Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF
Retour vers le dossier législatif


N
° 788

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 avril 2008.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI n° 574, autorisant l’approbation de l’accord relatif aux services de transport aérien entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Madagascar,

PAR M. Jean-Paul DUPRÉ,

Député.

____

INTRODUCTION 5

I – UN NOUVEL ACCORD NÉCESSAIRE AU RESPECT DU DROIT COMMUNAUTAIRE ET AU DÉVELOPPEMENT DU TOURISME À MADAGASCAR 7

A – L’ACCORD DU 1ER DÉCEMBRE 1962 N’EST PLUS CONFORME AU DROIT COMMUNAUTAIRE 7

B – LE DÉVELOPPEMENT DU TOURISME À MADAGASCAR PERMETTRAIT D’AMÉLIORER SA SITUATION ÉCONOMIQUE 9

II – UN CADRE MODERNISÉ POUR L’EXPLOITATION DES SERVICES AÉRIENS ENTRE LA FRANCE ET MADAGASCAR 11

A – LES CRITÈRES DE DÉSIGNATION DES TRANSPORTEURS AÉRIENS ET LES DROITS QUI LEUR SONT ACCORDÉS 11

B – LES CONDITIONS D’EXPLOITATION DES TRANSPORTEURS AÉRIENS DÉSIGNÉS 13

1) Les principes 13

2) Les conditions financières 13

3) Les autres conditions commerciales 14

C – LA PRISE EN COMPTE DES NOUVELLES RÉGLEMENTATIONS INTERNATIONALES EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ ET DE SÛRETÉ 15

1) En matière de sécurité 15

2) En matière de sûreté 16

CONCLUSION 17

EXAMEN EN COMMISSION 19

Mesdames, Messieurs,

Le formidable développement du trafic aérien international a été permis, depuis les lendemains de la deuxième guerre mondiale, par la conclusion de milliers d’accords bilatéraux entre pays du monde, par lesquels la desserte d’un pays par les compagnies aériennes de l’autre était autorisée, sous réserve du respect de certaines règles, sur la base du principe de réciprocité.

Depuis plusieurs arrêts rendus par la Cour de justice des Communautés européennes le 5 novembre 2002, la logique de ces accords est remise en question pour les membres de l’Union européenne, les « clauses de nationalité » étant jugées contraires au droit communautaire.

C’est à la suite de ces arrêts qu’a, notamment, été entreprise la négociation de l’accord franco-malgache signé le 21 juillet 2005, dont le présent projet de loi vise à autoriser l’approbation. Conforme au droit communautaire et tenant compte des nouveaux standards internationaux en matière de sûreté et de sécurité, il remplacera l’accord de 1962 actuellement en vigueur.

Votre Rapporteur présentera les conséquences de la jurisprudence communautaire sur les accords bilatéraux relatifs aux services de transport aérien et l’importance du développement du tourisme pour Madagascar, avant de détailler les stipulations de l’accord.

I – UN NOUVEL ACCORD NÉCESSAIRE AU RESPECT DU DROIT COMMUNAUTAIRE ET AU DÉVELOPPEMENT DU TOURISME À MADAGASCAR

A – L’accord du 1er décembre 1962 n’est plus conforme au droit communautaire

Les services aériens sont traditionnellement régis par des accords bilatéraux passés entre Etats. Ceux-ci servent de cadre de négociation à des droits de trafic destinés aux compagnies nationales des Etats concernés et excluent de l’exploitation de ces droits de trafic les compagnies relevant d’autres Etats par des « clauses de désignation » reposant sur une condition de nationalité. La France est partie à une centaine d’accords de ce type, le premier d’entre eux ayant été signé avec le Royaume-Uni en février 1946.

Les arrêts du 5 novembre 2002 de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE), dits « Ciel ouvert », ont remis en cause cette pratique pour les Etats membres et ont conduit à la mise en place d’une politique extérieure de l’aviation de l’Union européenne. Ils ont en effet affirmé le caractère communautaire de certaines compétences en matière de services aériens internationaux. Trois domaines sont identifiés comme relevant de la compétence communautaire exclusive : les systèmes informatisés de réservation, les tarifs intracommunautaires et les créneaux horaires. Dans ces domaines, seule l’Union européenne peut mener des négociations avec des Etats tiers. En outre, la clause de nationalité présente dans les accords considérés ne respecte pas le droit d’établissement garanti par l’article 43 du traité sur l’Union européenne, puisqu’ils sont discriminatoires en fonction de la nationalité de la compagnie aérienne.

