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Commission d’enquête visant à évaluer les conséquences sur l'investissement public et les services publics de proximité de la baisse des dotations de l'État aux communes et aux EPCI

Mercredi 16 septembre 2015

Séance de 18 heures 

Compte rendu n° 18

Présidence de M. Alain FAURÉ, Président

Audition, ouverte à la presse, de M. Bruno Delsol, directeur général des collectivités territoriales, accompagné de Mme Françoise Taheri, sous-directrice des finances locales et de l’action économique, de M. François Lafond, chef du bureau des concours financiers de l’État et de M. Michel Duée, chef du département des études et des statistiques locales.

L’audition débute à dix-huit heures cinq.

M. le président Alain Fauré. Notre après-midi s’achève avec l’audition de M. Bruno Delsol, directeur général des collectivités territoriales, à qui je souhaite la bienvenue, ainsi qu’aux personnes qui l’accompagnent.

D’emblée, je précise que cette audition est spécifiquement consacrée à la péréquation et que nous serons amenés à recevoir à nouveau monsieur Delsol le 30 septembre, pour évoquer, cette fois, le thème des rigidités et des marges budgétaires des collectivités dans le contexte contraint par la baisse des dotations de l’État.

Monsieur le directeur général, nous sommes peut-être à la veille d’une opportunité historique. La péréquation est fondée sur des faisceaux de critères qui se croisent et s’entrecroisent ; elle a une double dimension, verticale et horizontale, pas toujours bien articulée. Ce système apparaît bousculé par la baisse des dotations de l’État, et la plupart des interlocuteurs de la commission d’enquête ont fait part de leur désir qu’en soient corrigés les défauts et améliorée l’efficacité. La contrainte financière rend moins supportable le statu quo et libère peut-être la parole.

Alors que se prépare une réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF), que le Gouvernement ambitionne de rendre « plus lisible et plus juste », un débat peut s’ouvrir : est-il vraiment judicieux de lancer une telle réforme, alors qu’il n’y a pas de grain à moudre, avec le risque de ne faire que des perdants et des « perdants-perdants » ? Est-il, au contraire, indispensable de le faire pour préserver les collectivités objectivement les plus fragiles des conséquences les plus douloureuses de la baisse des dotations de l’État ?

La réponse à cette dernière problématique est évidemment assez politique. Pour autant, la Direction générale des collectivités locales (DGCL) est à la manœuvre sur les chantiers de la péréquation, et c’est pourquoi nous allons vous écouter avec toute l’attention que mérite le sujet.

Avant de vous laisser la parole, je vais vous demander, conformément aux dispositions de l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958, de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité.

(M. Bruno Delsol et Mme Françoise Taheri prêtent successivement serment.)

M. Bruno Delsol, directeur général des collectivités territoriales. Nous avons cherché à savoir dans quelle mesure la péréquation atténuait les effets de la baisse des dotations pour certaines catégories de communes ou d’intercommunalités.

Permettez-moi, au préalable, de rappeler les principales composantes de la péréquation. Un premier bloc, appelé « péréquation verticale », se trouve au sein de la DGF. Il est constitué de la dotation de solidarité urbaine (DSU), qui augmente, en 2015, de 180 millions d’euros, de la dotation de solidarité rurale (DSR), qui augmente, en 2015, de 117 millions d’euros, de la dotation nationale de péréquation (DNP), qui augmente de 10 millions d’euros, et des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle, qui, quant à eux, restent stables.

D’autres leviers de péréquation, appelés « péréquation horizontale », se trouvent en dehors de la DGF. Il s’agit du Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC), qui a augmenté, en 2015, de 210 millions d’euros, et du Fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France (FSRIF), qui augmente, en 2015, de 20 millions d’euros. On parle, au sujet de ces fonds, de péréquation horizontale, car ils sont financés par prélèvement sur les ressources des communes ou des intercommunalités contributrices.

La péréquation a augmenté en 2015. Cette augmentation est financée en partie par ce que l’on appelle les variables d’ajustement et en partie en interne à la DGF. Cette année, cela a été « moitié-moitié ». Par conséquent, la progression de la péréquation verticale a été financée, pour 50 %, en interne à la DGF. Ce financement a fait l’objet d’un écrêtement sur la dotation forfaitaire des communes dont le potentiel fiscal par habitant est supérieur à 75 % de la moyenne nationale. Autrement dit, le financement de la péréquation est fait lui-même selon des modalités péréquatrices.

