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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mardi 19 novembre 2013

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 47

Présidence de M. Gilles Carrez,
Président, puis de
M. Dominique Baert,
Vice-président.

–  Audition, ouverte à la presse, de MM. Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, et Jean-Pierre Jouyet, directeur général, sur les perspectives stratégiques du groupe Caisse des Dépôts

–  Présences en réunion

La Commission entend, en audition ouverte à la presse, MM. Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, et Jean-Pierre Jouyet, directeur général, sur les perspectives stratégiques du groupe Caisse des Dépôts.

M. Henri Emmanuelli, président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations. Les résultats 2013 de la Caisse se présentent sous un meilleur jour que ceux de l’année 2012 : au 30 juin 2013, le résultat net consolidé du groupe s’établit à 954 millions d’euros, ce qui porte le niveau des fonds propres consolidés (hors plus–values latentes) à 20,4 milliards d’euros, totalement investis dans le capital des filiales et participations. Dans un contexte économique peu favorable, il convient de noter ce résultat, dont l’évolution en fin d’année sera impactée par la mise en place de la Banque publique d’investissement – BPI – à compter de juillet 2013 : ces chiffres ne sont donc pas très représentatifs de ce que sera le résultat, mais c’est par souci de transparence que je vous les communique.

Ce bilan ne nous dispense pas de faire preuve d’une vigilance particulière sur certains enjeux majeurs. Sollicitée de façon assez importante au cours des dernières années, la Caisse doit retrouver une certaine autonomie dans la gestion de ses fonds d’épargne et de ses fonds propres. En particulier, le niveau actuel de versement à l’État réduit considérablement les marges de manœuvre de la Caisse, ce qui obère d’autant plus ses capacités d’intervention pour le financement de l’économie. Je souhaite qu’il puisse être renégocié avec l’État et avec vous, qui déciderez en dernier ressort, car de mon point de vue, le taux de fiscalisation, notamment sur les comptes sociaux, qui peut dépasser 60 %, est aberrant au regard de la moyenne du taux acquitté par les grandes entreprises françaises. Pourquoi la Caisse, établissement public, devrait-elle subir ce régime fiscal particulièrement rude ? On m’objectera qu’elle bénéficie des dépôts des notaires, mais c’est un privilège qui coûte aujourd’hui.

L’enjeu est également financier, car la semaine dernière, une agence a abaissé la notation de la Caisse de AA+ à AA, comme celle de l’État, puisqu’elle est alignée, aucune institution financière ne pouvant bénéficier, dans un pays donné, d’une notation supérieure à celle de l’État. Cette dégradation n’a eu aucune incidence sur le taux des émissions et des obligations, mais la Caisse doit rester attentive, d’autant que son bilan s’est rigidifié au cours des dernières années, en raison de ses prises de participation dans La Poste et la BPI, dont les rendements attendus ne vont pas renforcer les fonds propres. La Caisse est par ailleurs engagée pour 12 milliards d’euros sur la Société de financement local – SFIL. Je remercie à cet égard votre commission, à commencer par son président, pour l’attention qu’elle a portée à la mise en place du fonds pour les collectivités locales, vitale pour que la SFIL conserve, lors de ses émissions sur les marchés, une notoriété qui lui permette d’emprunter à des taux convenables et facilite l’amortissement du prêt de la Caisse. Enfin, elle assure pour partie la trésorerie de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale – ACOSS – à hauteur d’une autorisation de 14 milliards d’euros.

La Caisse se situe aujourd’hui aux avant-postes du soutien à la croissance économique – je viens d’ailleurs de participer à une réunion avec les syndicats de la Société nationale Corse Méditerranée, la SNCM. Quand survient une difficulté sérieuse que l’État ne souhaite pas régler par lui-même ou qu’il n’a pas les moyens de régler, il a tendance à se tourner vers cette « vieille dame » qui va bientôt fêter ses deux cents ans. La Caisse a le souci de soutenir l’investissement public et des évolutions ont récemment eu lieu dans ce domaine. Le recours à l’enveloppe de 20 milliards d’euros de prêts à long terme (vingt à quarante ans) a démarré lentement, en raison de règles trop restrictives d’éligibilité ; mais elles ont été assouplies et élargies et la Caisse a obtenu l’inversion de la doctrine d’utilisation : désormais, tout ce qui n’est pas interdit est autorisé. L’enveloppe permettra donc par exemple de financer les infrastructures routières, les contrats de plan État-régions et la société du Grand Paris. De même, grâce à l’arbitrage du Président de la République, les directions régionales de la Caisse pourront désormais financer 100 % des prêts jusqu’à 1 million d’euros, et non plus 50 % comme c’est le cas aujourd’hui, ce qui simplifiera beaucoup la tâche des collectivités locales.

Nous devons rester vigilants, car la collecte du Livret A a été négative durant les deux derniers mois, à hauteur de 2 milliards d’euros au mois d’octobre. Il n’y a pas d’inquiétude particulière, car cela correspond à la période de l’année où l’on constate généralement soit une faible collecte, soit un léger décaissement, mais il faut rester attentif et vigilant à ce que sera la collecte dans les mois à venir.

S’agissant du financement des entreprises, la Caisse a finalisé le processus avec BPI France. Je vous rappelle qu’elle a financé la moitié des fonds propres de la banque, soit environ 10 milliards d’euros issus des différentes structures que sont le Fonds stratégique d’investissement – FSI –, CDC Entreprises, etc.

Nous allons évidemment rester très vigilants sur l’activité de la BPI, et il reviendra à la commission de surveillance de le faire. Nous serons d’ailleurs preneurs de vos réactions quant à ce qui se passe sur le terrain.

