Accueil > Travaux en commission > Commission des affaires culturelles et de l'éducation > Les comptes rendus

Afficher en plus grand
Afficher en plus petit
Voir le compte rendu au format PDF

Commission des affaires culturelles et de l’éducation

Mardi 6 décembre 2016

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 18

Présidence de M. Patrick Bloche, président

– Examen de la proposition de loi, modifiée par le Sénat, portant adaptation du deuxième cycle de l’enseignement supérieur français au système Licence-Master-Doctorat (n° 4175) (Mme Sandrine Doucet)

– Information relative à la Commission

– Présences en réunion 17

COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION

Mardi 6 décembre 2016

La séance est ouverte à seize heures vingt-cinq.

(Présidence de M. Patrick Bloche, président de la Commission)

——fpfp——

La commission des Affaires culturelles et de l’Éducation examine, sur le rapport de Mme Sandrine Doucet, la proposition de loi, adoptée par le Sénat, portant adaptation du deuxième cycle de l’enseignement supérieur français au système Licence-Master-Doctorat (n° 4175).

M. le président Patrick Bloche. Mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons cet après-midi vise à inscrire dans la loi l’accord, que l’on peut qualifier d’historique, conclu, au mois d’octobre dernier, entre les organisations syndicales, les organisations étudiantes, et la conférence des présidents d’université. Cette proposition de loi doit être adoptée rapidement si nous voulons qu’elle puisse entrer en vigueur avant les prochaines inscriptions en master qui doivent commencer au mois de mars prochain. Elle est inscrite à l’ordre du jour des séances publiques du lundi 19 décembre prochain.

Je remercie notre rapporteure, Sandrine Doucet, car nous ne l’avons désignée que le 22 novembre dernier, ce qui ne lui a pas permis de disposer d’un long délai pour travailler sur ce texte – cela dit, compte tenu de sa connaissance du sujet, je n’avais aucune inquiétude.

Mme Sandrine Doucet, rapporteure. Monsieur le président, si nous avons effectivement pu travailler assez rapidement, c’est que nous partions de l’accord historique que vous avez évoqué qui a permis à tous les membres de la communauté universitaire de se retrouver autour d’une même table pour régler la question lancinante de la sélection en deuxième année de master, dont les fondements juridiques restaient incertains.

Je veux saluer l’esprit de responsabilité et le courage des principales organisations représentant les étudiants – l’UNEF, la FAGE, et le PDE –, les enseignants et personnels des établissements d’enseignement supérieur – leurs organisations sont énumérées dans les documents à votre disposition –, mais aussi celles représentants les établissements d’enseignement supérieur –  la conférence des présidents d’université (CPU) et la conférence des directeurs des écoles françaises d’ingénieurs (CDEFI). Elles se sont toutes entendues, le 4 octobre 2016, sur une position commune équilibrée et prometteuse.

Ce compromis a été approuvé par plus des deux tiers des suffrages lors du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) du 17 octobre 2016. Le Sénat s’est inspiré de ce puissant et original consensus en adoptant le 26 octobre dernier, à une très vaste majorité, la présente proposition de loi déposée par M. Jean-Léonce Dupont, sénateur du groupe Union des démocrates et indépendants, qui intègre, grâce à un amendement de Mme Dominique Gillot, le résultat de l’accord du 4 octobre.

Nous devons constater que la situation actuelle est insatisfaisante. Le système licence-master-doctorat (LMD), introduit en France en 2002, est demeuré inachevé pour cette étape décisive des parcours que constitue le master. Le LMD s’inspirait pour la forme du processus de Bologne de 1999 visant au rapprochement des systèmes d’enseignement supérieur européens, mais sans véritable cohérence avec cette démarche en raison de l’existence d’une césure en milieu de master. Seuls certains masters permettent de déployer une formation complète et homogène sur quatre semestres, et ils sont presque majoritaires à conserver une procédure sélective à l’entrée de la deuxième année, héritée de l’accès limité qui existait traditionnellement à l’entrée des diplômes d’études approfondies (DEA) et des diplômes d’études supérieures spécialisées (DESS). Il faut dire que le maintien des traditions de recrutement à bac + 4 des professions emblématiques du droit et de la psychologie a contribué à ancrer cette pratique.

Cette situation nuit à la qualité pédagogique d’un cycle dont la pertinence doit reposer sur l’indivisibilité de ses quatre semestres constitutifs. Elle tend à réduire les formations en M2, amputées par les nécessaires remises à niveau d’étudiants venus d’horizons divers. Cela obère aussi les expériences à l’étranger telles les semestres Erasmus, qui ne trouvent pas leur place entre un Ml concentré sur la nécessité d’obtenir le « meilleur M2 possible », et un M2 déjà très rempli par les mises à niveau et les stages.

Cette césure est aussi un facteur d’incertitude et d’inégalité pour les étudiants. Les articulations byzantines entre les mentions Ml et M2 sont autant de facteurs de complexité qui défavorisent les étudiants issus de familles peu au fait des subtilités du système universitaire. Finalement, 35 % des étudiants n’obtiennent pas leur Ml en un an.

Ce master coupé en deux affaiblit la lisibilité et donc l’attractivité internationale de nos universités alors que nous cherchions précisément à améliorer ces dernières lors des débats préalables à l’adoption de loi relative à l’enseignement supérieure et à la recherche. Comme je l’ai indiqué, cette césure n’est pas cohérente avec le processus de Bologne.

