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Commission des affaires étrangères

Mercredi 22 juillet 2015

Séance de 12 heures

Compte rendu n° 97

Présidence de Mme Elisabeth Guigou, présidente

– Audition de M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international.

Audition de M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international.

La séance est ouverte à midi.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre présence ce matin. Notre réunion est fermée à la presse.

L’accord conclu avec l’Iran sur le dossier nucléaire est remarquable. Il clôt douze ans de négociations et vient d’être approuvé à l’unanimité par le Conseil de sécurité des Nations unies. C’est un très grand succès pour notre diplomatie, en particulier pour vous, monsieur le ministre : au cours des discussions, vous avez tenu une position de fermeté qui a porté ses fruits. Si nous disposons aujourd’hui d’un accord solide et crédible, de nature à éviter la prolifération nucléaire dans la région, nous le devons largement à votre action et à celle de notre diplomatie.

Nous connaissons les grandes lignes de cet accord : la limitation des capacités d’enrichissement de l’Iran ; la mise en place de mesures de vérification efficaces, dans une certaine transparence ; la possibilité de rétablir automatiquement les sanctions si l’Iran ne respecte pas ses obligations.

Nous aimerions en savoir davantage à propos des garanties qui ont été obtenues sur ces différents points, en particulier sur le mécanisme de rétablissement des sanctions, dit snapback, qui paraît assez original. Pouvez-vous également nous apporter des éclaircissements sur la très difficile question de la « possible dimension militaire » – possible military dimension (PMD) – des activités passées de l’Iran ? Comment est-il prévu de faire la lumière en la matière ? Quelles seront les possibilités d’accéder aux sites militaires iraniens afin de procéder aux vérifications qui s’imposeraient ?

S’agissant de nos relations bilatérales, vous vous rendrez en Iran mercredi prochain, le 29 juillet. La France a déjà des positions importantes en Iran, notamment avec Renault, Peugeot et Total, mais de nouvelles possibilités vont s’ouvrir.

Enfin, quelle est votre analyse en ce qui concerne la capacité de l’Iran à intervenir de façon plus positive dans les crises régionales ? Deux interprétations ont cours : certains estiment que l’on s’engage dans une dynamique constructive, d’autres non. N’y a-t-il pas un risque que l’Iran maintienne ses positions, voire les durcisse ? Le régime se fige dans une posture antiaméricaine. En outre, des inquiétudes très vives se sont exprimées en Israël et, à un moindre degré, dans les pays du Golfe. Ce sont évidemment les actes des Iraniens qui compteront. Comment voyez-vous la suite des événements dans la région ?

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et du développement international. Je suis très heureux d’être avec vous ce matin. Avant de répondre à vos questions, madame la présidente, je souhaiterais dire quelques mots sur une initiative qui me choque : certains députés et sénateurs français envisagent, si j’ai bien compris, de se rendre à Moscou, puis en Crimée.

Il est regrettable que le Gouvernement ait appris ce projet de déplacement non pas par les parlementaires concernés, mais par les autorités russes, en l’espèce par les services de la Douma. Je considère que la visite de parlementaires français en Crimée serait pour le moins problématique du point de vue politique. D’une part, j’imagine, sans grand risque de me tromper, que les médias ne manqueraient pas d’instrumentaliser cette visite, qui ne serait donc pas positive pour l’image de notre pays, à laquelle, je suppose, chacun est attaché. D’autre part, notre pays, qui ne ménage pas ses efforts pour aider à la résolution de la crise ukrainienne – les plus observateurs d’entre vous ont dû le remarquer –, pourrait s’en trouver affaibli. Or, vous connaissez l’engagement personnel du Président de la République et le mien dans le cadre du format « Normandie » pour mettre fin aux atteintes à l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

Enfin et surtout, ce déplacement en Crimée constituerait une violation caractérisée du droit international – on pourrait attendre des parlementaires qu’ils aient une certaine connaissance du droit. En effet, l’entrée de parlementaires en Crimée via la Russie sans l’accord des autorités ukrainiennes reviendrait à reconnaître les prétentions territoriales de la Russie sur cette péninsule. Or, la communauté internationale ne reconnaît pas le rattachement de la Crimée à la Russie : le 27 mars 2014, l’Assemblée générale des Nations unies a adopté une résolution condamnant cette annexion.

Pour toutes ces raisons, j’ai écrit au président de l’Assemblée nationale et au président du Sénat pour leur demander, dans le respect de la séparation des pouvoirs, d’utiliser leur influence afin que les parlementaires concernés renoncent à leur déplacement en Crimée, sauf, bien sûr, s’ils obtenaient une autorisation des autorités ukrainiennes.

