Accueil > Contrôle, évaluation, information > Les comptes rendus de la commission d'enquête

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission d’enquête sur les conditions d’abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Jeudi 16 juin 2016

Séance de 9 heures

Compte rendu n° 29

Présidence de M. Olivier Falorni, Président

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Jocelyne Porcher, directrice de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA), et M. Stéphane Dinard, agriculteur, représentants du Collectif « Quand l’abattoir vient à la ferme ».

La séance est ouverte à neuf heures dix.

M. le président Olivier Falorni. Ce matin, nous abordons le sujet des abattoirs mobiles et de l’abattage à la ferme, qui a soulevé de nombreuses questions lors des auditions précédentes. Ces dispositifs suscitent tout à la fois l’interrogation, l’intérêt, l’enthousiasme et la suspicion. S’ils reposent sur des principes qui ne sont pas contestables – la proximité, la volonté de garder l’animal dans son environnement familier, l’absence de transport –, ils posent de multiples questions en matière sanitaire et environnementale. Rappelons que les abattoirs à la ferme sont interdits en France, excepté pour l’autoconsommation. Ils constituent toutefois un enjeu important car ils peuvent représenter une solution pour l’abattage, notamment dans les territoires ruraux.

Nous recevons Mme Jocelyne Porcher, sociologue, directrice de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) à Montpellier. En 2001, vous avez soutenu, Madame, une thèse sur les relations affectives entre éleveurs et animaux pour laquelle vous avez reçu le prix Le Monde de la recherche universitaire. Vous militez pour des alternatives aux abattoirs actuels tels l’abattage à la ferme ou les abattoirs mobiles. Vous êtes également l’auteure de Vivre avec les animaux, une utopie pour le XXIe siècle.

Nous allons également entendre M. Stéphane Dinard, agriculteur en Dordogne où il élève des cochons gascons à pieds noirs, des vaches Dexter et des poulets en plein air. Vous êtes, Monsieur, représentant du collectif « Quand l’abattoir vient à la ferme » qui milite pour une mort plus respectueuse de l’animal à la ferme, par celui qui l’a élevé, et pour la légalisation de cette forme d’abattage.

Je rappelle que nos auditions sont ouvertes à la presse et retransmises en direct sur le portail vidéo de l’Assemblée nationale, certaines étant diffusées sur la chaîne parlementaire (LCP).

Conformément aux dispositions de l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958, relatif aux commissions d’enquête, je vais vous demander de prêter le serment de dire toute la vérité, rien que la vérité.

(Mme Jocelyne Porcher et M. Stéphane Dinard prêtent successivement serment.)

Mme Jocelyne Porcher, directrice de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA). Mesdames, Messieurs les députés, je vous remercie de cette invitation devant votre commission.

Je tiens à préciser que c’est dans le cadre de mes activités de recherche sur les innovations dans l’élevage et dans l’agroalimentaire que j’ai fondé avec Stéphane Dinard le collectif « Quand l’abattoir vient à la ferme ». Il s’agit, pour ce qui me concerne, d’une recherche-action-innovation plus ouverte que les travaux que j’ai menés précédemment sur le même sujet.

D’une manière plus générale, mes recherches portent sur les relations de travail entre humains et animaux en élevage, mais également dans d’autres secteurs de production de biens et de services. Au sein de ces relations de travail, la mort des animaux occupe une place centrale et sa compréhension est un enjeu majeur pour la pérennité de nos liens avec les animaux domestiques. C’est pourquoi elle est l’un de mes objets de recherche les plus anciens.

Je travaille en effet depuis plus de vingt ans à décrypter la place de la mort des animaux dans le travail en élevage et dans les productions animales. J’appelle « élevage » les rapports historiques de travail que nous avons avec les animaux et qui reposent sur de multiples rationalités dont la première est relationnelle. J’appelle « productions animales » les rapports de domination et d’exploitation des animaux engendrés par les scientifiques et par les industriels au XIXe siècle avec l’émergence du capitalisme industriel et qui se poursuivent aujourd’hui dans les systèmes industriels et intensifiés. Conceptualiser les différences entre ces deux types de relations aux animaux et les situer dans leurs dynamiques propres est crucial pour comprendre les problèmes auxquels nous sommes actuellement confrontés dans les abattoirs.

J’apprécie d’autant plus d’être auditionnée dans votre commission que j’ai publié en 2014, avec d’autres chercheurs, un ouvrage sur la situation alarmante des abattoirs dits de proximité, Le Livre blanc pour une mort digne des animaux, que nous avons adressé à une centaine de députés et de sénateurs concernés par les questions agricoles.

C’est en nous fondant sur le constat que le visuel médiatique prime beaucoup sur l’écrit que nous avons construit le collectif « Quand l’abattoir vient à la ferme », aujourd’hui très présent sur les réseaux sociaux. Notre démarche est suivie par plusieurs journalistes de la presse écrite et audiovisuelle. Grâce à eux, nos concitoyens peuvent savoir qu’il existe d’autres voies que l’abolitionnisme, autrement dit la rupture de nos liens avec les animaux, ou bien la vaine poursuite du processus d’industrialisation.

L’un des principaux résultats des enquêtes qui ont servi de matériaux à notre livre blanc est le refus de plus en plus marqué de certains éleveurs d’emmener leurs animaux à l’abattoir, petit ou grand, et le choix de les abattre à la ferme, même s’il leur faut pour cela enfreindre la loi. Car, et c’est un paradoxe à considérer de près, pour respecter leurs devoirs moraux envers les animaux, les éleveurs sont contraints de recourir à des pratiques illégales.

J’ai pu remarquer d’autre part, sur le temps long de mes recherches, que la situation, loin de s’améliorer, s’est au contraire considérablement aggravée. Par exemple, entre 2005, date à laquelle j’ai publié un article à propos de l’abattage mobile, et aujourd’hui, la critique des éleveurs sur le fonctionnement des abattoirs industriels s’est étendue aux abattoirs de proximité et leurs positions se sont renforcées. Si en 2005, de nombreux éleveurs pouvaient encore s’arranger pour faire abattre leurs animaux conformément à leur volonté dans le cadre des règles légales, en acceptant de multiples contraintes, de transport notamment, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Et un nombre croissant d’éleveurs n’a d’autre choix que d’abattre les animaux à la ferme s’ils veulent leur éviter les souffrances liées au transport et à l’abattage. Comme me l’a dit récemment une éleveuse, « tout nous pousse à désobéir ».

Cette éleveuse a récemment conduit quatre cochons à l’abattoir, dont trois ont été saisis pour myopathie. C’est le signe qu’ils ont été malmenés à l’abattoir car, pour avoir visité sa ferme, je sais comment ils ont été élevés : on ne saurait mieux faire. Ces cochons n’étaient absolument pas préparés à ce qui allait leur arriver. Pour un animal qui a eu une vie aussi bonne qu’elle peut l’être à la ferme, l’arrivée à l’abattoir est en effet une terrible violence tandis que pour un cochon produit dans l’industrie, elle n’est jamais que la suite de ce qui précède. L’obligation de conduire les animaux à l’abattoir génère donc de la souffrance chez les animaux et de la souffrance chez les éleveurs, traumatisés par ce qui arrive à leurs bêtes. Elle génère aussi du gâchis par rapport à la qualité de la viande obtenue par l’élevage.

