Accueil > Documents parlementaires > Les rapports législatifs
Version PDF
Retour vers le dossier législatif


N
° 2342

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 février 2010.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, adopté par le Sénat, autorisant l’approbation du protocole additionnel à l’accord de siège entre le Gouvernement de la République française et l’Organisation internationale pour l’énergie de fusion en vue de la mise en œuvre conjointe du projet ITER relatif au rôle de l’inspection du travail sur le site de l’Organisation internationale ITER et portant sur la santé et la sécurité au travail,

par M. Michel DESTOT

Député

___

ET

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Voir les numéros  :

Sénat : 15, 179, 180 et T.A. 44 (2009-2010).

Assemblée nationale : 2201.

INTRODUCTION 5

I – ITER, UN PROJET DE RECHERCHE ATTENDU ET TRANSPARENT 7

A – DE GRANDES AVANCÉES SCIENTIFIQUES EN PERSPECTIVE 7

1) La fusion, avenir du nucléaire ? 7

2) ITER, étape cruciale pour la maîtrise de la fusion 8

B – UNE OPPORTUNITÉ POUR L’EUROPE ET POUR LA FRANCE 9

1) Une contribution majeure de l’Union européenne 9

2) Des retombées importantes pour la France 10

C – UN ENCADREMENT JURIDIQUE QUI FAVORISE LA TRANSPARENCE 10

1) La soumission à la réglementation nucléaire nationale 10

2) Un régime exceptionnel au regard du droit international 11

II – LE PROTOCOLE ADDITIONNEL, UN ELEMENT SUPPLEMENTAIRE DE TRANSPARENCE 13

CONCLUSION 15

EXAMEN EN COMMISSION 17

ANNEXE – TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES 19

Mesdames, Messieurs,

La construction en France, sur le site de Cadarache, d’un réacteur expérimental utilisant l’énergie de la fusion nucléaire, baptisé ITER (International thermonuclear experimental reactor), implique que soient précisés plusieurs points juridiques concernant tant le fonctionnement administratif de l’organisation internationale ITER que les rapports entre cette organisation et le droit national.

La plupart de ces questions sont réglées par l’accord international ITER, signé le 21 novembre 2006, et l’accord relatif au siège de l’organisation ITER sur le territoire français, signé le 7 novembre 2007. Toutefois, l’accord de siège prévoit la signature de deux protocoles additionnels, l’un concernant les règles applicables en matière de droit et de sécurité au travail, l’autre sur la confidentialité d’informations classifiées au titre du droit français transmises à l’organisation ITER.

Si le deuxième protocole se borne à rappeler les règles du droit français en matière d’informations classifiées, le premier protocole additionnel paraît plus innovant, en ce qu’il confère à des autorités nationales, pour les motifs spécifiques liés au droit et à la santé au travail, un droit d’entrée dans les locaux d’ITER qui n’est pas habituel dans le cas des organisations internationales, compte tenu des privilèges et immunités qui leur sont traditionnellement accordés.

Objet du présent projet de loi, le protocole additionnel relatif au rôle de l’inspection du travail sur le site d’ITER est un des éléments majeurs permettant de souligner que le projet ITER, dont l’intérêt scientifique est indéniable, s’organise selon des exigences de transparence particulièrement fortes.

I – ITER, UN PROJET DE RECHERCHE ATTENDU ET TRANSPARENT

A – De grandes avancées scientifiques en perspective

1) La fusion, avenir du nucléaire ?

L’énergie nucléaire, pressentie dès le début du XXème siècle par les premiers physiciens s’étant intéressés au noyau de l’atome, notamment Becquerel et les époux Curie, a été théorisée au cours des années 1930. Le noyau d’un atome étant composé d’éléments plus petits, les protons et les neutrons, il a rapidement été imaginé que la force reliant ces éléments pouvait être utilisée pour produire de l’énergie.

