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N
° 253

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 octobre 2012

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE
loi de finances pour 2013
(n° 235),

TOME XV

RECHERCHE ET ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

GRANDS ORGANISMES
DE RECHERCHE

PAR M. Franck REYNIER,

Député.

——

Voir le numéro : 251 (annexe 37)

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I.— LE RALENTISSEMENT DE L’EFFORT FINANCIER EN FAVEUR DE LA RECHERCHE 9

A.— LE PROGRAMME 150 : FORMATIONS SUPÉRIEURES ET RECHERCHE UNIVERSITAIRE (ACTIONS 6 À 12) 9

B.— LE PROGRAMME 172 : RECHERCHES SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES PLURIDISCIPLINAIRES 10

C.— LE PROGRAMME 193 : RECHERCHE SPATIALE 12

II.— UN BUDGET DÉCEVANT QUI PLACE LES ORGANISMES DE RECHERCHE DANS UNE SITUATION PÉRILLEUSE 17

A.— LE BUDGET DE L’INRIA 17

B.— LE BUDGET DE L’INSERM 19

C.— LE BUDGET DU CNRS 22

D.— LE BUDGET DU CNES 26

E.— LE BUDGET DU CEA 29

III.— LE FINANCEMENT SUR PROJETS : UN SYSTÈME INSUFFISAMMENT DÉVELOPPÉ EN FRANCE, MIS EN CAUSE PAR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2013, DONT IL CONVIENT DE FAVORISER LA MODERNISATION 35

A.— L’AGENCE NATIONALE DE LA RECHERCHE : UNE INSTITUTION EN VOIE DE MODERNISATION DONT LES EFFORTS DE BONNE GESTION DOIVENT ÊTRE SOUTENUS 35

1. Une institution dont la fragilité a été soulignée par la Cour des comptes 35

2. Des efforts de gestion remarquables qu’il convient de soutenir 35

B.— LE PLF POUR 2013 REMET EN CAUSE L’ÉQUILIBRE DU FINANCEMENT SUR PROJETS, À REBOURS DE LA POLITIQUE DES GRANDS PAYS DÉVELOPPÉS 37

1. Le contexte international : le financement sur projets, pivot des systèmes de recherche 37

2. Le PLF pour 2013 remet en cause l’équilibre du financement sur projets 38

a) Une baisse de près de 10 % du budget de l’ANR et les risques de futures annulations de crédits 38

b) Les conséquences du PLF pour 2013 : le report ou l’abandon de plusieurs programmes de recherche 39

3. Face à un budget sous-calibré, il est impératif de prendre des mesures correctrices 39

a) Les économies de fonctionnement 39

b) La réserve de précaution 40

C.— TROIS AXES DE RÉFLEXION POUR ACCROÎTRE L’EFFICACITÉ DU FINANCEMENT SUR PROJETS 40

a) L’équilibre à trouver entre financement sur projets et crédits récurrents 40

b) La révision des modalités de calcul des frais de gestion et du préciput 41

c) La simplification des procédures de réponses aux appels d’offres 42

EXAMEN EN COMMISSION 43

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 45

MESDAMES, MESSIEURS,

Le prix Nobel de physique attribué à M. Serge Haroche en octobre 2012 pour ses travaux portant sur les interactions entre la lumière et la matière est une illustration, parmi beaucoup d’autres, de l’excellence de la recherche française. Cette distinction est également un hommage rendu aux institutions au sein desquelles il a accompli sa carrière : le CNRS, l’Université Pierre-et-Marie-Curie, l’École normale supérieure, l’École polytechnique et le Collège de France, dont il est actuellement l’administrateur.

Cette récompense fait suite à celles reçues par MM. Cédric Villani et Ngô Bao Châu, lauréats de la médaille Fields en 2011, M. Jules Hoffmann, lauréat du prix Nobel de médecine la même année, ou encore M. Yves Chauvin, récipiendaire du prix Nobel de chimie en 2005. Plus largement, comment ne pas saluer le travail accompli par l’ensemble de nos organismes de recherche, qui permettent à notre pays de faire vivre la chaîne de l’innovation, depuis la recherche fondamentale menée dans les laboratoires jusqu’aux applications commercialisées par de jeunes pousses souvent issues des incubateurs et des fonds d’amorçage ?

Alors que la compétitivité figure au cœur de l’agenda politique, il faut rappeler le caractère primordial de la recherche, seule à même de produire de l’innovation, d’irriguer le tissu économique en emplois hautement qualifiés et, ce faisant, d’alimenter la croissance de long terme. À cet égard, les réformes d’ampleur engagées depuis 2006 en faveur de la recherche et de l’innovation, accompagnées d’un effort budgétaire constant entre 2007 et 2012, auront constitué un puissant facteur de soutien aux travaux de recherche les plus innovants.

Deux indicateurs sont particulièrement illustratifs de l’effort financier accompli au cours des cinq dernières années en faveur de la recherche et de l’innovation :

• l’accroissement de la part des dépenses consacrées à la recherche dans le budget général de l’État, qui est passée de 4,38 % au début de la législature à 4,77 % dans le PLF 2012 ;

• l’augmentation de la part de la dépense intérieure de recherche-développement dans le produit intérieur brut, comme l’atteste le tableau ci-dessous :

Si les progrès sont bien réels, la position relative de la France n’en demeure pas moins fragile. En effet, la France se situe à la cinquième place parmi les six pays les plus importants de l’OCDE en termes de dépense intérieure de recherche-développement (DIRD), derrière la Corée du Sud (3,74 %), le Japon (3,26 %), les États-Unis (2,90 % en 2009) et l’Allemagne (2,82 %), mais devant le Royaume-Uni (1,76 %). Entre 2009 et 2010, le ratio progresse pour la Corée du Sud et reste stable pour la France et l’Allemagne. En effet, l’effort de recherche français reflète un positionnement modéré de son économie sur les industries de haute technologie, qui engendrent 4,5 % de la valeur ajoutée totale de l’économie marchande, contre 12,9 % en Allemagne. Si le tissu économique français était structuré de la même façon qu’en Allemagne, le ratio DIRD/PIB de la France dépasserait 3,5 %.


Il est à noter qu’entre 2009 et 2010, l’effort de recherche a augmenté grâce à une croissance de la dépense intérieure de R&D plus soutenue que celle du PIB (+ 1,7 % en volume).

Il est à craindre que cette position fragile mais durement acquise dans un contexte de concurrence croissante des pays émergents soit compromise par le projet de loi de finances pour 2013, qui, non seulement, est loin d’être à la hauteur des ambitions affichées, mais, de manière plus inquiétante encore, compromet gravement l’équilibre du financement sur projets.

Alors que le Gouvernement prétend faire de l’emploi, de la compétitivité et de l’innovation des axes majeurs de sa politique, votre rapporteur s’étonne du décalage existant entre les discours et leur traduction budgétaire. La hausse des crédits de paiement dédiés à la recherche est en effet limitée à 1,2 %, après avoir atteint 19,1 % sur la période 2007-2012. En raison de la sous-dotation imposée à un grand nombre d’organismes, des établissements tels que le CEA et le CNES vont être contraints de reporter ou d’annuler purement et simplement des programmes de recherche, pourtant stratégiques pour notre économie et nos entreprises. De surcroît, plusieurs établissements, handicapés par ailleurs par le système de la réserve de précaution, se voient confier de nouvelles missions, par exemple dans le domaine de la sécurité et de l’expertise, qui impliqueront nécessairement le sacrifice d’activités de recherche, en particulier de celles ne bénéficiant pas d’un co-financement.

De manière générale, il convient de veiller à mettre en adéquation l’ambition que l’on souhaite donner à ces organismes et les moyens correspondants. Lors de la détermination du montant de la subvention de l’État, le Gouvernement doit tenir compte des efforts de gestion consentis par les organismes, au lieu d’imposer des mesures d’économies de manière indifférenciée.

De manière plus inquiétante encore – votre rapporteur l’exposera plus en détail dans la troisième partie de cet avis – ce budget risque de désorganiser le système de financement sur projets puisque la subvention de l’ANR subit une baisse de près de 10 % (à - 73,2 M€).

Pour l’ensemble de ces raisons, votre rapporteur vous demande de donner un avis défavorable à l’adoption des crédits pour 2013 des grands organismes de recherche de la mission interministérielle « recherche et enseignement supérieur ».

I.— LE RALENTISSEMENT DE L’EFFORT FINANCIER
EN FAVEUR DE LA RECHERCHE

Eu égard au nombre des programmes de la mission « recherche et enseignement supérieur » et à l’ampleur des moyens qui lui sont attribués, la commission des affaires économiques rend deux avis distincts, afin de traduire la pluralité des points de vue de la commission sur cette mission. Outre le traditionnel avis consacré aux grands organismes de recherche (qui fera l’objet du présent rapport), sera également rendu un avis sur la recherche industrielle.

Le projet de loi de finances pour 2013 se révèle périlleux pour le secteur de la recherche. En effet, contrairement aux déclarations du Gouvernement, la recherche semble être devenue le parent pauvre de la mission recherche et enseignement supérieur. Alors que les crédits de paiement de la mission sont en hausse de 2,15 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2012, et même de 7,3 % s’agissant du programme 231 (vie étudiante), les crédits affectés aux actions 6 à 12 du programme 150, au programme 172 (recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires) et au programme 193 (recherche spatiale) connaissent une hausse limitée à, respectivement, 0,82 %, 0,87 % et 1,07 %.

A.— LE PROGRAMME 150 : FORMATIONS SUPÉRIEURES ET RECHERCHE UNIVERSITAIRE (ACTIONS 6 À 12)

Ce programme, bien qu’excédant le périmètre de la recherche au sens strict, mérite d’être évoqué en raison de l’importance de sa dotation.

Au sein des quinze actions que regroupe le programme n° 150, seules les actions 6 à 12 relèvent spécifiquement du secteur de la recherche universitaire, soit un budget global de 3,775 Md€ (en autorisations d’engagements et en crédits de paiement) dans le PLF pour 2013, soit une légère hausse de 0,82 % par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2012.

