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Amendements  sur le projet ou la proposition

N° 2986

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 17 novembre 2010.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION DE LOI, visant à généraliser le dépistage précoce des troubles de l’audition,

PAR M. Jean-Pierre DUPONT,

Député.

——

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 2752.

INTRODUCTION 5

I.- TROUBLES DE L’AUDITION : UN HANDICAP « INVISIBLE » QUI AFFECTE L’ENSEMBLE DE LA VIE SOCIALE 7

1. Une prévalence non négligeable, des conséquences lourdes 7

2. De récents progrès en matière de prise en charge médicale… 8

3. … Mais un diagnostic encore posé trop tardivement 9

II.- UNE PRISE DE CONSCIENCE PROGRESSIVE DES POUVOIRS PUBLICS 11

1. Des initiatives locales à la loi du 9 août 2004 11

2. Les interrogations du Comité consultatif national d’éthique 11

3. Les expérimentations menées par l’Assurance maladie 13

III.- LA NÉCESSITÉ DE GÉNÉRALISER LE DÉPISTAGE 17

1. Le plan gouvernemental pour les personnes sourdes et malentendantes de février 2010 : un plan inachevé 17

2. La généralisation du dépistage : le dispositif proposé 18

a) La nécessité d’un dépistage en deux temps : repérage puis diagnostic 18

b) Une information objective, complète et neutre sur les modes de communication disponibles 19

3. L’indispensable développement des dispositifs d’accompagnement 19

a) Développer l’accompagnement en aval 19

b) Réaffirmer la place de la langue des signes française 21

TRAVAUX DE LA COMMISSION 23

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 23

II.- EXAMEN DES ARTICLES 39

Article 1er (Art. L. 2132-2-2 (nouveau) du code de la santé publique) : Mise en place d’un dépistage précoce des troubles de l’audition 39

Article 2  Calendrier de mise en œuvre 45

Article 3  Gage 46

TABLEAU COMPARATIF 49

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF 53

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION 55

ANNEXE : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR 59

INTRODUCTION

La proposition de loi qui vous est présentée aujourd’hui est issue d’un long travail parlementaire et constitue un bon exemple de la coproduction législative défendue par le groupe majoritaire de notre Assemblée et permise par la révision constitutionnelle de 2008.

À l’occasion d’un colloque organisé en février dernier par la Fondation Jacques Chirac consacré notamment au handicap auditif, l’attention de votre rapporteur a été attirée sur la problématique du dépistage précoce des déficiences auditives.

Suite à cela, le président du groupe UMP a confié à Mme Edvige Antier, M. Jean-François Chossy et à votre rapporteur, une mission sur le dépistage précoce de la surdité. Au cours de cette mission, nous avons rencontré l’ensemble des acteurs de ce dossier : les experts médicaux, le ministère, la Haute Autorité de santé, l’Académie de médecine, la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), le comité consultatif national d’éthique et, bien sûr, l’ensemble des associations concernées par le dossier.

Au terme de notre réflexion, il nous est apparu indispensable, sans attendre la prochaine loi de santé publique, de déposer cette proposition de loi qui vous est aujourd’hui proposée. La commission des affaires sociales s’est saisie avec un très grand intérêt de ce dossier et les débats ont été particulièrement riches et intéressants, à la hauteur des interrogations soulevées par cette initiative, en particulier au sein de la communauté sourde. Au final, la commission a, sans revenir sur l’essentiel de la proposition, apporté un certain nombre de précisions et de compléments qui répondent en grande partie aux interrogations de la communauté sourde.

L’objectif de cette proposition de loi est clair et part d’un constat simple : chaque année, un enfant sur mille naît avec une déficience auditive et près de 800 sont diagnostiqués chaque année avant l’âge de 2 ans. Bien sûr ces déficiences auditives sont susceptibles de retentir à la fois sur toutes les acquisitions l’éducation et sur la scolarité et l’ensemble de la vie sociale, en raison de leur impact sur les possibilités de communiquer avec autrui.

Malheureusement, le diagnostic de la surdité est aujourd’hui posé en moyenne entre 16 et 18 mois, et parfois beaucoup plus tard. Or, l’ensemble de la communauté médicale considère que le dépistage et la prise en charge précoces de la surdité sont décisifs pour l’avenir de l’enfant et ce, quels que soient le traitement et la prise en charge – appareillage, implants cochléaires, rééducation, oralisme, langue des signes française (LSF).

Votre rapporteur insiste sur ce dernier point : il n’est en aucune manière dans nos intentions de privilégier telle ou telle forme de communication pour les enfants qui auront été diagnostiqués comme sourds : toutes les options devront être présentées aux parents à qui il reviendra bien sûr de faire un choix libre et éclairé. Tout malentendu sur ce point doit être dissipé.

Plusieurs expérimentations de dépistage précoce des troubles de l’audition ont été mises en place avec succès au cours de ces dernières années dans certaines maternités. Malheureusement, ces initiatives ne sont pas toujours bien coordonnées et sont surtout très inégalement réparties sur le territoire ce qui aboutit à des inégalités d’accès à la santé entre les enfants, qui ne sont pas acceptables.

C’est pour mettre un terme à ces inégalités qu’il vous est proposé de généraliser le dépistage, ce qui présenterait de nombreux avantages :

– sur le plan médical, il permettrait de gagner un temps précieux et décisif pour le développement futur de l’enfant, quel que soit le mode de communication choisi ultérieurement ;

– sur le plan médico-économique, il permettrait de réduire les coûts de prise en charge et d’accompagnement d’un enfant atteint de troubles auditifs dépisté tardivement ;

– sur le plan social, il permettrait d’atteindre toutes les familles, y compris celles qui ont des difficultés d’accès aux soins et donc de réduire les inégalités de santé ;

– sur le plan pratique, la régionalisation du dépistage permettrait un déploiement progressif, tel que souhaité par la plupart des acteurs concernés, sur une période de deux ans.

I.- TROUBLES DE L’AUDITION : UN HANDICAP « INVISIBLE »
QUI AFFECTE L’ENSEMBLE DE LA VIE SOCIALE

À l’occasion de la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a été définie, dans son article 2, pour la première fois, la notion de handicap et l’a en particulier étendue aux handicaps sensoriels et cognitifs, incluant ainsi la surdité.

On estime, en effet, à 6,6 % de la population (soit 4,09 millions de personnes) le nombre de Français souffrant d’un déficit auditif, dont 88 % sont devenus sourds ou malentendants au cours de leur vie. Ce public est d’une grande diversité : 483 000 personnes sont atteintes de déficience auditive profonde ou sévère, 600 000 malentendants portent un appareil auditif et 80 000 pratiquent la langue des signes française (LSF).

Si ce handicap concerne bien sûr majoritairement les personnes âgées, les enfants sont également touchés : chaque année, un enfant sur mille naît avec une déficience auditive ou est dépisté en tant que tel avant l’âge de 2 ans, soit environ 800 enfants par an.

1. Une prévalence non négligeable, des conséquences lourdes

Près de 85 % des surdités sont génétiques et peuvent donc être dépistées précocement. Certaines apparaissent plus tardivement à la suite par exemple d’otites séreuses et ne peuvent donc être détectées à la naissance. Si l’on y ajoute les surdités qui se développent dans les deux premières années, il y a en France environ 2 000 enfants sourds par année d’âge.

Dans plus de 90 % des cas, leurs deux parents sont « entendants ».

Les troubles de l’audition sont détectés en moyenne entre quatorze et dix-huit mois de l’enfant. Les enfants sourds sont souvent repérés trop tardivement, et l’on découvre encore des enfants sourds profonds à 2 ans et demi ou 3 ans. De plus, chaque année, des enfants en grande difficulté, voire en échec scolaire, sont repérés avec une surdité diagnostiquée très tardivement, et l’on découvre encore actuellement des enfants présentant des surdités élevées dépistées seulement vers huit ans.

Le diagnostic des troubles de l’audition peut être posé tardivement pour plusieurs raisons : la première d’entre elles est un dépistage tardif, mais aussi parfois la difficulté à poser le diagnostic (tests faussement « négatifs », absence de repérage par les professionnels de santé, banalisation des symptômes, etc.) ou l’association d’autres facteurs (enfants allophones ; difficultés socio familiales ou/et comportementales, psychiques ; processus de compensation, etc.) et parfois d’un déni des parents dans la mesure où il s’agit d’un handicap « invisible ».

Le problème de ce diagnostic tardif est bien sûr que les déficiences auditives sont susceptibles de retentir sur l’ensemble de la vie sociale : un enfant qui entend mal est un enfant qui a des difficultés à se parler à lui-même (et donc à penser), à exprimer ses besoins et a fortiori à comprendre et à se faire comprendre des autres. C’est pourquoi, un enfant sourd, dépisté et pris en charge tardivement, peut rencontrer des troubles psychiques et comportementaux, difficilement rattrapables.

La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques a fait cette même analyse : « les handicaps auditifs entraînent des problèmes spécifiques dans l’accomplissement de la scolarité, en raison des difficultés rencontrées pour l’acquisition de la parole et du langage. Celles-ci sont d’autant plus grandes que la surdité est sévère et survient précocement. Selon l’enquête HID, environ 175 000 jeunes déficients auditifs âgés de 6 à 25 ans suivent des études initiales. Ils sont proportionnellement moins nombreux dans ce cas que l’ensemble des jeunes du même âge et cette différence augmente fortement avec le niveau d’études ».

2. De récents progrès en matière de prise en charge médicale…

Jusqu’à une date récente, la surdité a été considérée comme un handicap « invisible », qui ne se voit pas spontanément à la naissance, et donc moins « invalidant ». De plus, la difficulté de prise en charge pour les jeunes enfants rendait, croyait-on, moins nécessaire un dépistage précoce de ce handicap.

Les progrès de la médecine et l’amélioration des techniques ont modifié l’approche de la problématique de la prise en charge de la surdité de l’enfant.

L’ensemble de la communauté scientifique et médicale souligne l’importance de la communication dès le plus jeune âge, quel que soit le mode de stimulation choisi par les parents pour l’enfant : appareillage, implants cochléaires (1), rééducation, oralisme et langue des signes française (LSF). Cette « imprégnation » est essentielle dans la mesure où elle conditionne le développement affectif, cognitif puis linguistique de l’enfant.

Les modes de prise en charge de la surdité, en particulier pour le jeune enfant, se sont diversifiés au cours de ces dernières années. À côté des appareillages, de la communication en langue des signes (LDS), de la langue parlée complété (LPC) (2), de nouvelles techniques de compensation du handicap ont été proposées aux familles, souvent complémentaires, comme les implants cochléaires.

Pour les très jeunes enfants, le développement récent des implants cochléaires a constitué une avancée majeure qui a relancé le débat sur le dépistage précoce de la surdité. En effet, la pose d’implants cochléaires peut avoir lieu dès le dixième mois de l’enfant, voire avant comme cela se pratique dans certains pays (Canada, Luxembourg, Allemagne, etc.). Dans ce domaine, les évolutions scientifiques et les progrès de la médecine sont très rapides et auront des conséquences sur l’approche éthique et sociétale de la surdité, sa prise en charge et son accompagnement.

La précocité du repérage des troubles de l’audition est primordiale pour la mise en place ultérieure de la prise en charge et de l’accompagnement de la personne sourde et de sa famille, quels que soient ses choix, ou ceux de sa famille, que ce soit en matière de mode de communication, d’appareillage, voire d’implants.

Par ailleurs, la précocité du dépistage permet de diagnostiquer d’autres pathologies qui accompagnent trop souvent la surdité.

3. … Mais un diagnostic encore posé trop tardivement

Les autorités sanitaires, médicales et éthiques se sont saisies à plusieurs reprises du problème du dépistage de la surdité chez le jeune enfant. Elles considèrent, de façon quasi-unanime, que le diagnostic est encore posé trop tardivement, entre 14 et 18 mois, 16 mois en moyenne, parfois plus tard. Elles formulent plusieurs propositions d’amélioration en matière de dépistage, de prise en charge et d’accompagnement.

Dans son rapport de décembre 2009 sur l’accompagnement des familles et le suivi de l’enfant sourd de 0 à 6 ans, la Haute Autorité de santé (HAS) recommande de proposer un programme d’intervention précoce à tout enfant sourd et à sa famille, avant l’âge de 1 an, adapté à ses besoins particuliers et au projet éducatif choisi par les parents. Elle souligne que « la stimulation et l’éducation auditive avant les deux ans de l’enfant permettent d’atteindre un niveau de langue parlée supérieur à celui obtenu par les enfants qui n’ont pas bénéficié de stimulation et d’éducation auditive avant cet âge ».

L’Académie nationale de médecine recommande, dans son avis de juillet 2008, de mettre en place un « dépistage généralisé des déficits sensoriels à la naissance », afin de remédier à la diversité des modalités de dépistage et de prise en charge des enfants suspects d’atteinte auditive. Elle souligne la nécessité de mettre en place des mesures d’accompagnement en direction des familles, des professionnels des secteurs sanitaire et médico-social.

De même, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a récemment consacré ses travaux au problème de la surdité et de la déficience auditive (3) et souligne que « les solutions à la déficience auditive passent par la prévention, le dépistage et la prise en charge précoces et par la rééducation ». Et de poursuivre : « le dépistage et le traitement précoces chez les nouveaux-nés et les jeunes enfants permettent de prévenir les troubles du langage et les difficultés d’apprentissage ».

II.- UNE PRISE DE CONSCIENCE PROGRESSIVE
DES POUVOIRS PUBLICS

1. Des initiatives locales à la loi du 9 août 2004

Au niveau local, plusieurs expérimentations ont été engagées pour améliorer le dépistage précoce des troubles de l’audition en maternité, en particulier en Haute-Normandie, Basse-Normandie, Champagne-Ardennes et Alsace. Bien qu’intéressantes, elles restent tributaires de l’implication des acteurs locaux et sont inégalement réparties sur le territoire, creusant ainsi les inégalités de santé.

Au niveau national, les pouvoirs publics ont engagé, depuis quelques années, une action visant à harmoniser et à coordonner ces actions en matière de dépistage précoce des troubles de l’audition mais peinent encore à définir une stratégie nationale de dépistage de la surdité permanente néonatale. Une rubrique concernant ce dépistage est prévue dans le carnet de santé pour la période néonatale. Mais, elle est diversement renseignée par les médecins, faute d’une véritable politique coordonnée dans ce domaine. Il en va de même des certificats de santé qui, malgré leur refonte récente, sont peu remplis, peu transmis aux services de protection maternelle et infantile (PMI) et peu exploités. Or, leur intérêt est double : s’assurer du suivi médical des enfants par les familles et collecter, de façon anonyme, des données épidémiologiques à des fins statistiques.

La loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique a constitué une avancée importante : elle fixe, dans son rapport annexé, des objectifs en matière de dépistage de la surdité (objectif 67 sur les atteintes sensorielles de l’enfant). Ils prévoient notamment un dépistage systématique de la surdité congénitale en maternité (ou au plus tard avant l’âge d’un an).

Dans la droite ligne de la loi de 2004, la Haute Autorité de santé préconisait, dans un avis daté de janvier 2007, que « le dépistage systématique de la surdité profonde néonatale soit mis en œuvre au niveau national de façon progressive ».

2. Les interrogations du Comité consultatif national d’éthique

Suite à cette recommandation de la HAS, la Fédération nationale des sourds de France a saisi le Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé qui a rendu, en décembre 2007, un avis extrêmement balancé.

Le comité alertait les pouvoirs publics sur le risque que les nouvelles technologies de dépistage et d’appareillage « ne contribuent indirectement à réactiver d’anciens préjugés sur la surdité longtemps perçue comme un handicap mental. De tels préjugés pourraient être propagés involontairement par le choix de politiques de dépistage et de suivi trop contraignants pour les parents et les enfants sourds, avec le risque que les progrès réalisés dans la sophistication des techniques de dépistage et de l’aide acoustique donnent lieu à une politique sanitaire standardisée, trop médicalisée et indifférente aux aspects humains des déficits auditifs ».

Et de préciser : « Dans la mesure où la population des personnes sourdes a eu à subir une longue tradition de préjugés, de pratiques coercitives et de stigmatisation, il est compréhensible que la perspective d’une systématisation du dépistage néonatal de la surdité suscite en son sein une inquiétude diffuse. Si on passe sous silence cette histoire marquée par l’exclusion sociale, on ne peut pas comprendre que face à l’approche « réparatrice » de la surdité, une partie de la population sourde soit tentée de faire valoir une approche « socioculturelle » refusant l’assimilation de la surdité à une déficience qui appellerait une approche thérapeutique. » Votre rapporteur partage totalement ce point de vue.

Le comité soulignait, par ailleurs, que « la légitimité d’un programme de dépistage en France se justifie d’autant plus que l’âge moyen de diagnostic de surdité profonde demeure beaucoup trop tardif (16 mois, depuis 1987). En lien avec le préjudice direct causé à l’enfant, le retard de diagnostic peut être source d’une grande souffrance psychique pour certains parents gagnés par le remords de n’avoir pas su déceler la surdité de leur enfant plus rapidement. »

Et de conclure en deux temps : « Tout en respectant le droit des parents au choix des traitements proposés pour leur enfant, et sans vouloir éluder les difficultés pratiques, éthiques et juridiques que pourrait poser l’imposition aux parents d’une volonté extérieure alors qu’aucun processus vital n’est menacé, le CCNE considère qu’il y a lieu de tenir également compte du droit des enfants présentant une surdité totale ou profonde bilatérale congénitale à ne pas être privés des traitements susceptibles de préserver leur capacité à communiquer avec d’autres communautés linguistiques. Le défaut de prise en charge à une date appropriée de son déficit sensoriel constitue une perte de chances irréversible pour l’enfant sourd. Car pour que la surdité ne soit pas un obstacle à la communication, il faut disposer d’éléments informatifs et éducatifs dans des délais beaucoup plus réduits que ceux que l’on constate actuellement (16 mois en moyenne).

Le rejet d’un support auditif approprié (prothèse ou implant) compromet l’apprentissage du langage parlé s’il est entrepris au-delà d’un âge de deux ans. Le principe éthique qui doit s’appliquer est celui de l’équité pour les enfants, lesquels doivent être respectés dans leur droit à bénéficier, dans les meilleures conditions, des progrès de la médecine. »

Pour autant, « l’intérêt du dépistage et de ses conséquences n’a de sens que si des mesures efficaces de suivi sont prises pour les accompagner. Le suivi médical et psychologique des enfants sourds, la prise en charge des coûts correspondants, sont une priorité de santé publique. Actuellement, les conditions du suivi médical sont réunies puisqu’il est désormais possible de déterminer avec une précision satisfaisante les périodes au cours desquelles la pose d’une prothèse ou d’un implant sera efficace. En revanche, la prise en charge des aspects psychologiques devrait être améliorée. La forme systématique du dépistage de la surdité dès la maternité nécessiterait une préparation de ses conditions effectives (pédagogique, culturelle et psychologique) chez les différents acteurs de l’équipe soignante ».

Et de conclure, « le Comité estime que les conditions éthiques d’une généralisation du dépistage néonatal de la surdité ne sont actuellement pas réunies. Il redoute une médicalisation excessive de la surdité qui la réduirait à sa seule dimension fonctionnelle et organique, polarisant du même coup la prise en charge sur l’appareillage technologique ».

Le caractère équilibré et mesuré de cet avis doit retenir toute notre attention et a guidé la rédaction de la proposition de loi :

– en aucun cas, il ne s’agit de stigmatiser la population sourde et de revenir à des errements dans lesquels la société française s’est déshonorée ;

– la dimension humaine, psychologique et sociale de la prise en charge de la surdité est absolument essentielle et est aussi importante que la dimension médicale ;

– enfin, les progrès permis par la technique des potentiels évoqués auditifs automatisés en termes de fiabilité répondent en partie aux interrogations également soulevées par le comité, en particulier s’agissant du problème des « faux positifs ».

Au final, votre rapporteur a eu le sentiment en rencontrant le professeur Grimfled, président du comité, que, compte tenu des évolutions technologiques et des garanties entourant le dépistage proposé, le dispositif de la proposition de loi pourrait répondre aux exigences du comité. À n’en pas douter, celui-ci sera particulièrement attentif à sa mise en œuvre.

3. Les expérimentations menées par l’Assurance maladie

Dans le cadre de la loi de 2004, la Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) a lancé, depuis 2005, une expérimentation de faisabilité du dépistage néonatal de la surdité en maternité, avec pour objectif d’étudier la faisabilité et l’impact du dépistage en maternité, et de contribuer à déterminer la meilleure stratégie de dépistage de la surdité congénitale.

Initialement prévu pour deux ans, ce programme, dont la mise en œuvre a été confiée à l’Association française de dépistage et de prévention des handicaps de l’enfant (AFDPHE), a été reconduit depuis lors. Il a concerné six villes – Paris, Lyon, Marseille, Lille, Bordeaux, Toulouse – et 38 maternités (sur 642 maternités en France métropolitaine).

Sur la période 2005-2007, 150 000 enfants ont bénéficié, dans le cadre de cette expérimentation, d’un dépistage des troubles de l’audition à la maternité (soit 10 % des naissances annuelles). Ce dépistage s’est révélé « positif » pour 1 500 enfants, soit 1 % d’entre eux. Ce test « positif » ne permettant pas de poser un diagnostic de surdité, des examens complémentaires ont été pratiqués dans les quinze jours suivants.

Deux méthodes de dépistage ont été utilisées : les oto-émissions acoustiques automatisées (OEAA) (4), peu onéreux, rapides d’utilisation (5 à 10 minutes) mais moins fiables (plus de « faux positifs » et de « faux négatifs ») et les potentiels évoqués auditifs automatisés (PEAA) (5), plus coûteux mais plus fiables. La très grande majorité de la communauté médicale recommande donc la seconde méthode qui représente certes un investissement financier plus important au départ mais permet de crédibiliser la démarche et de désengorger les centres de dépistage.

Le personnel de la maternité (auxiliaires de puériculture, puéricultrices, sages-femmes, aides-soignants...) a été chargé de la réalisation de ce dépistage et de l’information des familles sur les premiers résultats du test, après une courte formation technique.

Dans le cadre du protocole mis en place par la CNAMTS, quand le dépistage réalisé en maternité ne permet pas de conclure à l’absence de troubles de l’audition, les nouveau-nés sont orientés, dans les quinze jours, vers un centre de diagnostic et d’orientation de la surdité (CDOS) afin de réaliser un second dépistage, permettant de poser un diagnostic. Sept centres ont été mis en place dans le cadre de cette expérimentation. Ils proposent une prise en charge et un accompagnement adaptés autour d’une équipe pluridisciplinaire.

Selon les données de la CNAMTS, le coût du repérage des capacités auditives en maternité s’est élevé à 7,24 euros, celui du test de dépistage ainsi que le suivi des dossiers en CDOS à 25 euros par enfant et la prise en charge annuelle d’un enfant malentendant à 50 euros, soit au total un budget annuel de près de 567 000 euros.

Selon les premiers résultats disponibles, cette expérimentation a confirmé que le dépistage néonatal en maternité est bénéfique quelle que soit la prise en charge ultérieure de l’enfant.

La CNAMTS considère ces résultats comme très encourageants :

– ce dépistage est bien accueilli par les familles qui, à 98%, ont accepté de réaliser ce dépistage néonatal pour leur enfant ;

– ce dépistage permet, grâce au suivi en CDOS et au dépistage qui y est réalisé, de poser un diagnostic beaucoup plus précoce : dès 4 mois contre 14 à 18 mois aujourd’hui ;

– en conséquence, l’enfant et sa famille bénéficient plus tôt d’une prise en charge et d’un accompagnement, quel que soit le mode de communication choisi.

III.- LA NÉCESSITÉ DE GÉNÉRALISER LE DÉPISTAGE

Aujourd’hui, selon les chiffres partiels dont on dispose, à peu près 200 000 enfants sont dépistés dans les jours qui suivent la naissance, soit à peu près 25 % des nouveaux-nés. La première justification d’une généralisation du dépistage est donc de mettre fin à cette inégalité d’accès à la santé entre les territoires qui fait que selon que l’on naît dans telle ou telle maternité, l’on ne bénéficiera pas d’un traitement néonatal identique.

1. Le plan gouvernemental pour les personnes sourdes et malentendantes de février 2010 : un plan inachevé

Le Gouvernement a, depuis la loi de 2005, poursuit ses efforts en faveur des personnes soufrant d’un handicap auditif et a présenté, en février 2010, un plan triennal 2010-2012 en faveur des personnes sourdes et malentendantes.

Ce plan, doté de 52 millions d’euros, comprend 52 mesures concrètes visant à :

– améliorer la prévention, le dépistage et l’accompagnement lors de la découverte d’une déficience auditive ;

– mieux prendre en compte la déficience auditive à tous les âges de la vie (école, enseignement supérieur, emploi, personnes âgées devenues sourdes) ;

– rendre notre société plus accessible aux personnes sourdes ou malentendantes (accès à l’information et à la culture, téléphonie, développement des métiers de l’accessibilité).

En matière de dépistage et d’accompagnement, le plan prévoit notamment les actions suivantes :

– inscrire dans les priorités 2011 du programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) une thématique « handicap », dans laquelle figurent notamment les conséquences du diagnostic néonatal et de la prise en charge très précoce des enfants sourds et les conséquences de l’implant précoce chez les enfants sourds profonds ;

– afin d’améliorer le dépistage néonatal et chez l’enfant, mettre en place des actions d’information sur la surdité à destination des enseignants et des professionnels de l’enfance : diffusion en 2010 d’outils de sensibilisation et formation dans le domaine des troubles du langage et des apprentissages et des troubles sensoriels de l’enfant ; inscription de la formation aux signes d’alerte sur les troubles auditifs dans les plans de formation académiques à la rentrée scolaire 2011 ;

– réactualiser et diffuser le guide d’information à l’attention des familles lorsque la surdité de leur enfant est confirmée (« La surdité de l’enfant, guide pratique à l’usage des parents », Édition INPES / Fondation de France) ;

– lancer à la rentrée scolaire 2011 dans trois régions une campagne pilote de dépistage renforcé des jeunes dans les collèges et lycées ;

– instaurer des dépistages systématiques des troubles de l’audition à certains âges de la vie : lors des consultations de prévention (16-25 ans) et vers 60 ans venant s’ajouter aux dépistages déjà mis en place (PMI, bilans de santé de la CNAMTS) ;

– développer des protocoles de dépistage validés pour évaluer la faisabilité et les modalités d’une généralisation à l’ensemble de la population ;

– renforcer l’accompagnement des familles, au moment du diagnostic notamment : ouverture d’un centre national de ressources sur la surdité doté d’une plate-forme Web en 2011 ; il s’agit là d’un point particulièrement important, car aujourd’hui les centres d’information sur la surdité ne sont que très inégalement répartis sur le territoire et il manque réellement un lieu où les familles puissent trouver l’ensemble des informations théoriques et pratiques couvrant l’ensemble des aspects de la surdité, du médical à l’éducatif ;

– créer trois nouveaux centres d’action médico-sociale précoce (CAMSP) dotés d’une compétence en matière de déficience auditive.

Malgré les avances indéniables de ce plan, il ne prévoit pas une mise en place systématique d’un dépistage précoce des troubles de l’audition.

2. La généralisation du dépistage : le dispositif proposé

L’ensemble des personnes auditionnées par votre rapporteur – communauté médicale, organismes financiers, autorités sanitaires et éthiques, associations, etc. – sont favorables à la mise en place d’un dépistage systématique des troubles de l’audition pour les très jeunes enfants. Ce dépistage doit être proposé dans toutes les maternités, mais il ne saurait être obligatoire : de même que pour tous les dépistages néonataux, les parents pourront toujours refuser cet examen.

a) La nécessité d’un dépistage en deux temps : repérage puis diagnostic

Les associations rencontrées insistent de façon unanime sur la nécessité d’apporter une vigilance toute particulière à la construction du lien parents-enfant dans les premières semaines de la vie. Aussi ont-elles fait part, au cours des auditions, de leurs inquiétudes quant à la mise en place d’un dépistage au cours des trois premiers jours de la vie et d’une annonce brutale aux familles dans ce moment privilégié qu’est celui de la naissance.

Cette position est partagée par la communauté médicale : cette dernière reconnaît qu’il n’est pas possible d’établir de manière certaine et définitive un diagnostic de surdité quelques jours après la naissance. Même en utilisant la méthode la plus fiable possible (potentiels évoqués auditifs automatisés), ce premier test ne donne qu’une première indication sur les capacités auditives de l’enfant, avec une certaine marge d’erreur (environ 2 à 3 % dans les premiers jours de la vie de « faux positifs ») et devra être confirmé ou infirmé par des examens complémentaires réalisés dans un centre spécialisé, pour les enfants dont le premier test serait positif.

