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N
° 1055

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 16 juillet 2008

AVIS

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ECONOMIQUES, DE L’ENVIRONNEMENT ET DU TERRITOIRE SUR LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, relatif aux droits et aux devoirs des demandeurs d'emploi (n° 1005),

PAR M. Yves Albarello,

Député.

——

Voir les numéros :

Sénat : 390, 400 et T.A. n° 117 (2007-2008)

Assemblée nationale : 1005, 1043

SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION 5

TRAVAUX DE LA COMMISSION 9

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE 9

II.— EXAMEN DES ARTICLES 13

Avant l’article 1er 13

Article 1er (articles L. 5411-6 et L. 5411-6-1 à L. 5411-6-4 [nouveaux] du code du travail) : Définition du projet personnalisé d’accès à l’emploi et de l’offre raisonnable 13

Article 2 (article L. 5412-1 du code du travail) : Motifs de radiation de la liste des demandeurs d’emploi 20

Article additionnel après l’article 2 : Radiation de la liste des demandeurs d’emploi en cas de fraude 24

Article additionnel après l’article 2 : Augmentation des amendes encourues pour fausses déclarations 24

Article 3 (nouveau) : Disposition transitoire 24

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 27

MESDAMES, MESSIEURS,

Parvenir à une situation proche du plein-emploi à la fin du quinquennat en 2012, c'est-à-dire ramener le taux de chômage à 5 %, porter à 70 % le taux d’emploi, actuellement de 65,1 %, et réduire le délai de recherche d’emploi à cinq mois, tel est l’objectif fixé par le Président de la République et le Gouvernement.

Plusieurs lois votées par le Parlement depuis le début de la législature témoignent de notre mobilisation, alors que le taux de chômage atteint à 7,2 % son plus bas niveau depuis 25 ans. Pour autant, trop d’offres d’emploi ne trouvent pas preneurs.

La loi du 13 février 2008 sur la réforme de l’organisation du service public de l’emploi, qui a institué la fusion indispensable entre l’ANPE et les Assédic, marquait déjà l’aboutissement de plusieurs réformes essentielles, la principale étant la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005, complétée par la convention pluriannuelle entre l’État, l’ANPE et l’Unédic signée le 5 mai 2006. L’objectif était simple : accroître l’efficacité du service public de l’emploi, paralysé par le manque de coordination entre ses différents acteurs, et le manque de cohérence entre leurs interventions. Cette première réforme a permis d’expérimenter la mise en place de guichets uniques entre l’ANPE et les Assédic en un certain nombre de lieux, et d’initier un rapprochement entre l’ANPE et l’Unédic dans le domaine de l’informatique par la constitution d’un système commun.

La création des maisons de l’emploi, à laquelle M. Jean-Paul Anciaux a attaché durablement son nom, a suscité des espérances dont nous retirons aujourd’hui des résultats positifs ; les quelque deux cents maisons de l’emploi désormais en activité ont joué un rôle important dans la lutte du Gouvernement et des élus pour combattre sans relâche le chômage et le soumettre à une réduction significative. Un premier résultat a été obtenu, puisque le taux de chômage, qui plafonnait depuis des années autour de 10 %, est tombé à 7,2 % aujourd’hui. Les maisons de l’emploi ont joué un rôle positif dans ce combat. Elles ont développé des actions en direction des entreprises afin de favoriser des créations nouvelles et par voie de conséquence, de nouveaux emplois. Elles ont aussi fourni des informations intéressantes en matière de prévision des besoins de main-d’œuvre ou de reconversion économique de certains espaces en situation difficile. Le rapport d’information de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, présenté par Mme Marie-Christine Dalloz en juin dernier illustre ce rôle utile.

Il faut aujourd’hui aller plus loin, sans attendre que la fusion entre l’ANPE et les Assédic ne devienne effective, au 1er janvier 2009. Le service public de l’emploi doit disposer le plus vite possible des moyens d’agir avec la pleine efficacité désirée. La loi du 13 février 2008 exprime la volonté de fournir à chaque demandeur d’emploi des prestations améliorées, grâce à la diminution du nombre de demandeurs d’emploi suivi par chaque conseiller. La définition de l’offre d’emploi susceptible de convenir au demandeur constitue un autre volet essentiel de la réforme.

Cette notion était jusqu’à présent particulièrement floue en droit français. La plupart des pays européens qui réussissent à maintenir le taux de chômage à un niveau bien inférieur au nôtre ont inclus dans leur dispositif de lutte contre le chômage une définition précise et efficace de l’offre raisonnable d’emploi. Il nous faut tirer les leçons d’un tel pragmatisme. Il ne s’agit ni de brimer les chômeurs, ni de subir la difficile situation des finances publiques, mais de soutenir une dynamique volontariste en faveur du retour rapide à l’emploi.

Le dispositif proposé par le projet de loi est remarquable par son équilibre : il y a loin des mesures qui vous sont ici proposées aux réformes envisagées aux Pays-Bas qui devraient contraindre les chômeurs à accepter, au bout d’un an, toute proposition qui leur sera faite. La philosophie affichée par l’intitulé du projet de loi va ainsi bien au-delà de la définition juridique et technique de l’offre raisonnable d’emploi. L’équilibre entre les droits et les devoirs, la justification des uns par les autres est la meilleure réponse aux interprétations fallacieuses de la réforme.

La loi du 18 janvier 2005 dite de cohésion sociale invitait le demandeur d’emploi à accomplir des actes positifs et répétés de recherche d’emploi, le caractère réel et sérieux de ses démarches étant apprécié en tenant compte de sa situation personnelle et de la situation locale de l’emploi, ce qui laisse une place importante à l’appréciation individuelle de chaque conseiller ANPE. Saisis dès 2005 de propositions tendant à définir l’offre raisonnable d’emploi, invités par le Gouvernement en juin 2007 à profiter des négociations engagées à propos de la modernisation du marché du travail, les négociations entre partenaires sociaux n’ont pas abouti sur cette question, ce dont prend acte l’article 18 de l’accord national interprofessionnel du 11 janvier 2008.