À côté de cette enveloppe de prêts de 20 milliards d’euros, nous venons de voter une enveloppe supplémentaire de 10 milliards d’euros sur le programme d’investissements d’avenir – PIA. Nous nous intéresserons de près à l’utilisation effective des crédits provenant du PIA, car le schéma de gouvernance semble assez complexe. En effet, c’est le Commissariat général à l’investissement qui donne l’autorisation finale alors que ce sont les services de la Caisse qui sont opérateurs et qui instruisent les dossiers à ce titre, sans qu’ils disposent pour autant d’un quelconque pouvoir de décision. Je ne suis pas certain que cette formule soit la plus rapide et la plus efficace.

J’en viens maintenant aux dossiers particuliers que doit gérer la Caisse. En premier lieu, je n’imagine pas que la puissance publique puisse se désintéresser du dossier SNCM. La Caisse n’a cependant pas vocation à devenir actionnaire. Si elle peut aider à trouver une solution, notamment en finançant des navires, elle le fera dès lors qu’on lui présentera des projets concrets, ce qui n’a pas été le cas jusqu’à présent. Cependant, la Caisse ne peut se substituer ni à Veolia Environnement ni à l’État. En effet, je l’ai dit avec beaucoup de franchise aux syndicats, dès lors que la Caisse entre au capital d’une entreprise, même de manière symbolique, c’est vers elle qu’on se tourne s’il y a une ardoise à régler. Par ailleurs, Veolia Environnement s’était engagé, en échange de l’entrée au capital à hauteur de 60 % de Veolia Transdev, devenu Transdev depuis lors, à conserver la totalité de ses parts dans la SNCM. Enfin, on demande à la SNCM, notamment à Bruxelles, des efforts qui ne sont pas demandés à d’autres. Cela mériterait d’être examiné de plus près.

Quant à Transdev, je crois que l’actuel président fait du bon travail : la société gagne des marchés, notamment à l’étranger. Elle emploie 107 000 salariés, dont 39 000 en France, pour un chiffre d’affaires de plus de 7 milliards d’euros. Son redressement me semble être en bonne voie. Il faudra cependant rediscuter avec Veolia Environnement, qui a imposé à la Caisse un « mariage forcé » – je parle de la fusion entre Veolia Transport et Transdev – pour finalement imposer un « divorce », en espérant laisser la Caisse assumer les difficultés. Cela témoigne d’une attitude assez peu respectueuse envers la Caisse.

Le deuxième dossier important est relatif à la Caisse nationale de prévoyance – CNP. Vous aurez remarqué que M. Pérol, président de la BPCE, mène actuellement une offensive médiatique en expliquant qu’il est ouvert à la renégociation du contrat liant la CNP aux caisses d’épargne, lesquelles distribuent les produits de la CNP aux côtés de La Banque postale, tout en déclarant qu’il ne souhaite pas renouveler ce contrat. Cela constitue une entrée en discussion assez particulière… Elle doit cependant retenir toute notre attention car la CNP est le premier assureur-vie français et possède plus de 300 milliards d’euros de produits d’assurance-vie. Ce sont donc des bouleversements à opérer avec précaution sous peine de mener à des effets en cascade néfastes pour tout le monde.

Sur ce point, le directeur général de la Caisse avait indiqué l’année dernière qu’il ne souhaitait pas siéger au conseil d’administration de la CNP. Il me semble pourtant nécessaire qu’il y aille et que la Caisse soit représentée au plus haut niveau au sein de cette structure. Je ne vois d’ailleurs pas ce qui pourrait s’y opposer, notamment sur le plan déontologique, sauf à imaginer des choses dont on ne nous aurait pas parlé. Il serait donc souhaitable que Jean-Pierre Jouyet siège désormais au conseil d’administration de la CNP.

Je lui laisse d’ailleurs le soin de vous présenter désormais le plan stratégique du groupe Caisse des Dépôts. En effet, notre groupe doit connaître des évolutions, notamment afin de sortir d’une organisation « en silos » et d’aller vers une plus grande synergie entre les différentes branches.

M. Jean-Pierre Jouyet, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations. Compte tenu de ce qui a déjà été dit par Henri Emmanuelli, je rappellerai brièvement que dès le début de l’année, j’ai souhaité que notre groupe engage une réflexion sur ses orientations stratégiques avec deux objectifs. Il s’agit, d’une part, de mieux définir nos axes d’intervention après la création de la BPI et, d’autre part, de tenir compte de l’accentuation des contraintes économiques, prudentielles et financières, telles que décrites par le président Emmanuelli.

Nous souhaitons donc aller vers une organisation plus transversale entre l’établissement public et ses filiales afin de mieux garantir le respect de nos priorités. Par conséquent, nous devons transformer et moderniser l’établissement public et mettre en œuvre une vision plus intégrée du groupe Caisse des Dépôts tout en gardant la spécificité de l’établissement public. Je ne reviens pas sur les nouvelles obligations qui s’imposent à nous au niveau des fonds propres ou de la rigidité du bilan mais je veux indiquer qu’il y a un troisième facteur qui pèse sur notre activité et qui réside dans la faiblesse des taux d’intérêt. En effet, ces taux faibles pèsent sur les fonds d’épargne, sur la collecte de l’épargne ainsi que sur ce qu’on appelle la « rente des notaires », laquelle s’amenuise fortement au vu du rapport entre la rémunération des notaires depuis plus d’un siècle et les taux de replacement de la ressource qui existent aujourd’hui. Cela joue sur l’ensemble de l’équation économique et nos marges de manœuvre sont donc actuellement plus réduites qu’elles ne l’étaient avant la crise financière.

