Audition de M. Antoine Grassin, Directeur général de Campus France
La séance est ouverte à dix-sept heures.
Mme la présidente Élisabeth Guigou. Mes chers collègues, nous accueillons ce soir M. Antoine Grassin, directeur général de Campus France, accompagné de M. Arthur Soucemarianadin, directeur du département des relations institutionnelles, sur le projet de contrat d’objectifs et de moyens pour les années 2013-2015.
C’est la loi relative à l’action extérieure de l’État du 27 juillet 2010 qui a créé l’établissement public, industriel et commercial (EPIC) Campus France. Cet EPIC s’est substitué au 1er janvier 2012 à l’association Égide et au groupement d’intérêt public (GIP) Campus France. Les activités internationales du Centre national des œuvres universitaires et scolaires (CNOUS) lui ont été transférées en septembre 2012.
Campus France est placé sous la tutelle conjointe du ministre des affaires étrangères et du ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche. La gouvernance de l’établissement est désormais stabilisée et son action est celle des espaces Campus France déployés dans 112 pays, dont trente proposent la procédure Centres pour les études en France (CEF), qui font l’objet d’une appréciation très largement positive.
La création d’un EPIC disposant d’un périmètre large de compétences permet de disposer d’une véritable chaîne de l’accueil des étudiants étrangers et de développer efficacement l’attractivité universitaire de la France, qui est un élément essentiel de la politique d’influence – nous le savons et le soulignons souvent au sein de cette commission.
La France a accueilli 289 924 étudiants étrangers en 2012, ce qui la maintient au quatrième rang des pays d’accueil après les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie. Le nombre des étudiants étrangers a été multiplié par deux en dix ans et plus de 60 % d’entre eux sont en master et doctorat, ce qui atteste d’une approche qualitative résultant notamment du développement des mobilités encadrées.
Le projet de contrat d’objectifs et de moyens qui nous est soumis s’articule autour de quatre objectifs stratégiques pertinents : la promotion de l’enseignement supérieur français, l’accueil et l’accompagnement des étudiants et chercheurs étrangers en France, le suivi et l’animation du réseau des anciens étudiants étrangers et l’efficience dans la gestion administrative et financière.
Monsieur le directeur, vous nous présenterez chacun des sous-objectifs et les indicateurs retenus au regard des imperfections que vous avez identifiées, ainsi que les pistes de modernisation et de simplification de la politique d’allocation des bourses qui conditionnent l’équilibre économique de l’opérateur.
Je tiens à souligner l’importance d’avoir érigé au rang des priorités, d’une part, l’accueil en France, qui ne devra pas se cantonner aux boursiers, avec un système d’informations partagées avec les CROUS, la constitution de guichets uniques d’accueil, une information en ligne et une offre adéquate de services à l’arrivée et, d’autre part, la création d’un réseau des étudiants et chercheurs étrangers venus en France au moyen d’un outil informatique dont le déploiement commencera dans dix pays l’an prochain et qui servira directement notre diplomatie d’influence. Nous souhaiterions connaître la liste des pays retenus et les modalités concrètes de gestion et d’animation envisagées.
Monsieur le directeur, je vous laisse la parole pour un propos liminaire, à la suite duquel les députés ici présents et moi-même vous poserons quelques questions.
M. Antoine Grassin, directeur général de Campus France. Je tiens à commencer mon intervention en vous livrant une information qui ne date que de quelques jours. Selon les données actualisées du classement de l’Unesco des pays en fonction du nombre d’étudiants internationaux qu’ils accueillent, la France a retrouvé son troisième rang en rattrapant l’Australie qui a, entre-temps, perdu du terrain. Les données de l’OCDE, qui sont différentes en valeur absolue, révèlent la même progression, puisque la France passe, selon celles-ci, de la cinquième à la quatrième place. Nous sommes dans un contexte dynamique.
Les trois premiers objectifs stratégiques de Campus France correspondent aux missions fondamentales de l’établissement : assurer la valorisation et la promotion des formations supérieures françaises à l’étranger, l’accueil et l’accompagnement en France des étudiants étrangers, en particulier des boursiers étrangers, ainsi que le suivi régulier et l’animation des réseaux des anciens étudiants étrangers.
