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N° 2303

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 février 2010.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE (N° 2261 rect.) DE M. JEAN-MARC AYRAULT, MMES PASCALE CROZON, DANIELLE BOUSQUET, CATHERINE COUTELLE, M. CHRISTOPHE CARESCHE ET PLUSIEURS DE LEURS COLLÈGUES, visant à promouvoir l’harmonisation des législations européennes applicables aux droits des femmes suivant le principe de la « clause de l’Européenne la plus favorisée »,

PAR MME Pascale CROZON,

Députée.

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Voir le numéro : 2279

INTRODUCTION 5

I.– LA PERSISTANCE DES INÉGALITÉS ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES 6

A. LA DÉMARCHE INITIÉE PAR MME GISÈLE HALIMI 6

B. LES INÉGALITÉS ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES EN EUROPE 6

1. Les inégalités économiques et sociales 7

2. Les violences faites aux femmes 8

3. La sous-représentation des femmes dans la vie publique 8

II.– L’EFFORT EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ DOIT ÊTRE RENFORCÉ 9

A. UNE COMPÉTENCE DE L’UNION 9

1. Le droit européen applicable 9

a) Une compétence reconnue par les traités 9

b) La « feuille de route » pour l’égalité entre les femmes et les hommes 10

c) Le Pacte européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes 10

d) L’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes 11

2. Les perspectives de la présidence espagnole 11

a) Une nouvelle « feuille de route » 11

b) Les actions entreprises 12

B. LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION 13

1. Une nécessaire action nationale et européenne 13

2. L’examen par la commission des Affaires européennes 14

EXAMEN EN COMMISSION 17

PROPOSITION DE RÉSOLUTION ADOPTÉE PAR LA COMMISSION VISANT À PROMOUVOIR L’HARMONISATION DES LÉGISLATIONS EUROPÉENNES APPLICABLES AUX DROITS DES FEMMES SUIVANT LE PRINCIPE DE LA « CLAUSE DE L’EUROPÉENNE LA PLUS FAVORISÉE » 25

Mesdames, Messieurs,

La commission des Lois est saisie de la proposition de résolution (n° 2261 rect.) visant à promouvoir l’harmonisation des législations européennes applicables aux droits des femmes suivant le principe de la « clause de l’Européenne la plus favorisée », déposée le 25 janvier dernier par les membres du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (SRC) et apparentés.

Cette proposition de résolution a été examinée par la commission des Affaires européennes qui l’a rejetée (1).

En application de l’article 151-5 du Règlement, introduit par la résolution n° 292 du 27 mai 2009, les propositions de résolution européenne autres que les projets ou propositions d’actes de l’Union européenne ou sur un document émanant d’une institution de l’Union européenne sont renvoyées à l’examen préalable de la Commission des affaires européennes.

Lorsque le Gouvernement, le président d’une commission permanente ou le président d’un groupe le demande, la commission doit déposer son rapport dans le délai d’un mois suivant cette demande. Son rapport conclut soit au rejet, soit à l’adoption de la proposition de résolution, éventuellement amendée. Le texte adopté par la Commission des affaires européennes ou, à défaut, la proposition de résolution initiale, est renvoyé à la commission permanente compétente.

Le groupe SRC ayant proposé l’inscription de cette proposition de résolution à l’ordre du jour de la séance publique du 18 février prochain, il appartient à la commission des Lois d’examiner la proposition, dans sa version initiale, puisque la commission des Affaires européennes l’a rejetée.

I.– LA PERSISTANCE DES INÉGALITÉS ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES

A. LA DÉMARCHE INITIÉE PAR MME GISÈLE HALIMI

En 1979, à l’occasion de la première élection des membres du Parlement européen au suffrage universel direct, a été initiée une démarche en faveur de la mise en place d’une « clause de l’Européenne la plus favorisée ». Cette démarche est soutenue par l’association « Choisir la cause des femmes », créée en juillet 1971 sur une initiative conjointe de Mme Gisèle Halimi et de Mme Simone de Beauvoir.

L’idée de la « clause de l’Européenne la plus favorisée » est simple : il s’agit d’identifier les dispositions les plus favorables aux femmes dans les États membre de l’Union européenne dans chaque domaine, et de proposer que les États membres alignent leur législation sur celle de l’État membre où elle est la plus favorable aux femmes.

Dans le cadre de la publication, en 2008, d’un ouvrage collectif sur le sujet (2), cinq domaines ont été retenus pour constituer une base commune d’action :

—  le droit de choisir de donner ou de ne pas donner la vie, qui englobe l’éducation sexuelle, la contraception ou encore l’interruption volontaire de grossesse ;

—  la famille, qui inclut le mariage, le PACS, le divorce, les enfants, l’autorité parentale, les pensions alimentaires et la question du nom d’usage des femmes mariées ;

—  l’indépendance économique des femmes, qualifiée de « socle » de leur libération. Il s’agit d’un domaine très large couvrant le travail, la promotion et l’égalité professionnelle, la discrimination dans l’emploi, les retraites ou encore le harcèlement sexuel dans le travail ;

—  les violences sous toutes leurs formes, ce qui recouvre notamment le harcèlement, les violences physiques, la prostitution et le viol ;

—  la politique, en soulignant le rôle que les femmes doivent jouer dans une société démocratique.

B. LES INÉGALITÉS ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES EN EUROPE

Les Européennes ont pu bénéficier d’importantes conquêtes sociales au cours du vingtième siècle : elles ont acquis le droit de vote, elles ont accédé plus facilement au marché du travail, les conditions du divorce ont été améliorées et leurs droits en matière d’autorité parentale ont été affirmés.

Cependant, les inégalités entre les hommes et les femmes demeurent très importantes.

1. Les inégalités économiques et sociales

Publié le 18 décembre 2009, le rapport (3) de la Commission européenne sur l’égalité entre les femmes et les hommes en Europe pointe la persistance des disparités entre les hommes et les femmes au sein de l’Union européenne.

Le taux d’emploi des femmes a augmenté de 7,1 points de pourcentage au cours des dix dernières années, pour atteindre 59,1 % en 2008 et se rapprocher ainsi très fortement de l’objectif de Lisbonne (fixé à 60 % en 2010), malgré d’importantes différences entre les États membres (de moins de 40 % à plus de 70 %). L’écart moyen entre le taux d’emploi des femmes et celui des hommes est passé de 18,2 points de pourcentage en 1998 à 13,7 points en 2008.

