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Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Mardi 4 novembre 2014

Séance de 12 heures 30

Compte rendu n° 32

Présidence de Mme Marie-Christine Dalloz, Secrétaire

–  Suite de l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2015 (n° 2234) :

–  Examen et vote sur les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales et sur l’article 47, rattaché :

–  Politiques de l’agriculture ; compte spécial Développement agricole et rural (M. Charles de Courson, Rapporteur spécial)

–  Sécurité alimentaire (M. Éric Alauzet, Rapporteur spécial)

–  Présences en réunion

La Commission poursuit l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2015 (n° 2234).

Après l’audition de Monsieur Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt (voir le compte rendu de la commission élargie du 4 novembre 2014 à 9 heures 30 (1)), la commission des Finances examine les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, sur le rapport de M. Charles de Courson (sur les Politiques de l’agriculture) et de M. Éric Alauzet (sur la Sécurité alimentaire), rapporteurs spéciaux.

Article 32 (État B)

La Commission est saisie de l’amendement II-CF156 de M. Charles de Courson, rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Dans le cadre de la politique agricole commune, les subventions aux assurances climatiques peuvent représenter au maximum 65 % du coût de l’assurance. La France cofinance 25 % de ces subventions, les 75 % restants étant cofinancés par des fonds européens. À noter que c’est la dernière année ou le cofinancement national est obligatoire, l’an prochain la totalité de l’aide à l’assurance sera financée sur crédits européens par un transfert du pilier 1 vers le pilier 2.

L’an dernier, les crédits d’engagement de 19,3 millions d’euros ont permis de mobiliser 57,9 millions d’euros de cofinancements européens. Les besoins totaux pour subventionner les contrats à 65 % ont finalement représenté 105,2 millions d’euros si bien que les producteurs de grandes cultures n’ont pu être aidés qu’à hauteur de 43 % du coût des assurances.

Pour 2015 les crédits d’engagement de la France, fixés à 24,3 millions d’euros, sont en hausse de 26 % par rapport à 2014 (+ 5 millions d’euros). Ils devraient permettre de mobiliser un cofinancement européen de 72,9 millions d’euros (75 %), pour reconstituer une enveloppe totale de 97,2 millions d’euros sur l’assurance récolte. Ce montant reste inférieur aux besoins totaux de l’an dernier nécessaires pour une prise en charge à 65 % des coûts pour toutes les cultures. Cette année encore, les grandes cultures recevront une aide inférieure à 65 % du montant des primes d’assurance.

Tout en prenant acte de la consolidation d’une enveloppe de 97,2 millions d’euros pour le financement de l’assurance récolte il convient de revoir son montant qui s’avère insuffisant pour une prise en charge d’un taux de subvention de 65 % pour toutes les cultures.

L’amendement propose de prélever 10 millions d’euros sur l’action n° 1 Moyens de l’administration centrale pour les reverser sur l’action n° 12 Gestion des crises et des aléas de production.

M. Pascal Terrasse. Il est vrai que le mécanisme qui a été mis en place en 2003 ne fonctionne pas bien et n’a pas atteint les objectifs qui lui avaient été assignés à l’époque.

Cependant, nous venons d’entendre le ministre sur ce sujet important. Il a annoncé que l’année 2015 serait consacrée à une réflexion sur cette question des assurances. Il me semble nécessaire d’attendre les résultats de cette réflexion avant d’adopter ce type d’amendement.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Justement, l’adoption de l’amendement serait un moyen d’aider le ministre dans ses intentions de réformer un dispositif qui crée aujourd’hui des inégalités selon les filières de production.

La Commission rejette l’amendement II-CF156.

Elle examine ensuite l’amendement II-CF158 du rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Bien que n’étant pas de même nature que le dispositif d’aides aux agriculteurs en difficultés (AGRIDIFF), la priorité de l’État s’était portée en 2009 en faveur du Fonds d’allègement des charges (FAC) dont le montant avait été doublé. Son montant, qui ne variait plus et avait été reconduit à hauteur de 8 millions d’euros en 2012, s’est trouvé à son étiage le plus bas en 2014 avec 2,2 millions d’euros. La chute se prolonge en 2015 avec 1,5 million d’euros.