Enfin cette coupure juridiquement très fragile nourrit des contentieux récurrents qui sont une continuelle source d’instabilité aussi bien pour les requérants que pour les établissements mis en cause. En 2015 et en 2016, de très nombreux tribunaux, ainsi que le Conseil d’État, ont annulé des refus d’inscription en constatant que la loi actuelle n’autorisait une sélection, d’ailleurs prévue en entrée de Ml et non en M2, que dans des conditions particulières non satisfaites.

Nous devons aborder de façon constructive la question de la sélection. Si chacun convient qu’il est indispensable d’achever la construction du processus LMD, cette question est longtemps demeurée piégée par des postures idéologiques autour de conceptions qui, lorsqu’elles sont radicales, sont également impraticables.

Il est cohérent que soit assurée une légitime adéquation entre les formations et l’aptitude des étudiants à les suivre avec succès. Pour autant, orienter là où l’on a de réelles chances de réussir n’est pas sélectionner par principe, dans une logique malthusienne, en réservant les « meilleures » formations à des jeunes préalablement triés sur le volet.

Notre système d’enseignement supérieur souffre trop de cette extrême et précoce sélectivité dans de très nombreuses filières, préemptées par ceux qui disposent du capital culturel pour les identifier et y pénétrer. S’il est un fait systématiquement démontré par les chiffres, c’est que chacun gagne à élever notre niveau global d’études. Les étudiants eux-mêmes y gagnent bien sûr, car le diplôme demeure le meilleur bouclier contre le chômage et l’un des gages les plus précieux pour accéder à des métiers qualifiés et des rémunérations plus confortables. Mais tous les citoyens bénéficient ensuite du dynamisme économique et social d’une société mieux formée. Dans ce contexte, il n’est ni efficace, ni juste de priver des jeunes, engagés avec réussite dans un parcours, de toutes perspectives de poursuite d’études.

L’accord du 4 octobre qu’il nous est proposé de transcrire dans la législation présente un compromis audacieux et protecteur.

Le texte renoue avec la logique LMD, ce qui donne une visibilité internationale, en permettant la construction d’une offre de formation de master qui se déroule pleinement sur deux années. Il supprime en effet la barrière sélective qui existe aujourd’hui entre la première et la seconde année de master. À cet effet, il déplace l’éventuel recrutement des universités à l’entrée de la première année du cycle.

Cette sélection à l’entrée reposera sur des procédures claires et transparentes. L’admission ne pourra être subordonnée qu’au succès à un concours ou à l’examen du dossier du candidat, selon des critères qui seront exposés en particulier sur un portail d’information créé à cette occasion. Les décisions de rejet devront être motivées et communiquées aux candidats.

Un aménagement est introduit pour les formations du droit et de la psychologie, dont les concours ou les métiers réglementés reposent encore sur des sorties à bac + 4. Cependant, cette exception est transitoire, et une vaste concertation est d’ores et déjà engagée pour garantir rapidement leur retour vers le droit commun.

Je signale aussi que pour éviter que cette nouvelle faculté ne nourrisse une inflation infondée du nombre de masters sélectifs, la fixation des capacités d’accueil par les établissements fera l’objet d’un « dialogue » avec l’État. Ce dernier pourra ainsi s’assurer qu’elles seront fixées uniquement en fonction de critères objectifs comme les capacités des locaux d’accueil, celles de l’encadrement, ou l’aptitude à offrir un nombre suffisant de stages. Pour autant, je ne crois pas à un réflexe malthusien des universités. Les capacités existantes en Ml comme en M2 sont totalement en phase avec les flux actuels de diplômés de licence. Les universités n’ont aucune raison de diminuer leurs capacités d’accueil en master, car ces dernières irriguent leur potentiel de recherche.

En contrepartie de cette clarification des procédures d’entrée, et pour éviter que certains titulaires de licence se retrouvent dans une impasse au milieu de leur parcours, alors même qu’en franchissant cette très difficile étape qu’est l’obtention du premier cycle ils ont démontré leur aptitude à réussir, la proposition de loi institue un très prometteur et innovant droit à la poursuite d’études en master. Tout étudiant titulaire d’un diplôme national de licence qui n’aura pas reçu de réponse positive à ses demandes d’admission se verra ainsi désormais garantir une inscription dès lors qu’il saisira le recteur.

Le recteur de région académique lui formulera trois propositions cohérentes avec ses aspirations, en priorité dans l’établissement dans lequel il a obtenu sa licence ou, à défaut, dans un établissement de la même région académique. Ces propositions tiendront évidemment compte du projet professionnel de l’étudiant.

Des moyens seront mis en place pour l’application de cette disposition. Je veux souligner l’ampleur des garanties apportées à ce droit. La mobilité géographique, souvent coûteuse pour l’étudiant, est limitée autant que possible. Sont moins en cause les changements d’établissements, souvent indispensables pour aller dans un master qui correspond mieux à un projet professionnel, que les déménagements très loin du domicile, socialement discriminants. Je rappelle qu’aujourd’hui, plus de 40 % des étudiants changent déjà d’établissement en Ml, et que 37 % en changent en M2. En retenant l’échelle de la région, l’accord et la proposition de loi trouvent le juste équilibre. En outre, l’État s’est engagé à mobiliser tous les moyens disponibles, en particulier les bourses, déjà dépendantes de la distance entre le foyer familial et le lieu d’étude ainsi que les aides ponctuelles à l’installation.

Un autre élément est important à mes yeux : ce droit à la poursuite d’étude ne se limite pas aux jeunes diplômés de licence. Il pourra être sollicité de nombreuses années après l’obtention du diplôme, conformément à l’ambition de renforcer la formation tout au long de la vie.

