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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mercredi 9 juillet 2014

Séance de 10 heures 30

Compte rendu n° 95

Présidence de M. Gilles Carrez,
Président

–  Examen du rapport d’information de la mission d’évaluation et de contrôle (MEC) sur la fiscalité des hébergements touristiques (Mme Monique Rabin, MM. Éric Woerth et Éric Straumann, rapporteurs)

–  Présences en réunion

La Commission examine le rapport d’information de la mission d’évaluation et de contrôle (MEC) sur la fiscalité des hébergements touristiques (Mme Monique Rabin, MM. Éric Woerth et Éric Straumann, rapporteurs).

M. Pierre-Alain Muet, président. Je vais donner la parole aux trois rapporteurs de la mission d’évaluation et de contrôle – MEC – sur la fiscalité des hébergements touristiques, M. Éric Woerth, rapporteur spécial pour le Tourisme, Mme Monique Rabin et M. Éric Straumann qui est membre de la commission des Affaires économiques, pour nous présenter les conclusions de leurs travaux.

Mme Monique Rabin, rapporteure. Avant d’entrer dans le vif du sujet, nous devons en rappeler le contexte. Nous savons tous l’importance de l’activité touristique pour l’économie française : elle génère 7,3 % du PIB et 2 millions d’emplois directs ou indirects. Sachant que la France a accueilli en 2012, 83 millions de touristes étrangers et que ce nombre doit être multiplié par deux à l’échelle mondiale dans les quinze ans à venir, il s’agit d’un enjeu économique considérable, qui plus est concernant des emplois par nature non délocalisables. Or, la fiscalité en est une composante déterminante.

Le débat sur la fiscalité touristique vient d’être relancé par le dépôt d’amendements sur le projet de loi de finances rectificative, pour modifier la taxe de séjour. Cette taxe a justement été au centre des travaux de notre mission. Il s’avère en effet que malgré plusieurs réformes ou tentatives de réforme, son dispositif doit être adapté à l’évolution de l’offre touristique de notre époque. Même si cette la taxe, perçue par seulement 2 500 communes et une vingtaine de départements, n’est que d’un rendement global relativement limité (251 millions pour les communes et environ 16 millions pour les départements en 2013), elle constitue un apport indispensable au soutien à l’activité touristique locale et à la conduite de politiques de promotion touristique. Pour ces raisons, nous croyons indispensable que la question de la taxe de séjour soit examinée dans tous ses aspects.

Concernant le rendement et l’efficacité de la taxe au regard de son objectif, la mission a d’abord dressé les constats suivants : l’assiette de la taxe est mal connue des collectivités
– vous constaterez, à ce propos, des divergences entre les chiffres recueillis selon les différentes sources. Par ailleurs, la taxe est mal recouvrée et les possibilités de contrôle sont peu opérantes aujourd’hui, ce qui génère des distorsions de concurrence – que je tiens à souligner – entre professionnels et entre particuliers et professionnels. Cette situation nuit à l’acceptation d’une fiscalité dont l’utilisation devrait, en tout état de cause, faire l’objet d’une meilleure concertation.

En préalable, nous voudrions insister sur le point suivant : dans le respect du principe de la liberté des collectivités locales dans la gestion de la taxe de séjour, la mission s’est placée, non pas dans une logique de recherche de l’élargissement de l’assiette pour accroître le rendement de la taxe, mais clairement dans celle de l’égalité de traitement de tous les acteurs du secteur. Elle propose donc des mesures pour éviter qu’une partie des redevables de la taxe de séjour n’y échappent dans les faits.

La taxe, c’est notre conviction, sera d’autant mieux acceptée, que la charge en sera répartie sur l’ensemble des redevables et que son emploi sera compris, car décidé en concertation avec les professionnels du tourisme.

Les principales propositions de la mission s’articulent autour de trois problématiques. Premièrement, il est nécessaire de mettre fin aux distorsions de concurrence. Un consensus s’est dégagé au sein de la mission sur la nécessité d’adapter les règles de collecte de la taxe de séjour aux nouvelles donnes du marché de la location touristique, c’est-à-dire à la mise en location de logements via des sites Internet.

Des particuliers offrent traditionnellement à la location des hébergements relevant des meublés touristiques ou des chambres d’hôtes ; mais le média que constituent les plateformes Internet effectuant de l’intermédiation locative est en train de donner à ce type d’hébergement touristique une ampleur nouvelle (même si elle est encore difficile à évaluer précisément) ; certains exercent ainsi, de fait, une activité para-hôtelière sans connaître les contraintes de la profession.