Parmi ces six actions, les principales sont :

– l’action 11 (7,7 %) : Recherche universitaire en sciences de l’homme et de la société ;

– l’action 12 (7,3 %) : Recherche universitaire, interdisciplinaire et transversale ;

– l’action 6 (6,1 %) : Recherches universitaires en sciences de la vie, biotechnologies et santé.

Le détail des crédits par action se présente comme suit :

Programme 150

PLF 2012

PLF 2013

Évolution

2012-2013

Action n° 6 : recherches universitaires en sciences de la vie, biotechnologies et santé

756,87

769,83

+ 1,71 %

Action n° 7 Recherche universitaire en mathématiques, sciences et techniques de l’information et de la communication, micro et nanotechnologies

365,95

370,12

+ 1,13 %

Action n° 8 Recherche universitaire en physique, chimie et sciences pour l’ingénieur

548,20

548,73

+ 0,09 %

Action n° 9 Recherche universitaire en physique nucléaire et des hautes énergies

12,77

13,32

+ 4,3 %

Action n° 10 Recherche universitaire en sciences de la terre, de l’univers et de l’environnement

163,98

166,01

+ 1,23 %

Action n° 11 Recherche universitaire en sciences de l’homme et de la société

968,41

976,11

+ 0,79 %

Action n° 12 Recherche universitaire, interdisciplinaire et transversale

927,75

931,64

+ 0,41 %

(en millions d’euros, autorisations d’engagement = crédits de paiement)

Les principaux opérateurs chargés de mettre en œuvre ce programme sont, soit des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel (EPSCP), soit des établissements publics administratifs, autonomes ou rattachés. Sont ainsi concernés les universités, les grands établissements, les instituts d’études politiques, les écoles d’ingénieurs indépendantes sous tutelle du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, les écoles normales supérieures et divers établissements à vocation de recherche et d’enseignement supérieur, dont les observatoires de Paris et de Nice et les cinq écoles françaises à l’étranger (parmi lesquelles figurent notamment l’école française d’Athènes, l’école française de Rome et l’Institut français d’archéologie orientale du Caire).

B.— LE PROGRAMME 172 : RECHERCHES SCIENTIFIQUES ET TECHNOLOGIQUES PLURIDISCIPLINAIRES 

Programme 172

PLF 2012

PLF 2013

Évolution 2012-2013

Autorisations d’engagement = crédits de paiement

5,121

5,166

+ 0,87 %

(en milliards d’euros)

Ce programme joue un rôle central dans la conduite de la politique de recherche, tant par son volume (il s’agit toujours du premier programme dédié à la recherche au sein de la MIRES) que par son étendue, puisqu’il couvre l’ensemble des champs scientifiques, qu’il s’agisse, pour ne prendre que quelques exemples, de la santé, de l’histoire, des nanotechnologies ou de l’exploration des fonds marins.

Les principales actions de ce programme sont :

– l’action 5 (23,6 %) : Recherches scientifiques et technologiques en sciences de la vie, biotechnologies et santé ;

– l’action 2 (13,3 %) : Agence nationale de la recherche ;

– l’action 7 (13,2 %) : Recherches scientifiques et technologiques en physique, chimie et sciences pour l’ingénieur.

Le détail des crédits par action se présente comme suit :

Programme 172

PLF 2012

PLF 2013

Évolution

2012-2013

Action n° 1 : pilotage et animation

169,22

151,68

- 10,36 %

Action n° 2 : Agence nationale de la recherche

759,85

686,65

- 9,63 %

Action n° 5 : Recherches scientifiques et technologiques en sciences de la vie, biotechnologies et santé

1 174,68

1 220,90

+ 3,93 %

Action n° 6 Recherches scientifiques et technologiques en mathématiques, sciences et techniques de l’information et de la communication, micro et nanotechnologies

509,35

524,79

+ 3,03 %

Action n° 7 Recherches scientifiques et technologiques en physique, chimie et

sciences pour l’ingénieur

616,52

681,30

+ 10,5 %

Action n° 8 Recherches scientifiques et technologiques en physique nucléaire et des hautes énergies

334,78

334

- 0,23 %

Action n° 9 Recherches scientifiques et technologiques en sciences de la terre, de l’univers et de l’environnement

300,71

314,19

+ 4,48 %

Action n° 10 Recherches scientifiques en sciences de l’homme et de la société

313,19

330,92

+ 5,66 %

Action n° 11 Recherches interdisciplinaires et transversales

60,97

62,70

+ 2,83 %

Action n° 12 Diffusion, valorisation et transfert des connaissances et des technologies

75,18

78,86

+ 4,89 %

Action n° 13 Grandes infrastructures de recherche

304,35

244,24

- 19,75 %

Action n° 14 Moyens généraux et d’appui à la recherche

503,01

526,45

+ 4,65 %

(en millions d’euros, autorisations d’engagement = crédits de paiement)

Les principaux opérateurs concernés sont prioritairement les grands organismes de recherche comme le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), dans sa seule dimension civile, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), l’Institut national des études démographiques (INED), ainsi que l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA). Mettent également en œuvre ce programme des fondations (au premier rang desquelles se trouve l’Institut Pasteur) et des groupements d’intérêt public (principalement l’IPEV – Institut Paul-Émile Victor, et l’ANRS – Agence nationale de recherche sur le sida).

S’agissant de ce programme, les principales caractéristiques du PLF pour 2013 sont :

– une forte baisse des crédits de l’ANR (- 73,2 M€, soit près de - 10 %) et un redéploiement partiel des crédits vers les organismes de recherche (+ 55,6 M€) ;

– la baisse des crédits d’intervention du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche (- 16,6 M€) ;

– la revalorisation du budget consacré au projet ITER – « réacteur thermonucléaire expérimental international » (+ 38,1 M€) et à la société civile GENCI – « grand équipement national de calcul intensif » (+ 14,7 M€) ;

– la sortie du périmètre de l’action 13 (Grandes infrastructures de recherche) de 18 opérations, qui représentent 58,73 M€. Le solde de ces crédits est ventilé au sein des autres actions.

Les dépenses fiscales rattachées à ce programme sont constituées à titre quasi-exclusif du crédit d’impôt en faveur de la recherche (CIR), instrument privilégié de la recherche privée qui permet aux entreprises effectuant des dépenses de recherche d’obtenir une créance fiscale sur l’État. Il est évalué à 3,35 Md€ en 2013, auxquels s’ajoutent 5 M€ au titre de l’exonération de l’impôt sur les sociétés en faveur principalement des établissements publics de recherche.

C.— LE PROGRAMME 193 : RECHERCHE SPATIALE

Le PLF pour 2013 propose de fixer les crédits à 1,413 Md€, ce qui représente, par rapport au PLF pour 2012, une hausse de 1,07 %.

 

PLF 2012

PLF 2013

Évolution 2012-2013

Autorisations d’engagement = crédits de paiement

1,398

1,413

+ 1,07 %

Les principales actions de ce programme sont :

– l’action 4 (35,6 %) : Maîtrise de l’accès à l’espace

– l’action 2 (19,7 %) : Développement de la technologie spatiale au service de l’observation de la terre

– l’action 5 (15,6 %) : Maîtrise des technologies orbitales et de l’innovation technologique

Programme 193

PLF 2012

PLF 2013

Évolution

2012-2013

Action n° 1 : Développement de la technologie spatiale au service de la science

178,33

180,42

+ 1,17 %

Action n° 2 : Développement de la technologie spatiale au service de l’observation de la terre

278,13

277,87

- 0,09 %

Action n°3 : Développement de la technologie spatiale au service de la recherche en sciences de l’information et de la communication

113,65

116,04

+ 2,1 %

Action n°4 Maîtrise de l’accès à l’espace

493,67

503,59

+ 2 %

Action n° 5 Maîtrise des technologies orbitales et de l’innovation technologique

219,47

220,33

+ 0,39 %

Action n° 6 Moyens généraux et d’appui à la recherche

84,56

84,05

- 0,6 %

Action n° 7 Développement des satellites de météorologie

30,7

30,7

0 %

(en millions d’euros, autorisations d’engagement = crédits de paiement)

L’opérateur principal de ce programme est, naturellement, le centre national d’études spatiales (CNES), qui œuvre dans le cadre du contrat pluriannuel 2011-2015, signé le 26 octobre 2010, tout en veillant à s’accorder avec les actions menées par ailleurs par l’Agence spatiale européenne (ESA). Il oriente l’action du CNES dans les directions suivantes : la participation à la montée en puissance de l’Union européenne dans le domaine spatial ; la mise en service des systèmes spatiaux décidés au niveau national, tels que, à titre d’exemple, les satellites Megha-Tropiques (cycle de l’eau), Altika (altimétrie) ou Meteosat 3ème génération (météorologie) ; le concours et l’expertise pour le développement des nouvelles générations de satellites (par exemple : SWOT pour l’altimétrie) et de lanceurs (Ariane 5 ME et Ariane 6).

Le PLF pour 2013 propose de réduire les crédits du CNES de 14,48 M€ au titre du budget multilatéral (- 2,42 %) et d’accroître de 29,9 M€ (sur une enveloppe annuelle de 799 M€, soit + 3,76 %) les crédits accordés au titre de la contribution française à l’agence spatiale européenne (ESA).

RÉCAPITULATION DES CRÉDITS PAR PROGRAMME ET PAR TITRE

II.— UN BUDGET DÉCEVANT QUI PLACE LES ORGANISMES DE RECHERCHE DANS UNE SITUATION PÉRILLEUSE

Après avoir vu de façon générale, autant qu’abstraite parfois, les moyens dont disposait la mission recherche et enseignement supérieur, il nous a semblé opportun d’étudier de façon détaillée les crédits dont les principaux organismes de recherche rattachés aux programmes 150 (dans son volet recherche), 172 et 193 bénéficient dans le cadre du projet de loi de finances pour 2013.