Si les arrêts de la CJCE portaient sur des accords bilatéraux passés entre les Etats-Unis et huit Etats membres, ils ont considérablement fragilisé les quelque 2 000 accords bilatéraux conclus entre un Etat membre et un Etat tiers dans ce domaine, qui comportent une clause de nationalité et contiennent des engagements internationaux que seule l’Union a la compétence de contracter. Il est apparu urgent de résoudre ces problèmes afin de mettre fin à une insécurité juridique pesant sur les accords bilatéraux, qui peuvent être dénoncés à tout moment, et à ses éventuelles conséquences sur l’activité des compagnies aériennes, qui pourraient subir des ruptures de desserte aérienne par exemple.

Pour se faire, trois mesures ont été prises :

– mandat a été conféré à la Commission européenne pour négocier un accord entre l’Union européenne et les Etats-Unis, visant à établir un espace aérien sans frontières : cette négociation a conduit à la signature, le 30 avril 2007, de l’accord de transport aérien entre la Communauté européenne et ses États membres, d’une part, et les États-Unis d’Amérique, d’autre part, dont notre Assemblée a autorisé l’approbation le 7 février 2008 ; la Commission a, depuis juin 2003, reçu mandat pour négocier des accords aériens du même type avec le Maroc, les pays des Balkans (1), l’Ukraine, la Jordanie, Israël et le Canada ;

– la Commission a aussi reçu mandat de négocier des « accords horizontaux » destinés à éliminer les problèmes juridiques des accords bilatéraux existants : les articles posant des restrictions liées à la nationalité dans la désignation ou la révocation des opérateurs bénéficiant des accords sont remplacés par une clause de désignation communautaire qui étend les droits ouverts à tous les transporteurs communautaires, et les dispositions touchant à la sûreté, à la sécurité, aux tarifs aériens, aux droits de douane et aux mesures fiscales sont mises en conformité avec le droit communautaire ; la négociation des droits de trafic reste en revanche de la compétence des Etats membres ; trente « accords horizontaux » ont, à ce jour, été signés ou paraphés par la Commission ;

– a été adopté, le 29 avril 2004, un règlement concernant la négociation et la mise en œuvre d’accords relatifs à des services aériens entre les Etats membres et les Etats tiers (n° 847/2004), entré en vigueur le 30 mai 2004.

Ce règlement autorise les Etats membres à négocier des accords avec les pays tiers dans un cadre de coopération entre l’Union et les Etats membres, qu’il fixe, afin d’assurer le respect des compétences de chacun. Il permet ainsi aux Etats membres de mettre leurs accords en conformité avec le droit communautaire, grâce à l’introduction de clauses types qui reflètent la compétence communautaire. L’objectif de ce règlement est d’assurer que les négociations bilatérales soient correctement coordonnées et que toutes les discriminations à cause de la nationalité soient supprimées. La clause de nationalité doit être remplacée par une condition d’établissement : tout Etat membre pourra alors désigner comme bénéficiaire des stipulations de l’accord bilatéral auquel il est partie un transporteur sous licence de l’Union européenne (2) ayant un établissement sur son territoire.

C’est l’article 13 de l’accord franco-malgache du 1er décembre 1962 qui pose la clause de nationalité dans les termes suivants : « Ne peuvent en principe être désignées par chacune des parties contractantes pour l’exploitation de services agréés que des entreprises dont une part prépondérante de la propriété appartient à la partie contractante qui l’a désignée ou à des nationaux de cette dernière », une dérogation étant accordée à la société MADAIR, qui peut être désignée par Madagascar bien qu’elle ne remplisse pas la condition de nationalité.

