Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF
Retour vers le dossier législatif


N
° 1471

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 février 2009.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR :

- LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Bénin relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement,

- LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Congo relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement,

et

- LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation de l’accord relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal et de son avenant,

par M. Michel TERROT,

Député

Voir les numéros :

Sénat : 464 (2007-2008), 129 et T.A. 24 (2008-2009) ; 465 (2007-2008), 129 et T.A. 25 (2008-2009) ; 68, 129 et T.A. 26 (2008-2009).

Assemblée nationale : 1326, 1327, 1328

INTRODUCTION 5

I – LA PROBLÉMATIQUE INTERNATIONALE DES MIGRATIONS ET DU DÉVELOPPEMENT 7

A – ACTUALITÉ INTERNATIONALE DU FAIT MIGRATOIRE 7

B – LE NOUVEAU REGARD SUR LES MIGRATIONS : L’ÉMERGENCE DE L’ARTICULATION MIGRATION - DÉVELOPPEMENT 8

C – SE TRADUIT DANS DE NOUVELLES ORIENTATIONS POLITIQUES 11

D - LA DÉMARCHE EUROPÉENNE : VERS LE PACTE EUROPÉEN DE L’IMMIGRATION ET DE L’ASILE. 13

II – LA POLITIQUE MIGRATOIRE DE LA FRANCE S’INSCRIT DANS CE CONTEXTE INTERNATIONAL 17

A – RAPPEL HISTORIQUE SUR QUELQUES PRÉMICES 17

B – L’ARTICULATION MIGRATION - CODÉVELOPPEMENT DANS L’ÉVOLUTION RÉCENTE DE LA LÉGISLATION 18

C – LES ACCORDS DE GESTION CONCERTÉE 22

III – LES ACCORDS SIGNÉS AVEC LE BÉNIN, LE CONGO ET LE SÉNÉGAL 25

A – LE PROFIL MIGRATOIRE DES TROIS PAYS : DONNÉES STATISTIQUES ET SOCIOLOGIQUES 25

1) Le Bénin 25

2) Le Congo 25

3) Le Sénégal 26

B – LES RÉGLEMENTATIONS PARTICULIÈRES ACTUELLEMENT EN VIGUEUR 27

1) La convention de 1992 avec le Bénin 27

2) La convention de 1993 avec le Congo 27

3) Les accords avec le Sénégal 27

C – LE CONTENU DES ACCORDS 29

1) L’architecture générale des accords 29

2) Les approches 29

3) La circulation des personnes 30

4) Le traitement de l’immigration irrégulière 31

5) Le codéveloppement et l’aide au développement 32

6) Tirer les conséquences de cette nouvelle approche liant migrations et développement 33

CONCLUSION 35

EXAMEN EN COMMISSION 37

Mesdames, Messieurs,

Le gouvernement a conclu ces derniers mois avec les gouvernements des républiques du Bénin, du Congo et du Sénégal des accords relatifs « à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement » que la commission des affaires étrangères a estimé opportun d’examiner simultanément compte tenu de l’identité d’objet de ces conventions.

Votre rapporteur présentera par conséquent un rapport commun aux trois projets de loi déposés par le gouvernement.

Le Sénat, auquel le gouvernement a confié l’examen de ces textes avant l’Assemblée nationale, a procédé de même, incluant dans son analyse un quatrième projet portant sur un accord similaire, conclu avec la Tunisie. La commission des affaires étrangères a toutefois préféré examiner ce dernier texte séparément, considérant les différences de situation entre un pays du Maghreb et d’autres, d’Afrique subsaharienne.

Ces accords font suite à celui signé avec le Gabon, ratifié au printemps 2008 et en annoncent d’autres, qui ont été conclus entre novembre 2008 et janvier 2009 avec le Cap-vert, l’Île Maurice et le Burkina Faso. D’autres sont actuellement en cours de négociation, qui devraient être finalisés prochainement, notamment avec le Cameroun et peut-être dans un proche avenir, avec le Mali.

Ils traduisent donc l’orientation résolue de la politique française en la matière et sa continuité. En ce qu’elle se rattache aux grandes tendances internationales actuelles, votre rapporteur considère utile, avant de vous présenter son analyse du contenu des accords, de vous donner en premier lieu un certain nombre d’éléments de contexte.

En effet, la question de l’articulation entre immigration et développement est de celles qui se sont imposées avec le plus de force au cours de ces dernières années. Cette approche liée est maintenant commune aux organismes internationaux et sert désormais de fil conducteur à la réflexion et aux politiques nationales ou régionales mises en œuvre en matière de maîtrise des flux migratoires.

Il est utile d’en rappeler les tenants et aboutissants pour resituer dans son contexte la politique migratoire française avant d’étudier les dispositifs négociés par le gouvernement avec ses partenaires africains.

I – LA PROBLÉMATIQUE INTERNATIONALE DES MIGRATIONS ET DU DÉVELOPPEMENT

A – Actualité internationale du fait migratoire

Quelques données simples aident à cerner l’ampleur du phénomène migratoire : selon les estimations de l’Office international des migrations, l’OIM (1), plus de 200 millions de personnes, soit 3 % de la population mondiale, sont aujourd’hui des migrants, dont 10 à 15 % sont en situation illégale. Le nombre des migrants a doublé en 20 ans et ils sont pour l’essentiel originaires d’Asie, principalement de Chine et d’Inde. Parmi les tendances mondiales fortes constatées sur une longue durée, l’OIM souligne que la proportion de certaines populations de migrants décroît : c’est le cas des Africains, dont la part est passée de 12 % des migrants en 1970 à 9 % en 2000 et surtout des Asiatiques, qui représentaient plus du tiers des migrants en 1970 contre un quart aujourd’hui (2). L’immigration latino américaine tend en revanche à augmenter.

Si de nombreuses motivations peuvent intervenir dans la décision d’émigrer, c’est l’écart socio-économique croissant entre les pays qui explique l’ampleur du phénomène migratoire. Selon un rapport de l’OIT (3), sur une population mondiale de 6,7 milliards d’individus en 2006, la main-d’œuvre est de quelque 2,9 milliards de personnes, dont 1,37 milliard sont des travailleurs pauvres.

Comme le rappelait il y a quelques mois notre collègue Patrick Balkany dans son rapport sur l’accord de gestion des flux migratoires signé avec le Gabon, les pays de l’OCDE accueillent la moitié des migrants, dont 60 % sont originaires d’un pays en développement et 40 % d’un autre pays de l’OCDE. En 2006, 60 % des flux à destination des pays européens de l’OCDE étaient originaires d’Europe, laquelle est aussi destinataire de 85 % des mouvements migratoires en provenance d’Afrique du nord. En revanche, près de 60 % des flux en provenance d’Afrique subsaharienne se tournent vers des pays non européens de l’OCDE (4).

Ces migrations ne se traduisent pas uniquement par des flux du sud vers le nord mais aussi du sud vers le sud. La réalité de l’immigration a considérablement changé ces dernières années, et de nombreux pays d’Europe du sud mais aussi d’Afrique, naguère terres d’émigration, sont devenus pays d’accueil ou de transit, comme le sont aussi les pays émergents. C’est tout particulièrement le cas des « migrants africains qui se rendent principalement vers d'autres pays africains, l'Afrique australe, le Maghreb et l'Afrique de l'Ouest constituant les sous-régions les plus affectées par la mobilité de la main-d'oeuvre en Afrique » (5). Les migrations au départ de l’Afrique subsaharienne sont essentiellement intra-régionales (6)et, volontaires ou forcées, touchent plus de 16 millions de personnes. Si elles restent donc encore relativement marginales à l’échelle globale, certains pôles migratoires sont d’ampleur mondiale, dans la mesure où, parmi les 20 premiers pays accueillants, trois sont africains : l’Ouganda, la Côte d’Ivoire et l’Afrique du sud (7).

Cela étant, ce ne sont pas seulement les migrations qui ont changé, mais aussi le regard porté sur elles, tant de la part des pays de départ que des pays de destination, à mesure que le potentiel des migrants était de plus en plus pris en compte, de telle manière que, comme l’a souligné l’OCDE dans ses « Perspectives des migrations internationales » (8), l’immigration apparaît de plus en plus comme un élément clé des relations internationales. Mieux, selon l’OIM, migration et développement sont « des processus inséparables et interdépendants qui s’inscrivent dans un contexte mondialisé. (9) »

B – Le nouveau regard sur les migrations : l’émergence de l’articulation migration - développement

Au long de ces dernières décennies, l’immigration a surtout été perçue, du point de vue des pays accueillants, comme une source de tensions économiques et sociales, et c’est essentiellement sur cet aspect qu’ont tourné les axes principaux des politiques publiques mises en œuvre : renforcement des politiques de sécurité et de contrôles aux frontières et maîtrise des flux migratoires.

L’idée que les migrations internationales contribuent au développement, non seulement des pays développés mais aussi des pays en développement est donc relativement nouvelle. Elle n’en est pas moins désormais partagée par tous et cette approche apparaît désormais comme le prisme au travers duquel doit s’analyser la problématique des migrations.