La crise économique semble ralentir cette évolution positive. Entre mai 2008 et septembre 2009, le taux de chômage a augmenté plus rapidement pour les hommes (passant de 6,4 à 9,3 %) que pour les femmes (pour lesquelles il est passé de 7,4 à 9 %) dans l’Union. Cet écart s’explique par le fait que les secteurs les plus touchés par la crise, comme l’industrie ou la construction sont essentiellement masculins.

De même, les femmes sont davantage susceptibles d’être désavantagées sur le marché du travail, en raison, par exemple, de la proportion plus élevée de contrats précaires et de temps partiels involontaires. En 2008, 31,1 % des femmes travaillaient à temps partiel, contre 7,9 % des hommes.

Bien que le niveau d’instruction des femmes ait augmenté considérablement ces dernières années et que celles-ci soient désormais plus nombreuses que les hommes parmi les diplômés d’université (59 % des diplômés toutes matières confondues en 2006 dans l’Union), elles restent concentrées dans des secteurs traditionnellement féminins et souvent moins rémunérateurs (les services de santé et de soins, l’enseignement, etc.) et occupent moins de postes à responsabilités dans toutes les sphères de la société.

Si le nombre de femmes participant à la prise de décision ou nommées à des postes à responsabilités a augmenté dans l’Union au cours des dernières années, les femmes ne représentent que 10 % des membres des conseils d’administration des sociétés européennes de premier ordre et 3 % des dirigeants de ces conseils.

2. Les violences faites aux femmes

Les femmes sont les principales victimes de la violence sexiste. Dans l’Union européenne, on estime qu’au moins deux femmes sur dix ont subi des violences physiques au moins une fois dans leur vie d’adulte et qu’environ une sur dix a été victime de violences sexuelles (4). La majorité de ces actes de violence sont perpétrés par des hommes qui font partie de leur entourage immédiat, le plus souvent leur partenaire ou ex-partenaire. Outre la souffrance qu’elle engendre, cette violence a aussi des conséquences sociales et financières graves, avec des coûts élevés pour le secteur de la santé, les services sociaux, policiers et judiciaires et le marché du travail.

Il convient de souligner que l’Assemblée nationale est particulièrement active dans ce domaine puisqu’une proposition de loi (5) renforçant la protection des victimes et la prévention et la répression des violences faites aux femmes a été déposée le 27 novembre 2009 par Mme Danielle Bousquet, membre du groupe SRC et M. Guy Geoffroy, membre du groupe UMP. Examinée par une commission spéciale, cette proposition de loi sera examinée par l’Assemblée nationale le 25 février prochain. Cette proposition de loi vise, notamment, à renforcer la prévention des violences faites aux femmes, améliorer la protection des victimes et accentuer la répression à l’encontre des auteurs de violences faites aux femmes.

3. La sous-représentation des femmes dans la vie publique

Selon une étude (6) de la fondation Robert Schuman, si les parlements européens (chambres basses ou chambres uniques) comptaient en 2008 en moyenne 23,7 % de femmes, les écarts demeuraient très importants. La Suède comptait ainsi 46,7 % de femmes parmi ses députés, la France 18,5 % et Malte seulement 6,7 %.

De même, si les gouvernements européens comptaient, en 2008, en moyenne, 23,3 % de femmes ministres, la Finlande en comptait 55 %, l’Espagne 50 %, la France 43,8 % (depuis le remaniement ministériel du 23 juin 2009, le gouvernement français ne compte plus qu’un tiers de femmes) et la Roumanie aucune.

II.– L’EFFORT EN FAVEUR DE L’ÉGALITÉ DOIT ÊTRE RENFORCÉ

A. UNE COMPÉTENCE DE L’UNION

1. Le droit européen applicable

a) Une compétence reconnue par les traités

Dès 1957, l’article 119 du Traité de Rome prévoyait que « chaque État membre assure au cours de la première étape, et maintient par la suite, l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins pour un même travail ».

La compétence de la Communauté européenne a été étendue en matière sociale, avec le protocole sur l’Europe sociale, annexé au Traité de Maastricht du 7 février 1992. Cette compétence a été élargie à la lutte contre les inégalités salariales entre les femmes et les hommes par le Traité d’Amsterdam du 2 octobre 1997.

Le Traité de Lisbonne consolide la compétence de l’Union en matière de lutte contre les inégalités entre les hommes et les femmes. C’est ainsi que l’article 2 du Traité sur l’Union européenne précise que l’Union est fondée sur des valeurs « communes aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l’égalité entre les femmes et les hommes. »

De même, le paragraphe 3 de l’article 3 précise que l’Union européenne « promeut (…) l’égalité entre les hommes et les femmes ».

Plus généralement, l’article 10 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, après l’entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, stipule que « dans la définition et la mise en œuvre de ses politiques et actions, l’Union cherche à combattre toute discrimination fondée sur le sexe », la race ou l’origine ethnique, la religion ou les convictions, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle.

Enfin, l’article 23 de la Charte européenne des droits fondamentaux, adoptée à Nice en 2000, prévoit que l’égalité entre les hommes et les femmes doit être assurée dans tous les domaines, y compris en matière d’emploi, de travail et de rémunération. Ce même article ajoute que le principe de l’égalité n’empêche pas le maintien ou l’adoption de mesures prévoyant des avantages spécifiques en faveur du sexe sous-représenté.

Sur le fondement des traités, 14 directives communautaires tendent à favoriser l’égalité entre les hommes et les femmes.

La directive 75/117/CEE du 10 février 1975 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à l’application du principe de l’égalité des rémunérations entre les travailleurs masculins et les travailleurs féminins est le principal texte européen en matière d’égalité salariale.

En matière économique est intervenue la directive 2004/113/CE du 13 décembre 2004 mettant en œuvre le principe de l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l’accès à des biens et services et la fourniture de biens et services.

b) La « feuille de route » pour l’égalité entre les femmes et les hommes

La Commission européenne a publié le 1er mars 2006 une « feuille de route » (7) pour l’égalité entre les femmes et les hommes.