L’accord franco-malgache du 21 juillet 2005 est le premier accord relatif aux services de transport aérien signé par la France avec un pays tiers conformément au règlement du 29 avril 2004. Tous les accords négociés après l’entrée en vigueur de ce règlement sont conformes à ses stipulations ; les accords antérieurs sont renégociés au fur et à mesure des opportunités afin d’y intégrer les clauses exigées par le droit communautaire. Depuis la signature de l’accord franco-malgache, quatre autres accords du même type ont été conclus par notre pays, avec l’Algérie en février 2006, avec Macao en mai 2006, avec la Mongolie en février 2007 et avec le Liban en février 2008. Un nouvel accord avec le Brésil, conforme au droit communautaire, a été paraphé en mars 2008. Par ailleurs, à l’occasion de négociations conduites pour répondre aux besoins commerciaux de nos transporteurs, la direction générale de l’aviation civile a aussi amendé une douzaine d’accords bilatéraux, afin de les rendre conformes au droit communautaire.

Contrairement aux accords conclus auparavant dans le même domaine, l’approbation de l’accord franco-malgache, comme celle des autres accords précités, doit être autorisée par le Parlement dans la mesure où son article 10 contient des stipulations fiscales, qui relèvent donc du domaine législatif. Les autorités malgaches ont d’ores et déjà fait parvenir aux autorités françaises leur instrument de ratification de cet accord.

B – Le développement du tourisme à Madagascar permettrait d’améliorer sa situation économique

La rapidité avec laquelle les autorités malgaches ont achevé leur procédure interne d’approbation de cet accord témoigne de l’importance que revêt pour elle le développement du trafic aérien entre leur pays et la France, principalement afin de développer le tourisme, qui joue un rôle considérable dans leur économie.

Ile de 592 000 kilomètres carrés, Madagascar compte 19 millions d’habitants. La République malgache n’occupe, en 2006, que la 146ème place sur 175 Etats en terme d’indice de développement humain, le PIB par habitant y atteignant seulement 305 dollars américains, soit environ dix fois mois que le PIB par habitant en France. Forte à la fin des années 1990, la croissance a été stoppée par la crise politique de 2002, qui a paralysé toute l’activité économique et provoqué une importante récession. Elle a repris depuis, à un taux de 4,6 % en 2005 et de 4,8 % en 2006, et devrait dépasser 5 % pour 2007.

Le secteur primaire, dominé par l’agriculture, qui occupe 70 % de la population active de Madagascar et assure 20 % des exportations, représente 28 % du PIB. Le secteur secondaire représente 16 % du PIB et 50 % des exportations. La croissance du secteur industriel, concentré autour de l’industrie agroalimentaire, les bois et dérivés, le textile/habillement et l’industrie métallique, s’est accélérée au cours des années 1999/2001 (5 % par an en moyenne), mais c’est surtout le tourisme qui constitue le secteur d’avenir.

Le secteur tertiaire (56 % du PIB) repose sur les transports, le commerce, la santé, les communications et le tourisme, ce dernier étant l’un des secteurs les plus dynamiques de l’économie malgache. Il est le second pourvoyeur de devises du pays après la pêche. On comptait environ 20 000 emplois directs dans le tourisme en 2004, année pendant laquelle on avait enregistré 180.000 visiteurs, soit 70 % de plus qu’en 2003. Ils étaient un peu plus de 300 000 touristes en 2007. Le gouvernement espère sur 500 000 touristes par an d’ici 2012.

La région Afrique Australe/Océan Indien constitue en effet une zone d’attrait privilégié pour le tourisme d’origine européenne, Madagascar ayant vocation à en devenir un grand acteur entre l’Afrique du Sud et l’Ile Maurice. La mise en service réussie à Nosy Be, au Nord du pays, d’un hôtel de 205 chambres et d’une liaison charter hebdomadaire avec Milan, la construction dans la capitale d’un nouvel hôtel de standing international, achevée en 2006, d’autres projets du même type, la multiplication de constructions d’unités de taille moyenne par des investisseurs étrangers, la renégociation des accords aériens dans un sens plus favorable à l’augmentation du trafic, sont des éléments confortant les perspectives de contribution importante du tourisme au développement du pays.