Je rappelle que l’élevage repose sur une forte relation aux animaux, une relation qui renvoie à une rationalité économique mais surtout à des rationalités relationnelles et morales. Les éleveurs aiment leurs animaux, ils les estiment et ils les respectent. Ils leur ont donné une bonne vie et c’est pour eux un devoir moral que de leur donner une bonne mort. Entre respecter la loi et abandonner leurs animaux à des abattoirs dont ils réprouvent les pratiques et transgresser la loi pour donner une mort digne à leurs animaux, ils sont de plus en plus nombreux à choisir la transgression.

L’objectif de fond de notre collectif est de contribuer à rendre légales ces pratiques illégales qui, quoiqu’elles concernent surtout les éleveurs en vente directe et les circuits courts, sont révélatrices de la souffrance induite chez les animaux mais aussi chez les éleveurs et chez les consommateurs par les process d’abattage en abattoir.

Notre collectif regroupe des éleveurs, des associations de protection animale, des vétérinaires, des associations de consommateurs et des citoyens ordinaires. Nous sommes également en relation avec des bouchers. Nous travaillons sur l’abattage à la ferme dans ses deux formes principales : l’abattage mobile et la construction de locaux dédiés dans la ferme.

Pour ce qui concerne l’abattage mobile, nous faisons un double constat : d’une part, l’existence de difficultés réglementaires, au niveau européen, qui freinent le développement des équipements souhaités ; d’autre part, la forte demande des éleveurs européens en faveur de l’abattage à la ferme – en Autriche et en Allemagne, ils réclament des règlements et une organisation du travail leur permettant de respecter leurs animaux.

Il existe actuellement deux grands types d’abattoirs mobiles.

Il s’agit d’abord des abattoirs mobiles totalement autonomes et capables d’assurer un certain rendement. C’est le cas d’un camion suédois, autonome en eau et en électricité, ou du camion Schwaiger, du nom de l’éleveur autrichien qui l’a conçu. Utilisé en Hongrie, en Californie et en Argentine, mais interdit en Autriche et en France, il est constitué, outre la partie dédiée à la traction, de remorques d’abattage et de remorques frigorifiques.

Il s’agit ensuite des caissons d’abattage, équipements plus légers permettant uniquement l’abattage et la saignée à la ferme. Ces caissons peuvent aussi être un outil complémentaire de l’abattage au pré, comme c’est le cas en Suisse.

Ces divers outils concernent aussi bien les bovins que les moutons ou les cochons. Leur prix va de 2,5 millions d’euros pour l’abattoir mobile suédois à moins de 15 000 euros pour le caisson d’abattage, en passant par 500 000 euros pour l’abattoir Schwaiger. Ils ne sont donc pas accessibles aux mêmes types d’acteurs.

L’abattage dans un local dédié, du même type que les abattoirs de volailles à la ferme, est, quant à lui, d’un coût plus faible. Il intéresse plus particulièrement les éleveurs de petits animaux.

Les freins au développement de ces outils sont d’ordre réglementaires, liés notamment aux aspects sanitaires, mais ils pourraient, à notre sens, être facilement levés grâce à une véritable politique d’aide.

Précisons que ces équipements, loin de concurrencer les abattoirs de proximité, en constituent au contraire le prolongement. L’utilisation notamment du caisson d’abattage, qui ne sert qu’à l’abattage et à la saignée, implique de se rendre rapidement dans un abattoir de proximité pour le traitement de la carcasse.

L’enjeu aujourd’hui pour notre collectif est d’obtenir les moyens réglementaires et financiers qui nous permettront d’évaluer la validité de nos propositions et d’apporter des réponses aux nombreuses questions en suspens.

M. Stéphane Dinard, agriculteur, représentant du Collectif « Quand l’abattoir vient à la ferme ». En tant qu’éleveur, je vous remercie de prendre en considération ma démarche partagée par de nombreux autres éleveurs. J’ai fait le choix depuis 2007 d’abattre mes animaux à la ferme sur leur lieu de vie afin de leur éviter le stress et la souffrance occasionnés par le transport et l’attente, et que je partage avec eux. Je me suis équipé d’une pièce d’abattage et d’un laboratoire pour la transformation avec une chambre froide. Je fais appel aux personnes compétentes pour réaliser l’abattage ainsi qu’à un boucher pour la découpe, ce qui me permet d’assurer aux consommateurs venus acheter ma viande une totale transparence sur la traçabilité.

L’interdiction d’abattre mes animaux dans ma ferme m’empêche de développer correctement mon exploitation et pèse sur la pérennité de mon activité. Je suis donc venu devant vous dans l’attente d’une évolution de la législation. Je me tiens à votre disposition pour répondre à vos questions.

M. le président Olivier Falorni. Vous avez effleuré le sujet, Madame Porcher, mais vous comprendrez bien que notre préoccupation principale porte sur le respect des normes sanitaires et environnementales. Vous avez évoqué des exemples étrangers. Pouvez-vous nous indiquer comment ces normes sont respectées ailleurs ? Qu’en est-il par exemple du camion suédois ? Vous insistez sur la nécessité d’une expérimentation ; encore faut-il que nous ayons des assurances en termes de respect des normes.

Par ailleurs, l’abattage mobile ne va-t-il pas contribuer à renchérir le coût de la viande ? Si oui, qui doit supporter ce surcoût ? Les abattoirs mobiles ont-ils vocation à être rentables ? Doivent-ils être pris en charge par le secteur public ou par le privé ?

Enfin, l’abattage mobile ou à la ferme n’est-il pas condamné à n’être utilisé que pour les petits élevages ? Si ces formes d’abattage étaient légalisées, Monsieur Dinard, quel serait le tonnage annuel envisageable ?

Mme Jocelyne Porcher. Vous posez des exigences sur des équipements qui précisément n’ont pas pu être expérimentés en France… Depuis 2005, j’essaie de poser la question de l’abattoir mobile pour que sa pertinence et son coût soient évalués mais mes tentatives restent vaines. La question du respect des normes sanitaires et environnementales doit être mesurée à l’aune de la situation actuelle des abattoirs industriels. Les visites que j’ai pu faire me laissent circonspecte sur ce point.

M. le président Olivier Falorni. Pouvez-vous nous donner des précisions ?

Mme Jocelyne Porcher. Ce sont des choses connues.

M. le président Olivier Falorni. Nous aimerions avoir votre point de vue…

Mme Jocelyne Porcher. Les animaux sont victimes d’une « violence soft », du fait des cadences extrêmes de travail, qui pèsent aussi lourdement sur la santé des travailleurs : si les troubles musculo-squelettiques sont une réalité connue, les problèmes psychiques ne sont pas du tout pris en compte. Mon expérience en psychologie du travail me fait dire que ces personnes souffrent indéniablement de problèmes psychiques. Elles ont besoin d’être entendues. J’ai rencontré plusieurs d’entre elles qui n’avaient jamais consulté de médecin du travail. Moi qui suis assise derrière un ordinateur, je le vois tous les ans…

Il y a aussi les conditions dans lesquelles les animaux arrivent et sont découpés, à peine morts, et le traitement des carcasses.