Le président du Sénat a bien voulu me faire savoir oralement qu’il avait pris contact avec chacun des sénateurs concernés et que son intervention avait été efficace, à l’exception peut-être d’un sénateur.

Le président de l’Assemblée nationale a répondu à ma lettre en m’indiquant qu’il avait, à plusieurs reprises, pour des invitations similaires, appelé M. Thierry Mariani à la vigilance en soulignant les risques d’instrumentalisation par les États étrangers, qui peuvent placer les députés et, avec eux, l’institution elle-même, dans une situation délicate. 

M. le président Bartolone m’indique avoir rappelé aux députés répondant à de telles invitations qu’ils ne pouvaient se prévaloir d’un mandat officiel de l’Assemblée nationale pour s’exprimer ; et que, très logiquement, aucune facilité matérielle ou logistique ne pouvait leur être fournie. S’agissant plus particulièrement de ce déplacement en Crimée, dont M. le président Bartolone n’avait pas connaissance, il a bien été déclaré, conformément à l’article 4 du code de déontologie des députés. Aucune instance ne peut donc s’y opposer car les parlementaires jouissent d’une liberté pleine et entière de déplacement dans l’exercice de leur mandat.

Néanmoins, compte tenu de la gravité de la situation, je comprends que M. le président Bartolone a pris contact avec les députés invités afin qu’ils soient parfaitement éclairés des conséquences de cette invitation.

Telles sont les données politiques et juridiques, ainsi que la position du Gouvernement. Contrairement à ce que j’ai entendu, je ne suis pas « défavorable » à cette visite : j’y suis hostile et opposé pour les raisons de droit international que je viens de rappeler. Les mots ont un sens.

M. Jacques Myard. Peut-être avons-nous un droit de réponse ?

M. le ministre. Si vous souhaitez me saisir, vous pouvez le faire par écrit. Ma déclaration n’appelle pas de réponse pour le moment.

M. Jacques Myard. De notre part aussi.

M. le ministre. Visiblement non, puisque vous n’avez pas eu la courtoisie élémentaire de me saisir auparavant.

M. Thierry Mariani. Je peux peut-être répondre très brièvement, monsieur le ministre.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Monsieur Mariani, je propose que nous en restions là pour l’instant. Le ministre a donné son point de vue. Vous pourrez intervenir ultérieurement au cours de notre réunion.

M. le ministre. Pour en revenir à vos questions, Madame la Présidente, la question très difficile et très importante du nucléaire iranien donne lieu à des discussions, voire à des controverses, depuis douze ans. Pour ma part, je n’ai eu à m’en occuper que depuis trois ans, depuis que j’appartiens au Gouvernement.

La position qui a été défendue par la France, et finalement entérinée par l’accord, peut se résumer en une formule : « Le nucléaire civil, oui ; la bombe atomique, non. » Dans la préface du texte signé – il s’agit non pas d’un traité international, mais d’un accord politique, qui a été endossé ce lundi par le Conseil de sécurité des Nations unies –, j’ai demandé à faire figurer une citation essentielle, reprise d’une déclaration du Guide suprême iranien et du président Rohani : « Under no circumstances will Iran ever seek, develop or acquire any nuclear weapons » – « En aucune circonstance, l’Iran ne cherchera à développer ou à acquérir d’arme nucléaire. » Les Iraniens l’ont accepté. Tel est, au fond, l’objet de l’accord.

Je ne reviens pas sur les nombreuses difficultés que nous avons rencontrées pour aboutir à cet accord. Évidemment, il n’y aurait pas eu d’accord si l’un des signataires ne l’avait pas accepté. Pour notre part, nous avons particulièrement insisté sur trois points, à propos desquels nous avons fait des propositions.

Premier point : l’enrichissement de l’uranium et la production de plutonium. Pour fabriquer une bombe atomique, il faut de la matière première, soit du plutonium, soit de l’uranium de qualité militaire, c’est-à-dire de l’uranium hautement enrichi, à hauteur de 90 % environ. L’uranium ne peut être enrichi qu’au moyen de centrifugeuses, lesquelles sont plus ou moins sophistiquées.

Nous avons beaucoup insisté sur la limitation du nombre de centrifugeuses et du stock d’uranium. De l’avis des experts du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), dont la compétence est reconnue de tous et qui ont été en permanence à mes côtés, les résultats que nous avons obtenus sont appréciables : l’Iran s’est engagé à ne garder, pendant les dix ans qui viennent, que 5 060 des 20 000 centrifugeuses qu’il possède actuellement ; en outre, alors qu’il dispose aujourd’hui de 7,5 tonnes d’uranium faiblement enrichi et de 200 kilogrammes d’uranium hautement enrichi, il devra, pendant quinze ans, limiter son stock à 300 kilogrammes d’uranium enrichi au maximum à 3,67 %, la limite actuelle étant de 20 %. Ces mesures très fortes changent les données du problème car, du point de vue technologique, la difficulté est d’atteindre la capacité d’enrichissement à 20 %, la progression vers l’enrichissement à 90 % étant ensuite assez rapide. D’autre part, l’Iran a l’interdiction de procéder à une série d’essais et de se doter de centrifugeuses plus sophistiquées pendant huit ans, sachant qu’il ne pourra les utiliser que dans treize ans.