Cette condition milite pour un dépistage en deux temps : un premier repérage en maternité, puis un diagnostic en centre spécialisé avant les trois mois de l’enfant. L’annonce à la famille de la nécessité de tests complémentaires doit se faire avec le plus grand tact, afin de ne pas provoquer de stress inutile chez les jeunes parents et compromettre la relation avec l’enfant. Les personnels soignants devront donc être spécifiquement formés pour cela. Ce repérage dès la maternité est essentiel, car il permet d’éviter le phénomène des perdus de vue, c’est-à-dire ces enfants qui sortent par la suite du circuit médical et qui sont les premières victimes d’un diagnostic tardif. On notera que ce sont souvent des enfants issus des milieux défavorisés qui sont concernés.

b) Une information objective, complète et neutre sur les modes de communication disponibles

Toutes les personnes auditionnées ont insisté sur la nécessité d’harmoniser les informations délivrées aux parents sur les troubles de l’audition, les techniques de compensation et les modes de communication pouvant leur être proposés. Cette information est aujourd’hui trop disparate et ne permet pas réellement un « choix éclairé » des parents sur la ou les solutions adaptées à leur enfant.

C’est le sens de la création d’un centre de ressources surdité accompagné de l’ouverture d’un site Web prévue par le plan gouvernemental « Surdité » de février 2010 évoqué précédemment. Il conviendra sans doute d’aller plus loin dans ce domaine pour faire des parents de véritables acteurs de santé publique.

3. L’indispensable développement des dispositifs d’accompagnement

Par ailleurs, toutes les personnes auditionnées soulignent la nécessité de développer les dispositifs d’accompagnement et de veiller à ce que ce dépistage précoce ne soit pas considéré comme une attaque contre la langue des signes française.

a) Développer l’accompagnement en aval

La mise en place en aval des structures et moyens de prise en charge et d’accompagnement est indispensable.

Il est absolument nécessaire de mettre en place un dispositif de prise en charge et d’accompagnement personnalisé de l’enfant et de sa famille. Rien ne serait pire que de mettre en place, en amont, un dépistage sans proposer, en aval, à l’enfant et à sa famille des solutions concrètes et adaptées...

La mise en place en amont d’un dépistage par les pouvoirs publics leur confère une responsabilité particulière, en aval, pour la prise en charge de ce handicap.

La Haute Autorité de santé s’est penchée sur ce point dans son récent rapport consacré à « la surdité de l’enfant : accompagnement des familles et suivi de l’enfant de 0 à 6 ans ».

Le rapport de notre ancienne collègue Dominique Gillot, établi en 1998 à la demande du Premier ministre (6), a dressé un état des structures d’accueil et d’éducation de l’enfant sourd en France il y a déjà dix ans. Ce rapport mettait en évidence l’extrême diversité réglementaire et gestionnaire des structures à disposition de la population sourde. Étaient recensés des établissements nationaux, des établissements publics ou privés, sous tutelle du ministère de l’Emploi et de la Solidarité ou du ministère de l’Éducation nationale, des structures sanitaires, médico-sociales ou éducatives, etc.

Depuis, de nombreux textes réglementaires sont intervenus, mais aucune enquête nationale ni article récent sur ce sujet n’ont permis de dresser un état des lieux actualisé des structures d’accueil et de prise en charge des enfants sourds de 0 à 6 ans. Cette situation est particulièrement regrettable et votre rapporteur souhaite qu’un état des lieux précis soit établi.

La Haute autorité de santé constate ainsi que :

« – la moitié des départements n’ont pas de structure spécialisée offrant un programme d’intervention précoce aux enfants sourds, alors que les CAMSP polyvalents n’ont pas les moyens suffisants pour assurer aux parents un choix entre une éducation avec « communication en langue française » exclusive et une éducation « avec communication bilingue » ;

– les lieux sociaux où un environnement en langue des signes pourrait être proposé aux familles ne sont pas répertoriés, ni au niveau local, ni au niveau national (crèche, halte-garderie, assistante maternelle, etc.) ;

– l’accès aux structures spécialisées peut être retardé dans de nombreuses régions du fait des procédures administratives d’accès aux services d’accompagnement familial et à l’éducation précoce (SAFEP), procédures qui n’existent pas pour les CAMSP ;

– les CAMSP spécialisés et SAFEP, bien que relevant de procédures administratives différentes, sont en mesure de délivrer des programmes d’intervention précoce similaires auprès des enfants sourds de moins de 3 ans ; les populations accueillies ne sont cependant pas identiques, les SAFEP accueillant une proportion plus élevée d’enfants dont le seuil auditif est supérieur à 70 dB HL. »

Le plan 2010-2012 du Gouvernement en faveur des personnes sourdes et malentendantes tente de répondre, en partie, à ces insuffisances, puisque la mesure n°13 prévoit de « renforcer l’offre en services d’accompagnement familial et à l’éducation précoce (SAFEP) et en centres d’action médico-sociales précoce (CAMSP) ». D’ici 2012, 480 nouvelles places de SAFEP « déficients auditifs » doivent être créées afin que l’ensemble des départements soient couverts et, en 2010, trois nouveaux CAMSP dotés d’une compétence en matière auditive doivent être ouverts. Ce sont près de 21 millions d’euros qui devraient être ainsi mobilisés sur la durée du plan.

b) Réaffirmer la place de la langue des signes française

Le dépistage précoce préconisé par cette proposition de loi ne préjuge en rien des réponses à apporter à un enfant diagnostiqué sourd. Comme l’affirme très clairement la Haute Autorité de santé dans ses recommandations de décembre 2009, l’objectif est bien de « favoriser le développement du langage de l’enfant sourd au sein de sa famille, quelles que soient la ou les langues utilisées, français ou langue des signes française (LSF) ».

Elle souligne que le choix des parents entre l’une ou l’autre langue « peut évoluer au cours du temps, en particulier au vu du développement global de l’enfant. Les projets éducatifs visant à favoriser le développement de l’enfant sourd, notamment le développement du langage, vont en partie dépendre des capacités de cet enfant à percevoir la langue utilisée par son entourage. Dans le cadre des familles dont la langue principalement utilisée est une langue parlée, les projets éducatifs vont notamment s’adapter à la capacité de l’enfant sourd à percevoir auditivement la parole de son entourage, que l’enfant soit ou non appareillé. En l’état actuel des connaissances, une très large majorité des enfants sourds ayant un seuil auditif < 70 dBHL utilisent exclusivement une langue parlée. En revanche, les enfants sourds ayant un seuil auditif > 70 dB HL utilisent soit exclusivement une langue parlée, soit, pour une majorité d’entre eux, une langue parlée et une langue des signes, soit exclusivement une langue des signes. (…). Face à l’hétérogénéité du profil des enfants sourds (environnement linguistique, seuil auditif, fluctuation ou non de ce dernier, gains prothétiques, surdité isolée ou associée à d’autres troubles), la seule prise en compte du seuil auditif ne permet pas de définir une stratégie de suivi et d’accompagnement de l’enfant sourd et de sa famille. »

Votre rapporteur partage totalement cette vision pragmatique des choses dans laquelle l’intérêt et le parcours individuel de l’enfant doivent primer sur toute autre considération.

Votre rapporteur souhaite également rappeler que le législateur a très clairement réaffirmé, avec la loi du 11 février 2005 (articles L. 112-3 et L. 312-9-1 du code de l’éducation), le principe déjà énoncé depuis 1991 du droit des parents d’enfants sourds de faire le choix de l’éducation de leur enfant : « Dans l’éducation et le parcours scolaire des jeunes sourds, la liberté de choix entre une communication bilingue, langue des signes et langue française, et une communication en langue française est de droit. »

Il s’agit là d’un acquis essentiel et il n’est bien sûr pas question de revenir dessus. L’important est que le diagnostic soit établi le plus tôt possible, afin que les parents puissent s’adapter à la situation de leur enfant et choisir le plus tôt possible les réponses à y apporter.

La langue des signes françaises (LSF) et ses spécificités

« La langue des signes est une langue vivante et complexe. Comme toute langue, elle évolue. Elle possède une pleine capacité d’expression et d’abstraction. Elle permet donc la transmission de savoirs, d’où sa légitimité éducative. Elle possède sa propre syntaxe, qui est intimement liée à la perception visuelle, puisque cette langue répond à une logique visuelle et non auditive. La grammaire de la langue des signes n’est pas identique à celle du français. Ainsi, la place des mots dans la phrase n’est pas la même. Les signes sont basés sur l’utilisation des mains, du regard et de l’espace : les configurations des mains, leur emplacement, leur orientation et leur mouvement forment des signes qui équivalent à des mots, disposés devant soi comme sur une scène de théâtre. La disposition de ces signes, ainsi que la direction du regard, permettent de visualiser les relations (actif, passif…), le temps (signes tournés vers l’arrière pour le passé, vers l’avant pour le futur). Le visage et le mouvement des épaules servent aussi à exprimer les nuances du discours.

La langue des signes se sert d’un alphabet manuel (dactylo-logie) pour épeler certains mots de la langue française. La langue des signes n’est pas une langue universelle : le vocabulaire diffère d’un pays à l’autre. Cependant, la grammaire étant sensiblement la même, les échanges entre signeurs de pays différents en sont facilités. Les mains et les yeux sont très importants pour les sourds : ils sont leur porte d’accès au monde et à la vie sociale. Les signeurs considèrent bien souvent la LSF comme une source de richesse, de culture et d’échange : on parle de « culture sourde ».

Cette culture est la façon de vivre propre aux personnes sourdes signantes. Elle est axée sur l’appréhension visuelle et gestuelle du monde. Ainsi, ces personnes ont l’habitude d’adapter leur environnement pour faciliter la communication visuelle. Elles utilisent également les vibrations pour s’interpeller en tapant sur les planchers ou les tables par exemple… L’appréhension visuelle du monde entraîne aussi un autre rapport au corps : il est fréquent dans le monde des sourds de se toucher, de se taper sur l’épaule. La culture sourde a une forme d’humour particulière, qui s’exprime par le visage, les mains et le corps. »

Extraits du « Guide pratique à l’usage des parents : la surdité de l’enfant » édité par l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé et la Fondation de France.

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission examine la présente proposition de loi au cours de ses séances des mercredi 17 et 24 novembre 2010.

Après que le rapporteur a présenté son rapport, plusieurs commissaires sont intervenus dans la discussion générale.

M. Guy Lefrand. Je me félicite que l’on prenne enfin en considération les handicaps sensoriels, longtemps ignorés – les grilles AGGIR ne le montrent que trop. La proposition de loi est d’autant plus intéressante qu’il existe désormais des solutions technologiques efficaces pour traiter les troubles de l’audition ; en outre, elle correspond aux recommandations de la Haute Autorité de santé. J’approuve l’amendement AS 1, qui associe tous les professionnels concernés à l’élaboration des plans régionaux de dépistage précoce des troubles de l’audition.

Je m’inquiète, en revanche, du contenu des très nombreux courriels dont, comme beaucoup de mes collègues, j’ai été le destinataire à l’occasion de la discussion de cette proposition de loi. Certains semblent vouloir que les sourds restent entre eux et, en faisant la promotion exclusive de la langue des signes, paraissent souhaiter une sorte de culture de la surdité. Qu’en est-il donc ? La langue des signes est certes intéressante, mais elle ne justifie pas que l’on empêche les enfants qui ont des troubles de l’audition de profiter d’un dépistage. Le rôle de la représentation nationale est bien d’éviter un handicap quand elle peut le faire et de permettre à de jeunes enfants de se développer dans un monde entendant. La proposition de loi présente le grand intérêt de réduire les inégalités d’accès aux soins alors qu’existent des traitements efficaces ; c’est une question de santé publique.

M. Georges Colombier, président. Nous sommes nombreux de cet avis.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Cette mesure était attendue, et tout ce qui va dans le sens du dépistage précoce des troubles de l’audition, comme d’autres troubles, constitue un progrès indiscutable. Les dépistages précoces ont déjà permis à beaucoup de jeunes enfants d’accéder dans de meilleures conditions à l’éducation et à la scolarisation.

Cela étant, ayant également reçu des messages électroniques par centaines, je me suis efforcée de comprendre ce que l’on voulait me dire. Je sais qu’au cours de la longue histoire des enfants sourds et malentendants, plusieurs écoles se sont opposées, ce que l’on peut comprendre. Mais, ce dont il s’agit ici est d’organiser un dépistage accessible à tous, ne déterminant en rien le traitement qui suivra un diagnostic positif, traitement à propos duquel les parents auront évidemment leur mot à dire. Je suis favorable à cette proposition de loi qui permettra d’aider les familles à mieux comprendre la situation de leurs enfants, comme ce fut le cas pour d’autres formes de handicaps, et l’on sait que la précocité des interventions des centres d’action médico-sociale précoce et des services d’éducation spéciale et de soins à domicile est une excellente chose.

Il faudra veiller à rassurer les professionnels ainsi que les familles concernées qui semblent s’inquiéter, et aussi faire progresser les dépistages dans d’autres domaines. Lors du colloque du 1er février 2010, auquel j’ai assisté, tous les spécialistes ont illustré les progrès de la recherche, et des personnes concernées ont témoigné pour dire que le dépistage précoce était attendu. Rappelons-nous : il y a vingt ans encore, les enfants sourds étaient officiellement considérés comme « inéducables ». Depuis lors, un long chemin a été parcouru, et des textes successifs y ont contribué, en respectant toutes les sensibilités. Je comprends les inquiétudes qui s’expriment mais il nous revient de faire avancer les choses, en ayant pris l’avis de tous ceux qui traitent quotidiennement de ces questions.

M. Roland Muzeau. On ne peut remettre en cause a priori la légitimité d’un programme de dépistage de la surdité, mais différentes questions se posent : celle du moment de ce dépistage – dès la naissance, à trois mois, à six mois ? – ; celle des conditions dans lesquelles ce diagnostic est réalisé – par des oto-rhino-laryngologistes hospitaliers ? Par des praticiens libéraux ? En présence de psychologues spécialisés dans la petite enfance ? Avec quel lieu d’accueil pour les parents ? La question se pose aussi de la finalité du dépistage : prendra-t-on en compte l’intérêt exclusif de l’enfant, ou ira-t-on vers un appareillage hâtif en implants cochléaires ?