Même si l’enjeu fiscal peut, a priori, paraître faible au regard du produit total de la taxe, la mission propose donc que soit mis en place, dans un souci d’égalité de traitement des différents acteurs du tourisme et en concertation avec eux, un dispositif de recouvrement adapté qui permette que les locations de courte durée effectuées via les sites Internet n’échappent pas à la taxe de séjour. Les ressources dégagées par ce dispositif forfaitaire et collectées par les gestionnaires de site, au même titre que les hôteliers, pourraient être versées à un fonds. Nous proposons que ce fonds soit affecté prioritairement à Atout France pour développer la promotion touristique. Pour illustrer l’explosion de ces activités, j’observerai qu’en 2008, le leader mondial du secteur, AirBnB avait 20 000 inscrits ; ils sont 6 millions aujourd’hui. Il y a là un champ de recettes dynamique et exponentiel.

Nous demandons également le rétablissement de l’obligation de déclaration de la mise en location de courte durée de tous les logements, y compris les résidences principales, qui a été supprimée lors du vote de la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové pour garantir aux communes une connaissance de l’offre touristique sur leur territoire et permettre un contrôle effectif de ces mises en location. Ces deux mesures nous paraissent des préalables indispensables.

M. Éric Woerth, rapporteur. Notre deuxième axe de réflexion a porté sur la révision et la simplification du barème de la taxe de séjour. Nous pensons qu’il ne faut pas augmenter significativement ce barème, pour plusieurs raisons. En revanche, nous proposons diverses modifications qui relèvent du bon sens et de la nécessité de l’actualiser.

Le barème est progressif en fonction des catégories d’hébergements. Le bas du barème distingue les hôtels « sans étoile » et les hôtels à « une étoile ». Le haut s’applique de la même façon aux hôtels « quatre étoiles » et aux « cinq étoiles ». Or, depuis sa création, l’offre touristique a beaucoup évolué. Nous proposons donc deux modifications : tout d’abord, la fusion de la catégorie « une étoile » avec celle immédiatement en-dessous ; ensuite, la création d’une catégorie supplémentaire pour l’application d’un tarif supérieur aux hôtels « cinq étoiles » et aux palaces, désormais distingués des hôtels « quatre étoiles ». Le nombre de tranches de tarif resterait le même. Ce serait une façon réaliste de réformer la taxe, acceptable pour la profession et pour la compétitivité de notre tourisme. Les éventuelles dissonances entre nous, au sein de la mission, sur les niveaux de tarif sont limitées.

Nous vous proposons aussi de simplifier les régimes d’exonération et de réduction de la taxe, ainsi que le mécanisme de l’abattement de la taxe au régime forfaitaire pour les remplacer par une seule catégorie d’abattement progressant entre 10 et 40, voire 50 %, permettant aux collectivités de moduler le forfait de nuitées en fonction des circonstances locales.

M. Éric Straumann, rapporteur. Troisièmement, après la lutte contre les distorsions de concurrence et la simplification de la taxe, nous recommandons l’amélioration de son recouvrement. La mission considère que les communes qui le souhaitent doivent pouvoir confier le recouvrement de la taxe de séjour au réseau de collecte des services fiscaux. Certaines communes expriment des réticences à se voir dessaisies d’une compétence et redoutent qu’à terme, le produit de la taxe lui-même ne leur échappe. D’autres, au contraire, renoncent à instaurer la taxe par manque de moyens pour en assurer la gestion. La mission a donc formulé une double série de propositions ouvrant aux communes une option sur cette question et, parallèlement, renforçant les moyens de recouvrement de celles qui souhaiteraient continuer à assurer la gestion de la taxe de séjour.

Nous préconisons aussi l’ouverture aux maires et aux présidents d’Établissements publics de coopération intercommunale de la procédure de taxation d’office, en cas de carence des obligations déclaratives.

Il nous paraît également indispensable d’affirmer le droit à la communication par les services fiscaux aux mairies des éléments qui ont servi à l’établissement et au contrôle de la taxe et le développement d’outils en ligne pour son recouvrement, de la déclaration jusqu’au paiement.

La mission considère ensuite que l’association des professionnels du tourisme à la détermination de l’utilisation du produit de la taxe de séjour est essentielle, tant au bon usage de la taxe, qui doit être centré sur la promotion touristique, qu’à sa bonne acceptation. Elle préconise donc un développement de la concertation avec les professionnels du tourisme sur l’affectation du produit de la taxe.