Ce premier point a donné lieu à des conversations très précises, au cours desquelles la fantaisie n’était pas de mise. À l’automne 2013, on nous avait présenté un projet d’accord qui prévoyait de limiter le taux d’enrichissement non pas à 3,67 mais à 20 %, qui permettrait la poursuite de la production dans le réacteur d’Arak et qui n’était pas satisfaisant non plus en ce qui concerne le site de Fordow. Je l’ai refusé au nom de la France, et les autres membres des « 5+1 » s’étant tous rangés à notre point de vue, l’Iran est revenu à la table des négociations et a finalement accepté ce qui est aujourd’hui la base même de l’accord.

Parallèlement, nous avons obtenu que le réacteur d’Arak soit transformé de manière à ne plus pourvoir produire de plutonium en quantité et qualité militaires, alors qu’il permet aujourd’hui une production qui, par sa qualité et sa quantité, peut être utilisé à des fins militaires.

Selon moi, les résultats que nous avons obtenus sur le premier point sont satisfaisants.

Deuxième aspect très important sur lequel nous avons beaucoup insisté : la question de la « possible dimension militaire » (PMD). Il existe en effet une controverse sur le point de savoir si les Iraniens ont cherché ou non à se doter de la bombe dans le passé et s’il existe des traces de cette activité. Il est essentiel de connaître non pas tant la réalité historique que les intentions et le niveau de détermination antérieurs des Iraniens, qui peuvent avoir une signification pour l’avenir. Il s’agit également de nous assurer que nous connaissons la totalité de leurs sites nucléaires. La question est donc liée à celle de la vérification des sites, l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) n’ayant pas pu effectuer les contrôles pertinents pour le moment.

Après une série de discussions, nous sommes arrivés à des accords qui permettront aux inspecteurs de l’AIEA de vérifier, avant le 15 décembre de cette année, ce qui s’est passé sur un certain nombre de sites donnant lieu à des contestations, en particulier sur celui de Parchin. Nous avons donc obtenu satisfaction sur la PMD aussi.

La troisième question, très complexe, est celle des sanctions. Il existe deux catégories de sanctions : celles du Conseil de sécurité des Nations unies, qui portent essentiellement sur le commerce des armes ou visent à prévenir la production de missiles ; celles des États-Unis et de l’Union européenne, qui sont davantage de nature économique. L’Iran étant très pénalisé par ces sanctions – en particulier sa population, ce qui est, certes, très dommageable –, il n’y avait pas d’accord possible sans une levée de celles-ci, sous certaines conditions. Il fallait donc traiter cette question, mais sans être dupe ni faire preuve de naïveté.

Nous pouvons d’ailleurs tirer un enseignement plus général de ce qui s’est passé : ce sont très largement les sanctions qui ont poussé le régime iranien, bon gré, mal gré, à faire certaines ouvertures. Personne ne peut sérieusement soutenir que cette évolution aurait eu lieu sans les sanctions.

À l’issue de discussions innombrables sur ce point, nous sommes arrivés à un accord très complexe qui prévoit, de manière schématique, que les sanctions économiques seront levées dès lors que l’AIEA aura certifié qu’il n’y a pas de programme nucléaire caché. Encore faut-il, au préalable, que l’accord ait été approuvé par le Congrès américain et le Parlement iranien. Selon nos experts, la levée des sanctions économiques pourrait intervenir au deuxième trimestre de 2016, sachant que les prochaines élections législatives iraniennes auront lieu au premier trimestre. La population iranienne, qui a très bien accueilli l’accord, n’en percevra donc pas encore la traduction matérielle au moment des élections. La levée des sanctions économiques apportera d’importantes ressources financières à l’Iran – selon certains experts, jusqu’à 150 milliards de dollars, de manière échelonnée, ce qui représenterait environ six points de croissance supplémentaires. .

Rien ne figure dans l’accord sur le contrôle de l’utilisation de ces fonds. Toutefois, les sanctions qui portent sur le commerce des armes et celles qui visent à prévenir la production de missiles balistiques ne seront levées, respectivement, que dans cinq et huit ans, à condition que tout ait été vérifié auparavant. En outre, cela ne signifie pas que les Iraniens pourront faire ce qu’ils veulent une fois les sanctions levées car, en signant l’accord, ils ont pris des engagements dont les échéances sont échelonnées : à cinq, huit, dix, quinze, vingt ou vingt-cinq ans, voire à perpétuité.

