord collectif fixant, conformément à l’article L. 212-5 du code du travail, le taux de majoration applicable aux heures supplémentaires [,] le taux de majoration des quatre premières heures supplémentaires applicable aux entreprises de vingt salariés au plus est fixé, par dérogation aux dispositions de cet article, à 10 % ».

 Un mode d’imputation sur le contingent dérogatoire

Le niveau de la durée légale du travail tel qu’elle est fixée à trente-cinq heures par l’article L. 212-1 du code du travail constitue le seuil de déclenchement du passage des « heures normales » aux « heures supplémentaires ». Au-delà de cette limite, les heures sont imputées sur le contingent d’heures supplémentaires, tel qu’il est défini à l’article L. 212-6 du code du travail, avec les conséquences que cela entraîne concernant le régime d’autorisation par l’inspecteur du travail et la prise de repos compensateur obligatoire (cf. supra).

De manière à adoucir cet effet créé par l’imputation des heures supplémentaires à compter de la trente-sixième heure sur le contingent, la loi Aubry II avait institué un régime transitoire d’imputation progressive des heures supplémentaires sur le contingent, de façon à « retarder » l’effet de seuil résultant du dépassement du contingent et à ménager ainsi une transition, prévoyant au fil des années une imputation des heures supplémentaires sur le contingent à partir de la seule trente-neuvième heure, puis trente-huitième, puis trente-septième, etc.

En particulier, s’agissant des petites entreprises de 1 à 20 salariés, la loi a prévu que les heures supplémentaires ne seraient imputées sur le contingent qu’à compter de la trente-septième heure en 2002, et de la trente-sixième en 2004. Or la loi du 31 mars 2005 a prévu que le régime transitoire soit prolongé jusqu’au 31 décembre 2008, pour les entreprises de vingt salariés ou moins à la date de promulgation de la loi.

En effet, le I de l’article 4 dispose que « dans l’attente de la convention ou de l’accord collectif fixant, conformément à l'article L. 212-5 du code du travail, le taux de majoration applicable aux heures supplémentaires [,] le seuil défini au troisième alinéa de l'article L. 212-6 du même code est fixé, pour ces mêmes entreprises, à trente-six heures ».

Les dispositions du III de l’article 4 sont les suivantes : « les régimes dérogatoires institués par les I et II du présent article prennent fin le 31 décembre 2008, même en l’absence de conventions ou d’accords collectifs prévus par les articles L. 212-5 et L. 227-1 du code du travail applicables à l’entreprise ou à l’unité économique et sociale. À compter du 1er janvier 2009, les dispositions des articles L. 212-5 et L. 212-6 du même code sont applicables à l’ensemble des entreprises quels que soient leurs effectifs. Les entreprises et unités économiques et sociales, y compris agricoles, auxquelles sont applicables ces régimes transitoires sont celles dont l’effectif est au plus égal à vingt salariés à la date de promulgation de la présente loi. L’effectif est apprécié dans les conditions prévues à l’article L. 620-10 du même code ».

Ces dispositions permettent donc de préciser les points suivants :

– en tout état de cause (même signature d’un accord collectif de travail sur la majoration des heures supplémentaires ou sur le compte épargne-temps) le régime dérogatoire s’éteint au 31 décembre 2008 et à compter du 1er janvier 2009, le régime de droit commun des heures supplémentaires est applicable (tel qu’il résulte des articles L. 212-5 et L. 212-6 du code du travail) ;

– les entités à prendre en considération sont celles dont l’effectif est effectivement de vingt salariés ou moins au moment de la promulgation de la loi, et non au moment de la « naissance » du régime dérogatoire (donc de la loi Aubry II) ;

– les effectifs sont décomptés selon le droit commun du travail, tel qu’il résulte de l’application de l’article L. 620-10.

e) Entrée en vigueur du dispositif et évaluation

L’alinéa 52 de cet article 1er prévoit l’entrée en vigueur de l’ensemble du dispositif de l’article 1er au 1er octobre 2007. La précision est apportée, selon laquelle (s’agissant des dispositions des I à VI) ce sont les « rémunérations perçues à raison des heures de travail accomplies à compter du 1er octobre 2007 » qui doivent être prises en compte.

De manière à prévoir un dispositif d’évaluation des dispositions de l’ensemble de l’article, l’alinéa 53 fait obligation au gouvernement de présenter au Parlement, avant le 1er juillet 2009, soit moins de deux ans après l’entrée en vigueur de cet article 1er, un rapport sur l’évaluation de celui-ci.

Au total, selon les informations transmises par les services du ministère de l’économie, des finances et de l’emploi, le coût entraîné par la mise en application du présent article est de l’ordre de 6 milliards d’euros en année pleine, à partir de 2009 : 1 450 millions d’euros au titre de la déduction de cotisations patronales, 3 milliards d’euros au titre de la réduction de cotisations salariales, 1 500 millions d’euros au titre de l’exonération fiscale.

Il est prévu qu’en application de l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, les exonérations de charges sociales seront compensées par l’État.

*

La commission a examiné deux amendements de suppression de l’article, l’un de Mme Martine Billard et l’autre de M. Michel Liebgott.

M. Roland Muzeau a indiqué que le groupe de la Gauche démocrate et républicaine déposera également un amendement de suppression en séance publique.

Le rapporteur pour avis a souligné que la suppression de l’article vide de son sens le projet de loi, alors même que le dispositif prévu à l’article 1er est très attendu par les salariés.

Le président Pierre Méhaignerie a rappelé que ces amendements vont de fait contre la volonté des salariés et qu’on ne peut oublier qu’il existe aujourd’hui plus de 500 000 offres d’emplois non satisfaites.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la commission a rejeté les amendements.

Puis la commission a examiné un amendement de M. Michel Liebgott tendant à supprimer l’ensemble du nouveau dispositif d’exonération fiscale.

M. Michel Liebgott a rappelé que c’est la croissance qui crée des emplois, et non la loi. Le principal problème de la France résulte bien de la situation de chômage de nombreuses personnes, qui de plus ne trouvent plus d’emploi en contrat à durée indéterminée puisqu’aujourd’hui 75 % des embauches sont effectuées sur des emplois précaires. Ce projet de loi ne fait qu’ajouter à la précarité : les heures « normales » travaillées deviendront demain l’exception. Or la priorité, c’est bien la création d’emplois à durée indéterminée. Du reste, il est clair que ce projet de loi ne fait qu’anticiper sur d’autres dispositions à venir, comme la suppression du contrat à durée indéterminée avec la création d’un contrat unique.

Le rapporteur pour avis a estimé que l’opposition fait une erreur psychologique d’appréciation du texte. Les salariés veulent améliorer leur pouvoir d’achat et ils le disent. Ce projet de loi le leur permet : il est véritablement très attendu.

M. Michel Liebgott a rappelé que seuls quelque 40 % des salariés effectuent aujourd’hui des heures supplémentaires. On est donc loin des possibilités offertes par le contingent, fixé à 220 heures, à l’évidence sous-utilisé.

Le rapporteur pour avis a souligné que, pour les salariés, l’adoption du projet de loi se traduira par une meilleure rémunération.

Mme Danièle Hoffman-Rispal a rappelé qu’un premier texte a déjà, il y a deux ans, porté le contingent d’heures supplémentaires à 220 heures. On ne voit pas ce que ce nouveau projet peut apporter aux salariés, alors même que le pays souffre surtout du manque de croissance et que de très nombreux chômeurs ont besoin de travailler.

Le rapporteur pour avis a jugé inutile de refaire le débat sur les trente-cinq heures et réaffirmé la position très favorable des salariés à l’égard du projet de loi.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la commission a rejeté l’amendement.

La commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis visant, dans un souci d’exhaustivité, à permettre aux salariés qui bénéficient du régime prévu à l’article L. 212-4-7 du code du travail, à savoir une réduction de la durée du travail sous forme d’une ou plusieurs périodes d’au moins une semaine en raison des besoins de leur vie familiale, de bénéficier des nouvelles exonérations. Les heures supplémentaires qu’ils effectuent sont en effet définies de manière spécifique au troisième alinéa de ce même article comme celles qui sont réalisées au-delà de la durée légale de trente-cinq heures ou, en cas d’application d’une convention ou d’un accord défini à l’article L. 212-8, comme celles qui sont effectuées au-delà des limitées fixées par cet accord.

La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur pour avis visant à permettre aux salariés travaillant dans les petites entreprises de vingt salariés ou moins selon la procédure de temps choisi, prévue au II de l’article 4 de la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005 portant réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise, de bénéficier des nouvelles exonérations.

M. Marcel Rogemont et Mme  Marisol Touraine ont interrogé le rapporteur pour avis sur la compensation de ces exonérations s’agissant des contributions aux régimes complémentaires de retraite, tels les régimes de l’Association générale des institutions de retraite des cadres (AGIRC) et de l’Association des régimes de retraite complémentaire (ARRCO).

Le rapporteur pour avis a rappelé la teneur de l’exposé des motifs du projet de loi, selon lequel « en application de l’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, l’État compensera les exonérations de cotisations de sécurité sociale aux régimes concernés ».

S’en rapportant aux propos de la ministre de l’économie, des finances et de l’emploi, le président Pierre Méhaignerie a indiqué que la compensation devrait être effective. Pour autant, il convient sans doute de s’assurer qu’elle le sera également pour les régimes complémentaires de retraite et ce point pourrait faire utilement l’objet d’une question adressée à la ministre en séance publique.

La commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur pour avis visant à inclure dans le nouveau dispositif d’exonérations les salariés non cadres soumis à une convention de forfait horaire sur une base mensuelle.

La commission a examiné un amendement du rapporteur pour avis visant à clarifier la rédaction de la clause destinée à éviter les abus en matière de temps partiel. La formulation retenue par l’alinéa 21 de l’article 1er du projet de loi n’est pas très explicite : il s’agit donc de prévoir expressément que le dépassement de l’horaire fixé au contrat de travail à temps partiel ne peut donner lieu au bénéfice des nouvelles exonérations que s’il est régularisé du fait de l’inclusion de ce dépassement dans l’horaire prévu au contrat d’une part, et seulement pour une durée limitée d’autre part.

M. Michel Liebgott a reconnu la nécessité d’éviter ces abus, tout en estimant que l’amendement ne répond pas entièrement à la question posée par le développement du temps partiel. Ainsi, par exemple, dans la grande distribution, du fait des dispositions du présent projet de loi, les entreprises seront peut-être incitées à créer plus d’emplois, mais des emplois à temps partiel.

Le président Pierre Méhaignerie a rappelé qu’en matière d’heures complémentaires, il existe malgré tout la limite de droit commun égale au dixième de l’horaire prévu au contrat à temps partiel, volume d’heures pouvant être travaillées au-delà de l’horaire contractuel, mais qui ne peut être dépassé en l’absence d’accord collectif.

La commission a adopté l’amendement.

La commission a examiné un amendement de M. Michel Liebgott visant à supprimer les dispositions relatives aux nouvelles exonérations de cotisations de sécurité sociale sur les heures supplémentaires.

M. Michel Liebgott a souligné que cette disposition est de nature à creuser encore le déficit des régimes sociaux. Qui paiera en effet ? Sera-t-il fait appel à la TVA sociale et aux contribuables locaux ? Au moins avec la réduction du temps de travail et les emplois jeunes, on savait qu’une ressource serait libérée au fil de la mise en œuvre des dispositifs.

Evoquant une dynamique de confiance, une dynamique de croissance, le président Pierre Méhaignerie a toutefois concédé qu’il y a une part de pari ; comme le disait Edgar Faure : « Il y a des politiques sans chances, il n’y a pas de politiques sans risques »

Suivant l’avis défavorable du rapporteur pour avis, la commission a rejeté l’amendement.

La commission a adopté un amendement du rapporteur pour avis visant à préciser dans le texte de l’article 1er que l’ensemble des heures de travail excédentaire effectuées pourra bénéficier de la nouvelle déduction patronale, à la seule exception des heures complémentaires réalisées par les salariés à temps partiel, conformément à l’intention exprimée dans l’exposé des motifs du projet de loi et afin d’éviter tout abus dans le recours au temps partiel.

La commission a ensuite examiné un amendement de Mme Martine Billard supprimant l’alinéa 34 de l’article 1er, qui prévoit qu’une déduction forfaitaire est également applicable pour chaque jour de repos auquel renonce le salarié.

Le rapporteur pour avis a indiqué que la disposition visée concourt à favoriser une application équitable des dispositions du texte au profit de l’ensemble des situations de travail envisageables et donné un avis défavorable à l’adoption de l’amendement.

La commission a rejeté l’amendement.

La commission a examiné un amendement du rapporteur pour avis visant à établir clairement – en raison d’une ambiguïté sur cette question dans le texte du projet de loi – que la nouvelle déduction patronale est imputable sur l’ensemble de la rémunération des salariés concernés et non seulement au titre de l’heure supplémentaire visée.