Il est un dernier élément, moins fréquemment souligné, sur lequel je veux insister avec force. L’accord du 4 octobre n’oublie pas l’indispensable information et le défi de l’orientation.

Comme je l’ai dit, en matière de formation, la complexité et la profusion sont souvent les masques d’une préemption sociale de l’orientation au bénéfice des jeunes les mieux armées pour identifier les parcours de la réussite. Pour éviter cet écueil, l’accord repose sur l’engagement du Gouvernement de mettre en place dans les plus brefs délais un portail dénommé « trouvermonmaster.gouv.fr » présentant avec clarté et précision l’ensemble des filières disponibles, leurs prérequis et leur évaluation. Ce portail, qui ne sera en aucune manière prescripteur – il sera donc très loin du modèle de l’administration post-bac (APB) –, permettra à tous les étudiants de connaître les formations et les débouchés concrets des masters, de mieux identifier les logiques de continuité entre les licences et les masters, et de bien comprendre les éventuels critères de sélection retenus. C’est là encore un progrès considérable, qui appelle un travail de préparation approfondi de la part des universités
– certaines ont déjà amplement commencé leur réflexion sur la constitution du portail.

Cela explique pourquoi, si nous voulons réussir la rentrée 2017, il importe d’adopter cette proposition de loi aussi vite que possible. Bien sûr, il faudra réfléchir à une refonte de l’orientation en licence, en s’inspirant notamment des conclusions de la mission d’information de notre commission sur le bac – 3/bac + 3, présentées l’année dernière par notre collègue Emeric Bréhier qui appelait en particulier à la mise en place d’un tutorat d’orientation pour tous les étudiants.

Avec cette proposition de loi, je crois que nous avons affaire à un équilibre de grande qualité qui évite les ornières idéologiques, et qui s’appuie sur le principe cardinal selon lequel, en matière d’enseignement, l’essentiel est d’orienter sans empêcher. Il rend concrète l’ambition de co-construction avec les acteurs, ambition qui constitue le meilleur espoir pour continuer de bâtir un enseignement supérieur performant et démocratique.

M. Yves Durand. Cette proposition de loi a été votée au Sénat au-delà des clivages politiques. Elle répond à une situation juridique particulièrement délicate qui voit notre université suivre une logique entrant en contradiction avec celle que nous avions choisie conformément au modèle adopté dans l’enseignement supérieur en Europe.

Des familles, celles relevons-le qui en avaient les moyens, ont pu arguer de l’incertitude juridique actuelle pour aller devant les tribunaux pour faire annuler des refus d’inscription opposés à leurs enfants. Cette situation impossible et ces contentieux ont amené tous les acteurs à réfléchir à une solution pour parvenir au compromis du 4 octobre. Il a été approuvé par le CNESER, le 17 octobre, après avoir reçu l’accord de tous les grands acteurs de l’université : la CPU, la Conférence des grandes écoles, les deux principaux syndicats étudiants, les syndicats enseignants… Tout cela est bien la marque d’un accord historique qu’il faut maintenant inscrire dans la loi pour qu’il soit appliqué.

Le texte adopté par le Sénat reprend intégralement cet accord. Il s’agit d’un texte d’équilibre qui repose sur deux piliers.

D’une part, l’orientation-sélection – n’ayons pas peur des mots – pour l’entrée en master dans les filières sous tension est indispensable si l’on veut éviter la mise en place du pire des mécanismes de sélection : le tirage au sort. D’autre part, un nouveau droit à la poursuite des études doit être inscrit dans la loi. Un pilier ne peut pas exister sans l’autre. Il faut que de plus en plus d’étudiants soient admis en master, mais on ne peut pas laisser faire n’importe quoi ; on ne peut pas laisser les étudiants choisir seuls sans une orientation fondée sur les débouchés des masters, et sur la volonté des universités.

Cet accord d’équilibre vise à une nouvelle organisation du cursus des masters fondée à la fois sur l’orientation et sur un nouveau droit.

Le groupe Socialiste, écologiste et républicain invite l’ensemble des députés de la commission et de notre assemblée à faire entrer cet accord dans la loi et, pour cela, à voter la proposition de loi dans les termes adoptés par le Sénat.

M. Frédéric Reiss. Une fois de plus, nous examinons un texte en toute urgence. Incontestablement, le temps s’accélère pour la majorité.

S’agissant de la première partie de cette proposition de loi, je ne peux que me joindre au concert de louanges. À l’heure du parcours LMD, la sélection à bac + 4 qui existait autrefois n’a plus lieu d’être. Nous sommes tous d’accord sur ce point, et c’est à ce problème que s’attelait le texte du sénateur Dupont.

Le texte initial devait appliquer la pleine logique du parcours LMD pour permettre la construction d’une offre de formation de masters se déroulant sur deux années, comme chez nos voisins européens. À l’heure des échanges internationaux, c’était devenu plus qu’indispensable.

Alors pourquoi avoir tant attendu ? Parce que cette réforme demandait un certain courage politique. M. Mandon a eu ce courage, ou plutôt la lucidité de dire la vérité, je le cite : « Pour moi, la sélection n’est pas un gros mot, la loi doit rendre possible une sélection en master 1. » Il a vite été recadré par sa ministre de tutelle, Mme Vallaud-Belkacem. Yves Durand, qui vient de parler de sélection, le sait très bien.