En effet, si le pays souffre encore de problèmes structurels – réseau routier en mauvais état, coût élevé des communications, faible capacité des hôtels – qui freinent son développement touristique, il possède des atouts précieux, au premier rang desquels un littoral de près de 5 000 kilomètres de long, une extraordinaire biodiversité, des beautés naturelles et des ressources culturelles remarquables.

L’évolution du nombre de passagers sur les vols entre Madagascar et la métropole française reflète ce développement touristique. Après avoir régulièrement progressé au cours des années 1990, passant de 47 000 personnes en 1991 à 187 500 en 2001, ce nombre a chuté brutalement en 2002 (moins de 70 500), avant de se redresser très rapidement depuis : dès 2003, il atteignait presque 170 000, dépassait largement le 200 000 en 2004 et frisait les 260 000 en 2007.

II – UN CADRE MODERNISÉ POUR L’EXPLOITATION DES SERVICES AÉRIENS ENTRE LA FRANCE ET MADAGASCAR

Selon les stipulations de l’article 24 de l’accord du 21 juillet 2005, celui-ci remplacera l’accord du 1er décembre 1962 à compter de son entrée en vigueur, prévue le premier jour du deuxième mois suivant la seconde notification d’accomplissement des formalités constitutionnelles propres aux deux Etats parties.

A – Les critères de désignation des transporteurs aériens et les droits qui leur sont accordés

L’accord prévoit que chaque Etat partie accorde à l’autre une série de droits, que l’on peut qualifier de « libertés de l’air », qui bénéficient en fait aux transporteurs aériens que les Etats désignent à cet effet.

L’article 2 distingue en fait deux types de droits :

– les droits de survol du territoire de l’autre Etat, sans atterrir, et le droit d’effectuer des escales sur le territoire de cet Etat à des fins non commerciales : il ne s’agit pas de desservir l’Etat cocontractant, mais seulement de disposer de facilités dans la desserte d’autres destinations ;

– le droit d’effectuer des escales sur le territoire de l’autre Etat en certains points, « afin d’embarquer et de débarquer, séparément ou ensemble, des passagers et du fret, y compris du courrier, à destination ou en provenance du territoire de la première partie contractante », dans le cadre de l’exploitation de certaines routes aériennes : il s’agit alors d’assurer la liaison entre un aéroport situé dans l’un des Etats et un aéroport situé dans l’autre.

En revanche, le même article exclut du champ de l’accord les vols internes à l’un ou l’autre Etat partie.

Les routes aériennes concernées ainsi que les points d’escale font l’objet de l’annexe à l’accord. Il y a des routes long courrier et des routes régionales au départ ou à l’arrivée de la France pour les transporteurs désignés par la France, de Madagascar pour les transporteurs désignés par la République malgache. Les routes régionales passent par la Réunion ou Mayotte. Les routes aériennes peuvent passer par des points intermédiaires et se prolonger au-delà du point desservi dans l’autre Etat.

Pour bénéficier des droits précités, les transporteurs aériens doivent avoir été désignés par l’un ou l’autre Etat partie. Chacun d’entre eux peut désigner le nombre de transporteurs de son choix, sans limitation. En application de l’article 3, la désignation des transporteurs se fait par voie diplomatique. L’autorité aéronautique de l’autre Etat partie délivre ensuite les autorisations d’exploitation appropriées.

Le transporteur aérien doit satisfaire un certain nombre d’exigences, parmi lesquelles le respect des lois et règlements applicables en matière de transport aérien international dans l’Etat qui va lui délivrer ces autorisations et le respect des normes de sécurité (article 8) et de sûreté (article 18) prescrites par l’accord. Il doit aussi remplir la condition d’établissement, qui remplace désormais la condition de nationalité.

La France pourra ainsi désigner tout transporteur « établi sur le territoire de la République française en vertu du traité instituant la Communauté européenne », sous réserve, naturellement, qu’il possède une licence d’exploitation en règle et qu’il relève du contrôle réglementaire de l’Etat membre de la Communauté européenne qui lui a délivré son certificat de transporteur aérien. La République de Madagascar est de même libre de désigner tout transporteur établi sur son territoire, doté d’une licence, auquel elle a délivré un certificat, et qui est soumis à son contrôle.