Quant au mécanisme de rétablissement des sanctions, nous en disposerons pendant quinze ans – les Iraniens ont donné leur accord pour une durée de dix ans, mais les « 5+1 » sont convenus qu’ils pourront l’utiliser pendant cinq années supplémentaires. Il n’était possible d’accepter un mécanisme de cette nature que s’il était automatique : il n’était pas question de demander l’autorisation des Iraniens, ni de compter sur l’engagement de certains des cinq membres permanents du Conseil de sécurité de ne pas opposer leur veto à un rétablissement des sanctions. La France a donc été amenée à proposer la solution du « snapback», bizarrerie juridique qui a donné des maux de tête à beaucoup de diplomates ! Ce mécanisme fonctionne de la manière suivante : la levée des sanctions sera reconduite automatiquement sauf si l’un des membres permanents du Conseil de sécurité met son veto. En d’autres termes, le veto, qui sert habituellement à s’opposer, ne pourra être utilisé en l’espèce que pour rétablir les sanctions, et ce à tout moment.

Ainsi que je l’ai indiqué il y a un instant, pour que l’accord soit appliqué, il faut d’abord que le Congrès américain et le Parlement iranien l’approuvent.

D’autre part, il faut tenir compte du contexte international. J’ai eu des contacts avec les dirigeants des pays voisins, notamment avec nos partenaires israéliens. Le gouvernement israélien a fait part de son désaccord radical avec le processus en cours. L’attitude des pays du Golfe est plus mesurée, mais ils expriment néanmoins des inquiétudes, notamment quant à l’effet de l’accord sur la politique extérieure de l’Iran, en particulier dans la région.

Certains médias ont indiqué, un peu rapidement, que la France avait bloqué l’accord ou s’y était opposée. Or, telle n’est pas la position que le Président de la République et moi-même avions prise. Dans toute cette affaire, la France a adopté une attitude de « fermeté constructive » : selon nous, mieux valait un accord plutôt que pas d’accord, mais nous ne pouvions adopter un accord que s’il était très robuste, ainsi que je n’ai cessé de le soutenir.

Pourquoi valait-il mieux un accord que pas d’accord ? Parce que l’autre terme de l’alternative, si l’on pousse le raisonnement à son terme, était un conflit direct avec l’Iran.

Grâce à l’accord, le délai nécessaire aux Iraniens pour construire une bombe s’ils le décidaient – breakout time –, actuellement de deux à quatre mois selon les estimations, sera porté à un an pendant dix ans. Ensuite, il diminuera, mais le relais sera pris par le Protocole additionnel de l’AIEA, auquel l’Iran s’est engagé à adhérer. Ce Protocole interdira à l’Iran d’aller vers la bombe atomique. Bien sûr, l’AIEA devra procéder à toutes les vérifications pertinentes et, si leur résultat n’est pas satisfaisant, la question de la réaction de la communauté internationale se posera à nouveau.

Si nous n’étions pas parvenus à un accord, les Iraniens ne se seraient nullement sentis obligés d’arrêter le développement de leurs centrifugeuses et de leur stock d’uranium. Ils auraient pu aller vers la fabrication de la bombe. La seule façon de s’y opposer eût été une guerre avec l’Iran. Il faut donc juger l’accord non pas dans l’absolu, mais au regard des solutions qui s’offraient à nous, et qui présentaient chacune des inconvénients.

En tout cas, nous devons être très vigilants et faire tout notre possible pour contribuer à une amélioration des relations avec l’Iran, tout en signifiant que certaines prises de position sont inadmissibles, en particulier les déclarations de certains dirigeants iraniens à propos d’Israël.

Soyons clairs et nets : nous avons signé l’accord avec l’Iran pour des raisons non pas commerciales, mais stratégiques. Pour en revenir à notre attitude de « fermeté constructive », j’ai défendu la thèse, y compris auprès des Iraniens, qu’un accord au rabais aurait été considéré comme sans valeur par les pays voisins. En effet, si le texte n’avait pas été assorti de précautions suffisamment précises, les pays voisins en auraient déduit que l’Iran allait se doter de la bombe atomique malgré l’accord, et auraient jugé nécessaire, pour se prémunir, d’aller eux-mêmes vers la bombe.

Si l’accord n’avait pas été ferme, la conséquence eût été non pas l’arrêt, mais le développement de la prolifération nucléaire. La situation aurait même été très paradoxale : l’Iran aurait pris l’engagement de ne pas fabriquer la bombe, alors que d’autres pays, ne croyant pas à l’accord, se seraient orientés dans cette direction. La France a donc fait valoir à ses partenaires qu’elle posait des exigences non pas pour les ennuyer, mais parce que c’était la seule manière d’empêcher la prolifération nucléaire dans une région déjà très éruptive. Tel a été le sens de notre action, qui a été, je crois, utile.