Nous n’aurons donc plus de « sélection » à l’entrée en master mais un « recrutement ». Ce terme, tiré du vocabulaire du monde du travail, reste – que vous le vouliez ou non – une sélection. Vous pouvez toujours renommer les choses, la réalité est là. Pour nous, la sélection va perdurer. Vous le reconnaissez vous-même, ce diplôme fait l’objet de la concurrence internationale la plus acharnée, parce que son degré de spécialisation et de professionnalisation en fait l’un des diplômes les plus efficaces pour intégrer le marché du travail. Il ne peut que rester sélectif, sous peine d’être dévalorisé. Faire croire qu’il pourrait en être autrement, c’est mentir aux étudiants.

Vous avez inspiré un accord par lequel nous ne pouvons pas nous sentir liés, parce qu’il n’est pas une bonne nouvelle pour l’université française à moyen terme. C’est un peu du donnant-donnant, au détriment des étudiants eux-mêmes. Le rapporteur du Sénat s’est d’ailleurs montré très dubitatif, même si son texte intègre maintenant la totalité du compromis.

Éclaircir le sujet de la sélection en master aurait dû s’accompagner d’une politique de renforcement et de professionnalisation du diplôme de licence, et d’une meilleure information sur les masters existants. Le « droit à la poursuite d’études » est une chimère et une usine à gaz.

C’est une chimère, parce que les masters les plus demandés sur le marché du travail et les grandes écoles resteront très compétitifs, à l’évidence, parce qu’ils continueront à ne sélectionner que les meilleurs étudiants, et c’est bien normal.

C’est une usine à gaz, parce que le système que vous proposez va engorger les rectorats. Auparavant, c’était aux étudiants de faire les démarches pour trouver un master correspondant à leur projet et à leurs aptitudes. Demain, n’importe quel étudiant, même pas très motivé ni pressé d’intégrer le marché du travail, n’aura plus qu’à déposer un dossier dans n’importe quel master et attendre. Une fois qu’il sera refusé, le rectorat fera le travail pour lui trouver une formation, même plusieurs, qu’il sera obligé d’accepter. Pensez-vous qu’il s’agit là d’une bonne préparation au monde du travail ? Sans parler du coût pour le contribuable, qui n’a même pas été évalué. Va-t-on ouvrir des masters en nombre ? Aucune étude d’impact n’a été faite.

Enfin, la mise en place de ce droit, à terme, ne va faire que renforcer les inégalités. Il va y avoir les masters sélectifs, qui offriront des débouchés et que les meilleurs étudiants voudront intégrer, et les autres qui seront assignés aux étudiants recalés. Les grandes écoles tireront toujours mieux leur épingle d’un jeu dont les étudiants seront les grands perdants.

En évitant soigneusement le mot « sélection », vous ne voulez fâcher personne. Nous ne pouvons quant à nous cautionner cela. Nous nous opposerons donc au texte tel qu’il est présenté et défendrons des amendements à cette fin.

M. Rudy Salles. Attaché à l’objectif d’harmonisation des cursus de formation dans l’enseignement supérieur, le groupe Union des démocrates et indépendants soutient le processus de Bologne depuis son lancement et la mise en place du modèle européen dit LMD, pour licence-master-doctorat, qui a progressivement remplacé les structures de diplômes propres à chaque pays.

À ce titre, nous regrettons fort que pendant plus de dix ans, un système de sélection à l’issue de la première année de master ait perduré en France. En effet, ni la loi LRU de 2007, ni la loi ESR de 2013 n’ont remédié à cet état de fait contraire à la logique d’harmonisation du système européen.

Initiée par notre collègue Jean-Léonce Dupont, cette proposition de loi a le mérite de mettre en lumière ce problème et a sans doute encouragé le Gouvernement à accélérer la concertation avec les acteurs concernés. La multiplication des recours devant les tribunaux administratifs risquait, à terme, de déstabiliser l’ensemble de l’offre de formation délivrée par les universités.

Ainsi, les députés du groupe Union des démocrates et indépendants souscrivent pleinement à l’objectif recherché par cette proposition de loi, puisqu’elle instaure une sélection à l’entrée en master dans l’esprit de la réforme européenne, et nous estimons que le texte initial permettait une lisibilité et une sécurité juridique bienvenue.

La proposition de loi initiale prévoyait ainsi une sélection à l’entrée du deuxième cycle – soit à l’entrée du master 1 – et laissait aux universités le soin de définir les capacités d’accueil en première année.

Pour intégrer la position commune aux syndicats étudiants et aux universités, le texte a été profondément modifié en commission au Sénat. La procédure de sélection à l’entrée en M1 prévue dorénavant reste proche de la première version, et peut nous convenir, même si elle ne précise plus qui définira les modalités de cette sélection : chaque établissement fixera les modalités adéquates.

La disposition qui nous laisse le plus sceptiques est l’instauration insidieuse d’un droit à la poursuite d’études. Cette mesure prévoit que s’ils en font la demande, les titulaires d’une licence non admis en master 1 se verront proposer une inscription dans une formation du deuxième cycle en tenant compte de leur projet professionnel et de l’établissement dans lequel ils ont obtenu leur licence.

Compte tenu du caractère très précaire et potentiellement hasardeux de l’inscription d’un tel droit dans la loi, nous souscrivons à la volonté du rapporteur au Sénat d’y adjoindre un dispositif d’évaluation. En effet, seule la pratique nous éclairera sur la portée de ce dispositif : droit à la poursuite d’études ou simple deuxième tour d’orientation ?

Nous devons veiller à ce que nos filières soient des filières de réussite, qui garantissent une insertion professionnelle aux étudiants. Selon une étude de l’Apec, en 2015, près de 40 % des jeunes bac + 5 sont sans emploi un an après leur diplôme.

