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N
° 3455

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 24 mai 2011.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI n° 3193, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Émirats arabes unis relatif à la coopération en matière de défense ainsi qu’un échange de lettres,

par M. Patrick  BALKANY

Député

___

ET

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

INTRODUCTION 5

I – LES RELATIONS ENTRE LA FRANCE ET LES EMIRATS ARABES UNIS : PARTENARIAT ET AMITIÉ 7

A – UNE PUISSANCE ÉCONOMIQUE INCONTOURNABLE DANS LE GOLFE PERSIQUE 7

B – DES RELATIONS BILATÉRALES CONSIDÉRÉES COMME EXEMPLAIRES 8

II – UN ACCORD AUTANT POLITIQUE QUE MILITAIRE 9

A – UN EXCELLENT CLIMAT DE NÉGOCIATION 9

B – UN ACCORD QUI PERMETTRA À LA FRANCE DE RENFORCER SON INFLUENCE AUX EMIRATS ARABES UNIS 10

1) Le dispositif de l’accord de coopération 10

2) La clause de sécurité 13

CONCLUSION 17

EXAMEN EN COMMISSION 19

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ANNEXE – TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES 25

Mesdames, Messieurs,

La commission des affaires étrangères est saisie du projet de loi (n° 3193), autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Emirats arabes unis relatif à la coopération en matière de défense, ainsi qu’un échange de lettres. L’accord de défense a été signé à Abou Dabi le 26 mai 2009, l’échange de lettres relatif à l’interprétation de l’accord précité s’étant déroulé à Paris le 15 décembre 2010.

La France et les Emirats étaient déjà liés par un accord de coopération en matière de défense signé le 18 janvier 1995. Ce document est devenu graduellement obsolète pour deux grandes raisons :

– le développement considérable de nos relations bilatérales avec les Emirats arabes unis a débouché sur un nombre important de partenariats dans les domaines politiques, économiques et culturels. Paris et Abou Dabi affichent une communauté de vue sur la plupart des grandes questions internationales. Aussi n’est-il pas exagéré d’affirmer qu’un véritable climat d’amitié préside aux relations entre les deux Etats ;

– l’installation d’une base militaire française à Abou Dabi, qui accueillera à terme 600 militaires, avec pour certains leur famille, nécessite l’actualisation de l’accord de 1995 précité afin de mettre en place les instances de dialogue entre les autorités françaises et émiriennes pour régler tous les problèmes relatifs à son fonctionnement, organiser les modalités d’entraînement des forces françaises sur le territoire des Emirats et assurer la protection juridique des personnels militaires et civils participant aux actions bilatérales de coopération.

Ce texte intervient dans le cadre de la relance de nos relations avec la plupart des pays du Moyen-Orient. Des accords bilatéraux de coopération militaire sont ainsi entrés en vigueur, à la suite de votes du Parlement ayant autorisé leur ratification : Arabie saoudite (loi n° 2010-839 du 23 juillet 2010), Liban (loi n° 2011-8 du 3 janvier 2011) et Irak (loi n° 2011-301 du 22 mars 2011). Le présent accord avec les Emirats consolide la présence de la France dans cette région si importante pour la stabilité du monde, mais il a une portée politique plus forte : l’article 4 prévoit en effet que notre pays s’engage à participer à la défense des Emirats. Avec cette disposition, la France réaffirme sa volonté d’agir comme une puissance globale en contribuant à la paix dans le Golfe persique, région traversée par de multiples tensions et risques de conflits.

I – LES RELATIONS ENTRE LA FRANCE ET LES EMIRATS ARABES UNIS : PARTENARIAT ET AMITIÉ

Diplomates et observateurs de la vie internationale qualifient les relations entre la France et la fédération des Emirats arabes unis (E.A.U.) de sans nuages. Les deux pays défendent les mêmes positions sur la scène internationale et commercent activement. La seule déception, du côté de notre pays, provient du choix de l’offre coréenne au détriment du consortium français composé d’AREVA, de Total, de GDF-Suez et d’EDF pour la construction d’une centrale nucléaire aux Emirats.

A – Une puissance économique incontournable dans le Golfe persique

Avec 230 milliards de dollars de produit intérieur brut (PIB) en 2009, les E.A.U. poursuivent un vigoureux développement économique. Le PIB par habitant atteignait cette année là près de 38 000 dollars, à comparer à 60 000 dollars au Qatar et 15 200 dollars en Arabie saoudite. L’économie demeure largement liée au pétrole, les Emirats disposant des troisièmes réserves au monde, principalement à Abou Dabi, mais elle se diversifie. Si les hydrocarbures représentent 60% du PIB, le fret naval, le transport aérien, l’immobilier, le tourisme, la finance, l’aluminium et l’énergie assurent désormais 40% de la richesse nationale.

Les Emirats ont subi les effets de la crise financière qui a entraîné la contraction de l’économie mondiale. Ils ont subi de plein fouet la baisse des prix du pétrole, puis l’éclatement de la bulle immobilière qui a accompagné une récession économique de 0,7% en 2009. Les réserves financières d’Abou Dabi ont permis de soutenir la dette de Nakheel (promotion immobilière) dont un défaut de paiement aurait menacé la crédibilité de Dubaï. Abou Dabi a également injecté 100 milliards de dollars dans l’économie pour bâtir ou moderniser des infrastructures.