Pour nous tous qui croyons à la diplomatie, il est extrêmement important que nous soyons ainsi parvenus, pour la première fois depuis de nombreuses années, à résoudre un conflit de cette nature non pas par la force, mais par la discussion, aussi longue ait-elle été. Cela oblige un certain nombre d’entre nous à réviser les jugements très négatifs qu’ils ont portés sur les sanctions. Je ne dis pas qu’elles peuvent être utilisées partout et en toutes circonstances mais, en l’espèce, personne ne peut sérieusement contester que ce sont bien elles qui ont fait bouger les choses. Cela nous amène aussi à réfléchir à la question des formats diplomatiques. Nous avons négocié dans un format spécial : l’Iran d’un côté, les cinq membres permanents du Conseil de sécurité et l’Allemagne de l’autre. Ce format a prouvé son efficacité. Bien que stratégique, l’accord aura des conséquences commerciales, à condition que le processus qu’il prévoit soit mené à bien. Et la France n’a aucune raison de rester en arrière. Compte tenu du mécanisme de « snapback » que nous avons mis en place, aucune entreprise ou banque sérieuse n’osera se lancer dans des affaires importantes avec l’Iran si elle risque d’être « rattrapée par la patrouille », en l’occurrence par les autorités américaines, en cas de rétablissement des sanctions. Donc, sur ma proposition, que mes collègues allemand et britannique ont acceptée sans aucune difficulté, nous avons procédé à un échange de lettres avec notre collègue américain John Kerry afin de nous assurer que toutes les entreprises seraient sur un pied d’égalité et qu’il n’y aurait pas de lourdes mesures de rétorsion si jamais l’histoire disposait de la réalité autrement que nous l’espérons.

Tel est, en quelques mots, le contenu de cet accord, selon moi majeur. J’ai adressé mes vifs remerciements à nos diplomates qui ont fait, avec nos experts dans le domaine nucléaire, un travail remarquable, reconnu comme tel. Cela montre que la diplomatie peut être utile, même si ce succès diplomatique ne s’est malheureusement pas étendu à d’autres grands sujets pour le moment.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Monsieur le ministre, je vous remercie. La parole est maintenant aux commissaires.

M. Jean Glavany. Considérant qu’il était indispensable de remettre l’Iran dans le jeu diplomatique, j’étais depuis longtemps partisan d’un accord pourvu qu’il fût sérieux ; ne voyez donc, monsieur le ministre, aucune critique dans mes questions. J’aimerais connaître votre opinion sur la décision prise par les États-Unis, l’encre de la signature de l’accord à peine sèche, de livrer des avions de chasse à Israël et de financer l’installation dans ce pays d’une protection anti-missile. Donner ainsi le sentiment d’offrir à Israël des contreparties à l’accord me semble néfaste.

Vous avez évoqué avec toute la prudence qui sied les conséquences politiques et diplomatiques de l’accord. Sachant l’ampleur de la fracture entre chiisme et sunnisme, le retour de l’Iran dans le concert des nations peut-il provoquer des évolutions au Moyen- Orient, et si oui, lesquelles ?

M. Michel Terrot. L’accord ne vaut que si l’on peut vérifier la réalité de son application. L’Iran a-t-il accepté le principe de visites de contrôle inopinées de ses sites nucléaires, seule manière de s’assurer qu’il n’y a pas anguille sous roche ?

M. François Loncle. Je tiens pour une erreur sémantique de parler, y compris au Quai d’Orsay, de la Conférence de Paris sur le climat comme de la « COP 21 ». Ce sigle, outre qu’il est anglo-saxon, a le grand inconvénient d’être très peu évocateur. De plus, il laisse entendre que lui succédera une COP 22, ce qui relativise l’importance déterminante de l’événement.

Je suis en désaccord avec la politique suivie par la France en Syrie depuis l’assassinat de Rafiq Hariri, il y a dix ans. Nous sommes nombreux à la penser erronée. Je constate d’ailleurs l’évolution de la position de nos alliés, le Royaume-Uni et les États-Unis. Pendant des mois, monsieur le ministre, vous avez dit qu’il fallait compter sur l’opposition syrienne pour aboutir à une solution, et considéré Daech et Bachar al-Assad comme bonnet blanc et blanc bonnet. Or, l’opposition à Bachar al-Assad n’a jamais existé, ou elle s’est lamentablement diluée au fil du temps. Je note cependant que la diplomatie française a évolué, puisque vous avez évoqué très récemment l’hypothèse de discussions avec « des éléments du régime » ; quels sont-ils ?