Cette feuille de route décrit six domaines prioritaires pour l’action de l’Union européenne relative à l’égalité entre les femmes et les hommes pour la période 2006-2010 : une indépendance économique égale pour les femmes et les hommes, la conciliation de la vie privée et professionnelle, une représentation égale dans la prise de décision, l’éradication de toute forme de violence fondée sur le genre, l’élimination des stéréotypes de genre et la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes dans les politiques externes et de développement.

Cette feuille de route illustrait donc l’engagement de la Commission à faire avancer le programme sur l’égalité entre les femmes et les hommes en renforçant les partenariats avec les États membres et d’autres acteurs.

Il convient d’ailleurs de souligner que ce document s’inscrit dans la lignée d’une précédente communication (8) de la Commission européenne, pour les années 2000 à 2005.

c) Le Pacte européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes

Le Pacte européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes a été adopté par le Conseil européen des 25 et 26 mars 2006.

Ce pacte européen vise à encourager les États membres et l’Union à agir pour :

—  combler les écarts entre hommes et femmes et à lutter contre une conception stéréotypée des rôles sur le marché du travail, notamment en promouvant l’emploi des femmes dans toutes les tranches d’âge, en combattant toutes les formes de discrimination, en favorisant un plus grand pouvoir des femmes dans la vie politique et économique, ainsi qu’en intégrant le principe de l’égalité entre hommes et femmes dans toutes les activités publiques ;

—  promouvoir un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée pour tous, en atteignant les objectifs fixés lors du Conseil européen de Barcelone de mars 2002 en ce qui concerne la mise à disposition d’infrastructures d’accueil des enfants, en améliorant l’offre en matière d’infrastructures d’accueil et de soins d’autres personnes dépendantes et en encourageant le congé parental, tant pour les femmes que pour les hommes.

—  renforcer la gestion des affaires publiques grâce à une intégration du principe de l’égalité entre hommes et femmes et à un meilleur suivi statistique.

d) L’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes

Le règlement (CE) n° 1922/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 20 décembre 2006, portant création d’un Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes a créé un organisme chargé d’aider les institutions européennes et les États membres à promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes dans toutes les politiques communautaires et les politiques nationales

L’Institut a également pour objectif de contribuer à la lutte contre la discrimination fondée sur le sexe et à la sensibilisation des citoyens européens. Basé à Vilnius (Lituanie), cet Institut a été mis en place le 16 décembre 2007 et dispose d’un budget de 52,5 millions d’euros pour la période 2007-2013.

2. Les perspectives de la présidence espagnole

Depuis le 1er janvier 2010, le Royaume d’Espagne assure la présidence semestrielle du Conseil de l’Union européenne. Dans ce cadre, le gouvernement espagnol a défini un programme de travail articulé autour de six priorités, dont la première est la « consolidation de l’Europe sociale, en mettant l’accent sur l’égalité des sexes et la lutte contre la violence domestique ».

a) Une nouvelle « feuille de route »

Ce programme d’action s’inscrit dans la lignée des conclusions du Conseil « Emploi, politique sociale, santé et consommateurs » du 30 novembre 2009. Le Conseil avait, en effet, adopté des conclusions sur le thème de « l’égalité des sexes pour renforcer la croissance et l’emploi » (9). Au cours du débat, les ministres sont convenus que l’intégration dans les différentes politiques du principe de l’égalité des sexes et les questions liées à ce principe devront occuper une place importante dans la stratégie de Lisbonne pour l’après-2010, ainsi que dans les futures politiques sociales et de l’emploi, considérant que l’égalité des sexes va dans le sens des objectifs de croissance et d’emploi. Ils ont affirmé l’importance que revêt l’égalité des sexes pour la cohésion sociale et la prospérité économique et, compte tenu du vieillissement de la population, en tant que condition indispensable à la compétitivité et au financement des systèmes sociaux des États membres. En outre, les ministres ont mis en garde contre l’utilisation de la crise économique actuelle comme prétexte pour négliger l’égalité des sexes.

La présidence espagnole a décidé de préparer une nouvelle « feuille de route » pour l’égalité entre les femmes et les hommes pour les années 2011 à 2015.

b) Les actions entreprises

Devant la commission des droits de la femme et de l’égalité des genres du Parlement européen, Mme Bibiana Aído Almagro, ministre espagnole de l’égalité, a indiqué le 25 janvier dernier, que la présidence espagnole souhaitait une stratégie européenne commune pour lutter contre les violences sexistes. Elle a ainsi annoncé son soutien au projet de directive sur mise en œuvre de l’ordonnance de protection européenne et à la proposition de la Commission européenne de mettre en place un numéro de téléphone unique et gratuit, le « 116-016 », pour l’assistance aux victimes de violence à caractère sexiste.

Afin d’enrayer la violence à caractère sexiste, des conclusions communes pourraient être adoptées par le Conseil « Emploi, politique sociale, santé et consommateurs » le 8 mars 2010.

Enfin, il est prévu de créer un Observatoire européen de la violence à caractère sexiste pour élaborer des indicateurs européens communs, en partenariat avec l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes.

Plusieurs dispositions normatives devraient prochainement être adoptées.

En effet, la présidence espagnole souhaite l’adoption de la proposition de directive relative au congé maternité (10).

Par ailleurs, conformément à l’article 10 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, la présidence espagnole devrait inclure la lutte contre les inégalités entre les hommes et les femmes dans de nombreux domaines. C’est ainsi que la nouvelle stratégie pour la croissance et l’emploi, intitulée « Europe 2020 », aura notamment pour objectif, dans son volet social, de « parvenir à une égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, en éliminant toute forme de discrimination ». De même, en matière d’emploi, la présidence espagnole souligne qu’il convient de faire des « progrès définitifs dans l’égalité professionnelle effective entre les femmes et les hommes », en éliminant toute forme de discrimination et, en matière de politique sociale, que « la perspective d’égalité entre les femmes et les hommes devra constituer un élément central dans le nouveau modèle de cohésion sociale ».

B. LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION

La présente proposition de résolution tend, dans ses alinéas 19 à 23, à « féliciter » la présidence espagnole pour avoir mis l’égalité entre les hommes et les femmes au centre de ses priorités.

