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Commission des affaires culturelles et de l’éducation

Mardi 29 octobre 2013

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 07

Présidence de M. Patrick Bloche, président,
puis de
M. Michel Ménard,

– Projet de loi de finances pour 2014 (n° 1395) (seconde partie) :

• Examen pour avis et vote, ouverts à la presse, des crédits de la mission Sport, jeunesse et vie associative :

- Sport, jeunesse et vie associative (Mme Marie-George Buffet, rapporteure pour avis)

• Examen pour avis et vote, ouverts à la presse, des crédits de la mission Action extérieure de l’État :

- Diplomatie culturelle et d’influence (Mme Claudine Schmid, rapporteure pour avis)

– Informations relatives à la Commission

Présences en réunion

Vice-président

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mardi 29 octobre 2013

La séance est ouverte à dix-sept heures.

(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la Commission)

——fpfp——

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation examine, pour avis, les crédits pour 2014 de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », sur le rapport de Mme Marie-George Buffet et de la mission « Action extérieure de l’État » sur le rapport de Mme Claudine Schmid (Diplomatie culturelle et d’influence).

M. le président Patrick Bloche. Nous examinons les crédits pour 2014 de deux missions qui ont déjà été débattues en commission élargie : « Action extérieure de l’État » – sous l’angle du programme « Diplomatie culturelle et d’influence » – et « Sport, jeunesse et vie associative ».

Le bureau de la commission a décidé de consacrer le temps nécessaire à la présentation et à la discussion des rapports de nos rapporteures pour avis, afin de faire honneur au travail qu’elles ont mené pendant plusieurs semaines et de mettre en valeur les thématiques qu’elles ont traitées.

Le 22 octobre dernier, les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » ont été examinés en commission élargie, en présence de Mme Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative, qui a présenté les crédits de son ministère et répondu à de nombreuses questions. Je remercie Marie-George Buffet pour son investissement dans le travail sur cette mission budgétaire.

Madame la rapporteure pour avis, vous avez choisi de vous interroger, au vu des moyens modestes accordés au ministère, sur sa capacité à accomplir ses missions et à respecter les engagements pris en début de législature. Votre enquête vous renforce dans votre préoccupation.

Mme Marie-George Buffet, rapporteure pour avis des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Lors de la commission élargie du 22 octobre, consacrée à la mission « Sport, jeunesse et vie associative », Mme la ministre Valérie Fourneyron a développé ses objectifs avec beaucoup de rigueur et de dynamisme, et a répondu avec précision à toutes nos questions ; son apport au débat fut déterminant.

La mission affiche une hausse de plus de 19,6 % en autorisations d’engagement et de 19,3 % en crédits de paiement. On pourrait s’en féliciter ; mais cette augmentation est liée à l’inscription, en 2014, sur cette mission, d’un pécule de 100 millions d’euros au titre du plan des investissements d’avenir (PIA), utilisable par appel à projets de 2014 à 2017, et qui intéresse également l’éducation nationale. L’audition de Mme la ministre comme celle de M. le ministre de l’éducation ont témoigné de la complexité de gestion et d’utilisation de ce nouveau programme 411, intitulé « Projets innovants en faveur de la jeunesse ». Notre commission devra, à moyen terme, faire un point d’étape quant à la maîtrise de ces crédits par le ministère des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative. En effet, les exigences qui y sont associées – caractère innovant des projets, ampleur des territoires et des réseaux concernés – peuvent exclure de ce financement les réponses à des besoins bien réels, tels que le fonctionnement des centres de loisirs, bouleversé par la réforme des rythmes scolaires.

Si l’on ne tient pas compte de ce programme 411, à périmètre constant, les deux programmes « Sport » et « Jeunesse et vie associative » régressent de 2,9 % et de 1,1 % respectivement. Au-delà du budget pour 2014, la lente érosion des moyens du ministère contribue depuis des années à élargir le fossé entre son champ de compétences et les moyens qui lui sont attribués : 460 millions d’euros. À terme, cette érosion posera la question de l’existence même d’un ministère de plein exercice. En 2012, lors de la commission élargie consacrée au budget pour 2013, le rapporteur de la commission des finances s’était d’ailleurs demandé, avec ironie, si le montant examiné justifiait encore l’existence d’une mission.

Nous sommes tous attachés au ministère des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative, et à ses missions : l’accès de toutes et de tous à la pratique sportive, sur tout le territoire et à tous les niveaux ; la protection des valeurs du sport et de l’intégrité physique et psychique des sportives et des sportifs ; le soutien du mouvement sportif ; le développement de la vie associative dans le respect de ses objectifs propres d’éducation populaire ; l’impulsion d’une politique de jeunesse ; la formation et les métiers correspondant à ces missions. Avec des moyens aussi réduits, le ministère peut-il garder la capacité de les remplir ? Pense-t-on encore que l’intervention publique dans ces champs de compétence reste nécessaire ? Si notre réponse est positive – et je n’en doute pas –, il faut permettre à ce ministère de relever trois défis et d’ouvrir un chantier.

Avant tout, le ministre doit recouvrer la maîtrise de ses personnels. Ce ministère atypique doit gérer un personnel quasiment militant qui connaît bien le sujet et le terrain, régir des métiers spécifiques – conseiller technique, conseiller d’éducation populaire et de
jeunesse – et travailler en partenariat étroit avec le monde associatif et les collectivités territoriales. La révision générale des politiques publiques (RGPP) et, surtout, la disparition des directions déconcentrées ont eu pour conséquence de compliquer la mobilisation, par le ministre, de ses personnels et de dégrader, au niveau départemental, le partenariat avec le mouvement sportif et les associations, pourtant vivace à l’échelle nationale. La méconnaissance des métiers du sport et de l’éducation populaire de la part de l’administration préfectorale crée des frustrations lourdes au sein du personnel. Il faut donc travailler à recréer une véritable direction des ressources humaines propre à ce ministère, à rouvrir un portail « Jeunesse et sport » au niveau des départements, à donner une nouvelle visibilité aux métiers du sport et à continuer à contrôler les écoles nationales dépendant du ministère et les contenus des formations dispensées dans les centres de ressources, d’expertise et de performance sportives (CREPS), aujourd’hui régionalisés.

Le deuxième défi revient à attribuer au ministère un socle de moyens lui permettant d’assurer ses missions premières, ce qui implique de retrouver une capacité de financement public d’État, aujourd’hui marginal – bien inférieur à celui des familles et des collectivités territoriales – et fragilisé par sa dépendance à l’égard de celui du Centre national pour le développement du sport (CNDS), fondé sur les paris en ligne, les jeux et les droits télévisuels. Même si ma proposition doit vous paraître hors du temps, je pense qu’il faut travailler, sur les trois ans à venir, à une progression du budget du ministère, qui lui permettrait de retrouver une marge d’initiative et d’action. Ce défi implique également d’en finir avec le recours systématique aux appels à projets concernant des publics ou des objectifs ciblés. Le financement du sport se justifie, car celui-ci concourt à la santé de la population, à la cohésion et à l’insertion sociales, mais également à la création d’emplois. Le ministère ne peut pas reprendre à son compte tous les objectifs normalement dévolus à ses homologues. C’est en développant les clubs, en augmentant le nombre de licenciés, en renforçant la formation des bénévoles, en préservant l’éthique et les valeurs du sport, en encadrant le sport de haut niveau par des spécialistes, en construisant les infrastructures nécessaires, que l’on arrivera à développer l’emploi, à aménager le territoire, à contribuer à la cohésion sociale, au développement économique et bien entendu à la santé.

Enfin, il faut redonner cohérence et visibilité à l’action du ministère en faveur de la vie associative, de la jeunesse et de l’éducation populaire. La mise en place, par le Gouvernement, du Comité interministériel de la jeunesse, doté d’un délégué interministériel et d’un secrétariat permanent, constitue une avancée considérable. La politique en direction des jeunes – priorité du Président de la République – nécessite une mobilisation de l’ensemble des ministères : emploi, santé, éducation, culture. Cette avancée redonne au ministère des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative le rôle de coordinateur et de pilote, et on ne peut que s’en féliciter. Cela démultipliera sa force d’action et d’initiative, amoindrie par la prolifération des dispositifs en direction de la jeunesse.

Le développement de la vie associative des jeunes et de l’éducation populaire demeure pourtant une responsabilité propre au ministère. L’engagement de la jeunesse se lit dans le succès du service civique qui absorbe les deux tiers de la ligne jeunesse de ce budget et doit, à terme, accueillir 100 000 jeunes. Mais il ne s’y résume pas, s’exprimant également dans les grandes associations de jeunesse. Nous avons ainsi auditionné la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC) qui fait un remarquable travail de proximité, notamment auprès des travailleurs saisonniers. Des associations comme celle-ci jouissent aujourd’hui de peu de visibilité, et demandent à être confortées par un financement pérenne.

Le rapport sur la vie lycéenne avait également abordé la question de la démocratie dans les établissements ; il nous faut soutenir les organisations que se donnent les lycéens ou les étudiants pour mener leur action. Nous devons également conforter les grands réseaux d’éducation populaire. Cela implique de travailler avec eux à une nouvelle évaluation de leur mission – la dernière datant de plus de dix ans – et à une redéfinition de leurs objectifs, et de développer l’aide directe aux associations, notamment à travers le Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (FONJEP) et les subventions.