Après que M. Roland Muzeau a jugé peu claire la rédaction proposée, M. Simon Renucci a déclaré que l’amendement est antinomique avec la perspective de l’ensemble du projet de loi, puisqu’il ne vise pas les seules heures excédentaires travaillées.

Le président Pierre Méhaignerie a souhaité qu’un travail soit mené avec la commission des finances pour préciser les termes de cet amendement.

Le rapporteur pour avis ayant indiqué que le gouvernement a exprimé son accord avec la proposition contenue dans l’amendement, la commission a adopté l’amendement.

La commission a examiné un amendement du rapporteur pour avis tendant à modifier plusieurs dispositions du code de la sécurité sociale afin de permettre le cumul de la nouvelle déduction forfaitaire de cotisations patronales au titre des heures supplémentaires avec les mesures d’exonération de cotisations patronales de sécurité sociale spécifiques déjà existantes.

Le président Pierre Méhaignerie a observé qu’il existe un grand nombre de systèmes d’exonération de cotisations patronales, en particulier sur la tranche de revenus comprise entre 1 et 1,4 Smic. Cette accumulation est quelque peu regrettable et s’explique par le fait que, pour ne pas faire apparaître un accroissement de la dépense publique, le Parlement a très souvent par le passé - toutes sensibilités politiques confondues – procédé à des réductions de recettes.

M. Roland Muzeau s’est interrogé sur la pertinence de cet amendement, notamment du point de vue de son impact financier. Combien va coûter le cumul ainsi proposé ? Ces cumuls finissent par ressembler à une prime, tant le niveau des déductions est élevé.

M. Michel Liebgott s’est élevé contre une pratique qui peut confiner à l’absurde. La presse s’est fait l’écho, dans la perspective de la discussion du présent projet de loi, de l’apparition de situations dans lesquelles les allègements pourraient être supérieurs au niveau des cotisations patronales.

Le rapporteur pour avis a rappelé que la possibilité de cumul de la nouvelle déduction patronale avec d’autres exonérations est déjà ouverte par le projet de loi. Le président Pierre Méhaignerie a indiqué que cette possibilité de cumul n’équivaut pas pour autant à un crédit. D’après les travaux du Conseil de l’emploi, des revenus et de la cohésion sociale (CERC), la France, si elle se situe au dixième ou au onzième rang en matière de salaire direct parmi les quinze membres les plus anciens de l’Union européenne, se situe encore au deuxième ou au troisième rang s’agissant du coût horaire du travail, ce qui laisse des marges de manœuvre. Il serait donc erroné de parler de simples « cadeaux » successifs. Ce n’est pas sans conséquences lorsque l’on observe, par exemple, l’évolution du coût horaire du travail en Allemagne et les incidences en matière d’emploi.

Enfin, il a évoqué le souhait, exprimé devant lui, par le premier président de la Cour de cassation et le vice-président du Conseil d’État de procéder à une simplification des textes juridiques et des codes, et ce en concertation avec un comité parlementaire permanent, car une telle entreprise n’est pas réalisable à législation constante. Il est important d’alléger le poids des réglementations qui, au final, pénalise le pays.

M. Simon Renucci a déclaré mieux comprendre ainsi la portée de cet amendement, qui s’inscrit dans une succession de cadeaux fiscaux.

M. Roland Museau a évoqué la récente étude de la Cour des comptes relative aux différents dispositifs d’exonération et leur efficience toute relative, tout comme la prime pour l’emploi, en matière de création d’emplois.

La commission a adopté l’amendement.

Elle a également adopté un amendement du rapporteur pour avis visant à permettre le cumul de la déduction forfaitaire des cotisations patronales au titre des heures supplémentaires avec l’exonération des cotisations d’allocations familiales dues au titre de l’emploi des travailleurs agricoles occasionnels.

Puis la commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 1er ainsi modifié.

Article 8

Définition du revenu de solidarité active (RSA)

Les articles 8 à 11 du présent projet de loi instituent une expérimentation, dans les départements volontaires, du revenu de solidarité active (RSA), mesure dont l’ambition est de permettre à chacun de vivre dignement de son travail, en améliorant les revenus des « travailleurs pauvres » sans peser sur le coût du travail.

Globalement mis en œuvre, le RSA constituerait une sorte de révolution, puisqu’il se substituerait à l’ensemble des minima sociaux, à la prime pour l’emploi, voire aux aides au logement, et ce pour tous ceux dont les revenus propres sont insuffisants.

Dans l’attente de la réforme d’ensemble des minima sociaux que M. Martin Hirsch, Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, espère (voir son audition supra) pouvoir appliquer en 2009, c’est une phase expérimentale qui est proposée.

Dans cette phase, le RSA sera réservé aux bénéficiaires de certains minima sociaux, sous réserve, naturellement, qu’ils aient une activité professionnelle. L’expérimentation de la mesure sur une partie seulement du territoire, et pour une durée limitée à trois ans, une évaluation étant naturellement prévue, permettra aussi de mesurer son efficacité.

Avant d’évoquer le dispositif proposé, il n’est pas inutile de le replacer dans la réflexion et les réformes déjà conduites pour valoriser le travail même peu rémunérateur, ainsi que de présenter le concept du RSA.

1. Un dispositif novateur qui s’inscrit cependant dans la continuité des politiques visant à favoriser l’accès à l’emploi des bénéficiaires de minima sociaux

En premier lieu, on doit rappeler sommairement ce que sont les « minima sociaux ». Constitué depuis une cinquantaine d’années, le système français des minima sociaux regroupe une dizaine de prestations sociales qui ont en commun d’être des allocations financières non contributives (10) versées sous condition de très faibles ressources en vue d’assurer un revenu minimal aux personnes concernées. Tandis que le revenu minimum d’insertion (RMI) a le champ le plus universel, seuls les jeunes de moins de vingt-cinq ans en étant écartés, les autres minima sociaux visent des groupes plus ou moins ciblés (personnes âgées, handicapées, parents isolés, chômeurs en fin de droits, demandeurs d’asile, anciens détenus, etc.), d’où leur nombre variable de bénéficiaires. Le tableau ci-après permet d’apprécier ces effectifs.

Effectifs des bénéficiaires de minima sociaux en 2005

Ensemble, dont :

3 514 600

Revenu minimum d’insertion (RMI)

1 289 500

Allocation aux adultes handicapés (AAH)

801 000

Allocation supplémentaire vieillesse (ASV) (1)

610 000

Allocation de solidarité spécifique (ASS)

400 400

Allocation de parent isolé (API)

206 100

Allocation supplémentaire d’invalidité (ASI)

112 600

Allocation d’insertion (AI) (2)

35 400

Allocation équivalent retraite – remplacement (AER)

42 600

Allocation veuvage (en extinction)

7 000

Revenu de solidarité (outre-mer)

10 000

Source : DREES, Études et résultats n° 539, novembre 2006.

() Devenue depuis l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA) et communément dénommée « minimum vieillesse ».

(2) Remplacée depuis par l’allocation temporaire d’attente.

Certains minima sociaux sont seulement versés sous condition de ressources, mais les principaux d’entre eux, comme le RMI et l’allocation de parent isolé (API), présentent un caractère différentiel, c’est-à-dire que l’allocation a pour objet de compléter les revenus propres des personnes à concurrence d’un certain plafond. Dans ces conditions, l’augmentation éventuelle des revenus propres des bénéficiaires sous ce plafond ne se traduit par aucun changement de revenu global pour eux. C’est pourquoi, afin de valoriser la recherche d’activités rémunérées même modestes, il a été prévu très tôt des mécanismes dits d’« intéressement » des bénéficiaires de minima sociaux permettant de cumuler tout ou partie des allocations et des revenus d’activité commencée après l’ouverture des droits à ces allocations.

Cependant, complexes et donc peu prévisibles, a fortiori pour des personnes défavorisées, ces mécanismes ont montré leurs limites, la fraction des bénéficiaires des différents minima sociaux y accédant restant très minoritaire – et inférieure nécessairement à la fraction de ces personnes qui ont un emploi ou une activité, l’« intéressement » n’étant possible que pour une durée limitée et seulement en cas de (re)prise d’emploi, pas en cas de continuation d’un emploi préexistant.

Par ailleurs, était institué en 2001 (11) un dispositif de soutien des revenus d’activité modestes, adossé à l’impôt sur le revenu (prenant la forme d’un crédit d’impôt pouvant conduire à un impôt négatif, donc à un versement net aux contribuables), la prime pour l’emploi. Visant à inciter au retour à l’emploi ou au maintien de l’activité, cette prime est subordonnée à l’exercice d’une activité professionnelle, salariée ou non, car elle n’est versée que lorsque sont déclarés des revenus d’activité compris entre un plancher (il s’agit d’inciter à un minimum d’activité) et un plafond, le niveau maximum de prime étant atteint pour des revenus correspondant à un SMIC à plein temps.

Enfin, les bénéficiaires de minima sociaux font naturellement partie des populations éloignées de l’emploi qui sont ciblées par les mécanismes dits de « contrats aidés » mis en place depuis une vingtaine d’années pour faciliter, grâce à des aides de l’État aux employeurs, l’accès à des emplois soit de droit commun, soit adaptés et accompagnés à des degrés divers.

Ces politiques ont été réformées dans la période la plus récente, afin de les rendre plus attractives et de les recentrer sur les bénéficiaires de minima sociaux.

a) Les mesures d’« activation » des minima sociaux dans le cadre des contrats aidés

Reprenant l’acquis de la loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 qui a transféré aux départements la responsabilité de la gestion du RMI, mais aussi institué le contrat insertion-revenu minimum d’activité (CI-RMA), la loi n° 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale a établi quatre contrats aidés différents pour les personnes éloignées de l’emploi à partir du croisement de deux critères de différenciation : ces contrats de travail particuliers sont ou non dédiés à des bénéficiaires de minima sociaux ; ils s’exécutent chez des employeurs marchands ou non (collectivités locales, associations…). On distingue donc respectivement : le CI-RMA, le contrat d’avenir, le contrat initiative-emploi (CIE) et le contrat d’accompagnement dans l’emploi (CAE).

Tous ces contrats reposent sur des aides publiques aux employeurs, mais le CI-RMA et le contrat d’avenir, réservés aux bénéficiaires des minima sociaux, l’un dans le secteur marchand, l’autre dans le secteur non-marchand, comportent une modalité particulière d’aide : l’allocation sociale (ou plutôt une fraction de celle-ci égale au RMI garanti à une personne isolée (12)), au lieu d’être versée au bénéficiaire (qui perçoit en contrepartie un salaire plus élevé), est transformée en aide à l’employeur. À ce titre, les départements, financeurs du RMI, deviennent financeurs des contrats aidés destinés aux bénéficiaires de cette allocation. À cette « activation » du minimum social s’ajoutent des aides complémentaires de l’État et des exonérations de charges sociales.

b) La réforme de l’intéressement des bénéficiaires des minima sociaux en 2006

La loi n° 2006-339 du 23 mars 2006 pour le retour à l’emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux a pour objet principal une réforme d’ensemble des mécanismes financiers d’incitation à la reprise d’activité par les bénéficiaires des divers minima sociaux, à savoir les mécanismes dits d’intéressement dont le principe a été présenté supra. Ces mécanismes, différents dans leurs paramètres selon qu’il s’agissait du RMI et de l’API ou de l’ASS, reposaient les uns et les autres sur le principe du cumul d’une part dégressive (dans le temps) des revenus d’activité avec l’allocation de minimum social.

Cette réforme obéit à quelques grandes lignes :

– la recherche de la simplicité et de la lisibilité (donc de l’attractivité) pour les personnes concernées, en substituant un système simple et prévisible reposant sur des primes forfaitaires garanties pour une durée déterminée à un dispositif complexe dont la compréhension impliquait des compétences mathématiques poussées ;

– la prise en charge des coûts afférents à la reprise d’emploi. Ces coûts (habillement, transports, garde d’enfants…) sont en partie fixes et sont importants, d’autant plus que la période de chômage a été longue. Ils surviennent rapidement. C’est ce qui a justifié d’une part l’instauration d’une prime de 1 000 euros versée d’un coup, d’autre part le maintien d’un système limité et dégressif dans le temps ;

– la préférence donnée au retour aux emplois permettant la meilleure insertion. Les emplois les plus à même de sortir effectivement les personnes de la précarité étant ceux qui comportent une durée de contrat et un horaire de travail suffisants pour dégager de vrais revenus, même modestes, le choix a été fait de n’appliquer le nouveau dispositif qu’aux prises d’emplois avec un horaire excédant 78 heures par mois, tandis que l’ancien système d’intéressement a été conservé (sous réserve de quelques ajustements) pour les horaires plus faibles.

