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N° 3306

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 avril 2011.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION DE LOI visant à interdire l’utilisation des phtalates, des parabènes et des alkylphénols,

PAR M. Yvan LACHAUD,

Député.

——

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 2738.

I.- DES PRODUITS OMNIPRÉSENTS 7

A. LES PHTALATES 7

B. LES PARABÈNES 9

C. LES ALKYLPHÉNOLS 10

II.- QUELS RISQUES POUR LA SANTÉ ? 11

A. DES SUBSTANCES TOXIQUES POUR LA REPRODUCTION 11

1. Des effets démontrés sur la faune 11

a) les phtalates 11

b) les parabènes 13

c) les alkylphénols 15

2. Quel rôle des perturbateurs endocriniens chez l’homme ? 16

B. UNE RÉGLEMENTATION PARCELLAIRE 18

1. Des interdictions ou des encadrements ponctuels 18

a) les jouets 18

b) les contenants alimentaires 19

c) les produits cosmétiques 20

d) les dispositifs médicaux 20

e) les matériaux de construction et de décoration 21

2. La réglementation REACH 22

III.- AGIR AU NOM DU PRINCIPE DE PRÉCAUTION 25

A. DES CONNAISSANCES INSUFFISANTES 25

1. L’exemple des phtalates 25

2. Les perturbateurs endocriniens en général 25

B. UNE PRISE DE CONSCIENCE NÉCESSAIRE 27

TRAVAUX DE LA COMMISSION 29

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE 29

II.- EXAMEN DE L’ARTICLE UNIQUE 39

Article unique : Interdiction de l’utilisation des phtalates, des parabènes et des alkylphénols 39

TABLEAU COMPARATIF 41

ANNEXES 45

ANNEXE 1 : LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 45

ANNEXE 2 : USAGES DES PHTALATES, PARABÈNES ET ALKYLPHENOLS  47

ANNEXE 3 : ÉLÉMENTS D’INFORMATION SUR LE DROIT EUROPEEN APPLICABLE OU EN COURS D’ELABORATION 55

« Lorsque des incertitudes subsistent quant à l'existence ou à la portée de risques pour la santé des personnes, les institutions peuvent prendre des mesures de protection sans avoir à attendre que la réalité et la gravité de ces risques soient pleinement démontrées. » (1)

Mesdames, Messieurs,

Quel est le point commun entre un plastifiant, un conservateur et un émulsifiant ? Ces trois substances chimiques, qui entrent dans la composition d’une foultitude de produits de consommation courante (objets en plastique, produits cosmétiques, détergents, matériaux de construction, etc.), ont des effets reprotoxiques et appartiennent à la catégorie des perturbateurs endocriniens.

Or de nombreuses études tendent désormais à démontrer la responsabilité de ces perturbateurs endocriniens dans la baisse de la fertilité masculine et de la multiplication des cancers des testicules observées chez l’homme depuis une quarantaine d’années. Les substances chimiques telles que les phtalates, les parabènes et les alkylphénols sont en effet capables de perturber le fonctionnement du système hormonal, en particulier celui de la reproduction, et d’affecter aussi bien l’adulte que l’enfant, mais également l’embryon ou le fœtus lors de son développement prénatal. Ils pourraient ainsi être la cause de certaines malformations congénitales chez le petit garçon.

La dangerosité des produits chimiques est certes prise en compte, tant au niveau national qu’au niveau de l’Union européenne, dans le cadre de la délivrance des autorisations de mise sur le marché de ces produits et du contrôle du respect de l’obligation générale de sécurité qui incombe aux fabricants de biens de consommation (article L. 221-1 du code de la consommation). On constate toutefois que la réglementation applicable demeure parcellaire (jouets, produits cosmétiques, contenants alimentaires) face aux risques encourus, qui ne se mesurent plus uniquement aujourd’hui en référence à des doses maximales autorisées, mais résultent plus globalement d’une « imprégnation » quotidienne dans notre cadre de vie.

Si la mise en œuvre du règlement REACH devrait permettre, à terme, de mieux encadrer voire d’interdire certains perturbateurs du système endocrinien considérés comme des substances extrêmement préoccupantes (2), ses effets concrets ne devraient pas se faire sentir avant plusieurs années.

Est-il raisonnable d’attendre ?

Alors que nous avons eu il y a un an de cela, une discussion riche et documentée sur une proposition de loi sénatoriale visant à interdire le bisphénol A dans les plastiques alimentaires, qui a abouti à l’adoption de la loi du 30 juin 2010 tendant à suspendre la commercialisation de biberons produits à base de ce produit chimique, la situation a très peu évolué. En application de l’article 2 de la loi, un rapport d’étape présentant les mesures déjà prises et celles envisagées pour diminuer l’exposition humaine aux perturbateurs endocriniens a bien été adressé par le Gouvernement au Parlement le 10 mars dernier, mais on est encore loin de disposer du bilan complet censé être réalisé par les différentes agences sanitaires (INSERM, InVS, AFSSAPS, ANSES) sur ce sujet. Le Parlement doit donc de nouveau reprendre la main.

Comme l’indique la définition jurisprudentielle du principe de précaution posée par la Cour de justice des communautés européennes rappelée en exergue de ce rapport, il est des sujets, comme la santé humaine ou l’environnement, où l’on ne peut se contenter d’attendre des preuves avérées du risque encouru pour agir. L’absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque dans le domaine de l’environnement, de la santé ou encore de l’alimentation.

Nous n’avons malheureusement que trop d’exemples – distilbène, PCB, chlordécone et aujourd’hui médiator – tendant à prouver que sur les sujets ayant trait à la santé de nos concitoyens, il est toujours imprudent et souvent même dangereux d’attendre avant d’agir et qu’il est toujours préférable d’être attentif aux signaux d’alerte de manière à prévenir et à anticiper les risques.

C’est la raison pour laquelle, la présente proposition de loi, que je vous demande de bien vouloir adopter, vise à interdire purement et simplement la fabrication, l’importation, la vente ou l’offre de produits contenant des phtalates, des parabènes et des alkylphénols.

I.- DES PRODUITS OMNIPRÉSENTS

A. LES PHTALATES

Les phtalates forment une famille de substance chimique utilisée depuis environ 50 ans, principalement pour rendre le chlorure de polyvinyle (PVC) souple et flexible. Ils sont les plastifiants le plus communément utilisés dans le monde. Mais leur utilisation dans les différents produits de consommation est multiple : certains sont utilisés pour éviter que le vernis à ongles ne s’écaille, d’autres pour faire tenir les parfums plus longtemps, d’autres encore pour rendre les manches des outils plus solides et résistants ou pour augmenter l’effet des adhésifs, les pigments de peinture, du calfatage et de beaucoup d’autres matériaux (3).

À température ambiante, les phtalates ressemblent à l’huile végétale pure : un liquide transparent, d’aspect huileux ou visqueux, qui dégage peu ou pas d’odeur. Les phtalates ont une forte affinité avec les graisses et les alcools lourds mais sont a contrario très peu solubles dans l’eau. Ils peuvent partiellement migrer ou être libérés du polymère vers d’autres milieux par contact (aliments), extraction (lavage) ou pertes à chaud (calandrage). Compte tenu de leur grande utilisation, les phtalates se retrouvent dans tout l’environnement : à cet égard, s’ils se dégradent relativement facilement dans l’atmosphère et le milieu aquatique (à l’exception des eaux froides et profondes), ils ont une durée de vie plus importante dans le sol et très supérieure dans les sédiments (4).

Les six phtalates les plus utilisés à l’heure actuelle sont (5) :

– le phtalate de dibutyle ou DBP

– le phtalate de benzyle butyle ou BBP

– le phtalate de di-n-octyle ou DnOP

– le phtalate de di-isononyle ou DINP

– le phtalate de di-isodécyle ou DIDP

– le phtalate de di-2-éthyl-hexyle ou DEHP

Exemples d’utilisation de quelques phtalates pour des usages
de type commercial et industriel

Catégorie de phtalates

Abréviation

Exemples d’utilisation

Phtalate de benzylbutyle

BBP

Fragrances, fixatifs pour cheveux, adhésifs et colles, produits pour l’automobile, revêtements de surface intérieure, mousse de polyvinyle, cosmétiques…

Phtalate de dibutyle

DBP

Fragrances, fixatifs pour cheveux, déodorants, vernis à ongle, insecticides, cosmétiques, adhésifs, agents anti-moussants, encres pour imprimantes, emballages plastiques, solvants, plastifiants…

Phtalate de di-2-éthylexyde

DEHP

Fragrances, produits flexibles en PVC (notamment revêtement de sol), revêtements de surface intérieure, condensateurs, matériel médical, textiles et habillement, traitement de surfaces, cosmétiques…

Phtalate de di-isononyle

DINP

Jouets pour enfants, gants, matériels pour l’emballage de la nourriture…

Source : Extrait du mémoire « Projet PERSAN : les phtalates », École des Hautes études en santé publique, 2010.

En 2005, la production européenne de phtalates a été estimée à 1 million de tonnes, dont 900 000 tonnes utilisées pour plastifier le PVC (6). La production mondiale a quant à elle été estimée à 3 millions de tonnes par l’INRS (institut national de recherche et de sécurité) en 2004 (7). Sur ce total de production, 50 % est constitué par le DEHP.

D’après les informations publiées en 2010 dans le cadre d’un mémoire de l’EHESP consacré aux phtalates, la proportion de ces substances peut représenter jusqu’à 50 % (en poids) de certains produits de la vie quotidienne, tels les sacs plastiques, les emballages alimentaires, les jouets pour le bain ou les dispositifs médicaux (poches de perfusion, contenants pour le stockage du sang).

Sur le site internet du centre français d’information sur les phtalates, créé à l’initiative du Conseil Européen pour Plastifiants et Intermédiaires (ECPI), il est mentionné que du fait de leur « énorme utilisation », les phtalates ont fait l’objet de « recherches intensives » pour leurs éventuels effets sur la santé et l’environnement et sont « parmi les substances chimiques les plus étudiées ». Force est toutefois de constater que leur usage très répandu favorise une exposition par diverses voies chez l’humain. Le site en question signale cependant surtout que « depuis leur longue utilisation bénéfique, aucun cas de dommage à la santé n’est connu à ce jour. Au contraire [les phtalates] ont contribué à accroître notre bien-être dans la vie de tous les jours et plus important, sont souvent l’unique composant possible du matériel médical permettant de sauver des vies. ».

B. LES PARABÈNES

Les parabènes sont des conservateurs essentiellement utilisés dans les cosmétiques et, de façon plus marginale, dans les médicaments et dans certains aliments. Ils regroupent les esters de l’acide parahydroxybenzoïque (methyl paraben, ethyl paraben, propyl paraben, butyl paraben).

L’utilisation des parabènes dans les produits cosmétiques (8) tient à leur efficacité antimicrobienne et à leur relative innocuité, en particulier en ce qui concerne des effets sensibilisants. Les parabènes ont un large spectre d’activité sur les bactéries, les levures, les moisissures et les champignons. Ils sont efficaces à de faibles concentrations et les mélanges de parabènes ont un effet synergique. Ils sont facilement hydrolysables par des enzymes non spécifiques. Des études ont mis en évidence la dégradation des parabènes après application sur la peau, ce qui explique une faible exposition systémique du consommateur. Enfin, s’il existe des possibilités de substitution des parabènes par d’autres conservateurs, ceux-ci ne sont pour l’heure pas toujours considérés comme aussi efficaces et ne présentent pas une aussi bonne tolérance ni les mêmes données de sécurité (9).

Un arrêté fixant la liste des agents conservateurs que peuvent contenir les produits cosmétiques limite toutefois l’usage de ces substances aux concentrations maximales autorisées à 0,4 % (en acide) pour un ester et à 0,8 % (en acide) pour les mélanges d’ester.

D’après l’encyclopédie en ligne Wikipédia, les composés de la famille des parabènes les plus couramment utilisés sont :

– le méthylparabène ou 4-hydroxybenzoate de méthyle (E218) et son sel de sodium (E219)

– l’éthylparabène ou 4-hydroxybenzoate d’éthyle (E214) et son sel de sodium (E215)

– le propylparabène ou 4-hydroxybenzoate de propyle (E216) et son sel de sodium (E217)

– l’isopropylparabène

– le butylparabène

– l’isobutylparabène

– le benzylparabène

C. LES ALKYLPHÉNOLS

Les alkylphénols (AP) sont des substances chimiques non-halogénées fabriquées presque exclusivement pour produire des éthoxylates d’alkylphénol (APE), une famille de surfactants (agents de surface actifs) non-anioniques. Les APE les plus largement utilisés sont les éthoxylates de nonylphénol (NPE) et, dans une moindre mesure, les éthoxylates d’octylphénol (OPE). Les NPE sont utilisés comme surfactants, émulsifiants, dispersants et/ou agents mouillants dans une grande variété d’applications commerciales et industrielles.

Sur les 77 000 tonnes utilisées en Europe de l’ouest, la plus grande part (presque 30 %) est incorporée dans des produits de nettoyage industriels ou à destination des collectivités (détergents) ; on les retrouve également comme émulsifiants (11 %), dans la finition des textiles (10 %) et du cuir (7 %), comme ingrédients de pesticides et autres produits agricoles (6 %) et dans les peintures à l’eau (5 %) (10). De plus, la littérature indique qu’une proportion substantielle (16 % soit plus de 12 000 tonnes) est utilisée dans plusieurs autres « niches commerciales » (ingrédients de cosmétiques, de shampoings, et autres produits de soin corporel) ou ne fait l’objet d’aucune affectation connue. Dans cette dernière catégorie, se classeraient les usages comme ingrédients de colles et de mastics, mais les informations sont très limitées. L’usage de dérivés de NPE comme antioxydants de certains plastiques est également mentionnée dans certaines publications (Guenther et al. 2002).

D’après les informations figurant sur le site de l’organisation Greenpeace (11), les APE se dégradent dans l’environnement en AP, lesquels sont persistants, bioaccumulables et toxiques pour la vie aquatique. Les alkylphénols (particulièrement le nonyphénol et ses dérivés) sont distribués largement dans les eaux douces et marines et, en particulier, dans les sédiments où ces composés persistants s’accumulent. Notons également que du fait de leurs rejets dans les eaux usées, les alkylphénols sont des composants communs des boues d’épuration des eaux. Les niveaux de contamination de la faune ont fait l’objet de peu de recherches, même si la littérature cite des niveaux significatifs détectés dans des poissons et des oiseaux aquatiques en aval des sites de production d’APE ou d’installations les utilisant. Le NPE comme l’OPE sont connus pour s’accumuler dans les tissus des poissons et d’autres organismes vivants, et suivre un processus de biomagnification (12) dans la chaîne alimentaire (13).

II.- QUELS RISQUES POUR LA SANTÉ ?

A. DES SUBSTANCES TOXIQUES POUR LA REPRODUCTION

1. Des effets démontrés sur la faune

a) les phtalates

Depuis le début des années 1990, d’importants travaux de recherche ont été menés sur les phtalates, mettant en évidence, pour certains d’entre eux, des propriétés toxiques pour la reproduction ainsi qu’un effet cancérigène sur le rongeur.

Des effets sur le foie, les reins et le système reproducteur ont ainsi été observés après une administration chronique, mais les effets varient d’un phtalate l’autre (à l’exception des effets sur le foie communs à tous). Le mécanisme à l’origine de l’apparition de tumeurs hépatiques chez le rat ainsi que les effets cancérogènes ne semblent cependant pas transposables à l’homme. Pour certains phtalates, des effets sur la reproduction sont observés après administration orale répétée chez le rat et la souris : baisse de la fertilité, atrophie testiculaire, malformations fœtales, mortalité fœtale. Certains possèdent également un effet perturbateur endocrinien susceptible de développer des anomalies du développement sexuel chez le jeune rat mâle exposé in utero (14).

