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APRÈS ART. 13N°SPE1746

ASSEMBLÉE NATIONALE
10 janvier 2015

LA CROISSANCE ET L'ACTIVITÉ - (N° 2447)

Adopté

AMENDEMENT N°SPE1746

présenté par

M. Ferrand, rapporteur général, Mme Untermaier, rapporteure thématique M. Castaner, rapporteur thématique M. Grandguillaume, rapporteur thématique M. Robiliard, rapporteur thématique M. Savary, rapporteur thématique M. Tourret, rapporteur thématique M. Travert, rapporteur thématique et Mme Valter, rapporteure thématique

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ARTICLE ADDITIONNEL

APRÈS L'ARTICLE 13, insérer l'article suivant:

« I. – Les notaires, les huissiers de justice et les commissaires-priseurs judiciaires peuvent librement s’installer dans les zones où l’implantation d’offices ou l’association de notaires, d’huissiers de justice et de commissaires-priseurs judiciaires au sein des offices existants apparaissent utiles pour renforcer la proximité et l’offre de services.

Ces zones sont déterminées par une carte établie conjointement par les ministres de la Justice et de l’Économie, sur proposition de l’Autorité de la concurrence en application de l’article L. 462-10 du code de commerce. Elles sont définies de manière détaillée au regard de critères précisés par décret, et notamment sur la base d’une analyse démographique de l’évolution prévisible du nombre de professionnels installés.

« À cet effet, cette carte identifie les secteurs dans lesquels, pour renforcer la proximité et l’offre de services, de nouveaux offices de notaire, d’huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire doivent être créés ou les offices existants doivent être renforcés par l’association de personnes remplissant les conditions de nationalité, d’aptitude, d’honorabilité, d’expérience et d’assurance requises pour être nommées par le ministre de la Justice en qualité de notaire, d’huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire.

« L’élaboration de cette carte garantit une augmentation progressive du nombre d’offices à créer et du nombre de personnes à nommer en qualité de notaire, d’huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire, de manière à ne pas causer de préjudice anormal aux offices existants. Elle est assortie de recommandations sur le rythme d’installation compatible avec une augmentation progressive du nombre de professionnels dans la zone concernée.

« Afin d’élaborer cette carte, l’Autorité de la concurrence consulte des associations de défense des consommateurs agréées au niveau national pour ester en justice. Elle peut être saisie par toute personne remplissant les conditions de nationalité, d’aptitude, d’honorabilité, d’expérience et d’assurance requises pour être nommée par le ministre de la Justice en qualité de notaire, d’huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire.

« Cette carte est rendue publique et révisée tous les deux ans.

« II. – Dans le respect des conditions prévues au I, le ministre de la Justice ne peut refuser une demande de création d’office de notaire, d’huissier de justice ou de commissaire‑priseur judiciaire.

« Un décret précise les conditions dans lesquelles le ministre de la Justice nomme dans un office les personnes remplissant les conditions de nationalité, d’aptitude, d’honorabilité, d’expérience et d’assurance requises pour être nommées en qualité de notaire, d’huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire.

« Si, dans un délai de six mois à compter de la publication de la carte mentionnée au I, le ministre de la Justice constate un nombre insuffisant de demandes de créations d’office ou d’associations au sein des offices existants au regard des besoins identifiés, il procède, dans des conditions prévues par décret, à un appel à manifestation d’intérêt en vue d’une nomination dans un office ou de la création d’un bureau annexe par un officier titulaire.

« Si l’appel à manifestation d’intérêt est infructueux, le ministre de la Justice confie la fourniture des services d’intérêt général en cause, selon le cas, à la chambre départementale des notaires, à la chambre départementale des huissiers de justice ou à la chambre des commissaires-priseurs judiciaires concernée. Le ministre de la Justice précise, en fonction de l’insuffisance identifiée, le contenu et les modalités des services rendus. À cet effet, une permanence est mise en place dans une maison de justice et du droit. La chambre concernée répartit, entre les officiers publics ou ministériels de son ressort, les charges et sujétions résultant du présent II.