Ce fonds qui a pour vocation à contribuer à la prise en charge, des aléas exceptionnels (encéphalopathie spongiforme bovine, fièvre catarrhale ovine…), et des aléas climatiques (en remplacement des prêts spéciaux pour calamités agricoles), ou des crises conjoncturelles, perd ainsi au fil des années de son efficacité auprès des exploitations en difficulté.

Compte tenu des difficultés rencontrées par la plupart des filières et des effets de l’embargo imposé par la Russie, le FAC doit se voir doté de moyens équivalents à ceux de 2013. C’est pourquoi l’amendement propose de prélever 6,5 millions d’euros sur l’action n° 1 Moyens de l’administration centrale pour les inscrire sur l’action n° 12 Gestion des crises et des aléas de production.

La Commission rejette l’amendement II-CF158.

Elle est saisie de l’amendement II-CF162 du rapporteur spécial.

M. le Charles de Courson, rapporteur spécial. Après un recul sans précédent en 2013 et une nouvelle baisse en 2014, les crédits dédiés au dispositif relatif aux agriculteurs en difficulté sont reconduits à l’identique.

Alors que la plupart des filières connaissent des difficultés importantes, il est anormal que l’État ne conforte pas les leviers qui ont vocation à favoriser le redressement de certaines exploitations. Il est essentiel d’augmenter le montant des crédits dédiés à ce poste à hauteur de ceux alloués en 2012.

L’amendement propose donc de transférer 2,2 millions d’euros de l’action n° 1 Moyens de l’administration centrale vers l’action n° 12 Gestion des crises et des aléas de production.

La Commission rejette l’amendement II-CF162.

Après que Mme Marie-Christine Dalloz, présidente, ait rappelé que M. Éric Alauzet, rapporteur spécial, donnait un avis favorable à l’adoption des crédits, et malgré l’avis défavorable de M. Charles de Courson,rapporteur spécial, elle adopte les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, ainsi que le compte d’affectation spéciale Développement agricole et rural.

Article 47

La Commission est saisie de l’amendement II-CF75 du rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. L'article 47 vise notamment à exclure les entreprises de travaux agricoles, ruraux et forestiers (ETARF) du champ d'application du dispositif d'exonération en faveur de l'emploi saisonnier agricole. Toutefois, par sa rédaction, il exclut également les sylviculteurs qui emploient du personnel pour la réalisation de travaux saisonniers.

Cet amendement propose donc de modifier cette rédaction, afin de ne pas pénaliser ces sylviculteurs, qui n'étaient pas visés par cette volonté d'exclusion des entreprises de travaux agricoles, ruraux et forestiers.

M. Pascal Terrasse. Je suis d’accord avec cet amendement et je demande à mon groupe de le voter.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Cet amendement représente un coût très faible. Je pense qu’il s’agit plutôt de réparer une erreur de plume.

La Commission adopte l’amendement II-CF75.

Elle est ensuite saisie de l’amendement II-CF86 du rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Le contrat « vendanges » a été créé en 2002 par un amendement que j’avais déposé et qui avait reçu le soutien de mes collègues socialistes et communistes.

Il y a deux volets à ce dispositif. D’une part, il s’agit d’un contrat particulier et un certain nombre de règles d’exclusion et de non-cumul d’activités avaient été supprimées. D’autre part, il y a un volet d’encouragement avec une exonération des cotisations sociales salariales.

Aujourd’hui, le Gouvernement ne propose pas de supprimer le contrat « vendanges » mais de supprimer son volet d’encouragement en revenant sur l’exonération des cotisations salariales.

Quels sont les arguments du ministre ? Il vient de nous expliquer qu’il s’agit de se conformer à la décision du Conseil constitutionnel de cet été concernant la modulation des cotisations sociales salariales. Le Conseil a jugé que cette modulation n’est pas possible parce que les cotisations ne sont pas un impôt et qu’elles sont la contrepartie de l’ouverture du droit à des prestations égales pour tous.

Je conteste cet argument. D’une part, c’est d’abord la cotisation maladie qui est concernée. Or, les bénéficiaires du contrat « vendanges » sont déjà couverts par ailleurs par un régime d’assurance maladie et il ne s’agit donc pas de l’ouverture d’un droit nouveau. D’autre part, s’agissant de la cotisation vieillesse, pour une grande partie de ses bénéficiaires – les retraités ou les fonctionnaires par exemple – le contrat « vendanges » ne leur ouvre pas de droits à pension supplémentaires.