Les deux principales réactions nucléaires permettant de produire de l’énergie sont la fission d’un noyau atomique, et la fusion de deux noyaux. Les premières applications de ces théories furent militaires, avec la première utilisation de la bombe A (à fission) en 1945 à Hiroshima puis Nagasaki, et la mise au point d’une bombe H (à fusion) dès 1952.

L’utilisation civile de l’énergie nucléaire fut plus longue à mettre au point. En effet, les réactions nucléaires de fission, et encore davantage pour la fusion, produisent une énergie bien supérieure à toute autre réaction physique connue. Afin de convertir cette énergie à des usages civils, notamment la production d’électricité, il est nécessaire de contrôler ces réactions, sous peine de voir l’énergie produite détruire l’outil utilisé pour créer la réaction – ce qui est, au contraire, le fondement même de l’usage militaire de l’énergie nucléaire.

La réaction de fission est à l’origine des premiers réacteurs nucléaires, et reste le seul processus nucléaire actuellement utilisé pour produire industriellement de l’électricité. Bien que plus difficile à provoquer et entretenir artificiellement, la fusion nucléaire possède trois avantages considérables sur la fission. En premier lieu, elle ne produit pas de déchets radioactifs à haute radioactivité et à vie longue, contrairement à la fission de noyaux d’uranium ou de plutonium, qui laisse inexploitée une partie du combustible employé, même après retraitement.

En second lieu, la fusion recourt à des matières premières bien plus abondantes que l’uranium ou le plutonium requis par les centrales à fission actuelles. Théoriquement, la fusion de deutérium et d’hélium est même un procédé permettant de créer de l’énergie sans limite, le deutérium étant très abondant dans la nature. En pratique, les moyens technologiques disponibles impliquent l’utilisation de tritium, extrait du lithium, dont les ressources sont finies, mais sans commune mesure avec celles actuellement disponibles pour l’uranium naturel (1).

Enfin, la fusion nucléaire permet, avec peu de matières premières, de produire une quantité très importante d’énergie. On estime que la réaction de fusion génère au moins quatre fois plus d’énergie par atome que la réaction de fission.

Plusieurs réacteurs expérimentaux ont été construits afin de progresser vers la maîtrise de la réaction de fusion à des fins civiles. Depuis la percée théorique réalisée par les équipes soviétiques dans les années 1950, la plupart de ces réacteurs possèdent une forme torique, à savoir un tube replié sur lui-même. Cette catégorie de réacteurs a ainsi été baptisée « tokamak », de l’acronyme russe Toroidalnaya kamera c magnitnymi katushkami (chambre torique de confinement magnétique).

Après avoir construit plusieurs réacteurs de ce type, dont seul Tore Supra est encore en activité après la suspension des activités du TFR et de Petula, la France participe ainsi au projet européen JET (Joint european torus) situé au Royaume-Uni. Un autre tokamak européen, Asdex-upgrade, est utilisé par l’institut Max Planck pour la physique des plasmas sur le site de Garching en Bavière.

Hors d’Europe, l’agence nationale pour l’énergie atomique japonaise met en œuvre, pour sa part, le réacteur JT-60 sur son site de Naka. L’entreprise américaine General Atomics a développé, sur son site de San Diego et en partenariat avec le ministère américain pour l’énergie et de nombreux organismes de recherche internationaux, une gamme de différents réacteurs, du premier Doublet au plus récent DIII-D. Enfin, le réacteur KSTAR, construit sur le site coréen de Daejon par le National fusion research institute, est le tokamak le plus récent.

D’autres projets visent à expérimenter une autre technique permettant de maîtriser la fusion nucléaire en utilisant le rayonnement laser. Le Commissariat à l’énergie atomique développe ainsi le programme de « Laser mégajoule », et participe au projet européen HiPER. Le site de Livermore, en Californie, accueille pour sa part le projet Nif (National ignition facility).