Ces objectifs sont déclinés en différents sous-objectifs.
Nous nous efforçons, en matière de promotion à l’étranger des études en France, de concentrer nos actions sur les opérations les plus pertinentes. Un des indicateurs de performance retenus traduit la répartition, par catégories, entre grandes écoles et universités, des établissements français participant aux manifestations organisées par Campus France, l’objectif clairement assigné par les deux ministères de tutelle étant d’y rendre plus présentes les universités – la participation des grandes écoles est actuellement la plus forte. Un indicateur devra également traduire le taux de satisfaction des établissements participant à ces manifestations, taux que nous renseignons par sondage à l’issue de celles-ci. Un autre indicateur concerne le nombre de rendez-vous individuels, certaines de ces manifestations étant conçues comme une aide au recrutement, non seulement dans les grandes écoles, comme c’est le cas en Inde ou en Chine, mais également dans les écoles doctorales : ces jours-ci – les 11, 12 et 13 novembre –, se tient à Sao Polo et à Rio de Janeiro un salon d’études doctorales auquel quatre-vingt-treize étudiants brésiliens se sont inscrits pour rencontrer les treize écoles doctorales qui se sont déplacées.
Nous produisons également des outils, notamment de la documentation en ligne ou sur support papier, qui vise à valoriser l’offre et à permettre aux étudiants étrangers de mieux se repérer dans un paysage qui demeure touffu en dépit des efforts radicaux entrepris par Mme Geneviève Fioraso, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, pour simplifier les intitulés.
Un autre sous-objectif vise à assurer des actions d’information et de conseil en direction des établissements d’enseignement supérieur français. Ce point a fait débat lors du passage du GIP à l’EPIC, dans la mesure où un établissement public a une gouvernance plus structurée qu’un GIP : les conférences d’établissements ont eu le sentiment de ne plus être les acteurs de ce dispositif. C’est pourquoi a été créé le Forum Campus France, dont sont membres de droit les établissements d’enseignement supérieur qui soutiennent l’action de Campus France et qui comptent sur nous pour leur projection internationale. Nous voulons assurer la croissance de ce forum qui regroupe aujourd'hui 289 établissements. Un indicateur concerne également les activités du forum : réflexions en commissions thématiques et manifestations diverses.
À la fin du mois de novembre, Campus France permettra aux établissements d’enseignement supérieur de rencontrer à Paris un nombre important d’espaces Campus France – nos antennes à l’étranger –, avec lesquels ils pourront commencer de nouer des projets. Les indicateurs s’attacheront à traduire non seulement le nombre de rendez-vous mais également la satisfaction des établissements à l’issue de ces rendez-vous.
L’accueil des étudiants étrangers en France et l’amélioration de leur accompagnement constituent le deuxième grand objectif.
La mise en place d’un système d’information partagé avec le CNOUS visera à faciliter l’accueil dans les résidences universitaires des étudiants étrangers boursiers. Dans le cadre d’un accord signé avec le CNOUS, Campus France a accès à un parc de résidences universitaires. Il convient d’améliorer la communication, qui n’est pas toujours fluide, pour renseigner en temps réel les étudiants étrangers.
Un autre sous-objectif novateur vise à aider à la constitution de guichets uniques d’accueil pilotés par les établissements. Campus France a des prestations à offrir en la matière, notamment parce que nous sommes les premiers à contacter l’étudiant étranger avant qu’il n’arrive en France. Nous pouvons avant même son arrivée lui indiquer les adresses utiles. Les deux indicateurs adossés à ce sous-objectif opérationnel sont le nombre de guichets uniques impliquant Campus France – nous avons commencé de nous impliquer cette année à titre expérimental – et la réalisation d’une cartographie des guichets d’accueil d’étudiants étrangers en France – toutes les expériences existantes ne sont pas identiquement labellisables. Il conviendra également de développer des services en direction des étudiants étrangers notamment en termes d’hébergement, d’ouverture d’un compte bancaire ou de partenariats régionaux.
Par ailleurs, Campus France n’a pas vocation à travailler de manière isolée : il lui faut développer des synergies, notamment avec le réseau Euraxess pour l’accueil des chercheurs étrangers.