Par ailleurs, cette mesure pose un problème social. Pour ses 316 000 bénéficiaires, le contrat « vendanges » représente un gain moyen de 650 euros. La suppression de l’exonération des cotisations salariales représenterait une perte de revenus de 8 % soit de 52 euros en moyenne. Pour un gain global modeste pour l’État (16 millions d’euros), cette mesure toucherait des gens modestes (chômeurs, étudiants ou retraités).

Je rappelle que les employeurs sont fortement incités à recourir au contrat « vendanges ». C’est un point d’autant plus important que nous assistons à la concurrence grandissante de sociétés étrangères parfaitement organisées qui font venir des travailleurs de l’étranger. Pour la Champagne, ceux-ci représenteraient déjà près de la moitié des vendangeurs. Sur ce point, l’article 47 n’aura aucun effet sur cette concurrence dommageable.

Enfin, j’ai rencontré les représentants de grandes régions d’appellation d’origine contrôlée (AOC) qui m’ont fait part de leur intention, si le Gouvernement persévère dans le démantèlement du contrat « vendanges », de revenir sur l’interdiction actuelle de la mécanisation des vendanges dans leur aire de production.

M. Pascal Terrasse. Il y a un certain nombre d’amendements qui ne suppriment que le cinquième alinéa de l’article 47, alors que le II-CF86 supprime les alinéas 4 à 6. Pour la clarté de débat, il serait préférable que tous ces amendements fassent l’objet d’une discussion commune puisqu’ils traitent du même sujet.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Je suis d’accord. Je retire l’amendement II-CF86 au profit des amendements identiques suivants, dont le mien.

L’amendement II-CF86 est retiré.

La Commission examine ensuite trois amendements identiques, le II-CF122 du rapporteur spécial, le II-CF2 de M. Pascal Terrasse et le II-CF109 de M. Étienne Blanc.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. J’ai déjà défendu l’amendement II-CF122

M. Pascal Terrasse. Il faut rappeler que le contrat « vendanges » est un contrat saisonnier d’un type très particulier, puisqu’il ne saurait avoir une durée supérieure à un mois et qu’en général, il est même inférieur à trois semaines. Dans ces conditions, je ne partage pas l’avis du ministre sur la nécessité de transcrire la récente décision du Conseil constitutionnel : une période aussi courte n’ouvre aucun droit à pension supplémentaire puisqu’elle est inférieure au seuil de validation d’un trimestre.

L’article 47, s’il ne remet pas en cause le contrat « vendanges », aura néanmoins un effet direct sur les revenus de ses bénéficiaires. Même si dans de nombreuses régions viticoles, les salaires versés sont supérieurs au SMIC, il représentera une baisse de 8 % de leur pouvoir d’achat. Il est inexact de dire que cette baisse sera compensée par la suppression de la première tranche de l’impôt sur le revenu, car celle-ci ne concernera pas les mêmes personnes, je pense notamment aux étudiants.

Cette mesure ouvre le débat sur la mécanisation de notre système de production agricole. Or, aucune machine à vendanger actuellement utilisée n’est fabriquée en France. De plus, l’attrait du vin français repose en partie sur son mode de production et notamment sur le fait qu’il soit vendangé à la main.

Tout cela n’a aucun sens.

M. Étienne Blanc. Moi aussi, je ne suis pas d’accord avec la lecture que le ministre fait de la décision du Conseil constitutionnel. Il a censuré une mesure de modulation de portée générale, alors que l’exonération liée au contrat « vendanges » est une mesure spéciale poursuivant un objectif ciblé. Il n’y a pas lieu donc de transposer la décision du Conseil.

J’observe qu’il s’agit également d’une mesure de peu d’impact financier (16 millions d’euros seulement) qui pourtant soulève deux questions. D’une part, si elle conduit à une pénurie de vendangeurs, cela entraînera des difficultés dans certains vignobles peu propices à la mécanisation, notamment dans les zones de coteaux. D’autre part, un élément culturel est en jeu : pour les étudiants par exemple, participer aux vendanges n’est pas seulement une question d’argent mais permet une expérience conviviale appréciée.

M. François André. J’entends la fougue de mes collègues, mais j’éprouve une certaine gêne qui me conduira à m’abstenir sur ces amendements.