M. le président Olivier Falorni. Avez-vous des éléments tangibles prouvant que les normes sanitaires et environnementales ne sont pas respectées ?

Mme Jocelyne Porcher. Une norme peut être respectée sans pour autant apporter du bien-être aux animaux. Par exemple, une exploitation de mille vaches peut utiliser des tapis d’une épaisseur parfaitement conforme.

Dans les abattoirs, ce qui m’a frappé, ce sont les énormes quantités d’eau utilisées. Cette débauche d’eau me paraît aller à l’encontre du respect de l’environnement ; et pourtant aucune norme ne vient régler l’usage de l’eau.

Qui plus est, entre ce que disent les normes et la réalité du travail… Les conditions de travail des employés ont un impact évident sur les conditions sanitaires. La fatigue peut avoir une répercussion directe sur le respect des normes. Il n’y a pas un flic derrière chaque employé. Toute personne s’étant rendue dans un abattoir industriel sait le décalage entre ce qui est prescrit et ce que les gens font réellement.

Cela étant, le niveau d’exigence pour les abattoirs mobiles ne peut être du même ordre que pour les abattoirs industriels : on n’est pas dans le même monde. Il faut adapter les exigences au contexte.

Quant au coût de la viande, il faut bien voir qu’il est minoré dans le système industriel : il est pris en charge par la communauté. A priori, un poulet industriel a un prix très bas, mais est-ce vraiment de la viande ? Tué à quarante jours, il est avant tout constitué d’eau et de résidus de produits médicamenteux. Si l’on fait le calcul à partir des seules matières sèches, une viande issue d’un élevage comme celui de Stéphane Dinard est proportionnellement moins chère. À cela s’ajoutent le coût environnemental de l’exploitation industrielle avec la pollution des eaux et les dommages sur la santé des travailleurs.

Enfin, je considère que les abattoirs relèvent du service public : il faudrait viser l’équilibre plutôt que la rentabilité. C’est d’ailleurs un des plus gros problèmes des abattoirs de proximité : comment peut-on leur imposer une exigence de rentabilité alors qu’il s’agit d’un service rendu aux petits élevages ?

M. le président Olivier Falorni. Monsieur Dinard, l’abattage mobile n’est-il pas condamné à n’être réservé qu’aux petits élevages ? Quel tonnage annuel serait envisageable si cette forme d’abattage était légalisée ?

M. Stéphane Dinard. S’agissant du tonnage, je n’ai pas de réponse. L’abattage mobile peut être utilisé également dans les élevages de taille moyenne car ils n’ont pas à abattre des animaux chaque jour. Je suis persuadé qu’il s’agit d’un outil complémentaire et qu’il serait très utile là où les infrastructures manquent. Il faut le mettre en place à titre expérimental pour évaluer sa pertinence. Tant que l’expérience ne sera pas lancée, il n’est pas possible de se prononcer.

M. le président Olivier Falorni. La mise en place d’abattoirs mobiles ne mettrait-elle pas en péril certains abattoirs de proximité et donc les emplois qui y sont attachés ?

M. Stéphane Dinard. Je les vois avant tout comme des outils complémentaires par rapport aux abattoirs de proximité, souvent en difficulté. Ceux-ci pourraient être reconvertis en salle de découpe avec des frigos où opéreraient des bouchers à disposition des éleveurs. Cela éviterait à chaque éleveur de se doter d’un laboratoire pour transformer la viande. Autrement dit, il faudrait repenser le fonctionnement des outils, parallèlement à l’activité de l’abattoir mobile qui passerait dans les fermes. Du coup, je pense que ce serait plutôt l’inverse de ce que vous redoutez : ce pourrait être créateur d’emplois.

Mme Sylviane Alaux. J’entends bien vos arguments. Certains éleveurs, très attachés à leurs animaux, ont du mal à les conduire à l’abattoir, dites-vous. Je me demande toutefois si cette vision un peu angélique ne vaut que pour un très petit nombre : la transformation de l’animal en viande de consommation est la finalité même de tout élevage.

Par ailleurs, vous avez évoqué les opérateurs des abattoirs et leurs problèmes psychiques. Il faut rappeler les difficultés de recrutement et le manque de formation mais aussi la présence des services vétérinaires qui apporte une certaine garantie dans l’encadrement, même si tout n’est pas parfait.

Faire venir l’abattoir à la ferme paraît être une solution très séduisante. On imagine le stress de l’animal, arraché à la tranquillité de son pré, subissant toutes sortes de nuisances pendant son transport. Toutefois, ne pensez-vous pas que tout cela sera très compliqué à mettre en place et à sécuriser ? Je reste dubitative, malgré les réponses que vous avez apportées à notre président. J’aimerais avoir des précisions supplémentaires.

M. Stéphane Dinard. Nous sommes effectivement très attachés à nos animaux, nous les aimons, nous les respectons, nous passons tout notre temps avec eux, depuis leur naissance à la ferme jusqu’à l’abattage. Ce qui me pose problème, ce n’est pas la mise à mort d’un animal que j’ai élevé, mais le stress qu’il va subir, du chargement dans le camion de transport jusqu’à l’attente dans l’abattoir. Il va quitter le champ où il est né pour se trouver confronté à un lieu totalement inconnu et néfaste. Pour moi, il est douloureux d’abandonner mes animaux. Que l’abattoir vienne à la ferme change tout : cela permet de leur épargner tous ces moments. Je considère que mon travail, c’est de les élever et de les accompagner jusqu’à la fin de leur vie, dans les meilleures conditions possibles. Quant à la finalité, je la connais : ce sont des animaux de consommation. Personnellement, cela ne me pose pas de problème. Mon travail est de les amener dans les meilleures conditions jusqu’à cette étape, pour en faire des animaux de consommation de bonne qualité.

Mme Sylviane Alaux. Qui s’occupe de l’abattage ?

M. Stéphane Dinard. Je fais appel à des personnes compétentes de manière que l’abattage soit fait dans de bonnes conditions.

Mme Sylviane Alaux. Comment est déterminée la compétence de ces personnes ?

M. Stéphane Dinard. Ce sont des gens du métier. Ce serait manquer de respect aux animaux que d’improviser leur mise à mort. De la même manière, même si je suis capable de le faire, je confie la découpe à des bouchers professionnels.

Mme Sylviane Alaux. J’aurai une dernière question qui porte sur la préservation de l’environnement : comment traitez-vous les rejets de cette unité mobile ?

M. Stéphane Dinard. Il y a très peu de rejets. Prenez les cochons : une fois les ongles et les poils enlevés, il ne reste plus grand-chose à jeter ; le peu qui reste part à la poubelle. Si ces abattoirs étaient légalisés, il pourrait être envisagé, comme cela se fait pour les chasseurs, de mettre en place des poubelles dédiées à ce type de déchets, ramassées par les services d’équarrissage. La France dispose d’ores et déjà de toute la technologie et des équipements pour que le système fonctionne dans de bonnes conditions, comme chez nos voisins européens.