Ce dispositif comporte donc (pour les seules prises d’emploi avec un horaire d’au moins 78 heures) :

– un cumul intégral des minima sociaux et du salaire du travail repris pendant trois mois, ce qui correspond pour l’essentiel au maintien du régime antérieur d’intéressement ;

– le versement d’une prime dite de retour à l’emploi de 1 000 euros au bout de quatre mois de travail, voire dès la fin du premier mois en cas de conclusion d’un ou plusieurs contrats de travail à durée indéterminée ou avec une durée déterminée de plus de six mois (13) ;

– le versement d’une prime mensuelle forfaitaire de 150 euros pour les personnes isolées, 225 euros pour les couples et les familles (y compris monoparentales), pendant neuf mois après la période de cumul intégral allocation/revenu d’activité.

Pour les bénéficiaires du RMI et de l’API travaillant moins de 78 heures mensuelles, le maintien du système antérieur leur permet de cumuler, pendant ces neuf mois, l’allocation avec 50 % de leur revenu d’activité.

Il a été décidé que les prises d’emplois aidés pourraient ouvrir droit au nouveau régime d’intéressement, sauf s’il s’agit de contrats d’avenir ou de CI-RMA, lesquels sont compatibles avec la prime de retour à l’emploi de 1 000 euros, mais pas avec les primes forfaitaires mensuelles. Cette exclusion, dans la continuité du régime antérieur d’intéressement, a alors été justifiée par la nature particulière de ces contrats dits d’activation des minima sociaux, qui représentent déjà une forme d’intéressement et sont destinés à des publics particulièrement éloignés de l’emploi. Cela dit, on peut considérer que cet argument perd de sa validité avec l’élargissement des conditions d’accès aux contrats d’activation justement réalisé par ailleurs par la loi du 23 mars 2006 : la règle de latence qui imposait six mois préalables de bénéfice d’un minimum social pour accéder à ces contrats a été supprimée.

Pour conclure, on peut observer que la réforme de l’intéressement, si elle améliore le système préexistant, en le rendant plus simple et plus favorable, en conserve deux limites fondamentales :

– le caractère provisoire (un an en général) du cumul allocation/revenu d’activité ;

– la limitation aux seules prises ou reprises d’emploi (les personnes bénéficiant d’un minimum social tout en poursuivant une activité réduite ou non rentable ne sont pas concernées).

On doit relever par ailleurs que la loi pour le retour à l’emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux cherche à dynamiser les contrats aidés, en particulier le contrat d’avenir et le CI-RMA dédiés aux bénéficiaires de minima sociaux, en aménageant diverses règles les concernant : outre la suppression de la règle de latence mentionnée supra, sont ainsi apportées des souplesses et des allègements en matière de durée des contrats (notamment pour les détenus bénéficiant d’un aménagement de peine), de durée hebdomadaire du travail, de forme du contrat de travail conclu (des CI-RMA peuvent désormais être conclus à durée indéterminée), d’agrément administratif…

Il est enfin à noter que la loi de finances pour 2006 a réalisé une amélioration substantielle de la prime pour l’emploi (dont on rappelle qu’elle est techniquement adossée à l’impôt sur le revenu) en programmant une majoration en deux ans de 50 % de son montant maximal et en s’efforçant de mieux cibler les « travailleurs pauvres » : même si le montant maximal de prime continue à être atteint pour un revenu d’activité équivalent au SMIC à temps plein, il a été prévu une amélioration spécifique au bénéfice des travailleurs à temps partiel, avec, pour un revenu d’activité correspondant à un SMIC à mi-temps, un relèvement de la prime unitaire variable selon la situation de famille mais de toute façon supérieur à 80 %.

En fin de compte, comme le montrent les éléments réunis dans le tableau ci-après, l’accès des bénéficiaires de minima sociaux à l’emploi et plus particulièrement aux dispositifs spécifiques d’aide, s’il semble s’être amélioré ces dernières années, reste néanmoins faible. Par ailleurs, ainsi qu’on le voit s’agissant des bénéficiaires de l’API, un grand nombre de ceux qui travaillent ne perçoivent pas d’intéressement, compte tenu des limites intrinsèques de ce dispositif qui ont été rappelées supra.

L’accès des bénéficiaires des minima sociaux à l’intéressement et à l’emploi

En %

 

API (2004)

RMI (2003)

RMI (12/2006)

ASS (2004)

ASS (2006)

Taux de bénéficiaires de l’intéressement

5,4

11,9

13,5

13,6

14,7

Taux de bénéficiaires de contrats d’activation

Sans objet

Sans objet

5,2

Sans objet

4,8

Taux de personnes en activité sans intéressement

8,5

n.d.

n.d.

n.d.

n.d.

Sources : rapports annuels de performances 2006 des missions Travail et emploi et Solidarité et intégration ; DARES, Première synthèses, n° 26-3, juin 2006 ; DREES, Etudes et résultats, n° 579, juin 2007.

c) L’expérimentation engagée en 2007

Il convient également de présenter l’expérimentation engagée en application de la loi de finances pour 2007, car le RSA tel que proposé dans le présent projet se greffe sur cette expérimentation, dont il élargit le champ et l’ambition.

L’article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2000 a en effet autorisé les départements volontaires, en tant que financeurs et gestionnaires du RMI, à expérimenter pendant trois ans un certain nombre de dérogations au droit commun (légal et réglementaire) des mesures d’intéressement et/ou de celles d’activation – contrat d’avenir et CI-RMA – des bénéficiaires de cette allocation. Ces dérogations sont susceptibles de porter principalement sur :

– le montant, la durée de versement et la périodicité des nouvelles mesures d’intéressement prévues en cas de reprise d’un emploi pour plus de 78 heures mensuelles, la prime de retour à l’emploi et des primes forfaitaires, la première pouvant alors être versée et gérée par les départements ;

– la forme juridique du contrat d’avenir, afin qu’il puisse être passé non seulement sous la forme classique d’un contrat à durée déterminée, mais aussi (comme le CI-RMA) sous celle d’un contrat à durée indéterminée ou d’intérim ;

– le montant et les critères de modulation des aides aux employeurs afférentes aux contrats aidés ;

– la durée minimale, la durée maximale et le renouvellement de ces contrats, dans certaines limites (avec un plancher de six mois et un plafond de vingt-quatre, renouvellements inclus) ;

– la durée hebdomadaire du travail en contrat d’avenir, qui pourra varier entre vingt heures et la durée légale du travail (contre vingt-six heures imposées dans le droit commun, sauf dans les chantiers d’insertion et associations intermédiaires).

Il est ensuite apparu opportun d’étendre cette expérimentation aux dispositifs financés en dernier ressort par l’État et donc de sa responsabilité (même si leur gestion est confiée à d’autres organismes comme l’Agence nationale pour l’emploi ou les caisses d’allocations familiales) : les autres minima sociaux tels que l’ASS, l’AAH et l’API, et les autres contrats aidés, CAE et CIE. Cette extension a été réalisée par l’article 52 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, avec en toile de fond la faculté ainsi ouverte de rapprocher suffisamment les dispositifs pour expérimenter le « contrat unique d’insertion ». L’objectif affiché est en effet de conduire des expérimentations convergentes et le rapprochement des règles dérogatoires pratiquées par l’État et le conseil général sera l’un des objets de la convention de mise en œuvre de l’expérimentation qu’ils passeront.

L’expérimentation ouverte par la loi de finances pour 2007 est prévue pour trois ans (à compter de la publication par décret de la liste des départements admis à y participer, conformément aux dispositions organiques du code général des collectivités territoriales). Les départements volontaires devaient se porter candidats auprès des préfets avant le 31 mars 2007, suite à une délibération motivée de leur assemblée délibérante, et transmettre avant le 30 juin un dossier décrivant les expérimentations envisagées. Seize candidatures ont été enregistrées et deux départements dont les dossiers étaient précocement prêts, ont déjà été reconnus par décret (14), l’Eure (conseil général présidé par M. Jean-Louis Destans, socialiste) et la Côte d’Or (conseil général présidé par M. Louis De Broissia, UMP).

Enfin, ce dispositif prévoit en termes précis les modalités d’un « accompagnement financier » des départements par l’État sur des bases forfaitaires par bénéficiaire (par exemple 1 000 euros par prime de retour à l’emploi attribuée par le département et l’équivalent de la moyenne nationale de l’aide d’État aux contrats d’avenir par contrat de cette nature géré par le département).

2. Le concept de revenu de solidarité active

Le concept de RSA a été dégagé dans le rapport rendu en avril 2005 par la commission « Familles, vulnérabilité, pauvreté » présidée par M. Martin Hirsch, dont il constitue l’une des quinze « résolutions ».

Ce concept représente l’aboutissement de la réflexion plus ancienne sur le remplacement du système complexe des minima sociaux par une allocation universelle dégressive selon les revenus d’activité, réflexion qui a donné lieu à diverses propositions comme celle de M. Roger Godinot (« l’allocation compensatrice de revenu ») et que l’on peut rattacher, de manière plus générale, à celle sur l’« impôt négatif » ou le « dividende universel ».

Le rapport précité se fonde sur un certain nombre de constats :

– Dans bien des cas, le retour à l’emploi s’accompagne d’une réduction des revenus d’un foyer ou, au mieux, d’une stagnation de ceux-ci. Des études montrent qu’un bénéficiaire du RMI perd de l’argent quand il reprend un emploi à quart-temps, voire, parfois, à mi-temps. Plus généralement, le prélèvement marginal sur les revenus complémentaires tirés d’une activité est souvent supérieur à 100 % pour les ménages les plus modestes : ce constat renvoie à la notion de « trappe à inactivité » ; il existe en outre de nombreuses discontinuités dans la progression financière des revenus selon le quantum de travail effectué.

Cette situation est liée en particulier à la question des « droits connexes », c’est-à-dire des avantages divers dont bénéficient les allocataires des divers minima sociaux en raison de leur statut, droits dont les « travailleurs pauvres » ne bénéficient pas nécessairement. Mme Valérie Létard, lorsqu’elle était sénatrice, a étudié cette question, qui a fait l’objet d’un rapport d’information, puis est devenue le cœur de la proposition de loi « portant réforme des minima sociaux » adoptée par le Sénat en janvier 2007 (15). Le tableau ci-après, extrait de ces travaux, récapitule les droits connexes nationaux, auxquels il faudrait ajouter tous ceux accordés par les collectivités locales, par exemple en matière d’accès aux transports collectifs, sur la même base du statut de bénéficiaire de telle ou telle prestation. Selon certaines analyses, compte tenu de ces droits et transferts « connexes », la durée hebdomadaire de travail (rémunéré au SMIC) permettant d’obtenir un gain financier en sortie de minimum social pourrait être en moyenne de 25 heures pour un célibataire, de 30 pour un couple et de 40 pour un parent isolé avec un enfant (16)

Les droits connexes nationaux liés au statut de bénéficiaire d’un minimum social

Minimum social

Droits connexes liés au statut

RMI

Allocation logement à taux plein automatique, suspension des dettes fiscales, exonération automatique de taxe d’habitation, exonération de redevance audiovisuelle, exonération d’impôt sur le revenu, exonération de CSG-CRDS, exonération de cotisation couverture maladie universelle (CMU), accès automatique et gratuit à son complément (CMUc), tarification sociale téléphone, prime de Noël

AAH

Majoration pour vie autonome, exonération de redevance audiovisuelle, exonération d’impôt sur le revenu, exonération de CSG-CRDS, tarification sociale téléphone

ASS

Prime de Noël, exonération de CRDS, tarification sociale téléphone

API

Allocation logement à taux plein automatique, exonération d’impôt sur le revenu, exonération de CSG-CRDS, suspension des dettes fiscales

Allocation d’insertion

Prime de Noël, exonération d’impôt sur le revenu, exonération de CRDS

Minimum vieillesse

Exonération de redevance audiovisuelle, exonération d’impôt sur le revenu, exonération de CSG-CRDS

Minimum invalidité

Exonération de redevance audiovisuelle, exonération d’impôt sur le revenu, exonération de CSG-CRDS

AER

Prime de Noël, exonération de CRDS

Allocation veuvage

Exonération de CSG-CRDS, exonération d’impôt sur le revenu

Sources : Sénat, rapport d’information sur les minima sociaux n° 334, session ordinaire 2004-2005, et rapport sur la proposition de loi portant réforme des minima sociaux, n° 158, session ordinaire 2006-2007, par Mme Valérie Létard.

– La France compte un million de travailleurs pauvres, qui sont de plus en plus souvent des salariés, notamment des ouvriers, et de plus en plus souvent des travailleurs précaires.