Dès que l’une des conditions énumérées à l’article 3 n’est plus remplie, chaque Etat partie a le droit de révoquer l’autorisation d’exploitation du transporteur désigné, de suspendre l’exercice de ses droits ou d’imposer à cet exercice certaines conditions. Sauf urgence, ces mesures sont prises après consultation de l’autre Etat partie.

Actuellement – c’est-à-dire au cours de la « saison aéronautique » de l’hiver 2007-2008 –, quatre compagnies assurent la liaison entre la France et Madagascar : Air Austral, compagnie française basée à la Réunion, Air France, Corsair et Air Madagascar, seule compagnie malgache sur cette liaison.

En ce qui concerne la route long courrier reliant la métropole française à Madagascar, elle est empruntée par Air France (quatre fréquences hebdomadaires), Corsair (deux fréquences) et Air Madagascar (trois fréquences) entre Paris et Antananarivo, et par Air Madagascar seulement entre Marseille et Antananarivo, une fois par semaine. Sur la route régionale, les services réguliers sont assurés par Air Austral et Air Madagascar, qui assurent neuf fréquences hebdomadaires entre la Réunion et Madagascar et, respectivement, trois et deux fréquences hebdomadaires entre Mayotte et Madagascar.

B – Les conditions d’exploitation des transporteurs aériens désignés

1) Les principes

L’article 5 de l’accord exige que les transporteurs désignés par les deux Etats parties disposent de « possibilités équitables et égales de concurrence » pour l’exploitation des routes visées par l’accord, ce qui suppose notamment que les transporteurs aériens désignés par un Etat tiennent compte des intérêts de ceux qui ont été désignés par l’autre. L’objectif est de parvenir à répondre aux besoins en matière de transport de passager, de fret et de courrier entre les deux pays.

En application de l’article 6, les transporteurs aériens désignés par l’une ou l’autre partie, ainsi que les personnes ou les choses qu’ils transportent, sont soumis à des règles identiques, qui sont aussi applicables aux aéronefs nationaux assurant les mêmes services aériens internationaux.

Les diverses formes d’autorisations délivrées dans l’un des Etats aux fins de l’exploitation des routes visées par l’accord sont reconnues par l’autre Etat, dès lors qu’elles respectent des critères au moins égaux aux normes qui peuvent être instituées en application de la convention relative à l’aviation civile internationale du 7 décembre 1944 (article 7).

2) Les conditions financières

L’accord régit plusieurs aspects des conditions financières d’exploitation des routes qu’il vise par les transporteurs désignés : les redevances d’usage, les droits de douane et taxes, les tarifs.

De manière classique, des redevances d’usage peuvent être perçues « au titre de l’utilisation des installations et services aéroportuaires et des installations de sécurité, de sûreté, de navigation aérienne et autres » par les autorités ou un organisme d’un Etat auprès des transporteurs aériens désignés par l’autre. L’article 9 impose que leur niveau soit le même pour ces transporteurs que pour tous les autres transporteurs dans la même situation. Le montant de ces redevances peut « refléter, sans toutefois excéder » une part équitable du coût total du service rendu.

En France, ces redevances sont de trois types :

– les redevances de navigation aérienne : il s’agit de la redevance de route, qui rémunère l’usage des installations et services mis en œuvre par l’Etat au-dessus du territoire métropolitain et dans son voisinage, pour la sécurité de la circulation en route et la rapidité des mouvements, et de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne, qui finance les services de la navigation aérienne fournis à proximité des principaux aérodromes ;

– les redevances de contrôle technique de l’aviation civile, qui sont dues par tous les acteurs de l’aviation civile soumis à une autorisation pour exercer leur activité ;

– les redevances aéroportuaires, perçues pour les divers services rendus par les aéroports.

L’article 10 exempte de tout droit de douane et taxe dans un Etat l’ensemble des biens transportés par un transporteur désigné par l’autre Etat afin d’assurer les services aériens : c’est le cas par exemple du carburant, des pièces détachées d’avion, des provisions de bord. Il en est ainsi que ces biens soient transportés par l’aéronef qui les utilise ou aient été introduits ou fournis indépendamment de lui mais dans le but d’être utilisés par un tel aéronef. L’exemption ne s’applique en revanche pas si le transporteur désigné par Madagascar assure une liaison entre deux aéroports français ou deux aéroports de l’Union européenne ou si le transporteur désigné par la France relie deux aéroports malgaches.