M. le président Olivier Falorni. Pratiquez-vous l’étourdissement ? De quelle façon ?

M. Stéphane Dinard. Oui, je pratique l’étourdissement à l’aide d’un pistolet de calibre 22. Je sais que sur internet, il est possible de se procurer des pistolets d’abattage de type matador qui permettent de neutraliser l’animal.

M. Hervé Pellois. J’ai une question d’ordre juridique. L’abattage mobile est autorisé en Hongrie, en Suède, mais pas en France ou en Autriche. Ces distorsions sont-elles compatibles avec la législation européenne ?

Par ailleurs, j’aimerais en savoir plus sur le déroulement concret de l’abattage dans votre ferme et avoir une description précise de ces fameuses unités mobiles que personne ici n’a jamais vues. Pouvez-vous nous en dire davantage ?

M. le président Olivier Falorni. Oui, pourriez-vous nous décrire le fonctionnement de ces abattoirs mobiles ?

M. François Pupponi. Une unité mobile, vous pouvez venir en visiter une à Sarcelles quand vous voulez…

Mme Jocelyne Porcher. Notre collectif est entièrement composé de bénévoles ; nous n’avons pas de juristes, À notre connaissance, même si l’abattage mobile est interdit en Europe, il existe des dérogations. En Hongrie, les propriétaires d’un camion Schwaiger sont ainsi en voie d’obtenir un agrément européen.

Comme je le disais, il existe plusieurs types d’abattoirs mobiles. Le camion suédois, le plus lourd, est complètement autonome : il a ses réserves d’eau, ses compartiments frigorifiques, des palans pour manipuler les animaux, les réserves pour les déchets. C’est ce qui explique qu’il soit très coûteux. Pour ce qui concerne le camion Schwaiger, vous trouverez de plus amples renseignements dans le livre blanc que nous avons publié et que je tiens à votre disposition – un court article lui est consacré.

M. Stéphane Dinard. Je vais répondre aux questions sur le déroulement concret de l’abattage dans ma ferme. L’animal est étourdi sur son lieu de vie, puis amené une trentaine de mètres plus loin dans la pièce d’abattage où il est saigné puis préparé pour être conservé directement en chambre froide. Je l’ai moi-même réalisée, avec une petite charpente en bois, des bacs acier, du carrelage au sol, l’eau et le palan, bref, tout ce qu’il faut pour préparer un cochon.

Le camion suédois a une capacité d’abattage d’une quarantaine de bovins à la journée. Il est totalement autonome et n’a pas besoin d’être raccordé à l’eau ou à l’électricité. Il peut être stationné au milieu d’un champ et mener ses opérations.

Pour le caisson d’abattage, tel qu’il est utilisé en Autriche, il faut ramener la carcasse de l’animal abattu sur place dans un délai d’une heure à l’abattoir. C’est une manière, là encore, de travailler avec les abattoirs locaux, sans qu’il y ait de concurrence.

M. William Dumas. Je dois dire, Madame Porcher, que je trouve très bizarre que certains opérateurs d’abattoir ne voient pas le médecin du travail. Peut-être est-ce un cas très particulier que vous avez rencontré. Tous les salariés doivent se rendre régulièrement chez le médecin du travail. Par exemple, les attachés qui travaillent pour moi ont une visite tous les deux ans. Et je sais, pour bien connaître le milieu agricole, qu’il en va de même pour les ouvriers agricoles.

En utilisant des abattoirs mobiles, vous transgressez la loi. Cela pose un problème sanitaire, me semble-t-il. Qu’en est-il du respect des normes ?

En outre, il apparaît que la méthode du caisson mobile induit un très fort renchérissement puisque celui-ci doit être transporté jusqu’à la ferme puis de la ferme à l’abattoir.

M. Stéphane Dinard. Mes animaux ne passent pas par l’abattoir. Ils sont abattus puis transformés sur place. Je citais l’exemple autrichien.

M. William Dumas. Mais vous n’avez aucune autorisation.

M. Stéphane Dinard. Aucune.

M. William Dumas. Cela implique donc qu’il n’y a aucun contrôle sanitaire.

M. Stéphane Dinard. Il n’y a aucun contrôle extérieur, mais les personnes qui viennent travailler chez moi veillent au bon déroulement des opérations. Comme cette pratique n’est pas autorisée, je ne peux pas aller voir un vétérinaire pour faire les vérifications.

M. William Dumas. Je considère que vous prenez des risques énormes.

M. Stéphane Dinard. Je ne refuse en aucune façon les contrôles. Des vétérinaires viennent chaque année dans mon exploitation pour les actes de prophylaxie. Simplement, il ne m’est pas possible, en l’état actuel de la législation, de leur demander de contrôler aussi l’abattage. Et si nous sommes devant vous aujourd’hui, c’est pour que la loi soit modifiée. Nous n’avons aucune intention de transgresser quelque règle que ce soit : nous disons simplement qu’il y a un vide juridique qui ne nous permet pas de faire ce que nous estimons moral pour nos animaux et pour nous-mêmes.

Mme François Dubois. Je n’irai pas jusqu’à dire que ce que vous faites est inquiétant, mais il est sûr que cela pousse à s’interroger : vous travaillez tout de même plus ou moins dans la clandestinité. Je sais que vous avez fait ce choix parce que vous aimez vos animaux : vous les avez vus naître, vous les avez élevés. Je comprends vos motivations, nous avons tous eu le cœur serré en croisant des camions de transport de bétail sur la route. Je ne doute pas que vous les abattiez dans de bonnes conditions, et vous n’avez probablement aucune difficulté à écouler toute votre marchandise. Les consommateurs aiment venir acheter à la ferme, cela a un côté bucolique. Le problème, comme le souligne William Dumas, c’est que vous prenez des risques. Vos clients ne peuvent avoir aucune garantie quant au respect des normes sanitaires. Y a-t-il d’abattoirs à la ferme en France ?

M. Stéphane Dinard. Depuis que j’ai rencontré Jacqueline Porcher, plusieurs réunions ont été organisées par notre collectif. Il y a eu notamment un colloque à Strasbourg en 2013. J’ai été amené à rencontrer dans différents coins de France des éleveurs qui pratiquent l’abattage à la ferme. Seulement, ils ne l’affichent pas comme je l’affiche.

Mme François Dubois. Autrement dit, tout le monde le sait, mais tout le monde ferme les yeux.

M. Stéphane Dinard. Je ne sais pas si tout le monde ferme les yeux.

Concernant la vente, étant donné mes choix dans ma façon de travailler, je ne peux proposer mes produits qu’à des personnes consentantes. Je ne vais pas sur les marchés, je ne démarche pas les restaurateurs ou les bouchers. Je ne vends qu’à des particuliers qui approuvent ma manière de travailler, qui connaissent ma ferme et les raisons de mes choix. C’est la seule voie par laquelle j’écoule ma production. Ce n’est pas suffisant : je ne peux pas développer mon activité et augmenter les volumes de manière à pouvoir vivre de mon travail.

Mme Jocelyne Porcher. Dans mon travail, je rencontre un grand nombre d’éleveurs qui pratiquent un abattage à la ferme de petits animaux. Ils ne le disent pas, seuls leurs clients le savent. Pour les consommateurs, le produit que vendent ces éleveurs est 100 % traçable. On ne peut pas faire plus traçable : le consommateur connaît l’éleveur, il va à la ferme, il peut être là le jour de l’abattage s’il le souhaite.

