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N
° 3112

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 octobre 2015.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES SUR LE PROJET DE
loi de finances pour 2016
(n° 3096)

TOME IV

AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES

FORÊT

PAR M. André CHASSAIGNE

Député

——

Voir les numéros : 3096 et 3110 (annexe 4).

SOMMAIRE

___

Pages

INTRODUCTION 5

I. UN BUDGET STABLE, MAIS DONT LES CHOIX SONT DISCUTABLES 7

A. LES CRÉDITS DU PROGRAMME 149 SONT RECONDUITS 7

1. La structure du programme 149 7

2. La stabilité des crédits ne doit pas faire oublier que d’importantes coupes ont été opérées les années précédentes. 8

B. ACTION 11 : GESTION DES FORÊTS PUBLIQUES ET PROTECTION DE LA FORÊT 9

C. ACTION 12 : DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DE LA FILIÈRE ET GESTION DURABLE 11

D. ACTION 13 : FONDS STRATÉGIQUE DE LA FORÊT ET DU BOIS 13

II. LA SITUATION FINANCIÈRE ET SOCIALE DE L’OFFICE NATIONAL DES FORÊTS 15

A. UNE SITUATION FINANCIÈRE STRUCTURELLEMENT DÉGRADÉE 15

1. Le constat : un déficit structurel et un niveau d’endettement alarmant 15

2. Les causes : une contribution aux pensions trop élevée, un financement qui repose sur les recettes tirées des ventes de bois 15

a. Un financement fortement dépendant des ventes de bois 15

b. Les contributions au compte d’affectation spéciale « Pensions » 16

3. Des pistes pour un financement pérenne 17

4. Les obstacles à la mobilisation du bois 18

a. Des forêts publiques non soumises au régime forestier 19

b. L’exploitation des forêts sectionales 19

c. Incidences des recettes tirées de la vente de bois sur la DGF 20

d. Programmes triennaux de coupes 20

e. La rétribution des fonctions de président d’un SMGF 21

f. Le mode de facturation des prestations d’ATDO 21

B. UNE SITUATION SOCIALE DE PLUS EN PLUS ALARMANTE 22

1. Un retrait de l’État 22

2. Une privatisation rampante ? 22

3. Un climat social dégradé 23

4. La dureté croissante des conditions de travail 23

5. L’abandon de la politique de formation 24

III. CETTE DÉGRADATION EST PARTICULIÈREMENT PRÉOCCUPANTE ALORS QUE LA FORÊT DOIT FAIRE FACE AU DÉFI DU CHANGEMENT CLIMATIQUE. 25

1. Les effets du changement climatique sur l’arbre et la forêt 25

a. Effets sur la répartition des espèces 25

b. Effets sur le cycle de développement et la physiologie de l’arbre 26

c. Effets sur les écosystèmes 26

2. Ces effets appellent une adaptation de la gestion forestière et sylvicole et un renforcement des moyens en faveur de la forêt. 26

EXAMEN EN COMMISSION 28

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 31

INTRODUCTION

Nous fêtons cette année les cinquante ans de l’installation de l’Office national des forêts (ONF), dont la création avait été décidée par l’Assemblée nationale en décembre 1964. Cette date devrait être l’occasion, non seulement de saluer la contribution décisive de cet établissement dans la valorisation de la forêt publique française, mais aussi de dessiner pour lui des perspectives ambitieuses, à l’heure où le changement climatique rend plus que jamais nécessaire une gestion prospective rigoureuse de notre patrimoine forestier.

Force est de constater, pourtant, que l’ONF n’est pas, pour l’heure, en mesure de répondre efficacement aux défis qui l’attendent. Cela n’est nullement lié à la qualité de ses équipes, dont le savoir-faire exceptionnel est largement reconnu, en France comme à l’étranger, mais bien plutôt à une gestion financière et sociale déficiente, qui se poursuit maintenant depuis plusieurs années.

L’Office manque structurellement de ressources financières, et recourt presque chaque année à l’endettement pour assurer son fonctionnement. Ces difficultés s’expliquent par une réduction des moyens accordés par l’État et par l’ampleur des missions dévolues à l’ONF, mais aussi par un modèle économique fragile reposant pour l’essentiel sur les recettes tirées de la vente du bois, dont les cours tendent à être de plus en plus fluctuants.

Sur le plan social, la situation des personnels de l’Office ne cesse de s’aggraver : le triste bilan des suicides commis par des agents de l’ONF s’est encore alourdi depuis le début de l’année 2015, signe aveuglant de la détérioration des conditions de travail. Sont ici en cause les réductions d’effectifs, l’aggravation de la charge de travail, ainsi que les méthodes de gestion du personnel.

À ce constat s’ajoutent les difficultés récurrentes rencontrées par la forêt privée et la filière forêt-bois, en particulier en termes de mobilisation de la récolte et de valorisation du bois issu des forêts françaises.

Le projet de loi de finances pour 2016 ne prend pas la mesure de cette situation critique. Si les crédits du programme 149 affichent une relative stabilité, celle-ci ne doit pas faire oublier la réduction tendancielle des moyens dévolus à la forêt qui se poursuit depuis plus d’une décennie.

De plus, le contenu exact du contrat d’objectifs et de performance (COP) 2016-2020, qui régit le fonctionnement et définit les objectifs de l’établissement, n’étant pas encore connu, l’adaptation du programme 149 à ce nouveau contrat est difficile à évaluer.

Alors que doit s’ouvrir à Paris, le 30 novembre 2015, la 21ème Conférence des parties de la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, la France devrait montrer l’exemple en accordant à sa forêt les moyens qu’elle mérite. La forêt, dont le rôle protecteur contre le réchauffement climatique est établi, devra en effet s’adapter, dans les prochaines décennies, à une modification sans précédent de son environnement. Les financements nécessaires pour assurer cette adaptation ne sont pas, pour l’heure, au rendez-vous.

Malgré leur baisse très modérée, votre rapporteur ne peut donc émettre un avis positif sur les crédits du programme 149, dont la stagnation risque d’obérer l’avenir de l’Office national des forêts et de compromettre l’adaptation de la forêt française au changement climatique.

I. UN BUDGET STABLE, MAIS DONT LES CHOIX SONT DISCUTABLES

A. LES CRÉDITS DU PROGRAMME 149 SONT RECONDUITS

1. La structure du programme 149

Le programme 149 détermine les crédits affectés à la forêt et à la filière bois françaises. Conformément au principe de multifonctionnalité de la forêt, ses objectifs sont donc à la fois patrimoniaux, économiques, sociaux et environnementaux.

Le projet annuel de performance reprend cette diversité de fonctions assignées à la forêt sous trois grands objectifs : mobiliser plus et mieux valoriser la ressource bois ; gérer durablement les forêts ; adapter les forêts françaises et anticiper le changement climatique.

L’objectif de gestion durable comprend la gestion des risques, notamment un appui spécifique en cas d’événements critiques tels que les tempêtes de 1999 et 2009, dont les conséquences se font toujours sentir, ainsi que la restauration des terrains en montagne (RTM) et la défense des forêts contre les incendies (DFCI).

Les dotations du programme sont réparties en trois actions :

– L’action n° 11 « Gestion des forêts publiques et protection de la forêt », qui vise la mise en œuvre du régime forestier en forêt publique, la valorisation du patrimoine forestier domanial, ainsi que la prévention des risques en forêt ;

– L’action n° 12 « Développement économique de la filière et gestion durable », qui a pour objectifs d’améliorer la gestion durable des forêts et de promouvoir le développement économique de la filière forêt-bois, notamment par l’accroissement des récoltes et le renforcement de la compétitivité de la filière ;

– L’action n° 13 « Fonds stratégique de la forêt et du bois », qui finance des actions de développement et d’accompagnement de l’investissement, tant à l’amont qu’à l’aval de la filière.