En ce qui concerne le FPIC, 730 territoires sont contributeurs nets et 1 246 sont bénéficiaires nets – sachant que certains territoires peuvent à la fois contribuer et recevoir. En 2015, 48 % des territoires sont assujettis à un prélèvement au titre du FPIC et 59 % reçoivent une attribution, ce qui fait 57 % de bénéficiaires nets.

Nous nous sommes demandé quel était l’impact de la péréquation face à la baisse des dotations par catégorie de collectivités, et d’abord par taille.

Nous prenons en considération la taille des territoires puisque le FPIC est, en première échéance, payé ou perçu par l’ensemble constitué par l’EPCI à fiscalité propre et ses communes membres. Si l’on observe l’impact par strate, la méthode consiste à comparer la baisse de la DGF avant l’intervention de la péréquation horizontale et après la progression de la péréquation horizontale, le tout rapporté aux recettes réelles de fonctionnement de 2013. La moyenne sera de moins 1,9 %, soit le rapport entre la baisse de la DGF en 2015 et les recettes réelles de fonctionnement, toutes communes et EPCI confondus.

Pour les territoires de moins de 10 000 habitants, la baisse est de 1,45 % avant péréquation horizontale et de 1,42 % après péréquation horizontale. Il y a donc, même s’il s’agit d’un faible pourcentage, un écart favorable aux territoires de moins de 10 000 habitants. Il est également favorable pour les territoires de 10 000 à 20 000 habitants et ceux de 20 000 à 50 000 habitants, mais défavorable pour ceux de 50 000 à 100 000 habitants. L’écart redevient favorable pour les territoires de 100 000 à 200 000 habitants, mais défavorable pour ceux de plus de 200 000 habitants. L’effet atténuateur joue donc surtout en dessous de 50 000 habitants.

Nous avons également fait un calcul en fonction des strates de potentiel fiscal par habitant, qui est un indicateur de richesse, en retenant les quatre quarts du classement. Pour les territoires du premier quart, la baisse de la DGF par habitant est de 1,07 % avant l’intervention de la péréquation, et de 0,53 % après. L’effet de la péréquation efface donc la moitié de la baisse de la DGF. Comme le tout se passe à enveloppe fermée, l’effet est contraire dans le quart des territoires les plus riches, pour lesquels la baisse spontanée est de 2,17 % mais de 2,39 % après péréquation.

Parmi les communes les plus concernées par la péréquation, nous nous sommes concentrés sur les éligibles à la DSU cible et à la DSR cible, c’est-à-dire les communes les plus pauvres au regard des indicateurs de richesse retenus pour définir la DSU et la DSR. Pour les communes éligibles à la DSU cible en 2015, la péréquation a ramené leur contribution au redressement des finances publiques du niveau spontané de 1,84 % de leurs recettes réelles de fonctionnement – soit un niveau proche de la moyenne nationale –, à 0,3 %. Si, en outre, l’on tient compte du FPIC, l’effort net demandé à ces communes est de 0,04 %. On peut donc dire, au moins pour les communes éligibles à la DSU cible, que la péréquation a considérablement réduit la contribution réelle au redressement des finances publiques et l’a même presque annulée. Sur les 280 communes éligibles à la DSU cible, 120 connaissent une baisse effective de leur DGF, ce qui veut dire que les autres connaissent hausse ou stabilité en la matière. Les données ne sont pas très différentes pour les communes éligibles à la DSR cible. Compte tenu de la péréquation verticale et du FPIC, les attributions totales de ces communes sont en hausse en 2015 par rapport à 2014. Ces catégories de communes ne sont certes pas représentatives de l’ensemble des communes, mais l’examen de leur cas permet de comprendre dans quelle mesure la péréquation peut atténuer l’effort pour les communes les plus pauvres.

Un autre de nos sujets d’étude a porté sur la cohérence des divers dispositifs de péréquation.

La péréquation verticale et la péréquation horizontale procèdent du même esprit, mais ne fonctionnent pas selon les mêmes mécanismes. Par conséquent, les gagnants à la DSU et les gagnants au FPIC ne sont pas forcément les mêmes. Nous avons cherché à savoir s’il résultait des contradictions de ces différences ou si le paysage était cohérent dans l’ensemble.