Notre dernier point concerne les taxes additionnelles départementales. Dans le contexte du projet de réforme territoriale, leur devenir doit être examiné ainsi que, dans l’hypothèse du maintien de ce prélèvement, la question de la collectivité qui en serait attributaire. Nous en sommes donc venus à proposer une réflexion, en concertation avec les professionnels, sur leur maintien à terme, compte tenu du projet de réforme territoriale. Cette réflexion s’impose d’autant plus après le vote par l’Assemblée nationale, en première lecture du projet de loi de finances rectificative, d’un amendement créant une taxe de séjour au bénéfice de la région d’Île-de-France.

Telles sont, résumées à grands traits, les propositions de la mission sur l’avenir de la taxe de séjour. Ces points sont développés dans le rapport écrit que nous avons élaboré en concertation.

M. Éric Woerth, rapporteur. En résumé, nous proposons, en premier lieu, de permettre de percevoir la taxe sur toutes les locations touristiques passant par Internet, qui sont sources d’une forte concurrence pour les hôtels, sans supporter la même fiscalité. Cette question devra être étudiée avec l’administration fiscale, mais nous pensons que cela est faisable – vraisemblablement sous la forme d’un pourcentage du chiffre d’affaires réalisé en France. Deuxièmement, nous évitons d’augmenter la taxe de séjour, mais proposons de créer une catégorie supérieure qui correspond à une différence réelle de niveaux de prestations. Enfin, nous laissons aux collectivités la possibilité de faire appel à la Direction générale des finances publiques pour collecter cette taxe, car les collectivités territoriales ont du mal à connaître l’ensemble de l’assiette, notamment s’agissant des meublés et chambres d’hôtes.

M. François Vannson. Je suis élu d’un département touristique. Par expérience, j’ai compris qu’il faut aborder le secteur du tourisme comme une industrie à part entière, soumise à une concurrence internationale de plus en plus exacerbée. Or, on constate que des hébergements du type « meublés de tourisme » se sont beaucoup développés ces dernières années. Si l’on veut une offre de qualité, il est urgent de renforcer leur réglementation. Cette demande est portée par différentes associations de gîtes, pour que la France soit en mesure de proposer à une clientèle étrangère des produits de qualité et, surtout, qui correspondent à ses attentes. Face au développement d’une concurrence déloyale, il est urgent d’avancer dans cette direction.

Les propositions de votre rapport sur l’évolution de la taxe de séjour me rassurent. Ces derniers jours, j’ai été confronté à de fortes réactions de la part d’hôteliers-restaurateurs. Dans un contexte de compétition mondiale, notre industrie hôtelière a besoin de réaliser de lourds investissements pour se mettre au niveau de nos concurrents étrangers. Il faut des clients pour les rentabiliser. À ce titre, l’augmentation de la taxe de séjour, dans des conditions moins contrôlées que ce que vous proposez, aurait pu être très néfaste.

M. Olivier Faure. Je voudrais tout d’abord louer la qualité du rapport présenté avant de revenir sur la polémique qui s’est engagée à la suite de l’adoption de deux amendements, de nature différente, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative. Le premier amendement de Sandrine Mazetier portait sur la taxe communale de séjour. Je voudrais évoquer le second amendement, dont je suis l’auteur et qui proposait l’instauration d’une taxe régionale spécifique à l’Île-de-France dont l’assiette reposerait sur les nuitées passées en Île-de-France et dont le produit serait exclusivement destiné au plan de mobilisation pour les transports, pour lequel l’État s’est engagé à trouver 150 millions d’euros par an.

La confusion est née du fait que les deux amendements ont été discutés en même temps. En ce qui concerne la taxe de séjour communale, je comprends aujourd’hui, que vous êtes plus favorable à un élargissement effectif de son assiette qu’à un relèvement important de son plafond, mais je maintiens la pertinence d’une taxe régionale pour les transports en Île-de-France. Je reconnais toutefois qu’il vaudrait peut-être mieux en corriger la dénomination et prévoir un barème progressif plutôt qu’un tarif unique de 2 euros par nuitée.

Le tourisme ne peut se développer sans des transports de qualité. Le site d’Euro Disney est dans mon département et je peux témoigner que le RER A est un facteur essentiel à son succès. Qui peut imaginer que des touristes séjournent dans la grande ou la petite couronne si les transports publics n’y sont pas assurés ? Si le tourisme ne peut s’imaginer sans la Tour Eiffel ou le Louvre, il ne peut non plus s’imaginer sans les services publics qui lui sont associés, au premier rang desquels figurent les transports.

Si l’effort financier pour prolonger la ligne 4 jusqu’à Orly n’est pas supporté en partie par les touristes, il le sera par les contribuables français, et cela pèsera sur notre économie d’une manière ou d’une autre.