Le chantier à ouvrir – qui, comme nous l’avons constaté lors de l’audition du président du Comité national olympique et sportif français (CNOSF), M. Denis Masseglia, est en réalité déjà commencé – est celui du modèle sportif français. Celui-ci repose sur une idée simple : le sport est un droit, et appelle à ce titre des politiques publiques. Ces politiques ont commencé, sous le Front populaire, par la création du brevet sportif populaire et les premières aides publiques de l’État à l’équipement communal sportif. Au fil des décennies, on a construit un véritable partage des missions de service public entre l’État et le mouvement sportif : l’État finance les fédérations sportives, qui gardent le monopole de l’organisation de leurs disciplines respectives, y compris des compétitions ; en contrepartie, l’État exerce sur elles une tutelle – qui passe par les agréments, les conventions, l’encadrement des diplômes et des techniques, et les règlements intérieurs –, les droits et les devoirs des fédérations étant inscrits dans la loi. Ce modèle a permis de favoriser l’égalité d’accès au sport, de promouvoir ses valeurs et de conférer à la France la sixième place au niveau international pour le sport de haut niveau. Mais il est aujourd’hui fragilisé par plusieurs évolutions : l’affaiblissement du financement de l’État, le rôle de plus en plus important des collectivités territoriales, le développement du sport professionnel. Rappelons que l’existence d’une ligue professionnelle du rugby ne date que des années 2000 ; le mouvement s’est donc fortement accéléré durant la dernière décennie. Du statut de société anonyme à objet sportif, les clubs passent à celui de société anonyme de droit commun ; on ne sait plus, dès lors – on le constate dans le débat sur la taxation des hauts revenus à 75 % –, si l’on a affaire à des clubs sportifs ou à des entreprises. Certains ont même revendiqué une rupture de la filiation avec l’association sportive, ou évoqué la volonté de créer des ligues fermées.

L’unité même du sport à travers la vie fédérale devient moins évidente. Dans beaucoup de disciplines, la professionnalisation du haut niveau est très avancée ; il est impossible, si l’on veut jouer un rôle de premier plan dans les compétitions internationales, de mener en parallèle une carrière professionnelle. Le développement du sport de loisir se poursuit également. Les disciplines sont de plus en plus nombreuses – elles se sont par exemple multipliées dans le domaine des arts martiaux –, mais de moins en moins à bénéficier d’une véritable visibilité médiatique. Le rôle des structures – notamment des fédérations – internationales s’est accru ; le rugby, par exemple, cherche en ce moment à se doter d’une structure européenne équivalant à celle du football.

Face à ces réalités, nombreux sont ceux qui estiment – dans tous les courants partisans – que l’État devrait limiter son action au soutien au sport pour tous, que le sport de haut niveau devrait relever du mouvement sportif – et notamment du CNOSF et des fédérations –, et le sport professionnel vivre sa vie indépendante des missions de service public. Pour ma part, je m’y oppose ; le sport étant un droit, l’égalité d’accès de tous et de toutes à la pratique sportive, à tous les niveaux et sur tout le territoire, tout comme le soutien aux valeurs et à l’éthique du sport, exigent une impulsion de l’État, une régulation et un contrôle. La capacité d’autorégulation du mouvement sportif n’est pas avérée : on a pu le constater dans le cas de la lutte contre le dopage où il a fallu que les États européens interviennent au niveau international pour que le Code mondial antidopage voie le jour. De même, il est nécessaire d’établir des outils de contrôle et de gestion pour réguler l’argent qui circule dans le sport.

Seul le financement public peut assurer la pérennité de toutes les disciplines, dont certaines seraient condamnées en cas de passage au financement privé. Dans le domaine sportif, l’engagement public est tout aussi nécessaire qu’il l’est dans celui de l’éducation. Mais il faut modifier les conditions du partenariat, clarifier les compétences et redonner à la puissance publique – aux collectivités, mais également au ministère – les moyens d’assurer sa mission. Il faut également développer la vie démocratique des fédérations, car faire débattre les orientations et les objectifs du mouvement sportif par l’ensemble des licenciés en rehausserait la force et la portée. Le projet de loi de programmation et d’orientation qui nous sera présenté par Mme la ministre en 2014 devrait répondre à toutes ces interrogations.

Le ministère des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative représente un très bel outil de l’action de l’État, et il est temps de lui redonner les moyens indispensables à son ambition. C’est ainsi qu’il faut comprendre mon appel à l’abstention sur ce budget : au lieu de se plaindre, année après année, de sa petitesse, il faut donner un signe fort en faveur de son augmentation, pour qu’il continue à alimenter un véritable ministère capable de prendre les initiatives nécessaires.

M. Pierre Léautey. Avant tout, je tiens à saluer la qualité du travail et la connaissance du sujet de notre rapporteure pour avis.

Le budget total du ministère des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative s’élève, pour 2014, à 833 millions d’euros, avec une dotation exceptionnelle de 100 millions d’euros issue du programme d’investissements d’avenir (PIA). Cette dotation assure une hausse de 14 % du budget du ministère et apporte un soutien fort en faveur de la jeunesse, notre priorité. Hors PIA, le budget reste globalement stable – fait notable dans le contexte des nécessaires restrictions budgétaires. Il traduit la feuille de route du Gouvernement – qui donne la priorité à l’emploi, à la croissance et à la jeunesse – tout en permettant de respecter nos engagements en matière de maîtrise des dépenses publiques.

Ainsi, le ministère s’engage à porter 15 000 emplois d’avenir, soit 10 % du total prévu ; à ce jour, les deux tiers de cet objectif sont déjà atteints. Le soutien à l’emploi associatif représente 51 millions d’euros, 26 millions étant alloués au FONJEP – qui accompagnera 3 700 emplois qualifiés – et le reste au CNDS – qui soutiendra 3 000 emplois dans les associations sportives. L’allègement – à hauteur de 314 millions d’euros – des charges pour les associations employeurs, grâce à l’abattement de la taxe sur les salaires, constitue également une mesure forte en faveur de l’emploi associatif. Au total, tous ministères confondus, 81 milliards d’euros sont consacrés à la jeunesse. Le projet de loi de finances 2014 intègre un nouveau programme 411, intitulé « Projets innovants en faveur de la jeunesse », doté de 100 millions d’euros, dont la vocation est d’accompagner la réalisation de projets permettant de lutter efficacement contre les inégalités sociales et territoriales ; il s’agit d’une réelle avancée dont la mise en œuvre reste à préciser.

Plus largement, le ministère poursuit les engagements formulés dès 2012 : l’accès au sport pour tous, la lutte contre les inégalités d’accès à la pratique sportive, la promotion du sport comme outil de santé publique, le rayonnement de la France sur la scène sportive internationale, l’accompagnement individualisé des sportifs de haut niveau et une attention accrue à la lutte contre le dopage – en France et à l’international – et à celle contre les matchs truqués.

Par ailleurs, les fédérations sportives – socle de notre modèle – bénéficient toujours de plus de 30 % des crédits alloués à l’ensemble du programme. Le ministère continue à mettre à leur disposition des moyens humains : plus de 1 600 conseillers techniques et sportifs auront pour mission de les accompagner, ce qui représente un effort de 105 millions d’euros financé par l’État. Quant au CNDS, sa réforme, tout comme le redressement de ses comptes, se poursuit. La ministre a d’ailleurs réaffirmé sa vocation initiale : le développement des pratiques sportives, la lutte contre les inégalités d’accès et l’aide aux territoires.

Les crédits alloués au sport de haut niveau augmenteront de 2,5 % par rapport à 2013, afin de prendre en charge les frais d’études des sportifs ou les coûts liés à la pratique, mais également l’insertion professionnelle et les droits à la retraite.

Enfin, s’agissant du programme « Jeunesse et vie associative », et au-delà du PIA, le ministère a souhaité, pour 2014, mettre l’accent sur l’emploi et la mobilité des jeunes ; cette dernière – élément clé de leur formation – bénéficiera du programme de mobilité « Erasmus + ». L’engagement des jeunes sera conforté, 146 millions d’euros étant prévus en 2014 pour accompagner la montée en charge du service civique. Le soutien direct à l’emploi du secteur associatif et à l’éducation populaire représente une nouvelle stratégie 2013-2015 du Fonds d’expérimentation pour la jeunesse.

Enfin, le ministère prend toute sa part dans l’objectif de maîtrise des finances publiques, à travers une stratégie d’optimisation dans l’ensemble de ses secteurs d’intervention. Il en va ainsi de la politique volontariste visant à régler les dossiers qui grevaient le budget du ministère, qui comprend notamment – conformément aux engagements pris en 2012 – la suppression du versement de l’indemnité pour absence de club résident au consortium Stade de France. Ces mesures symbolisent la volonté de la ministre de construire une politique cohérente et ambitieuse, soucieuse de l’argent public ; c’est pourquoi le groupe SRC votera les crédits pour 2014 de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

M. Guénhaël Huet. Je salue, moi aussi, le travail réalisé par Marie-George Buffet, la passion et l’objectivité dont elle fait preuve dans ses analyses.

