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Commission de la défense nationale et des forces armées

Mercredi 5 octobre 2016

Séance de 9 heures

Compte rendu n° 2

Présidence de M. Philippe Nauche, vice-président

— Audition, ouverte à la presse, de M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’État auprès du ministre de la Défense, chargé des Anciens combattants et de la mémoire, sur le projet de loi de finances pour 2017

La séance est ouverte à neuf heures.

M. Philippe Nauche, président. Mes chers collègues, je tiens tout d’abord à présenter les excuses de Mme la présidente Patricia Adam, qui n’a pu être présente et m’a demandé de la remplacer.

Je suis donc heureux d’accueillir M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’État auprès du ministre de la Défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire, sur le projet de loi de finances pour 2017.

Monsieur le secrétaire d’État, après le ministre de la Défense hier, c’est désormais à vous qu’il appartient de nous présenter le projet de loi de finances pour 2017, s’agissant de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».

Sans anticiper sur votre propos, je note que ce projet de loi de finances comprend trois articles concernant le monde combattant, tout en incluant comme mesure principale la revalorisation de la retraite du combattant.

M. Jean-Marc Todeschini, secrétaire d’État auprès du ministre de la Défense, chargé des anciens combattants et de la mémoire. Mesdames et Messieurs les députés, la présentation des moyens alloués à la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » est toujours un moment attendu. Et c’est légitime puisqu’il s’agit de mener une action juste de reconnaissance, de réparation et de solidarité à l’égard des anciens combattants et victimes de guerre, tout en veillant à transmettre leur histoire aux plus jeunes générations. Ces moyens sont bien sûr dictés en partie par des contraintes budgétaires que vous connaissez tous.

J’émettrai toutefois un souhait concernant l’érection du monument en hommage aux militaires morts en OPEX. Ce monument, dont vous avez annoncé la pose de la première pierre en début d’année, est très attendu. J’aimerais connaître les modalités de financement de ce monument, en souhaitant que, par la suite, il soit bien consolidé.

En ce qui concerne les veuves des grands invalides de guerre, mon prédécesseur, Kader Arif, a fait beaucoup pour elles, en augmentant notamment de cinquante points supplémentaires la majoration attribuée au conjoint survivant au 1er janvier 2015, puis à nouveau de cinquante points au 1er janvier 2016. La condition requise pour percevoir cette majoration était de s’être occupé de son conjoint invalide pendant quinze ans ; cette durée a été abaissée à dix ans en 2015, puis ramenée à cinq ans dans la loi de finances pour 2016, avec un lissage des effets de seuil. Il s’agissait de faire bénéficier du dispositif le plus grand nombre de personnes possible.

Cela étant, la mesure n’étant rentrée en application qu’au 1er juillet de cette année, nous ne disposons pas encore du recul suffisant pour évaluer le nombre de nouveaux bénéficiaires, et les chiffres que vous citez ne peuvent donc être significatifs. Sans doute les tenez-vous de Mme Gisèle Grosz, mais son engagement et son militantisme ne doivent pas lui faire oublier la réalité : on ne peut faire en sorte que les conjoints survivants de grands invalides de guerre touchent davantage qu’un invalide pensionné à 100 %. Il faut savoir en effet certaines pensions sont assez conséquentes, et non imposables de surcroît. Dans le cas où ces pensions d’invalidité sont supérieures à 13 000 points, si nous appliquions les propositions qui nous sont faites, certains conjoints survivants toucheraient jusqu’à 3 700 euros par mois.

Cela étant, ils bénéficieront bien cette année de la revalorisation du point de pension militaire d’invalidité de 3 %, mais je n’ai pas l’intention de rouvrir un dossier dans lequel mon prédécesseur a déjà beaucoup fait. Par ailleurs, nos études révèlent que la catégorie des veuves de très grands invalides n’est pas celle qui se trouve dans la situation la plus difficile et qu’au cas par cas il est toujours possible d’avoir recours à l’aide sociale de l’ONAC-VG.