Effets reprotoxiques pour les six principaux phtalates

 

Données chez l’animal

Données chez l’Homme

 

Voie orale

Voie orale

Effets reprotoxiques

DEHP

Rat et souris :
– anomalies de développement des nouveaux nés, effets tératogènes ;
– diminution de la fertilité, atrophie testiculaire, atteintes histologiques (rat)
– dégénération des tubes séminifères (souris)
– défauts d’ovulation, altération du cycle
œstral

Possible activité de perturbateurs endocriniens

DINP

Fertilité : Étude une et deux générations : les paramètres de reproduction n’ont pas été affectés
Développement
 : Effets sur le développement embryo-f
œtal à forte dose : variation squelettique, viscérale

 

BBP

Rat :
– lésions des organes reproducteurs ;
– diminution du nombre de spermatozoïdes et de la fertilité, notée chez le rat après traitement per os (>500 mg/kg).
Rat et souris :
– mortalité embryonnaire, retard de croissance et malformation des petits ;
– malformations chez les descendants mâles, réduction de la distance anogénitale ;
– absence de régression des mamelons et/ou des altérations de la production de sperme (rat) ;
– développement de l’appareil reproducteur et différenciation sexuelle chez les mâles sont particulièrement affectés après exposition pendant une période sensible (≥ 250 mg/kg).

 

DBP

Rongeurs :
altération du développement pré et post-natal

Pas de données de tératogénécité ou de toxicité sur la reproduction
Rq
 : les expositions chez l’animal sont en général plus importantes que celles rencontrées chez l’homme or le métabolite, responsable de la toxicité chez l’animal, ne s’accumule pas dans l’organisme humain

DIDP

Fertilité : Rongeurs : aucun effet observé jusqu’à la dose de 930 mg/kg/jr (une étude une génération + une étude sur deux générations avec observation des capacités d’accouplement, de fertilité, de fécondité et d’indices de gestation)
Développement prénatal
 :
– augmentation de l’incidence des variations squelettiques et de toxicité maternelle (NOAEL : 500 mg/kg/jr) (2 études ; 9 jours ; dose maximale de 1000 mg/kg/jr)
– diminution du poids des petits à la naissance, diminution du taux de survie (NOAEL : 33 mg/kg/jr) (2 études, dont 1 sur 2 générations) ;
– effets observés sur le développement f
œtal à partir d’une dose de 200 mg/kg/jr

 

DnOP

Rat : d’après les études disponibles, aucun effet sur la reproduction pour une exposition chronique de 403 mg/kg/jr et un gavage pendant 4 jours de 2 800 mg/kg/jr → données insuffisantes pour conclure mais hypothèse d’une reprotoxicité plus faible que les autres phtalates de faible poids moléculaire.
Développement prénatal
 :
Rat et souris 
: aucun effet (2 études mais très critiquées → fiabilité ?)
Rat
 : aucun effet (1 étude sur plusieurs générations ; dose maximale de 7,5 g/kg/jr dans la nourriture)

Aucune donnée existante

Source : Extrait du mémoire « Projet PERSAN : les phtalates », École des Hautes études en santé publique, 2010.

Les principaux résultats auxquels ont abouti les études en cours montrent ainsi :

– que le niveau de toxicité des phtalates varie selon le type de composé. Ainsi, comme l’indique le mémoire de l’EHESP précité, les phtalates de bas et de haut poids moléculaires ne présentent que peu ou pas de toxicité (Sailleenfait et Laudet-Hesbert, 2005). En revanche, le DEHP possède un potentiel de toxicité plus élevé que les autres phtalates (Saint-Laurent et Rhainds, 2004) ;

– les phtalates ne s’accumulent pas dans l’organisme : ils sont rapidement métabolisés puis éliminés (Laudet-Hesbert et alii, 2004) ; cependant, ils peuvent franchir la barrière placentaire (AFSSET, 2008) ;

– les principaux effets des phtalates concerneraient ainsi la reproduction et le développement prénatal. Chez l’animal, les phtalates agissent comme des perturbateurs endocriniens et les principaux effets toxiques observés concernent le foie. Si ces résultats ne sont pas extrapolables à l’homme, les chercheurs considèrent néanmoins qu’il pourrait y avoir des effets également sur la reproduction et le développement prénatal (atrophie ou malformation testiculaire) ;

– enfin, s’agissant des voies de contamination, l’ingestion (aliments contaminés via les emballages, jouets pour les enfants – s’agissant des phtalates non interdits) est la voie prédominante que ce soit chez l’adulte ou chez l’enfant (Chen et al., 2008). L’inhalation constitue une voie secondaire, qui est aujourd’hui peu documentée, alors que les observations disponibles démontrent la présence de phtalates dans les poussières des maisons, avec une prédominance marquée pour le DEHP, le DINP et le DIDP. Quant à l’exposition par la voie cutanée, elle est également très peu documentée, la peau étant généralement considérée comme une barrière suffisante. Mais il faut également cité des possibilités d’exposition lors de certains procédés médicaux (hémodialyse, transfusion sanguine, administration de fluides par intra-veineuse, etc.).

S’agissant du DEHP, substance la plus utilisée de la famille des phtalates, une équipe française a confirmé, dans une étude parue le 9 septembre 2008 dans la revue Environmental Health Perspectives, qu’il était directement nocif pour les cellules produisant les spermatozoïdes. Interrogée par le journal Le Figaro, Virginie Rouiller-Fabre, à l’origine de l’étude réalisée par l’unité mixte de recherche INSERM/CEA/université Paris VII Gamétogénèse et génotoxicité, indique que l’ajout de MEHP, la forme circulante du DEHP dans l’organisme, au sein de testicules humains fœtaux cultivés in vitro provoque au bout de trois jours la mort de 40 % des cellules précurseurs des spermatozoïdes (15). L’article poursuit : « Cet effet du DEHP pourrait-il expliquer la baisse constante de la concentration en spermatozoïdes relevée dans les pays industrialisés depuis une vingtaine d’années ? Nos travaux renforcent effectivement ces soupçons, indique le Pr René Habert qui dirige l’unité Gamétogenèse et génotoxicité. Car les concentrations en MEHP que nous avons testées ne sont que dix à cent fois supérieures à celles que l'on peut trouver dans l'organisme maternel. En outre, nous n'avons ajouté qu'un seul phtalate alors que nous sommes exposés à des dizaines d'autres et à des centaines de polluants environnementaux. » Des conclusions pour le moins inquiétantes.

b) les parabènes

Au début des années 2000, des études in vitro sur des modèles cellulaires ont mis en évidence que les parabènes pouvaient « mimer » les propriétés des oestrogènes et émis l’hypothèse d’un risque d’accroissement de tumeurs cancéreuses du sein. Une étude en particulier a permis de détecter des parabènes sur des biopsies de tumeurs mammaires chez l’homme (Darbre et al., Concentrations of parabens in human breast tumours, J. Appt. Toxicol. 24 : 5-13, 2004). L’origine de ces composés reste toutefois indéterminée dans la mesure où ils sont retrouvés dans de nombreux produits alimentaires, pharmaceutiques et cosmétiques. À l’occasion d’une réponse à une question écrite, le ministère de la santé a en outre signalé que cette étude avait été largement reprise et critiquée par l’ensemble de la communauté scientifique en raison de la présence de certains biais méthodologiques, concluant que les effets néfastes d’un éventuel passage transcutané des parabènes chez l’homme n’étaient pas démontrés (16).

Dès juin 2004, l’AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé), en collaboration avec l’AFSSA (Agence française de sécurité sanitaire des aliments, devenue depuis l’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) et l’InVS (Institut national de veille sanitaire), a toutefois engagé une évaluation de la sécurité d’utilisation de ces substances et mis en place un groupe d’experts. Sur la base de l’analyse des données de la littérature et des données de pharmacovigilance, elle a considéré que les parabènes étaient peu toxiques et bien tolérés, bien que des réactions allergiques puissent survenir chez certaines personnes. Des études plus récentes ont cependant établi que ces conservateurs pourraient être à l’origine d’une perturbation, jugée faible, du système endocrinien. L’AFSSAPS a néanmoins considéré par la suite que les données toxicologiques et épidémiologiques ne permettaient pas de caractériser ni de quantifier le risque qui pourrait être associé à la perturbation endocrinienne.

Des effets toxiques du propyl paraben et du butyl paraben sur la reproduction ont cependant été mis en évidence chez le jeune rat. Les études ont été réalisées à des doses susceptibles d’être compatibles avec les expositions humaines et suggèrent un risque potentiel pour la fertilité masculine. Aucun effet n’a en revanche été mis en évidence avec le methyl paraben ni avec l’ethyl paraben. Des études complémentaires de reprotoxicité ont donc été demandées à l’industrie cosmétique, notamment s’agissant de la réversibilité des effets et du devenir des parabènes dans l’organisme (évaluation de la distribution, de l’accumulation éventuelle, de l’élimination). Au vu de ces études et des conclusions des comités d’experts de la Commission Européenne dans les domaines cosmétique et alimentaire, la commission cosmétologie de l’AFSSAPS du 29 septembre 2005 s’est prononcée en faveur de la poursuite de l’utilisation, aux conditions prévues par la réglementation actuelle, de 4 des 5 parabènes les plus couramment utilisés (méthyl-éthyl-propyl et butyl parabens). Pour l’isobutylparaben, la commission de cosmétologie s’est montrée favorable à la poursuite de l’utilisation dans les produits cosmétiques de ce conservateur, sous réserve d’études complémentaires. Enfin, concernant les autres esters d’alkyle de l’acide parahydroxybenzoique, notamment le benzylparaben, la commission de cosmétologie a émis des réserves concernant leur utilisation compte tenu du manque de données permettant d’écarter un risque reprotoxique.

La question des parabènes dans les produits cosmétiques

destinés aux enfants de moins de trois ans

En septembre 2008, un collectif de médecins, le comité pour le développement durable en santé (C2DS), a mis en cause le contenu des trousses offertes gracieusement dans les maternités aux jeunes mamans, en raison de la possible toxicité de certains ingrédients entrant dans la composition des produits cosmétiques pour bébés qu’elles contiennent.

Pour répondre à ces inquiétudes, l’AFSSAPS et la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) ont mis en œuvre, en sus de leurs activités habituelles de contrôle, un programme spécifique d’inspection afin de vérifier que les pratiques des industriels étaient bien conformes aux exigences de la réglementation : 79 produits cosmétiques destinés aux enfants de moins de 3 ans dont des lingettes, du lait nettoyant ou encore des gels moussants ont ainsi été analysés.

Les produits examinés ne contenaient aucune substance interdite par la réglementation. Il a toutefois été observé que certains de ces produits contenaient des conservateurs en nombre important ; les analyses effectuées ont montré que les restrictions d’emploi concernant les agents conservateurs étaient respectées et que les conservateurs présents dans ces produits étaient présents à des taux très inférieurs aux concentrations maximales autorisées. Les analyses microbiologiques réalisées sur 19 produits prélevés par les enquêteurs de la DGCCRF et 37 produits prélevés par l’AFSSAPS ont toutes conduit à des résultats mettant en évidence une bonne qualité microbiologique de ces produits. L’enquête précise cependant que des progrès restent à accomplir en ce qui concerne la qualité de l’évaluation du produit fini. Sur 47 produits contrôlés, l’absence d’évaluation a été constatée pour 3 produits, et 44 ont été jugées perfectibles. Notons à cet égard, que bien que la directive relative aux produits cosmétiques prévoie une évaluation spécifique de la sécurité des produits destinés aux enfants de moins de trois ans, il n’existe pas, à ce jour, de référentiels opposables précisant les tests spécifiques à réaliser en vue de cette évaluation.

Sur la base de ce constat, un groupe de travail pluridisciplinaire, placé auprès de la commission nationale de cosmétologie de l’AFSSAPS, a été chargé d’élaborer des recommandations destinées aux industriels visant à garantir l’innocuité des produits cosmétiques destinés aux enfants de moins de trois ans. Ces travaux devaient ensuite être portés au niveau communautaire afin que des recommandations de portée européenne soient élaborées pour garantir que l’ensemble des produits cosmétiques en libre circulation sur le marché européen présentent un niveau de sécurité optimal pour les enfants de moins de trois ans.

c) les alkylphénols

Si les informations relatives aux phtalates et aux parabènes sont relativement disponibles et largement commentées, notamment sur Internet, il n’en va pas de même des alkylphénols sur lesquels il reste très difficile de trouver des données approfondies et des résultats d’études. Aussi les informations présentées ici ne peuvent-elles être que lacunaires, et ce d’autant plus que le ministère chargé de la santé n’a fourni aucun élément à votre rapporteur sur ces substances chimiques, ce qui ne laisse pas d’interroger sur les informations dont nous disposons réellement en la matière.

Des travaux récents, cités par l’association Greenpeace, ont néanmoins montré l’omniprésence des éthoxylates de nonyphénol dans toute une variété d’aliments en Allemagne (Guenther et al. 2002), mais les conséquences de cette exposition pour l’homme restent encore à évaluer. La portée et les conséquences de l’exposition directe provoquée par leur usage dans les produits de consommation n’ont pas non plus été beaucoup étudiées, bien qu’un rapport récent fasse état de la présence de résidus dans des poussières domestiques (Butte and Heinzow, 2002).

L’évaluation des risques effectuée par l’Union européenne pour le nonylphénol a associé aux usages courants de ces substances des risques significatifs pour l’environnement aquatique, les sols et pour les organismes supérieurs par empoisonnement secondaire (c’est-à-dire résultant de l’accumulation dans la chaîne alimentaire). En considération de l’exposition humaine provoquée par l’usage des NPE dans les produits de consommation, le Comité Scientifique de l’Union européenne sur la Toxicité, l’Ecotoxicité et l’Environnement (CSTEE 2001) a conclu que le « manque sérieux des données mesurées pour le NP en relation avec la production et l’utilisation de ce composé et de ces dérivés rend l’évaluation des expositions professionnelles et domestiques incertaine ».

Le danger associé aux alkylphénols le plus largement reconnu réside, là aussi, dans leur activité oestrogène, susceptible d’altérer le développement sexuel de plusieurs organismes vivants, et reconnue pour provoquer notablement la féminisation des poissons (Jobling et al. 1995, 1996). Les dangers pour la santé humaine demeurent cependant inconnus. Des travaux récents ont cependant soulevé des éléments nouveaux : par exemple, Chitra et al. (2002) et Adeoya-Osiguwa et al. (2003) décrivent des effets sur les fonctions du sperme chez les mammifères, tandis que d’autres documents citent une détérioration de l’ADN dans les lymphocytes humains (Harreus et al. 2002).

2. Quel rôle des perturbateurs endocriniens chez l’homme ?

Depuis une quarantaine d’années, des études épidémiologiques à travers le monde industrialisé ont révélé une baisse de la fertilité masculine en partie liée à la baisse de la production de spermatozoïdes chez l’homme. On a également constaté, sur la même période, une augmentation de l’incidence des cancers du testicule et de la prostate, ainsi que des cryptorchidies (17). Enfin, depuis 1950, on rapporte une diminution des naissances de garçons.

L’hypothèse d’un rôle éventuel des perturbateurs endocriniens est considérée comme licite par la communauté scientifique. Aussi ces évolutions préoccupantes ont-elles été souvent attribuées à certaines substances chimiques, comme les phtalates ou le bisphénol A, qui peuvent soit avoir un effet toxique direct sur les organes de la reproduction, soit perturber le fonctionnement du système hormonal reproductif et affecter l’adulte, le jeune enfant, l’embryon ou le foetus lors de son développement prénatal. Comme le reconnaît le Gouvernement dans sa réponse en date du 25 novembre 2008 à la question écrite n° 33638 de M. Jean-Pierre Giran sur la présence de phtalates et de bisphénol A dans les produits de consommation courante, « la question des reprotoxiques et des perturbateurs endocriniens est un sujet grave pour la santé publique ». 

Les perturbateurs endocriniens

Derrière la désignation très générique de « perturbateur endocrinien », se cache un ensemble de substances étrangères à l’organisme qui peuvent interférer avec les hormones. Il peut s’agir de substances chimiques d’origine naturelle ou artificielle interférant avec le métabolisme des hormones naturelles produites par l’organisme. Sur le plan pratique, ces substances ont majoritairement des effets œstrogéniques. En altérant la fonction endocrine, elles peuvent affecter tout à la fois l’organisme en question mais aussi sa descendance.