Globalement, les 280 communes éligibles à la DSU cible sont bénéficiaires nettes du FPIC à hauteur de 83 millions d’euros ; 225 sont bénéficiaires nettes, mais 24 sont contributrices nettes. Autrement dit, 24 communes bénéficiaires de la DSU cible – donc présumées figurer parmi les plus pauvres – contribuent au FPIC plus qu’il ne leur est reversé. Pour ces 24 communes, une question se pose. Quant aux 10 000 communes éligibles à la DSR cible, elles sont bénéficiaires du FPIC à hauteur de 127 millions d’euros, et 641 d’entre elles sont contributrices nettes au FPIC. Ce qui peut sembler une contradiction touche en fait une minorité puisque 8 400 environ de ces communes, soit 84 %, sont bénéficiaires nettes du FPIC. Cela étant, les communes concernées y voient une injustice.

S’agissant de l’avenir, je serai bref, car le sujet est très bien documenté dans le rapport de madame Pires Beaune.

J’évoquerai d’abord la question récurrente des communes pauvres dans des EPCI riches. Si l’EPCI est riche, la commune bénéficie des services et des infrastructures portés par l’établissement public, ainsi que, éventuellement, de la dotation de solidarité communautaire ou d’une répartition péréquée des attributions de compensation si l’EPCI et les communes en ont décidé ainsi. Telle est la réponse que nous faisons aux maires, qui nous répondent à leur tour que, par malchance, leur EPCI ne fait pas tout cela. Il faut donc trouver une solution. Nous avons chiffré le report de contributions vers l’EPCI d’appartenance, qui s’élèverait à 33 millions d’euros pour la DSU et à 0,6 million pour la DSR cible, soit au total environ 34 millions. Il reste à apprécier si, par rapport au problème qu’il s’agit de régler, cette dépense est raisonnable.

Autre sujet sur la table : faut-il cibler davantage les dotations de péréquation ? Aujourd’hui, 35 677 communes bénéficient d’au moins une dotation de péréquation au sein de la DGF : DSU, DSR, dotation nationale de péréquation ou dotation affectée aux communes d’outre-mer. Autrement dit, 97 % des communes bénéficient de la péréquation. Plus précisément, 75 % des communes de plus de 10 000 habitants sont éligibles à la DSU et 98 % des communes de moins de 10 000 habitants sont éligibles à la DSR. On peut se demander s’il faut resserrer les conditions d’attribution des dotations de péréquation.

Les effets de seuil figurent aussi parmi les thèmes d’interrogation pour l’avenir. La DSU cible est attribuée, au regard des indicateurs de richesse, aux 250 premières communes de plus de 10 000 habitants et aux 30 premières communes de moins de 10 000 habitants. Il y a donc un effet de seuil caractérisé suivant que l’on occupe la deux cent cinquantième ou la deux cent cinquante et unième place. La question peut se poser de remplacer le phénomène de seuil par un mécanisme de pente, qui accentuerait la péréquation pour les communes les plus pauvres.

M. le président Alain Fauré. On peut se demander s’il est bien raisonnable, surtout au regard des sommes allouées à certaines d’entre elles, que 97 % des communes bénéficient de la péréquation, et s’il n’y aurait pas lieu de se pencher sur ce mode de fonctionnement alambiqué. Les communes sont grandement irritées par notre système, souvent incompréhensible et illisible ; et quand s’y ajoute une diminution des dotations, cela ne facilite pas les choses ! Chacun convient aussi qu’il faut mettre de l’ordre au plus vite dans la fiscalité des collectivités.

M. Nicolas Sansu, rapporteur. L’objet de cette commission d’enquête est d’appréhender les conséquences des baisses des dotations au bloc communal sur l’investissement public et les services publics de proximité. Sur ces baisses de dotations, qui sont décidées par l’exécutif et par le législateur, ce n’est pas votre avis que nous recherchons, mais des éclairages sur les recommandations qui pourraient être faites.

Votre exposé était très clair, mais extrêmement ciblé. Sur les quelque 37 000 communes, plus les EPCI, les communes bénéficiaires de la DSU cible sont peu nombreuses et celles qui sont éligibles à la DSR cible très nombreuses, mais ne représentent que peu d’habitants.

Vous nous avez expliqué que les collectivités des strates qui bénéficient aujourd’hui de la DSU, mais moins de la péréquation globale, sont celles qui devraient en bénéficier le plus ; que les communes de moins de 50 000 habitants avaient finalement touché un peu plus que si la baisse de dotation s’était appliquée de manière uniforme. Plusieurs intervenants nous ont dit que, précisément, les villes de 10 000 à 50 000, voire de 10 000 à 100 000 habitants, étaient celles qui auraient le plus de mal à absorber le choc de la baisse des dotations. Ne faut-il pas envisager de modifier les règles de la péréquation pour tenir compte du choc à absorber ?