La remontée des cours du pétrole brut à la fin de 2009 a permis à l’économie émirienne de retrouver un taux de croissance appréciable (2,4% en 2010) mais la crise de liquidités a fait prendre conscience aux autorités de la fédération de leur fragilité en matière financière. La priorité ne va plus aux investissements immobiliers mais à la restructuration des dettes des différentes entités publiques.

La France a su profiter à plein de ce dynamisme économique. Sa part de marché a triplé entre 1998 et 2009, pour atteindre 3,4 milliards d’euros au titre des exportations. Les E.A.U. constituent le premier client de la France au Moyen-Orient et le dix-huitième dans le monde. La diminution en valeur de nos importations de pétrole brut a ainsi permis à notre pays de dégager une balance commerciale positive de 2,9 milliards d’euros en 2009. Il faut toutefois tempérer ce tableau en notant la part importante de l’aéronautique, Airbus représentant chaque année un quart de nos exportations.

Outre le groupe EADS qui bénéficie à la fois des ventes d’Airbus et d’hélicoptères, GDF Suez, Suez Environnement, Véolia, Alstom et Thalès ont remporté de nombreux contrats de génie civil. Total, Technip, l’Air liquide, Systra ou Coteba sont en négociations avancées dans leurs domaines respectifs. Les perspectives pour 2011 sont toutefois moins prometteuses qu’auparavant en raison du ralentissement des investissements publics. La France doit défendre ses positions face à un nombre croissant de concurrents car outre ses rivaux commerciaux traditionnels (Allemagne, Italie…) elle subit les effets du dynamisme de l’Inde, de la Turquie ou de la Corée du Sud, qui ont comblé leur retard technologique et sont en mesure de proposer des prix attractifs.

B – Des relations bilatérales considérées comme exemplaires

La France a instauré un véritable partenariat stratégique avec les Emirats, illustré par l’intensité des rencontres politiques qui ont suivi les deux séjours de M. Nicolas Sarkozy, Président de la République, en janvier 2008 et mai 2009 à Abou Dabi. Les E.A.U. ont ainsi adhéré à l’Organisation internationale de la francophonie à titre d’observateurs. Mme Michèle Alliot-Marie a rencontré à plusieurs reprises son homologue en charge des affaires étrangères, Cheikh Abdallah (21 octobre 2010, 26 février 2011), M. Alain Juppé ayant poursuivi ce dialogue peu après sa prise de fonction, le 16 mars dernier.

Dans le domaine de la défense, les deux pays entretiennent un partenariat de longue date. L’accord de coopération en matière de défense, objet du présent rapport, a actualisé le précédent accord de 1995. Cette coopération s’appuie sur la base militaire d’Abou Dabi, point d’ancrage stratégique de la France dans cette région.

Les relations culturelles sont également intenses. L’Université « Paris Sorbonne Abou Dabi » a ouvert ses portes en 2006. Investissement de 224 millions d’euros apportés par les E.A.U., elle accueille 620 étudiants, dont un tiers d’Emiriens et un autre tiers originaire de la région du Golfe. Des projets d’implantation du lycée Louis le Grand et de l’école vétérinaire de Maisons-Alfort sont en cours de négociation. Enfin, le « Louvre Abou Dabi » dont la construction coûte 2 milliards d’euros devrait voir sa construction prochainement achevée.

II – UN ACCORD AUTANT POLITIQUE QUE MILITAIRE

L’analyse du présent accord avec les Emirats ne peut se limiter au domaine militaire. Dès lors que la France prend l’engagement de participer – c'est-à-dire d’assurer, aux côtés d’autres pays occidentaux – à la défense de ce pays, l’accord revêt un aspect politique. Notre pays choisit délibérément d’être activement présent dans une région hautement stratégique, avec la présence de la Vème flotte américaine basée à Bahreïn, le transit du pétrole et du gaz, la jonction des mondes sunnites et chiites, l’affirmation par l’Iran de sa puissance et un Pakistan en proie à une crise économique et morale profonde.

A – Un excellent climat de négociation

La version initiale du présent accord a été proposée par la France, qui souhaitait formaliser le cadre juridique d’une éventuelle intervention française en cas de menace ou d’attaque contre les Emirats et assurer les modalités de la coopération militaire bilatérale entre les deux pays. Les négociations ont commencé à la fin du mois de janvier 2009. Du côté français, elle a été conduite par les directions concernées des ministères des Affaires étrangères, de la Défense et de la Justice. La délégation émirienne a été dirigée par le colonel Hamad Ali Ghalfi, chef de cabinet du directeur du renseignement militaire. Les points les plus ardus à négocier ont concerné les articles 3 et 4 (consultations mutuelles et échanges de vues en cas de menace et action de la France en cas de conflit) ainsi que la définition et le contenu du statut des forces françaises sur place.