A.— LE BUDGET DE L’INRIA

L’Institut de recherche en informatique et en automatique (INRIA) a été créé par la loi n° 67-7 du 3 janvier 1967. Il est alors l’un des principaux artisans du Plan Calcul, lancé en 1966 et destiné à doter la France d’une indépendance en matière de technologie informatique. L’institut devient, en 1979, un établissement public à caractère administratif puis, en 1985, un établissement public à caractère scientifique et technologique (EPST), placé sous la double tutelle du ministère chargé de la recherche et du ministère chargé de l’industrie. L’INRIA constitue aujourd’hui un ensemble de renommée internationale réunissant huit centres de recherche, les trois derniers ayant été créés au début de l’année 2008.

L’institut est en train de finaliser un nouveau plan stratégique « Objectif INRIA 2020 » pour la période 2013-2017. La stratégie scientifique de l’INRIA est construite autour de deux axes complémentaires, sur lesquels s’articulera la contribution de l’institut:

– les sciences et technologies du numérique utiles à l’humain, à la société et la connaissance ;

– les développements scientifiques prioritaires au cœur de nos sciences.

Le budget de l’INRIA pour 2012 s’inscrit dans le cadre des orientations fixées par le contrat d’objectif 2011-2014 approuvé par le Conseil d’administration. Hors produits et charges calculés, les crédits ouverts au budget primitif pour 2012 s’élèvent à 228,87 M€ (contre 231,09 M€ en 2011), soit - 1 %, pour un total de financements inscrits au budget de 227,37 M€.

L’équilibre du budget 2012 est assuré grâce à un prélèvement sur le fonds de roulement, à hauteur de 1,5 M€, autorisé afin de permettre le financement de dépenses exceptionnelles en lien avec les opérations immobilières de l’établissement.

Les subventions pour charges de service public (SCSP) s’établissent à 166,94 M€ (contre 167,7 M€ en LFI 2011).

Les ressources propres sont estimées à 60,42 M€ (+ 0,82 M€, + 1,4 %) et intègrent (pour 1,98 M€) les premiers financements issus du programme d’investissements d’avenir (PIA). Les contrats et soutiens finalisés à l’activité de recherche sont estimés à 52,48 M€ (+ 7,13 M€, +15,7 %). Au sein de cette catégorie de recettes, sont identifiés les contrats publics au titre du PIA (1,98 M€).

La progression des ressources propres porte à la fois sur les contrats de recherche avec des partenaires publics ou privés, à 44,43 M€ (contre 42,12 M€ en 2011), et les subventions sur projet ou programme de recherche, à 8,04 M€ (contre 3,22 M€ en 2011). Les contrats publics (37,87 M€) comprennent notamment les financements de l’ANR et de l’Union européenne, respectivement pour 12,97 M€ (contre 13,59 M€ en 2011) et 14,6 M€ (contre 13,8 M€ en 2011). Il est à noter que la progression des ressources provenant des contrats et des soutiens de recherche finalisés présente un caractère structurel. Elle résulte en effet des succès obtenus par les équipes de recherche de l’institut dans les divers appels à projets nationaux (ANR, pôles de compétitivité, etc.) et européens (PCRD, ERC, etc.) ainsi que d’une progression des financements provenant du secteur privé.

La subvention pour charges de service public pour 2013 s’élève quant à elle à 169,51 M€ (+ 2,12 %). La dotation de base accordée à l’INRIA pour 2012, comporte, par rapport à 2011, trois évolutions principales :

– le relèvement du taux de cotisation employeur aux pensions civiles et à l’allocation temporaire d’invalidité porté à 74,6 % au 1er janvier 2013 (+ 2,66 M€), et un redéploiement de crédits en provenance de l’ANR (+ 3,464 M€) ;

– 2,71 M€ de compensation des mesures d’économies 2011-2012 ;

– le financement de 20 post-doctorants (qui ne seront plus pris en charge sur la ligne spécifique de l’action 1), et de 82 post-doctorants sur la ligne spécifique de l’action 1, évalué à 2,862 M€.

Par ailleurs, le plafond d’emplois de l’établissement demeure inchangé à 1 794 ETP. Plus de la moitié des salariés de l’établissement sont titulaires de contrats à durée déterminée : doctorants, post-doctorants, souvent étrangers, et ingénieurs.

À cet égard, votre rapporteur tient à souligner que l’INRIA constitue un vivier pour le monde économique : chaque année, 400 à 500 ingénieurs sortent de ses rangs pour travailler dans le secteur privé, et l’établissement aide à la création de six à huit entreprises innovantes (120 depuis sa naissance), grâce à son programme de financement de start-up. Cet établissement joue un rôle stratégique dans la mesure où il assure le passage de la recherche au marché – ce qui demeure un point faible du système français – par le biais de partenariats stratégiques conclus avec des entreprises telles que Bull, Alcatel-Lucent ou Google, pour n’en citer que quelques-unes.

Par ailleurs, l’INRIA subit depuis plusieurs années une contrainte de financement spécifique, liée aux opérations immobilières engagées pour les trois nouveaux centres de Saclay, Bordeaux et Lille. À cette priorité s’en sont ajoutées deux autres dans le cadre du budget 2012 :

– la maîtrise de l’évolution de la masse salariale limitative, ce qui se traduit pour l’essentiel par le remplacement des départs sur les supports d’emploi permanents (avec un arbitrage au profit de Bordeaux, Lille et Saclay) et le fait de ne pourvoir qu’environ 85 % des supports d’emplois contractuels ;

– le maintien du niveau des moyens de base alloués aux équipes de recherche, la priorité étant accordée aux centres de Lille, Bordeaux et Saclay.

Ces choix ont impliqué :

– une contraction des dépenses de fonctionnement, à tous les niveaux et dans toutes les entités (globalement - 3 % d’un budget primitif à l’autre) ;

– une réduction des dépenses d’investissement autres que celles liées aux opérations immobilières en cours, à savoir les équipements scientifiques et technologiques ne faisant pas l’objet d’engagements dans le cadre des contrats de projets État-région, les travaux d’infrastructure de réseaux et le renouvellement de matériels informatiques ;

– et un rééchelonnement de certaines « dépenses d’intervention » (opérations partenariales).

Au-delà de cette seule dimension budgétaire, alors que le numérique constitue l’un des trois axes de la stratégie nationale de recherche et d’innovation, votre rapporteur souhaiterait que le Gouvernement accorde une véritable priorité aux programmes de recherche de l’INRIA et, plus largement, à ce pan de la recherche française. Il est à craindre, en effet, qu’à défaut de signal politique, la France – et plus largement l’Europe - ne ratent le virage du numérique, qui est pourtant un facteur essentiel de la croissance de long terme.

B.— LE BUDGET DE L’INSERM

Créé en 1964, l’INSERM est un établissement public à caractère scientifique et technologique placé sous la double tutelle du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et du ministère de la santé. Régi par le décret n° 83-975 du 10 novembre 1983, l’INSERM a notamment pour finalité de développer et de coordonner tous travaux de recherche ayant notamment pour objectifs la connaissance de la santé de l’homme et des facteurs qui la conditionnent, la découverte et l’évaluation de tous moyens d’intervention tendant à prévenir, à diagnostiquer et à traiter les maladies et à améliorer l’état de santé de la population. Au terme de la réorganisation conduite depuis 2008, l’organisation interne de l’INSERM est aujourd’hui en phase avec la structuration thématique mise en place dans le cadre de l’alliance pour les sciences de la vie et de la santé (AVIESAN). Au terme du contrat d’objectifs État-INSERM 2011-2015 et du plan stratégique adopté fin 2009, l’INSERM structure son action autour de quatre objectifs stratégiques :

– assurer la production de connaissances au niveau international le plus adapté ;

– contribuer à la diffusion de ces connaissances au sein de la société ;

– accroître le transfert des connaissances vers les applications cliniques et développer la recherche en santé publique ;

– développer le transfert des connaissances vers les applications industrielles et accroître leur valorisation économique.

En termes de structuration de ses activités, le contrat État-INSERM fixe trois objectifs  à l’institut :

– accompagner la structuration et le renforcement des universités, dans le respect de leur autonomie ;

– poursuivre et renforcer les actions de coordination au sein d’AVIESAN et participer à la simplification du paysage institutionnel de la recherche, tout particulièrement dans le domaine des sciences de la vie et de la santé ;

– aligner la gestion avec les besoins de la recherche et les évolutions de l’établissement.

Dans le budget primitif pour 2012, la subvention pour charges de service public s’élève à 598,84 M€ pour 2012 (597,82 M€ hors post-doctorants).

L’évolution de cette subvention tient compte de mesures budgétaires prévues au PLF 2012 :

– l’intégration au 1er janvier 2012 de l’ANRS (+ 39,88 M€) ;

– l’ajustement des crédits relatifs au plan cancer 2 (+ 3 M€) ;

– la hausse du taux de cotisation aux pensions civiles et à l’ATI (+5,65 M€) ;

– les économies de fonctionnement et la reprise de crédits « plan de relance de l’investissement public » (- 6,51 M€).

Les ressources propres, quant à elles, connaissent une progression notable (241,42 M€, + 26,42 M€, + 12,3 %). L’ANRS contribue fortement à cette augmentation et apporte à elle seule 6,71 M€ supplémentaires, soit environ un quart de l’évolution prévisionnelle. L’évolution est notable sur ce point puisqu’elles ne représentaient qu’une quarantaine de millions d’euros à la fin des années 1990.

Les ressources propres sont issues :

– des contrats et soutiens finalisés à la recherche pour 225,75 M€ ;

– des produits de l’activité de recherche et prestations de services, à hauteur de 9,32 M€ ;

– des autres subventions et produits pour 6,35 M€.