Mme Françoise Dubois. Acceptez-vous la présence des consommateurs lors de l’abattage ?

M. Stéphane Dinard. Absolument.

Mme Jocelyne Porcher. J’ai noté que de nombreux consommateurs sont intéressés par l’abattage à la ferme. Beaucoup d’éleveurs le font déjà et beaucoup d’autres en ont l’intention parce que l’abattoir tel qu’il est ne leur convient pas – et depuis les vidéos de L214, c’est encore pire ; certains éleveurs n’avaient pas idée que l’on puisse traiter leurs animaux de cette manière, ils en ont eu des cauchemars.

L’éleveuse que j’ai citée, a été obligée d’amener quatre cochons très bien élevés, heureux pendant toute leur vie, dans un abattoir où ils ont dû avoir extrêmement peur pour que la viande ait été à ce point dégradée. Elle en a pleuré. Elle a abandonné ses animaux à un système qu’elle réprouve. Cela constitue une violence énorme contre les éleveurs. Ce système a tenu jusqu’à présent par déni de la relation affective que vous avez soulignée et sur laquelle j’ai travaillé dans ma thèse. Or cette relation affective est le ciment de l’élevage. C’est cela qu’il faut prendre en compte, et qui justifie la demande d’abattoirs à la ferme.

Mme Françoise Dubois. Vous avez souligné, Mme Porcher, le décalage entre les prescriptions et la pratique dans les abattoirs. Est-ce dû à la cadence ?

M. Stéphane Dinard. Mon élevage représente de tout petits volumes.

Mme Françoise Dubois. Les dérapages qu’on a pu observer sont sans doute liés à la cadence et à l’affolement des animaux du fait du nombre. En outre, la formation du personnel n’est pas toujours vérifiée dans les abattoirs. Monsieur Dinard, vous dites faire appel à du personnel qui serait plus qualifié que certains employés des abattoirs. Pouvez-vous nous le confirmer ?

M. Stéphane Dinard. Ces professionnels n’ont pas les mêmes impératifs, ni la même démarche. Une personne qui travaille dans un abattoir a des cadences à respecter alors que la personne que je sollicite vient pour abattre un cochon. Ce n’est pas du tout le même travail, ni la même relation. Cela n’a rien de comparable.

Mme Jocelyne Porcher. Stéphane fait appel à des personnes compétentes, tueurs et bouchers ; les éleveurs ont constaté que les abattoirs emploient des gens qui ne connaissent absolument pas le travail et qui sont formés à vitesse grand V.

Mme Françoise Dubois. Nous ne souhaitons pas jeter l’opprobre sur ces personnes.

M. Stéphane Dinard. Nous non plus.

Mme Françoise Dubois. Ce sont des gens qui cherchent du travail, qui en trouvent un et qui font ce qu’on leur demande. Il y a sans doute un problème de formation en matière de bien-être animal, qu’il est possible de corriger.

Mme Jocelyne Porcher. Certaines personnes se retrouvent dans les abattoirs sans connaître le métier, sans même avoir de relation à l’animal. Or, pour tuer un animal, il faut avoir une relation avec lui ; c’est un paradoxe, mais il ne faut pas détester les animaux. Un tueur qui détesterait les animaux ferait un travail nul. Ces employés sont débordés psychiquement. L’absence de formation a un effet négatif sur eux, ce qui peut conduire à des comportements inadmissibles, faute de pouvoir penser son propre travail. Ils ne comprennent pas ce qu’ils font ni pourquoi ils le font.

Mme Françoise Dubois. J’imagine qu’on ne fait pas ce métier par plaisir. Certaines personnes peuvent déraper parce qu’elles ne maîtrisent plus ni leurs pulsions ni l’animal.

M. le président Olivier Falorni. Madame Porcher, vous n’avez pas répondu à la question de William Dumas. Vous avez affirmé qu’un certain nombre de salariés dans les abattoirs ne voyaient jamais la médecine du travail. Pouvez-vous étayer cette affirmation qui nous interpelle tous ?

Mme Jocelyne Porcher. Lors de mes enquêtes dans des abattoirs, j’ai rencontré des travailleurs qui m’ont dit n’avoir jamais rencontré la médecine du travail. Je ne peux pas dire plus ; je n’ai pas fait de statistiques. J’ai été très étonnée moi aussi, mais on mesure là le fossé entre ce qui se passe réellement dans les abattoirs et ce qui est prescrit. Bien sûr, il y a des normes, on est supposé faire ceci ou cela, mais les choses ne se passent pas comme c’est prévu. Certaines personnes peuvent parfois ne pas être employées dans le bon registre sans que les ressources humaines en soient conscientes.

M. le président Olivier Falorni. Je dois avouer que cela nous laisse pantois.

M. William Dumas. Je ne comprends pas, car les abattoirs sont contrôlés.

Mme Jocelyne Porcher. Regardez les vidéos de L214 : cela non plus, ce n’est pas normal… Des tas de choses ne sont pas normales dans les abattoirs. C’est pour cela que nous en sommes là. Cela ne devrait pas arriver.

M. William Dumas. Une telle situation ne peut pas durer des années !

Mme Jocelyne Porcher. Je ne pense pas que la personne qui m’a dit cela était employée à l’abattoir depuis vingt ans. Il ne s’agissait pas de vieux travailleurs.

M. François Pupponi. Je suis impressionné car c’est courageux de la part des éleveurs de dire ici ce qu’ils font, même si c’est à la limite de la légalité. Mais je sais qu’ils sont nombreux à pratiquer cette forme d’abattage qui est intelligente, respectueuse pour l’animal, pertinente sur le plan économique – le circuit court – et financièrement intéressante pour l’éleveur. Or, ils sont obligés de le faire, pour certains clandestinement, pour d’autres officiellement. Je pense qu’il faut les entendre parce qu’ils proposent une piste de réflexion pour notre commission.

Nous avons un abattoir mobile à Sarcelles depuis deux ans, qui fonctionne très bien. Au moment de l’Aïd, on tue 2 000 moutons en trois jours, au vu et au su de tout le monde, sous le contrôle des services vétérinaires. L’abattoir est ouvert, les gens voient leur mouton vivant et ils repartent huit minutes après avec la carcasse. Cela se passe à vingt minutes de Paris début septembre, je vous y invite pour une journée expérimentale. C’est propre, c’est contrôlé, tout le monde est content, ce n’est pas très cher et c’est très efficace. Cela permet de développer une activité économique au plus proche des personnes.

Le responsable de l’opération doit aller recruter pendant trois jours cinq Gallois – ce sont les plus efficaces, paraît-il. Tout est mécanisé, c’est assez impressionnant : ils tuent l’animal, ils le basculent dans une chaîne mécanique où il est dépouillé et éviscéré, tout le monde voit ce qui se passe. Cela me paraît être une solution intelligente, peu coûteuse, efficace, respectueuse pour l’animal et pour l’hygiène. Nous sommes deux ou trois villes à faire cela en France.

M. Stéphane Dinard. Je savais que des outils avaient été mis en place pour l’abattage des moutons, notamment pour la fête de l’Aïd. Cela démontre que cet outil fonctionne. On aurait tort de s’en priver.

