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N
° 3250

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 mars 2011.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI n° 2938, autorisant l’approbation de la convention de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République argentine,

par M.  jean-paul BACQUET

Député

___

ET

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

INTRODUCTION 5

I – UN TEXTE QUI S’INSÈRE OPPORTUNÉMENT DANS UN DISPOSITIF CONVENTIONNEL DÉJÀ ÉTOFFÉ 7

A – LE RÉSEAU FRANÇAIS DES CONVENTIONS BILATÉRALES DE SÉCURITÉ SOCIALE 7

B – L’OPPORTUNITÉ DE LA CONVENTION 9

1) De la crise argentine du début du siècle à la récupération 10

2) Les relations économiques entre les deux Parties 12

C – CE QUI EST ATTENDU DE LA CONVENTION FRANCO-ARGENTINE 15

II – LES DISPOSITIONS DE LA CONVENTION BILATÉRALE 17

A – LES DISPOSITIONS GÉNÉRALES ET LE CHAMP D’APPLICATION DE L’ACCORD 17

B – LES PRESTATIONS CONCERNÉES 19

C – LA COOPÉRATION ADMINISTRATIVE 20

CONCLUSION 23

EXAMEN EN COMMISSION 25

_____

ANNEXE - TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES 27

Mesdames, Messieurs,

La France et l'Argentine entretiennent depuis très longtemps d’excellentes relations bilatérales. En témoignent l’importante présence française, que ce soit au niveau économique - plus de 200 entreprises françaises sont aujourd’hui installées en Argentine -, l’ancienneté et la qualité des échanges culturels ou encore la densité des partenariats scientifiques entre instituts de recherche des deux pays. Les rencontres de haut niveau sont régulières et à plusieurs reprises, ces dernières années, les chefs d’Etat argentins ont eu l’occasion d’effectuer des visites dans notre pays : le président Néstor Kirchner, en 2003 et en 2005, en premier lieu, puis la présidente Cristina Fernández de Kirchner, en 2008.

Actuellement, au sein du G20, le gouvernement argentin soutient activement les positions de la présidence française, notamment sur les thèmes qui sont porteurs d’enjeux pour l’avenir tels que les matières premières, la dimension sociale de la mondialisation et la lutte contre les paradis fiscaux.

Cette relation étroite se traduit aussi par le nombre important d’accords signés entre les deux pays qui couvrent un grand nombre de domaines de la coopération bilatérale depuis le milieu du XIXe siècle. La convention de sécurité sociale signée à Buenos Aires le 22 septembre 2008 dont il nous est proposé d’autoriser l’approbation est en effet le 35e accord bilatéral entre les Parties. Elle ouvre un nouveau champ de la relation bilatérale et, grâce à la coordination des régimes de sécurité sociale, facilitera la mobilité des travailleurs en permettant notamment la prise en compte des périodes cotisées dans l’un et l’autre Etat et, entre autres aspects, d’améliorer ainsi le calcul des pensions de retraites des intéressés.

I – UN TEXTE QUI S’INSÈRE OPPORTUNÉMENT DANS UN DISPOSITIF CONVENTIONNEL DÉJÀ ÉTOFFÉ

A – Le réseau français des conventions bilatérales de sécurité sociale

La France est le pays qui compte actuellement le réseau de conventions de sécurité sociale le plus développé. Comme le montre le tableau récapitulatif présenté ci-après, notre pays est aujourd’hui lié par 35 conventions bilatérales de sécurité sociale (1). Par comparaison, les Etats-Unis disposaient en 2010 d'un réseau de 24 accords bilatéraux, l'Allemagne de 19 et le Royaume-Uni de 18.

Si l’on ajoute à ce dispositif les divers instruments européens qui intéressent les Etats de l’Union européenne, de l’Espace économique européen et la Suisse, la liste des accords de sécurité sociale auxquels la France est partie s’étend au total à près de 70 Etats.

La densité du réseau de conventions françaises tient en grande partie à des raisons historiques. Il est d’ailleurs aujourd’hui encore tourné de manière importante vers les anciennes colonies de la France ou sa zone d’influence, puisque l’on note que 17 conventions sont en effet en vigueur avec des pays d’Afrique du nord ou subsaharienne ou portent sur la coordination des régimes métropolitains avec ceux en vigueur en Nouvelle Calédonie ou en Polynésie. Ces accords, souvent anciens, peuvent faire l’objet d’actualisation. Cela a été récemment le cas de la convention avec le Maroc. De même, celle avec l’Algérie est-elle actuellement en cours de renégociation, en ce qui concerne les soins de santé. Une autre discussion est parallèlement menée avec la Serbie, qui devrait, à terme, voir un nouvel accord se substituer à l’actuel, héritage de la convention existant autrefois avec les pays de l’ancienne Yougoslavie. Il en est de même enfin des discussions engagées avec le Canada pour remplacer la convention de 1981.

