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Commission de la défense nationale et des forces armées

Mercredi 1er octobre 2014

Séance de 18 heures

Compte rendu n° 3

Présidence de Mme Patricia Adam, présidente

— Audition de M. Kader Arif, secrétaire d’État aux Anciens combattants et à la mémoire, sur le projet de loi de finances pour 2015

La séance est ouverte à dix-huit heures.

Mme la présidente Patricia Adam. Après le ministre de la Défense, nous accueillons maintenant M. Kader Arif, secrétaire d’État aux Anciens combattants et à la mémoire, dont le budget retient toute l’attention de cette commission.

M. Kader Arif, secrétaire d’État aux Anciens combattants et à la mémoire. Je me félicite, en préambule, de l’état d’esprit de tous les groupes politiques au cours de cette année 2014, à l’occasion des grands événements qui ont ponctué le cycle commémoratif que nous avons lancé. Le 6 juin, le 14 juillet, le 15 août, le 12 septembre sont autant de moments qui ont donné de la France une image à la hauteur de ce qu’en attendaient non seulement nos compatriotes, mais aussi, si l’on en juge par le nombre de chefs d’État présents, les visiteurs étrangers. Ce cycle mémoriel aura contribué à renforcer l’unité nationale en dépit des engagements politiques qui nous séparent. La manifestation du 11 novembre à Notre-Dame-de-Lorette conclura ces commémorations autour du thème de la paix : sur le mémorial seront gravés les 600 000 noms des soldats tombés pendant la Grande Guerre dans le Nord-Pas-de-Calais, sans distinction d’origine ni de grade, afin que tous soient mis sur un pied d’égalité.

Pour 2015, le budget des Anciens combattants s’élève à 2,64 milliards d’euros sur mon périmètre de responsabilité. Il baisse de 5,4 % par rapport à 2014, mais l’augmentation des dépenses fiscales ramène cette diminution à 3,3 %. Ces 5,4 % correspondent à la baisse du nombre des bénéficiaires. J’ai néanmoins veillé à la fois à la stabilisation de la dépense moyenne par ancien combattant, autour de 2 994 euros annuels, et à la définition de mesures nouvelles concernant d’une part les populations les plus en difficulté et d’autre part la 4e génération du feu.

Je commencerai par la refonte de l’action sociale, dont je rappelle que l’Office national des Anciens combattants et victimes de guerre (ONACVG) est désormais le seul opérateur. Le budget de cette action sociale est de 23,4 millions d’euros, en hausse de 1,5 million d’euros, soit plus 16,5 % depuis 2012. L’aide différentielle en faveur des conjoints survivants, portée de 900 à 932 euros dans le budget 2014, sera cette année transformée en aide complémentaire spécifique aux conjoints survivants et amenée à 987 euros, soit l’équivalent du seuil de pauvreté. Nous aurons ainsi, en deux ans, satisfait une attente ancienne et légitime. Il s’agit également de sécuriser cette aide sur le plan juridique, en résolvant, en particulier, la question des veuves ne vivant pas sur le territoire métropolitain. Enfin, la refonte de l’aide sociale permet plus globalement de venir en aide aux Anciens combattants les plus démunis, aux soldats en opération extérieure (OPEX) ou à leur famille.

Deuxième mesure nouvelle, la majoration spéciale de pension prévue à l’article L. 52-2 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG) qui peut être attribuée sous certaines conditions aux conjoints survivants des plus grands invalides de guerre – ceux qui sont pensionnés à 85 % et plus – sera revalorisée. Dans le budget 2014, certaines pensions avaient déjà été revalorisées de 360 points PMI (pension militaire d’invalidité) par l’abaissement du seuil d’accès de 11 000 à 10 000 points. Plusieurs options ont été étudiées cette année par le groupe de travail que j’ai mis en place. Partant du principe que la pension des veuves des invalides de guerre n’est pas un revenu de substitution mais un droit à réparation, la proposition de reverser 25 % de la pension du grand invalide de guerre a été écartée, sachant que ces pensions peuvent atteindre, pour les plus importantes, 191 000 euros, non fiscalisés, par an. Il a également été proposé lors des débats du PLF 2014, par le biais d’un amendement de Mme Paola Zanetti, d’augmenter toutes les pensions de conjoints survivants d’invalides de plus de 2000 points de 150 à 400 points PMI en fonction des situations, pour un coût de huit millions d’euros en année pleine.

La proposition que je vous soumets est une augmentation de la majoration de l’article L.52-2 de 50 points PMI à partir du 1er janvier 2015, suivie d’une augmentation de 50 points supplémentaires à partir du 1er janvier 2016. Ces 100 points correspondent à 116 euros par mois, soit 1 394 euros par an – l’équivalent d’un SMIC mensuel brut. Je ne souhaite pas, en procédant ainsi, refermer le dossier mais plutôt engager une dynamique pour répondre à une véritable interrogation en termes de droit à réparation. Le groupe de travail s’est déjà réuni à plusieurs reprises et continuera sa réflexion.

Afin d’augmenter le nombre de bénéficiaires, la durée de soins nécessaire pour pouvoir toucher la majoration passera de quinze à dix ans. Cette disposition représente 650 000 euros pour 2015 et 1,3 million d’euros en 2016, compte tenu des 50 points supplémentaires d’augmentation.