En l’état, la proposition de loi soulève plus d’interrogations sur l’orientation des politiques de santé publique et d’inquiétudes sur la remise en cause de la liberté de choix des parents qu’elle n’apporte de réponses. On ne peut balayer d’un revers de main les craintes qu’exprime notamment la Fédération nationale des sourds de France, non sur le principe même du dépistage, mais sur son caractère trop précoce et sur le risque induit que les enfants soient aiguillés vers le seul traitement par le son. L’exigence de garantir réellement la liberté de choix de la famille en matière de communication et l’accès précoce aux langues signées ne peut être négligée.

Par ailleurs, les psychiatres soulignent la violence de l’annonce faite à une mère de la surdité profonde de son nourrisson au lendemain de la naissance, au moment même où doit se tisser le lien psychique étroit nécessaire au bon développement de l’enfant, et les conséquences pathologiques que cette annonce peut avoir pour la mère et pour l’enfant. Cet argument vaut d’autant plus que l’accueil des parturientes et des nouvelles accouchées est déshumanisé par la faiblesse des moyens en personnel – et la proposition de loi ne répond pas à la question des moyens.

Enfin, la démarche médico-technique qu’est le dépistage précoce systématique de la surdité néonatale soulève une question éthique que les auteurs de la proposition de loi n’abordent pas. En effet, dans son avis de 2006, le Comité consultatif national d’éthique soulignait que « les évolutions technologiques portées par la louable ambition de favoriser l’intégration de l’enfant dans l’univers des entendants en développant ses capacités d’audition et d’oralisation s’accompagnent d’une interrogation éthique que notre société ne peut se permettre de négliger. Il serait notamment regrettable que les avancées accomplies dans le dépistage précoce et l’audiophonologie ne contribuent indirectement à réactiver d’anciens préjugés sur la surdité longtemps perçue comme un handicap mental » Et le comité consultatif de mettre en garde : « De tels préjugés peuvent être propagés involontairement par le choix de politiques de dépistage et de suivi trop contraignantes pour les parents et les enfants sourds, avec le risque que les progrès réalisés dans la sophistication des techniques de dépistage et de l’aide acoustique donnent lieu à une politique sanitaire standardisée, trop médicalisée et indifférente aux aspects humains des déficits auditifs. »

La proposition de loi ne réunit pas les garanties indispensables pour éviter de tels risques. C’est pourquoi nous ne pouvons la voter en l’état.

M. Jean-Luc Préel. Cette proposition de loi est très intéressante, mais une loi est-elle vraiment nécessaire pour organiser le dépistage précoce des troubles de l’audition ? Je suis favorable à ce dépistage, mais j’observe que l’on diagnostique déjà à la naissance la luxation de la hanche ou la phénylcétonurie du nourrisson. Pourquoi ne pas intégrer les tests d’audition dans cet examen ? Par ailleurs, l’intitulé de la proposition de loi n’indique pas qu’elle porte sur le dépistage à la naissance ; de fait, le dépistage des troubles de l’audition devrait se faire tout au long de la vie. Cela vaut particulièrement pour les adolescents qui, un MP3 vissé à l’oreille, écoutent de la musique à un niveau sonore extraordinairement élevé, au risque de souffrir ultérieurement de graves troubles de l’audition. Il conviendrait d’instituer des examens réguliers de l’audition, notamment pendant la scolarité, et d’inciter les jeunes gens à la prudence.

En bref, nous voterons cette proposition de loi sympathique, mais nous avons des doutes sur la nécessité d’une loi et nous nous demandons si un décret n’aurait pas suffi pour intégrer le dépistage précoce des troubles de l’audition au nombre des examens auxquels les nourrissons sont déjà soumis. Plus largement, nous serions favorables au dépistage précoce de la surdité à tous les âges.

M. Dominique Dord. Ayant lu la proposition de loi, j’ai eu le sentiment qu’elle était nécessaire et permettait un progrès immense. Puis, j’ai été frappé par le nombre de courriels reçus de familles qui, se plaçant sur un terrain presque philosophique, exprimaient un avis contraire. Cette vague d’opposition ne doit pas nous faire changer d’avis, mais elle doit nous inciter à respecter cette sensibilité et cette manière de voir les choses.

M. Jean Bardet. Je ne mets pas en doute les bonnes intentions des auteurs de cette proposition de loi, mais je m’interroge également sur l’utilité d’une loi dictant aux médecins ce que doivent être les bonnes pratiques médicales. Après chaque accouchement, le bébé est examiné par un pédiatre. Je pense dangereux de dresser la liste des examens que l’on doit faire à la naissance : en creux, cela dégage la responsabilité des médecins, qui pourront arguer du fait qu’ils n’ont pas procédé à tel examen qu’ils auraient dû faire parce que la loi ne le prévoit pas.

Par ailleurs, quand le diagnostic de surdité est porté dans une famille entendante, il est ressenti comme l’annonce d’une malformation dramatique et des tests doivent être proposés. Mais, dans les familles malentendantes, la question a un aspect éthique. Il faut savoir que certaines familles malentendantes qui recourent à la procréation médicalement assistée, demandent le transfert d’embryons dont on peut supposer qu’ils sont mal entendants, afin que les enfants à naître ne soient pas exclus du monde de leurs parents, celui du silence.

À mon sens, cette proposition de loi est inutile. Il serait préférable de s’assurer que les moyens de diagnostiquer la surdité existent partout, car il ne sert à rien d’adopter une loi si elle ne peut être appliquée.

M. Élie Aboud. Il s’agit d’une question de santé publique méconnue. J’ai la chance d’avoir dans ma circonscription la polyclinique Causse, clinique de référence en otologie en Europe, et mes collègues oto-rhino-laryngologistes m’ont dit qu’un très grand nombre d’enfants leur sont envoyés par des pédopsychiatres, pour des troubles uniquement organiques, dus à une surdité. Le problème est réel, mais je crains que la proposition de loi, si elle n’est pas précise, n’ait de résultats que virtuels, faute de passerelles effectives entre les agences régionales de santé et les centres de références.

Enfin, dans un domaine hors sujet mais collatéral, je pense qu’un problème encore plus grave va se poser pour les adolescents : outre que la musique écoutée à un niveau trop fort abîme l’audition, les seuils sonores élevés stimulent le centre neurologique de la soif, et donc la consommation d’alcool. Les organisateurs de soirée le savent d’ailleurs très bien.

M. Jean-Pierre Door. Je remercie les rapporteurs qui se sont attaqués à un problème auquel je suis très sensible : un de nos conseillers municipaux et communautaires est malentendant, et nous avons installé un site web destiné aux malentendants. Comme nombre de mes collègues, j’ai été alerté par de nombreux courriels dont l’un émanait de ce conseiller, me demandant de ne pas voter cette proposition de loi. Les auteurs de ces messages expliquent qu’ils se sentiraient dépossédés de l’usage de la langue des signes et ils redoutent une médicalisation à outrance, avec obligation d’appareillage. J’aimerais des précisions à ce sujet. Par ailleurs, je m’interroge aussi sur l’utilité d’une loi quand un décret suffirait peut-être.

Mme Catherine Lemorton. Une fois de plus, en devançant la loi de santé publique, une loi qui, au demeurant, a tout de l’Arlésienne de Georges Bizet – on en parle beaucoup mais on ne la voit jamais – vous saucissonnez un ensemble qui devrait être appréhendé globalement. Faut-il rappeler que, parce que l’on veut raccourcir la durée des séjours, les femmes restent de moins en moins longtemps à la maternité après avoir accouché ? Dans ce contexte, il me paraît violent d’annoncer la surdité d’un nouveau-né et de laisser la mère repartir immédiatement chez elle, souvent loin d’un centre médical et sans accompagnement psychologique, alors même que l’appareillage de l’enfant n’est possible que de six mois à un an plus tard. Il me semble assez dangereux de laisser les parents seuls après que cette annonce leur a été faite, et sans leur donner de solution médicale immédiatement applicable.

À cela s’ajoute que l’amendement AS 10 du rapporteur met le dépistage à la charge des familles, ce qui créera une nouvelle inégalité d’accès aux soins et à l’accompagnement.

Mme Edwige Antier. C’est un honneur pour moi d’avoir été associée à l’élaboration de cette proposition de loi destinée à améliorer le dépistage précoce des troubles de l’audition. Nous avons procédé à vingt auditions, dont celles de l’Association de la langue des signes française bien sûr et celle du Pr Alain Grimfeld, président du Comité consultatif national d’éthique qui, ce qui rassurera Roland Muzeau, a donné son accord à cette proposition de loi. En ma qualité de pédiatre en maternité, j’ai examiné des milliers de bébés, et je puis vous dire que l’on ne peut actuellement savoir à coup sûr si un nouveau-né n’entend pas. Certes, il est dur pour des parents d’apprendre que leur enfant n’entend pas – mais qu’en est-il de l’enfant dont personne ne sait qu’il n’entend pas, jusqu’à ce que, lorsqu’il a deux ans, on en vienne à consulter un psychiatre pour un autisme supposé ? Combien de fois cet enfant aura-t-il été rabroué parce que l’on pensait qu’il n’obéissait pas ? Cette ignorance de la situation réelle de l’enfant conduit à une forme de maltraitance.

S’agissant de la langue des signes, nous nous sommes entretenus avec de nombreuses associations ainsi qu’avec des enfants sourds devenus adultes qui la pratiquent. Ce que nous proposons est un repérage suivi, le cas échéant, d’un dépistage dans les trois mois. Après quoi, l’enfant malentendant sera confié à un centre de dépistage et d’orientation de la surdité, auquel les associations et les pratiquants de la langue des signes sont associés. Si le diagnostic est fait précocement, les enfants seront bilingues – langue des signes/oralisme – comme des enfants entendants peuvent être bilingues français/anglais. Les dix pour cent d’enfants dont les parents sont signeurs parleront d’abord la langue des signes, puis la langue des sons. Ils le feront d’autant mieux qu’ils auront été dépistés plus tôt, que l’on n’aura pas ignoré leur handicap et que l’on aura pu déterminer si un traitement est possible – un implant cochléaire dans un quart des cas. L’important est que la surdité soit connue des parents, des nourrices, du personnel des crèches, afin que la communication avec l’enfant soit stimulée, quelle que soit la méthode ; sinon, des neurones seront irrémédiablement détruits, ce qui est une perte de chances.

Le dépistage que nous proposons devrait être obligatoirement proposé par les maternités – ce qui ne signifie pas que les parents seraient tenus de l’accepter. On constate que deux pour cent des parents le refusent. S’agissant de l’accompagnement psychologique des parents, permettez-moi d’observer que les personnes qui procèdent actuellement au test de Guthrie sur les nouveau-nés sont formées à formuler des annonces graves.

Si nous n’adoptons pas la proposition de loi, si la surdité continue de n’être repérée qu’à deux ans, sinon plus tard parce que les maternités ne sont pas convenablement équipées, il pourrait y avoir matière à plainte contre l’État pour non-assistance à personne en danger. En l’état actuel des connaissances, pourquoi n’équipons-nous pas les maternités ?

M. Jean Bardet. Adoptons donc, plutôt que celle-là, une proposition de loi visant à équiper les maternités !

Mme Marianne Dubois. Je suis la mère d’un fils sourd profond, aujourd’hui âgé de 30 ans, et je souhaite vous expliquer ce qui sous-tend les centaines de courriels que vous avez reçus. Les sourds ont une aversion pour le milieu médical. Ils se sentent bien dans leur surdité, mais, vous le savez, ils ont été considérés comme débiles pendant des siècles. Leur vie a toujours été dirigée par les entendants, leurs aspirations n’ont jamais été prises en compte et ils subissent l’oralisation comme une certaine forme de torture. Sachez qu’il a été interdit à des parents – moi, par exemple – d’utiliser la langue des signes quand leur enfant était petit, au motif qu’alors il ne parlerait jamais ou que, devenu adulte, il serait taré. Cette interdiction devenant impossible à supporter, nous avons choisi de sortir notre fils de l’oralisation et c’est nous qui avons appris la langue des signes.

Cela étant, je suis favorable au dépistage le plus tôt possible, mais le sujet est très douloureux et les entendants qui ne sont pas directement concernés ne peuvent pas comprendre. La langue des signes n’est pas seulement un outil de traduction, c’est un moyen de communication extrêmement riche. Elle est très nuancée, ce qui rend sa maîtrise très compliquée et son apprentissage très cher. J’ajoute qu’à Orléans, il faut de deux à trois semaines pour obtenir un rendez-vous avec un interprète en langue des signes – c’est dire la difficulté auquel un sourd est confronté lorsqu’il lui faut se rendre chez un médecin ou à un entretien professionnel. Le dépistage, l’oralisation, l’apprentissage de la parole sont primordiaux, mais il faut surtout des moyens pour que les malentendants se sentent bien dans leur surdité ; la langue des signes en est un.

Mme Michèle Delaunay. La passion qui s’exprime montre que l’on traite de questions de fond. Je rappelle que le dépistage de la surdité est déjà proposé systématiquement, comme une batterie d’autres tests. Mais, même si l’on est très près de l’obligation, les parents peuvent refuser ces tests. Cela pose la question de la rédaction du code de la santé publique, aux termes duquel ne sont obligatoires que les actes médicaux ou de dépistage qui ont trait aux maladies infectieuses et contagieuses. Je considère pour ma part que, qu’il s’agisse de prophylaxie bucco-dentaire ou de prévention des cancers du sein, on ne progressera que si l’on transgresse ce diktat en rendant obligatoires certains actes de santé publique.

À titre personnel, je suis très favorable à cette proposition de loi, et nous nous grandirions à l’adopter par consensus. Demeurent cependant en suspens, outre la question, déjà évoquée, du caractère obligatoire ou facultatif de certains examens de dépistage, celle de la normalité et de l’anormalité, qui se pose dans de nombreux cas – pour les personnes transgenres par exemple : sont-elles malades ou anormales ? Selon moi, elles sont anormales. De même, les sourds ne se sentent pas malades et ils ont raison, mais ils présentent un caractère d’anormalité qu’il faut tout faire pour corriger. Est-ce à dire qu’il faut nier leur identité et cette chose admirable qu’est la langue des signes ? Tout au contraire, et je me bats pour que, dans un collège de ma ville que fréquentent un certain nombre d’enfants sourds, les autres enfants apprennent au moins les rudiments de la langue des signes. J’observe que, bien que la langue des signes ne soit pas internationale, un sourd signeur se fait comprendre dans tous les pays. J’aimerais beaucoup que la langue des signes, trésor que l’on acquiert assez facilement quand on est petit, se diffuse au sein de la population.