Liste des pays avec lesquels la France a conclu un accord de sécurité sociale (2)

Pays

Signature de l'accord

Entrée en vigueur

Algérie

1er octobre 1980

1er février 1982

Andorre

04 juin 2003

1er juin 2003

Bénin

06 novembre 1979

1er septembre 1981

Bosnie Herzégovine 1 (échange de lettres)

03 et 04 décembre 2003

04 janvier 2004

Cameroun

05 novembre 1990

1er mars 1992

Canada

09 février 1979

1er mars 1981

Cap-Vert

15 janvier 1980

1er avril 1983

Chili

25 juin 1999

1er septembre 2001

Congo

11 février 1987

1er juin 1988

Corée

25 février 2005

1er juin 2007

Côte d’Ivoire

16 janvier 1985

1er janvier 1987

Croatie 1 (échange de lettres)

09 et 12 octobre 1995

12 octobre 1995

Etats-Unis

02 mars 1987

1er juillet 1988

Gabon

02 octobre 1980

1er février 1983

Guernesey

10 juillet 1956

1er mai 1958

Israël

17 décembre 1965

1er octobre 1966

Japon

6 décembre 2004

1er juin 2007

Jersey

10 juillet 1956

1er mai 1958

Macédoine 1 (échange de lettres)

13 et 14 décembre 1995

14 décembre 1995

Madagascar

08 mai 1967

1er mars 1968

Mali

12 juin 1979

1er juin 1983

Maroc

09 juillet 1965

1er janvier 1967

Mauritanie

22 juillet 1965

1er février 1967

Monaco

28 février 1952

1er avril 1954

Monténégro 2

26 mars 2003

26 mars 2003

Niger

28 mars 1973

1er novembre 1974

Philippines

07 février 1990

1er novembre 1994

Québec Entente

12 février 1979

1er novembre 1981

Québec Protocole (étudiants et coopération)

19 décembre 1998

1er juillet 2002

Saint-Marin

12 juillet 1949

1er janvier 1951

Sénégal

29 mars 1974

1er septembre 1976

Serbie 1

26 mars 2003

26 mars 2003

Togo

07 décembre 1971

1er juillet 1973

Tunisie

17 décembre 1965

1er septembre 1966

Turquie

20 janvier 1972

1er août 1973

     

1 Ces États issus d'une partition ont déclaré reprendre pour leur compte, au moyen d'un échange de lettres, les accords conclus avec la République Socialiste Fédérative de Yougoslavie.

2 Cette république n'a pas déclaré au moyen d'un échange de lettres se considérer liée par les anciens accords. Toutefois, une telle procédure n'est pas nécessaire pour maintenir les liens contractuels existants.

Cela étant, depuis quelques années, la France diversifie aussi les zones géographiques avec lesquelles elle conclut des accords de sécurité sociale. Notre commission des affaires étrangères vient ainsi d’approuver l’autorisation de ratifier la convention signée avec l’Inde. Dans le même esprit, en ce qui concerne l’Amérique latine, un premier accord bilatéral a été conclu avec le Chili en 2001 et, selon les informations recueillies par votre Rapporteur, après qu’une convention ait été signée le 6 décembre dernier à Montevideo avec la République orientale de l’Uruguay, une négociation est en ce moment même en cours avec le Brésil. Dans le même esprit, la France cherche à entamer un processus avec la Chine. En d’autres termes, il y a là autant d’éléments qui confirment l’intérêt montré par la France pour ce type d’accords et traduisent une approche dynamique vers les grands pays émergents.

En regard, le réseau conventionnel bilatéral de la République argentine apparaît nettement moins développé. L'Argentine n’a en effet souscrit jusqu’à aujourd’hui qu’ à une douzaine d’accords bilatéraux en matière de sécurité sociale, dont au demeurant deux, conclus avec le Brésil et l’Uruguay, ont été remplacés par un accord multilatéral intervenu dans le cadre du MERCOSUR, entré en vigueur le 1er juin 2005. Elle a parfois conclu des conventions spécifiques, comme avec le Paraguay, par exemple, avec lequel elle est liée par accord spécifique pour le chantier du barrage binational de Yacyretá, ou encore avec la Bolivie.

Cela étant, et mis à part une convention avec le Chili, c’est uniquement avec des pays européens que l’Argentine a signé des accords en matière de sécurité sociale. On remarque qu’elle est actuellement liée avec l’Espagne, l’Italie, le Portugal ou la Grèce. Classiquement, il s’agit donc essentiellement d’accords signés avec des pays avec lesquels l'Argentine entretient des relations historiques, notamment en termes migratoires, fortes, soit avec lesquels elle souhaite développer ses échanges.

Avant de détailler le contenu concret des dispositions de cet accord, il importe de présenter quelques développements sur l’évolution des relations entre les deux pays, entre autres au plan économique, et de voir les perspectives qui sont ouvertes.

B – L’opportunité de la convention

L’amitié est ancienne entre la France et l'Argentine dont les relations n'ont cessé de se développer au long de l’histoire. L'influence et l'attrait de la culture française demeurent importants et la France continue de bénéficier d'un grand respect en Argentine comme dans la plupart des pays de la région, dans lesquels la francophilie, et souvent la francophonie, sont très actives. La France reste aujourd’hui en Argentine un pays qui a de nombreux atouts et un grand capital de sympathie. C’est sur cette toile de fond que les relations économiques se sont elles-mêmes développées.

Cela étant, l'Argentine est entrée dans le 21e siècle en traversant une crise économique et financière particulièrement grave qui n’a pas été sans conséquences sur nos échanges et sur la présence des entreprises françaises.

1) De la crise argentine du début du siècle à la récupération

La crise qu’a connue l'Argentine en 2001 a été interne. Elle a surgi suite à la dollarisation de l’économie engagée dès le début des années 1990 sous la première présidence de Carlos Menem. A l’euphorie provoquée par les premiers succès de la politique ultra-libérale, succéda une crise sociale et économique majeure, qui se traduisit par un très fort endettement, une crise de liquidités, le pays allant jusqu’à se déclarer en état de cessation de paiement en décembre 2001, incapable de rembourser ses créanciers. La forte désindustrialisation et la perte de compétitivité ont été d’autant plus vivement ressenties que l'Argentine espérait alors encore faire jeu égal avec le Brésil dont le PIB est aujourd’hui plus de trois fois supérieur.