La question est la même pour d’autres mécanismes péréquateurs, tel le Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), qui est un mécanisme fort de remboursement de l’État et qui bénéficie davantage aux collectivités ayant la capacité d’investir. En cela, il est presque générateur d’inégalités puisqu’une collectivité qui a les moyens d’investir touchera plus, et donc, aura encore plus les moyens d’investir.

Nous avons prévu des déplacements dans les territoires, et il nous serait très utile d’avoir des données de la DGCL les concernant. Si vous en êtes d’accord, monsieur Delsol, nous vous ferons parvenir un questionnaire écrit.

S’agissant de l’investissement, nous avons eu un débat sur la consommation de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) et sur l’enveloppe supplémentaire annoncée. Avez-vous aujourd’hui plus de remontées des préfectures concernant cette consommation ?

M. Bruno Delsol. Il est exact que la DSU cible et la DSR cible bénéficient à une minorité de communes. Il nous a paru intéressant de montrer que, dans ces cas limites, la baisse des dotations se trouvait quasiment effacée. Il serait sans doute possible de démontrer techniquement que plus on est haut dans le classement de la pauvreté, plus le choc se trouve atténué.

Pour l’année prochaine, la question est bien celle que vous avez posée : comment atténuer le choc ? Il faudra aussi s’interroger sur la poursuite de la croissance de la péréquation. Les dotations de péréquation ont progressé à un rythme élevé ces dernières années, alors même que la courbe générale de la DGF s’est inversée, passant d’une hausse dynamique à une hausse moindre, puis à la stabilité, et enfin, à la baisse. Je ne crois pas trahir de secret en disant que l’intention du Gouvernement est de poursuivre l’effort de péréquation en 2015, mais je ne peux pas en dire plus tant que le projet de loi de finances n’est pas présenté.

En ce qui concerne les inégalités par strates, je me permets de citer le rapport de Mme Pires Beaune. Il y a une forte attente des communes-centre en ce qui concerne la compensation de leurs charges de centralité, et des communes rurales quant à leurs charges de sous-densité. Les communes rurales critiquent le système qui fait que la dotation de base rapportée au nombre d’habitants est une fonction croissante de la population.

Les inégalités sont moins marquées entre strates qu’à l’intérieur de chacune des strates, ce que le rapport démontre de façon frappante. Il y a des inégalités considérables à l’intérieur des strates, que l’on n’arrive à expliquer ni par la richesse ni par les charges. La raison est évidente : la DGF comporte une partie de composantes dites « figées », héritées de fiscalités disparues, qui sont représentatives des recettes d’autrefois et non des besoins d’aujourd’hui. C’est l’un des sujets qui sont sur la table dans le débat sur la réforme de la DGF.

Quant au FCTVA, il n’a aucune vertu péréquatrice. D’intenses débats se sont d’ailleurs développés, il y a cinq ou six ans, pour savoir s’il fallait le remplacer par une dotation. Les choses en sont restées là, car on s’est rendu compte que le FCTVA était perçu par une majorité de maires comme une sorte de remboursement de la TVA. Même si c’est inexact d’un point de vue strictement juridique, c’est une conception si fortement ancrée dans les esprits qu’il ne semblait pas réaliste de s’en détacher.

En revanche, le FCTVA est très lié à l’investissement. En 2015, son taux a été augmenté pour soutenir l’investissement local. Cette augmentation a été financée hors enveloppe fermée des concours de l’État aux collectivités, c’est-à-dire qu’elle n’a pas été payée par les autres collectivités.

Le Gouvernement a annoncé, à l’issue du conseil des ministres de ce matin, qu’il proposerait au Parlement de rendre éligibles au FCTVA les dépenses d’entretien des bâtiments. L’impact de cette nouvelle mesure en année pleine est estimé à 170 millions d’euros. L’impact pour 2016 reste à chiffrer ; il serait de l’ordre de quelques dizaines de millions. Le FCTVA est versé, selon les collectivités, l’année de la dépense, l’année suivante ou encore l’année d’après, c’est pourquoi il faut trois ans pour que la mesure ait son plein effet.