2. La stabilité des crédits ne doit pas faire oublier que d’importantes coupes ont été opérées les années précédentes.

(en euros)

 

PLF 2015

PLF 2016

AE

CP

AE

CP

TOTAL 149

279 319 614

296 684 183

277 755 933

291 314 122

Action n° 11 « Gestion des forêts publiques et protection de la forêt »

218 248 048

222 251 706

202 058 713

206 062 371

Classement en forêt de protection et lutte phytosanitaire

693 750

693 750

693 750

693 750

ONF – Versement compensateur et contribution exceptionnelle

171 990 263

171 990 263

155 800 928

155 800 928

ONF – Missions d’intérêt général

22 316 232

22 316 232

22 316 232

22 316 232

Restauration des terrains en montagne

8 686 271

9 686 271

8 686 271

9 686 271

Acquisition de forêts par l’État

925 000

925 000

925 000

925 000

Défense des forêts contre les incendies

13 636 532

16 640 190

13 636 532

16 640 190

Action n° 12 « Développement économique de la filière et gestion durable »

50 404 332

52 609 287

65 108 394

67 506 969

Centre national de la propriété forestière

0

0

15 414 420

15 414 420

Charges de bonification

0

1 000 000

0

1 000 000

Nettoyage et reconstitution suite à la tempête Klaus

41 693 620

42 898 575

40 983 262

42 381 837

Institut technologique Forêt cellulose bois – Construction ameublement

7 500 000

7 500 000

7 043 000

7 043 000

Évaluation, prospectives forestières et appuis aux démarches collectives

1 210 712

1 210 712

1 667 712

1 667 712

Action n° 13 « Fonds stratégique de la forêt et du bois »

10 667 234

21 823 190

10 588 826

17 744 782

Investissements forestiers et filière bois

7 773 116

18 929 072

7 694 708

14 850 664

Animation, études, recherche et innovation

2 894 118

2 894 118

2 894 118

2 894 118

Les crédits affectés au programme 149 s’élèvent à 277,76 M€ en autorisations d’engagement (AE), contre 279,32 M€ en 2015, et à 291,31 M€ en crédits de paiement (CP), contre 296,68 M€ en 2015, soit une réduction de 0,56 % et de 1,81 %, respectivement. Ils affichent donc un niveau stable, dans un contexte budgétaire général qui demeure tendu.

Toutefois, cette année de répit s’inscrit dans une trajectoire structurelle de réduction des crédits consacrés à la forêt, les rares budgets en augmentation étaient essentiellement dus à la prise en compte, après 2009, des conséquences de la tempête Klaus, à l’exception de l’année 2014, seule année au cours de laquelle l’État ait consenti un investissement plus significatif en faveur de la forêt. Pour mémoire, les crédits de la forêt avaient subi dans le PLF pour 2015 une diminution conséquente de leur montant de près de 15 %.

Projet de loi de finances

Autorisations
d’engagement

2003

396 M€

2004

343 M€

2005

312 M€

2006

294 M€

2007

306 M€

2008

305 M€

2009

293 M€

2010

366 M€

2011

360 M€

2012

354 M€

2013

290 M€

2014

317 M€

2015

279 M€

2016

277 M€

B. ACTION 11 : GESTION DES FORÊTS PUBLIQUES ET PROTECTION DE LA FORÊT

Les crédits de l’action 11 s’élèvent en 2016 à 202,06 M€ en AE comme en CP, contre 218,25 M€ en AE et 222,25 M€ en CP en 2015. Ils connaissent donc une nouvelle baisse de 7,2 % en AE et de 7,3 % en CP, après une baisse d’environ 10 % dans le PLF pour 2015.

Leur part dans l’ensemble du programme diminue également, puisqu’elle passe de 78 % dans le PLF pour 2015 à 72,7 % dans le présent projet.

(en euros)

 

PLF 2015

PLF 2016

 

AE

CP

AE

CP

Action n° 11 «  Gestion des forêts publiques et protection de la forêt »

218 248 048

222 251 706

202 058 713

206 062 371

Classement en forêt de protection et lutte phytosanitaire

693 750

693 750

=

=

ONF – Versement compensateur et contribution exceptionnelle

171 990 263

171 990 263

155 800 928

155 800 928

ONF – Missions d’intérêt général

22 316 232

22 316 232

=

=

Restauration des terrains en montagne

8 686 271

9 686 271

=

=

Acquisition de forêts par l’État

925 000

925 000

=

=

Défense des forêts contre les incendies

13 636 532

16 640 190

=

=

Cette baisse des crédits est entièrement subie par l’ONF, par le biais d’une réduction de sa subvention au titre du versement compensateur et de la contribution exceptionnelle de l’État. Le versement compensateur est une variable d’ajustement destinée à combler à l’échelle nationale la différence entre les charges du régime forestier et les frais de garderie, versés par les communes à l’ONF pour rétribuer la mise en œuvre du régime forestier dans les forêts communales. Son montant est maintenu au même niveau qu’en 2015, à savoir 140,4 M€. En revanche, la subvention exceptionnelle d’équilibre versée par l’État à l’ONF connaît une baisse importante, puisqu’elle passe de 31,6 M€ à 15,4 M€, soit une réduction de 51,3 %. L’État justifie cette baisse par la réalisation d’économies de gestion, une intensification de la récolte dans les forêts publiques et un renchérissement du prix de marché du bois.

Toutefois, il est à craindre que ces prévisions soient bien optimistes : il est loin d’être acquis que la récolte puisse être améliorée dans les proportions attendues – votre rapporteur y reviendra dans la seconde partie de cet avis – et le niveau des cours du bois pour l’année prochaine, sans être à ce stade alarmant, ne constitue en rien une garantie de financement. Le prix du hêtre, notamment, affiche une situation particulièrement dégradée.

Il convient de rappeler que l’équilibre du contrat d’objectifs et de performance (COP) conclu entre l’ONF, l’État et la fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR), pour la période 2012-2016, établi en 2011, n’a pu être atteint, notamment en raison d’un niveau des cours du bois qui n’a pas permis d’atteindre les cibles de recettes. En conséquence, la négociation d’un nouveau contrat d’objectifs et de performance a été lancée cette année, pour la période 2016-2020.

À ce stade, le budget estimé de l’ONF dans le présent projet de loi demeure donc très largement prospectif, en l’absence de conclusion de la négociation sur le COP. Les crédits qui seront finalement affectés à l’action n° 11 ne pourront donc être connus avec certitude qu’au cours du mois de décembre, au mieux.

S’agissant des effectifs, le présent projet de loi poursuit la tendance qui s’affirme depuis plusieurs années, celle d’une réduction des postes. Pour l’année 2016, conformément à la trajectoire dessinée dans le COP 2012-2016, la suppression de 104 équivalents temps plein annuels travaillés est programmée.

La totalité des autres postes de l’action n° 11 bénéficient de dotations d’un montant égal au PLF pour 2015.

C. ACTION 12 : DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DE LA FILIÈRE ET GESTION DURABLE

Les crédits de l’action 12 s’élèvent à 65,1 M€ en AE et 67,5 M€ en CP (23,4 % des moyens du programme) ; ils poursuivent deux objectifs : le développement économique de la filière forêt-bois et la gestion durable des forêts.

(en euros)

   

PLF 2015

PLF 2016

   

AE

CP

AE

CP

Action n° 12 « Développement économique de la filière et gestion durable »

50 404 000

52 609 000

65 108 394

67 506 969

Centre national de la propriété forestière

0

0

15 414 420

15 414 420

Charges de bonification

0

1 000 000

=

=

Nettoyage et reconstruction suite à la tempête Klaus

41 693 620

42 898 575

40 983 262

42 381 837

Institut technologique Forêt Cellulose bois – construction ameublement

7 500 000

7 500 000

7 043 000

7 043 000

Évaluation, prospectives forestières et appuis aux démarches collectives

1 210 712

1 210 712

1 667 712

1 667 712

Le budget de cette action est en nette augmentation en raison du rétablissement de la dotation du Centre national de la propriété forestière (CNPF). Afin d’assurer le financement du CNPF, le PLF pour 2015 avait en effet procédé à une ponction de 16 M€ sur le fonds de roulement de celui-ci.

Cette ponction a des conséquences non négligeables sur l’activité de l’établissement : animations réduites, investissements en véhicules non réalisés, formations des agents et des sylviculteurs non effectuées... De plus, l’absence de trésorerie est extrêmement pénalisante pour répondre à des appels à projets exigeant des préfinancements.

