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Commission des affaires culturelles et de l’éducation

Mardi 18 décembre 2012

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 18

Présidence de M. Patrick Bloche, président

– Audition, ouverte à la presse, de Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l’éducation nationale chargée de la réussite éducative, sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à abroger la loi n° 2010-1127 du 28 septembre 2010 visant à lutter contre l’absentéisme scolaire (n° 333) (Mme Sandrine Doucet, rapporteure)

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mardi 18 décembre 2012

La séance est ouverte à seize heures quinze.

(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la Commission)

——fpfp——

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation auditionne Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l’éducation nationale chargée de la réussite éducative, sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat, tendant à abroger la loi n° 2010-1127 du 28 septembre 2010 visant à lutter contre l’absentéisme scolaire (n° 333) (Mme Sandrine Doucet, rapporteure).

M. le président Patrick Bloche. Nous avons le plaisir d’accueillir Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative.

Notre Commission examinera demain matin le rapport de Mme Sandrine Doucet sur la proposition de loi tendant à abroger la loi du 28 septembre 2010 relative à la lutte contre l’absentéisme scolaire. Cette proposition de loi de la sénatrice Françoise Cartron a été adoptée par le Sénat le 25 octobre dernier. La Conférence des présidents de notre Assemblée a prévu que son examen en séance publique aurait lieu le 16 janvier prochain.

Je remercie Mme Sandrine Doucet d’avoir mené ses travaux dans des délais très brefs. Avant que nous n’examinions son rapport, il nous a paru indispensable de vous entendre, madame la ministre, pour connaître la position du gouvernement vis-à-vis de ce texte.

Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée auprès du ministre de l'éducation nationale, chargée de la réussite éducative. La proposition de loi de Mme Françoise Cartron vise à créer un nouvel outil de lutte contre l’absentéisme scolaire en supprimant le dispositif mis en place après l’adoption en 2010 de la proposition de loi de M. Éric Ciotti, qui prévoit notamment des sanctions de suspension et de suppression des allocations familiales. Ce texte d’origine sénatoriale vous est présenté avant le projet de loi pour la refondation de l’école et procède de la même logique : permettre la réussite de tous et aider les élèves et les familles sans stigmatiser personne.

Si nous sommes favorables à la suppression du dispositif « Ciotti », c’est d’abord parce qu’il ne fonctionne pas. À certains égards, il est même contreproductif tant la réponse qu’il propose est inadaptée.

Pour nous, l’absentéisme est le plus souvent le symptôme d’une situation sociale difficile touchant en particulier les mères célibataires qui peinent à suivre l’éducation de leurs enfants. Il est la première étape d’un chemin qui mène au décrochage scolaire et à l’exclusion sociale.

Alors que l’égalité fait partie de la devise de notre pays et que notre système scolaire vise l’égalité entre les enfants, on constate que les résultats scolaires sont étroitement corrélés à la situation socioéconomique des parents. L’école républicaine ne parvient pas à combler ce déficit, au contraire : les écarts mesurés entre les enfants au niveau du cours préparatoire s’accroissent en cours moyen et sont encore plus élevés en classe de troisième. Au lieu de combler ou de corriger les écarts de départ, l’éducation nationale les laisse se creuser.

Le nombre d’élèves « décrocheurs » est très important : environ 150 000 par an. Ce sont les enfants des quartiers populaires qui sont frappés et il est très difficile de les ramener dans un processus d’apprentissage alors qu’ils ont eu le sentiment de ne pas avoir trouvé leur place à l’école et ne pas avoir su faire face aux exigences pour acquérir les fondamentaux.

De plus en plus d’enfants sont en souffrance à l’école et finissent par s’esquiver, par s’en aller sur la pointe des pieds. Face à cela, qu’affirme le dispositif « Ciotti » ? Que les parents sont irresponsables, qu’ils ne s’occupent pas de leurs enfants, et qu’il faut les sanctionner en menaçant de suspendre les allocations familiales s’ils ne parviennent pas à les remettre dans le droit chemin.

Cette conception repose sur une erreur d’analyse de départ. En effet, ce ne sont pas les plus jeunes, ceux que les parents doivent amener à l’école tous les jours, qui forment l’effectif principal des absentéistes et des décrocheurs : ce sont les adolescents, et même les grands adolescents de seize ans qui, étant sortis du collège, se sentent « largués ». Beaucoup sont élèves en lycée professionnel mais ne sont pas satisfaits de l’orientation qu’on leur a proposée ou qu’ils ont choisie. À seize ans, il arrive souvent que l’on ne sache pas grand-chose du métier vers lequel on se dirige !

Bref, la « loi Ciotti » est non seulement injuste, inefficace et démagogique, mais elle porte une vision de l’absentéisme sans rapport avec la réalité que les chiffres dont nous disposons font ressortir.

De plus, il laisse de côté un tiers des élèves, ceux dont les familles sont affiliées à la Mutualité sociale agricole ou ne touchent pas d’allocations familiales parce qu’elles ne comportent qu’un enfant. Dans ce dernier cas, il s’agit souvent de femmes seules élevant un enfant unique.

L’automaticité de la sanction ne permet pas non plus de faire le tri entre les familles de bonne foi et celles, extrêmement rares, où l’incurie est telle que l’on n’attache pas d’importance à l’absence et à l’échec de l’enfant à l’école.

La sanction touche des familles monoparentales, donc des femmes seules que leurs conditions de vie empêchent de surveiller et d’épauler leurs grands enfants. Au supermarché ou à l’hôpital, les mères de familles travaillent jusqu’à des heures tardives. Les familles ont dans ce cas besoin d’être aidées. Les sanctionner, a fortiori les sanctionner financièrement, n’est pas une solution !

Les chiffres de la direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO) montrent de façon éloquente l’échec du dispositif. Sur 12 millions d’élèves, environ 300 000 sont en situation d’absentéisme. Or il n’y a eu que 619 suspensions de versement des allocations familiales sur toute l’année scolaire 2011-2012, ce qui représente une infime proportion au regard de l’ampleur du problème.

M. Éric Ciotti invoque à cet égard un effet dissuasif : la menace de suppression des allocations familiales aurait pour effet, selon lui, de pousser les parents concernés à renvoyer leurs enfants à l’école. Là encore, les chiffres lui apportent un démenti : sur les 619 suspensions, seulement 142 ont donné lieu à un reversement aux familles à la suite du retour de l’élève dans son établissement. Le taux d’échec est donc de 80 %, contre de 60 % la première année. Il est inutile d’attendre d’arriver à 95 % : on voit bien que cela ne fonctionne pas !

Nous devons néanmoins tirer les enseignements de ce qui peut fonctionner : en cas d’absentéisme, l’établissement convoque les parents et dialogue avec eux pour chercher la cause de ce comportement. Seule la discussion avec la famille et avec l’élève peut aboutir à des résultats. Ce n’est qu’en s’intéressant au jeune et à ce qu’il a voulu dire en n’allant plus à l’école que l’on arrivera à avancer.

Je remarque aussi que l’UMP s’était auparavant refusée à soutenir l’approche de la « loi Ciotti ». En 2004, M. Christian Jacob, alors ministre de la famille, avait supprimé le dispositif de suspension des allocations familiales en vigueur depuis 1959. Dans leurs circulaires de rentrée de 2009 et de 2010, MM. Xavier Darcos et Luc Chatel, alors ministres de l’éducation nationale, insistaient sur l’importance du dialogue avec l’élève et ses parents. En 2009, alors que le président Nicolas Sarkozy souhaitait intégrer la mesure de suspension dans la loi d'orientation et de programmation sur la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI), les députés de la majorité de la Commission des affaires culturelles et de l’éducation, emmenés par leur présidente Mme Michèle Tabarot, s’y étaient opposés.

