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Commission des affaires culturelles, et de l’éducation

Mercredi 27 avril 2016

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 36

Présidence de M. Patrick Bloche, président

– Audition de M. Bruno Foucher, président exécutif de l’Institut français

– Présences en réunion

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mercredi 27 avril 2016

La séance est ouverte à neuf heures quarante.

(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la Commission)

——fpfp——

La commission des Affaires culturelles et de l’Éducation procède à l’audition de M. Bruno Foucher, président exécutif de l’Institut français.

M. le président Patrick Bloche. Mes chers collègues, j’ai le très grand plaisir d’accueillir en votre nom une délégation du groupe d’amitié Cameroun-France, dont nous avons salué la présence dans l’hémicycle hier, lors des questions au Gouvernement. Elle se compose de M. Jean-Bernard Ndongo Essomba, député de Lékié-Est, président du groupe Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) et président du groupe d’amitié, Mme Marie-Rose Nguini Effa, députée RDPC du Centre et vice-présidente du groupe d’amitié, Mme Aissa Douvaouissa Hamadi, députée du Nord, de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP), et M. Joseph Kankeu, député RDPC de l’Ouest. Je salue également M. Médard Mvondo, secrétaire administratif du groupe d’amitié.

Le hasard faisant bien les choses, c’est à l’audition de M. Bruno Foucher, président exécutif de l’Institut français, que la délégation va assister. M. Foucher est accompagné de Mme Anne Tallineau, directrice générale déléguée de l’Institut, et de M. Clément Bodeur-Crémieux, secrétaire général.

Créé il y a moins de six ans par la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État, l’Institut français, établissement public industriel et commercial, s’est substitué au 1er janvier 2011 à l’association Culturesfrance en tant qu’opérateur de l’action culturelle extérieure de la France. Nous avons connu à sa tête M. Xavier Darcos puis, trop brièvement, M. Denis Pietton, que je connaissais par ailleurs depuis longtemps et qui était pour moi un ami ; nous ne pouvons qu’avoir ce matin une pensée toute particulière pour lui, qui nous a quittés prématurément en décembre dernier.

Outil majeur du rayonnement linguistique et culturel de la France dans le monde, l’Institut français suscite toujours une grande attention de la part des membres de la commission des affaires culturelles et de l’éducation, même s’il relève de la tutelle du ministère des affaires étrangères et du développement international, car notre domaine de compétence est au cœur de ses missions.

Monsieur le président, je ne vous ferai pas rougir en retraçant en détail votre superbe parcours au sein de la diplomatie française. Vous me rappeliez à l’instant que vous avez été il y a quelques années ambassadeur au Tchad ; plus récemment, vous avez occupé un poste tout à fait stratégique, en Iran. Vous avez pris la tête de l’Institut français le 1er février dernier.

Nous avons lu avec attention le rapport d’activité de l’Institut pour 2015, que vous avez bien voulu nous transmettre et dont les députés ici présents ont eu communication dès la semaine dernière. L’opérateur est aujourd’hui, et nous nous en réjouissons, une « marque mondiale » et le premier partenaire du réseau de coopération et d’action culturelle de la France à l’étranger, réseau constitué par les services culturels des ambassades, les instituts français locaux et les alliances françaises.

En disant cela, j’ai conscience de mettre le doigt sur un problème central pour l’Institut : sa place au sein de la politique culturelle et d’influence de la France dans le monde et son articulation avec les différents vecteurs de cette politique – puisqu’il a été décidé, après l’échec de l’expérimentation prévue par la loi de 2010, de ne pas lui rattacher le réseau culturel.

Nous sommes particulièrement heureux de vous recevoir aujourd’hui afin que vous nous présentiez la situation actuelle de l’Institut et que vous nous fassiez part de vos projets pour renforcer ses atouts, lui permettre d’exercer au mieux ses missions et résoudre ses difficultés.

En cette période de forte contrainte pour les finances publiques – une donnée qui n’est pas nouvelle –, j’aimerais notamment que vous évoquiez le potentiel de développement des ressources propres de l’Institut, qui ne représentent aujourd’hui, selon le dernier rapport d’activité, que 6 % de son budget, et, plus largement, les mesures engagées ou envisagées pour assurer la pérennité économique de l’établissement.

M. Bruno Foucher, président exécutif de l’Institut français. Je salue Mmes et MM. les députés, ainsi que nos amis du Cameroun dont j’ai en effet été le voisin pendant près de cinq ans lorsque j’exerçais mes fonctions au Tchad.

Merci de me recevoir au sein de votre commission. J’ai eu, dans un passé encore récent, l’occasion de beaucoup travailler avec l’Assemblée, en l’occurrence avec la commission des affaires étrangères. Je n’ai eu qu’à m’en féliciter : au cours de mon difficile mandat dans le pays où j’ai occupé mon précédent poste, la diplomatie parlementaire a joué un rôle essentiel en faisant le trait d’union entre le moment où l’administration ne se donnait pas le droit de rendre visite à mes « paroissiens » sur place et celui où les choses se sont arrangées. Il y a eu à cet égard entre le Parlement – Assemblée nationale et Sénat – et les affaires étrangères une très grande communauté de vue et d’action qui a permis d’améliorer notre position politique et économique dans ce pays, et j’espère qu’il en ira bientôt de même de notre situation culturelle.

C’est dans cet esprit que je me présente devant vous. C’est toujours un honneur d’être reçu par la représentation nationale. Je me tiens à votre disposition à tout moment pour vous apporter des éclaircissements ou aborder les points dont vous souhaiteriez discuter avec moi.

L’Iran, où j’ai passé cinq ans, fournit un très bon exemple de l’importance que l’image de la France peut revêtir à l’étranger. Notre culture et notre civilisation suscitent une grande admiration chez les Iraniens de tous bords, soutiens ou non du régime. Nous entretenons avec le pays une relation politique complexe, tendanciellement plutôt difficile, et des rapports économiques moins développés qu’ils ne devraient l’être, mais en voie d’amélioration. Au nombre des évolutions dont j’ai pu être témoin au cours des cinq dernières années, principalement des trois dernières, figurent le renouement politique – le secrétaire général du ministère des affaires étrangères se rendra en Iran la semaine prochaine, pour la première fois depuis très longtemps – et, en matière économique, le retour fracassant de nos entreprises : la visite en France du président Rohani, fin janvier, a débouché sur la signature de 35 milliards d’euros de contrats. Cette politique doit à mon sens être poursuivie dans le domaine culturel. Les Iraniens le demandent, parce que l’image française, la spécificité française, l’art de vivre à la française, notre art et notre civilisation continuent de susciter leur attention. Et pour approfondir nos relations avec un pays, même difficile, la « carte » de la politique culturelle peut être jouée, dans l’intérêt mutuel des parties.

Car la culture – ce n’est pas à vous que je l’apprendrai – est un vecteur essentiel d’influence. À ce sujet, on parle aujourd’hui volontiers de soft power, un concept élaboré par un politologue américain et que, personnellement, je conteste, car le soft power n’a de sens que couplé au hard power et, dans ces expressions, c’est le mot power qui compte. Le soft power ne vise qu’à amener l’autre à penser comme vous, donc à le priver de son mode de pensée propre, alors que l’influence à la française, plus respectueuse de l’autre, tend à favoriser un mode de pensée différent. Elle est parfaitement compatible avec la pluralité de l’opinion, avec le respect de l’altérité, et s’inscrit dans l’héritage des Lumières, son humanité et son universalité.

Pour conserver notre place dans un monde bouleversé, il nous faut donc mener une politique d’influence culturelle structurée à long terme, dotée de moyens véritables, mais pas nécessairement considérables.

Nous avons, à l’Institut et au-delà, un périmètre d’action privilégié : l’aire francophone. La langue française est un vecteur essentiel d’influence. Il y a 274 millions de francophones dans le monde ; selon les prévisions, ils pourraient être 750 millions à l’horizon 2060, dont 85 % en Afrique – un continent dynamique où la croissance est fortement positive et dont je suis revenu très optimiste. Le français est la deuxième langue la plus enseignée au monde et la quatrième langue d’affaires. La cible, aujourd’hui et demain, ce sont les 115 millions d’apprenants en français et les 900 000 professeurs de français, sans se limiter au 1,1 million de personnes qui apprennent notre langue au sein du réseau qui est à notre main ou de nos 500 lycées à l’étranger.

Mais notre aire d’influence ne se réduit pas à celle de notre langue : elle touche aussi à la création, à l’innovation, à tout ce que l’on est capable de produire. Pour être influent, en effet, il faut être considéré comme tel : on vous juge sur des actes, sur des créations, de même que dans l’industrie. Il faut donc être créatif et le montrer ; pour le montrer, il faut promouvoir la création ; et, pour promouvoir la création et notre inventivité, il faut des structures.

Tel est précisément le but et le rôle de l’Institut français, opérateur de la diplomatie culturelle, qui a besoin d’être stratégiquement bien orienté, opérationnellement efficace, institutionnellement reconnu et politiquement soutenu pour être en ordre de bataille. En effet, le réseau culturel français et nos partenaires internationaux attendent de nous que nous fassions connaître notre culture, nos créations, nos artistes et nos industries culturelles, que nous fassions aimer notre langue et que nous promouvions nos idées et nos valeurs partout dans le monde.

Je commencerai par vous dire où en est l’Institut français, avant d’en venir à nos grands projets pour l’année à venir, puis, en troisième lieu, aux contraintes, notamment financières, qui pèsent sur nous.