Nous devons donc revoir nos modes d’intervention et recentrer nos responsabilités sur nos cinq grands métiers. Cela concerne d’abord notre métier d’investisseur : nous devons être plus économes sur nos fonds propres et plus sélectifs dans nos projets. Nous devons désormais être davantage co-investisseurs et développer nos outils afin d’attirer des capitaux étrangers, y compris des fonds souverains. Il s’agit donc de maximiser l’effet de levier et de jouer un rôle de catalyseur et de fédérateur de l’investissement.

En ce qui concerne notre métier de prêteur, comme l’a rappelé Henri Emmanuelli, nous sommes plus exposés qu’auparavant au financement par des prêts, que ce soit en raison de l’enveloppe de 20 milliards d’euros du fonds d’épargne, des lignes de prêt à la SFIL, à hauteur de 12,5 milliards d’euros, du partenariat avec La Banque postale, qui se concrétise là encore sous forme de prêts, ou de notre participation à hauteur de 50 % du financement de la BPI.

La Caisse se réinvestit dans des métiers bancaires et financiers sans être maîtresse de toutes les ressources allouées à la fois en termes de pilotage de groupe et de maîtrise des risques, ce qui n’est pas neutre. Nous sommes de plus en plus avec des partenaires tiers et dans des participations, notamment au sein de la BPI. Nous ne sommes pas maîtres de toutes les ressources allouées et pour la Caisse, c’est un défi important.

S’agissant de notre métier historique de mandataire, il est soumis à une pression de plus en plus forte de la part des clients. Vous souhaitez obtenir les coûts les plus bas, par exemple pour les caisses de retraite des collectivités locales ou les régimes hospitaliers. La Caisse doit donc avoir une activité qui puisse répondre aux nouvelles exigences des gestionnaires de régimes de retraite. Je rappelle qu’elle gère 47 régimes de retraite et fonds de protection sociale, qui couvrent 7 millions d’actifs et 3,5 millions de retraités, et qu’en France une retraite sur cinq est gérée par la Caisse. Nous sommes prêts à accueillir de nouveaux mandats et à accompagner le mouvement de simplification et nous nous réjouissons que la Caisse puisse siéger au sein de l’Union des institutions et services de retraites.

Sur notre métier de gestionnaire de dépôts, nous devons faire face à la conjoncture, notamment immobilière, mais nous sommes à la disposition du Parlement pour intervenir davantage dans la gestion des comptes bancaires inactifs et des contrats d’assurance-vie en déshérence, mission que vous avez suggéré de confier à la Caisse des dépôts, monsieur le Rapporteur général, et nous vous en remercions. Ces dépôts constituent un socle qui permettrait d’accroître le moteur de notre réacteur au service du financement de l’économie. Ce sont tout de même 1 à 2 milliards d’euros qui sont ici en jeu.

Sur notre métier d’opérateur, nous sommes un groupe avec des filiales intervenant dans le secteur concurrentiel – la CNP, Icade… Ces filiales sont confrontées à des défis importants. Je ne reviens pas sur ce qu’a dit le président Emmanuelli sur CNP Assurances mais je précise que de nouveaux accords partenariaux devront être conclus en 2015. Les discussions s’amorcent avec les partenaires distributeurs et nous allons les mener dans des conditions qui permettront de préserver l’intérêt des clients, des salariés et de tous les actionnaires. Je rappelle que la CNP est la première compagnie d’assurance-vie française, à majorité publique, et que nous estimons que les pouvoirs publics doivent s’intéresser de près à l’évolution de ce dossier car elle gère l’épargne de plus de 10 millions de Français. Comme l’a dit le président Emmanuelli, j’ai pris des engagements et il n’y a pas d’ambiguïté avec les fonctions antérieures que j’ai occupées à l’Autorité des marchés financiers – AMF – par rapport à CNP Assurances. À partir du moment où des enjeux fondamentaux pour le groupe Caisse des Dépôts sont en jeu, il serait incompris de la part du groupe que son directeur général ne soit pas membre du conseil d’administration de la CNP. Dans les mois et les années à venir, ce dossier sera le plus structurant pour l’avenir du groupe : cela représente 300 milliards d’interventions dans l’économie. Si nous nous trouvons dans un cadre différent ou si les ressources sont moindres, c’est par exemple l’ensemble de l’intervention de la puissance publique dans la stabilisation de la propriété en capital des entreprises de notre pays qui pourrait se trouver mis en cause.

Sur Transdev et la SNCM, je n’ai rien à ajouter par rapport à ce qu’a déjà dit le président Emmanuelli.

Concernant les rapports entre la Caisse et ses parties prenantes, la principale modification tient à l’évolution de nos modes d’intervention dans les territoires, avec une meilleure intégration des expertises de l’ensemble du groupe et l’amélioration de la qualité de son offre. La Caisse doit devenir un pivot de l’ingénierie publique, technique et financière au niveau territorial. Cela suppose que nous soyons mieux intégrés. En recevant un certain nombre d’élus et de parlementaires, j’ai vu les différences d’approche sur des projets précis entre certaines filiales de la Caisse, et l’établissement public au niveau local et territorial. Nous devons avoir davantage de synergies et être plus clairs en termes de stratégie territoriale. Notre intervention en prêts grâce à l’enveloppe de 20 milliards d’euros devenant plus importante, nous devons être particulièrement cohérents. Depuis le printemps dernier, près de 300 dossiers sont en cours d’instruction, représentant plus de 1,5 milliard d’euros de financement. D’une part, les critères d’éligibilité vont être élargis et, d’autre part, la Caisse pourra financer 100 % du besoin d’emprunt pour les projets inférieurs à 1 million d’euros et, si le Premier ministre le confirme, 75 % pour les projets compris entre 1 et 2 millions d’euros, ce qui constitue une mesure de simplification pour les collectivités territoriales, notamment les plus petites.