Le Gouvernement a pris ses responsabilités, abordant courageusement cette question, guidé par quelques principes clairs. Le projet de loi repose sur un engagement réciproque entre le nouveau service public de l’emploi et le demandeur d’emploi, avec un équilibre entre des droits plus nombreux et des devoirs renforcés. Il fait le choix d’une approche personnalisée, traduite par le projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE). Élabore conjointement par le chômeur et par le service public de l’emploi, il sera désormais leur référence commune. Son actualisation régulière est prévue, afin de maximiser les chances de retour rapide à l’emploi. L’exigence d’équité est confortée par la définition objective de l’offre raisonnable d’emploi.

En contrepartie de ces nouveaux droits, le demandeur d’emploi sera sanctionné s’il refuse deux offres raisonnables d’emploi, la définition de ces offres étant évolutive. Les devoirs sont en effet aussi impératifs et concrets que les droits. Leur non observation, leur violation, appellent sanction. Sur ce point, il n’est pas possible de transiger. C’est d’ailleurs l’esprit même de notre Constitution, dont le préambule de 1946 dispose que « Chacun a le devoir de travailler et le droit d’obtenir un emploi ». La refonte des textes réglementaires, nécessaire pour la mise en œuvre de la réforme, doit offrir l’occasion de réfléchir à une meilleure gradation des sanctions, plus juste et plus efficace.

Enfin, il faut clairement distinguer l’inobservation de la règle d’une part, la fraude d’autre part, qui doit être plus sévèrement sanctionnée

En effet, on peut craindre que la nature du nouveau dispositif, impliquant une rupture avec des habitudes anciennes, n’incite certains à recourir purement et simplement à la fraude. Les sanctions prévues, qu’elles soient d’ordre législatif ou réglementaire, doivent être parfaitement dissuasives, à l’égard « de l’ensemble des fraudeurs impliqués dans les affaires de fraude en réseau, des organisateurs de la fraude mais aussi des faux allocataires », comme le souhaitait M. Dominique Tian.

Sous le bénéfice de ces observations, votre rapporteur pour avis vous invite à approuver le projet de loi qui vous est soumis.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE

Au cours de sa réunion du 16 juillet 2008, la commission a examiné pour avis, sur le rapport de M. Yves Albarello, le projet de loi, adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, sur les droits et devoirs des demandeurs d’emploi (n° 1005).

Un débat a suivi l’exposé du rapporteur pour avis.

M. Jean Gaubert a indiqué que le groupe SRC approuvait l’objectif d’équilibre entre les droits et les devoirs, mais considérait que le projet de loi ne mettait pas en œuvre ce principe, puisque les droits sont évolutifs et les devoirs progressifs. En réalité, le projet de loi vise à dégonfler les chiffres de l’ANPE ; les effets d’une telle politique se font déjà sentir sur le terrain.

Quant à la définition de l’offre d’emploi dite raisonnable, elle va renforcer la liberté d’appréciation des agents de l’ANPE et accroître les inégalités selon les zones géographiques concernées. Le caractère raisonnable de l’offre d’emploi est une notion assez peu juridique. On observe déjà que les agences ANPE, pour atteindre les objectifs qui leur sont fixés, réservent certaines offres aux demandeurs d’emploi de leur ressort.

Le projet de loi n’aborde jamais la question de la santé au travail. Or de nombreux salariés sont dans l’incapacité de continuer à travailler, sans pour autant pouvoir être indemnisés, ainsi de femmes d’une quarantaine d’années, handicapées après de longues années de travail dans les abattoirs.

L’actualisation de l’offre raisonnable d’emploi n’est en réalité qu’une diminution contrainte des prétentions des demandeurs d’emploi.

La contrainte géographique est très dangereuse : que se passera-t-il dans les zones rurales sans transports en commun ? pour un travailleur payé au SMIC, il vaudra mieux, compte tenu du coût des carburants, devenir « auto-entrepreneur », comme la loi de modernisation de l’économie va le permettre…

Le groupe SRC votera contre le projet de loi, précisément parce qu’il n’assure aucun équilibre entre les droits et les devoirs.

Mme Laure de La Raudière a rappelé que l’engagement du Président de la République d’atteindre le plein-emploi en 2012 correspondait aux attentes des Français. Le projet de loi permettra de reconnaître l’engagement des agents de l’ANPE et de faciliter leur travail : il est difficile d’admettre le refus d’offres raisonnables d’emploi par une minorité de personnes, qui attendent d’être en fin de droits pour accepter une proposition.

La définition de l’offre raisonnable d’emploi est bien encadrée, et le décret apportera des précisions complémentaires.

Une entreprise d’insertion de sa circonscription indiquait récemment que la moitié des personnes ayant retrouvé un emploi après deux ans dans cette entreprise quittaient leur nouveau poste dès qu’elles pouvaient à nouveau bénéficier des allocations-chômage.

Mme Colette Langlade a déclaré que le projet de loi stigmatise les demandeurs d’emplois comme des assistés satisfaits de leur sort, alors qu’ils sont privés d’emploi, victimes de licenciements souvent économiques. Le Gouvernement s’attaque aux chômeurs au lieu d’affronter le chômage. La suppression de nombreux postes de fonctionnaires, notamment à l’Éducation nationale, aggravera la situation.

Mme Catherine Coutelle a regretté qu’une énième loi soit mise sur le métier, alors que les Français ne distinguent aucune cohérence dans l’accumulation des réformes. Quelle urgence à voter précipitamment un tel projet de loi, en plein été ? Ce texte illustre parfaitement la nécessité de disposer d’études d’évaluation et d’impact solides, et notamment d'études de genre afin de lutter contre les inégalités entre les femmes et les hommes, comme le prévoit une proposition de loi déposée en mars dernier par le groupe SRC.