Je suis arrivé à l’Institut français le 1er mars et je l’ai trouvé en ordre de marche après une année 2015 difficile du point de vue de la gouvernance – trois présidents se sont succédé, avec l’épisode très malheureux de la disparition de Denis Pietton, qui était aussi l’un de mes amis. La situation est en train d’évoluer. Après trois ans de négociations, une convention d’entreprise a été signée avec les partenaires syndicaux en août 2015, ce qui a permis d’apaiser le climat social au sein de l’établissement. Il me semble que l’épisode du non-rattachement du réseau culturel est derrière nous.

L’Institut travaille en ce moment à son projet stratégique dans le cadre des discussions avec les tutelles en vue de la rédaction de notre contrat d’objectifs et de moyens (COM), dont le Parlement devrait être saisi vers le mois de septembre, après que notre tutelle l’aura revu et que le ministère du budget l’aura examiné. Ce projet stratégique, vous le connaissez. Vous avez parlé, monsieur le président, de « marque mondiale ». En effet, l’Institut français est l’instrument français de la diplomatie culturelle ; acteur unique sur la scène culturelle française dans ses rapports avec l’étranger, il a besoin d’être reconnu comme tel. Son but est de réaffirmer sa mission de valorisation internationale de la création artistique et intellectuelle et des industries culturelles et créatives, de promotion de la langue française et de soutien au dialogue des cultures. Son action doit illustrer la stratégie de notre diplomatie d’influence, maintenant que sa relation avec le réseau culturel des instituts français et des alliances françaises – son premier partenaire dans le monde – est clarifiée.

Nous avons pour spécificité de mettre l’accent sur la pluridisciplinarité de l’action culturelle. Nous recherchons la transversalité, l’hybridation dans le domaine des arts – l’un des thèmes sur lesquels nous travaillons actuellement –, le décloisonnement de nos activités pour mieux tenir compte de l’évolution des pratiques culturelles. Nous promouvons le « focus transdisciplinaire » aux Nuits sonores de Lyon, où sont invités une cinquantaine de professionnels étrangers identifiés et envoyés par les postes pour repérer la scène musicale française et la French Tech culturelle. Ils participeront également au forum European Lab, dédié aux acteurs européens de l’innovation culturelle, et à l’opération « Shoot the Book ! » au Festival de Cannes.

Si le principe d’universalité de notre réseau n’a pas été remis en cause, la baisse de nos moyens nous contraint malheureusement à recentrer notre action sur des zones géographiques plus nettement prioritaires. Nous avons donc élaboré une stratégie géographique qui sera présentée au prochain conseil d’administration et qui met l’accent sur une quarantaine de pays seulement, à la demande de nos tutelles, contre 78 lors du dernier exercice. Il s’agit de pays prescripteurs, de pays émergents ou néo-émergents, de pays d’Afrique et du Moyen-Orient. Nous avons l’intention de contractualiser avec ces pays prioritaires pour y encadrer l’action de l’Institut français pendant trois ans, afin de mieux la planifier. Nous avons par ailleurs défini des zones régionales moins prioritaires, où nous pourrions faire circuler librement les projets que nous avons montés. Enfin, tous les autres pays conservent naturellement l’accès à l’ensemble de nos missions de conseil et de nos plateformes et outils informatiques et numériques. Nous gardons en réserve quelques crédits budgétaires pour les pays qui traversent actuellement une crise grave mais qui pourraient revenir sur la scène culturelle au cours des trois prochaines années : il faudrait alors dégager rapidement les moyens de favoriser ce retour.

Nous continuerons d’accorder une attention particulière à l’Afrique, où la coopération culturelle française, historique, mérite d’être valorisée à la mesure des enjeux que représente le continent. Je songe à la Biennale de Bamako, que nous avons conduite à l’automne dernier dans des conditions sécuritaires difficiles, et qui a permis de faire émerger des photographes africains sur la scène internationale, mais aussi à la Cinémathèque Afrique, à Afrique et Caraïbes en créations ou à l’Africa Design Week. Des partenariats avec le secteur privé seront naturellement recherchés.

En France, nous souhaitons être un partenaire incontournable pour les collectivités territoriales et revisiter notre collaboration avec elles à cette fin. Vingt-sept conventions sont signées, que nous avons commencé à « dépoussiérer ». Je me suis ainsi entretenu il y a quelques semaines avec le maire de Bordeaux pour réexaminer les conditions de mise en œuvre de la convention ; je ferai de même dans quelques jours avec Gérard Collomb, maire de Lyon ; j’espère pouvoir ensuite rencontrer le président de la région des Hauts-de-France, puis la maire de Nantes. Nous tirerons alors un premier bilan de ces quatre contacts avant d’aborder les autres conventions. Les conventions représentent un montant global de 1,1 million d’euros, sachant que, pour chaque euro que nous apportons, la collectivité territoriale en apporte également un.

J’en viens aux grands projets de l’Institut français pour l’année à venir.

Le premier, après le grand succès de l’événement qui s’est déroulé au Quai d’Orsay en janvier, consiste à lancer une nouvelle Nuit des idées pour faire de la formule une sorte de marque maison. L’événement aurait lieu à date fixe, cette fois dans de très nombreux lieux culturels en France, notamment à Paris, et à l’étranger. Nous n’en serions plus les organisateurs directs, mais nous pourrions labelliser des projets qui nous seraient transmis, sur le fondement d’un cahier des charges minimal que nous allons proposer. Cette nouvelle édition, dont nous avons officiellement lancé l’idée hier, pourrait se tenir en janvier prochain – la date sera bientôt arrêtée définitivement. Les différents lieux qui l’accueilleront simultanément dialogueront et communiqueront grâce aux techniques numériques.

Le deuxième projet, que vous connaissez bien, est une spécialité de notre maison : les saisons croisées. L’année France-Corée a été lancée il y a quelques semaines par le ministre à Séoul. C’est une saison assez lourde puisqu’elle n’englobe pas moins de 200 événements culturels dans plusieurs villes des deux pays : il s’agit d’un gros investissement pour l’Institut, en effectifs comme du point de vue financier. Les « années » sont principalement financées par le mécénat et il n’est pas toujours facile de trouver des entreprises pour monter des programmes d’ampleur – j’y reviendrai.

Nous allons lancer fin 2016 la saison croisée France-Colombie, qui débutera le 16 décembre à Bogotá, en même temps que la Fête des lumières lyonnaise. La mobilisation du secteur privé a été tout à fait remarquable, de sorte que nous avons trouvé sans grande difficulté la somme dont nous avions besoin pour monter cette saison, soit 1,7 million d’euros, même si nous nous heurtons aujourd’hui à un petit problème lié à la dévaluation de 40 % du peso colombien, qu’il faudra compenser.

Les prochaines saisons croisées doivent avoir lieu avec Israël en 2018, avec la Roumanie en 2019 et avec le Qatar en 2020.

Nous avons récemment eu un débat avec mes autorités de tutelle au ministère sur la nécessité, qui me paraît s’imposer, de consulter l’Institut français avant de choisir un pays en vue d’une saison croisée. Trop souvent, l’Institut est prévenu après coup et la saison annoncée ne recoupe pas toujours des intérêts économiques clairement affichés, ce qui complique notre recherche de moyens financiers pour monter ces opérations coûteuses.

Le troisième grand projet est la réponse à l’invitation de la France à la Foire du livre de Francfort. Ce sera un événement majeur : cela faisait vingt-huit ans que la France n’avait pas été à l’honneur lors de cette manifestation. L’invitation a été reprise au bond par le Premier ministre, fort de l’idée tout à fait juste selon laquelle il existe entre les jeunes générations des deux pays un déficit de communication, qui concerne aussi la traduction et la lecture et qu’il faut combler en resserrant nos liens économiques et culturels dans le domaine du livre. La Foire du livre de Francfort est une manifestation de portée mondiale : c’est la plus grande foire du livre au monde. Nous y aurons un pavillon important et nous serons au cœur de l’événement. Nous avons déjà organisé plusieurs rencontres à Paris avec les éditeurs allemands qui sont tout à fait mobilisés, ainsi que leurs homologues français, pour tisser de nouveaux liens sur fond de rénovation de la relation intellectuelle entre nos deux pays.

En quatrième lieu, nous allons continuer de développer notre offre numérique pour valoriser dans le monde la vitalité de la scène culturelle française, comme l’Institut français en a été chargé dans le cadre du projet MAEDI 21, et conformément à l’évolution des pratiques. Davantage qu’un relais d’information, il s’agit d’offrir une image attractive de la vie et des valeurs culturelles françaises, de tisser du lien et de créer des rendez-vous avec les francophiles, les francophones et les « culturophiles » partout dans le monde. Au-delà de nos partenaires internationaux, il s’agit de s’adresser aux classes moyennes internationales, au premier rang desquelles les publics des 97 instituts français et des 850 alliances françaises dans le monde, qui forment un réseau unique et constituent nos relais naturels. L’évolution des outils numériques de l’Institut français devra illustrer les priorités de notre diplomatie culturelle en promouvant l’excellence des productions françaises, le made in France dans le domaine culturel. Il convient de noter que le financement de cette plateforme reposera presque entièrement sur l’Institut français, dans le cadre budgétaire qui est le sien.

J’en viens précisément aux financements, troisième aspect que je souhaitais aborder et qui est au cœur de ma mission. Nous cherchons depuis des années à diversifier nos ressources. Plusieurs pistes existent, que nous sommes en train d’explorer.