Lors de son audition en commission élargie, Mme la ministre avait évoqué un budget marqué par l’« ambition » et la « solidité retrouvée ». Certes, le projet de loi de finances pour 2013 ayant sérieusement malmené la mission « Sport, jeunesse et vie associative », on pouvait s’attendre, cette année, à une amélioration. Mais le budget qui nous est présenté ne permet pas de confirmer l’optimisme ministériel. En effet, ainsi que l’a indiqué Mme la rapporteure pour avis, les crédits du programme « Sport » ont diminué de 2,8 % en autorisations d’engagement et de 2,9 % en crédits de paiement par rapport à l’année 2013. Ceux du programme « Jeunesse et vie associative » ont pour leur part diminué de 1,1 %. Seul le changement de périmètre de la mission, avec l’adjonction d’un nouveau programme intitulé « Projets innovants en faveur de la jeunesse », permet de sauver les apparences, même si la dotation de 100 millions d’euros devra s’étaler sur quatre années et sera partagée avec le ministère de l’éducation. En réalité, on assiste donc bien à une érosion des crédits consacrés à la mission « Sport, jeunesse et vie associative », et l’on ne peut que s’en inquiéter.

Au sein du programme « Sport », les crédits affectés au sport pour le plus grand nombre baissent de 51,7 % hors la réserve parlementaire – ce qui n’empêche pas Mme la ministre de clamer qu’il s’agit d’une de ses priorités. Ceux alloués aux fédérations sportives diminuent également de 2,3 %, passant de 85 à 83 millions d’euros, avec notamment des incertitudes quant à l’évolution du nombre de conseillers techniques mis à disposition des fédérations. Seule augmentation que l’on trouve dans ce budget : celle des crédits en faveur du sport de haut niveau, qui progressent de 2,8 % en crédits de paiement. Cependant – et le groupe UMP a déposé un amendement en ce sens –, le ministère devrait fournir des précisions quant à sa volonté en matière d’organisation de manifestations sportives internationales. Celle de l’Euro 2016, à venir, est pour l’essentiel due à l’investissement personnel du précédent Président de la République et de son gouvernement ; mais, actuellement, on manque de visibilité sur les intentions du ministère dans ce domaine.

S’agissant de la taxation des hauts revenus à 75 %, d’aucuns prétendent que les clubs de football sont des entreprises comme les autres, et qu’il n’y a donc aucune raison de les en dispenser. Pourtant, les entreprises classiques ont la possibilité d’externaliser ou d’expatrier les hauts revenus, alors que les clubs de football – qui, par définition, doivent conserver les hautes rémunérations sur le sol français – n’ont pas cette possibilité. Cette taxe est hautement symbolique ; mais on ne gouverne pas uniquement avec des symboles, et la réalité finit toujours par avoir le dernier mot. Cette taxe risque de poser de sérieux problèmes aux clubs professionnels français, dont la majorité sont déjà confrontés à de graves difficultés financières.

Les crédits consacrés à la prévention par le sport et à la protection des sportifs chutent de 1,6 %. Cette baisse affectera à terme le fonctionnement de l’Agence française de lutte contre le dopage (AFLD), alors même que le rapport sénatorial rendu public en juillet dernier montre qu’il reste encore beaucoup à faire dans ce domaine, toutes disciplines confondues.

Pour résumer, plusieurs questions se posent à propose du programme « Sport » : l’évolution du nombre des conseillers techniques mis à disposition des fédérations, l’avenir de la lutte contre le dopage, l’élargissement de l’assiette de la taxe dite « Buffet », ou encore le financement du plan piscine – évoqué par la ministre, mais n’apparaissant nulle part dans les crédits du ministère. On souhaite que le projet de loi de programmation et d’orientation qui nous sera présenté réponde au moins à certaines de ces préoccupations, mais, au vu de la tournure que prennent les propositions budgétaires, on ne peut que craindre pour l’avenir du sport dans notre pays.

S’agissant du programme « Jeunesse et vie associative », nous saluons la forte augmentation des crédits destinés au service civique, mais déplorons la baisse des crédits déconcentrés et des crédits alloués à l’éducation populaire. Nous nous interrogeons également sur ce nouveau programme 411 doté de 100 millions d’euros, dont on ne sait ni ce qu’il recouvrira précisément, ni sur quelle durée, ni comment s’effectuera le partage entre le ministère des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative et celui de l’éducation.

Pour toutes ces raisons, le groupe UMP ne votera pas les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

M. Rudy Salles. Je salue à mon tour le travail réalisé par Mme Buffet ; son réquisitoire – dont je tiens à la féliciter – frappe par son réalisme. Sa position n’a, du reste, rien de nouveau : ainsi, dans la majorité comme dans l’opposition, Charles Ehrmann – député niçois, ancien doyen de l’Assemblée nationale et défenseur du sport – a toujours voté contre le budget des sports, qu’il considérait comme mauvais, quelle que soit la majorité au pouvoir.

Parce que l’ensemble des enjeux qu’elle rassemble représente des vecteurs de « vivre ensemble », de mixité et de brassage social, la mission « Sport, jeunesse et vie associative » ne saurait se réduire à une variable d’ajustement du budget général. Le sport n’est pas un simple divertissement ; il porte le sens des valeurs, le goût de l’effort et le développement de l’esprit collectif. Le monde du sport fait travailler et vivre des milliers de Français, et en fait rêver des millions d’autres.

Le monde associatif est devenu au fil du temps une composante indispensable du socle économique, social, solidaire et environnemental de notre modèle ; l’ensemble de ses institutions – comme l’Agence du service civique (ASC) ou l’Institut national de la jeunesse et de l’éducation populaire (INJEP) – et de ses acteurs, qui donnent tant, méritent pleinement le soutien – y compris financier – de l’État.

Le Président de la République aurait-il, une fois de plus, fait marche arrière ? Nous le craignons. La priorité donnée à la jeunesse est une promesse mort-née, ce budget pour 2014 en est la preuve. Les crédits de l’action « Promotion du sport pour le plus grand nombre » sont divisés par deux. La vie associative et l’éducation populaire voient également leurs crédits baisser. Dans leur ensemble, les crédits alloués à la jeunesse et à la vie associative subissent une baisse préjudiciable de 2,5 millions d’euros. Là aussi, les moyens semblent grandement déconnectés des objectifs et des ambitions que le Gouvernement s’était fixés.

Certes, l’arrivée dans cette mission d’un nouveau programme intitulé « Projets innovants en faveur de la jeunesse » est à mettre à son crédit, mais, à y regarder de plus près, son contenu apparaît bien léger. Pour un peu, on n’y verrait qu’une nouvelle tentative de nous jeter de la poudre aux yeux !

Fort heureusement, la fuite de ces financements ne correspond pas entièrement à une perte pour la mission « Sport, jeunesse et vie associative », le Gouvernement ayant choisi de mettre l’accent sur le sport de haut niveau et le rayonnement de nos champions à l’étranger. Il semblerait pourtant que sa main gauche ignore ce que fait sa main droite, puisque le projet de loi de finances pour 2014 instaure par ailleurs, à la charge des clubs, une taxe à 75 % sur les salaires des sportifs. Nombre de ces clubs verront ainsi leur budget déstabilisé, à tel point, d’ailleurs, que certains ont décidé de se mettre en grève à la fin du mois de novembre : du jamais vu depuis les années 1920 !

Les choix du Gouvernement sont définitivement fâcheux et mauvais pour le monde du sport, pour l’accès de tous aux activités physiques et sportives et pour le développement du monde associatif. Le groupe UDI ne peut qu’émettre un avis défavorable sur les crédits de cette mission.

M. Thierry Braillard. Je félicite à mon tour la rapporteure pour avis pour son travail exhaustif. Ce rapport est un rapport d’alerte sur l’existence même d’un ministère à part entière chargé de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

Convaincus que l’intervention publique est utile et nécessaire, nous voyons malgré tout dans ce projet de budget des signes encourageants. L’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (INSEP) voit ses moyens confortés. Son rôle de pilotage du réseau du sport de haut niveau et des parcours de l’excellence sportive est renforcé, en lien plus étroit avec les fédérations. L’institut a également mis en place, à l’intention des sportifs en fin de carrière, une cellule de reconversion. Ses infrastructures bénéficient d’investissements dont elles avaient bien besoin.

La question des CREPS, en revanche, reste posée. Ne devrait-on pas les transférer aux régions ?

Le sauvetage du CNDS et le recentrage de ses missions sur le sport pour tous sont un autre sujet de satisfaction. L’offre d’infrastructures doit être confortée dans des territoires parfois oubliés, certes, mais pas seulement. Il faut favoriser l’investissement dans les équipements aussi bien en zone urbaine qu’en zone rurale. À titre d’exemple, notre pays manque de halles d’athlétisme. Il n’y en a pas une seule dans toute la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, si bien que le comité départemental des Hautes-Alpes est contraint d’organiser son championnat à Lyon !