Lancé dès 1985 par le dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev, le projet de construire un nouveau réacteur expérimental pour avancer vers la maîtrise de la fusion a été rejoint par les Etats-Unis, le Japon et l’Europe. Sous l’égide de l’Agence internationale pour l’énergie atomique, le projet ITER est aujourd’hui l’un des plus prometteurs pour l’avenir de l’énergie nucléaire.

2) ITER, étape cruciale pour la maîtrise de la fusion

Le procédé de fusion tel qu’il opère dans les réacteurs de recherche de type tokamaks, précités, implique de créer, et de conserver stable dans un champ magnétique, un plasma mêlant des atomes de tritium et des atomes de deutérium. Le plasma ne peut être entretenu qu’en chauffant les matériaux présents dans le réacteur à des températures très importantes, de plusieurs millions de degrés.

Les expériences réalisées jusqu’à présent ont permis d’atteindre des températures de l’ordre de 20 millions de degrés, et d’allonger jusqu’à deux minutes la durée pendant laquelle le plasma produit de l’énergie. L’objectif final est d’obtenir un plasma suffisamment chaud pour entretenir la réaction de fusion sur de longues durées, tout en dégageant un surplus de chaleur pouvant être capté et utilisé pour produire de l’électricité.

Etape intermédiaire, ITER doit permettre de créer, en consommant 50 MW, un plasma dégageant une énergie de 500 MW pendant 400 secondes – ce qui représente un saut important en matière de puissance produite rapportée à la puissance induite – puis de plus de 200 MW – ce qui permet d’entretenir la réaction de fusion – pendant 16 minutes environ. Les records actuels sont de 16 MW créés pour 25 MW investis (détenu par JET) et de 6 minutes 40 secondes pour l’auto-entretien de la réaction de fusion (réalisé dans Tore supra).

ITER est donc voué à rester un outil de recherche. Afin de remplir les objectifs qui lui ont été fixés, de nombreux éléments doivent en effet être testés, comme les matériaux à utiliser pour fabriquer les « caloporteurs » voués à évacuer la chaleur produite par la réaction en fusion non réinjectée dans le plasma.

B – Une opportunité pour l’Europe et pour la France

Réacteur expérimental destiné à la recherche appliquée en matière de physique nucléaire, ITER est un projet international de grande ampleur, qui implique un budget important, estimé à 10 milliards d’euros sur 45 ans.

1) Une contribution majeure de l’Union européenne

La participation à la construction d’ITER est répartie entre les sept parties : l’Europe, la Chine, la Corée du Sud, les Etats-Unis, l’Inde, le Japon et la Russie (2). La majeure partie des contributions à la construction du site seront fournies en nature.

L’ampleur des investissements nécessaires à la réussite d’ITER a longtemps ralenti les négociations, qui achoppaient notamment sur le choix du site d’implantation du futur réacteur. Afin de faire pencher la balance en faveur du site français de Cadarache, soutenu par l’ensemble de l’Union européenne, celle-ci accepta de prendre en charge une part importante des frais de construction d’ITER (45,46 % contre environ 9,09 % pour les autres) et de financer une partie de la rénovation du réacteur JT60 japonais. La contribution européenne est fournie par l’intermédiaire d’une agence implantée à Barcelone, baptisée « F4E » (Fusion for energy), dotée d’un budget de 4 milliards d’euros pour les dix premières années du projet ITER.

En plus de sa participation au financement de F4E, la France assume également un certain nombre de charges financières au titre d’Etat d’accueil du projet ITER. Elle s’engage à aménager à ses frais le site d’accueil du tokamak, contribue ainsi directement au budget d’ITER, finance une partie de la rénovation de JT60 et participera directement au coût du démantèlement du réacteur. L’ensemble des contributions françaises à ITER est estimé à 871,5 millions d’euros, auxquels s’ajoutent l’aménagement des voies d’accès au site de Cadarache et la construction d’un lycée international à Manosque pour accueillir les enfants des personnels de l’organisation ITER.