La première, qui pourrait déboucher sur des résultats assez significatifs, est européenne. Nous avons obtenu un premier succès en remportant en 2016 un appel d’offres de la Commission à propos d’un programme d’éducation à l’image appelé CinEd. Celui-ci réunit sept pays et a pour objectif d’éduquer et d’ouvrir le jeune public européen à la richesse du cinéma d’Europe. Par ailleurs, nous sommes actuellement chargés, au sein du réseau EUNIC (European Union National Institutes of Culture), de la réalisation des contenus d’un portail culturel destiné aux pays tiers, sur financement européen. Nous allons continuer à nous proposer chaque fois que de nouveaux projets seront lancés.

On observe toutefois depuis peu une évolution qui suscite notre attention et dont j’ai parlé au ministre la semaine dernière. Vous l’avez sans doute noté, Mme Mogherini fait des déclarations publiques sur la politique culturelle qu’elle voudrait construire en marge de la politique diplomatique dont elle est chargée au sein du Service européen pour l’action extérieure (SEAE). Elle doit présenter dans un mois au Conseil européen et au Parlement sa stratégie, dont la teneur nous intéresse vivement. S’agira-t-il d’utiliser une image et de la promouvoir, sans programme culturel associé ? De faire appel pour des projets culturels aux réseaux européens – français, allemand, anglais – sur lesquels elle peut s’appuyer à l’étranger ? Ou disposera-t-elle de moyens financiers supplémentaires, notamment grâce au soutien du Parlement ? Mme Mogherini a en tout cas l’intention de développer une politique culturelle, elle a parlé d’attachés culturels, de services culturels à propos des missions de la Commission, et nous sommes très désireux d’en savoir plus.

La deuxième source de financement à laquelle nous travaillons est le développement des cours de français en ligne, à l’appui de ceux qui sont dispensés par les instituts français et, potentiellement, de ceux des alliances françaises. Ce chantier pourrait permettre à l’Institut français de récupérer, à terme, quelques moyens qui ne seront pas considérables mais restent toujours bons à prendre. Toutefois, nous n’en sommes qu’à une phase d’étude et d’investissement : selon nos calculs, les retours sur investissement ne devraient pas intervenir avant 2019.

La troisième source de financement annexe est le mécénat, dont j’ai déjà parlé. Le programme des saisons capte une très grande partie des libéralités que nous obtenons dans ce cadre : 3,5 millions d’euros pour l’année France-Corée, un peu moins pour France-Colombie, sans parler de l’opération « Louvre à Abu Dhabi » ni de la Foire de Francfort. Les entreprises, vous le savez mieux que moi, sont souvent très sollicitées dans le cadre des années, mais aussi par bien d’autres établissements culturels, de sorte que le marché est relativement étroit et qu’il est difficile de s’assurer des financements stables et renouvelables au-delà d’un projet particulier. Les entreprises nous le disent, elles sont fréquemment sur-sollicitées, ce qui ne nous laisse pas beaucoup de marge de manœuvre pour l’avenir. Les quelques appuis que nous obtenons pour des projets ciblés qui ne sont pas liés aux saisons sont eux aussi limités.

Nous pouvons toutefois nous prévaloir de belles réussites, par exemple la Villa Kujoyama au Japon, un programme de résidence qui bénéficie du soutien de deux mécènes très engagés dans le projet. Cette année, je présidais le jury de sélection des artistes qui seront admis à y passer trois à six mois ; sur 320 candidats, soit deux fois plus que l’an dernier, nous avons pu sélectionner 14 lauréats d’excellent niveau. Nous voudrions également valoriser ce programme en montrant au public français la production qui en résulte, en association avec la Villa Médicis et la Casa Velázquez, qui, elles, relèvent toutes deux du ministère de la culture.

Il existe encore d’autres pistes que je suis en train d’explorer, dont les offsets et les plateformes de financement participatif – ou crowdfunding. J’ai également suggéré la création d’un club des amis de l’Institut français, qui permettrait de regrouper un nombre limité d’entreprises importantes susceptibles de nous aider à l’avenir.

Monsieur le président, vous avez dit que nos ressources propres représentaient 6 % de notre budget en 2015 ; cette année, elles seront plus élevées, et nous devrons continuer de travailler en ce sens.

Au total, nous restons toutefois très dépendants des subventions que nous obtenons de l’État, principalement de celle du ministère des affaires étrangères, qui est en baisse constante depuis cinq ans. Au cours de cette période, nous avons perdu 21,5 % de notre budget ; or, compte tenu de la structure du bilan de l’Institut, cette réduction n’a pu jouer sur le loyer ni sur les équipes, mais a essentiellement entamé nos crédits d’intervention, qui ont diminué de 34 %. Une telle baisse oblige à opérer des choix, dans les nomenclatures d’intervention, dans les projets à soutenir ; et, si la tendance se poursuit, il nous faudra en faire davantage.

Prenons l’exemple du cinéma. Nous avons un programme – l’Aide aux cinémas du monde, en partenariat avec le Centre national du cinéma (CNC) – désormais mondialement connu : cette année, douze des films qui en ont bénéficié sont sélectionnés pour le Festival de Cannes, et c’est un film que nous avons financé qui ouvrira la section « Un certain regard ». À ce programme, s’ajoute la Fabrique des cinémas du monde ; tous deux fonctionnent très bien. Or, si les crédits venaient à diminuer encore, ce sont des programmes entiers qu’il nous faudra sacrifier. En effet, ma directrice me le disait récemment, nous sommes vraiment « au taquet » : nous ne pouvons pas réduire davantage nos moyens. Nos effectifs sont au niveau minimal, nous recevons beaucoup de demandes, nous ne parvenons pas à écluser tous les scénarios que nous voudrions lire pour pouvoir les défendre. Si nos moyens baissent, nous devrons sacrifier de grands festivals prescripteurs où la présence française me paraît indispensable pour présenter de jeunes artistes et des entreprises créatives. Ainsi, nous pourrions cesser d’aller à Venise, comme au Salon du livre ou à New York, pour faire des économies.

Je tiens à vous dire, comme je l’ai dit à mes autorités, que nous avons été le deuxième opérateur culturel le plus pénalisé au cours des cinq dernières années. Cette année encore, notre subvention a baissé de 2 %, ce qui représente 700 000 euros. Si la diminution se poursuit, nous aurons du mal à continuer d’accomplir notre mission. Car celle-ci est très vaste, comme vous le montrera le COM qui confirme l’ampleur de notre domaine d’action alors que nos moyens vont diminuant, ce qui me paraît contradictoire. Pourtant – vous l’avez dit, monsieur le président –, l’Institut français est en train de devenir une marque mondiale, que j’entends promouvoir en prenant part à toutes les réunions régionales d’ambassadeurs, où j’appellerai mes collègues à faire de la culture un moyen de conforter notre influence politique et économique. Les entreprises sont tout à fait acquises à cette démarche ; encore faut-il pouvoir la faire valoir devant elles et disposer de moyens qui témoignent concrètement du soutien politique dont l’Institut français bénéficie.

M. le président Patrick Bloche. Merci, monsieur le président, pour ce panorama très complet de l’actualité de l’Institut français et de ses enjeux.

Je le répète, le fait que nous vous auditionnions témoigne de l’intérêt des commissaires pour l’Institut comme opérateur culturel et pour son rôle à l’international. Nous avons parfaitement conscience des questions financières, raison pour laquelle je les avais moi-même évoquées d’emblée. Nous sommes amenés à intervenir régulièrement à ce sujet dans le cadre de l’avis que prépare chaque année un rapporteur issu de nos rangs sur le budget de la diplomatie culturelle et d’influence, lequel concerne directement vos crédits, dont vous avez rappelé à juste titre qu’ils baissent régulièrement.

En outre, pour participer souvent à des groupes d’amitié, nous pouvons mesurer les effets de votre action, sans oublier l’Alliance française qui joue un rôle majeur dans la diffusion de notre langue par les cours qu’elle assure.

Quant aux saisons croisées, je peux témoigner, comme président du groupe d’amitié France-Croatie, de l’extraordinaire réussite de la saison croate en France puis de la saison française en Croatie, un pays avec lequel nos relations ne reposent pourtant pas sur une tradition historique, même si nous nous sommes maintenant proches au sein de l’Union européenne.

Enfin, je ne reviens pas sur la diplomatie parlementaire que vous avez évoquée en commençant et à laquelle nous avons pris part : je me rappelle avoir reçu ici même il y a quelques années une délégation de parlementaires iraniens intéressés par les enjeux culturels et éducatifs.

M. Hervé Féron. Au nom du groupe Socialiste, républicain et citoyen, je vous remercie, monsieur le président, d’avoir accepté de venir devant la représentation nationale à l’issue d’une année particulièrement difficile pour l’Institut français du point de vue de la gouvernance. Il nous faut saluer la création par l’Institut, en 2016, de la Bourse Denis Pietton, qui sera attribuée chaque année à un jeune acteur de la société civile d’Afrique du Nord ou du Moyen-Orient engagé dans des domaines comme l’éducation, les droits des femmes ou la santé. Quel plus bel hommage, en effet, pouvait-on rendre à Denis Pietton, unanimement décrit comme un diplomate global, humaniste et passionné, que de continuer à soutenir le courage et l’engagement citoyen sous toutes ses formes ?

Forger un outil au service d’une diplomatie globale qui sache conjuguer tous les aspects de notre influence dans le monde, telle est l’ambition du ministère des affaires étrangères. Il peut donc s’appuyer sur l’Institut français, car l’action culturelle extérieure de la France est essentielle à la poursuite de cet objectif. En effet, l’influence à la française que vous avez évoquée ne se mesure pas uniquement au nombre d’armes vendues ou de litres de pétrole écoulés.