Je souhaiterais proposer, pour la nouvelle lecture du projet de loi de finances rectificative, une rédaction de l’amendement prévoyant une progressivité de la taxe avec un barème allant de 20 centimes d’euros pour les hôtels de première catégorie à 5 euros pour les palaces. Cette taxe devrait offrir un rendement de l’ordre de 140 millions d’euros annuel et surtout constituer une source durable de financement.

À ce jour, il n’a pas été trouvé de voies permettant d’avoir des transports de qualité sans faire appel ni à l’usager, ni au contribuable. Il ne me paraît pas normal que ce soit le contribuable francilien qui subventionne les touristes quand ils utilisent les transports en commun. Je rappellerai que le coût du transport n’est pas son coût d’usage réel, puisque seul 30 % du coût de financement est assuré par l’usager. Il serait donc logique que les touristes en Île-de-France contribuent à l’amélioration de la qualité des transports de cette région.

M. Charles de Courson. Je voudrais avoir quelques précisions sur vos quatorze propositions.

Tout d’abord sur la première proposition, parler d’un « dispositif de recouvrement adapté » signifie-t-il bien que la taxe doit être directement recouvrée par les gestionnaires des sites Internet car il me semble que c’est la seule solution ?

Que va-t-il se passer pour les mobil-homes qui ne paient ni taxe d’habitation, ni taxe sur le foncier bâti ? Échappent-ils aussi à la taxe de séjour ? Il faudrait éviter les détournements qui aboutissent à des exonérations de fait, parce que la loi fiscale ne s’est pas adaptée à l’évolution des modes d’hébergement.

Sur la deuxième partie relative à la révision et à la simplification de l’assiette, je voudrais revenir sur le problème de l’intercommunalisation de la taxe et insister sur le fait que la taxe doit revenir à la collectivité qui a la compétence tourisme.

Sur le recouvrement, je pense que la possibilité pour une commune de confier le recouvrement aux services fiscaux doit constituer un véritable droit d’option. Il doit être clair que les services fiscaux ne peuvent en aucun cas refuser.

Je voudrais enfin faire une remarque sur l’affectation du produit de la taxe. Si aujourd’hui la taxe de séjour est bien affectée, elle ne comporte pas d’obligation de présentation au sein d’un budget annexe. Je souhaiterais rendre obligatoire une telle présentation, parce qu’elle constitue un des rares moyens de vérifier que les produits de la taxe ne sont pas utilisés pour des dépenses courantes.

Sur la proposition n° 14 relative à la taxe additionnelle départementale, je voudrais dire, qu’en tout état de cause, elle doit être versée à la collectivité en charge de la compétence tourisme.

M. Christophe Caresche. Je tiens à saluer la qualité des informations données par le rapport sur un sujet devenu d’actualité, avant d’évoquer l’objectif de la taxe. S’il faut être attentif à ne pas prendre de mesures pénalisant le tourisme, qui constitue une ressource économique essentielle méritant d’être développée et modernisée, il faut aussi être conscient que cette activité génère des coûts non négligeables pour un certain nombre de collectivités. Je peux en témoigner en tant que député à Paris du quartier Montmartre, dont la zone touristique s’est beaucoup étendue. Je pense que la taxe est justifiée, mais le problème est de savoir comment évaluer le caractère dissuasif ou non qu’elle peut avoir.

En ce qui concerne le régime de la taxe de séjour, je me demande s’il faut maintenir l’option entre taxation au réel et taxation forfaitaire. La taxation au forfait est plus facile à percevoir, mais peut avoir un caractère pénalisant pour les hôteliers dans la mesure où le taux d’activité réelle n’est pas pris en compte.

L’élargissement de l’assiette me paraît très intéressant. Le phénomène de location de courte durée est en train de connaître un développement massif et il est tout à fait légitime que la taxe de séjour lui soit réellement appliquée.

M. François André. Je voudrais quelques compléments d’information. Comment expliquer l’importance du non-recouvrement de la taxe de séjour ? Quels types d’hébergements cela touche-t-il ? Au-delà des mobil-homes, y a-t-il des hôtels traditionnels qui échappent à la taxe ?

Vous avez évoqué le rôle croissant des plateformes en ligne. Les prix proposés par les hôtels sont parfois différents de ceux proposés par les sites de réservation. Pouvez-vous nous éclairer sur les relations financières entre les sites en ligne et les exploitants ?

M. le président Gilles Carrez. Je suis en plein accord avec les propositions de ce rapport, notamment celles portant sur « l’élargissement » de l’assiette et le renforcement des modalités de recouvrement. La question de la taxe de séjour est posée depuis très longtemps. Il y a nécessité de la réformer.

En ce qui concerne les deux amendements présentés dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, j’avais indiqué qu’il fallait attendre les conclusions de la mission d’évaluation et de contrôle.