Le ministre a expliqué en quoi cette mesure est guidée par la décision du Conseil constitutionnel. En l’espèce, nous sommes en face de deux interprétations différentes de la décision du Conseil : celle du ministre me paraît plus convaincante que celle de Charles de Courson.

Par ailleurs, je ne vois pas en quoi cette mesure pourrait avoir pour conséquence de favoriser le recours à des travailleurs détachés car rien n’est changé pour les employeurs. En outre, les conséquences pour les salariés seront compensées par la suppression de la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu.

Mme Marie-Christine Dalloz, présidente. Il ne s’agit pas de se livrer à des suppositions sur les effets de la mesure selon les catégories de vendangeurs. Mais, un certain nombre d’entre eux, notamment les retraités, ne se trouvaient pas tous dans la première tranche du barème de l’impôt sur le revenu. Il me semble qu’il s’agit d’un argument tiré par les cheveux.

Par ailleurs, la durée des contrats « vendanges », trois semaines en moyenne, est trop courte pour permettre la validation de trimestres supplémentaires pour les droits à pension.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Je redis qu’il n’y a pas ouverture de droit nouveau, ni en matière de couverture maladie, ni en matière de retraite. On parle d’une durée moyenne de trois semaines, mais en Champagne c’est plutôt douze jours.

Je partage l’avis d’Étienne Blanc selon lequel la décision du Conseil ne peut s’appliquer qu’à une mesure de portée générale, ce que n’est pas l’exonération de cotisations pour le contrat « vendanges ».

Quant à l’argument de la réforme de l’impôt sur le revenu, il ne tient pas car, sur les 316 000 personnes concernées, il est probable qu’environ les deux tiers ne sont pas imposables et ne seront donc pas concernés par la suppression de la première tranche.

La Commission adopte les amendements II-CF122, II-CF2 et II-CF109, puis l’article 47 ainsi modifié.

Après l’article 47

La Commission est saisie de l’amendement II-CF243 du rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. On observe parfois des difficultés de répartition des compétences entre les chambres régionales d’agriculture et les centres régionaux de la propriété forestière. Deux régions, la Franche-Comté et l’Aquitaine, s’interrogent sur la fusion de ces structures. Cet amendement demande au Gouvernement de remettre un rapport pour étudier cette éventuelle fusion permettant d'accroître les synergies entre ces organismes en charge des questions forestières.

La Commission rejette l’amendement II-CF243.

Elle est ensuite saisie de l’amendement II-CF244 du rapporteur spécial.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Cet amendement a pour objet la présentation d'un rapport gouvernemental envisageant une fusion de la Sopexa et d’UbiFrance, permettant d'accroître les synergies entre deux organismes chargés de la promotion des produits et techniques agricoles français sur les marchés extérieurs.

Mme Monique Rabin. Sur le fond, je suis d’accord avec l’objectif de cet amendement. Cette fusion est déjà en marche et cet amendement n’est sans doute pas utile. En tant que rapporteure spéciale des crédits du commerce extérieur, je vous donne rendez-vous l’année prochaine sur ce point.

M. Charles de Courson, rapporteur spécial. Justement, cela justifie de l’adopter en commission, quitte à le retirer en séance. Il s’agirait de montrer au ministre que les parlementaires sont résolus sur cette fusion nécessaire.

M. Pascal Terrasse. C’est vrai que cet amendement ne va pas très loin. Il pourrait être utile d’interroger le ministre sur ses intentions sur cette question. Je n’ai donc pas d’objection à son adoption.

Mme Monique Rabin. Il deviendrait un amendement de la commission et revêtirait donc une portée symbolique forte. Encore une fois, nous sommes d’accord sur l’objectif mais j’observe que, sur le terrain, les esprits ne sont pas encore prêts. Il ne faut pas leur envoyer un mauvais signal car il est indispensable d’associer les intéressés à ce processus.

La Commission rejette l’amendement II-CF244.

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Membres présents ou excusés

Commission des Finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

Réunion du mardi 4 novembre 2014 à 12 h 30

Présents. - M. François André, M. Étienne Blanc, M. Jean-Claude Buisine, M. Christophe Castaner, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jean Launay, Mme Véronique Louwagie, M. Michel Pajon, Mme Monique Rabin, M. Pascal Terrasse

Excusé. - M. Guillaume Bachelay

——fpfp——

1 () http://www.assemblee-nationale.fr/14/budget/plf2015/commissions_elargies/