La vitalité et l’originalité des formes d’art et de culture soutenues par l’Institut français sont remarquables : en témoigne votre rapport d’activité, qui fourmille d’événements passionnants. Citons, parmi les nombreuses et diverses initiatives que vous soutenez, la présence d’un pavillon français onirique, tout de verre et de végétaux, à la Biennale d’art de Venise ; le programme « FranceDanse » à Ekaterinbourg et à Moscou, qui lie depuis cinq ans artistes français et structures russes ; l’exposition itinérante « Actrices », en hommage à la regrettée photographe Kate Barry ; l’opération « Shoot the Book ! », qui propose à des producteurs de films du monde entier des projets d’adaptation d’œuvres littéraires publiées en France. L’Institut français conduit ainsi quelque 2 000 projets culturels ou artistiques dans 96 pays, donnant tout son sens aux mots de Montaigne cités dans le rapport : « Il n’est aucune qualité si universelle […] que la diversité et variété. »

Mais la mission de l’Institut français va bien au-delà de la seule coopération culturelle. En effet, l’Institut joue un rôle diplomatique essentiel. L’animation, depuis plus de trente ans, des saisons culturelles croisées y contribue. On a cité l’année de la Corée en France, en 2015, suivie de l’année de la France en Corée, en 2016. Ce n’est pas un hasard s’il a été décidé en janvier 2015 d’organiser une année France-Colombie – un pays en plein essor. Bref, à bien des égards, les événements estampillés comme culturels reflètent les relations diplomatiques ; ils peuvent même exercer sur elles une influence déterminante.

En ce qui concerne la collaboration entre l’Institut français et les collectivités territoriales, j’ai lu que 450 projets artistiques par an étaient réalisés dans ce cadre. Ainsi, la métropole de Rennes a bénéficié cette année du soutien de l’Institut à son projet French Miracle Tour. Il semblerait toutefois que ce partenariat ne soit mis en œuvre qu’avec les grandes collectivités territoriales françaises. À quelles conditions une collectivité peut-elle passer une convention avec l’Institut français, et pourquoi ne pas envisager de partenariats avec de plus petites collectivités, afin de favoriser l’égal accès de tous à la culture, y compris dans les territoires enclavés ?

On lit également dans le rapport que l’entreprise BA Système a soutenu la Biennale d’art de Venise par un apport en compétences et en nature destiné au projet « rêvolutions », c’est-à-dire au pavillon choisi pour représenter la France lors de cet événement. Pouvez-vous nous en dire davantage sur la place que votre projet accorde au mécénat, encore relativement peu développé dans notre pays ? L’Institut français a-t-il l’intention d’encourager cette pratique dans le cadre de sa collaboration avec un réseau de professionnels ?

Enfin, j’ai appris avec intérêt l’existence d’IFcinéma, plateforme de films en ligne destinée au réseau culturel français à l’étranger et à ses partenaires proches. La francophonie représentant un enjeu de première importance et l’Institut français étant réputé et sollicité pour son offre unique de films francophones, pourquoi ne pas faire d’IFcinéma une « super plateforme » de diffusion de films français, accessible à tous les utilisateurs à l’étranger en contrepartie d’une somme modique – bref, une sorte de Netflix public français ?

M. François de Mazières. Au nom du groupe Les Républicains, j’aimerais d’abord saluer le travail accompli par Xavier Darcos, Denis Pietton et vous-même à la tête de l’Institut.

Avec plus de 1 500 implantations aux statuts très divers, le réseau culturel français à l’étranger apparaît très morcelé. L’Institut français est depuis 2011 l’opérateur unique de l’action culturelle extérieure de la France. Mais, à l’étranger, notre réseau public comprend également 161 services de coopération et d’action culturelle (SCAC), placés auprès des ambassades et chargés de la mise en œuvre et de l’animation de nos actions de coopération, notamment culturelle. À ses côtés subsiste en outre l’Alliance française, de statut privé, créée en 1883 et dont le réseau international permet chaque année à plus de 500 000 élèves d’apprendre notre langue. De fait, si notre réseau culturel est le plus étendu du monde, il demeure bien trop éclaté, ce qui nuit à la visibilité de la France à l’étranger et à l’efficacité de ses actions.

La loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État prévoyait l’expérimentation sur trois ans du rattachement à l’Institut français du réseau culturel de la France à l’étranger. Cette expérimentation s’est achevée le 31 décembre 2013 ; le ministre des affaires étrangères a alors considéré que ses résultats n’étaient pas à la hauteur des effets escomptés. Toutefois, comme l’estimait à l’époque la Cour des comptes, « la fin de l’expérimentation ne devrait pas conduire à un retour au statu quo ante mais permettre de relever plusieurs défis : l’exercice d’une tutelle stratégique sur le réseau, les modalités des prestations des opérateurs, le statut juridique du réseau et l’adaptation de la gestion des ressources humaines aux objectifs poursuivis ».

Lors de son audition devant notre commission, en février dernier, Olivier Poivre d’Arvor, ambassadeur chargé de l’attractivité culturelle de la France, jugeait opportun de rationaliser notre réseau : « à titre personnel », disait-il, « j’estime qu’il serait bon de remettre en chantier la création d’un organisme unique ».

Si vous deviez travailler à ce rapprochement, quelles pistes concrètes exploreriez-vous ?

Vous avez par ailleurs évoqué avec éloquence la baisse de vos moyens financiers. Au vu du rapport d’activité, vos crédits d’intervention sont aujourd’hui un peu inférieurs à 25 millions d’euros : c’est très peu. Vous nous avez du reste indiqué que vous étiez obligé de cibler 40 pays prioritaires, contre 78 récemment encore.

Au total, on a le sentiment que, au-delà du discours, la défense de la culture française à l’étranger perd du terrain et que des opérations telles que la Nuit des idées sont un peu des « coups de com’ » qui cachent cette réalité. La participation de la France, comme invitée d’honneur, à la Foire de Francfort, est d’une autre portée, comme vous l’avez fort bien expliqué. Mais l’État a-t-il dégagé les moyens nécessaires à cet événement ? Quelle somme est-il prévu de lui allouer ? Je sais, en effet, que les Allemands sont gourmands en ce domaine.

J’aimerais ensuite soulever la question fondamentale de la francophonie. La situation est inquiétante. En 2014, l’Observatoire de la langue française recensait 274 millions de francophones dans le monde, ce qui fait du français la cinquième langue la plus parlée et la deuxième la plus apprise au monde. Selon le rapport de Jacques Attali, « La francophonie et la francophilie, moteurs de croissance durable », le nombre de locuteurs francophones pourrait atteindre 770 millions d’ici à 2050 si un effort massif était consenti par les pouvoirs publics. En effet, le développement de la francophonie repose notamment sur l’augmentation de l’offre d’enseignement du français dans le monde, sur l’extension de l’aire culturelle francophone et sur l’attractivité accrue de notre pays aux yeux des populations étrangères
– autant de missions qui incombent à l’Institut français. Au vu des moyens dont vous disposez, le scénario optimiste esquissé par Jacques Attali vous semble-t-il réalisable ?

Mme Gilda Hobert. Au nom du groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste, je salue la délégation du groupe d’amitié Cameroun-France et je vous remercie, monsieur le président, madame la directrice générale déléguée, de votre présence ainsi que de la présentation très précise de votre rapport que vous nous avez livrée.

Vous avez endossé un rôle-phare, monsieur Foucher : présider l’Institut français est une charge importante, que vous assumez avec l’appui de vos administrateurs et collaborateurs ainsi que des salariés de l’établissement – au nombre de 143 fin 2015 –, pour une diplomatie de haute influence.

Il ne suffit pas, en effet, de se convaincre que la culture française bénéficie, par son patrimoine et ses innovations, d’un rayonnement hors pair : encore faut-il mettre en œuvre des actions et des missions qui le prouvent. C’est à l’évidence ce à quoi s’emploie l’Institut français, comme le montrent le rapport et vos propos, en dépit, nous l’avons compris, des difficultés de gouvernance.

Le rayonnement de la France dans le monde contribue à l’attractivité de notre pays. Nous appartenons au « Tout-Monde », comme le dit si bien Patrick Chamoiseau. Madame Tallineau, dans votre introduction au rapport, vous citez également Montaigne pour évoquer la diversité. Notre langue, notre cinéma, notre spectacle vivant, nos écrivains et nos artistes trouvent un écho dans les cultures du monde qu’ils côtoient : c’est l’échange qui fait leur force, c’est par lui qu’ils se nourrissent et qu’ils nourrissent les autres. Le rapport le montre clairement.

Ainsi, dans le secteur du cinéma, des partenariats ont été instaurés avec plusieurs pays – l’Italie, le Liban, l’Allemagne. C’est un aspect important de l’éclectisme de vos actions. Je pense aux Cinémas du monde, à CinEd ou encore à « La Belle Saison », festival destiné à la jeunesse.

Quel objectif l’Institut français peut-il poursuivre par le soutien aux arts, aux artistes, aux industries culturelles, par la promotion de la littérature, par la participation à des festivals et biennales, sinon le développement des cultures, vecteur privilégié des relations entre les hommes, auquel contribue désormais le numérique ? On ne peut que saluer cette promotion d’une culture innovante, transversale, offensive, qui a su prendre le virage du numérique. Je songe tout particulièrement à Culturethèque, véritable bibliothèque numérique qui connaît un vif succès, relance l’industrie du livre et rajeunit le public. Les nouvelles technologies sont aussi un atout pour la culture. Au vu de cette réussite, pensez-vous aller plus loin en développant d’autres actions, à propos de thématiques différentes, afin de rendre la culture attractive et accessible à tous ?