Cette évolution au profit des territoires sera conjuguée à un accord de coopération entre la Caisse et la Banque Européenne d’Investissement – BEI –, qui augmentera ses interventions en France de 4 à 7 milliards d’euros par an, y compris pour le secteur public local entre 2013 et 2015. Les directions régionales de la Caisse seront sur le terrain les interlocutrices privilégiées pour instruire ces dossiers.

Sur les relations avec l’État, je pense qu’il faut privilégier le moyen terme compte tenu de la situation des uns et des autres, mais on ne peut pas demander à la Caisse tout et son contraire : de davantage intervenir, d’être dans un contexte prudentiel et financier plus difficile qu’auparavant et de conserver les mêmes règles opératoires qui peuvent limiter ses interventions.

En ce qui concerne les priorités sectorielles, nous souhaitons être en adéquation avec les orientations de la puissance publique.

Ces secteurs concernent en premier lieu le développement et le financement des entreprises à travers Bpifrance, notre première filiale. Son bilan d’activité au 1er septembre 2013 montre une progression, pour une banque mise en place au mois de juillet dernier et dont le principe a été voté à la fin de l’année dernière. C’est créer une grande banque, mettre en synergie différentes activités, et même si tout n’est pas parfait, je tiens à saluer le travail réalisé par les équipes. Les différentes directions régionales sont aujourd’hui opérationnelles. Bpifrance a présenté le 5 novembre dernier un plan pour l’innovation, dont un fonds doté de 500 millions d’euros pour les entreprises innovantes. Nous allons également innover puisque les fonds d’épargne pourront ainsi augmenter leurs investissements dans le capital des PME de croissance. Nous pouvons également intervenir avec des fonds nouveaux, notamment sur le financement obligataire des PME.

En deuxième lieu, pour ce qui concerne l’accélération de la transition écologique et énergétique, nous proposons de mettre en place un mécanisme de garantie pour améliorer la rénovation thermique des logements privés. Nous souhaitons accompagner le développement des énergies renouvelables et la modernisation des réseaux de distribution. C’est un domaine dans lequel l’intégration doit être plus forte au sein de la Caisse. C’est une priorité majeure pour le développement économique, un des premiers leviers de croissance au vu des effets assez limités des politiques monétaires ou de liquidités injectées dans l’économie. L’organisation entre les filiales et l’établissement public doit donc être plus resserrée, avec un référent en charge d’assurer la coordination.

Le logement est la troisième priorité. Le financement du logement social reste le cœur de cible de la Caisse à travers les prêts des fonds d’épargne. Mais nous avons aussi pour ambition, à travers notre filiale la Société nationale immobilière – SNI –, de mettre sur pied avec les investisseurs institutionnels, un fonds consacré à la relance du logement intermédiaire, et je sais que votre Commission en a discuté lors de l’examen de l’article 55 du projet de loi de finances pour 2014, qui prévoit les mesures fiscales d’accompagnement de ce dispositif. Nous souhaitons également développer le « viager intermédié ».

Quatrième priorité, la Caisse doit être plus offensive sur le numérique, en particulier à travers la gestion des programmes d’investissement d’avenir, dont va s’occuper Mme Renaud-Basso. Elle doit également l’être s’agissant de l’équipement numérique des territoires, du développement des quartiers numériques et de son positionnement sur les politiques portant sur la consignation des données numériques. Il faut pour cela que les procédures de gestion soient davantage unifiées au sein de la Caisse et que les relations avec le Commissariat général à l’investissement soient clarifiées, de même qu’avec la BPI – c’est d’ailleurs un des axes essentiels du plan stratégique.

Enfin, cinquième priorité, le développement des infrastructures durables, pour lesquelles nous nous trouvons dans un contexte de raréfaction des financements longs. Sont concernés les infrastructures de transport et d’énergie, les réseaux de chaleur et les infrastructures de tourisme. La Caisse est un opérateur important en termes de tourisme et souhaite le rester. Elle a des ambitions internationales et entend promouvoir une politique touristique plus cohérente, dans ce secteur important en termes d’activité et d’emploi.

Concernant le développement international, le président Emmanuelli vous a donné les chiffres relatifs à Transdev mais il faut savoir que 45 % de l’activité du groupe Caisse des Dépôts se fait aujourd’hui à l’international. De national, le groupe est devenu international : nous devons développer notre coopération avec nos partenaires allemands de la Kreditanstalt für Wiederaufbau – KfW –, avec la Cassa Depositi e Prestiti en Italie nous développons des projets avec la BEI et des fonds souverains internationaux et nous avons créé une filiale ad hoc CDC International afin de disposer d’un outil plus performant.

En conclusion, c’est une nouvelle donne pour la Caisse, compte tenu des contraintes financières et économiques, une nouvelle ambition pour faire du groupe un ensemble plus intégré nous permettant, à l’échéance de notre bicentenaire en 2016, d’en faire un groupe modernisé, performant et toujours investisseur à long terme et patient au service de l’intérêt général.

M. Christian Eckert, rapporteur général. Pensez-vous que la création de la BPI change la nature de l’activité de la Caisse et comment envisagez-vous l’articulation entre la BPI et la Caisse dans les années à venir ? Jugez-vous nécessaire un recentrage de votre portefeuille de participations et, notamment, quelle est votre position au sujet de votre participation dans Icade ?

Le gouvernement a décidé de décentraliser, dans le bilan des banques, une part non négligeable de l’épargne réglementée qui était précédemment intégralement centralisée. Cette évolution devrait permettre de faciliter le respect par le fonds d’épargne des exigences prudentielles, mais cette décision emporte-t-elle d’autres conséquences et souhaitez-vous procéder à d’autres opérations de ce type ?