En mai 2006, en ouverture de son rapport « Migrations internationales et développement » (10), qui allait contribuer aux débats du « Dialogue de haut niveau sur les migrations internationales et le développement » qui se tiendrait au mois de septembre suivant, Kofi Annan pouvait ainsi rappeler que les initiatives gouvernementales étaient de plus en plus nombreuses à réfléchir sur cette relation. Le Secrétaire général de l’ONU citait le document de la Commission mondiale sur les migrations internationales (11)qui mettait notamment l’accent sur la question de l’optimisation des transferts de fonds, sur les travaux du « Groupe spécial d’États sur les migrations », ou encore ceux de l’Organisation internationale du Travail (OIT). Il saluait l’importance de la réflexion en cours et le consensus qui commençait de se forger autour de l’idée selon laquelle les pays pouvaient coopérer afin de concrétiser les synergies possibles entre migrations et développement et rendre la situation avantageuse et profitable à la fois pour les migrants, leurs pays d’origine et les sociétés qui les accueillent.

Autant que les migrations à proprement parler, la prise de conscience du montant annuel des transferts financiers des migrants et du potentiel que leur utilisation en faveur du développement représente est à la base de ce changement essentiel de perspective : selon les estimations de la Banque mondiale, citées par l’OIM, les rapatriements de fonds effectués par les migrants ont dépassé en 2007 le chiffre de 337 milliards de dollars US, dont plus de 250 sont allés aux pays en développement. A titre de comparaison, le montant global de l’aide publique au développement a été de 104 milliards de dollars pour cette même année.

Les débats de ces dernières années et les pistes de réflexion qui ont été explorées sur la collaboration entre pays du nord et du sud ont donc été nourris tant de l’intérêt désormais porté aux flux monétaires qui y sont liés que de l’aspect humain du fait migratoire.

Le rapport déjà cité de Kofi Annan invite en effet les États Membres à « mettre au point une stratégie articulée autour du co-développement » pour atteindre ensemble les objectifs qu’ils partagent relatifs aux migrations et notamment « améliorer les retombées des migrations internationales pour le développement ; veiller à ce que les migrations empruntent essentiellement des voies légales ; assurer la protection des droits des migrants ; éviter l’exploitation des migrants, en particulier ceux qui sont en situation de vulnérabilité ; lutter contre les infractions que constituent le trafic illicite de migrants et la traite de personnes. » (12)

Les débats des 132 pays qui ont participé au « Dialogue de haut niveau sur les migrations internationales et le développement » ont confirmé trois axes de réflexion :

1. l’importance croissante des migrations internationales et leur contribution possible au développement des pays d’origine et d’accueil moyennant des politiques d’accompagnement appropriées

2. le caractère essentiel du respect des droits et libertés fondamentaux des migrants

3. l’importance de l’intensification de la coopération internationale dans ce domaine.

Indépendamment du travail des organismes que le secrétaire général des Nations Unies rappelait, cette première réunion, tenue sous l’égide de l’ONU, a été suivie de nombreuses autres qui, toutes, ont prolongé la démarche. Le gouvernement belge a ainsi lancé un processus en vue de la création d’un « Forum mondial sur la migration et le développement » qui a réuni pour la première fois à Bruxelles en 2007 les représentants de 156 pays. Les Philippines ont accueilli la deuxième édition en octobre 2008. La Grèce sera l’hôte de la réunion de 2009 et l’Argentine s’est offerte pour recevoir le Forum de 2010. En d’autres termes, un processus de dialogue et de coopération s’est institutionnalisé au niveau mondial, qui associe pays en développement et pays développés, gouvernements et sociétés civiles, et œuvre à la promotion de politiques cohérentes et à la coordination de positions sur les différentes questions qui lient migrations internationales et développement et qui figurent désormais à l’agenda de l’Assemblée générale des Nations Unies (13).

Au sein de l’ONU et des organisations associées, plusieurs programmes et fonds spécialisés contribuent depuis lors, chacun dans son rôle, à la réflexion : La CNUCED, le PNUD, l’UNICEF, le HCR, ainsi que les Fonds des Nations Unis pour l’enfance, pour la population. Les institutions spécialisées, telles que l’UNESCO, l’OIM, la Banque mondiale, le Groupe mondial sur la migration, etc. y sont également parties prenantes.

C – Se traduit dans de nouvelles orientations politiques

Cette réflexion d’ensemble se concrétise peu à peu par l’élaboration de cadres de coopération intergouvernementaux en matière de migrations internationales notamment au niveau régional, auxquels s’ajoutent des espaces de consultation plus informels.

La problématique est également débattue dans le cadre de processus d’intégration régionale en cours. Le groupe des pays ACP a ainsi adopté en 2006 une Déclaration et un plan d’action sur les questions d’asile de migration et de mobilité. Une « Facilité ACP pour la migration » a été créée, abondée par le IXème FED, pour notamment renforcer les capacités institutionnelles régionales et nationales en la matière, tandis que, aux termes d’une résolution des ministres chargés des questions de migration adoptée en mai 2008, l’accent entre migration et développement était réaffirmé.

Au niveau africain, un cadre stratégique pour une politique de la migration a été approuvé par l’Union africaine, visant à l’intégration des politiques de migration et de développement dans les stratégies de réduction de la pauvreté et à maximiser la mobilisation des fonds des migrants. Pour leur part, les Etats membres de la CEDEAO ont décidé en janvier 2008 d’une approche commune.

Enfin, tant la Ligue des Etats arabes que l’ASEAN ou l’Amérique latine développent également, chacune pour ce qui la concerne, une réflexion comparable se traduisant par l’élaboration de résolutions régionales en matière de migration et de développement.

En complément de ces coopérations régionales, selon le dernier rapport du secrétaire général de l’ONU, ce sont aujourd’hui 13 processus de consultation régionale, voire sous-régionale, qui sont également en cours et couvrent la plupart des pays du monde (14). Existent ainsi un « Dialogue sur les migrations pour l’Afrique australe », un autre pour l’Afrique de l’Ouest, le « Dialogue 5 + 5 » entre l’Europe et l’Afrique du nord, les Processus de Colombo (Asie), de Lima (Amérique latine et caraïbes), ou encore de Puebla (Amérique centrale), ou sur des aspects plus spécifiques, ceux de Bali (traites des migrants) et de Budapest (contrôle des flux migratoires).

Le consensus est donc aujourd’hui large sur le fait que les questions migratoires doivent être intégrées dans les politiques de développement, et la communauté internationale a répondu à l’attente de Kofi Annan qui souhaitait qu’à l’échelon international surgissent des initiatives originales pour la promotion des bienfaits des migrations internationales.

Cela étant, si la relation entre migrations et développement est vue comme fondamentale (15), si le regard sur les migrations internationales privilégie aujourd’hui leur effet potentiellement moteur sur le développement et la croissance des pays d’origine et d’accueil concernés, ce n’est pas sans que certaines conditions soient mises en avant et considérées comme indispensables au succès de cet apport, sur lesquelles les politiques de coopération devront précisément porter. En d’autres termes, si migration et développement peuvent aller de pair, cette articulation, pour être positive, doit être régulée (16).

A cet égard, les questions de fuites des cerveaux ou d’émigration excessive, apparaissent prioritaires du point de vue des pays en développement. C’est notamment le cas des professionnels du secteur santé en Afrique (17), compte tenu des besoins pour faire face à l’épidémie de VIH/SIDA. D’une manière plus générale, l’exode de professionnels bien formés à une incidence forte sur les possibilités de développement économique et industriel, voire politique, des pays d’origine. L’Afrique ne compte aujourd’hui que 20 000 scientifiques et ingénieurs sur une population totale de quelque 600 millions d’habitants. Le gaspillage des compétences dans les pays d’origine, qui sous-utilisent leur main-d’œuvre qualifiée, est un phénomène connexe.

De multiples études montrent également que les transferts de fonds des migrants sont l’apport le plus tangible des migrations voire, compte tenu des sommes en jeu, celui dont les effets de leviers peuvent être les plus déterminants. Encore faut-il que les mécanismes soient facilités, moins coûteux et, dans la mesure du possible, contribuent à l’orientation des fonds envoyés non seulement vers les dépenses de consommation courante des communautés des pays d’origine, mais aussi vers l’investissement productif, garant du développement économique.

C’est, entre autres, par des politiques de développement globales, cohérentes et coordonnées, tant au niveau multilatéral que bilatéral, moyennant la négociation de partenariats effectifs de coopération entre pays d’origine et de destination, prenant en compte les divers aspects de ces questions, que les bénéfices potentiels des migrations en faveur du développement pourront être mis à profit.

La question migratoire et son articulation avec celle du développement fait par conséquent l’objet, comme votre rapporteur croit l’avoir montré, d’une réflexion politique de fond menée au niveau international, mais c’est sans doute au niveau européen que cette démarche est aujourd’hui la plus aboutie.

D - La démarche européenne : vers le Pacte européen de l’immigration et de l’asile.

La question d’une politique de l’immigration commune aux vingt-sept pays de l’Union européenne et, partant, d’une approche commune, a fait l’objet de débats importants depuis le Conseil européen de Tampere qui l’a lancée en octobre 1999. Comme notre collègue Thierry Mariani (18)a eu l’occasion de le souligner, cette question, évoquée dans le traité de Maastricht comme étant d’intérêt commun, est devenue au fil du temps prioritaire et a évolué considérablement.