L’Institut français contribue également à l’apaisement des territoires dans lesquels il est implanté. En témoigne la réouverture du centre culturel de Gaza, il y a quinze jours à peine. La reprise des cours de français et la préparation des examens du diplôme d’études en langue française (DELF) sont un symbole : ce sont les premiers pas d’une diplomatie retrouvée.

Vous évoquez à plusieurs reprises dans le rapport la diversité culturelle que l’Institut développe, voire impulse. Je ne peux que vous approuver. Plusieurs centaines de projets sont financés et réalisés dans les domaines du cinéma, du livre, du spectacle vivant ; 450 projets artistiques sont ainsi menés à bien chaque année avec les collectivités territoriales. Ces projets sont choisis pour être la vitrine de la culture française. Il s’agit d’une forme de marketing territorial culturel vertueux, à propos duquel je me demande toutefois si des candidats
– artistes, compagnies, associations – peu connus, émergents, bénéficient de la même considération que d’autres plus renommés. La question se pose également pour les quelque 700 créateurs et professionnels étrangers invités et accueillis en France.

Ainsi que vous le soulignez, pour accomplir ces missions, il vous a fallu composer en 2015 avec un budget affecté par la diminution des subventions de l’État : alors que les produits atteignaient 46,8 millions d’euros en 2014, ils ne sont plus que de 41 millions environ en 2015. En outre, la part du financement public, bien qu’en baisse, représente 74 % de l’ensemble des produits en 2015, contre 66 % en 2014.

Il semble que la part du mécénat dans vos ressources n’ait pas toujours été à la hauteur des espérances. Vous avez évoqué quelques pistes pour y remédier. Des difficultés sont d’ailleurs apparues avec le report des levées de fonds relatives à l’opération « Louvre à Abu Dhabi ». Dans ce contexte, vous paraît-il possible de diversifier davantage les sources de mécénat ? Selon vous, le financement privé peut-il porter atteinte à votre mission de service public ?

Quant aux 40 pays prioritaires qui ont été identifiés comme cibles des missions futures, nous avons bien compris que cette restriction est consécutive aux contraintes budgétaires et nous attendons avec impatience un premier bilan de ce nouveau fonctionnement.

M. Christophe Premat. Merci, monsieur le président Foucher, pour ce discours réaliste. Vous avez rappelé les défis auxquels l’Institut est confronté après une succession de réformes qui ont notamment eu des conséquences sur le pilotage de l’établissement. Dès lors que vos moyens sont en diminution constante et que cela se traduit par une baisse des crédits d’intervention, vous rappelez à juste titre qu’il faut faire des choix.

À propos du pilotage de l’Institut, on a beaucoup parlé de son conseil d’orientation stratégique (COS), qui est à ma connaissance tombé en désuétude. Pourriez-vous nous donner des éléments concernant ses réunions ?

Je me félicite de l’existence de partenariats entre l’Institut et les régions françaises. La question est de savoir comment mesurer l’implication des partenaires étrangers. Certes, le législateur a prévu l’instauration d’un contrôle de gestion, avec des indicateurs chiffrés
– nombre de spectateurs par manifestation, de cours vendus, de partenaires, en distinguant partenaires publics français et partenaires étrangers –, et le calcul d’un effet levier permettant de mesurer notre influence. Observe-t-on une forte corrélation entre l’appui des régions et l’engagement des partenaires étrangers ? Le niveau modeste des budgets ne nous condamne-t-il pas à « saupoudrer » certaines manifestations ? L’effet levier est parfois très significatif alors que l’implication de l’Institut est très limitée. Cela peut-il rejaillir sur la crédibilité de l’Institut s’agissant de certains projets ?

L’Institut a signé des conventions avec d’autres opérateurs publics, dont l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger (AEFE) à propos des DELF, et avec des acteurs privés comme les alliances françaises, pour rationaliser son influence. Les rôles respectifs de l’Institut et de la Direction générale de la mondialisation (DGM) du ministère des affaires étrangères ont-ils été clarifiés ?

Votre propos tendait à montrer, comme le rapport, que plusieurs défis ont été relevés avec le lancement de nombreux projets, comme IFcinéma. Ses difficultés budgétaires conduisent-elles l’Institut français à recentrer son action sur cette plateforme ?

Quelle place l’Europe occupe-t-elle dans les priorités de l’Institut, alors que certaines structures ont connu ou connaissent des difficultés, comme l’institut français du Portugal et, plus récemment, celui des Pays-Bas ? L’attractivité des BRICS entraîne-t-elle un détournement de nos structures européennes ? Mais peut-être cette dernière question devrait-elle être plutôt posée à votre tutelle.

Je relève enfin l’évolution intéressante du cinéma et du numérique. Quelle est votre politique pour développer l’offre de livres numériques et de nouveaux films disponibles dans Culturethèque ?

Mme Dominique Nachury. Merci de votre présence et de votre présentation, ainsi que de ce rapport très lisible.

Pour promouvoir la langue française, il existe déjà plusieurs acteurs au niveau national ou international. L’Institut français a-t-il trouvé sa place parmi eux ? S’est-il simplement appuyé sur les actions de l’Alliance française, avec laquelle il est lié par convention ? Quel est son apport propre ?

Le site de l’Institut indique que celui-ci veut aussi s’approprier les nouvelles technologies pour en faire un vecteur de l’influence française, mais cette dimension est peu développée dans le rapport : une seule page lui est consacrée, qui recense des dispositifs destinés aux professionnels, en particulier aux personnels de l’éducation nationale, plutôt qu’au grand public. Avez-vous une stratégie visant le grand public, notamment sur les réseaux sociaux ? En comparaison, la British Library a mis en ligne de nombreuses collections accessibles à tous.

Enfin, comment l’Institut français peut-il s’inscrire dans un événement aussi singulièrement lyonnais que la Fête des lumières et que lui apportera-t-il ?

Mme Colette Langlade. Le réseau diplomatique des instituts français joue un grand rôle culturel partout dans le monde, mais incarne également une dimension importante de notre influence économique au service des entreprises françaises installées à l’étranger. Il permet de faire partager la culture française comme d’offrir à des salariés expatriés un appui essentiel par la promotion de notre langue. J’en veux pour preuve l’action, décisive pour notre diplomatie économique, de l’institut français du Turkménistan.

Qu’en est-il des éventuels projets de création d’antennes à travers le monde ? Car si le réseau est déjà très riche, les instituts français manquent en Océanie, notamment en Australie et en Nouvelle-Zélande, alors que ces pays sont privilégiés par nos jeunes compatriotes, que ce soit pour une longue expatriation ou pour une courte aventure professionnelle.

M. Michel Herbillon. Monsieur le président, à vous écouter, j’ai eu l’impression que vous vous satisfaisiez d’une situation qui, comme l’a très bien montré mon collègue et ami François de Mazières, n’est pourtant pas satisfaisante. Nous nous heurtons aujourd’hui aux difficultés mêmes que la création de l’Institut français était censée résoudre : notre réseau culturel est morcelé, ce qui limite l’action culturelle de notre pays, et l’on répartit des moyens de plus en plus faibles entre des acteurs toujours plus nombreux. Notre action en devient illisible. J’aimerais vous entendre sur ce point. Ce morcellement n’est pas une fatalité, et vous devriez vous donner pour objectif d’y remédier. C’est une exception française de plus : voyez la vitalité et la force du Goethe-Institut, sans parler des instituts culturels italiens. En réalité, on n’a pas tiré les leçons de l’expérimentation du rattachement du réseau à l’Institut : pour seul bilan, on se contente de la situation actuelle !

J’aimerais aussi en savoir davantage sur les suites et l’évaluation de la Nuit des idées – un beau slogan –, dont je n’aurai pas l’impudence de vous demander si elle est debout ou couchée…

Enfin, selon quels critères comptez-vous juger de la réussite de votre action à la tête de l’Institut français ?

Mme Marie-Odile Bouillé. Votre intervention a parfaitement complété le rapport qui nous a été remis. L’Institut français joue un rôle essentiel dans les actions culturelles menées à l’étranger et dans la diffusion de notre langue, mais aussi de notre création intellectuelle et artistique et de notre patrimoine cinématographique et audiovisuel. Il doit aussi développer le dialogue des cultures et organiser les saisons et les festivals en France et à l’étranger.

La diffusion de la langue française passe par l’échange et le partage des œuvres artistiques qui existent dans notre pays et à l’étranger. Quant à son apprentissage, l’Institut fait du soutien au numérique éducatif une priorité, pour reprendre les termes du rapport. Ainsi la plateforme « IFProfs » a-t-elle été finalisée en 2015. Qu’en est-il de son développement et de son utilisation dans les dizaines de pays cités ? L’Institut envisage-t-il d’étendre cette méthode à d’autres pays, notamment en Afrique ou en Amérique ?

M. Patrick Hetzel. Un élément fondateur de l’Institut est la volonté de décloisonnement qui a présidé à sa création. L’idée était de développer les partenariats entre les institutions qui s’occupent du rayonnement culturel de la France et de la promotion de notre culture, notamment à l’étranger. Voilà pourquoi le ministère des affaires étrangères a souhaité s’associer au ministère de la culture, mais aussi à celui de l’éducation nationale. Parmi les membres du conseil d’administration de l’Institut figure d’ailleurs la directrice générale de l’enseignement scolaire, ainsi que la directrice générale de l’enseignement supérieur.