Les différentes catégories de perturbateurs endocriniens sont :

– les hormones animales naturelles (œstrogènes) ;

– les substances naturelles ou phytohormones (génistéine, daïdzéine, coumestrol, zéaralénone…) ;

– les produits phytosanitaires (herbicides, fongicides, insecticides, raticides, nématocides…) ;

– les produits chimiques issus de l’industrie (alkylphénols, bisphénol A, phtalates, tributylétain, métaux lourds…) ;

– les produits pharmaceutiques ou vétérinaires (DES, promoteurs de croissance…).

La contamination par les perturbateurs endocriniens peut donc se faire par de multiples voies (air, sol, sédiments, eau, nourriture, biens de consommation, etc.). Pour l’homme, l’alimentation est la première voie d’exposition mais d’autres sources ont été incriminées, comme par exemple l’absorption de phtalates contenues dans les jouets pour les jeunes enfants (avant leur réglementation), la migration du bisphénol A (BPA) au cours de la première heure suivant la pose de pansements dentaires à base d’epoxy ou encore le relargage de BPA à partir des boîtes de conserve en acier ou des emballages de boissons revêtus de polycabornate.

Hormis le lien établi entre diéthylstillbestrol (DES), les anomalies de reproduction et les cancers, il n’y a toutefois aujourd’hui que peu de certitudes quant à l’impact des perturbateurs endocriniens sur la santé humaine. Cependant plusieurs résultats convergents obtenus sur des espèces et/ou à partir d’études épidémiologiques, étayent l’hypothèse selon laquelle des troubles de la reproduction, du fonctionnement thyroïdien ou du comportement pourraient résulter d’exposition à de telles molécules.

Les cas de troubles de la reproduction et du développement sont désormais bien documentés pour de nombreuses espèces, notamment les poissons, en raison des rejets de substances chimiques dans les rivières. Dans la population générale, le risque de détérioration de la santé reproductive masculine est au centre des préoccupations, même si aucune relation de cause à effet n’a été pour l’heure établie complètement.

Comme le souligne le rapport de notre collègue sénatrice, Mme Marie-Christine Blandin sur les risques chimiques au quotidien présenté en 2008 au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (18), il apparaît de plus en plus évident que les perturbateurs endocriniens peuvent expliquer à la fois la croissance des atteintes à la reproduction et celle des cancers hormonodépendants. Le rapport souligne en outre que l’action toxique de ces perturbateurs endocriniens ne dépend pas nécessairement de la dose à laquelle nous sommes exposés et qu’une action à faible dose peut avoir un impact plus fort qu’à forte dose, étant entendu que l’impact combiné de perturbateurs endocriniens peut également être plus fort que la simple addition de leurs effets respectifs.

Le rapport précité met ainsi en évidence une faiblesse évidente dans la gestion du risque, qui se limite à la définition de doses journalières acceptables, alors qu’il faudrait tendre à obtenir le plus bas niveau de risque possible ou le « niveau de risque le plus bas que l’on peut raisonnablement atteindre » (dit principe Alara pour « As Low As Reasonably Achievable »). M. Gérard Dériot indique à cet égard, dans son rapport sur la proposition de loi tendant à interdire le Bisphénol A dans les plastiques alimentaires (19), que ce principe a déjà été mis en œuvre par l’Union européenne s’agissant des nitrates, des mycotoxines, du monochloro-propane-1, 2 diol (3-MCPD), les dioxines et les PCB de type dioxine, ainsi que pour les hydrocarbures aromatiques polycycliques et l’étain organique, pour lesquels les teneurs maximales sont fixées au niveau le plus faible que permettent raisonnablement les bonnes pratiques de fabrication ou les bonnes pratiques agricoles.

B. UNE RÉGLEMENTATION PARCELLAIRE

De nombreuses initiatives ont été prises, tant au niveau national que de l’Union européenne, pour encadrer l’utilisation de certaines substances chimiques dès lors qu’il était scientifiquement prouvé qu’elles présentaient un risque pour la santé humaine, ou pour l’environnement. Le principe en la matière n’est toutefois pas celui de l’interdiction préventive mais bien de l’autorisation a priori : les produits restent donc autorisés tant qu’il n’y a pas atteinte à l’obligation générale de sécurité des produits et qu’un danger potentiel pour la santé n’est pas démontré. L’adoption du règlement REACH constitue à cet égard une avancée puisqu’il a notamment vocation à dresser une liste positive de produits présumés interdits sauf autorisation spéciale. Sa montée en régime est toutefois progressive et ses effets concrets ne devraient pas se faire sentir avant plusieurs années.

1. Des interdictions ou des encadrements ponctuels

a) les jouets

Depuis la fin des années 1990, plusieurs Etats membres de l’Union européenne ont considéré que les phtalates pouvaient présenter un risque lorsqu’ils étaient utilisés dans les jouets et dans les articles de puériculture en PVC souple : après avoir été dans un premier temps interdits, les phtalates sont aujourd’hui autorisés, dans des proportions très limitées, dans certains produits.

Ainsi la directive 2005/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2005 modifiant la directive 76/769/CEE, transposée en droit interne par le décret n° 2006-1361, prévoit ainsi :

– que le DEHP, le DBP et le BBP ne peuvent être utilisés comme substances ou composants de préparations à des concentrations supérieures à 0,1 % en masse de matière plastifiée dans les jouets et articles de puériculture,

– et que le DINP, DIDP et le DnOP ne peuvent pas être utilisés comme substances ou composants de préparations à des concentrations supérieures à 0,1 % en masse de matière plastifiée dans les jouets et articles de puériculture qui peuvent être mis en bouche par les enfants.

Rappelons en outre que les jouets doivent respecter des exigences essentielles de sécurité définies par l’Union européenne : de nouvelles normes, plus strictes, s’appliqueront ainsi à compter du 20 juillet 2011, date d’entrée en vigueur de la directive 2009/48/CE du 18 juin 2009 transposée par le décret n° 2010-166 du 22 février 2010 qui comprend notamment, dans son annexe I, des exigences de sécurité particulières quant aux propriétés chimiques des jouets.

b) les contenants alimentaires

L’utilisation des phtalates dans les matériaux de contact alimentaire est régie par les dispositions de la directive 2007/19/CE qui interdit à compter du 1er juillet 2008 la fabrication et l’importation dans la Communauté européenne des matériaux et des objets en matière plastique destinés à entrer en contact avec des denrées alimentaires et non conformes aux restrictions et aux spécifications prévues pour certains phtalates.

Ainsi, le BBP, dont la limite de migration spécifique (LMS) a été fixée à 30 mg/kg simulant de denrée alimentaire, est à employer uniquement comme :

a) plastifiant dans des matériaux et des objets réutilisables ;

b) plastifiant dans des matériaux et des objets à usage unique en contact avec des aliments non gras, à l’exception des préparations pour nourrissons et des préparations de suite ;

c) auxiliaire technologique à des concentrations pouvant aller jusqu’à 0,1 % dans le produit final.

Quant au DEHP (LMS = 1,5 mg/kg simulant de denrée), il est à employer uniquement comme plastifiant dans des matériaux et des objets réutilisables en contact avec des aliments non gras et auxiliaire technologique à des concentrations pouvant aller jusqu’à 0,1 % dans le produit final. Il est donc interdit notamment comme membrane interne de capuchon ou comme joint.

c) les produits cosmétiques

La mise sur le marché de produits cosmétiques est soumise aux dispositions de la directive modifiée n° 76/768/CEE du Conseil du 27 juillet 1976 concernant les produits cosmétiques, transposées aux articles L. 5131-1 et suivants du code de la santé publique. Ces produits doivent ainsi respecter des règles en matière de composition, d’étiquetage et de présentation. Sur la base de ces dispositions, cinq arrêtés modifiés du 6 février 2001 fixent les listes exhaustives des substances interdites, des substances soumises à restriction et des ingrédients autorisés dans un but de coloration, de conservation, ou de protection contre les rayonnements ultra-violets. Notons enfin, d’une manière générale, que les produits cosmétiques ne doivent pas nuire à la santé humaine lorsqu’ils sont appliqués dans les conditions normales ou normalement prévisibles d’utilisation compte tenu, notamment, de la présentation du produit, des mentions portées sur l’étiquetage ainsi que de toute autre information destinée aux consommateurs.

La présence de phtalates dans les produits cosmétiques a ainsi été interdite pour la plupart d’entre eux :

– le phtalate de butyle benzyle,

– le phtalate de l’ester dipentylique (ramifié et linéaire),

– le phtalate de l’acide 1,2-benzène-dicarboxylique,

– le phtalate de di-n-pentyle et d’isopentyle,

– le phtalate de di-n-pentyle,

– le phtalate de diisopentyle,

– le phtalate de bis (2-éthylhexyle),

– le phtalate de bis (2-méthoxyéthyle),

– et le phtalate de dibutyle.

Concernant toutefois le diéthylphtalate, la réponse à la question écrite n° 80039 de M. Marc Le Fur, en date du 8 juin 2010, indique que les différentes évaluations menées au niveau européen ont toutes conclu à son innocuité pour un usage cosmétique.

d) les dispositifs médicaux

Les phtalates sont couramment utilisés dans les dispositifs médicaux, notamment le DEHP, qui entre actuellement pour plus de 50 % dans la composition des plastiques à usage médical (20). Or, le DEHP peut migrer facilement hors de la structure PVC, a fortiori dans les produits ayant une forte affinité comme le sang, les mélanges nutritifs contenant des lipides, ou autres médicaments lipophiles en contact.

La directive n° 2007/47/CE relative aux dispositifs médicaux, entrée en vigueur le 21 mars 2010, renforce les obligations des fabricants de dispositifs médicaux « destinés à administrer dans l’organisme et/ou à retirer de l’organisme des médicaments, des liquides biologiques ou autres substances ou des dispositifs destinés au transport et au stockage de ces liquides ou substances » contenant des phtalates classés comme CMR de catégorie 1 ou 2 conformément à l’annexe I de la directive 67/548/CE. Cette directive, transposée en droit interne par l’ordonnance n° 2010-250 du 11 mars 2010, exige un étiquetage spécifique de ces dispositifs médicaux et impose la justification de l’utilisation de ces substances chimiques ainsi que l’indication, dans la notice d’information, des risques résiduels et des mesures de précaution appropriées dans le cas où les dispositifs médicaux sont spécialement destinés aux enfants, aux femmes enceintes ou allaitant.

e) les matériaux de construction et de décoration

Dans le cadre du deuxième Plan National Santé-Environnement (PNSE 2), adopté en conseil des ministres le 24 juin 2009, la limitation des sources de pollution de l’air intérieur a été jugée un axe d’action prioritaire : le plan a prévu l’étiquetage obligatoire des matériaux de construction et de décoration quant à leurs émissions polluantes à partir de 2011 et l’interdiction des substances classées cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction dans ces produits. C’est ainsi que le benzène, le trichloréthylène et deux phtalates ont été interdits par arrêté dans les matériaux de construction et de décoration à partir du 1er janvier 2010.

Le PNSE 2 a également prévu d’étudier l’extension de l’étiquetage obligatoire à d’autres produits émetteurs, tels que les meubles ou les détergents, et de rendre obligatoire d’ici à 2013 l’utilisation de produits faiblement émissifs dans les bâtiments et lieux recevant des enfants.

Plus généralement, la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national en faveur de l’environnement dispose qu’une surveillance de la qualité de l’air intérieur est obligatoire pour le propriétaire ou l’exploitant de certains établissements recevant du public déterminés par décret en Conseil d’Etat lorsque la configuration des locaux ou la nature du public le justifie (article L. 221-8 du code de l’environnement). Les écoles et les crèches devraient être prioritairement soumises à cette obligation, une campagne pilote ayant été lancée avant l’adoption de la loi dans 150 crèches et écoles de 14 régions afin de tester les protocoles de mesure qui pourraient être mis en œuvre. La liste des polluants de l’air intérieur qui font l’objet de cette surveillance et les méthodes de prélèvements et d’analyses à employer sont fixées par décret : les phtalates ne sont pas concernés.

2. La réglementation REACH

La réglementation en vigueur dans l’Union européenne relative à l’évaluation et à la gestion des risques des substances chimiques ayant montré ses limites dans la connaissance et l’évaluation des produits chimiques, le Conseil et le Parlement européen ont adopté, après trois ans de négociations, le règlement REACH relatif à l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi qu’aux restrictions applicables à ces substances et instituant une Agence européenne des produits chimiques (ECHA). L’objectif premier ce nouveau règlement est d’assurer un niveau élevé de protection de la santé et de l’environnement, en améliorant la connaissance et l’information sur les produits chimiques et en accélérant les procédures de gestion des risques. Il remplace 40 directives et refond totalement les trois directives et le règlement qui définissaient jusqu’à présent le contrôle harmonisé des produits chimiques dans l’Union européenne.

Dans le cadre de ce règlement, les substances jugées extrêmement préoccupantes font l’objet d’un traitement particulier visant à garantir que les risques sont valablement maîtrisés et que ces substances sont progressivement remplacées par d’autres substances ou technologies appropriées lorsque cela est possible. REACH impose ainsi une utilisation encadrée des substances chimiques jugées les plus préoccupantes car susceptibles de provoquer des effets irréversibles graves sur la santé publique ou sur l’environnement. Les substances identifiées comme telles selon les critères définis par le règlement se voient imposer une procédure d’autorisation spécifique. La première liste de substances « candidates » à l’inclusion dans l’annexe du règlement relative aux substances sujettes à autorisation (annexe XIV) proposée par l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) le 28 octobre 2008 contenait ainsi trois phtalates : le BBP, le DBP et le DHEP. Les recommandations d’inscription faite par l’ECHA à partir de cette première liste, publiées le 14 janvier 2009, comprenaient également le BBP, le DBP et le DHEP. Enfin, suite à la phase de commentaires prévue par le règlement, la Commission européenne vient de décider de l’inclusion effective de six substances à l’annexe XIV (21). Ces six substances, qui comprennent les trois phtalates précédemment cités, sont :

– le 5-tert-butyl-2.4.6-trinitro-m-xylène (numéro CAS : 81-15-2)

– le 4.4’-diaminodiphénylméthane (MDA) (numéro CAS : 101-77-9)

– l’hexabromocyclododécane (HBCDD) (numéro CAS : 3194-55-6)

– le phtalate de bis(2-éthylhexyle) (DEHP) (numéro CAS : 117-81-7)

– le phtalate de benzyle et de butyle (BBP) (numéro CAS : 85-68-7)

– le phtalate de dibutyle (DBP) (numéro CAS : 84-74-2)

Dans cette liste de substances (22), quatre sont classées CMR (cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction) par l’Union Européenne. Le MDA est classé « cancérogène de catégorie 1B » et les trois phtalates sont classés « toxique pour la reproduction de catégorie 1B ». Rappelons qu’auparavant, sous l’empire de la directive 67/548/CEE, quatre des six principaux phtalates étaient d’ores et déjà classés comme toxiques pour la reproduction catégorie 2 conformément au tableau figurant ci-dessous :

DEHP

T ; Repr. Cat2 ; R60-61

Légende :
T
 : toxique
Catégorie 1 
: Substances que l’on sait être cancérogènes pour l’homme.
Catégorie 2 
: Substances devant être assimilées à des substances cancérogènes pour l’homme
Catégorie 3 
: Substances préoccupantes pour l’homme en raison d’effets cancérogènes possibles, mais pour lesquelles les informations disponibles ne permettent pas une évaluation suffisante
R60 
: peut altérer la fertilité
R61 
: risque pendant la grossesse d’effets néfastes pour l’enfant
R62 
: risque possible d’altération de la fertilité
R63 
: risque possible pendant la grossesse d’effets néfastes pour l’enfant

DBP

T ; Repr. Cat2 ; R61 Repr. Cat3 ; R62

BBP

T ; Repr. Cat2 ; R61
Repr. Cat3 ; R62

DIPP

T ; Repr Cat2 ; R60-61

DMEP

T ; Repr. Cat2 ; R61
Repr. Cat3 ; R62

DPP

T ; Repr. Cat2 ; R60-61

Cette inclusion dans l’annexe XIV du règlement REACH signifie l’interdiction de mise sur le marché ainsi que l’interdiction d’utiliser ces substances à moins d’obtenir une autorisation spécifique de l’ECHA pour un usage bien précis. Sans cette autorisation, l’utilisation de ces substances prendra fin à la date indiquée dans le règlement, c’est-à-dire, pour les trois phtalates concernés, le 21 février 2015. Comme le note la réponse en date du 18 août 2009 à la question écrite n° 44148 de M. Marc Le Fur, cette évolution constitue d’ores et déjà une incitation extrêmement forte à la substitution de ces molécules par les fabricants, et ce dès aujourd’hui.

