Accueil > Documents parlementaires > Amendements
Version PDFRetour vers le dossier législatifVoir le texte de référence

AVANT ART. PREMIERN°CF10 (Rect)

ASSEMBLÉE NATIONALE
30 mars 2016

RÉFORME DU SYSTÈME DE RÉPRESSION DES ABUS DE MARCHÉ - (N° 3601)

Adopté

AMENDEMENT N°CF10 (Rect)

présenté par

M. Baert

----------

ARTICLE ADDITIONNEL

AVANT L'ARTICLE PREMIER, insérer l'article suivant:

I.– Les articles L. 465‑1, L. 465‑2, L. 465‑2‑1 et L. 465‑3 du code monétaire et financier sont remplacés par les articles suivants :

« Art. L. 465‑1‑1. – I. – A. Est puni de 5 ans d’emprisonnement et de 100 millions d’euros d’amende, dont le montant peut être porté au-delà de ce chiffre, jusqu’au décuple du montant de l’avantage retiré du délit ou des pertes qu’il a permis d’éviter, sans que l’amende puisse être inférieure à ce même avantage ou ces mêmes pertes, le fait, par le directeur général, le président, un membre du directoire, le gérant, un membre du conseil d’administration, un membre du conseil de surveillance d’un émetteur concerné par une information privilégiée ou une personne qui exerce une fonction équivalente, par une personne disposant d’une information privilégiée concernant un émetteur au sein duquel elle détient une participation, par une personne disposant d’une information privilégiée à l’occasion de sa profession ou de ses fonctions ou à l’occasion de sa participation à la commission d’un crime ou d’un délit, ou par toute autre personne disposant d’une information privilégiée en connaissance de cause, de faire usage de cette information privilégiée en réalisant, pour elle-même ou pour autrui, soit directement, soit indirectement, une ou plusieurs opérations ou en annulant ou en modifiant un ou plusieurs ordres passés avant que la personne ne détienne l’information privilégiée, sur les instruments financiers émis par cet émetteur ou sur les instruments financiers concernés par ces informations privilégiées.

« B. Il ne doit pas être considéré que le simple fait qu’une personne dispose d’une information privilégiée signifie que cette personne a fait usage de cette information, si son comportement est légitime au sens de l’article 9 du règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché.

« C. Au sens de la présente section, l’expression « information privilégiée » désigne les informations privilégiées au sens de l’article 7, paragraphes 1 à 4, du règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché.

« II. – La tentative de l’infraction prévue au I du présent article est punie des mêmes peines.

« Art. L. 465‑1‑2. – I. – Est puni des peines prévues au A du I de l’article L. 465‑1‑1, le fait, par l’une des personnes mentionnées à cet article, de recommander la réalisation d’une ou plusieurs opérations sur les instruments financiers auxquels l’information privilégiée se rapporte ou d’inciter à la réalisation de telles opérations, sur le fondement de cette information privilégiée.

« II. – Constitue l’infraction prévue au A du I de l’article L. 465‑1‑1, le fait, par toute personne, de faire usage de la recommandation ou de l’incitation mentionnée au I du présent article en sachant qu’elle est fondée sur une information privilégiée.

« III. – Constitue l’infraction prévue au I de l’article L. 465‑1‑3, le fait, par toute personne, de communiquer la recommandation ou l’incitation mentionnée au I du présent article en sachant qu’elle est fondée sur une information privilégiée.

« IV. – La tentative de l’infraction prévue au I du présent article est punie des mêmes peines.

« Art. L. 465‑1‑3. – I. – Est puni des peines prévues au A du I de l’article L. 465‑1‑1, le fait, par une personne disposant d’une information privilégiée concernant un émetteur au sein duquel elle exerce les fonctions de directeur général, de président, de membre du directoire, de gérant, de membre du conseil d’administration, de membre du conseil de surveillance ou une fonction équivalente ou au sein duquel elle détient une information, par une personne disposant d’une information privilégiée à l’occasion de sa profession ou de ses fonctions ou à l’occasion de sa participation à la commission d’un crime ou d’un délit, ou par toute autre personne disposant d’une information privilégiée en connaissance de cause, de la communiquer à un tiers, à moins qu’elle ne prouve que cette communication intervient dans le cadre normal de sa profession ou de ses fonctions, y compris lorsqu’elle relève d’un sondage de marché effectué conformément à l’article 11, paragraphes 1 à 8, du règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché.