Face à cette situation, il s’agit de repenser le rapport entre revenus du travail et revenus de la solidarité. Trop souvent on oppose la logique du travail et la logique de l’assistance. L’ouverture à une réforme profonde de l’équation sociale nécessite le dépassement de cette opposition. Pour reprendre les termes mêmes du rapport, « l’idée n’est pas que les prestations se substituent au travail ou compensent l’impossibilité de la société de donner un accès à un emploi dans des conditions compatibles avec les capacités et les contraintes de celles et ceux qui ont des enfants à élever. L’idée est que l’on puisse vivre, avec son travail et par son travail, quelle que soit sa situation familiale, en continuant à pouvoir, dans des conditions justes, bénéficier de la solidarité de la société ». Il s’agit d’un véritable renversement des perspectives.

Pour réaliser cette ambition, il s’agit de mettre en place un système unique et simple, donc lisible : il convient de « rendre les revenus plus prévisibles pour les familles, le système plus lisible pour les bénéficiaires, plus facile à gérer et à adapter aux besoins des personnes pour les organismes publics ». À la lumière des exemples étrangers, en particulier britannique, américain et canadien, il est donc proposé une refonte totale de notre système de minima sociaux et d’aide sociale, avec pour objectif d’assurer une égalité de revenu et de « niveau de vie » à situation « objectivement » égale des foyers, une réelle valorisation de tout revenu d’activité, de toute heure travaillée, et le caractère pérenne de cette incitation à l’activité, qui ne peut se limiter aux premiers mois d’une reprise d’activité – comme dans les systèmes en vigueur d’intéressement – et deviendrait un soutien au revenu des travailleurs modestes.

Le RSA tel que proposé dans le rapport est donc conçu selon quelques principes simples :

– tout revenu du travail doit conduire à une diminution des prestations égale à environ 50 % du gain ainsi apporté, qu’il s’agisse de quelques heures travaillées dans la semaine ou dans le mois ou d’une activité professionnelle à temps plein, sans effets de seuil et de manière pérenne ;

– la progression du revenu de solidarité active serait plus rapide pour les revenus les plus faibles ;

– le niveau de revenu garanti tient compte de la situation familiale.

Le RSA, s’ajoutant aux revenus du travail, a vocation à intégrer l’ensemble des minima sociaux, la prime pour l’emploi, voire les aides au logement (ce dernier point n’étant pas tranché) ; les prestations familiales resteraient en revanche en sus afin d’assurer la prise en compte de la situation familiale.

Le coût net ex ante d’une telle mesure est estimé par les auteurs du rapport comme pouvant aller de 6 à 8 milliards d’euros. Mais des exemples étrangers d’autofinancement de l’intéressement, comme l’exemple canadien du « projet d’autosuffisance » (voir l’encadré ci-après), montrent l’importance des effets retour à attendre.

Extrait du rapport de la commission « Familles, vulnérabilité, pauvreté » :

« Le self sufficiency project : quand l’intéressement s’autofinance…

« Au Canada, au sein du programme « Développement des ressources humaines » a été expérimenté en 1992 dans deux provinces (Nouveau Brunswick et Colombie britannique) un « projet d’autosuffisance » (PAS) ou self sufficiency program (SSP) à destination des familles monoparentales bénéficiaires de l’aide sociale depuis au moins un an.

« Les bénéficiaires du dispositif ont été sélectionnés au hasard. La proposition était la suivante :

« – Les chefs des familles concernés pouvaient adhérer à ce projet : ils prenaient alors l’engagement de trouver un emploi à temps plein dans un délai maximal d’un an. En contrepartie, sitôt l’emploi trouvé, un complément de salaire leur était versé durant trois ans sous réserve que, durant tout ce temps, ils continuent de travailler à temps plein (et, donc, ne perçoivent plus du tout d’aide sociale).

« – Un ensemble de services dénommé « PAS plus », destiné à les accompagner dans leur recherche d’emploi (aide à la préparation de CV, séances d’orientation, suivi par un tuteur, club de recherche d’emploi) leur était également proposé : il leur était alors promis un supplément de salaire plus élevé que celui prévu par le PAS en cas de reprise d’un emploi.

« Les bénéficiaires de l’expérience sont comparés à un groupe de contrôle non bénéficiaire.

« Les premiers résultats de cette expérience ont montré que les sommes versées au titre du supplément de revenu n’ont été que légèrement supérieures aux montants d’aide sociale (…). En quelque sorte, la mesure expérimentée était quasiment autofinancée.

« S’agissant de ses effets à long terme sur l’offre de travail, les évaluations récentes du SSP montrent que le caractère transitoire de l’incitation pose problème. Une étude (…) montre en effet qu’après avoir provoqué de nets écarts de taux de participation et de rémunération entre le groupe bénéficiaire et le groupe de contrôle, ces écarts s’étaient quasiment résorbés cinq ans après l’entrée des bénéficiaires dans l’aide. »

3. Le dispositif proposé

Le présent article 8 a tout d’abord pour objet d’introduire dans le droit positif la notion même de revenu de solidarité active.

L’alinéa 1 définit l’objectif du RSA, conformément aux principes énoncés dans le rapport précité : assurer une augmentation des ressources des personnes bénéficiaires de minima sociaux ayant une « activité », augmentation permettant d’atteindre un « revenu garanti » tenant compte des revenus d’activité professionnelle et des charges de famille.

La condition d’accès au RSA est large : il s’adresse à la personne « qui prend ou reprend un travail, exerce ou accroît son activité ». Le terme activité, dans la logique du dispositif – permettre à chacun de vivre par son travail –, renvoie à l’activité professionnelle, en incluant semble-t-il la participation à un stage de formation, explicitement mentionnée à l’article 10 infra dans la définition du RSA appliqué aux bénéficiaires de l’API. Surtout, la seule exigence d’exercice d’une activité – et non de (re)prise d’un emploi – permettra de couvrir également les travailleurs pauvres qui perçoivent un minimum social tout en conservant une activité professionnelle réduite ou peu rentable, alors que l’intéressement en vigueur est conditionné à une (re)prise d’emploi.

L’alinéa 2 prévoit une expérimentation du RSA pour les bénéficiaires de deux minima sociaux : le RMI et l’API.

Les bénéficiaires des autres minima sociaux tels que l’ASS ou l’allocation aux adultes handicapés (AAH) ne sont pas concernés. S’agissant de l’AAH, un traitement à part peut être justifié par l’existence pour cette allocation d’un régime spécifique d’intéressement à l’activité qui permet déjà une forme de cumul pérenne allocation/revenu d’activité et par le niveau plus élevé de l’allocation (par rapport aux autres minima sociaux). S’agissant de l’ASS, le régime d’intéressement applicable n’a été touché par la réforme opérée par la loi du 23 mars 2006 qu’en ce qui concerne les prises d’emploi excédant 78 heures mensuelles ; pour ce qui est des emplois à temps très partiel, dont l’amélioration de la situation est l’un des objectifs centraux de la présente mesure, subsiste pour l’ASS un régime antérieur nettement plus favorable que dans le cas du RMI et de l’API, puisque les revenus d’activité inférieurs à ½ SMIC mensuel peuvent être cumulés intégralement avec l’allocation pendant six mois, puis ne sont défalqués qu’à hauteur de 40 % pendant les six mois suivants.

De manière plus générale, on doit observer que la logique du RSA implique qu’il touche à terme l’ensemble des « travailleurs pauvres », bénéficiaires ou non de minima sociaux. Son équité et son acceptabilité sociale sont à ce prix, tant la question des revenus comparés des bénéficiaires de transferts sociaux et des travailleurs modestes est sensible. La limitation du dispositif à certaines catégories d’allocataires sociaux correspond donc à la logique de l’expérimentation, qui conduit à cibler des groupes limités et déjà connus.

Au regard de l’accès à l’activité des bénéficiaires de minima sociaux et du champ prévu de l’expérimentation (16 départements déjà candidats à l’expérimentation de la loi de finances pour 2007 auxquels s’ajouteront au maximum 10 nouveaux candidats en application de l’article 11 infra), environ 50 000 bénéficiaires du RMI et 5 000 de l’API pourraient être concernés selon le dossier de présentation du gouvernement ; le surcoût (amélioration des prestations et mesures d’accompagnement) par bénéficiaire serait de 1 000 à 1 200 euros selon la même source.

*

La commission a examiné un amendement du rapporteur pour avis de nouvelle rédaction de l’alinéa 1, visant à préciser que le RSA est établi afin de lutter contre la pauvreté au travail et à simplifier la formulation en disposant qu’il est destiné aux personnes qui exercent une activité professionnelle.

Le rapporteur pour avis a indiqué que cette rédaction est plus conforme à la philosophie sociale du projet de loi.

Mme Marisol Touraine a jugé que cet amendement est susceptible de faire croire que le public bénéficiaire du RSA comprend avant tout les travailleurs pauvres et non les personnes exerçant une activité et percevant des minima sociaux. La rédaction proposée peut remettre en question le champ d’application du projet de loi, ce qui serait très mal perçu par les personnes concernées et contredirait les objectifs qu’a exposés le Haut commissaire devant la commission.

Le rapporteur pour avis ayant observé que ce débat pourrait avoir lieu en séance si l’amendement était adopté, Mme Marisol Touraine a estimé préférable de s’en tenir à la rédaction du projet de loi.

M. Pierre Morange a observé que la rédaction du rapporteur pour avis met en lumière la philosophie du RSA sans pour autant en remettre en cause le périmètre.

Le président Pierre Méhaignerie a rappelé que ce projet de loi n’est que le premier étage d’une fusée qui, pour aller loin, devra déboucher sur une réforme d’ensemble des minima sociaux. Le but poursuivi est d’étudier et d’élaborer d’ici un an un continuum entre les différents minima que sont le RMI, le RSA, l’allocation de parent isolé, etc. et les revenus du travail jusqu’à 1,4 fois le SMIC environ. C’est dans cette perspective qu’il convient de se situer.

M. Georges Colombier a déclaré que cet amendement peut être adopté si le Haut commissaire y est favorable.

Mme Françoise Hostalier a fait part de son incompréhension devant l’exposé des motifs de l’amendement.

M. Etienne Pinte a jugé que faire référence à la pauvreté au travail laisse sous-entendre que la personne est au travail. Or le Haut commissaire a indiqué clairement qu’il faut concentrer l’attention sur ceux qui sortent du monde du travail.

Mme Marisol Touraine a souhaité revenir sur la discussion avec le Haut commissaire qu’elle a qualifié d’éclairante. En principe, les travailleurs pauvres ne sont pas concernés par le projet de loi. En revanche, les personnes directement concernées sont les titulaires du RMI et de l’allocation de parent isolé.

M. Christophe Sirugue a observé que l’article 8, dans la rédaction du projet, prévoit différents cas de figure d’accès au RSA – prise ou reprise d’un travail, exercice ou accroissement d’une activité – et estimé qu’il ne faut pas restreindre cette liste.

Le rapporteur pour avis a alors proposé qu’il soit fait référence dans la rédaction de l’amendement aux personnes qui « exercent », mais aussi « reprennent » une activité professionnelle.

M. Pierre Morange, constatant un accord sur le périmètre du dispositif, a souhaité que celui-ci soit associé avec la philosophie qu’il défend.

Estimant que le RSA tel qu’il est proposé ne correspond pas à la notion de « pauvreté au travail », Mme Françoise Hostalier a proposé de supprimer les mots « au travail » après le mot « pauvreté » et de faire référence aux personnes bénéficiant d’un minimum social qui « exercent » ou « prennent » une activité professionnelle.

Le président Pierre Méhaignerie a souligné qu’il ne faut pas donner l’espoir que le projet de loi s’attache à régler la question des travailleurs pauvres. Ce texte ne vise que les bénéficiaires de certains minima sociaux. Il a proposé à la commission soit de reprendre la rédaction du projet de loi, soit de rectifier l’amendement du rapporteur pour avis en supprimant les mots « au travail » et en faisant référence au fait de reprendre une activité.

À l’issue de ce débat, le rapporteur pour avis a retiré l’amendement.

La commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 8 sans modification, le groupe socialiste s’abstenant.

Article 9

Expérimentation du RSA pour les bénéficiaires du revenu minimum d’insertion

Le revenu minimum d’insertion (RMI) étant à la charge des départements depuis 2004, l’expérimentation du RSA pour les bénéficiaires de cette prestation est logiquement conçue, dans le présent article, comme un prolongement de celle instituée par la loi de finances pour 2007 et décrite supra (voir commentaire afférent à l’article 8). La nouvelle expérimentation doit donc être effectuée pour l’essentiel « dans les conditions » de la précédente (alinéa 1). En particulier, le renvoi à ces conditions semble impliquer que la durée de la nouvelle expérimentation ne puisse excéder celle inscrite dans la loi de finances précitée (trois ans à compter de la publication du décret fixant la liste des départements habilités à expérimenter) : à défaut, la prescription constitutionnelle (cf. articles 37-1 et 72 de la Constitution) d’une limitation temporelle des expérimentations ne serait pas respectée ; à ce titre et dans un souci de lisibilité de la loi, il serait opportun que cette durée de trois ans apparaisse explicitement dans le dispositif législatif.