J’ai, par ailleurs, introduit dans le service de psychiatrie de l’hôpital dont je préside le conseil d’administration l’accompagnement systématique des malades sourds en langue des signes, et un psychiatre s’est formé à cette langue.

Nous devons tranquilliser les familles des malentendants en leur expliquant que nous ne voulons aucunement les empêcher de signer. Nous voulons qu’ils soient bilingues, et il ne faut pas les priver de cette chance. Il faut dédramatiser l’usage de la langue des signes, qui est une richesse pour les entendants aussi.

Mme Bérengère Poletti. L’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques m’avait confié la rédaction d’un rapport sur les apports de la science et de la technologie à la compensation du handicap. Pour avoir, à cette occasion, approfondi le sujet en France et à l’étranger, je puis dire que la question est d’ordre culturel : les sourds de tous les pays se sont construits une identité culturelle propre, pour partie fondée sur leur proximité avec la langue des signes. Ils craignent, par le biais du dépistage organisé de la surdité, la disparition de la langue des signes, car ils pensent qu’une fois porté le diagnostic de surdité, on proposera systématiquement la pose d’implants cochléaires – seuls demeureraient « hors implants » les 10 % d’enfants sourds de parents eux-mêmes sourds. Existe-t-il un risque en ce sens ? C’est à ce propos que, si nombreux, ils nous interpellent.

Catherine Lemorton juge dangereuse et violente l’annonce aux parents de la surdité d’un nouveau-né. C’est violent en effet, mais n’est-il pas plus violent encore de laisser aller des enfants sans avoir diagnostiqué leur situation, les empêchant par là même d’accéder à un langage quel qu’il soit et compromettant définitivement le développement de leur personnalité ? Les parents souhaitent que le diagnostic soit posé. C’est ce que permet la proposition de loi. Ensuite, on leur proposera certes l’implantation cochléaire, mais aussi l’accès à la langue des signes. Actuellement, on sacrifie les parents entendants, car on ne leur propose rien : ni le signe, ni le son. Pour eux et pour leurs enfants, il est indispensable d’organiser le dépistage systématique de la surdité.

En conclusion de mon rapport pour l’office, je ne proposais pas l’adoption d’une loi organisant le dépistage précoce des troubles de l’audition, car je considérais que la question était d’ordre réglementaire. Mais, en raison d’un lobbying intense par des gens qui ne se sentent pas handicapés mais porteur d’une identité culturelle – ce qui est tout à fait respectable –, rien n’avance. Il est pourtant inhumain que le diagnostic de surdité d’un enfant ne soit pas posé et qu’il reste, de ce fait, sans possibilité d’accès au langage. Je rends hommage aux trois rapporteurs, grâce auxquels nous proposons enfin un dépistage organisé, sensible à l’ensemble de la problématique de sourds, sans attendre la loi de santé publique. Je voterai la proposition de loi sans réserve.

M. Jean-François Chossy. La loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances a reconnu le handicap sensoriel et imposé l’accès des sourds et des malentendants aux programmes télévisés. La reconnaissance de la langue des signes française comme une langue à part entière, qui figure à l’article 75 de la loi, résultait déjà du lobbying des associations – j’étais rapporteur de ce projet de loi et je me rappelle la pression à laquelle j’ai été soumis alors, pour que cet article soit voté. La même pression s’exerce maintenant. Elle émane de personnes qui pensent peut-être que la proposition de loi qui vous est présentée aujourd’hui est un artifice permettant de détourner l’article 75 de la loi de 2005. Or, il ne s’agit aucunement de cela, mais de permettre que les enfants pour lesquels le diagnostic de troubles de l’audition a été posé aient accès à toute la gamme de solutions possible. Il ne revient pas au législateur de faire un choix à la place des parents, mais de leur permettre de prendre une décision éclairée. Que l’on enseigne la langue des signes dans toutes les écoles, pourquoi pas ? Avec l’article 75 de la loi de 2005, on n’en est pas loin. Je le redis, le sens de la proposition de loi n’est pas que le législateur décide à la place des parents, mais de sortir les enfants sourds de leur isolement et de permettre qu’ils s’épanouissent en rétablissant la communication, d’une manière ou d’une autre. Il ne s’agit en rien de desservir la langue des signes. Voilà pourquoi je proposerai, par l’amendement AS 1, la participation de tous les professionnels de santé concernés par les troubles de l’audition, sans exclusive, à l’élaboration des plans régionaux de dépistage.

Enfin, je pense, comme d’autres, que nous devrons dans un autre temps traiter de la presbyacousie chez l’adulte. Ce serait la suite logique de la présente proposition de loi.

M. Denis Jacquat. Il est bon que les députés usent de leur possibilité de traiter des sujets par le biais de propositions de loi. Le colloque du 1er février 2010, auquel il a été fait référence, a rassemblé des spécialistes éminents, français et étrangers, et tous ont insisté sur la nécessité de diagnostiquer les troubles de l’audition le plus précocement possible. La proposition de loi qui nous est présentée ce matin est donc excellente. Mais, je ne voterai pas l’amendement AS 10 qui prévoit de mettre le coût du dépistage à la charge des familles ; ce n’est pas la règle à l’étranger. Il s’agit de rendre la vie quotidienne des intéressés la meilleure possible. Il est vrai que l’annonce des troubles de l’audition d’un enfant est terrible pour les parents. Il n’empêche que tout doit être mis en œuvre pour permettre un diagnostic précoce, suivi de propositions aux parents désemparés. J’ai été surpris par l’intervention de Roland Muzeau, car ce qu’il a dit est entièrement faux. Je suppose qu’il a été influencé par les courriels qu’il a dû recevoir, comme nombre d’entre nous, en quantité. Pour les professionnels, l’opposition de ce lobby est très difficile à comprendre. On n’a pas le droit de laisser non repérés des enfants sourds. Si le diagnostic n’est pas fait précocement, ils affronteront la vie avec un handicap de départ qu’ils ne rattraperont jamais. Il est de notre devoir de voter cette excellente proposition de loi, mais de repousser l’amendement AS 10.

M. Bernard Perrut. La généralisation du dépistage précoce des troubles de l’audition qui nous est proposée est un sujet de société qui touche à la santé et à l’éthique. Le regard de la société sur la surdité a évolué lentement en France où la langue des signes n’est reconnue que depuis 2005 par les pouvoirs publics comme une langue à part entière. Dans ma ville, un collège et un lycée offrent cet enseignement depuis plusieurs années, et cet apprentissage est reconnu lors des examens. Il devrait être développé.

La proposition de loi fait mesurer le retard de la France en cette matière ; elle vise à favoriser l’intégration de l’enfant dans l’univers des entendants par le développement de ses capacités d’audition et d’oralisation et nous ne pouvons qu’y être favorables. Mais, cette évolution s’accompagne d’une interrogation éthique que nous ne pouvons négliger et nous devons prendre au sérieux les témoignages des personnes sourdes qui disent avoir une vie sociale en bien des points comparables à celle des entendants, ne se sentir ni handicapés ni exclus et capables de mener une vie autonome en accédant à l’apprentissage de la langue des signes.

Tout en respectant le droit des parents au choix des traitements proposés pour leur enfant et sans vouloir éluder les difficultés pratiques, éthiques et juridiques que pourrait poser aux parents l’imposition d’une volonté extérieure alors qu’aucun processus vital n’est menacé, il faut tenir compte du droit des enfants malentendants à ne pas être privés des traitements susceptibles de préserver leur capacité à communiquer avec d’autres communautés linguistiques. En effet, le défaut de prise en charge de son déficit sensoriel à une date appropriée constituant une perte de chances irréversible pour l’enfant sourd. Le principe éthique qui doit s’appliquer est celui de l’équité, tous les enfants devant pouvoir bénéficier des progrès de la médecine. Là est la force de cette proposition de loi.

Mme Marisol Touraine. J’ai été très sensible à la manière dont Marianne Dubois a expliqué les choses. On a trop tendance, en France, à présenter les politiques de santé publique comme des contraintes, de surcroît normalisatrices. Il est important que ce qui s’est dit ce matin soit répété lors de l’examen de la proposition de loi en séance publique.

Nous voterons cette proposition de loi en dépit de certaines réserves, mais le texte ne doit ni signifier la négation du choix par les parents du mécanisme d’intégration de leur enfant dans la vie sociale, ni être le véhicule d’une normalisation subreptice de la conduite des familles. Par ailleurs, notre vote sera conditionné par la prise en charge du dépistage des troubles de l’audition par l’assurance maladie ; serait-il laissé à la charge des familles que la proposition de loi n’aurait plus lieu d’être.

Une expérimentation de généralisation du dépistage de la surdité avait été lancée à Tours, mais elle a cessé d’être financée. Alors que des associations, des médecins et des parlementaires se battant pour que des financements soient alloués à des expérimentations de cette sorte s’entendaient répondre que ce n’était pas fondamental, je me réjouis que l’on y vienne. Cela étant, faut-il une loi pour cela, ou même un décret ? Ne s’agit-il pas d’une simple procédure médicale ? Je puis témoigner, à titre personnel, que l’audition de mes nouveau-nés a été vérifiée par le pédiatre, et je trouve dommage que l’on en passe par une loi. Enfin, une fois qu’une surdité aura été dépistée à trois jours, quelle garantie a-t-on sur le suivi dans les trois mois ?

Nous voterons cette proposition de loi mais nous considérons qu’elle ne constitue qu’une première étape. La deuxième devrait être de définir comment accompagner les enfants repérés comme présentant de gros risques de troubles de l’audition vers des structures spécialisées. Si ce n’est pas le cas, des inégalités se récréeront entre les familles qui assumeront la nouvelle qui leur est donnée et celles qui ne l’assumeront pas.

M. Fernand Siré. À mon sens, deux problèmes distincts se posent ici : rendre obligatoire le dépistage de la surdité d’une part, d’autre part le faire par la loi, ce qui revient à rendre l’État responsable du déficit de diagnostic. Je suis favorable à une loi rendant le dépistage obligatoire et contraignant l’État à fournir le matériel de dépistage adéquat, mais je désapprouve l’idée que ce dépistage spécifique devrait être fait dans les trois jours suivant la naissance. Les nouveau-nés sont déjà soumis à une série de tests de dépistage obligatoires pris en charge par l’assurance maladie dans le certificat médical obligatoire du huitième jour – et si ces tests ne sont pas faits, la prime de naissance n’est pas versée. Pourquoi imposer le dépistage des troubles de l’audition dans les trois premiers jours plutôt qu’au cours de la première semaine ? Enfin, la loi ne doit pas laisser les parents libres de s’opposer au dépistage de la surdité, dont je rappelle qu’il est fait au bénéfice des enfants et non pas de leurs parents.

Mme Marie-Françoise Clergeau. On ne peut qu’être d’accord avec l’idée d’un dépistage précoce des troubles de l’audition mais des questions restent en suspens. En premier lieu, ce qui est proposé est un dépistage au troisième jour de vie, mais il m’a été dit que la confirmation certaine des troubles ne peut intervenir avant les trois mois de l’enfant. N’est-ce pas risquer d’inquiéter inutilement les familles ? Dans un autre domaine, nous avons été noyés de courriels d’associations de sourds et de malentendants, dont certaines disent ne pas avoir été auditionnées. Les associations concernées ont-elles été entendues en nombre suffisant ? Enfin, nous ne pourrons voter cette proposition de loi que si le coût du dépistage est pris en charge par l’assurance maladie.

Outre cela, on ne peut s’en tenir à la généralisation du dépistage précoce. Comment, ensuite, améliorer l’accompagnement des parents et la prise en charge de l’éducation des enfants malentendants ? Le suivi dans son entier doit être envisagé. C’est parce que ce n’est pas le cas aujourd’hui que les associations de sourds et de malentendants se sont regroupées pour demander un suivi tout au long de la vie. Le dépistage précoce est une bonne chose, mais il ne suffit pas.

M. Vincent Descoeur. Proposer un dépistage précoce et plus accessible me semblait être de bon sens mais j’ai été intrigué, sinon déstabilisé, par la levée de boucliers que cette idée a suscitée. Alors que les auteurs de la proposition de loi sont de bonne volonté, une incompréhension manifeste subsiste. Cela ne diminue en rien l’intérêt du dépistage, mais il faut tenir compte de ces réactions, les respecter et répondre aux interrogations posées, notamment en soulignant fortement qu’au lendemain du dépistage, le libre choix des familles demeurera. Enfin, ce dépistage doit être gratuit comme le sont les autres dépistages faits à la naissance.

Mme Valérie Rosso-Debord. Pour les parents entendants, apprendre que leur enfant est sourd est un drame, mais c’est aussi un drame pour des parents sourds de savoir que leur enfant entend. Là est le cœur du débat : le problème du handicap sensoriel – compensé – s’est mué en une question d’ordre culturel. Comme être aveugle, être sourd est un handicap mais, du fait de la ghettoïsation de la communauté des sourds pendant plusieurs siècles, cette communauté s’est soudée, a acquis des formes de communication palliatives et affirme ne pas se reconnaître dans le monde des entendants. Mais, la langue des signes française est constituée de 3 500 signes qui ne permettent pas de rendre compte de toutes les nuances du langage oral ; c’est pourquoi, pour ce qui touche à la psychologie, au spirituel, au religieux, les sourds recourent à l’alphabet dactylologique.

On doit aux parents de connaître l’état de santé de leurs enfants et la possibilité de réagir en fonction de leur sensibilité personnelle. Cette proposition de loi le permet ; j’y souscris pleinement et j’en remercie les auteurs.

M. Simon Renucci. J’ai examiné des milliers d’enfants à la naissance, mais je n’ai jamais pensé que, devenu député, j’en viendrai à voter une proposition de loi visant à instituer un dépistage précoce de la surdité, et je suis convaincu qu’une circulaire aurait suffi pour aboutir au résultat souhaité. Cela dit, l’idée est excellente. Je partage, par ailleurs, le point de vue de Fernand Siré : pourquoi imposer un dépistage avant le troisième jour au lieu d’en prévoir la réalisation en même temps que les tests prévus dans le cadre du bilan médical du huitième jour ? Nous devons aussi accepter d’entrer dans le monde des malentendants en apprenant la langue des signes et, par ailleurs, renforcer les moyens des Centres d’action médico-sociale précoce. Enfin, les parents veulent la vérité et plus tôt elle leur est dite, mieux cela vaut. Je me réjouis de la tenue de ce débat de haute tenue.