Enfin, il faut noter que le règlement REACH prévoit également des restrictions pour certaines substances ou certains mélanges jugées dangereux (annexe XVII). C’est dans ce cadre qu’est intervenu le règlement (CE) n° 552-2009 du 22 juin 2009 qui a inclus dans la liste prévue à l’annexe XVII l’éthoxylate de nonylphénol (NPE). Cette inclusion emporte ainsi des restrictions applicables à la fabrication, à la mise sur le marché et à l’utilisation de ces substances consistant en une interdiction de la présence de NPE à des concentrations de plus de 0,1 % en poids dans les domaines suivants :

– nettoyage industriel et nettoyage domestique,

– traitement des textiles et du cuir (sauf exception),

– émulsifiant dans les produits agricoles de traitement par immersion des trayons,

– usinage des métaux (sauf exception),

– fabrication de pâte à papier et de papier,

– produits cosmétiques et autres produits d’hygiène corporelle (sauf les spermicides),

– coformulants dans les pesticides et biocides (sauf autorisation nationale de produit phytopharmaceutique et de produits biocide accordée avant le 17 juillet 2003, jusqu’à la date de son expiration).

III.- AGIR AU NOM DU PRINCIPE DE PRÉCAUTION

A. DES CONNAISSANCES INSUFFISANTES

1. L’exemple des phtalates

Pour s’en tenir au seul exemple des phtalates, en dépit de l’évolution récente des recherches sur le sujet, de nombreuses incertitudes demeurent. Ainsi, comme le souligne le mémoire précité de l’EHESP, si des observations ont été réalisées pour les différentes voies d’exposition aux phtalates chez différentes espèces, peu de données sont disponibles sur l’homme. Les données concernant la toxicité humaine proviennent en très grande majorité d’extrapolations de données animales, ce qui les rend à la fois incertaines et incomplètes. En effet, les résultats des études menées sur les animaux ne sont pas extrapolables à l’homme : par exemple, l’absorption par voie orale est plus lente chez l’homme que chez le rat, et l’absorption cutanée plus faible.

S’agissant des voies d’exposition, si le niveau d’information concernant les aliments, l’eau ou les sols apparaît satisfaisant, les données sur l’inhalation sont quant à elles quasi-inexistantes. Or, certaines situations particulières (comme la construction ou la rénovation d’habitat) peuvent conduire à des expositions plus fortes que la normale. Le mémoire précité suggère à cet égard qu’il serait opportun de lancer des études spécifiques sur l’inhalation de vapeurs ou de poussières, notamment auprès des professionnels les plus exposés (ceux du bâtiment en particulier). Il en va de même de l’exposition via l’environnement intérieur (air ambiant et poussières) qui fait l’objet d’un intérêt grandissant dans le cadre des réflexions sur l’interaction entre la conception des bâtiments et la santé : une étude d’ensemble sur l’interaction entre la structure des bâtiments, le mobilier, l’environnement extérieur, les occupants et le type d’activité au sein des bâtiments reste encore à mener. La question des expositions multiples (multi-voies et multi-phtalates), avec un risque d’effets cumulatifs, reste également posée (Koch et al., 2002).

S’agissant des différents composés de la famille des phtalates, on constate également que, si les effets du DEHP, considéré comme le phtalate le plus toxique, ont beaucoup été étudiés, ceux du DINP l’ont beaucoup moins été : or du fait des multiples interdictions dont le DEHP fait désormais l’objet, le DINP lui est de plus en plus substitué…

2. Les perturbateurs endocriniens en général

Lors du débat en séance au Sénat le 24 mars 2010 sur la proposition de loi tendant à interdire le bisphénol A dans les plastiques alimentaires, un amendement a été adopté visant à demander la production, par le Gouvernement, d’un rapport présentant les mesures déjà prises et celles envisagées pour diminuer l’exposition humaine aux perturbateurs endocriniens dans les deux mois suivant la publication, par l’INSERM, de son expertise collective sur ces produits et au plus tard le 1er janvier 2011 (23). Il convient également de souligner qu’à l’occasion de plusieurs réponses à des questions écrites posées par des députés, la ministre avait également annoncé son intention de saisir les différentes agences sanitaires compétentes afin de réaliser un bilan sur la problématique des perturbateurs endocriniens :

– non seulement l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) avec une demande d’expertise collective sur le danger de ces substances,

– mais également l’Institut de veille sanitaire (InVS) pour réaliser une synthèse de l’évolution de la fertilité masculine en France,

– l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) pour examiner le risque attribuable aux ingrédients présents dans les produits cosmétiques,

– et enfin, l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) devenue depuis l’ANSES (agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) pour quantifier la présence et l’utilisation de ces substances dans l’alimentation ou les produits vétérinaires.

Au final, un rapport intermédiaire a été déposé le 10 mars dernier sur le bureau des assemblées. Les résultats définitifs de l’expertise collective de l’INSERM ne sont en effet pas encore connus ; quant à ceux des évaluations engagées par les différentes agences sanitaires précitées, ils devraient être publiés entre le premier semestre 2011 pour le bisphénol A et fin 2012 pour les autres substances perturbatrices endocriniennes présentes dans les produits grand public. Le rapport présente néanmoins une synthèse de l’expertise collective de l’INSERM dont les conclusions tendent plutôt à confirmer les incertitudes actuelles. Ainsi, sur le bisphénol A, il est indiqué que les études épidémiologiques permettant de confirmer ou d’infirmer chez l’homme les effets à long terme observés chez l’animal sont peu susceptibles d’apporter des réponses avant de nombreuses années ; quant aux données précises et fiables d’exposition et d’imprégnation des populations, elles sont encore trop rares aujourd’hui. S’agissant des phtalates, le rapport confirme en revanche que la majorité des études chez l’homme adulte montre un lien entre les concentrations de phtalates et une altération des paramètres du sperme dont la concentration et la morphologie des spermatozoïdes ainsi qu’une augmentation de la fragmentation de l’ADN du gamète mâle.

Beaucoup de questions restent donc encore aujourd’hui sans réponse. En revanche, les évolutions positives constatées sur le dossier du bisphénol A depuis l’adoption de la proposition de loi sénatoriale de M. Yvon Collin démontrent toute l’utilité pour le Parlement de jouer pleinement son rôle sur ces sujets.

Le point sur le bisphénol A depuis l’adoption de la loi du 30 juin 2010

La loi du 30 juin 2010 a suspendu la fabrication, l’importation, l’exportation et la mise sur le marché de biberons produits à base de bisphénol A jusqu’à l’adoption par l’ANSES d’un avis motivé autorisant de nouveau ces opérations.

Les autorités françaises ont également adressé à la Commission une note relative à l’étiquetage des matériaux en matière plastique produits à base de bisphénol A destinés à entrer en contact avec les denrées alimentaires, afin qu’une réflexion soit menée sur les modalités spécifiques d’étiquetage des objets en plastique.

Le ministère chargé de la santé a rédigé deux plaquettes d’information, l’une sur le bisphénol A, l’autre sur le lait maternel, dressant une liste les bonnes pratiques pour éviter l’exposition au bisphénol A pendant la grossesse et les premiers mois de l’enfant ainsi que les précautions à respecter concernant l’allaitement. Ces plaquettes destinées aux jeunes mamans sont en principe diffusées depuis le début de l’année.

Enfin au niveau européen, le 25 novembre 2010, un amendement à la directive 2002/72/CE relative aux matériaux et objets en matière plastique destinés à entrer au contact des denrées alimentaires a été adopté. Cet amendement prévoit l’interdiction d’utiliser le bisphénol A dans les biberons en plastique à partir du 1er mars 2011, puis l’interdiction de mise sur le marché et l’importation au 1er juin 2011.

B. UNE PRISE DE CONSCIENCE NÉCESSAIRE

Le principe de précaution peut être invoqué quand une intervention urgente face à un possible danger pour la santé humaine, animale ou végétale, ou pour la protection de l’environnement est nécessaire dans le cas où les données scientifiques ne permettent pas une évaluation complète du risque. Il doit ainsi permettre d’empêcher la distribution ou même de retirer du marché des produits susceptibles d’être dangereux pour la santé.

Rappelons à cet égard que l’article 36 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne prévoit que le principe de libre circulation des marchandises et de non-restriction des importations ne fait pas obstacle aux interdictions ou restrictions d’importation, d’exportation ou de transit, justifiées par des raisons de protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou de préservation des végétaux. Certains textes spécifiques, comme le règlement n° 178/2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, prévoient en outre la possibilité pour les Etats membres de prendre toutes mesures provisoires nécessaires pour assurer le niveau élevé de protection de la santé qui doit prévaloir au sein de l’Union européenne, dans l’attente d’une évaluation plus complète du risque.

Ainsi, selon la Commission européenne, le principe de précaution peut être invoqué lorsque les effets potentiellement dangereux d’un phénomène, d’un produit ou d’un procédé ont été identifiés par le biais d’une évaluation scientifique et objective, mais que cette évaluation ne permet pas de déterminer le risque avec suffisamment de certitude. Le recours au principe de précaution s’inscrit donc pleinement dans le cadre général de la gestion du risque par les pouvoirs publics : c’est exactement à cette exigence d’action et de décision que répond la présente proposition de loi.

Votre rapporteur est conscient que les mesures à prendre doivent non seulement servir l’objectif de protéger la santé de nos concitoyens mais également qu’elles doivent être justifiées et proportionnées. Du point de la justification, les éléments mis en évidence par le présent rapport, voire l’absence de donnée tangible, parlent d’eux-mêmes. En termes de proportionnalité, il est clair que l’interdiction des produits visés dans la proposition de loi pose le problème de la faisabilité technique d’une substitution. Si, dans le cas des phtalates, les experts semblent considérer que la mise sur le marché, à court terme, de produits de substitution ayant les mêmes propriétés de résistance et de flexibilité n’est pas réaliste en particulier dans le secteur médical, il est inexact d’affirmer que les solutions de rechange n’existent pas. L’INRS cite à cet égard d’autres plastifiants comme l’adipate de di-2-éthylhexyle, les phosphates d’alkyle-aryle, les trimellitates de triakyle, les polyesthers polymérisés. Votre rapporteur considère toutefois que ces produits de substitution doivent impérativement faire la preuve de leur innocuité et de leur efficacité pour être valablement retenus.

Il en va de même pour les parabènes dans le secteur cosmétique, puisque de nombreux produits sans conservateur ou, du moins, ne contenant pas certains d’entre eux (parabène, phénoxyéthanol) sont aujourd’hui mis sur le marché, qu’ils se réclament ou non du label « agriculture biologique ». Une enquête de surveillance du marché des produits cosmétiques labellisés « bio » et revendiquant l’absence de tout conservateur ou de certains d’entre eux a été lancée en 2008 par la DGCCRF et l’AFSSAPS dont les résultats, parus en mars 2009, ont été jugés satisfaisants au plan de la qualité microbiologique. Des traces de conservateurs ont certes pu être décelées dans ces produits, mais les deux services ont convenu qu’il était vraisemblable que leur présence résulte de leur utilisation dans les matières premières, et notamment celles d’origine végétale, et non de la volonté des fabricants de les y introduire en trompant ainsi sciemment le consommateur.

Par ailleurs, s’il existe des marges de discussion sur le principe d’une interdiction totale dans tous les produits de toutes les substances chimiques visées dans la présente proposition de loi ainsi que sur les modalités de mise en œuvre de cette interdiction, on ne peut aujourd’hui rester inactif face à un danger potentiel. Nos concitoyens, alertés par de multiples sources d’informations, inquiets et, il faut le dire, désormais méfiants vis-à-vis des décisions publiques qui sont prises en matière de sécurité sanitaire, doivent être rassurés. Ils attendent de la Nation qu’elle les protège effectivement et préventivement contre les risques. Peut-on encore décevoir leurs attentes ?

TRAVAUX DE LA COMMISSION

I.- DISCUSSION GÉNÉRALE

La Commission examine le présent projet de loi au cours de sa séance du mardi 5 avril 2011.

M. Yvan Lachaud, rapporteur. Vous avez tous en mémoire nos débats de l’an dernier sur la proposition de loi sénatoriale tendant à interdire la présence de bisphénol A (BPA) dans les plastiques alimentaires, proposition qui a abouti à la loi du 30 juin 2010 suspendant la fabrication et la commercialisation des biberons produits à base de BPA jusqu’à ce qu’une nouvelle expertise de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) les autorise de nouveau.

Cette initiative parlementaire, unanimement saluée, a contribué à faire évoluer le débat au niveau européen, puisqu’une nouvelle directive en date du 28 janvier 2011 a modifié la réglementation relative aux matériaux et objets en matière plastique entrant en contact avec les aliments. Tout comme la loi du 30 juin 2010, elle vise à interdire l’utilisation du BPA dans les biberons en plastique jusqu’à ce que l’on dispose de données scientifiques complémentaires confirmant les effets toxiques de cette substance – changements biochimiques dans le cerveau, effets immuno-modulateurs et prédisposition accrue aux tumeurs du sein, en particulier. Cette interdiction est effective pour tous les États membres de l’Union européenne depuis le 1er mars.

C’est à la même démarche que tend ce texte. Le BPA n’est en effet pas la seule substance chimique potentiellement dangereuse dans notre environnement quotidien : de nombreux autres composés présents dans les produits de grande consommation rendent possible une contamination par toutes sortes de voies – ingestion, inhalation ou contact cutané.

Le texte distingue trois familles de produits. Il s’agit d’abord des phtalates, qui servent essentiellement de plastifiants dans le PVC, dans les vernis, colles et laques, dans l’encre ou le caoutchouc, mais sont aussi utilisés dans l’industrie papetière, dans celles du bois et des matériaux de construction, dans l’industrie automobile, et entrent dans la composition des parfums, voire, pour certains, d’additifs, de filtres de cigarettes et même de sucettes !

Des interdictions ponctuelles – dans certains produits – et des restrictions quant à la concentration autorisée ont été décidées. Trois phtalates seront en outre interdits à partir de 2015 dans le cadre du nouveau règlement européen REACH sur les produits chimiques. Les fabricants pourront néanmoins demander des autorisations pour des usages spécifiques.

La deuxième famille de produits visée est celle des parabènes, conservateurs que l’on retrouve surtout dans les cosmétiques, mais aussi dans l’industrie alimentaire et dans les produits du tabac. Ils ne font actuellement l’objet d’aucune interdiction, mais sont au centre de la polémique. Le Danemark vient d’ailleurs d’interdire provisoirement les produits cosmétiques contenant du propylparabène et du butylparabène destinés aux enfants de moins de trois ans. Des études sur la présence de parabènes dans les médicaments sont en cours, mais la balance bénéfices-risques n’est pas la même pour les produits de santé. J’ajoute qu’il semble que pour les cosmétiques, des produits de substitution puissent être utilisés.

Enfin, les alkylphénols sont des agents surfactants qui sont les principaux agents actifs des détergents et désinfectants industriels, ménagers ou médicaux. Ils font l’objet de restrictions quant à leur concentration en raison de leur toxicité pour le milieu naturel et de leur bio-persistance dans l’environnement.