Votre rapporteur se félicite, néanmoins, de constater que le caractère exceptionnel de cette mesure est confirmé. À la suite du prélèvement opéré en 2015, le PLF pour 2016 renoue avec le mode de financement habituel du CNPF en rétablissant son financement par le budget de l’État. Le montant alloué à ce centre, de 15,4 M€ en AE comme en CP, diminue toutefois par rapport à l’exercice 2014, où 16 M€ lui avaient été attribués.

Le CNPF est un établissement public à caractère administratif institué par l’ordonnance n° 2009-1369 du 6 novembre 2009 et le décret n° 2010-326 du 22 mars 2010. Il regroupe un échelon central situé à Paris et est présent dans les territoires à travers 18 délégations régionales, les centres régionaux de la propriété forestière (CRPF).

Le CNPF encadre la gestion durable de la forêt privée en instruisant les documents de gestion durable élaborés par les propriétaires privés ; il participe au suivi de la santé des forêts ; il assure la formation à la gestion forestière des propriétaires forestiers et contribue à leur bonne information. De plus, il participe à la mise en œuvre des stratégies locales de développement forestier, agit en faveur de la qualité de la desserte forestière, et favorise la diffusion de l’innovation dans le domaine sylvicole.

Le contrat d’objectifs et de performances (COP) en cours pour la période 2012-2016 insiste plus particulièrement sur le développement de la gestion durable en forêt privée et une mobilisation accrue de la récolte.

Outre une dotation versée par le ministère de l’agriculture, qui constitue 40 % de son budget, le CNPF est également financé par une quote-part forestière de la taxe additionnelle sur le foncier non bâti (24 %), par des subventions et marchés passés avec l’État, les collectivités territoriales et d’autres partenaires (26 %) et par des ressources propres (10 %).

Les charges de bonification correspondent à des versements au bénéfice d’établissements de crédit en compensation des prêts bonifiés au taux de 1,5 % mis en place en 2009 pour financer la mobilisation et le stockage des bois issus des parcelles sinistrées dans les régions Aquitaine, Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon. Elles couvrent également, de manière marginale, les engagements relatifs aux prêts bonifiés accordés à la suite de la tempête de 1999. Leur montant total, qui s’élève à 1 M€, demeure inchangé par rapport au PLF pour 2015.

Les aides destinées au traitement des conséquences de la tempête Klaus visent à soutenir les propriétaires forestiers dans le nettoyage et la reconstitution des parcelles sinistrées. Leur montant connaît une faible diminution, s’élevant à 1,7 % en AE et à 1,2 % en CP, soit 41,0 M€ et 42,3 M€.

L’Institut technologique Forêt Cellulose Bois – construction Ameublement (FCBA) est le centre technique de la filière forêt-bois. Il assure des actions de recherche, d’assistance technique, de formation et de conseil dans le domaine du bois et de sa mise en valeur. Son financement dans le présent PLF, de 7,04 M€ en AE et en CP, est en baisse de 6,1 % par rapport à 2015, ce qu’on ne peut que regretter au regard de l’importance que revêt actuellement la mise en valeur du bois issu des forêts françaises.

Cette diminution est pour partie contrebalancée par l’augmentation des crédits consacrés à l’évaluation et à la prospective forestières, qui passent de 1,2 M€ à 1,7 M€ en AE comme en CP, soit une hausse de 37,8 %. Ces crédits visent à anticiper les évolutions de la demande en matière première de l’industrie du bois par le financement d’actions de recherche et d’études.

D. ACTION 13 : FONDS STRATÉGIQUE DE LA FORÊT ET DU BOIS

Le Fonds stratégique de la forêt et du bois (FSFB) a été créé en loi de finances pour 2014 afin de financer des investissements à l’amont comme à l’aval de la filière forêt-bois. Il répond à une demande ancienne de la profession, et vise à répondre à la faible mobilisation du bois français et au manque d’adaptation de notre industrie à la nouvelle donne du marché mondial.

(en euros)

 

PLF 2015

PLF 2016

 

AE

CP

AE

CP

Action n° 13 «  Fonds stratégique forêt-bois »

10 667 000

21 823 000

10 588 826

17 744 782

Investissement forêt et filière bois

7 773 000

18 929 000

7 694 708

14 850 664

Animation, études, recherche et innovation

2 894 000

2 894 000

2 894 118

2 894 118

Le financement du FSFB constitue cette année 3,8 % des crédits du programme 149, une proportion stable par rapport à la précédente loi de finances. Ses moyens connaissent une légère diminution de 0,7 % en AE, mais celle-ci est beaucoup plus marquée pour les crédits de paiement, puisqu’elle s’élève à 18,7 %. Cette baisse est supportée par les investissements à l’amont de la filière et dans les industries de première transformation, qui visent à remédier au déficit chronique de mobilisation du bois dont souffre l’industrie du bois française par l’amélioration de la desserte et l’aménagement de places de dépôt des bois.

Votre rapporteur a déjà abordé l’importance de ces enjeux dans ses rapports précédents. Dans son rapport sur le PLF pour 2014, il avait souligné les conséquences massives de la sous-mobilisation du bois sur les performances de la filière française à l’export ; dans son rapport sur le PLF pour 2015, il est revenu sur la nécessité d’améliorer la desserte forestière, 29 % des surfaces et des volumes de bois se trouvant en situation d’exploitabilité difficile en forêt domaniale. Il ne peut donc que déplorer la réduction des moyens du Fonds, à l’heure où il conviendrait au contraire de les renforcer notablement.

Pour l’heure, le FSFB demeure financé par une dotation budgétaire, par le transfert d’une part de la taxe additionnelle à la taxe foncière sur les propriétés non bâties (TFNB) perçue sur les surfaces forestières au profit des chambres d’agriculture, et par le produit de l’indemnité de défrichement (1). Ces produits sont estimés, pour l’année 2016, à 3,7 M€ et 10 M€, respectivement. Complété par des cofinancements assurés par le Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER), le financement total du FSFB pour 2016 est estimé à 25 M€. Indéniablement, ces moyens sont trop modestes au regard des défis qui sont ceux de la filière forêt-bois française, dans un contexte où elle continue de représenter le deuxième poste le plus déficitaire de notre commerce extérieur, après l’énergie ; le déficit de la balance commerciale de la filière bois s’élèverait aujourd’hui à 5,5 Mds € (2).

Des pistes pour un financement pérenne existent pourtant, pour l’heure malheureusement écartées par le Gouvernement. Il s’agirait de financer le FSFB par un compte d’affectation spéciale, de lui affecter une partie des crédits du Fonds chaleur, qui encourage à la consommation de biomasse sans contribuer à son renouvellement, et une partie du produit de la contribution climat-énergie, qui viendrait rémunérer le service environnemental essentiel rendu par la forêt à travers sa fonction de « puits de carbone ».

II. LA SITUATION FINANCIÈRE ET SOCIALE DE L’OFFICE NATIONAL DES FORÊTS

A. UNE SITUATION FINANCIÈRE STRUCTURELLEMENT DÉGRADÉE

1. Le constat : un déficit structurel et un niveau d’endettement alarmant

Le constat est connu : l’Office national des forêts connaît depuis des années une situation financière difficile, dont témoignent son déficit récurrent et ses difficultés permanentes de trésorerie.

Le résultat net de l’ONF s’est élevé à – 12,2 M€ en 2009, – 14,7 M€ en 2010, + 1,1 M€ en 2011, – 0,9 M€ en 2012 et + 2,5 M€ en 2013. Le résultat positif de 2013 s’explique par l’amélioration des prix du bois. Toutefois, l’excédent dégagé ne compense que très partiellement les déficits des années moins fastes.

Ces déficits ont rendu le recours à l’emprunt nécessaire. Aujourd’hui, la dette de l’ONF s’élève à 300 M€. Cet endettement s’est accru pour assurer le fonctionnement de l’Office, et non pour financer des investissements.