Si la rédaction de l’amendement d’Olivier Faure n’est pas complètement satisfaisante, elle soulève néanmoins le problème réel du financement en Île-de-France de nos transports dont la composante touristique est essentielle.

Dans la négociation avec les Américains sur le projet Disney, le prolongement de la ligne A du RER a joué un rôle fondamental. Une clause du contrat prévoyait même le versement par Disney d’une participation à la RATP, en cas de fréquentation inférieure à un certain seuil. Attractivité touristique et qualité des transports sont très fortement connectées et l’amélioration des transports est une des vocations de la taxe de séjour.

Il a été décidé que les transports ne devaient pas peser sur la province, mais faire l’objet d’un financement spécifique à l’Île-de-France avec, pour les entreprises, la taxe sur les bureaux et, pour les ménages, la taxe spéciale d’équipement qui figure sur la taxe d’habitation et sur la taxe foncière sur le bâti.

Dès cette époque, j’avais dit qu’il fallait prévoir une contribution des touristes à travers un système de participation reposant sur les nuitées. Aujourd’hui, on est dans une réelle impasse de financement. Je pense que la barre des 140 millions est trop haute, mais avec 50 millions d’euros chaque année, on finance immédiatement 500 millions de travaux. Le tourisme en Île-de-France ne peut se développer que si on améliore les transports.

Vous dites, dans votre rapport, qu’il faut réfléchir à l’intérêt de la taxe additionnelle départementale, mais la mission ne pourrait-elle pas prolonger ses travaux, en réfléchissant à ce qui pourrait être imaginé pour l’Île-de-France ? Nous avons proposé un dispositif régional parce que les transports sont une compétence régionale, mais on pourrait imaginer une taxe sur le modèle de la taxe départementale, perçue au niveau régional.

Je suis tout à fait d’accord avec Olivier Faure pour remplacer la taxe à 2 euros par un barème. Il y a selon moi urgence à proposer un dispositif au plus tard dans le cadre de la prochaine loi de finances. Ce serait à la fois logique et équitable.

M. Jean-Louis Gagnaire. La question des transports n’est pas seulement un problème francilien. Il suffit d’observer ce qui se passe pour les TGV. Ce sont les régions et les territoires hors Paris qui ont financé les lignes TGV.

M. le président Gilles Carrez. Je m’inscris en faux contre ces déclarations. Lorsque l’on examine la comptabilité interne de la SNCF, l’on constate que les amortissements passés au titre de la dégradation du matériel d’Île-de-France ont justement permis pendant des années de financer les lignes TGV. Dans le même temps, il n’y a pas eu de renouvellement du matériel en Île-de-France. Il est donc faux de dire que les territoires franciliens n’ont pas participé au financement de ces lignes, bien au contraire.

M. Jean-Louis Gagnaire. Je ne veux pas opposer l’Île-de-France au reste de la France. Il y a bien sûr un problème spécifique au transport en Île-de-France, cela est indéniable. Cependant, la question me semble bien plus large.

Sur les propositions de ce rapport, je souhaiterais aborder deux points.

S’agissant de la mise en location de la résidence principale pour des locations touristiques de courte durée, vous proposez de rendre la déclaration obligatoire. J’ajouterais que les revenus tirés de ces locations ne sont le plus souvent pas taxés car non déclarés : la majorité des propriétaires étant d’ailleurs de bonne foi. C’est d’ailleurs une question qui se posera fortement lors de la compétition de football de l’Euro 2016. Le problème du caractère déclaratif de la taxe de séjour est donc délicat. Ne pourrait-on pas imaginer un système de prélèvement à la source, afin de sécuriser le recouvrement de cette taxe ?

D’autre part, l’un des sujets importants concerne les sites Internet. Certains sites servent d’intermédiaire, mais ne perçoivent pas de revenus en raison de cette activité. Faut-il également fiscaliser ce type d’acteurs ? Cela ne paraît pas souhaitable. Il pourrait enfin être utile d’indiquer clairement sur les sites Internet commerciaux le montant de la taxe de séjour à acquitter, dans un souci de transparence et de clarté.

Mme Marie-Christine Dalloz. Je tiens également à féliciter les auteurs de ce rapport. Cependant, je suis encline à la prudence au sujet de la fiscalité touristique. Il faut en effet faire attention aux dérives, qui auraient pour conséquence de l’alourdir de manière excessive. Dans ma circonscription située dans le Jura, les acteurs du secteur m’ont alertée sur les risques que ferait courir une hausse du taux de la taxe de séjour, qui rendrait, mécaniquement, nos régions moins attractives.