Aux alinéas 24 et 25, elle propose de souligner que, « compte tenu de la répartition des compétences entre l’Union Européenne et les États membres en matière de lutte pour l’égalité entre les hommes et les femmes », le rôle des parlements nationaux et du Parlement européen doit être pleinement respecté et que l’Assemblée nationale doit être étroitement associée aux travaux parlementaires européens et rappelle sa « disponibilité » quant à toute initiative de coopération interparlementaire sur ce sujet.

1. Une nécessaire action nationale et européenne

L’alinéa 28 de la proposition de résolution invite le Gouvernement à présenter au Parlement un rapport présentant les dispositions législatives et réglementaires des États membres de l’Union les plus progressistes à l’égard des femmes. Sur la base de ce rapport, la proposition de résolution invite le Gouvernement à présenter un projet de loi visant à aligner la législation française sur ces dispositions les plus favorables.

La proposition de résolution invite la présidence espagnole, la Commission européenne et les États membres à renforcer leurs efforts en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes.

L’alinéa 30 propose ainsi de demander, à l’occasion de la présidence espagnole, aux ministres en charge de l’égalité entre les hommes et les femmes, de proposer de nouveaux moyens innovants d’amélioration de la législation en matière d’égalité hommes femmes, notamment sur les bases proposées par l’initiative de la « clause de l’Européenne la plus favorisée » qui permet une harmonisation vers le haut des droits des femmes.

De même, l’alinéa 31 propose de demander que la Commission européenne confie à l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes la réalisation d’une étude visant à analyser et à répertorier les dispositions législatives et réglementaires des États membres « les plus élevées et les plus progressistes à l’égard des femmes ».

Enfin, l’alinéa 32 propose de demander que, sur la base de cette étude, Commission européenne mette en œuvre les principes de la « clause de l’Européenne la plus favorisée ».

Le texte de la proposition de résolution semble parfaitement adapté. En effet, la lutte contre les inégalités entre les femmes et les hommes est très largement soutenue.

Plus précisément, le mécanisme dit « clause de l’Européenne la plus favorisée » est parfaitement conforme aux objectifs de l’Union européenne puisqu’il tend à harmoniser les différentes législations européennes, qui plus est sur la base d’un « nivellement par le haut ».

2. L’examen par la commission des Affaires européennes

La présente proposition de résolution a été examinée, le 3 février dernier, par la commission des Affaires européennes, qui l’a rejetée. Si cette commission semble avoir partagé les intentions des auteurs de la proposition de résolution
– Mme Anne Grommerch, co–rapporteure, la jugeant « intéressante » et « peu contestable sur le principe » – il semble que son rejet a été motivé par des considérations de « calendrier » et de « circonstances ».

Les co-rapporteurs de la commission des Affaires européennes soulignent que la « clause de l’Européenne la plus favorisée » aurait déjà fait l’objet d’une tentative d’inscription à l’Agenda européen, lors de la présidence française de 2008. Il est vrai que certains aspects de la réflexion touchent à des domaines où les États peuvent faire valoir le principe de subsidiarité. Il en est ainsi des législations sur le mariage, par exemple.

Votre rapporteure considère néanmoins que l’article 10 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et l’article 23 de la Charte des Droits fondamentaux sont de nature, après entrée en vigueur du Traité de Lisbonne, à impulser une nouvelle dynamique et accroître les possibilités d’action de l’Union. Il ne semble dès lors pas inutile de se saisir de cette opportunité pour faire avancer l’égalité entre les femmes et les hommes au sein de toutes les politiques de l’Union. En tout état de cause, votre rapporteure souligne que la proposition de résolution ne méconnaît en rien le principe de subsidiarité, puisqu’elle invite d’une part la Commission européenne et, d’autre part, le gouvernement français à mettre en œuvre les principes de la « clause de l’Européenne la plus favorisée » dans les domaines relevant de leurs compétences respectives.

Par ailleurs, a été émise l’idée d’un traité entre quatre États : la Belgique, l’Espagne, la Suède et la France, en vue de faire respecter les droits fondamentaux des femmes, le droit de choisir de donner la vie, de lutter contre les violences faites aux femmes, les discriminations dans le travail et d’instaurer la parité dans la représentation politique.

Les co-rapporteurs de la commission des Affaires européennes ont donc estimé « très délicat de prendre dans l’immédiat des positions trop précises qui donneraient l’impression de préempter par avance les possibilités, les options et les résultats de cette démarche ». Votre rapporteure estime, au contraire, que la proposition de résolution ne « préempte » pas les résultats de la démarche proposée : elle invite simplement à l’action. Elle souligne par ailleurs que cet argument devrait alors être objecté à toute proposition de résolution européenne, dont la nature même est d’orienter ou de consolider les démarches diplomatiques en y apportant le poids de la représentation nationale.

Par ailleurs, ces co-rapporteurs ont également pris plusieurs exemples pour lesquels un débat spécifique approfondi mériterait d’être conduits :

—  En matière d’interruption volontaire de grossesse, il apparaît que le délai le plus favorable, lorsque la décision appartient à la femme, est celui de la Suède, qui est fixé à dix-huit semaines (quatre mois), contre douze semaines en France. Ils font observer qu’une telle modification ne devrait pas résulter d’une clause générale mais d’une décision spécifique. Votre rapporteure souligne que la démarche proposée ne conduit pas automatiquement à allonger le délai pendant lequel une interruption volontaire de grossesse est autorisée. En effet, si une telle proposition devait être formulée, il appartiendrait alors au législateur de se prononcer.

—  En matière de parité, les co-rapporteurs soulignent que la Constitution belge est la plus précise puisque son article 10 « garantit » l’égalité des femmes et des hommes, tandis que second alinéa de l’article premier de notre Constitution indique que « la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales ». Votre rapporteure souligne que, bien évidemment, la proposition de résolution ne peut évidemment pas avoir pour effet de modifier une disposition constitutionnelle.

—  En matière de congé parental, la Suède propose un congé long, des règles de partage et d’alternance entre les deux parents et la possibilité de le fractionner jusqu’à l’âge de huit ans. Les co-rapporteurs de la commission des Affaires européennes estiment qu’une telle mesure aurait, en France, un impact financier important. Votre rapporteure estime, là encore, que si une telle proposition d’amélioration du congé parental était proposée, il appartiendrait alors au législateur de se prononcer.