2. Les causes : une contribution aux pensions trop élevée, un financement qui repose sur les recettes tirées des ventes de bois

a. Un financement fortement dépendant des ventes de bois

L’article L. 223-1 du code forestier prévoit que « les ressources de l’Office national des forêts doivent permettre de faire face à l’ensemble des charges d’exploitation et d’équipement correspondant aux missions qui lui sont confiées ». Selon ses termes, ces ressources comprennent, en particulier :

1° Les produits des bois et forêts appartenant à l’État, ainsi que le produit des réparations, restitutions, dommages-intérêts, recettes d’ordre et produits divers afférents à ces bois et forêts ;

2° Les frais de garderie et d’administration versés par les collectivités territoriales, les établissements publics, les établissements d’utilité publique, les sociétés mutualistes et les caisses d’épargne ;

3° Une subvention du budget général dans le cas où le montant des frais de garderie n’atteindrait pas la valeur réelle des dépenses de l’office résultant de ses interventions de conservation et de régie dans les bois et forêts des personnes morales propriétaires ;

4° Les produits des ventes de lots groupés de bois issus des forêts soumises au régime forestier, sous réserve de la distribution à chaque collectivité de la part des produits nets encaissés qui lui revient.

L’ONF est donc financé, à titre principal, par la vente du bois récolté dans les forêts publiques et par la rémunération de ses services par les personnes morales propriétaires des bois soumis au régime forestier. Le soutien de l’État n’intervient normalement qu’à titre subsidiaire.

Dans son rapport de juin 2014 consacré à l’Office national des forêts, la Cour des comptes soulignait que « les deux tiers, environ, des produits d’exploitation de l’Office dépendent du marché du bois ». Or, si les prix du bois ont connu des niveaux historiquement très élevés à la suite des chocs pétroliers de 1973 et de 1979, les tempêtes de 1999 et de 2009 ont provoqué une forte accumulation des chablis disponibles et une saturation du marché, à l’origine d’une chute du prix du bois. De manière plus structurelle, la mondialisation du marché du bois, ainsi que le contexte actuel de crise économique ont entraîné une instabilité des prix de marché. Comme l’indiquait la Cour des comptes, les ventes de bois constituent une ressource « irrégulière et déclinante ». C’est d’ailleurs un niveau décevant des recettes tirées de la vente de bois par l’ONF en 2014 qui a conduit à dégrader sa situation financière et à avancer d’un an l’achèvement de son contrat d’objectifs et de performance pour les années 2012-2016.

Si des progrès peuvent certainement être accomplis dans la mobilisation du bois, comme le préconisent la Cour des comptes et l’administration, il n’en reste pas moins que celle-ci ne saurait être infinie. Surtout, des recettes aussi fluctuantes ne sauraient convenir pour financer un service public qui doit s’inscrire dans le long terme. L’ONF a besoin de ressources fiables et d’un modèle économique robuste pour permettre à la forêt de jouer tout son rôle patrimonial, environnemental, économique et social.

b. Les contributions au compte d’affectation spéciale « Pensions »

À partir de 2006, un doublement des cotisations patronales a été appliqué pour tous les fonctionnaires, afin d’assurer l’équilibre des régimes de retraite du secteur public. Aussi le taux des cotisations patronales de l’ONF pour ses personnels fonctionnaires, qui constituent les deux tiers de ses effectifs (3), est-il passé de 33,0 % en 2006 à 62,5 % en 2010, puis à 67,0 % en 2011. Cette charge pèse lourdement sur les comptes de l’ONF, puisqu’elle représente environ 50 M€ par an. Ce montant, d’ailleurs supérieur à celui de la subvention exceptionnelle versée annuellement par l’État à l’ONF pour équilibrer ses comptes, explique pour une large part son niveau d’endettement actuel.

Dès 2010, le rapport d’Hervé Gaymard au Président de la République avait préconisé un aménagement de ce dispositif pour le cas de l’ONF (4). Mettant en regard le montant des charges supplémentaires acquittées par l’ONF du fait du doublement de ces cotisations avec celui du produit de ses ventes de bois – 214 M€ à l’époque –, et soulignant que l’État compensait chaque année le surcoût pour l’ONF par une hausse de sa subvention budgétaire, il recommandait l’application d’un principe d’équité concurrentiel, comme cela avait été fait pour La Poste. Depuis 2006, celle-ci bénéficie en effet d’un prélèvement libératoire pour les pensions de ses fonctionnaires égal aux cotisations patronales qui auraient été payées pour des personnels relevant du code du travail. Cette dérogation lui a été accordée au motif qu’elle intervient sur le marché en concurrence avec des entreprises. Dans la mesure où l’ONF est un acteur majeur d’un marché du bois désormais largement internationalisé, il paraîtrait équitable de lui appliquer un régime comparable.

Un tel régime adapté serait d’autant plus envisageable que le compte d’affectation spéciale « Pensions » affiche aujourd’hui un niveau de fonds de roulement de 2,2 Mds €, très supérieur à ses besoins, estimés à 1 Md €. Votre rapporteur recommande donc de mettre fin à la majoration des cotisations patronales pour l’ONF, du moins tant que son endettement ne sera pas résorbé.

3. Des pistes pour un financement pérenne

La forêt procure, selon l’expression désormais consacrée, des « aménités » à la collectivité, dont elle ne perçoit pas, à l’heure actuelle, le bénéfice. Il serait pourtant logique que les personnes et organismes qui contribuent à la pérennité et à la bonne gestion de la forêt française disposent des moyens nécessaires pour que celle-ci continue de remplir ses fonctions économique, environnementale et sociale. L’ONF, en tant que gestionnaire des forêts publiques, qui constituent 25 % des surfaces forestières françaises, devrait en être le premier bénéficiaire. Les services qu’il rend au public seraient ainsi justement rétribués.

À cette fin, plusieurs pistes paraissent envisageables :

– les massifs forestiers gérés conformément au principe de multifonctionnalité permettent de disposer de réserves en eau de bonne qualité. Or le traitement des eaux polluées par des nitrates et des pesticides entraîne un surcoût compris entre 0,5 et 0,7 € par m3 d’eau distribué. Il serait donc facilement envisageable de créer une contribution au titre de la gestion durable des espaces forestiers, d’un montant compris entre 0,1 et 0,2 € par m3 d’eau distribué. Cette contribution servirait au financement d’actions en direction des propriétaires forestiers, dont l’ONF, via les agences de bassin ;

– La présence, en zone de montagne, de forêts bénéficiant d’une gestion exigeante contribue de manière cruciale à la réduction des risques naturels, notamment gravitaires. En cas de catastrophe naturelle, son apport peut se révéler essentiel dans la réduction des dégâts, dans les régions soumises à une forte érosion des sols. Or l’ONF a été l’opérateur des opérations de restauration des terrains en montagne décidées par l’État. On estime que son action a permis de stabiliser les sols de manière durable dans une trentaine de départements. Il serait naturel que les services rendus par l’ONF en ce domaine soient rétribués. Cette rétribution pourrait prendre la forme d’un prélèvement sur le fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit « fonds Barnier », créé par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement. Financé par un prélèvement de 12 % sur la prime « catastrophes naturelles » des contrats d’assurance habitation et automobile, ce fonds a été au départ destiné à financer les indemnités d’expropriation de biens exposés à un risque naturel majeur, avant que son utilisation soit élargie à d’autres catégories de dépenses, comme des subventions à des collectivités territoriales pour financer des travaux de réduction des risques naturels. Il paraît souhaitable que l’ONF, au titre de sa contribution à la prévention de ces risques, devienne bénéficiaire d’une partie de ce fonds ;

– Enfin, la forêt, lorsqu’elle est correctement exploitée, joue un rôle fondamental dans la fixation du dioxyde de carbone. Les revenus tirés des « droits carbone », d’un montant d’1,5 Md €, devraient, pour partie, revenir au premier exploitant forestier de la Nation.

Le renforcement des ressources financières de l’ONF pourrait permettre, également, d’étoffer ses missions selon les besoins rencontrés aujourd’hui par la filière bois française. Votre rapporteur souhaite ici se faire l’écho des propositions exprimées par notre collègue Mme Pascale Got, dans le rapport d’information pour une meilleure valorisation économique de la filière bois-forêt française, dont elle était co-rapporteure avec M. Damien Abad (5). Ce rapport propose notamment de créer un observatoire économique de la forêt et du bois, rattaché à l’ONF, qui mettrait à la disposition des acteurs économiques de cette filière des études économiques et des ressources statistiques propres à renforcer la connaissance qu’ils ont de leur environnement, et de confier à l’ONF la mission de développer une réelle politique économique forestière ; à ce titre, l’Office serait, en particulier, chargé de mettre en place une gestion prévisionnelle des ressources et des besoins adaptée à la demande de l’aval de la filière, et de jouer un rôle d’impulsion, notamment en matière de contractualisation, afin de réduire l’incertitude des livraisons et de consolider les relations entre amont et aval. Votre rapporteur souligne que ces nouveaux moyens devraient également servir à financer l’adaptation de la forêt française au changement climatique, tâche urgente, sur laquelle il revient dans la dernière partie du présent rapport.