Du reste, le fait que cette mesure ait été prévue pour la LOPPSI montre que son objectif n’était pas principalement éducatif mais sécuritaire. Il fallait incriminer un comportement. C’est de mon point de vue inacceptable.

L’absentéisme est une composante du problème majeur que constitue le décrochage scolaire. Chaque année, 150 000 jeunes quittent l’école sans formation, sans diplôme et, par suite, sans emploi. C’est un échec social considérable, voire un danger pour notre pacte républicain, que de laisser tant de jeunes sans solution.

Nous mènerons une lutte résolue contre le décrochage scolaire. Le ministre de l’éducation nationale, M. Vincent Peillon, a déjà annoncé plusieurs mesures. Pour prévenir l’absentéisme, nous mettons en place différents outils tels que les classes et ateliers relais ou les micro-lycées. Il s’agit de proposer au jeune des alternatives au dispositif classique où il n’est pas heureux et n’apprend plus rien. Un accompagnement personnalisé doit leur être proposé, comme celui que met en place la Ville de Paris pour les enfants présentant des problèmes de comportement.

Il faut également être en mesure d’alerter rapidement les services sociaux lorsque l’absentéisme est avéré. Les facteurs sont divers. Les difficultés familiales nécessitent parfois des médiations. Il peut s’agir aussi de problèmes de santé qui appellent la mise en place de dispositifs pédagogiques différents. Or, on constate que les enseignants et les services sociaux hésitent aujourd'hui à « dénoncer » la famille, craignant la sanction financière pour les parents s’ils n’obtiennent pas que l’enfant retourne à l’école.

Nous souhaitons donc que la procédure qui reste prévue dans la réglementation ne soit qu’un dernier recours, après que l’on aura fait tout le nécessaire pour remettre le jeune sur de bons rails.

Enfin, en cas de conflit familial ou si les parents sont insuffisamment présents pour encadrer leurs enfants, l’internat peut constituer une solution.

Nous sommes pleinement conscients du problème de l’absentéisme mais nous considérons que la sanction financière est néfaste. En conséquence, le gouvernement soutient la proposition de loi tendant à supprimer le dispositif. Il prendra des mesures pour anticiper davantage les problèmes et pour traiter l’absentéisme comme il doit l’être, c'est-à-dire comme un symptôme qui doit amener la communauté éducative à se rassembler pour proposer des solutions adaptées à l’enfant concerné.

M. le président Patrick Bloche. Vos propos, madame la ministre, éveillent certains souvenirs. Avec plusieurs collègues de l’opposition d’alors, nous avions tout fait pour empêcher le vote de la proposition de loi sur l’absentéisme scolaire.

Mme Sandrine Doucet, rapporteure. Je vous remercie, madame la ministre, pour l’éclairage que vous venez d’apporter sur cette proposition de loi. C’est une belle démonstration de cohérence politique dans un souci de justice sociale.

Le Président François Hollande avait fait de la jeunesse la pierre angulaire de son programme, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a placé la justice sociale au cœur de son action et le ministre de l’éducation nationale Vincent Peillon a fait du pacte républicain le fer de lance de sa politique. Vous venez de faire la synthèse de ces principes, en articulant la réussite scolaire autour de l’intérêt de l’élève et en garantissant ce qui est une condition première de cette réussite : le soutien à l’assiduité, qui fait souvent défaut aux plus fragiles en raison d’un cadre familial précaire et pauvre.

Le gouvernement propose également un calendrier cohérent, qui fixe des rendez-vous à la nation dans l’immense et indispensable projet de refondation de l’école : création de 1 000 postes dans le primaire ; adoption au Sénat, le 25 octobre, de la proposition de loi de Mme Françoise Cartron ; annonce, le 4 décembre, d’un plan contre le décrochage scolaire ; retour à une carte scolaire plus contrôlée ; mise en débat, dans quelques semaines, du projet de loi pour la refondation de l’école. Tous ces éléments marquent incontestablement une volonté politique.

La proposition de loi tendant à abroger la loi du 28 septembre 2010, dite « loi Ciotti », s’inscrit dans ce processus de retour à la justice sociale qui passe par l’école. Elle rompt avec une vision assimilant la jeunesse à une source de problèmes nécessitant sanction.

Lorsque M. Nicolas Sarkozy, alors en perte de vitesse, annonce en 2010 qu’il veut faire de la suppression des allocations familiales un moyen de lutte contre l’absentéisme, M. Éric Ciotti reprend à son compte cette conception répressive d’un phénomène scolaire. L’école est vue comme un creuset de la délinquance, les jeunes et leurs familles deviennent objets de proscription. L’amalgame entre absentéisme et délinquance est ainsi acté.

Comme Mme Françoise Cartron, vous avez énuméré les éléments qui disqualifient une telle loi. La sénatrice dénonce un dispositif « inadapté, injuste et inefficace » et déplore le manque d’ambition du projet scolaire du précédent gouvernement. Celui-ci n’a pas su apporter des réponses efficaces et justes aux problématiques multiples et complexes qui sont à l’origine d’un décrochage scolaire très souvent lié à un absentéisme lourd et récurrent.

Vous l’avez indiqué, 77 % des élèves dont les familles ont été frappées par la suspension des allocations ne sont pas revenus à l’école. Ces centaines d’élèves ont grossi les rangs déjà trop nombreux des 20 000 décrocheurs annuels et des 150 000 jeunes qui sortent du système scolaire sans diplôme chaque année. Ce sont les établissements situés en zone d’éducation prioritaire, en particulier les lycées professionnels, qui sont le plus touchés par ce phénomène.

Revenir sur cette loi, c’est non seulement lutter contre l’injustice et repenser l’école en termes d’égalité, mais c’est aussi créer un cercle vertueux autour de l’élève en difficulté en concentrant autour de lui l’essentiel des efforts et des moyens, et non pas en remettant entre les mains des directeurs des caisses d’allocations familiales le devenir de son cadre familial. C’est également une façon de lutter contre la pauvreté.

Revenir sur cette loi, c’est également élargir notre horizon et penser notre avenir. Paradoxalement, au moment où la « loi Ciotti » était mise en application, l’Europe plaidait d’autres méthodes en matière d’échec scolaire. Dans sa communication au Parlement et au Conseil européens du 31 janvier 2011, la Commission européenne met en avant des mesures d’intervention centrées sur l’ensemble de l’école et visant à améliorer le climat scolaire et à créer un environnement d’apprentissage favorable à l’éducation. La Commission préconise la mise en place de systèmes d’alerte rapide, une meilleure coopération avec les familles, une meilleure orientation et un soutien financier.

On jugera à l’aune de ces principes tout à la fois le décalage du dispositif « Ciotti » et l’ambition de réussite que vous portez, madame la ministre, dans le cadre d’un projet européen fondé sur la concertation et l’innovation pédagogique.

La communication de la Commission européenne recensait les expériences menées dans de nombreux pays que l’on retrouve, comme par hasard, mieux placées que le nôtre dans les évaluations internationales. Il existe certes quelques expériences en France, mais elles ont subi ces dernières années les effets de la suppression des moyens de l’éducation.