M. le président Olivier Falorni. Que devient l’abattoir mobile le reste de l’année ?

M. François Pupponi. Il est stocké… On ne le sort qu’une fois par an.

Mme Françoise Dubois. Au Mans, un abattoir qui était désaffecté est ouvert une fois dans l’année pour la fête de l’Aïd. Cela permet de mieux maîtriser l’abattage rituel.

M. le président Olivier Falorni. Nous parlons d’un abattoir mobile, c’est-à-dire d’un abattoir qui se déplace dans les fermes.

M. Stéphane Dinard. Pour rebondir sur les propos de Madame, l’existence d’un abattoir mobile pourrait permettre de transformer l’abattoir qui ne fonctionne qu’une fois par an en salle de découpe à disposition des éleveurs. Le camion abattoir tournerait de telle sorte que les éleveurs des alentours puissent abattre leurs animaux dans de bonnes conditions. L’abattoir désaffecté serait ainsi réutilisé pour une autre fonction ; le camion abattoir serait le complément des structures existantes qui ne sont plus utilisées. Le coût d’installation d’un laboratoire pour réaliser la transformation à la ferme est difficile à assumer pour de petits élevages.

M. Guillaume Chevrollier. Je voudrais seulement exprimer une réflexion : nous sommes à l’Assemblée nationale, là où on fait la loi. Or, vous venez nous dire que vous travaillez dans l’illégalité, et vous mettez en cause ceux qui travaillent dans la légalité selon un autre modèle, industriel certes, mais que la société a voulu à un moment donné. Vous pointez les irrégularités qu’ils commettent, les cadences et le personnel maltraité. Ce n’est pas une bonne façon de poser un débat qui peut par ailleurs être légitime sur l’intérêt des abattoirs mobiles, non pas en opposition mais en complémentarité des abattoirs industriels, pour répondre à une autre demande d’une partie de nos concitoyens.

Des agriculteurs dans ma circonscription m’ont fait valoir l’utilité de développer l’abattoir mobile, mais davantage en complément. Les industriels investissent de manière significative pour intégrer le bien-être animal. En dépit de cadences soutenues, si l’outil industriel est bien organisé, les animaux, comme les personnels, peuvent être bien traités.

Il faut se garder de tout débat manichéen, comme vous l’avez posé de façon un peu militante.

Mme Jocelyne Porcher. Je ne veux pas me répéter, mais je pense que si nous en sommes là aujourd’hui, c’est justement parce que dans les abattoirs industriels et dans les abattoirs de proximité – l’abattoir de proximité, et c’est là le problème, est en fait un petit abattoir industriel, avec une organisation du travail similaire – se pose un grave problème d’organisation du travail, de traitement des animaux et de durabilité de l’élevage.

Le choix des éleveurs comme Stéphane, qui ne veulent pas emmener leurs animaux dans les abattoirs – vous dites que le bien-être animal est assuré ; il n’empêche que, pour ces éleveurs, il ne l’est pas de manière suffisante –, met en cause leur rapport à la loi. Ils prennent des risques importants car leur rapport moral aux animaux est plus fort que leur souci de respecter la loi. À ces éleveurs qui font un choix moral très fort en privilégiant le rapport aux animaux, il faut offrir des alternatives ; à défaut, un grand nombre d’entre eux vont disparaître. S’ils ne peuvent plus faire ce qu’ils font, certains arrêteront, ils ne mettront pas leurs animaux à l’abattoir, connaissant la façon dont sont traités leurs animaux.

Les normes de bien-être animal, qui peuvent être respectées dans un grand abattoir industriel, ne suffisent pas pour un éleveur qui veut voir ce qui arrive à ses animaux – il veut pouvoir rentrer dans l’abattoir, accompagner ses bêtes, ne pas les abandonner. Pour les éleveurs, il s’agit d’un enjeu moral. Il en va de même pour les consommateurs qui ne veulent plus ce rapport violent aux animaux ; ils demandent à pouvoir manger de la viande en étant assurés de ne pas être des criminels…

M. le rapporteur. Je ne m’étendrai pas sur l’aspect militant de la démarche. J’ai appris au cours moyen première année que chacun est libre et responsable. Nous sommes ici dans la maison où nous faisons la loi et vous comprendrez que nous ne puissions pas trop commenter le choix militant de ne pas la respecter. Je vais donc me cantonner à l’objet technique de notre audition qui est de réfléchir sur les moyens et la pertinence d’offrir une alternative au modèle de l’abattoir fixe.

Vous avez souligné à juste titre, nous le pensons tous, que l’abattoir mobile permet de supprimer l’étape du transport et les opérations connexes – chargement, déchargement, etc., qui sont par ailleurs soumises à des normes, respectées le plus souvent, parfois non, et contrôlées. Il est certain qu’en supprimant le transport, on supprime un certain nombre d’aléas qui peuvent affecter le bien-être animal. C’est ce qui explique l’intérêt de notre commission pour l’idée de rapprocher l’abattoir du lieu d’élevage.

Vous avez dit, Madame Porcher, qu’on ne peut pas imaginer un policier derrière chaque travailleur pour expliquer les dérives par rapport à la règle relevées dans les abattoirs. Il en va de même pour l’élevage : je suis un élu rural, j’ai une culture agricole et je peux vous assurer qu’il y a aussi des petits élevages dans lesquels les animaux ne sont pas bien traités. Nous sommes bien dans la recherche d’une relation de confiance globale entre un éleveur, un consommateur et plus généralement une société.

Dans le modèle de l’abattoir mobile, on réduit la distance avec l’animal, mais le consommateur reste à 80 % urbain. Le modèle économique que vous développez est celui de la proximité du consommateur qui peut se rapprocher du lieu de production de la viande qu’il va consommer. Ce n’est pas donné à tout le monde. La traçabilité d’un abattoir mobile ne va-t-elle pas connaître une interruption ? Une fois que l’abattoir quitte la ferme avec les carcasses, peut-on rentrer dans le cycle normal de la boucherie classique ou est-on cantonné à une consommation directe ? Est-on limité au circuit court ou peut-on regagner le circuit de la boucherie ? Les volumes ne sont pas du même ordre.

M. Stéphane Dinard. Les deux options sont possibles. Un boucher ou un restaurateur peuvent acheter les carcasses. La viande peut rejoindre le circuit classique, bien sûr.

Mme Jocelyne Porcher. Nous avons discuté avec deux grands bouchers – notamment M. Le Bourdonnec – qui sont très intéressés par l’abattoir mobile dans la mesure où ils sont dans une recherche d’excellence.

M. le rapporteur. Où ce boucher achèterait-il ?

Mme Jocelyne Porcher. Il achète aux éleveurs.

M. le rapporteur. Il achète un animal vivant ?

Mme Jocelyne Porcher. Il achète un animal vivant, mais qui pourrait être tué à la ferme dans un abattoir mobile.

M. Thierry Lazaro. J’éprouve une allergie assez profonde à la grande distribution, mais, comme tout le monde, une partie de ce que je consomme en provient. Nous recevions hier un major de la viande et de l’abattage avec Monsieur Bigard. On est là dans le gigantisme, on ne peut pas le contester, mais cela fait partie de la société.