Enfin, si nous soutenons ce texte, la question de la sélection à l’université reste ouverte et ne pourra plus être éludée. Cette année encore, 32 400 étudiants supplémentaires sont entrés dans l’enseignement supérieur, après une augmentation de 30 000 étudiants l’année dernière. Depuis 2009, les universités ont accueilli 180 000 étudiants supplémentaires, soit l’équivalent de près de dix universités.

Nous déplorons l’enterrement du rapport de l’Inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche sur « L’affectation en première année de licence dans les formations à capacités d’accueil limitées ». Ce rapport propose plusieurs mesures qui mériteraient d’être débattues : la limitation des redoublements en première année de licence, subordonnés à un avis favorable du jury qui tiendrait notamment compte de l’assiduité de l’étudiant ou de ses résultats ; la priorisation, dans les filières en tension, des étudiants ayant construit un parcours cohérent avec leurs vœux dans le supérieur ; ou encore la possibilité d’établir des prérequis à l’entrée de certaines formations, qui est peut-être la proposition la plus sensible.

Aujourd’hui les demandes d’inscriptions continuent d’augmenter chaque année et on ne peut tolérer que certaines filières en tension pratiquent une sélection aussi arbitraire que le tirage au sort. Si nous ne remettons pas en cause la massification de l’enseignement, nous constatons néanmoins qu’elle montre aujourd’hui ses limites et ses contradictions.

Par ailleurs, on ne peut éluder la sélection par l’échec, quand moins d’un tiers des étudiants inscrits en première année à l’université en 2012-2013 ont obtenu leur licence en trois ans, et que seuls 40 % des nouveaux inscrits à l’université en 2014-2015 ont validé leur première année de licence.

À terme, il faudrait qu’après un examen individuel de leurs dossiers, on puisse dire aux étudiants qu’avec tel bac, telles notes et telle filière, ils ont telle chance de réussite et telle probabilité de trouver un emploi.

Mme Marie-George Buffet. La proposition de loi qui nous est soumise est l’aboutissement d’un processus commencé en 2002, mettant en conformité le deuxième cycle des études universitaires avec les cursus existants en Europe pour l’enseignement supérieur : licence, master, doctorat (LMD). Nous avions regretté à l’époque la disparition du diplôme à bac + 2.

La mise en œuvre de ces nouveaux cursus s’est faite alors que le nombre d’étudiants augmentait. Le Centre d’études et de recherches sur les qualifications prévoit ainsi 666 000 étudiants de master en 2024, soit une hausse de 15,2 % par rapport aux effectifs de 2014.

Dans le même temps, les réformes successives de l’enseignement supérieur l’ont fragilisé. La loi LRU, puis la loi de 2013, ont érigé, sous couvert d’autonomie, la mise en concurrence des universités au nom d’une compétitivité qui sied mal au développement des connaissances et des savoirs. Les universités sont aussi fragilisées par la baisse des dépenses publiques. Le résultat est qu’en juillet, près de la moitié des universités avaient au moins une filière en tension.

Dans ce contexte, le déroulement du master et ses effectifs sont devenus un casse-tête pour de nombreuses universités. Ainsi, des sélections arbitraires se sont opérées entre le M1 et le M2, déclarées irrecevables par le Conseil d’État en février 2016. Le ministère a ensuite publié un décret en mai 2016, autorisant cette sélection dans certains cas, qui a reçu un avis défavorable du CNESER.

La ministre et le secrétaire d’État ont souhaité organiser une concertation avec les syndicats et les organisations du supérieur. Elle a débouché sur l’accord du 4 octobre, signé par la quasi-totalité des syndicats d’enseignants du supérieur et les syndicats d’étudiants, puis adopté par le CNESER.

Pour entériner le contenu de cet accord, le Gouvernement a décidé de l’adosser à une proposition de loi du sénateur Dupont, déposée le 9 septembre, portant la philosophie de la sélection. Cette proposition de loi amendée a pour principe essentiel d’interdire la sélection controversée entre master 1 et master 2 en instaurant une sélection, baptisée « sélection orientation », à l’entrée en master, après l’obtention de la licence.

Certes, le texte qui nous est proposé s’appuie sur l’accord signé avec les organisations syndicales, tout en assurant un droit à la poursuite des études et des critères de transparence. Il n’oblige pas à cette sélection, puisqu’elle dépendra des capacités d’accueil que peuvent fixer les établissements. C’est sur ce point que nous avons déposé un amendement, car nous pensons qu’il faut instaurer les garde-fous nécessaires pour atteindre les objectifs de la stratégie nationale de l’enseignement supérieur : l’élévation du niveau de qualification de notre pays avec 60 % d’une classe d’âge diplômée de l’enseignement supérieur, dont 50 % d’entre eux diplômés au niveau licence, 25 % au niveau master, et 20 000 docteurs par an.

Les capacités d’accueil de chaque établissement ne peuvent en effet dépendre uniquement de la volonté des directions et des contraintes budgétaires, même si le rapport nous a donné des éléments rassurants sur la réalité d’un risque malthusien concernant les capacités d’accueil. Celles-ci doivent bénéficier d’un cadrage national qui n’existe pas aujourd’hui, c’est le sens de notre amendement.

M. Hervé Féron. Madame la rapporteure, je tiens à vous remercier pour la qualité de ce rapport auquel vous avez su donner une tonalité résolument sociale et progressiste, en ne perdant jamais de vue l’intérêt des étudiants, qui constituent la première raison d’être de cette réforme.