« II. – La tentative de l’infraction prévue au I du présent article est punie des mêmes peines.

« Art. L. 465‑2‑1. – I. – A. Est puni des peines prévues au A du I de l’article L. 465‑1‑1, le fait, par toute personne, de réaliser une opération, de passer un ordre ou d’adopter un comportement qui donne ou qui est susceptible de donner des indications trompeuses sur l’offre, la demande ou le cours d’un instrument financier, ou qui fixe ou qui est susceptible de fixer à un niveau anormal ou artificiel le cours d’un instrument financier.

« B. Le A du présent I n’est pas applicable dans les cas où l’opération ou le comportement mentionné au I du présent article est fondé sur un motif légitime et est conforme à une pratique de marché admises, au sens de l’article 3, paragraphe 1, point 9), du règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché.

« II. – Est également puni des peines prévues au A du I de L. 465‑1‑1, le fait, par toute personne, de réaliser une opération, de passer un ordre ou d’adopter un comportement qui affecte le cours d’un instrument financier, en ayant recours à des procédés fictifs ou à toute autre forme de tromperie ou d’artifice.

« III. – La tentative des infractions prévues au I et au II du présent article est punie des mêmes peines.

« Art. L. 465‑2‑2. – I. – Est puni des peines prévues au A du I de l’article L. 465‑1‑1, le fait, par toute personne, de diffuser, par des voies et moyens quelconques, des informations qui donnent des indications fausses ou trompeuses sur l’offre, la demande ou le cours d’un instrument financier ou qui fixent le cours d’un instrument financier à un niveau anormal ou artificiel.

« II. – La tentative de l’infraction prévue au I du présent article est punie des mêmes peines.

« Art. L. 465‑2‑3. – I. – Est puni des peines prévues au A du I de l’article L. 465‑1‑1, le fait, par toute personne :

« 1° De fournir ou de transmettre des données ou des informations fausses ou trompeuses utilisées pour calculer un indice de référence, ou de nature à fausser le cours d’un instrument financier ou d’un actif auquel est lié un tel indice ; ou

« 2° D’adopter tout autre comportement aboutissant à la manipulation du calcul d’un tel indice.

« Constitue un indice de référence tout taux, indice ou chiffre mis à la disposition du public ou publié, qui est déterminé périodiquement ou régulièrement par application d’une formule, ou sur la base de la valeur d’un ou de plusieurs actifs ou prix sous-jacents, y compris des estimations de prix, de taux d’intérêt ou d’autres valeurs réels ou estimés, ou des données d’enquêtes, et par référence auquel est déterminé le montant à verser au titre d’un instrument financier ou la valeur d’un instrument financier.

« II. – La tentative de l’infraction prévue au I du présent article est punie des mêmes peines.

« Art. L. 465‑3. – I. – Les dispositions de la présente section s’appliquent :

« 1° Aux instruments financiers négociés sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation ou pour lesquels une demande d’admission à la négociation sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation a été présentée ;

« 2° Aux instruments financiers autres que ceux mentionnés au 1° dont le cours ou la valeur dépend du cours ou de la valeur d’un instrument financier mentionné au 1° ou dont le cours ou la valeur a un effet sur le cours ou la valeur d’un instrument financier mentionné au 1°.

« 3° Aux unités mentionnées à l’article L. 229‑7 du code de l’environnement.

« II. – Les dispositions des articles L. 465‑2‑1 et L. 465‑2‑2 s’appliquent également :

« 1° Aux contrats au comptant sur matières premières au sens de l’article 3, paragraphe 1, point 15), du règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché, qui ne sont pas des produits énergétiques de gros au sens de l’article 2, point 4), du règlement (UE) n° 1227‑2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’intégrité et la transparence du marché de gros de l’énergie, lorsque l’opération, le comportement ou la diffusion a ou est susceptible d’avoir un effet sur le cours ou la valeur d’un instrument financier visé au I ;

« 2° Aux instruments financiers dont le cours ou la valeur a un effet sur le cours ou la valeur d’un contrat au comptant sur matières premières au sens de l’article 3, paragraphe 1, point 15), du règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché, lorsque l’opération, le comportement ou la diffusion a ou est susceptible d’avoir un effet sur le cours ou la valeur du contrat au comptant sur matières premières ;