Dans la même logique de continuité, l’article 11 du présent projet permet d’ailleurs aux départements qui se sont portés volontaires pour la première expérimentation d’adhérer au nouveau dispositif.

L’alinéa 2 du présent article fixe le champ de la nouvelle expérimentation en visant les dispositions législatives auxquelles il pourra être dérogé :

– l’article L. 262-11 du code de l’action sociale et des familles, lequel constitue la base légale du système en vigueur d’intéressement, et en particulier des primes forfaitaires instaurées par la loi du 23 mars 2006 ;

– l’article L. 262-12-1 du même code, lequel dispose que les titulaires d’un contrat d’avenir ou d’un CI-RMA conservent en sus du revenu d’activité afférent à ce contrat la fraction du RMI excédant l’allocation d’une personne isolée, dite « part familiale » (en d’autres termes, la part du RMI correspondant aux autres membres du foyer) ;

– l’article L. 322-12 du code du travail, base légale de la prime de retour à l’emploi.

Ces diverses dérogations rendront effectivement possible, comme l’annonce l’exposé des motifs du présent projet :

– d’ouvrir un intéressement supplémentaire aux titulaires d’un contrat d’avenir ou d’un CI-RMA, au-delà du cumul actuellement délimité par l’article L. 262-12-1 précité, qui prohibe de fait un cumul entre ces contrats et les primes de retour à l’emploi et forfaitaires mensuelles d’intéressement ;

– de compléter la réforme effectuée par la loi du 23 mars 2006, qui concerne essentiellement les travailleurs à mi-temps ou plus, en améliorant l’intéressement des travailleurs à temps très partiel (l’expérimentation engagée en application de la loi de finances pour 2007 ne permet pour l’heure que de jouer sur les paramètres de la prime de retour à l’emploi et des primes forfaitaires dédiées aux personnes reprenant un emploi avec un horaire d’au moins 78 heures) ;

– le cas échéant d’aller vers une fusion de l’allocation de RMI et des primes d’intéressement existantes.

Le champ des dérogations ouvertes apparaît comme suffisamment large pour aller vers des dispositifs d’intéressement pérennes et/ou accessibles non seulement aux bénéficiaires du RMI (re)prenant un emploi, mais aussi à ceux qui n’ont jamais cessé de travailler sans en tirer de revenus suffisants.

Il est précisé qu’il ne pourra toutefois être dérogé :

– aux quatrième, cinquième et septième alinéas de l’article L. 262-11 du code de l’action sociale et des familles précité, c’est-à-dire au principe selon lequel la prime forfaitaire mensuelle constitue une prestation légale d’aide sociale à la charge du département et à la règle de subsidiarité applicable quand une personne touche des fractions de plusieurs minima sociaux (règle qui protège les finances départementales : la prime forfaitaire n’est à sa charge qu’en cas de RMI « pur » ; si celui-ci est cumulé avec l’ASS, par exemple, c’est la prime forfaitaire « ASS », à la charge indirecte de l’État, qui sera versée) ;

– aux deuxième à cinquième alinéas de l’article L. 322-12 du code du travail précité, lesquels ont respectivement pour objet : de disposer que la prime de retour à l’emploi est à la charge du fonds de solidarité de l’assurance chômage pour les bénéficiaires de l’ASS et de l’État pour ceux du RMI et de l’API ; de préciser qu’elle est versée par l’organisme qui verse l’allocation principale (RMI, API ou ASS) qu’elle complète ; de fixer son régime de cessibilité et son régime contentieux ; de fixer les modalités de contrôle et d’échanges d’informations liées à sa gestion. S’il est légitime de ne pas permettre de dérogation aux règles protectrices relatives au contrôle ou au contentieux de la prime de retour à l’emploi, l’interdiction de déroger au principe de prise en charge de la prime par l’État peut apparaître en revanche quelque peu contradictoire avec l’objet même de l’expérimentation qui est de transférer éventuellement cette responsabilité aux départements (sous réserve d’un concours financier à négocier avec l’État par ailleurs, naturellement).

Il est prévu (à l’alinéa 5) une aide de l’État aux départements concernés. Sur ce point, on doit toutefois relever que le projet de loi est peu explicite sur le montant de l’aide afférente à la nouvelle expérimentation, dont il est seulement indiqué qu’elle couvrira une partie de son coût, et encore de manière facultative, puisque les conventions État/départements « pourront » en traiter. A contrario, comme on l’a dit, la loi de finances pour 2007 est très précise quant à la prise en charge de la première expérimentation qu’elle autorise.

D’après les déclarations de M. Martin Hirsch devant les commissions des affaires culturelles, familiales et sociales et des finances, de l’économie générale et du plan réunies (voir audition supra), la dotation annuelle envisagée sur le budget de l’État, soit 25 millions d’euros, permettrait une prise en charge de la moitié environ des surcoûts d’allocation pour les bénéficiaires du RMI (ainsi que de travaux d’évaluation, de mesures d’accompagnement et naturellement de l’intégralité de l’expérimentation pour les bénéficiaires de l’API, qui relève de la seule responsabilité de l’État). Le gouvernement doit préciser ses engagements sur cette question.

Le présent article définit enfin deux règles propres à la nouvelle expérimentation :

– les conseils généraux pourront réserver le bénéfice de ce régime a priori attrayant (par construction plus avantageux financièrement que le droit commun) aux personnes résidant ou ayant élu domicile sur leur territoire depuis une durée minimale qu’ils fixeront, sans excéder six mois (alinéa 3) ;

– le dispositif étant ciblé sur le retour à l’emploi, les engagements en la matière du bénéficiaire et de la collectivité devront être formalisés dans le contrat d’insertion que tout bénéficiaire du RMI doit signer (alinéa 4).

*

La commission a adopté un amendement de précision du rapporteur pour avis visant à faire apparaître explicitement la durée de l’expérimentation du RSA, soit trois ans.

La commission a ensuite examiné deux amendements en discussion commune :

– le premier de Mme Martine Carrillon-Couvreur prévoyant que la convention mentionnée au IX de l’article 142 de la loi de finances pour 2007 doit prévoir la prise en charge par l’État du coût global de l’expérimentation ;

– le second du rapporteur pour avis précisant que la convention détermine les conditions de prise en charge par l’État d’une partie du coût de l’expérimentation.

Mme Martine Carrillon-Couvreur a jugé primordial que la politique de lutte contre les exclusions relève de la solidarité nationale. C’est pourquoi la création du RSA à titre expérimental dans certains départements doit être prise en charge directement par l’État.

Le rapporteur pour avis a tout d’abord convenu de la nécessité de clarifier la rédaction de cet article : en effet, il ne doit pas apparaître comme facultatif que les conventions conclues avec les départements déterminent les conditions de prise en charge par l’État d’une partie du coût de l’expérimentation, dès lors que le gouvernement s’y est engagé. Il n’y a cependant aucune raison que l’État finance intégralement ce dispositif, dans la mesure où les départements pourraient en bénéficier dans le cadre d’un contrat « gagnant-gagnant » ; le Haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté, M. Martin Hirsch, s’est prononcé en faveur d’une prise en charge partielle de ce dispositif par l’État de l’ordre de 50 %.

Mme Marisol Touraine a jugé assez surprenant que les modalités de prise en charge financières de ce dispositif, qui s’inscrit pourtant dans le cadre d’une politique nationale, soient ainsi définies par voie conventionnelle, ce qui ne manquerait pas d’ouvrir la voie à de nombreux recours contentieux.

Le rapporteur pour avis a cependant rappelé que cette expérimentation se fonde sur les principes de volontariat et de contractualisation, donc de négociation avec les collectivités concernées.

Le président Pierre Méhaignerie a également mis en exergue l’intérêt que pourraient trouver les conseils généraux à participer à ce dispositif, dans la mesure où ils devraient pouvoir bénéficier d’une dotation globale qui pourrait être appelée à évoluer, alors que dans le même temps rien n’indique que le nombre de bénéficiaires du revenu minimum d’insertion (RMI) va diminuer, bien au contraire. À la lumière de l’expérience acquise à la suite de la mise en œuvre des lois de décentralisation, il n’y a en effet aucune raison de penser que les conseils généraux ne vont pas bénéficier de cette dynamique

Mme Danièle Hoffman-Rispal a cependant rappelé qu’alors même que la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales prévoit la compensation intégrale des transferts de charges aux collectivités locales, force est de constater que les conseils généraux ont aujourd’hui une créance sur l’État de plus d’un milliard d’euros au titre du RMI. L’expérimentation du RSA peut, certes, s’avérer intéressante à terme pour les conseils généraux. Il n’en demeure pas moins que les départements doivent aujourd’hui faire face à de nouvelles dépenses en augmentation et non compensées par l’État, du moins dans l’immédiat : il arrive donc logiquement un moment où les départements ne peuvent pas tout prendre en charge, a fortiori si ces charges ne sont pas compensées.

M. Christophe Sirugue a par ailleurs rappelé que l’expérimentation ne concerne qu’environ 55 000 personnes et qu’il est dès lors quelque peu excessif de faire des économies potentiellement générées pour les conseils généraux un argument décisif dans ce débat.

La commission a ensuite rejeté l’amendement de Mme Martine Carrillon-Couvreur, puis adopté celui du rapporteur pour avis.

La commission a examiné un amendement du rapporteur pour avis prévoyant que les documents d’évaluation qui seront produits en fin d’expérimentation comprendront une analyse des motifs pour lesquels les bénéficiaires du RMI éligibles à l’expérimentation n’ont pas accédé au RSA ou l’ont refusé, ainsi qu’une évaluation du nombre de personnes concernées.

Le rapporteur pour avis a jugé nécessaire que l’évaluation du dispositif ne porte pas seulement sur les personnes bénéficiant du RSA, mais sur l’ensemble des bénéficiaires du RMI dans les départements concernés, dont ceux qui n’accèderont pas au RSA, afin d’identifier les obstacles au retour à l’activité de ces personnes et améliorer ainsi l’information sur l’ensemble des bénéficiaires du RMI.

Le président Pierre Méhaignerie s’est toutefois interrogé sur l’efficacité du vecteur utilisé pour atteindre cet objectif, au regard du nombre déjà très élevé de rapports que le Parlement demande.

M. Roland Muzeau a déclaré partager ces interrogations concernant l’opportunité d’un tel rapport compte tenu du nombre de rapports jamais produits.

Le rapporteur pour avis a cependant précisé que l’amendement ne prévoit pas la transmission d’un nouveau rapport au Parlement, mais uniquement de compléter par un nouveau chapitre relatif aux bénéficiaires du RMI des rapports déjà prévus par la loi de finances pour 2007.

M. Marcel Rogemont a rappelé qu’une évaluation du nombre de bénéficiaires du RMI susceptibles d’accéder au RSA a déjà été établie par l’Agence nouvelle des solidarités actives. De surcroît, l’analyse des raisons pour lesquelles l’ensemble des bénéficiaires du RMI ne pourraient pas avoir accès au RSA ou l’ont refusé semble outrepasser, et de loin, le champ du présent projet de loi.

La commission a adopté l’amendement du rapporteur pour avis.

Elle a ensuite donné un avis favorable à l’adoption de l’article 9 ainsi modifié.

Article 10

Expérimentation du RSA pour les bénéficiaires
de l’allocation de parent isolé (API)

Le présent article traite de l’expérimentation qui sera menée parallèlement pour les bénéficiaires de l’allocation de parent isolé (API), allocation gérée par les caisses d’allocations familiales et financée par l’État.

Le parallélisme des démarches menées en matière de RMI et d’API est affirmé : l’expérimentation API aura lieu dans les départements ou parties de départements concernées par l’expérimentation RMI (alinéa 1). Sa durée sera également de trois ans à compter de la publication de la liste des départements habilités à l’expérimentation RMI (alinéa 8) et elle sera évaluée dans les mêmes conditions que l’expérimentation de l’article 142 de la loi de finances pour 2007 (alinéa 9), pour laquelle il est prévu :

– un rapport annuel dans chaque département concerné, puis un rapport de fin d’expérimentation ;

– la constitution d’un comité d’évaluation ;

– la présentation en fin d’expérimentation d’un rapport du gouvernement au Parlement.

Le RSA des bénéficiaires de l’API est également défini comme leur garantissant un revenu progressif selon leurs charges de famille et leurs revenus d’activité, mais introduit des éléments complémentaires à prendre en compte que ne mentionne pas la définition générale du revenu de solidarité donnée à l’article 8 du présent projet : les éventuels revenus afférents à un stage de formation, assimilés à un revenu d’activité ; la durée de reprise d’activité (alinéa 2 du présent article). Le montant du revenu garanti sera défini par décret (alinéa 10).