Les négociations se sont déroulées dans un excellent climat et ont rapidement abouti à un texte, signé le 26 mai 2009 lors de la visite officielle de M. le Président de la République à Abou Dabi. Cette signature a été saluée par l’ensemble des dynasties régnantes dans les Emirats et a été bien accueillie par la presse, qui a considéré que la France devenait un partenaire aussi important que les Etats-Unis et un pays avec lequel il était certainement plus facile de travailler, les Emiriens ayant en mémoire l’opposition du Congrès à la prise de contrôle de ports américains par la société Dubaï Port World.

Les six Etats du Conseil de coopération des Etats arabes du Golfe n’ont pas marqué d’opposition à cet accord. Il est vrai que la France entretient d’excellentes relations avec eux et qu’ils perçoivent positivement toute politique qui contribue à la stabilité de leur région.

Jusqu’à présent, seuls les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont chacun établi avec les Emirats un accord de défense ou de stationnement des forces. Ces accords n’étant pas publiés, on ne peut en analyser la portée même s’il existe de fortes raisons de considérer que Washington a pris l’engagement d’être aux côtés des Emiriens en cas de conflit, en raison des moyens militaires considérables dont disposent les Etats-Unis dans cette région. En adoptant une politique analogue, la France joue la carte de la dissuasion : le renforcement de la défense des Emirats et la garantie de son intégrité par désormais trois Etats nucléaires devraient avoir un effet dissuasif à l’encontre de tout agresseur potentiel.

B – Un accord qui permettra à la France de renforcer son influence aux Emirats arabes unis

1) Le dispositif de l’accord de coopération 

L’accord de coopération comprend 15 articles, complétés par un échange de lettres. Il revêtirait l’apparence d’un dispositif classique de tout accord de ce type, s’il n’y avait pas les clauses particulières de sécurité prévues aux articles 3 et 4. Ces derniers seront analysés infra, même s’ils font l’objet du rapport pour avis présenté par la commission de la défense nationale et des forces armées.

Le préambule souligne que l’objet de l’accord est de renforcer les capacités militaires et de défense des Emirats arabes unis et réaffirme l’attachement des deux parties à la stabilité et à la sécurité du Golfe persique, qualifié de « région d’une importance stratégique vitale pour le monde ». L’article 1er énumère ensuite la liste de termes et des définitions utilisées dans l’accord.

Le titre Ier prévoit les principes généraux de la coopération de défense entre la France et les Emirats. L’article 2 précise les domaines dans lesquels s’exercera la coopération militaire franco-émirienne. Il s’agit du renseignement, de la formation et de l’entraînement, de l’établissement de plans, d’exercices conjoints, des forces spéciales et de tout autre domaine sur lequel les deux Etats peuvent convenir de coopérer. Techniquement, l’article 2 permet aux forces terrestres et aériennes françaises de se former et de réaliser des exercices conjointement avec leurs homologues émiriennes. Aucun dispositif ne prévoit en revanche que la marine française puisse s’entraîner dans les eaux territoriales des Emirats mais le septième alinéa (f) de cet article permet aux deux parties de faire évoluer les modalités de leur coopération. L’accord est en quelque sorte à géométrie variable.

L’article 5 est relatif à l’octroi mutuel de facilités. Il prévoit logiquement que les activités militaires d’un Etat sur le territoire de l’autre (en pratique, les activités militaires françaises aux Emirats) sont soumises à l’autorisation préalable de l’Etat d’accueil. Il en est de même pour les installations (bases) et des zones d’activité militaire. Cette disposition donne notamment un fondement juridique aux entraînements de l’armée de l’air française au-dessus du désert d’Abou Dabi. Il est enfin explicitement prévu que des troupes françaises puissent stationner sur le territoire émirien, des textes d’application permettant de régir la gestion de l’ensemble de leurs équipements.

L’article 6 instaure un haut comité militaire mixte, ce qui est classique dans ce type d’accord. Il est coprésidé par les chefs d’état major des deux parties et comprend l’ambassadeur de France aux Emirats et celui des Emirats en France, des représentants des forces armées et de plusieurs ministères. Il forme en son sein deux sous-comités, l’un chargé des questions administratives et juridiques, l’autre responsable des questions militaires.

Le titre II est relatif au statut des forces, des membres du personnel et des personnes à charge relevant de la France ou des Emirats, en poste sur le territoire de l’autre pays.

Les articles 7 et 8 n’appellent pas de commentaire particulier et concernent les formalités de séjour des personnels et personnes précités ainsi que le port de l’uniforme. L’article 9, classique dans ce type d’accord, prévoit la compétence de l’Etat d’envoi en matière de règles disciplinaires sur les personnels relevant de son autorité, en poste dans l’Etat d’envoi. L’article 10 dispense les personnels de chaque Etat des dispositions de sécurité sociale de l’Etat d’accueil, organise leur accès au système de santé de l’Etat d’accueil, prévoit les modalités d’un éventuel rapatriement sanitaire et précise les formalités à accomplir en cas de décès d’un membre du personnel d’une des parties sur le territoire de l’autre partie.