Cela étant, l'Argentine s’est depuis remarquablement redressée au point qu’il n’y pas eu d’autre crise depuis 2003-2004 et que ces dernières années ont au contraire été marquées par une croissance économique forte et continue, de 8 % par an en moyenne entre 2003 et 2010. Cette croissance a été notamment soutenue par des exportations, en premier lieu agricoles, portées par les prix élevés des matières premières alimentaires, ainsi que par la demande intérieure, alimentée par un fort accroissement des dépenses publiques, de 35 % annuels. Les grands équilibres macro-économiques ont été restaurés, et la crise de 2008 a moins touché l'Argentine que d'autres. La croissance a à peine ralenti en 2009, et elle est très vite repartie à la hausse, comme dans l’ensemble du sous-continent. Lors d’un colloque récent (3), l’ambassadeur d'Argentine en France soulignait qu’au cours des sept dernières années, « l'industrie a crû de 72 % et le bâtiment de 125 %. Ces deux secteurs sont encore en croissance en 2010. La consommation, après avoir progressé de 121 % en sept ans, connaît encore une croissance supérieure à 11 % sur le premier trimestre 2010. D'ailleurs, tous les secteurs sont restés en croissance durant la crise de 2009-2010. » Le taux de croissance attendu pour 2011 est de 5 %. En d’autres termes, nombre d’indicateurs sont au vert et la croissance de l'Argentine se fait à des taux comparables à ceux de la Chine, et elle a permis une croissance de l’emploi de 30 %, sur fond de résultats financiers sans précédents et d’un excédent commercial des plus enviables.

La part de l’industrie dans le PIB argentin était de 19% en 2008, année où elle a dépassé d’un tiers le plafond de 1998, avant que l’économie argentine ne commence à entrer dans sa période de profonde récession. Le secteur tertiaire représente les deux tiers de l'économie argentine, les infrastructures et les transports ont été considérablement développés, et l'Argentine bénéficie d’un réseau ferroviaire parmi les plus étendus du monde. L'Argentine est aussi une destination touristique de premier ordre : elle figure désormais parmi les principales destinations en Amérique et ce secteur, qui a notamment bénéficié de la crise de 2001 et de la très forte dévaluation de la monnaie, est aujourd’hui considéré comme l'une des principales industries, avec l’agriculture, la sidérurgie ou l’énergie. Avec des entrées de devises de près de 3 milliards de dollars par an, il dépasse même nettement à l’exportation le secteur bovin.

Traditionnel grenier de l'Amérique du sud, depuis toujours exportatrice de viande et de céréales, l'Argentine est cependant plus que jamais une puissance agricole de premier plan, et ce secteur constitue un pilier important sur lequel s'appuie son économie. Elle y dispose d'un avantage compétitif indéniable, grâce à des terres fertiles, abondantes et des exploitations modernes. Huitième pays du monde par l'étendue de son territoire couvrant près de 2,8 millions de km2, l'Argentine bénéficie des vastes plaines de la Pampa de la région centrale, propres à l’agriculture et à l’élevage intensifs sur quelque 650 000 km2. L'Argentine produit ainsi aujourd’hui à elle seule 70 % des protéines mondiales, et elle s’est récemment spécialisée dans certains domaines particuliers, telle la production de soja, dont elle est devenue le troisième producteur mondial.

Les filières agricole et agroalimentaire argentines participent à hauteur de 10% du PIB national, et l’agriculture joue un rôle moteur dans les exportations argentines, avec plus de 50 % de leur volume global. Le soja, dont l'Argentine exporte la quasi-totalité de sa production, pour l’essentiel vers l’Europe, représente à lui seul près de la moitié du volume global de ses ventes et sa première source de devises. L'agriculture argentine, une des plus modernes du monde, a aussi bénéficié en 2010 de volumes de récoltes exceptionnels, et la hausse actuelle des prix internationaux des denrées agricoles permet évidemment l'amélioration structurelle des termes de l'échange.

D’une manière générale, la structure du commerce extérieur argentin se caractérise par des exportations de produits agricoles transformés, de biens industriels, de matières premières, d’énergie et de combustibles, pour l’essentiel. Il n’est pas inutile ici de rappeler que l’Argentine est le 4e producteur de pétrole en Amérique latine après le Venezuela, le Mexique et le Brésil, et qu’elle bénéficie des réserves les plus importantes du Cône Sud. Le pays figure parallèlement au 4e rang des réserves identifiées de gaz naturel en Amérique du Sud, après le Venezuela, le Brésil et la Bolivie. Ce sont en revanche des biens de consommation, des biens intermédiaires et d’équipement, pièces et accessoires, que l'Argentine importe principalement.

Il faut souligner que les autorités argentines apportent une grande attention à la normalisation de la situation financière et au désendettement. La restructuration de la dette se poursuit et aujourd'hui, l'Argentine affiche l'un des taux d'endettement les plus faibles parmi les pays du G20, accompagné d'un excédent budgétaire à peine troublé par un déficit modeste de 2009. Enfin, la balance commerciale et des comptes externes est désormais positive. Les exportations ont été le moteur de la croissance argentine pendant les dernières années. Il faut aussi souligner que l'économie argentine s'appuie en premier lieu sur une relation très étroite avec le Brésil, dont le marché de 200 millions d'habitants absorbe 40 % de ses exportations.