Nous ne pouvons plus accepter le fait que près de la moitié des masters proposés dans les universités profitent du manque de précision de la loi pour mettre en place une sélection à la fin de la première année de master, avec pour conséquence le redoublement de plus d’un tiers des étudiants cette même année.

J’ai trouvé particulièrement pertinente votre analyse de la sélection par l’opacité pratiquée par les universités, qui favorisent indirectement les étudiants issus de familles à fort capital culturel, se rendant ainsi coupables de pratiques socialement discriminatoires incompatibles avec l’idéal méritocratique vers lequel notre système doit tendre. Aussi, je partage votre constat, qui était aussi celui de notre collègue Emeric Bréhier dans le rapport d’information que vous avez cité, sur l’importance des moyens humains pour aider les étudiants à construire leur projet professionnel. Cette dimension fait encore trop défaut au lycée, mais aussi à l’université. La mise en place du tutorat d’orientation imaginé par notre collègue répondait parfaitement à cet objectif.

Vous évoquez par ailleurs le fait que le manque de lisibilité des études supérieures en France provoque un déficit d’attractivité de nos universités à l’international. Je signale à ce sujet les excellents résultats d’une école comme l’INSEAD, école de commerce classée première du palmarès mondial des maîtrises en administration des affaires – MBA – en 2015. Si cette école tire son épingle du jeu, elle reste une exception parmi les universités françaises.

Cette réforme ira dans le sens d’un rééquilibrage de la situation, et c’est une raison supplémentaire pour la soutenir.

Pensez-vous que le fait de remettre les étudiants d’université sur un pied d’égalité avec ceux des grandes écoles, en leur donnant des gages de sécurité sur l’obtention de leur diplôme de master, puisse aider les grandes écoles à se départir de leur image souvent élitiste et socialement discriminatoire ?

Le projet du Gouvernement de créer un portail en ligne sur l’orientation post-licence est une bonne initiative, mais il ne faut pas reproduire les mêmes erreurs qu’avec le site APB, dont les dysfonctionnements sont régulièrement pointés et pénalisent un certain nombre de futurs étudiants. Il ne faudrait pas que cet outil se retourne contre les titulaires de licence, et la représentation nationale y sera très vigilante.

Enfin, je suis totalement d’accord avec vous sur la nécessité de mener le chantier de la professionnalisation des licences, diplômes qui ne permettent quasiment plus de trouver un travail qualifié aujourd’hui. Je prends pour exemple le système des concours de la fonction publique, dont la catégorie A est censée être ouverte aux titulaires de licence : du fait de leur degré de difficulté et de sélectivité, ils s’adressent en réalité aux détenteurs de masters, voire plus. Les dés sont un peu pipés. Il convient donc de redonner un vrai sens à la licence pour permettre aux jeunes qui ne veulent pas poursuivre leurs études de trouver un travail correctement rémunéré, trois années après le bac.

Mme Annie Genevard. Cette réforme soulève certaines questions. Ce que nous propose la ministre est antinomique : on ne peut pas à la fois sélectionner à l’entrée et donner la possibilité à tous les étudiants de s’inscrire en master. C’est l’un ou l’autre.

Sinon, cela signifie qu’il y aura des masters à deux vitesses : de bons masters sélectionnant les étudiants et à effectifs réduits, et des masters fourre-tout. C’est une première difficulté, alors que de notre point de vue, il faut viser l’excellence plutôt que de niveler la formation des étudiants par le bas.

Certaines pistes auraient mérité d’être explorées. Par exemple, celles qui permettraient de donner à la licence une valeur plus professionnalisante, plus insérante. Pourquoi le master ne serait pas aussi plus professionnalisant et plus sélectif ? La sélection est à mettre en relation avec la professionnalisation. Pourquoi ne pas activer un meilleur repérage des métiers porteurs ou émergents ? Pourquoi ne pas approfondir la réflexion avec les professionnels pour la conception des maquettes ?

Madame la rapporteure, avez-vous le sentiment que cette réforme du master a suffisamment exploré et pris en compte la question de l’insertion professionnelle ?

Mme la rapporteure. Vos interventions, mes chers collègues, renvoient à trois questions principales : quelle considération a-t-on pour l’étudiant ? Quel rôle accorde-t-on aux universités ? Quel rôle et quelle fonction donne-t-on aux institutions et à l’État ?

Commençons par la prise en considération de l’étudiant. En entendant M. Reiss affirmer que l’accès de droit au master revenait à ouvrir les vannes et laisser les étudiants affluer en masse de manière inconsidérée vers les masters, me revenaient en mémoire les propos tenus par Martin Schulz, président du Parlement européen, en 2012 au sujet du financement des bourses Erasmus. Il insistait sur la volonté d’éviter de créer une génération perdue, compte tenu de l’ampleur du chômage dans les pays européens, et par conséquent sur la nécessité de rendre les études constructives alors que les parents n’avaient jamais consacré autant d’argent à la scolarité de leurs enfants.

C’est dans cette perspective que nous nous situons : d’abord sur la forme, car cette proposition de loi permet enfin à la France de s’inscrire pleinement dans la logique du dispositif européen du LMD ; ensuite sur le fond, car le droit à la poursuite d’études donne les moyens de s’élever par la connaissance, ce qui constitue l’un des meilleurs remparts contre le chômage – plus un jeune est diplômé, moins il lui est difficile de trouver un emploi. Ajoutons que la mise en œuvre de ce droit a été préparée par plusieurs dispositifs déjà en place. Pensons à la revalorisation du système des bourses, à laquelle 450 millions d’euros sont consacrés, aux mesures en faveur du logement étudiant ou encore à l’instauration de l’aide à la recherche du premier emploi (ARPE).