Nous nous réjouissons également du renforcement de l’emploi associatif via un soutien marqué au FONJEP et au Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA). Le soutien aux associations et fédérations nationales de jeunesse et d’éducation populaire bénéficie d’une dotation de 9 millions d’euros. Par ailleurs, les contrats d’avenir sont un succès : ils représentent 10 % des emplois dans les structures consacrées à la jeunesse et au sport.

En ce qui concerne les moyens du ministère, nous ne pouvons que partager l’avis de Mme la rapporteure pour avis. Les services déconcentrés ne peuvent plus se consacrer à leur mission de proximité. Mais si réquisitoire il y a, mes chers collègues de l’opposition, c’est un réquisitoire contre votre RGPP et contre tout ce que vous avez fait pendant dix ans ! On est passé d’une direction départementale dédiée à une direction englobant la solidarité, l’insertion et l’égalité des chances. Le ministère n’a donc plus de réelle maîtrise de ses moyens d’action sur le terrain.

Par ailleurs, le succès du service civique a des effets chronophages qui peuvent, à terme, grever les crédits du ministère.

L’État s’est désengagé des années durant du tissu associatif et de l’éducation populaire. Les collectivités territoriales ont été amenées à prendre le relais, mais en recourant le plus souvent à des appels à projets qui font passer au second plan le projet associatif. En commission élargie, la ministre s’est montrée rassurante sur ce point, annonçant des propositions gouvernementales pour sécuriser la subvention associative.

Enfin, nous regrettons la désorganisation administrative de la vie associative. Le système paraît à bout de souffle, incapable, notamment, d’informatiser correctement ses bases de données.

Le groupe RRDP votera le budget de la jeunesse, du sport, de la vie associative et de l’éducation populaire, en attendant la discussion du prochain projet de loi de programmation et d’orientation du sport.

M. Régis Juanico, rapporteur spécial de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». Alors que la discussion en commission élargie avait porté principalement sur les aspects budgétaires, je trouve intéressant que nous puissions débattre cet après-midi des sujets mis en exergue par Mme Marie-George Buffet dans son rapport pour avis.

S’agissant des crédits, je me suis efforcé de mettre en relief les évolutions à périmètre comparable. Si l’on additionne l’ensemble des programmes et si l’on raisonne à coûts complets, en tenant compte des déversements issus d’autres programmes et correspondant aux moyens de fonctionnement et aux dépenses de personnels du ministère, on arrive à un chiffre légèrement supérieur à 1 milliard d’euros, soit une augmentation de 10 % par rapport à 2013. Mais on a toutes les raisons de retrancher de ce montant les 100 millions du programme exceptionnel 411, qui s’étalera jusqu’en 2017 et pour lequel les premières dépenses interviendront en 2015, l’année 2014 étant consacrée à l’appel à projets. En réalité, donc, les moyens de la mission restent stables par rapport à l’année dernière. On ne peut parler de diminution.

Les recettes du CNDS ont été préservées. Cela n’avait rien d’évident : tous les autres opérateurs de l’État ont été mis à contribution, avec une baisse de 4 % en moyenne.

Je veux aussi préciser que les 100 millions d’euros du PIA sont bien rattachés à la mission « Sport, jeunesse et vie associative » dans le bleu budgétaire. L’éducation nationale bénéficiera d’autres volets de ce plan – par exemple les 150 millions d’euros supplémentaires destinés aux internats de la réussite, pour un objectif de 6 000 places nouvelles. Cela étant, entre le PIA, le Fonds d’expérimentation pour la jeunesse – qui bénéficiera de 12 millions d’euros en trois ans, sur des thèmes qui se recoupent parfois avec ceux des investissements d’avenir – et la convention passée entre le ministère et l’entreprise Total pour 17 millions d’euros, là encore sur des thèmes semblables, je trouve, comme Mme Buffet, que le recours aux appels à projets est trop fréquent. Le ministère et le Parlement doivent non seulement contrôler ces appels à projets, mais aussi redonner des marges de manœuvre aux acteurs concernés.

Je partage certains constats de la rapporteure pour avis au sujet des services déconcentrés du ministère. Il faut aujourd’hui redonner de l’oxygène aux personnels. J’ai mentionné en commission élargie les 250 ETPT consacrés à la seule instruction des dossiers du CNDS : je pourrais aussi évoquer les dossiers du service civique, parfois plus épais. Une action volontaire pour simplifier ces dossiers aussi bien pour les utilisateurs que pour les services instructeurs permettrait d’affecter de nouveau les personnels aux missions centrales du ministère.

M. Patrick Hetzel. Je remercie Mme Marie-George Buffet de nous proposer un avis au sens plein du terme, assorti de véritables prises de position.

J’aimerais également recueillir son avis sur un point précis. Alors que nos concitoyens tiennent beaucoup aux retransmissions sportives à la télévision, il est de plus en plus difficile d’avoir un accès gratuit aux grands événements, accaparés par les chaînes payantes. Les Français souhaitent notamment que le bouquet de la TNT offre un plus grand nombre de matchs de football.

Mme Sophie Dion. Je m’associe aux félicitations que mes collègues vous ont adressées, madame la rapporteure pour avis.

Les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » ne sont pas à la hauteur des besoins, estimez-vous dans votre avis. Vous regrettez notamment la baisse de près de 3 % des crédits du programme « Sport » : les crédits destinés aux fédérations et à la promotion des métiers du sport diminuent, ceux de l’action « Promotion du sport pour le plus grand nombre » sont amputés de 51,7 %.

Je constate, à cet égard, que ce projet de budget ne considère pas les territoires ruraux et de montagne comme prioritaires en matière de développement de la pratique sportive. Alors que l’on nous répète à l’envi que le sport est un outil d’aménagement du territoire, quelle place leur réserve-t-on ? Selon une étude menée par le ministère des sports en 2012, 36 % des communes rurales ne disposent pas d’équipements sportifs. De ce fait, elles ne peuvent organiser le temps extrascolaire comme le Gouvernement le leur impose. Plus généralement, les déplacements représentent une contrainte importante, tant pour les salariés encadrant les activités sportives et partageant leur temps de travail entre plusieurs sites que pour les pratiquants.

Le sport est un enjeu de développement et d’attractivité des territoires. Je regrette que ce projet ignore, une fois de plus, le fait rural.

M. Benoist Apparu. L’esprit du programme d’investissements d’avenir était de sortir de la logique de l’annualisation budgétaire afin de préparer la croissance pour les vingt prochaines années. Il ne s’agissait pas de se ménager – comme le fait le Gouvernement avec le deuxième PIA – un « troisième tour » budgétaire parce que le ministère n’a pas obtenu les crédits souhaités. Je regrette donc que cette mission, à l’instar de la mission « Enseignement scolaire », inscrive dans le budget les crédits du PIA, les transformant de fait en crédits de droit commun et les détournant de leur destination initiale.

D’autre part, lorsqu’ils paient leur licence sportive, nos concitoyens croient financer leur club : or 90 % du montant de cette licence remontent à la fédération. Le financement global des circuits sportifs pose un problème !

M. Dominique Le Mèner. Si ce budget avait été présenté par la précédente majorité, nul doute que vous auriez formulé un avis de rejet pur et simple et nous d’abstention, madame la rapporteure pour avis !

La formulation à laquelle vous recourez au sujet du service civique – « le poids du service civique » – ne laisse pas de nous inquiéter, car elle suggère que vous souhaitez en limiter l’accès. L’objectif est pourtant la montée en puissance, jusqu’en 2017, d’un dispositif dont chacun peut constater le succès localement, faute d’évaluation globale. Le bénéfice pour nos associations et nos clubs est aujourd’hui avéré. Pourriez-vous nous rassurer sur la pérennité des moyens alloués au service civique ?

M. le président Patrick Bloche. La Commission a récemment auditionné MM. Jean Gachassin et Gilbert Ysern, respectivement président et directeur général de la Fédération française de tennis. Bien que le sujet principal fût le nouveau Roland-Garros, M. Ysern nous a également livré les raisons pour lesquelles, selon la fédération, l’appel d’offres qu’elle avait lancé avait échoué. Je me suis, depuis lors, entretenu avec le directeur du service des sports de France Télévisions, M. Daniel Bilalian. Celui-ci a une vision quelque peu différente de cet échec. Il m’a redit la volonté très forte que France Télévisions avait de jouer pleinement sa mission de service public et de continuer à diffuser dans les prochaines années le tournoi de Roland-Garros, toute comme le Tour de France, dont il vient de conserver les droits de diffusion.

Mme la rapporteure pour avis. Il n’y a pas de partage des 100 millions d’euros du programme 411 entre le ministère de l’éducation nationale et celui des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative : seul le second pilotera l’utilisation de ce montant. Mais, dans sa brochure de présentation du budget, le ministère de l’éducation exerce une amicale pression en suggérant que cet argent pourrait être utilisé intelligemment en partenariat entre les deux départements. Il conviendra donc que notre commission suive attentivement l’emploi de ces sommes.

Ce programme m’inquiète surtout par sa complexité. Après avoir écouté les réponses que l’on nous a faites dans les deux commissions élargies, je ne saisis toujours pas quelle est la nature des projets qui pourraient bénéficier de ces 100 millions d’euros de soutien. J’ai redemandé au ministère des éclaircissements, dans le dessein d’aider les élus et les réseaux associatifs à monter les projets.