L’article 11 est à l’origine du retard avec lequel le Gouvernement a soumis au Parlement l’autorisation de ratifier le présent accord. Le Conseil d’Etat a en effet tenu à ce que les Emirats ne puissent appliquer la peine de mort à l’encontre d’un ressortissant français couvert par le champ de l’accord. Par l’échange de lettres du 15 décembre 2010, les Emirats ont renoncé à recourir à cette peine, qui figure dans leur droit.

L’article 11 opère la distinction entre les cas où une infraction relève de la juridiction française et ceux où elle est de la compétence des tribunaux émiriens.

Les autorités françaises exerceront leur compétence de juridiction dans quatre cas :

– lorsque l’infraction résulte d’un acte ou d’une négligence accompli par un militaire ou membre du personnel français dans le cadre du service, tel que défini au premier alinéa de l’article ;

– lorsque l’infraction porte uniquement à la sécurité de la France ;

– lorsque l’infraction porte atteinte à la personne ou aux biens d’un autre membre du personnel français ;

– enfin, lorsque l’infraction porte uniquement atteinte aux biens de l’Etat français.

En cas de conflit de juridiction résultant d’interrogations sur la nature de l’infraction, l’accord sous forme d’échange de lettres prévoit que les Emirats prennent une décision après consultation des autorités françaises dans un délai de 48 heures suivant l’infraction et en cas de désaccord entre les deux pays, l’avis du sous-comité juridique du haut-comité militaire est requis.

Dans les autres cas (infractions en dehors du service, atteinte à des personnes émiriennes ou à leurs biens, menaces ou atteintes de toutes sortes à l’encontre des Emirats), les autorités émiriennes exerceront leur droit de juridiction. Toutefois, l’accord sous forme d’échange de lettres prévoit que toute partie ayant priorité de juridiction peut y renoncer si l’autre partie fait valoir des considérations particulières le justifiant.

En vertu du paragraphe 11 de l’article 11, si la peine de mort était prononcée à l’encontre d’un ressortissant d’une des parties (en pratique à l’encontre d’un ressortissant français par un tribunal des Emirats, puisque la France l’a abolie), elle ne peut être exécutée. Une peine de substitution doit alors être trouvée par accord entre les deux parties. Il en est de même pour des peines qui seraient prononcées aux Emirats et que la France considère comme contraire à son ordre public interne (comme certaines peines prévues par la charia).

L’article 12 est relatif aux réparations résultant des dommages causés par les membres du personnel d’une des deux parties sur le territoire de l’une ou l’autre partie. Le mécanisme prévu est très classique et se retrouve dans tous nos accords de statut de nos forces à l’étranger. En l’espèce, les E.A.U. se substituent à la France pour le règlement des indemnités financières en cas de condamnation civile. La France rembourse ensuite les Emirats de la somme versée en application de la décision du tribunal.

Ce mécanisme ne s’applique qu’aux dommages causés par les membres du personnel dans le cadre du service et non à leurs fautes personnelles. S’il est vrai que les dispositions de cet article reviennent à mettre à la charge de l’Etat français les condamnations prononcées à l’encontre de son personnel à raison de fautes de service, il ne s’agit que de la traduction du principe de protection fonctionnelle des agents publics qui résulte de l’article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. L’administration a en effet le devoir de protéger son agent contre les attaques dont il peut faire l’objet en exerçant ses fonctions. Ce principe est repris dans le statut général des militaires à l’article L. 4123-10 du code de la défense.

L’article 13 prévoit l’engagement de chaque partie à ne pas porter atteinte à l’environnement sur le territoire de l’autre partie dans l’application du présent accord.

Le titre III (articles 14 et 15) est relatif aux dispositions finales. La France et les Emirats arabes unis conviennent de régler tout différent sur le présent accord par une négociation directe, via un comité ad hoc ou par la voie diplomatique. Une fois achevées les procédures de ratification, l’accord entrera en vigueur pour une durée de 15 ans, renouvelable pour une durée identique par notification écrite des deux Etats.

2) La clause de sécurité

Le territoire des Emirats arabes unis occupe une position stratégique qui jouxte le détroit d’Ormuz, sous souveraineté omanaise, au large duquel passe 40% du trafic pétrolier mondial. Producteurs de pétrole, plate-forme logistique portuaire et aéroportuaire (Abou Dabi, Dubaï et Sharjah), centre de services bancaires et financiers, les Emirats disposent d’une économie diversifiée. La faiblesse de la population (6,4 millions d’habitants, avec seulement 923 000 nationaux, 81% de la population étant étrangère) rend en revanche difficile la défense de leur territoire. Les Emirats arabes unis sont donc obligés de s’en remettre à des accords de défense avec leurs principaux alliés pour assurer leur sécurité.

Il existe des accords de défense et de stationnement des forces avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni, qui ne sont pas publiés. Les Emirats avaient signé en 1991 avec la France, après la première guerre du Golfe, un accord secret de défense, puis un autre accord –également secret– le 18 janvier 1995 (coopération en matière de défense), auquel se substituera le présent texte. La coopération militaire a atteint une telle intensité que 60% des équipements militaires des Emirats sont d’origine française.