Le dispositif, conçu de manière collégiale, s’inscrit dans la logique de démocratisation de l’enseignement supérieur. Il prend en compte les aspirations de l’étudiant. Il le conduit vers l’autonomie : possibilité lui est donnée de prendre en charge ses études et sa vie professionnelle. Dans le même temps, les parents peuvent se sentir rassurés par cet accompagnement.

À l’issue du baccalauréat comme à l’issue de la licence, le parcours de l’étudiant s’insère dans un cadre construit avec l’État. La loi ESR de 2013 avait créé des passerelles au sein du premier cycle et instauré des quotas pour faciliter l’accès des jeunes issus des bacs professionnels et des bacs technologiques aux diplômes universitaires de technologie (DUT) et aux brevets techniques supérieurs (BTS). De la même manière, la proposition de loi offre des débouchés vers le master selon des critères précis et transparents.

J’en viens aux rôles des universités, signataires de l’accord via leurs représentants. Elles s’engagent à une transparence dans le recrutement. Les étudiants se dirigeront vers les masters, pleinement conscients des enjeux grâce au portail trouvermonmaster.gouv.fr en cours de construction. Les universités auront tout intérêt à assurer cette transparence afin d’éviter les recours et de disposer d’un vivier d’étudiants pour leurs formations ultérieures, en doctorat notamment.

Cette proposition de loi s’insère dans un processus qui a débuté en 2013 avec la loi ESR. Qu’a-t-on fait depuis dix ans ? a demandé l’un d’entre vous. Eh bien, durant cette période qui couvre les deux derniers quinquennats, nous avons fait beaucoup pour répondre aux défis de la démocratisation de l’enseignement supérieur.

Quant au rôle des institutions et de l’État, il est précisé dans la proposition de loi. Le recteur, représentant de l’État, va assurer un accès en master aux jeunes qui n’auraient pas trouvé le master qu’ils estimaient être le plus en adéquation avec leur projet professionnel. Ils sont accompagnés dans leurs démarches. L’offre de formations s’établit grâce à un dialogue permanent entre les universités et l’État.

Nous sommes loin de la vision entretenue par certains d’étudiants profitant de manière irréfléchie du nouveau système. Le droit à poursuivre des études ne dévalorise en rien le master.

Pour finir, je soulignerai qu’il existe déjà une adéquation entre le nombre d’étudiants sortant de licences et le nombre de places en master : les effectifs sont sensiblement les mêmes. En favorisant une orientation dûment réfléchie, nous ferons en sorte que chaque étudiant diplômé d’une licence trouve une place en master. L’élévation du niveau de connaissances dans un pays est la garantie d’une augmentation des richesses, de la croissance et du PIB.

La Commission en vient à l’examen des articles.

Article 1er : Sélection à l’entrée en master et droit à la poursuite d’études

La Commission examine l’amendement AC4 de Mme Marie-George Buffet.

Mme Marie-George Buffet. Cet amendement vise à compléter l’alinéa 4 afin de réglementer la fixation des capacités d’accueil par chaque établissement sans remettre en cause le droit à l’accès au master de tous les titulaires de licence dans un même établissement.

Mme la rapporteure. Je comprends la préoccupation que vous exprimez, madame Buffet, mais je crains que la formulation retenue soit peu opérationnelle. Les objectifs de la stratégie nationale de l’enseignement supérieur n’ont pas de fondement législatif et je doute qu’ils puissent être opposables à chaque établissement de l’enseignement supérieur.

Vous posez la question de l’impact de la proposition de loi sur les flux de titulaires de master, ce qui renvoie à la crainte d’une dérive malthusienne des universités. Je peux vous rassurer sur les capacités existantes : les places aujourd’hui offertes en M1 et en M2 sont parfaitement suffisantes pour accueillir les flux de diplômés de licence. Je ne vois pas pourquoi les universités réduiraient leurs offres car celles-ci renforcent leur potentiel de recherche et contribuent à leur attractivité.

Les masters ne pourront fixer des capacités d’accueil justifiant une sélection qu’après un dialogue avec l’État. Celui-ci s’assurera, comme il le fait aujourd’hui, que ces choix répondent à des réalités objectives – locaux, capacités d’encadrement, environnement pour les stages. Le droit à la poursuite d’études permettra d’éviter que les étudiants méritants, qui ont réussi à franchir l’étape difficile de l’obtention de la licence, se retrouvent sans solution. Dès lors qu’ils choisiront de poursuivre leurs études, le recteur leur fera trois propositions, cohérentes avec leur parcours et leur projet.

Contrairement à ce que vous redoutez, les flux d’accès en master devraient se renforcer grâce à l’attractivité d’un cycle replacé dans toute la cohérence du LMD et grâce à la disparition de l’incertitude liée à l’absurde sélection en M2 qui obscurcissait l’avenir des étudiants.

J’émettrai donc un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AC7 de M. Patrick Hetzel.

M. Frédéric Reiss. Cet amendement supprime le droit à la poursuite d’études en première année de master tel qu’il est prévu par les alinéas 5 et 6. Ceux-ci nous apparaissent sources de contentieux. Ils participent à la dévalorisation des formations chargées d’accueillir les recalés et entrent en totale contradiction avec le principe d’une sélection.

La suppression de ce droit n’empêchera pas les étudiants de se porter candidat à des formations qui ont la capacité de les accueillir, comme c’est le cas actuellement dans le processus de sélection entre le master 1 et le master 2.