Dans le PLF pour 2013, la SCSP inscrite sur l’enveloppe de crédits du programme s’établit à 620,45 M€ (+ 22,62 M€ et +3,8 %). Cette évolution intègre le relèvement du taux de cotisation employeur aux pensions civiles et à l’allocation temporaire d’invalidité porté à 74,6 % au 1er janvier 2013 (+ 10,21 M€), et, conformément aux orientations décidées par le Gouvernement, un redéploiement de crédits précédemment mobilisés par l’ANR dans le cadre d’appels à projet (+ 12,44 M€). Les crédits relevant de l’action 13 (TGIR) n’intègrent plus l’opération reclassée ÉCRIN (infrastructure européenne de recherche clinique, -0,46 M€) sur laquelle un ajustement net a, par ailleurs, été effectué (-0,03 M€).

Ce budget peut sembler relativement satisfaisant eu égard au contexte budgétaire. Il permettra en particulier de réaliser des campagnes de recrutements de chercheurs et d’ITA d’un niveau équivalent à celui des années précédentes. Toutefois, il conviendra de veiller à ce que les fonds retirés à l’ANR soient effectivement versés à l’établissement.

Au-delà de cette question, deux incertitudes principales se posent aujourd’hui. D’une part, à quel niveau sera fixée la réserve de précaution ? Votre rapporteur rappelle qu’il s’agit d’une difficulté récurrente pour l’ensemble des organismes de recherche. Alors que des efforts substantiels sont demandés aux établissements, le retour aux taux de 0,5 % de la masse salariale et de 6 % des dépenses de fonctionnement et d’investissement les contraindrait à réduire la dotation affectée à leurs unités de recherche. Comme votre rapporteur l’a rappelé, lors de la commission élargie du 23 octobre 2012, à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, il est indispensable que les établissements publics scientifiques et technologiques (EPST) continuent à bénéficier des taux réduits de mise en réserve de 0,25 % et de 3 %.

La deuxième source d’incertitude concerne l’application de la loi n°2012-347 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique. En particulier, une circulaire d’application de la ministre de la réforme de l’État, de la décentralisation et de la fonction publique du 26 juillet 2012 étend le champ d’éligibilité à la cdi-sation aux multi-employeurs, ce qui est lourd de conséquences pour certains organismes de recherche, à commencer par l’INSERM. Par ailleurs, des incertitudes demeurent sur les conditions précises permettant de bénéficier de la titularisation dans la fonction publique. Votre rapporteur souhaite que le Gouvernement mette fin au plus tôt à cette insécurité juridique et budgétaire.

L’INSERM poursuit par ailleurs ses efforts de réduction des dépenses. Parallèlement à une baisse de 10 % des dotations affectées aux unités de recherche, l’établissement a fait porter ses efforts sur les fonctions de soutien et de support : après une diminution moyenne de 10 % en 2011, cette baisse devrait atteindre 5 % en 2012 et 2 % en 2013. Toutefois, ces efforts vont bientôt trouver leurs limites. Un audit mené dans le cadre de la RGPP a d’ailleurs montré que l’INSERM avait adopté les mesures de réorganisation nécessaires et qu’aucun progrès nouveau n’était identifiable en la matière.

C.— LE BUDGET DU CNRS

Créé en 1939, le CNRS est un établissement public à caractère scientifique et technologique, placé sous la tutelle du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Il dispose depuis 2010 d’une nouvelle organisation, en application du décret du 29 octobre 2009, qui a profondément réformé la gouvernance de l’institution. Cette réforme s’est traduite par la création d’un poste de président-directeur général et de deux postes de directeurs généraux délégués, l’un à la science, l’autre aux ressources. Par ailleurs, à la suite de l’audit lancé en octobre 2011 dans le cadre de la RGPP, un plan d’action destiné à assurer une plus grande proximité des fonctions support et de l’activité scientifique du CNRS a été présenté au conseil d’administration du printemps 2012.

Le budget prévisionnel du CNRS pour 2012 s’élève à 3 320,9 M€, répartis comme suit :

Source : CNRS

La subvention de l’État pour 2013 s’élève à 2 609,62 M€, en hausse de 72,7 M€ avant la mise en réserve ; cette hausse comprend une augmentation de 51 M€ de la ressource au titre des pensions et de l’allocation temporaire d’invalidité et, en sens inverse, une diminution de 3,3 M€ de la dotation pour les post-doctorants. Hors pensions, la subvention de l’État augmente donc de 21,3 M€. En 2012, le montant exécuté des ressources propres devrait atteindre 784,08 M€, soit 23,6 % des ressources totales du CNRS. La dotation – incluse dans la subvention de l’État – destinée aux dépenses de fonctionnement, d’équipement et d’investissement du CNRS – est pour sa part en hausse de 11,89 M€, passant de 447,95 M€ en 2012 à 459,84 M€ en 2013.

La rigidité de la dépense – notamment à l’égard des très grandes infrastructures de recherche, de la valorisation de la recherche et de l’action sociale – a constitué une puissante incitation à engager depuis 2011 un plan de réduction des dépenses de fonctionnement. Des économies ont en particulier été effectuées en dehors du cœur de l’activité scientifique pour 6,3 M€, répartis comme suit :

• l’administration du siège et des délégations régionales : - 24 % ( - 3,2 M€)

• la formation permanente : - 15 % (- 1,6 M€) ;

• le budget de la communication : - 18% (- 0,5 M€) ;

• les ressources allouées aux nouveaux programmes internationaux : - 17 % (- 0,3 M€) ;

• les dépenses du siège des instituts : - 11 % (0,7 M€).

Parallèlement, le CNRS s’est efforcé de mobiliser davantage les ressources propres au service des fonctions support, pour un montant de 10,4 M€, dont :

• 5 M€ de préciput de l’ANR pour l’entretien immobilier et la restauration ;

• 4,6 M€ de frais de gestion de l’ANR et de frais imputés sur les contrats pour le fonctionnement des délégations régionales, les frais d’infrastructure liés à la restauration ;

• 0,8 M€ pour la documentation.

La question de la facturation de l’utilisation de certaines très grandes infrastructures de recherche (TGIR), qui constitue un enjeu important pour plusieurs organismes de recherche, a connu des avancées significatives depuis un an. En particulier, une stratégie nationale pour les infrastructures de recherche a été définie.

LA STRATÉGIE NATIONALE POUR LES INFRASTRUCTURES DE RECHERCHE

La réflexion menée au cours de l’année 2011 a permis d’élaborer un document stratégique définissant cinq grands thèmes, qui ont tous été déclinés en objectifs : être leader dans la construction de l’Europe des infrastructures ; assurer la présence française dans les grands programmes internationaux ; servir l’ensemble des enjeux de société identifiés dans la stratégie nationale de recherche et d’innovation ; soutenir la recherche fondamentale dans tous les secteurs de la connaissance ; renforcer les partenariats avec le secteur économique.

Parallèlement, un nouveau schéma de gouvernance et de pilotage des infrastructures de recherche a été adopté par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche. Son objectif est double :

- mettre en place un pilotage dynamique centralisé des très grandes infrastructures de recherche (TGIR) en cohérence avec la stratégie nationale et permettant de renforcer le suivi financier et programmatique pluriannuel ;

- accroître la compétitivité des entreprises par un meilleur usage des TGIR grâce à une offre de services adaptés à leurs besoins.

Ce schéma distingue trois catégories d’infrastructures : les organisations internationales (OI), les très grandes infrastructures de recherche (TGIR), les infrastructures de recherche (IR), les deux premières étant caractérisées par la nécessité d’un suivi individualisé au niveau de l’État.

Ce nouveau schéma repose sur la création d’un Comité directeur et d’un Haut conseil des TGIR. Présidé par le directeur général pour la recherche et l’innovation, le Comité directeur comprend l’administrateur général du CEA, le président du CNRS, les présidents des alliances thématiques de recherche et un représentant du ministère des affaires étrangères et européennes. Sa mission consiste à proposer au ministre en charge de la recherche la stratégie nationale pour les infrastructures de recherche, la feuille de route nationale en matière de programmation pluriannuelle des TGIR et OI et les décisions structurantes sur ces installations.

Le Haut conseil est, quant à lui, une instance scientifique consultative qui rend des avis scientifiques et stratégiques sur saisine du Comité directeur. Il s’appuie sur les groupes de travail des alliances ou les comités inter-organismes ad hoc.

La DGRI est chargée de la déclinaison de la politique gouvernementale dans le domaine des TGIR et des OI, en consolidant et coordonnant à l’échelle nationale les actions nécessaires à sa mise en place, et en assurant leur suivi. Les alliances sont responsables de la programmation des IR dans leur domaine de compétence et les opérateurs sont responsables du pilotage opérationnel des infrastructures hormis pour les OI.

Enfin, un nouvel outil d’aide à la décision a été institué : la programmation pluriannuelle des besoins des TGIR et des OI.

La révision générale des politiques publiques (RGPP) a préconisé un suivi financier rapproché des TGIR et a mis l’accent sur l’intérêt d’une utilisation accrue de ces infrastructures par les industriels afin d’accroître leur potentiel d’innovation. Dans ce cadre, une étude a été menée de septembre 2011 à juin 2012, pilotée par la cellule TGIR de la direction générale de la recherche et de l’innovation.

Quatre objectifs principaux ont été définis :

• accroître la compétitivité des entreprises technologiques par un meilleur usage des TGIR ;

• encourager des politiques de promotion de l’usage des TGIR auprès des industriels et valoriser des services complémentaires à haute valeur ajoutée ;

• augmenter les ressources propres des TGIR par une contribution accrue des utilisateurs industriels, grâce à la définition de modèles de collaboration possibles et d’une politique de tarification adaptée ;

• sensibiliser les utilisateurs académiques au complément de financement que représente l’utilisation des TGIR, par une valorisation des coûts complets par activité.

Les travaux engagés ont permis de disposer d’une vision en coûts complets pour les TGIR relevant du périmètre ministériel et de mieux apprécier le potentiel de développement des ressources propres.