Depuis mars 2009, la France dispose d’une base à Abou Dabi, inaugurée le 26 mai 2009 par M. Nicolas Sarkozy, Président de la République et répartie sur trois unités qui atteindront environ 600 personnes lorsqu’elles fonctionneront à plein régime. La marine française pourra faire accéder l’ensemble de ses vaisseaux (sauf le porte-avions Charles de Gaulle) dans le port où ils bénéficient d’un quai de 300 m de long. A cinquante minutes de route, la base aérienne 104 accueille depuis octobre 2009 des Mirage 2000-5 et des Rafale. Enfin, le groupement terre permettra aux forces françaises de s’entraîner au combat en zone urbaine comme désertique.

C’est la première fois depuis 50 ans que la France a ouvert une base militaire permanente hors de son territoire national, dans une région traditionnellement d’influence anglo-saxonne (route des Indes) mais où elle a de nombreux intérêts économiques et culturels et un nombre croissant d’expatriés. Il s’agit d’une application pratique du Livre blanc, qui a rappelé que l’arc de crise allant de l’Atlantique à l’Océan indien se déplaçait de plus en plus vers l’Est. Le Président de la République a rappelé que se jouait dans le Golfe persique « une partie de notre sécurité et de celle du monde ». En s’implantant au cœur du Golfe, la France affirme sa volonté d’être une puissance globale, de contribuer à la sécurité et à la paix d’une région où elle a des alliés et de disposer d’installations à proximité de l’Irak et à quelques heures de vol de l’Afghanistan et du Pakistan.

Il est inévitable de s’interroger sur la signification de cette base comme de notre engagement aux côtés des Emirats alors que leur territoire fait face à l’Iran.

Aucun document public émirien ne mentionne l’Iran comme menace potentielle. Les deux pays sont des partenaires commerciaux très actifs (biens de consommation, produits agricoles…) et les Iraniens disposent d’avoirs importants à Dubaï où vivent d’ailleurs 500 000 de leurs ressortissants. Leurs relations ont néanmoins de tout temps été ambivalentes en raison du déséquilibre évident en cas de conflit. Face à un Iran de 70 millions d’habitants, qui constitue une nation et une civilisation vieille de 3 000 ans, les Emirats arabes unis constituent un Etat nettement plus petit territorialement, peuplé d’à peine 6,4 millions d’habitants dont 81% sont étrangers, en provenance de 70 pays environ. Stricto sensu, le seul véritable point de discorde entre les deux pays concerne la revendication sur les îles Tomb et Abou Moussa. Discrets sur ce dossier, les Emiriens ont récemment fait preuve de fermeté, Cheikh Abdallah ayant déclaré le 20 avril dernier que l’occupation iranienne de ces îles s’assimilait à l’occupation israélienne de la Palestine.

En public, les Emirats affichent une certaine sérénité à l’égard de leur puissant voisin, se limitant à lui demander de ne pas s’ingérer dans les affaires arabes et à se conformer aux règles de l’AIEA sur son programme nucléaire. En réalité, ils font preuve d’une méfiance permanente devant les ingérences, que sont à leurs yeux le soutien de Téhéran aux Chiites en Irak ou l’aide au hezbollah au Liban. Une présence de la France, s’ajoutant à la protection assurée par les Américains et les Britanniques, ne peut que les rassurer, alors que l’Iran poursuit des activités nucléaires très sensibles.

Entre la France et l’Iran, le contentieux majeur concerne le programme nucléaire iranien, la France soupçonnant, comme ses partenaires de l’AIEA, que les objectifs n’en sont pas uniquement civils. Cette position est appuyée par les Emirats qui soutiennent le processus de négociation des Six mais qui demandent également à y être mieux associés.

La présence militaire française aux Emirats, aux côtés des Etats-Unis et du Royaume-Uni, doit essentiellement être interprétée comme relevant de la dissuasion. Attaquer les Emirats aura pour effet d’attaquer la France, ce qui ne sera pas sans conséquence pour le pays qui s’y risquera…

L’engagement de la France est assuré par les articles 3 et 4 du présent accord.

La brièveté de l’article 3 ne doit pas occulter son importance car toute menace peut être considérée comme la phase préalable d’un conflit. La France et les Emirats arabes unis conviennent de se consulter et d’échanger leurs analyses chaque fois que l’un ou l’autre pressent une menace susceptible d’atteindre ses intérêts fondamentaux nationaux. Le verbe pressentir est choisi à dessein afin que chaque Etat puisse consulter l’autre dès qu’il suppose qu’il y a apparition d’un risque.

Les échanges de renseignement joueront un rôle primordial dans l’application de cet article. Ils font effectivement partie du champ de l’accord. Il est impossible de prévoir par avance à quoi ils s’appliqueront, mais si l’on garde à l’esprit que la place financière de Dubaï accueille des filiales de banques iraniennes et que le port de Dubaï a constitué dans le passé une plaque tournante pour le commerce de biens et de technologies duales (par le réseau Khan, notamment), la coopération franco-émirienne devrait permettre de mieux identifier les circuits de prolifération nucléaire. La présence du navire Dupuy de Lôme, relevant du renseignement militaire, renforce également nos capacités d’écoutes électroniques dans la région.

L’article 4 engage la France à participer à la défense de la sécurité, de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance des Emirats arabes unis. Il est au cœur du présent accord et a une portée politique plus importante que les dispositions techniques qu’il met en œuvre.