En attendant une réflexion approfondie sur l’absentéisme et, plus généralement, sur l’école et ses missions, la présente proposition de loi vise à abroger le contrat de responsabilité parentale, qui est vidé de son sens, et les dispositions relatives à la suspension des allocations. Nous voulons nous placer à l’avant-garde du destin européen, et la République est pour nous le cadre et le garant de la justice par l’éducation.

M. Stéphane Travert. Le vote de la loi du 28 septembre 2010, dite « loi Ciotti », s’inscrit dans le contexte d’une logique purement sécuritaire et punitive. Le précédent gouvernement souhaitait faire de ce texte un marqueur politique et idéologique. Et nous considérons en effet qu’il y a une grande différence entre nos conceptions respectives de ce que doit être l’éducation et du rôle qu’elle doit jouer dans la République.

C’est pourquoi le groupe SRC soutient la proposition de loi de la sénatrice Françoise Cartron. Le dispositif « Ciotti » ne répond ni aux préoccupations des parents ni à celles des enseignants quant aux causes réelles de l’absentéisme, qui prélude souvent au décrochage scolaire et à des difficultés d’insertion dans la société et dans le monde du travail. Le texte sénatorial est en revanche juste et adapté. Il est fondé sur la confiance non sur la défiance. Le changement de politique passe par la nouvelle organisation de l’école que nous appelons de nos vœux. La refondation scolaire est une priorité du Président de la République, du gouvernement et de la majorité.

Les chiffres que vous avez cités, madame la ministre, montrent l’inefficacité du système : 12 millions d’élèves, 619 suspensions. Avec de tels résultats, il est inimaginable de maintenir ce dispositif, d’autant qu’il n’a aucun effet dissuasif et qu’il est beaucoup trop lent : il faut que le directeur de l’établissement alerte les responsables académiques, lesquels doivent informer les familles susceptibles de subir des sanctions. Même si l’absentéisme cesse, les sanctions peuvent être appliquées. Plusieurs mois s’écoulent avant la prise en compte des problèmes de l’enfant et de sa famille par les professionnels de l’aide sociale et de la communauté éducative.

Ce que nous proposons, au contraire, c’est de traiter l’absentéisme dès que le phénomène est constaté.

La « loi CIotti » traite de façon uniforme des problèmes dont les facteurs sont multiples. La suppression des allocations familiales est une sanction inéquitable pour les parents.

M. Dominique Le Mèner. Ce n’est pas une suppression mais une suspension !

M. Stéphane Travert. Oui, mais cette suspension entraîne de grandes difficultés pour les parents. Nous ne pouvons souscrire à ce choix punitif qui révèle les incohérences de l’ancienne majorité. Celle-ci a voulu entretenir la confusion entre traitement de l’absentéisme et traitement de la délinquance en essayant dans un premier temps d’introduire la mesure de suspension au sein de la LOPPSI contre l’avis de la présidente de la Commission des affaires culturelles et de l’éducation.

À l’inverse de ces artifices de communication politique, la présente proposition de loi est un texte de confiance envers l’école, les élèves et les partenaires éducatifs. Alors que la « loi Ciotti » s’inscrivait dans une surenchère sécuritaire, la question de l’absentéisme appelle des réponses éducatives appropriées, sans stigmatiser et déstabiliser des familles déjà fragilisées.

L’école est pour nous le creuset de la République. Chacun doit pouvoir y suivre son parcours choisi dans le dialogue et l’écoute. Le pacte républicain, c’est l’école du respect et non un système punitif dont l’inspiration relève plus du coup de menton que de la volonté de réformer et d’adapter notre système éducatif.

M. le président Patrick Bloche. Nous pouvons au moins nous mettre d’accord sur un point de sémantique : une suspension est une suppression temporaire. Lorsqu’il défendait sa proposition de loi, M. Éric Ciotti parlait certes de suspension, mais on sentait bien qu’une sanction plus ferme comme la suppression avait sa faveur.

Mme Virginie Duby-Muller. Tout en vous remerciant d’être venue faire part à notre Commission des projets du gouvernement en matière de réussite éducative, madame la ministre, je déplore que le premier acte de votre politique soit l’abrogation prématurée, sans concertation ni transparence, d’une mesure mise en place par la majorité précédente.

La proposition de loi de Mme la sénatrice Françoise Cartron, discutée et votée par le Sénat dans le cadre de l’ordre du jour réservé au groupe socialiste, a pour seul objet la suppression du dispositif de lutte contre l’absentéisme scolaire mis en place par la loi du 28 septembre 2010. Rappelons que ce texte avait été adopté pour endiguer l’augmentation des cas d’absentéisme scolaire, qui atteignent 300 000 par an. Il créait un dispositif gradué et proportionné pour alerter, accompagner et, le cas échéant, sanctionner par le moyen de la suspension des allocations familiales les parents dont les enfants auraient été absents de l’école de manière répétée et non justifiée.

Les parents sont en effet les premiers éducateurs de leurs enfants. Leur responsabilisation et leur accompagnement devenaient, avec ce texte, un élément clé de la lutte contre l’absentéisme. La suppression des allocations familiales devait être perçue comme une mesure de dissuasion, une arme ultime destinée à leur faire prendre conscience de la gravité de la situation de leur enfant. En d’autres termes, cette sanction administrative se voulait plus dissuasive que punitive, en privilégiant à chaque étape un temps d’écoute et de dialogue avec les parents afin de les orienter vers des structures, réseaux et groupes de parole susceptibles de les aider. Une large liberté d’appréciation était laissée aux chefs d’établissement et aux inspecteurs d’académie pour faire face à la complexité des situations individuelles et éviter une application mécanique.

D’ailleurs, dans sa dernière étude intitulée « Aider les parents à être parents », le Conseil d’analyse stratégique évoque le développement de dispositifs recourant à la sanction ou à l’incitation financières. Il conclut que leur succès est proportionnel « à l’intensité et à la qualité des services d’accompagnement et à l’utilisation avec justesse et parcimonie des sanctions ». Tel est bien le cadre, gradué et réversible, offert par le dispositif « Ciotti ».

Permettez-moi d’en revenir aux chiffres. L’administration a recueilli 80 000 signalements qui ont donné lieu à 60 000 avertissements, puis à 22 000 seconds signalements, 1 400 demandes de suspension des allocations familiales, 619 suspensions effectives et 142 rétablissements des allocations. On le voit : sur 80 000 cas signalés, 79 858 jeunes ont retrouvé le chemin de l’école.

Pourquoi donc se priver d’un tel dispositif, si ce n’est par pure idéologie et parce qu’il s’agissait d’une des mesures emblématiques de la présidence de Nicolas Sarkozy ? Vous avez reconnu au Sénat qu’il n’y avait pas eu d’évaluation, madame la ministre. N’aurait-il pas été plus raisonnable d’attendre avant de tout détricoter ? Et qu’en est-il du rapport que l’inspection générale de l’éducation nationale (IGEN) a remis en juillet au ministre et qui, fort opportunément, n’a pas été rendu public, contrairement aux dix-sept autres ? Ne concluait-il pas à l’efficacité du dispositif ? Où est la transparence à laquelle s’était engagé votre ministre de tutelle lorsqu’il déclarait en mai que les rapports de l’IGEN avaient « désormais vocation à être publiés » ? Peut-être le système est-il, pour vous, inadapté, injuste et inefficace, mais telles ne sont pas les conclusions de votre administration !