Or, depuis la création de l’Institut, le volet enseignement supérieur est resté embryonnaire. J’avais eu l’occasion de m’exprimer à ce sujet lorsque je siégeais au conseil d’administration ; quelques années plus tard, les choses n’ont guère changé, ce qui m’étonne quelque peu, surtout par comparaison avec des pays plus offensifs comme la Chine, très active lorsqu’il s’agit d’établir des partenariats avec les départements de chinois à l’étranger. Que faites-vous pour vous rapprocher des autres interlocuteurs universitaires, par exemple de l’Agence universitaire de la francophonie (AUF), qui a un rôle essentiel à jouer pour que le français ne continue pas de perdre pied à l’échelle internationale, dans le système éducatif en général et universitaire en particulier ?

M. Jacques Cresta. Monsieur le président, c’est un plaisir de vous interroger trois mois après votre nomination à la tête de l’Institut français.

La restructuration du réseau diplomatique d’action culturelle par la fusion des SCAC et des instituts français locaux sous la marque « instituts français », achevée en 2013, a donné plus de visibilité à l’action culturelle et renforcé chez les expatriés le sentiment d’appartenance à la communauté française.

Depuis 2011, la dotation budgétaire accordée à l’Institut français est en baisse régulière, ce qui ne peut que susciter l’inquiétude quant à la capacité de la France à mener une politique culturelle extérieure ambitieuse. Dans ce contexte budgétaire contraint, il est envisagé, pour rationaliser le réseau culturel, de procéder à une refonte de la carte de nos implantations culturelles à l’étranger, notamment hors des capitales, en améliorant l’articulation entre les structures existantes. Quelles sont les villes concernées ? Selon quels critères déterminera-t-on cette nouvelle géographie ? Qu’adviendra-t-il des structures existantes ? Ne faut-il pas craindre un affaiblissement de l’influence culturelle française à l’étranger ?

La stratégie numérique de l’Institut est considérée comme l’une des réussites du dernier contrat d’objectifs et de moyens. Plusieurs outils et plateformes numériques ont été créés à l’intention du public et du réseau culturel. Des instruments collaboratifs sont également développés pour les enseignants de français langue étrangère du réseau ; l’accent est mis sur la formation numérique des agents de notre réseau culturel. Quelles actions sont envisagées afin de poursuivre et de renforcer leur déploiement et leur utilisation ?

Mme Véronique Besse. L’Institut français est au service du rayonnement de la France à l’étranger, qui est, vous l’avez rappelé, un marqueur essentiel de la puissance française. La France en a plus que jamais besoin dans un monde multipolaire où la force de persuasion par la culture est devenue l’un des principaux leviers d’influence.

L’éditorial de votre rapport d’activité 2015 parle de liberté d’expression, de diversité culturelle, de circulation des idées, mais le rapport sous-estime quelque peu l’importance de la langue, bien que celle-ci y soit qualifiée de « vecteur de culture ». En 2010, on comptabilisait 220 millions de locuteurs francophones dans le monde, soit 3 % de la population mondiale ; en 2050, selon les prévisions, il y en aura 700 millions, soit 8 % de la population mondiale. En d’autres termes, les zones d’influence de la France vont s’étendre, notamment sur un continent africain jeune et dynamique. Cela ne semble pourtant pas être un vrai chantier pour l’Institut français. Comment comptez-vous tirer profit de cette influence pour permettre à la France d’être une puissance de premier plan ?

Mme Sandrine Doucet. Monsieur le président Foucher, je vous félicite de votre nomination et je vous souhaite de réussir dans votre exaltante mission.

J’aimerais revenir sur le programme Entr’écoles, qui associe l’Institut français, la direction générale de la création artistique (DGCA) du ministère de la culture et de la communication et les écoles supérieures d’art. Le rapport évoque l’exemple de la collaboration entre l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Lyon et l’Institut supérieur d’art de La Havane, à Cuba. Ces projets sont essentiels à l’heure où nous consolidons l’enseignement supérieur artistique dans le cadre du projet de loi relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine. Quels autres projets du même ordre pourriez-vous nourrir à l’avenir ?

Vous avez évoqué vos échanges avec la municipalité bordelaise. C’est une question d’actualité puisque c’est à la fin de cette semaine que doit être bouclé l’appel à projets lancé dans le cadre de la convention 2016-2018 entre l’Institut et la ville. Or, ces dernières années, peu d’artistes ont été concernés et, en 2013, le partenariat n’a bénéficié qu’à un seul projet en résidence : une artiste américaine est venue à Bordeaux et une artiste bordelaise s’est rendue aux États-Unis. J’aimerais donc savoir ce qui sera fait dans le cadre des futurs programmes pour impliquer plus d’artistes et, surtout, pour démocratiser les projets : ces partenariats qui visent l’international ne doivent pas être hors-sol, ils devraient infuser les pratiques artistiques et culturelles locales, qui manquent à Bordeaux.

M. Bruno Foucher. Les questions sont très nombreuses, et je m’en réjouis ; je vais y répondre dans la mesure du possible, n’étant en poste que depuis un peu moins de trois mois, avant de laisser ma directrice générale Anne Tallineau apporter les compléments nécessaires.

Pourquoi n’avons-nous de relations qu’avec les grandes collectivités territoriales ? Précisons d’abord que nos partenariats avec les collectivités concernent l’étranger, où toutes ne se projettent pas. En outre – j’aurai souvent à le répéter –, nos moyens budgétaires sont limités. Or lorsque nous contractons avec une collectivité, nous apportons des moyens : la convention avec Bordeaux représente 50 000 euros, celle avec Rennes 90 000, sachant qu’il peut y en avoir vingt-sept ou vingt-huit et que nous voudrions approcher l’ensemble des régions. Nous ne pouvons donc pas nouer des relations avec toutes. En revanche, nous examinons avec bienveillance chaque demande émanant d’une collectivité désireuse d’établir des liens avec l’Institut.

J’en profite pour préciser que de nombreux artistes ont bénéficié de notre convention avec Bordeaux : je crois que vous avez été mal informée, madame la députée. Nous avons promu un grand nombre de petits projets.

Voilà d’ailleurs pourquoi nous avons entrepris une révision des stratégies qui sous-tendent nos conventions avec les collectivités, afin d’éviter le saupoudrage qui consiste à donner 2 000 euros par-ci, 3 000 euros par là à une petite troupe qui voudrait aller se produire à l’étranger. C’est un choix tout à fait respectable, mais qui ne correspond pas à la méthode que nous voudrions adopter. Je l’ai dit à mes interlocuteurs, et je continuerai : plutôt que de venir compléter des politiques classiques, nous voulons nous porter sur des scènes prescriptrices, favoriser la promotion d’artistes ou de startups numériques dans des lieux où ils pourront rencontrer des acteurs à l’international qui leur permettront de se développer et d’essaimer. C’est ce que nous allons faire avec nos quatre premiers partenaires, avant de dresser le bilan de ces échanges pour savoir si nous allons dans la bonne direction.

La proposition qui a été avancée concernant IFcinéma poserait sûrement un problème de droits.

S’agissant de l’expérience du rattachement du réseau et de ses suites, on ne peut pas dire que je me contente de ce que j’ai trouvé ; simplement, je prends ce que j’ai en main, la situation étant ce qu’elle est. Pour avoir passé dix ans au sein du réseau, où je faisais partie des ambassadeurs qui s’occupent de la culture – j’avais sur place un institut français, des alliances, des SCAC, et j’y consacrais du temps –, je sais néanmoins que tous les problèmes ne peuvent pas être résolus par une centralisation de l’ensemble des moyens en un point unique à Paris. Il faut aussi compter avec la politique des hommes, leur perception. Croyez-moi, un ambassadeur qui fait en sorte de coordonner les moyens dont il dispose
– alliances françaises, instituts français, universités dotées d’un département de français – obtient des résultats. Ma stratégie, sachant que je suis obligé de prendre l’appareil tel qu’on me l’a confié, consiste donc notamment, je l’ai dit, à me rendre à toutes les réunions régionales d’ambassadeurs pour rappeler à mes collègues leur rôle de coordinateur et souligner qu’il leur est tout à fait possible de rassembler les alliances françaises – comme d’ailleurs les instituts français –, si nombreuses et disséminées soient-elles, puisqu’elles nous sont liées par des mécanismes de formation et par les moyens que nous leur fournissons. Bref, un ambassadeur actif qui veut mettre en ordre de bataille le réseau présent dans son pays est en mesure de le faire.

J’ai pu le vérifier il y a quinze jours, lorsque j’ai reçu la visite du conseiller de coopération et d’action culturelle (COCAC) de Madrid. L’ambassadeur qui a récemment pris ses fonctions sur place a été spécialiste des questions culturelles dans le passé, et l’on voit très bien la stratégie qu’il met en œuvre dans toutes les alliances d’Espagne, en montant à l’échelle du pays des événements auxquels les acteurs locaux vont être associés.

En somme, s’il n’est peut-être pas satisfaisant de ne pas disposer d’un mécanisme aussi centralisé que le British Council ou le Goethe-Institut – qui ne bénéficie d’ailleurs pas d’une très grande visibilité à l’étranger –, rien n’est possible sans ceux qui pilotent ou relaient localement la politique culturelle à l’appui des autres politiques. Je ferai avec les moyens du bord – ceux d’aujourd’hui, ceux de demain s’ils changent – et je compte bien consolider la stratégie des différents acteurs en rappelant à l’ambassadeur que c’est à lui de donner l’impulsion, naturellement avec l’entière participation de son COCAC, son collaborateur principal dans ce domaine.