M. Meyer Habib. Je reconnais volontiers que la diplomatie française – vous le premier, monsieur le ministre – s’est battue pour améliorer l’accord avec l’Iran, qui aurait été bien plus mauvais si vous n’aviez pas été là. Mais ce qui est vu comme une victoire diplomatique suscite en moi le plus grand scepticisme. La seule question qui vaille est de savoir si, à long terme, l’Iran pourra ou non se doter d’une capacité nucléaire militaire. Rappelons-nous les mots du président Bill Clinton, au moment de la signature, en 1994, de l’accord nucléaire avec la Corée du Nord : « La Corée du Nord a accepté de geler son programme nucléaire et de consentir au contrôle international de tous ses sites nucléaires. Les États-Unis, la péninsule de Corée et le monde dans son ensemble seront mieux protégés, car l’accord réduit le danger de prolifération des armes nucléaires ». On connaît la suite – et encore la dynastie de dictateurs fous qui dirige la Corée du Nord n’est-elle pas djihadiste !

Par l’accord signé avec l’Iran, on renforce la dictature des mollahs, cette tyrannie obscurantiste qui est la matrice du terrorisme islamiste et du djihadisme mondial depuis 1979, qui, en février de cette année, a organisé un concours de caricatures sur la Shoah, et qui déclare vouloir rayer Israël de la carte. Pourquoi n’a-t-on pas au moins demandé à l’Iran de cesser de déclarer vouloir la disparition d’Israël ? À quoi servira le dégel prévu de 150 milliards de dollars sinon à permettre à l’Iran d’accroître son emprise sur le Yémen, le Liban et la Syrie, sans parler de l’Irak où il est déjà ?

Accepter que les contrôleurs de l’AEIA accèdent aux sites qu’ils sont tenus de vérifier au terme d’un préavis de 24 jours, c’est donner aux Iraniens 24 jours pour cacher ce qu’ils ont à cacher. Il fallait exiger qu’ils aient un accès immédiat à ces sites ; si l’on n'a rien à dissimuler, pourquoi demander un tel délai ? Et pourquoi n’a-t-on pas demandé aussi l’arrêt du développement du programme balistique de la République islamique, dont les missiles pourront menacer non seulement les pays voisins mais aussi l’Europe, dont la France ?

Sur le fond, comment ne pas être sceptique sur les intentions réelles d’un pays qui n’a cessé de mentir douze années durant ? Votre visite en Iran dès la semaine prochaine, monsieur le ministre, n’est-elle pas quelque peu prématurée ? Quel est son objet ?

M. Jacques Myard. Je vous remercie, monsieur le ministre, pour l’hommage appuyé que vous venez de rendre à l’indépendance des députés à propos de la Russie et de la Crimée. J’ai senti dans vos propos un soupçon de jalousie… (Mouvements divers)

M. le ministre. Détrompez-vous ; je ne suis jamais jaloux de ceux qui commettent des erreurs.

M. Jacques Myard. Si erreur il y a, c’est celle du Gouvernement, car votre politique à l’égard de la Russie, intenable, vous mène à coup sûr dans une impasse. L’affaire de la Crimée est pour moi une affaire entendue – le Donbass, c’est autre chose – ; je vous ai d’ailleurs entendu dire ici même que l’on ne ferait pas la guerre avec la Russie pour la Crimée. Il vient un moment où il faut tenir compte de la réalité ! Nous maintenons bien sûr notre position comme vous maintenez la vôtre.

Pourrons-nous disposer d’une synthèse de l’accord complexe signé avec l’Iran ? Les fonds gelés seront-ils débloqués immédiatement ? Pour ce qui est de la visite des sites, je m’interroge, comme mon collègue Meyer Habib : pour tenir à un délai de préavis de 24 jours, les Iraniens ont-ils quelque chose à cacher? Enfin, que pensez-vous de la dissymétrie de la politique des États-Unis à l’égard des entreprises qui commercent avec l’Iran selon qu’elles sont américaines ou qu’elles ne le sont pas ? Ainsi, Airbus est bloqué alors que Boeing est autorisé à vendre des pièces détachées pour moderniser l’ensemble de la flotte aérienne iranienne. Ce n’est pas acceptable.

On peut enfin imaginer, pour s’en féliciter, que l’ouverture sur le monde permise par la signature de l’accord aura pour effet l’évolution du régime ; c’est d’ailleurs la grande crainte des Pasdaran. Quel est votre sentiment sur ce point ?