De façon générale, votre rapporteure constate que le rejet de cette proposition de résolution par la commission des Affaires européennes est largement motivé par des dispositions législatives retenues en exemple par l’association « choisir la cause des femmes ». Elle rappelle qu’un vote positif sur cette proposition de résolution ne vaut bien évidemment pas adoption de l’ensemble de ces textes. Cette idée serait d’ailleurs contraire à la démarche défendue par Gisèle Halimi, qui invite chacun, à l’issue d’un débat de fond sur les législations en vigueur et leurs avantages et inconvénients comparés, à constituer son propre « bouquet législatif ». Cette résolution est donc bien une invitation au débat, premier pas nécessaire vers la définition d’objectifs communs à l’ensemble des Européennes.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission examine la proposition de résolution européenne au cours de sa séance du mercredi 10 février 2010.

Après l’exposé de la rapporteure, une discussion générale a lieu.

M. Guy Geoffroy, président. Avant d’ouvrir la discussion générale, je voudrais éclairer la Commission en rapportant la teneur des interventions du Président de la Commission des Affaires européennes et des deux corapporteurs de la proposition de résolution, M. Christophe Caresche et Mme Anne Grommerch, ayant précédé le vote de rejet émis par cette Commission. Le président Pierre Lequiller a souligné que la difficulté soulevée par la proposition de résolution ne porte pas sur l’objectif, ni sur les intentions, mais sur le calendrier, comme vient de nous le rappeler notre rapporteure. M. Christophe Caresche a déclaré percevoir la nature des arguments avancés et demandé si la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes avait été saisie. Mme Anne Grommerch a alors expliqué avoir évoqué ce dossier avec la présidente de la Délégation, Mme Marie-Jo Zimmermann, le président Pierre Lequiller indiquant l’avoir également fait.

Vous voici mes chers collègues éclairés des échanges qui ont eu lieu au sein de la Commission des Affaires européennes. J’ouvre donc la discussion générale.

Mme Marie-Jo Zimmermann. J’ai lu comme vous les conclusions de la Commission des Affaires européennes. Or, et je le regrette, la Délégation aux droits des femmes de notre Assemblée n’a jamais été saisie officiellement de ce texte. Je suis cependant heureuse que cette proposition de résolution soit aujourd’hui soumise à la Commission des Lois, car j’estime que c’est en son sein que sa rédaction peut être véritablement travaillée et que des réponses peuvent être apportées. La Délégation aux droits des femmes s’est efforcée sur tous les sujets traités depuis 2002 d’aboutir par consensus : la question de l’égalité hommes-femmes est une question transversale et non politique. Je crois absolument nécessaire que la question soit débattue au sein du Parlement. Je sais que le groupe de travail européen constitué de la Suède, la Belgique, l’Espagne et la France élabore un projet. Le travail législatif doit avoir lieu dans chaque État. Si je comprends les conclusions de la commission des Affaires européennes, je prends comme un signe très favorable que la proposition de résolution vienne aujourd’hui en débat devant notre Commission.

Mme Catherine Coutelle. Je vous remercie de me donner la parole, moi qui ne suis pas membre de votre Commission, mais membre de la Délégation aux droits des femmes. Contrairement à la Commission des Affaires européennes, je trouve très intéressant que le débat sur cette proposition de résolution intervienne à ce moment-là du calendrier. Quasiment à chaque fois que le droit des femmes a progressé dans notre pays, cela a été du fait de l’Europe, qu’il s’agisse de la lutte contre les violences faites aux femmes ou de l’accroissement de leurs pouvoirs de décision.

À la veille du Conseil des ministres de Valence qui se tiendra fin mars sur le sujet de l’égalité hommes-femmes, je crois très important que le Parlement prenne position pour donner du poids à nos représentants dans la négociation. Je regrette à ce sujet qu’il n’existe pas de ministre de pleine autorité en charge de l’égalité hommes-femmes. Le sujet est aujourd’hui piloté « en interministériel », sans coordination suffisante… La proposition de résolution donnera un signal fort de la volonté de notre pays d’harmoniser les législations par le haut, je vous invite donc à soutenir ce texte !

M. Jérôme Lambert. Je rappelle qu’il ne s’agit pas aujourd’hui de décider du contenu de la loi future ; on ne peut à l’évidence pas légiférer à la hâte sur ce sujet. Il s’agit « simplement » – mais la portée symbolique est forte – de voter une résolution invitant le Gouvernement français dans les négociations européennes à venir à soutenir le principe de la clause de l’Européenne la plus favorisée. Qui peut refuser une telle chose ? La cause des femmes ne mérite-t-elle pas l’affirmation de la volonté d’une égalité la meilleure possible ? La situation actuelle est loin de cet idéal, il faudra du temps et sans doute de nombreux textes pour y parvenir. Je crois que, malgré le rejet du texte par la Commission des Affaires européennes, il faut sans arrière-pensée et sans engagement dans un quelconque engrenage, voter en faveur de cette proposition de résolution.

Mme Danielle Bousquet. Je note que le rapport écrit de la Commission des Affaires européennes juge les propositions formulées dans le texte qui nous est soumis « intéressantes et peu contestables », ce qui devrait aboutir à ce qu’elle soit soutenue.

Je peux comprendre que l’adoption de cette proposition de résolution soulève des questions d’opportunité, mais n’oublions pas que la France est souvent en retard par rapport au reste de l’Europe s’agissant de la place des femmes. Il est donc prioritaire d’affirmer une forte volonté politique afin de favoriser, dans tous les domaines, l’égalité entre les femmes et les hommes. Cela suppose que, tout en se gardant de trop légiférer, nous alignions, par paliers successifs, les droits de tous les citoyens de l’Union européenne sur la législation des États membres la plus favorable à cette égalité entre les femmes et les hommes. La France se doit de jouer ici un rôle d’éclaireur.

M. le président. S’agissant de la suite de la procédure applicable à l’examen de cette proposition de résolution, je tiens à préciser qu’en application de l’article 151-7, si notre Commission rejette la proposition de résolution qui lui est soumise, à l’instar de la commission chargée des Affaires européennes, et si l’inscription à l’ordre du jour est décidée – ce qui est le cas – l’Assemblée sera alors appelée sur les conclusions de rejet. À ce moment-là, de deux choses l’une : soit l’Assemblée adopte les conclusions de rejet et la proposition est définitivement rejetée ; soit l’Assemblée rejette les conclusions de rejet et la discussion s’engage sur les articles – en l’espèce sur l’article unique – de la proposition de résolution initiale.