La troisième mesure nouvelle concerne les OPEX. Aujourd’hui, pour pouvoir bénéficier de la carte du combattant, il faut avoir passé quatre-vingt-dix jours en unité combattante ou mené cinq actions de feu individuelles ou neuf collectives. Des différences existent toujours entre armées ; par exemple, les marins ne sont pas traités de la même manière que les terriens. La question des soldats engagés dans la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL) n’est toujours pas réglée. Je vous propose donc d’appliquer le régime des anciens d’Algérie, à savoir justifier de 120 jours cumulatifs en OPEX pour pouvoir bénéficier de la carte du combattant et donc de la retraite du combattant, de la demi-part fiscale et de la retraite mutualiste. Cette mesure, si vous la votiez, entrerait en vigueur le 1er octobre 2015 et représenterait 400 000 euros en 2015. Puis, en 2016, nous passerions à 6,3 millions d’euros et à 6,9 millions en 2017, le dispositif montant en charge sur plusieurs décennies. Il s’agit de répondre ici à une demande des associations d’Anciens combattants de faire des soldats concernés, engagés dans des conflits d’autre nature, des ressortissants de l’ONAC. J’ai pu me rendre compte auprès du chef d’état-major des armées que les armées elles-mêmes acceptaient fort bien une telle proposition.

Nos compatriotes harkis sont l’objet de la quatrième proposition. Vous le savez, mon histoire personnelle me rend sensible à cette question. Je suis favorable à la reconnaissance mais opposé à la repentance. Pour avancer, nous nous sommes appuyés sur les réalisations des gouvernements précédents. Si la fonction publique d’État a créé des postes, les fonctions publiques territoriale et hospitalière accusaient un certain retard en la matière, les élus n’étant pas forcément bien informés. Désormais, les choses avancent crescendo : quelques postes ont ainsi été créés dans la fonction publique hospitalière des Bouches-du-Rhône.

La première disposition concernant les harkis est l’augmentation de 167 euros de l’allocation de reconnaissance telle qu’elle existe depuis 2005. Les bénéficiaires touchant de 2 150 à 3 250 euros par an, la hausse que je vous soumets est de 5 à 8 %, autrement dit le plus gros « coup de pouce » depuis 2005. Avec les services du ministère des Affaires sociales, nous avons aussi étudié la possibilité, pour ceux qui ont vécu dans les camps entre seize et vingt et un ans, de racheter quatre trimestres, à raison de 4 000 euros par trimestre, l’État en prenant 2 000 à sa charge, soit 8 000 euros au total. C’est, à ma connaissance, la participation la plus importante de l’État en matière de rachat de points.

La reconnaissance passe certes par les mots, mais aussi par d’autres actions comme l’établissement, en lien avec le ministère de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, d’une sorte de parcours mémoriel dans les 75 hameaux de forestage où a été placée une grande partie des harkis arrivés en France.

Le budget consacré à la politique mémorielle sera de 22,7 millions d’euros, en baisse de 500 000 euros par rapport à 2014, année la plus chargée en grands événements. Je vous proposerai de consacrer un peu plus de 11 millions d’euros de ce budget à la rénovation des grands monuments, des grandes nécropoles, des grands cimetières, des hauts lieux de la mémoire nationale ; par rapport aux 4,6 millions de 2014, cela représente une hausse de 145 %. Le tourisme mémoriel bénéficiera également d’une augmentation de 10 %, ses crédits passant de 1,5 million d’euros à 1,65 million. Le président de la République devrait, à l’occasion des cérémonies du 11 novembre prochain, souligner l’importance de ce tourisme mémoriel pour nos collectivités et notre économie. Même si nous ne disposons pas encore de données pour 2014, il semble que cette activité ait pas mal profité aux collectivités de Normandie et, selon Hubert Falco, Toulon aurait accueilli le 15 août 200 000 personnes de plus que d’habitude.

L’an dernier, un budget de 700 000 euros était consacré au financement de l’extension du régime d’imputabilité aux incorporés de force dans l’armée allemande et ensuite détenus par les Soviétiques à l’ouest de la ligne Curzon. Onze personnes seulement ont déposé un dossier pour bénéficier des mesures proposées.

Certains d’entre vous restent très sensibles à la question de la campagne double qui, du reste, ne relève pas du budget du secrétariat d’État aux Anciens combattants. Je rappelle que l’attribution de la campagne double signifie que chaque jour de service effectué par le militaire est compté pour trois jours dans le calcul de sa pension, contre deux jours dans le cas de la campagne simple. En dépit de tout le respect que j’ai pour les fonctionnaires et assimilés, j’ai du mal à admettre qu’on touche une pension plus élevée pour le seul fait qu’on a été fonctionnaire, au détriment d’un soldat provenant, lui, du secteur privé. Un soldat est un soldat. Même si le coût de cette mesure attendue par certains n’est que de 2,4 millions d’euros l’année de sa mise en œuvre, je considère cette mesure comme sectorielle et je n’en fais pas une priorité.

Autre question, très sensible en fonction des régions, l’élargissement de l’indemnisation des orphelins dont les parents ont été victimes de la barbarie nazie, prévue par les décrets de 2000 et 2004, à tous les orphelins de la Seconde guerre mondiale. Au-delà du coût de la mesure, que je veux bien envisager, se poserait aussitôt la question des autres conflits : quelle réponse apporter, par exemple, aux orphelins de la guerre d’Algérie ? Est-il plus difficile d’être un orphelin du second conflit mondial que des autres ? Peut-être faudrait-il relancer le groupe de travail qui s’était penché sur le sujet et étudier la possibilité d’un examen au cas par cas.

Permettez-moi, pour finir, de revenir un instant sur la campagne double, en particulier sur la question de la rétroactivité. Cette mesure a été accordée dès lors que le Législateur a reconnu, en 1999, que ce qu’on appelait jusque-là les événements d’Algérie avait été une guerre. Donc tous ceux qui ont déposé un dossier après 1999 ont pu bénéficier de la campagne double. La difficulté juridique de ce dossier tient à la demande de l’application rétroactive de cette disposition pour ceux qui ont commencé de percevoir une pension avant 1999.