2) Les relations économiques entre les deux Parties

Les échanges commerciaux entre la France et l'Argentine se sont inévitablement réduits pendant la crise de 2001-2002, avant de se ressaisir dès 2003 avec la reprise de l’économie argentine. Ils ont d’ailleurs été marqués par un fort dynamisme, puisque, selon les informations fournies par la DGTPE (4), en 2008, par exemple, les échanges bilatéraux avaient progressé de 40 % par rapport à l’année précédente. Les exportations françaises ont augmenté de 37 %, alors que dans le même temps les importations depuis l’Argentine se sont accrues de 46 %. Après un nouveau et fort ralentissement en 2009, dû à la crise, le volume des échanges a ensuite de nouveau repris en 2010, pour atteindre 1,6 milliard d’euros, marquant une progression de 33 % par rapport à 2009. La progression de nos exportations est notamment signalée par le site de l’ambassade de France qui relève une augmentation de + 50,7 % en 2010, à plus d’1 milliard d’euros. Les biens d’équipement en constituent 60 %, et les produits liés à l’automobile plus du tiers.

Selon les données fournies, l’excédent traditionnel de notre pays se maintient et même progresse : il s’établissait à 473 millions d’euros en 2010 contre 174 en 2009 et 73 en 2008 (5). Nos positions semblent néanmoins s’éroder par rapport aux performances des autres partenaires de l’Argentine. Si elle était en effet au 7e rang des fournisseurs de l’Argentine en 2008, comme l’indique le tableau ci-contre extrait de la note de la DGTPE précitée, la France ne figurait, en 2010, qu’au 8e rang, si l’on en croit les indications de notre ambassade à Buenos Aires. En d’autres termes, la part de marché de la France dans les importations argentines n’évolue pas favorablement, par comparaison avec celles de ses autres grands partenaires, - le Brésil, les Etats-Unis, l’Allemagne ou, last but not least, la Chine, désormais. En termes d’import-export, la part de l’Allemagne est ainsi deux fois supérieure.

Au total, l'Argentine représente notre troisième débouché régional pour nos exportations sur le continent latino-américain, derrière le Brésil et le Mexique, et notre 4e partenaire commercial dans la région.

Pour leur part, les importations de produits argentins en France sont également en hausse, mais bien plus modeste (+9,6 %). Sans surprise, l’essentiel des ventes argentines à la France porte sur des produits alimentaires et agro-alimentaires, qui concentrent plus de 80 % du total, soit 432 M€ en 2010).

Structure des échanges franco-argentins
en 2008 
(6)

Les ventes françaises à l'Argentine sont plus diversifiées : la part de l'automobile y est considérable, représentant environ un tiers des exportations françaises en Argentine, suivie d'autres biens d'équipement, des produits intermédiaires et, plus modestement, de produits de consommation.

La France présente traditionnellement de bonnes positions en termes d’investissements en Argentine. Il n’est pas inutile de rappeler à cet égard qu’au début du siècle, l'Argentine était le pays dans lequel la France avait le plus grand stock d'investissements directs, hors pays membres de l’OCDE, et y a par conséquent longtemps figuré parmi les premiers investisseurs en Argentine. La crise que ce pays a connue à cette époque a bien sûr considérablement modifié la donne et la période suivante a été marquée par une décrue assez forte du stock d'investissements des entreprises françaises.

La reprise a été progressive, à partir de 2006, et relativement lente, à des niveaux qui, d’une part, restent très inférieurs à ceux qui avaient été atteints durant la décennie 1990, tandis que l’on note, par ailleurs peu de nouvelles implantations ces dernières années. Certains des principaux acteurs français du secteur bancaire, notamment, ont quitté le marché argentin, le Crédit Agricole en premier lieu, puis la Société Générale, en 2005, ainsi que la BNP Paribas, qui a mis fin à ses activités de dépôt au début de 2010. Dans le secteur de la grande distribution, en revanche, Carrefour et Casino sont restés des acteurs clés parmi les distributeurs.

Il reste néanmoins un stock d'investissements français important. Selon les données précitées de la DGTPE, le montant des IDE français en Argentine a été estimé à 2,6 Mds de dollars pour l’année 2007 (7), ce qui plaçait alors notre pays à hauteur de 3,6 % des investissements étrangers en Argentine, et au septième rang derrière l’Espagne, les États-Unis, les Pays-Bas, le Chili, le Brésil et le Luxembourg.

Aujourd’hui, quelque 200 à 250 entreprises françaises sont implantées en Argentine, dans des secteurs aussi divers que l'industrie chimique, la pétrochimie, le commerce de produits agricoles, l'électricité, l'automobile, la défense, les transports aériens ou l'hôtellerie. En matière d’agro-alimentaire, on note une présence française dans la production de vin mousseux, de liqueurs et de vins, renforcée ensuite avec Danone, Bongrain ou Louis-Dreyfus, notamment, dans la biscuiterie et la boulangerie, les produits laitiers et l’alimentation animale. Dans le secteur manufacturier, PSA Peugeot-Citroën et Renault et leurs principaux équipementiers dominent et contrôlent une part importante, 30 %, du marché argentin de l’automobile. Dans les services, en revanche, suite aux départs enregistrés, les banques et les compagnies d’assurance françaises ont désormais une présence modeste en Argentine. Les entreprises dans le secteur de la grande distribution, Carrefour, occupent 40 % du marché, tandis que d’autres, tel Total, pour le gaz ou Schneider, pour les équipements électriques, sont également présents.

Pour autant, les nouvelles entreprises qui se sont installées dernièrement en Argentine n’ont pas eu à le regretter et aucune n'envisage aujourd’hui de quitter le pays, même si, d’une manière générale, les investisseurs sont parfois confrontés à certaines difficultés, quant au mode de gouvernance, aux cadres réglementaires parfois volatiles, à la qualité de ses politiques économiques ou à son taux d’inflation, qui dépasse aujourd’hui les 20 % annuels. A cet égard, le fait que l'Argentine observe actuellement des mouvements de capitaux négatifs, puisque quelque 52 milliards de dollars ont quitté le pays ces trois dernières années, traduit à l’évidence que les investisseurs ne sont pas sans incertitudes sur le long terme et que la confiance mériterait d’être rassurée. Néanmoins, l'Argentine reste stratégique comme plate-forme d’abordage des marchés locaux, régionaux, via le MERCOSUR, indépendamment de l’intérêt que représente la qualité de ses ressources humaines.