Classées CMR, c’est-à-dire cancérigènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction, de catégories 1 à 3, certaines de ces substances suscitent aujourd’hui des interrogations quant à leurs effets sur notre organisme, notamment comme perturbateurs du système endocrinien. C’est la raison pour laquelle le Parlement a, dans la loi du 30 juin 2010, demandé un rapport sur le rôle de ces perturbateurs endocriniens dans le cadre des travaux de l’INSERM. Ceux-ci n’étant pas encore achevés, c’est un rapport d’étape que le Gouvernement a déposé sur le bureau des assemblées le 11 mars dernier. Il est donc difficile d’en tirer des conclusions définitives, mais il confirme la nécessité de la prudence vis-à-vis de ces substances.

La proposition de loi ne remet évidemment pas en cause le travail accompli tant par nos agences sanitaires, notamment l’ANSES et l’AFSSAPS, que par l’Agence européenne de sécurité sanitaire. Le Gouvernement a depuis longtemps chargé les premières de se pencher, chacune dans son champ de compétence, sur le rôle des perturbateurs endocriniens. Nous avons auditionné le directeur général de l’ANSES, qui nous a exposé son programme de travail en matière de recherche de nouvelles méthodologies d’évaluation des risques et d’identification des substitutions possibles. Mais le champ est vaste et les expertises exigent du temps. En outre, au niveau européen, la réactivité avec laquelle les demandes d’évaluations complémentaires sont traitées par les industriels laisse parfois à désirer. Les parabènes font ainsi l’objet de demandes d’expertise répétées depuis le début des années 2000.

Le législateur doit-il pour autant attendre, alors qu’il est tout à fait à sa portée, si ce n’est d’interdire du jour au lendemain, du moins de suspendre la production et la commercialisation des produits contenant des substances potentiellement dangereuses ?

Si l’utilisation des phtalates, parabènes et alkylphénols est bien autorisée sur le marché européen, leurs effets ne sont pas totalement connus, de même que leur interaction. L’étude de leur toxicité repose en effet encore sur la définition de doses journalières admissibles, alors que d’éventuels effets « cocktail » ou ceux de petites doses régulières restent peu étudiés.

Quant aux voies de contamination, les études sur les risques liés à l’ingestion sont désormais bien documentées et ont permis des interdictions totales ou partielles, comme celles des phtalates dans les jouets. D’autres voies restent cependant inexplorées. Nous ne disposons par exemple que de peu d’éléments sur l’inhalation des phtalates, que ce soit dans l’air ambiant ou par le biais de poussières.

L’objectif de ce texte est donc d’interdire l’utilisation de ces substances chimiques par précaution. S’il est un domaine où le principe de précaution doit s’appliquer, c’est bien en effet la santé humaine. Trop d’exemples récents montrent, hélas, que des dégâts surviennent immanquablement lorsque les précautions élémentaires ne sont pas prises en amont.

La présente proposition de loi est certes radicale dans ses effets, puisque son champ d’application couvre des familles entières de produits chimiques dans toutes leurs utilisations. Son adoption définitive en l’état susciterait de nombreuses difficultés, en particulier pour la filière plastique, dont j’ai reçu les représentants. Il faudrait donc l’affiner, afin – par exemple – de retenir non des familles de substances, mais seulement les composés les plus dangereux ou pour lesquels aucune restriction n’est prévue à l’heure actuelle. Il conviendrait sans doute également de préciser les utilisations et les produits dans lesquels ces substances devraient en priorité être interdites, et de ménager un délai permettant de mettre en œuvre des substitutions avant son entrée en vigueur.

Je travaille en ce sens et pense resserrer le dispositif, en particulier en le concentrant sur certains parabènes présents dans les cosmétiques. J’espère pouvoir vous présenter des propositions concrètes lors de notre réunion au titre de l’article 88.

Pour l’heure, je souhaite que le débat ait lieu sur l’ensemble des substances visées dans le texte. Je ne vous proposerai donc que deux amendements de forme, et reste ouvert à toutes vos suggestions dans la perspective de l’examen en séance publique.

Mon principal objectif est que le débat ait lieu. Le ministre chargé de la santé doit nous apporter des réponses précises sur les expertises en cours et sur les actions qu’il entend mener au niveau de l’Union européenne. J’attends qu’il nous explique par exemple ce que fait la France quand le Danemark, lui, interdit certains parabènes dans les produits cosmétiques pour enfants.

Parce que ces questions importantes pour la santé de nos concitoyens méritent d’être débattues dans l’hémicycle, je vous demande de bien vouloir adopter cette proposition de loi.

M. Paul Jeanneteau. Si la préoccupation qui le sous-tend – la protection de la santé de nos concitoyens – est louable, ce texte ne peut pour autant être voté en l’état. Tout d’abord, il serait d’application particulièrement brutale. La France peut difficilement être la seule dans l’Union européenne à interdire de manière drastique la fabrication, l’importation, la vente et l’offre – c’est-à-dire la distribution à titre gratuit – de ces trois catégories de produits. Nous ne pouvons être le petit village gaulois qui résiste seul, encore et toujours, à l’envahisseur ! Du reste, nous ne saurions nous affranchir du jour au lendemain de tous ces produits utilisés à très petites doses tout au long de la vie quotidienne. J’appelle enfin votre attention, puisque nous parlions d’emploi tout à l’heure, sur les enjeux économiques.

Nous sommes bien sûr favorables au remplacement de certains produits par des produits « bio », mais cela ne peut se faire de manière aussi brutale.

Si chacun d’entre nous attache une grande importance à la maîtrise des risques liés aux substances chimiques et au principe de précaution, ce texte interfère d’autre part avec de nombreux travaux en cours. Plusieurs interdictions ont en effet été décidées, tandis que des travaux étaient lancés sur les perturbateurs endocriniens. Des programmes de recherche sont ainsi conduits par l’Agence nationale de la recherche ou par le ministère de l’écologie, avec le programme national de recherche sur les perturbateurs endocriniens. Les agences de sécurité sanitaire et l’INSERM ont également été chargées d’évaluer les risques des substances suspectées d’agir sur le système endocrinien. Le Gouvernement a d’ailleurs transmis un rapport préliminaire au Parlement au mois de mars. Les résultats définitifs de ces expertises, qui devraient être connus dans l’année, permettront d’ajuster et de compléter les actions déjà entreprises. Mieux vaut donc attendre avant de légiférer.

Interdire de façon absolue l’utilisation de ces trois catégories de molécules suppose en outre de trouver des substances de substitution qui ne présentent pas de risques pour la santé. Cela exige du temps, toute généralisation de ces substituts devant être précédée d’un examen attentif de leur balance bénéfices-risques pour les différents usages concernés.

Comme le reconnaît le rapport, l’article unique « vise, d’une manière générale, les trois catégories de substances chimiques susmentionnées sans opérer de distinction en leur sein ni en fonction des classements de toxicité établis par l’Union européenne. » Cela me paraît d’autant plus surprenant que certains produits concernés sont déjà interdits. Ainsi, l’utilisation d’un certain nombre de phtalates dans les cosmétiques est proscrite au niveau européen. Par ailleurs, en visant tous les phtalates, le texte ne prend pas en compte la spécificité des produits de santé susceptibles d’être concernés. Faut-il rappeler, enfin, que 90 % des phtalates produits en Europe sont utilisés comme plastifiants pour rendre les PVC plus souples et plus flexibles ? Il n’y a pas là de risque pour la santé.

Les parabènes sont pour leur part utilisés dans certains médicaments. Des études ont fait état d’un risque d’effets cancérigènes, mais d’autres qui sont en cours à l’initiative de l’AFSSAPS tendent pour le moment à démontrer que celui-ci n’est pas avéré. Attendons donc des conclusions définitives pour prendre éventuellement la décision d’interdire les parabènes aux doses où ils sont utilisés dans les médicaments.

Les alkylphénols, enfin, sont utilisés pour fabriquer des détergents industriels ou des émulsifiants – donc rarement mis sur le marché grand public. La réglementation européenne interdit de fait, et ce depuis plusieurs années, l’utilisation de deux d’entre eux, le nonylphénol et l’éthoxylate de nonylphénol, qui ne peuvent être utilisés à plus de 0,1 % dans de nombreux usages.

Il apparaît néanmoins « nécessaire », indique l’exposé des motifs, « de réduire l’exposition de la population à ces molécules, au nom du principe de précaution, dès aujourd’hui, sans attendre les résultats d’études à venir. » Si tel est le principe, interdisons immédiatement les produits que nous savons extrêmement dangereux et particulièrement cancérigènes, comme les cigarettes !

Mme Michèle Delaunay. Je suis entièrement d’accord avec M. Jeanneteau : peu de produits dits dangereux atteignent le niveau de toxicité d’une année de tabagisme, et nous continuons néanmoins à produire et à vendre du tabac ! Cela pourrait nous inciter à aller plus loin dans la réflexion.

Ce texte traite de trois types de produits assez différents, tant dans leur mode d’utilisation que dans leur toxicité. Mieux vaudrait donc les distinguer pour envisager une gradation de la mesure.

Conclure à la toxicité d’un produit suppose le plus souvent une longue durée d’utilisation. Le risque est par ailleurs plus sérieux pour les enfants, dont le mécanisme de reproduction cellulaire est beaucoup plus rapide que celui des adultes. Par précaution, nous pouvons donc envisager de légiférer – comme nous l’avons fait pour le BPA dans les biberons – sur l’usage de ces produits pour les enfants. Je pense en particulier aux parabènes dans les crèmes et produits de soins qui leur sont destinés. Il me paraît en revanche prématuré de prendre une mesure d’interdiction générale.

M. Gérard Bapt. Peut-on se procurer le rapport intermédiaire qui a été remis au Parlement le 11 mars ?

M. le président Pierre Méhaignerie. Il est à la distribution.

M. Gérard Bapt. Cette proposition de loi a le mérite de remettre au cœur du débat la question des perturbateurs endocriniens, qui nous impose de reconsidérer l’approche traditionnelle de la notion de toxicité, fondée sur la prise en considération d’une dose mesurable produisant des effets immédiats. Avec les perturbateurs endocriniens, nous observons en effet que des doses très faibles, voire infinitésimales, peuvent induire des effets très retardés, qui peuvent en outre se cumuler, en un effet « cocktail » de plusieurs substances.

Je regrette donc que seuls les biberons aient été concernés par la loi du 30 juin 2010, la majorité ayant voté contre l’extension de l’interdiction de l’utilisation du bisphénol A à l’ensemble des contenants alimentaires, en particulier à ceux destinés aux femmes enceintes et aux bébés. Ce texte réglerait évidemment le problème… Cela étant, les contenants alimentaires ne représentent qu’une faible part des applications du bisphénol A. Est-il utile d’interdire l’usage de celui-ci dans les pare-chocs des voitures ? La question mérite au moins d’être posée.

En ce qui concerne les phtalates, des mesures d’interdiction ont déjà été prises à l’échelle européenne pour certaines catégories. Se pose aujourd’hui le problème de l’utilisation d’autres catégories, notamment les DEHP, dans les dispositifs médicaux – poches, tubulures. Il semble cependant qu’elles présentent un intérêt particulier pour la conservation. Pour le moment, l’INSERM ne considère donc pas que les risques soient supérieurs aux avantages.

J’observe par ailleurs que certains perturbateurs endocriniens n’appartiennent pas aux catégories de produits visées par le texte.

Certains de nos collègues ont déposé un amendement proposant d’étendre l’interdiction d’utilisation posée par le texte au bisphénol A. Cette interdiction générale me semble inadaptée. Je vous propose plutôt de déposer à nouveau, lors de notre réunion au titre de l’article 88, l’amendement repoussé lors de la discussion de la loi du 30 juin 2010, qui étendait la mesure à l’ensemble des contenants alimentaires. J’attire votre attention sur le fait que l’argument de l’inexistence de substituts pour l’industrie est tombé, puisque Nestlé et Danone assurent désormais que leurs petits pots pour bébés ne contiennent plus de bisphénol A. Peut-être la majorité acceptera-t-elle donc de revoir sa position.

Permettez-moi enfin de vous faire part des résultats d’une étude que présentait hier une équipe du CHU de Montpellier – à laquelle appartient notamment le Professeur Sultan – sur le caractère transgénérationnel des conséquences du distilbène chez l’homme, et non plus seulement chez le rat. Le distilbène est une molécule très proche du bisphénol – il semble même que l’on ait hésité entre les deux pour la prévention des fausses couches. Cette étude met en évidence des troubles neuro-psychiques et des dysgénésies sexuelles 8 à 40 fois plus fréquents que la moyenne chez les petits-enfants des femmes ayant pris du distilbène durant leur grossesse. Nous avons désormais suffisamment d’arguments scientifiques, me semble-t-il, pour mettre un terme à l’exposition à cette substance des femmes enceintes et des jeunes au stade de la puberté. Saisissons donc l’occasion que nous offre ce texte !

Mme Martine Billard. Sur la forme, on peut regretter que cette proposition de loi soit appelée à évoluer notablement d’ici à sa discussion en séance publique. Nous souhaitons cependant, nous aussi, que ce débat ait lieu. En effet, si une nouvelle loi de santé publique doit en principe nous être soumise avant la fin de la législature, nous n’avons aucune certitude qu’elle le sera. Or il ne nous est pas permis de discuter des questions de santé publique lors du débat sur le PLFSS. Autant dire que nous avons rarement l’occasion de traiter de santé publique dans cette Assemblée !

S’agissant du principe de précaution et de la comparaison avec le tabac, je rappelle qu’une loi a été votée pour interdire de fumer dans les lieux publics et que des messages d’éducation sanitaire figurent sur les paquets de cigarettes. Les fumeurs agissent donc en connaissance de cause. Il y a là une différence fondamentale avec les molécules dont nous parlons, dont nous connaissons mal les effets, notamment cumulatifs ou en cas d’interaction.

Reconnaissons d’autre part que la directive REACH est moins ambitieuse que ce qui était prévu au départ. Or les études en cours font ressurgir de pénibles souvenirs. Selon le centre français d’information sur les phtalates, aucun cas de dommage à la santé ne serait ainsi connu à ce jour. Cela me rappelle tragiquement le comité amiante. De grâce, ne recommençons pas les mêmes erreurs qu’avec l’amiante ou avec les éthers de glycol ! Dès lors que l’on ne maîtrise pas les effets sanitaires de ces molécules, nous devons appliquer le principe de précaution. L’explosion des allergies, des cancers et d’un certain nombre d’autres maladies devrait du reste nous alerter. Du point de vue de la santé publique comme du point de vue financier, la meilleure politique consiste donc à enrayer cette progression dont on peut raisonnablement penser qu’elle trouve son origine dans l’utilisation de certaines de ces molécules.

Bon nombre de ces substances peuvent être remplacées, ou bien on peut éviter d’utiliser les produits qui en contiennent – ainsi les contenants alimentaires comportant du bisphénol ou les shampooings comportant des parabènes. Le problème est que les consommateurs ne sont pas toujours informés et qu’ils n’ont pas nécessairement les moyens d’acheter des produits alternatifs – souvent plus chers que ceux qui contiennent ces substances potentiellement dangereuses. Il en résulte une inégalité entre nos concitoyens.

Le groupe GDR est donc favorable à ce qu’un débat ait lieu sur ce sujet dans l’hémicycle, quelle que soit la rédaction définitive de cette proposition de loi – elle semble, en effet, appelée à beaucoup évoluer. Il faut absolument que nous avancions plus vite qu’aujourd’hui. Plus nous attendons, plus nos concitoyens seront exposés à des maladies, et plus le coût sera élevé pour les finances publiques.

M. Jean Mallot. On peut se demander si la rédaction actuelle de cette proposition – « La fabrication, l’importation, la vente ou l’offre de produits contenant des phtalates, des parabènes ou des alkylphénols sont interdites » – correspond vraiment aux intentions affichées de ses auteurs.

Si le rapporteur a invoqué la notion de prudence, l’exposé des motifs fait en effet référence, à plusieurs reprises, au principe de précaution. Or, aux termes de l’article 5 de la Charte de l’environnement, « lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incertaine en l’état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d’attributions, à la mise en œuvre de procédures d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ».