M. Razzy Hammadi m’a interrogé sur la réforme de l’ADCS. Là encore, nous ne disposons que d’un bilan sur six mois, mais les remontées que nous avons depuis les départements ne font guère état de difficultés particulières, certaines veuves touchant même davantage que ce qu’elles auraient touché dans l’ancien système. J’ajoute qu’avec cette nouvelle politique les anciens combattants eux-mêmes peuvent bénéficier d’une allocation.

Si nous attendons le rapport d’information de Régis Juanico sur la mission d’information présidée par Mme Dalloz, le rapport semestriel que je vous ai fourni indique d’ores et déjà que 25 % des veuves ont perçu davantage qu’auparavant, dans la mesure où, désormais, la totalité de leurs charges sont prises en compte. Dans le cas inverse, et lorsque l’allocation a baissé, cela résulte de critères objectifs, comme la diminution des charges ou l’augmentation des ressources liées à des changements de situation.

Je serai évidemment en mesure de vous donner un bilan plus complet au terme d’une année révolue, mais les moyens dont dispose l’action sociale de l’ONAC-VG ayant été augmentés d’un million d’euros, le dispositif devrait fonctionner correctement. Par ailleurs, j’ai bien précisé aux associations que les cas difficiles qu’elles signaleraient seraient étudiés par les antennes départementales de l’ONAC-VG, dont l’une des missions consiste précisément à accompagner ces personnes âgées isolées, qui ne sont pas nécessairement au courant de leurs droits. Sachez, quoi qu’il en soit, que les veuves ne sont pas abandonnées. Nous ne pouvions faire autrement que de modifier les critères d’attribution de l’allocation au conjoint survivant, mais je ne doute pas que ce changement aura des effets positifs.

Quant au supplément pour enfant à charge, la modification du dispositif ne coûtera que 130 000 euros et ne concernera qu’une petite centaine de veuves. Il s’agit d’une mesure de justice et d’équité : en effet, il n’est plus justifié de devoir attendre l’âge de quarante ans pour pouvoir bénéficier de ce supplément, octroyé dans la limite des 500 points d’indice, alors que nos soldats engagés dans les OPEX sont de plus en plus jeunes.

J’ai enfin été interrogé sur la JDC. Un groupe de travail s’est penché en 2013 sur son allongement à deux jours, appuyé sur un partenariat entre le ministère de la Défense et l’Éducation nationale ou les collectivités locales. Cette extension représentait un surcoût évalué entre 32 et 48 millions d’euros, sachant que ces deux jours n’auraient pas été consécutifs afin d’éviter la prise en charge de l’hébergement.

La seule modification opérée au bout du compte en 2014 a porté sur les modules présentés, le module « secourisme » ayant été remplacé par un module « sécurité routière ». Nous en sommes là de nos réflexions, tandis que la Cour des comptes, très au-delà de nos estimations, évalue le coût d’une journée entre 116 et 118 millions d’euros.

Quoi qu’il en soit, à côté des JDC existe également le service militaire volontaire (SMV), actuellement en phase expérimentale, qui prend en charge ceux qui n’ont pas tout acquis lors de leur scolarité. Ayant eu l’occasion de remettre les diplômes de la première promotion sortie du premier centre ouvert en Lorraine, j’ai pu constater qu’à une exception près les volontaires considéraient l’expérience comme très positive. Ce n’est cependant pas un dispositif qui a vocation à être étendu à tous puisqu’il s’agit avant tout d’apporter un complément de formation à des jeunes en difficultés.

M. Jean-François Lamour. Monsieur le ministre, j’étais présent lorsque vous êtes venu présenter à la mairie du XVe arrondissement le projet de monument aux morts en OPEX, très attendu par les combattants et leurs familles. Le ministère a indiqué financer ce monument à hauteur de 500 000 euros.

M. le secrétaire d’État. Ce chiffre correspond au financement du concours lancé pour la conception du monument.

M. Jean-François Lamour. L’enveloppe globale évoquée en marge de la réunion avec le maire du XVe arrondissement se situait en effet entre deux et trois millions d’euros, ce qui inclut l’intervention des architectes du parc André-Citroën, lesquels ont évidemment un droit de regard sur la rénovation du jardin Noir qui accueillerait le monument.