« III. – Dans les zones où l’implantation d’offices supplémentaires de notaire, d’huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire serait de nature à porter atteinte à la continuité de l’exploitation des offices existants ou à compromettre la qualité du service rendu, le ministre de la Justice peut refuser une demande de création d’office ou de nomination en qualité de notaire, d’huissier de justice ou de commissaire‑priseur judiciaire, après avis de l’Autorité de la concurrence rendu dans un délai de deux mois après le dépôt de la demande de création d’office ou de nomination. Cet avis est rendu public. Le refus est motivé au regard, notamment, des caractéristiques de la zone et du niveau d’activité économique des professionnels concernés.

« IV. – Lorsque la création d’un office porte atteinte à la valeur patrimoniale d’un office antérieurement créé, le titulaire de ce dernier est indemnisé, à sa demande, par le titulaire du nouvel office dont la création a causé ce préjudice.

 

« La valeur patrimoniale de l’office antérieurement créé correspond à celle du fonds libéral dexercice de la profession avant la création du nouvel office.

 

« En cas de désaccord sur le montant ou sur la répartition de l’indemnisation, les parties peuvent saisir le juge de l’expropriation qui fixe le montant de l’indemnité dans les conditions définies au chapitre III du titre Ier du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique.

 

« La demande dindemnisation doit être accompagnée d’une évaluation précise du préjudice et des pièces justificatives.

 

« La demande doit être introduite dans un délai de six ans après la création du nouvel office. Le juge peut prévoir un étalement dans le temps du versement de l’indemnité par le titulaire du nouvel office, dans la limite de dix ans. Si le titulaire du nouvel office cesse dexercer ses fonctions avant lexpiration de ce délai, les indemnités sont dues par son successeur. »

 

« V. - Le chapitre II du titre VI du livre IV du code de commerce est complété par un article ainsi rédigé :

 

« Art. L. 462-10. – L’Autorité de la concurrence rend au ministre de la Justice, qui en est le garant, un avis sur la liberté d’installation des notaires, des huissiers de justice et des commissaires-priseurs judiciaires

 

« Elle fait toutes recommandations en vue d’améliorer l’accès aux offices publics ou ministériels dans la perspective de renforcer la cohésion territoriale des prestations et d’augmenter de façon progressive le nombre d’offices sur le territoire. Ces recommandations sont rendues publiques tous les deux ans. Elles sont assorties de la carte mentionnée au I de l’article 13 bis de la loi n°  du  pour la croissance et l’activité.

 

« Lorsque l’Autorité de la concurrence délibère au titre du présent article, son collège comprend deux personnalités qualifiées nommées par décret pour une durée de trois ans non renouvelable. »

 

« VI. – L’article L. 462-10 du code de commerce, dans sa rédaction issue du présent article, est applicable à Wallis-et-Futuna. »

EXPOSÉ SOMMAIRE

Dans un souci de clarification et de simplification du dispositif de libéralisation de l’installation des notaires, huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires qui est proposé par le Gouvernement, le présent amendement propose une réécriture globale du dispositif prévu à l’article 17 du projet de loi ainsi qu’un déplacement de ce dispositif au sein du projet de loi. C’est en effet de ce dispositif que dépend la bonne compréhension des articles 14, 15 et 16. Aussi est-il proposé de le placer avant l’article 14.

Tout d’abord, il apparaît à vos rapporteurs que le dispositif suggéré par le Gouvernement pourrait gagner en lisibilité et en simplicité :

1° s’il était construit sur une distinction plus claire, y compris en termes d’ordonnancement des paragraphes, entre les zones où l’implantation d’offices ou l’association de notaires, d’huissiers de justice et de commissaires-priseurs judiciaires au sein des offices existants apparaissent utiles pour renforcer la proximité et l’offre de services, et celles où l’implantation d’offices supplémentaires de notaire, d’huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire serait de nature à porter atteinte à la continuité de l’exploitation des offices existants ou à compromettre la qualité du service rendu.