S’agissant en particulier du CNRS, ce potentiel de développement apparaît très variable. Des infrastructures telles que CELPHEDIA (création, élevage, phénotypage, distribution et archivage de modèles animaux vertébrés), RENATER (réseau national de télécommunications pour la technologie, l’enseignement et la recherche), la flotte océanographique, GANIL (grand accélérateur national d’ions lourds) et IRAM (institut de radioastronomie millimétrique) présentent un bon ratio de ressources propres existantes par rapport aux ressources propres potentielles. À titre d’exemple, ce ratio est de l’ordre de 85 % pour CELPHEDIA, 73 % pour RENATER et 70 % pour la flotte océanographique.

En 2013, la dépense relative aux TGIR devrait atteindre  141,25 M€, soit 30,6 % des dépenses de fonctionnement, d’équipement et d’investissement. Cela illustre la rigidité et le poids persistants de cette dépense dans l’ensemble des charges du CNRS.

S’agissant enfin de la question de la sous-budgétisation de certaines dépenses obligatoires (de fonctionnement, d’équipement et de masse salariale), des progrès ont également été accomplis depuis l’année dernière, mais la situation demeure fragile. En ce qui concerne la masse salariale, l’État assure un financement correct du ressaut de cotisations des pensions civiles. En revanche, et à l’instar des autres établissements publics scientifiques et technologiques, le CNRS ne reçoit pas de crédits de la part de l’État au titre du glissement-vieillesse-technicité. Ainsi, à titre illustratif, le coût des promotions représentera 21 M€ en 2013. En ce qui concerne le fonctionnement et les investissements, le redéploiement, opéré par le PLF pour 2013, de crédits en provenance de l’ANR vers les établissements pourra permettre de contrebalancer partiellement la baisse du soutien de base apporté aux laboratoires. Toutefois, votre rapporteur tient à souligner que cette mesure restera vaine si le Gouvernement prive les organismes de recherche du bénéfice des taux réduits de mise en réserve, qui étaient en vigueur lors des exercices précédents.

D.— LE BUDGET DU CNES

Placé sous la double tutelle du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et du ministère de la défense, le Centre national d’études spatiales a célébré en 2011 le cinquantième anniversaire de sa création, puisqu’il a été institué en 1961 à l’initiative du général de Gaulle. Chargé de proposer au Gouvernement et de mettre en œuvre la politique spatiale de la France en Europe, le CNES est à la fois une agence de programmes et un centre technique dont l’activité s’inscrit depuis plusieurs années dans un cadre multinational, notamment en partenariat privilégié avec l’action menée par l’Agence spatiale européenne (European Space Agency ou ESA).

Signé le 26 octobre 2010, le contrat État-CNES 2011-2015 oriente l’action de l’établissement dans trois directions :

• la participation à la montée en puissance de l’Union européenne dans le domaine spatial ;

• la mise en service de systèmes spatiaux décidés au niveau national, seul ou avec des partenaires étrangers, afin de maintenir l’excellence scientifique française et de contribuer à la mise en œuvre des politiques publiques ;

• le développement de l’activité industrielle et de la compétitivité des entreprises.

Parmi les priorités thématiques retenues par le CNES en 2013, on peut notamment citer :

– dans le domaine de l’accès à l’espace, la mise en œuvre des décisions du conseil ministériel de l’ESA de novembre 2012 ;

– dans le secteur des applications grand public, la poursuite des projets engagés - réalisation d’études et d’expertises, fourniture de certains éléments constitutifs d’Egnos et de Galileo, en coopération avec l’ESA et la Commission européenne et le soutien apporté à la compétitivité de l’industrie spatiale nationale dans le domaine des télécommunications ;

– au chapitre « Terre, environnement et climat », le début de la réalisation du sondeur atmosphérique de nouvelle génération IASI-NG, pour les futures satellites de météorologie, la poursuite des travaux de développement de l’instrument du satellite d’océanographie CFOSAT et des activités de définition du satellite d’altimétrie de nouvelle génération SWOT et la préparation des futures missions de mesure des gaz à effet de serre ;

– dans le domaine des sciences spatiales, le démarrage des contributions françaises aux missions de l’ESA Cosmic Vision, du projet Insight pour la mission martienne Discovery-12 de la Nasa et du projet Mascot à la mission japonaise Hayabusa 2 ;

– sur le plan de la sécurité et de la défense, le lancement du satellite militaire Athena – projet inscrit dans l’axe de la coopération franco-italienne –, dont l’objectif est de déployer une infrastructure spatiale pour les services de télécommunications haut débit pour les ministères de la défense des deux pays, ainsi que la poursuite des travaux technologiques CXCI (démonstrateur de technologies innovantes dans le domaine du renseignement) pour les futurs systèmes d’observation de très haute résolution (THR) et d’extrêmement haute résolution (EHR).

Par ailleurs, le CNES porte une attention particulière à la disponibilité de la base spatiale de Kourou afin de pouvoir faire face à la cadence élevée des lancements, due à la mise en service des deux lanceurs Soyouz et Vega, aux côtés d’Ariane 5.

Le budget prévisionnel du CNES pour 2012 s’élève à 2,133 Md€ dont 1 363 M€ pour le programme multilatéral et 770 M€ pour la contribution de la France à l’ESA. Même si le budget du CNES pour 2013 n’est pas encore connu, faute de pouvoir d’ores et déjà déterminer la part des ressources propres, le projet de loi de finances prévoit d’attribuer à l’établissement une subvention pour charges de service public d’un montant de 742,7 M€ au titre du programme multilatéral. Cette subvention globale comprend les crédits affectés au programme 193 « Recherche spatiale », d’un montant de 583,8 M€ (- 14,48 M€, soit - 2,42 % par rapport à 2012) et les crédits affectés au programme 191, qui relève du ministère de la défense, d’un montant de 159,4 M€ (- 3 M€, soit – 1,85 % par rapport à 2012).

De 2013 à 2015, les crédits affectés au programme 193 devraient être inférieurs de 65 M€ au montant indiqué dans le contrat État-CNES 2011-2015. Les efforts demandés à l’établissement ne sont pas minces puisque ce montant équivaut au financement d’un programme de recherche-développement. Cette évolution intervient alors que, depuis 2005, l’organisme a réduit de 13 % ses dépenses de fonctionnement. Ces résultats ont permis à l’établissement de respecter les priorités du contrat avec l’État, malgré des annulations de crédits significatives, qui ont représenté en 2012 7,6 M€ sur le programme 193 (après 14,2 M€ en 2011) et 7,8 M€ sur le programme 191 (après 0,4 M€ en 2011). Par ailleurs, 15,2 M€ de crédits demeurent gelés sur le programme 193 et 8,1 M€ sur le programme 191. Il est à craindre que de nouvelles annulations de crédits sur le programme multilatéral compromettent la tenue des engagements du CNES vis-à-vis des projets en cours, des contrats industriels, des accords de maintien de compétences dans l’industrie, des accords de partenariats internationaux, ainsi qu’avec l’ESA et les laboratoires scientifiques.

La subvention destinée à honorer la contribution française à l’ESA s’élève, quant à elle, à 799 M€ au titre de l’année 2013, en hausse de 29,96 M€ par rapport à 2012 (après une augmentation cumulée de 85 M€ depuis deux ans). Toutefois, le montant de l’appel à contribution de l’ESA pour la France devrait s’élever à 751,1 M€ dans la mesure où le gel sur les 799 M€ de la contribution française atteindra vraisemblablement 47,9 M€. Dans ces conditions, l’objectif de remboursement de la dette française d’ici 2015 paraît compromis en raison du niveau insuffisant de la subvention de l’État au regard des engagements figurant dans le contrat État-CNES. Le cumul d’arriérés devrait en effet atteindre 360 M€ à la fin 2013. Le respect des engagements de la France nécessitera donc un redéploiement des prévisions pluriannuelles de contributions fixées dans le plan à moyen terme des programmes de l’ESA.

Votre rapporteur tient à souligner que le CNES et la recherche spatiale française connaissent des succès exceptionnels depuis 2002. Les défis à relever seront encore plus importants en 2013, puisque sont d’ores et déjà prévus 6 lancements d’Ariane 5, 3 lancements de Soyouz et un lancement de Vega. Dans ce contexte, le conseil ministériel de l’ESA devra prendre des décisions déterminantes en novembre 2012. Votre rapporteur considère que, dans un contexte de concurrence internationale croissante, il est vital pour l’industrie française et européenne de réussir le passage à Ariane 6. Le développement de ce lanceur de nouvelle génération, moins coûteux et plus innovant, est en effet indispensable pour permettre à notre continent de conserver son rang de deuxième puissance spatiale mondiale, et de numéro un mondial dans le domaine des lanceurs.

Nous avons également l’opportunité de conforter ce rang éminent en contribuant au développement des télécommunications satellitaires à haut débit. Le 16 décembre 2011 a été signée la convention relative au premier volet du projet de recherche et développement à très haut débit par satellite (THD-SAT), dans le cadre du volet numérique du programme des investissements d’avenir, pour un montant de 40 M€. La majeure partie de ces activités de recherche-développement sont contractualisées par le CNES auprès du secteur industriel. Afin de permettre à la France d’être partie prenante de l’émergence d’une nouvelle filière industrielle, il convient à présent de parachever cet engagement en appliquant le deuxième volet – abondé à hauteur de 60 M€ – du projet THD-SAT.

E.— LE BUDGET DU CEA

Le CEA est un établissement public industriel et commercial placé sous la triple tutelle du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, du ministère de l’écologie, de l’énergie, du développement durable et de la mer et du ministère de la défense. Intervenant dans trois grands domaines (la sécurité et la défense, l’énergie, les technologies pour l’information et la santé), le CEA est un acteur primordial de la recherche française. La loi de finances rectificative pour 2010 du 9 mars 2010 a modifié son intitulé : il s’agit désormais du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, ce qui traduit l’engagement de l’État à investir dans les énergies nouvelles.