4. Les obstacles à la mobilisation du bois

Les solutions de financement exposées précédemment doivent faire l’objet d’une réflexion dès à présent, et devraient pouvoir être mises en place à moyen terme. Toutefois, le renforcement du financement de l’ONF appelle également une réponse urgente. Pour répondre à ce défi, votre rapporteur prend en compte la possibilité, bien qu’hypothétique, d’accroître la récolte de bois en forêt publique. Cette mobilisation accrue contribuerait, à court terme, au redressement de la situation financière de l’Office, puisque celui-ci perçoit les recettes de la vente du bois des forêts de l’État, et une partie des recettes tirées des ventes de bois des forêts des collectivités territoriales – à savoir 10 % en plaine et 12 % en montagne –, au titre des frais de garderie. Il apparaît cependant nécessaire de lever certains obstacles.

a. Des forêts publiques non soumises au régime forestier

Tout d’abord, de manière étonnante, l’ensemble des propriétés publiques boisées ne sont pas soumises au régime forestier, ce qui constitue pourtant une obligation légale. Ces zones, qui couvrent certes une superficie marginale, ne bénéficient pas des règles très protectrices qui entourent la gestion des forêts publiques, dans le respect du principe de multifonctionnalité garantissant un développement forestier dans l’intérêt général. Pire, certaines sont dans une situation de non-droit, le régime moins contraignant applicable à la forêt privée n’y étant même pas mis en œuvre ! Elles sont parfois gérées directement par des particuliers, qui procèdent eux-mêmes à la récolte et à la vente du bois, et les produits financiers tirés de celle-ci ne sont pas toujours versés au budget communal. Il serait urgent qu’un recensement précis de ces forêts soit publié, et que le régime forestier y soit pleinement appliqué, comme le prescrit la loi.

b. L’exploitation des forêts sectionales

Héritage médiéval, la section de commune est une partie du territoire d’une commune dont les habitants possèdent collectivement, à titre permanent et exclusif, des biens, dits « biens de section », souvent boisés, qu’ils gèrent à leur profit. Elle est dotée de la personnalité juridique.

Dans un objectif de simplification administrative, et afin de lever une contrainte pesant sur le fonctionnement des communes concernées, la loi n° 2013-428 du 27 mai 2013 modernisant le régime des sections de commune, dite « Jarlier », a modifié le régime de ces sections, en créant une procédure visant à faciliter le transfert des biens sectionaux aux communes pour motif d’intérêt général, moyennant une indemnisation des habitants de la section, et en interdisant le partage de revenus en espèces entre ayants droit.

Selon ses initiateurs, cette réforme visait à lever un frein au développement des territoires ruraux, notamment en termes d’aménagement du territoire des communes, au motif que les ayants droit avaient tendance à privilégier les arbitrages financiers de court terme au lieu d’une vision de développement sur le long terme. Or, s’agissant des biens sectionaux comportant sur leur territoire des forêts, la réforme paraît avoir davantage conduit à décourager la gestion forestière, dont les habitants étaient naguère directement bénéficiaires. Lorsque les collectivités territoriales comportant sur leur territoire des forêts sectionales ont poursuivi la gestion de celles-ci, elles ne trouvent pas toujours d’usage aux recettes qui en sont tirées, faute de bénéficiaire désigné. Cet embarras conduit, là encore, à renoncer à la gestion des bois concernés. Votre rapporteur ne peut que regretter que ces aspects n’aient pas été davantage pris en considération, alors que la mobilisation du bois français, particulièrement en forêt publique, revêt aujourd’hui une importance cruciale. Il conviendrait donc d’inciter les collectivités territoriales concernées à exploiter les forêts sectionales.

c. Incidences des recettes tirées de la vente de bois sur la DGF

Le montant de la dotation forfaitaire des communes au sein de la dotation globale de fonctionnement (DGF) est désormais fonction de leurs recettes réelles de fonctionnement constatées. Ces recettes incluent les recettes forestières brutes, issues de la vente de la récolte et des produits forestiers. Ce mode de calcul, s’il est justifié par le souci de faire contribuer les communes les plus riches à l’effort de redressement des finances publiques, entraîne un effet pervers notable sur la mobilisation du bois. Les communes qui tirent le plus de revenus de la vente de bois sont, en effet, également celles qui réalisent le plus grand effort de mobilisation. Le retrait du montant de leurs recettes forestières de leur dotation ne peut que les décourager dans la poursuite de cet effort.

Cette situation a suscité, à bon droit, l’incompréhension de nombre de communes forestières. Elle a désormais été éclaircie par une réponse de M. Christian Eckert : pour éviter qu’une augmentation de l’activité d’exploitation forestière ne conduise à une contribution accrue à l’effort de redressement des finances publiques, une solution consiste à créer un budget communal annexe dédié, au sein duquel est reporté l’ensemble des flux comptables et financiers afférents à l’exploitation forestière de la commune. La modulation de la dotation des communes selon leurs recettes ne tient compte, en effet, que des recettes inscrites au budget principal.

Si votre rapporteur se réjouit de la clarté de la réponse apportée par l’administration sur ce sujet d’importance, il estime toutefois qu’il est absolument nécessaire que l’ensemble des communes forestières ainsi que les comptables publics en soient informés, afin de renforcer la mobilisation du bois des forêts publiques.

d. Programmes triennaux de coupes

Les plans communaux de gestion forestière sont aujourd’hui soumis à une nouvelle délibération du conseil municipal chaque année. Il serait opportun d’ouvrir aux communes la possibilité d’élaborer et d’adopter des programmes triennaux de coupes et de travaux, qui permettrait de fournir aux entreprises de travaux forestiers une meilleure visibilité sur leur volume de travail, et de programmer leurs investissements en conséquence. La mobilisation du bois s’en trouverait ainsi accrue.

e. La rétribution des fonctions de président d’un SMGF

La fonction de président d’un syndicat mixte de gestion forestière (SMGF) n’est plus toujours rétribuée, alors qu’elle entraîne des frais pour son titulaire. Les syndicats mixtes de gestion forestière sont créés en vue de faciliter la mise en valeur, la gestion et l’amélioration de la rentabilité des bois et forêts relevant du régime forestier. Leur création a permis de procéder à une gestion groupée des sections de communes, et donc d’améliorer notablement la mobilisation de leur bois. Les délégués d’un SMGF sont nommés par le conseil municipal à chaque renouvellement de mandat. Ils élisent un président qui assure le fonctionnement du syndicat. Or, alors que jusqu’ici le président d’un SMGF bénéficiait d’une indemnité pour couvrir les frais engendrés par ses responsabilités, qui était inscrite au budget du syndicat, certains comptables publics rejettent désormais son versement. Le bon fonctionnement et la pérennité de certains syndicats s’en trouvent remis en cause. Il conviendrait d’éclaircir cette question, que votre rapporteur a déjà soumise au Gouvernement, sans obtenir pour l’heure de réponse (6). Le remboursement des présidents de SMGF aux frais réels étant difficile à mettre en œuvre, une indemnisation forfaitaire en lien avec les surfaces ou les volumes gérés pourrait être la réponse la plus adaptée. Dans tous les cas, une juste compensation de ces fonctions très utiles à la mobilisation du bois devrait être garantie.

f. Le mode de facturation des prestations d’ATDO

Actuellement, les communes qui décident de vendre des bois façonnés sous contrat d’approvisionnement paient à l’ONF des frais d’assistance technique à donneur d’ordre (ATDO), d’un montant d’environ 3 € par m3. Ces frais sont, pour l’heure, déduits de l’assiette des frais de garderie acquittés par les communes au profit de l’ONF en rétribution de ses interventions dans les forêts communales.