Par ailleurs, si la ministre a sanctuarisé les postes de cadres techniques et sportifs dans le budget pour 2014, je veux alerter la commission à propos du discours tenu par certaines fédérations, qui estiment que ces cadres ne correspondent plus à leurs besoins en matière d’encadrement et d’entraînement, et qui préfèrent faire appel à des entraîneurs évoluant dans le privé. Il conviendra peut-être de revisiter les fonctions des cadres techniques pour maintenir l’excellence qui était la leur jusqu’à présent.

S’agissant de la lutte contre le dopage, les crédits sont maintenus. Je crois toutefois que l’action de l’Agence mondiale antidopage perd un peu en intensité. Selon moi, le financement doit essentiellement servir à aider la recherche. Si nous voulons gagner la course-poursuite à laquelle nous contraint l’apparition constante de nouveaux produits dopants, il faut que nos laboratoires – au premier rang desquels l’excellent laboratoire national de détection du dopage de Châtenay-Malabry, qui a découvert notamment comment détecter l’EPO – dispose des financements nécessaires.

Je n’ai rien contre le service civique, monsieur Le Mèner. Le problème, c’est de se donner les moyens d’atteindre l’objectif de 100 000 jeunes volontaires en 2017. Soit nous suivons les voies envisagées par le président de l’Agence du service civique, M. Martin Hirsch, notamment pour réduire la durée ou l’indemnité de certains services – mais il me semble problématique de créer plusieurs services civiques de nature et de valeur différentes –, soit nous accordons les crédits nécessaires au financement du dispositif, ce qui nécessite une augmentation de la ligne « Actions en faveur de la jeunesse et de l’éducation populaire », car il est exclu que cette montée en puissance se fasse au détriment des associations évoluant dans ces domaines.

S’agissant du budget de la jeunesse, des sports et de la vie associative, le réquisitoire porte sur les décennies passées. Lors de son examen, c’est le même « chœur des pleureuses » qui se fait entendre tous les ans, sur tous les bancs de l’Assemblée nationale. Or on ne peut demander à ce petit budget d’être à la fois un facteur de cohésion sociale, un instrument de lutte contre l’exclusion et de résolution des problèmes des quartiers difficiles, un élément de promotion de la mixité, et ainsi de suite, si l’on en reste à ces montants et si l’on prive le ministère de son personnel. Comment voulez-vous qu’une ministre fasse passer ses objectifs si elle ne dispose pas d’une administration qui s’y consacre pleinement ?

Je n’appelle pas à critiquer tel ou tel. Des promesses, tout le monde en a fait ! M. Sarkozy s’était même engagé devant le CNOSF à allouer à la jeunesse et aux sports 3 % du budget de l’État. Aussi notre commission doit-elle insister auprès du Gouvernement pour qu’il revisite ce budget dans les prochaines années afin de redonner au ministère sa capacité d’initiative. C’est parce que celui-ci est privé de marges de manœuvre qu’il fait du ciblage à tout prix, essayant de tirer quelques subsides de la politique de la ville pour soutenir les associations de proximité au détriment des grands réseaux, ou pour aménager un terrain de proximité au détriment du club local, ce qui aboutit à enfermer les jeunes et les associations dans leurs quartiers alors que la politique dont nous avons besoin doit se développer au niveau du territoire.

Ce matin même, d’ailleurs, j’ai entendu le ministre délégué chargé de la ville demander qu’on arrête le ciblage excessif et que l’on mène la politique de la ville au niveau du territoire de la commune. Cela devrait inciter le ministère des sports, de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative à élargir l’aide au financement des associations. L’« hyper-ciblage » est source de problèmes : si l’on dit, par exemple, que la question des femmes est prioritaire, toute association ou tout club sportif ayant besoin de moyens saura monter un projet dirigé vers les femmes. Quant à la réalité de la mise en œuvre de ces projets, mieux vaudrait y regarder de plus près !

Il me paraît plus efficace, sur le long terme, de faire confiance aux associations et aux clubs en leur assurant un budget de fonctionnement, quitte à discuter ensuite, lors des conventionnements, de la réalité de leur action.

Je pense aussi que ce ministère peut être une source d’emploi dans la mesure où il comprend différents métiers en son sein et propose des formations à ces métiers. Après l’expérience des emplois jeunes, il se place de façon satisfaisante sur les emplois d’avenir, précisément parce qu’il a encore la capacité de former ces jeunes et de les accueillir dans les associations. Si nous remettons en cause les moyens de formation du ministère et si nous diminuons encore les subventions aux associations, celles-ci ne pourront plus accueillir ces emplois.

Je précise que toutes les associations nous ont dit qu’elles avaient besoin d’emplois qualifiés, tant pour leur fonctionnement que pour l’accueil des emplois d’avenir. On ne peut résoudre la question de l’emploi dans le milieu associatif par les seuls emplois aidés. Il faut aussi des emplois qualifiés, et c’est là le rôle du FONJEP.

Concernant l’accès de tous aux retransmissions sportives à la télévision, Monsieur Hetzel, on peut, bien sûr, élargir par décret la liste des événements d’importance majeure. Mme Fourneyron y travaille avec la ministre de la culture et de la communication. Mais la question principale est celle de la régulation. Si, comme c’est le cas aujourd’hui, certaines fédérations – en nombre limité, il est vrai – essaient d’asseoir leur budget presque exclusivement sur les droits télévisuels, elles créent un cercle vicieux en faisant monter des enchères que la télévision publique ne peut suivre. Le budget des droits de retransmissions sportives de France Télévisions diminuera de 10 millions d’euros en 2014. Ce sont donc des chaînes comme BeIN Sport qui, à la suite de Canal Plus qui s’affronte maintenant à plus gros que lui, achètent les droits.

La régulation des droits télévisuels est un sujet important. Comment les cinq ou six fédérations en cause pourraient-elles construire leur budget pour réguler le montant de ces droits ?

S’agissant de la taxe « Buffet », j’attends les propositions que feront les deux ministres concernées. Pour les droits signés à l’étranger mais qui concernent des événements se déroulant en France, on se dirige vers un règlement de la taxe par les seuls télédiffuseurs, ce qui entraîne de vives protestations de leur part. Je souhaite, pour ma part, que l’on s’en tienne à l’esprit de cette taxe, qui vise à ce que le sport professionnel contribue au financement du sport amateur.

Pour ce qui est des licences, monsieur Apparu, on ne résoudra le problème de la circulation de l’argent dans les fédérations que si l’on franchit le pas démocratique que j’évoquais en introduction.

Aujourd’hui, la vie d’une fédération est réglée par des élections et des cooptations. Le licencié et le bénévole n’ont guère leur mot à dire sur les grandes orientations fédérales, notamment en matière de financement. Tant que l’on n’aura pas donné davantage la parole aux acteurs du mouvement sportif, je ne vois pas comment on pourra faire bouger la répartition des coûts et de l’argent dans les fédérations.

Vous avez raison, monsieur Huet : la Ligue 1 ne se résume pas au Paris-Saint-Germain, à Monaco et à Marseille. Nous l’avons d’ailleurs constaté en préparant, avec vous-même, M. Braillard et M. Deguilhem, notre rapport d’information sur le fair-play financier. Certains clubs sont en grande difficulté. Nous avons vu ce qui s’est passé au Mans et nous connaissons la grande fragilité d’un club comme celui de Lille. Mais ce n’est pas la taxe à 75 % qui les a plongés dans ces difficultés : c’est le poids de la masse salariale dans leur budget. Tant que l’on n’aura pas établi une régulation des salaires, en fixant notamment un salaire plafond, tant que l’on n’aura pas limité les transferts à une seule période par année et non à deux, tant que les agents sportifs ne seront pas rétribués par les seuls joueurs, nos clubs continueront à éprouver ces difficultés.

À moins que l’on n’espère que tous soient rachetés par des fonds, à l’instar du PSG ou de l’AS Monaco ! Lors de leur audition, nous avons demandé aux équipes dirigeantes de ces deux clubs si elles avaient une garantie sur la pérennité de l’engagement de leurs investisseurs qataris ou russes. Elles n’en ont aucune. Tout peut s’écrouler demain.

C’est bien pourquoi il faut reconstruire les budgets des clubs de football professionnel sur des bases différentes. J’espère que les préconisations adoptées sur ce sujet à l’unanimité par notre commission seront suivies d’effets, notamment dans le projet de loi de programmation et d’orientation du sport.

Enfin, je pense que l’organisation de grandes compétitions internationales dans notre pays est indispensable au développement de l’envie de sport chez les enfants et les jeunes. Chaque fois que nous accueillons un grand événement sportif, la pratique sportive de tous y gagne. Il n’y a nullement opposition entre ces deux aspects. Mais il faudra un jour oser interroger les fédérations internationales sur les conditions qu’elles exigent des pays pour qu’ils puissent accueillir une compétition internationale. Le nombre de pays candidats à l’organisation de certains événements diminue, car cela leur devient inaccessible. Lors des Jeux olympiques d’Athènes, le Comité international olympique avait réfléchi aux moyens de mettre les Jeux à la portée d’un plus grand nombre de pays. Cette réflexion a volé en éclats et la course au gigantisme a repris. Je souhaite néanmoins que la France se batte pour obtenir des compétitions.