Nos outils de suivi des étudiants étrangers sont parcellaires et mal coordonnés. Certaines ambassades ont déjà mis en place des outils informatiques perfectionnés pour suivre au moins de manière statistique le nombre d’étudiants étrangers ayant fait leurs études en France comme boursiers – le Maroc, la Chine et l’Égypte notamment. Malheureusement, ces systèmes sont cloisonnés. C’est pourquoi nous nous sommes donné l’ambition, à la demande du ministre des affaires étrangères, de construire une plate-forme internet mondiale dédiée au suivi des étudiants étrangers. Nous livrerons l’outil technique au printemps 2014 – le cahier des charges, qui implique notamment les établissements d’enseignement supérieur, est en cours – et le testerons sur une dizaine de pays. Ce dispositif devra fonctionner comme un réseau social plutôt que comme une base de données, ce qui suppose de prévoir une animation pour inciter le plus grand nombre possible de partenaires, notamment les entreprises, à le rejoindre.
S’agissant du quatrième objectif stratégique, qui est d’ordre économique, la convention nous incite à améliorer l’efficience de la gestion de Campus France, qu’il s’agisse notamment de la politique de promotion ou de la gestion des bourses du gouvernement français et des autres programmes de bourses. Les indicateurs concernent la présentation des établissements, le volume des coûts de structure et les tarifs de gestion.
Mme la présidente Élisabeth Guigou. Quel est le nombre de sessions de formation des personnels des espaces Campus France que vous organisez ? Combien d’agents sont concernés ? Menez-vous des actions de formation des formateurs ? Quels sont les pays et les régions prioritaires ?
Les étudiants étrangers en formation en alternance rencontreraient souvent des difficultés à obtenir des titres de séjour. Combien d’étudiants en formation professionnelle sont accueillis ? Qu’en est-il de l’octroi des titres de séjour ?
Mme Geneviève Fioraso, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, a lancé le projet France université numérique (FUN) en vue de développer les formations numériques. Quel sera le rôle de la commission spécifique de Campus France ?
Les crédits de Campus France diminuent alors que ses missions augmentent : la dotation du ministère des affaires étrangères a notamment été réduite de 160 000 euros – 4 % – pour s’établir à 4 millions d’euros. Comment l’établissement fera-t-il face à de telles contraintes budgétaires ?
M. Jean-Pierre Dufau. Les objectifs stratégiques du contrat d’objectifs et de moyens sont intéressants sur le plan théorique : comment seront-ils mis en œuvre et que recouvrent-ils sur les plans quantitatif et qualitatif ?
Outre la question de la formation des personnels, évoquée par Mme la présidente, comment travaillez-vous avec les ambassades ? Quels réseaux comptez-vous mettre en place ? Trop souvent, les étudiants étrangers venus en France repartent dans leur pays de manière anonyme, sans être suivis, alors qu’il existe des réseaux d’anciens étudiants, notamment dans les pays anglo-saxons. Qu’avez-vous fait en la matière depuis dix-huit mois ? Avec qui travaillez-vous ? Quels résultats avez-vous obtenus ? Votre démarche est-elle globale ou privilégiez-vous, dans une approche expérimentale, une zone géographique précise avant toute généralisation ?
M. Hervé Gaymard. J’ai été le rapporteur de la commission des affaires étrangères sur le projet de loi relatif à l’action extérieure de l’État : je rappellerai que notre commission a alors récrit en grande partie le projet de loi gouvernemental qui était moins ambitieux pour le futur EPIC que ne l’était le GIP. La configuration actuelle de l’EPIC France Campus répond à la volonté du Parlement de l’époque : nous en sommes heureux.
Le suivi des alumni est moins régulier en France qu’il ne l’est dans les universités anglo-saxonnes ou allemandes – ces dernières ayant rattrapé sur dix ans une grande partie de leur retard. Or, chacun sait que ce suivi est un vecteur très important en termes de stratégie d’influence : c’est pourquoi je tiens à insister sur cet objectif stratégique.
Quel est par ailleurs l’état de vos relations avec le CNOUS ? Elles paraissent pour le moins compliquées, ce qui est très dommage. Campus France devrait être le seul pilote.