Au fur et à mesure de ses réflexions, la Commission européenne a été amenée à étoffer progressivement ses propositions : aux trois secteurs retenus initialement comme participant à la constitution d’un espace de liberté, de sécurité et de justice – la lutte contre l’immigration clandestine, l’élaboration d’une politique commune en matière d’asile et le traitement équitable des ressortissants des pays tiers en situation régulière – se sont ensuite ajoutés des volets tendant à favoriser l’entrée des travailleurs qualifiés et à améliorer la politique européenne d’aide au retour.

Par la suite, « l’Approche globale sur la question des migrations », adoptée par le Conseil européen de Bruxelles en décembre 2005, prétendait mettre en œuvre une action globale et cohérente, axée sur la coopération avec les pays et les organisations régionales tiers dans un certain nombre de domaines connexes : immigration légale et clandestine ; développement ; protection des réfugiés ; traite des êtres humains. Il s’agissait également de travailler à la coordination des politiques en matière de relations extérieures, de développement, d’emploi, de justice et d’affaires intérieures. En d’autres termes, cette orientation appelait tout à la fois à un renforcement de la coopération entre les pays membres et à un dialogue de l'Union avec l'Afrique et les pays du bassin méditerranéen.

Le sommet de Lisbonne, qui réunit les 27 pays de l’Union européenne et les 53 pays africains, tenu en décembre 2007, s’était fixé des objectifs dans cette tonalité et avait notamment approuvé le « Partenariat Afrique – UE » qui définissait un certain nombre de programmes d’actions prioritaires touchant aux différents thèmes d’intérêt communs. Partant du constat que les migrations sont intimement liées à l'histoire du développement humain « et devraient être traitées comme des phénomènes largement positifs », l'Afrique et l'Union européenne s’engagent à poursuivre la mise en oeuvre de politiques et de programmes « qui tiennent compte de toutes les dimensions pertinentes des migrations », pour « mieux gérer les migrations et la mobilité légales, en vue de soutenir le développement socio-économique des pays d'origine et des pays de destination ». En complément, les liens entre migration et développement seront promus, et la participation des migrants au développement de leur pays d’origine sera optimisée, notamment à travers l’amélioration des mécanismes d’envoi de fonds et la participation des diasporas. Enfin, le principe du renforcement de la coopération entre l'Afrique et l'Union européenne est réaffirmé pour faire « face ensemble aux effets indésirables des migrations » que ce soit par une lutte conjointe et coordonnée dans ses divers aspects contre l'immigration illégale, ou l’attention portée à la fuite des cerveaux dans des secteurs sensibles, comme la santé et l'éducation.

Par conséquent, la question des migrations, de la mobilité et de l’emploi apparaissait non seulement essentielle mais abordée sous l’angle de la gestion des flux migratoires, articulée avec les stratégies nationales de développement et de codéveloppement des pays africains (19). Les actions prioritaires du programme d’action 2008-2010, défini en marge du Partenariat, consistaient entre autres en la mise en œuvre de la Déclaration de la Conférence ministérielle de Tripoli sur les migrations et le développement. Cette déclaration prolongeait le plan d’action défini un an auparavant lors de la première conférence tenue à Rabat (20), afin de renforcer les synergies potentielles entre migrations et développement, d’améliorer la coopération dans les domaines de la lutte contre l’immigration illégale et de la gestion des migrations. L’accent était notamment mis sur l’adéquation des profil migratoires aux besoins des marchés, sur le risque de fuite des cerveaux, ou encore sur la nécessité de « promouvoir des programmes régionaux pour intensifier la coopération entre les pays d’origine, de transit et de destination concernant les migrations et le développement le long des routes migratoires (21) ».

En d’autres termes, le Pacte européen sur l’immigration et l’asile, adopté en octobre 2008, durant la présidence française de l’Union européenne, sur la base de cet objectif, partagé par l’ensemble des Etats membres, de maîtrise et d’organisation des flux migratoires, n’a pas réellement innové. Il a surtout cherché à donner une nouvelle impulsion politique à un processus déjà bien lancé et objet d’un large consensus des deux côtés de la Méditerranée.

L’élaboration de ce pacte a néanmoins constitué l’une des priorités de la présidence française et en cela, elle mérite que votre rapporteur s’y arrête. Elle a représenté un axe majeur de l’activité du MIIIDS qui a mis en avant cinq principes dans les négociations avec ses partenaires : organisation de l’immigration légale et de l’immigration professionnelle ; meilleure protection des frontières extérieures de l’Union ; meilleure effectivité de l’éloignement des étrangers en situation irrégulière ; mise en œuvre d’un régime européen d’asile ; renforcement du co-développement et de l’aide au développement (22).

Le Pacte réaffirme fortement la nécessité d’une approche globale, à la fois entre les vingt-sept Etats membres et au plan thématique, dans la mesure où les différents aspects de la problématique sont étroitement liés. Il reprend l’ensemble des axes mis en avant par la présidence française. Pour ce qui intéresse plus particulièrement l’objet des accords de gestion concertée des flux migratoires et de codéveloppement, votre rapporteur voudrait souligner que le Pacte met l’accent sur les aspects suivants :

– la nécessité de mettre en œuvre des politiques d’immigration professionnelle qui tiennent compte des besoins du marché du travail des Etats membres ;

– la nécessité de réguler l’immigration familiale dans le respect de la convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

– la lutte contre l’immigration irrégulière ;

– la création d’un partenariat global avec les pays d’origine et de transit pour favoriser les synergies entre migrations et développement.

Concernant ce dernier point, le Pacte traduit la conviction du Conseil européen de la pertinence, dans l’intérêt de tous, d’une approche intégrale de la problématique, qui lie migration et développement. Sur cette base, non seulement les questions migratoires doivent « devenir une composante importante des relations extérieures des Etats membres et de l’Union », mais les synergies entre migrations et développement doivent faire l’objet de partenariats entre l’Union et les pays concernés. Pour ce faire, le Conseil identifie deux volets principaux, l’un centré sur l’immigration, l’autre sur le développement.

Dans le cadre du premier, il s’engage à « conclure au niveau communautaire ou à titre bilatéral, des accords avec les pays d’origine et de transit, comportant, de façon appropriée, des dispositions relatives aux possibilités de migration légale, adaptées à l’état du marché du travail des Etats membres, à la lutte contre l’immigration irrégulière et à la réadmission ainsi qu’au développement des pays d’origine et de transit », et à encourager une immigration légale « adaptée à l’état du marché du travail des Etats membres ».

Le volet « développement » est ensuite abordé sous un angle à la fois individuel et étatique : l’immigration légale doit tout d’abord permettre aux migrants d’acquérir une formation ou une expérience professionnelle et de se constituer une épargne qu’ils pourront mettre au service de leur pays. Ensuite, « dans le cadre des priorités sectorielles identifiées avec les pays partenaires », les Etats membres et la Commission sont invités à privilégier des projets de développement solidaire et à promouvoir des actions de codéveloppement associant les migrants au développement de leur pays. Il s’agit également de privilégier des formes de migration temporaire ou circulaire qui ne n’accentuent pas la fuite des cerveaux, de favoriser, connaissant ses volume et importance, le transfert de l’épargne des migrants vers leur pays, et de mettre en cohérence l’ensemble des questions migratoires et de développement afin qu’elles profitent au mieux aux régions d’origine et contribuent pour leur part à la réalisation des OMD.

Enfin, votre rapporteur ne saurait clore ce développement sans mentionner la continuité de cette politique et rappeler qu’une deuxième conférence ministérielle euro-africaine sur la migration et le développement s'est réunie à Paris le 25 novembre 2008, dans les dernières semaines de la présidence française, au cours de laquelle un programme de coopération pluriannuel a été approuvé par les soixante pays et les vingt organisations internationales participantes. Ce programme, axé sur les trois volets de l'approche globale des migrations : la migration légale, la lutte contre la migration irrégulière et les synergies entre migrations et développement, inclut une série de mesures concrètes et opérationnelles, qui tendent à renforcer la coopération entre pays d'Europe et d'Afrique concernant la problématique.

* * * * *

La manière dont la politique de gestion des flux migratoires est abordée en France depuis ces dernières années, s’inscrit par conséquent dans une démarche et une réflexion internationales et européennes de longue haleine. Elle montre que les réponses qui y sont apportées ne diffèrent pas fondamentalement des solutions débattues et promues par l’ensemble des partenaires de notre pays, qu’ils soient du nord ou du sud. Il importe maintenant, avant d’analyser le détail des trois accords de gestion des flux migratoires et de développement solidaire, de s’attarder sur quelques-uns des aspects essentiels de la politique migratoire française.

II – LA POLITIQUE MIGRATOIRE DE LA FRANCE S’INSCRIT DANS CE CONTEXTE INTERNATIONAL

A – Rappel historique sur quelques prémices

Les questions qui sont ainsi débattues au niveau international et européen sont aussi celles dont la France se préoccupe depuis de nombreuses années. Les récents développements qu’a connus la question des migrations jusqu’à l’élaboration du Pacte européen ne sont que la dernière étape de réflexions bien antérieures.

Après que quelques pays européens eurent tenté des programmes d’aide au retour ou de réinsertion des immigrés, à la philosophie proche, tels l’Allemagne dès 1972 ou les Pays-Bas en 1975 (23), les premières mesures de soutien aux initiatives de développement en liaison avec la thématique migratoire furent mises en œuvre vers la fin des années 70. Un premier programme de réinsertion volontaire fut lancé en 1977 par le secrétaire d’Etat à l’immigration et au travail manuel, Lionel Stoleru, qui gratifiait d’un pécule les migrants désireux de retourner dans leur pays d’origine et porteur d’un projet économique.