Il comprend plusieurs stades de mise en jeu de notre engagement. Les deux pays sont préalablement censés établir des plans, en application du quatrième alinéa (c) de l’article 2 de l’accord. La France doit ensuite déployer des moyens dissuadant tout Etat de menacer ou d’attaquer les Emirats. Les deux pays doivent également anticiper toute menace ou attaque, grâce aux instances de dialogue et de coordination prévues par l’accord.

En cas de menace, les deux pays doivent mettre en œuvre les mesures appropriées pour l’écarter. En cas d’attaque, la France s’engage, en application des deux alinéas de l’article 4, à établir des contacts avec les Emirats afin de conduire des opérations militaires, puis à participer par ses forces armées, à toute opération militaire permettant de repousser une agression.

La mise en œuvre pratique de cet article relève des plans établis par les états-majors et n’appelle pas de commentaire particulier, sachant que le rapport pour avis de la commission de la défense nationale et des forces armées complète l’information du Parlement. Il est loisible de souligner le risque qu’encourt une base française de taille réduite dans une région du monde où règnent tant de tensions. La sécurisation de nos lignes d’approvisionnement depuis la France, nos moyens de détection comme de communication et la coordination de nos forces avec celles d’autres pays occidentaux présents dans le Golfe persique seront à l’évidence cruciaux. Il convient plutôt de souligner la valeur politique de notre engagement aux côtés des Emirats, en rappelant que la présence française a pour objectif de renforcer la paix dans le Golfe persique. Pour le reste, nos unités ont une réelle capacité opérationnelle grâce à la modernité de leurs équipements et en cas de conflit, la France dispose de moyens de projection de ses forces.

CONCLUSION

A partir du moment où la France, membre du Conseil de sécurité de l’ONU, conçoit son rôle sur la scène internationale comme celui d’une puissance globale, en raison notamment de la détention de l’arme nucléaire et d’une capacité de projection de ses forces, l’analyse de nos intérêts doit être globale. Dès lors que notre pays estime que sa sécurité dépend de la stabilité de l’arc de crise dont l’épicentre est le Moyen-Orient, il lui appartient d’en tirer les conséquences. Etre ou vouloir être une grande puissance exige des engagements ainsi que des moyens humains, technologiques et financiers pour les tenir.

Le contenu du présent accord avec les Emirats arabes unis est logique au regard de la doctrine de défense de la France : être présente là où peuvent apparaître les crises, anticiper les évènements, disposer d’une capacité de dissuasion assurant qu’une crise ne dégénère pas en conflit…

Le point essentiel auquel doit veiller la commission des Affaires étrangères n’est donc pas le dispositif même de l’accord, mais ses moyens d’application. Face à un adversaire potentiel que personne ne nomme mais auquel chaque analyste pense, le devoir de l’Etat est de permettre aux militaires d’accomplir matériellement leur mission de dissuasion et éventuellement de combat. A défaut, le présent accord ne sera qu’une déclaration sans substance.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission a examiné le présent projet de loi au cours de sa réunion du mardi 24 mai 2011 à 17h00.

Après l’exposé de M. Henri Plagnol, suppléant le Rapporteur, un débat a lieu.

M. Jean-Marc Roubaud. La base française aux Emirats arabes unis est-elle opérationnelle ? Les 600 hommes prévus y sont-ils déjà déployés ou assistera-t-on à une montée en puissance progressive ? Quelles activités sont déjà organisées sur place ?

M. Henri Plagnol, suppléant le rapporteur. Il s’agit d’une montée en puissance progressive mais l’on assiste déjà à des échanges et des entraînements très soutenus. Il existe déjà des échanges de renseignements et des capacités importantes seront disponibles grâce au navire de surveillance électronique sur place. La base fonctionnera à plein régime en 2014.

M. Michel Terrot. L’un des problèmes majeurs des Emirats arabes unis est le déséquilibre entre le faible nombre de citoyens et la masse de travailleurs immigrés qui y vivent. Le printemps arabe a-t-il eu des conséquences sur le pays ? Y a-t-il un risque de voir se déclencher des troubles intérieurs qui pourraient susciter une intervention française ?

M. Henri Plagnol, suppléant le rapporteur. 90 nationalités sont présentes sur le territoire émirati, dont d’importantes minorités chrétiennes comme les Philippins. Il est donc difficile de parler d’un Etat Nation à l’européenne, ce qui peut générer des problèmes. Mais la situation des Emirats n’est pas comparable avec celle de Bahreïn, où une majorité religieuse se considère traitée comme des citoyens de seconde zone. Il n’y a pas, aux Emirats, de cristallisation des mécontentements. Par ailleurs, de nombreux cadres de très haut niveau travaillent dans ce pays, dont de nombreux étrangers.

M. Jean-Paul Lecoq. Qu’est-ce que la France va faire là-bas ? Ce sont des positionnements ancestraux pour des Etats. On nous parle d’Europe, de l’OTAN, d’administrations internationales : pourquoi la France ès qualité se rend-elle dans ce pays ? Il y a des réponses non dites car cela repose sur des intérêts financiers, ou alors il s’agit de raisons stratégiques tournées contre l’Iran.