Le projet de loi ne prévoit aucune disposition relative à la santé des salariés, ni à l’amélioration de leurs qualifications. Le coût des carburants, et celui de la garde d’enfants, insurmontable pour certaines familles monoparentales, poseront de graves problèmes. Il faut développer les plans de déplacements entreprise (PDE), sous l’égide de l’ADEME.

M. Philippe Meunier a affirmé que le projet de loi était tout à fait équilibré. Des discussions avec des salariés, en circonscription, il ressort que ces derniers sont ulcérés par l’impunité des profiteurs. Pour maintenir les dispositifs d’assurance-chômage et d’assurance-maladie, il faut sanctionner les abus et motiver les chômeurs. Il y a là une question de justice. Il faut aussi évaluer correctement les dispositifs.

M. Lionel Tardy a rappelé que « Gouverner, c’est prévoir » : le papyboom va entraîner une augmentation des tensions sur le marché de l’emploi, ce qui permettra aux salariés de choisir plus facilement parmi les offres d’emploi.

S’agissant de l’évaluation de la loi, la seule réponse possible consiste à voter la réforme constitutionnelle qui donnerait davantage de pouvoirs au Parlement en la matière. Enfin, sur la définition de l’offre raisonnable d’emploi, un amendement de Mme Marie-Christine Dalloz, adopté par la Commission des affaires sociales, prévoit que cette offre ne pourra être à temps partiel que si cela est expressément prévu dans le projet personnalisé du demandeur d’emploi.

Le Président Serge Poignant a ensuite répondu à Mme Catherine Coutelle que l’on ne peut reprocher à la Commission des affaires économiques de ne pas avoir compris la nécessité d’évaluer la loi, celle-ci étant la première commission à avoir initié un mouvement à la fois de contrôle et d’évaluation des textes qui lui sont soumis. Par ailleurs, on ne peut accepter que cette loi soit assimilée à une « loi anti-chômeurs » dans la mesure où son objectif est d’améliorer le retour à l’emploi des demandeurs d’emploi.

M. Jean Gaubert a soutenu que le Parlement légiférait trop sans avoir de retour sur les textes déjà votés, le présent projet de loi n’en étant qu’une illustration parmi d’autres. La loi sur la fusion ANPE-Unédic n’est en effet pas encore mise en œuvre que l’on modifie les règles de recherche d’emploi ! Il en va ainsi depuis le début de la législature où lorsqu’un point non consensuel est soulevé au sein de la majorité, il est réexaminé six mois plus tard par le Parlement. Par ailleurs, il existe aujourd’hui une tendance au sein de la majorité à voir des délinquants partout, or il est avéré que les tricheurs ne constituent qu’une infime minorité des demandeurs d’emploi. A cet égard, la mission parlementaire sur les fraudes et pratiques abusives menée par les députés Gérard Léonard et Charles de Courson sous la Xème législature n’avait estimé qu’à 6 % le nombre de « faux chômeurs » en France. Ce taux, relativement faible, peut-il justifier que l’on impose à tous les demandeurs d’emploi le système prévu par le projet de loi ?

M. Yves Albarello, rapporteur, a souligné qu’à titre personnel, il ne pouvait se satisfaire d’un taux de chômage à 7,2 % et que les exemples étrangers prouvaient que celui-ci pouvait être ramené à 5 %, sans même évoquer les 3 % de taux de chômage des Pays-Bas. La France a donc beaucoup de progrès à faire en matière de recherche d’emploi et ce alors même que plus de 600 000 emplois ne sont pas pourvus. L’objectif n’étant pas d’importer de la main d’œuvre, comme aux Pays-Bas, mais de donner du travail aux Français, le projet de loi constitue une réponse adéquate au problème auquel nous sommes confrontés.

En réponse aux différents intervenants, il a ensuite indiqué :

- que la maladie constituerait bien évidemment un motif légitime de refus et que le PPAE prendra en compte la situation personnelle, donc la santé, des demandeurs d’emploi ;

- qu’en zone rurale, il convenait également de trouver des solutions au chômage. A cet égard, il a évoqué l’exemple personnel de son fils, cuisinier de formation, qui gagne à peine le SMIC mais n’hésite pas à faire 30 kilomètres en voiture, pour se rendre tous les jours au travail, tout simplement parce qu’il veut réussir dans la vie. Le rapporteur en a conclu que c’était là la différence entre la majorité et l’opposition.

Le présent projet de loi est la suite logique des actions déjà engagées par le Gouvernement et notamment de la loi sur la modernisation du marché du travail et de la fusion ANPE-Unédic, d’où la présence d’un article transitoire dans le texte.

S’agissant du temps partiel imposé aux femmes, la Commission des affaires sociales a adopté un amendement de Mme Marie-Christine Dalloz destiné à le combattre.

Contrairement à ce qu’a avancé Mme Colette Langlade, le texte proposé est beaucoup moins contraignant que le droit existant : en effet, à l’heure actuelle, un premier refus peut aboutir à une radiation. Le projet de loi ne prévoit de radiation qu’à compter du second refus et ses effets sont limités dans le temps. Quant au salaire, il est bien précisé à l’alinéa 11 de l’article 1er qu’il ne peut y avoir de proposition inférieure au SMIC.

Enfin, le rapporteur a indiqué qu’en tant que jeune député, il constatait qu’un nombre important de rapports étaient déposés chaque année qui restaient sans suite. Ainsi le rapport d’information de M. Dominique Tian sur les fraudes à l’assurance chômage date déjà d’il y a deux ans et rien n’a été fait : le rapporteur s’en est donc inspiré pour déposer un amendement visant à combattre les fraudes qui coûtent à l’État 150 millions d’euros par an, notamment les fraudes organisées par des réseaux.

M. Jean Gaubert a estimé que déclarer systématiquement l’urgence sur les textes soumis au Parlement n’était pas un bon moyen de revaloriser le rôle de celui-ci. Une réunion de commission n’est par ailleurs pas une tribune politique et assimiler les commissaires de l’opposition à des défenseurs des fraudeurs est déplacé. Il existe une vraie différence de conception entre la majorité et l’opposition, qui a été exposée précédemment mais il ne semble pas qu’elle ait été entendue par le rapporteur.