Cette définition du RSA des bénéficiaires de l’API exclut qu’il soit limité dans le temps et réservé aux personnes (re)prenant un emploi, comme le système actuel d’intéressement, même si la mention de la durée de reprise d’activité autorisera éventuellement une dégressivité. Il est souhaitable que le dispositif qui sera proposé permette un engagement long, sur plusieurs années, vis-à-vis des personnes concernées.

Concrètement, la mise en œuvre du RSA des bénéficiaires de l’API doit passer par le versement d’une allocation différentielle qui s’ajoutera à l’API et aux revenus propres des intéressés pour atteindre le revenu garanti défini supra (alinéa 2). Cette allocation supplémentaire, qui aura le même régime juridique – conditions de prescription, d’insaisissabilité, régime fiscal…– que l’API et sera également financée par l’État (alinéa 3), absorbera les divers mécanismes d’intéressement de droit commun tels que les primes forfaitaires mensuelles et de retour à l’emploi, ceux-ci n’étant plus applicables (alinéa 4).

Des garanties sont données aux bénéficiaires de l’expérimentation :

– d’une part, si le dispositif dérogatoire s’avérait moins favorable que le droit commun, la différence devrait leur être reversée (alinéa 5) ;

– d’autre part, le droit au RSA sera maintenu un an – dans la limite de durée de l’expérimentation – après que les bénéficiaires auront cessé d’avoir droit à l’API (alinéa 7). Cette dernière disposition est très significative compte tenu du fonctionnement de cette allocation, qui n’est versée aux personnes isolées ayant charge d’enfants et répondant à la condition de ressources posée que pour douze mois (API « courte ») ou tant qu’un des enfants à charge a moins de trois ans (API « longue ») : pour cette raison, le taux de sortie de l’API est nécessairement plus élevé que pour les autres minima sociaux, sans que cela signifie évidemment plus de sorties « vers le haut » (retour à meilleure fortune grâce au retour à l’emploi ou à la constitution d’un couple) ; un maintien temporaire du RSA représente donc une mesure importante de stabilisation des conditions sociales des personnes concernées.

Les conditions de la « sortie » de l’API

Au second trimestre 2006, 92 % des personnes en API « courte » au 31 décembre 2004 et 46 % de celles en API « longue » ne percevaient plus l’allocation, alors que ce taux de sortie n’est que de 30 % pour les bénéficiaires du RMI et 31 % pour ceux de l’ASS ; 46 % des sorties de l’API sont dues à l’expiration de la durée réglementaire de versement (DREES, Études et résultats, n° 567, avril 2007).

Ces personnes qui sortent de l’API basculent très souvent dans le RMI : au 31 décembre 2005, 37 % des personnes entrées en API « courte » en 2002 et 30 % de celles qui étaient en API « longue » en 2002 percevaient le RMI (DREES, Etudes et résultats, n° 536, novembre 2006).

Enfin, l’alinéa 6 renvoie à une disposition réglementaire le soin de préciser « les engagements réciproques au regard de l’emploi du bénéficiaire et de l’État ». En effet, à la différence des bénéficiaires du RMI, ceux de l’API ne sont pas tenus de signer un contrat d’insertion, lequel pourrait être étendu auxdits engagements. À cet égard, il convient de rappeler que l’absence de dispositif général – prévu par la loi – d’accompagnement et d’insertion des bénéficiaires de l’API peut être considérée comme particulièrement regrettable ; la question d’une expérimentation en la matière peut légitimement être posée.

Les termes du débat sur l’accompagnement et l’insertion des bénéficiaires de l’API

Si l’API a pu être conçue à sa création en 1976 comme une réponse d’assistance à la multiplication des familles monoparentales, il est aujourd’hui évident que les personnes concernées doivent se voir offrir toutes les opportunités de formation et d’emploi, sinon toujours immédiats, du moins à moyen terme.

Pourtant, aucun dispositif général d’insertion n’a été mis en place pour les bénéficiaires de l’API, même si, en pratique, les caisses d’allocations familiales (CAF), en tant que gestionnaires de l’allocation, conduisent des actions plus ou moins spécifiques d’accompagnement orientées vers ses bénéficiaires ou plus généralement les familles monoparentales : il ressort en effet de leur activité un effort particulier à l’égard de ces dernières, puisqu’en 2003, plus d’un tiers (37 %) des bénéficiaires réels des interventions de travail social (conseillers en économie sociale et familiale, assistants de service social et agents de développement) des caisses ont été des familles monoparentales, qui ne représentent pourtant que 17 % des familles ; dans un quart des caisses, l’ouverture des droits à l’API s’accompagne d’une « offre de service » aux bénéficiaires, qui recouvre diverses prestations ; enfin, la convention d’objectifs et de gestion conclue entre l’État et la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) pour 2005-2008 a inscrit en tant que priorité du champ de l’action sociale le « renforcement de l’accompagnement des familles vulnérables » (article 11-3), incluant notamment la mise en œuvre d’un socle minimal d’accompagnement social des bénéficiaires de l’allocation de parent isolé.

Par ailleurs, l’article L. 263-18 du code de l’action sociale et des familles prévoit déjà, mais sans application réelle, que « les personnes bénéficiant du droit à l’allocation de parent isolé (…) peuvent souscrire l’engagement de participer aux activités d’insertion sociale et professionnelle mentionnées à l’article L. 262-1 [mesures prévues pour les bénéficiaires du RMI] et tenant compte de leur situation particulière ».

Face à cette situation, MM. Michel Mercier et Henri de Raincourt, sénateurs, ont, dans leur rapport « Plus de droits et plus de devoirs pour les bénéficiaires des minima sociaux d’insertion » remis au Premier ministre en décembre 2005, proposé de fusionner l’API et le RMI en une « allocation unique d’insertion » et de donner au conseil général, gestionnaire du RMI, le rôle de « pilote » de l’insertion des bénéficiaires des minima sociaux.

Le rapport d’audit de modernisation rendu en décembre 2006 sur l’API par les inspections générales des finances et des affaires sociales (IGF-IGAS) observe cependant que les conseils généraux souhaitent que leur éventuelle intervention en faveur des bénéficiaires de l’API reste à leur initiative. Il relève également qu’une telle intervention répond au demeurant à un intérêt bien compris, compte tenu du basculement massif qui existe actuellement en sortie d’API vers le RMI, à la charge des départements. Cela dit, le coût d’un accompagnement d’insertion généralisé des bénéficiaires de l’API ne serait évidemment pas nul : le rapport sénatorial précité le chiffre à 133,3 millions d’euros au niveau national, tandis que le rapport d’audit, se fondant sur l’hypothèse d’un ciblage sur certaines catégories de bénéficiaires de l’API et sur les comportements d’évitement vraisemblables de la part d’allocataires, avance un coût de 39,5 millions d’euros.

Le rapport d’audit recommande donc une démarche fondée sur le volontariat des départements, assortie d’un partage des coûts, et, là où les conseils généraux ne voudraient pas s’engager, le conventionnement d’opérateurs d’insertion professionnelle par les CAF. Dans une lettre au Premier ministre en date du 3 mai 2007, les ministres alors en charge du dossier, MM. Jean-Louis Borloo et Philippe Bas, proposent d’expérimenter un pilotage de l’insertion des bénéficiaires de l’API par les départements volontaires, à défaut éventuellement par l’État.

*

La commission a examiné un amendement du rapporteur pour avis tendant à préciser les modalités de l’insertion des bénéficiaires de l’API dans le cadre de l’expérimentation du RSA.

Le rapporteur pour avis a précisé que l’amendement prévoit la conclusion d’un contrat d’insertion entre, d’une part, les bénéficiaires de l’API et, d’autre part, l’État ou, le cas échéant des départements qui seraient volontaires pour cela, dans le cadre de la disposition légale qui prévoit déjà une faculté d’intervention de ces départements vis-à-vis de ce public. Il s’agit d’un premier élément de la réforme des minima sociaux.

M. Christophe Sirugue a fait part de ses interrogations concernant les conditions de participation de l’État au financement de cette mesure. L’instruction d’un contrat d’insertion représente un coût et les départements ne doivent pas se le voir imposer sans concertation.

Le rapporteur pour avis a rappelé les positions exprimées sur ce sujet par les membres du groupe socialiste, selon lesquels il n’est pas possible de laisser le système actuel inchangé.

M. Christophe Sirugue a fait part de son désaccord sur ce dernier point, dans la mesure où ce constat ne s’appliquait pas à cette question particulière mais à celle de l’ensemble des minima sociaux.

Le rapporteur pour avis a objecté que les départements n’auront pas l’obligation, mais uniquement la possibilité, de participer ou non à ce dispositif, sur la base du volontariat.

M. Christophe Sirugue a cependant renouvelé ses inquiétudes concernant les charges supplémentaires ainsi confiées aux conseils généraux pour la gestion de ce dispositif.

Le président Pierre Méhaignerie a souligné qu’il s’agit d’une expérimentation avec des départements volontaires pour lesquels il y aura des retombées positives.

M. Yanick Paternotte a estimé que les contrats d’insertion pourraient également permettre aux collectivités locales qui souhaiteraient s’engager dans cette expérimentation d’en obtenir un retour, des économies ultérieures. Surtout, au-delà des seuls aspects financiers, il s’agit là d’un problème social majeur avec une ardente obligation de répondre et d’avancer.

De manière plus générale, le président Pierre Méhaignerie a également rappelé que toutes les études réalisées par la commission des finances, de l’économie générale et du plan de l’Assemblée nationale ont montré que l’État donne plus aux collectivités locales qu’il ne prélève sur elles ; c’est le législateur qui, en multipliant les dégrèvements compensés d’impôts locaux, conduit l’État à accroître ses transferts aux collectivités. Dès lors, il serait bon de ne pas mettre en cause systématiquement l’État dans ses relations financières avec les collectivités, en accréditant ainsi des thèses qui sont infondées.

La commission a adopté l’amendement du rapporteur pour avis.

Puis, la commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 10 ainsi modifié.

Article 11

Éligibilité à l’expérimentation

Le présent article fixe les conditions d’éligibilité des départements candidats à l’expérimentation du RSA.

Dans la logique de continuité avec l’expérimentation prévue par l’article 142 de la loi de finances pour 2007, il permet aux départements qui s’y sont portés volontaires (avant le 31 mars 2007 selon la règle édictée), de modifier leur dossier de candidature d’ici au 30 septembre 2007 (alinéa 1). Les départements qui n’ont pas adhéré à la première expérimentation pourront également adhérer au présent dispositif, mais dans la limite de dix candidatures (alinéa 2) ; si ce nombre était dépassé, seraient retenus les dix départements au potentiel fiscal le plus faible (alinéa 3).

*

Suivant l’avis du rapporteur pour avis, la commission a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 11 sans modification.

M. Pierre Morange a salué le travail remarquable réalisé par le rapporteur pour avis dans des délais particulièrement serrés.

La commission a ensuite donné un avis favorable à l’ensemble du projet de loi ainsi modifié.

*

En conséquence, et sous réserve des amendements qu’elle propose, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter le projet de loi (n° 4).

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Article 1er

Amendement présenté par M. Dominique Tian, rapporteur pour avis :

I. Compléter l’alinéa 3 de cet article par les mots :

« , ainsi que des heures effectuées en application du troisième alinéa de l’article L. 212-4-7 du code du travail ».

II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Amendement présenté par M. Dominique Tian, rapporteur pour avis :

I. Compléter l’alinéa 4 de cet article par les mots :

« ; elle s’applique de même, dans les entreprises de vingt salariés au plus, aux salaires versés en application des dispositions prévues au II de l’article 4 de la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005 portant réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise, permettant aux salariés de renoncer à une partie des journées ou demi-journées de repos accordées en application de l’article L. 212-9 du code du travail ou du III de l’article L. 212-15-3 du même code ou d’effectuer des heures au-delà de la durée prévue par la convention de forfait conclue en application du I ou du II de l’article L. 212-15-3 du même code ».

II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Amendement présenté par M. Dominique Tian, rapporteur pour avis :

I. Après l’alinéa 4 de cet article, insérer l’alinéa suivant :

« L’exonération mentionnée au premier alinéa est aussi applicable aux salariés soumis à une convention de forfait en heures sur une base mensuelle en application de l’article 2 de l’accord national interprofessionnel du 10 décembre 1977 sur la mensualisation, annexé à la loi n° 78-49 du 19 janvier 1978 relative à la mensualisation et à la procédure conventionnelle ».

II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Amendement présenté par M. Dominique Tian, rapporteur pour avis :

Substituer à l’alinéa 21 de cet article les deux alinéas suivants :

« - à la rémunération des heures complémentaires lorsque ces heures sont accomplies de manière régulière au sens du septième alinéa de l’article L. 212-4-3 du code du travail.

Lorsque les heures mentionnées précédemment ont été intégrées à la durée contractuelle dans les conditions et selon les modalités prévues au dernier alinéa de l'article précité du code du travail, elles bénéficient des dispositions des I et II, pour une durée limitée définie par décret ».