Mme Paola Zanetti, rapporteure pour avis de la commission de la Défense nationale et des forces armées. L’année dernière, monsieur le secrétaire d’État, vous vous étiez engagé devant cette commission à prendre des mesures nouvelles à chaque discussion budgétaire. Une fois encore, vous tenez votre engagement. Je relève ainsi l’augmentation de l’aide différentielle pour les conjoints survivants, l’élargissement des critères d’attribution de la carte du combattant aux OPEX, des mesures nouvelles en faveur des harkis, une augmentation du budget de l’action sociale de l’ONAC. Tout cela est positif.

À la suite du long débat que nous avons eu sur les veuves des grands invalides de guerre, vous proposez la revalorisation de la majoration spéciale prévue à l’article L.52-2 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre, article que vous entendez même modifier. Vous avez précisé qu’il s’agissait là de la première étape d’une dynamique que vous souhaitez engager. Connaissez-vous le nombre de veuves susceptibles d’être concernées ? A-t-on réalisé des estimations puisqu’une mission devait être confiée à cette fin au contrôleur général des armées ? Est-on, par conséquent, en mesure d’étayer le chiffre de huit millions d’euros que vous avez annoncé ? L’élaboration d’un système de réparation plus complet évoquée l’année dernière va-t-elle se poursuivre avec la commission que vous avez mise en place, regroupant des représentants d’associations ?

Vous avez précisé que onze personnes concernées par le décret du 29 janvier 2013 sur la ligne Curzon avaient déposé un dossier. Pouvez-vous nous donner des indications sur les procédures d’information mises en place par l’administration à destination des potentiels bénéficiaires ?

Enfin, certaines régions sont, en effet, particulièrement concernées par les orphelins de guerre. Nous avions demandé la remise d’un rapport, mais cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel au mois de décembre 2013. Il est difficile de se prononcer sur les critères en vigueur. On a ainsi relevé des cas où, dans une même famille, certains bénéficiaient d’une réparation et d’autres non. Vous avez indiqué l’année dernière que vous feriez preuve de souplesse dans l’examen de ces critères. Reste que relancer le groupe de travail auquel vous avez fait allusion paraît nécessaire pour répondre à cette délicate question.

M. Razzy Hammadi, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Contrairement à leurs aînés, nos combattants en OPEX, que l’on appelle aussi la « quatrième génération du feu », se trouvent dans une situation singulière au sein de la société française : il est aujourd’hui devenu exceptionnel d’avoir été blessé au combat ou d’avoir eu son conjoint tué au combat. Dans ces conditions, l’État doit être particulièrement attentif à la façon dont il traite les soldats blessés dans l’exercice de leur mission, ainsi que la famille des soldats tués.

S’agissant de la prise en charge médicale des blessés, les soins médicaux et les appareillages destinés à nos blessés en OPEX doivent être marqués du sceau de l’excellence. Quelles mesures avez-vous prises et comptez-vous prendre pour améliorer cette prise en charge ?

Ces blessés perçoivent une pension d’invalidité : quel est désormais le délai de traitement des nouvelles demandes ?

Enfin, quel est l’état d’avancement du monument aux morts en OPEX qui doit être érigé place Vauban, devant l’Hôtel des Invalides ?

M. le secrétaire d’État. Je rappelle pour la clarté de nos débats que la ligne Curzon est une ligne de démarcation proposée par le ministre britannique des Affaires étrangères lors de la guerre russo-polonaise de 1920-1921. Alors que les incorporés de force dans l’armée allemande capturés par l’armée soviétique et internés à l’est de cette ligne, notamment au camp de Tambov ou dans l’une de ses annexes, bénéficiaient du régime d’imputabilité à la détention pour certaines infirmités nommément désignées, les prisonniers qui avaient été détenus à l’ouest de la ligne Curzon n’y avaient pas droit. Les conditions de détention y étaient pourtant tout aussi dramatiques qu’à l’est. La loi de finances pour 2014 a intégré le financement de l’extension en faveur de ces prisonniers du régime d’imputabilité pour mettre un terme à cette iniquité de traitement. Cela concerne peu de personnes mais répond à une exigence morale.

M. Jean-David Ciot. Je salue la forte augmentation des crédits consacrés aux rapatriés et aux harkis, qui marque la poursuite des avancées accomplies. Vous êtes celui qui, en 2012, a fait le premier pas sur la voie de la reconnaissance de l’abandon de nos compatriotes harkis, et il faut vous en remercier. Le Premier ministre a franchi un autre pas cette année. Le dossier des réparations est ouvert et nos compatriotes abandonnés par l’État doivent bénéficier d’un accompagnement particulier. Votre plan d’action commence à être mis à exécution. Il traite notamment de la revalorisation de leur allocation ainsi que de leurs retraites, dont certains aspects devront toutefois être rediscutés. En particulier, le rachat d’une partie des points de retraite, même avec la participation considérable de l’État, sera difficile à financer pour certains. Le plan emploi harkis doit être accéléré pour les aider à s’intégrer, car ceux-ci ne demandent rien d’autre que d’être des hommes normaux.

Enfin, le projet de création d’un conservatoire national pour la mémoire des harkis et des rapatriés d’Afrique du Nord doit pouvoir être mené à son terme, ce qui nécessite des crédits. Je sais que les budgets ne sont pas illimités, mais les sommes en jeu ne sont pas énormes et elles pourraient peut-être s’insérer dans les actions consacrées à la mémoire.