J’en viens à la francophonie. Nous avons un rôle à jouer en la matière mais, cela a été dit, nous ne sommes pas les seuls : le dispositif est effectivement morcelé mais chacun a sa spécialité. L’AEFE suit les 500 lycées homologués ; j’ai toujours entretenu d’excellentes relations avec elle lorsque je faisais partie du réseau. Nous avons naturellement des liens très étroits, et plutôt efficaces, avec l’AUF et avec les départements de français des universités. Lorsque j’étais en Iran, 19 accords avec des départements français étaient en vigueur ; en Tunisie, il y a 13 départements de français qui sont tous liés à l’ambassade de France par des accords de coopération.

Assurément, la tâche est immense. L’avenir de notre influence dépend principalement de ce vecteur. Je l’ai dit dans mon introduction : l’aire francophone est un périmètre d’action privilégié. Mais nous ne disposons pas de moyens suffisants pour faire tout ce que nous voudrions en ce domaine. C’est par la stratégie numérique dont va vous parler Anne Tallineau, en déployant des plateformes à vocation universelle, que nous pourrons toucher un public toujours plus large auquel nous permettrons de parler français ou de l’apprendre selon une méthodologie normée. Cela ne nécessite pas forcément d’importants moyens financiers. Nous continuons de réfléchir à cette question, dont vous pouvez être assurés qu’elle demeure l’une de nos priorités.

Nous promouvons également la francophonie par la diffusion et la traduction du livre. Dans ce domaine, la carte géopolitique évolue à toute vitesse. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce sont des pays asiatiques – la Chine, la Corée – qui cherchent le plus à nous acheter des droits, non les pays européens ni l’Amérique du Nord. L’édition américaine est très fermée, depuis très longtemps ; les livres étrangers y représentent à peine 3 %, dont la moitié de livres français.

Le mécénat est, je le répète, une entreprise difficile. Ce n’est pas que les entreprises ne veulent pas accorder de libéralités ; simplement, je l’ai dit, elles sont sur-sollicitées par les établissements culturels. Il suffit de se rendre dans une exposition parisienne pour constater l’implication de dix ou douze sponsors. Lorsque j’étais ambassadeur, je n’ai cessé de demander aux entreprises françaises sur place de participer à telle cérémonie ou à tel événement. Il ne s’agit pas d’entreprises locales, mais des succursales d’entreprises nationales.

Certes elles interviennent à titre gracieux, mais non sans attendre des contreparties. Il ne s’agit pas de subordonner la culture à des intérêts d’entreprise. Simplement, les entreprises ne mettent pas au pot des tickets de 150 000 ou 200 000 euros, parfois bien plus encore, sans demander à bénéficier d’une plus grande visibilité en retour. J’ai assisté à deux comités de mécènes : j’ai pu constater que cette demande était récurrente. Cela ne veut pas dire que les entreprises soient toujours très exigeantes, mais ce ne sont ni des ONG ni des bonnes sœurs : elles ont un business plan et doivent rendre compte de ce qu’elles font en matière de mécénat.

Il n’en va pas de même des fondations, que nous sollicitons beaucoup. En Afrique, nous voudrions approcher la Fondation Orange. Nous faisons appel à elles pour notre villa artistique au Japon : ce sont deux fondations très actives qui financent l’essentiel du programme.

Mais le mécénat n’est pas une source illimitée de financement. Voilà pourquoi j’ai commencé d’explorer d’autres pistes, dont les offsets, qui pourraient être prometteuses mais à propos desquelles je n’en suis qu’au tout début de ma réflexion.

Un mot, enfin, sur les écoles d’art. Mes équipes, avec qui j’ai abordé le sujet pas plus tard qu’avant-hier, me disent exactement la même chose que vous, madame Doucet. Il serait idéal de pouvoir mettre les écoles d’art françaises en relation avec des partenaires internationaux, car la création se nourrit d’échanges. Malheureusement, nous n’avons pas les moyens financiers de le faire. Cette question pourrait être mise sur la table lorsque nous passerons sous une seconde tutelle, celle du ministère de la culture, en juillet, car je sais qu’elle tient à cœur à la ministre. Nous serons alors en mesure de savoir si nous pourrons développer cette politique en ayant les moyens de la nourrir.

Mme Anne Tallineau, directrice générale déléguée de l’Institut français. En ce qui concerne les collectivités territoriales, nous avons signé en 2015 une nouvelle convention avec la région Corse. Nous cherchons toujours à établir de nouveaux partenariats. La réforme territoriale qui vient d’avoir lieu soulève quelques questions, dont nous discutons beaucoup avec les régions, et parfois avec les communautés urbaines ou les villes. Naturellement, nous sommes soumis à une contrainte financière qu’a très bien rappelée Bruno Foucher, mais c’est également le cas des collectivités elles-mêmes. Voilà pourquoi il nous serait très difficile de développer des partenariats avec de plus petites entités, qui ne pourraient mobiliser les ressources nécessaires.

Cela dit, l’action que nous menons sous l’impulsion de Bruno Foucher dans le but de revivifier nos relations avec l’ensemble des collectivités dépasse le seul cadre de ces conventions. Ainsi, à Lyon, où nous nous rendrons la semaine prochaine, nous sommes partenaires du festival Nuits sonores, à l’occasion duquel nous faisons venir 50 professionnels du monde entier afin qu’ils repèrent ce que la scène française a de meilleur à offrir en musique et en création numérique. Nous les ferons également participer à European Lab. Ces actions très diverses sont loin de toutes relever de la convention. Ce festival est reconnu à l’échelle internationale, il peut être exporté. C’est ce type d’actions, de lieux, d’événements, d’acteurs que nous voulons englober dans notre démarche vis-à-vis des collectivités.

S’agissant de l’expérimentation, la décision de ne pas rattacher le réseau culturel à l’Institut français s’explique aussi par le coût qu’aurait représenté le rattachement, soit quelque 70 millions d’euros sur trois ans. Cet élément a pesé lourd dans le contexte de restrictions budgétaires extrêmes que nous connaissons.

Comment nous, Institut français, pouvons-nous résoudre le problème aujourd’hui ? La création même de l’Institut est un début de réponse : depuis qu’il existe, l’établissement s’est considérablement rapproché du réseau des instituts français comme de celui des alliances françaises. Nos actions sont beaucoup plus coordonnées que ne l’étaient celles de Culturesfrance. La stratégie géographique que le président a développée devant vous, les contrats-cadres que nous allons passer avec les territoires dont le potentiel est à nos yeux le plus élevé et avec le réseau culturel sur place ne peuvent que favoriser cette coordination. Quant aux alliances françaises, nous sommes en train de renouveler notre convention avec elles ; elles siègent à notre conseil d’administration, nous siégeons au leur, et nous veillons quotidiennement à leur répondre au mieux et à nous coordonner avec elles autant que possible. Pour nous, la multiplicité des acteurs est aussi une richesse : notre pays a la grande chance de disposer de deux réseaux d’influence dans le monde, dont l’Institut français est la tête de pont et l’agence centrale. On nous envie beaucoup ce système.

Quant à ce que pourrait être la grande agence à laquelle Olivier Poivre d’Arvor avait fait allusion lors de son audition, n’oublions pas que le British Council équivaut à la fois à CampusFrance, à l’Institut français et à Erasmus + : son champ d’action est loin de se réduire à la culture. Il ne m’appartient pas de porter ici un jugement à ce sujet. Mais ne dévalorisons pas la richesse que représente notre réseau, les hommes et les femmes qui le composent – dont l’ambassadeur, qui joue dans son animation un rôle déterminant, ainsi que le président l’a parfaitement expliqué. Le ministère des affaires étrangères s’est d’ailleurs récemment emparé résolument de ce dossier en créant un comité des opérateurs et en s’efforçant d’articuler la stratégie de chacun d’entre eux. Il nous appartient de travailler au plus près d’eux et de les nourrir au mieux.

En ce qui concerne le manque de visibilité et l’éparpillement supposés de nos actions, j’aimerais prendre l’exemple de la Nuit des idées, née du module de la Nuit de la philosophie. Il y en aura cette année une quinzaine dans le monde, un chiffre à peu près équivalent à celui de l’année dernière. La Nuit de la philosophie a attiré 15 000 personnes au Maroc, entre Rabat et Casablanca – des files d’attente, des jeunes que l’on n’a jamais vus là auparavant –, 10 000 personnes en Argentine, 10 000 encore à New York, qui font la queue jusqu’à trois heures du matin devant les locaux de l’Institut français. Voilà qui permet de mesurer l’effet de notre action.

Quant à l’avenir de cette manifestation, ainsi que Bruno Foucher l’a annoncé, il y aura une nouvelle Nuit des idées en 2017, qui se caractérisera sans doute par l’organisation d’événements simultanés dans le monde entier, à date fixe. Nous y travaillons, car c’est l’une des marques de fabrique de la France : nous sommes attachés à la libre circulation des idées, à la liberté d’expression, et nous avons un rôle à jouer en la matière.