Bref, vous n’avez pas convaincu le groupe UMP. Si une évaluation chiffrée, concrète et rigoureuse du dispositif ne vous conduit pas à abandonner vos postures purement idéologiques et vos imprécisions partisanes, nous ne pourrons vous accompagner dans votre lutte – pourtant vitale pour notre jeunesse – contre l’absentéisme scolaire.

Mme Barbara Pompili. La réussite éducative pour toutes et tous est un enjeu sur lequel nous sommes tous d’accord. La lutte contre l’absentéisme est une facette de la lutte contre l’échec scolaire. Il s’agit là d’une véritable préoccupation dont nous discuterons plus précisément demain, lorsque nous examinerons le rapport de Mme Sandrine Doucet.

Même si l’absentéisme tend à s’amplifier à mesure que les enfants avancent en âge, il concerne aussi les plus petits. Dès l’école primaire, c’est un sujet de préoccupation. Le phénomène est grave car il ouvre la voie au décrochage scolaire et le nourrit. Une fois entré dans ce cercle vicieux, il est difficile d’en sortir ! Les conséquences en sont, bien souvent, de grandes difficultés d’insertion dans le monde du travail et plus généralement dans la société.

La majorité ayant fait une priorité de la lutte contre l’échec scolaire, il était logique qu’elle s’attaque à cette question et qu’elle commence par abroger la « loi Ciotti ». Loin de combattre le phénomène, ce texte l’aggrave en stigmatisant celles et ceux qui auraient au contraire besoin d’un accompagnement.

L’absentéisme, vous l’avez rappelé, a pour causes principales les difficultés d’apprentissage de certains enfants, le redoublement, une orientation imposée, le système de notation et de compétition qui stigmatise et décourage l’élève en difficulté, mais aussi des problèmes sociaux et familiaux : la précarité et le chômage qui touchent les parents, des conflits ou des ruptures au sein des familles.

Les politiques éducatives et sociales destinées à lutter contre l’absentéisme et, de façon plus générale, contre l’échec scolaire constituent donc de véritables enjeux.

Nous partageons bien sûr le changement d’approche opéré par le nouveau gouvernement dans la mesure où il vise à favoriser l’accompagnement des familles et non à mener une politique répressive.

La réduction de l’absentéisme est étroitement liée à l’amélioration de la réussite des élèves. Je souhaiterais à cet égard en savoir un peu plus sur les actions d’accompagnement éducatif que vous prévoyez de mettre en œuvre et sur les mesures permettant une prise en charge personnalisée des élèves en difficulté.

De même, pourriez-vous préciser vos intentions s’agissant de la santé à l’école ? La question est de votre compétence et elle n’est pas sans conséquences en matière d’absentéisme.

Quelles améliorations apporter à l’orientation des élèves ? Notre commission a débattu la semaine dernière des enjeux de l’orientation en fin de collège à l’occasion de la présentation du rapport que la Cour des comptes a consacré à ce sujet. Il a été souligné combien le redoublement et l’orientation imposée sont vécus comme des sanctions conduisant souvent à une perte de confiance en soi et à un rejet. De grand progrès restent à faire. Pour que l’élève puisse choisir de façon éclairée sa propre orientation, il faut améliorer l’information, changer le regard porté sur les voies professionnalisantes, renforcer le lien avec les milieux professionnels et multiplier les passerelles. Le choix d’une voie ne doit pas être bloquant : le jeune a le droit de changer d’avis et de revenir dans telle ou telle branche du système éducatif.

Je le répète, le système français s’enferme dans un cloisonnement qui n’a plus lieu d’être.

Le groupe écologiste plaide pour une plus grande implication des parents d’élèves dans la vie de l’école, qui permettrait aussi de progresser en matière de lutte contre d’absentéisme. Quelle est votre position quant à notre demande de création d’un statut de parent délégué ? Au-delà, comment envisagez-vous l’accompagnement des parents qui rencontrent de réelles difficultés avec leurs enfants ? Des mesures en ce sens constitueraient un premier pas vers le décloisonnement de l’école. Les établissements d’enseignement primaire et secondaire doivent cesser d’être des lieux fermés. Plus ils tisseront de liens avec l’extérieur, plus la lutte contre l’échec scolaire sera efficace.

Par ailleurs, les effets positifs en termes de réussite scolaire et d’insertion de la préscolarisation des enfants de moins de trois ans ne sont plus à démontrer, notamment dans les milieux défavorisés. Vous pouvez compter sur mon entier soutien à cet égard. Pourriez-vous préciser l’état d’avancement de ce dossier, y compris sous l’angle des moyens alloués, dans le cadre de la préparation de la nouvelle loi ?

La réussite éducative de tous passe aussi par l’accueil des élèves en situation de handicap. Il existe un absentéisme lié à ces questions. Que comptez-vous faire à ce sujet ?

Pour conclure, je souhaite vous féliciter pour votre volonté de favoriser la scolarisation des enfants roms et itinérants. Aucun enfant ne doit être exclu !

M. Patrick Hetzel. L’absentéisme scolaire est un réel problème. Il faut tout mettre en œuvre pour le faire baisser car il est l’antichambre du décrochage scolaire. C’est la raison pour laquelle nous avons soutenu le dispositif de lutte proposé en son temps par M. Éric Ciotti.

Nous regrettons que ce dispositif récent – sa mise en place remonte à un an seulement – n’ait pas été davantage développé. Comme vous l’avez vous-même indiqué, madame la ministre, son objectif était de responsabiliser les parents moyennant un dialogue en amont. Sa non-application ne signifie nullement qu’il n’était pas pertinent. J’en veux pour preuve ce qui se passe dans l’enseignement supérieur, où le lien établi depuis un certain temps entre la présence attestée de l’étudiant aux cours et le maintien de sa bourse a contribué à renforcer l’assiduité. On doit considérer ce lien non comme une sanction mais comme une source possible d’effets vertueux. Tel est l’esprit dans lequel a été adoptée la « loi Ciotti ».

Aussi déplorons-nous les orientations qui se dessinent dans cette proposition de loi alors que le dispositif n’a pas pu prendre sa pleine mesure. La question éducative nécessite bien l’implication et la responsabilisation des parents. Le négliger ou l’ignorer, c’est faire fausse route.

Cette proposition de loi est empreinte d’une vision déconnectée du réel. Si l’instruction publique relève de l’État, l’éducation appartient aussi aux parents. Vous détricotez ce que la majorité précédente a réalisé sans disposer d’aucune évaluation sérieuse du dispositif. Nous nous opposerons donc à ce texte.

M. Thierry Braillard. S’il y a un sujet sur lequel il ne peut y avoir de consensus avec l’opposition, c’est bien celui-ci. La « loi Ciotti » procède d’une politique répressive. Le nombre de sanctions prononcées, qui rappelle les résultats de la loi « HADOPI », prouve que ce n’est pas la bonne solution. Plus généralement, les propos de mes collègues de l’UMP et du Rassemblement-UMP illustrent bien la différence entre l’importance qu’ils accordent à la sanction et l’importance que nous accordons à la prévention.