M. Philippe Vitel. Monsieur le ministre, vous avez raison, les commémorations de 2014 ont constitué un grand moment d’unité nationale. Jamais je n’oublierai les instants vécus à Toulon le 15 août dernier.

Je ne vois, dans votre projet de budget, aucune trace de revalorisation de la retraite des anciens combattants, dont l’indice reste bloqué à 48 : ai-je mal lu le document qui nous a été distribué ou cette revalorisation est-elle reportée à une date ultérieure ?

Par ailleurs, je souhaiterais que l’on élargisse la définition de la communauté harki à l’ensemble des harkis européens. Le chiffre qui fut annoncé, de 8 000 harkis européens, a en réalité été très surévalué : on n’en recense aujourd’hui que 400 à 500.

Enfin, qu’en est-il de la reconnaissance des anciens combattants ayant résidé en Allemagne dans les forces françaises d’occupation entre 1945 et la chute du Mur de Berlin ? Moi qui en fais partie, je vous ai déjà interrogé l’an dernier sur ce point et je continuerai à le faire jusqu’à ce que cette revendication soit satisfaite. Cette reconnaissance, l’État américain l’a accordée à ses ressortissants, et même à certains Français.

M. le secrétaire d’État. Madame Zanetti, le nombre de veuves concernées par la revalorisation de la majoration spéciale s’élève entre 800 et 1 000.

S’agissant des orphelins de guerre, une première étape pourrait consister à demander au groupe de travail d’étudier les dossiers au cas par cas. Je ne suis pas opposé à ce type de démarche. En revanche, il me paraîtrait difficile et dangereux d’étendre l’indemnisation à tous les orphelins.

Nous avons transmis l’information relative au régime d’imputabilité des prisonniers internés à l’ouest de la ligne Curzon à l’ensemble du monde associatif ainsi qu’à l’ensemble de l’administration. Cela étant, je suis tout à fait disposé à lancer une nouvelle campagne de communication cette année pour la diffuser si nécessaire.

Quant aux combattants ayant participé à des OPEX, ils peuvent déjà bénéficier de la carte du combattant au terme de 120 jours. L’avancée que nous proposons est très appréciée par le monde associatif et l’armée dans son ensemble.

Monsieur Hammadi, le budget de l’an dernier consacrait un million d’euros à l’appareillage, et ces crédits seront maintenus dans le PLF pour 2015. Avec une telle somme, on équipe quinze à vingt soldats avec un appareillage de dernière génération, sachant qu’une prothèse pour les genoux ou les pieds coûte en moyenne 60 000 euros et doit être changée tous les quatre ans. L’avancée ici accomplie concerne les modalités de financement, qui devaient se faire auparavant de façon croisée et étaient donc difficiles à mettre en place. Une belle manière de rendre hommage à ces soldats est d’assister aux Rencontres militaires blessures et sports : de nombreux soldats en situation de handicap y retrouvent leur dignité en pratiquant un sport. Pour ma part, j’ai assisté, il y a quelques semaines, à Londres, aux Invictus Games lancés par nos amis britanniques à la demande du prince Harry. Cette manifestation fut une réussite, non seulement parce que les soldats français ont remporté de nombreuses médailles, mais aussi parce que les soldats appareillés ont montré d’eux une image de compétiteurs, à la fois contre le handicap et dans leur discipline sportive.

Dans le domaine du traitement social de nos soldats blessés et des familles de nos soldats tombés, le ministre de la Défense et les différentes armées ont engagé un formidable travail. Grâce aux cellules d’aide, les familles dans la douleur sont prises en charge très tôt par l’armée elle-même, qui aide les épouses à retrouver du travail, s’occupe de leurs enfants et leur apporte un suivi psychologique. Sont également prises en compte les « blessures honteuses », celles que l’on ne déclarait pas : syndromes post-traumatiques, difficultés psychologiques consécutives à des engagements dans des conditions très dures. Un numéro vert a également été créé, qui a reçu des centaines d’appels. Enfin, un traitement psychologique est dispensé au sein du service de santé des armées, mais nos soldats peuvent aussi bénéficier du soutien, à titre individuel, de psychologues et de psychiatres à proximité de leur lieu de résidence.

Nous nous efforçons de réduire le délai de traitement des dossiers de pensions militaires d’invalidité des blessés en opérations extérieures à moins de 180 jours. C’est un délai long mais nécessaire pour disposer d’une véritable expertise médicale et évaluer l’ensemble des séquelles et des blessures. Les Américains considèrent que le traitement de l’après-guerre du Vietnam fut un échec : si l’on ne soigne que les blessures physiques en oubliant les blessures psychologiques qui se déclarent par la suite, on ne règle rien.

Monsieur Ciot, nous avons créé pour les harkis un G12 comme il en existe pour les autres organisations d’anciens combattants, car ils ne disposaient pas de structure nationale leur permettant de se rencontrer et de discuter avec le ministre. Je mène moi-même les discussions avec eux, je ne les délègue pas à mon cabinet. Ce G12 a été reçu pendant plus d’une heure trente par le président de la République, à l’Élysée. Pour assurer un traitement social adéquat de ces combattants, nous avons annoncé la création de groupes de travail harkis régionaux placés sous la tutelle des préfets de région : y seront abordés les thèmes du logement, de la scolarité et de l’emploi. Les mêmes préfets de région ainsi que les recteurs d’académie ont été saisis par le Premier ministre de la question de la mémoire harki, afin de la diffuser auprès des publics scolaires.