Cette orientation a été poursuivie en France au début des années 80 puis à la fin des années 90 (24)avec des résultats généralement modestes, comme aura l’occasion de le remarquer le rapport de la Commission d'enquête du Sénat sur les régularisations d'étrangers en situation irrégulière (25) : faible nombre de postulants, de projets concrétisés, utilisation des sommes à d’autres fins que celles prévues, programmes de formation peu adaptés aux besoins (26), etc.

Cela étant, il n’est pas inutile surtout de souligner une véritable continuité politique au fil des années, dans la mesure où le propos, dès cette époque, est identique à celui qui sera défendu par la suite par les différents gouvernements successifs. Le délégué interministériel au codéveloppement et aux migrations internationales créé en 1998 aura pour fonctions « de proposer des orientations et des mesures visant au renforcement de la coopération de la France avec les pays d'émigration en vue de convenir avec eux, dans une perspective de codéveloppement, d'une meilleure maîtrise des flux migratoires. » (27)

Le rapport d’étape de M. Sami Naïr, en charge de la fonction, proposera entre autres pistes, la conclusion de conventions de codéveloppement entre la France et les pays partenaires, pour à la fois « soutenir les projets de développement impliquant des migrants », « faire des étudiants un vecteur du codéveloppement », « favoriser l’investissement productif de l’épargne des migrants », tout en considérant nécessaire de renforcer le caractère interministériel de la politique « migrations/codéveloppement ». Autant d’éléments, comme votre rapporteur vous le montrera plus loin, que les accords de gestion concertée des flux migratoires incluent aujourd’hui.

B – L’articulation migration - codéveloppement dans l’évolution récente de la législation

Ainsi que le rappelait notre collègue Thierry Mariani (28), la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité, à l’instar des précédentes adoptées depuis 30 ans, avait pour but d’améliorer la maîtrise des flux migratoires. Elle était essentiellement axée sur cet aspect, ce qui permettait à notre collègue de conclure que la France n’avait pas de véritable politique migratoire. Tout en soulignant le danger de cette lacune, il dénonçait l’inefficacité, voire « la faillite du système », notamment en regard de la question de l’immigration professionnelle : non seulement, à l’encontre du discours officiel, la France n’était pas fermée à l’immigration puisque quelque 160 000 premiers titres de séjour étaient délivrés chaque année, mais cette immigration non gérée pesait finalement sur la compétitivité de notre économie et avait des effets contreproductifs, voire pervers (29).

La loi du 24 juillet 2006, relative à l'immigration et à l'intégration (30), traduit un changement d’approche et parachève le dispositif. Comme l’exposait le ministre de l’intérieur de l’époque, Nicolas Sarkozy, il s’est agi de fonder une nouvelle politique, comparable à certaines expériences étrangères, reposant sur trois principes - l'immigration choisie, l’affirmation d’un lien entre immigration et intégration, et enfin le co-développement. L’articulation de ces principes devait permettre d’atteindre cinq objectifs complémentaires :

– la maîtrise quantitative de l’immigration en distinguant les grandes catégories de titres de séjour, par motifs : travail, études, séjour familial ;

– la redéfinition de l’immigration familiale en réformant tout d’abord les règles du rapprochement familial ;

– un meilleur accueil des étudiants, des talents, des actifs qui désirent venir en France ;

– l'intégration réussie des immigrés en définissant un vrai parcours d'intégration, de l'arrivée en France jusqu'à l'installation durable ;

– la maîtrise de l'immigration outre-mer.

En d’autres termes, la logique qui inspire cette réorientation de la législation et les éléments qui en constituent le dispositif sont similaires à ceux qui traversent les débats en cours. Leur proximité du Pacte européen mérite également d’être soulignée. Au sein de ces cinq objectifs, cela est particulièrement notable s’agissant des dispositifs prévus concernant le contrôle des flux migratoires ou le codéveloppement.

La question de la gestion des flux migratoires, en premier lieu, est abordée de plusieurs manières, vues comme complémentaires dans la perspective du respect des intérêts communs de la France et des pays d’origine : c’est le fondement de la création des différents types de cartes de séjour, « compétences et talents », saisonniers, salariés, etc., reposant sur le principe de l’organisation de la circulation des compétences. Les changements introduits dans l’immigration étudiante suivent cette orientation, notamment en ce qui concerne les possibilités offertes d’une première expérience professionnelle de quelques mois en France après l’obtention d’un diplôme du niveau d’un master, permettant de mieux préparer le retour au pays ultérieur.

C’est également le cas concernant le volet du codéveloppement puisque c’est cette même loi qui crée le « compte épargne codéveloppement ». En cela, la France fait une incursion remarquée vers les aspects les plus novateurs en matière de codéveloppement, qui vient compléter la réflexion que notre pays mène par ailleurs dans les cénacles internationaux sur la question des financements innovants pour l’aide au développement. Elle apparaît même comme pionnière dans la mise en œuvre des recommandations exprimées dans les forums internationaux, tel que le Dialogue précédemment mentionné, organisé sous l’égide de l’ONU en 2006 (31), dont les conclusions avaient mis en exergue les contributions potentielles au développement que pouvaient représenter les envois de fonds des migrants, quelques modalités qu’elles prennent. Il faut ainsi préciser que la France est le seul pays de l’Union européenne à avoir institué de tels dispositifs d’épargne. L’Allemagne, le Royaume Uni ou l’Espagne se sont pour l’instant limités à explorer le thème de la réduction des coûts de transferts.

Les dispositions de la loi du 24 juillet 2006 qui ont institué le compte épargne codéveloppement, ont été complétées par le livret d’épargne pour le codéveloppement, créé par la loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile. Les deux instruments financiers visent tous deux à inciter les migrants à orienter une partie de leurs transferts de fonds vers l’investissement dans leur pays d’origine.

Comme l’indiquait notre collègue Mme Henriette Martinez dans son avis budgétaire sur l’aide publique au développement publié en novembre dernier (32), « les projections indiquent que les immigrés installés sur notre territoire envoient, principalement vers l’Afrique du Nord ou sub-saharienne, environ 8000 M€ par an, soit l’équivalent de l’APD française. » On imagine par conséquent sans mal les effets de levier potentiels pour le développement si les mécanismes prévus réussissent à canaliser effectivement vers des projets d’investissement une partie des sommes transférées.

L’instauration de ces dispositifs, qui reprend des suggestions exprimées dans nombre de rapports publiés ces dernières années, doit donc être saluée : il y a dans ces initiatives et réflexions des mécanismes intéressants, qui participent très directement à l’évolution de la notion même de codéveloppement ou de développement solidaire et à sa traduction en réalités concrètes.

En l’espèce, le compte épargne codéveloppement doit recevoir l’épargne des ressortissants de pays appartenant à la ZSP, pour financer des opérations de développement économique. Il est prévu une incitation fiscale (déduction du revenu global à hauteur de 25 % des versements dans la limite de 20 000 € par personne), un plafond des dépôts de 50 000 € et une durée de vie du compte limitée à 6 ans. Le livret d’épargne pour le codéveloppement, qui complète le dispositif, prévoit une prime d’épargne pour les titulaires du livret qui contractent un prêt pour financer une opération d’investissement dans leur pays d’origine, à l’issue d’une phase d’épargne d’au moins trois ans.

Cela étant, votre rapporteur ne peut laisser passer l’occasion de relever que la commercialisation des produits d’épargne n’a pas encore commencé et que les dispositifs n’ont pas encore porté leurs fruits. Ces retards sont dommageables et conduisent à priver les actions de développement de ressources importantes. A cet égard, l’analyse que notre collègue Henriette Martinez en avait faite mérite qu’on s’y arrête. Il semble en effet fondé de soutenir que, pour intéressants qu’ils soient dans leur intention, ces mécanismes d’épargne sont sans doute mal adaptés aux réalités socio-économiques et culturelles africaines, aux pratiques des migrants vis-à-vis de leurs familles et à l’utilisation des sommes transférées qui, à hauteur de 75 ou 80 %, sont utilisées par les familles pour couvrir leurs dépenses de consommation courante, médicales et scolaires. Toutes les études montrent qu’à peine 5 % à 10 % des sommes transférées sont réellement consacrées à l’épargne ou à l’investissement dans des activités génératrices d’emplois ou de revenus.

En d’autres termes, les transferts, comme cela a souvent été souligné, contribuent actuellement bien plus à la réduction de la pauvreté qu’au développement à proprement parler. Par conséquent, réorienter vers le codéveloppement une partie substantielle des transferts suppose de proposer à la clientèle intéressée des produits suffisamment attractifs pour justifier un changement important des comportements.

Sans revenir sur l’analyse détaillée à laquelle notre collègue Henriette Martinez s’est livrée dans son avis budgétaire auquel votre rapporteur vous renvoie, l’étude de divers aménagements à apporter aux deux dispositifs devrait d’urgence être entreprise afin d’y introduire les correctifs nécessaires pour que ces modes de financement du codéveloppement soient enfin commercialisés avec quelque chance de succès et deviennent au plus tôt instruments effectifs du codéveloppement qu’ils prétendent être.