Amendement présenté par M. Dominique Tian, rapporteur pour avis :

Dans la première phrase de l’alinéa 33 de cet article,

après les mots :

« heure supplémentaire »,

insérer les mots :

« ou toute autre durée de travail, à l’exception des heures complémentaires de travail définies aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 212-4-3 et au premier alinéa de l’article L. 212-4-4 du code du travail, »

Amendement présenté par M. Dominique Tian, rapporteur pour avis :

I. Après l’alinéa 34 de cet article,

insérer l’alinéa suivant :

« III. Les déductions mentionnées au I et au II sont imputées sur les sommes dues par les employeurs pour chaque salarié concerné au titre de l’ensemble de sa rémunération aux organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 du code de la sécurité sociale et L. 725-3 du code rural ».

II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Amendement présenté par M. Dominique Tian, rapporteur pour avis :

I.Après l’alinéa 46 de cet article, insérer les trois paragraphes suivants :

« V bis – 1° L’article L. 131-4-1 du code de la sécurité sociale devient l’article L. 131-4-2 du même code ;

2° Dans le dernier alinéa du IV de l’article L. 131-4-2 du code de la sécurité sociale et dans la dernière phrase du III bis de l’article L. 241-10 du même code, après les mots : « montants forfaitaires de cotisations » sont insérés les mots : « , à l’exception de la déduction forfaitaire prévue à l’article L. 241-18 » ;

3° Dans le dernier alinéa de l’article L. 241-6-4 du code de la sécurité sociale, après les mots : « à l’exception » sont insérés les mots : « de la déduction forfaitaire prévue à l’article L. 241-18 et » ;

4° Dans le troisième alinéa de l’article L. 241-14 du code de la sécurité sociale, après le mot : « L. 241-13 » sont insérés les mots : « et de la déduction forfaitaire prévue à l’article L. 241-18 » ;

5° Dans le IV bis de l’article L. 752-3-1 du code de la sécurité sociale, après les mots : « sécurité sociale » sont insérés les mots : « , à l’exception de la déduction forfaitaire prévue à l’article L. 241-18 ».

« V ter – Dans le sixième alinéa de l’article L. 981-6 du code du travail, après les mots : « montants forfaitaires de cotisations » sont insérés les mots : « , à l’exception de la déduction forfaitaire prévue à l’article L. 241-18 du code de la sécurité sociale ».

« V quater – 1° Dans le deuxième alinéa du VI de l’article 12 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville et dans le VI de l’article 131 de la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004, après les mots : « montants forfaitaires de cotisations » sont insérés les mots : « , à l’exception de la déduction forfaitaire prévue à l’article L. 241-18 du code de la sécurité sociale » ;

2° Dans le neuvième alinéa du VII de l’article 130 de la loi n° 2006-1771 de finances rectificative pour 2006, après les mots : « montants de cotisations » sont insérés les mots : « , à l’exception de la déduction forfaitaire prévue à l’article L. 241-18 du code de la sécurité sociale ».

II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Amendement présenté par M. Dominique Tian, rapporteur pour avis :

I. Après l’alinéa 49 de cet article, insérer l’alinéa suivant :

« 2° bis Dans le troisième alinéa de l’article L. 741-5, après les mots : « de l’article L. 741-16 » sont insérés les mots : « et de la déduction forfaitaire prévue à l’article L. 241-18 du code de la sécurité sociale ».

II. Compléter cet article par le paragraphe suivant :

La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Article 9

Amendement présenté par M. Dominique Tian, rapporteur pour avis :

Rédiger ainsi la seconde phrase de l’alinéa 1 de cet article :

« Cette mise en œuvre est effectuée par les départements volontaires pour une durée de trois ans à compter de la publication du décret pris en application du II de l’article 142 de la loi n° 2006-1666 du 21 décembre 2006 de finances pour 2007 et dans les conditions définies par cet article, à l’exception de son III, sous les réserves suivantes : »

Amendement présenté par M. Dominique Tian, rapporteur pour avis :

Dans l’alinéa 5 de cet article, substituer aux mots :

« peut prévoir également »,

les mots :

« détermine les conditions de ».

Amendement présenté par M. Dominique Tian, rapporteur pour avis :

Compléter cet article par le paragraphe suivant :

« 5° Le rapport que doivent transmettre les départements participant à l’expérimentation avant l’expiration de la durée fixée pour celle-ci ainsi que le rapport du gouvernement au Parlement mentionnés au X de l’article 142 précité ont notamment pour objet d’analyser les motifs pour lesquels des bénéficiaires du revenu minimum d’insertion éligibles à l’expérimentation n’ont pas accédé au revenu de solidarité active ou l’ont refusé et d’évaluer le nombre de personnes concernées. »

Article 10

Amendement présenté par M. Dominique Tian, rapporteur pour avis :

« V.– Les engagements réciproques au regard de l’emploi du bénéficiaire et de l’État ou, le cas échéant, du département faisant application de l’article L. 263-18 du code de l’action sociale et des familles sont précisés dans un contrat d’insertion dont le contenu ainsi que les modalités d’accompagnement et de contrôle sont définis par le décret en Conseil d’État mentionné au IX. »

ANNEXES

ANNEXE 1

Définition et régime applicable aux heures supplémentaires et complémentaires

ARTICLES DU CODE

OBJET

OBSERVATIONS

Article L. 212-5 du code du travail : définition des heures supplémentaires et fixation de leur taux de majoration

Constituent des heures supplémentaires les heures effectuées au-delà de la durée légale hebdomadaire (article L. 212-5 du code du travail) ou de la durée considérée comme équivalente.

Les heures supplémentaires donnent lieu à majoration de salaire dont le taux est fixé prioritairement par accord collectif avec un plancher minimal de 10 %. À défaut d’accord, ce taux varie en fonction de la taille de l’entreprise concernée :

● pour les entreprises de plus de 20 salariés, les heures supplémentaires sont majorées de :

–  25 % pour les huit premières heures supplémentaires (soit de la 36ème à la 43ème heure incluse) ;

–  50 % pour les heures suivantes (soit à partir de la 44ème heure).

● pour les entreprises de 20 salariés au plus, la loi du 31 mars 2005 a prévu un taux dérogatoire de 10 % jusqu’au 31 décembre 2008 pour les 4 premières heures supplémentaires.

Les heures supplémentaires effectuées au-delà de 39 h sont majorées aux mêmes taux que pour les entreprises de plus de 20 salariés.

– Lorsque la durée conventionnelle du travail est inférieure à la durée légale, les heures effectuées au-delà de cette durée conventionnelle et jusqu’à hauteur de la durée légale ne constituent pas des heures supplémentaires (Cass. soc., 15 février 1995, Mahé et a. c/ Scop Roquebrune).

Article L. 212-6-1 du code du travail : les heures choisies

– Des heures supplémentaires peuvent être effectuées après une simple information de l’inspection du travail et, s’il existe, du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel dans la limite d’un contingent annuel d’heures supplémentaires. Ce contingent est fixé par un accord collectif de branche ou d’entreprise. À défaut, s’applique un contingent réglementaire de 220 heures.

– Un accord collectif peut prévoir la possibilité pour le salarié qui le souhaite, d’effectuer en accord avec son employeur, des heures dénommées « heures choisies », au-delà du contingent réglementaire ou conventionnel ou au-delà de la durée fixée à la convention de forfait (majoration au moins égale à celles des heures supplémentaires).

Lorsque l'entreprise applique un accord de modulation de forte amplitude, le contingent d’heures supplémentaires est réduit à 130 heures.

En revanche, si l’accord prévoit une faible variation de la durée hebdomadaire de travail (entre 31 heures et 39 heures ou un nombre d'heures au-delà de la durée légale hebdomadaire au plus égal à 70 heures par an), le contingent applicable est de 220 heures.

Article L. 212-7-1 du code du travail (5ème alinéa) : modalités particulières d’organisation du temps de travail par cycle

Dans les établissements organisant le temps de travail par cycle, seules sont considérées comme heures supplémentaires celles qui dépassent la durée moyenne de 35 heures calculée sur la durée du cycle de travail.

 

Article L. 212-8 du code du travail (4ème alinéa) : modalités particulières d’organisation du temps en modulation

Dans le cadre de la modulation, les heures effectuées entre 35 heures et la limite haute de modulation (plafond de la variation) ne sont pas considérées comme des heures supplémentaires. En revanche, sont considérées comme des heures supplémentaires les heures effectuées au-delà :

– de la limite haute hebdomadaire définie par l’accord collectif ;

– de 1607 heures par an (à l’exception des heures supplémentaires effectuées au-delà du plafond hebdomadaire et déjà payées en cours d’année) ou d’un plafond conventionnel inférieur.

 

Article L. 212-9 du code du travail (I et 1er alinéa du II) : réduction du temps de travail sous forme de jours de repos

En cas de réduction du temps de travail par l'attribution de jours de repos sur l'année (« JRTT »), constituent des heures supplémentaires, celles effectuées au-delà de 39 heures par semaine (ou d’un plafond inférieur fixé par l'accord) ainsi que les heures effectuées au-delà de 1 607 heures.

 

Article
L. 212-15-3 du code du travail (II) :
salariés au forfait en heures

Des conventions individuelles de forfait peuvent également être conclues avec des salariés sur une base hebdomadaire, mensuelle ou encore annuelle, permettant de prévoir une rémunération forfaitaire incluant un nombre prédéterminé d’heures supplémentaires.

Dans le cas d’un forfait hebdomadaire ou mensuel en heures, les heures supplémentaires accomplies à l’intérieur ou en dépassement du forfait doivent respecter le plafond réglementaire d’heures supplémentaires.

Dans le cas d’un forfait annuel en heures, les salariés concernés (cadres ou itinérants non cadres) sont exclus du champ d’application du contingent d’heures supplémentaires mais les heures effectuées en dépassement du forfait sont des heures supplémentaires qui doivent être comptabilisées par l’employeur et donner lieu à rémunération.

Le salaire forfaitaire doit être au moins égal à celui qu’aurait procuré la rémunération des heures normales de travail et des heures supplémentaires calculées selon le salaire minium auquel le salarié peut prétendre en vertu notamment des dispositions de la convention nationale de travail (Cass. soc. 25 juin 1997).

L’employeur doit décompter le temps de travail des salariés qui ont une convention de forfait (Cass. soc. 25 novembre 1998).

La convention de forfait doit mentionner le nombre d’heures supplémentaires incluses dans la rémunération forfaitaire (Cass. soc. 19 janvier 1999, Cass. soc. 5 juin 2002 Société Eche c/ Spiteri) ainsi que le salaire de base utilisé pour le calcul de cette rémunération (Cass. soc. 2 juin 1999, Société Agrigel Lorraine c/ Buguet).

Article L. 212-15-3 du code du travail (III) : forfait en jours sur l’année

Une convention de forfait en jours sur l’année permet de rémunérer un salarié (cadres ou non-cadres autonomes) sur la base d’un nombre de jours travaillés annuellement sans référence horaire.

La loi n°2005- 296 du 31 mars 2005 ouvre la faculté au salarié qui le souhaite, en accord avec le chef d’entreprise, de renoncer à une partie de ses jours de repos en contrepartie d’une majoration de son salaire.

Le nombre de jours travaillés ne peut dépasser le plafond de 218 jours par an.

La loi ne fixe pas de plafond au nombre de jours de repos auquel il est possible de renoncer.

Article L. 212-4-3 du code du travail : définition des heures complémentaires

Sont des heures complémentaires, les heures effectuées par un salarié à temps partiel au-delà de la durée du travail stipulée au contrat.

Elles sont plafonnées à 1/10è de la durée hebdomadaire ou mensuelle fixée au contrat de travail. Dans cette limite, les heures complémentaires effectuées ne donnent pas lieu à majoration.

La limite de 1/10è peut être portée jusqu’au tiers de l’horaire contractuel par un accord collectif. Au-delà du 1/10è de la durée mensuelle ou hebdomadaire fixée au contrat, les heures effectuées donnent lieu à majoration de 25 %.

 

Article L. 772-1 du code du travail : salariés du particulier employeur

Les dispositions du code du travail relatives à la durée du travail ne s’appliquent pas aux employés de maison qui travaillent au domicile privé de leur employeur (Cass. soc. 17.10.2000). Ils sont seulement soumis à la convention collective nationale « salariés du particulier employeur » en application de laquelle la durée du travail effectif est de 40 heures par semaine.

Les heures supplémentaires sont donc celles travaillées à partir de la 41è heure. Les 8 premières heures (de la 41è à la 48è) sont majorées de 25 %, celles effectuées au-delà de 50 %.

De plus, pour les postes d’emploi à caractère familial (garde d’enfants, garde-malades…), il existe un dispositif particulier de décompte du temps de travail : les heures de présence responsable. Elles se définissent comme celles où le salarié peut utiliser son temps pour lui-même tout en restant vigilant pour intervenir s’il y a lieu. Une heure de présence responsable équivaut au 2/3 d’une heure de travail effectif.