M. Michel Issindou. D’évidence, un problème culturel se pose, que traduisent les multiples courriels reçus. Mais nous débattons aujourd’hui de santé publique, et je comprends que l’on ait envie de dépister au plus tôt les troubles de l’audition pour sortir le plus vite possible les enfants malentendants de la surdité, car il est toujours mieux d’entendre que de ne pas entendre. Cela étant, pourquoi légiférer à propos de ce qui devrait être un examen relevant de la pratique médicale quotidienne ? Nous voterons la proposition de loi, mais non sans regretter que l’on ait choisi ce vecteur.

M. Jean Bardet. De fait, en viendra-t-on à écrire dans la loi qu’il faut mesurer la tension artérielle ?

Mme Jacqueline Fraysse. Je fais partie de celles et ceux qui pensent que le dépistage précoce des troubles de l’audition ne peut qu’être utile. Mais, beaucoup d’interrogations demeurent qui doivent inciter à la prudence, et les questions posées par les personnes sourdes et leurs familles ne peuvent être ignorées. Ainsi, l’enseignement de la langue des signes devrait être beaucoup plus développé qu’il ne l’est actuellement ; cela résoudrait de nombreux problèmes.

Je suis surprise par le dépôt de cette proposition de loi sur un thème spécifique, alors qu’un projet de loi de santé publique a été annoncé. De surcroît, le problème de la surdité ne se résume pas au dépistage précoce ; or, rien n’est dit du suivi systématique des enfants et, en particulier, de la santé scolaire – il est vrai que l’on sait le faible nombre de médecins scolaires. Par ailleurs, ceux qui proposent des maisons de naissance non médicalisées proposent dans le même temps un dépistage médical supplémentaire. Où est la cohérence ?

La grande diversité des cas est avérée : parents malentendants et enfants entendants, familles entendantes et enfants sourds… Cela doit nous inciter à respecter les préoccupations des familles et à constituer des équipes disciplinaires aptes, après que le diagnostic de troubles de l’audition a été posé, à accompagner les familles et à leur permettre un choix éclairé, dans l’intérêt de l’enfant. Cela exige des moyens et une prise en charge financière. La portée de ce texte est très limitée. Aussi, tout en comprenant la démarche qui la sous-tend, nous ne pouvons soutenir une proposition de loi se limitant à instituer un dépistage précoce généralisé.

M. Maxime Gremetz. J’approuve ce point de vue, comme le questionnement de Vincent Descœur. Cette proposition de loi, au thème important mais parcellaire, en laissant penser que les médecins seraient incapables d’exercer convenablement, remet en cause la liberté et la responsabilité du corps médical. Je suis favorable au dépistage précoce obligatoire des troubles de l’audition, mais pas au troisième jour – et c’est ce calendrier que contestent les courriels qui nous sont parvenus. De plus, le dépistage suppose un suivi. Je suis très attaché à la prévention, mais l’on sait la grande misère de la médecine scolaire, qui n’a d’égale que celle de la médecine du travail.

Je note que la proposition de loi ne s’oppose pas à l’utilisation de la langue des signes. Si l’on vient, inutilement, à adopter un texte de loi à ce sujet, il faut préciser que le dépistage est obligatoire, laisser aux médecins le soin de décider des modalités des tests sans leur imposer le moment de ceux-ci et spécifier que les tests de dépistage sont pris en charge par l’assurance maladie. Sur la forme, procéder par propositions de loi successives revient à découper la santé en tranches, alors qu’il s’agit d’un problème global.

M. Philippe Morenvillier. L’être humain a besoin de chacun de ses cinq sens. Se rendre compte trop tard des déficiences auditives d’un enfant à la naissance, c’est hypothéquer sa scolarité et sa socialisation, c’est le faire s’engager dans une vie minorée, faite de luttes et parfois de souffrances. À ce jour, le dépistage des troubles sensoriels n’est pas généralisé. Faut-il, alors, légiférer, et imposer un dépistage systématique des troubles de l’audition en maternité ? Cela pourrait laisser croire à la déresponsabilisation du corps médical mais, au regard des enjeux médicaux, médico-économiques et sociaux, je suis favorable à l’instauration de cette obligation et contre l’idée que les parents puissent refuser le dépistage. En outre, la proposition de loi contribuerait à réduire les inégalités d’accès aux soins. Je la voterai donc, mais je ne voterai pas l’amendement AS 10, car ce dépistage doit être pris en charge par l’assurance maladie et ne pas donner lieu à une contribution des familles.

Mme Catherine Génisson. En ma qualité de membre du conseil d’administration du centre d’éducation pour jeunes sourds d’Arras, je ne puis qu’être favorable au dépistage précoce des troubles de l’audition. Toutefois, il s’agit d’un sujet de santé publique qui relève d’une loi globale. D’autre part, il y a quelque chose d’étrange à imposer des injonctions par voie législative sur des sujets qui ressortissent aux compétences des professionnels concernés, lesquels exercent au demeurant en fonction des indications de la Haute Autorité de santé. De plus, on n’aura rien résolu si l’on ne considère pas que la question de la surdité relève des responsabilités de l’État. Il est fondamental de s’occuper de ce que deviennent les enfants dont la surdité a été dépistée : c’est un problème de santé publique, d’éducation et de socialisation. Dans le débat dont nous avons eu l’écho, deux intégrismes s’affrontent : l’oralisation à tout prix pour masquer le handicap et, à l’inverse, la sur-reconnaissance du handicap par l’apologie de la langue des signes. Au-delà du dépistage, notre responsabilité est donc de travailler à l’exigence de compétence dans les lieux qui accueillent les sourds, car s’il est bien de dépister, il faut ensuite assumer le suivi des enfants sourds.

M. Georges Colombier, président. Notre débat a été très riche. J’en retiens également la nécessité de prévenir aussi les troubles de l’audition chez les jeunes gens. La parole est au rapporteur pour répondre aux orateurs.

M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur. Nous vous présentons cette proposition de loi pour que le sujet soit traité maintenant et parce que les médecins nous ont demandé de pousser les feux. Nous avons reçu tous les acteurs concernés dont, évidemment, la Fédération française du langage des signes, qui n’a pas manifesté d’opposition à la proposition de loi, ayant compris que ce qui nous intéresse est d’organiser le repérage des troubles de l’audition dans les trois jours qui suivent la naissance – trois jours étant la durée moyenne des séjours à la maternité.

Pour éviter les nourrissons « perdus de vue », nous voulons que les parents soient alertés avant de quitter la maternité. Si le dépistage n’est pas généralisé à ce jour, c’est que toutes les cliniques ne sont pas équipées à cette fin. Des statistiques empiriques que nous avons faites, en interrogeant nos jeunes collaboratrices devenues mères au cours des deux ou trois ans écoulés, il ressort qu’un nouveau-né sur deux est soumis à un dépistage sérieux des troubles de l’audition par oto-émissions acoustiques automatisées ou, de manière plus fiable, par potentiels évoqués auditifs automatisés. Si le repérage conduit à un diagnostic positif, la famille sera dirigée vers un centre de dépistage et d’orientation de la surdité. Il en existe déjà sept, créés dans le cadre des expérimentations évoquées. Mais, l’année dernière, sur 800 000 naissances, seuls 192 430 bébés ont été soumis à des tests de dépistage des troubles de l’audition.

Nous sommes obligés d’en passer par une loi pour avoir des arguments à opposer à ceux qui sont contre le dépistage néonatal systématique. Avec 25 % seulement des nourrissons dépistés, la France accuse un très important et peu glorieux retard : au Danemark, le taux de dépistage est de 98 % et il est de 80 % en Bulgarie. Dans notre pays, trois quarts des nouveau-nés ne sont pas soumis à ces tests ; cette inégalité pourrait entraîner des plaintes contre l’État, qui pourrait se trouver attaqué pour n’avoir pas installé les moyens de repérage nécessaires. Les médecins généralistes ne peuvent procéder à ces tests techniques, pour lesquels même les oto-rhino-laryngologistes se disent insuffisamment équipés. Voilà pourquoi nous proposons que le repérage se fasse avant la sortie de la maternité. Mais, une fois les parents alertés, il ne revient pas au législateur de dicter sa conduite au pédiatre. Je le redis, en France, à ce jour, le repérage concerne 25 % des nourrissons ; pourquoi pas les autres ? Qu’attend-on ?

C’est ce qui nous a conduits à pousser les feux en choisissant la voie législative. Ainsi s’explique cette proposition de loi, qui vise à donner à tous les parents, dans un délai de deux ans, la possibilité d’un choix éclairé et d’un suivi. Nous avons été très émus par les témoignages entendus, dont nous avons retenu que, trop souvent, faire appareiller un enfant sourd relève du parcours du combattant. Un suivi de proximité est donc nécessaire.

Certains s’insurgent, considérant que nous nous mêlons d’un sujet qui ne nous concerne pas. Mais les chiffres sont ceux que je vous ai dits, et il est de notre rôle de législateur d’intervenir sans attendre.

Enfin, l’amendement AS 10 vise à éviter que la proposition de loi ne tombe sous le coup de l’article 40 de la Constitution. Lors de l’examen du texte en séance publique, nous obtiendrons évidemment du Gouvernement qu’il présente des amendements permettant de revenir au texte initial, et qu’il lève le gage.

Mme Edwige Antier. Nous nous sommes entretenus par deux fois de cette proposition de loi au ministère de la santé. Si, lors de notre première visite, l’accueil fait au texte a été assez tiède, il a été validé lors de notre seconde visite, après chiffrage du coût de la mesure par la CNAMTS. Nous attendions le dépôt d’un amendement du Gouvernement rendant la proposition de loi recevable, mais le remaniement du Gouvernement est intervenu.

Le suivi des enfants dépistés suppose un personnel dûment formé. La proposition de loi prévoit cette formation et, pour assurer le suivi nécessaire, un maillage territorial par des centres spécialisés, auxquels les associations de langue des signes sont associées.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Pour dissiper toute ambiguïté, j’indique que nous sommes favorables à la proposition de loi à la condition expresse que le dépistage soit pris en charge par l’assurance maladie.

II.- EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er

(Art. L. 2132-2-2 (nouveau) du code de la santé publique)


Mise en place d’un dépistage précoce des troubles de l’audition

Saisie de la proposition de loi n°2752, la commission des affaires sociales a apporté un certain nombre de modifications au texte initial, afin de lever certaines ambiguïtés de rédaction et de répondre à certaines inquiétudes apparues au sein de la communauté sourde.

L’article 1er de la proposition pose le principe et détaille les modalités du dépistage précoce des troubles de l’audition. Pour cela, il insère dans le code de la sécurité sociale un nouvel article L. 2132-2-2 au sein de la deuxième partie (Santé de la famille, de la mère et de l’enfant), livre Ier (Protection et promotion de la santé maternelle et infantile), titre III (Actions de prévention concernant l’enfant), chapitre II (Carnet de santé et examens obligatoires).

Le premier alinéa du nouvel article L. 2132-2-2 (alinéa 2) pose le principe d’un dépistage précoce des troubles de l’audition. Dans le texte initial, il était indiqué que ce dépistage avait lieu à la naissance ce qui était quelque peu ambigu : en effet, le dépistage est un processus qui certes commence dans les quelques jours suivant la naissance avec un premier repérage mais qui ne s’achève qu’au bout de quelques mois avec le diagnostic final. C’est pourquoi la commission a précisé que ce dépistage devait intervenir avant la fin du troisième mois de l’enfant.

a) Un repérage dès la maternité

La première étape de ce dépistage est donc un repérage qui est décrit au 1° de l’article L. 2132-2-2 (alinéa 4). Il doit avoir lieu à la maternité, avant le départ de l’enfant afin d’éviter le phénomène des enfants « perdus de vue ». La référence au « troisième jour » qui figurait dans le texte initial et qui correspondait à la durée moyenne de séjour en maternité a été supprimée par la commission : le repérage devra simplement avoir lieu avant la sortie de l’enfant de la maternité. Pour ce repérage, il est souhaitable que ce soit la méthode des potentiels évoqués auditifs automatisés (PEAA) qui soit utilisée puisqu’il s’agit de la méthode la plus fiable. Le rapport relatif à l’expérimentation menée par la CNAMTS indique même qu’il semble efficace d’instaurer un 2ème test en maternité, évitant ainsi d’avoir à demander à un nombre important de parents de ramener leurs enfants quelques semaines plus tard pour des investigations diagnostiques.

Votre rapporteur souhaite insister sur la nécessité du plus grand tact et de la plus grande prudence au moment de l’annonce faite aux parents à la maternité : il ne s’agit bien sûr pas d’annoncer un diagnostic de surdité, mais simplement d’indiquer qu’il existe un doute sur les capacités auditives de l’enfant et qu’il sera donc nécessaire de procéder à des examens complémentaires sachant que dans seulement 10 % des cas, ces examens révèleront une surdité.

b) Un diagnostic posé avant trois mois

Le 2° de l’article L. 2132-2-2 (alinéa 5) indique précisément les modalités de ces examens complémentaires qui doivent intervenir avant la fin du troisième mois afin d’établir un diagnostic définitif. Dans l’expérimentation menée par la CNAMTS, ces examens ont lieu au sein des centres de diagnostic et d’orientation de la surdité (CDOS), structures ad hoc qui sont adossées aux services d’ORL des CHU de l’expérimentation. C’est pourquoi la version initiale du texte avait retenu le terme de « centre de référence » fréquemment utilisé dans secteur hospitalier.

La commission lui a préféré le terme plus neutre de « structure » pour deux raisons : d’une part, il reviendra à chaque agence régionale de santé de désigner les structures agréées pour mener à bien ce diagnostic et il sera indispensable de tenir compte du maillage territorial existant en ne s’interdisant aucune possibilité ; d’autre part, il est indispensable de ne pas enfermer ce processus dans un circuit exclusivement médical et de donner toute sa place à la dimension éducative et culturelle de la surdité.

c) Une information complète des parents

Cela est d’autant plus indispensable que la troisième composante du diagnostic précoce, prévue au 3° de l’article L. 2132-2-2 (alinéa 6), est la délivrance d’une information complète sur « les différents modes de communication existants et leur disponibilité au niveau régional ». Cela suppose que l’ensemble des options (appareillage, implants cochléaires, rééducation, oralisme, langue française parlée complétée (LPC) langue des signes française (LSF)) soient présentées et que tous les acteurs soient associés à cette information. C’est afin d’affirmer très clairement que le dépistage précoce ne préjugeait en rien de la solution retenue par les parents d’enfants sourds que la commission a souhaité dans ce paragraphe viser explicitement la langue des signes française.