Il faut souligner enfin que la France est le premier partenaire de l'Argentine sur le plan scientifique, devant les Etats-Unis. Ce domaine traditionnel de coopération est même en plein développement, qui a vu la création de laboratoires et d’instituts communs, par exemple autour du CNRS, notamment sur des thématiques climatiques et environnementales, ou encore de mécanique des fluides et de nanosciences. L'Argentine joue aussi un rôle pionner en Amérique latine dans la recherche nucléaire : elle est le seul pays qui conçoit et produit des réacteurs de recherche. Plus d'un millier de jeunes Français font chaque année une partie de leurs études en Argentine, reconnaissance de la qualité de son enseignement universitaire.

C – Ce qui est attendu de la convention franco-argentine

Comme votre Rapporteur l’a indiqué plus haut, cet accord signé avec l'Argentine s’inscrit dans le cadre de ceux que notre pays cherche désormais à développer avec les pays émergents. Il est aussi le premier que la France signe avec l'Argentine en la matière.

En d’autres termes, à l’heure actuelle, il n’y a pas de coordination entre les régimes de sécurité sociale des deux Etats qui permette la prise en compte des périodes cotisées par le travailleur d’un Etat dans l’autre et, partant, l’amélioration du calcul des pensions ; comme le rappelle l’étude d’impact, les employés doivent être affiliés au régime de sécurité sociale de l’Etat où ils exercent leur activité. L’intérêt de cette convention est donc de faciliter la mobilité professionnelle entre la France et l’Argentine, puisque les ressortissants de l’un et l’autre pays pourront désormais bénéficier de la coordination en matière de pensions avec la prise en compte, au moment de la liquidation de leur retraite, des périodes d’activité cotisées au cours de leur expatriation.

La conclusion de cette convention intéresse une population française relativement importante, puisque plus de 15 000 Français étaient immatriculés en Argentine au 31 décembre 2008, aux deux tiers binationaux. Les données concernant les ressortissants argentins en France sont en revanche plus floues : l’ambassade d’Argentine en France ne dispose pas de registre comparable à ceux de nos consulats et peut seulement estimer grossièrement le nombre d’Argentins ; selon les indications fournies à votre Rapporteur, ils seraient entre 8 000 et 12 000.

Ainsi que le relève aussi l’étude d’impact, compte tenu du potentiel de développement de ce pays, cet accord, grâce aux règles de détachement et de coordination, permettra d’améliorer la circulation des travailleurs entre les deux Etats, et peut donc avoir une certaine incidence sur la densification des échanges économiques avec l’Argentine, dans la mesure où la mobilité d’un personnel qualifié pourra être facilitée grâce à son maintien au régime de sécurité sociale français, avec la mise en place du détachement qui permettra aux salariés détachés en Argentine de rester affiliés aux régimes de sécurité sociale français. Inversement, les travailleurs argentins, salariés ou non-salariés, pourront ne pas être affiliés au régime français pour l’ensemble des risques. A cet égard, il faut souligner que, compte tenu de la structure des investissements étrangers dans les deux pays, les travailleurs expatriés concernés sont bien plus français qu’argentins. En effet, les stocks d’IDE français en Argentine sont relativement importants, comme on l’a vu, ce qui suppose un certain nombre d’expatriations, même si les recrutements locaux sont de plus en plus fréquents compte tenu de la qualité des ressources humaines argentines ; en revanche, les investissements argentins en France sont au minimum.

Selon les informations que votre Rapporteur a pu recueillir, très peu d’entreprises argentines sont en effet concernées et la présence argentine en France est des plus limitées : en 2009, avec un stock d’IDE de 33 millions d’euros, l’Argentine apparaissait au 73e rang des investisseurs étrangers en France, après que cette année a d’ailleurs vu un désinvestissement argentin vis-à-vis de la France de l’ordre de 67 millions d’euros. La rubrique économique du site de l’ambassade d’Argentine en France n’en fait pas mention, et l’Agence française pour les investissements internationaux rappelle simplement la présence à Dunkerque et Lille de Dagrex, filiale du groupe argentin Inforcampo, entreprise argentine d’export et de distribution de produits agroalimentaires, qui a choisi la France en 2006 comme base de son implantation européenne. Ce projet a permis la création de 12 emplois.

En d’autres termes, la logique de cette convention s’inscrit dans la politique que notre pays mène en la matière depuis quelques années : si beaucoup d’accords initiaux de sécurité sociale, comme votre Rapporteur le soulignait plus haut, ont été signés avec les anciennes colonies pour prendre en considération à la fois les flux de mobilité des personnes entre les deux pays et l'importance des communautés françaises sur place, et permettre la prise en compte des périodes de cotisation des personnes ayant travaillé dans les deux pays, ceux de ces dernières années sont d’avantage tournés vers les grands pays émergents, - Inde, Brésil, prochainement Chine - et spécifiquement vers l’Amérique latine, - Chili, Uruguay, et donc Argentine, pour contribuer à leur mesure à la densification des relations économiques entre la France et ces pays.