Quelle que soit la décision de notre Commission, le sujet qui nous intéresse aujourd’hui pourra donc être examiné par l’Assemblée nationale en séance publique.

M. Yves Nicolin. Il me paraît souhaitable de favoriser une harmonisation européenne des législations nationales sur ces questions. Parce que le contenu de cette proposition de résolution mérite d’être débattu, je voterai en faveur de son adoption par notre Commission.

M. Guénhaël Huet. On peut d’ailleurs, à l’occasion de cette discussion, regretter que l’opposition parlementaire n’ait pas accepté de voter en faveur de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, qui prévoyait la possibilité pour le Parlement d’adopter des résolutions. Il me semble que cela aurait été plus cohérent.

Je suis, à titre personnel, favorable à ce que notre Commission adopte cette proposition de résolution, afin que la France adresse ainsi un signal positif, au niveau européen, en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes.

M. le président. Je vous propose donc de poursuivre et je constate qu’aucun amendement n’a été déposé sur le texte de cette proposition de résolution.

M. Jacques Alain Bénisti. Monsieur le Président, je souhaiterais que notre Commission suspende ses travaux pour quelques minutes.

M. le président. Nous suspendrons après avoir entendu les réponses du rapporteur, ainsi que notre collègue François Vannson.

Mme la rapporteure. Cette proposition de résolution ne concerne pas les seules femmes mais aussi les hommes et traite de l’avenir de nos enfants.

Nous devons saisir aujourd’hui l’opportunité que nous offre la présidence espagnole de l’Union européenne, qui a inscrit ce sujet à l’ordre du jour de ses travaux. Il est juste de rappeler que c’est l’Europe, pour l’essentiel, qui a fait progresser les droits des femmes dans notre pays. La question de l’égalité entre les hommes et les femmes doit nous rassembler tous.

Je déplore l’absence d’un secrétaire d’État chargé de ces questions qui pourrait assurer plus efficacement la coordination interministérielle. Je souligne d’ailleurs le rôle essentiel que jouent les délégations aux droits des femmes de notre Assemblée, du Sénat et du Conseil économique, social et environnemental.

Effectivement, la France doit jouer un rôle d’éclaireur en Europe. Nous accomplissons de notables progrès en matière de prévention des violences faites aux femmes. Il faut aujourd’hui avancer dans d’autres domaines.

M. François Vannson. Il s’agit d’un sujet sur lequel il est difficile de légiférer et qui doit transcender les clivages partisans et toutes les sensibilités politiques. Le texte qui nous est proposé n’est pas d’une teneur exceptionnelle mais, si nous le rejetions, expliquer notre décision pourrait être délicat.

(La séance est alors suspendue durant dix minutes)

M. Jean-Christophe Lagarde. Cette proposition de résolution est pleine de bon sens et va dans la direction souhaitable. Les députés du groupe Nouveau Centre y seront donc favorables, sous réserve toutefois de quelques adaptations. Je ne comprends pas, en particulier, comment nous pourrions fixer l’ordre du jour du conseil des ministres de l’Union européenne prévu les 25 et 26 mars prochains. Il me semble par ailleurs indispensable de prévoir un contrôle de l’application effective des mesures qui nous sont proposées. Les députés de notre groupe vous proposeront donc, pour l’examen du texte en séance publique, plusieurs amendements prenant en compte ces difficultés.

M. Etienne Blanc. Notre Commission doit se prononcer tant sur le fond que sur la forme d’une proposition de résolution dont nous disposons d’ailleurs assez tardivement.

S’agissant d’abord du fond, je crois que nous sommes tous d’accord pour améliorer notre législation économique et sociale au profit des femmes. L’idée d’aligner le droit français sur la législation nationale du pays européen qui leur est la plus favorable mérite d’être considérée.

S’agissant de la forme, en revanche, il me semble que le rôle de la commission des Lois est de veiller au respect des règles procédurales prévues dans notre ordre juridique. Or, la procédure qui nous est ici proposée est très surprenante au regard du droit européen et de son intégration en droit français : alors que le législateur national doit normalement transposer les directives communautaires, il serait ici prévu, selon un mécanisme curieux, que ce législateur s’inspire des législations étrangères « les plus progressistes » – notion qui, en droit, me laisse d’ailleurs perplexe.

Cette proposition de résolution pose, en outre, des difficultés constitutionnelles, car elle diminuerait nos pouvoirs de législateur selon des procédures juridiques inconnues, comme l’inventaire des législations nationales et l’idée « d’aligner la législation française » sur celles-ci.

Sans porter un jugement sur le fond de la proposition, je tiens à faire part de mon opposition radicale quant à sa forme juridique. J’invite donc la Commission à rejeter ce texte, ce qui n’empêchera pas l’Assemblée nationale d’en connaître ensuite en séance publique.

Mme Marie-Jo Zimmermann. Je partage un point de vue moins radical qu’Étienne Blanc.

Sur le fond du texte lui-même, on ne peut être contre. Sur la forme, il mérite des améliorations. Mais, précisément, il faut pouvoir l’amender en séance, pour le rendre compatible avec notre besoin de légiférer sur cette question. Je voterai donc en faveur du texte, afin qu’il puisse être discuté et amendé en séance.

M. Jérôme Lambert. Il est clair qu’il faut commencer par approuver ce texte en commission pour pouvoir l’amender en séance.

Je ne suis pas d’accord avec l’analyse d’Étienne Blanc, qui est fondée sur de mauvaises interprétations du droit européen. L’alinéa 24 de la proposition de résolution « souligne, compte tenu de la répartition des compétences entre l’Union européenne et les États membres en matière de lutte pour l’égalité entre les hommes et les femmes, que le rôle des parlements nationaux et du Parlement européen soit pleinement respecté ». Il ne s’agit pas de se dessaisir du sujet.

Il faut savoir si l’on veut ou non manifester une volonté politique de faire progresser les choses.