Par ailleurs, l’obligation d’informer les parents sur la disponibilité des structures existantes suppose de mener à bien un travail de recensement qui n’est aujourd’hui malheureusement pas fait.

d) Le rôle des agences régionales de santé

Cette exigence de proximité explique en partie le choix fait par les auteurs de la proposition de loi de confier dans le sixième alinéa de l’article L. 2132-2-2 (alinéa 7) aux agences régionales de santé (ARS) le soin d’élaborer un programme de dépistage précoce des troubles de l’audition. Outre l’exigence de proximité et de connaissance la plus précise possible de l’offre existant sur les territoires, le recours aux ARS et répond parfaitement à la double dimension de la surdité, qui est à la fois médicale sociale.

L’un des objectifs de la création des ARS était précisément, rappelons-le, de permettre un décloisonnement entre le secteur sanitaire, et à l’intérieur du secteur sanitaire entre la médecine de ville et l’hôpital, et le secteur médico-social. La problématique de la surdité pourrait assurément constituer un cas d’école pour ce décloisonnement : la découverte de la surdité chez un enfant appelle bien sûr un suivi médical particulier de l’enfant, mais également un accompagnement social de la famille et une offre de structures et de services spécifiques qui sont du ressort du champ médico-social. Si, au niveau central, le cloisonnement entre les différentes grandes directions est en partie inévitable, au niveau régional, grâce aux ARS, le décloisonnement est possible.

Même s’il est régional, ce programme de dépistage devra bien sûr être élaboré en fonction d’un cahier des charges national, qui sera établi par arrêté après avis de la Haute Autorité de santé et du conseil national de pilotage des ARS.

La commission a souhaité supprimer l’alinéa qui prévoyait que le refus des parents de faire procéder au repérage devrait faire l’objet d’une déclaration écrite, annexée au carnet de santé. Cette précision est apparue inutile : le code de la santé publique et, en particulier son article L. 1111-4, offre déjà aux parents la possibilité de refuser tel ou tel examen. Il reviendra simplement aux professionnels de santé d’indiquer, en attendant une refonte du carnet de santé, que ce repérage a été proposé et refusé par les parents.

Le septième alinéa de l’article L. 2132-2-2 (alinéa 8) précise que les résultats des examens sont inscrits dans le carnet de santé de l’enfant qui constitue un formidable outil de santé publique et le huitième alinéa (alinéa 9) prévoit que « ce dépistage ne donne pas lieu à contribution financière ». Ceci va de soi, et cet alinéa n’est probablement pas indispensable, mais il a semblé important à la commission de le conserver. Ça sera bien sûr à la CNAMTS de financer cette généralisation du dépistage.

Enfin, le neuvième alinéa de l’article L. 2132-2-2 (alinéa 10) prévoit le dépôt au Parlement d’un rapport annuel sur la mise en place du dépistage précoce.

*

La Commission commence l’examen de cet article au cours de sa séance du mercredi 17 novembre 2010.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel AS 2 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement AS 1 de M. Jean-François Chossy.

M. Jean-François Chossy. L’amendement prévoit la participation de l’ensemble des professionnels concernés par les troubles de l’audition à l’élaboration des plans régionaux de dépistage.

Suivant l’avis favorable du rapporteur, la Commission adopte l’amendement AS 1.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels AS 3, AS 4, AS 5 et AS 6 du rapporteur.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement AS 10 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement vise à rendre la proposition de loi recevable au titre de l’article 40. S’il n’est pas adopté, la proposition de loi ne prospérera pas. Mais, lors de l’examen du texte en séance publique, le Gouvernement présentera des amendements permettant le retour au texte initial, et lèvera le gage.

M. Simon Renucci. Cette manière de procéder n’est pas satisfaisante. Nous devons avoir l’assurance, avant l’examen du texte en séance publique, que le dépistage est pris en charge par l’assurance maladie.

Mme Catherine Génisson. La proposition de loi ne devrait pas être mise à l’ordre du jour de la séance publique, avant qu’un accord de principe ait été conclu avec le Gouvernement à ce sujet.

M. Denis Jacquat. Ayant eu des expériences malheureuses dans le passé, je ne pourrai, si cet amendement est adopté, ni voter pour ni voter contre la proposition de loi. Un accord doit être pris avec le Gouvernement de façon certaine avant que ce texte soit soumis à l’examen de l’Assemblée.

M. Maxime Gremetz. Mieux vaudrait que l’amendement soit retiré.

Mme Catherine Lemorton. Le Gouvernement devrait être sensible à l’argument qui figure dans l’exposé des motifs de la proposition de loi, selon lequel le dépistage des troubles de l’audition chez le nouveau-né « permet de réduire les coûts de prise en charge et d’accompagnement d’un enfant atteint de troubles auditifs dépisté tardivement ». Voilà qui devrait l’inciter à lever le gage.

M. Jean-François Chossy. Le remaniement a empêché que le Gouvernement s’engage, mais si l’amendement AS 10 n’est pas adopté la proposition de loi restera irrecevable. Il faut l’adopter puis, après concertation avec le nouveau ministre de la santé, le rapporteur pourra vous assurer que le gage sera levé lors de l’examen du texte en séance publique.

M. le rapporteur. Une autre possibilité consisterait à supprimer, à l’article 1er, l’alinéa 10 ainsi rédigé : « Ce dépistage ne donne pas lieu à une contribution financière des familles ». Dans le même temps, je retirerai l’amendement AS 10. Ensuite, un accord sera trouvé avec le Gouvernement.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Il ne me paraît pas que le problème de fond soit réglé pour autant, car cela revient au même.

Mme Catherine Génisson. Mieux vaudrait reporter la date de l’examen de la proposition de loi en séance plénière.

M. Denis Jacquat. Je ne suis pas pleinement rassuré par la nouvelle proposition du rapporteur et je souhaite avant tout vote que le Gouvernement s’engage à lever le gage.

Mme Bérengère Poletti. Ne pourrait-on envisager que la Commission reporte son vote sur la proposition de loi ?

M. le président Pierre Méhaignerie. J’ai été informé de vos débats, auxquels, retenu par les votes en séance publique, je n’ai pu assister. J’engagerai une négociation avec le Gouvernement afin qu’il prenne l’engagement de lever le gage. Dès lors, je propose que nous suspendions la discussion de la proposition de loi. Nous la reprendrons la semaine prochaine.

La Commission reprend l’examen de cet article au cours de sa séance du mercredi 24 novembre 2010.

La Commission est saisie de l’amendement AS 11 rectifié du rapporteur.

M. le rapporteur. Le souci de clarification conduit à substituer, à l’alinéa 2, aux mots « à la naissance » les mots « avant la fin de son troisième mois ». Je tiens ainsi compte de la remarque de Roland Muzeau.

La Commission adopte l’amendement AS 11 rectifié du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement AS 12 du rapporteur.

M. le rapporteur. Il s’agit, pour plus de souplesse, de substituer, à l’alinéa 4, aux mots « dans les trois jours qui suivent la naissance » les mots « avant la sortie de l’enfant de ».

La Commission adopte l’amendement AS 12 du rapporteur.

Puis, elle examine l’amendement AS 13 du rapporteur.

M. le rapporteur. Par cet amendement, nous entendons laisser aux agences régionales de santé une marge de manœuvre dans la désignation des structures habilitées à procéder au diagnostic complémentaire de troubles de l’audition. S’il est adopté, cet amendement se substituera à l’amendement AS 6 que nous avons adopté la semaine dernière.

Mme Martine Carrillon-Couvreur. J’aurais aimé connaître le bilan des expérimentations de repérage des troubles de l’audition à la maternité menées par la CNAMTS dans six villes. D’autre part, les centres d’action médico-sociale précoce (CAMSP) sont particulièrement adaptés au diagnostic de la surdité, mais un rendez-vous en ces lieux demande un an d’attente, sinon davantage. Des recommandations à ce sujet devraient être faites aux agences régionales de santé, car ce sera un facteur de blocage.

M. Élie Aboud. Le problème est réel et je crains que confier aux agences régionales de santé la définition des structures habilitées à procéder aux examens complémentaires ne règle pas le problème de fond.

M. le rapporteur. Les structures adaptées sont les CAMSP spécialisés, et les centres de dépistage et d’orientation de la surdité (CODS) là où les CAMSP n’ont pas cette spécialisation.

Pour les expérimentations, la CNAMTS n’a pas choisi six villes mais six CHU ; c’est donc sur ces CHU que portent, globalement, les statistiques.

Nous avons privilégié l’échelon régional, car les agences régionales de santé permettent de lier solution médicale et suivi social, et de faire jouer un rôle aux maisons départementales des personnes handicapées. Il reviendra aux agences de déterminer l’organisation du dispositif : elles auront deux ans pour cela.

La Commission adopte l’amendement AS 13 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement AS 14 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement fait mention explicite de la langue des signes comme mode de communication à la disposition des enfants et de leurs familles.

M. Jean-François Chossy. Il fallait apaiser les inquiétudes qui transparaissent dans les très nombreux courriels que nous avons reçus, et l’amendement y pourvoit. Mais j’aimerais dire aussi explicitement qu’il existe d’autres méthodes que la langue des signes, telle la langue parlée complétée.

M. le rapporteur. Nous effleurons cette question pour éviter tout conflit, mais l’objet premier de la proposition de loi est d’organiser le repérage et le dépistage précoces de la surdité.

La Commission adopte l’amendement AS 14 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement AS 15 du rapporteur.

M. le rapporteur. L’amendement AS 15 tend à préciser l’amendement AS 1 de Jean-François Chossy, que nous avons adopté la semaine dernière, en indiquant que l’agence régionale de santé devra définir le programme de dépistage en concertation également avec les associations concernées.

M. Jean-François Chossy. Je souhaite que l’amendement soit précisé par l’insertion du mot « tous » avant les mots « les professionnels ». Ainsi s’assure-t-on que seront consultés l’ensemble des spécialistes, et non seulement ceux de la langue des signes.

M. le rapporteur. Avis favorable à cette rectification.

La Commission adopte l’amendement AS 15 rectifié du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement AS 16 du rapporteur, tendant, aux alinéas 7 et 12, à substituer au mot : « décret » le mot « arrêté ».

Mme Martine Carrillon-Couvreur. Il conviendrait dans ce cas d’écrire, à l’alinéa 7, « un cahier des charges établi par arrêté ».

M. le rapporteur. Avis favorable à cette rectification.

La Commission adopte l’amendement AS 16 rectifié du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement AS 17 du rapporteur, qui tend à supprimer l’alinéa 8.

M. le rapporteur. Il est inutile de préciser dans la loi que les parents peuvent s’opposer au repérage des troubles de l’audition à la maternité par une déclaration écrite annexée au carnet de santé. S’il était adopté, cet amendement rendrait sans objet l’amendement AS 3 adopté la semaine dernière.

Mme Edwige Antier. L’obligation est faite aux maternités de proposer le dépistage et de disposer de l’équipement nécessaire pour y procéder, mais il est apparu préférable de laisser les parents exercer leur libre arbitre sans que leur refus soit formalisé dans le carnet de santé.

La Commission adopte l’amendement AS 17 du rapporteur

Puis, elle adopte l’amendement AS 7, rédactionnel, du rapporteur.

La Commission adopte l’article 1er ainsi modifié.

Article 2

Calendrier de mise en
œuvre

L’article 2 prévoit une montée en charge progressive du dispositif de généralisation du dépistage précoce des troubles de l’audition.

Le I de l’article prévoit d’abord que le cahier des charges national devant encadrer les programmes régionaux devra être publié dans les six mois suivant la promulgation de la loi. Et le II précise que les agences régionales de santé disposeront de deux ans pour mettre en œuvre ce dépistage.

*

La Commission adopte l’amendement AS 8, rédactionnel, du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 2 ainsi modifié.

Article 3

Gage

La commission a bien sûr supprimé cet article grâce à un amendement du Gouvernement qui, seul, dispose du pouvoir constitutionnel de lever le gage.

Votre rapporteur salue cette initiative du Gouvernement : aujourd’hui, c’est la dotation initiale du Fonds national de prévention, d’éducation et d’information sanitaire (FNPEIS) qui finance les expérimentations, fonds qui n’était consommé en 2009 qu’à hauteur de 77 %. Il semble donc qu’il ne sera pas insurmontable de dégager les moyens supplémentaires nécessaires à la généralisation du dépistage, moyens au demeurant assez faibles, puisque évalués à moins de 12 millions d’euros.

Reste que 2011 sera probablement une année d’étude et d’élaboration du cahier des charges et que c’est donc lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 qu’il conviendra de s’assurer que les financements nécessaires seront bien disponibles.

*

La Commission est saisie de l’amendement AS 18 du Gouvernement supprimant l’article.

M. Roland Muzeau. Par cet amendement, le Gouvernement propose certes de lever le gage, mais il n’alloue aucun moyen supplémentaire destiné au dépistage précoce des troubles de l’audition, renvoyant au redéploiement des financements existants. Outre que la formulation de l’exposé sommaire est des plus vagues, on peut pourtant supposer que les moyens existants sont déjà utilisés !

M. le rapporteur. Le ministre nous répondra sur ce point lors de l’examen du texte en séance publique. Mais j’observe que quelque 200 000 enfants – sur 800 000 naissances – bénéficient déjà d’un dépistage, et que jamais la question ne s’est posée de savoir qui prenait ce dépistage à sa charge : c’est la CNAMTS. Cela signifie sans doute que l’on poursuivra dans cette voie, d’autant que la CNAMTS est très favorable à la proposition de loi.

M. Roland Muzeau. Reconnaissez néanmoins que l’on ne peut faire plus sans davantage de moyens !

Suivant l’avis du rapporteur, la Commission adopte l’amendement AS 18 du Gouvernement. L’article 3 est ainsi supprimé.

M. Roland Muzeau. Avec Mme Jacqueline Fraysse, je maintiens mon vote d’abstention sur l’ensemble de la proposition de loi.