M. Thierry Mariani. Je vous remercie, madame la présidente, de me donner enfin la parole (Protestations). Votre totale opposition à notre déplacement en Russie et en Crimée, monsieur le ministre, n’est pas à proprement parler une surprise. Nous connaissons les limites de ce séjour et nous savons que nous ne représentons que nous-mêmes, mais c’est notre droit. Nous avons rempli les obligations qui nous incombent, en déclarant en juin notre intention au déontologue de notre Assemblée. Je n’ai effectivement informé votre cabinet que vendredi dernier, mais vos diplomates en Russie l’ont été avant cela. Je respecte votre position, mais respectez le principe de la séparation des pouvoirs. Je maintiens mon déplacement. Nous avons droit à la liberté d’opinion, tout en respectant le travail du Gouvernement, dont la contribution aux accords de Minsk a été remarquable.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Il ne s’agit pas simplement d’opinion mais de violation de principes fondamentaux du droit international. Si l’Ukraine déclare un jour être d’accord avec l’annexion de la Crimée par la Russie, ce sera autre chose. Mais il n’y a pas de précédent en Europe, depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, y compris avec le Kosovo, d’annexion unilatérale d’un morceau d’un pays souverain par un autre…

M. Thierry Mariani. N’oubliez-vous pas le Haut-Karabagh ?

Mme la présidente Élisabeth Guigou. … ce pourquoi je juge ce voyage parfaitement inopportun.

M. Thierry Mariani. Je commence donc, à 56 ans, une carrière de délinquant international.

Mme Chantal Guittet. Quelles seront les conséquences de l’accord dans la région ? L’armée iranienne est très présente en Irak où elle lutte contre Daech ; envisagez-vous que l’Iran rejoigne la coalition ? Quelle serait alors la position de l’Arabie saoudite ? Comment travailler avec l’Iran qui, en Syrie, soutient Bachar al-Assad ?

M. le ministre. Je vous ferai transmettre une synthèse de l’accord.

Je répondrai en bloc aux questions relatives à Israël. Je n’ai eu de contacts ni avec les Américains ni avec les Israéliens au cours des deux derniers jours ; je ne sais donc pas quelle est la réalité de ce qu’avance la presse. La France est en complet désaccord avec la position de l’Iran à propos d’Israël. Nous condamnons bien sûr cette hostilité essentielle.

Israël n’a jamais caché son opposition à l’accord. Mais, encore une fois, il faut mesurer ce qu’est le deuxième terme de l’alternative. À cela, M. Benjamin Netanyahou m’a répondu : « Nous sommes capables de nous défendre ». La garantie de sécurité, pour Israël comme pour les autres pays, doit être absolue. Mais, en cette circonstance, un accord est meilleur qu’une solution consistant à recourir à la force – à supposer que ce soit une solution.

Quelles pourraient être les conséquences diplomatiques de l’accord sur les relations entre chiites et sunnites ? Nous souhaitons tous que les guerres de religions cessent. Je réaffirme que la France ne prend pas partie pour les uns ou les autres en fonction de leur appartenance religieuse. La meilleure preuve en est que Daech, auquel nous sommes viscéralement opposés, se réclame du sunnisme ; dire, comme le font certains, que nous sommes proches de l’Arabie saoudite parce que c’est un pays sunnite est une ânerie caractérisée. Nous n’entrons aucunement dans cette dispute fondamentale d’autant plus dure, comme souvent, qu’elle est fratricide. Nous souhaitons le respect des différences et l’harmonie entre ces tendances mais dans les faits l’affrontement est violent.

Pour qu’elle soit victorieuse, la lutte contre Daech demande, outre les avions de la coalition, l’implication de la population. Mais celle-ci est composée pour partie de chiites et pour partie de sunnites, et ces derniers n’accepteront de s’engager que s’ils ont le sentiment que le gouvernement irakien est véritablement inclusif. Il l’est davantage que ne l’était celui M. Nouri al-Maliki, mais il demeure très orienté vers les chiites. Il y a donc une contradiction : la forte présence iranienne est utile pour lutter contre Daech, mais elle se traduit par un gouvernement déséquilibré, ce qui dissuade les sunnites de se lancer dans la bataille.

En Syrie, comme vous l’avez souligné, l’Iran soutient Bachar al-Assad et a affirmé qu’il continuerait de le soutenir quelles que soient les circonstances. Je vous ai connu plus nuancé, monsieur Loncle. Ce que j’ai toujours affirmé, c’est qu’il fallait parvenir à une union entre des éléments du régime de Bachar al-Assad et des éléments de l’opposition ; nous y travaillons. À Vienne, en marge des très longues négociations de l’accord sur le programme nucléaire iranien, je me suis entretenu de cette question avec M. Sergueï Lavrov, le ministre russe des affaires étrangères, et nous continuons d’en parler. C’est extraordinairement difficile.