Deux de vos propositions ont particulièrement attiré mon attention. Il s’agit de la proposition n° 9 qui prévoit l’instauration d’une taxation d’office, cela me choque. Il faut être conscient qu’il existe aujourd’hui un rejet de l’impôt. Quant à la proposition n° 13 relative à la concertation avec les professionnels du tourisme, je me demande si cette concertation serait consultative ou délibérative.

Enfin, j’aurais souhaité que vos travaux puissent aller au-delà de la taxe de séjour et traiter de la fiscalité touristique dans son ensemble. J’aurais aimé que vous réfléchissiez à d’autres sujets, comme par exemple la TVA. Le taux de TVA peut en effet varier en fonction du type de clientèle reçu par un établissement, soit des personnes handicapées, des scolaires, ou des touristes. Un travail d’harmonisation et de simplification à ce sujet serait souhaitable.

M. Gaby Charroux. Je comprends mieux la sagesse de notre collègue Monique Rabin en séance il y a quelques jours, qui nous incitait à ne pas adopter d’amendements proposant l’augmentation du taux du plafond de la taxe de séjour. J’ai voté un de ces amendements, je l’assume. Cependant, je suis d’accord pour considérer que la hausse proposée semblait excessive. En tant que maire de Martigues, je suis interpellé par la question d’une fiscalité pesant sur les caravanes et les habitations mobiles ; comment cela pourrait-il se réaliser concrètement ? Je suis très sceptique à ce sujet.

M. Olivier Faure. Écoutez la sagesse de notre président de commission ; je souscris pleinement à ce qu’il a déclaré. Il sera indispensable à l’avenir de déterminer de nouvelles modalités de financement des infrastructures de transport en Île-de-France. En l’absence de solutions, ce seront les usagers qui in fine financeront ces transports. Or, on ne peut prendre le risque de se trouver dans une situation similaire à celle de Londres, où la part du financement par les usagers s’élève à 90 % du coût du transport. En Île-de-France, cette part se situe entre 25 et 30 %. Ainsi, un citoyen de ma circonscription qui paye un abonnement annuel de l’ordre de 1 100 euros devrait acquitter un paiement quatre, voire cinq fois plus important. C’est inenvisageable.

M. Charles de Courson. Il faut réfléchir à l’aménagement du territoire.

M. Olivier Faure. Oui, je suis d’accord. Les temps de transport peuvent actuellement être de 3 ou 4 heures par jour en Île-de-France. Il faut prendre cet élément en considération et tenter d’y apporter des solutions. Si nous ne répondons pas à cette demande légitime des populations qui habitent, notamment, en grande couronne parisienne, nous observerons au cours des prochaines élections soit un renforcement du taux d’abstention, soit un basculement vers un vote extrême. Je suis donc favorable à un élargissement du financement des transports aux touristes.

Mme Monique Rabin, rapporteure. Certaines réponses aux questions que vous avez posées se trouvent dans notre rapport.

Pour répondre à Marie-Christine Dalloz, notre travail s’est effectivement centré sur la taxe de séjour. Je ressens votre remarque comme une invitation à poursuivre ce travail au cours de travaux menés par la commission des Finances ou par notre Assemblée. J’y suis à titre personnel favorable.

Concernant la taxe de séjour en elle-même, elle a pour objectif le développement de l’activité touristique et la possibilité de faire face aux dépenses induites par cette activité. Une annexe au compte administratif existe, elle doit permettre une transparence de l’utilisation des recettes de la taxe de séjour par la collectivité concernée. Cela suscite d’ailleurs des débats. À Paris par exemple, les hôteliers ont du mal à comprendre pourquoi, avec un rendement de 40 millions d’euros, 7 millions d’euros de la taxe de séjour seulement sont affectés à l’office de tourisme. Cela s’explique par la nécessité de financer d’autres structures, comme la Préfecture de police qui sécurise les sites touristiques et perçoit à ce titre 7 millions d’euros. Ce premier contrôle existe, nous proposons en plus d’associer plus systématiquement les professionnels du tourisme aux choix d’affectation de la taxe.

Nous avons fait le choix de ne pas proposer d’étendre aux camping-cars et aux bateaux de croisière la taxe de séjour. Pour des raisons de complexité mais aussi de préservation de l’attractivité touristique. Nous avons proposé, par contre, une nouvelle modalité de recouvrement de la taxe, avec la possibilité pour la commune de confier ce recouvrement à la DGFiP. En effet, seulement 2 500 communes ont instauré une taxe de séjour sur leur territoire, sur les 6 000 communes qui sont potentiellement concernées, selon Atout France. Enfin, il ne faut pas sous-estimer l’impact d’un élargissement de l’assiette de la taxe à de nouveaux acteurs. Je pense aux meublés touristiques proposés par le biais de sites Internet. Actuellement 95 % du rendement de la taxe de séjour provient des hôtels, les meublés touristiques n’en représentant que 5 %.