Or, le projet de COP envisage de supprimer cette déductibilité ; les frais de garderie ne seraient plus payés sur les recettes nettes tirées de la vente des bois, mais sur leur montant brut. Il est vrai que cette mesure aurait un effet neutre sur les relations financières de l’ONF avec les communes forestières prises dans leur ensemble. Toutefois, il n’en irait pas de même pour chaque commune prise séparément. Les communes dans lesquelles l’exploitation présente des difficultés particulières, notamment en zone de montagne, verraient le coût d’exploitation de leurs bois augmenter de manière significative, ce qui risquerait de réduire la mobilisation du bois, à l’heure où l’on cherche au contraire à la dynamiser.

B. UNE SITUATION SOCIALE DE PLUS EN PLUS ALARMANTE

1. Un retrait de l’État

L’ONF subit, sur le long terme, une réduction drastique de ses effectifs. En trente ans, il a perdu 40 % de ses emplois, et 22 % depuis quinze ans. Les contrats d’objectifs et de performance pour les années 2007-2011 et 2012-2016, qui prévoyaient une diminution des effectifs de 1,5 % par an, ont été, sur ce point, parfaitement réalisés.

Pour 2016, les réductions prévues s’élèvent à 108 postes, à comparer aux 150 initialement prévues dans le COP. Cette inflexion, légère au regard des suppressions déjà consenties, amorcerait, selon l’administration, un retournement de tendance : l’objectif pour le prochain COP serait de mettre un coup d’arrêt aux suppressions, et même de créer de nouveaux postes. À compter de 2017, 50 postes seraient créés chaque année jusqu’à la fin de l’exécution du COP, soit 200 postes au total. Les recrutements devraient prendre la forme de contrats aidés et de contrats d’apprentissage, dans leur intégralité.

Votre rapporteur ne peut que se féliciter de ces intentions, et veillera à ce qu’elles soient suivies d’effets, même si elles ne font que confirmer une tendance de l’ONF à recourir de manière croissante à des contrats aidés (7). Toutefois, il s’interroge sur l’idée d’une reprise des embauches sous la forme de contrats à durée limitée, alors que les réductions d’effectifs ces dernières années ont également touché les personnels fonctionnaires. La forêt a des besoins en personnels permanents, qui justifient des emplois pérennes et de qualité. La qualité de la gestion forestière serait la première victime d’une précarisation de l’emploi à l’ONF.

À plus court terme, votre rapporteur s’interroge sur l’ampleur exacte des suppressions d’effectifs pour l’année 2016, dans la mesure où le projet annuel de performances continue d’évoquer « un schéma d’emplois de 150 ETP correspondant à la baisse prévue du plafond d’emplois inscrit en LFI. ».

2. Une privatisation rampante ?

L’administration a annoncé son souhait de différencier plus rigoureusement les personnels réalisant des missions relevant d’un service public administratif, et ceux qui relèvent plutôt du service public industriel et commercial. Le Gouvernement a d’ailleurs déposé un amendement en ce sens en vue de la discussion en séance publique, à l’Assemblée nationale, du projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires (8). Cet amendement, sans aucune concertation avec les organisations syndicales, proposait l’inscription, dans le code forestier, des différents statuts sous lesquels l’ONF peut recruter des agents : fonctionnaires de l’État, agents contractuels de droit public, et salariés régis par le code du travail. L’objectif serait de réallouer les moyens en personnel, en repositionnant les effectifs en fonction de leur statut et de leurs missions. Les représentants syndicaux entendus par votre rapporteur ont souligné combien cette distinction serait difficile à réaliser sur le terrain, l’ensemble des missions de l’ONF étant intimement liées et donc souvent réalisées par les mêmes agents. Aussi votre rapporteur partage-t-il les inquiétudes exprimées par ceux-ci face à ces annonces, qui peuvent laisser présager une réduction importante des personnels fonctionnaires et ouvrir la voie à une forme de privatisation rampante de l’établissement ONF.

3. Un climat social dégradé

L’audit socio-organisationnel (ASO) conduit en 2011 avait révélé l’imposition d’un management par objectifs brutal douloureusement ressenti par les personnels, ainsi qu’un manque d’écoute des institutions représentatives du personnel par la direction.

Si ces faits sont malheureusement connus, votre rapporteur regrette de constater que la qualité du dialogue social ne paraît pas favorisée par le Gouvernement. En effet, celui-ci a envisagé, lors de la discussion du projet de loi relatif à la déontologie, aux droits et aux obligations des fonctionnaires, de proposer une modification du code forestier afin d’instituer un comité technique et un comité central d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail uniques, compétents pour l’ensemble des personnels de l’ONF, de droit public comme de droit privé. L’exposé sommaire de l’amendement déposé précisait que l’objectif de cette mesure était de mettre « fin à un système de double concertation très souvent redondant » (9). Votre rapporteur ne peut que se féliciter que cet amendement ait été retiré avant sa discussion mais exprime son inquiétude face à la vision du dialogue social qu’il révèle. Il rappelle que des échanges approfondis avec les représentants du personnel, dans toute leur diversité, sont un outil au service de la performance, et non une entrave au bon fonctionnement d’un service public.

Or le dialogue social entre l’ensemble des organisations syndicales et les dirigeants s’est profondément dégradé, atteignant un stade critique, notamment dans le cadre de la négociation du futur COP 2016-2020.

4. La dureté croissante des conditions de travail

Trois personnes employées par l’ONF se sont suicidées en forêt, sur leur lieu de travail, depuis le début de l’année 2015. Ce triste chiffre vient s’ajouter à un bilan déjà très lourd et malheureusement bien connu : depuis 2005, 39 fonctionnaires et salariés de l’Office sont morts dans les mêmes conditions. Le constat catastrophique qui avait conduit à la réalisation d’un audit socio-organisationnel en 2011 est donc toujours d’actualité. Cet audit avait conclu à l’existence d’un « malaise social profond et multifactoriel » directement lié aux réductions d’effectifs qui ont entraîné une augmentation de la charge de travail, l’abandon de certaines missions de service public et la fragilisation des personnels ouvriers. De manière générale, il avait révélé un niveau de stress au travail et de dépression élevé et un fort isolement des personnels travaillant en forêt.

Les méthodes de gestion du personnel sont, également, à l’origine de ces difficultés. L’ASO avait mis en évidence une grande méfiance vis-à-vis des personnels d’encadrement – seuls 33 % des personnels avaient déclaré faire confiance à leur responsable de structure et 16 % des personnels des territoires envers le siège.

À cet égard, votre rapporteur relève que la performance sociale et la qualité de l’emploi ne sont pas prises en compte pour l’attribution du label PEFC (Program for the Endorsement of Forest Certification schemes), le plus répandu en France. À l’inverse, le label FSC (Forest Stewardship Council), qui est privilégié en Allemagne, inclut un important volet social dans son cahier des charges : la qualité de la discussion avec les partenaires sociaux, le fait de privilégier des emplois réguliers et locaux et le développement des compétences des travailleurs constituent des critères qui conditionnent l’attribution du label.

5. L’abandon de la politique de formation

La fermeture du centre de formation de Velaine-en-Haye, situé à 20 km de Nancy, a été annoncée en septembre 2015, pour le mois de juin 2016. Proche de vastes massifs forestiers, situé dans une région qui concentre une grande part de la formation française en foresterie, bien desservi et doté d’hébergements, ce centre est un atout majeur de la politique de formation de l’ONF.

L’annonce de cette fermeture intervient alors que l’ONF fait face à un défi majeur en termes de formation, en raison de la pyramide des âges de ses personnels, dont 25 % doivent partir à la retraite dans les cinq prochaines années.

De manière générale, l’ONF se désinvestit de l’activité de formation, alors que l’expertise française en foresterie, notamment en matière de gestion des forêts tropicales, bénéficie traditionnellement d’une reconnaissance mondiale. Avec la diminution des moyens accordés à la formation par l’ONF, c’est une part du rayonnement français dans le domaine scientifique qui risque de s’amenuiser, voire de disparaître.

Cette orientation est d’autant plus regrettable que l’offre de formation dans les métiers du bois est peu répandue sur le territoire national. Elle fait d’ailleurs l’objet de la recommandation n° 3 du rapport d’information précité de Mme Pascale Got et de M. Damien Abad.

III. CETTE DÉGRADATION EST PARTICULIÈREMENT PRÉOCCUPANTE ALORS QUE LA FORÊT DOIT FAIRE FACE AU DÉFI DU CHANGEMENT CLIMATIQUE.