Une des discussions les plus longues a porté sur les contrôles et les visites inopinées. La conclusion en est que tous les sites peuvent être visités mais que les visites de sites militaires doivent se dérouler selon des modalités assurant qu’il s’agit de vérifier le respect des obligations souscrites en matière nucléaire et non de percer les secrets militaires iraniens. Le directeur général de l’AIEA m’a indiqué que l’Agence dispose des moyens techniques lui permettant de vérifier la réalité de ce que les Iraniens avanceront. Je sais que ce sera difficile et je m’attends à des controverses, mais je rappelle que la réintroduction des sanctions, le « snapback », sera toujours possible s’il le faut. La France avait proposé un préavis inférieur à 24 jours mais il fallait trouver un point d’accord – et tout refus d’une visite des contrôleurs serait une très sérieuse raison de prendre des mesures de rétorsion. De plus, des moyens techniques qui, nous ont dit les experts, ne peuvent être controuvés, permettent de vérifier s’il y a eu ou non une activité nucléaire en un lieu.

Vous avez raison, monsieur Loncle, c’est de la Conférence de Paris sur le climat que nous devons parler.

M. Meyer Habib a eu l’honnêteté intellectuelle de reconnaître que la France a été très ferme dans la négociation, mais il désapprouve l’accord pour les raisons qu’il a dites. Nous pensons que le dispositif de vérification prévu suffit ; mais nous serons extrêmement vigilants et, encore une fois, la possibilité du snapback demeure. Mme Federica Mogherini, Haute Représentante de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, m’aura précédé d’un jour en Iran. J’ai été invité plusieurs fois à m’y rendre, et j’avais jusqu’à présent refusé ces invitations successives. Je pense qu’il est maintenant légitime d’y aller pour faire le point, et j’ai tenu à ce que cette visite n’ait pas de volet économique. Des chefs d’entreprises françaises se rendront en Iran à l’automne, mais je ne voulais pas donner à mes interlocuteurs le sentiment que nous avions signé l’accord en fonction de considérations commerciales. J’ai lu dans la presse des commentaires selon lesquels, lors de la reprise des échanges commerciaux avec l’Iran, la France serait pénalisée en raison de sa fermeté au cours de la négociation. Nous avons pris une position qui a finalement été suivie, et je pense que l’on gagne à être respecté. J’irai donc en Iran, où je rencontrerai notamment le président de la République islamique et mon homologue.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Monsieur le ministre, c’est la onzième fois que nous vous recevons depuis juillet 2012 et je tiens à vous remercier, ainsi que votre cabinet, pour la disponibilité dont vous faites preuve. S’achève ainsi la 113e réunion en un an de notre commission qui, avec 158 heures de réunion, 45 accords internationaux examinés, des rapports budgétaires et des missions d’information, a beaucoup travaillé.

M. le ministre. En effet. À cet égard, j’ai pris connaissance des intéressantes conclusions du rapport que m’a remis M. Henri Plagnol, chargé de la mission sur les évolutions interprétatives, passées et prévisibles de l’article 53 de la Constitution. Il indique que l’une des raisons pour lesquelles votre ordre du jour est encombré tient à ce qu’un projet de loi ne peut contenir plusieurs accords. Modifier cette disposition serait un facteur de simplification.

Mme la présidente Élisabeth Guigou. Le Bureau, qui en a discuté, est favorable à une simplification.

Monsieur le ministre, je vous remercie.

La séance est levée à treize heures vingt-cinq.

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Membres présents ou excusés

Commission des affaires étrangères

Réunion du mercredi 22 juillet 2015 à 12 heures

Présents. - M. Jean-Marc Ayrault, M. Philippe Baumel, M. Jean-Luc Bleunven, M. Guy-Michel Chauveau, Mme Seybah Dagoma, M. Jean-Louis Destans, M. Jean-Pierre Dufau, M. Jean-Paul Dupré, M. Jean Glavany, Mme Élisabeth Guigou, M. Jean-Jacques Guillet, Mme Chantal Guittet, M. Meyer Habib, M. Benoît Hamon, Mme Françoise Imbert, M. Serge Janquin, M. Pierre-Yves Le Borgn', M. Bernard Lesterlin, M. François Loncle, Mme Marion Maréchal-Le Pen, M. Thierry Mariani, M. Jacques Myard, M. Axel Poniatowski, Mme Marie-Line Reynaud, M. François Rochebloine, M. André Santini, M. François Scellier, M. André Schneider, M. Michel Terrot, M. Michel Vauzelle

Excusés. - Mme Nicole Ameline, M. Christian Bataille, M. Gérard Charasse, M. François Fillon, M. Jean-Claude Guibal, M. Armand Jung, M. Noël Mamère, M. Jean-Claude Mignon, M. Jean-Luc Reitzer, Mme Odile Saugues

Assistaient également à la réunion. - M. Michel Ménard, M. Gabriel Serville