Je me félicite de l’investissement de la Caisse dans les opérations relatives au logement intermédiaire de même que de la création d’un fonds de garantie sur les opérations liées à la transition énergétique, dont j’ai souhaité qu’il devienne rapidement opérationnel, car ce secteur peut générer beaucoup d’activité économique.

Enfin, je voudrais évoquer la récente proposition de loi relative aux contrats d’assurance-vie en déshérence et aux comptes bancaires inactifs. J’ai suggéré au président Bartolone de demander un avis au Conseil d’État sur ce texte. Nous aurons une concertation avec la Caisse mais aussi avec d’autres acteurs du secteur. J’espère que cette proposition pourra être examinée par notre Assemblée au cours du premier trimestre 2014. Vous avez évoqué la possibilité d’utiliser ces fonds pour intervenir dans le domaine économique. Je souhaite vous suggérer l’idée suivante : s’agissant de fonds parfois issus de personnes âgées ou décédées, ne pourrait-on pas imaginer qu’une partie des sommes puisse être employée pour des opérations liées à l’investissement dans le domaine de la dépendance ? Il y a actuellement de gros besoins et peu de disponibilités financières dans ce domaine. Je souhaite donc qu’on puisse réfléchir avec pragmatisme sur la possibilité de voir là une opportunité d’emploi.

Je conclurai en rappelant que les relations entre la Caisse des dépôts et consignations sont étroites, constantes et franches et je m’en félicite. C’est extrêmement précieux.

M. Michel Piron. Au-delà de ce qui vient d’être suggéré concernant le logement intermédiaire, pourriez-vous nous donner un éclairage complémentaire s’agissant des évolutions en matière de logement ?

Par ailleurs, en matière de transition énergétique, je suis de ceux qui continuent de s’interroger sur les outils de financement utilisables pour des investissements dont on peut penser que les temps de retour sont extrêmement disparates. La Caisse ayant une grande tradition de vision à long terme, fait-elle dans ce domaine la différence entre les investissements de court terme, qui ne justifient peut-être même pas l’intervention publique, et ceux de long terme, qui exigent probablement son savoir-faire et son ingénierie ?

M. Marcel Rogemont. Je souhaite prolonger les réflexions relatives au logement. Des efforts ont été faits, notamment en matière de logement intermédiaire. Il n’en reste pas moins que les organismes d’HLM se retrouvent confrontés à des familles en grande difficulté. Or, le niveau des loyers dépend des prêts que la Caisse des dépôts peut accorder. En plus de ce qui a été fait ou annoncé, entendez-vous poursuivre la démarche consistant à faciliter l’obtention de prêts locatifs aidés d’intégration – PLAI –, en plus des quelques milliers déjà accordés ? Envisagez-vous de renforcer cette politique ?

M. Marc Goua. Où en est-on dans la mise en place de la caisse de garantie qui doit permettre, notamment dans le cadre des opérations lancées par l’Agence nationale de l’habitat – ANAH –, de solvabiliser un certain nombre de nos concitoyens qui ne pourraient pas accéder au crédit bancaire et au sujet de laquelle le ministre nous a dit qu’il y avait une lettre de mission qui avait été confiée à la Caisse ?

Mme Monique Rabin. Je souhaiterais aborder la question du fonds d’intervention de 20 milliards d’euros destiné, notamment, aux collectivités locales. Un certain nombre de domaines éligibles ont été définis, s’agissant en particulier des hautes technologies et du très haut débit, ou de l’assainissement. Ne pourrait-on pas envisager que ce fonds serve également à aider les communes pour les projets concernant l’accessibilité des personnes handicapées ?

M. Jean-Louis Dumont. Je me félicite de l’intérêt que le Parlement porte au logement, secteur qui peut jouer un rôle en matière de relance économique, conformément aux objectifs fixés par le Président de la République lors de son intervention du 21 mars dernier à Alfortville. Mais pour cela, les règles doivent être connues. Or, elles tardent souvent à l’être et je ne suis pas sûr que tous les textes soient aujourd’hui publiés. On attend davantage de rapidité dans le traitement des dossiers par la Caisse. Je souhaite donc attirer l’attention sur le fait que, pour les dossiers d’une certaine importance, une fois que la direction régionale a donné son avis, les délais au niveau central peuvent devenir « non maîtrisables », même lorsqu’il s’agit de simples renégociations. Nous arrivons en fin d’année et j’ai le sentiment que des opérations patinent.

Par ailleurs, nous avons été choqués par le mauvais démarrage de la BPI, même s’il semble que cela aille mieux aujourd’hui. J’aimerais être complètement rassuré car je n’ai pas vu de dynamique ni de capacité nouvelles à prendre en compte l’ensemble des dossiers. Nous avons eu l’impression que l’on s’attachait davantage aux aspects matériels de l’installation de la banque, et notamment à l’aspect l’immobilier, qu’au traitement des dossiers. Il y a eu des pertes de temps.

En matière de logement intermédiaire, je crois qu’il faudrait bousculer certaines formes de rétention de l’information de la part de l’administration, qui prend de toute évidence trop de temps pour examiner certains dossiers avant d’y apporter des réponses. Là aussi, il convient absolument de réduire les délais de traitement.

M. le président Gilles Carrez. J’ai été surpris, comme beaucoup, par la diversification sans cesse croissante des activités de la Caisse, mais aussi par leur imbrication et leur internationalisation. Réfléchissez-vous à des règles de gestion transversales sur – par exemple – le niveau de prise de risque, les questions de rentabilité, l’organisation entre les différentes filiales ou la gestion des ressources humaines ? Comment conférer une certaine unité à une diversité de missions qui ne fait que croître ? Et faudra-t-il qu’un jour la Caisse refuse de nouvelles missions ?