M. le président. À ce stade de la discussion, je souhaite rappeler quelques éléments de procédure. Si nous rejetons la proposition de résolution, l’Assemblée nationale ne se prononcera sur d’éventuels amendements que si elle a préalablement rejeté en séance ces conclusions de rejet.

En réponse à la question d’Étienne Blanc sur la mise à disposition du document, je vous indique que la commission des Affaires européennes a examiné et rejeté la proposition de résolution mercredi dernier et que c’est donc le texte initial de la proposition de résolution, déposé le 25 janvier 2010, qui a été transmis à notre commission, nul ne pouvant ignorer qu’il existât.

M. Dominique Raimbourg. Je partage l’analyse de Jérôme Lambert. Ce texte est une déclaration d’intention, qui entame un processus mais qui ne lie pas le Parlement pour l’avenir. Il n’y a ni risque d’inconstitutionnalité ni risque d’application mécanique de textes qui ne correspondraient pas à notre législation interne.

M. Yves Nicolin. Nous avons engagé un processus vertueux de progression de la parité entre les hommes et les femmes et cette proposition de résolution est une nouvelle étape dans ce processus. Certes, cette proposition de résolution doit être améliorée, mais pour cela il faut d’abord l’adopter.

M. Jacques Alain Bénisti. Quand on lit l’alinéa 31 de la proposition de résolution, qui prévoit de « demander à ce que la Commission européenne puisse confier à l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes la réalisation d’une étude visant à analyser et à répertorier les dispositions législatives et réglementaires des États membres les plus élevées et les plus progressistes à l’égard des femmes », cela revient à prendre une position et inciter les instances européennes à faire de même. J’invite mes collègues à ne pas aller dans ce sens.

M. Jean-Christophe Lagarde. Il est bon de rappeler dans quelles conditions les propositions de résolution sont discutées par le Parlement, depuis la révision constitutionnelle de juillet 2008. Le but de la résolution est de pouvoir indiquer des orientations politiques, en direction du Gouvernement, des institutions européennes ou de toute autre institution. Tel est l’esprit des résolutions, et si l’on s’interdit d’adopter une résolution parce qu’elle incite, alors c’est le principe même de la résolution auquel l’on s’oppose. C’est pourquoi je crois qu’il faut adopter cette proposition de résolution.

M. le président. Je rappelle à notre commission que les propositions de résolution telles que celle que nous examinons aujourd’hui ont été rendues possibles non pas par la révision constitutionnelle de juillet 2008 mais par celle de juin 1992 découlant du traité de Maastricht.

M. Jean-Christophe Lagarde. Mais l’esprit est le même !

M. Charles de la Verpillière. Personnellement, je voterai pour la proposition de résolution afin qu’elle puisse être examinée.

Toutefois, elle devra être profondément amendée. Elle recèle une contradiction interne, car elle affirme la nécessité de passer par la législation européenne et préconise dans le même temps que la France, sans attendre l’évolution du droit communautaire, mette en œuvre la « clause de l’Européenne la plus favorisée ».

Ma deuxième critique porte sur le principe d’une application immédiate de cette clause, qui nous lierait les mains. Je ne crois pas que ce soit le sens que doit avoir une telle résolution.

M. Bernard Roman. Chacun semble d’accord pour dire qu’il faut avancer sur cette question.

Chacun semble d’accord, y compris les auteurs du texte, pour dire qu’il faut discuter la proposition de résolution et l’amender.

Je propose aux commissaires qui pourraient être tentés de voter contre la proposition de s’abstenir! Car sinon, cela conduira à un exercice difficile, consistant à voter contre la proposition de résolution en commission puis à voter pour cette même proposition en séance publique.

Pour pouvoir faire avancer la cause des femmes, la meilleure solution est de débattre de ce texte en séance et de l’amender pour le rendre acceptable par tous.

M. Guénhaël Huet. Je m’attache davantage à l’esprit qu’à la lettre du texte, qui exprime une volonté politique. Or, il y a une réelle unanimité pour progresser vers l’égalité entre les hommes et les femmes. Cette résolution ne vise pas autre chose.

Nous aurons bien le temps d’amender la proposition dans le sens proposé par Monsieur de La Verpillière. Mais il vaut mieux travailler la proposition et l’améliorer que de s’y opposer par principe.

Mme la rapporteure. Bernard Roman a parfaitement résumé la situation : pour que cette proposition de résolution puisse être discutée et amendée en séance, il convient de l’adopter !

J’indique également à Étienne Blanc que le principe de subsidiarité est respecté par la proposition de résolution qui distingue les actions à mener à l’échelle nationale et à l’échelle de l’Union.

La Commission adopte alors sans modification l’article unique de la proposition de résolution, celle-ci étant en conséquence adoptée sans modification.

*

* *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter la proposition de résolution visant à promouvoir l’harmonisation des législations européennes applicables aux droits des femmes suivant le principe de la « clause de l’Européenne la plus favorisée », dont le texte figure ci-après.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION ADOPTÉE PAR LA COMMISSION visant À promouvoir l’harmonisation des lÉgislations europÉennes applicables aux droits des femmes suivant le principe de la « clause de l’europÉenne la plus favorisÉe »

Article unique


L’Assemblée nationale,


Vu l’article 151-5 du Règlement de l’Assemblée nationale,


Vu l’article 2 du Traité sur l’Union européenne qui établit que l’égalité est une valeur fondatrice de l’Union et commune aux États membres dans une société caractérisée par l’égalité entre les femmes et les hommes ;


Vu l’article 3 du Traité sur l’Union européenne qui énonce que l’Union promeut l’égalité entre les femmes et les hommes ;


Vu l’article 8 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne qui précise que pour toutes ses actions, l’Union cherche à éliminer les inégalités et à promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes ;


Vu l’article 10 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne qui stipule que dans la définition et la mise en
œuvre de ses politiques et actions, l’Union cherche à combattre toute discrimination fondée sur le sexe ;


Vu l’article 19 § 1 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne qui stipule que le Conseil statuant conformément à une procédure législative spéciale et après approbation du Parlement européen, peut prendre les mesures nécessaires en vue de combattre toute discrimination fondée sur le sexe.