L’essentiel est de savoir si cet accord a des conséquences internes : comme en Côte d’Ivoire, au Tchad, en Libye, la France va-t-elle jouer un rôle de gendarme quasi-colonisateur ?

M. Henri Plagnol, suppléant le rapporteur. Ces questions sont essentielles : pourquoi la France va-t-elle aux Emirats, mais aussi pourquoi les Emirats accueillent-ils la France ? Nous ne sommes pas dans un contexte post-colonial. Il y a un vrai sentiment de vulnérabilité de la part de nos partenaires. Par rapport à l’arc de crise et au poids géopolitique de la zone, nous devons être présents pour compter. Et il n’est pas méprisable de vouloir en faire une vitrine de la technologie française.

M. Jean-Paul Lecoq. Avec des Rafale !

M. Henri Plagnol, suppléant le rapporteur. Pas seulement. Toutes les entreprises françaises sont présentes sur place. Par ailleurs, les Emirats arabes unis ont vocation à devenir une interface culturelle entre le monde arabe et l’Occident.

M. François Rochebloine. Je voudrais que vous développiez un peu la réponse que vous avez faite à Jean-Marc Roubaud. Les 500 à 600 hommes sont-ils Français ou y aura-t-il des troupes des Emirats ? Par ailleurs, en ce qui concerne la réalisation de la base, qui paie, concrètement ? Les Emirats arabes unis, qui sont riches, contribuent-ils ? Enfin, la présence culturelle française importante a-t-elle permis à cette négociation d’aboutir ?

M. Henri Plagnol, suppléant le rapporteur. La France assure à hauteur de 75 millions d’euros le coût de fonctionnement annuel de la base. Dans le détail, il y a notamment une composante aérienne de 140 hommes, avec un escadron de chasse de 6 avions; il y aura aussi des bâtiments de l’aéronavale et un groupement tactique interarmes de l’armée de terre de 330 hommes en 2011, ramené à 260 en 2014. Un état-major interarmes est aussi prévu et divers services de soutien.

M. Jean-Paul Dupré. Cet accord a été signé le 26 mai 2009, confirmé le 15 décembre 2010, dans un contexte régional alors très différent de celui que nous connaissons aujourd’hui. Compte tenu de ce qui se passe, cet accord risque-t-il de nous mettre dans une situation délicate en cas de conflit dans la région ?

M. Henri Plagnol, suppléant le rapporteur. Je rappelle qu’il s’agit d’un accord de sécurité extérieure et qui ne porte en aucune manière sur le maintien de l’ordre à l’intérieur du pays. En revanche, en cas de menace de l’Iran, la question de l’intervention se poserait évidemment. Le pari de la France et de l’Occident est que notre présence est dissuasive.

M. Serge Janquin. Les développements du printemps arabe dans la péninsule et le rôle de l’Arabie saoudite avec ses voisins font peser des risques d’instabilité sur des pays peu démocratiques, dans une période où la France a commencé à réduire ses bases et à renégocier ses accords de défense sur le continent africain. Cette base ne nous expose-t-elle pas dans le cadre d’un conflit entre les EAU et l’Iran ? Ne risque-t-on pas à terme de devoir porter assistance à un régime contesté et, finalement, un tel accord est-il urgent, sur le plan de la symbolique, vis-à-vis des démocraties arabes ?

M. Henri Plagnol, suppléant le rapporteur. Il s’agit d’un accord d’Etat à Etat et non pas entre régimes. L’engagement porte d’autre part uniquement en cas de menace sur les EAU. Enfin, je crois que les Emirats ne sont pas, vis-à-vis du printemps arabe, dans une position hostile. Ils montrent au contraire une ouverture assez remarquable en matière culturelle ou en ce qui concerne les medias, que la coopération avec l’occident ne peut qu’encourager. J’ajoute aussi que l’accord prévoit des échanges d’analyses en cas de menaces, et un temps de partage d’informations, de renseignements, avant la mise en œuvre de l’article 4.

M. Jean-Paul Bacquet. Il y a derrière cet accord une évidente arrière-pensée économique qui se comprend parfaitement. Cela étant, on assiste à un rajeunissement important des cadres et des dirigeants, qui sont systématiquement formés aux Etats-Unis. Vu la situation en Arabie saoudite, le réflexe ne sera-t-il pas de se tourner vers les Etats-Unis avant la France et ne risque-t-on pas de devoir s’aligner sur les Etats-Unis ?

M. Henri Plagnol, suppléant le rapporteur. Il est impossible de préjuger de l’attitude des Etats-Unis, du Royaume-Uni ou des Emirats. Il y a à l’évidence une influence des Etats-Unis sur les élites mais il y a aussi un souci de rééquilibrage de l’influence au profit de la France.