M. Henri Emmanuelli. Concernant la question du périmètre des filiales – il me semble que c’est une question posée par le Rapporteur général, – je pense – mais il revient au directeur général de le dire – qu’il n’existe pas de doctrine figée et taboue. Manifestement, dans les participations de la Caisse, il existe des filiales qui sont plus ou moins en adéquation avec ses rôles « traditionnels » ou avec un rôle à tonalité d’action publique.

La situation évoluera sans doute mais la Caisse ne sera pas plus rigide que l’État dans la gestion des participations. Comme je constate que M. Azéma cherche la plus-value, il n’est pas question de le décevoir. Je pense qu’il y aura des mouvements et comme il s’agit de sociétés cotées, les décisions à prendre le seront dans un futur forcément éloigné voire très éloigné et donc, il ne peut y avoir d’anticipation.

Concernant le logement intermédiaire, un programme est prévu et M. André Yché a été nommé référent sur le logement. Le groupe SNI prévoit la construction de 10 000 logements sociaux.

Concernant l’assurance-vie, j’ai bien entendu le Rapporteur général et je me sens concerné notamment sur la question d’actions dans le viager. C’est vrai que si l’on prend un peu de recul et que l’on se repositionne par rapport au sempiternel débat entre répartition et capitalisation, on peut dire qu’il existe un énorme fonds de capitalisation qui est l’immobilier. Les Français n’investissent pas dans les fonds de capitalisation mais, spontanément, se précipitent sur la construction de logement. Il existe donc un capital énorme qui n’est pas solvable, qui n’est pas liquide. Dans certains cas et compte tenu de la problématique de l’évolution du régime des retraites dans le futur, l’un des éléments de la solution pourrait être d’ouvrir la possibilité de rendre liquide une partie de ce capital investi pour celles et ceux qui le souhaiteraient, à condition de vaincre une réticence psychologique qui est celle de l’héritage et de la transmission. J’attire votre attention sur le fait qu’on vit sur des schémas anciens. Quand on regarde l’évolution de la famille actuelle et son éclatement, on peut se dire que certains héritages seront fragmentés. J’ai en tête des cas précis où des personnes vivent difficilement leur retraite car elles ont peu de moyens et ne transmettront pas grand-chose alors qu’elles possèdent en réalité un patrimoine. Peut-être la Caisse dispose-t-elle de la crédibilité et peut-elle offrir des éléments de confiance. Si l’on ajoute un droit de préemption pour les héritiers, cela peut avoir une certaine influence. Il ne faut certainement pas créer un nouveau fonds, car il y en a déjà beaucoup. Il faudra d’ailleurs certainement établir un jour le gigantesque catalogue de ces fonds : même lorsqu’on discute avec les acteurs économiques, quand on leur parle d’un fonds, ils vous demandent où il se trouve.

Madame Rabin, sur le sujet que vous avez évoqué, c’est déjà le cas, on peut déjà le faire et cela s’appelle « l’amélioration du patrimoine public ». Vous avez le droit de suggérer aux élus que vous connaissez les possibilités de financement à long terme pour cette accessibilité qui est très chère et qui pose des questions existentielles à certaines de nos mairies.

M. Jean-Pierre Jouyet. Sur la fragmentation, pour être très honnête avec vous, nous sommes dépendants aussi des projets présentés par les collectivités territoriales. Nous étudions l’éligibilité et il y a ensuite la répartition des enveloppes, qui ne nous appartient pas. Je trouve particulièrement intéressantes les mesures qui ont été prises à l’égard des communes, pour lesquelles cela représente des charges importantes.

M. le président Gillez Carrez. Il est bon d’accorder des prêts mais il est important de vérifier qu’elles pourront bien les rembourser.

M. Jean-Pierre Jouyet. Je rappelle qu’il est ici question d’un taux de 2,25 % sur vingt à quarante ans. Je suis d’accord avec vous et je sais bien que le problème de l’endettement des collectivités et, en particulier, des petites communes, est important mais là, on arrive à y répondre de manière raisonnable par rapport à des projets longs.

Nous essayons d’avoir une sélectivité plus importante sur des activités qui sont diverses. Et comme l’a justement indiqué Henri Emmanuelli, quand vous ne connaissez pas cette institution et que vous arrivez à sa tête, ce qui est frappant, c’est le foisonnement, la diversification des lieux de décision et des missions qui peuvent exister. Nous souhaitons être plus sélectifs dans les actions, dans les investissements et avoir une discipline stratégique qui soit forte. C’est pour cela que sont définis des axes stratégiques et des repères forts. Vous avez raison : nous avons besoin de règles de transversalité. C’est la raison pour laquelle seront organisées des réunions de personnes dites « référentes » qui détermineront ce que doit être la discipline stratégique. Des critères de rentabilité devront être opposés et les responsabilités transversales devront être davantage affirmées, notamment pour les DRH et l’informatique, problème que nous n’avons pas abordé aujourd’hui mais que nous évoquons souvent en commission de surveillance. Il faut que nous disposions d’une organisation qui soit plus intégrée en matière informatique pour réduire les coûts sur un certain nombre de nos prestations ; il en va de même pour l’identification, la gestion des risques et l’audit. C’est une volonté extrêmement forte de la part de la commission de surveillance et de la direction générale.

Incidemment, je rappelle qu’à certaines époques, il existait beaucoup de divergences entre la commission de surveillance et la direction générale. J’aimerais rendre hommage au président de la commission de surveillance et préciser que nous décidons de travailler ensemble sur la plupart des dossiers sensibles.