L’utilisation croissante de sites Internet comme moyen de mise en relation entre loueurs et vacanciers est exponentielle et il ne faut pas que le politique soit en retard par rapport à la société. Il existe deux types de sites Internet : des sites payants, comme Airbnb ou des sites gratuits, comme Leboncoin. Aux premiers, il est difficile d’appliquer la taxe de séjour aux locations qu’ils proposent dans ses modalités actuelles. En France, la taxe de séjour est un dispositif fixé par la loi pour tout le territoire, tandis que dans d’autres pays, la taxe relève de la politique de la ville – comme à Berlin, à Barcelone ou encore à Bruxelles. C’est donc à l’État d’engager des discussions avec ces sites d’intermédiation locative à titre onéreux afin de mettre en place une taxation forfaitaire, comme c’est actuellement le cas à San Francisco ou à Portland aux États-Unis. Dans le second cas, des sites Internet mettent en relation des personnes à titre gratuit. Leur situation est différente mais je rappelle que les personnes faisant appel à ces sites Internet doivent déclarer ces locations aux communes. Pour aider les communes à identifier ces personnes, la mission préconise de permettre la communication par les services fiscaux au maire des éléments nécessaires à leur identification.

« L’amendement STIF » me semblait davantage un amendement d’appel sur la mise en place d’une « taxe transport ». Si les recettes supplémentaires induites par l’élargissement de l’assiette de la taxe aux sites Internet d’intermédiation locative sont conséquentes, il pourrait être envisagé d’orienter une partie de ces recettes vers un fonds de modernisation des infrastructures de transport.

La nouvelle proposition d’Olivier Faure est plus adaptée, puisqu’elle rend la taxe progressive : il était difficile d’admettre que, pour un hôtel à une étoile ou un hôtel non classé, la taxe soit identique à un hôtel de luxe. Dans tous les cas, il ne pourra pas s’agir d’une taxe additionnelle à la taxe de séjour, puisqu’elle est peu prélevée en Île-de-France ; en Seine-et-Marne, par exemple, seule une commune est assujettie à la taxe de séjour.

Je voudrais préciser qu’il n’a jamais été affirmé par la mission que le relèvement du plafond de la taxe de séjour serait la seule augmentation à réaliser. La mission suggère également une indexation du barème de la taxe, qui n’a pas été réévalué depuis plus de douze ans. Nous sommes toutefois d’accord pour désolidariser le barème applicable aux palaces et aux hôtels « cinq étoiles » du barème applicable aux hôtels quatre étoiles.

M. Éric Woerth, rapporteur. Pour les sites Internet, il convient d’instaurer une taxation assise sur le chiffre d’affaires de ces sociétés. Les propriétaires qui louent pour une courte durée à des vacanciers sont assujettis à la taxe de séjour quand celle-ci a été instituée par la commune. La difficulté réside dans le contrôle et la collecte de l’information par les communes. Il en résulte de réelles difficultés pour assurer le recouvrement de la taxe, et c’est pour cette raison, que la mission propose que la DGFiP, sur option de la commune, assure la collecte de la taxe de séjour. Le coût de collecte pour la DGFiP sera prélevé sur les recettes de la taxe.

Les pouvoirs de sanction doivent, par ailleurs, être renforcés, en confiant au maire la possibilité d’engager la procédure de taxation d’office, en cas de carence des obligations déclaratives. Les sanctions actuelles ne sont pas suffisamment dissuasives.

La mission est également attachée à une participation des professionnels du tourisme à la définition de l’affectation des recettes de la taxe de séjour. Cette participation ne doit pas nécessairement être contraignante pour les élus, mais doit permettre à chacun de fournir son opinion sur l’affectation de la taxe. La taxe de séjour est payée par les professionnels du tourisme. Il est logique que ces derniers soient associés à la détermination de son affectation pour le développement de la politique touristique de la ville.

En revanche, la création d’un budget annexe pour contrôler l’utilisation de la taxe de séjour ne semble pas constituer la solution la plus adéquate. Il est difficile de déterminer précisément l’affectation de la taxe de séjour pour les communes, puisqu’elle est utilisée globalement par la commune pour faire face aux coûts supplémentaires induits par l’activité touristique.

Il est important que la collectivité puisse choisir, en liaison avec les professionnels, entre la taxation « au réel » ou au forfait. Nous proposons toutefois d’élargir l’abattement au forfait, tout en le simplifiant.