J’ai conduit en 2006 une mission dans les pays émergents à la demande du Premier ministre. Le rapport avait donné lieu à la création en janvier 2007 du GIP Campus France. Ce qui m’avait frappé, c’est que nos interlocuteurs, indiens notamment – ils n’étaient pas les seuls –, doutaient de la qualité de l’enseignement supérieur français en raison de sa gratuité : pour eux, ce qui est gratuit est sans valeur.
Je ne tiens pas à ouvrir le débat périlleux des droits d’inscription dans les universités françaises pour les Français : il est normal que les étudiants français dont les parents payent des impôts en France bénéficient du système actuel. En revanche, pourquoi s’interdire de prévoir une tarification pour les étudiants étrangers, laquelle permettrait d’améliorer leur accueil en France ? Cette question périlleuse doit être débattue de manière sereine.
M. Jean-Louis Destans. J’étais la semaine dernière à Dakar où notre ambassadeur et son attaché de coopération m’ont fait part d’un paradoxe : alors que la situation s’est normalisée, le nombre d’étudiants sénégalais désireux de se rendre en France diminue. C’est l’attractivité des universités françaises qui semble en cause.
Procédez-vous à un étalonnage par rapport aux principaux pays concurrents de la France en matière d’échanges universitaires ?
M. Pouria Amirshahi. Si notre pays retrouve son troisième rang, c’est bien la preuve que notre langue n’est pas un obstacle à son attractivité et qu’il n’est pas nécessaire de lui substituer une autre langue d’enseignement.
Quelles sont en revanche les raisons d’une baisse tendancielle de notre attractivité dans un pays francophone tel que le Sénégal ? N’est-ce pas l’effet retardé d’un sentiment de frustration, le refus ces dernières années d’un trop grand nombre de visas ayant provoqué une baisse de la demande ?
Par ailleurs, dans quelle mesure la coopération des établissements d’enseignement supérieur et professionnels non seulement français mais plus largement de langue française peut-elle encourager la mobilité étudiante ? Nous associer avec des pays francophones ou faire valoir des coopérations entre des universités francophones, validées ou non par l’Agence universitaire de la francophonie (AUF), n’est-ce pas la garantie de voir s’élargir l’offre de formation francophone de haut niveau scientifique ? Un tel élargissement faciliterait la mobilité non seulement en direction de la France mais aussi à l’intérieur de la zone francophone : l’enseignement en français deviendrait une force pour demain, car ce seront autant de jeunes qui seront instruits et formés à la recherche dans notre langue.
Certains établissements français ont également créé des antennes à l’étranger : c’est ainsi que l’université Paris-Dauphine a créé l’Institut Tunis Dauphine – l’IEP en a créé de son côté. Les enseignants français effectuant des allers-retours, les étudiants qui souhaitent venir en France pourraient recevoir au sein de ces antennes, dans le cadre de co-diplomations, un enseignement de qualité égale à celui qu’ils recevraient dans notre pays, ce qui ne manquerait pas de renforcer l’espace universitaire francophone international.
Je tiens à souligner que la question des visas n’est pas tant importante pour les étudiants que stratégique pour les enseignants, les formateurs et les intervenants professionnels.
M. François Loncle. Dans mon rapport pour avis sur les crédits pour 2014 du programme diplomatie culturelle et d'influence de la mission « Action extérieure de l’État », je me suis félicité du fait qu’on dote notre réseau d’un outil de suivi des étudiants étrangers venus en France : il convient de le constituer par zones et par secteurs d’activités, en y impliquant les entreprises et en l’alimentant d’informations diverses. Le cahier des charges du fichier en cours d’élaboration devrait permettre de lancer le projet dans une dizaine de pays pilotes au printemps 2014. Quels sont-ils ?
À partir du moment où les instituts français locaux ne seront pas rattachés à l’Institut français de Paris, serait-il permis d’imaginer un jour une coopération très étroite, voire une fusion, entre Campus France et l’Institut français de Paris ?
M. Boinali Said. S’agissant la cartographie des réseaux d’influence, des ordres de priorité sont-ils prévus en termes de choix disciplinaires par rapport à l’offre de formation ?
Mme la présidente Élisabeth Guigou. Des actions spécifiques sont-elles menées pour aider les étudiants étrangers qui ne sont pas hébergés en résidences universitaires à trouver un logement ?