C’est également sans imposition que l’excédent des recettes locales d’un transporteur désigné – c’est-à-dire la part de ses recettes qu’il n’aura pas affectée aux règlements des dépenses liées à son activité de transport – pourra être converti et transféré vers le territoire de son choix (article 12).

En ce qui concerne les tarifs, l’article 19 de l’accord du 1er décembre 1962 comportait, comme l’ensemble des accords de ce type conclus dans les années 1960, des clauses d’entente tarifaires qui sont désormais contraires au droit communautaire de la concurrence. Celles-ci sont donc supprimées. L’article 14 du nouvel accord demande aux transporteurs désignés de fixer des tarifs « à des niveaux raisonnables ». Les autorités aéronautiques des Etats parties veilleront à ce que les transporteurs tiennent compte, pour fixer leurs tarifs, de facteurs objectifs comme les coûts d’exploitation et les tarifs de leurs concurrents. Les tarifs devront donc être soumis aux autorités aéronautiques des Etats parties au moins trente jours avant leur entrée en vigueur.

3) Les autres conditions commerciales

Les activités commerciales dans un Etat des transporteurs désignés par l’autre sont facilitées par une série de stipulations reposant sur la seule condition de réciprocité et énoncées à l’article 11 :

– ils ont le droit d’ouvrir des bureaux s’occupant de la promotion et la vente de services de transport aérien ;

– ils sont autorisés à faire entrer et séjourner dans l’autre Etat les personnels dont ils ont besoin, y compris si ce n’est que de manière temporaire ;

– ils ont le droit de vendre leurs titres de transport, dans leurs bureaux ou par l’intermédiaire d’agents accrédités, ainsi que d’ouvrir et d’utiliser des comptes bancaires ;

– ils sont libres de conclure des accords de coopération commerciale avec d’autres transporteurs aériens, quelle que soit leur nationalité, sous réserve qu’ils en informent les autorités aéronautiques des deux Etats parties ;

– ils peuvent utiliser des aéronefs loués coque nue, à condition que ceux-ci satisfassent aux stipulations de l’accord en matière de sécurité et de sûreté.

En application de l’article 13, les transporteurs ont en outre le droit d’assurer leur propre assistance en escale sur le territoire de l’autre Etat ou de sous-traiter ces services à une entreprise autorisée à les fournir.

C – La prise en compte des nouvelles réglementations internationales en matière de sécurité et de sûreté

Les stipulations de l’accord sont conformes aux règles fixées par l’Organisation de l’aviation civile internationale, qui ont été récemment renforcées.

1) En matière de sécurité

L’article 8 porte à la fois sur les normes de sécurité que chaque Etat doit imposer et au respect de ces normes par les transporteurs aériens.

Afin d’assurer la mise en place d’un cadre normatif effectif suffisamment exigeant en matière de sécurité, un Etat contractant peut demander à l’autre de modifier sa réglementation ou la mise en œuvre de celle-ci sur certains points pour respecter au moins les normes minimales imposées par la convention du 7 décembre 1944. Si l’Etat requis s’y refuse, l’Etat requérant peut suspendre ou révoquer les autorisations d’exploitation qu’il a délivrées aux transporteurs aériens désignés par l’Etat requis.

Tout aéronef exploité ou loué par un transporteur aérien désigné par un Etat peut être l’objet de contrôles pendant son séjour sur le territoire de l’autre Etat. Ces contrôles porteront sur la validité des documents de l’aéronef et de son équipage, sur son état apparent et ses équipements. Dans le cas de preuves matérielles irréfutables d’un manquement par rapport aux normes minimales imposées par la convention du 7 décembre 1944 (3), qu’il soit le fait de l’exploitant de l’aéronef ou des autorités de l’Etat qui l’a désigné, l’autre Etat a le droit de suspendre ou de modifier l’autorisation d’exploitation, y compris de manière immédiate si c’est nécessaire. Les mêmes décisions peuvent être prises en cas de refus d’accès à l’aéronef.