Monsieur Vitel, la fixation à 48 points d’indice de la retraite des Anciens combattants est le fruit d’une concertation avec l’ensemble des associations d’Anciens combattants. L’accord avec elles portait sur cet objectif et pas au-delà, il n’est donc pas question d’augmentation dans le budget que je vous soumets. Sans doute faudra-t-il revenir sur ce sujet dans les années à venir, en sachant tout de même que le point de PMI augmente de manière régulière.

Lors de la cérémonie du 25 septembre dernier, un harki européen a été décoré par le Premier ministre : cela montre bien que loin d’opérer des distinctions de couleur, nous les prenons en compte.

Concernant les forces françaises d’occupation en Allemagne, s’agissant d’un dossier très technique, je vous répondrai par courrier.

Enfin, en termes de chiffres, la retraite des combattants s’élève actuellement à 669,12 euros. Elle est passée de 33 à 48 points entre 2006 et 2012. La dernière augmentation est intervenue le 1er juillet 2012 et a eu un impact budgétaire estimé à 18,5 millions d’euros en 2012, et à 54 millions en année pleine en 2013. Dans l’hypothèse du passage de 48 à 49 points au 1er juillet, le coût budgétaire en année pleine s’élèverait à 16,3 millions pour un gain d’un euro par mois environ pour chaque combattant.

M. Joaquim Pueyo. Compte tenu de nos contraintes budgétaires, le budget que vous venez de nous présenter me paraît satisfaisant.

Avec la carte du combattant, vous respectez l’engagement pris dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014 d’ériger en priorité le renforcement de la reconnaissance des combattants en OPEX.

Dans le domaine du tourisme mémoriel, l’augmentation des crédits me paraît tout à fait intéressante pour les collectivités territoriales. En tant qu’élu de Basse-Normandie, j’ai beaucoup apprécié la manière dont les cérémonies du Débarquement se sont déroulées, en harmonie avec la population.

Mais parlons aussi de l’avenir et des questions que suscite le phénomène des jeunes partant combattre en Syrie. Dans la mesure où la journée défense et citoyenneté (JDC) vise à assurer un lien entre la Nation et l’armée, ne conviendrait-il pas de renforcer ce dispositif, auquel vous comptez faire participer plus de 600 000 jeunes en 2015 ? Le contenu de cette journée doit être orienté différemment, car il est insuffisamment adapté aux enjeux d’aujourd’hui et de demain.

M. Jean-Jacques Candelier. Le budget des Anciens combattants est de nouveau en baisse – moins 3,3 % pour 2015. Je le regrette. Il est pourtant urgent de le renflouer, car la moyenne d’âge des anciens combattants est supérieure à soixante-quinze ans et l’on recense plus de trois millions d’ayants droit. Compte tenu du fait que 60 000 à 70 000 anciens combattants décèdent chaque année, à budget constant, on pourrait répondre à certaines revendications légitimes.

Concernant la campagne double, il conviendrait de mener une réflexion avec les représentants d’associations d’anciens combattants.

Enfin, j’aurais voulu vous interroger sur l’indemnisation des victimes des essais nucléaires, mais il me semble que ce sujet n’est plus de votre ressort. Connaissez-vous néanmoins le nombre de personnes indemnisées et pour quelle somme ?

M. Philippe Folliot. Les commémorations sont, en effet, des moments importants quand, dans notre société, les valeurs collectives passent souvent au second plan.

Si le problème des orphelins et pupilles de la Seconde Guerre mondiale se pose effectivement en termes financiers, cela ne doit pas occulter pour autant le sentiment d’injustice qui s’y rattache.

Dans le soutien aux blessés de guerre, le travail d’accompagnement que vous menez est essentiel. Alors que l’engagement militaire peut se conclure par le sacrifice suprême de la vie ou l’état de grand blessé, la présence sur place du service de santé des armées, le rapatriement et la rééducation dans les hôpitaux militaires doivent être préservés à tout prix.

La décristallisation des pensions a entraîné des situations curieuses. On a ainsi constaté, dans certains pays, des cas d’espérance de vie défiant les lois statistiques ou la célébration de mariages entre des hommes très âgés et de très jeunes filles. Le Gouvernement a-t-il spécifiquement contrôlé ces phénomènes, sachant que quelques abus sont susceptibles de jeter l’opprobre sur un système légitime ?

Une réflexion est-elle en cours s’agissant du maillage territorial ? De fait, avec la diminution du nombre d’anciens combattants, moins il y aura d’effectifs par implantation et plus la question de l’opportunité de maintenir ces implantations se fera pressante.

Dans le domaine mémoriel, l’association Le Souvenir français accomplit sur le terrain un travail exceptionnel, grâce à de nombreux bénévoles. Bénéficie-t-elle de soutiens de votre ministère ?

Enfin, puisque vous voulez favoriser le tourisme mémoriel, permettez-moi de rappeler à votre bon souvenir le mémorial national et la maison du combattant de Montredon Labessonié, pour lesquels nous n’aurions besoin que de quelques dizaines de milliers d’euros.

M. Christophe Guilloteau. Monsieur le ministre, je vous adresserai tout d’abord un reproche personnel : alors que vous vous étiez engagé, devant cette commission, à inviter personnellement les parlementaires aux manifestations du 14 juillet, je n’ai pu m’associer à l’hommage national rendu à ceux qui ont donné leur vie pour la France que par télévision interposée. Peut-être me direz-vous qu’il s’agit d’une erreur de votre secrétariat.

Votre budget se caractérise, il est vrai, par plusieurs avancées en faveur des veuves, des grands invalides et des combattants ayant passé plus de quatre mois en opération extérieure, ainsi qu’au regard du seuil de précarité. Néanmoins, de nombreuses associations d’anciens combattants déplorent qu’il n’augmente pas depuis votre arrivée au ministère ; rapportée à la diminution du nombre d’anciens combattants, la baisse que vous annoncez est même bien plus importante.