Votre optimisme vous conduit à envisager de poser la première pierre de ce monument en février prochain, en présence du président de la République. Cependant, nous ne connaissons aujourd’hui ni l’ampleur des travaux à effectuer ni le montant de la ligne budgétaire du budget de la Ville de Paris qui permettra de financer l’érection du monument. Toute information plus précise dont vous disposeriez sera donc la bienvenue.

M. Damien Meslot. Depuis quelques années, tous les gouvernements ont multiplié les commémorations, si bien qu’au bout du compte certaines d’entre elles se déroulent devant des parterres vides, à l’exception des autorités préfectorales et des élus.

Ne pensez-vous pas dans ces conditions que, sans porter atteinte à la mémoire des dates marquantes de notre histoire, il serait souhaitable de ne plus soutenir des commémorations qui manquent de visibilité et d’envisager, comme cela se pratique dans de nombreux pays européens, la réunion de certaines d’entre elles ?

M. Jacques Lamblin. Pour en revenir à la JDC, dont on semble vouloir à tout prix étoffer le contenu, loin de l’ambition initiale, pourquoi ne pas utiliser du temps scolaire – réparti tout au long de l’année – pour compléter les enseignements de cette journée ?

Je constate par ailleurs que cette proposition de budget est, une fois encore, muette sur le problème des pupilles de la Nation, alors qu’une profonde inégalité de traitement subsiste entre les pupilles de la Seconde Guerre mondiale dont les parents – qu’ils soient Juifs ou non – sont morts en déportation et les autres : les premiers en effet sont indemnisées mais pas les seconds.

À une question qui vous a été posée au Sénat, vous avez répondu en laissant entendre que c’était avant tout un problème financier, en particulier pour ce qui concernait le versement du capital. Vous appuyez vos dires sur des chiffres pour le moins imprécis, puisque vous évaluez le coût de cette indemnisation entre 0,6 et 1,3 milliard d’euros, soit du simple au double. Si les pupilles de la Nation sont conscients qu’il s’agirait là d’une dépense trop lourde pour le budget de l’État, nous suggérons en revanche d’opter pour le principe d’une indemnisation qui prenne la forme d’une rente viagère. Cela représenterait une dépense supplémentaire d’une soixantaine de millions d’euros, soit peu ou prou l’équivalent de la baisse du budget pour 2017. Puisque, comme on l’a dit, nous sommes en année préélectorale, pourquoi ne pas en faire également profiter les pupilles de la Nation oubliés par les décrets ?

M. Yves Fromion. Je m’associe à la question de Jacques Lamblin, ayant moi-même déposé avec mon collègue socialiste Pierre-Yves le Borgn’ une proposition de loi visant à mettre en œuvre la proposition qu’il vient de vous faire. En effet, à l’heure où – pardonnez-moi cette notation macabre – le budget des Anciens combattants diminue de façon comptable du fait de la disparition progressive des allocataires, instaurer un dispositif d’indemnisation progressive des pupilles de la Nation qui n’étaient pas concernés par les décrets de 2004 serait une mesure équitable. Ces pupilles méritent en effet plus de considération que l’attitude qui consiste à leur opposer une réponse strictement comptable.

En ce qui concerne d’autre part l’Institution nationale des Invalides, on sait que des dépenses considérables sont nécessaires pour lui permettre d’être digne de sa mission. Pourquoi, là encore, ne pas investir l’argent économisé du fait de la diminution du nombre des anciens combattants pour moderniser cet établissement ?

Enfin, le ministère dispose-t-il d’un recensement des combattants en OPEX qui ont quitté les armées mais qui sont susceptibles, du fait de leurs blessures ou de leurs traumatismes, de venir grossir les prochaines générations d’anciens combattants éligibles aux indemnités versées par l’État ?

M. Patrice Prat. Je salue à mon tour l’effort de revalorisation de la retraite des anciens combattants, tout comme je salue l’effort accompli en faveur des harkis et de leurs conjoints.