Je rejoins ce que mon collègue Chevrollier a dit : il y a un côté militant dans votre démarche. Nous ne sommes pas là pour donner des leçons mais pour essayer de se comprendre. Je ne sais pas si le militantisme est la meilleure formule pour convaincre le plus grand nombre.

À l’aube des années 2050, nous serons 70 ou 75 millions de Français. Nous observons une baisse de la consommation de la viande, mais elle sera probablement compensée par la hausse de la population. Le système industriel n’est certainement pas le meilleur mais, de facto, il existe.

L’opposition permanente entre les deux modèles – c’est cela, le militantisme – me chagrine un peu. L’abattoir mobile peut être une des réponses mais il n’est pas l’unique réponse. Notre rôle est d’examiner si les abattoirs répondent au problème qui est le nôtre aujourd’hui, la maltraitance animale. Comme William Dumas le rappelait, des abattoirs petits et moyens contribuent au fonctionnement économique et social de certaines de nos contrées.

Je me demande si, plus qu’une alternative, l’abattoir mobile n’est pas plutôt un complément. Les mentalités évoluent, c’est vrai – je pense aux « vegans » –, mais on est loin d’avoir changé. Pour ce qui me concerne, je suis un amateur de viande, je préfère une viande de qualité, c’est une évidence, je préfère savoir que la bête a bien vécu. Certaines personnes, quel que soit leur parcours, ont un respect profond pour l’animal, mais d’autres pas du tout.

En essayant de mettre de côté l’aspect militant, je voulais savoir si vous ne voyez pas plus un complément qu’une alternative dans l’abattoir mobile.

Mme Jocelyne Porcher. On ne peut pas penser que les systèmes de production industriels des animaux et les abattoirs qui vont avec vont disparaître du jour au lendemain, ni que la majorité de la consommation ne va plus passer par la grande distribution. Nous voudrions pouvoir tester la validité de la solution de l’abattoir mobile en le faisant fonctionner en grandeur réelle dans une région pour recueillir d’autres résultats que ceux des Suédois, des Autrichiens, des Hongrois, des Californiens, obtenus dans un contexte à chaque fois différent. Il faut offrir des alternatives aux différents types de consommateurs : les personnes qui achètent en grande surface, celles qui fréquentent les magasins Biocoop ou celles qui vont chez les producteurs. Il faut que chaque consommateur puisse avoir accès au produit qu’il désire, qui correspond à ses valeurs morales notamment. L’élevage est une question morale.

Je le répète : je défends un point de vue, mais je fais un travail scientifique. Je ne suis pas militante ici. Je sais que cela peut paraître étonnant, mais je défends mes résultats de recherche. Je rapporte ce que m’ont dit les éleveurs et les travailleurs d’abattoir que j’ai rencontrés. Ce n’est pas moi qui le dis ; je ne fais que rendre compte de mon travail de recherche. Je ne suis pas plus militante que mes collègues qui travaillent pour le système industriel. Ils ne sont pas militants, mais moi non plus. Je rapporte ce que j’entends, de ce que je vois et de ce que je comprends. Je suis sociologue. Les résultats en sociologie ne sont pas de même nature qu’en biologie. On entend quelqu’un souffrir, on le reconnaît et on cherche à comprendre pourquoi.

M. Stéphane Dinard. Je suis d’accord avec ce que vient de dire Monsieur Lazaro. À l’heure actuelle, l’abattoir mobile n’est pas en capacité d’absorber la demande industrielle. Trente-quatre millions d’animaux sont abattus chaque année en France, répartis sur moins de 300 abattoirs, de mémoire…

Mme Jocelyne Porcher. Il y a 283 abattoirs.

M. Stéphane Dinard. Ce ne sont pas quelques camions qui y suffiront.

Mme Françoise Dubois. La sociologie n’est pas une science exacte. Comment pouvez-vous évaluer la souffrance ? Estimez-vous que l’animal souffre dans les abattoirs traditionnels ? Cette souffrance est-elle due à la cadence, à l’attente, au transport ? Plusieurs paramètres peuvent expliquer la souffrance de l’animal. Les animaux sont-ils suffisamment réfléchis pour souffrir ?

Mme Jocelyne Porcher. Il faut d’abord distinguer la souffrance et la douleur sur laquelle travaillent mes collègues de l’INRA.

En tant que sociologue, je m’intéresse à la souffrance des humains et des animaux. La souffrance est subjective : face à un même fait, on n’éprouve pas la même souffrance.

Pour penser la souffrance des animaux à l’abattoir industriel, il faut la relier à ce qui se passe en amont, c’est-à-dire à la production industrielle. Pour moi, les animaux souffrent de leur naissance à leur mort dans le système industriel. C’est un système violent qui ne tient aucun compte de la subjectivité des animaux : le seul but est de produire le plus vite possible, le moins cher possible. Les animaux sont maltraités dans le système de production, ils sont toujours maltraités à l’abattoir, mais c’est un seul et même processus.

Mme Françoise Dubois. Peut-être que ces animaux souffrent moins à l’abattage ?

Mme Jocelyne Porcher. Exactement, je l’ai moi-même constaté à l’occasion d’enquêtes auprès des travailleurs d’abattoir ; je regardais un quai de déchargement et j’ai vu une truie assise sur son cul qui regardait ce qui se passait. Tous les animaux étaient comme des piles parce qu’ils venaient d’être déchargés en sortant des élevages industriels. Visiblement, elle n’en sortait pas : elle n’avait pas peur, elle était tout simplement étonnée. Son comportement a changé à partir du moment où le salarié est venu la pousser, sans violence, avec un bâton en plastique, pas un bâton électrique : c’est là qu’elle s’est effrayée. Un animal qui vient de l’élevage de Stéphane et qui se retrouve à l’abattoir est totalement perdu ; il n’a pas été habitué à ce type de relation avec les humains. C’est pour cette raison que les éleveurs sont malheureux d’abandonner leurs animaux, c’est parce qu’ils savent que leur animal va être perdu. Et cette pauvre truie était totalement perdue.

M. Stéphane Dinard. Un animal élevé dans un système industriel n’aura pas le même comportement en arrivant à l’abattoir qu’un animal élevé en plein air. L’animal industriel est habitué à être élevé en milieu clos, il est familiarisé avec la lumière artificielle, il ne va pas être surpris d’arriver sur un quai de déchargement. En outre, ce ne sont pas les mêmes durées d’élevage. Dans mon élevage, un cochon est élevé plus d’un an ; dans le milieu industriel, les délais d’élevage sont beaucoup plus courts. Ils n’ont pas la même vie, donc ils n’ont pas le même comportement à l’abattoir.

Mme Françoise Dubois. Avez-vous pu mesurer une différence de degré dans la souffrance entre une volaille et un porc ou un veau ?

Mme Jocelyne Porcher. Je ne saurais vous répondre ; je suis plutôt spécialiste de la production porcine.

Mme Françoise Dubois. On peut imaginer une différence de souffrance. En outre, l’homme n’a peut-être pas les mêmes rapports avec le mammifère.