Concernant la BPI, et pour répondre à M. le Rapporteur général, le principal changement provient du transfert des investissements en capital dans les entreprises. Les prêts étaient déjà auparavant dans OSEO, où nous étions minoritaires. Pour ce qui concerne l’innovation, des transferts ont eu lieu ainsi que des partages de frontières sur les programmes d’investissement d’avenir et sur différentes innovations avec la BPI. Pour ce qui concerne la Caisse, nous souhaitons davantage être impliqués dans ce qui favorise le développement économique en dehors du financement direct du capital des entreprises ; sur des prêts et financements logement, infrastructures et numérique, ainsi que sur les fonds souverains. Nous considérons, ainsi que les autorités publiques, qu’il revient par ailleurs à la Caisse de mener des interventions de co-investissement au niveau international avec les fonds souverains, car ce n’est pas la même catégorie de rentabilité que dans le cadre de la BPI et des éléments politiques peuvent également intervenir.

Pour revenir à la BPI et en réponse à M. Dumont, des problèmes de fonctionnement se sont produits au départ. L’État est actionnaire à 50 % et nous sommes actionnaires à 50 %. Vous avez, à parité, des représentants de l’État au conseil d’administration et des représentants de la Caisse, ainsi que des personnalités indépendantes. L’État a une influence prééminente pour tout ce qui concerne les prêts, sur la branche financement, et nous avons une influence prééminente dans la branche investissement et dans les fonds propres. On dit parfois que son fonctionnement est compliqué car il existe deux filiales, une filiale investissement et une filiale financement. Mais le fonctionnement de certaines autres banques privées est identique.

Je tiens à votre disposition, Monsieur Dumont, des données, car je ne veux pas vous abreuver de chiffres. L’activité de financement de la BPI est en progression ; notamment au regard des défaillances du marché sur le financement en trésorerie et sur la trésorerie à court terme ainsi que sur les préfinancements du CICE, il y a eu un apport de la BPI par rapport au système bancaire traditionnel. Il y a également eu un apport sur le capital risque et sur l’amorçage par rapport au système bancaire. On remarque que pour les entreprises dites de taille intermédiaire, c’est-à-dire les moyennes entreprises, cotées ou non, il existe un retrait en termes d’investissement en capital par rapport à l’année dernière sur les PME. Il y a moins de demande, plus de sélectivité et on trouve moins de fonds, moins de partenaires bancaires pour le faire. Nous aurons le même exercice de réflexion sur la stratégie à adopter pour la BPI à la fin de l’année que celui que nous avons eu dernièrement pour la Caisse. Et je confirme ce qu’a dit le président Henri Emmanuelli : plus nous aurons de remontées de terrain dans les mois qui viennent, plus nous aborderons le débat stratégique dans de bonnes conditions pour trouver ce qui pourrait être favorable tant à la BPI qu’à la Caisse.

Concernant les prises de participation de la Caisse, il convient d’éviter l’éparpillement en maintenant une gestion active du portefeuille de la section générale et des participations.

Le dossier Icade fait l’objet d’une surveillance particulière puisque ce dernier est actuellement traité par l’AMF. Cette société est dans le groupe depuis près de soixante ans et s’inscrit parfaitement dans la stratégie de développement foncier de la Caisse. En conséquence, Icade a toute sa place dans le groupe Caisse des Dépôts.

Pour le fonds de garantie, je partage votre sentiment. La Caisse est actuellement en attente de la lettre de mission. Les processus de décision interministérielle sont encore en cours.

En ce qui concerne le fonds d’épargne, la décentralisation telle qu’elle est intervenue a été une bonne opération pour la Caisse. Les gains se concentrent sur la baisse des coûts de commissions et sur des placements plus liquides. Compte tenu de la baisse actuelle des taux d’intérêt, cette opération est nettement avantageuse pour la Caisse. Toutefois, compte tenu de la situation actuelle de l’inflation, des taux d’épargne et des taux d’intérêt, des tensions nouvelles sur la liquidité des fonds vont apparaître, rendant difficile la répétition d’une telle opération.

Sur la transition écologique et sur les outils de financement récurrents, nous n’avons pas vocation à intervenir sur des projets de court terme mais sur des projets de long terme, comme sur la mise en œuvre des réseaux de transport d’énergie ou de chaleur, ainsi que sur des projets innovants. La BPI aura vocation, dans ce cadre, à intervenir dans le financement des entreprises. Le rôle de la Caisse est quant à lui de mettre les acteurs en relation pour assurer le financement des projets de transition énergétique et écologique.

Concernant la sortie du capital de la Caisse nationale des caisses d’épargne, l’opération n’a pas été désavantageuse pour la Caisse, tant s’en faut. C’est après la sortie du capital de la Caisse des dépôts et consignations qu’il y a eu des difficultés pour le réseau des caisses d’épargne et pour Natixis. J’invite le groupe BPCE à essayer de comprendre les raisons de ces difficultés. La logique qui justifie l’existence d’une compagnie d’assurances intégrée dans un groupe bancaire est compréhensible, mais il convient d’avoir les capacités opérationnelles de le faire, et d’être capable de préserver les intérêts des assurés, les intérêts de CNP Assurances et les intérêts de tous les actionnaires.

Mme Odile Renaud-Basso, directrice générale adjointe de la Caisse des dépôts et consignations. Sur le logement social, compte tenu de l’évolution récente de la collecte, la liquidité des fonds d’épargne, après le transfert de liquidités de 30 milliards d’euros, s’est fortement réduite. Si l’on regarde les perspectives, compte tenu des efforts en matière de logement social et des financements des collectivités locales, les ratios de liquidité seront atteints en cas de nouveau transfert de liquidité, nécessitant dès lors d’effectuer un nouvel appel de liquidité auprès des banques.