Cela étant, même s’il ne peut être chiffré, selon ce qu’indique l’étude d’impact, compte tenu de l’absence de statistiques, la coordination qui sera instituée entre les régimes de sécurité sociale représentera un gain, en termes d’amélioration du montant des retraites, pour les ressortissants français qui ont cotisé successivement aux régimes argentin et français lorsqu’ils demandent la liquidation de leurs droits à pension. En effet, les ressortissants français, grâce à la levée de la clause de résidence, pourront obtenir le versement d’une pension de retraite argentine. En conséquence, les bénéfices de la convention doivent être considérés comme importants, pour modeste que soit la population concernée.

II – LES DISPOSITIONS DE LA CONVENTION BILATÉRALE

Dans ses grandes lignes, l’accord conclu entre la France et l'Argentine ne diffère pas de nombreux autres et, notamment, de celui qui a été signé il y a quelques années avec le Chili, tant dans sa structure que dans ses principes et dispositions.

A – Les dispositions générales et le champ d’application de l’accord

Les définitions d’usage étant posées à l’article 1er, les différents articles du titre I de la convention en définissent les champs d’application matériel et personnel. Au plan matériel, sont en premier lieu énumérées les différentes législations françaises et argentines auxquelles s’applique le texte.

Pour ce qui est de la France, aux termes de l’article 2, sont tout d’abord intéressées les législations des assurances sociales applicables tant aux salariés qu’aux non-salariés des professions agricoles et non agricoles. N’en sont exclues que les législations concernant les régimes complémentaires d’assurance vieillesse des non-salariés des professions non agricoles et, s’agissant des non salariés des professions agricoles, celles ouvrant aux personnes travaillant ou résidant hors du territoire français la faculté d’adhérer aux assurances volontaires. Les régimes spéciaux de sécurité sociale, sauf mention expresse, de même que les législations relatives aux régimes de prestations familiales, d’accidents du travail et de maladies professionnelles, font également partie du champ d’application de l’accord.

En ce qui concerne les législations argentines, distinction n’est pas faite entre régimes salariés ou non-salariés. L’article 2 de l’accord énumère les législations et risques concernés, à savoir, les régimes de retraites et pensions, fondés sur la répartition ou la capitalisation individuelle, le régime d’allocations familiales, allocation maternité et allocations familiales ouvertes aux retraités et aux pensionnés, ainsi que les régimes de risques du travail et des soins de santé. Sont visées par cet accord, selon l’article 3, quelle que soit leur nationalité, les personnes qui sont soumises à ces législations ou qui ont acquis des droits en vertu de celles-ci, ainsi que leurs ayants droit et survivants, étant aussi entendu que l’article 4 institue l’égalité de traitement pour l’application de la législation de l'Etat dans lequel les bénéficiaires résident.

Les dispositions de l’article 5 posent comme règle générale de cet accord celle de l’affiliation obligatoire des travailleurs, salariés ou non, et leurs ayants droits, à la législation de l’État sur le territoire duquel ils exercent leur activité professionnelle, sous réserve d’exceptions limitativement énumérées au chapitre 2 de l’accord.

Afin d’éviter des périodes d’interruptions dans la constitution des droits à pension et la multiplication des affiliations à des régimes différents, la première, et principale, dérogation au principe de base concerne les positions de détachement des travailleurs, dans la mesure où un travailleur salarié détaché par son employeur reste soumis à la législation de sécurité sociale de l'Etat dont il dépend, à la double condition que son détachement soit pour une durée maximale de deux ans, congés inclus, et qu’il ne soit pas envoyé en remplacement d’un précédent employé arrivé au terme de son détachement. Il en est de même des travailleurs indépendants qui viendraient à exercer temporairement sur le territoire de l’autre Partie contractante, « à condition que la durée prévisible de l’activité temporaire ne dépasse pas douze mois », comme le précise l’article 6.

Cela étant, aux termes de l’article 11, cette dérogation, ainsi que celles que prévoit l’article 10, n’est possible « qu’à la condition que l’employeur ou le travailleur indépendant ait souscrit une couverture qui garantit au travailleur détaché ainsi qu’aux membres de sa famille qui l’accompagnent, la prise en charge de l’ensemble des frais médicaux, y compris les frais d’hospitalisation, pendant toute la durée de son séjour sur le territoire de l’Etat de détachement. »

L’article 6 précise aussi que lorsque la durée du travail à effectuer excède ce qui était prévu en raison de « circonstances imprévisibles dûment justifiées par l’employeur », la législation de la première Partie reste applicable jusqu’à l’achèvement du travail entamé, et en tout état de cause, pour une durée également maximale de vingt-quatre mois, sous réserve que les autorités compétentes de chacune des Parties aient donné leur accord. La même règle s’applique s’agissant des travailleurs indépendants, mais pour une durée maximale de douze mois, conformément à la période initiale envisagée pour cette catégorie. Comme le précise l’exposé des motifs, en l’espèce, ont été reprises les dispositions des nouveaux règlements communautaires en matière de détachement.

Par ailleurs, des dispositions traditionnelles qui n’appellent pas de commentaires particuliers de la part de votre Rapporteur, concernant les personnels navigants et gens de mer, sont incluses dans la convention. Elles figurent aux articles 7 et 8 et confirment que ces employés restent en tout état de cause affiliés aux régimes de sécurité sociale de la partie contractante sur laquelle leur entreprise a son siège social, sauf s’agissant des employés de succursales. Les fonctionnaires et agents publics de l’État, y compris les agents diplomatiques ou consulaires et le personnel administratif et technique des missions diplomatiques ou consulaires, demeurent soumis à la législation de l’État qui les emploient à l’exception du personnel local qui dispose d’un droit d’option. Les dispositions des conventions de Vienne ne sont donc pas affectées par cet accord. L’article 10 ouvre enfin la possibilité aux États de s’entendre d’un commun accord sur d’autres dérogations aux règles d’affiliation ou de réviser ultérieurement celles établies dans le texte initial.