La Commission est ensuite passée à l’examen des articles du projet de loi.

II.— EXAMEN DES ARTICLES

Avant l’article 1er

La Commission a examiné un amendement de M. Lionel Tardy portant article additionnel avant l’article 1er visant à compléter l’article L. 5112-1 du code du travail relatif au Conseil national de l’emploi. M. Lionel Tardy a indiqué que la loi du 13 février 2008 portant réforme de l'organisation du service public de l'emploi avait créé un Conseil national de l'emploi, dont l'une des fonctions est précisément de veiller à la cohérence de l'action des différents acteurs concourant à la mise en œuvre de la politique de l'emploi. Or la liste de ces acteurs est incomplète, les différentes instances consultatives, qui existent déjà comme le conseil d'orientation pour l'emploi, ou qui viendraient à être créés, n’y figurant pas. Il s’agit donc d’un amendement de cohérence. Le rapporteur a estimé qu’il n’était pas opportun de revenir sur la loi du 13 février 2008. M. Jean Gaubert a pour sa part indiqué que la position de l’auteur de l’amendement était logique et qu’il valait mieux préciser d’emblée les choses plutôt que d’y revenir plus tard. Le rapporteur ayant souligné que l’amendement présenté ne permettrait pas de répondre pas à l’objectif poursuivi, la Commission l’a rejeté.

Article 1er

(articles L. 5411-6 et L. 5411-6-1 à L. 5411-6-4 [nouveaux] du code du travail)

Définition du projet personnalisé d’accès à l’emploi
et de l’offre raisonnable

Traduisant l’équilibre entre les droits et les devoirs des demandeurs d’emploi affiché par le titre du projet de loi, le I de l’article 1er du projet de loi propose une nouvelle rédaction de l’article L. 5411-6 du code du travail définissant la relation du demandeur d’emploi et du nouvel opérateur mentionné à l’article L. 5312-1.

Le II de cet article insère quatre nouveaux articles dans le code du travail définissant au niveau législatif le projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) et l’offre raisonnable d’emploi.

L’actuel article L. 5411-6 oblige à accomplir des actes positifs et répétés de recherche d’emploi les demandeurs d’emploi immédiatement disponibles pour occuper un emploi, c'est-à-dire ceux qui n’exercent aucune activité professionnelle, ne suivent aucune formation professionnelle, et dont la situation personnelle leur permet d’occuper sans délai un emploi. La nouvelle rédaction proposée pour cet article maintient évidemment cette obligation, introduite dans le code du travail par la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005, mais elle la replace dans un contexte plus large.

La première phrase dispose ainsi que le demandeur d’emploi est orienté et accompagné dans sa recherche d’emploi par l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1. La section relative à la recherche d’emploi, au sein du titre du code du travail consacré aux droits et obligations du demandeur d’emploi, commence donc par une affirmation de ses droits et des devoirs de « France Emploi » envers lui.

La seconde phrase détaille les obligations du demandeur d’emploi, qui est tenu d’accomplir des actes positifs et répétés de recherche d’emploi, mais aussi, et là réside la nouveauté du projet de loi :

– de participer à la définition du projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) ; le PPAE est institué à l’article L. 5411-6-1 nouveau ;

– d’accepter les offres raisonnables d’emploi ; celles-ci sont définies à l’article L. 5411-6-2 nouveau.

Le paragraphe II de l’article 1er insère quatre nouveaux articles dans la section du code du travail consacrée à la recherche d’emploi.

L’article L. 5411-6-1 (nouveau) du code du travail met en place le dispositif du projet personnalisé d’accès à l’emploi.

Le PPAE existe déjà au niveau réglementaire et conventionnel. Il reçoit ici une consécration législative.

Il est mentionné aux articles R. 5411-14 et R. 5411-15, ainsi rédigés :

 Article R. 5411-14. - Après l'inscription du demandeur sur la liste des demandeurs d'emploi, un projet personnalisé d'accès à l'emploi est établi, et adapté au cours du temps, par l'agence nationale pour l'emploi ou, en liaison avec elle, par tout organisme participant au service public de l'emploi. »

« Article R. 5411-15. - Le projet personnalisé d'accès à l'emploi définit les caractéristiques des emplois recherchés et tient compte :

« 1° De la situation du demandeur d'emploi, notamment de sa formation, de sa qualification, de sa situation personnelle et familiale ;

« 2° De la situation locale du marché du travail et des possibilités de mobilité géographique et professionnelle de l'intéressé. »

Le PPAE précise (alinéa 5) :

– la nature et les caractéristiques de l’emploi recherché

Des débats au Sénat, il ressort clairement qu’il appartient au demandeur d’emploi d’indiquer s’il recherche un emploi à temps partiel ou à temps complet, un CDD ou un CDI, etc. La nature du contrat ne peut pas être imposée aux demandeurs d’emploi, qui ne peuvent donc être tenus d’accepter un contrat à temps partiel s’ils ne le souhaitent pas. Toutefois, le Gouvernement a fait le choix de n’inscrire dans la loi que les obligations imposées aux demandeurs d’emploi, c’est pourquoi cette précision ne figure pas dans le texte du projet de loi. Les travaux préparatoires et les débats publiés au Journal officiel apportent néanmoins toutes les garanties sur ce point ;

– la zone géographique privilégiée ;

– le niveau de salaire attendu.

Pour ce faire, le PPAE tient compte :

– de la formation du demandeur d’emploi,

– de ses qualifications,

– de sa situation personnelle et familiale,

– de la situation du marché du travail local.

Le Sénat a apporté une clarification par rapport à la rédaction initialement prévue pour cet alinéa, afin de bien préciser que ces éléments d’appréciation s’appliquent aux trois éléments constitutifs du PPAE et pas seulement à la nature et aux caractéristiques des emplois recherchés.