2) Des retombées importantes pour la France

Toutefois, ces coûts importants doivent être mis en perspective avec les conséquences économiques positives de l’implantation d’ITER en France. Ainsi, l’arrivée de 400 fonctionnaires internationaux, et les nombreux chantiers qui seront lancés dans le cadre du projet, devrait générer environ 3000 emplois indirects pendant la construction du réacteur, et 3200 une fois celui-ci en état de fonctionner.

D’ores et déjà, les entreprises françaises se sont vues attribuer 230 millions d’euros de contrats.

C – Un encadrement juridique qui favorise la transparence

Projet de recherche visant à diversifier nos ressources énergétiques, ITER est soumis à un régime juridique particulièrement complet en matière de transparence et de sûreté nucléaire. En effet, contrairement à de nombreux réacteurs de recherche internationaux, ITER est considéré comme une « installation nucléaire de base », dénomination qui recouvre l’ensemble des centrales nucléaires en activité en France. De plus, les rapports entre les règles de fonctionnement de l’organisation internationale ITER et le droit national connaissent plusieurs exceptions par rapport à d’autres accords internationaux.

1) La soumission à la réglementation nucléaire nationale

Considéré, dès l’origine, comme une installation nucléaire de base, le réacteur de recherche ITER est soumis au respect de la loi n°2006-686 du 13 juin 2006 sur la transparence et la sécurité nucléaires. A l’inverse, le réacteur européen JET, construit en Angleterre, est soumis aux seules règles du droit environnemental britannique, telles qu’elles sont appliquées à tout autre équipement industriel.

La différence de traitement entre ces deux tokamaks s’explique pour deux raisons. D’abord, les conditions élaborées par les droits nationaux pour qualifier un réacteur de recherche d’installation nucléaire de base peuvent différer. De plus, la nature des matériaux employés peut induire une autre catégorisation juridique.

En tant qu’installation nucléaire, ITER se doit également d’appliquer les règles nationales concernant l’exposition des personnes aux éventuelles radiations, telles qu’elles sont fixées dans le code du travail et le code de la santé publique.

Enfin, les impératifs de protection et de contrôle des matériaux nucléaires présents sur le site, rappelés dans les articles L.1332-1 et L.1333-1 et suivants du code de la défense, sont applicables.

Une telle situation, qui voit un projet international entièrement soumis au droit national concernant la transparence et la sécurité nucléaires, était largement inconnue à ce jour. Le Centre européen de recherche nucléaire (CERN), construit sur la frontière franco-suisse, n’est pas considéré comme une installation nucléaire de base, bien qu’un accord entre la France et l’organisation européenne CERN ait été conclu en 2000 pour garantir des niveaux de protection équivalents dans les structures de recherche prévues.

D’autres installations nucléaires sont administrées directement par le centre commun de recherche, une agence de l’Union européenne. Toutefois, aucun partenaire étranger n’est présent dans ces programmes.

Le seul autre cas d’installation nucléaire de base, sur le sol français, dirigée par une organisation internationale est le réacteur ILL de l’Institut Max von Laue – Paul Langevin, situé à Grenoble. A la différence d’ITER, cette entité n’est pas considérée comme une organisation internationale proprement dite, et ne dispose donc pas des différents privilèges et immunités traditionnellement accordés à ces personnes morales.

2) Un régime exceptionnel au regard du droit international

Le projet ITER est administré par plusieurs structures : l’organisation internationale ITER, qui administre l’ensemble du projet ; les agences ITER de chaque partie (F4E pour l’Union européenne), qui gèrent les contributions spécifiques ; et des institutions françaises : le Haut représentant pour le projet ITER en France et la mission ITER France, placée sous l’ordre du préfet de la région Provence-Alpes-Côtes d’Azur.