En ce qui concerne la DETR, l’enveloppe a été majorée l’an dernier de 200 millions, c’est-à-dire un tiers. J’étais, il y a encore quelques jours, préfet dans un département rural ; je peux vous dire que ces 33 % supplémentaires ont vraiment fait du bien ! Les autorisations d’engagement ont été déléguées à 100 % et, en engagements, le taux de consommation est à ce jour de 72 %, contre 67,8 % l’année dernière à la même époque, l’objectif étant d’atteindre 100 % à la fin de l’année. C’est donc un taux de consommation très dynamique. Peut-être faut-il y voir le contre-choc du cycle électoral, après la pause que les communes marquent habituellement dans leurs investissements l’année des élections et l’année suivante. En 2014, la baisse a été plus forte que d’habitude ; il est trop tôt pour dire si 2015 sera l’année du contre-choc, mais la DETR donne un signal plutôt positif. En matière de crédits de paiement, le taux de consommation des crédits délégués est de 67 %, contre 63 % l’an dernier. On consomme donc sensiblement mieux que l’année dernière. Je précise que la DETR est un crédit toujours bien consommé grâce à une gestion particulièrement vigilante de la part de mes équipes qui veillent à ce que les préfectures consomment bien les crédits de paiement et les répartissent en fonction de la consommation réelle. La gestion à flux tendus est un enjeu très intégré par les préfectures afin que l’argent du contribuable ait son plein effet.

M. le président Alain Fauré. Si vous avez des pourcentages précis de consommation pour chacun des départements sur les cinq ou six dernières années, il nous intéresserait d’en disposer. Nous pourrions ainsi voir si les revendications de certains territoires sont fondées.

La péréquation n’a pas forcément pour objet d’absorber la baisse des dotations aux collectivités qui a, à mon sens, deux objectifs : d’une part, susciter une réflexion sur l’optimisation des dépenses – prévention des gaspillages, réorientation de l’argent dans des projets indispensables plutôt que dans d’énièmes zones d’activité industrielle ou artisanale où les entreprises ne viennent pas ; d’autre part, inciter à faire des efforts sur les budgets de fonctionnement pour permettre d’investir, comme tout élu en a la volonté. Y a-t-il eu, ces dernières années, une augmentation avérée des budgets de fonctionnement des collectivités, notamment des communes et des intercommunalités ? Si oui, dans quels domaines avez-vous observé ces augmentations ?

M. Bruno Delsol. En ce qui concerne les enjeux de la péréquation, je ne peux pas m’engager à porter une appréciation politique, mais il est évident qu’il s’agit de justice. Quand les dotations augmentent, l’augmentation doit être répartie équitablement ; quand elles diminuent, il est peut-être encore plus important que la baisse soit répartie équitablement.

En ce qui concerne le lien entre péréquation et efficacité, un rapport ancien de Gilles Carrez a démontré que la dépense locale était très largement corrélée à la recette, d’un point de vue comptable, bien sûr, mais aussi économique. Réciproquement, la péréquation a un effet vertueux sur la dépense locale puisqu’elle enlève de l’argent à des collectivités qui dépensent peut-être plus que de besoin, et en attribue à des collectivités qui sont peut-être en « sous-dépense ». On peut en déduire que la péréquation n’a pas seulement des vertus en termes de justice, elle en a aussi en termes d’efficacité économique.

S’agissant de vos diverses demandes de chiffres, j’indique que le rapport de l’Observatoire des finances locales fait état de données très développées.

M. le président Alain Fauré. Vous nous les communiquerez lors de votre prochaine audition.

Mme Christine Pires Beaune. Je suis tout à fait d’accord avec le constat que vous faites sur le saupoudrage de la DSU et de la DSR, ainsi que sur l’effet positif de la péréquation ; c’est celui que nous avons dressé, avec Jean Germain, dans notre rapport. La péréquation est faite pour atténuer les écarts de richesse au regard des charges de chaque collectivité, pas pour atténuer la baisse des dotations. Ce n’est pas son objectif, pourtant c’est ce que nous constatons.

Nous attendons un rapport sur le FPIC. Il serait bon que nous en disposions le plus rapidement possible pour pouvoir mesurer, notamment, les effets contre-péréquateurs ou surpéréquateurs entre les différents fonds et éventuellement procéder à des ajustements concernant les communes pauvres au sein de territoires riches, ou l’inverse, même si l’enjeu financier peut paraître faible au regard du montant global du FPIC. Il me semble nécessaire d’aller au bout de la trajectoire du FPIC puisqu’il reste une « marche » à monter.

M. le rapporteur. Vous avez dit, monsieur Delsol, que l’augmentation du FPIC provenait pour moitié des variables d’ajustement.

M. Bruno Delsol. Il s’agit de l’augmentation de la péréquation verticale, c’est-à-dire de la DSU, de la DSR et de la DNP. L’augmentation du FPIC est hors DGF, et donc, financé par un prélèvement sur les recettes.