Mme Jocelyne Porcher. Les enquêtes que j’ai faites ont montré que le lien affectif avec l’animal est bien plus fort pour les personnes qui travaillent avec des bovins que pour celles qui travaillent avec les porcs. Elles ont plus de patience. Les représentations que les personnes ont de l’animal jouent sur leur comportement. Même en abattoir, les travailleurs que j’ai interrogés étaient très proches des animaux ; ils aimaient cette proximité, certains disaient qu’ils aimaient l’odeur des bovins. C’est assez dur à comprendre, mais ces personnes étaient en abattoir parce que c’était le lieu où elles pouvaient travailler avec des animaux, même s’il fallait les tuer.

Mme Sylviane Alaux. Tout dépend du lien qu’on établit avec l’animal. À la télévision, j’ai vu un éleveur de porcs qui avait un rapport avec eux similaire à celui qu’on établit avec un chien ; il leur donnait des noms, les porcs venaient à l’appel de leur nom, ils se laissaient caresser. Tout de même, il exagère, me disais-je, dire qu’après, il va les tuer ! Mais je n’ai pas d’états d’âme quand la côtelette est dans mon assiette… Tout cela repose finalement sur une certaine hypocrisie.

Mme Jocelyne Porcher. Les enquêtes montrent cette complexité de l’élevage : les éleveurs ont une relation affective avec les animaux mais ils savent que le bout du travail, non pas le but, c’est de les tuer. Dans les enquêtes que je réalise actuellement auprès des éleveurs, je note une forte demande de leur part de revenir sur des choses qui ont été imposées par l’industrialisation de l’élevage, comme le choix des races, notamment pour augmenter l’espérance de vie. Les cochons de Stéphane sont abattus au bout d’un an ; en système industriel, c’est cinq mois et demi…

La relation à l’animal en élevage se définit à la fois par la proximité, mais aussi par une certaine distance : si on aime trop les animaux, on ne peut plus les tuer. Les animaux préférés des éleveurs ne vont pas à l’abattoir, ils meurent à la ferme. Cela demande un travail sur soi.

M. le président Olivier Falorni. Votre relation est-elle différente avec les porcs et avec les vaches ?

M. Stéphane Dinard. J’ai la même affection pour les deux. J’ai choisi de travailler avec ces animaux-là parce que ce sont ceux que je préfère. Je ne suis pas particulièrement attiré par les chèvres : je n’aurai pas pu élever des chèvres pour faire du fromage. J’aime bien les cochons, je m’entends bien avec eux. C’est la même chose avec les vaches. Mon comportement avec les vaches et les cochons n’est pas différent, j’accorde autant de temps aux uns et aux autres, je fais en sorte de leur donner tout ce dont ils ont besoin pour être élevés dans de bonnes conditions. Un cochon est un animal aussi intelligent qu’un chien, il se domestique très facilement, vous pouvez l’emmener en promenade avec vous. C’est la même chose avec les vaches. Ensuite, il faut composer avec le caractère des animaux : ils sont plus ou moins proches de moi. Pour les vaches, il y a une hiérarchie dans le groupe.

Mme Sylviane Alaux. Combien de vaches et de porcs élevez-vous ?

M. Stéphane Dinard. J’élève une douzaine de vaches et une vingtaine de porcs. C’est une petite structure mais c’est le fait de ma situation.

M. le président Olivier Falorni. Votre témoignage est assez fort. On sent le lien d’affection qui vous unit à vos animaux, presque similaire à celui qu’on peut avoir avec un animal domestique ; mais, on l’a dit, la finalité est différente. Ceux qui ont un animal domestique ont tous été confrontés à la nécessité de le faire piquer quand la douleur est trop forte, c’est une vraie souffrance. Comment avez-vous « domestiqué » la rupture de ce lien affectif ? Le déchirement est-il atténué au fil des ans ? Vous créez un lien d’affection avec vos animaux tout en sachant que vous les élevez pour qu’ils soient mangés et tués. C’est une situation un peu paradoxale, même si elle est parfaitement compréhensible : c’est votre métier, vous avez un lien d’affection avec vos animaux, et tant mieux, c’est une garantie de leur bien-être. Néanmoins, comment appréhendez-vous avec le temps le moment du départ, de la mise à mort ? Peut-on parler d’une forme d’habitude ?

M. Stéphane Dinard. Je ne me dédouane pas, je sais que la finalité est celle-là, que les animaux devront être abattus pour la consommation de leur viande. Je m’impose que cela se passe dans les meilleures conditions pour eux. Cette étape-là, je la vis, mais eux ne doivent pas s’en apercevoir. Il faut que ce soit le plus instantané possible, qu’ils ne voient pas ce qui leur arrive. Je l’assume, cela fait partie de mon travail.

Vous parliez d’hypocrisie. Je pense qu’aujourd’hui, les gens se sont en quelque sorte dédouanés de leur alimentation. Ils ne savent plus d’où elle vient, comment elle est produite ; ils viennent au salon de l’agriculture, mais cela ne va pas plus loin. Le métier d’éleveur consiste à bien élever l’animal, mais aussi à lui donner la mort. J’en suis totalement conscient, j’assume cette finalité. Les gens ont oublié ce qu’il se passe entre l’animal qu’ils voient dans le pré et le morceau de viande qu’ils consomment dans leur assiette. Et s’ils sont choqués, c’est parce qu’ils ne sont plus du tout connectés à cette réalité.

Mme Sylviane Alaux. Un animal domestique, c’est un compagnonnage de dix ou quinze ans. Pour vos porcs, ce n’est qu’un an.

M. Stéphane Dinard. C’est un an, parce que j’achète des petits sevrés. Cette année, j’ai décidé de faire naître sur place ; donc je vais garder des truies. Mais mes vaches passent une dizaine d’années sur la ferme à faire des veaux.

Mme Jocelyne Porcher. Un des intérêts du point de vue de la relation aux animaux de l’abattoir mobile est de laisser du temps à cette rupture du compagnonnage avec l’animal. Beaucoup d’éleveurs – je ne sais si c’est le cas de Stéphane – se mettent dans un état mental particulier au moment de tuer l’animal ; j’en connais qui récitent des poèmes ; d’autres se posent pour réfléchir à ce qu’ils se préparent à faire. C’est le contraire de tuer les animaux sans y penser. Il s’agit de donner la mort. Les éleveurs ont donné la vie, ils doivent donner la mort. Mais donner la mort, ce n’est pas l’infliger ni tuer les animaux sans y penser. L’abattoir mobile permet justement de prendre le temps de penser à ce qu’on fait.

M. le président Olivier Falorni. Madame, Monsieur, je vous remercie de vos interventions et de vos témoignages.

La séance est levée à dix heures quarante.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission d’enquête sur les conditions d’abattage des animaux de boucherie dans les abattoirs français

Réunion du jeudi 16 juin 2016 à 9 heures

Présents. - Mme Sylviane Alaux, M. Jean-Luc Bleunven, M. Jean-Yves Caullet, M. Guillaume Chevrollier, Mme Françoise Dubois, M. William Dumas, M. Olivier Falorni, M. Thierry Lazaro, M. Hervé Pellois, M. François Pupponi

Excusé. - M. Christophe Bouillon, M. Arnaud Viala