Enfin, l’an dernier, vous avez suscité une grande émotion en tentant, par le biais d’un décret sournois, de récupérer quelques subsides sur les rentes mutualistes. Pouvez-vous nous rassurer et nous dire qu’elles ne sont pas dans votre viseur cette année ?

M. Nicolas Dhuicq. Il est des blessures symboliques que l’argent ne pourra jamais compenser : vous avez donc raison de poser des limites nécessaires en matière financière.

Il me semble que la JDC devrait aussi être liée au rétablissement par l’éducation nationale de l’enseignement de l’histoire chronologique. Beaucoup au sein de cette commission ont oublié que le général de Gaulle et la France ont participé à la guerre russo-polonaise et que nous payons sans doute encore aujourd’hui les conséquences de l’éclatement des empires centraux. Si tous nos collègues parlementaires connaissaient mieux l’histoire de ce que l’on appelle aujourd’hui l’Ukraine, peut-être les chancelleries occidentales auraient-elles une attitude moins calquée sur celle des États-Unis. Cette attitude nuit aux intérêts de la Nation, ne serait-ce que financièrement, avec 600 millions d’euros de pertes de recettes pour nos entreprises, ce qui aura des conséquences sur les recettes fiscales de l’État.

J’attire votre attention sur la situation de nombreuses veuves d’anciens combattants en zone rurale, qui ne touchent que de très faibles pensions : pour elles, le poids symbolique et monétaire de toutes les mesures que prend votre ministère est plus important qu’il n’en a l’air ici, à Paris.

Enfin, que pensez-vous de l’inflation du nombre de commémorations et de manifestations patriotiques auxquelles assistent les maires ? Les anciens combattants eux-mêmes s’interrogent sur ce point. C’est aujourd’hui la génération de la guerre d’Algérie qui assume le rôle de porte-drapeau ; or celle-ci vieillit, de sorte que l’on est obligé de raccourcir les circuits des manifestations. Il conviendrait de s’interroger quant à l’avenir de ces porte-drapeaux. Pour ma part, je pencherai pour les conseillers municipaux, qui sont en poste pour six ans, plutôt que pour les sapeurs-pompiers.

Mme Émilienne Poumirol. Les personnels des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et de certaines écoles de reconversion professionnelle (ERP) de mon département s’inquiètent de la déclaration de l’association des mutilés de guerre, anciens combattants et victimes de guerre selon laquelle l’ONAC n’a pas pour vocation première de gérer cette branche médico-sociale et que cette mission devrait revenir à un service public ou à un service médico-social à but non lucratif, et non pas au secteur privé. Je sais qu’une mission interministérielle a été mandatée afin d’étudier la question. De fait, à l’ERP de Muret, par exemple, 1 % à peine des personnes en formation sont issues de l’armée et, dans l’EHPAD géré par l’ONAC dans mon département, moins de la moitié des résidents sont d’anciens militaires. S’il est vrai que l’ONAC doit être recentré sur son rôle premier, pourriez-vous rassurer ces personnels quant à l’avenir de leur statut ?

M. le secrétaire d’État. S’agissant du tourisme mémoriel, je rappelle que nous avons choisi cette année de rendre hommage non seulement aux combattants qui ont débarqué le 6 juin 1944, mais aussi aux populations civiles ; c’est la première fois qu’étaient reconnues les 20 000 victimes du Débarquement. Nous avons organisé cet événement de façon à permettre à toutes les populations d’être au plus près des cérémonies. Nous avons notamment veillé à ce que les commerces les plus proches de la plage ne ferment pas pour bénéficier de l’apport financier de l’événement, alors qu’ils avaient dû fermer lors d’autres opérations décennales. Que ce type de manifestation bénéficie au tourisme mémoriel est une réussite dont je me félicite. Nous envisageons de structurer ce secteur avec les acteurs du tourisme et les élus locaux. Il nous faut réfléchir à ce que le tourisme mémoriel apporte à notre économie et aux régions concernées en particulier.

Vous connaissez mon attachement au lien entre l’armée et la Nation, et donc à la JDC, à laquelle participent 760 000 jeunes, filles et garçons. C’est pourquoi je suis toujours surpris qu’on veuille en ponctionner les crédits dès que l’on cherche à financer d’autres opérations. J’ai souligné publiquement à plusieurs reprises combien le service militaire avait été une réussite sur le plan de l’intégration républicaine, qui semble tant faire défaut à notre pays aujourd’hui. Je me suis aussi souvent prononcé en faveur d’un service civique obligatoire et mixte : outre que nos jeunes doivent servir la Nation à un moment donné de leur vie, ils doivent aussi trouver par ce biais une place dans la Nation française et la République, quelles que soient leurs origines sociales, culturelles ou cultuelles. Selon une enquête, plus de 80 % des jeunes qui participent à la JDC trouvent que c’est un beau moment.

Nous avons fait évoluer le contenu de cette journée afin de le rendre plus didactique et de le tourner davantage vers nos armées. Le ministère de la Défense est aussi un employeur et il faut inciter le jeune à le percevoir comme tel. L’an dernier, j’ai envisagé de prolonger la JDC sur une semaine, peut-être à travers la réserve citoyenne, afin que nos jeunes puissent au moins aller dormir sous la tente et participer à des activités aux côtés de nos militaires. J’ai aussi entendu le président de la République s’exprimer sur le service civique, il y a une quinzaine de jours. C’est une évolution que je soutiens, même si elle soulève des problèmes d’ordre juridique et assurantiel. Elle me paraît indispensable quand des milliers de jeunes nés sur le sol français se font recruter par Daesh.