Il faut enfin signaler pour être exhaustif que, ultérieurement, la loi de juillet 2006 a été complétée par celle du 20 novembre 2007, présentée par le gouvernement après la création du MIIIDS, et relative à la maîtrise de l'immigration, à l'intégration et à l'asile. Sans qu’il soit nécessaire de trop s’attarder, votre rapporteur rappellera simplement que cette nouvelle réforme a cherché à prolonger les effets de la loi de 2006, notamment quant au rééquilibrage entre immigration professionnelle et familiale. Le dispositif de 2006 avait ouvert la porte à une immigration « choisie » ; celui de 2007 le complète en direction de la promotion d’une immigration qui réponde mieux aux besoins de notre pays, notamment en ce qui concerne les migrants hautement qualifiés, destinataires de la carte de séjour « compétences et talents » et bénéficiaires de conditions plus favorables quant aux conditions de regroupement familial, notamment. Enfin, comme votre rapporteur l’a signalé plus haut, cette loi n’a pas non plus omis de consacrer un volet au codéveloppement, dans la mesure où c’est elle qui a introduit le livret d’épargne pour le codéveloppement.

C – Les accords de gestion concertée

Enfin, la négociation d’accords de gestion concertée en matière de flux migratoires et de développement solidaire complète le dispositif institutionnel mis en place et consacre l’articulation des deux aspects de la problématique migratoire contemporaine.

Ces accords suivent très précisément les recommandations de l’ONU, dont le secrétaire général en 2006 invitait les pays d’origine et les pays d’accueil à mieux se coordonner et à renforcer la cohésion de leurs politiques de migration et de codéveloppement. Il appelait de ses vœux à une coopération entre les institutions en charge des stratégies de développement et celles en charge des questions migratoires, pour une meilleure synergie au service du développement.

De tels partenariats migration – développement ne sont pas encore très fréquents, que ce soit au niveau régional ou au niveau bilatéral. Jacques Barrot, vice-président de la commission européenne indiquait récemment (33)que l’Union européenne avait signé en juin 2008 un premier « Partenariat pour la mobilité en Afrique » avec le Cap-vert et qu’elle avait également lancé un « Centre d’information de gestion des migrations » (CIGEM) au Mali, pour l’aider à mieux gérer les questions migratoires dans le cadre d’un partenariat avec les pays voisins ainsi qu’avec l’Europe.

D’autres discussions de la Commission sont en cours avec la Moldavie, la Géorgie ou le Sénégal, mais d’une manière générale, cette approche de la gestion du fait migratoire, qui tend à articuler les questions de migrations et les engagements concrets en matière d’aide au développement, reste encore relativement modeste (34).

Elle devient en revanche un axe prioritaire de la politique du gouvernement français que le MIIIDS met en œuvre.

*****

Au terme de cette étude, avant d’examiner en détail le contenu des trois accords qui sont soumis à l’Assemblée nationale, il convient de souligner que notre pays apparaît comme particulièrement réformateur en matière de codéveloppement et prompt à expérimenter les pistes ouvertes au sein des forums internationaux et tout particulièrement celles ouvertes au sein de l’ONU depuis 2006 par Kofi Annan. Que ce soit au niveau national, bilatéral ou régional, elle a commencé d’explorer les différentes voies concordantes qui permettent de redessiner les contours de l’immigration internationale dans un sens qui conviennent aux différentes parties impliquées.

Les accords de gestion concertée des flux migratoires sont un des aspects les plus forts de cette politique.

III – LES ACCORDS SIGNÉS AVEC LE BÉNIN, LE CONGO ET LE SÉNÉGAL

Les accords soumis à l’examen de l’Assemblée nationale concernent trois pays d’Afrique subsaharienne dont les caractéristiques migratoires ne sont pas éloignées.

A – Le profil migratoire des trois pays : données statistiques et sociologiques

1) Le Bénin

Plus de 500 000 Béninois, sur une population totale de quelque 9 millions d'habitants, vivent à l'étranger, soit environ 6 % de la population. La France, avec une communauté de 7500 personnes, est la première destination européenne des ressortissants béninois devant l'Allemagne et l'Italie. Le Bénin n’arrive toutefois qu’au 43ème rang des pays d'origine des migrations à destination de notre pays et le flux annuel de migrants béninois connaît une baisse annuelle régulière : Il avoisinait en 2002 les 1 300 premiers titres délivrés ; il n’en a pas atteint 800 en 2007. Il s’agit d’une immigration essentiellement familiale ; l’immigration professionnelle, très modeste, connaît une baisse régulière depuis 2002.

De son côté, le Bénin accueille environ 175 000 migrants, principalement originaires des pays voisins : Nigeria, Togo, Niger, Côte d'Ivoire et Ghana.

2) Le Congo

Selon les données qui ont été communiquées à votre rapporteur, la République du Congo ne représente pas un pays de très forte pression migratoire pour la France. En 2007, elle occupait le 21ème rang parmi les pays d’origine des migrants en France. La communauté congolaise résidant dans notre pays a néanmoins augmenté sensiblement depuis 2003, passant d’un peu plus de 23 000 personnes à près de 27 000, soit une hausse de 14 % en 5 ans.

Pour près de 80 % des premiers titres délivrés, l’immigration congolaise reste encore une immigration d’origine familiale. Quelque 1405 titres sur 2 526 ont été délivrés à ce titre en 2007. Pour la catégorie « familles de Français », le Congo arrive au 14ème rang, toutes nationalités confondues. Il convient en contrepartie de relever l'extrême faiblesse du flux d'immigrés pour motifs professionnels qui ne représente que 1,7 % de l'ensemble (43 titres délivrés en 2007).

Pour le reste, la population des migrants congolais est constituée d’étudiants, pour quelque 16 % du flux annuel en 2007 (plus de 340 titres délivrés), d’étrangers malades et de demandeurs d'asile. Ces deux dernières catégories représentent respectivement environ 11 % des premiers titres délivrés en 2007. La catégorie « réfugiés, apatrides, demandeurs d'asile », qui représentait 18 % du nombre de titres délivrés connaît une baisse sensible depuis 2005.

3) Le Sénégal

L’importance de la communauté sénégalaise régulièrement établie sur le territoire français témoigne du fait que, traditionnellement, le Sénégal est un pays de forte émigration vers la France. Il s’agit de la 9ème communauté étrangère en ordre d’importance en France (35) et de la première en ce qui concerne les communautés d’Afrique subsaharienne. En augmentation régulière - de 14 % par rapport à 2002 - elle comptait plus de 50000 personnes en 2007, dont les 3/5èmes sont titulaires un titre de séjour d’une durée de validité supérieure à un an.

Le flux annuel d’immigrants s’est stabilisé autour de 4000 premiers titres délivrés en 2006 et 2007, plaçant le Sénégal au 8ème rang des pays d’émigration vers la France après l’Algérie, le Maroc, la Chine, la Tunisie, la Turquie, les Etats-Unis et le Cameroun.

En termes de répartition par catégories, le flux annuel se compose pour moitié d’une immigration familiale (plus de 2000 premiers titres délivrés en 2007), de la venue d’un nombre important d’étudiants et de stagiaires (1 500 en 2007) ; en revanche, comme dans le cas du Congo, l’immigration professionnelle reste marginale.

*****

En d’autres termes, les profils migratoires des trois pays concernés montrent globalement que l’immigration familiale est très nettement dominante et que l’immigration professionnelle est faible voire marginale. Ces données confirment la logique de l’ambition de réorienter la politique migratoire de la France affirmée ces dernières années qui, précisément, prétend renverser la tendance au profit des migrations professionnelles pour arriver à un rééquilibrage entre les deux catégories d’immigration.

On doit rappeler à cet égard que la loi de 2006, pour ce qui concerne les pays de la zone de solidarité prioritaire, ZSP, n’entre que très progressivement en vigueur, à mesure que se négocient les accords de gestion concertée des flux migratoires, dont seul, aujourd’hui, celui avec le Gabon a été ratifié. Cela explique ces données qui devraient logiquement évoluer, une fois le rythme de croisière atteint et se traduire par conséquent par le rééquilibrage souhaité en faveur de cette immigration, tandis que devrait diminuer d’autant l’immigration familiale.

B – Les réglementations particulières actuellement en vigueur

Les trois accords dont il s’agit sont destinés à se substituer à des conventions actuellement en vigueur sur lesquelles votre rapporteur juge utile de vous apporter quelques informations, dans la mesure où elles confirment le changement d’approche intervenu ces dernières années.

1) La convention de 1992 avec le Bénin

Les questions migratoires entre la France et le Bénin sont actuellement réglées par une convention « relative à la circulation et au séjour des personnes » signée le 21 décembre 1992 à Cotonou, publiée par décret le 3 novembre 1994. Elle a abrogé et remplacé un précédent accord de 1975 entre la France et le Dahomey.

A l’instar des accords conclus à cette époque, cette convention ne porte que sur les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de chacune des parties signataires dans l’autre et, consécutivement, sur les catégories de requérants, sur les visas qui peuvent être délivrés selon les durées de séjour envisagées et les motifs de l’immigration.

Aucune mention de quelque nature que ce soit ne fait référence à une conception de l’immigration en relation avec le développement.

2) La convention de 1993 avec le Congo

Les relations entre la France et la république du Congo sont réglées par la convention « relative à la circulation et au séjour des personnes » signée à Brazzaville le 31 juillet 1993. Elle est entrée en vigueur le 1er octobre 1996 et a remplacé une convention franco-congolaise de 1974, amendée en 1978 et 1979.