B – Les prestations concernées

Composé de cinq chapitres, le titre III de l’accord présente les dispositions relatives aux différentes prestations sociales concernées.

Au rang des dispositions générales, l'article 12 pose le principe de la conservation des droits acquis et du paiement des prestations à l’étranger. Consécutivement, « les pensions ou rentes qui sont servies en application de la présente Convention ne peuvent subir ni réduction, ni modification, ni suspension, ni suppression du fait que le bénéficiaire séjourne ou réside sur le territoire de l’autre Partie ou d’un Etat tiers. ». En d’autres termes, à l’exception des prestations de solidarité nationale à caractère non contributif, qui seront précisées par l’arrangement administratif à venir, le principe de l’exportation des pensions est posé. De son côté, l’article 13 précise que les clauses de réduction, de suspension ou de suppression prévues par la législation de l’un des deux États en cas de cumul de prestations sont opposables aux bénéficiaires pour des prestations ou revenus obtenus dans l’autre État sauf en cas de liquidation de prestations de vieillesse, d’invalidité ou de survivants de même nature en coordination.

Les autres articles du titre III posent les règles régissant les différents risques et de l’ouverture des droits à prestations. Ainsi, s’agissant des prestations en espèce de l’assurance maladie et maternité, il est tenu compte, pour l’ouverture et la détermination des droits, si nécessaire, des périodes d’assurance accomplies sous la législation de l’autre Partie contractante, sous réserve que l’intéressé relève d’un régime de sécurité sociale au titre d’une activité professionnelle, de manière à totaliser ainsi les différentes périodes d’assurance.

En ce qui concerne les prestations de vieillesse, d’invalidité et celles servies aux survivants, l’article 15 prévoit tout d’abord la prise en compte, si nécessaire, d’une situation constatée sous la législation d’un État pour l’acquisition, le maintien ou le recouvrement du droit à pension dans l’autre État. En d’autres termes, les conditions d’ouverture des droits sont réputées remplies s’il y a cotisation ou perception d’une pension dans l’autre Etat, ces dispositions n’étant cependant pas applicables aux régimes spéciaux français des fonctionnaires civils et militaires de l’État, des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers ainsi que des ouvriers des établissements industriels de l’État.

En matière de prestations de vieillesse et de survivants, dès lors que le droit est ouvert au regard des législations des deux Parties, et sauf demande expresse inverse du demandeur de surseoir à la liquidation de l’une ou de l’autre pension, il est procédé à la liquidation, les périodes d’assurance se totalisant, à condition qu’elles ne se superposent pas. L’article 21 fixe d’autre part les modalités particulières de prise en compte des périodes d’assurance inférieures à un an pour l’ouverture et le calcul des droits à pension. Les modalités de calcul des prestations sont déterminées à l’article 22 et n’appellent pas de commentaire particulier, dans la mesure où elles reprennent les règles classiques de totalisation et de proratisation entre les deux régimes concernés, selon les durées de cotisations respectives, éventuellement plafonnées à la durée maximale requise.

Par analogie, les règles sont identiques en matière de pension d’invalidité. L’article 17 prévoit l’application aux prestations d’invalidité, par analogie, des dispositions consacrées aux prestations vieillesse en ce qui concerne les effets de présentation d’une demande, la totalisation des périodes d’assurance ou encore le calcul des prestations. L’article 18 fixe les modalités de détermination de l’invalidité lorsque le demandeur réside sur le territoire de l’autre État et en particulier la mise à disposition des documents médicaux ou la réalisation d’examens médicaux.

L’article 23 indique la prise en compte pour la détermination du taux de liquidation des pensions des régimes spéciaux de retraite français des fonctionnaires civils et militaires de l’État, des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers et des ouvriers des établissements industriels de l’État, des périodes d’assurance accomplies sous législation argentine. L’article 24 précise les principes de totalisation de périodes propres au régime argentin de capitalisation individuelle. Il n’est pas inutile de préciser que, selon les informations que votre Rapporteur a recueillies, une évolution sensible est intervenue dans la législation argentine depuis la négociation de cette convention, et que le régime par répartition est redevenu le régime de base obligatoire. Les périodes accomplies au titre de la capitalisation pour les personnes qui auront effectivement versé des contributions à ce titre seront validées en interne et, concrètement, la partie française n'aura donc affaire qu'à un seul régime de répartition.

En matière d’accidents du travail et de maladies professionnelles, l’article 25 reprend des dispositions classiques quant à l’ouverture du droit aux prestations, aux termes desquelles celle-ci se fait conformément à la législation à laquelle était soumis le cotisant au moment du fait générateur ou à la législation de la Partie sur le territoire de laquelle l’emploi en cause, s’agissant d’une maladie, a été exercé en dernier lieu. Enfin, les prestations familiales sont versées pour les enfants qui résident avec les personnes soumises à la législation.

C – La coopération administrative

Traditionnellement, la coopération et l’entraide administratives figurent parmi les aspects importants des conventions bilatérales de sécurité sociale, la lutte contre la fraude aux cotisations et aux prestations sociales constituant une priorité nationale, ainsi que le rappelle l’étude d’impact. Cet accord n’y déroge pas et pose le principe de la collaboration des institutions administratives compétentes.