M. Hervé de Charette. Cet accord est bienvenu dans une région du monde où il faut être présent. La France réduit son implantation en Afrique à deux bases, au Gabon et à Djibouti, et garde un peu de présence au Tchad et au Sénégal. Il est souhaitable qu’en contrepartie elle porte son effort militaire sur cette région et assure une présence dans un pays dont la position géographique est éminemment stratégique, proche du détroit d’Ormuz, ne serait-ce que pour la sécurisation de nos approvisionnements énergétiques. Il est important qu’en plus de notre coopération classique, nous augmentions notre effort et si nous pouvons faire plus, ce sera bienvenu, compte tenu des aspects stratégiques et des tensions de la région. Il ne s’agit pas de diriger l’accord contre l’Iran mais d’assurer la protection de nos intérêts et il vaut mieux consacrer dans ce cadre 75 millions par an que tout ce que l’on dépense, y compris en hommes, en Afghanistan. Je soutiens donc sans réserve cet accord. Je voudrais néanmoins quelques précisions sur le calendrier et les coûts prévus. Les chiffres qui nous ont été donnés sont-ils des coûts initiaux, qu’en sera-t-il dans le budget 2012 ? Y a-t-il des dépenses engagées dès le budget 2011 ? En ce qui concerne le calendrier, quand cette base commencera-t-elle à être active ?

M. Henri Plagnol, suppléant le rapporteur. Cette base est déjà active et monte en puissance. Des crédits ont été engagés et le tout sera finalisé à l’horizon 2014, mais je n’ai malheureusement pas plus de précision quant aux investissements engagés. Je vous donnerai par écrit des éléments sur son coût initial.

M. Jean-Pierre Kucheida. Vous avez parlé d’une base aéronavale, ce qui suppose la présence d’un port. Etant donné la configuration de la côte, qui est sableuse et présente de faibles profondeurs, de quel type de port s’agit-il ?

Je tiens à rappeler le petit nombre de citoyens émiriens, alors que le pays s’est développé au cours des dernières décennies grâce à l’arrivée d’une très nombreuse main d’œuvre étrangère. Il ne connaît donc pas le même type de tensions entre communautés que Bahreïn.

M. Henri Plagnol, suppléant le rapporteur. Les citoyens émiriens sont effectivement très peu nombreux. La base comprendra une jetée de 300 mètres pour accueillir les navires.

M. Jean-Michel Boucheron. Cet accord est d’abord un accord politique. La France a besoin d’avoir des alliés, comme le met en évidence l’opération en Libye, à laquelle les Emirats arabes unis participent. Cette base permettra à la France d’être présente dans le détroit d’Ormuz, et donc d’être un acteur de la région.

Les moyens mis en place à Abou Dabi proviendront-ils d’autres bases ? En d’autres termes, la France va-t-elle alléger sa présence à Djibouti ?

M. Henri Plagnol, suppléant le rapporteur. Il est évident que des moyens vont être redéployés au profit d’Abou Dabi, mais je ne peux pas vous dire s’ils proviendront de Djibouti ou d’ailleurs. Là encore, je vous enverrai un complément de réponse par écrit.

M. Rudy Salles. Cet accord est extrêmement pertinent. Les Emirats arabes unis constituent une plate-forme régionale d’échanges ; c’est un pays très ouvert, notamment aux autres Etats arabes. Il se situe dans une zone très sensible et sa sécurité doit absolument être assurée. Quelle a été la réaction des Etats arabes voisins, le Qatar et l’Arabie saoudite en particulier, à la conclusion de cet accord ?

M. Henri Plagnol, suppléant le rapporteur. Ces Etats n’ont eu aucune réaction hostile à cet accord.

Le président Axel Poniatowski. Je voudrais souligner l’importance de cet accord qui lie la France aux émirats qui forment la Fédération, dont le président est l’émir d’Abou Dabi. La clause d’engagement a été conclue à la demande des Emirats arabes unis. Il faut rappeler qu’ils ont aussi signé des accords de défense avec les Etats-Unis et le Royaume uni : ces accords sont secrets, mais ils contiennent très probablement cette même clause.

La France a été le premier pays à reconnaître l’indépendance de la Fédération, avec laquelle elle entretient les liens bilatéraux les plus forts de toute la zone. En contribuant à la sécurité de cet Etat, elle assure aussi celle des 3,5 milliards d’échanges commerciaux qu’elle réalise annuellement avec lui. En outre, cet accord a d’abord un objectif de dissuasion, la France se posant comme garante de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de la Fédération.

M. Henri Plagnol, suppléant le rapporteur. Je n’ai rien à ajouter aux arguments présentés par les uns et les autres en faveur de l’approbation de cet accord.

Suivant les conclusions du Rapporteur, la Commission adopte sans modification le projet de loi (no 3193).

*

La Commission vous demande donc d’adopter, dans les conditions prévues à l’article 128 du Règlement, le présent projet de loi dans le texte figurant en annexe du présent rapport.

ANNEXE

TEXTE DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

Article unique

(Non modifié)

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement des Émirats arabes unis relatif à la coopération en matière de défense, signé à Abou Dabi, le 26 mai 2009, ainsi qu’un accord sous forme d’échange de lettres relatif à l’interprétation de l’accord de coopération en matière de défense, signées à Paris, le 15 décembre 2010, et dont le texte est annexé à la présente loi.

NB : Le texte de l’accord figure en annexe au projet de loi (n° 3193).

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