Le PPAE retrace les actions que l’ANPE puis le nouvel opérateur issu de la fusion de l’ANPE et des Assédic s’engagent à mettre en œuvre dans le cadre du service public de l’emploi (SPE), notamment en matière d’accompagnement et le cas échéant, de formation et d’aide à la mobilité (alinéa 6).

Le PPAE est élaboré conjointement par le demandeur d’emploi et l’ANPE, ou en liaison avec elle par tout organisme participant au SPE (alinéa 4). La participation du demandeur d’emploi est une nouveauté introduite par le projet de loi.

Le projet de loi initial ne visait que l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 du code du travail. Alors que l’ANPE travaille avec des organismes variés chargés de certains publics, comme l’Association pour l’emploi des cadres (APEC), les missions locales ou le réseau Cap Emploi pour les handicapés, cette rédaction pouvait laisser croire que le nouvel opérateur aurait le monopole de l’élaboration et de l’actualisation du PPAE. La nouvelle rédaction rend possible à terme de confier l’accompagnement des demandeurs d’emploi à des acteurs privés.

Le PPAE n’est pas de nature contractuelle, comme l’a rappelé le ministre en séance au Sénat, mais c’est un « engagement réciproque », selon l’expression du rapporteur du Sénat, M. Dominique Leclerc. Reconnaître au PPAE un caractère contractuel aurait pu provoquer des blocages lorsqu’aucun accord n’est trouvé entre le demandeur d’emploi et son conseiller.

L’article L. 5411-6-2 nouveau du code du travail proposé à l’alinéa 7 détermine les critères constitutifs de l’offre raisonnable d’emploi (ORE), à savoir, tels qu’ils sont mentionnés dans le PPAE :

– les caractéristiques des emplois recherchés,

– la zone géographique privilégiée,

– le salaire attendu.

L’ORE résulte donc d’une élaboration conjointe par le demandeur d’emploi et « France Emploi ».

Les trois critères précités sont là encore interprétés en tenant compte de la formation du demandeur d’emploi, de ses qualifications, de sa situation personnelle et familiale, de la situation du marché du travail local.

Il s’agit de critères objectifs, qui assureront l’égalité de traitement entre les demandeurs d’emploi, alors qu’aujourd’hui la notion d’offre valable d’emploi est laissée à l’appréciation de chaque conseiller ANPE. C’est donc là un véritable progrès.

Cette réforme rapproche la France des pays européens où de tels dispositifs ont été mis en place avec succès. Par exemple, la loi Hartz IV en Allemagne prévoit qu’un demandeur d’emploi depuis plus de six mois doit accepter un emploi rémunéré à hauteur de 70 % au moins de son salaire antérieur et occasionnant un temps de trajet de deux heures et demie au plus aller-retour.

DÉFINITIONS DE L'OFFRE RAISONNABLE D'EMPLOI
TABLEAU COMPARATIF

Pays

Qualification

Mobilité géographique

Salaire

Sanction du refus

FRANCE (aujourd'hui)

Compatible avec la spécialité ou la formation antérieure du demandeur d'emploi

Selon les possibilités de mobilité géographique individuelles

Rétribué à un taux de salaire normalement pratiqué dans la profession et dans la région

Exclusion définitive ou temporaire

ALLEMAGNE

 

2 heures et demie, pour un temps de travail journalier supérieur à 6 heures, et un temps de trajet de plus de 2 heures pour un temps de travail journalier inférieur ou égal à 6 heures. Déménagement peut être exigé pour demandeur d'emploi de plus de 3 mois

De 0 à 3 mois : 80 % du salaire antérieur
Après 3 mois : 70 %
Après 6 mois : montant de l'allocation

Interruption des paiements fonction de la durée d'indemnisation (de 12 semaines à ¼ de la durée d'indemnisation)

GRANDE-BRETAGNE

Pendant 3 mois : droit de refuser tout emploi ne correspondant pas à la profession habituelle (idem Finlande et Danemark)

Après 6 mois :

Obligation d'accepter une offre impliquant un trajet quotidien inférieur à 2 heures

Après 6 mois de chômage : pas d'exigence de salaire

Suppression de l'allocation (mais maintien d'une allocation minimale de base « logement »)

ESPAGNE

Correspondant à la profession habituelle du demandeur d'emploi

Lieu de travail à moins de 30 km et frais de transport inférieurs à 20 % du salaire

Salaire pratiqué dans le secteur

Selon gravité : au moins 3 mois d'interruption voire extinction des droits

PORTUGAL

 

Les frais de trajets ne peuvent excéder 10 % du salaire mensuel proposé (sauf si prise en charge par l'employeur)

Temps de trajet moyen n'excédant pas 25 % du temps de travail (20 % si personnes à sa charge)

Rémunération supérieure au montant de l'allocation chômage (majoré de 25 % au cours des 6 premiers mois, de 10 % ensuite)

 

ITALIE

« Équivalent » aux attributions précédentes

Moins de 50 km ou moins d'une heure de trajet

90 % du salaire du secteur

Perte des droits à indemnisation et radiation

BELGIQUE

Après 6 mois : tout emploi tenant compte des qualifications

Lieu de travail à moins de 25 km et impliquant un trajet quotidien inférieur à 4 heures ou une durée d'absence du domicile de plus de 12 heures par jour

Revenu net (diminué des frais de déplacements et augmenté des allocations familiales) supérieur à l'allocation

Au choix du directeur du bureau du chômage, avertissement ou exclusion de 4 à 52 semaines
Prise en compte de la récidive

Source : ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi.

Le PPAE une fois établi, il convient de l’actualiser périodiquement. C’est l’objet de l’article L. 5411-6-3 nouveau du code du travail proposé à l’alinéa 8. L’objectif de cette actualisation est notamment d’accroître les perspectives de retour à l’emploi. Plusieurs étapes sont distinguées.