M. le rapporteur. Mais vous avez dit que l’autre moitié de l’augmentation était prise sur la DGF. On peut donc dire qu’il s’agit de péréquation « verti-horizontale »…

J’ignore s’il y aura, en 2016, une augmentation de la péréquation verticale. Or cette verticalité est une préoccupation majeure pour les collectivités locales, et la péréquation horizontale est de plus en plus difficile à faire passer. Et je ne vous parle pas du FSRIF, qui va valoir des nuits de travail à l’Assemblée, avec des maires de la couronne parisienne qui sortent, au dernier moment, le petit amendement qui peut contribuer à résoudre leurs difficultés…

M. Bruno Delsol. Il est exact que de nombreux élus contestent l’expression « péréquation verticale » en disant que c’est toujours leur argent qui tourne.

En ce qui concerne la part de péréquation verticale qui sera financée en interne à la DGF en 2016, la réponse relève du projet de loi de finances. Une autre question importante concernera le niveau de progression du FPIC. La loi de finances pour 2012 qui a instauré ce fonds avait fixé un objectif pluriannuel de progression. Jusqu’à présent, sauf erreur de ma part, cet objectif a été suivi. Bien entendu, cet objectif ne contraint pas le législateur, car la loi en question n’est pas supérieure à celle qui vous sera soumise dans quelques semaines. Puisque c’est la dernière année de l’application de la loi de 2012, la question se pose de savoir s’il faut franchir cette marche ou échelonner davantage, la dernière marche de l’escalier étant plus haute que les précédentes.

Mme Françoise Taheri, sous-directrice des finances locales et de l’action économique. Les hausses adoptées au cours des différentes lois de finances prévoyaient une progression des ressources du FPIC équivalente à 210 millions d’euros par an. Il était prévu que les ressources du FPIC seraient équivalentes à 1,115 milliard, soit 2 % des recettes fiscales agrégées. Les discussions des groupes de travail du Comité des finances locales (CFL) de l’été ont montré que la marche était effectivement supérieure à celle franchie chaque année depuis la création du FPIC.

M. le président Alain Fauré. Ce qui, dans le FPIC, est injuste et cause tant d’incompréhensions, c’est la notion de commune pauvre incluse dans une communauté riche et vice versa. Certes, les collectivités devraient pouvoir s’entendre entre elles, mais tant que nous n’imposerons pas une seule et même fiscalité sur un territoire ou des compensations dans les statuts, nous n’y arriverons pas.

Je ne sais plus à quoi font référence les augmentations dont vous avez parlé dans votre présentation, de 210 millions et 20 millions…

M. Bruno Delsol. Il s’agit d’une augmentation de 210 millions pour le FPIC et de 20 millions pour le FSRIF.

Mme Christine Pires Beaune. Avez-vous des éléments de calendrier à nous communiquer sur le rapport à venir ?

Mme Françoise Taheri. La loi prévoit que le Gouvernement remet au Parlement, le 1er octobre, un rapport sur le FPIC. Nous y travaillons et le rapport sera remis à temps.

Mme Christine Pires Beaune. En plus de souhaiter la bienvenue au nouveau directeur général des collectivités, je tiens à lui dire que ce fut un plaisir de travailler avec ses services.

M. le rapporteur. Pour ma part, je redis que nous vous adresserons un questionnaire précis pour avoir toutes les données chiffrées nécessaires à l’établissement d’un rapport le plus documenté possible.

M. le président Alain Fauré. Pour votre prochaine audition, le 30 septembre, je vous suggère de nous envoyer par avance les documents sur lesquels vous vous appuierez afin que nous puissions nous préparer un peu plus précisément.

Je vous remercie pour votre participation à nos travaux.

L’audition s’achève à dix-neuf heures cinq.

Membres présents ou excusés

Commission d’enquête visant à évaluer les conséquences sur l'investissement public et les services publics de proximité de la baisse des dotations de l'État aux communes et aux EPCI

Réunion du mercredi 16 septembre 2015 à 18 heures.

Présents. – M. Éric Alauzet, M. Olivier Audibert Troin, M. Jean-Luc Bleunven, M. Alain Calmette, M. Alain Fauré, M. Jean-Marc Fournel, M. Laurent Furst, Mme Marie-Lou Marcel, Mme Christine Pires Beaune, Mme Régine Povéda, M. Nicolas Sansu, M. Claude Sturni.

Excusés. – M. François de Mazières M. Martial Saddier.