« III. – Les dispositions de la présente section ne s’appliquent pas :

« 1° Aux opérations de rachat par les sociétés de leurs propres actions, au sens des articles L. 225‑206 à L. 225‑216 du code de commerce, lorsque ces opérations sont réalisées conformément à l’article 5, paragraphes 1 à 3 du règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché ;

« 2° Aux opérations de stabilisation, au sens de l’article 3, paragraphe 2, point d), du règlement (UE) n° 596/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché, portant sur les instruments financiers mentionnés à l’article 3, paragraphe 2, points a) et b) de ce règlement, lorsque ces opérations sont réalisées conformément à l’article 5, paragraphes 4 et 5, de ce règlement ;

« 3° Aux opérations ou comportements mentionnés à l’article 6, paragraphes 1 à 4, du règlement (UE) n° 596/2014 du parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014 sur les abus de marché.

« Art. L. 465‑3‑1. – Les personnes morales déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l’article 121‑2 du code pénal, des infractions définies aux articles L. 465‑1‑1 à L. 465‑2‑3 encourent, outre l’amende suivant les modalités prévues par l’article 131‑38 du code pénal, les peines prévues par l’article 131‑39 du même code.

« L’interdiction mentionnée au 2° de l’article 131‑39 du code pénal porte sur l’activité dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise. »

II.– Le même code est ainsi modifié :

1° À l’article L. 466‑1, la référence : « L. 465‑1 » est remplacée par les références : « L. 465‑1‑1 à L. 465‑1‑3 » ;

2° À l’article L. 621‑12, les références : « L. 465‑1, L. 465‑2 et L. 465‑2‑1 » sont remplacées par les références : « L. 465‑1‑1 à L. 465‑2‑3 » ;

3° Au troisième alinéa de l’article L. 621‑17‑7, les mots : « de l’article L. 465‑1 et du premier alinéa de l’article L. 465‑2 » sont remplacés par les mots : « des articles L. 465‑1‑1 à L. 465‑2‑1 » ;

III.– À l’article 705‑1 du code de procédure pénale, les références : « L. 465‑1, L. 465‑2 et L. 465‑2‑1 » sont remplacées par les références « L. 465‑1‑1 à L. 465‑2‑3 » ;

IV.– À l’article 421‑1 du code pénal, la référence : « à l’article L. 465‑1 » est remplacée par les références : « aux articles L. 465‑1‑1 à L. 465‑1‑3 ».

V.– Les dispositions du présent article entrent en vigueur le 3 juillet 2016.

EXPOSÉ SOMMAIRE

La transposition de la directive européenne sur les abus de marché (dite directive MAD) et le règlement qui lui est associé ( dit règlement MAR) du 16 avril 2014 obligent les États membres à renforcer leur système répressif pénal en matière d’abus de marché, en établissant des sanctions « effectives, proportionnées et dissuasives », Ces dispositions doivent être transposées en droit français avant le 3 juillet 2016. 

Afin de s’y conformer, cet amendement modifie l’intégralité de la section du code monétaire et financier qui constitue la base légale des infractions en matière d’abus de marché, à savoir les incriminations d’abus d’initié, de diffusion de fausse information et de manipulation des cours. Il procède tout d’abord à la refonte des périmètres des trois délits principaux en matière d’abus de marché, afin de les rendre conforme à la réglementation européenne. Les trois incriminations sont désormais : l’opération d’initié, au champ plus réduit que le délit d’initié existant, la divulgation illicite d’information privilégiée, jusqu’à maintenant incluse dans le délit d’initié, et la manipulation de marché, incluant l’actuel délit de manipulation des cours et celui de diffusion de fausse information. Surtout, ces trois délits seront désormais tous punis d’une peine maximale de cinq ans d’emprisonnement (contre 1 ou 2 ans aujourd’hui en fonction des cas), et d’une sanction pécuniaire d’un montant égal à celui de la sanction administrative, à savoir 100 millions d’euros (contre 150 000 euros ou 1,5 million d’euros aujourd’hui). Ces nouvelles incriminations seront dupliquées à l’identique sous forme de manquements administratifs. La responsabilité pénale des personnes morales n’a pas été modifiée.

Cet amendement procède également à la coordination nécessaire avec les autres articles du code monétaire et financier, mais également du code pénal et du code de procédure pénale, afin que les références aux articles correspondent à la nouvelle numérotation.