Monsieur Candelier, avant même que j’entre dans mes fonctions ministérielles, on m’avait averti qu’il me serait impossible de maintenir un budget constant. Nous nous sommes d’ailleurs battus pour que la baisse de nos crédits n’aille pas au-delà de la stricte prise en compte de la diminution du nombre de bénéficiaires des pensions d’anciens combattants. Je vous accorde néanmoins qu’il serait nécessaire de réfléchir à la question de la campagne double, et notamment de demander aux associations si cet enjeu leur paraît prioritaire.

La question des essais nucléaires est désormais du ressort du Premier ministre. Le budget finançant l’indemnisation des victimes de ces essais sera maintenu en 2015 au même niveau qu’en 2014. Je crois savoir que quelque 620 dossiers ont à ce jour été instruits et moins d’une vingtaine ont fait l’objet d’une indemnisation.

Monsieur Folliot, je comprends que vous dénonciez une injustice. Mais si être orphelin de guerre est une douleur, cela vaut pour toutes les guerres. La question n’est certes pas uniquement d’ordre budgétaire, mais il est illusoire de croire que les revendications s’arrêteront à la Seconde Guerre mondiale.

L’an dernier, nous avons prolongé d’un an la date limite de dépôt des demandes de révision des pensions décristallisées à la demande des pays concernés, en particulier du Maroc, ce qui a représenté un coût de 12 millions d’euros. Les personnes qui n’en bénéficient pas encore ont jusqu’au 31 décembre 2014 pour déposer leur demande. Aujourd’hui, sur 8 400 dossiers traités par la sous-direction des pensions de La Rochelle, 44 % concernent des ressortissants marocains et un peu moins des Algériens. S’agissant des abus, le service des pensions n’augmente pas le montant versé en cas de remariage, car l’indemnité reversée est fonction du nombre d’années passées en couple dans le cadre d’un mariage certifié officiel. Ainsi, la première épouse ne se retrouve pas totalement dépossédée de toute ressource lorsque son époux se remarie avec une deuxième ou une troisième femme, d’autant qu’avec la décristallisation, les sommes versées sont importantes au regard du coût de la vie dans les pays africains. Ces questions ont été abordées dans le détail au cours d’une réunion à Rabat.

Nous travaillons avec le Souvenir français tant sur le plan national que local : le contrôleur général Delbauffe est en contact permanent avec mon cabinet et avec moi-même. J’ai décidé de porter l’indemnité d’entretien des sépultures de guerre qui bénéficie à cette association, comme aux communes à qui l’État confie cet entretien, de 1,22 à 1,50 euro par stèle ou par tombe, somme qui n’avait jamais été augmentée depuis 1980.

Ce sont les OPEX qui vont faire perdurer la mémoire combattante collective, puisque les anciens d’Algérie, qui représentent aujourd’hui le plus gros des effectifs, sont en train de disparaître – le plus jeune d’entre eux a soixante-quinze ans. En outre, savoir qu’il y a une prise en charge médicale et psychologique ainsi que la retraite du combattant pour les soldats ayant servi en OPEX peut convaincre de l’attrait de s’engager dans l’armée lorsque l’on souhaite servir le pays.

Monsieur Guilloteau, je ne rejette jamais la responsabilité sur mon secrétariat ni sur mon chef de cabinet. Si les choses se sont passées ainsi, c’est pour des raisons protocolaires. Pour autant, tous les parlementaires qui ont adressé une demande à Jean-Yves Le Drian ou à moi-même ont obtenu une réponse positive.

Monsieur Vitel, je répète ce que j’ai dit s’agissant de la revalorisation de la retraite des anciens combattants : un euro mensuel supplémentaire par ancien combattant coûterait 16 millions d’euros.

Pour ce qui est de la rente mutualiste, n’ayez aucune crainte : la question a été réglée.

Dans ce budget, je vous rappelle que nous avons maintenu le régime de la demi-part fiscale, bien qu’elle aurait pu être supprimée à titre de variable d’ajustement.

Nicolas Dhuicq m’a interrogé sur l’inflation des commémorations, et la question a également été soulevée par les médias. Nos compatriotes, quant à eux, se sont montrés plutôt satisfaits tant de l’organisation des grands événements nationaux que des manifestations qui se sont déroulées au niveau local. Cela étant, je reconnais que nous nous heurtons à de réelles difficultés pour trouver des porte-drapeaux. Votre suggestion de recourir aux conseillers municipaux pour assurer cette fonction mérite d’être étudiée, et je suis prêt à lancer une réflexion sur le sujet.

M. Nicolas Dhuicq. Je suggère que l’on recoure à de véritables conseillers municipaux, car il nous faut des personnes mûres occupant un poste pérenne et qui se soient engagées au service du pays. Il devient intenable pour les élus de maintenir, dans les bourgs-centres en zone rurale, une douzaine de manifestations auxquelles ne participent qu’une vingtaine de personnes. Les commémorations auxquelles on enregistre une affluence importante sont celles du 11 novembre, du 14 juillet et du 8 mai.

M. le secrétaire d’État. Parallèlement à la question des ressources humaines se pose celle de l’aide financière aux petites communes : je regarderai s’il nous est possible de leur apporter des crédits.