En effet, plus le temps passe, plus les chances de retrouver un emploi diminuent. L’objectif est de créer une dynamique : la seule ambition de la réforme est de favoriser le retour le plus rapide possible vers le monde du travail des salariés privés d’emploi.

Au-delà de trois mois, est réputée raisonnable l’offre d’un emploi :

– compatible avec les qualifications du demandeur d’emploi ;

– rémunéré à au moins 95 % du salaire antérieurement perçu.

Au-delà de six mois est réputée raisonnable l’offre d’un emploi :

– rémunéré à au moins 85 % du salaire antérieurement perçu ;

– entraînant un temps de trajet (aller) en transport en commun d’une durée maximale d’une heure ou une distance à parcourir (aller) d’au plus 30 kilomètres.

Au-delà de douze mois est réputée raisonnable l’offre d’un emploi :

– entraînant un temps de trajet (aller) en transport en commun d’une durée maximale d’une heure ou une distance à parcourir (aller) d’au plus 30 kilomètres, ce qui correspond au quotidien de 70 % des Français qui travaillent ;

– rémunéré au moins à hauteur du revenu de remplacement prévu à l’article L. 5421-1.

L’article L. 5421-1 du code du travail distingue deux types de revenu de remplacement : l’allocation d’assurance, financée par l’assurance chômage, et les allocations de solidarité, financées par l’État. Rappelons qu’à peine la moitié des demandeurs d’emploi inscrits à l’ANPE sont indemnisés par le régime d’assurance chômage.

L’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE) est versée pendant 7 à 36 mois, selon la durée d’affiliation et l’âge, aux demandeurs d’emploi qui ont travaillé au minimum 6 mois au cours des 22 derniers mois.

Salaire de référence (salaire brut antérieur)

Allocation brute journalière

Inférieur à 1 040,40 euros

75 % du salaire de référence

Compris entre 1 040,40 et 1 139,85 euros

26,01 euros par jour

Compris entre 1 139,85 et 1 881,18 euros

40,4 % du salaire journalier brut + 10,66 euros par jour

Supérieur à 1 881,18 euros

57,4 % du salaire journalier brut (pris en compte dans la limite de 11 092 euros)

L’allocation spécifique de solidarité (ASS) bénéficie aux demandeurs d’emploi justifiant de 5 ans d’activité salariée dans les 10 ans précédant la fin du contrat de travail et qui ne dépassent pas un plafond de ressources fixé à 1 031,80 euros pour une personne seule et 1 621,40 euros pour un couple. Le montant de l’ASS est de 442,20 euros par mois sous un plafond de 589,60 euros pour une personne et du double pour un couple ; une allocation réduite différentielle à concurrence des plafonds de ressources précités est également versée.

L’alinéa 11, qui créée un nouvel article L. 5411-6-4 dans le code du travail apporte des garanties sur ce point. Ainsi, aucune disposition de la section relative à la recherche d’emploi ne peut obliger un demandeur d’emploi à accepter un niveau de salaire inférieur au salaire normalement pratiqué dans la région et dans la profession, ni porter atteinte à d’autres dispositions légales ou stipulations conventionnelles en vigueur, notamment celles relatives au salaire minimum de croissance (SMIC). Ainsi, aucun « dumping » salarial n’est à craindre.

*

* *

La Commission a examiné un amendement de M. Jean-Pierre Decool visant à étendre le projet personnalisé d’accès à l’emploi en tenant compte, outre les critères déjà fixés, des demandes en matière de formation et de l’éventuelle mobilité du demandeur d’emploi. Le rapporteur a indiqué que l’amendement était satisfait, le projet de loi prévoyant la prise en compte, d’une part, de la situation personnelle et familiale du chômeur et la définition d’une zone géographique privilégiée et, d’autre part, de la formation de ce dernier, c'est-à-dire également des lacunes de sa formation. En conséquence, M. Jean-Pierre Decool a retiré son amendement.

La Commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur à l’alinéa 5 visant à donner plus de souplesse dans la reconversion des demandeurs d’emploi en prévoyant que le PPAE précise pour l’emploi recherché, un poste spécifique ou une catégorie d’emplois plus large, ainsi qu’un amendement de coordination à l’alinéa 7.

Puis la Commission a examiné un amendement de M. Jean-Pierre Decool visant à mettre en cohérence les dispositions de l’alinéa 8 qui prévoit une actualisation périodique du projet personnalisé avec celles de l’alinéa 2 qui fixe cette périodicité à trois mois. Le rapporteur ayant indiqué qu’il n’y avait aucune ambiguïté sur le fait que la révision périodique serait bien trimestrielle, la Commission a néanmoins adopté cet amendement. M. Jean-Pierre Decool a ensuite retiré son amendement suivant qui prévoyait de préciser que la notion d’offre raisonnable d’emploi s’entendait dans la zone géographique privilégiée, le rapporteur ayant estimé qu’il était satisfait. Enfin, la Commission a adopté un autre amendement du même auteur précisant la notion de « profession » visée à l’alinéa 11 de l’article, conformément à l’avis favorable du rapporteur, puis elle a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 1er ainsi modifié.

Article 2

(article L. 5412-1 du code du travail)

Motifs de radiation de la liste des demandeurs d’emploi

L’article 2 du projet de loi propose une réécriture de l’article L. 5412-1 du code du travail, lequel énumère les motifs de radiation de la liste des demandeurs d’emplois. Loin de jeter le discrédit sur les demandeurs d’emploi, cet article transcrit une volonté d’équité, en sanctionnant les seuls abus, dont M. Laurent Wauquiez, secrétaire d’État chargé de l’Emploi a estimé, au vu des exemples étrangers, qu’ils peuvent être de l’ordre de 5 % au plus.

Dans la continuité du droit existant, cet article reprend sans changement plusieurs motifs de radiation et en modifie ou ajoute quelques-uns pour prendre en compte la mise en place du PPAE et de l’ORE.