Si nous détricotons cette mesure, monsieur Hetzel, ce n’est pas parce que Nicolas Sarkozy en a eu l’initiative : c’est parce qu’elle ne correspond pas à notre philosophie politique. La politique répressive que vous avez menée s’est traduite par une inflation législative. Vous avez adopté tellement de loi qu’il devenait impossible de savoir laquelle s’appliquait. Vous avez institué des peines « plancher » censées réduire la délinquance : la délinquance ne s’est jamais autant accrue qu’après l’adoption de ce texte qui allait jusqu’à mettre en cause le libre arbitre du juge, c'est-à-dire le principe de l’individualisation des peines énoncé par Beccaria !

Appliquée à l’école, cette philosophie revient à taper sur les pauvres en leur infligeant une double sanction. Est-ce le rôle du législateur que de dire à un gamin qui se trouve déjà dans une situation difficile que l’on sanctionnera ses parents en suspendant les allocations familiales ? Catastrophique en termes de chiffre, le résultat l’est plus encore d’un point de vue philosophique !

Il y a là une véritable ligne de partage entre la droite et la gauche. C’est pourquoi le groupe RRDP reprend pleinement à son compte la proposition de loi sénatoriale.

Je précise que cette prise de position n’est nullement laxiste. Nous pensons que la bonne solution consiste d’abord à créer les conditions d’un dialogue parfois inexistant entre les parents et le monde enseignants. Responsabiliser les parents, c’est avant tout leur faire comprendre que l’absence de leur enfant peut le conduire à un décrochage irrémédiable.

M. Michel Ménard. La suspension des allocations familiales est une sanction d’autant plus importante que les revenus des familles sont faibles. L’absentéisme est souvent lié à l’échec scolaire et au désintérêt de l’enfant pour une école où il ne trouve plus sa place. L’enjeu est de redonner aux élèves l’envie d’apprendre et de découvrir et non de les renvoyer à des sanctions pécuniaires !

Madame la ministre, vous avez affirmé au Sénat qu’il faut aider les parents et mettre en place des dispositifs d’accompagnement, tels les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED), lesquels ont été malheureusement supprimés par vos prédécesseurs Ces réseaux nous ont récemment fait part de leur inquiétude, notamment parce que le rapport issu de la concertation « Refondons l’école » ne les mentionne pas. Notre collègue Carole Delga, rapporteure spéciale de la Commission des finances sur les crédits de l’enseignement scolaire, auditionnera demain les organisations membres du collectif RASED. Quels éléments pouvez-vous nous donner pour les rassurer ?

M. Paul Salen. L’absentéisme concerne, certes, des jeunes de plus de seize ans qui auraient été mal orientés, mais il est aussi, et même surtout, le fait de collégiens. Comme les autres, le conseil général, dont je suis vice-président en charge de l’éducation, attribue des bourses aux familles en fonction de leurs ressources. Depuis dix ans, avant de verser ces bourses au début du deuxième trimestre, nous demandons l’avis des principaux sur le comportement ou l’absentéisme des enfants, dans le but non pas de sanctionner les familles, mais de les responsabiliser. Un mauvais comportement entraîne la suspension de la bourse, mais toute amélioration au cours du second trimestre peut donner lieu à son versement. Depuis maintenant plusieurs années que nous procédons ainsi, les principaux constatent une nette amélioration tant au niveau de l’absentéisme que du comportement.

Face à cela, vous proposez le dialogue. Pensez-vous qu’il n’existe pas déjà entre les enseignants, les principaux et les familles ? Instaurer un dialogue avec les parents, c’est bien, mais le problème de ces derniers, aujourd’hui, c’est surtout d’accéder aux informations et parfois de les comprendre.

Quant à l’internat que vous avez évoqué, vous en connaissez certainement le coût. Qui prendra en charge cette dépense pour les familles ?

M. Ary Chalus. Lourd dossier que celui de l’échec scolaire ! Vous aurez besoin du concours de tous pour en venir à bout, madame la ministre. Sanctionner les familles, c’était les rendre encore plus pauvres. Certaines, en outre-mer, vivent sans électricité ni confort minimum, ce qui a des conséquences sur la scolarité de leurs enfants.

Dans ma commune, qui compte 31 000 habitants, nous avons mis en place plusieurs dispositifs pour accompagner les familles : un conseil pour les droits et devoirs des familles qui ne prend pas de sanctions, l’intégration des jeunes, dès le plus jeune âge, dans la vie associative, l’organisation de challenges dans les écoles primaires et au collège comme outil de motivation. Ces dispositifs ont contribué à diminuer considérablement l’absentéisme, si bien que notre collège Maurice Satineau a affiché cette année un taux de réussite de plus de 88 %.

Je plaide pour que la nouvelle organisation des rythmes scolaires laisse une journée d’activités pour les jeunes. De nombreuses associations, qui sont créatrices d’emplois en Guadeloupe, craignent de ne plus pouvoir s’occuper des enfants comme elles le faisaient le mercredi et le samedi, et de subir ainsi un manque à gagner. En 2009, celles qui dispensent du soutien scolaire avaient déjà souffert des deux mois et demi de grève et beaucoup avaient dû déposer le bilan. Serait-il possible de trouver un moyen d’épargner ces associations qui créent des emplois ?

Mme Julie Sommaruga. Comme beaucoup de mes collègues, je suis très satisfaite que l’on puisse abroger la « loi Ciotti », loi inefficace, stigmatisante et injuste socialement. Sanctionner les parents pour l’absentéisme de leurs enfants, c’est les affaiblir, abîmer leur autorité et, finalement, les éloigner encore plus de la scolarité et accentuer les difficultés. Il faut actionner d’autres outils et travailler à la lutte contre la difficulté et le décrochage scolaires, ainsi qu’à l’aide à la parentalité.

Trop de parents ne disposent pas des moyens d’accompagner et de suivre la scolarité de leurs enfants. Des dispositifs existent déjà pour rapprocher l’école et les parents dans une dynamique de co-éducation. Comment les développer et favoriser les initiatives locales dans ce domaine ? Le travail sur la parentalité ne doit pas se faire uniquement au sein de l’école ou par rapport à celle-ci. Il doit pouvoir être développé, en lien avec l’éducation nationale, dans les quartiers populaires où les associations d’éducation populaire font un travail remarquable. Avez-vous prévu des dispositions à cet égard ?

Mme Dominique Nachury. L’absentéisme scolaire est très préoccupant et nous sommes toujours en attente de solutions concrètes, qui doivent être diversifiées, pour remédier à un problème qui est à la fois individuel et collectif.

Mieux comprendre est une nécessité, j’en conviens. Pour autant, cela ne veut pas dire admettre. Il est fondamental que les familles prennent conscience et réagissent. Bien des raisons sont à l’origine de l’absentéisme scolaire, et nous avons déjà identifié l’orientation subie. Lorsqu’il s’agit de difficultés sociales, ne conviendrait-il pas de coordonner les mesures qui pourraient être prises avec toutes les mesures d’assistance éducative et de prévention mises en œuvre dans le champ de l’aide sociale à l’enfance ? À multiplier les interventions autour d’un enfant et d’une famille, on nuit parfois plus à l’efficacité qu’on ne la sert.

M. Luc Belot. L’absentéisme révèle bien souvent des réalités scolaires, mais aussi sociales, éducatives et sociétales. Je partage les inquiétudes qui se sont exprimées s’agissant de l’amalgame parfois fait entre absentéisme et délinquance. Gardons-nous de nous référer à quelques expériences de terrain pour lier les deux situations.