M. Nicolas Dhuicq. De ce point de vue, les communes s’en sortent : j’ai, pour ma part, mis une partie du temps de travail de mon secrétariat à disposition des associations de combattants, compte tenu du nombre incalculable de documents administratifs que leurs présidents doivent remplir, alors qu’ils sont tous âgés de plus de soixante-dix ans. Ces responsables associatifs se retrouvent parfois aussi en conflit avec l’état-major de la grande ville centrale, qui leur reproche de ne pas être assez actifs. Leurs associations risquent de disparaître du monde rural.

M. le secrétaire d’État. La question s’est également posée de savoir s’il ne fallait conserver qu’une seule journée de commémoration, comme cela se fait dans d’autres pays. À titre personnel, je ne suis pas certain que ce soit là la meilleure solution.

M. Christophe Guilloteau. Il est vrai qu’en zone rurale, on ne se retrouve plus désormais qu’avec des pompiers, les anciens combattants d’Algérie et quelques enfants parfois. Sous la précédente législature, nous avons adopté un texte visant à faire du 11 novembre la manifestation-phare ; faisons en sorte qu’elle soit reconnue comme telle.

M. le secrétaire d’État. Il ne me semble pas que cela corresponde à un souhait du monde des anciens combattants. Chaque date renvoie à une histoire particulière dans l’esprit de nos compatriotes, et ce n’est pas forcément le même type de population qui se déplace à chaque commémoration. Dans le cas de la guerre d’Algérie, il a ainsi fallu maintenir deux dates distinctes. Nous n’appartenons pas à une culture anglo-saxonne.

M. Joaquim Pueyo. Beaucoup de communes n’organisent plus de cérémonies. Dans ma petite commune rurale, j’ai dû restaurer celle du 11 novembre. Les cérémonies qui attirent du monde sont celles du 8 mai et le 11 novembre ; n’assistent aux autres que quelques porte-drapeaux et quelques élus. On pourrait regrouper plusieurs commémorations au sein de quelques journées nationales : le 8 mai serait consacré aux dates de la Seconde Guerre mondiale, et l’ensemble des guerres coloniales pourrait être commémoré à une autre date unique, même s’il est vrai que la question de l’Afrique du Nord est sensible. Si majorité et opposition s’entendent sur ce dossier, l’évolution sera mieux acceptée par la population. Il est vrai que le centenaire de 1914 et les soixante-dix ans du débarquement ont eu du succès, mais celui-ci s’explique par une grande mobilisation médiatique.

M. Philippe Folliot. Dans nombre de petits villages de ma circonscription, une seule cérémonie est organisée le jour de la fête de village, si bien que l’affluence y est importante. Quel que soit le jour de l’année retenu, l’important c’est qu’il y ait du monde et que chacun puisse se souvenir.

M. le secrétaire d’État. Loin d’être fermé à ce débat de nature non partisane, je suggère que les parlementaires s’en saisissent afin de dégager un accord puis de s’entretenir avec le monde des anciens combattants. La question n’est pas simple, car il existe une multiplicité d’associations qui ne vivent qu’à travers une mémoire et qui auront l’impression de disparaître si l’on regroupe plusieurs commémorations.

M. Nicolas Dhuicq. En zone rurale, le raisonnement n’est pas le même qu’en ville. Ce sont les anciens qui me demandent ce regroupement.

M. le secrétaire d’État. Je suis ouvert à vos propositions, et la fête locale peut effectivement être une solution.

S’agissant du projet prévu à Montredon Labessonnié, je vous suggère d’adresser votre demande à mes services.

Enfin, pour répondre à Émilienne Poumirol, on compte huit EHPAD et neuf écoles de reconversion, au sein desquels les anciens combattants représentent une proportion infime. Je considère que l’ONAC n’a pas pour mission d’être un opérateur médicosocial ; il doit se concentrer sur son cœur de métier. C’est pourquoi il est envisagé qu’un repreneur public global regroupe les neuf ERP, cependant que les EHPAD seraient gérés par des opérateurs publics au niveau des départements, sinon par des opérateurs privés sans but lucratif. Quant aux personnels, qui relèvent actuellement de mon ministère, les professeurs des ERP seraient pris en charge par le ministère de l’Éducation nationale et les personnels non-enseignants comme les personnels des EHPAD pourraient être intégrés dans des corps homologues de la fonction publique hospitalière. Cette formule aurait l’avantage de ne pas nuire au déroulement des carrières.

M. Christophe Guilloteau. Qu’adviendrait-il des bâtiments de ces établissements ?

M. le secrétaire d’État. Ils pourraient, dans des conditions à déterminer et sauf exception, être transférés aux repreneurs.

Mme la présidente Patricia Adam. Monsieur le ministre, nous vous remercions.

La séance est levée à dix-neuf heures quarante-cinq.

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Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Patricia Adam, Mme Sylvie Andrieux, M. Olivier Audibert Troin, M. Sylvain Berrios, M. Jean-Jacques Candelier, M. Jean-David Ciot, Mme Catherine Coutelle, M. Nicolas Dhuicq, Mme Marianne Dubois, M. Philippe Folliot, Mme Geneviève Gosselin-Fleury, Mme Edith Gueugneau, M. Christophe Guilloteau, M. Damien Meslot, M. Philippe Meunier, M. Jacques Moignard, M. Philippe Nauche, Mme Émilienne Poumirol, M. Joaquim Pueyo, M. Gwendal Rouillard, M. Jean-Michel Villaumé, M. Philippe Vitel, M. Michel Voisin, Mme Paola Zanetti

Excusés. - Mme Danielle Auroi, M. Claude Bartolone, M. Philippe Briand, M. Yves Foulon, M. Éric Jalton, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Frédéric Lefebvre, M. Bruno Le Roux, M. Maurice Leroy, Mme Marie Récalde, M. François de Rugy

Assistait également à la réunion. - M. Razzy Hammadi