Quelle est la nature des relations entre Campus France et l’Association pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE), notamment en vue de faciliter les ponts entre nos lycées à l’étranger et nos universités et nos grandes écoles en France ?
M. Antoine Grassin. Je tiens tout d’abord à rappeler qu’il existe dans une centaine de pays quelque 200 espaces et antennes Campus France regroupant 300 personnels, qui s’ajoutent aux 240 dont l’EPIC dispose en France.
Jusqu’à présent, le choix a été fait de préserver l’unité du réseau de l’action culturelle extérieure de l’État. Ces correspondants travaillent au sein des instituts et des alliances françaises, parfois également dans les services de coopération et d'action culturelle (SCAC). Ces établissements disposent de personnels dédiés à Campus France pour accueillir les étudiants étrangers dans un lieu spécifique. Ces correspondants relaient également nos actions de promotion et aident ces étudiants à construire et à consolider un projet d’étude et à entreprendre les démarches – dossier d’inscription académique, dossier consulaire. Ces personnels ne dépendent pas de Campus France mais travaillent sous son label. La formation de ces personnels – accueil et promotion – revient à Campus France, qui consacre 200 000 euros par an à des actions de formation : formations au départ – quelques mois après avoir pris leur poste, ces personnels reviennent à Paris pour recevoir les rudiments nécessaires à leur mission – et sessions de formation régionales, qui permettent de réunir les personnels chargés de l’action de la coopération universitaire, de l’accueil des étudiants étrangers et de la promotion pour une région donnée. En 2013, ces sessions se sont déroulées à Djakarta pour l’Asie, à Dakar pour l’Afrique subsaharienne et le Maghreb et à Santiago du Chili pour l’Amérique latine. Elles accueillent, outre les personnels locaux, les attachés de coopération universitaire. Ces moments d’échanges permettent de recadrer à leur intention les priorités du Gouvernement en matière d’enseignement supérieur et d’action extérieure de l’État et de leur procurer des outils. L’Europe et l’Amérique du Nord ont bénéficié de la même formation en 2012 – chaque région en bénéficie tous les deux ans. Nous n’avons donc pas défini de priorité régionale : c’est la totalité du réseau que nous souhaitons former et rendre plus professionnel car c’est un gage de crédibilité auprès des établissements. De plus, les personnels qui changent souvent d’affectation ont besoin d’adapter régulièrement leur formation. Les pays à gros effectifs, tels que la Chine et le Maroc, bénéficient de formations pour eux seuls (formations nationales).
Nous travaillons en étroite collaboration avec les ambassades : nos responsables géographiques entretiennent des relations constantes avec les attachés de coopération universitaire ou les conseillers de coopération, ainsi qu’avec les personnels des espaces Campus France.
La question du visa des étudiants en alternance est difficile. Il faut savoir que les visas sont donnés pour des séjours d’études : or les séjours en alternance doivent intégrer des formations en entreprise. Je ne connais pas le nombre exact de cas, lesquels demeurent très limités. La plupart des étudiants qui viennent en France suivent des formations académiques. Nous devons promouvoir ces possibilités de séjour tout en nous assurant que les visas pour les formations en alternance ne posent aucun problème d’ordre réglementaire.
M. Arthur Soucemarianadin, directeur du département des relations institutionnelles. À l’heure actuelle, la plupart des plates-formes sont d’origine américaine – Coursera ou EdX – et nos propres établissements, comme l’École polytechnique, mettent des cours sur ces plates-formes. Il n’en reste pas moins que le numérique connaît un véritable développement : c’est ainsi que Grenoble I diffuse tous les cours de médecine de première année en e-enseignement, l’université n’assurant aucun cours magistral : seuls ont lieu des cours réunissant une vingtaine d’étudiants qui ont tout d’abord regardé les cours diffusés en ligne.
Il existe également des sections d’universités virtuelles : c’est le cas de l’Université médicale virtuelle francophone. Toutefois, tous ces cours ne sont jamais rassemblés sur une plate-forme française et si Campus France édite à la fois des catalogues papier et des catalogues numériques, il ne dispose d’aucun catalogue général des cours d’ores et déjà dispensés par les établissements – ces cours ne sont diffusés que sur les intranets des universités.