La meilleure réponse à apporter à l’absentéisme est globale, et c’est certainement le projet de refondation de l’école puisqu’il implique l’ensemble des acteurs, non seulement ceux de l’éducation nationale mais, plus largement, toute la communauté éducative. Je ne doute pas que nous trouverons les réponses lorsque nous aurons réussi à mettre tous ces acteurs autour de la table et à lever les oppositions à la constitution d’équipes pluridisciplinaires qu’avaient manifestées certains intervenants lorsqu’il s’était agi de mettre en place les programmes de réussite éducative. Ce travail en équipe devra s’effectuer au service des élèves avant tout et en collaboration avec les parents.

L’enjeu de la parentalité est essentiel. Que nos collègues en soient convaincus, les parents d’élèves dont l’absentéisme est constaté ne sont pas démissionnaires, ils sont désarmés. Ce sont des parents qu’il faut accompagner dans la recherche de réponses éducatives personnelles, sans les leur dicter. Aider ces parents, ce n’est certainement pas considérer qu’ils comprendront mieux ce qui se passe si on leur supprime les allocations. La loi qu’il s’agit aujourd’hui d’abroger est la première étape d’une construction commune qui constituera une bien meilleure réponse. Sur ces questions, madame la ministre, vous trouverez, en la majorité à l'Assemblée nationale, un partenaire de travail permanent.

M. Dominique Le Mèner. Au-delà de votre volonté de stigmatiser la « loi Ciotti », j’ai du mal à comprendre le procès que vous faites d’un texte qui n’envisage pas une sanction comme une fin mais comme l’exercice d’une pression sur des parents souvent démissionnaires. Si l’on en juge par les chiffres, ça marche. Sans aller jusqu’à relier les deux phénomènes, l’assiduité en commission a subitement augmenté depuis qu’on a demandé aux députés de signer une feuille de présence le mercredi matin ! En partant de 80 000 signalements et 60 000 avertissements, tomber à 22 000 seconds avertissements et à 1 400 demandes de suspension des allocations familiales, c’est bien la preuve que le texte fonctionne, même s’il ne constitue pas l’alpha et l’oméga de la lutte contre l’absentéisme scolaire. Le but n’est pas de stigmatiser mais, au contraire, d’inciter. Toute comme la loi protège, elle sait aussi sanctionner, et il était normal de prendre des mesures pour inciter à porter une attention particulière sur l’absentéisme.

Abroger cette loi avant d’engager autre chose est une erreur. On aurait pu comprendre que vous le fassiez pour y substituer une autre forme de réponse mais pas sous le seul prétexte qu’elle n’a pas donné de résultat. D’ailleurs, pourquoi le rapport établi par l’inspection générale de l’éducation nationale et remis au ministre au mois de juillet n’a-t-il pas été publié ? Je ne prétends pas qu’avec la suspension des allocations familiales, nous avions trouvé « la » solution. Simplement, c’est un moyen qui a prouvé son efficacité, et il est faux d’y voir un élément d’une quelconque intention sécuritaire.

M. Pierre Léautey. L’évaluation de cette loi est sans appel : c’est une loi inefficace, une loi inégalitaire, injuste et stigmatisante, qui s’applique plutôt aux familles les plus en difficulté en accroissant encore leurs difficultés, et une loi inadaptée. D’ailleurs, lorsque la circulaire d’application était sortie, beaucoup s’y étaient opposés, des enseignants et chefs d’établissements aux parents d’élèves et lycéens, et même les collectivités.

Au-delà de la seule abrogation, je suis heureux que Mme la ministre ait ouvert des pistes en vue de prendre en compte les difficultés que rencontrent les familles, l’absentéisme n’étant qu’une conséquence de diverses difficultés, qu’elles soient familiales, sociales, psychologiques ou liées à l’école ou à une orientation subie. Sous quelles formes les orientations citées seront-elles mises en œuvre, qu’il s’agisse du renforcement du dialogue avec les familles et les enfants ou de la mobilisation des établissements pour installer des relais et accompagner ces enfants qui sont dans l’antichambre du décrochage ?

Mme Isabelle Attard. C’est bien une double peine, éducative et financière, qui était prononcée contre des parents qui avaient déjà le sentiment de ne pas être à la hauteur. Ce sont bien les élèves les plus fragiles qui se détournent de l’école, car ils n’y ont pas trouvé les méthodes pédagogiques qui leur ont fait aimer notre école de la République. Donnons-leur envie d’y retourner !

« Prévention » est le mot-clé qui doit nous guider et diriger la rédaction des futures lois. Jamais des élèves n’iront contraints et forcés à l’école ; ils iront parce qu’ils auront compris que c’est leur intérêt. Depuis une vingtaine d’années, la preuve a été faite qu’ils peuvent aussi intégrer les groupes pédagogiques, participer à leur propre projet éducatif. Par ailleurs, il conviendrait de revoir les sanctions prononcées en conseil de discipline : ce sont souvent des exclusions qui confortent l’absentéisme. Imposer la participation à des groupes d’accueil, des parents par exemple, serait plus constructif.

Un petit clin d’œil, pour finir. Il nous a été rapporté que cette loi serait à l’origine d’un chantage de la part de jeunes rusés qui réclament le versement d’allocations comme argent de poche, faute de quoi ils sécheront l’école.

M. Yves Durand. Que les choses soient claires : personne, ici, n’est pour l’absentéisme scolaire ; nous sommes tous contre, et tous persuadés que c’est un problème majeur du système éducatif. Toutefois, nous sommes plusieurs à considérer que la suppression des allocations n’est pas une bonne réponse. Non seulement elle est inefficace, mais elle est mauvaise, donc condamnable.

Ne nous cachons pas derrière notre petit doigt et rappelons l’ambiance qui régnait sur le débat sur la « loi Ciotti ». Cette loi « coup de menton » avait pour objectif premier, non pas de lutter contre l’absentéisme scolaire, mais de récupérer des voix plus à droite que l’UMP de l’époque. Elle a été adoptée bien qu’ayant été condamnée par l’ensemble des acteurs de l’école, associations de parents d’élèves, syndicats enseignants, associations d’éducation populaire. Ils y étaient opposés parce qu’aucune étude réelle n’avait été effectuée sur l’absentéisme scolaire. Celui-ci est majoritairement constaté dans les lycées professionnels, où la plupart des élèves ont été orientés de manière subie et sont issus de familles défavorisées. Comment peut-on aider des familles en commençant par leur taper dessus, en leur montrant l’école comme un endroit où l’on sanctionne et non pas comme un lieu où l’on comprend ? Cette loi n’a aucun sens puisqu’elle ne poursuit pas l’objectif qu’elle prétend rechercher. Il n’y a qu’une chose à faire, et sans tarder : l’abroger.

Quant à la remplacer, c’est dans le cadre de la loi sur la refondation de l’école qu’il faudra y réfléchir. Quelle politique d’accompagnement des parents allez-vous mettre en place, madame la ministre ?

M. Jean-Pierre Le Roch. L’absentéisme scolaire est un défi qu’il nous faut affronter dans l’intérêt des jeunes, des familles et de la société. Absentéisme et égalité des chances sont intimement liés. Une étude récente montre que, en France, 20 % des élèves ont des difficultés de lecture à l’entrée du collège, ce qui les met en situation d’échec scolaire, très souvent suivie de décrochage scolaire. La loi de refondation pour l’école et le plan de lutte contre le décrochage scolaire permettront à l’école de la République d’apporter des solutions globales.