J’en viens à la francophonie, qui occupe une place centrale dans vos préoccupations. Il est vrai qu’il existe dans ce domaine une multiplicité d’acteurs. Cette question, d’importance croissante, a longtemps été associée à une image un peu vieux jeu, voire à la Françafrique. Mais le rapport Attali, qui a délibérément choisi de l’aborder du seul point de vue économique, a mis en évidence toutes les potentialités de l’espace francophone. Pour l’Institut français, évidemment, la francophonie ne peut être réduite à cette dimension économique. Sans doute une forte impulsion politique serait-elle nécessaire pour émettre un message qui réunisse l’ensemble des acteurs.

À notre niveau, nous traitons la question de deux manières.

Premièrement, nous collaborons étroitement avec les autres acteurs de la francophonie : l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), partenaire de la Fabrique des cinémas du monde à Cannes et de plusieurs autres de nos programmes ; l’AUF, avec laquelle nous menons des programmes doctoraux ; la Fondation Alliance française, car les alliances françaises sont au côté des instituts français les destinataires de nos cours de français en ligne. En outre, nous développons de nouveaux outils que nous mettons à la disposition de tous les acteurs, dont le réseau social « IFProfs », destiné à mettre en relation tous les professeurs de et en français dans le monde, qu’ils travaillent au sein des lycées français de l’AEFE ou en entreprise, et à leur fournir une banque de ressources.

Deuxièmement, nous avons engagé une réflexion sur l’Afrique comme lieu d’action absolument prioritaire. L’Institut français est ici l’héritier d’une longue histoire de coopération incarnée par Culturesfrance et, avant elle, par l’Association française d’action artistique (AFAA). Tel est le sens du programme Afrique et Caraïbes en créations et de la Cinémathèque Afrique. Nous menons ainsi en Afrique une multiplicité d’actions que nous avons décidé d’engager de manière transversale, en installant un « groupe d’action Afrique » de manière permanente au sein de l’Institut. Il s’agit d’assurer une articulation optimale avec les acteurs privés présents sur le continent africain, sur le modèle de ce que nous faisons avec la Fondation Total dans le cadre du programme « Danse l’Afrique danse ! » ; nous réfléchissons actuellement avec d’autres partenaires – on connaît bien les grands partenaires, issus notamment du secteur des télécommunications – à des actions dans le domaine des arts visuels. Bref, nous œuvrons résolument à la valorisation et à la transversalité de nos actions sur le continent africain.

Toujours en Afrique, nous nous sommes aussi appuyés au cours des dernières années sur le fonds de solidarité prioritaire « 100 000 profs pour l’Afrique », dont nous gérons une petite partie du budget, mais qui arrivera malheureusement à échéance en 2017, ce que nous regrettons beaucoup.

S’agissant des outils numériques, nous enrichissons constamment Culturethèque, notre bibliothèque d’outils pour la lecture, de films, de musique à disposition des médiathèques du réseau. Je ne reviens pas sur IFcinéma. Nous travaillons en ce moment, sous l’impulsion du Quai d’Orsay et dans le cadre de MAEDI 21, à la rénovation de notre stratégie numérique. Comme vous l’avez noté, celle-ci est actuellement plutôt destinée à des utilisateurs professionnels, tout au moins au réseau qui peut ensuite s’en faire l’intermédiaire auprès de son propre public. Nous souhaitons adopter une démarche multi-supports également destinée directement au grand public, dont les premiers relais dans le monde sont le million de personnes qui fréquentent les instituts et les alliances françaises. Nous développons donc un outil numérique inclusif, fondé sur les réseaux sociaux – à ce propos, nous ne sommes pas peu fiers de nos 500 000 amis Facebook –, qui nous permettra d’aller vers les classes moyennes éduquées dans le monde. Il englobera tous nos outils professionnels, dont les outils de suivi des bénéficiaires de nos programmes que nous sommes en train de mettre au point et qui sont indispensables. En effet, dans le cadre des programmes de mobilité qui font partie de notre politique de coopération, nous avons pu repérer des artistes ou des personnalités de la société civile qui, de retour dans leur pays, deviendront pour nous autant de relais d’opinion et d’ambassadeurs.

En résumé, notre stratégie numérique joue à trois niveaux. D’abord, le grand public, à l’intention duquel nous voulons valoriser la vitalité de la culture française en montrant, sans prétention à l’exhaustivité, le meilleur de ce que nous avons à proposer. Ensuite, les bénéficiaires de nos programmes et les professionnels internationaux. Enfin, le réseau et les programmes nationaux français. Il s’agit d’un projet ambitieux que nous espérons pouvoir financer, notamment grâce à nos réserves ; nous sommes en train d’en discuter.

S’agissant des écoles d’art, ce sera l’École de design de Saint-Étienne qui concevra le pavillon français à la Foire du livre de Francfort. Plus généralement, comme l’a indiqué Bruno Foucher, nous réfléchissons beaucoup à la situation des écoles d’art avec le ministère de la culture et de la communication. Nous avons déjà un programme qui fonctionne dans le domaine des arts visuels. Il n’est pas facile de le développer dans des secteurs plus lourds comme les arts vivants. Mais cela fait partie des sujets sur lesquels nous travaillons ensemble, en lien avec les axes stratégiques du ministère de la culture.

Le conseil d’orientation stratégique se réunira avant que notre COM soit transmis au Parlement ; nous espérons que ce sera au mois de juin.

L’engagement des pouvoirs publics en vue de la Foire de Francfort, qui est pour nous un événement de la même ampleur qu’une saison, est très significatif : environ 3 millions d’euros, sur un budget total de quelque 4,8 millions. Nous espérons obtenir un peu plus d’un million d’euros du mécénat et comptons évidemment sur le partenariat, que nous recherchons avec énergie, de tous les acteurs – du secteur de l’édition, que nous veillons à inclure en permanence dans notre démarche, et des industries culturelles en général, car l’image que nous voulons donner de la France lors de cette manifestation est celle de l’innovation et de la créativité.

M. Bruno Foucher. J’aimerais répondre à la question qui nous a été posée au sujet de la révision de la carte du réseau et des villes qui en seront pilotes, mais je dois vous dire que nous ne sommes pas vraiment associés à cette réflexion, puisque le réseau ne nous appartient pas.

Quant à la place de l’Europe dans nos activités, l’Union européenne représente 15 % de nos engagements d’intervention, une part très significative à laquelle s’ajoutent 3 à 4 % pour l’Europe orientale. Il n’existe aucun effet d’éviction au profit des BRICS. Les BRICS font certes partie des pays prioritaires mais les priorités géographiques auxquelles j’ai fait référence incluent aussi les pays d’Afrique, principalement d’Afrique de l’Ouest, et les pays arabes. Ces pays qui sont à nos portes et ont besoin que nous y montrions notre culture ne seront donc pas pénalisés au profit de pays émergents ou néo-émergents plus lointains.

Je vous remercie de m’avoir reçu avec mon équipe. Je reste à votre disposition, sachant que je vais beaucoup me déplacer dans différents pays, dont l’Australie et la Nouvelle-Zélande que l’une d’entre vous a mentionnées, afin de voir sur place comment fonctionnent nos institutions culturelles et ce que nous pourrions faire de plus pour répondre aux demandes de ces territoires lointains. Il y a en effet en Australie 60 000 Français très actifs et qui ont besoin, comme tous nos compatriotes installés hors de France, de sentir la proximité de la culture française.

M. le président Patrick Bloche. Merci de votre disponibilité et de cet échange fructueux. Vous l’aurez compris, les commissaires de tous les groupes politiques sont particulièrement mobilisés pour vous accompagner dans vos missions de service public afin que le rayonnement culturel international de la France soit, au-delà des slogans, une réalité concrète, celle dont vous êtes porteurs au quotidien.

La séance est levée à onze heures trente.

——fpfp——

Présences en réunion

Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Réunion du mercredi 27 avril 2016 à 9 h 45

Présents. – M. Jean-Pierre Allossery, M. Pouria Amirshahi, M. Benoist Apparu, Mme Isabelle Attard, Mme Véronique Besse, M. Patrick Bloche, Mme Marie-Odile Bouillé, Mme Brigitte Bourguignon, Mme Marie-George Buffet, M. Jean-Noël Carpentier, M. Ary Chalus, M. Jacques Cresta, M. Bernard Debré, M. Laurent Degallaix, M. Pascal Deguilhem, M. Jacques Dellerie, Mme Sandrine Doucet, Mme Virginie Duby-Muller, M. William Dumas, M. Hervé Féron, Mme Annie Genevard, M. Jean-Pierre Giran, Mme Claude Greff, M. Michel Herbillon, Mme Gilda Hobert, M. Guénhaël Huet, M. Christian Kert, Mme Anne-Christine Lang, Mme Colette Langlade, M. Vincent Ledoux, M. Dominique Le Mèner, Mme Annick Lepetit, M. François de Mazières, M. Michel Ménard, Mme Dominique Nachury, Mme Maud Olivier, M. Christian Paul, M. Michel Pouzol, Mme Régine Povéda, M. Christophe Premat, M. Frédéric Reiss, M. Marcel Rogemont, M. Paul Salen, Mme Julie Sommaruga, M. Claude Sturni, Mme Michèle Tabarot, Mme Sylvie Tolmont, M. Stéphane Travert, M. Patrick Vignal

Excusés. – Mme Huguette Bello, M. Bernard Brochand, M. Jean-François Copé, Mme Michèle Fournier-Armand, M. Romain Joron, Mme Sonia Lagarde, Mme Martine Martinel, M. Michel Piron, M. Franck Riester, M. Rudy Salles

Assistaient également à la réunion. – M. Patrick Hetzel, M. Régis Juanico