Passons sur le fait que la santé n’y est pas mentionnée : cette question a fait l’objet de travaux au sein du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC), à l’issue desquels nous sommes convenus qu’il n’était pas utile d’étendre le champ de l’article 5, les atteintes à l’environnement pouvant induire des atteintes à la santé. Je m’interroge, en revanche, sur le caractère provisoire et proportionné des mesures proposées. Si l’on peut admettre, au nom du principe de précaution, l’interdiction de certaines substances quand des études scientifiques laissent penser qu’elles pourraient avoir des effets nocifs, une mesure générale d’interdiction ne serait ni provisoire, ni proportionnée.

M. Michel Issindou. Il est sans doute prudent de remplacer toutes ces substances chaque fois que c’est possible, mais faisons attention à ne pas tout mélanger. L’exposé des motifs est un véritable fourre-tout, qui mêle les emballages alimentaires, les chaussures, les huiles utilisées par les voitures…, donnant l’impression que tout ce qui est chimique peut être dangereux ! Il serait à mon sens souhaitable d’éviter un amalgame entre les produits alimentaires, qui requièrent une attention particulière, et le reste : si les tuyaux d’échappement des automobiles sont polluants, ce n’est pas du fait de leur composition.

Nous avons longuement débattu du principe de précaution, force étant de constater qu’il a conduit à certains excès – même si des exemples récents, tels que ceux du Mediator et de l’amiante, conduisent à modérer ce jugement. Il ne faut pas oublier que vivre finit par tuer, et que nous risquons de compliquer grandement notre existence en appliquant trop rigoureusement ce principe. Les scientifiques identifient des risques dans tous les domaines, ce qui fait avancer la santé et le progrès en général, mais on peut se demander jusqu’où il faut aller dans la prise en compte de ces risques. Cette proposition de loi est assez inquiétante à cet égard.

Mme Edwige Antier. M’étant battue pour qu’on élimine le bisphénol A des biberons, je porte un grand intérêt à cette proposition de loi : il faut éviter l’usage des produits qui menacent la santé. Je pense, en particulier, à la féminisation de la population et au développement de plus en plus précoce de la poitrine chez les petites filles – évolution que ma pratique médicale m’a permis de constater d’une génération à l’autre.

C’est pourquoi je regrette qu’on ne remplisse plus les carnets de santé : ces documents, rendus obligatoires dans les années 1980 et admirés jusqu’aux États-Unis, nous permettraient un suivi de la gynécomastie et de la taille des sexes des petits garçons. Les industriels nous opposant le manque d’études scientifiques, pourquoi ne pas utiliser cet outil ? Nous pourrions ainsi éviter de lancer de nouvelles études, lesquelles sont fort onéreuses. Il faudrait demander aux conseils généraux d’exiger à nouveau ces carnets de santé.

On constate, par ailleurs, que les parabènes sont souvent utilisés dans des cosmétiques dont l’usage est loin d’être toujours indispensable : une meilleure information de la population permettrait certainement de limiter l’usage de crèmes en tous genres.

Si je partage donc la préoccupation qui a inspiré cette proposition, je vois mal en revanche comment nous pourrions adopter une mesure d’interdiction générale en l’absence de législation au niveau européen. À quoi bon interdire en France des produits dont nos partenaires européens continueraient de nous inonder ? Mieux vaudrait demander au Parlement européen d’adopter d’une directive.

M. le président Pierre Méhaignerie. De l’avis général, il paraît nécessaire d’ouvrir le débat, monsieur le rapporteur, mais aussi de nous montrer prudents, de telles mesures supposant à la fois l’existence de produits de substitution et une législation similaire à l’échelle européenne.

M. le rapporteur. Je répète que je défendrai un amendement tendant à remplacer l’interdiction de commercialisation par une simple mesure de suspension. Nous pouvons nous le permettre dans la mesure où l’industrie des cosmétiques, par exemple, dispose déjà de nombreuses substances de substitution, et cela nous donnera toute latitude d’examiner les problèmes produit par produit comme le suggère Michèle Delaunay. En tout état de cause, les commandes de ces produits à risque se multipliant, de même que ces produits eux-mêmes, le devoir de précaution nous impose de traiter le sujet. Et la suspension de la commercialisation n’est qu’une mesure provisoire, monsieur Mallot.

Nos discussions avec l’Agence de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) font ressortir des éléments quelque peu différents de ce que vous indiquez, monsieur Jeanneteau : 50 substances font aujourd’hui l’objet d’études ; si l’on peut penser que certaines d’entre elles apparaîtront dangereuses, on ne peut pas espérer de conclusion rapide, ces études étant menées sur des décennies.

Au niveau européen, trois phtalates font l’objet d’une interdiction à terme dans le cadre du règlement « Reach » : les fabricants doivent obtenir, jusqu’en 2013, une autorisation spécifique pour continuer à les utiliser, et il leur revient de démontrer qu’ils recherchent des solutions de substitution.

Si les Danois ont décidé de suspendre l’utilisation de deux parabènes, ce n’est pas sans raison. Je rappelle, en outre, que l’agence européenne des produits chimiques s’est déjà prononcée sur trois parabènes – un quatrième devrait être visé très rapidement, puis deux autres. Le Parlement français a le droit, et même le devoir, de s’inscrire dans cette démarche en adoptant des mesures de suspension, et en s’intéressant à la question de la substitution des produits.

Nous avons beaucoup discuté des poches de sang avec les professionnels, monsieur Bapt. Les risques apparaissent aujourd’hui moins importants que les bénéfices. Il faut savoir raison garder : sans avoir peur du débat, il convient peut-être de sérier les difficultés.

Quant à l’aspect de « fourre-tout », monsieur Issindou, il est dû au fait que l’exposition à ces substances doit impérativement être mesurée sous tous ses aspects : on est en contact avec ces produits sous de multiples formes – en conduisant son véhicule, en manipulant des câbles électriques, en utilisant des cosmétiques…

Les populations sur qui pèsent les plus fortes menaces étant les femmes enceintes, les bébés et les enfants, on peut envisager d’approfondir en priorité l’étude de ces cas mais, même si nous ne décidons pas aujourd’hui une interdiction systématique – je vous rejoins sur cette position, bien qu’elle soit un peu en retrait sur la rédaction actuelle de la proposition de loi –, nous ne pouvons faire l’économie du débat.

II.- EXAMEN DE L’ARTICLE UNIQUE

Article unique

Interdiction de l’utilisation des phtalates, des parabènes et des alkylphénols

Le présent article prévoit l’interdiction de la fabrication, mais également de l’importation sur le territoire national de tout produit contenant des phtalates, des parabènes ou des alkylphénols, ainsi que la vente ou l’offre (c’est-à-dire la distribution à titre gratuit) de ces produits. Le dispositif vise, d’une manière générale, les trois catégories de substances chimiques susmentionnées sans opérer de distinction en leur sein ni en fonction des classements de toxicité établis par l’Union européenne.

La présentation de ces trois familles de substances chimiques et de leurs effets potentiels sur la santé publique fait l’objet de la première partie du présent rapport. Rappelons simplement que ces substances ont pour point commun d’être des perturbateurs endocriniens. Compte tenu des risques potentiels qu’elles présentent, en particulier pour les fonctions reproductives de l’homme, il est proposé, à titre préventif, de supprimer toute utilisation de celles-ci dans les biens de consommation.

Votre rapporteur vous propose néanmoins d’amender le dispositif, en cohérence avec les dispositions adoptées dans le cadre de la loi n° 2010-729 tendant à suspendre la commercialisation de biberons produits à base de bisphénol A, en visant également l’exportation de ces produits et en remplaçant les notions de vente et d’offre par celle, plus usuelle, de « mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux ».

Il propose également, dans le but de renforcer la solidité juridique des dispositions du présent article et de les rendre plus conformes aux règles européennes applicables aux mesures provisoires applicables dans les cas où l’existence de possibles effets nocifs sur la santé nécessite une évaluation plus complète du risque, votre rapporteur vous propose de préciser que ces dispositions s’appliqueront jusqu’à la publication, par les agences sanitaires compétentes, d’expertises attestant de l’innocuité de ces produits à l’égard de la santé publique. Il s’agirait donc de prévoir, sur le modèle de la loi précitée, une « suspension jusqu’à preuve scientifique contraire », et non une interdiction définitive, qui ne laisserait aucune alternative en cas de nouvelle évaluation voire n’inciterait pas à la production de telles évaluations. Or, comme indiqué en introduction, les connaissances sont aujourd’hui insuffisantes et la production d’expertises scientifiques supplémentaires est indispensable pour mieux comprendre l’action des perturbateurs endocriniens sur la santé humaine et, éventuellement, s’en prémunir.

*

La Commission rejette l’amendement rédactionnel AS 3 du rapporteur.

Contre l’avis du rapporteur, elle rejette ensuite l’amendement AS 2 de M. Olivier Jardé.

Puis elle examine l’amendement AS 4 du rapporteur.

M. le rapporteur. Comme je l’indiquais tout à l’heure, il s’agit de remplacer l’interdiction de commercialisation par une simple suspension. Cela permettra de traiter ce dossier dans une plus grande quiétude.

La Commission rejette l’amendement.

Elle rejette ensuite l’amendement AS 1 de M. Olivier Jardé.

Puis, la Commission rejette l’ensemble de la proposition de loi.

TABLEAU COMPARATIF

___

Texte de la proposition de la loi

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Texte adopté par la Commission

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Proposition de loi visant à interdire l’utilisation des phtalates, des parabènes et des alkylphénols

 
   

Article unique

 

La fabrication, l’importation, la vente ou l’offre de produits contenant des phtalates, des parabènes ou des alkylphénols sont interdites.

 
   

AMENDEMENTS EXAMINÉS PAR LA COMMISSION

Amendement n° AS 1 présenté par M. Olivier Jardé, Mme Véronique Besse, MM. Jean-François Chossy, Georges Colombier, Dominique Dord et Mme Bérengère Poletti

Titre

Après le mot : « parabènes », insérer les mots : « , du bisphénol A ».

Amendement n° AS 2 présenté par M. Olivier Jardé, Mme Véronique Besse, MM. Jean-François Chossy, Georges Colombier, Dominique Dord et Mme Bérengère Poletti

Article unique

Après le mot : « parabènes », insérer les mots : « , du bisphénol A ».

Amendement n° AS 3 présenté par M. Yvan Lachaud, rapporteur

Article unique

Substituer aux mots : « la vente ou l’offre », les mots : « l’exportation et la mise sur le marché à titre onéreux ou gratuit ».

Amendement n° AS 4 présenté par M. Yvan Lachaud, rapporteur

Article unique

Substituer au mot : « interdites », les mots : « suspendues jusqu’à l’adoption, par les agences de sécurité sanitaire compétentes, d’une évaluation des risques et des bénéfices présentés par ces produits attestant de leur innocuité pour la santé publique».

ANNEXES

ANNEXE I :

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Ø Filière plastique : M. Michel Loubry, PlasticsEurope, directeur Europe - région Ouest, M. Benoît Lefebvre, ELIPSO, directeur des Affaires réglementaires, M. Marc Madec, Fédération de la plasturgie, responsable du département HSE et M. Vincent Gagneur, consultant

Ø ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) : M. Marc Mortureux, directeur général, M. Dominique Gombert, directeur de l’évaluation des risques, M. Philippe Juvin, adjoint à la direction des produits réglementés et Mme Alima Marie, directrice de l’information, de la communication et du dialogue avec la Société

ANNEXE 2 :

USAGES DES PHTALATES, PARABÈNES ET ALKYLPHENOLS 
(24)

Synthèse générale des usages

Phtalates

Usages communs

Agent plastifiant pour la synthèse de polymères : PVC…

Agent plastifiant pour la fabrication de peintures, vernis, colles et adhésifs, mastics, laques, encres

Agent plastifiant dans l’industrie du caoutchouc

Agent plastifiant dans la synthèse d’esters ou éthers de cellulose

Utilisé dans l’industrie papetière, du carton

Autres usages dans l’industrie de la photographie, des produits ménagers, des produits phytosanitaires

Utilisé dans la formulation des cosmétiques (présent dans les parfums)

Solvant pour colorants, insecticides, peroxydes et autres composés organiques

Utilisé dans la formulation de revêtements antidérapants

Utilisé dans l’industrie du bois, des matériaux de construction

Utilisé dans l’industrie automobile

Agent plastifiant dans la synthèse de polyuréthanes

Utilisés dans les emballages des lessives grand public

Utilisés dans les jouets, dans des limites de concentrations règlementées

Présents dans les plastiques et adhésifs et pouvant potentiellement se retrouver dans des composants de montres

Usages spécifiques à certains phtalates

Utilisé dans les films alimentaires

Agent plastifiant dans les enduits d’étanchéité

Additif plastifiant dans la fabrication de matériaux céramiques

Utilisé dans la fabrication de produits de consommation tels que gants en vinyle, les bandes auto-adhésives, rubans, pellicules…

Utilisé dans les systèmes catalytiques de polypropylène

Utilisé dans des agents anti-mousses et lubrifiants pour l’industrie textile

Utilisé dans le mélange d’arômes

Utilisé dans les matériaux inhibiteurs de corrosion

Utilisé dans la fabrication des filtres à cigarette

Utilisation dans les emballages alimentaires

Additif dans la poudre noire destinée aux pistolets et fusils

Agent plastifiant et gélifiant dans des produits de consommation tels que des sucettes, des couverts, bouteilles d’eau en plastique, des stylos, des poignées de vélo, des boîtes destinées au four à micro-ondes

Parabènes

Usages communs

Agent conservateur dans les formulations cosmétiques (autobronzant, déodorant, hygiène dentaire et buccale, produits capillaires, produits cosmétiques pour bébé, maquillage, soin pour la peau, produits de rasage et épilatoire, vernis à ongles, gel hydroalcoolique, médicament)

Agent conservateur dans l’industrie alimentaire (sauces salades, mayonnaise, moutardes, sauces épicées, produits lactés surgelés, pâtisseries, œufs de poisson, conserves de poisson, crèmes, gelées, jambons, jus de fruits, sirops, viandes hachées)

Utilisé dans la formulation de vernis, colles et adhésifs, cirages

Agent conservateur dans les produits du tabac (cigarettes, cigares, tabac coupé, en rouleaux et reconstitué)

Conservateur dans la formulation de lessives grand public

Usages spécifiques à certains parabènes

Présent dans les cosmétiques animaliers

Intermédiaire chimique dans la synthèse des « parabens"

Utilisé dans la synthèse de résines polyesters et de polymères à cristaux liquides

Substance aromatisante dans l’industrie alimentaire (plats cuisinés, boissons, graisse et huile, crème glacée et sorbet, produits laitiers, confiseries)

Intermédiaire chimique pour la fabrication de colorants

Inhibiteur de corrosion, antioxydant et émulsifiant

Intermédiaire dans la synthèse de polyesters

Utilisé dans la formulation de deux détachants ménagers

Alkylphénols

Usages communs

Agent conservateur dans l’amidon de blanchisserie, d’adhésifs, de peintures, d’émulsions de cires de parquets, de nettoyants ménagers, dans l’industrie du cuir, dans les composés de polissage, les joints de feutre dans l’automobile, dans les matériaux de construction, dans les pâtes et papiers, dans l’industrie des textiles, dans les plâtres chirurgicaux, dans l’industrie du bois

Principe actif dans la formulation de désinfectants industriels ou ménagers (sprays, lingettes), pour le secteur médical

Utilisé dans la synthèse d’un produit utilisé dans l’industrie de la photographie

Utilisé dans la synthèse chimique de polycarbonates, résines phénoliques, résines époxy

Les dérivés du phénol présents dans les résines et colorants pourraient se retrouver dans les composants de montres.