Vous avez évoqué la politique mémorielle ambitieuse du Gouvernement. À cet égard, le président de la République a fait une déclaration forte et solennelle en direction des harkis, en reconnaissant officiellement leur abandon par la France. Si cette déclaration a reçu un écho très favorable auprès des familles, nombre d’entre elles souhaiterait qu’on aille plus loin en inscrivant cette reconnaissance dans la loi. Quelle est sur ce point la position du Gouvernement ?

Vous vous êtes déplacé en personne au camp de Saint-Maurice-l’Ardoise en juillet dernier, afin de témoigner de votre engagement en faveur de ce site. De leur côté, les mairies de Saint-Laurent-des-Arbres et Laudun-l’Ardoise ont lancé une initiative conjointe pour faire du site un lieu de mémoire. Mais la bonne volonté des collectivités ne pourra rien sans le soutien de l’État, voire du département et de la région. Au-delà de votre visite et de vos déclarations pleines de bonnes intentions, peut-on espérer que vous concrétisiez votre engagement en facilitant les négociations avec le service foncier des armées afin de revoir la configuration du site ? Peut-on également espérer un concours financier de l’État pour ce lieu, auquel vous connaissez mon attachement, qui tient à la fois à des raisons personnelles et historiques ?

M. le secrétaire d’État. Monsieur le ministre Lamour, vous étiez en effet présent lors de ma rencontre avec le maire du XVe arrondissement. Depuis cette réunion, les concertations se sont poursuivies, et l’on parle aujourd’hui d’un coût d’1,2 million d’euros pour le réaménagement du jardin Noir, destiné à accueillir le monument aux morts en OPEX. Nous pouvons également nous prévaloir du soutien de la maire de Paris, qui nous a assurés, au général de Villiers et à moi-même, que la décision serait prise sans tarder.

De son côté, le ministère de la Défense lance, pour un montant de 450 à 500 000 euros un concours concernant le monument lui-même, sachant que nous sommes prêts à examiner avec la Ville de Paris les efforts que nous pourrions fournir pour le réaménagement du jardin, sans qu’il soit question que nous le prenions entièrement à notre charge. Mais les réunions se poursuivent avec Jean-Paul Viguier, l’architecte chargé du parc, et je ne doute pas que la question du financement trouvera sa solution.

En ce qui concerne les débats entre la maire de Paris et le maire du XVe arrondissement, cela ne me concerne pas. Je m’en tiens au fait qu’il est d’autant plus important que nous puissions aboutir que le refus des habitants du VIIe arrondissement de voir le monument érigé place Vauban a été très mal reçu. Son implantation dans le parc André-Citroën prend heureusement tout son sens, maintenant que nos services sont installés à Balard.

En ce qui concerne la multiplication des cérémonies, je vous ai parlé tout à l’heure de la paix des mémoires. Or la paix des mémoires est incompatible selon moi avec la suppression de commémorations. Une tentative avait été faite pour ériger le 11 novembre en jour du souvenir, comme cela se fait dans d’autres pays, mais nous devons respecter la pluralité des mémoires.

J’ajoute que la mémoire ne se joue pas seulement devant les monuments aux morts mais également dans les écoles, à travers les concours scolaires comme le concours national de la Résistance et de la déportation, rénové à la demande du président de la République ; elle se joue également à travers les voyages scolaires, à travers le plan de lutte contre le racisme et l’antisémitisme, sur internet ou encore à travers les témoignages livrés par les survivants, comme le rescapé d’Oradour-sur-Glane que j’évoquais tout à l’heure. Supprimer des commémorations n’ira pas dans le sens de l’apaisement et risque au contraire de rouvrir des débats inutiles.

En ce qui concerne la JDC, que vous souhaitez compléter par du temps scolaire, l’éducation nationale fait son travail, et la défense n’a pas à lui demander de lui fournir des modules, ce qui exigerait d’amender les programmes et risquerait de ranimer la guerre scolaire. L’enseignement de l’histoire permet déjà de former des citoyens éclairés, même si certains épisodes ne sont que très imparfaitement abordés, quand ils le sont – je pense en particulier à la guerre d’Algérie, qui a longtemps été ignorée par les programmes…

M. Alain Marty. Tout comme les « Malgré-nous » !

M. le secrétaire d’État. Je reconnais bien là un propos de Mosellan ! Avant les années quatre-vingt, personne en effet ne savait qui étaient les « Malgré-nous », car ils se taisaient et on n’en parlait pas. Il faut du temps ; seul le temps apaise.