La subvention civile pour charges de service public pour 2013 (hors programme ITER) s’élève à 1 071,5 M€, soit une baisse de 3 M€ par rapport à la LFI pour 2012 et un montant inférieur de 25,8 M€ (soit – 2,4 %) à celui prévu dans le contrat d’objectifs et de performance conclu entre l’État et le CEA (1 097,3 M€).

COMPARAISON ENTRE LE CONTRAT ÉTAT-CEA ET LE PLF 2013

M€

Contrat

État-CEA

PLF 2012

Écart

Programmes du CEA

hors ITER, hors fonds dédiés, hors Cratanem

(programmes 172, 190 et 191 hors fonds dédiés)

1 097,3

1 071,5

- 25,8

Votre rapporteur tient à souligner que cette nette diminution des moyens rend difficile la programmation scientifique et financière du CEA, et ce d’autant plus que l’établissement doit assumer des charges non envisagées il y a encore quelques mois. Ces charges nouvelles sont au nombre de trois :

• le financement des conséquences du renforcement de la réglementation nucléaire sur ses installations, notamment à la suite à l’accident de Fukushima (+20 M€ en 2013 sur les études complémentaires de sûreté, et + 10 M€ sur les assurances) : il s’agit de demandes impératives de l’ASN qui s’imposent à l’exploitant nucléaire ;

• le financement de la montée en charge de son principal investissement civil, le réacteur de recherche Jules Horowitz (+ 15 M€ en 2013 dans le cas favorable où la solution de dégel spécifique serait prorogée sur l’exercice 2013, comme elle a été mise en œuvre au cours des exercices précédents) : cet équipement est destiné à alimenter en radionucléides la médecine nucléaire et à mener les études sur la sûreté des centrales, de telle sorte que son calendrier ne peut être différé sans risque pour l’approvisionnement en radionucléides des pays européens, avec une difficulté potentielle pour la santé publique;

• le financement des charges liées au grand nombre de ses personnels qui vont dans les prochaines années, faire valoir leurs droits à la retraite ou bénéficier d’une cessation anticipée d’activité à une échéance rapprochée, telle que permise par la loi du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites (+ 10 M€ en 2013).

Pour engager ces dépenses incompressibles et absorber une baisse de la subvention de 3 M€, le CEA devra dégager 58 M€ de réduction du besoin de subvention par ailleurs. Cela se traduira par une baisse du budget disponible des unités de recherche du CEA de près de 6 %, salaires compris, en 2013. Si la masse salariale était stabilisée, grâce à une nette diminution (division par trois) des flux de recrutements afin de réduire les effectifs, il faudrait de plus réduire de 15 % environ la subvention affectée aux dépenses non salariales. Compte tenu de l’existence de projets partenariaux et de contrats pluriannuels de maintenance, cette diminution ne pourra être absorbée que par une remise en cause de la programmation scientifique du CEA.

Les économies de gestion, déjà largement engagées par l’établissement, ne permettront pas de réaliser à elles seules un tel effort. Il convient de rappeler que ces efforts de gestion se sont traduits par une baisse des dépenses de fonctionnement courant de 14 % en cinq ans, comme l’illustre le tableau ci-après.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT COURANT DU CEA, 2007-2011

M€

2007

2008

2009

2010

2011*

Évolution

Fournitures de bureau

5,9

4,7

3,9

4,1

3,6

- 39 %

Consommables informatiques

8,4

8,1

7,1

7,2

6,7

- 20 %

Frais de réception / conférences

6,7

7,1

7,5

7,0

7,0

4 %

Missions à l’étranger

13,4

13,3

13,0

13,3

13,3

- 1 %

Missions en France

12,9

13,0

12,2

11,7

11,7

- 9 %

Télécommunications

7,3

7,1

6,1

5,4

5,0

- 32 %

Total

54,7

53,2

49,9

48,8

47,3

- 14 %

   

- 3 %

- 6 %

- 2 %

- 3%

 

Source : CEA

L’examen des dépenses par salarié (y compris les CDD financés par les recettes externes) atteste une baisse de 20 % en 4 ans, en euros courants.

ÉVOLUTION DES DÉPENSES DE FONCTIONNEMENT COURANT PAR SALARIÉ
2007-2011

(Base 100 en 2007)

Source : CEA

Un deuxième effort a consisté à redéployer des effectifs du support vers les programmes de recherche. L’effort est continu, et est amené à se poursuivre jusqu’en 2013, conformément au contrat d’objectifs et de performance 2011-2013, tout en prenant en compte la nécessité de conserver des lignes fonctionnelles efficaces pour la conduite des projets du CEA.

ÉVOLUTION DES EFFECTIFS DU SUPPORT, Y COMPRIS LA SÛRETÉ,
ENTRE 2005 ET 2010


NB : données retraitées pour neutraliser les transferts d’emplois d’AREVA vers le CEA en 2006/2007

Source : CEA

Au regard de ces éléments, il apparaît que les gisements d’économies les plus rapides ont déjà été exploités. L’objectif du CEA demeure toutefois de trouver 24 M€ d’économies à l’horizon 2014-2015 – montant qui, en tout état de cause, est sans commune mesure avec les 58 M€ que l’établissement doit se procurer pour 2013.

Si l’on tient compte du fait que l’État multiplie les exigences envers le CEA, tant en matière de nouvelles technologies de l’énergie que de recherche fondamentale, de recherche technologique et d’expertise nucléaire, votre rapporteur juge indispensable que le Gouvernement s’engage à faire bénéficier l’établissement d’un dégel de crédits de 15 M au cours de l’année 2013. Ce serait la juste contrepartie des efforts accomplis et de la multiplication des missions qui lui sont demandés.

Un autre sujet majeur concerne le démantèlement et l’assainissement des installations nucléaires du CEA. Pour permettre à l’établissement de mener à bien cette mission, l’État a signé le 19 octobre 2010 une convention-cadre, qui porte sur la période 2011-2013. Au lieu d’un financement par vente d’actifs positionnés dans les fonds, le CEA bénéficie désormais d’une double source de financement :

– une subvention de 189 M€ inscrite dans le projet de loi de finances pour 2013 ;

– des rachats par l’État d’actions AREVA détenues par le CEA, pour 214 M€, et ce, pour la première fois, en 2012.

LES DÉPENSES MOYENNES DASSAINISSEMENT ET DE DÉMANTÈLEMENT DU CEA
SUR LA PÉRIODE 2011-2013, ET LEUR COUVERTURE

M€

2011

2012

2013

Besoins de liquidités liés aux travaux (dépenses)

675

639

670

Achat de titres AREVA par l’État

0

214

418

Subvention

169

189

249

Mobilisation du reliquat d’actifs financiers

498

233

0

Autres

8

3

3

Source : CEA

Pour l’année 2013, ce système de financement mixte devrait perdurer. La subvention serait portée à 249 M€, en hausse de 60 M€ par rapport à la LFI 2012, et l’achat de titres AREVA serait porté à 418 M€. Néanmoins, si la subvention progresse à nouveau de 60 M€ en 2014 et 2015, et que les titres AREVA couvrent le besoin de financement résiduel, la totalité des actions AREVA positionnées sur les fonds dédiés du CEA aura été rachetée en 2015 par l’État. Le besoin de budgétisation des fonds dédiés du CEA atteindra brutalement plusieurs centaines de millions d’euros supplémentaires en 2016. Si l’État a esquissé une première réponse au problème du financement de l’assainissement-démantèlement des installations du CEA, la solution de financement reste à identifier pour l’année 2016. Votre rapporteur estime donc indispensable d’assurer la pérennité de ce financement par un abondement à due concurrence de la subvention de l’État.

III.— LE FINANCEMENT SUR PROJETS : UN SYSTÈME INSUFFISAMMENT DÉVELOPPÉ EN FRANCE, MIS EN CAUSE PAR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2013, DONT IL CONVIENT DE FAVORISER LA MODERNISATION

L’examen du projet de loi de finances pour 2013 est l’occasion de s’interroger sur la place que l’on souhaite accorder au financement sur projets, et singulièrement à l’Agence nationale de la recherche (ANR), dans le système de recherche français. Le Gouvernement entend réduire de près de 10 % le budget de l’agence, justifiant ce choix par la nécessité de rééquilibrer le financement de la recherche publique et d’accroître le taux de participation des équipes françaises dans les programmes de recherche européens. Ce faisant, le PLF pour 2013 remet en cause l’équilibre du financement sur projets –  à rebours de la politique menée dans les grands pays industrialisés –  ce qui entraînera mécaniquement le report ou l’abandon de nombre de programmes de recherche. Dans ce contexte, votre rapporteur estime nécessaire de soutenir la modernisation et les efforts de bonne gestion de l’ANR, tout en réfléchissant aux moyens d’accroître l’efficacité du système de financement sur projets.

A.— L’AGENCE NATIONALE DE LA RECHERCHE : UNE INSTITUTION EN VOIE DE MODERNISATION DONT LES EFFORTS DE BONNE GESTION DOIVENT ÊTRE SOUTENUS

1. Une institution dont la fragilité a été soulignée par la Cour des comptes

La Cour des comptes, examinant la capacité de l’ANR à mettre en œuvre l’exécution des projets du grand emprunt, a mis en lumière en 2011 certaines fragilités de l’institution(1). La juridiction a estimé en particulier que « la soutenabilité du portage de la majorité des investissements d’avenir par l’ANR, à laquelle 18,85 Md€ ont été délégués, est incertaine. Si des moyens supplémentaires lui ont été accordés pour faire face à ses nouvelles missions, la Cour a pu constater (…) le risque associé à l’internalisation, d’ici 2012, de l’activité des unités supports ». Dans ces conditions, à rebours de ce qui est accompli aujourd’hui, votre rapporteur estime qu’il convient d’apporter un soutien à l’agence dans le processus de réorganisation et de modernisation de ses procédures de gestion et d’évaluation. Ses procédures de financement devraient notamment être adaptées à la spécificité du programme des investissements d’avenir.