Notre objectif pour 2014 est donc de recenser l’ensemble des cours existants, en français comme en d’autres langues, pouvant être proposés aux étudiants. Nous pourrions couvrir le monde entier avec l’enseignement virtuel. À cette fin, il convient tout d’abord de faire un état des lieux, puis de rassembler les cours dans un catalogue numérique, enfin de les diffuser : telles sont les propositions qui ont été discutées avec le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche.
M. Antoine Grassin. Les relations avec le CNOUS sont bonnes. Le CNOUS a fait tout son possible pour faciliter le transfert à Campus France des dossiers qu’il gérait. Les équipes informatiques ont travaillé en étroite collaboration.
Nous avons conclu en 2012 une convention avec le CNOUS qui nous permet d’accéder sous certaines conditions à un nombre de résidences universitaires que nous déterminons chaque année en fonction de notre appréciation des besoins – quelque 3 000 en 2013. Notre partenaire a des exigences liées à ses contraintes : nous devons notamment lui garantir l’occupation des chambres, ainsi que passer par lui pour faire parvenir aux CROUS nos demandes et en recevoir l’information, ce qui est contraignant, c’est vrai. Il est indispensable de créer un outil de fluidification de l’information.
Le CNOUS et les CROUS constituent une machine un peu lourde à faire fonctionner. Toutefois, nous n’avons été confrontés à aucun problème majeur : tous ont été résolus.
Nous entretenons avec l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger une double relation.
La première est liée au fait que le réseau scolaire français à l’étranger est, pour la France, un vivier extraordinaire d’étudiants étrangers, puisqu’ils sont complètement francophones, connaissent bien notre système scolaire et ont le niveau d’études requis. Nos espaces interviennent régulièrement dans les lycées français, qu’ils soient en gestion directe, privée ou conventionnée, pour promouvoir les études en France.
La seconde relation est de l’ordre du partenariat : nous gérons les bourses de l’AEFE. Il faut savoir que certains de ces étudiants sont mineurs : ils exigent une attention particulière.
Notre suivi des anciens étudiants étrangers, boursiers ou non, est insuffisant. Les universités américaines ont des moyens autrement importants que les nôtres. De plus leur histoire est différente. Toutefois, certaines de nos grandes écoles assurent déjà le suivi de leurs anciens élèves étrangers.
Nous travaillons à l’heure actuelle à des maquettes de plates-formes internet : notre expérience en la matière nous rend confiants. Nous prendrons évidemment l’avis de nos partenaires, à savoir les postes, les ambassades, les entreprises, les universités et les écoles, ainsi que les associations d’étudiants, que nous consultons dans le cadre d’un comité de pilotage élargi. Nous livrerons cet outil vers le mois de mai 2014 : il conviendra de l’animer. Campus France pilotera et coordonnera le réseau, qui s’appuiera par ailleurs sur les ambassades, qui pourront elles aussi y accéder. La base de données prévoira des entrées multiples, tant pour Campus France que pour les ambassades. Campus France déversera dans la plate-forme les données importantes relatives aux boursiers qu’il possède déjà, une fois prises toutes les précautions légales en matière de données individuelles. En revanche il appartiendra à Campus France, aux ambassades et aux établissements de convaincre le plus grand nombre possible d’anciens étudiants étrangers non boursiers d’entrer dans ce fichier. Nous prévoyons à cette fin des incitateurs, comme des offres d’entreprises, des séminaires ou des forums d’animation.
L'Office allemand d'échanges universitaire (DAAD) dispose d’une équipe de sept personnes : nous espérons faire fonctionner ce dispositif avec moins de personnels. Cet effort, qu’il est prévu de réaliser en 2014, sera d’autant plus important que, comme vous l’avez rappelé, madame la présidente, notre budget sera contraint. Nous mettrons en œuvre progressivement mais avec détermination cette priorité fixée par nos ministères de tutelle. Notre objectif est d’asseoir la crédibilité de cet instrument en engageant le plus grand nombre possible de partenaires.