Le barème de la taxe de séjour doit être indexé, mais sans rattraper pour autant l’absence, par le passé, de réévaluations. Cette indexation sera toutefois difficile à réaliser, puisque les montants concernés sont faibles.

Enfin, si la volonté de mieux financer les transports en Île-de-France est louable, la création d’une taxe additionnelle sur la taxe de séjour ne peut être considérée comme la solution miracle. Les touristes consomment et participent déjà à la vitalité économique de la région parisienne, tout en permettant une augmentation des recettes fiscales. La véritable question est de trouver les moyens d’assurer un financement viable des infrastructures de transport en Île-de-France. La taxe de séjour ne constitue pas une réponse logique à ce problème, car ce ne sont pas les touristes qui sont responsables de la saturation des lignes de transports en Île-de-France. Il existe un problème général de financement des infrastructures de transport, dont le tourisme constitue un élément, mais n’est pas l’élément central

M. Éric Straumann, rapporteur. Rendre obligatoire l’affichage de la taxe de séjour pour les sites Internet est difficile en pratique à mettre en œuvre. Il faut identifier les 2 500 communes qui ont établi une taxe de séjour et les tarifs qu’elles ont décidés.

Il faut approfondir le contrôle et améliorer les moyens de recouvrement de la taxe de séjour. Actuellement, même lorsqu’un hôtelier fait l’objet d’un contrôle fiscal approfondi, la taxe de séjour n’est pas contrôlée.

Enfin, concernant le financement des infrastructures de transport en Île-de-France, les touristes ne sont pas responsables de l’engorgement des moyens de transport et constituent au contraire un atout pour l’économie locale. En revanche, l’accord passé entre la ville de San Francisco et le site AirBnB, a permis un surplus de recettes conséquent pour la ville.

M. Éric Woerth, rapporteur. La taxe de séjour s’intègre dans un paysage fiscal et social plus lourd en France que dans la plupart des autres pays. La fiscalité globale applicable aux établissements touristiques est plus faible dans les autres pays par rapport à la France, si l’on y ajoute non seulement les cotisations sociales, mais également les charges des entreprises.

M. Charles de Courson. Y aura-t-il des avancées dans le projet de loi de finances pour 2015 sur ce sujet ? Autrement que sous la forme d’amendements ?

Mme Monique Rabin, rapporteure. Il y a eu non seulement les assises du tourisme, avec lesquelles nous partageons certaines propositions, mais également la mise en place d’une mission parlementaire sur le sujet. Dans ce cadre, des amendements seront proposés afin d’obtenir de véritables avancées concernant la taxe de séjour. Dans cette perspective, il conviendra de discuter avec les acteurs de la profession.

Les comparaisons avec les taxes sur l’hébergement des autres pays sont toujours difficiles. Les taxes y sont parfois supérieures mais les hôtels de tourisme subissent déjà en France une TVA supérieure, et une cotisation foncière des entreprises particulièrement lourde, en raison de l’importance de l’immobilier dans le secteur hôtelier.

Il faudra également faire attention à la taxation au forfait, qui aboutit à inclure la taxe dans le prix de l’hébergement, sans la faire apparaître spécifiquement. Le prix de la chambre semble alors plus élevé, ce qui n’est pas le cas lorsque la taxe de séjour est appliquée « au réel ». Cette situation est facteur d’inégalités entre professionnels du secteur.

M. Charles de Courson. Peut-on envisager la mise en place d’une taxe de séjour proportionnelle au chiffre d’affaires, plus simple pour en assurer le recouvrement ? Cette solution serait-elle euro-compatible ?

Mme Monique Rabin, rapporteure. Cette solution ne répond pas à la même logique que la taxe de séjour actuelle qui est notamment assise sur le nombre de nuitées. Elle pourra toutefois être retenue pour les sites Internet, pour lesquelles il faut une solution adaptée.

La Commission autorise, en application de l’article 145 du Règlement, la publication du rapport de la mission d’évaluation et de contrôle sur la fiscalité des hébergements touristiques.

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Membres présents ou excusés

Commission des Finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mercredi 9 juillet 2014 à 10 h 45

Présents. - M. François André, M. Christophe Caresche, M. Gilles Carrez,
M. Christophe Castaner, M. Yves Censi, M. Gaby Charroux, M. Charles de Courson,
Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Faure, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Régis Juanico, Mme Monique Rabin, M. Alain Rodet, M. Éric Woerth

Excusés. - M. Guillaume Bachelay, M. Dominique Baert, M. Marc Francina,
M. Jean-Pierre Gorges, M. Pierre Moscovici, M. Thierry Robert, M. Pascal Terrasse,
M. Michel Vergnier

Assistaient également à la réunion. - M. Éric Straumann, M. François Vannson

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