Au sujet des orphelins de la Seconde Guerre mondiale, aucun gouvernement ne peut-être insensible à leur situation. D’où les décrets pris en 2000 et en 2004, à partir desquels mon ministère procède au réexamen de chaque dossier le méritant.

Il est impératif cependant de conserver le caractère spécifique de l’indemnisation, et son extension à tous les orphelins n’est pas envisageable, non seulement pour des motifs d’ordre financier mais également pour des raisons symboliques. Vous invoquez la baisse des dépenses consacrées aux anciens combattants et plaidez pour qu’en année préélectorale nous fassions un effort en faveur de l’indemnisation de ces orphelins…

M. Yves Fromion. Je parlais des pupilles de la Nation, non de l’ensemble des orphelins.

M. le secrétaire d’État. Il s’agit des mêmes personnes, et les revendications que vous portez concernent les orphelins qui n’avaient pas vingt et un à l’époque du conflit.

Le code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre reconnaît comme pupilles de la Nation tous les orphelins dont le père ou la mère ont péri pendant le conflit, et ils ont le droit au soutien de l’État jusqu’à leurs vingt et un ans. Les indemniser coûterait à l’État entre 0,5 et 1,3 milliard d’euros, voire plus de deux milliards d’euros si on y ajoute l’ensemble des orphelins de tous les conflits, car il n’y a pas de raison d’établir de différences de traitement.

Sans vouloir polémiquer, je rappellerai que la précédente majorité avait annoncé en 2007 un troisième décret visant l’ensemble des orphelins de guerre, promesse qui fut renouvelée en 2012, à la veille de l’élection présidentielle.

M. Yves Fromion. Vous avez raison, mais elle a également été faite par François Hollande.

M. le secrétaire d’État. C’est inexact. Quoi qu’il en soit, la notification des rejets a en conséquence été suspendue entre 2007 et 2012, avant que nous reprenions, en 2013, les décisions de rejet pour les cas les moins sensibles.

Le Gouvernement actuel a par ailleurs estimé qu’il fallait préserver la dimension symbolique de cette indemnisation mise en place en 2000 sous le gouvernement Jospin. J’étais à l’époque chef de cabinet du secrétaire d’État aux Anciens combattants, et nous avions parfaitement conscience que cette indemnisation était attribuée de façon discriminatoire à une partie seulement des orphelins de guerre. Mais n’était-ce pas le reflet de la discrimination qui avait conduit les parents de ces orphelins dans les camps d’extermination ? Cela ne m’empêche pas de mesurer la situation douloureuse dans laquelle se trouvent les orphelins non indemnisés, qui estiment être des orphelins au même titre que les autres.

M. Yves Fromion. L’indemnisation ne concerne pas uniquement les enfants de déportés mais ceux dont les parents ont été victimes de la barbarie nazie.

M. le secrétaire d’État. Vous vous référez là au second décret, pris en 2004 sous le gouvernement Raffarin. Le premier décret concernait, lui, les enfants dont les parents avaient été persécutés pour ce qu’ils étaient.

M. Jacques Lamblin. La distinction entre les enfants de parents morts en déportation et les autres n’est-elle pas un peu spécieuse ? Pourquoi en effet indemniser l’enfant d’un résistant mort en déportation mais pas celui d’un résistant torturé sur le sol français ?

D’autre part, je répète que ce qui coûte cher, c’est l’indemnisation en capital des pupilles. En revanche, une indemnisation sous forme de rente serait beaucoup moins coûteuse et plus facile à mettre en œuvre.

M. le secrétaire d’État. Je l’ai dit, au-delà du coût financier, cette indemnisation à une dimension symbolique que nous tenons à préserver. Il serait démagogique de ma part de prétendre le contraire.