Le secteur recourt massivement au temps partiel (parfois très réduit) avec souvent de multiples employeurs. Le décompte des heures se fait par contrat de travail, donc par employeur

Articles L. 773-1 et suivants du code du travail : assistants maternels

Les dispositions du code du travail relatives à la durée du travail ne s’appliquent pas aux assistants maternels qui accueillent des mineurs ou des majeurs de moins de 21 ans à leur domicile. Ils perçoivent une rémunération déterminée par enfant présent et par heure (article L. 773-8 du code du travail).

Les heures travaillées au-delà de 45 heures hebdomadaires (qui ne sont pas expressément qualifiées d’heures supplémentaires par le code du travail) donnent lieu à une majoration de rémunération dont le taux est fixé par accord entre l’assistant maternel et l’employeur (article D. 773-8 du code du travail). Les assistants maternels n’effectuent pas d’heures complémentaires au sens du code du travail.

Pour autant, il est fait référence dans la convention collective nationale des assistants maternels (article 6) à des heures « complémentaires » effectuées par les assistants maternels en temps incomplet sur l’année. Ces heures qui ne sont pas majorées correspondent aux heures effectuées par ces assistants maternels, au-delà de la durée du travail prévue par le contrat de travail et dans la limite de 45 heures hebdomadaires.

Les dispositions du code du travail relatives à la durée du travail ne s’appliquent pas non plus aux assistants familiaux (assistants maternels à titre permanents). Leur rémunération est fonction de la durée d’accueil de l’enfant (par jour ou par mois) et du nombre d’enfant accueillis. Ils n’effectuent ni heures supplémentaires, ni heures complémentaires.

Sont soumis aux dispositions du code du travail relatives à la durée du travail les salariés des établissements industriels et commerciaux, des professions libérales, des sociétés civils et les syndicats professionnels (article L. 200-1 du code du travail).

Source : Direction générale du travail du ministère du travail, des relations sociales et de la solidarité

ANNEXE 2

Salariés du livre VII du code du travail et heures supplémentaires

Salariés

Régime de droit commun du code du travail : articles L. 212-5 et suivants

Convention collective

Statut législatif et réglementaire spécifique (code du travail)

Autre code

Mines et carrières (articles L. 711-1 et suivants du code du travail)

   

Article L. 711-1 et L.711-2 du code du travail : la durée de présence (qui correspond au temps de travail effectif) ne peut excéder 38 h 40

Articles 208 à 211 du code minier : mêmes dispositions

Industries électriques et gazières (articles L. 713-1 et suivants du code du travail)

Oui.

Accord national

   

Travailleurs à domicile (articles L. 721-1 et suivants du code du travail)

   

L. 721-16 du code du travail : pour toute activité prolongée au-delà de 8 heures par jour ouvrable compte tenu des délais imposés par le donneur d’ouvrage, majoration de 25 % minimum pour les 2 premières heures, 50 % pour les suivantes.

 

Bâtiment et travaux publics (articles L. 731-1 et suivants du code du travail)

Oui.

Convention collective nationale et infranationales Bâtiment et Travaux publics (ouvriers, ETAM, cadres)

   

Transports et télécommunications autres que marine marchande et pêche

Oui.

Convention collective nationale transport aérien et convention collective nationale transport routier

   

Marins (articles L. 742-1 et suivants du code du travail)

     

Articles 24 à 30 du code du travail maritime : durées légales hebdomadaire et quotidienne de l’article L. 212-1 du code du travail.

Pour la pêche maritime, la durée du travail peut-être fixée par accord collectif étendu. Durée du travail calculée sur une base annuelle dans la limite de 225 jours par an, y compris les heures effectuées à terre.

Voyageurs, représentants, placiers (VRP) (article L. 751-1 du code du travail)

 

Convention collective interprofessionnelle : durée du travail non-contrôlable, pas d’heures supplémentaires

   

Journalistes (articles L. 761-1 et suivants du code du travail)

Oui.

Convention collective nationale

   

Artistes (article L. 762-1 du code du travail)

Oui.

6 conventions collectives nationales du secteur du spectacle

   

Mannequins (article L. 763-1 du code du travail)

Oui.

Convention collective nationale

   

Concierges et employés d’immeuble (article L. 771-1 du code du travail)

 

Convention collective nationale : heures supplémentaires au-delà 169 heures par semaine ou au-delà de 1 000 unités de valeur par mois.

   

Employés de maison (article L. 772-1 du code du travail)

Les dispositions du code du travail relatives à la durée du travail ne s’appliquent pas aux employés de maison qui travaillent au domicile privé de leur employeur (Cass. soc. 17.10.2000).

CCN « salariés du particulier employeur » : la durée du travail effectif est de 40 heures par semaine.

Les heures supplémentaires sont donc celles travaillées à partir de la 41è heure. Les 8 premières heures (de la 41è à la 48è) sont majorées de 25 %, celles effectuées au-delà de 50 %.

   

Assistants maternels et assistants familiaux (article L. 773-1 du code du travail)

Les dispositions du code du travail relatives à la durée du travail ne s’appliquent ni aux assistants maternels qui accueillent des mineurs ou des majeurs de moins de 21 ans à leur domicile, ni aux assistants familiaux (assistants maternels à titre permanents).

 

Article D. 773-8 du code du travail pour les assistants maternels : les heures travaillées au-delà de 45 heures hebdomadaires donnent lieu à une majoration de rémunération dont le taux est fixé par accord entre l’assistant maternel et l’employeur. Les assistants maternels n’effectuent pas d’heures complémentaires.

Les assistants familiaux : leur rémunération est fonction de la durée d’accueil de l’enfant (par jour ou par mois) et du nombre d’enfant accueillis. Ils n’effectuent ni heures supplémentaires, ni heures complémentaires.

 

Éducateurs et aides familiaux (article L. 774-1 du code du travail)

   

Pas de référence à des heures supplémentaires, salariés forfait jours sur l’année, pas de rachat de jours de repos possible.

 

Gérants salariés (article L. 781-1 du code du travail)

Oui.

     

Gérants non-salariés des maisons de succursales de détail (article L. 782-1 du code du travail)

Oui.

     

Enseignants non-permanents des établissements d’enseignement supérieur (article L. 786 du code du travail)

Oui.

     

NB : Les entreprises publiques qui répondent à la définition de l’article L. 200-1 du code du travail (établissements industriels et commerciaux) appliquent les dispositions de droit commun du code du travail. Les autres disposent de statuts particuliers (hors code du travail ou code rural) bénéficiant éventuellement de dispositions spécifiques relatives à la durée du travail.

Source : Direction générale du travail du ministère du travail, des relations sociales et de la solidarité

ANNEXE 3

Simulations relatives aux gains pour le salarié et pour l’employeur des mesures relatives aux heures supplémentaires

– Cas n° 1 : entreprise de moins de 20 salariés

• Sous-cas n° 1 : 188 heures supplémentaires annuelles sur 47 semaines

Gain mensuel en euros

• Sous-cas n°2 : 55 heures supplémentaires annuelles sur 47 semaines

Gain mensuel en euros

– Cas n° 2 : entreprise de plus de 20 salariés

• Sous-cas n° 1 : 188 heures supplémentaires annuelles sur 47 semaines

Gain mensuel en euros

• Sous-cas n°2 : 55 heures supplémentaires annuelles sur 47 semaines

Gain mensuel en euros

Source : Direction de la sécurité sociale du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique

© Assemblée nationale

1 () Concernant la question de la définition des salariés auxquels sont applicables les dispositions du code du travail, il importe de noter qu’elle sera simplifiée avec l’entrée en vigueur du nouveau code du travail (entrée en vigueur prévue au moment de l’entrée en vigueur de la partie réglementaire du code du travail et, au plus tard, le 1er mars 2008). Le nouveau code du travail définit en effet en tête de chaque partie le champ des salariés auquel il est applicable. Concernant la troisième partie consacrée notamment à la durée du travail, l’article L. 3111-1 dispose ainsi qu’il est applicable aux employeurs de droit privé ainsi qu’à leurs salariés, et aux établissements publics à caractère industriel et commercial. La question de la transition entre le code du travail dans sa version actuelle et le nouveau code du travail a été, à fort bon escient, prise en considération par les rédacteurs du projet de loi qui ont, par exemple, anticipé sur le transfert des dispositions relatives aux assistants maternels du code du travail vers le code de l’action sociale et des familles en visant dès le présent texte les deux codes.

2 () À noter (voir infra) que les entreprises de un à vingt salariés bénéficient d’un taux de majoration dérogatoire jusqu’au 31 décembre 2008 pour les quatre premières heures supplémentaires (entre trente-cinq et trente-neuf heures) : ce taux est de 10 %. Le présent projet de loi supprime toutefois cette disposition dérogatoire.

3 () Au-delà du contingent, les heures supplémentaires doivent être autorisées par l’inspection du travail ; en outre, le régime du repos compensateur dit obligatoire diffère selon que l’on se trouve en deçà ou au-delà du contingent d’heures supplémentaires.

4 () Par ailleurs, les heures supplémentaires sont comptabilisées et imputées sur le contingent d’heures supplémentaires, avec des conséquences en termes de régime d’autorisation et de prise de repos compensateur.

5 () Elle a toutefois aussi souligné qu’en l’absence d’accord de branche étendu permettant de porter la limite dans laquelle peuvent être effectuées des heures complémentaires au-delà du dixième de la durée contractuelle, un salarié à temps partiel qui effectue des heures au-delà de la limite légale, s’il ne peut prétendre au paiement majoré tel qu’il existe en matière d’heures supplémentaires, est fondé à réclamer le paiement de ces heures au taux prévu par son contrat de travail, mais aussi des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu’il a subi du fait de ce dépassement (par exemple, Cass. soc. 16 novembre 2005, Société ISS Abilis France c. Barabarot).

6 () Ce résultat concerne les situations jusqu’à 1,27 Smic. Au-delà, un léger surcoût apparaît dans les entreprises qui portent la majoration des heures supplémentaires de 10 à 25 %, surcoût qui croît après 1,6 Smic.

7 () À noter que pour les petites entreprises de moins de vingt salariés, ce coefficient est de 0,28 à compter du 1er juillet 2007 : l’enjeu est donc d’autant plus important pour elles.

8 () De plus, cet allègement contribue à la simplification. Il ne reprend pas, en particulier, les différentes majorations applicables à lallègement prévu par la loi Aubry II. Il se substitue à ce dernier allègement, ainsi qu'à la ristourne dégressive sur les bas salaires, dite ristourne Juppé. S'agissant des formalités administratives de mise en œuvre, celles-ci sont encore assouplies : il suffit à l'employeur de tenir à la disposition des organismes de recouvrement de sécurité sociale les documents requis. Par ailleurs, cet allègement poursuit un but macroéconomique spécifique : concentrer ses effets sur les bas et les moyens salaires, qui correspondent aux parties du marché du travail les plus sensibles à l'évolution du coût du travail. En portant de 1,3 à 1,7 (puis 1,6) SMIC le niveau des salaires auquel il s'applique, il permet d'éviter l'effet de « trappe à bas salaires » qui était reproché à la ristourne Juppé ; quant à la part structurelle de l'allègement prévu par la loi Aubry II, au-delà des salaires correspondant à 1,8 SMIC, celle-ci ne visait qu'une partie du marché du travail où l'emploi était assez peu élastique à l'évolution des salaires, et il nétait donc pas dommageable qu'elle soit supprimée.

9 () Voir, pour une présentation plus détaillée de l’historique de ces mesures, le rapport (n° 2040) fait par M. Pierre Morange au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales sur la proposition de loi de MM. Patrick Ollier, Hervé Novelli, Pierre Morange et Jean-Michel Dubernard portant réforme de l’organisation du temps de travail dans l’entreprise (janvier 2005).

10 () Elles ne sont pas la contrepartie de cotisations mais sont financées par la solidarité nationale.

11 () Loi n° 2001-458 du 30 mai 2001.

12 () Montant désormais minoré de 12 %, en application du décret n° 2007-208 du 19 février 2007, lorsqu’il est à la charge des départements – c'est-à-dire pour les bénéficiaires du RMI –, cette minoration étant financée par l’État.

13 () Il est à noter que cette prime avait été préfigurée par la « prime exceptionnelle de retour à l’emploi » établie par le décret n° 2005-1054 du 29 août 2005, mesure transitoire de même montant et destinée sensiblement aux mêmes publics.

14 () Décret n° 2007-691 du 4 mai 2007.

15 () Sénat, session ordinaire 2006-2007, n° 51.

16 () Voir à cet égard « Transferts sociaux locaux et retour à l’emploi », par Denis Anne et Yannick L’Horty, dans Économie et statistique n° 357-358, 2002.