Enfin, votre rapporteur souhaiterait lancer un signal d’alarme, en vue de la 21ème Conférence des parties de la convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques qui doit s’ouvrir à Paris très prochainement, sur l’enjeu que représente l’adaptation de la forêt française au changement climatique. Celui-ci aura en effet des répercussions majeures sur l’état de la forêt, dont il convient de prendre, dès maintenant, toute la mesure, en raison de l’inscription de la gestion forestière dans le temps long : c’est aujourd’hui que se préparent la forêt et les récoltes de l’après-2050, période qui devrait voir, selon les prévisions, les changements les plus importants de notre environnement.

Le processus de changement climatique comprend deux évolutions conjointes : une fréquence accrue des épisodes de sécheresse et de canicule, et une hausse de la concentration atmosphérique en CO2.

1. Les effets du changement climatique sur l’arbre et la forêt

a. Effets sur la répartition des espèces

La vie des espèces est, pour l’essentiel, déterminée par le climat, notamment l’énergie lumineuse disponible, les températures et la disponibilité en eau. Chaque espèce y réagit différemment en fonction de ses besoins en chaleur, de sa tolérance au froid et au déficit hydrique.

En conséquence, le changement climatique devrait déboucher sur une modification de la répartition géographique des espèces :

– L’augmentation des températures devrait provoquer un déplacement vers le nord et en altitude des espèces. Le chêne vert pourrait ainsi étendre sa présence, tandis que le pin pourrait trouver à mieux s’acclimater dans la moitié nord du pays.

– Conjointement avec la diminution des précipitations, l’augmentation des températures devrait entraîner un assèchement des sols, qui pourrait nuire au développement de l’épicéa, du sapin et du hêtre. Le hêtre, qui recouvre 15 % de la surface forestière de production en France, pourrait se retirer de 60 à 70 % de son aire actuelle à l’horizon 2055, et se replier vers les massifs montagneux et le nord-est du pays. À la même échéance, le chêne sessile se retirerait de 30 à 40 % de son aire actuelle, tandis que le chêne pédonculé serait particulièrement vulnérable au manque d’eau. Pour le sapin et l’épicéa, ce retrait atteindrait 60 % et 90 %, respectivement.

b. Effets sur le cycle de développement et la physiologie de l’arbre

Le changement climatique est d’ores et déjà à l’origine de modifications dans le cycle de vie des arbres : l’apparition des bourgeons et la floraison des espèces forestières auraient avancé en moyenne de trois jours par décennie au cours des cinquante dernières années. En revanche, les événements d’automne, comme l’entrée en sénescence des feuilles, auraient eu tendance à se produire plus tardivement, en moyenne d’un jour et demi par décennie (10). Au total, la période d’activité des arbres aurait augmenté de quatre à cinq jours au cours des cinquante dernières années.

Néanmoins, la sécheresse du sol pourrait réduire la productivité forestière dans les prochaines décennies, avec de fortes variations entre espèces, quand l’augmentation de la concentration du CO2 devrait la dynamiser.

c. Effets sur les écosystèmes

La hausse des températures devrait avoir un impact sur le développement des insectes ravageurs et pathogènes. Plus de la moitié de ceux-ci auraient vu leur population s’accroître ou étendre leur aire de distribution depuis les années 1970. Le rôle du changement climatique dans cette extension a même pu être démontré pour certaines espèces, ainsi pour la chenille processionnaire du pin, qui a étendu son domaine vers le nord et en altitude en raison de températures plus élevées. L’effet de la modification climatique devrait se cumuler avec celui des activités humaines, qui est un facteur connu du développement de ces espèces.

2. Ces effets appellent une adaptation de la gestion forestière et sylvicole et un renforcement des moyens en faveur de la forêt.

La stratégie de gestion à adopter et l’ampleur des interventions devront être ajustées en fonction des effets observés du changement climatique sur la forêt, au fur et à mesure de leur apparition. Il ne s’agit donc pas seulement d’observer ces effets et de choisir de nouvelles priorités de gestion en fonction de ceux-ci, mais de réaliser des expérimentations en permanence, dans des zones aux caractéristiques différentes. En effet, l’enjeu n’est pas de protéger la forêt contre un aléa ponctuel, mais d’ « anticiper une modification progressive des conditions du milieu, parfois avec des à-coups, qui instaure un état de déséquilibre permanent des écosystèmes, sans possibilité de retour en arrière » (11).

Dans tous les cas, l’intervention humaine sera déterminante pour accompagner la forêt dans l’adaptation au changement climatique. La forêt ne pourra en effet s’adapter par elle-même à cette évolution : les migrations naturelles des essences, en particulier, sont de l’ordre de 10 à 100 fois trop lentes au regard du rythme du changement climatique. C’est pourtant le changement des essences seul qui permettra, à long terme, d’apporter une réponse aux modifications de l’environnement – l’adaptation des modes de gestion sylvicoles ne convenant, au mieux, qu’à moyen terme.

Face à ce constat, votre rapporteur déplore la faiblesse des moyens dévolus à l’accompagnement de notre forêt face au changement climatique : les forestiers, publics comme privés, ne disposent pas de suffisamment de financements pour réaliser les plantations nécessaires. Il conviendrait également de renforcer l’information des propriétaires et leur accompagnement. Enfin, les auditions conduites par votre rapporteur ont fait ressortir les difficultés de financement rencontrées par les équipes menant des recherches à visée pratique sur ces sujets. Les recherches sont en effet exclues, en raison de leur caractère appliqué, des canaux habituels de financement de la recherche. Le seul véhicule qui assure aujourd’hui ce financement est le Réseau mixte technique « Aforce » (Adaptation de la forêt au changement climatique), doté par l’État de 100 000 € par an seulement.

Votre rapporteur souhaite alerter face à cet enjeu qui lui paraît encore sous-estimé, et appeler à une prise de conscience sur la nécessité d’apporter un soutien adapté aux forestiers dans la gestion de cette transition, notamment les organismes chargés d’une mission de service public dans ce domaine, à savoir l’Office national des forêts et le Centre national de la propriété forestière.

EXAMEN EN COMMISSION

Dans le cadre de la commission élargie du mercredi 28 octobre 2015, la commission des affaires économiques a examiné pour avis, sur les rapports de M. Jean-Pierre Le Roch (Agriculture et alimentation) et de M. André Chassaigne (Forêt), les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » (voir le compte rendu officiel de la commission élargie du 28 octobre 2015, sur le site internet de l’Assemblée nationale (12).

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À l’issue de la commission élargie, la Commission des affaires économiques a délibéré sur les crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

La Commission est saisie des amendements n° II-CE1 et n° II-CE2 de M. Thierry Benoit et plusieurs de ses collègues.

M. Thierry Benoit. Conformément aux propos tenus tout à l’heure, l’amendement n°II-CE1 propose d’abonder le fonds d’allègement des charges à hauteur de 6,5 M€ à partir d’un ajustement pris sur les moyens de l’administration générale. Si vous le souhaitez, pour votre être agréable Madame la Présidente, je peux aussi défendre l’amendement n° II-CE2. Il s’agit d’abonder à hauteur de 7,5 M€ le dispositif des exonérations de charges sociales. Nous trouvons dommageable que cette rubrique soit affaiblie dans son volume. Là aussi, le mouvement se ferait à partir d’un ajustement pris sur des moyens de l’administration centrale.

M. Jean-Pierre Le Roch, rapporteur pour avis. Sur le premier amendement, Madame la Présidente, la réponse a déjà été abordée pendant le débat qui vient de s’écouler. Le budget du fonds d’allègement des charges est stable entre 2015 et 2016 et abondé sur 2015 avec 100 M€, peut-être même un peu plus puisque sur les 63 M€ accordés par l’Europe, une vingtaine de millions pourraient être affectés sur ce budget du fonds d’allègement des charges. L’avis est donc défavorable. Sur le deuxième amendement, la prévision est en accord avec le dispositif des 400 M€ pour l’emploi des travailleurs salariés saisonniers. Il est calibré pour cette dépense sachant que, pour les agriculteurs, s’ajoute la mise en place du crédit d’impôt compétitivité emploi et la montée en charge du pacte de responsabilité avec des nouvelles baisses de charges de plus de 700 M€ pour le secteur agricole. En conséquence, l’avis est défavorable.