Usages spécifiques à certains alkylphénols

Intermédiaire chimique pour la fabrication de certains retardateurs de flamme, la fabrication de teintures, la fabrication de résines synthétiques, dans l’industrie du caoutchouc, des lubrifiants,

Utilisé dans l’industrie des cosmétiques

Additif alimentaire pour le traitement en surface des agrumes

Utilisé dans les emballages alimentaires

Biocide dans les fluides de coupe

Utilisé dans la synthèse de colorants

Utilisé dans la synthèse de substances actives de produits phytosanitaires (insecticides, herbicides)

Utilisé dans la fabrication de colles et mastics pour le bâtiment

Intermédiaire dans la production de trinonylphénol phosphite,

Utilisé dans la composition de pyjamas pour enfants, de jouets, de peintures, de produits de nettoyage domestique, de bouteilles d’eau en plastique, de bouteilles de lait

Utilisé dans l’industrie d’extraction de métaux,

Utilisé dans la fabrication des éthoxylates octylphénoliques utilisés comme émulsifiants, matières adjuvantes pour les textiles et cuir, stabilisant pour plastique, dans les produits cosmétiques et shampoing, dans certains produits nettoyants ménagers

Usages détaillés par substance

Phtalates

 Dipropylphtalate 

– Agent plastifiant pour la synthèse de PVC flexible

– Agent plastifiant dans la synthèse d’esters ou éthers de cellulose

– Agent plastifiant de vernis, peintures, adhésifs

 Diisononylphtalate (DINP)

– Agent plastifiant pour la synthèse de PVC flexible

– Agent plastifiant dans les formulations d’articles divers en caoutchouc, adhésif et colles, d’encres, de peintures, de laques, de mastic, lubrifiants, vêtements en cuir et skaï

 Butylbenzylphtalate (BBP) 

– Agent plastifiant dans les produits à base de polymères et principalement le PVC

– Agent plastifiant pour la formulation d’adhésifs destinés aux papiers, emballages, bois, matériaux construction, industrie auto

– Utilisé dans les mastics en mousse polyuréthane

– Agent plastifiant dans les peintures

– Utilisé dans des laques

– Utilisé dans le secteur du caoutchouc

– Utilisé dans les films alimentaires

– Agent plastifiant dans les enduits d’étanchéité

 Di-(2-ethylhexyl) phtalate (DEHP)

– Agent plastifiant dans les produits à base de polymères et principalement le PVC

– Agent plastifiant dans la synthèse de caoutchouc synthétique

– Additif dans la formulation des encres utilisées dans l’impression, des peintures,

– Solvant dans la formulation des laques, dans la fabrication des mastics

– Agent anti-mousse dans l’industrie papetière

– Utilisé dans l’industrie des adhésifs

– Autres usages dans l’industrie de la photographie, des produits ménagers, des produits phytosanitaires

– Additif plastifiant dans la fabrication de matériaux céramiques

Le DEHP se retrouve dans des pochettes plastiques transparentes, des agendas, des fils de fer plastifié, des liens d’attache, des grillages et panneaux rigides.

 Diisodecylphtalate (DIDP)

– Agent plastifiant dans les PVC

– Agent assouplissant dans la formulation des encres

– Utilisé dans la formulation des peintures

– Solvant dans la formulation de laques

– Utilisé dans la fabrication des mastics

– Utilisé dans la formulation des cosmétiques (présent dans les parfums)

– Utilisé dans la fabrication de produits de consommation tels que gants en vinyle, les bandes auto-adhésives, rubans, pellicules…

 Di-n-butyl phtalate (DBP)

– Agent plastifiant dans les produits à base de polymères (principalement le PVC, l’acétate de vinyle et la cellulose), des résines et dans certains caoutchoucs (néoprène, caoutchouc nitrile)

– Agent plastifiant dans la formulation des peintures, des vernis

– Agent plastifiant dans les colles et adhésifs, les mastics d’étanchéité

– Solvant pour colorants, insecticides, peroxydes et autres composés organiques

– Utilisé dans les systèmes catalytiques de polypropylène

– Utilisé dans des agents anti-mousses et lubrifiants pour l’industrie textile

– Utilisé dans le mélange d’arômes

– Utilisé dans les matériaux inhibiteurs de corrosion

– Utilisé dans la fabrication des filtres à cigarette

 Diisopentylphtalate (DIPP)

– Utilisé dans les emballages alimentaires

– Additif dans la poudre noire destinée aux pistolets et fusils

 Mono-n-butylphtalate (MBuP)

Il est le métabolite de deux autres phtalates : DBP et BBP. Cf. ces phtalates pour les usages

 Diisobutylphtalate (DIBP)

– Utilisé dans des dispersions pour des peintures et vernis

– Utilisé dans des encres destinées aux papiers et emballages alimentaires

– Utilisé dans la formulation de mastic

– Utilisé dans la formulation de revêtements antidérapants

– Utilisé dans des colles

– Utilisé dans la fabrication du papier et du carton

– Utilisé dans des parfums

– Agent plastifiant et gélifiant dans des produits de consommation tels que des sucettes, des couverts, bouteilles d’eau en plastique, des stylos, des poignées de vélo, des boîtes destinées au four à micro-ondes

 Di-n-hexyl-phtalate (DHP)

– Agent plastifiant dans la production de PVC

– Agent plastifiant dans la synthèse des esters ou éthers de cellulose

– Agent plastifiant dans la synthèse de polyuréthanes

– Utilisé dans la synthèse de styrène butadiène dans l’industrie du caoutchouc

 Di-propyl heptyl phtalate (DPHP)

– Agent plastifiant dans la production de PVC

Les phtalates peuvent être utilisés dans les emballages des lessives grand public. Certains phtalates peuvent également être utilisés dans les jouets, dans des limites de concentrations règlementées. Les phtalates présents dans les plastisques et adhésifs pourraient potentiellement se retrouver dans des composants de montres.

Parabènes

 N-propyl p-hydroxybenzoate

– Agent conservateur dans les formulations cosmétiques (autobronzant, déodorant, hygiène dentaire et buccale, produits capillaires, produits cosmétiques pour bébé, maquillage, soin pour la peau, produits de rasage et épilatoire, vernis à ongles, gel hydroalcoolique, médicament)

– Agent conservateur dans l’industrie alimentaire (sauces salades, mayonnaise, moutardes, sauces épicées, produits lactés surgelés, pâtisseries, œufs de poisson, conserves de poisson, crèmes, gelées, jambons, jus de fruits, sirops, viandes hachées)

– Utilisé dans la formulation de vernis, colles et adhésifs, cirages

– Agent conservateur dans les produits du tabac (cigarettes, cigares, tabac coupé, en rouleaux et reconstitué)

– Présent dans les cosmétiques animaliers

 P-hydroxybenzoate

– Utilisé dans la formulation de vernis et revêtements protecteurs

– Substance aromatisante dans l’industrie alimentaire (plats cuisinés, boissons, graisse et huile, crème glacée et sorbet, produits laitiers, confiseries)

– Intermédiaire chimique dans la synthèse des « parabens »

– Utilisé dans la synthèse de résines polyesters et de polymères à cristaux liquides

– Intermédiaire chimique pour la fabrication de colorants

– Inhibiteur de corrosion, antioxydant et émulsifiant

– Intermédiaire dans la synthèse de polyesters

 N-butyl p-hydroxybenzoate

– Agent conservateur dans les formulations cosmétiques (autobronzant, déodorant, hygiène dentaire et buccale, produits capillaires, produits cosmétiques pour bébé, maquillage, soin pour la peau, produits de rasage et épilatoire, vernis à ongles, gel hydroalcoolique)

– Utilisé dans la formulation de colles et de cirages

 Ethyl p-hydroxybenzoate

– Agent conservateur dans les formulations cosmétiques (autobronzant, déodorant, hygiène dentaire et buccale, produits capillaires, produits cosmétiques pour bébé, maquillage, soin pour la peau, produits de rasage et épilatoire, vernis à ongles, gel hydroalcoolique)

– Agent conservateur dans l’industrie alimentaire (sauces salades, mayonnaise, moutardes, sauces épicées, produits lactés surgelés, pâtisseries, œufs de poisson, conserves de poisson, crèmes, gelées, jambons, jus de fruits, sirops, viandes hachées)

– Agent conservateur dans les produits du tabac (cigarettes, cigares, tabac coupé, en rouleaux et reconstitué)

– Utilisé dans la formulation de vernis, colles, cirages

 Méthyl p-hydroxybenzoate

– Agent conservateur dans les formulations cosmétiques (autobronzant, déodorant, hygiène dentaire et buccale, produits capillaires, produits cosmétiques pour bébé, maquillage, soin pour la peau, produits de rasage et épilatoire, vernis à ongles, gel hydroalcoolique, médicament)

– Agent conservateur dans l’industrie alimentaire (sauces salades, mayonnaise, moutardes, sauces épicées, produits lactés surgelés, pâtisseries, œufs de poisson, conserves de poisson, crèmes, gelées, jambons, jus de fruits, sirops, viandes hachées)

– Utilisé dans la formulation de vernis, colles, cirages

– Agent conservateur dans les produits du tabac (cigarettes, cigares, tabac coupé, en rouleaux et reconstitué)

– Utilisé dans la formulation de deux détachants ménagers

Les parabènes peuvent également être utilisés en tant que conservateur dans la formulation de lessives grand public.

Alkylphénols

 O-phénylphénol

– Agent conservateur dans l’amidon de blanchisserie, d’adhésifs, de peintures, d’émulsions de cires de parquets, de nettoyants ménagers, dans l’industrie du cuir, dans les composés de polissage, les joints de feutre dans l’automobile, dans les matériaux de construction, dans les pâtes et papiers, dans l’industrie des textiles, dans les plâtres chirurgicaux, dans l’industrie du bois

– Intermédiaire chimique pour la fabrication de certains retardateurs de flamme, la fabrication de teintures, la fabrication de résines synthétiques, dans l’industrie du caoutchouc, des lubrifiants,

– Principe actif dans la formulation de désinfectants industriels ou ménagers (sprays, lingettes), pour le secteur médical

– Utilisé dans l’industrie des cosmétiques

– Additif alimentaire pour le traitement en surface des agrumes

– Utilisé dans les emballages alimentaires

– Biocide dans les fluides de coupe

 4-nitrophénol

– Utilisé dans la synthèse d’un produit utilisé dans l’industrie de la photographie

– Produit intermédiaire pour la fabrication de caoutchouc synthétique

– Utilisé dans la synthèse de colorants

– Utilisé dans la synthèse de substances actives de produits phytosanitaires (insecticides, herbicides)

 4-tert-butylphénol

– Monomère dans la synthèse chimique de polycarbonates, résines phénoliques, résines époxy

– Agent conservateur ou d’entretien du bois

– Utilisé dans la fabrication de colles et mastics pour le bâtiment

 4-nonylphénol

– Monomère dans la fabrication de résines formophénoliques,

– Catalyseur dans l’industrie des résines époxy, et d’autres résines

– Utilisés dans la composition de certains produits de tannerie

– Intermédiaire dans la production de trinonylphénol phosphite,

– Utilisé dans la composition de pyjamas pour enfants, de jouets, de peintures, de produits de nettoyage domestique, de bouteilles d’eau en plastique, de bouteilles de lait

– Utilisé dans l’industrie d’extraction de métaux, de la photographie

 4-tert-octylphenol

– Intermédiaire dans la fabrication de résines phénoliques/formaldéhydes utilisés dans l’industrie du caoutchouc, l’industrie électrique, l’industrie chimique, l’industrie du papier

– Utilisé dans la fabrication des éthoxylates octylphénoliques utilisés comme émulsifiants, matières adjuvantes pour les textiles et cuir, stabilisant pour plastique, dans les produits cosmétiques et shampoing, dans certains produits nettoyants ménagers

Les dérivés du phénol présents dans les résines et colorants pourraient se retrouver dans les composants de montres.

ANNEXE 3 :

ÉLÉMENTS D’INFORMATION SUR LE DROIT EUROPEEN APPLICABLE OU EN COURS D’ELABORATION

(article 86 paragraphe 7 du Règlement)

Éléments d’information sur le droit européen applicable ou en cours d’élaboration à propos de la proposition de loi visant à interdire
l’utilisation des phtalates, des parabènes et des alkylphénols (N° 2738)

(en application de l’article 86, paragraphe 7, du Règlement)

Le droit européen en matière de produits chimiques repose sur deux types de règles. À côté des règles générales, des dispositions sectorielles, applicables à une catégorie de produits, sont également prévues.

Il s’agit d’un droit ancien, tôt intervenu dans la construction du Marché commun.

Ses règles générales reposent depuis l’origine sur une double démarche.

La première est une démarche de classification et d’information sur les dangers. Destinée à créer les conditions d’une libre circulation des produits, elle est intervenue dès 1967 avec la directive 67/548/CEE concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à la classification, l'emballage et l'étiquetage des substances dangereuses, afin de permettre des mesures de prévention et de protection adéquates au cours de leur utilisation. En 1988, des dispositions semblables ont été prévues pour les mélanges par la directive 88/379/CEE pour la classification et l’étiquetage des préparations dangereuses.

Son dispositif et ses annexes sont en cours de remplacement par les dispositions du règlement (CE) n ° 1272/2008 du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l'étiquetage et à l'emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) n ° 1907/2006.

La deuxième démarche est celle du contrôle de la commercialisation, avec des restrictions à l’utilisation et à la commercialisation, qui peuvent aller jusqu’à l’interdiction de certaines substances, en cas de risque important pour la santé humaine ou l’environnement.

Actuellement, elle repose système REACH pour l'enregistrement, l'évaluation, l'autorisation et les restrictions des substances chimiques. Son adoption en 2006 a achevé le processus de prévention des risques entamé avec la directive 76/769/CEE du 27 juillet 1976 concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la limitation de la mise sur le marché et de l'emploi de certaines substances et préparations dangereuses.

Deux étapes intermédiaires, mais essentielles doivent être soulignées avec d’abord, en 1981, une modification de la directive 67/548/CEE (« le sixième amendement »), qui a introduit une obligation de notification et de tests pour toute nouvelle substance préalablement à sa mise sur le marché. Les substances chimiques existant sur le marché à cette date ont quant à elles fait l’objet d'un inventaire les répertoriant par la Commission européenne. Ensuite, ultérieurement, le règlement n° 793/93/CE concernant l'évaluation et le contrôle des risques présentés par les substances existantes, a organisé leur évaluation, selon des critères sanitaires et environnementaux. Une liste de 141 substances prioritaires a alors été établie parmi les substances produites à plus de 1000 tonnes, avec la possibilité, en cas de risques identifiés, de prendre des mesures de gestion de ces risques et de prévoir, dans certains cas, des mesures de retrait du marché ou de limitation d'emploi d'une substance lorsque le risque avéré est inacceptable.

I. Le règlement « REACH » :

Le règlement (CE) n° 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2006 met en place un système intégré d’enregistrement, d’évaluation, d’autorisation et de restrictions des substances chimiques, dit « REACH ». À défaut d’enregistrement, une substance ne peut être ni produite ni importée.

Le règlement s’applique à toutes les substances chimiques, selon un calendrier progressif, fonction de l’importance de leur production et donc de leur utilisation. Les substances les plus produites devaient être enregistrées avant le 31 décembre 2010. Les deux autres échéances interviennent les 31 décembre 2013 et 31 décembre 2018.

L’objectif est d’améliorer la protection de la santé humaine et de l’environnement tout en maintenant la compétitivité et en renforçant l’esprit d’innovation de l’industrie chimique européenne. L’Agence européenne des produits chimiques est également créée, avec la mission de gérer les exigences relatives à REACH.

Pour les substances extrêmement préoccupantes, le règlement prévoit des dispositions spécifiques. Celles-ci peuvent, après évaluation, être interdites, sous réserve d’autorisations au cas par cas de la Commission européenne en vue d’utilisations particulières. L’objectif est de garantir que les risques liés à ces substances sont valablement maîtrisés et que, selon le principe de substitution, ces substances sont progressivement remplacées par d’autres substances ou technologies appropriées, lorsque c’est économiquement et techniquement viable.

L’Agence publie et met à jour régulièrement une liste de substances (« liste des substances candidates ») identifiées comme ayant de telles caractéristiques extrêmement préoccupantes. Peuvent y être inscrites les CMR (substances cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction), les PBT (substances persistantes, bioaccumulables et toxiques), les vPvB (substances très persistantes et très bioaccumulables) et certaines substances préoccupantes ayant des effets graves et irréversibles sur l’être humain et l’environnement, telles que les perturbateurs endocriniens.