Ses dispositions sont identiques à la convention avec le Bénin et n’appellent pas de commentaire supplémentaire.

3) Les accords avec le Sénégal

Il en est exactement de même de la convention de Dakar signée le 1er août 1995. Toutefois, votre rapporteur doit signaler qu’en complément de cet accord classique étaient intervenu à partir de 2000 plusieurs textes montrant une évolution dans l’approche de la question migratoire entre ces deux pays. Une première convention de codéveloppement avait ainsi été signée avec le Sénégal le 25 mai 2000, suivie peu après, en 2001, d’un accord spécifique relatifs aux échanges de jeunes professionnels.

La convention de codéveloppement du 25 mai 2000 est intéressante en ce sens qu’elle marquait le premier pas de la France avec le Sénégal en direction de la politique de gestion concertée des flux migratoires dans la mesure où elle définissait « en commun les politiques spécifiques de développement, liées aux flux migratoires, visant à : Favoriser la mobilisation des migrants installés en France pour le développement de leur pays d'origine ; Organiser la mobilité des personnes, notamment pour répondre aux besoins de formation du Sénégal, dans le cadre des programmes de codéveloppement. » (36)

Elle l’est également dans ses modalités de mise en œuvre, et sa logique.

Des partenariats, associant le secteur privé, les associations de migrants actives au Sénégal, les collectivités territoriales impliquées dans la coopération décentralisée, sont prévus pour se mobiliser dans le cadre de comités régionaux de développement. Un comité mixte pour le codéveloppement et les migrations était mis en place pour assurer le suivi et l’évaluation de programmes pluriannuels de codéveloppement qu’il définissait dans le champ établi par la convention, et notamment : Appui au développement local et régional, pour contribuer à développer un tissu productif capable de générer les richesses et emplois permettant de stabiliser les populations et de pérenniser le développement des régions de fortes émigrations ; Action des migrants pour l'amélioration des équipements dans leurs villages ou communes ; Aide aux projets individuels des migrants ; Appui au développement du système productif ; Amélioration des instruments financiers et mobilisation de l'épargne des migrants.

La maîtrise commune des flux migratoires constituait le second volet de la convention et s’articulait autour de mesures conjointes facilitant la réinstallation de migrants et le renforcement de la coopération entre les services concernés dans les deux pays pour la prévention de l'émigration illégale, l'action contre l'immigration irrégulière et l'organisation de la mobilité contrôlée.

La convention de 2001 mérite tout autant l’attention, en ce qu’elle rejoint certains des dispositifs des accords de gestion concertée en organisant l’échange, contingenté et temporaire, de jeunes professionnels entre les deux pays.

Le rappel de ces conventions permet à votre rapporteur de souligner une nouvelle fois la grande continuité au fil des ans de la politique française d’immigration dans ses divers aspects.

C – Le contenu des accords

1) L’architecture générale des accords

L’architecture des trois accords est très proche et l’on ne note pas non plus de profondes différences quant au fond, dans la mesure où ils déclinent chacun trois aspects complémentaires : le volet de l’organisation de l’immigration légale ; celui de la lutte contre l’immigration irrégulière et enfin celui du codéveloppement ou développement solidaire. Tous les trois abordent également les questions de gestion et de suivi bilatéral.

Formellement, la différence la plus importante se trouve dans l’accord avec le Sénégal, qui a souhaité qu’un avenant soit apporté au texte signé en 2006. Cet avenant est venu compléter l’accord initial sur la plupart des éléments du dispositif. Sa négociation aura retardé de deux ans la mise en application de ce texte, qui est en fait le premier à avoir été conclu. Il convient à ce sujet de préciser que l’accord initial comportait l’engagement des deux Parties à accepter et à organiser conjointement la réadmission de leurs ressortissants en situation irrégulière sur le territoire de l’autre Partie, engagement sur lequel les autorités sénégalaises se sont finalement montrées réticentes, dans la mesure où le processus prévu était sans contrepartie. Les négociations entre les deux pays ont ensuite repris pour aboutir à la conclusion d’un avenant, signé le 25 février 2008, modifiant et complétant substantiellement l’accord du 23 septembre 2006 par des dispositions qui en assurent l’équilibre global.

Cette remarque amène votre rapporteur à faire un aparté pour préciser l’état des processus respectifs de ratification dans chacun des pays : l’accord avec le Congo a été ratifié par les deux chambres du parlement en avril 2008, celui avec le Sénégal a été adopté dans les deux chambres entre août et septembre dernier. Au Bénin, en revanche, la situation politique reste relativement tendue et une situation de paralysie institutionnelle a empêché que l’Assemblée nationale béninoise étudie le projet. En l’absence de ratification, le droit en vigueur est maintenu.

2) Les approches

Que ce soit au niveau des considérants ou des dispositions générales, les différents accords mettent tous en avant les objectifs des Parties signataires. Tous n’expriment pas les mêmes préoccupations avec une même force.

Le préambule de l’accord avec le Sénégal, met d’entrée en avant la lutte contre l’immigration clandestine en posant que si « les flux migratoires ont toujours été un moteur de l’histoire », les deux gouvernements sont « préoccupés par l’ampleur sans précédent des flux de migrants clandestins entre l’Afrique et l’Europe » et considèrent « les conséquences dramatiques de la migration clandestine tant sur les migrants et leurs familles que sur les relations entre Etats ».

Si la préoccupation de la lutte contre l’immigration clandestine n’est certes pas absente de l’accord avec le Congo, comme de celui avec le Bénin, l’approche paraît néanmoins plus sereine à cet égard et semble privilégier une vision des flux migratoires positive en terme de perspectives de développement réciproque des pays.

Le souci de l’enrichissement du pays d’origine via les transferts de fonds des migrants est annoncé dès les considérants tout comme celui de la perte de ressources.

3) La circulation des personnes

En matière de circulation, les trois accords détaillent les dispositions relatives aux différentes catégories de visas et de personnes admises au séjour.

Sont successivement abordés la politique de facilitation des visas de circulation, c'est-à-dire de courts séjours à entrées multiples, qui permettent des séjours de trois mois au maximum par semestre pour une durée de un à cinq ans, pour trois catégories de bénéficiaires : hommes d’affaires, universitaires, sportifs, etc., membres des familles de ressortissants résidant sur le territoire et, enfin, personnes nécessitant des soins médicaux en France. L’accord avec le Congo mentionne également que les titulaires de passeports diplomatiques sont dispensés de visas pour une durée de deux à dater de l’entrée en vigueur de l’accord.

En ce qui concerne les séjours de longue durée, les accords distinguent entre la qualité des demandeurs.

Ce sont en premier lieu les étudiants qui sont concernés et la logique des dispositifs est de valoriser leur séjour en France dans une perspective de développement de leurs pays d’origine. Un « Espace Campus France » est créé dans le cadre des accords avec le Bénin et le Congo pour informer les établissements supérieurs français des besoins de formation exprimés par ces pays. L’information des intéressés est également prévue dans le cadre de l’accord avec le Sénégal, via le « Centre pour les études en France » de Dakar, dont le fonctionnement doit être amélioré pour mieux répondre aux besoins des étudiants sénégalais et à leurs attentes. De même, l’accord avec le Sénégal prévoit-il, au sein de l’observatoire général des flux migratoires, une « section technique sur l’enseignement supérieur », paritaire, dont la mission portera notamment sur une réflexion sur l’évolution du système universitaire public.

Dans chacun des accords des mécanismes sont prévus tendant à la possibilité d’une première expérience professionnelle en France pour les étudiants titulaires d’un diplôme de niveau master, qui pourront bénéficier d’une autorisation provisoire de séjour de six mois. Au terme de cette période, s’ils sont titulaires d’un emploi ou d’une promesse d’embauche, ils seront autorisés à séjourner en France sans considération de la situation de l’emploi.

La seconde catégorie concernée par les visas de longue durée est celle des immigrés pour motifs professionnels, pour laquelle les accords, pour l’essentiel, mettent en œuvre les dispositions de la loi de 2006 qui renvoie expressément, comme votre rapporteur vous l’a signalé, à la signature d’accords bilatéraux, en ce qui concerne l’octroi des cartes de séjour « compétences et talents » aux ressortissants de pays appartenant à la zone de solidarité prioritaire. Un nombre maximum de ces 150 cartes est prévu dans les accords avec le Congo et le Bénin.

Pour le reste, sauf avec le Sénégal, les accords prévoient également les dispositions concernant les jeunes professionnels, également accueillis en nombre limité (37), pour des durées brèves, de six à dix-huit mois.

Les accords organisent enfin la délivrance des cartes de séjour temporaire qui concernent soit les travailleurs saisonniers, soit les salariés en mission, soit un certain nombre de métiers, précisément énumérés dans chacun des accords ou leurs annexes. Sur cet aspect de la question, des échanges d’information sont prévus entre les pays sur les métiers qui connaissent des difficultés durables de recrutement et qui rendent précisément intéressant l’embauche de travailleurs étrangers.