M. le président Patrick Bloche. Merci, Madame Buffet. Nous avons pris le temps d’un débat qui nous a permis d’aller au fond de nombreux sujets.

La Commission est saisie d’un amendement II-AC2 de M. Guénhaël Huet, portant article additionnel après l’article 76.

M. Guénhaël Huet. Cet amendement vise à solliciter du Gouvernement la présentation, avant l’examen de la loi de programmation et d’orientation du sport, d’un rapport sur l’accueil des compétitions sportives internationales en France, leur coût et leur bénéfice économique.

Mme la rapporteure pour avis. L’amendement se réfère à un projet de loi dont nous ne connaissons ni la teneur ni le calendrier d’examen. Il serait préférable, je crois, de formuler un vœu auprès de la ministre pour que notre commission participe à la réflexion sur les thèmes que vous mentionnez dans l’amendement.

M. Guénhaël Huet. J’apprécie la subtilité de votre argumentation. Mais, entre un vœu et un amendement, il y a une belle différence. Je maintiens mon amendement.

M. Pascal Deguilhem. L’accueil d’une grande compétition internationale peut être évalué autrement que dans le cadre d’un rapport demandé avant même l’examen du futur projet de loi de programmation et d’orientation du sport. Il est plus raisonnable d’attendre l’examen de ce texte qui, peut-être, précisera les contours et les conditions de l’accueil du sport de haut niveau. L’amendement n’est donc pas utile.

M. Patrick Hetzel. L’accueil de telles compétitions est un sujet stratégique, qui provoque des discussions sur leur coût et leurs éventuelles retombées économiques. Disposer de données objectives est donc nécessaire à la fois pour le décideur public et le législateur. Cet amendement permettra d’apaiser le débat parlementaire en évitant les postures.

M. le président Patrick Bloche. Si l’objet de cet amendement mérite intérêt, en revanche, il est inopérant sur le plan juridique puisqu’il vise un texte qui n’a pas encore été présenté en conseil des ministres et n’a donc même pas valeur de projet de loi. Cet amendement repose donc sur du vide.

M. Patrick Hetzel. L’amendement fait simplement référence au futur projet de loi.

M. le président Patrick Bloche. La faiblesse de votre amendement, c’est l’absence de tout projet de loi.

Pourquoi ne pas poser la question à Mme  Fourneyron lorsque le budget des sports sera examiné en séance publique ?

M. Pascal Deguilhem. Je tiens à rappeler la dérive du financement de l’accueil des grandes compétitions internationales au sein du CNDS sous la précédente législature. De plus, Mme Fourneyron a déjà prévu une reformulation des conditions de l’accueil des grandes compétitions internationales. Peut-être cet amendement sera-t-il déjà satisfait avant même l’examen du projet de loi d’orientation.

Mme Sophie Dion. Au nom de mes collègues de l’UMP, je tiens à insister sur la nécessité de traiter cette question. Trop souvent, en effet, on reproche aux grandes compétitions internationales le coût de leur accueil, alors qu’elles ont un effet d’entraînement au profit des petits clubs qui voient leur nombre de licenciés augmenter.

Monsieur le président, vous avez raison, il est difficile de soutenir cet amendement en l’absence du texte auquel il se réfère. C’est pourquoi nous le retirons, tout en nous en remettant à la sagesse du président de la commission.

M. Guénhaël Huet. Nous souhaitons que la commission prenne acte de la nécessité de travailler sur cette question le moment venu.

M. Patrick Hetzel. Nous espérons que, avant l’examen du projet de loi de programmation et d’orientation sur le sport, un parlementaire sera missionné sur le sujet. En effet, il me semble qu’un consensus existe pour faire toute la lumière sur le coût véritable et les bénéfices économiques réels qu’entraîne l’organisation de compétitions sportives internationales sur notre territoire.

L’amendement II-AC2 est retiré.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits pour 2014 de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation examine, pour avis, les crédits pour 2014 de la mission « Action extérieure de l’État » sur le rapport de Mme Claudine Schmid (Diplomatie culturelle et d’influence).

M. le président Patrick Bloche. Les crédits de la mission « Action extérieure de l’État » ont déjà fait l’objet d’une commission élargie, le 22 octobre dernier, en présence de M.  Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères, qui a répondu aux questions budgétaires qui lui ont été posées par les députés présents.

Comme pour la mission précédente, le projet d’avis de notre collègue Claudine Schmid qui, en raison des compétences de notre commission, porte sur le programme « Diplomatie culturelle et influence », vous a été transmis à la fin de la semaine dernière. Vous avez donc pu prendre connaissance du thème que notre collègue a choisi de traiter cette année : les résidences de créateurs. Les dispositifs décrits vont tous dans le sens d’une vivification des échanges artistiques internationaux et participent donc du rayonnement de la France et de l’enrichissement de son réseau culturel.

Madame la rapporteure pour avis, je tenais à vous remercier chaleureusement d’avoir choisi ce thème passionnant.

Mme Claudine Schmid, rapporteure pour avis des crédits de la diplomatie culturelle et d’influence. Comme l’a précisé M.  le président, je ne présenterai que l’avis thématique, puisque le budget a été discuté le 22 octobre dernier en présence de M.  Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères.

De tout temps, les artistes sont allés au-delà des frontières, à la recherche d’autres paysages, d’autres sensibilités, d’autres pensées, d’un autre monde. Et de ce désir d’un autre monde, qui est en filigrane de l’histoire de l’art, sont nées les résidences de créateurs.

Dans son principe, la résidence, qui favorise les rencontres et les échanges entre artistes français et étrangers, correspond parfaitement à la politique française de soutien au dialogue des cultures et à la diversité culturelle.

C’est pourquoi de nombreux programmes de résidences, dédiés à un domaine spécifique ou couvrant un large champ de disciplines artistiques, ont été mis en place depuis une vingtaine d’années par le ministère chargé des affaires étrangères et ses opérateurs successifs : l’Association française d’action artistique, CulturesFrance et l’Institut français.

Principalement orientés vers la création contemporaine, ces programmes s’inscrivent dans les priorités stratégiques et géographiques assignées à la diplomatie culturelle.

Il s’agit tout d’abord des programmes de mobilité vers l’étranger d’artistes français, comme les programmes Hors les murs, Louis Lumière, Villa Kujoyama ou Missions Stendhal. Ce sont ensuite des programmes de résidences internationales en France, qui offrent aux artistes étrangers de toutes disciplines la possibilité de développer un projet de création à la Cité internationale des arts ou au Centre des Récollets à Paris. Il s’agit enfin des programmes de résidences croisées avec d’autres pays, qui favorisent, outre l’échange d’artistes, le développement de partenariats entre structures artistiques françaises et étrangères.

Quant aux programmes Visas pour la Création, destinés à des artistes africains et caribéens, ils participent de la structuration des acteurs culturels et des opérateurs de la société civile en Afrique et aux Caraïbes.

Les programmes de résidences sont pilotés principalement par le département du développement et des partenariats de l’Institut français, avec la participation de deux autres départements, celui du livre et de la promotion des savoirs pour les Missions Stendhal et celui des échanges et coopérations artistiques pour les programmes Visas pour la création. La gestion des programmes est assurée, au sein de l’Institut français, par dix personnes, dont quatre à plein temps. Le financement des programmes est en grande partie inscrit dans les crédits d’intervention de l’Institut français, à l’exception des programmes Visas pour la Création, financés par le ministère des affaires étrangères et le ministère de la culture et de la communication. Le réseau culturel et les collectivités territoriales apportent également une contribution.

Par ailleurs, certains programmes reçoivent des soutiens étrangers, notamment du Québec ou des Émirats arabes unis.

L’Institut français détermine l’enveloppe qu’il souhaite consacrer aux programmes de résidences après avoir évalué l’impact des programmes au regard des autres actions qu’il mène. Ainsi, pour 2013, l’enveloppe budgétée par le département du développement et des partenariats s’est élevée à un peu plus de 762 000 euros et celle prévue par le département du livre et de la promotion des savoirs, à 65 000 euros. Quant aux programmes Visas pour la création, ils ont reçu une subvention totale de 76 000 euros de la part du ministère des affaires étrangères et du ministère de la culture et de la communication.

Le montant qui est alloué à chaque programme conditionne le nombre de lauréats désignés : en 2013, si 275 candidatures ont été présentées dans le cadre du programme Hors les murs, vingt-deux lauréats ont été retenus. Sur une centaine de dossiers déposés pour les Missions Stendhal, une quinzaine a été sélectionnée. Les programmes Visas pour la création ont retenu onze lauréats sur une cinquantaine de dossiers présentés.

Ces programmes s’adressent donc à un petit nombre d’artistes qui sont choisis au terme d’une procédure de sélection qui est détaillée dans le rapport. Je noterai simplement que la procédure débouche sur la signature d’un contrat, par lequel les lauréats s’engagent, en contrepartie des avantages offerts, à participer au cours de leur séjour à des ateliers, à des conférences ou à des masters class organisés par le réseau culturel, et à présenter un bilan de leur résidence.