Vu l’article 19 § 2 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne qui précise que le Parlement européen et le Conseil statuant conformément à la procédure législative ordinaire, peuvent adopter les principes de base des mesures d’encouragement communautaire, à l’exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et règlementaires des États membres pour combattre toute discrimination fondée sur le sexe ;


Vu l’article II-23 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union indiquant que l’égalité entre les hommes et les femmes doit être assurée dans tous les domaines, y compris en matière d’emploi, de travail et de rémunération ;


Vu l’article 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;


Vu la Convention du 18 décembre 1979 de l’organisation des Nations unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et son protocole ;


Vu le programme d’action de la Quatrième conférence mondiale sur les femmes qui s’est tenue à Beijing en septembre 1995, au travers duquel les gouvernements se sont engagés à veiller à ce que le souci d’équité entre les sexes imprègne toutes les politiques et tous leurs programmes ;


Vu la communication du 1er mars 2006 de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions « Une feuille de route pour l’égalité entre les femmes et les hommes - 2006-2010» (COM 2006, 92 final) ;


Vu le règlement (CE) No 1922/2006 du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 portant création d’un Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes ;


Considérant, malgré l’existence des Traités européens et conventions internationales en vigueur, que les États membres ne se sont pas suffisamment prévalus des bases juridiques inscrites dans le droit communautaire et des marges de man
œuvre existantes pour améliorer la législation afin de combattre les nombreuses inégalités, injustices et sexisme à l’encontre des femmes, qui subsistent encore dans tous les secteurs de notre société ;


Considérant de surcroît que, si la situation des femmes s’est améliorée dans certains États membres de l’Union européenne, d’autres en revanche connaissent actuellement une régression voire la négation des droits fondamentaux des femmes ;


Considérant que la cause des femmes doit passer par une harmonisation par le haut des législations sur l’égalité entre les femmes et les hommes ainsi que sur le respect de leurs droits, notamment en matière de santé reproductive et de lutte contre les violences et l’exploitation sexuelle ;


Considérant que chaque avancée de la condition des femmes fait avancer la société toute entière ;


1) Félicite la Présidence espagnole de l’Union Européenne pour avoir mis l’égalité entre les hommes et les femmes au centre de ses priorités et notamment :


– de consacrer les 25 et 26 mars 2010 un Conseil des ministres intégralement à la question de l’égalité hommes-femmes ;


– de préparer un plan pour l’égalité des chances entre les hommes et les femmes entre 2011 et 2015, notamment concernant le marché du travail ;


– de proposer la modification de plusieurs directives existantes dans un sens plus protecteur ;


– de soutenir une proposition de directive européenne étendant la législation européenne existante prohibant toute forme de discrimination fondée sur le sexe, jusqu’ici limitée à l’emploi, à tous les domaines de la vie quotidienne (protection sociale, éducation, accessibilité, fourniture de biens et services, y compris le logement).


2)  Souligne, compte tenu de la répartition des compétences entre l’Union Européenne et les États membres en matière de lutte pour l’égalité entre les hommes et les femmes, que le rôle des parlements nationaux et du Parlement européen soit pleinement respecté ;


3)  Souhaite que l’Assemblée nationale soit étroitement associée aux travaux parlementaires qui auront lieu sous présidence espagnole et souligne vis-à-vis du Parlement européen sa disponibilité quant à toute initiative de coopération interparlementaire sur ce sujet.


Invite le gouvernement
Au niveau national,
4)  à présenter, à court terme, devant le Parlement un rapport présentant les dispositions législatives et réglementaires des États membres de l’Union les plus progressistes à l’égard des femmes à l’issu duquel sera présenté un projet de loi visant à aligner la législation française sur ces dispositions; la présente loi pourra être, le cas échéant, complétée utilement par les avancées apportée par une prochaine initiative européenne ;


Au niveau européen,


5)  à demander, à l’occasion de la Présidence espagnole de l’Union Européenne, aux ministres en charge de l’égalité entre les hommes et les femmes, de proposer de nouveaux moyens innovants d’amélioration de la législation en matière d’égalité hommes femmes, notamment sur les bases proposées par l’initiative de la « clause de l’Européenne la plus favorisée » qui permet une harmonisation vers le haut des droits des femmes ;


6)  à demander, dans ce cadre à ce que la Commission européenne puisse confier à l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes la réalisation d’une étude visant à analyser et à répertorier les dispositions législatives et réglementaires des États membres les plus élevées et les plus progressistes à l’égard des femmes ;


7)  à demander, à l’issue de cette étude, aux États membres de proposer à la Commission européenne de mettre en
œuvre les principes de « la clause de l’Européenne la plus favorisée ».

© Assemblée nationale

1 () Mme Anne Grommerch et M. Christophe Caresche, rapport n° 2279, 4 février 2010. La commission des Affaires européennes a également rejeté une proposition de résolution similaire (n° 2168) de Mme Marie-Hélène amiable et plusieurs de ses collègues de la gauche démocrate et républicaine, visant à introduire la « clause de l’Européenne la plus favorisée », déposée le 17 décembre 2009

2 () Mme Gisèle Halimi et « Choisir la cause des femmes », La clause de l’Européenne la plus favorisée : le meilleur de l’Europe pour les femmes, Éditions Des Femmes, 15 mai 2008, 361 pages.

3 () Commission européenne, L’égalité entre les hommes et les femmes – 2010, Rapport au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique, social européen et au Comité des région, COM (2009) 694 final, 18 décembre 2009.

4 () Ibid., page 10.

5 () Proposition de loi (n° 2121) de Mme Danielle Bousquet et M. Guy Geoffroy et plusieurs de leurs collègues, renforçant la protection des victimes et la prévention et la répression des violences faites aux femmes, déposée le 27 novembre 2009.

6 () Fondation Robert Schuman, Les femmes et l’Europe, Questions d’Europe n° 104, 30 juin 2008.

7 () Commission européenne, communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, Une feuille de route pour l’égalité entre les femmes et les hommes, COM(2006) 92, 1er mars 2006.

8 () Commission européenne, communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, Vers une stratégie-cadre communautaire en matière d’égalité entre les femmes et les hommes, COM(2005) 335, 7 juin 2000.

9 () Document n° 15488/09, 30 novembre 2009.

10 () Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil portant modification de la directive 92/85/CEE du Conseil concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail.