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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mardi 13 mai 2014

Séance de 16 heures 15

Compte rendu n° 72

Présidence de M. Gilles Carrez,
Président

–  Audition, ouverte à la presse, de M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, président du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), Mme Catherine Démier, secrétaire générale du CPO, et Mme Maryvonne Le Brignonen, rapporteure générale, sur le rapport du CPO « Fiscalité locale et entreprises »

–  Présences en réunion

La Commission entend M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, président du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), Mme Catherine Démier, secrétaire générale du CPO, et Mme Maryvonne Le Brignonen, rapporteure générale, sur le rapport du CPO « Fiscalité locale et entreprises »

M. le président Gilles Carrez. Nous accueillons aujourd’hui M. Didier Migaud, non pas en tant que Premier président de la Cour des comptes ou que président du Haut Conseil des finances publiques, mais en tant que président du Conseil des prélèvements obligatoires – CPO. Il vient en effet nous présenter le rapport sur le thème « Fiscalité locale et entreprises », qui avait été commandé en juillet dernier au CPO par le bureau de notre Commission.

Notre demande partait du constat suivant : si de nombreux travaux ont été réalisés sur la fiscalité locale, notamment sur la taxe professionnelle, en revanche, aucun n’a examiné du point de vue des entreprises, c’est-à-dire du contribuable, l’ensemble des impôts et prélèvements qui relèvent des collectivités territoriales et contribuent au financement des équipements et des services publics locaux ; ce qui constitue un patchwork impressionnant : je vous renvoie à l’annexe II du rapport, qui dresse la liste des taxes directement payées par les entreprises ou partagées entre les entreprises et les ménages.

Monsieur le président, je vous remercie pour ce rapport extrêmement intéressant, dont il y a beaucoup à tirer. Lors des réunions préparatoires, nous avions soulevé plusieurs questions de méthode : par exemple, que fallait-il intégrer dans le périmètre de l’étude ? Fallait-il prendre en considération le versement transport, bien qu’il soit assis sur la masse salariale ? Je me félicite que la réflexion ait si bien abouti.

Je souhaiterais que certaines de vos propositions soient mises en œuvre. Toutefois, elles ne sont pas toutes de même niveau : alors que certaines restent modestes – ce qui ne signifie pas qu’elles ne soient pas importantes –, d’autres relèvent d’un changement politique d’envergure !

Je suis particulièrement heureux qu’un jugement positif ait été porté sur la réforme de la taxe professionnelle, et notamment sur la territorialisation de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises – CVAE –, qui avait fait en son temps l’objet d’une lutte à couteaux tirés contre l’administration de Bercy. Finalement, ça marche ! J’observe aussi que la majorité a changé, mais qu’il n’est pas question de procéder à une réforme de la contribution économique territoriale.

M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, président du Conseil des prélèvements obligatoires. La commission des Finances avait en effet demandé au Conseil des prélèvements obligatoires de réaliser une étude sur le thème « Fiscalité locale et entreprises », dont je vais vous présenter les principales conclusions – étant entendu que le rapport général est accompagné de rapports particuliers consultables sur le site Internet de la Cour des comptes. Je suis pour cela accompagné de Mme Catherine Démier, secrétaire générale du CPO, de Mme Maryvonne Le Brignonen, inspectrice des finances et rapporteure générale de cette étude, ainsi que de deux des rapporteurs particuliers qui y ont contribué : Mme Laure Deltour-Becq, inspectrice des finances, et M. Samuel Horion, administrateur territorial.

Comme l’a souligné le président Carrez, si la fiscalité locale en tant que ressource des collectivités territoriales est fréquemment étudiée, il est en revanche plus rare de l’examiner du point de vue des entreprises – c’est-à-dire du contribuable.

Le CPO s’est d’abord attaché à faire l’inventaire des impositions locales des entreprises et à en chiffrer l’ampleur financière – ce recensement étant fourni en annexe du rapport –, puis il a cherché à répondre aux questions posées dans votre lettre de saisine. La réforme de la taxe professionnelle mise en œuvre en 2010 a-t-elle atteint ses objectifs pour les entreprises ? La fiscalité locale des entreprises constitue-t-elle un ensemble cohérent favorable à la compétitivité ? Dans quelle mesure l’attractivité économique des territoires repose-t-elle sur la fiscalité des entreprises ?

En premier lieu, nous constatons que la fiscalité locale des entreprises est disparate et que son produit global ne peut être approché que par estimation.

Près de soixante-dix impositions ont été identifiées. L’ensemble de cette fiscalité ne relève pas seulement d’une activité économique : certaines impositions sont ponctuelles ou occasionnelles, et leur fait générateur n’est pas toujours expressément lié à une activité régulière.

Cette fiscalité recouvre en réalité deux catégories bien distinctes d’impositions sur les entreprises.

Les impositions véritablement locales – au sens où leur assiette peut effectivement être territorialisée – représentaient, en 2012, quelque 43 milliards d’euros, soit environ 13 % de l’ensemble des prélèvements obligatoires pesant sur les entreprises. Il s’agit de la contribution économique territoriale – CET –, pour 21 milliards d’euros, des taxes foncières, pour 8 milliards d’euros, du versement transport – que nous avons bien évidemment inclus dans le périmètre d’étude –, pour 7 milliards d’euros, des impositions forfaitaires des entreprises de réseaux – IFER –, créées en même temps que la CET, pour 1,5 milliard d’euros, et de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, pour 1,2 milliard d’euros.

Les autres impositions locales sont en réalité des impositions nationales dont le produit est affecté aux collectivités territoriales ; elles représentent environ 16 milliards d’euros. Il s’agit, entre autres, de la taxe intérieure sur la consommation de produits énergétiques – TIPCE –, pour 10,9 milliards d’euros, et de la taxe spéciale sur les conventions d’assurances – TSCA –, pour 2,9 milliards d’euros.

Il existe en outre, pour un montant d’environ 17 milliards d’euros, un ensemble d’impositions pour lesquelles l’administration n’est pas en mesure de faire la distinction entre la part payée par les ménages et celle acquittée par les entreprises ; il s’agit par exemple des droits de mutation ou d’enregistrement et de la taxe sur les certificats d’immatriculation des véhicules. Nous les avons traitées à part, de manière à éviter tout amalgame. Les entreprises contribueraient à la somme totale à hauteur de 20 %, soit quelque 3 milliards d’euros.

Au total, en 2012, si l’on prend en compte l’ensemble de ces prélèvements, la fiscalité locale des entreprises aurait représenté quelque 63 milliards d’euros.

À l’étranger aussi, il existe une imposition des entreprises à l’échelon local. Mais si des taxes foncières existent dans la grande majorité des pays de l’OCDE, leur poids est comparativement plus important en France. En outre, à la différence de nombreux pays de l’OCDE, en France, aucune fraction de l’impôt sur les bénéfices des entreprises n’est affectée aux administrations locales. Notre pays se distingue également comme étant le seul de l’échantillon que nous avons retenu à disposer d’une taxe locale assise sur les salaires : le versement transport.

Traditionnellement, la fiscalité locale des entreprises reposait en France sur des assiettes facilement rattachables à un territoire. Cette singularité a en partie disparu.

Le transfert des recettes, parallèle au processus de décentralisation, a fait évoluer le paysage fiscal local, notamment par le biais de l’affectation aux collectivités territoriales du produit de plusieurs impositions sur les entreprises. Or, cette fiscalité transférée dans le cadre de la décentralisation est d’une nature différente de celle de la fiscalité dont étaient traditionnellement bénéficiaires les collectivités territoriales : elle s’apparente à de quasi-dotations, sans marges de manœuvre sur l’assiette ou le taux. La coexistence de différentes impositions s’est traduite par une pluralité d’assiettes, certaines restant majoritairement foncières, d’autres étant de nature sectorielle, d’autres encore spécifiques à un territoire.

Enfin, avec la réforme de la taxe professionnelle en 2010, la part de la fiscalité directe locale prise en charge par l’État a diminué : elle est passée de 45 % en 2009 à 22 % en 2012 (après extinction des dégrèvements transitoires pris en charge par l’État).

La création de la contribution économique territoriale a favorisé la compétitivité des entreprises et amélioré la cohérence des assiettes fiscales locales et nationales.

La taxe professionnelle était l’objet de critiques bien connues : on lui reprochait de renchérir les coûts de production et de pénaliser les secteurs exposés à la concurrence internationale ; on blâmait le fait qu’une part croissante de son coût était prise en charge par l’État. Son remplacement par la contribution économique territoriale et la création de l’assiette « valeur ajoutée », qui constitue le cœur de la réforme, ont atteint globalement l’objectif de compétitivité qui leur avait été assigné – étant entendu que nous ne nous permettons pas, monsieur le président, d’apprécier si la réforme est en soi bonne ou mauvaise.

La réforme a d’abord provoqué un allégement global de la fiscalité économique locale, agissant comme une mesure de soutien aux entreprises, avec des effets durables sur le niveau des impositions économiques locales. Dans les conditions fiscales de 2010, toutes entreprises confondues, et en tenant compte du dégrèvement transitoire, l’impôt économique local des entreprises fut ainsi de 7,5 milliards d’euros inférieur à ce qu’il aurait été en l’absence de réforme. Cette réduction était de l’ordre de 4,5 milliards d’euros en 2012, une fois le régime de croisière atteint ; 60 % des entreprises sont gagnantes, 15 % ne voient pas leur situation évoluer et 25 % sont perdantes.

La réforme a en outre modifié la répartition sectorielle de la charge fiscale, en faveur de l’industrie et des PME.

Le secteur de l’industrie est le premier bénéficiaire : en valeur absolue, l’industrie manufacturière a obtenu une réduction de sa charge fiscale de près de 2,5 milliards d’euros, soit 26 % de l’allégement global. L’ensemble des entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 3 millions d’euros concentre la moitié du gain fiscal initial de la réforme. Celle-ci profite tout particulièrement aux PME, puisque les entreprises de moins de 1 million d’euros de chiffre d’affaires concentrent 35 % du gain fiscal initial de la réforme.

Cependant, la mise en œuvre de la réforme s’est accompagnée d’effets non prévus pour un nombre important d’entreprises assujetties à la cotisation minimale de cotisation foncière des entreprises – CFE. Elle a ainsi provoqué, pour les professions libérales et les artisans et commerçants, un rétrécissement de leur base d’imposition à la seule valeur foncière du local utilisé, ce qui a souvent entraîné leur assujettissement à la cotisation minimale de CFE. Le nombre d’entreprises redevables de cette dernière s’est accru de 14,4 % entre 2010 et 2011 et de 12 % entre 2011 et 2012. Toutefois, depuis 2010, plusieurs lois de finances ont élargi les outils à la disposition des collectivités pour piloter le système de la cotisation minimale de CFE et pour lisser les effets de seuil pour les plus petites entreprises – celles dont le chiffre d’affaires est inférieur à, selon les cas, 10 000 ou 100 000 euros.

Conformément aux objectifs de la réforme, les niveaux d’imposition ont connu des variations modérées depuis 2010, en raison de l’existence d’un taux national de la CVAE – fixé à 1,5 % – et d’une modulation limitée des taux de la CFE.

L’évolution des assiettes fiscales de la CVAE et de la CFE reste en revanche incertaine. Les bases de la CFE sont dynamiques, notamment sous l’effet du dispositif des bases minimum de CFE. L’évolution des bases de CVAE est plus complexe à analyser ; le fort ralentissement de la croissance des bases de CVAE reflète d’abord la dégradation de la conjoncture en 2012, et les fluctuations constatées de 2010 à 2012 pèsent avec un décalage d’un à deux ans sur le produit de la CVAE reversé aux collectivités territoriales.

La réforme de la fiscalité locale des entreprises devrait se poursuivre avec la révision des valeurs locatives cadastrales. Le système actuel d’évaluation des valeurs locatives ne tient en effet pas compte de la disparité des évolutions des marchés locatifs à travers le territoire. La réforme à venir – en principe en 2016 – aura un impact sur les taxes foncières, sur la CFE et sur la répartition de la CVAE entre les collectivités, sans que l’on puisse bien mesurer aujourd’hui quels seront les transferts de charge entre entreprises. À cet égard, le CPO juge nécessaire que l’administration fiscale et les collectivités territoriales organisent dès que possible une communication adaptée et détaillée à l’attention des entreprises sur les modalités et les effets de la réforme à venir.

La fiscalité des entreprises s’oriente désormais vers une taxation fondée davantage sur la richesse produite que sur les facteurs de production, avec les conséquences que cela peut avoir sur les recettes des collectivités territoriales. La création de la CVAE, les réflexions récentes sur l’excédent brut d’exploitation ou celles menées lors des Assises de la fiscalité des entreprises ont montré la nécessité de retenir des assiettes fiscales reposant davantage sur la richesse produite. Au niveau local, la coexistence de la CVAE avec la CFE paraît constituer un bon compromis, en conjuguant une assiette fondée sur la valeur ajoutée avec une autre assise sur le foncier. Aujourd’hui, la répartition de la charge fiscale locale entre les secteurs économiques est relativement conforme à celle de la valeur ajoutée : les secteurs qui ont le plus bénéficié de la réforme sont l’industrie, qui produit 19 % de la valeur ajoutée nationale, et les services aux entreprises, qui en représentent 23 % ; à l’inverse, les secteurs les plus taxés par la fiscalité locale ne sont pas les plus exposés à la concurrence internationale.

Le CPO s’est interrogé sur le rôle que pouvait jouer la fiscalité locale en tant que facteur d’attractivité dans les choix d’implantation des entreprises.

La concurrence fiscale entre collectivités s’est réduite : la spécialisation de la fiscalité économique depuis 2010 ne permet plus une concurrence verticale fondée sur les taux d’imposition, et la spécialisation des impositions ne semble pas conduire à une concurrence fiscale accrue entre collectivités territoriales de même niveau.

La fiscalité locale ne constitue qu’un outil des politiques d’attractivité territoriale parmi d’autres. C’est avant tout grâce aux aides et aux prestations non monétaires – comme les infrastructures ou l’offre de transports – que les collectivités locales tentent d’attirer les entreprises. La disponibilité de l’offre foncière constitue un autre levier important, qui peut être renforcé en mobilisant certains leviers fiscaux ; dans ce cadre, les exonérations fiscales, bien que limitées dans leur portée et leur montant, sont considérées par les entreprises comme un signal positif dont l’impact ne doit pas être négligé.

Mais c’est plutôt pour remédier à la baisse de leurs ressources que les collectivités territoriales semblent aujourd’hui utiliser les leviers fiscaux, en activant les impositions facultatives sur les entreprises – par exemple la taxe locale sur la publicité extérieure – ou en ayant recours aux taux plafonds lorsqu’un coefficient de modulation existe.

Le CPO estime qu’il serait possible d’améliorer de façon marginale la fiscalité locale des entreprises, mais que des évolutions substantielles nécessiteraient un débat global sur le rôle assigné à la fiscalité locale.

Si nous jugeons nécessaire de stabiliser le paysage fiscal sur la base des acquis de la réforme de 2010, nous avons examiné d’éventuelles voies d’amélioration de la fiscalité locale des entreprises.

Premier axe : il pourrait être envisagé de consolider les acquis de la réforme en matière de compétitivité grâce à des simplifications.

Ainsi, est-il souhaitable d’affiner le calcul de la CVAE pour certains secteurs économiques ? Le secteur financier, dont font partie les assurances, fait l’objet d’un régime spécifique pour le calcul de la valeur ajoutée fiscale. L’absence de prise en compte des dotations et des reprises de provisions sur immobilisations financières dans ce calcul accroît la volatilité de l’assiette de l’impôt et, par voie de conséquence, l’instabilité des ressources des collectivités territoriales. En première analyse, la prise en compte des spécificités du secteur des assurances permettrait de limiter ces inconvénients : sur moyenne période, la CVAE payée par le secteur resterait identique. Cependant, il serait difficile de ne pas étendre cette mesure à l’ensemble des entreprises du secteur financier, moyennant des simulations financières poussées. En outre, les premières années d’application de cette mesure entraîneraient une baisse de la base imposable des sociétés d’assurances ; il faudrait prévoir des mesures transitoires, sans doute complexes et coûteuses durant les premières années. Un tel changement de méthode présenterait donc à court terme des inconvénients non négligeables.

Est-il possible de réduire la complexité des règles régissant certaines impositions locales ? Entre 2010 et 2012, le produit de la taxe locale sur la publicité extérieure, dont l’instauration est facultative, a été multiplié par plus de trois, pour atteindre 153 millions d’euros. Or, cette taxe est très critiquée du fait de ses règles d’établissement et de gestion. Ainsi, chaque collectivité territoriale « fabrique » son propre procédé de déclaration ; en outre, toute installation ou modification d’une enseigne donne lieu à une nouvelle déclaration. Le CPO estime que l’élaboration d’un imprimé CERFA standardisé, ainsi que l’annualisation des déclarations de taxe locale sur la publicité extérieure seraient d’utiles mesures de simplification.

Deuxième axe : renforcer la gouvernance de la fiscalité locale des entreprises pour prévenir son émiettement et accroître son efficacité.

Le CPO a constaté que la fiscalité locale des entreprises ne faisait pas l’objet d’une conception et d’un suivi coordonné au niveau de l’État : plusieurs administrations en sont chargées, le suivi financier de son produit n’est que partiellement centralisé, et il n’existe aucun document permettant d’évaluer et de contrôler le niveau de la fiscalité locale. De telles carences favorisent l’opacité de cette dernière. En outre, les collectivités territoriales manquent de visibilité sur le niveau attendu de leurs ressources fiscales au moment du vote de leur budget.

En conséquence, il pourrait être envisagé de réunifier la maîtrise d’œuvre de la fiscalité locale des entreprises au sein d’une seule direction rattachée au ministère de l’Économie et des finances, y compris lorsque les dispositions prévues sont appelées à être codifiées dans un code autre que le code général des impôts : code général des collectivités territoriales, code de l’urbanisme, code du tourisme... On pourrait également systématiser le recours aux fiches d’évaluation préalable pour toute mesure de nature fiscale, ainsi que le prévoient les articles 51 et 53 de la loi organique relative aux lois de finances – LOLF.

Depuis la réforme de 2010, la direction générale des finances publiques a accru son activité d’information des collectivités territoriales. Toutefois, les associations d’élus locaux regrettent le caractère trop tardif des transmissions concernant les simulations de CVAE : en 2013, elles sont intervenues entre le 25 novembre et le 6 décembre ; or, les collectivités territoriales votent généralement leur budget N+1 au mois de décembre. Par conséquent, le CPO suggère d’avancer le délai de transmission à chaque collectivité locale des montants de CVAE simulés pour N+1 et de donner en milieu d’année N les tendances nationales sur l’évolution de la CVAE qui sera reversée en N+1.

Troisième axe : supprimer certaines petites taxes et resserrer autour des grandes impositions le panier de ressources fiscales des collectivités territoriales.

Comme l’ont souligné les travaux antérieurs du CPO et un récent rapport de l’Inspection générale des finances, l’existence de multiples petites taxes répondant à des situations locales spécifiques présente des inconvénients. Au sein du panier d’impositions locales sur les entreprises identifiées dans le cadre du présent rapport, les neuf impositions dont le produit individuel dépasse 1 milliard d’euros représentent plus de 90 % du produit annuel total des impositions sur les entreprises, alors que les quinze impositions, hors IFER, dont le produit individuel est inférieur à 35 millions d’euros, n’atteignent un montant global que de 150 millions d’euros. Le bien-fondé de ces petites taxes devrait être examiné – tout en tenant compte des situations locales pour lesquelles des taxes géographiques ou de nature sectorielle conserveraient un intérêt. Les ressources des collectivités territoriales issues de la fiscalité sur les entreprises pourraient ainsi être concentrées sur quelques grandes impositions qui matérialisent le lien entre une activité et un territoire et sur un nombre limité d’impositions à caractère national qui seraient affectées aux collectivités pour faire face aux dépenses issues des transferts de compétence.

Des évolutions plus significatives relèveraient de plus larges débats portant, d’une part, sur la fiscalité de l’entreprise dans son ensemble, d’autre part, sur l’objectif premier à assigner à la fiscalité locale des entreprises.

Les récents débats confirment en effet la nécessité d’apprécier la fiscalité des entreprises de manière globale ; tel est d’ailleurs le principal objectif du Gouvernement, qui souhaite une simplification du cadre fiscal des entreprises, englobant notamment la fiscalité locale. L’analyse de certaines fédérations patronales, qui accordent un faible intérêt à une diminution du taux de l’impôt sur les sociétés, lui préférant la diminution du taux de la CVAE, repose sur une prise en considération du poids total de la fiscalité, et la demande récente exprimée en ce sens semble davantage liée à la dimension universelle de la CVAE qu’à son caractère local.

Il convient d’arbitrer plus clairement entre financement stable des collectivités territoriales et efficacité économique de la fiscalité locale des entreprises.

Les collectivités territoriales ont besoin de ressources stables. L’assiette foncière permet de sécuriser leurs ressources fiscales grâce à des bases taxables captives, mais elle est plus défavorable à l’activité économique que la taxation de la richesse produite.

L’objectif premier de la fiscalité locale est-il d’assurer un financement dynamique et stable aux collectivités territoriales ou de disposer d’une fiscalité en phase avec le cycle économique ? La « crise des bases minimum de CFE » en 2013 fut symptomatique de ce dilemme. Si la fiscalité locale s’apprécie, du point de vue des entreprises, au regard de l’objectif d’une modération de la charge fiscale et de l’adaptation de l’imposition économique locale aux facultés contributives des contribuables, du point de vue des collectivités, elle est perçue en fonction de sa capacité à mobiliser des ressources dynamiques et aussi indépendantes que possible des cycles économiques.

Il n’appartient pas au CPO de répondre à cette question, qui excède le mandat qui lui a été confié : cela impliquerait un arbitrage entre un financement des collectivités par le biais de la fiscalité ou un financement sur la base de dotations. Notre rapport renvoie in fine à un choix politique : il convient de définir l’objectif premier qui doit être assigné à la fiscalité locale des entreprises. En quelque sorte, nous renvoyons la question !

M. le président Gilles Carrez. Il me semble que, dès lors que les taxes ne sont pas anti-compétitives ou ne pèsent pas à l’excès sur les facteurs de production, la première qualité que l’on demande à la fiscalité locale est la stabilité. J’ai été frappé, lors des Assises de la fiscalité des entreprises, que certaines associations d’employeurs aient voulu croiser le fer, non pas sur l’impôt sur les sociétés – ils ont bien compris que l’enjeu n’était plus là –, mais sur la fiscalité locale, et en particulier sur la CVAE : ils voudraient conserver un taux national, mais plus faible. Inutile de préciser que j’y suis opposé : s’engager dans cette voie serait bien trop dangereux pour les collectivités locales !

Il n’en demeure pas moins que des difficultés subsistent. Vous en avez souligné une, qui concerne les modalités de calcul dans le secteur financier. Il est vrai que la ville de Paris a souffert, mais je ne conseillerai pas, à ce stade, de tenir compte des dotations et de revoir le calcul de l’assiette. Il vaut mieux garder le système actuel.

En revanche, une simplification serait nécessaire. Aujourd’hui, la répartition de la CVAE entre les collectivités implique que les entreprises répartissent leurs effectifs entre leurs établissements au moyen d’une déclaration spécifique ; or, les employeurs sont par ailleurs tenus de remplir une déclaration annuelle des données sociales – DADS. La DADS va bientôt être remplacée par la déclaration sociale nominative – DSN. Cette dernière ne pourrait-elle pas être utilisée à la fois pour le calcul des cotisations sociales et pour la répartition de la CVAE ?

La taxe locale sur la publicité extérieure est honnie par les entreprises, non pas tant à cause de son montant, qui est relativement faible – elle rapporte 150 millions d’euros –, qu’en raison des modalités de son calcul, de la paperasse qu’elle génère, de l’arbitraire auquel elle est soumise et des incertitudes qui l’entourent. Ne pourrait-on pas aller plus loin et proposer une simplification radicale ?

Il serait en effet tentant de supprimer les petites taxes, mais prenons garde à ne pas mettre en difficulté certaines collectivités, qui posséderaient par exemple à la fois une source d’eau thermale, un casino et un hippodrome !

Enfin, il serait utile de disposer chaque année d’une consolidation de l’ensemble des impositions locales : cela nous permettrait d’avoir une vision transversale de la fiscalité qui pèse sur les entreprises.

Mme Valérie Rabault, rapporteure générale. Vous avez conclu votre intervention en disant que l’objectif d’une fiscalité locale était à la fois la recherche d’une stabilité financière pour les collectivités territoriales et l’accompagnement du cycle économique des entreprises. Votre rapport montre, page 25, que la France se trouve au milieu du gué, à mi-chemin du Royaume-Uni, dont les impôts sont tous assis sur le patrimoine, et de l’Allemagne, qui n’en compte qu’une faible proportion de ce type. Existe-t-il des études qui examineraient dans quelle mesure une imposition locale assise sur le patrimoine introduit un biais dans l’accompagnement du cycle économique des entreprises ?

Dans le secteur des assurances, la valeur ajoutée telle que définie pour assoir la CVAE n’est-elle pas une assiette trop volatile pour garantir aux collectivités locales la prévisibilité des recettes dont elles ont besoin pour bâtir les budgets locaux ? Jugez-vous nécessaire une évolution dans ce domaine ?

S’agissant des clés de répartition, une marge de manœuvre est laissée aux entreprises. Votre rapport aborde cette question exclusivement sous l’angle des modalités déclaratives. Pensez-vous qu’il faille aller plus loin ? Comment traiter le cas particulier des groupes fiscalement intégrés ?

Mme Christine Pires Beaune. Le rapport qui nous est soumis par le Conseil des prélèvements obligatoires présente l’avantage et l’originalité de proposer une analyse de la fiscalité locale du point de vue des entreprises redevables, et non des collectivités territoriales bénéficiaires.

Si l’objectif de simplification est louable, la finalité assignée à la fiscalité locale doit rester celle d’assurer un financement stable et pérenne aux collectivités chargées du service public.

Tous les problèmes concernant la CVAE n’ont pas été réglés. Ainsi, aujourd’hui encore, les collectivités ont bien du mal à établir leur budget prévisionnel.

Pour ce qui concerne la CFE, la loi de finances pour 2014 a permis de progresser, mais la question des professions libérales, sous imposées par rapport aux artisans et aux commerçants, n’a pas été résolue.

Le CPO propose que les collectivités locales puissent « trouver des compensations à la suppression » de certaines petites taxes « soit par diminution de leurs dépenses soit par l’augmentation des taux d’impositions ». J’estime que d’autres solutions doivent être examinées. Il me semble en effet impossible d’explorer cette unique voie quand la surtaxe sur les eaux minérales peut représenter 38 % des recettes de fonctionnement d’une commune, et que, de surcroît, les entreprises concernées ne réclament rien.

M. Pierre-Alain Muet. Il me paraît très juste de considérer que la conjugaison d’une assiette fondée sur la valeur ajoutée avec une autre assise sur le foncier est un bon compromis. En effet, si l’efficacité et la légitimité d’un impôt sur les résultats sont incontestables, la valeur du foncier est bien liée aux investissements d’infrastructures consenties par les collectivités. Cet équilibre rend parfaitement compte du lien théorique qui existe bien entre taxation et foncier.

M. Éric Alauzet. Les Assises de la fiscalité ont clairement montré la défiance des chefs d’entreprises à l’égard des impôts sur la production, et la contribution sociale de solidarité – C3S – a subi de bien plus fortes critiques que la CVAE. Alors qu’au Royaume-Uni ou en Allemagne, deux à quatre taxes locales sont assises sur la production, on en compte plus d’une vingtaine dans notre pays. Il faut mettre fin à la complexité et à la lourdeur de ce système.

Le choix du chiffre d’affaires comme assiette de la CFE a lourdement handicapé les artisans, et largement profité aux professions libérales. Si la loi de finances pour 2014 n’a pas permis de corriger intégralement le tir en raison d’une censure du Conseil constitutionnel, il nous appartient de poursuivre la réflexion sur le sujet. Il serait par exemple judicieux de faire porter cette taxe sur les bénéfices.

Rapportées à une activité et à un territoire donnés, les petites taxes peuvent constituer une véritable ressource financière. Chacune d’entre elles doit donc faire l’objet d’un examen particulier. Quant aux frais de collecte, il faut également les estimer au cas par cas. Mieux vaut éviter de se prononcer de façon globale et dogmatique sur le sujet !

M. Dominique Lefebvre. L’analyse du point de vue des entreprises permet de rappeler que l’imposition de celles-ci au niveau local est parfaitement légitime. Il serait en effet à la fois injuste et aberrant que les dépenses des collectivités contribuent à la compétitivité des entreprises et restent à la seule charge des ménages et des dotations diverses.

La stabilité des ressources des collectivités locales est certes indispensable, mais elle ne peut pas justifier des impositions antiéconomiques. Il s’agit donc de trouver un équilibre entre compétitivité et stabilité. La logique de moyen terme consiste à disposer de bases solides et stables qui reposent sur l’imposition foncière tout en faisant intervenir une part variable – il n’y a pas de raison que l’amélioration des résultats d’une entreprise sur un territoire ne bénéficie pas à ce dernier.

Les réformes récentes ont peut-être amené les collectivités locales à perdre en souplesse – en termes de variabilité à la hausse des impositions –, mais elles y ont gagné en stabilité pour ce qui concerne leurs ressources. Cela est positif d’autant que, comme le constate le CPO, ces évolutions ont plutôt bénéficié à la compétitivité des entreprises.

Monsieur le président Migaud, nous concluons de vos propos et de la lecture rapide du rapport, d’une part, qu’environ 59 milliards d’euros sont prélevés sur les entreprises au titre de la fiscalité locale, et, d’autre part, que l’État prend en charge en moyenne 20 % des impôts locaux auxquels sont soumis les entreprises. Pouvez-vous nous préciser si ces 59 milliards sont réellement payés par les entreprises ? Une partie de ce montant est-elle compensée par le budget de l’État ?

Mme Marie-Christine Dalloz. La lecture du tableau 1 à l’annexe II du rapport est édifiante : la liste complète des impositions locales supportées par les entreprises fait apparaître des taxes qui semblent d’un autre âge.

Je me réjouis toutefois d’entendre que les réformes que nous avons menées ont apporté un équilibre aux territoires.

Le CPO souhaite « renforcer la gouvernance de la fiscalité locale des entreprises pour prévenir son émiettement et renforcer son efficacité ». Monsieur le président Migaud, pensez-vous sincèrement qu’il serait efficace de confier le pilotage de cette fiscalité locale au ministère des finances ?

M. Thierry Mandon. Au-delà de la liste qui se trouve à l’annexe V du rapport, que pouvez-vous nous dire concernant le maquis des exonérations possibles ? Nous avons affaire à des systèmes de plus en plus opaques. Je pense aux zones de revitalisation rurale – ZRR – ou aux politiques différenciées des pôles de compétitivité. Les entreprises demandent-elles à bénéficier de ces dispositifs ?

M. le président Gilles Carrez. Je rappelle que la Commission, en application de l’article 58-2 de la LOLF, a sollicité la Cour des comptes sur le bilan des conventions et des crédits de revitalisation des territoires. Un rapport devrait nous être remis dans le courant de l’année prochaine.

M. Thierry Mandon. Une mission d’information de la commission du Développement durable et de l’aménagement du territoire de notre Assemblée travaille actuellement sur les zones de revitalisation rurale, mais je crains qu’elle n’aborde pas cet aspect du problème.

M. Michel Piron. Pour un même bâtiment, la CFE d’une entreprise peut passer de 1 à 2,5 ou 3 selon que cette dernière est considérée comme négociant ou fabricant. Dans le cadre de notre politique industrielle, n’est-il pas paradoxal de favoriser la distribution ou l’importation par rapport à la fabrication ?

M. le président Gilles Carrez. Il s’agit peut-être d’un problème d’évaluation cadastrale.

M. Michel Piron. C’est plutôt l’effet d’un classement qui laisse place à une grande marge d’interprétation.

M. Olivier Carré. La modalité de garantie – garantie individuelle des ressources – mise en place en faveur des collectivités locales a-t-elle été analysée par bassin ? Quid de l’évolution de la péréquation ?

M. le président Gilles Carrez. Vous ne trouverez pas de réponses à ces questions dans le rapport qui vient de nous être remis, car nous avons demandé au Conseil des prélèvements obligatoires de travailler du seul point de vue de l’entreprise.

M. Charles de Courson. Le montant de la fiscalité locale réellement supportée par les entreprises ne doit pas être difficile à calculer : il suffit de déduire la part prise en charge par l’État.

M. le président Gilles Carrez. Le tableau 1 de l’annexe II indique, pour chaque impôt, le montant payé par les entreprises et celui perçu par les bénéficiaires. Je m’interroge à ce sujet sur le cas de la CFE pour laquelle il est indiqué que les entreprises paient 8 milliards d’euros alors que les collectivités ne perçoivent que 6,7 milliards. Comment expliquer cette différence ?

M. Charles de Courson. Il me semble que ces éléments mériteraient d’être précisés.

Qu’en est-il de la cohérence entre l’affectation des divers impôts par niveau de collectivités locales et les compétences de ces dernières ?

Le CPO évoque la possibilité d’affiner le calcul de la CVAE pour le secteur des assurances. Je suggère de ne pas s’aventurer dans une telle entreprise. Le concept de valeur ajoutée est déjà assez complexe comme ça !

Le travail mené a-t-il pu permettre de déterminer la part de la fiscalité locale qui pèse sur notre industrie, autrement dit sur les entreprises confrontées à la compétition internationale ? Cette donnée est déterminante pour mesurer l’impact des prélèvements obligatoires locaux sur notre compétitivité.

Enfin, le rapport ne propose pas de solution radicale concernant les petites taxes, notamment la taxe locale sur la publicité extérieure. Celle-ci pourrait être supprimée ou revue, ce qui permettrait d’éviter certains mouvements de révolte dont j’ai été témoin.

M. le président Gilles Carrez. Si le fer doit être porté quelque part, c’est bien là ! Cette taxe, d’un très faible rapport, reste au travers de la gorge des entreprises.

M. Thierry Mandon. Elle est d’initiative municipale : une délibération de la commune suffirait pour la supprimer ou la modifier !

M. le président du Conseil des prélèvements obligatoires. Certaines des questions posées ne relèvent pas du champ de notre travail, qui ne concernait la fiscalité locale que du point de vue des entreprises.

Nous nous sommes interrogés sur les spécificités du calcul de la valeur ajoutée fiscale pour le secteur des assurances, mais nous avons considéré qu’il y aurait plus d’inconvénients à modifier ce régime qu’à le conserver. Les premières années d’application d’une telle modification seraient en effet marquées par une baisse de la base imposable des sociétés d’assurances particulièrement dommageable pour les collectivités territoriales. Des réformes viennent d’avoir lieu ; celle des valeurs locatives de 2016 se profile : pour préserver une certaine stabilité, comme vous le souhaitez, il serait préférable de tirer les leçons des évolutions passées et à venir avant de modifier les règles du jeu.

Je note que le terme « stabilité » n’a pas tout à fait le même sens pour les collectivités locales et pour les entreprises qui, de leur côté, souhaitent plutôt que la fiscalité tienne compte du cycle économique. Cette divergence a rendu nécessaire un compromis qui se traduit par une assiette prenant en considération à la fois le foncier et la valeur ajoutée.

Le Conseil des prélèvements obligatoires est plus nuancé que l’Inspection générale des finances en ce qui concerne les petites taxes. En effet, une petite taxe peut représenter un produit élevé pour une commune. Il convient donc d’apprécier au cas par cas ce qu’il est opportun de conserver et ce qu’il n’est pas utile de maintenir compte tenu du produit et du coût du recouvrement – la taxe sur les appareils automatiques, par exemple, est-elle vraiment indispensable ?

S’agissant de la gouvernance de la fiscalité locale, parce qu’il est aujourd’hui très difficile de disposer d’informations globales, nous suggérons qu’une information consolidée soit collectée et disponible dans un lieu unique qui pourrait parfaitement être le ministère de l’Économie et des finances. Certaines procédures pourraient indéniablement être adaptées pour permettre aux collectivités territoriales de disposer d’informations sur leurs ressources lorsqu’elles adoptent leur budget. Il faut moins d’opacité en la matière. Nous avons d’ailleurs constaté nous-mêmes que selon l’interlocuteur ou la direction du ministère interrogé, les réponses pouvaient être différentes. Deux tableaux portant sur les mêmes items, l’un issu du Trésor et l’autre de la direction générale des finances publiques, peuvent fournir des données différentes !

M. Henri Emmanuelli. Comment expliquez-vous cela ?

M. le président du Conseil des prélèvements obligatoires. Je ne l’explique pas vraiment, même si les diverses références utilisées peuvent expliquer les écarts constatés.

Mme Catherine Démier, secrétaire générale du Conseil des prélèvements obligatoires. Il peut s’agir de données correspondant, pour les unes, à l’année de la déclaration et, pour les autres, à celle du recouvrement.

Mme Maryvonne Le Brignonen, rapporteure générale du Conseil des prélèvements obligatoires. Comme l’a remarqué Mme la rapporteure générale, les entreprises européennes connaissent des situations très hétérogènes concernant l’imposition de leur patrimoine. Alors que le Royaume-Uni privilégie une imposition locale du patrimoine, l’Allemagne préfère celle des revenus et bénéfices. Cette intéressante clé de lecture fournit par notre rapport se révèle toutefois insuffisante car nous n’avons pas travaillé sur la fiscalité nationale de ces pays, qui explique peut-être le choix des fiscalités locales.

Le rapport montre que la taxation du patrimoine des entreprises permet de rémunérer les services locaux mis à la disposition de celles-ci par les collectivités. Dans ce cadre, la combinaison avec une imposition de la valeur ajoutée, telle qu’elle se pratique dans notre pays, permet d’atteindre un bon équilibre.

Nous sommes restés très prudents concernant l’éventuelle modification du calcul de la valeur ajoutée fiscale pour le secteur des assurances...

Mme la rapporteure générale. Les normes comptables imposées au secteur jouent-elles un rôle au-delà de la méthode de calcul pour la CVAE ?

Mme la rapporteure générale du Conseil des prélèvements obligatoires. Nous n’avons pas analysé ce phénomène qui dépasse la question de la fiscalité locale, mais on peut penser que c’est le cas.

La réforme de la taxe professionnelle a permis aux professions libérales, dont le chiffre d’affaires est faible mais la marge forte, de bénéficier d’un effet d’aubaine. Le Conseil constitutionnel ayant refusé que le législateur traite différemment les bénéfices non commerciaux – BNC – et les bénéfices industriels et commerciaux – BIC –, une solution pourrait consister à prévoir une taxation spécifique sur les bénéfices pour les professions libérales. Cela irait toutefois à l’encontre de notre objectif de simplification et de lisibilité de la norme fiscale.

Les entreprises paient environ 59 milliards d’euros d’impôts locaux en net. L’annexe VI du rapport fait un point méthodologique sur les différences entre les montants payés par les entreprises et ceux perçus par les collectivités pour une même imposition. Les chiffres que nous présentons sont à prendre avec prudence, car les données qui nous ont été fournies n’ont pas toujours été parfaitement cohérentes. Celles-ci diffèrent selon les administrations et les modes de décompte : année de paiement ou de recouvrement ; comptabilité nationale ou budgétaire.

M. Dominique Lefebvre. Pour connaître le montant de la fiscalité locale perçue au titre des entreprises, il faudrait donc ajouter aux 59 milliards d’euros l’ensemble des compensations versées par l’État. Il est regrettable que le rapport n’en dresse pas un tableau exhaustif. Mais la chose est-elle seulement faisable ? J’ajoute que ces compensations sont souvent généreuses avant de régresser.

M. Charles de Courson. Le total du montant payé par les entreprises en 2012, soit 59,587 milliards d’euros, figure bien dans le tableau 1 de l’annexe II, à la page 163 du rapport, mais la case correspondant au montant perçu par l’ensemble des collectivités reste vide.

Quid de la question posée de notre président concernant le montant perçu de la CFE, inférieur au montant prélevé ? C’est incohérent !

M. le président Gilles Carrez. Il me semble que la réponse nous a été donnée. Au-delà des frais de recouvrement, la diversité des références choisies et les dégrèvements transitoires expliquent sans doute cette différence.

M. le président du Conseil des prélèvements obligatoires. Nous tenterons de vous apporter des clarifications concernant ce tableau.

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Membres présents ou excusés

Commission des Finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mardi 13 mai 2014 à 16 h 15

Présents. – M. Éric Alauzet, M. Christophe Caresche, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Gaby Charroux, M. Alain Claeys, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, Mme Carole Delga, M. Jean-Louis Dumont, M. Henri Emmanuelli, M. Alain Fauré, M. Olivier Faure, M. Marc Francina, M. Claude Goasguen, M. Jean-Pierre Gorges, M. Marc Goua, M. Laurent Grandguillaume, Mme Arlette Grosskost, M. Jean-François Lamour, M. Jean Launay, M. Dominique Lefebvre, M. Jean-François Mancel, M. Thierry Mandon, M. Pierre-Alain Muet, M. Patrick Ollier, Mme Valérie Pécresse, Mme Christine Pires Beaune, Mme Valérie Rabault,
M. Camille de Rocca Serra, M. Alain Rodet, Mme Eva Sas, M. Philippe Vigier

Excusés. – M. Guillaume Bachelay, M. Dominique Baert, Mme Karine Berger, M. Étienne Blanc, Mme Monique Rabin, M. Michel Vergnier

Assistaient également à la réunion. – M. François André, M. Michel Piron

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