Les principaux atouts des résidences sont, pour les artistes, le temps de réelle liberté offert durant un à six mois, en vue d’approfondir une recherche ou un projet de création sans obligation de résultat, et l’ouverture internationale de la structure d’accueil partenaire.

Les conditions attachées au statut de résident varient d’un programme à l’autre, mais on retrouve des avantages comme l’allocation de séjour, comprise entre 1 000 et 15 000 euros selon les programmes, la prise en charge du voyage aller-retour, l’hébergement ou la mise à disposition d’un atelier. En outre, les lauréats bénéficient de l’accompagnement à la fois des structures artistiques d’accueil et des Instituts français locaux qui leur facilitent l’accès aux scènes artistiques étrangères et aux différents réseaux professionnels.

Les postes consulaires peuvent être appelés à donner un avis consultatif sur les candidatures, à se prononcer sur la faisabilité des projets ou à présenter directement les candidatures.

Ainsi, dans le cadre du programme de la Cité internationale des arts, qui accueille chaque année une cinquantaine d’artistes étrangers pour une résidence de trois mois, ce sont les postes consulaires qui présentent, en les motivant, les candidatures des artistes qu’ils ont identifiés et repérés sur leur territoire. Ils participent aussi souvent financièrement à la résidence en attribuant une allocation de séjour aux artistes.

Pour resserrer ses liens avec le réseau culturel – l’une de ses missions fondatrices –, l’Institut français a lancé en 2011 des programmes de résidences croisées à l’initiative du réseau. Deux exemples de ces résidences, l’une initiée par l’Institut français de Prague, l’autre par celui de Madrid, sont détaillés dans le rapport.

Reposant sur des cofinancements et des logiques de partenariats, ces programmes de résidences croisées doivent évidemment répondre aux demandes des pays étrangers et concerner, de préférence, des domaines artistiques peu ou mal représentés dans les programmes de résidences de l’Institut français, voire des formes nouvelles, alliant par exemple les arts et les sciences.

Les postes consulaires sont chargés d’identifier les structures partenaires pour l’accueil des lauréats français et étrangers, éventuellement avec l’aide de l’Institut français de Paris pour le lieu d’accueil en France.

De même, afin d’associer les collectivités territoriales à la politique d’influence, l’Institut français a pris l’initiative de programmes de résidences croisées entre métropoles françaises et étrangères.

Un programme d’échanges d’artistes dans le domaine des arts visuels, France Los Angeles Residency Exchange, a ainsi été mis en place en 2011 entre Los Angeles et Bordeaux. Cette forme de résidences croisées entre villes permet de diversifier les sources de financement et présente l’intérêt de développer l’offre et donc le maillage culturel de notre territoire. Aussi mériterait-elle d’être étendue en prenant appui sur le réseau des Instituts français et sur les coopérations décentralisées.

Si l’organisation de séjours de créateurs à travers le monde permet à la France de conserver sa pertinence comme lieu de rayonnement culturel, les programmes de l’Institut français présentent des inconvénients inhérents à leur fonctionnement.

Au nombre de ces inconvénients, on peut citer le caractère sélectif des programmes, qui implique une gestion assez lourde en termes de suivi et de durée – certains processus de sélection se déploient sur trois à six mois – pour un volume de lauréats assez faibles.

L’implication des postes et leur réactivité aux appels à candidatures sont, en outre, très inégales et dépendent de plusieurs paramètres, tels la mobilisation de l’attaché ou du conseiller culturel, le vivier d’artistes identifiés, ou encore la langue, qui peut être un obstacle puisque les candidats doivent parler français ou anglais.

De plus, bien que les programmes de résidences constituent un levier potentiel pour les industries culturelles, leurs retombées économiques, comme celles de l’action culturelle en général, sont rarement mesurées en raison du cloisonnement important qui existe entre le monde de la culture et celui de l’économie.

Enfin, l’apport des programmes au rayonnement culturel de la France n’est pas immédiatement perceptible ; il se mesure sur le long terme, dans le développement des réseaux et des partenariats culturels qui se sont mis en place à travers les échanges d’artistes. C’est pourquoi ces programmes doivent être maintenus, moyennant des adaptations et une meilleure évaluation.

Les programmes de résidences évoluent régulièrement avec le renouvellement des pratiques artistiques, l’omniprésence du numérique et les contraintes budgétaires, qui incitent l’Institut français à repenser son offre.

Dans le cadre de la renégociation de son contrat d’objectifs et de performance 2014-2016, l’Institut français envisage une refonte des programmes de résidences qui suivra plusieurs axes. Il n’y aura pas de création de programme supplémentaire : tout nouveau programme devra se substituer à un ancien. La mobilité des artistes français vers l’étranger s’appuiera sur quelques programmes ciblés. Les programmes en faveur des artistes étrangers seront progressivement recentrés ; en contrepartie, l’offre de résidence sera élargie à l’ensemble du territoire français par le biais de partenariats conclus entre l’Institut français et les collectivités territoriales. Les programmes de résidences croisées à l’initiative du réseau seront plus structurés et assortis de critères relatifs à leur finalité et aux modes de sélection des lauréats et partenaires.

En sus de ces améliorations, je préconise d’élargir l’impact des résidences et d’ouvrir les programmes à un plus grand nombre d’artistes, ainsi que de privilégier dans la sélection les candidats n’ayant effectué au maximum que deux résidences. J’ai en effet rencontré au cours des auditions des artistes qui effectuaient leur neuvième résidence.

Dans la même logique, je suggère également de limiter les possibilités de candidater simultanément à plusieurs programmes. Même si, une fois désignés, les lauréats doivent choisir une seule résidence, le fait de postuler à différents programmes restreint l’éventail des candidatures différentes.

Je conclurai en précisant que je ne voterai pas les crédits du programme 185, car la réduction qui leur est appliquée et qui concerne également des opérateurs comme l’Institut français me semble préjudiciable à l’efficacité de la diplomatie d’influence. Cette position est également celle du groupe UMP, comme M. André Schneider l’a précisé au cours de la commission élargie du 22 octobre dernier.

Présidence de M. Michel Ménard, vice-président de la Commission.

M. William Dumas. Madame la rapporteure pour avis, je vous remercie du travail que vous avez réalisé sur les résidences de créateurs. Ces actions ne représentent toutefois qu’une petite partie du budget. Je ne suis pas d’accord avec l’introduction de votre rapport, qui évoque une « baisse drastique », ce qui est excessif. Si le budget est en baisse, c’est qu’il participe, comme d’autres, avec une diminution de 4 % des crédits alloués aux réseaux culturels et de coopération, à l’effort budgétaire et au redressement entrepris. Le budget de l’Institut français diminue quant à lui de 6 %, alors que le budget de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) voit son plafond d’emplois stabilisé à 6 353 ETP.

Le budget du programme 185 explique parfaitement la politique du Gouvernement : un effort budgétaire global donnant priorité à l’éducation et à la poursuite de la promotion de la langue française, atout majeur de notre diplomatie.

Ces deux dernières années, sous l’impulsion de M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères, le réseau culturel a profondément évolué. Il s’est organisé sur le plan administratif pour lever des fonds et augmenter son autofinancement : aujourd’hui le réseau s’autofinance à plus de 60 % et devrait lever 160 millions d’euros de cofinancement en 2013.

La réforme a notamment permis la mise en œuvre pour tous les centres culturels à travers le monde de la marque unique Institut français, qui donne plus de visibilité et de lisibilité à notre réseau et contribue ainsi au renouvellement de notre diplomatie culturelle. En effet, l’Institut se modernise et adopte les possibilités que les nouvelles technologiques offrent. Les plates-formes numériques, accessibles aux instituts et alliances françaises, ont ainsi été développées : notamment la culturethèque, une médiathèque numérique, IF Cinéma et IF Verso pour la traduction. Cette structuration du réseau culturel français vient appuyer ces secteurs stratégiques pour la France que sont le tourisme, la recherche, l’excellence des filières industrielles et l’innovation.

Madame la rapporteure pour avis, vous avez évoqué les résidences de créateurs, qui sont des moyens d’échanges artistiques et de dialogue entre les cultures. J’évoquerai un autre élément essentiel de la nouvelle politique culturelle et extérieure du Gouvernement : en donnant la priorité à la diplomatie économique, le ministre des affaires étrangères a indiqué que le rayonnement et l’attractivité ne peuvent être séparés des dimensions culturelles et scientifiques de l’action extérieure de l’État.

Dans le plan d’action pour la diplomatie économique, l’axe 6 prévoit notamment de mobiliser les outils d’influence que la France a développés dans le monde, spécifiquement en matière culturelle. Ainsi, le réseau de coopération culturelle, premier réseau culturel mondial, contribue à la valorisation de la marque France. Les ambassadeurs ont également pour mission de promouvoir nos industries culturelles et créatrices en lien avec la diplomatie économique, de mettre en place un conseil chargé de l’action culturelle, de l’éducation et de l’attractivité, et de renforcer l’articulation entre l’action culturelle et les autres dimensions de notre action d’influence.