En ce sens, deux aspects sont abordés : en premier lieu, celui de la communication des données à caractère personnel entre institutions, étant entendu que, selon la CNIL, l'Argentine dispose d’un niveau de protection des données adéquat et équivalent à celui de notre pays. Ce point est l’objet de l’article 28 de l’accord franco-argentin. En second lieu, est posé le principe de reconnaissance des décisions exécutoires qui, rendues par un des Etats contractants, permettra, si nécessaire, leur exécution sur le territoire de l’autre Partie. Il s’agit, en particulier, aux termes de l'article 29, des modalités de recouvrement des prestations indues ou des cotisations qui n’auraient pas été versées. En outre, l'article 30 prévoit que l’arrangement administratif prévu, non encore disponible, définira les modalités de lutte contre la fraude, en particulier en ce qu’elle touche à la résidence, aux revenus, aux cotisations et aux prestations. La collaboration administrative ne concerne pas uniquement la répression des fraudes éventuelles mais porte aussi sur des aspects statistiques (article 31).

A ce chapitre sur la coordination entre systèmes s’ajoutent des dispositions relatives à la présentation de documents, à l’exemption de droits d’actes et de documents administratifs, aux modalités de paiement des prestations ou encore aux attributions des autorités compétentes : en ce sens, des formalités régulièrement exécutées auprès d’une institution compétente de l’une des Parties sont considérées par l’autre comme ayant été également accomplies devant elle. De même sont supprimées les obligations de légalisation de documents et actes établis par les institutions compétentes. Ces questions font l’objet des articles 34 à 37 de l’accord bilatéral, une commission mixte étant par ailleurs établie à l'article 38 pour régler les difficultés relatives à son application.

CONCLUSION

Bien que le nombre de bénéficiaires de cet accord soit relativement modeste, les dispositions qu’il comporte répondent au souci de faciliter l’accompagnement de la mobilité internationale des travailleurs français et argentins. La coordination instituée en matière de pensions, avec la prise en compte des périodes d’activité cotisées dans l’une et l’autre Partie permettra notamment d’éviter les périodes d’interruption dans la constitution des droits à pension et la multiplication des affiliations à des régimes différents. Si l’impact de cet accord sur la densification des échanges économiques avec l'Argentine sera vraisemblablement modeste, il sera en revanche conséquent en ce qui concerne la situation personnelle des intéressés.

Votre Rapporteur est donc bien sûr favorable à cet accord et vous recommande d’en autoriser l’approbation.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission examine le présent projet de loi au cours de sa réunion du mercredi 16 mars 2011.

Après l’exposé du rapporteur, un débat a lieu.

Mme Martine Aurillac. Existe-t-il, hormis le cas brésilien que vous avez cité, des accords de ce type passés par la France avec d’autres pays d’Amérique latine ?

M. Jean-Paul Bacquet, rapporteur. Le Chili a ratifié un accord similaire, c’est le seul autre pays dans la région.

Mme Geneviève Colot. Quelle est la position de la caisse des français de l’étranger sur ces accords ? Il me semble que ces derniers entrent en compétition avec son activité.

M. Jean-Paul Bacquet, rapporteur. L’accord avec l’Argentine prévoit que les Français soient affiliés au régime argentin, il n’y a donc aucune modification à la situation existante. La caisse des français de l’étranger est une caisse complémentaire, à laquelle tous les Français de l’étranger peuvent donc continuer à s’affilier.

M. Dino Cinieri. L’Argentine est un pays qui bouge, notamment dans les domaines touristiques et culturels. J’en veux pour preuve le projet, commun à nos deux pays, de faire inscrire l’œuvre architecturale du Corbusier au patrimoine mondial de l’humanité.

M. Jean-Paul Bacquet, rapporteur. Cet élément renforce mon analyse selon laquelle le principal apport de cet accord est le renforcement de nos liens avec l’Argentine, sur le plan économique mais aussi culturel et touristique.

M. Jean-Paul Dupré. Quel est le solde de la balance commerciale entre nos deux pays ?

M. Jean-Paul Bacquet, rapporteur. Structurellement, il nous est favorable, dans la mesure où nous exportons des biens d’équipement et des voitures vers l’Argentine alors que cette dernière n’exporte que des produits agricoles. Ainsi, les chiffres font apparaître un excédent depuis 2008, en croissance : 63 millions d’euros, 193 millions en 2009 et 473 millions en 2010.

Suivant les conclusions du rapporteur, la commission adopte sans modification le projet de loi (n 2938).

*

La commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, le présent projet de loi dans le texte figurant en annexe du présent rapport.

ANNEXE

TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Article unique

(Non modifié)

Est autorisée l’approbation de la convention de sécurité sociale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République argentine, signée à Buenos Aires le 22 septembre 2008, et dont le texte est annexé à la présente loi.

NB : Le texte de la convention figure en annexe au projet de loi (n° 2938).

© Assemblée nationale

1 () 37, une fois achevées les procédures de ratification en cours, relatives aux conventions avec l’Inde et l'Argentine.

2 () Source : « Liste des accords internationaux de sécurité sociale auxquels la France est partie », Centre des liaisons européennes et internationales de sécurité sociale, CLEISS, pages 20-21, avril 2010.

3 () Intervention de son Exc. Luis Ureta Saenz Peña, ambassadeur de la République d'Argentine en France, lors du colloque économique international organisé au Sénat « Comment faire des affaires en Argentine et dans les pays du Cône sud ? », 10 juin 2010.

4 () DGTPE, Service économique de Buenos Aires, Fiche pays : Argentine ; octobre 2009, 4 pages.

5 () http://www.embafrancia-argentina.org/

6 () Source : DGTPE, Service économique de Buenos Aires, Fiche pays : Argentine ; page 3.

7 () La note d’impact jointe au projet de loi évalue pour sa part le stock français d’IDE en Argentine à 1,572 milliard d’euros en 2008.