La Commission adopte ensuite l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

*

En conséquence, la Commission des affaires sociales demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

TABLEAU COMPARATIF7

___

Dispositions en vigueur

___

Texte de la proposition de loi

___

Texte adopté par la commission

___

 

Proposition de loi visant à généraliser le dépistage précoce des troubles de l’audition

Proposition de loi visant à généraliser le dépistage précoce des troubles de l’audition

 

Article 1er

Article 1er

 

Après l’article L. 2132-2-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 2132-2-2 ainsi rédigé :

 
     
 

« Art. L. 2132-2-2. – En plus des consultations prévues à l’article L. 1411-6*, l’enfant bénéficie à la nais-sance d’un dépistage des troubles de l’audition.

« Art. L. 2132-2-2. …

… bénéficie avant la fin de son troisième mois d’un dépistage précoce des troubles de l’audition.

Amendements AS 11 et AS 2

     
 

« Ce dépistage comprend :

 
     
 

« 1° un examen de repérage des troubles de l’audition réalisé dans les trois jours qui suivent la naissance dans l’établissement de santé dans lequel a eu lieu l’accouchement ou dans lequel l’enfant a été transféré ;

« 1° …

… réalisé avant la sortie de l’enfant de l’établissement …

… transféré ;

Amendement AS 12

     
 

« 2° lorsque celui-ci n’a pas permis d’apprécier les capacités auditi-ves de l’enfant, des examens complé-mentaires réalisés, avant la fin du troisième mois de l’enfant, dans un centre de référence spécialisé dans le diagnostic, la prise en charge et l’accompagnement agréé par l’agence régionale de santé territorialement compétente ;

« 2° …

… dans une structure spécialisée dans le diagnostic …

… accompagnement, agréée par …

Amendement AS 13

     
 

« 3° une information sur les dif-férents modes de communication exis-tants et leurs disponibilités au niveau régional ainsi que sur les mesures de prise en charge et d’accompagnement susceptibles d’être proposées à l’enfant et à sa famille.

« 3° …

… exis-tants, en particulier la langue visée à l’article L. 312-9-1 du code de l’édu-cation*, et leurs disponibilités …

… famille.

Amendement AS 14

     
 

« Chaque agence régionale de santé élabore un programme de dépis-tage précoce des troubles de l’audition qui détermine les modalités et les condi-tions de mise en œuvre de ce dépistage, conformément à un cahier des charges national arrêté par décret après avis de la Haute Autorité de santé et du conseil national de pilotage des agences régio-nales de santé mentionné à l’article L. 1433-1*.

« Chaque …

… élabore, en concertation avec les associations, les fédérations d’asso-ciations et tous les professionnels concernés par les troubles de l’audition, un programme …

… national établi par arrêté après ...

… L. 1433-1*.

Amendements AS 15 et AS 16

     
 

« Les titulaires de l’autorité pa-rentale peuvent refuser la réalisation de ce dépistage par une déclaration écrite annexée au carnet de santé mentionné à l’article L. 2132-1*.

Alinéa supprimé

Amendement AS 17

     
 

« Les résultats de ces examens sont transmis aux titulaires de l’autorité parentale et inscrits sur le carnet de santé de l’enfant mentionné à l’article L. 2132-1*. Lorsque des examens complémentaires sont nécessaires, les résultats sont transmis au médecin du centre mentionné au 2° du présent article.

« Les résultats …

… de l’enfant. Lorsque …

… sont également transmis au médecin de la structure mentionnée au 2° du présent article.

Amendements AS 4, AS 5 et AS13

     
 

« Ce dépistage ne donne pas lieu à une contribution financière des familles.

 
     
 

« Chaque année, avant le 15 sep-tembre, le Gouvernement remet au Par-lement un rapport sur le dépistage orga-nisé des troubles auditifs prévu au présent article.

« Chaque …

… dépistage pré-coce des troubles de l’audition prévu …

… article.

Amendement AS 7

     
 

« Un décret détermine les condi-tions d’application du présent article. ».

« Un arrêté détermine …

… présent article. ».

Amendement AS 16

 

Article 2

Article 2

 

I. – Le cahier des charges natio-nal prévu à l’article L. 2132-2-2 du code de la santé publique est publié dans les six mois suivant la publication de la pré-sente loi.

I. …

… suivant la promulgation de …

… loi.

     
 

II. – Les agences régionales de santé mettent en œuvre le dépistage pré-coce des troubles de l’audition prévu à l’article L. 2132-2-2 du code de la santé publique dans les deux ans suivant la publication de la présente loi.

II. …

… suivant la promulgation de … … loi.

Amendement AS 8

 

Article 3

Article 3

 

Les charges qui pourraient résul-ter pour les organismes de sécurité so-ciale de l’application de la présente loi sont compensées, à due concurrence, par la majoration des droits sur les tabacs prévus par les articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Supprimé

Amendement AS 18

     
     

ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF

articles mentionnÉs dans la proposition de loi

Code de l’éducation

Art. L. 312-9-1. – La langue des signes française est reconnue comme une langue à part entière. Tout élève concerné doit pouvoir recevoir un enseignement de la langue des signes française. Le Conseil supérieur de l'éducation veille à favoriser son enseignement. Il est tenu régulièrement informé des conditions de son évaluation. Elle peut être choisie comme épreuve optionnelle aux examens et concours, y compris ceux de la formation professionnelle. Sa diffusion dans l'administration est facilitée.

Code de la santé publique

Art. L. 1411-6. – Sans préjudice des compétences des départements prévues à l'article L. 2111-2, des programmes de santé destinés à éviter l'apparition, le développement ou l'aggravation de maladies ou incapacités sont déterminés par arrêté du ministre chargé de la santé et de la sécurité sociale et, en tant que de besoin, des ministres intéressés.

Dans le cadre de ce programme sont prévus des consultations médicales périodiques de prévention et des examens de dépistage, dont la liste est fixée, après avis de la Haute Autorité de santé, par arrêté du ministre chargé de la santé, ainsi que des actions d'information et d'éducation pour la santé.

Les personnes handicapées bénéficient de consultations médicales de prévention supplémentaires spécifiques. Elles y reçoivent une expertise médicale qui leur permet de s'assurer qu'elles bénéficient de l'évolution des innovations thérapeutiques et technologiques pour la réduction de leur incapacité. La périodicité et la forme des consultations sont définies par arrêté du ministre chargé de la santé.

Les équipes médicales expertes responsables de ces consultations peuvent être consultées par les équipes pluridisciplinaires mentionnées à l'article L. 146-8 du code de l'action sociale et des familles, dans le cadre de l'élaboration des plans personnalisés de compensation prévus à l'article L. 114-1-1 du même code.

Art. L. 1433-1. – Un conseil national de pilotage des agences régionales de santé réunit des représentants de l'État et de ses établissements publics, dont la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie, ainsi que des représentants des organismes nationaux d'assurance maladie membres de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie. Les ministres chargés de la santé, de l'assurance maladie, des personnes âgées et des personnes handicapées, ou leur représentant, le président ; les ministres chargés du budget et de la sécurité sociale en sont membres.

Le Conseil national de pilotage des agences régionales de santé donne aux agences régionales de santé les directives pour la mise en œuvre de la politique nationale de santé sur le territoire. Il veille à la cohérence des politiques qu'elles ont à mettre en œuvre en termes de santé publique, d'organisation de l'offre de soins et de prise en charge médico-sociale et de gestion du risque et il valide leurs objectifs.

Il valide toutes les instructions qui leur sont données. Il conduit l'animation du réseau des agences.

Il évalue périodiquement les résultats de l'action des agences et de leurs directeurs généraux.

Le conseil national de pilotage veille à ce que la répartition entre les agences régionales de santé des financements qui leur sont attribués prenne en compte l'objectif de réduction des inégalités de santé mentionné à l'article L. 1411-1.

Art. L. 2132-1. – Lors de la déclaration de naissance, il est délivré gratuitement pour tout enfant un carnet de santé. Ce carnet est remis par l'officier d'état civil ; à défaut, il peut être demandé au service départemental de protection maternelle et infantile.

Un arrêté ministériel détermine le modèle et le mode d'utilisation de ce carnet où sont mentionnés obligatoirement les résultats des examens médicaux prévus aux articles L. 2132-2 et L. 2132-2-1 et où doivent être notées, au fur et à mesure, toutes les constatations importantes concernant la santé de l'enfant.

Le carnet est établi au nom de l'enfant. Il est remis aux parents ou aux personnes titulaires de l'exercice de l'autorité parentale ou aux personnes ou aux services à qui l'enfant a été confié. Ils doivent être informés que nul ne peut en exiger la communication et que toute personne appelée, de par sa fonction, à prendre connaissance des renseignements qui y sont inscrits est soumise au secret professionnel.

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement n° AS 1 présenté par M. Jean-François Chossy, M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, et Mme Edwige Antier

Article 1er

À l'alinéa 7, après les mots : « Chaque agence régionale de santé élabore », insérer les mots : «, en concertation avec tous les professionnels concernés par les troubles de l'audition, ».

Amendement n° AS 2 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

À l’alinéa 2, après le mot : « dépistage », insérer le mot : « précoce ».

Amendement n° AS 3 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

Après le mot : « santé », rédiger ainsi la fin de l’alinéa 8 : « de l’enfant ».

Amendement n° AS 4 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

À la première phrase de l’alinéa 9, supprimer les mots : « mentionnés à l’article L. 2132-1 ».

Amendement n° AS 5 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

À la dernière phrase de l’alinéa 9, après le mot : « sont », insérer le mot : « également ».

Amendement n° AS 6 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

À la dernière phrase de l’alinéa 9, après le mot : « centre », insérer les mots : « de référence ».

Amendement n° AS 7 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

À l’alinéa 11, substituer aux mots : « organisé des troubles auditifs », les mots : « précoce des troubles de l’audition ».

Amendement n° AS 8 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 2

Aux alinéas 1 et 2, substituer au mot : « publication », le mot : « promulgation ».

Amendement n° AS 10 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

Rédiger ainsi l’alinéa 10 :

« Ce dépistage est à la charge financière exclusive des familles. »

Amendement n° AS 11 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

À l’alinéa 2, substituer aux mots : « à la naissance », les mots : « avant la fin de son troisième mois ».

Amendement n° AS 12 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

À l’alinéa 4, substituer aux mots : « dans les trois jours qui suivent la naissance dans », les mots : « avant la sortie de l’enfant de ».

Amendement n° AS 13 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

I.– À l’alinéa 5, substituer aux mots : « un centre de référence spécialisé », les mots : « une structure spécialisée ».

II.– En conséquence, à la dernière phrase de l’alinéa 9, substituer aux mots : « du centre mentionné », les mots : « de la structure mentionnée ».

Amendement n° AS 14 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

À l’alinéa 6, après le mots : « existants », insérer les mots : « , en particulier la langue visée à l’article L. 312-9-1 du code de l’éducation, »

Amendement n° AS 15 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

À l’alinéa 7, après le mot : « élabore », insérer les mots : « , en concertation avec les associations, les fédérations d’associations et tous les professionnels concernés par les troubles de l’audition, ».

Amendement n° AS 16 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

I. – À l’alinéas 7, substituer aux mots : « arrêté par décret », les mots : « établi par arrêté ».

II. – En conséquence, à l’alinéa 12, substituer au mot : « décret », le mot : « arrêté ».

Amendement n° AS 17 présenté par M. Jean-Pierre Dupont, rapporteur, Mme Edwige Antier et M. Jean-François Chossy

Article 1er

Supprimer l’alinéa 8.

Amendement n° AS 18 présenté par le Gouvernement

Article 3

Supprimer cet article.

ANNEXE

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR

Ø Fédération nationale des sourds de France (FNSF) – M. Jean-François Burtin, premier vice-président, M. Vincent Cottineau, secrétaire général, M. Jean-François Burtin, directeur et Mme Guylaine Paris, présidente de l’Association française des interprètes de langue des signes (AFILS)

Ø Centre de diagnostic et d'organisation de la prise en charge de la surdité de l'hôpital Trousseau – Professeur Françoise Denoyelle, service d'ORL pédiatrique et de chirurgie cervico-faciale

Ø Société européenne d’ORL pédiatrique – Professeur Noël Garabédian, président et chef du service ORL de l'Hôpital Trousseau à Paris

Ø Direction générale de la santé – M. Patrick Ambroise, chef du bureau santé des populations, et Mme Brigitte Lefeuvre

Ø Haute autorité de santé – Professeur Bernard Fraysse, chef du service ORL de l'Hôpital Purpan à Toulouse

Ø Association nationale des parents d’enfants déficients auditifs (ANPEDA) – M. Didier Voïta, président

Ø Comité consultatif national d’éthique (CCNE) – Professeur Alain Grimfeld, président

Ø Union nationale pour l’insertion sociale du déficient auditif (UNISDA) – M. Cédric Laurent, président

Ø Génération Cochlée : Association de parents d'enfants implantés ou devant l'être prochainement – Mme Anne-Sophie Naert, présidente, et Mme Frédérique Armand, secrétaire générale, en charge de la relation avec les familles

© Assemblée nationale

1 () L’implant cochléaire est un appareil ultra-miniaturisé qui permet de restaurer l’audition à des personnes souffrant d’une surdité profonde à sévère. Contrairement aux aides auditives, ce dispositif stimule directement la cochlée, au moyen d’électrodes implantées chirurgicalement.

2 () le principe de la LPC consiste à associer à chaque syllabe prononcée un geste de complément effectué par la main près du visage. La combinaison de la forme des doigts et de la place des mains auprès du visage permet une représentation complète de la langue parlée.

3 () voir l’Aide-mémoire n° 300 d’avril 2010 consacré à la surdité et à la déficience auditive

4 () Ce sont des vibrations émises par la cochlée lors d’une stimulation acoustique. On peut les recueillir grâce à une petite sonde que l’on place dans le conduit auditif externe. Il s’agit d’un examen non douloureux et très rapide (quelques minutes) lorsque l’enfant est calme.

5 () Les PEAA enregistrent les réponses de la cochlée et des centres nerveux grâce à des électrodes collées sur le front et derrière les oreilles. L’étude des PEAA permet de déterminer le seuil d’audition de chaque oreille sur les seules fréquences aiguës et la localisation de la lésion responsable de la surdité (la cochlée, le nerf auditif ou les centres nerveux). Cet examen dure environ une dizaine de minutes. Il n’est fiable que si l’enfant est calme, ce qui peut nécessiter la prise d’un sédatif, voire une anesthésie générale.

6 () « Le droit des sourds : 115 propositions »

7 Dans les colonnes « Texte du projet de loi » et « Texte adopté par la commission », les dispositions suivies d’un astérisque sont détaillées en annexe.