Néanmoins, depuis l’entrée en vigueur du règlement CE n° 2111/2005 (4), en janvier 2006, les décisions de suspension d’autorisation ont été « communautarisées » et sont arrêtées dans une liste, régulièrement amendée, qui interdit l’exploitation dans l’espace aérien européen des compagnies aériennes jugées peu sûres. Actuellement huit compagnies aériennes, ainsi que tous les transporteurs aériens certifiés par les autorités responsables de la surveillance réglementaire de la République démocratique du Congo, sont inscrits sur cette liste.

Le dernier alinéa de l’article 8 prévoit le cas où la France désignerait un transporteur aérien relevant du contrôle réglementaire d’un autre Etat membre de l’Union européenne. La République de Madagascar pourra exercer les droits précités s’il apparaît que cet Etat ne respecte pas les règles minimales de sécurité.

2) En matière de sûreté

La question de la sûreté de l’aviation est traitée à l’article 18 de l’accord.

Les Etats parties doivent naturellement agir conformément aux nombreux instruments internationaux régissant la sûreté de l’aviation civile auxquels ils sont parties.

Mais l’accord prévoit aussi qu’ils s’accordent mutuellement, sur demande, toute l’aide nécessaire pour prévenir une menace contre la sûreté de l’aviation civile. Chaque Etat veille à ce que les mesures appropriées soient appliquées pour protéger les aéronefs ; il examinera avec bienveillance une éventuelle demande de l’autre Etat en vue d’instituer des mesures spéciales afin de faire face à une menace particulière, à condition que les mesures proposées soit raisonnables.

Lorsqu’un acte illicite est commis ou lorsqu’il existe une menace, les Etats parties se prêtent mutuellement assistance pour y mettre un terme rapidement et en toute sécurité.

Si un Etat dispose de doutes sérieux sur le respect par l’autre Etat des dispositions relatives à la sûreté, il peut demander des consultations immédiates. L’absence d’accord dans un délai de quinze jours peut constituer un motif de suspension des droits accordés à l’autre partie en application de l’accord. Surtout, en cas de menace directe et exceptionnelle pesant sur la sécurité des passagers et d’inaction d’un Etat, l’autre peut prendre temporairement toute mesure de protection appropriée.

CONCLUSION

Le nouvel accord franco-malgache relatif aux services de transport aérien se substituera à un accord signé il y a plus de quarante-cinq ans, dont les stipulations ne respectaient plus le droit communautaire et reposaient sur des standards dépassés en matière de sûreté et de sécurité aériennes.

Il permettra donc une augmentation du trafic aérien entre Madagascar et la France sur des fondements juridiques solides, ce qui est indispensable au développement du tourisme, voie de croissance actuellement privilégiée à Madagascar.

Votre Rapporteur est donc favorable à l’adoption du présent projet de loi.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du 8 avril 2008.

Après l’exposé du rapporteur et suivant ses conclusions, la commission a adopté le projet de loi (no 574).

*

* *

La commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, le présent projet de loi.

NB : Le texte de l’accord figure en annexe au projet de loi (n° 574).

© Assemblée nationale

1 () Cette négociation a conduit à la signature d’un accord multilatéral le 9 juin 2006, dont le projet de loi autorisant la ratification a été déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale le 30 janvier 2008, sous le n° 669.

2 () Un transporteur est communautaire lorsqu’il remplit trois conditions : il a son principal établissement et son siège social dans l’Union, le transport aérien est son activité principale, il est détenu majoritairement par un ou plusieurs Etats membres, certains pays tiers ou leurs ressortissants.

3 () Il s’agit de la convention relative à l’aviation civile internationale, dite convention de Chicago.

4 () Règlement (CE) n° 2111/2005 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2005 concernant l’établissement d’une liste communautaire des transporteurs aériens qui font l’objet d’une interdiction d’exploitation dans la Communauté et l’information des passagers du transport aérien sur l’identité du transporteur aérien effectif, et abrogeant l’article 9 de la directive 2004/36/CE.