Justifient cette radiation :

– le fait de ne pouvoir justifier de l’accomplissement d’actes positifs et répétés en vue de retrouver un emploi, de créer ou de reprendre une entreprise (alinéa 1°) : sans changement ;

– le fait, sans motif légitime, de refuser à deux reprises une ORE mentionnée à l’article L. 5411-6-2 (alinéa 2°).

Constitue actuellement un motif de radiation le fait pour un demandeur d’emploi de refuser sans motif légitime un emploi compatible avec sa spécialité, sa formation, ses possibilités de mobilité géographique compte tenu de sa situation personnelle et familiale et des aides à la mobilité qui lui sont proposées, rétribué à un taux de salaire normalement pratiqué dans la profession et la région, et ce quelle que soit la durée du contrat de travail offert.

Le nouveau dispositif proposé par le projet de loi est donc plus favorable que le droit existant qui rend possible une radiation dès le premier refus d’une telle offre et n’offre pas pendant la première année de la recherche d’emploi les mêmes garanties de salaire. Surtout, il se fonde sur des critères bien plus objectifs, ce qui garantira une égalité de traitement entre les demandeurs d’emploi.

Le paragraphe 3° énumère une série de motifs de radiation relatifs au comportement des chômeurs dans le cadre de leur recherche d’emploi.

Le aa) du 3° (alinéa 6), issu d’un amendement adopté par le Sénat, institue un nouveau motif de radiation : le refus de définir ou d’actualiser le PPAE.

Le a) du 3° (alinéa 7) reprend un motif existant : le refus de suivre une action de formation ou d’aide à la recherche d’emploi proposée par l’un des organismes mentionnés à l’article L. 5311-2 en y ajoutant une condition, favorable au demandeur d’emploi : cette action doit s’inscrire dans le cadre du PPAE. Le refus de suivre une formation ou toute autre aide à la recherche d’emploi, non prévue dans le PPAE, ne saurait donc constituer un motif de radiation.

Les alinéas suivants reprennent à l’identique des dispositions déjà prévues par le droit en vigueur. Sont ainsi visés :

– le refus de répondre à toute convocation des services et organismes mentionnés à l’article L. 5311-2 ou mandatés par eux (b), alinéa 8) ;

– le refus de se soumettre à une visite médicale auprès des services médicaux de main-d’œuvre destinée à vérifier son aptitude au travail ou à certains types d’emploi (c), alinéa 9) ;

– le refus d’une proposition de contrat d’apprentissage ou de contrat de professionnalisation (d), alinéa 10) ;

Le contrat de professionnalisation doit permettre d’acquérir une qualification professionnelle et de favoriser l’insertion ou la réinsertion professionnelle. Les bénéficiaires âgés de 16 à 25 ans révolus sont rémunérés en pourcentage du Smic selon leur âge et leur niveau de formation, les salariés âgés de 26 ans et plus perçoivent une rémunération qui ne peut être ni inférieure au SMIC ni à 85 % du salaire minimum conventionnel. Ce contrat ouvre droit pour l’employeur, pour certaines embauches et dans certaines limites, à une exonération de cotisations patronales de sécurité sociale. Des aides incitatives à la reprise d’emploi dans le cadre d’un contrat de professionnalisation peuvent être versées par les Assédic ;

– le refus d’une action d’insertion ou d’une offre de contrat aidé prévues aux chapitres II (insertion par l’activité économique) et IV (contrats de travail aidés) du titre III du livre Ier de la partie du code du travail intitulée « l’emploi »(e), alinéa 11).

Comme à l’alinéa 2°, tous les motifs énumérés au paragraphe 3° sont susceptibles d’être sanctionnés par la radiation de la liste des demandeurs d’emploi, sauf si le chômeur invoque un motif légitime.

Enfin, le 4° (alinéa 12) prévoit la radiation de toute personne ayant fait de fausses déclarations pour être ou demeurer inscrite sur la liste des demandeurs d’emploi.

Cet alinéa, qui reprend à l’identique le droit existant, mériterait selon votre rapporteur un traitement à part, afin de distinguer clairement des autres ce motif de radiation. Le rapport d’information déposé par la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, présenté en décembre 2006 par M. Dominique Tian sur les moyens de contrôle de l’Unédic et des Assédic estimait que « le chiffre de 140 millions d’euros, qui correspond au montant des fraudes constatées par l’Unédic au 13 décembre 2006, reflète un phénomène dont il est à ce jour difficile de prendre toute la mesure ». Votre rapporteur appelle le Gouvernement à accentuer la lutte contre la fraude, afin de ne pas décourager ceux qui mettent tout en œuvre pour retrouver du travail, et de garantir le meilleur usage des sommes très importantes qui résultent des efforts financiers de nos concitoyens.

Votre rapporteur souhaite également engager une réflexion globale sur les sanctions. À cet effet, il vous propose un amendement renforçant les amendes encourues en cas de fraude, et demande au Gouvernement la révision des décrets fixant les durées de radiation de la liste des demandeurs d’emploi.

Les conditions de radiation seront déterminées par un décret en Conseil d’État (alinéa 2). La nouvelle rédaction de l’article L. 5412-1 supprime l’avis des organisations syndicales de salariés et des organisations d’employeurs. En effet, la consultation du Conseil national de l’emploi est obligatoire pour tous les décrets relatifs à la politique de l’emploi depuis la loi n° 2007-130 du 31 janvier 2007 de modernisation du dialogue social.