2. Des efforts de gestion remarquables qu’il convient de soutenir

Ce soutien apporté à l’ANR est d’autant plus opportun que l’institution a accompli des efforts de gestion notables au cours des dernières années. En effet, la part des dépenses de gestion (personnel, fonctionnement et investissement, y compris unités support pour les précédentes années) dans le total des engagements de l’ANR (appels à projet classiques, hors appels à projet, décaissements au titre des investissements d’avenir et frais de gestion) a nettement décru entre 2010 et 2012, comme l’illustre le tableau ci-dessous :

PART DES DÉPENSES DE GESTION DANS LE TOTAL DES ENGAGEMENTS DE L’ANR

en M€

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

Frais de gestion

8 383 1

151 66

17 415

23 506

26 028

31 098

31 169

29 411

32 326

Engagements ANR

684 859

796 456

831 251

858 743

865 801

827 834

761 299

741 602

670 092

Décaissements Investissements d’avenir

         

2 800

217 100

1 296 800

1 117 500

Total engagements

684 859

796 456

831 251

858 743

865 801

830 634

978 399

2 038 402

1 787 592

Ratio frais de gestion/engagements

1,2 %

1,9 %

2,1 %

2,7 %

3,0 %

3,7 %

3,2 %

1,4 %

1,8 %

Source : ANR

De fait, ce rapport (1,4 % en 2012) est très en deçà de celui existant dans d’autres agences :

PART DES DÉPENSES DE GESTION DANS LE BUDGET DE SIX AGENCES DE RECHERCHE ÉTRANGÈRES

NFS

IMSERC

DLR (BMBF)

DFG

ESRC

RCN

USA

Canada

Allemagne

Allemagne

Royaume-Uni

Norvège

4%

5%

4%

3%

5,9%

5,4%

Source : ANR

Le budget prévisionnel de l’ANR pour 2012 atteste par ailleurs une maîtrise des dépenses de personnel (18,4 M€) et, plus généralement, de la dynamique de la dépense. La politique de recrutement, qui a fait l’objet d’un dialogue avec le ministère et d’une validation par ce dernier, a conduit au relèvement du plafond d’emplois pour faire face à l’absorption des unités support et des investissements d’avenir. Avant ces évolutions, l’effectif de l’ANR était de 84 ETP (fin 2009). Le plafond d’emplois a été relevé progressivement jusqu’à 204 ETP (+ 15 ETP pour l’année 2012 pour les investissements d’avenir), incluant une augmentation d’une centaine d’ETP au titre de l’internalisation des unités support et de 26 ETP sous plafond au titre des investissements d’avenir. Les gains de productivité obtenus sont substantiels : seuls 100 ETP parmi les 150 abrités par les unités support ont été transférés à l’ANR. Comme l’atteste le tableau ci-après, les gains de productivité sont confirmés par une comparaison réalisée en 2011 avec les agences internationales analogues.

BUDGET MOYEN GÉRÉ PAR ÉQUIVALENT TEMPS PLEIN

DANS DIX AGENCES DE RECHERCHE (EN M€) :

États-Unis

Canada

Japon

Allemagne

Royaume-Uni

Norvège

UE

France

NSF

NSERC

JST

JSPS

DLR

DFG

ESRC

RCN

EC

ANR

2,17

2,01

0,65

9,9

1,1

2,88

1,56

1,93

1,87

4,49

Source : ANR

Avec un budget moyen de 4,5 M€ géré par ETP, l’ANR arrive en seconde position, nettement devant les huit autres agences. Si l’on prend en compte les investissements d’avenir, l’ANR devance de beaucoup ses homologues.

Dans le rapport précité, la Cour des comptes regrettait « l’insuffisante qualité des processus financiers, budgétaires et comptables de l’ANR ». De fait, l’agence ne disposait pas, jusqu’en 2010, des systèmes d’information pour examiner le nombre important de projets qu’elle traite actuellement. De même, il a fallu attendre mai 2012 pour voir apparaître un système d’information budgétaire et comptable adapté. Votre rapporteur se félicite de cette montée en puissance et de cette professionnalisation de l’institution, qui est engagée dans un cycle d’investissement coûteux mais indispensable. Ces investissements devraient permettre une sécurisation des données budgétaires et comptables et une plus grande fluidité de traitement des paiements vis-à-vis des chercheurs. Dans ce contexte, on doit regretter que le PLF pour 2013 ampute de près de 10 % le budget de l’agence, au risque de freiner sa modernisation et de rompre l’équilibre du financement sur projets.

B.— LE PLF POUR 2013 REMET EN CAUSE L’ÉQUILIBRE DU FINANCEMENT SUR PROJETS, À REBOURS DE LA POLITIQUE DES GRANDS PAYS DÉVELOPPÉS

1. Le contexte international : le financement sur projets, pivot des systèmes de recherche

Le financement sur projets constitue le pivot de l’organisation de la recherche dans la grande majorité des pays industrialisés. Les crédits qui lui sont dédiés sont pérennisés, alors même que les budgets consacrés à la recherche diminuent dans la plupart des pays disposant d’un secteur de la recherche performant. Un tour d’horizon rapide en apporte la confirmation :

• Aux États-Unis, tandis que le budget consacré à la recherche-développement augmente de 2 %, celui de la NSF (National Science Foundation) est en progression de 5 % ;

• En Allemagne, le budget de la fondation de la recherche Deutsche Forschungsgemeinschaft (DFG) augmente dans les mêmes proportions (5 %) que celui de l’ensemble du système de recherche fédéral ;

• Au Royaume-Uni, le budget des agences est stabilisé, alors même que le budget récurrent des organismes et des universités est en diminution ;

• Au Canada, on s’attend à une baisse de l’ordre de 7 % du budget de la recherche-développement, tandis que le budget de la NSERC (conseil de recherches en sciences naturelles et en génie) est stable.

De tous les exemples, celui de l’Espagne est sans doute le plus révélateur : malgré ses difficultés budgétaires, et un budget de la recherche qui est annoncé en baisse de 15 %, ce pays est en train de créer une agence de la recherche qui non seulement s’inspire de l’ANR, mais disposera de surcroît d’attributions plus étendues, puisqu’elles devraient inclure la gestion des infrastructures de recherche.

2. Le PLF pour 2013 remet en cause l’équilibre du financement sur projets

Ce contexte international étant rappelé, votre rapporteur regrette vivement que le Gouvernement ait fait le choix d’une baisse du financement sur projets, alors que cette source de financement est déjà plus faible dans notre pays que chez nos partenaires étrangers.

a) Une baisse de près de 10 % du budget de l’ANR et les risques de futures annulations de crédits

Les lois de finances initiales pour 2010 et 2011 s’étaient déjà traduites par une baisse de la dotation de l’ANR de 97 M€. Ces baisses ont entraîné une réduction du champ de la programmation et des reports de programmes, mais en maintenant l’équilibre entre les programmes dits « blancs (2) » (50 %) et les programmes thématiques. Le PLF pour 2013 accélère nettement cette tendance en prévoyant une baisse de 10 % (- 74 M€) des crédits de l’ANR. À l’horizon 2015, la subvention de l’État pourrait être inférieure de près de 180 M€ –  soit 25 % du budget de l’agence – à son niveau de 2012.

De surcroît, l’ANR a connu beaucoup d’annulations de crédits de paiement depuis 2008 (753 M€, dont 85 M€ en 2011 et 5,3 M€ en 2012). Pour 2012, il est très probable que l’agence connaisse des annulations d’un niveau significatif. Celles-ci ne pourront porter, en tout état de cause, que sur les crédits de paiement, car l’ANR a d’ores et déjà engagé toutes ses autorisations d’engagement. Autant l’impact de ces annulations était limité au cours des années précédentes dans la mesure où l’ANR bénéficiait d’une trésorerie relativement abondante, autant il est à craindre que, d’ici 2014 ou 2015, ces crédits fassent défaut pour honorer des engagements pris antérieurement. Alors que ces crédits devraient en toute logique être restitués à l’agence, on peut craindre que cette difficulté de trésorerie donne lieu à une baisse de ses autorisations d’engagement. Afin d’éviter cette « double peine », votre rapporteur propose qu’un protocole prévoyant une rétrocession des crédits à l’agence soit annexé au contrat de l’établissement.

b) Les conséquences du PLF pour 2013 : le report ou l’abandon de plusieurs programmes de recherche

Votre rapporteur insiste sur le fait que la voie qui est proposée par le Gouvernement place l’ANR devant une alternative douloureuse :

• soit réduire la part des programmes blancs et mettre fin à la parité entre programmes blancs et programmes thématiques : cela pénaliserait des organismes tels que l’INSERM ou le CNRS ;

• soit resserrer la programmation thématique, ce qui se traduirait par une baisse du taux de sélection (qui est déjà en deçà de 20%) et la suspension de programmes de recherche, notamment dans le cadre de partenariats public-privé. Le programme OH Risque (programme non thématique stimulant des recherches à haut risque scientifique) ne serait pas lancé, afin de concentrer les moyens sur les programmes blancs. Une série de programmes européens ou internationaux ne feraient pas l’objet de financements en 2013 et seraient différés à 2014, voire suspendus. Dans cette configuration, le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche devra faire des choix difficiles, pour ne pas dire arbitraires. Cette situation appelle nécessairement des mesures correctrices.

De surcroît, cette baisse des crédits risque de réduire les taux de sélection aux appels à projets, alors qu’ils sont très en deçà de ceux pratiqués par les agences de nombreux pays. Ainsi, pour l’année 2011, on obtient les taux suivants : 20 % pour l’ANR ; 23 % pour la NSF américaine ; 25 % pour la Research Council britannique ; 40 % pour la DFG allemande. Or, il est important de ne pas réduire ce taux à l’excès, sous peine de décourager chercheurs et industriels. Il est à noter, d’ailleurs, que la plupart des programmes partenariaux en Europe impliquant des entreprises sont en général moins compétitifs et présentent des taux de succès voisins de 40 à 50 %, à l’image des appels Fraunhofer ou BMBF en Allemagne.