Concernant le taux des PLAI, il est inférieur au coût de la ressource. Néanmoins, compte tenu des contraintes actuelles sur l’équilibre global des fonds d’épargne, les marges sont faibles pour améliorer encore ce taux. La Caisse ne peut pas distribuer de façon massive des prêts à des taux en dessous du coût de la ressource au risque de remettre en cause l’équilibre global et la soutenabilité de son activité dans le futur. Elle a toutefois mis en place des mécanismes de primes de 120 millions d’euros pour subventionner les opérations PLUS –prêts locatifs à usage social – et PLAI agréées cette année. L’ampleur de ces subventions reste néanmoins limitée par des considérations d’équilibre global.

La Caisse suit attentivement la question de la durée d’instruction des prêts. Il a été observé une tendance à l’augmentation de la durée entre l’agrément et le déboursement effectif, augmentation qui s’explique par l’existence de mécanismes d’arbitrage au sein des organismes d’HLM. Une attention toute particulière sera portée sur l’évolution de la durée des mécanismes d’instruction interne.

Concernant le logement intermédiaire, il est nécessaire d’aller vite. Si le vote de la loi de finances constitue une étape importante, des travaux en parallèle ont déjà été engagés pour monter des opérations, lever des fonds privés et mettre en place un financement complémentaire via les fonds d’épargne. Une fois le mécanisme adopté en loi de finance, la mise en place effective sera rapide.

M. Henri Emmanuelli. Pour répondre à la question de Jean-Louis Dumont, l’opération avec les caisses d’épargne n’a pas été une mauvaise opération pour la Caisse.

M. Charles de Courson. Comment s’appliquent les règles de liquidité et de solvabilité à l’ensemble des activités de la CDC ? Au regard de l’état actuel des fonds propres et de la projection que l’on peut en faire pour les deux ou trois prochaines années, la situation est-elle jugée satisfaisante ?

M. Jean-Pierre Jouyet. La situation est moins bonne que par le passé, mais en termes de solvabilité et de liquidité, à la vue des ratios et des corridors existants, nous restons dans une situation solide.

M. Olivier Mareuse, directeur des finances du groupe Caisse des Dépôts. La loi a prévu un modèle prudentiel spécifique pour la Caisse qui tienne compte des caractéristiques de ses activités, et notamment concernant la section générale, de l’importance des investissements en actions et en participations stratégiques. Ce modèle spécifique a été validé par la commission de surveillance après un avis de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Il est adapté à l’activité d’investissement à long terme en actions de la Caisse. Il s’agit de permettre une détention longue des actions ou participations au-delà des cycles économiques de court terme.

M. Henri Emmanuelli. Pouvez-vous préciser, avec ce modèle, où la Caisse se situe par rapport aux obligations imposées par Bâle III ?

M. Olivier Mareuse. Sur l’activité comparable à celle des banques, c’est-à-dire l’activité de crédit, on utilise un modèle standard comparable à celui des banques avec un coefficient majoré de 25 % par rapport aux minima réglementaires des banques. Sur l’activité d’investissements en actions et en participations stratégiques, c’est un modèle spécifique qui n’a pas d’équivalent dans le secteur bancaire. Il est orienté vers un niveau de sécurité financière élevé tout en ayant le souci de soutenir les investissements de long terme.

M. Charles de Courson. De quelle marge disposez-vous par rapport à la situation actuelle de vos fonds propres ?

M. Olivier Mareuse. Par rapport à ce modèle spécifique, les derniers chiffres disponibles indiquent un niveau de 110 % de notre cible de solvabilité, ce qui représente un écart d’approximativement 2 milliards d’euros par rapport au seuil requis.

M. Jean-Pierre Jouyet. Nous reviendrons devant vous lorsque seront présentés les comptes de la Caisse et nous vous donnerons à cette occasion des éléments plus détaillés.

Le dernier point sur lequel je voudrais revenir concerne le fonds d’épargne. Au cours de plusieurs entretiens avec des représentants des banques et des compagnies d’assurances, j’ai observé que le financement à long terme se trouve aujourd’hui au cœur des discussions européennes sur le mécanisme de supervision bancaire. La Banque centrale européenne
– BCE – et les banques centrales tentent, comme la Caisse, d’imposer des modèles qui soient spécifiques aux investissements de long terme.

Dès lors, par rapport à la question posée par M. le Rapporteur général sur les fonds d’épargne, et aux opérations éventuellement envisagées, il me semble que ce n’est pas le moment de venir fragiliser les activités de long terme de la Caisse tant dans la section générale que dans les fonds d’épargne. En effet, les autres acteurs sont aujourd’hui dans une situation difficile au vu de l’absence d’accord européen sur le sujet.

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Membres présents ou excusés

Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mardi 19 novembre 2013 à 17 heures

Présents. - M. Dominique Baert, M. Étienne Blanc, M. Christophe Caresche,
M. Gilles Carrez, M. Pascal Cherki, M. Alain Claeys, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jean-Louis Dumont, M. Christian Eckert,
M. Jean-Pierre Gorges, M. Marc Goua, Mme Arlette Grosskost, M. Régis Juanico, M. Dominique Lefebvre, M. Jean-François Mancel, Mme Monique Rabin,
M. Camille de Rocca Serra

Excusés. - M. Guillaume Bachelay, M. Thierry Robert, M. Pascal Terrasse

Assistaient également à la réunion. - M. Michel Piron, M. Marcel Rogemont

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