À l’issue de la première phase d’enregistrement et de notification des substances chimiques, en vue de leur évaluation, la Commission européenne a décidé, en février dernier, d’inscrire trois phtalates, le bis (2-ethylexyl) phtalate (DEHP), le benzyl butyl phtalate (BBP) et le dibutyl phtalate (DBP), à l’annexe XIV, dans le cadre du règlement (UE) n° 143/2011 de la Commission, du 17 février 2011. Ces trois substances sont mentionnées comme toxiques pour la reproduction.

À partir du 21 juillet 2015, l’utilisation de ces trois phtalates sera interdite, sauf décision expresse d’autorisation, délivrée au cas par cas. Les demandes d’autorisation devront être présentées avant le 21 juillet 2013.

Par ailleurs, le règlement REACH prévoit des dispositions précises sur les phtalates dans les jouets et articles de puériculture. Ce point est évoqué au B du II ci-dessous.

S’agissant du nonylphénol et de l’éthoxylate de nonylphénol, le règlement (CE) n° 552-2009 du 22 juin 2009 les a inscrits à l’annexe XVII du règlement REACH sur les restrictions applicables à la fabrication, à la mise sur le marché et à l’utilisation de certaines substances dangereuses et de certains mélanges et articles dangereux, et interdit donc leur présence à des concentrations de plus de 0,1 % en poids dans les domaines suivants : nettoyage industriel, nettoyage domestique, traitement des textiles et du cuir, sauf exception, émulsifiant dans les produits agricoles de traitement par immersion des trayons, usinage des métaux, sauf exception, fabrication de pâte à papier et de papier, produits cosmétiques, autres produits d’hygiène corporelle, sauf les spermicides, coformulants dans les pesticides et biocides, sauf autorisation nationale de produit phytopharmaceutique et de produits biocide contenant de l’éthoxylate de nonylphénol accordée avant le 17 juillet 2003, jusqu’à la date de son expiration.

II. Six exemples de secteurs avec des exclusions ou des autorisations explicites

A.- Les dispositifs médicaux :

Lors de sa révision par la directive 2007/47/CE du 11 octobre 2007, des dispositions mentionnant les phtalates, et plus largement les CMR, ont été insérées dans la directive 93/42/CEE du 14 juin 1993 relative aux dispositifs médicaux. Il s’agit des articles et produits à vocation thérapeuthique qui ne sont pas des médicaments. C’est une catégorie très large qui va des prothèses aux poches plastiques pour les produits sanguins, en passant par les lunettes, notamment.

Les dispositions de 2007, entrées en vigueur le 21 mars 2010, prévoient trois exigences, dont deux pour réduire ou limiter l'utilisation, chez les enfants, les femmes enceintes ou allaitantes et autres patients à risque, des dispositifs médicaux contenant des phtalates dangereux :

– d’une part, une obligation générale indiquant que les dispositifs médicaux doivent être conçus et fabriqués de manière à réduire au minimum les risques découlant des substances dégagées par le dispositif et qu’une attention particulière doit être accordée aux substances carcinogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction ;

– d’autre part, une obligation d’étiquetage, pour les dispositifs destinés à administrer dans l'organisme et/ou à retirer de l'organisme des médicaments, des liquides biologiques ou autres substances ou des dispositifs destinés au transport et au stockage de ces liquides ou substances, qui contiennent des phtalates classés comme carcinogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction, de la classe 1 ou 2 ;

– enfin, l’obligation, pour les fabricants de dispositifs dont l’utilisation possible inclut le traitement d'enfants ou le traitement de femmes enceintes ou allaitant, de fournir, dans la documentation technique, une justification spécifique pour l'utilisation de ces substances en ce qui concerne le respect des exigences essentielles applicables aux dispositifs médicaux, et de mentionner dans la notice d'utilisation, des informations sur les risques résiduels pour ces groupes de patients et, le cas échéant, des mesures de précaution appropriées.

B.- Les jouets et articles de puériculture :

La première interdiction de phtalates au niveau européen est intervenue en 1999, dans le cadre de la décision 1999/815/CEE du 7 décembre 1999.

Cette décision a interdit l’utilisation de six phtalates dans les jouets et les articles de puériculture destinés à être mise en bouche par les enfants de moins de 3 ans, sur la base de la directive 92/59/CEE du Conseil, du 29 juin 1992, relative à la sécurité générale des produits.

Ensuite, cette décision, provisoire, a été prorogée vingt fois, avant l’insertion de ses dispositions dans la directive 2005/84/CE du 14 décembre 2005 modifiant la directive 76/769/CEE concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la limitation de la mise sur le marché et de l’emploi de certaines substances et préparations dangereuses (phtalates dans les jouets et les articles de puériculture).

Les dispositions correspondantes ont été reprises en annexe du règlement précité REACH.

Elles reposent sur des limites l’insertion de phtalates par les articles concernés.

Ainsi, les phtalates suivants ne peuvent être utilisés comme substances ou composants de préparations, à des concentrations supérieures à 0,1 % en masse de matière plastifiée, dans les jouets et les articles de puériculture :

- di (2-éthylhexyl) phtalate (DEHP)

- dibutyl phtalate (DBP)

- butyl benzyl phtalate (BBP)

De même, les phtalates suivants ne peuvent pas être utilisés comme substances ou composants de préparations, à des concentrations supérieures à 0,1 % en masse de matière plastifiée, dans les jouets et les articles de puériculture qui peuvent être mis en bouche par les enfants :

- di-"isononyl" phtalate (DINP)

- di-"isodecyl" phtalate (DIDP)

- di-n-octyl phtalate (DNOP).

C.- Les cosmétiques

Les produits cosmétiques font l’objet d’une harmonisation communautaire depuis l’intervention de la directive n° 76/768/CEE du 27 juillet 1976 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux produits cosmétiques. Ce texte a ensuite été plusieurs fois modifié.

Les produits concernés sont les produits cométiques au sens large, ce qui vise notamment l’ensemble des produits d’hygiène en contact avec les diverses parties superficielles du corps humain ou avec les dents et les muqueuses buccales, et ainsi les savons et dentifrices. Employés dans des conditions normales ou prévisibles d’utilisation, ils ne doivent pas nuire à la santé humaine.

Outre les règles d’étiquetage, de surveillance du marché et d’interdiction des expérimentations animales, ce texte contient en annexe deux types de listes : deux listes négatives, celle des substances interdites et celle des substances soumises à certaines restrictions ou conditions (« liste des substances que les produits cosmétiques ne peuvent contenir en dehors des restrictions et conditions prévues ») ; trois listes positives des seules substances que les cosmétiques peuvent contenir, à savoir celle des colorants autorisés, celle des agents conservateurs autorisés et celle des filtres UV autorisés.

En ce qui concerne les substances CMR, la directive 2003/15/CE du 27 février 2003 pose le principe de l’interdiction de celles qui sont le plus préoccupantes, les CMR de catégories 1 et 2.

À partir du 11 juillet 2013, les dispositions de la directive de 1976 sont remplacées par celles du règlement n° 1223/2009 du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques. Toutefois, s’agissant des substances CMR, les dispositions du règlement sont déjà applicables, depuis le 1er décembre 2010.

En l’état, les trois phtalates suivants sont mentionnés à l’annexe II de la directive de 1976, dans la liste des substances qui ne peuvent entrer dans la liste des produits cosmétiques : phtalate de dibutyle DBP (n° 675) ; phtalate de bis (2-éthylhexyle) DEHP (n° 677) et phtalate de bis (2-méthoxyéthyle) (n° 678).

S’agissant des parabènes, l’annexe VI (liste des agents conservateurs que peuvent contenir les produits cosmétiques) de la directive mentionne ceux qui sont autorisés.

Selon les éléments communiqués, la Commission européenne devrait proposer une mesure visant à interdire l’utilisation de l’isopropyl-, l’isobutyl- et le phenylparaben et réduire la concentration des propyl- et butyl paraben. En outre, elle envisage également une interdiction des propyl paraben et butyl paraben dans la composition des produits cosmétiques destinés aux enfants de moins de trois ans, suite à la même interdiction, mais temporaire, mise en œuvre par le Danemark.

Pour ce qui concerne les alkylphénols, les éléments mentionnés au I à propos de l’annexe XVII du règlement REACH s’appliquent. Le nonylphénol est interdit.

D.- Les matériaux en contact avec les denrées alimentaires

Les matériaux en contact avec les denrées alimentaires font l’objet au niveau européen de trois corps de règles spécifiques.

Il s’agit, d’une part, du règlement (CE) n° 1935/2004 du 27 octobre 2004 concernant les matériaux et objets destinés à entrer en contact avec les denrées alimentaires, d’autre part, des textes spécifiques visant les différents matériaux et, enfin, des dispositions particulières à certaines substances.

Le règlement n° 1935/2004, qui a abrogé les directives antérieures 80/590/CEE et 89/109/CEE, prévoit les conditions de mise en œuvre du principe dit d’inertie : les matériaux et les objets en contact avec les denrées alimentaires, qui doivent être produits conformément aux bonnes pratiques de fabrication, ne doivent céder aux denrées qu’ils accompagnent des constituants en une quantité susceptible de présenter un danger pour la santé humaine, d’entraîner une modification inacceptable de la composition des denrées ou d’entraîner une altération des leurs caractères organoleptiques.

Il distingue 17 groupes de matériaux et objets. Des mesures spécifiques pouvant aller jusqu’à des listes de substances autorisées sont prévues pour ces groupes.

En l’absence de mesures européennes spécifiques, les Etats membres peuvent maintenir ou prévoir leurs propres dispositions nationales.

S’agissant des textes ne visant que certains matériaux, il faut notamment mentionner la directive 2002/72/CE du 6 août 2002 concernant les matériaux et objets en matière plastique destinés à entrer en contact avec les denrées alimentaires, qui a remplacé la directive antérieure 82/711/CEE.

Dans son annexe II, relative à la liste des monomères et autres substances de départ qui peuvent être autorisées, elle mentionne certains phtalates avec des seuls de LMS, à savoir de limites de migration spécifiques.

E.- Les additifs alimentaires autres que les colorants et les édulcorants

La directive 95/2/CE du 20 février 1995 concernant les additifs alimentaires autres que les colorants et les édulcorants, a prévu un régime fondé sur plusieurs listes : les additifs généralement autorisés ; le nombre maximum d'additifs acceptés selon les denrées alimentaires ; les conservateurs et antioxygènes autorisés sous conditions ; les autres additifs autorisés ; les supports et solvants porteurs autorisés ; les additifs autorisés dans les denrées alimentaires et aliments de sevrage pour nourrissons et enfants en bas âge, en spécifiant celles autorisés pour les nourrissons en bonne santé et celles autorisés pour les préparations destinées à des fins médicales spéciales.

C’est dans ce cadre que certains parabènes sont utilisés comme conservateurs sous certaines conditions sous les dénominations suivantes, selon les éléments communiqués : E 214 (P-hydroxybenzoate d’éthyle), E 215 (Dérivé sodique de l’ester éthylique de l’acide-hydroxybenzoïque), E 216 (P-hydroxybenzoate de propyle), E 217 (Dérivé sodique de l’ester propylique de l’acide p-hydroxybenzoïque) et E 218 (P-hydroxybenzoate de méthyle). La liste concerne également le E 219 (Dérivé sodique de l’ester méthylique de l’acide p-hydroxybenzoïque).

En 2006, à la suite d’un avis de l’Autorité européenne de sécurité alimentaire, la directive 2006/52/CE du 5 juillet 2006 a interdit les additifs (E 216) et (E 217).

L’utilisation des additifs qui restent autorisés concerne, avec des limites de quantités, les confiseries, hors chocolat, les enrobages de gelée et pâtés, ainsi que les viandes séchées et certains « amuse-gueules ».

F.- Les détergents

Les détergents font l’objet du règlement (CE) n° 648/2004 du 31 mars 2004, qui a remplacé l’ancienne directive 73/404/CEE, plusieurs fois modifiée.

Ses dispositions ont un double objectif de protection. S’agissant de l’environnement aquatique, ils imposent des règles à l’ensemble des tensio-actifs et des méthodes d’essai plus strictes qu’antérieurement, car portant sur la biodégradabilité finale et non plus initiale.

Pour ce qui concerne les personnes, il prévoit un renforcement des règles d’étiquetage pour informer les utilisateurs de la présence d’allergènes et rend possible pour les professionnels de la santé, d’obtenir auprès du fabricant une liste exhaustive des composants afin de pouvoir déterminer le lien de cause à effet entre l’allergie d’un patient et un produit présent dans un détergent.

Comme précédemment indiqué, le règlement (CE) n° 552-2009 interdit la présence de nonylphénols à des concentrations de plus de 0,1 % dans les détergents.

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© Assemblée nationale

1 () Arrêt de la CJCE du 5 mai 1998 « Royaume-Uni c/ Commission ».

2 () Aux termes de l’article 57 du règlement (CE) n° 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), peuvent être incluses dans l’annexe XIV du règlement (substances interdites sauf autorisation spécifique) les substances considérées comme extrêmement préoccupantes relevant des catégories suivantes :

- les substances classées CMR : cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques (toxiques pour la reproduction) de classe 1 ou 2 ;

- les substances classées PBT (persistantes, bioaccumulables et toxiques) ;

- les substances dites vPvB (très persistantes et très bioaccumulables et toxiques) ;

- toutes substances qui, tout en ne remplissant pas les critères précédant, possédent des propriétés identiques et suscitent un niveau de préoccupation équivalent.

3 () Extrait du site internet www.phtalates.com du centre français d’information sur les phtalates, émanation du Conseil Européen pour Plastifiants et Intermédiaires (ECPI).

4 () Un mémoire de l’école des hautes études en santé publique intitulé « Projet PERSAN : les phtalates » (Ingénieur du génie sanitaire, promotion 2009-2010) fait référence à une modélisation réalisée dans le cadre des évaluations de risques au niveau de l’Union européenne sur le DEHP qui estimait le temps de « demi-vie » à 1 jour dans l’atmosphère, 50 jours dans les eaux de surface, 300 jours dans le sol et 3000 jours dans les sédiments.

5 () Source : mémoire de l’école des hautes études en santé publique précité

6 () Source : mémoire de l’école des hautes études en santé publique précité.

7 () « Le point des connaissances sur les phtalates », ED 5010, 2004.

8 () Les parabènes seraient présents dans 80 % des produits cosmétiques.

9 () Bulletin « Vigilances » de l’AFSSAPS, n° 30, décembre 2005.

10 () Source : Commission OSPAR (forum des parties contractantes à la Convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique Nord-Est), 2001.

11 () Fiche bibliographique effectuée par Greenpeace Exeter (traduction Greenpeace France, avril 2003).

12 () Processus par lequel les taux de certaines substances croissent à chaque stade de la chaîne alimentaire.

13 () Source : Commission OSPAR, 2001.

14 () Source : mémoire de l’école des hautes études en santé publique précité.

15 () « Un polluant répandu altérerait la reproduction masculine », Le Figaro, 22 septembre 2008.

16 () Réponse en date du 28 octobre 2008 à la question écrite de Mme Bérengère Poletti sur les risques liés à l’utilisation de parabènes dans les produits cosmétiques.

17 () Absence d’un ou des deux testicules dans le scrotum.

18 () Rapport n° 176, session ordinaire de 2007-2008.

19 () Rapport n° 318, fait au nom de la commission des affaires sociales du Sénat, session ordinaire de 2009-2010.

20 () Réponse en date du 27 juillet 2010 à la question écrite n° 85321 de M. Jacques Remiller.

21 () Règlement (UE) n° 143/2011 de la Commission du 17 février 2011 modifiant l’annexe XIV du règlement (CE) n° 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH).

22 () Cette liste a vocation à être régulièrement mise à jour et complétée.

23 () Article 2 de la loi n° 2010-729 du 30 juin 2010.

24 () Source : ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail), études en cours.