Je signale l’expérience intéressante que peuvent constituer les maisons de la formation professionnelle mises en place en région Bretagne. Là, on se rend compte des difficultés à faire renouer des jeunes entre seize et dix-huit ans avec la lecture, l’apprentissage en général. Des solutions individuelles doivent aussi être envisagées. Un tel accompagnement, adapté et contractualisé, sera prévu.

Le rôle des parents est essentiel et l’accompagnement à la parentalité peut être sinon une solution, du moins une façon concrète et utile de lutter contre l’absentéisme. Les centres communaux ou intercommunaux d’action sociale sont tout à fait aptes à mobiliser autour de cette problématique de l’aide à la parentalité. De nombreuses expériences sont menées un peu partout, par exemple en matière d’aide aux devoirs, par des bénévoles encadrés. Pourraient-ils être associés à cette lutte contre l’absentéisme scolaire ?

Mme Martine Faure. Je vous remercie, madame la ministre, d’avoir accepté de soutenir la proposition de loi relative à l’abrogation de la « loi Ciotti », cette loi injuste qui contribue à stigmatiser les familles souvent les plus modestes et à précariser les plus fragiles. Ses auteurs ont tout rejeté sur les familles, sans chercher à comprendre. Nous l’avions clamé dans l’hémicycle, cette loi serait inutile : cela s’est révélé vrai.

Oui, nous voulons lutter contre l’absentéisme scolaire, mais nous ne voulons pas faire rimer cette lutte avec suppression, sanction, répression. La lutte contre l’absentéisme, quelle qu’en soit l’origine, doit passer non par des sanctions mais par des solutions. Cela implique de redonner tout son sens à l’enseignement scolaire, de mettre en œuvre tous les moyens pédagogiques et éducatifs pour favoriser l’assiduité de tous les élèves.

Je ne reposerai pas toutes les questions sur les RASED, l’école maternelle, le dialogue avec les parents, l’orientation, la formation des maîtres, mais j’écouterai les réponses que vous allez nous apporter, madame la ministre.

Mme George Pau-Langevin, ministre déléguée chargée de la réussite éducative. J’ai entendu beaucoup d’arguments confortant l’inefficacité du dispositif « Ciotti ». À ceux qui plaident pour lui laisser le temps de faire ses preuves, je rappelle que la suspension des allocations familiales ne date pas d’hier. Déjà, en 2004, le ministre de la famille, qui était un conservateur, avait lui-même estimé que ça ne marchait pas. M. Éric Ciotti, était revenu à la charge en 2006, avec un contrat à mettre en œuvre par les conseils généraux qui n’a pas pris, les enseignants et les présidents des conseils généraux n’étant pas d’accord, sauf, comme par hasard, dans les Alpes-Maritimes et en Vendée, où de tels contrats ont été signés massivement. En 2010, c’est aux inspecteurs d’académie que l’on finit par confier la responsabilité d’engager le dispositif. Ceux-ci étant des éducateurs avant d’avoir des opinions politiques, ils ont beaucoup hésité à l’utiliser. Objectivement, depuis le temps qu’on voit les choses fonctionner, on ne peut que conclure à l’inefficacité de la méthode et à l’inutilité de continuer. Nous allons commencer par supprimer ce dispositif sans intérêt puis nous le remplacerons par un système sur lequel nous travaillons avec Mme Dominique Bertinotti, ministre de la famille, qui permettra de mieux épauler et encadrer les familles confrontées à de telles difficultés.

Certains d’entre vous souhaitent connaître la teneur du fameux rapport de l’IGEN qui n’aurait pas été communiqué. Des rapports non publiés, nous en avons trouvé plein les tiroirs en arrivant au ministère de l’éducation nationale, et nous en avons mis quelques-uns en ligne. Celui dont il est question est, en réalité, une note d’étape, le travail n’étant pas terminé. Dans cette note, les auteurs ont expliqué qu’ils avaient manqué de temps pour avoir des réponses suffisamment approfondies, indiquant néanmoins que beaucoup se gardaient de lancer la procédure sachant qu’elle conduirait à des situations qu’ils n’acceptaient pas. Les inspecteurs continuent leur travail, ils le mèneront à son terme sans a priori. Pour l’instant, les chiffres témoignent de résultats tout à fait dérisoires.

Les RASED sont des outils utiles dans l’aide aux enfants en difficulté, mais le dispositif a été amplement démantelé sous les gouvernements précédents. Cela est fort dommage au regard de leur démarche, qui consiste à détecter, dans la vie de l’enfant, où se situe le nœud du problème. Plutôt que de lui répéter encore et encore les mêmes explications, l’enseignant peut alors traiter particulièrement les difficultés identifiées. Après plusieurs années de démantèlement, le nombre des RASED est devenu très insuffisant, même si, dès son arrivée, Vincent Peillon a rétabli des postes. Dans le cadre de la concertation, une réflexion a été engagée sur la manière de remettre sur pied cette aide personnalisée. La loi sur la refondation de l’école pourrait aborder partiellement le problème, mais il faudrait reprendre le dispositif de manière plus approfondi, car, s’il a joué un rôle positif, il n’est pas évident qu’il puisse être remis en fonctionnement en l’état dans tous les établissements.

M. Ary Chalus a rappelé les problèmes particuliers de l’outre-mer, où les familles sont souvent pauvres et où, en outre, la pratique de la langue maternelle est susceptible de susciter des difficultés d’apprentissage. Je me rendrai prochainement en Guyane où se posent aussi des problèmes particuliers d’accès à l’école, notamment pour les enfants qui vivent sur le fleuve. Nous allons nous attaquer au traitement de l’illettrisme en Guyane.

M. Thierry Braillard a souligné, à juste titre, que la suppression de la « loi Ciotti » n’a rien à voir avec du laxisme. Nous voulons tous que les enfants aillent le plus longtemps possible à l’école et que chacun trouve sa voie, dans l’enseignement général, dans l’enseignement professionnel ou dans la formation continue, où l’on reprend en petits groupes des notions non acquises en formation initiale. Nous sommes en train de travailler avec les régions sur les deux dossiers non satisfaisants que sont le décrochage et l’orientation pour installer une sorte de continuum de la prise en charge des jeunes le plus longtemps possible. C’est d’ailleurs un objectif conforme à la stratégie Europe 2020. Tous ces jeunes sans formation, c’est un gâchis général auquel nous devons nous attacher à remédier. Du reste, dans la stratégie européenne, je n’ai pas vu que l’on préconise de suspendre les aides aux familles. C’est donc une voie dans laquelle l’Europe ne nous conseille pas de rester.