Les rapports entre l’organisation ITER et le gouvernement français sont organisés par l’accord du 7 novembre 2007 relatif au siège de l’organisation sur le sol français. Les personnels internationaux reçoivent, au titre de cet accord, des privilèges et immunités traditionnellement accordés aux employés d’organisations internationales vis-à-vis du droit national du pays où ils exercent leur activité, par exemple l’immunité de juridiction, ou certaines facilités particulières en matière de procédures douanières.

Dès lors, la soumission du projet ITER aux règles de droit national en matière nucléaire, en ce qu’elle permet à l’Autorité de sûreté nucléaire d’effectuer des contrôles sur le site, constitue une première exception au regard du droit commun des organisations internationales tel que prévu par la Convention de Vienne de 1961 sur les relations diplomatiques de 1961.

Une deuxième série d’exceptions est prévue, qui fait l’objet du présent protocole additionnel. En effet, compte tenu des particularités de l’activité conduite par ITER, l’accord du 7 novembre 2007 prévoit, à ses articles 3 et 17, que l’inspection du travail peut contrôler le respect par ITER des règles nationales en matière de santé et de sécurité au travail. La signature d’un accord entièrement consacré à ce thème était imposée par ce même article.

II – LE PROTOCOLE ADDITIONNEL, UN ELEMENT SUPPLEMENTAIRE DE TRANSPARENCE

Prévu à la fois par l’accord du 21 novembre 2006 donnant naissance à l’organisation internationale ITER et par l’accord du 7 novembre 2007 relatif au siège de l’organisation en France, le protocole additionnel relatif au rôle de l’inspection du travail en matière de santé et de sécurité au travail a été conclu sous la forme d’échange de lettres en date du 14 et du 29 janvier 2009.

Les missions que remplit l’inspection du travail sur le site d’ITER sont précisées, comme le rappelle l’article 2 du présent protocole, par l’article 14 de l’accord ITER de 2006, ainsi que les articles 3 et 17 de l’accord de siège de 2007. Elles sont liées au respect, par ITER, des règles françaises de santé et de sécurité au travail, ainsi que de respect de la réglementation en matière de radioprotection, en étroite collaboration, dans ce dernier domaine, avec les inspecteurs directement compétents.

Les articles 3 à 5 précisent les modalités de coopération entre les autorités d’ITER et l’inspection du travail. L’article 3 autorise les inspecteurs du travail à se rendre sur les lieux, selon un calendrier convenu à l’avance avec le Directeur général, ou en cas d’événement particulier. Ce droit d’entrée est une exception au regard du principe général d’inviolabilité des bâtiments des organisations internationales, mais permet de renforcer la transparence du fonctionnement d’ITER. L’article 4 indique que les visites de l’inspection du travail doivent donner lieu à une communication adressée au Directeur général, lequel doit y donner suite dans les meilleurs délais. L’article 5 organise la coordination en amont entre l’inspection du travail et la direction d’ITER, afin de prévenir tout manquement aux règles nationales en matière de sécurité et de santé au travail.

Les articles 6 à 9 contiennent des clauses classiques en droit international, privilégiant la négociation pour le règlement des différends, prévoyant une entrée en vigueur dès réception des instruments de ratification et pour une durée égale à celle de l’accord ITER de 2006, soit 35 ans avec une possibilité d’extension de dix ans sur décision du Conseil ITER et sans révision de l’accord.

CONCLUSION

Le projet ITER pourrait permettre une avancée considérable pour l’usage civil de l’atome. La maîtrise de la réaction de fusion ouvre en effet des perspectives essentielles pour notre avenir énergétique, en ouvrant l’accès à une source d’énergie plus propre, plus abondante et donc moins coûteuse que toutes les technologies existantes.

Les moyens importants mobilisés par sept puissances nucléaires mondiales, dont la France et l’Europe assurent une part notable, ont déjà permis de créer de l’activité économique, et des emplois, sur le site français finalement retenu pour la construction d’ITER.