Un des facteurs de la baisse d’attractivité de l’enseignement supérieur français auprès des étudiants africains tient peut-être au trop grand nombre de refus de visas sur une période donnée. Toutefois, il ne faut pas non plus oublier que plusieurs pays africains, dont le Sénégal, ont conduit des politiques d’amélioration de leurs établissements universitaires pour inciter leurs étudiants à rester au pays – les étudiants africains sont très mobiles, contrairement aux étudiants nord-américains. En termes d’étalonnage, nous rendrons prochainement publique une enquête, réalisée auprès d’un très grand échantillon d’étudiants étrangers, qui a porté sur leurs motivations à venir en France, l’accueil qu’ils y ont reçu et la formation qui leur a été dispensée. La même étude, réalisée il y a deux ans, montrait que la réputation de la qualité scientifique des études françaises est très grande aux yeux des étudiants subsahariens et maghrébins. Du reste, parmi les 100 premiers établissements du classement de Shanghai, figurent deux établissements scientifiques français, Paris-VI et Paris-XI. Il faut toutefois se réjouir de la politique de certains pays africains visant à améliorer leur système universitaire.
Il existe par ailleurs des pôles d’attraction francophones : au Burkina Faso, une école d’ingénieurs, dont la création a été soutenue par la coopération française, l’Institut international d'ingénierie de l’eau et de l’environnement (2iE), accueille des étudiants de trente nationalités du continent africain, Afrique du Nord comprise. La formation d’un étudiant dans cette école coûte quatre fois moins cher qu’en France. Les étudiants qui passent par cet institut trouvent un emploi en deux ou trois mois, ce qui leur permet de rembourser leurs études très rapidement. Nous voudrions répéter ce succès dans d’autres zones du monde.
Il faut avoir conscience de la régionalisation de la mobilité internationale. Aux yeux des étudiants africains, la France n’est pas seulement concurrencée par les États-Unis ou l’Australie : elle l’est également par les établissements d’excellence qui se trouvent au Maroc, en Tunisie ou en Afrique du Sud. Les étudiants africains anglophones – le plus gros contingent d’étudiants africains étrangers en mobilité – vont majoritairement en Afrique du Sud. Quant aux étudiants francophones, ils vont, certes, encore en France, mais aussi de plus en plus au Maroc. Il est donc d’autant plus important pour nos établissements de s’implanter dans des pôles de regroupement et de rayonnement, que ces pôles nous permettront de capter des étudiants qui ne sortiront pas de leur continent mais qui sont à la recherche de formations.
Campus France et l’Institut français sont deux établissements publics régis par le principe de spécialité. La fusion, sur le modèle britannique, des deux établissements n’est pas envisagée à l’heure actuelle. Cette décision n’est pas de mon ressort.
S’agissant des dix pays concernés par l’expérimentation de la plate-forme de suivi des anciens étudiants, tous les continents sont concernés – notamment l’Europe avec l’Allemagne, l’Asie avec la Malaisie et les Philippines, l’Afrique avec le Sénégal et le Gabon. La Chine et le Maroc notamment possèdent déjà leurs propres outils, qu’il faudra songer à intégrer dans un deuxième temps.
Mme la présidente Élisabeth Guigou. Je vous remercie, messieurs.
MM. Antoine Grassin et Arthur Soucemarianadin quittent la salle.
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Avis de la commission sur le projet de contrat d’objectifs et de moyens de Campus France
La commission donne un avis favorable au projet de contrat d’objectifs et de moyens de Campus France.
La séance est levée à dix-huit heures cinq.
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Membres présents ou excusés
Commission des affaires étrangères
Réunion du mercredi 13 novembre 2013 à 17 heures
Présents. - M. Pouria Amirshahi, M. Jean-Luc Bleunven, M. Jean-Louis Destans, M. Jean-Pierre Dufau, M. Hervé Gaymard, Mme Élisabeth Guigou, M. Pierre-Yves Le Borgn', M. François Loncle, M. Jean-René Marsac, M. Boinali Said, M. Michel Terrot, M. Michel Vauzelle
Excusés. - M. Avi Assouly, M. Alain Bocquet, M. Philip Cordery, M. Jacques Cresta, Mme Seybah Dagoma, M. Michel Destot, M. Paul Giacobbi, M. Thierry Mariani, M. François Scellier