M. Thierry Benoit. Toujours dans une démarche constructive, fidèle à l’Union des démocrates et indépendants, je propose de retirer l’amendement n° II-CE1 parce qu’en effet nous avons entendu le ministre. En revanche, je propose, au nom de mon groupe, de maintenir l’amendement n° II-CE2 parce que nous souhaitons revenir au volume initial de 418 M€.

L’amendement n°II-CE1 est retiré.

La Commission rejette l’amendement n° II-CE2.

Conformément à l’avis favorable de M. Jean-Pierre Le Roch, et contrairement à l’avis défavorable de M. André Chassaigne, la Commission des affaires économiques a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la Mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».

Puis elle examine l’amendement n° II-CE3 de M. Potier et plusieurs de ses collègues.

M. Dominique Potier. Il s’agit d’un amendement d’appel. Il faut trouver une solution phyto-pharmacologique pour des productions orphelines avec des impasses phytosanitaires dont la mise en marché des produits n’est pas financée par les firmes faute d’une assiette d’utilisation suffisante. Je propose que la solution soit de type mutualiste avec une prise en charge par l’ensemble des producteurs via la redevance pour pollutions diffuses. C’est ce qui est prévu dans le plan Ecophyto. Pour économiser cet argent et avoir des solutions alternatives pour quelques milliers d’hectares de productions stratégiques agricoles, légumières et semencières, la proposition retenue est l’extension de la vocation de la taxe sur la pharmacovigilance qui est dévolue à l’Agence nationale de la sécurité sanitaire des aliments. C’est une solution très attendue dans la profession. Il ne s’agit pas d’une nouvelle taxe, j’anticipe les réponses de mon collègue Le Roch, mais c’est une extension de l’utilisation de l’argent levé par cette taxe, votée l’année dernière, conformément à la loi d’avenir pour l’agriculture, afin de prévenir la sécurité alimentaire et sanitaire des produits phytopharmaceutiques dans la durée.

M. Jean-Pierre Le Roch, rapporteur pour avis. Cette taxe a été introduite par la loi de finances rectificative pour 2014 et fixée en 2015 à 0,2 % du chiffre d’affaires des produits pharmaceutiques. Son produit est affecté à l’Agence nationale de la sécurité sanitaire des aliments pour financer un dispositif de phyto-pharmacovigilance. Votre intention d’étendre son usage à la résorption d’usages orphelins est louable dans la mesure où de petites filières agricoles se trouvent fragilisées par l’impasse technique rencontrée. Toutefois, il existe déjà une commission des usages orphelins et un programme d’expérimentation sur des solutions innovantes pour les usages orphelins.  Par ailleurs, depuis cette année 2015, les autorités françaises cofinancent le secrétariat européen des usages mineurs (dont usages orphelins) avec deux autres États membres et la Commission. Celui-ci est basé à Paris dans les locaux de l’Organisation européenne et méditerranéenne pour la protection des plantes. Le développement des solutions phytosanitaires pour les usages orphelins est d’ores et déjà soutenu au sein du plan Ecophyto. L’Agence nationale de la sécurité sanitaire des aliments ne peut pas se substituer aux entreprises dans ce cas. Elle a aussi besoin de l’ensemble du produit de cette taxe pour la pharmacovigilance. Je vous demande de retirer votre amendement.

M. Dominique Potier. Je le retire mais j’y reviendrai en séance parce que c’est un combat important pour prévenir les impasses phytosanitaires dans les productions orphelines.

L’amendement de M. Potier est retiré.

Mme la Présidente Frédérique Massat. Merci mes chers collègues. La Commission des affaires économiques est terminée. La séance est levée concernant la Commission des affaires économiques.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR)

– M. Dominique Jarlier, président

– M. Yves Lessard, conseiller du président

Ministère de l’alimentation, de l’agriculture et de la pêche

– Mme Élodie Lematte, conseillère chargée des affaires financières, sociales et de la filière forêt-bois

– Mme Véronique Borzeix, sous-directrice filières forêt-bois, cheval et bioéconomie

Table ronde avec les syndicats des personnels de droit public de l’ONF :

SNUPFEN SOLIDAIRES Forêt

– M. Philippe Canal, secrétaire général adjoint

Syndicat CGT des personnels de droit public de l’ONF (CGT Forêt)

– M. Michel Benard, technicien forestier principal

– Mme Véronique Delleaux, technicien forestier

Unsa forêt - Génération Forêts

– M. Michel Ablancourt, secrétaire général de Génération Forêts

SNPA-ONF-FO

– M. Marc Coulon, secrétaire général

Syndicat de l’environnement, la forêt et l’agriculture-CGC

– M. Gilles Van Peteghem, secrétaire général EFA-CGC

Table ronde avec les syndicats des personnels de droit privé de l’ONF :

Fédération Nationale Agroalimentaire et Forestière CGT (FNAF CGT)

– Mme Jocelyne Hacquemand, secrétaire nationale

Fédération Générale Agroalimentaire-FGA-CFDT

– Mme Barbara Bindner, secrétaire fédérale

– M. Jean-François Davignon, délégué syndical central FGA-CFDT à l’ONF

– M. Frédéric Chiny, membre du conseil d’Administration de l’ONF

FO-Forêt

– M. Dominique Bordenave, salarié ONF, délégué syndical

– M. Denis Yeselnik, salarié ONF, délégué syndical

– M. Alain Thuot, salarié ONF, délégué syndical

– Mme Patricia Drevon, permanente fédérale FGTA

CFTC-Agri

– M. Didier Hilbert, délégué central national

– M. Éloi Schneider, délégué central adjoint à l’ONF

Union de la Coopération Forestière Française (UCFF)

– M. Bertrand Servois, vice-président

– M. Julien Bluteau, secrétaire général

Office National des Forêts, Direction Forêt et Risques Naturels

– Mme Myriam Legay, chef du département recherche, développement et innovation

Institut de développement forestier du Centre national de la propriété forestière (CNPF-IDF)

– M. Philippe Riou-Nivert, ingénieur principal au CNPF, chargé du changement climatique, des risques et des résineux

Office national des forêts (ONF)

– M. Christian Dubreuil, directeur général

– M. Patrick Soulé, directeur général adjoint

© Assemblée nationale

1 () Lors d’un défrichement, les propriétaires disposent en effet de la possibilité, depuis la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, de choisir entre une compensation en nature, en procédant à un reboisement, ou en argent, au profit du FSFB.

2 () Agreste Conjoncture n° 2-2,  octobre 2015, http://agreste.agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/conjinforap201510bois.pdf

3 () En tant qu’établissement public industriel et commercial à statut dérogatoire, l’ONF est autorisé à avoir en son sein des personnels fonctionnaires autres que l'agent chargé de la direction de l'ensemble du service et le chef de la comptabilité.

4 () « L’Office national des forêts, outil d’une volonté », rapport d’Hervé Gaymard au Président de la République, septembre 2010.

5 () « Pour une meilleure valorisation économique de la filière bois-forêt en France », rapport d’information de la commission des Affaires économiques présenté par Mme Pascale Got et M. Damien Abad, octobre 2015.

6 () Question écrite n °89225 de M. André Chassaigne, publiée au Journal officiel le 29 septembre 2015.

7 () En 2014, l’ONF employait 164 personnes sous contrats aidés ; en 2015, elles étaient 218. La prévision pour 2016 est de 351.

8 () Amendement n° 64 du Gouvernement, sur le projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et aux obligations des fonctionnaires (texte n° 3099).

9 () Amendement n° 63 (rect.) du Gouvernement, sur le projet de loi relatif à la déontologie, aux droits et aux obligations des fonctionnaires (texte n° 3099).

10 () In « Effets attendus du changement climatique sur l’arbre et la forêt », Mme Myriam Legay (ONF), publié dans L’arbre et la forêt à l’épreuve d’un climat qui change, rapport de l’Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique au Premier ministre et au Parlement, décembre 2014.

11 () In « Adaptation au changement climatique et gestion forestière », M. Philippe Riou-Nivert (Centre national de la propriété forestière – Institut de développement forestier), publié dans le rapport précité L’arbre et la forêt à l’épreuve d’un climat qui change.

12 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2016/commissions_elargies/cr/