L’analyse des listes de métiers est intéressante dans la mesure où, il convient de le reconnaître, elle semble parfois en contradiction avec l’objectif affirmé d’une immigration choisie, autour de métiers qualifiés pour lesquels le marché du travail français aurait des difficultés de recrutement. En effet, la liste des métiers ouverts aux ressortissants sénégalais par exemple, qui figure en annexe de l’avenant de l’accord, en comporte plus d’une centaine dont un grand nombre sont des emplois non qualifiés. Cela n’est pas le cas des professions ouvertes aux ressortissants béninois ou congolais. En d’autres termes, aux côtés de l’immigration professionnelle qualifiée, une immigration non qualifiée continue semble-t-il d’être souhaitée et organisée.

4) Le traitement de l’immigration irrégulière

Le traitement de l’immigration irrégulière est naturellement l’un des autres points clé de ces accords et fait l’objet de longs développements. Les dispositifs sont souvent très proches si ce n’est identiques, en tout cas dans leur esprit pour organiser la réadmission des étrangers en situation irrégulière dans leur pays d’origine.

Le principe est affirmé d’une responsabilité partagée entre la France et le Bénin et le Congo en la matière et des mécanismes de coopération, de collaboration sont prévus, notamment en matière de réadmission des nationaux et d’identification de nationalité des personnes en situation irrégulière pour leur future réadmission.

Dans le même esprit, une coopération spécifique, via le FSP, est également prévue en matière de surveillance des frontières dans le cadre de l’accord avec le Sénégal en vue d’un partenariat entre les deux pays. Dans le cadre de l’accord avec le Bénin et le Congo, l’accent est également mis sur une coopération policière, par laquelle la France apporte son expertise en matière de gestion des flux migratoires sur les questions de démantèlement de filières de clandestins, de sécurisation de titres, de fraude documentaire ou de sécurisation aéroportuaire.

5) Le codéveloppement et l’aide au développement

Le dernier volet des accords, également fort détaillé dans chacun des cas, porte sur les questions de codéveloppement et d’aide au développement des pays d’origine. C’est sur ce dernier aspect que le contenu des accords diffère le plus dans la mesure où ils répondent aux besoins exprimés par chacune des Parties.

L’accord avec le Congo met l’accent sur le rôle des migrants et notamment le financement de projets de développement local initiés par leurs associations, l’appui aux diasporas et le soutien aux projets d’initiatives économiques ou de développement des migrants, notamment des jeunes. Un deuxième aspect concerne la réinsertion des migrants volontaires pour un retour dans leur pays. Enfin, un fort accent est mis sur la coopération dans le secteur santé dans lequel un certain nombre d’actions sont énumérées qui complètent le DCP signé entre la France et le Congo en 2007.

La coopération développée avec le Sénégal dans le cadre de l’accord est plus générale. C’est un sujet qui n’a été abordé que dans le cadre de l’accord initial et n’a fait l’objet d’aucun amendement lors de l’élaboration de l’avenant. Elle concerne notamment, outre la santé, les secteurs de l’agriculture et de la pêche, le domaine financier, la coopération décentralisée.

Enfin, l’accord avec le Bénin énumère d’une part les généralités sur lesquelles les Parties entendent mettre l’accent et détaille en annexe le fort appui de la part de la France sur les questions de santé et tout particulièrement sur le thème de la faiblesse des ressources humaines du système de santé béninois. Une déclaration commune, adoptée le 17 septembre 2008, a précisé les interventions dans sept secteurs prioritaires, essentiellement en matière de santé et de formation professionnelle, pour mieux répondre aux demandes du gouvernement béninois (38).

6) Tirer les conséquences de cette nouvelle approche liant migrations et développement

La création du MIIIDS a représenté une étape essentielle : non seulement l’unité de gestion politique et administrative de la question migratoire a été atteinte ce qui permet d’en garantir l’efficacité, mais le codéveloppement ou développement solidaire prend également aujourd’hui sa véritable dimension au travers des accords de gestion concertée. Votre rapporteur se félicite des points de convergence trouvés sur ces questions, qui répondent aux préoccupations des pays d’origine.

Il souhaite néanmoins exprimer deux préoccupations que lui inspire son analyse des accords.

La première porte sur l’articulation entre le ministère de l’immigration, de l’identité nationale, de l’intégration et du développement solidaire, MIIIDS, et le secrétariat d’Etat à la coopération et à la francophonie. En effet, la mise en œuvre des volets codéveloppement des accords privilégie le rôle du MIIIDS sur celui, traditionnel, du secrétariat d’Etat à la coopération, qui en est absent. Certes, le MIIIDS n’agit pas de manière totalement isolée et l’on ne doute pas qu’il s’inspire du cadre général des Documents Cadre de Partenariats, DCP, parfois mentionnés dans certains des accords, pour définir ses actions. On ne méconnaît pas non plus le rôle coordinateur de l’ambassadeur dans chaque pays entre les différentes administrations concernées et le fait que les financements engagés pour les actions de codéveloppement prévues dans les accords seront des crédits du MIIIDS. Non plus que celui de l'AFD, sous co-tutelle du MAEE, du MINEFE et du MIIIDS, qui est également mentionnée comme participant dans certains cas à la mise en œuvre des actions de codéveloppement prévues. Pour autant, aux fins d’une bonne harmonisation des politiques conduites par les différentes institutions en charge de l’aide au développement, dont le MIIIDS fait désormais partie, il aurait sans doute été opportun de rappeler le rôle du secrétariat d’Etat à la coopération, voire de prévoir son intervention. Cette mention aurait été d’autant plus utile que les accords prévoient parfois des projets particuliers et importants dans des secteurs qui, aux termes des décisions prises par le CICID en 2004, sont soit transversaux, soit de la compétence de cette administration.

Par ailleurs, sauf à risquer de mettre en péril les dispositifs institués et, à terme, le succès de la politique migratoire de la France, la logique de l’articulation entre gestion migratoire et codéveloppement implique de privilégier les financements bilatéraux d’aide publique au développement.

Or, chacun sait que la part des financements multilatéraux est tendanciellement à la hausse dans la structure de l'APD française et que, tant les autorisations d’engagement que les crédits de paiement consacrés à la coopération bilatérale sont en baisse régulière, en témoigne le budget voté pour l’année 2009.

Votre rapporteur souhaite donc attirer vivement l’attention du gouvernement sur la question de la cohérence indispensable entre ses politiques migratoire et d’aide développement et l’inviter à un rééquilibrage au profit de l’aide bilatérale, garante de l’efficacité des accords de gestion concertée et du succès, sur la durée, de la maîtrise de l’immigration.

CONCLUSION

Sous réserve des dernières remarques, votre rapporteur vous invite à approuver ces projets de loi qui marquent une étape, après le premier accord signé avec le Gabon, et une réorientation de la politique migratoire de la France, dans un sens qu’il croit à la fois plus équilibré et répondant aux intérêts de notre pays et des pays d’origine.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission examine le présent projet de loi au cours de sa réunion du mardi 17 février 2009.

Après l’exposé du rapporteur, un débat a lieu.

Mme Nicole Ameline. Le sujet de ces accords est tout à fait essentiel. À cet égard, je souscris aux propos du Rapporteur qui en a justement souligné l’importance. Je souhaiterais ajouter que la signature, sous présidence française, du Pacte européen pour l’asile et l’immigration aura été un grand succès de cette présidence du Conseil de l’UE. Par ailleurs, j’insiste sur les liens entre les migrations et le développement : ces accords pourront permettre de trouver des leviers de croissance dans les pays partenaires et de remédier aux éventuelles difficultés rencontrées, par exemple en promouvant la protection sociale dans la lutte contre la pauvreté.

Les transferts financiers des migrants vers leurs familles restées dans leur pays d’origine sont souvent obérés par des coûts d’opérations importants. Des établissements financiers comme la Banque postale s’étaient engagés à améliorer la situation ; qu’en est-il ? Dans le domaine des visas, sous le régime antérieur les étudiants n’étaient pas autorisés à réutiliser leur visa pour revenir en France quelque temps après leur premier séjour. Qu’est-il prévu sur ce point ? Enfin, la question des « réfugiés climatiques » est-elle traitée dans les accords soumis à ratification ?

M. Michel Terrot, Rapporteur. La question des « réfugiés climatiques » constitue un réel problème en effet ; il faut néanmoins savoir que beaucoup de migrants africains ne poursuivent pas leur migration au-delà du continent, et se rendent par exemple du Niger ou du Burkina Faso vers la Côte d’Ivoire et pas au-delà. Par ailleurs, 60 % des migrations vers des pays de l’OCDE s’effectuent vers des États membres de l’OCDE qui ne sont pas européens. L’Afrique a vu en quelques années baisser sa part relative dans le nombre total de migrants de 17 % à 12 %. La Chine, qui comptait pour un tiers du total, n’en représente aujourd’hui qu’un quart. Les migrations latino-américaines sont quant à elles trop rarement évoquées.

Depuis 2006, plusieurs lois sont venues réglementer et encourager l’épargne en vue du développement solidaire, avec la création de comptes et de livrets ad hoc, sans grand succès. Notre collègue Henriette Martinez a eu l’occasion de le souligner dans ses avis budgétaires sur l’aide publique au développement, en appelant à corriger cette politique. La difficulté principale résulte du fait que 80 à 90 % des fonds envoyés vers le pays d’origine des migrants servent à alimenter la consommation immédiate. En dépit de ces difficultés, qu’il faudra traiter pour favoriser davantage le développement et l’investissement, il faut reconnaître à la France le mérite d’être le tout premier pays à s’occuper du sujet – à la différence de l’Allemagne ou du Royaume-Uni.