2° si la définition des zones où l’installation est libre apparaissait d’emblée au premier alinéa du I de l’article ;

3° si les offices dont il est question à l’article 17 étaient bien explicitement présentés comme étant ceux des notaires, huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires ;

4° si la notion d’« installation » qui est susceptible d’être demandée au garde des Sceaux était clairement présentée comme devant s’entendre de la création d’un office ou de la nomination en qualité de notaire, d’huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire au sein d’un office existant ;

5° si la notion d’« installation » qui est susceptible de donner lieu à indemnisation était clairement présentée comme devant s’entendre de la création d’un office ;

6° s’il n’était pas implicitement suggéré à l’article L. 462-10 [nouveau] du code de commerce que l’Autorité de la concurrence identifie des zones carencées pour procéder à un « appel à candidature » dont on est ainsi invité à conclure qu’elle en a l’initiative… alors que c’est au ministre de la Justice que l’article 17 du projet de loi confie le soin de procéder à un « appel à manifestation d’intérêt » ;

7° si l’ensemble des dispositions relatives au contenu et à la procédure d’élaboration de la carte proposée par l’Autorité de la concurrence étaient regroupées au sein d’un article 13 bis du projet de loi, ce qui n’exclut pas que l’article L. 462-10 [nouveau] fasse référence à cette carte et renvoie à l’article 13 bis.

Ensuite, il semble que le dispositif suggéré par le Gouvernement puisse être précisé sur un certain nombre de points :

1° il est difficilement concevable d’organiser un mécanisme de « nomination tacite » comme le suggère le dispositif proposé en prévoyant que le silence gardé par le ministre de la Justice vaut décision d’acceptation de la demande d’installation – c’est-à-dire de nomination ou de création d’un office ;

2° il est utile de préciser que les ministres de la Justice et de l’Économie arrêteront conjointement la carte des zones proposée par l’Autorité de la concurrence ;

3° il ne paraît pas pertinent d’entretenir la confusion, développée en jurisprudence et pointée par une partie de la doctrine (comme par le récent rapport de la mission d’information de la commission des Lois sur les professions juridiques réglementées - rapport n° 2475) entre le droit de présentation et la valeur patrimoniale de l’office, tant celle-ci correspond surtout à la valeur du « fonds libéral d’exercice de la profession » - notion qu’a consacrée la Cour de cassation en 2000 (Cass. 1ère civ. 7 novembre 2000, pourvoi n° 98-17731) ;

4° il paraît nécessaire de corriger une erreur de référence : dans sa rédaction actuelle, l’alinéa 9 de l’article 17 renvoie à un « livre III » du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique qui n’existe pas. Sans doute l’intention du Gouvernement était-elle de renvoyer les conditions de détermination, par le juge de l’expropriation, du montant de l’indemnité due par le titulaire du nouvel office dans les conditions définies par le chapitre III du titre Ier du code précité.

Enfin, vos rapporteurs estiment que le dispositif proposé par le Gouvernement peut être enrichi :

1°  il est important que les zones où l’installation sera libre soient définies non seulement comme celles où le nombre d’offices doit être renforcé pour améliorer une proximité (géographique) de services, mais aussi comme celles où le nombre de notaires, d’huissiers de justice ou de commissaires-priseurs judiciaires titulaires au sein des offices existants doit être renforcé pour améliorer une offre de services ;

2° dans un souci de préservation et d’amélioration du maillage territorial, et de garantie de l’accès au droit pour nos concitoyens, il est essentiel que la carte proposée par l’Autorité de la concurrence identifie précisément les secteurs dans lesquels des offices doivent être créés ou des officiers publics et/ou ministériels nommés pour renforcer la proximité et l’offre de services ;

3° il est utile que, dans le cadre de la procédure d’élaboration de la carte des zones carencées, l’Autorité de la concurrence puisse consulter des associations de consommateurs ou d’usagers du droit et qu’elle puisse être saisie par des « inventeurs de sites », c’est-à-dire par toutes les personnes qui répondraient aux conditions de nationalité, d’aptitude, d’honorabilité, d’expérience et d’assurance requises pour être nommées par le ministre de la Justice en qualité de notaire, d’huissier de justice ou de commissaire-priseur judiciaire et qui auraient identifié des zones où la proximité et l’offre de services peuvent être renforcées.