Pour ce qui regarde le recensement des militaires ayant participé aux OPEX puis ayant quitté l’institution, leur liste doit exister. Ceux qui possèdent la carte du combattant depuis le 1er octobre 2015 ont été identifiés par l’ONAC-VG, comme le seront ceux qui en feront la demande. Ils seront accompagnés, car l’institution militaire s’occupe de leur reclassement et les aide à se réinsérer dans la vie civile.

Monsieur Prat, vous n’êtes pas sans savoir que les lois mémorielles posent des problèmes à notre pays. Cela étant, les lois portant indemnisation des harkis témoignent déjà d’une reconnaissance des difficultés qu’ils ont rencontrées à leur arrivée en France.

Mais, là encore, il serait démagogique de ma part de prétendre que je suis favorable aux trois nouvelles propositions de loi qui ont été déposées sur le sujet, car le chiffrage de cette indemnisation nous mènerait bien au-delà de ce que nécessiterait l’indemnisation des orphelins de la Seconde Guerre mondiale.

Le « G12 harkis », dont les représentants ont été reçus par le Premier ministre le 20 septembre dernier, demande surtout à la reconnaissance des harkis par la Nation. En ce sens, le président de la République a été fidèle à ses engagements de candidat en prononçant les mots qu’il a prononcés. Jacques Chirac, quant à lui, avait fait du 25 septembre une journée nationale d’hommage aux harkis.

Quant à l’initiative des maires de Saint-Laurent-des-Arbres et de Laudun-l’Ardoise en faveur du camp de Saint-Maurice-l’Ardoise, elle se heurte en effet au problème des parcelles utilisées par le ministère de la Défense. Mais, si le projet devait se concrétiser, je m’engage à ce que l’État soit partie prenante dans l’édification d’un lieu de mémoire aux harkis. La direction de la mémoire, du patrimoine et des archives a coutume d’accompagner les collectivités territoriales dans ce genre de dossiers.

M. Philippe Nauche, président. Monsieur le ministre, nous vous remercions pour l’ensemble de vos réponses, qui nous ont éclairés.

La séance est levée à dix heures quarante-cinq.

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Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Sylvie Andrieux, M. Nicolas Bays, M. Daniel Boisserie, M. Malek Boutih, M. Jean-Jacques Bridey, Mme Isabelle Bruneau, M. Jean-Jacques Candelier, M. Guy Chambefort, Mme Dominique Chauvel, M. Jean-David Ciot, M. David Comet, Mme Catherine Coutelle, M. Bernard Deflesselles, M. Guy Delcourt, Mme Carole Delga, Mme Marianne Dubois, M. Yves Foulon, M. Yves Fromion, M. Claude de Ganay, M. Sauveur Gandolfi-Scheit, Mme Geneviève Gosselin-Fleury, M. Serge Grouard, Mme Edith Gueugneau, M. Francis Hillmeyer, M. Laurent Kalinowski, M. Patrick Labaune, M. Jacques Lamblin, M. Jean-François Lamour, M. Charles de La Verpillière, M. Gilbert Le Bris, M. Frédéric Lefebvre, M. Christophe Léonard, M. Jean-Pierre Maggi, M. Alain Marleix, M. Alain Marty, M. Damien Meslot, M. Philippe Meunier, M. Alain Moyne-Bressand, M. Philippe Nauche, Mme Nathalie Nieson, M. Jean-Claude Perez, Mme Sylvia Pinel, M. Patrice Prat, Mme Marie Récalde, M. Stéphane Saint-André, M. Thierry Solère, M. Jean-Michel Villaumé, M. Philippe Vitel

Excusés. - Mme Patricia Adam, M. Olivier Audibert Troin, Mme Danielle Auroi, M. Claude Bartolone, M. Philippe Briand, M. Nicolas Dhuicq, Mme Geneviève Fioraso, M. Éric Jalton, M. Jean-Yves Le Déaut, M. Bruno Le Roux, Mme Lucette Lousteau, M. Eduardo Rihan Cypel, M. Gwendal Rouillard, M. Alain Rousset, M. François de Rugy, M. Michel Voisin

Assistait également à la réunion. - M. Razzy Hammadi