3. Face à un budget sous-calibré, il est impératif de prendre des mesures correctrices

Les efforts accomplis par l’ANR et sa stratégie de modernisation doivent être pris en compte par le Gouvernement, tant sur le plan des économies de fonctionnement que de la réserve de précaution.

a) Les économies de fonctionnement

Le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche demande à l’ANR de réaliser 0,5 M€ d’économies de fonctionnement au titre de l’exercice 2013. Votre rapporteur estime que le cadrage demandé n’est pas acceptable au regard de la montée en puissance des systèmes d’information et des emplois nécessaires pour conventionner rapidement les investissements d’avenir. De fait, pour respecter le cadrage du ministère, l’agence devrait supprimer 70 emplois. Les investissements indiqués doivent impérativement être accompagnés et soutenus par l’État.

b) La réserve de précaution

Compte tenu de l’importance de la baisse contenue dans le PLF pour 2013, et du fait qu’elle intervient au cours de la dernière année d’une programmation triennale, votre rapporteur réitère la demande qu’il avait formulée à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, au cours de la commission élargie du 23 octobre 2012, tendant à ce que l’ANR bénéficie d’une mise en réserve à taux réduit. L’agence peut en effet difficilement supporter l’ajustement demandé tant en budgétisation qu’en gestion. L’application de taux réduits de mise en réserve – 25 M€ sont en jeu – permettrait à l’agence de maintenir la structure du cadre programmatique 2011-2013 sans affecter à l’excès les objectifs affichés vis-à-vis des politiques publiques, qu’il s’agisse, pour s’en tenir aux principales, du Grenelle de l’environnement, du plan national santé-environnement ou du plan Alzheimer.

Plus généralement, votre rapporteur souhaiterait que trois thèmes de réflexion soient développés afin de renforcer l’efficacité du système de financement sur projets envers ses bénéficiaires –  organismes de recherche, universités et entreprises.

C.— TROIS AXES DE RÉFLEXION POUR ACCROÎTRE L’EFFICACITÉ DU FINANCEMENT SUR PROJETS

a) L’équilibre à trouver entre financement sur projets et crédits récurrents

Votre rapporteur tient à rappeler en premier lieu que le financement sur projets et les crédits récurrents octroyés aux organismes de recherche et aux universités apparaissent plus comme des sources de financement complémentaires qu’exclusives l’une de l’autre. On ne saurait donc, sans préjudice pour l’organisation globale de la recherche, abonder les subventions récurrentes au détriment du financement par appels à projets.

En effet, les crédits récurrents répondent à trois principaux objectifs :

• financer la recherche dans une optique de long terme ;

• favoriser la naissance d’idées émergentes, souvent à l’échelle de l’équipe de recherche ;

• financer certains types de recherches construites autour de grands programmes, souvent internationaux, concernant par exemple la physique des particules, la recherche spatiale ou les grands programmes environnementaux.

La recherche sur projets, quant à elle, est, de loin, la méthode de travail la plus répandue chez les chercheurs. Elle permet notamment une accélération de la recherche sur des sujets prioritaires, ainsi qu’une traçabilité de la dépense de recherche-développement. Au-delà des contraintes liées au processus de sélection, les appels à projets compétitifs sont une source de créativité et favorisent notamment les collaborations innovantes entre laboratoires et/ou industriels. Les programmes partenariaux de l’ANR donnent lieu à des dépôts de brevets deux fois plus nombreux que les programmes non thématiques. Ils contribuent ainsi au décloisonnement entre laboratoires publics et entreprises et favorisent les transferts d’innovation.

De surcroît, le modèle de financement par des agences étant largement dominant à l’échelle mondiale, la place de I’ANR facilite les collaborations avec ses homologues et la mise en place de financements dédiés à des programmes européens, à l’instar des ERA-Nets (mise en réseau de programmes de recherche) ou internationaux, en particulier avec l’agence américaine NSF et les agences des pays émergents (Chine, Brésil et Inde). C’est donc à un équilibre qu’il faut parvenir, et non à la substitution d’un mode de financement au détriment de l’autre.

b) La révision des modalités de calcul des frais de gestion et du préciput

Une difficulté récurrente pesant sur les organismes de recherche concerne les conditions d’évaluation des coûts imposés par les règlements financiers de l’ANR. Le règlement financier de l’ANR applicable aux projets financés par le budget de l’agence prévoit deux types de mécanismes :

– la possibilité pour les établissements gestionnaires des contrats de prélever 4 % de leur montant au titre des frais généraux de gestion (montants prélevés par les délégations régionales) ;

– le versement à l’établissement hébergeur d’un préciput calculé en fonction du montant des contrats gérés au cours des trois dernières années (en général 11 % des aides attribuées). Le montant de ces prélèvements et de ces versements ne couvre généralement que 35% de la charge réelle de gestion assumée par les bénéficiaires des projets. Les organismes de recherche sont donc conduits à puiser dans leurs crédits récurrents, voire à céder des actifs financiers, pour assumer les coûts induits par les projets.

S’agissant des appels à projet relevant du budget de l’agence, l’une des pistes régulièrement évoquée est l’augmentation du taux des frais généraux de gestion. L’année 2012 a néanmoins permis de progresser sur la notion de « service distinct » pour l’éligibilité de certaines dépenses internes dans le cadre de l’exécution des contrats de l’ANR. À titre d’exemple, sont désormais éligibles les prestations d’une plateforme technologique placée dans la même unité de recherche qu’une équipe exécutant un contrat de recherche.

S’agissant des investissements d’avenir, les règlements financiers ont maintenu ce taux de 4 % mais prennent mieux en compte les dépenses liées à la mise en oeuvre des contrats (allocations pour perte d’emploi, restauration par exemple…). En revanche, aucun préciput n’a encore été instauré. Des discussions ont toutefois lieu entre le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et le commissariat général à l’investissement sur ce point.

Votre rapporteur juge nécessaire de parvenir à un meilleur calibrage des frais de gestion et du préciput, afin de donner à l’établissement bénéficiaire - organisme ou université - des marges de manœuvre supplémentaires pour mener sa politique scientifique. Une réflexion devrait être menée pour augmenter le préciput et les frais de gestion et en simplifier le versement. Si l’on souhaite parvenir à une meilleure prise en compte des coûts de la recherche, à une transparence accrue et à un pilotage budgétaire affiné, on ne pourra pas faire l’économie d’une réflexion d’ensemble sur un passage en coûts complets du système de recherche français.

c) La simplification des procédures de réponses aux appels d’offres

Un certain nombre de mesures ont déjà été prises par l’ANR pour redonner du temps aux chercheurs : les formulaires de soumission administratifs et financiers aux appels à projets ont été allégés et le nombre de rapports d’activité exigés a été réduit de moitié. L’agence a également avancé son calendrier de publication des appels à projets et mis en place des procédures informatiques permettant un délai raccourci pour le paiement des laboratoires.

Il n’en demeure pas moins que la simplification des procédures doit être une préoccupation constante et que l’ANR doit encore progresser dans cette direction. Il convient en particulier de travailler à un raccourcissement des délais d’attribution des aides, à une simplification des actes attributifs et à des textes d’appels à projets simplifiés et raccourcis. Au-delà de ces démarches internes, votre rapporteur suggère d’unifier les règlements financiers des différentes agences et fondations nationales afin de proposer aux porteurs de projets des procédures administratives et financières uniques. Le sentiment de complexité découle souvent, en effet, de la diversité des procédures applicables.

Votre rapporteur estime que la mise en œuvre de ces recommandations serait de nature à améliorer l’efficacité d’un dispositif qui, il faut le répéter, constitue un puissant facteur de soutien à la recherche et à l’innovation françaises et constitue une véritable chance pour notre pays. Plus généralement, loin d’opérer une substitution entre les deux modes de financement –  récurrents et sur projets –de la recherche française, il convient d’en faire des outils complémentaires au service de nos laboratoires et de nos industriels. C’est la condition nécessaire de l’excellence de la recherche française et de la capacité de nos jeunes entreprises innovantes à tenir leur rang face à la concurrence internationale.

EXAMEN EN COMMISSION

Dans le cadre de la commission élargie du 23 octobre 2012, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur le rapport de MM. Franck Reynier (Grands organismes de recherche) et Christophe Borgel (Recherche industrielle), les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur » (voir le compte rendu officiel de la commission élargie du 23 octobre 2012, sur le site internet de l’Assemblée nationale).

*

À l’issue de la commission élargie, la commission des affaires économiques a délibéré sur les crédits de la mission « Recherche et enseignement supérieur ».

Contrairement à l’avis défavorable de M. Franck Reynier, la Commission a donné un avis favorable à l’adoption des crédits des grands organismes de recherche (actions 6 à 12 du programme 150 et programmes 172 et 193) de la mission « Recherche et Enseignement supérieur » pour 2013.

——fpfp——

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Agence nationale de la recherche (ANR)

Mme Pascale Briand, directeur général

M. Philippe Freyssinet, directeur général adjoint

Mme Charline Avenel, directeur général adjoint aux ressources

Centre national d’études spatiales (CNES)

M. Yannick d’Escatha, président

M. Laurent Germain, directeur financier

Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

M. Alain Fuchs, président

Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA)

M. Christophe Gegout, directeur financier

M. Jean-Pierre Vigouroux, chef du service des affaires publiques

Institut national de la recherche en informatique et en automatique (INRIA)

M. Michel Cosnard, président-directeur général

Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM)

M. Thierry Damerval, directeur général délégué

M. Arnaud Benedetti, directeur de l’information scientifique et de la communication

© Assemblée nationale

1 () Cour des comptes, Résultats et gestion budgétaire de l’État (exercice 2010), mai 2011.

2 () Les programmes blancs, ouverts à tous les thèmes et à tous types de travaux de recherche, ont pour objet de promouvoir la poursuite d’objectifs originaux, en rupture avec les itinéraires de recherche traditionnels.