La parentalité est un sujet essentiel. Autrefois, l’école se considérait comme une forteresse où les enfants étaient à l’abri, les parents restant bien à l’extérieur. Aujourd’hui, on se rend compte que les enfants des classes moyennes ont des facilités d’apprentissage et d’évolution dans le système scolaire parce qu’il y a une cohérence entre les demandes qu’ils reçoivent de leurs parents et celles qu’ils reçoivent de l’école. Les parents des classes populaires, eux, sont souvent mal à l’aise à l’école parce qu’eux-mêmes ne sont pas suffisamment lettrés ou qu’ils ont mal vécu leur scolarité. Ils adhèrent d’ailleurs rarement aux associations de parents d’élèves, qui jouent un rôle très important dans les établissements. Il faut trouver un moyen de les impliquer dans l’école. Dans le cadre de la réflexion sur la refondation, nous avons été saisis de propositions extrêmement intéressantes, qui ont également été présentées au groupe de travail sur la pauvreté qui vient de rendre ses conclusions au Conseil économique, social et environnemental. Ce dernier préconisait de créer un lieu, dans l’école ou à proximité, où les parents pourraient se retrouver, de façon à les apprivoiser et à les aider à se sentir un peu moins mal à l’aise à l’école. Ainsi, dans une cité difficile du Mirail, à Toulouse, un appartement est réservé aux parents juste à l’entrée du collège. Là, ils peuvent venir discuter et trouver du soutien pour affronter les difficultés que tout parent peut éprouver dans l’éducation de ses enfants.

Certains dispositifs de réussite éducative mis en place dans le cadre de la politique de la ville comportent un axe de soutien aux parents extrêmement important. C’est là un aspect qu’il importe de développer. Nous avons entamé une démarche d’évaluation de tous les dispositifs de ce type en liaison avec le ministère de la ville. Nous cherchons toutes les bonnes pratiques permettant de régler des problèmes qui se posent à tout le monde et d’enclencher le rapprochement avec les parents, en vue de les généraliser. Par exemple, dans certains établissements scolaires du Mans, des cours de français sont dispensés aux parents pour que la langue ne fasse plus barrage à la discussion avec eux.

M. Yves Durand a souligné que l’absentéisme était particulièrement important dans les lycées professionnels. Il faut effectivement modifier le regard que nous portons, tout comme les jeunes, sur ces établissements qui sont trop souvent considérés comme des voies de garage, des filières de relégation. Pourtant, ce sont des endroits surprenants de qualité. J’ai récemment visité, dans le 19e arrondissement de Paris, le lycée Hector Guimard où l’on forme aux métiers de la pierre. Le bâtiment lui-même est d’une beauté remarquable et les jeunes qui y étudient sont des artistes ; ils sont capables d’intervenir dans la rénovation de monuments. Si l’on réussissait à faire comprendre à nos jeunes qu’ils vont acquérir des compétences professionnelles qui leur permettront de gagner leur vie, on changerait vraiment le regard qu’ils portent sur les établissements professionnels. De même, il faudrait arriver à y introduire un peu de mixité sociale, ne pas en faire des endroits réservés aux enfants des classes populaires, car ils préparent à des métiers qui permettent de gagner sa vie.

Comme le dit Vincent Peillon, tous les enseignants veulent la réussite des enfants. Pour ma part, je souhaite intervenir plus particulièrement sur les sujets expliquant les difficultés que certains enfants rencontrent à l’école. Parmi ceux-là, nous travaillons sur les problèmes de santé, de l’addiction à l’obésité, et sur toutes les questions liées au handicap. À cet égard, nous avons lancé, avec Mme Marie-Arlette Carlotti, un groupe de travail sur la professionnalisation des auxiliaires de vie scolaire (AVS), ces personnes qui permettent, de manière remarquable, aux enfants de vivre et d’étudier avec les autres. Il faut parvenir à systématiser ce mode de travail, en formant les enseignants pour vaincre leurs réticences et en mettant fin à la précarité du métier d’AVS. Cherchant à impulser une politique d’innovation, je constate que, ici ou là, quantité de gens font des choses extraordinaires pour remédier à l’échec scolaire. En Gironde, j’ai visité le collège Clisthène qui perdait autrefois beaucoup d’élèves car implanté dans un quartier à population très mélangée ; aujourd’hui, il applique des méthodes pédagogiques différentes et, pour les cent places qu’il propose, les candidatures sont six fois plus nombreuses. C’est bien la preuve que, même dans des quartiers dits difficiles, on peut apporter des réponses grâce à des moyens pédagogiques différents.

La lutte contre l’illettrisme devrait être une grande cause nationale, a dit quelqu’un. Cela semble important, en effet.

L’orientation, nous y travaillons avec les régions.

Nous devons aussi revoir la scolarisation en école maternelle, que le gouvernement précédent avait mise à mal, considérant que les instituteurs n’avaient pas à changer des couches. Pour notre part, nous estimons qu’un maximum d’enfants doit fréquenter l’école maternelle, c’est pourquoi il est gênant de constater qu’y vont majoritairement les enfants issus des classes moyennes. Paradoxalement, dans les zones de pauvreté, comme la Seine-Saint-Denis, les enfants sont beaucoup moins scolarisés, en particulier entre deux et trois ans. C’est pourtant eux qui y apprendraient utilement avant d’entrer à l’école primaire.

J’ai déjà dit que nous allions dresser un bilan des initiatives en matière de réussite éducative avec le ministère de la ville. Si beaucoup est entrepris dans le cadre de ces dispositifs, l’éducation nationale n’y intervient pas suffisamment comme partenaire. Elle est impliquée au niveau local mais, au niveau national, la complémentarité n’est pas suffisamment à l’œuvre.

L’abrogation du dispositif « Ciotti » va nous conduire vers autre chose. Dire que ce dispositif ne nous convient pas est une manière non pas de renoncer à travailler sur l’échec scolaire, mais d’affirmer qu’il faut s’y prendre autrement. Tout ce qui se construit autour de la loi sur la refondation en préparation et autour des rythmes scolaires a pour but d’aider nos enfants à progresser et à se sentir mieux à l’école. Nous sommes le pays où le nombre de jours d’école est le plus bas d’Europe, où les résultats ne sont pas bons et où les enfants souffrent le plus en milieu scolaire. Cela n’est pas acceptable. La refondation doit s’attacher à développer le bien-être des enfants à l’école, afin qu’ils n’y aillent pas à reculons et acquièrent le goût d’apprendre, sans se sentir jugés ni humiliés. Leur faire prendre conscience que l’école est le moyen de réussir leur vie d’homme est la mission que nous acceptons tous de remplir, dès que nous en aurons fini avec cette mauvaise idée qu’était la « loi Ciotti ».

M. le président Patrick Bloche. Merci, madame la ministre, pour avoir dit clairement combien le gouvernement était déterminé à lutter contre l’absentéisme scolaire par d’autres voies.

Nous reprendrons cette discussion demain matin, en examinant le rapport de notre collègue Sandrine Doucet.

La séance est levée à dix-huit heures cinq.

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Présences en réunion

Réunion du mardi 18 décembre 2012 à 16 heures 15

Présents. – Mme Isabelle Attard, M. Luc Belot, M. Patrick Bloche, Mme Brigitte Bourguignon, M. Thierry Braillard, M. Ary Chalus, Mme Valérie Corre, M. Yves Daniel, Mme Sandrine Doucet, Mme Virginie Duby-Muller, Mme Anne-Lise Dufour-Tonini, Mme Françoise Dumas, M. William Dumas, M. Yves Durand, Mme Martine Faure, Mme Annie Genevard, M. Patrick Hetzel, M. Christian Kert, M. Pierre Léautey, M. Dominique Le Mèner, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Lucette Lousteau, M. Michel Ménard, Mme Dominique Nachury, Mme Barbara Pompili, M. Michel Pouzol, M. Paul Salen, Mme Julie Sommaruga, M. Claude Sturni, M. Stéphane Travert

Excusés. – M. Guénhaël Huet, Mme Sonia Lagarde, M. Frédéric Reiss, M. Marcel Rogemont, M. Rudy Salles