L’AEFE participe également au défi de l’attractivité économique de la France. En diffusant la culture et la langue françaises – il y aura bientôt 700 millions de francophones en Afrique –, on accompagne le développement international de nos entreprises. La diplomatie culturelle signifie non seulement écouter le monde, mais également, dans le monde tel qu’il se développe, faire entendre la voix de la France et montrer les créations françaises, l’innovation française et l’excellence de nos filières. C’est alors que la culture française devient le premier outil d’influence.

La culture permet de défendre nos intérêts internationaux et nos valeurs universelles humanistes. Le Gouvernement, en combinant les deux, fait de la culture un atout économique. C’est pourquoi je salue la politique globale mise en œuvre par le Gouvernement en matière d’action extérieure de l’État, qui reconnaît la diplomatie culturelle comme le cœur de notre diplomatie d’influence.

L’influence ne se mesure pas uniquement au budget engagé mais également à la cohérence d’une action stratégique : l’action culturelle extérieure y participe. C’est pourquoi le groupe SRC votera les crédits pour 2014 de la mission « Action extérieure de l’État ».

M. Patrick Hetzel. Au sein des résidences de créateurs, les résidences croisées permettent un rayonnement international avec des interventions aussi bien en milieu urbain qu’en milieu rural – je pense au Centre international d’art et du paysage de Vassivière à la limite de la Creuse et de la Corrèze. Comment développer de tels programmes ?

Les crédits de la mission connaissent une réduction drastique. Même si, comme l’a souligné M. William Dumas, les aspects quantitatifs ne sont pas les seuls, il n’en reste pas moins que les réductions sont telles qu’elles ne peuvent que nuire à l’efficacité des différentes missions qui sont confiées à la diplomatie d’influence. C’est la raison pour laquelle le groupe UMP votera contre les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».

M. Rudy Salles. Le programme diplomatie culturelle et d’influence et, plus largement, la mission « Action extérieure de l’État » ont tendance à être trop souvent relégués au second plan des préoccupations des gouvernements et des assemblées. Pourtant, si nous-mêmes ne sommes pas capables de porter avec force l’image de la France à travers le monde, il ne faut pas s’étonner de voir notre influence réduite, nos positions parfois marginalisées et notre politique extérieure malmenée par les puissances étrangères. Je tiens donc à saluer les agents des services diplomatiques qui fournissent un travail d’extrême qualité dans des situations très complexes.

Ce programme, qui regroupe l’ensemble des moyens destinés aux politiques de rayonnement économique, culturel, linguistique, universitaire et scientifique de notre pays dans le monde, paraît essentiel au groupe UDI. Notre réseau diplomatique et culturel est d’une très grande qualité, ce qui permet à notre pays de disposer de très forts relais dans la majorité des pays de la planète. La France diffuse ainsi depuis longtemps déjà ses valeurs humanistes et universelles, la diplomatie culturelle et d’influence jouant en quelque sorte un rôle de porte-voix dans un monde en perpétuel mouvement.

Il faut bien sûr encourager le développement des réseaux d’ambassade et les représentations permanentes. Par-delà l’influence économique et de défense que nous devons promouvoir partout où c’est possible dans un souci essentiel de développement et de paix, ce sont nos valeurs culturelles qui méritent d’être portées. À cette fin, nous pouvons compter sur de nombreux opérateurs, comme l’AEFE, Campus France ou l’Institut français.

Si, dans un contexte de budget restreint, des choix doivent nécessairement être faits, il paraît peu judicieux de remettre en cause la stabilité et l’efficacité de ces ponts de la diffusion et de l’enseignement de notre langue et de nos valeurs à l’étranger que sont ces institutions et la politique diplomatique culturelle et d’influence.

Faire aussi bien, si ce n’est mieux, avec moins de ressources, tel est le grand défi que vous lancez à ces institutions. Les objectifs semblent en contradiction totale avec les moyens et le risque est grand de voir la sphère d’influence de la France se réduire toujours plus, tant la compétition mondiale en ce début de XXIe siècle est acharnée.

Il en va de même de la participation financière de la France aux soixante-douze organisations internationales qu’elle soutient. Il n’est pas possible d’abaisser régulièrement les crédits que nous leur accordons sans craindre en retour un affaiblissement de notre politique d’influence et de notre rayonnement dans le monde.

Voilà pourquoi le groupe UDI s’oppose à la politique actuellement conduite en la matière et votera contre les crédits de la mission « Action extérieure de l’État ».

Mme Dominique Nachury. Le rapport souligne la nécessité de renforcer l’évaluation des programmes de résidences : comment envisager un tel renforcement alors qu’il existe une forte diversité et un croisement important des financements – les collectivités territoriales peuvent avoir d’autres critères que les autres intervenants ?

Par ailleurs, l’entrée en application des nouvelles mesures, adoptées en 2012, relatives à l’aide à la scolarité – bourses déterminées en fonction des ressources familiales –, a-t-elle conduit à une modification des effectifs et des publics ?

Mme la rapporteure pour avis. Monsieur Dumas, si les résidences de créateurs sont une petite partie du programme 185, c’est que 60 % du programme sont consacrés à l’AEFE. Toutefois, cette partie du budget étant traitée par François Loncle, rapporteur spécial de la commission des affaires étrangères, je me suis consacrée à une seule thématique culturelle et cela m’a permis d’évoquer l’action des opérateurs et des postes diplomatiques.

Quant à l’autofinancement, s’il atteint effectivement 60 %, il pourrait être encore supérieur – la Cour des comptes l’a souligné – si les organismes concernés avaient les moyens de chercher d’autres financements, ce qui leur est impossible avec le budget dont ils disposent.

Quant à l’Institut français, son budget de 39,5 millions d’euros étant en baisse de 6 %, il lui est de plus en plus difficile d’assumer les nombreuses missions qui lui sont confiées. C’est la raison pour laquelle je trouve très faibles les crédits alloués à ce programme.

Les programmes de résidences constituent un levier potentiel pour les industries culturelles, puisqu’ils engendrent toute une économie impliquant les professionnels et les structures dans les différents domaines artistiques. Toutefois, comme le souligne encore la Cour des comptes dans son rapport sur le réseau culturel de la France à l’étranger qu’elle a rendu récemment au président de l’Assemblée nationale, « les retombées économiques de l’action culturelle sont rarement appréhendées, un cloisonnement important persistant entre le monde de la culture et celui de l’économie. […] Les opérateurs spécialisés de l’action culturelle, Institut français et Campus France, ne sont pas encore organisés pour intégrer cette dimension, comme en témoigne l’absence de convention entre ceux-ci et Ubifrance. »

Madame Nachury, c’est vrai, il est bien difficile d’évaluer les programmes de résidences. C’est un problème réel alors que nous allons demander un effort supplémentaire aux collectivités territoriales et qu’un grand nombre de villes françaises ont déjà conclu des opérations avec des villes étrangères sans être passées par l’Institut français.

Enfin, il est trop tôt pour tirer un bilan de l’effet sur les publics des modifications des aides à la scolarité, qui ne sont entrées en application qu’à la rentrée. S’agissant des effectifs, si l’on en croit les données en provenance du terrain, l’arrivée d’enfants inscrits sur listes d’attente – ils sont nombreux – a compensé le départ de ceux que leurs familles n’avaient pas réinscrits dans le système français. Les effectifs des écoles sont toujours complets.

La Commission donne un avis favorable à l’adoption des crédits pour 2014 de la mission « Action extérieure de l’État ».

La séance est levée à dix-neuf heures dix.

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Informations relatives à la Commission

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation a désigné Mme Sylvie Tolmont, rapporteure pour avis sur le projet de loi, adopté par le Sénat, pour l’égalité entre les femmes et les hommes (n° 1380).

La Commission des affaires culturelles et de l’éducation a désigné M. Patrick Bloche, rapporteur d’information sur le projet de contrat d’objectifs et de moyens de Campus France.

Présences en réunion

Réunion du mardi 29 octobre 2013 à 17 heures

Présents. – M. Jean-Pierre Allossery, M. Benoist Apparu, M. Patrick Bloche, Mme Marie-Odile Bouillé, M. Thierry Braillard, M. Emeric Bréhier, Mme Marie-George Buffet, M. Pascal Deguilhem, Mme Sophie Dion, M. William Dumas, Mme Michèle Fournier-Armand, Mme Annie Genevard, M. Patrick Hetzel, M. Guénhaël Huet, Mme Colette Langlade, M. Pierre Léautey, M. Dominique Le Mèner, M. Jean-Pierre Le Roch, Mme Martine Martinel, M. Michel Ménard, Mme Dominique Nachury, M. Michel Pouzol, M. Franck Riester, M. Rudy Salles, Mme Claudine Schmid, Mme Julie Sommaruga, Mme Sylvie Tolmont

Excusés. – M. Bernard Brochand, M. Gérald Darmanin, Mme Virginie Duby-Muller, M. Michel Françaix, Mme Lucette Lousteau, M. François de Mazières, Mme Michèle Tabarot

Assistait également à la réunion. –  M. Régis Juanico