Elément remarquable, ce réacteur de recherche est soumis aux mêmes obligations de transparence et de sûreté que n’importe quelle centrale électro-nucléaire sur notre territoire. Toutes les parties ont convenu qu’il n’était pas pensable d’entretenir un soupçon d’opacité pour un programme aussi important. C’est pourquoi l’applicabilité des règles nationales régissant les activités nucléaires a été prévue dès l’origine.

Le présent protocole additionnel renforce cette transparence, en autorisant l’inspection du travail à se rendre dans les locaux d’ITER, ce qui constitue une exception au regard des règles traditionnelles du droit international.

Favorisant l’acceptabilité par la population d’un programme de recherche qui suscite un important espoir, votre Rapporteur invite la commission des affaires étrangères à adopter le présent projet de loi autorisant l’approbation de ce protocole.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission examine le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 24 février 2010.

Après l’exposé du rapporteur, un débat a lieu.

M. Jean-Paul Lecoq. Au risque de vous surprendre, je ne suis pas un partisan de la production d’énergie par fission nucléaire. En revanche je pense qu’il est important de développer la recherche sur la fusion nucléaire. Sur le contenu de l’accord, il me semble déceler une difficulté. La possibilité d’inspecter le site d’ITER emporte-t-elle des conséquences en termes de responsabilité des autorités françaises à l’égard de la santé des travailleurs ? Par exemple, dans trente ans, des personnels ayant travaillé sur le site et victimes de maladies professionnelles pourront-ils se retourner, non seulement contre l’organisation internationale ITER, mais aussi contre l’État français pour le compte de ses inspecteurs ? Par ailleurs, en droit français l’inspecteur du travail peut pénétrer sans autorisation dans des locaux professionnels en cas de danger imminent. Cela ne semble pas être le cas dans l’accord qui nous est soumis.

M. Michel Destot, rapporteur. La seule entité responsable de la radioprotection des personnels, de leur sécurité au travail, est et demeure l’organisation internationale ITER. L’organisation dispose d’un régime propre de protection sociale, qui couvre notamment le risque d’accident de travail. L’applicabilité des règles françaises dans ces domaines permet de fixer des règles strictes sans les possibilités de dérogation que le statut international d’ITER aurait dû lui conférer.

M. Jean-Paul Lecoq. Les sites en question abritent-ils également des organisations représentatives des salariés ?

M. Michel Destot, rapporteur. Oui, si j’en juge par l’expérience similaire du synchrotron à Grenoble.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification le projet de loi (no 2201).

*

La commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, le présent projet de loi dans le texte figurant en annexe du présent rapport.

ANNEXE

TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Article unique

(Non modifié)

Est autorisée l’approbation du protocole additionnel, sous forme d’échange de lettres, à l’accord de siège entre le Gouvernement de la République française et l’Organisation internationale pour l’énergie de fusion en vue de la mise en œuvre conjointe du projet ITER relatif au rôle de l’inspection du travail sur le site de l’Organisation internationale ITER et portant sur la santé et la sécurité au travail, signées à Paris le 14 janvier 2009 et à Saint-Paul-lez-Durance le 29 janvier 2009, et dont le texte est annexé à la présente loi.

NB : Le texte du protocole additionnel figure en annexe au projet de loi (n° 2201).

© Assemblée nationale

1 () Selon le Commissariat à l’énergie atomique, environ 12 millions de tonnes de lithium sont présentes directement dans l’écorce terrestre, à comparer aux 4 millions de tonnes estimées pour l’uranium naturel. Par ailleurs, la présence de lithium dans l’eau de mer laisse supposer que plus de 200 milliards de tonnes supplémentaires seraient disponibles en cas de besoin.

2 () Après avoir retiré sa participation en 1998, les Etats-Unis ont finalement décidé de rejoindre le projet en 2003, en même temps que la Chine annonçait sa participation. La Corée du Sud a rejoint ITER quelques mois après. L’Inde est partie au projet depuis 2005.