POSSIBILITÉS DE RADIATION DE LA LISTE DES DEMANDEURS D’EMPLOI
DROIT ACTUEL, DISPOSITIONS RÉGLEMENTAIRES

La personne qui…

… encourt les sanctions suivantes :

– Soit ne peut justifier de l'accomplissement d'actes positifs et répétés en vue de retrouver un emploi

– Sans motif légitime, refuse une offre d’emploi compatible avec sa spécialité ou formation, compte tenu de sa situation familiale et personnelle et des aides à la mobilité et rétribué à un taux de salaire normalement pratiqué dans la profession et la région

– Refuse sans motif légitime, une proposition de contrat aidé, de contrat d'apprentissage ou de contrat de professionnalisation 

– Refuse sans motif légitime de suivre une action de formation, d'insertion ou une offre de contrat aidé

– Radiation pour 15 jours la première fois et réduction de 20 % du revenu de remplacement pendant 2 à 6 mois

– en cas de manquements répétés, radiation de un à six mois consécutifs et réduction de 50 % du revenu de remplacement pendant 2 à 6 mois, voire suppression définitive de ce revenu

– Refuse sans motif légitime de répondre à toute convocation des services et organismes mentionnés à l'article L. 5311-2 ou mandatés par ces services et organismes

– Refuse sans motif légitime de se soumettre à une visite médicale

– Radiation pour deux mois la première fois et suppression pour 2 à 6 mois du revenu de remplacement

– en cas de manquements répétés, radiation de deux à six mois consécutifs et suppression pour 2 à 6 mois, ou définitivement, du revenu de remplacement 

– A fait de fausses déclarations pour être ou demeurer inscrite sur cette liste

– Radiation pour six à douze mois consécutifs et suppression définitive du revenu de remplacement.

La suppression du revenu de remplacement est décidée par le préfet ; en attendant cette décision, les organismes de l’assurance chômage peuvent prévoir sa suspension.

Les décisions de radiation, prises par le délégué départemental de l’ANPE, sont motivées et interviennent après que l’intéressé a été mis à même de présenter des observations écrites.

En outre, une amende administrative plafonnée à 3 000 euros et des amendes pénales de 3 750 à 4 000 euros sanctionnent les fausses déclarations.

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La Commission a examiné un amendement de M. Jean-Pierre Decool prévoyant d’informer l'intéressé avant sa radiation de la liste des demandeurs d'emploi. Le rapporteur ayant indiqué que cette précision était de nature réglementaire et qu’elle figurait déjà à l’article R. 5412-7 du code du travail, l’auteur a retiré son amendement.

La Commission a ensuite examiné un amendement du rapporteur visant à supprimer l’alinéa 12 de l’article relatif à la fraude avant de replacer les dispositions afférentes dans un article additionnel après l’article 2. Le rapporteur a indiqué que cet amendement avait pour objectif de séparer la question des droits et devoirs des demandeurs d’emploi de celle des fraudeurs. Mme Catherine Coutelle ayant sollicité de plus amples explications, M. Jean Gaubert a indiqué qu’il s’agissait d’affichage, le président Serge Poignant précisant qu’il préférait le terme de lisibilité. La Commission a adopté cet amendement puis a donné un avis favorable à l’adoption de l’article 2 ainsi modifié.

Article additionnel après l’article 2

Radiation de la liste des demandeurs d’emploi en cas de fraude

La Commission a adopté un amendement du rapporteur visant à insérer dans un article additionnel les dispositions préalablement contenues à l’alinéa 12 de l’article 2.

Article additionnel après l’article 2

Augmentation des amendes encourues pour fausses déclarations

La Commission a adopté un amendement du rapporteur visant à porter à 5 000 euros et à harmoniser les amendes pénales prévues dans le code du travail en cas de fraude à l’assurance chômage.

Article 3 (nouveau)

Disposition transitoire

Issu d’un amendement du Gouvernement adopté par le Sénat, le présent article prévoit que jusqu’à la date de création de l’institution mentionnée à l’article L. 5312-1 du code du travail, l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) se substitue à l’institution précitée pour l’application de la présente loi.

La mise en place du nouvel opérateur créé par la loi n° 2008-126 du 13 février 2008 relative à la réforme de l’organisation du service public de l’emploi ne sera effective qu’à la date de la première réunion de son conseil d’administration, qui peut être repoussée jusqu’au 1er janvier 2009.

Il importait d’éviter tout vide juridique dans l’intervalle, d’autant que le PPAE est déjà mis en œuvre sur une base réglementaire.

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La Commission a donné un avis favorable à l’adoption de cet article sans modification.

Conformément aux conclusions de son rapporteur, la commission a donné un avis favorable à l’adoption du projet de loi (n° 1005) adopté par le Sénat après déclaration d’urgence, sur les droits et devoirs des demandeurs d’emploi, ainsi modifié.

AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION

Article 1er

Amendements présentés par M. Yves Albarello, rapporteur :

•  Dans l’alinéa 5 de cet article, substituer au mot : « recherché », les mots : « ou des emplois recherchés ».

•  Dans l’alinéa 7 de cet article, après le mot : « caractéristiques », insérer les mots : « de l’emploi ou ».

Amendements présentés par M. Jean-Pierre Decool :

•  A la fin de la première phrase de l’alinéa 8 de cet article, substituer au mot : « périodiquement », les mots : « par intervalle d’au moins trois mois ».

•  Dans l’alinéa 11 de cet article, substituer aux mots : « dans la profession », les mots : « pour la profession concernée ».

Article 2

Amendement présenté par M. Yves Albarello, rapporteur :

Supprimer l’alinéa 12 de cet article.

Article additionnel après l’article 2

Amendements présentés par M. Yves Albarello, rapporteur :

•  I. Après l’article L. 5412-1 du code du travail, il est inséré un article L. 5412-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 5412-2. - Est radiée de la liste des demandeurs d’emploi, dans des conditions déterminées par un décret en Conseil d’État, la personne qui a fait de fausses déclarations pour être ou demeurer inscrite sur cette liste. »

II. A la fin de la première phrase de l’article L. 5426-2 du code du travail, les mots : « aux 1° à 4° de l’article L. 5412-1 sont remplacés par les mots : « aux 1° à 3° de l’article L. 5412-1 et à l’article L. 5412-2 ».

•  I. A la fin de l’article L. 5413-1 du code du travail, la somme : « 3 750 euros » est remplacée par la somme : « 5 000 euros ».

II. A la fin de la première phrase de l’article L. 5429-1 du code du travail, la somme : « 4 000 euros » est remplacée par la somme : « 5 000 euros ».

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