Mme la rapporteure. Le droit à la poursuite d’études est l’un des piliers de l’accord du 4 octobre. Le supprimer reviendrait à faire s’effondrer tout l’édifice. Il s’agit d’un choix de justice endossé par toute la communauté éducative afin de ne laisser personne sans solution, alors même que les étudiants concernés ont prouvé, en obtenant leur licence, qu’ils avaient les moyens de réussir.

Il s’agit en outre d’un choix d’efficacité car toute la société gagne à l’élévation du niveau général des qualifications. L’essentiel est que les étudiants s’engagent dans les formations qu’ils peuvent réussir et qui répondent à leur projet professionnel. Telles sont les instructions données au recteur pour établir les choix qu’il proposera. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AC8 de M. Patrick Hetzel.

M. Frédéric Reiss. Cet amendement de repli aménage le droit à la poursuite d’études en première année de master : il donne du temps au temps. Les étudiants qui se verront refuser l’entrée dans la formation du deuxième cycle de leur choix disposeront d’une année pour mûrir leur choix et éventuellement tenter de nouveau leur chance pour intégrer la formation qu’ils souhaitent. Ce n’est qu’au bout d’un an, après le premier refus, que devra leur être proposée l’inscription dans une formation de deuxième cycle.

Mme la rapporteure. Cette année d’attente serait source d’injustices entre les étudiants qui n’en feraient pas le même usage : certains, aidés de leurs parents, pourraient suivre une formation payante ailleurs quand d’autres, moins favorisés, seraient contraints de trouver une activité salariée, forcément précaire puisqu’elle ne durerait qu’un an. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement AC3 de M. Guénhaël Huet.

M. Guénhaël Huet. Cet amendement vise à apporter une précision. Il est prévu que les étudiants non admis dans la formation du deuxième cycle de leur choix se voient proposer une formation tenant compte de leur projet professionnel. Il convient d’ajouter comme critère la localisation géographique, notamment pour régler les difficultés pratiques liées au coût du logement.

Mme la rapporteure. Je tiens à rassurer M. Huet. La proposition de loi prévoit une gradation dans les choix offerts aux étudiants. Le recteur prend en compte l’éloignement géographique : les propositions seront d’abord faites dans l’établissement de l’étudiant et, à défaut, dans la région. Le décret sera l’instrument juridique pertinent pour apporter toutes ces précisions.

Votre amendement étant satisfait, je donne un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AC9 de M. Patrick Hetzel.

M. Claude Sturni. Il s’agit d’un autre amendement de repli.

L’accord prévoit que l’étudiant pourra, en cas de refus d’inscription dans les masters qu’il a demandés, faire appel au rectorat qui devra lui faire trois propositions. Or cette obligation n’est pas traduite clairement dans l’alinéa 5. Elle est donc vraisemblablement renvoyée au décret d’application.

Les nombreux signataires de cet amendement considèrent qu’il sera très compliqué pour les rectorats de proposer trois choix différents aux étudiants recalés. La tâche sera particulièrement lourde pour les personnels. Pour éviter tout engorgement, nous proposons une mesure de bon sens : limiter l’obligation de proposition à une seule alternative.

Mme la rapporteure. Cet amendement revient à introduire dans la loi la notion d’affectation obligatoire confiée au recteur. Compte tenu de l’importance des masters dans les parcours universitaires, c’est bien le moins que l’étudiant puisse disposer de plusieurs propositions avant de s’engager. Le droit à la poursuite d’études doit résulter d’un choix et non d’une contrainte. Avis défavorable.

M. Claude Sturni. Pourquoi ne pas proposer quatre ou six choix dans ces conditions ? Pourquoi s’arrêter à trois ? Personne n’est contraint de poursuivre ses études et l’amendement AC8 montre bien qu’il existe d’autres alternatives. Il est aussi possible de ne pas accepter la proposition du rectorat.

Mme la rapporteure. Les propositions seront faites selon un mode radioconcentrique : seront pris en compte l’établissement, puis la région. Les représentants des étudiants, lors des discussions, ont tenu à ce que soient évités les écueils du système de l’admission post-bac qui favorisait une pléthore de vœux rendant les choix illisibles.

Nous pouvons supposer qu’avec trois choix, les étudiants disposeront des meilleures possibilités de poursuivre leurs études.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 1er sans modification.

Article 2 (nouveau) : Application outre-mer

La Commission adopte l’article 2 sans modification.

Puis elle adopte l’ensemble de la proposition de loi sans modification.

La séance est levée à dix-sept heures trente.

——fpfp——

Informations relatives à la Commission

La Commission a désigné Mme Jeanine Dubié, rapporteure sur la proposition de loi, adoptée par le Sénat, visant à préserver l’éthique du sport, à renforcer la régulation et la transparence du sport professionnel et à améliorer la compétitivité des clubs (n° 4173).

Présences en réunion

Réunion du mardi 6 décembre 2016 à 16 heures 15

Présents. – M. Jean-Pierre Allossery, M. Patrick Bloche, M. Emeric Bréhier, M. Xavier Breton, Mme Marie-George Buffet, M. Pascal Demarthe, Mme Sandrine Doucet, Mme Jeanine Dubié, M. Yves Durand, Mme Martine Faure, M. Hervé Féron, Mme Annie Genevard, M. Guénhaël Huet, Mme Martine Martinel, M. Frédéric Reiss, M. Rudy Salles, M. Claude Sturni, M. Patrick Vignal

Excusés. - M. Pouria Amirshahi, M. Jean-François Copé, Mme Michèle Fournier-Armand, M. Romain Joron, M. François de Mazières, M. Christophe Premat