M. François Loncle. La question des frais facturés en cas de transfert financier vers les pays d’origine est un vrai problème, renforcé par le fait que, les systèmes postaux fiables étant généralement inexistants dans ces pays, il faut avoir recours à des sociétés spécialisées.

M. Michel Terrot, Rapporteur. L’un des accords prévoit que l’Agence française de développement mette en place un site Internet permettant de comparer les tarifs des différentes sociétés spécialisées dans ce type de transactions. Il est vrai que leur faible nombre ne favorise guère la concurrence.

M. François Loncle. D’autres accords du même type sont en cours de négociation. Il semble qu’avec le Mali deux refus aient été essuyés ; sait-on pourquoi ?

M. Michel Terrot, Rapporteur. Outre les trois accords que je vous ai présentés, un autre, avec la Tunisie, va l’être dans un instant et il existe déjà un accord avec le Gabon. Trois autres ont été signés récemment avec le Burkina Faso, Maurice et le Cap-Vert. Selon les informations que j’ai reçues du Gouvernement, les négociations sont en bonne voie avec le Cameroun et l’Égypte. Au Mali en revanche, les pressions exercées par la population sur le pouvoir sont telles qu’aucun accord ne peut être signé tant que les nombreux Maliens vivant en France en situation irrégulière n’auront pas été régularisés ; or le secrétaire général du ministère de l’Immigration a clairement indiqué qu’il n’en était pas question.

M. François Loncle. Je souhaite que l’examen de ces accords en séance publique soit l’occasion d’un débat et non d’une procédure simplifiée.

Le Président Axel Poniatowski. C’est bien ce qui est prévu, conformément au souhait du bureau de notre commission.

Mme Martine Aurillac. Tous les accords évoqués sont conclus ou vont l’être avec des pays d’Afrique, si l’on veut bien reconnaître la proximité de l’Île Maurice avec ce continent. Le principe de la promotion de l’immigration choisie par toutes les parties, pays d’origine et pays d’accueil, est excellent. D’autres continents seront-ils concernés par des accords du même type ? Je note par ailleurs que l’accord avec le Sénégal comporte un avenant dans lequel figure une liste détaillée des nombreux métiers susceptibles d’être exercés par les migrants, ce dont je me réjouis en tant que président du groupe d’amitiés avec ce pays. Mais pourquoi cette particularité que l’on ne retrouve pas dans les autres accords ?

M. Michel Terrot, Rapporteur. En dehors de l’Afrique, un seul accord est pour l’instant envisagé à ma connaissance, avec Haïti. L’accord avec le Sénégal est en effet particulier, en quelque sorte à rebours du concept d’immigration qualifiée ; espérons donc que ce cas demeure isolé.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte les projets de loi (nos 1326, 1327, 1328).

*

* *

La commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, les trois présents projets de loi.

NB : Le texte des accords figure respectivement en annexe aux projets de loi (nos 1326, 1327, 1328).

© Assemblée nationale

1 () http://www.iom.int

2 () En valeur absolue, leur nombre a en revanche augmenté de 28 millions à quelque 45 millions de nos jours.

3 () « Tendances mondiales en matière d’emploi en 2007 », cité dans « Migrations économiques, cohésion sociale et développement : vers une approche intégrée. », Rapport de la 8ème Conférence du Conseil de l’Europe des ministres responsables des questions de migrations, Kiev, 4-5 septembre 2008, p. 59.

4 () OCDE, International Migration Outlook, SOPEMI, 2008, résumé en français, p. 2.

5 () Source OIM, (Rapport 2008 sur l'Etat de la migration dans le monde: Gestion de la mobilité de la main-d'œuvre dans une économie mondiale en mutation.)

6 () « Tendances récentes des migrations internationales », SOPEMI, OCDE, 2007, p. 47.

7 () « Les migrations sud-sud : exemple de l’Afrique subsaharienne”, Parlement européen, Direction générale pour les politiques externes de l’Union. Auteurs: Véronique Lassailly-Jacob (Université de Poitiers), Florence Boyer, Centre Population Développement (CEPED) et Julien Brachet (Université de Paris I). Réf.: EP-ExPol-B-2006-02, PE 371.978, 31/03/2006.

8 () Perspectives des migrations internationales, OCDE, 2007, p. 125.

9 () http://www.iom.int

10 () « Migrations internationales et développement », Rapport du Secrétaire général, Nations Unies, A/60/871, 2006.

11 () « Les migrations dans un monde interconnecté : nouvelles perspectives d’action », Rapport de la Commission mondiale sur les migrations internationales, octobre 2005.

12 () « Migrations internationales et développement », Rapport du Secrétaire général, Nations Unies, A/60/871, 2006, p. 17.

13 () « Migrations internationales et développement », Rapport du Secrétaire général, Nations Unies, A/63/265, août 2008.

14 () « Migrations internationales et développement », Rapport du Secrétaire général, Nations Unies, A/63/265, août 2008, pages 16 à 19.

15 () « Migrations économiques, cohésion sociale et développement : vers une approche intégrée. », Rapport de la 8ème Conférence du Conseil de l’Europe des ministres responsables des questions de migrations, Kiev, 4-5 septembre 2008, p. 58.

16 () Ibid, p. 80.

17 () Seul un quart des médecins formés en Afrique pratiquent en Afrique. Catherine Wihtol de Wenden, CNRS, (CERI-Science-Po), « Co-development policies inEurope : Objectives, Experiences and Limits. » novembre 2008, p. 8 ; (article disponible sur http://www.ifri.org, rédigé dans le cadre de la seconde réunion du Dialogue franco-anglais sur les régularisations et le codéveloppement : « Codéveloppement : quels objectifs ? Quels principes ? »)

18 ()« Vers un pacte européen sur l’immigration et l’asile », Thierry Mariani, député, rapport d’information n° 921, rédigé au nom de la délégation pour l’Union européenne, juin 2008.

19 () Le partenariat stratégique Afrique - UE, une stratégie commune Afrique - UE ; Partenariat Afrique – UE sur les migrations, la mobilité et l’emploi, p. 66.

20 () Première conférence ministérielle euro-africaine sur la migration et le développement, 10 et 11 juillet 2006.

21 () Ibid., p. 68.

22 () Pour les développements sur ces questions, cf. rapport de Thierry Mariani, p. 11s.

23 () « Co-development Policies in Europe : Objectives, Experiences and Limits. » Catherine Wihtol de Wenden, CNRS, (CERI-Science-Po), novembre 2008 ; article disponible sur http://www.ifri.org, rédigé dans le cadre de la seconde réunion du Dialogue franco-anglais sur les régularisations et le codéveloppement : « Codéveloppement : quels objectifs ? Quels principes ? »

24 () Mission interministérielle « Migration et codéveloppement » en 1998, conduite par M. Sami Naïr, délégué interministériel.

25 () Commission d'enquête chargée de recueillir des informations sur les régularisations d'étrangers en situation irrégulière opérées depuis le 1er juillet 1997 ; rapport n° 470 de MM. Paul Masson et José Balarello, sénateurs. (Deuxième partie, II, A, 1) : « Les résultats incertains des précédents dispositifs d'aide au retour ».

26 () Catherine Wihtol de Wenden, ibid.

27 () Décret n°98-314 du 24 avril 1998 portant création d'un délégué interministériel au codéveloppement et aux migrations internationales, article 2.

28 () Rapport fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république sur le projet de loi (n° 2986), relatif à l’immigration et à l’intégration, 26 avril 2006.

29 () Ibid, pages 22 à 24.

30 () Loi n°2006-911 du 24 juillet 2006.

31 () Résumé du Dialogue de haut niveau sur les migrations internationales et le développement ; note de la Présidente de l’Assemblée générale, A/61/515, 13 octobre 2006, p. 3 et 4.

32 () Avis n° 1201, Aide publique au développement, commission des affaires étrangères, Henriette Martinez, rapporteure, novembre 2008, p. 57.

33 () Jacques Barrot, intervention prononcée dans le cadre de la deuxième conférence euro-africaine sur la migration et le développement, paris, 25 novembre 2008.

34 () « Migrations économiques, cohésion sociale et développement : vers une approche intégrée. », Rapport de la 8ème Conférence du Conseil de l’Europe des ministres responsables des questions de migrations, Kiev, 4-5 septembre 2008, p. 83.

35 () Derrière l’Algérie, le Maroc, le Portugal, la Turquie, la Tunisie, l’Italie, l’Espagne et la Chine.

36 () Convention de codéveloppement entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Sénégal, signée à Paris le 25 mai 2000, art. 1er.

37 () 100 personnes dans le cadre de l’accord avec le Congo ; 200 dans le cadre de l’accord avec le Bénin.

38 () Création d'un pôle d'excellence régional, d'une banque régionale de matériel et d'équipements médico-techniques, d'une école de formation régionale en maintenance des équipements médico-techniques ; mise en place du régime d'assurance médicale universelle et d'une mutuelle dédiée aux personnels de santé, d'un centre de lutte intégrée contre le paludisme ; accompagnement au redéploiement des médecins dans les zones rurales déshéritées ; appui à la mise en place d'une assurance qualité et d'un mécanisme d'évaluation et d'accréditation pour les structures médicales.