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La commission entend M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique, et M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget, sur le programme de stabilité pour les années 2016 à 2019 et le programme national de réforme.
M. le président Gilles Carrez. Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, vous venez nous présenter le programme de stabilité, ainsi que le programme national de réforme (PNR), adoptés tous deux en Conseil des ministres ce matin.
Mme la rapporteure générale, Valérie Rabault, en déplacement à l’étranger, nous prie de l’excuser de ne pouvoir être parmi nous. Elle établira néanmoins un rapport, qui sera disponible la semaine prochaine, et qui servira de base à un débat en séance publique le 26 avril prochain. Je remercie les groupes Socialiste, républicain et citoyen et Radical, républicain, démocrate et progressiste d’avoir pris cette initiative – le Gouvernement ne l’a pas fait, et je le regrette. Il aurait été possible cette année, comme en 2011, en 2013 et en 2014, d’organiser un débat au titre de l’article 50-1 de la Constitution. Cela aurait donné un peu de solennité à l’exercice, et cela aurait été d’autant plus utile que le Gouvernement nous a confirmé qu’il n’y aurait pas de collectif budgétaire de milieu d’année. Ces sujets méritent de vrais débats.
Avant de vous donner la parole, monsieur le secrétaire d’État, je salue la présence parmi nous de Mme Danielle Auroi, présidente de la commission des affaires européennes.
M. Christian Eckert, secrétaire d’État chargé du budget. Monsieur le président de la commission, madame la présidente de la commission des affaires européennes, mesdames et messieurs les députés, les questions de calendrier sont toujours complexes. L’Assemblée nationale ne siège pas cette semaine, nous en sommes bien conscients. Mais nous étions tenus par les délais de transmission des documents, en amont au Haut Conseil des finances publiques, en aval à la Commission européenne. L’usage selon lequel le programme de stabilité est présenté à votre commission aussitôt après le Conseil des ministres qui l’adopte est ainsi respecté, et nous vous remercions de votre présence aujourd’hui.
Nous vous prions d’excuser Michel Sapin, qui vient de s’envoler vers Washington pour assister au G20 des ministres des finances.
Ce programme de stabilité, qui est bien sûr entièrement cohérent avec le programme national de réforme que vous présentera Emmanuel Macron, retrace les grandes orientations économiques et budgétaires de la France et participe à la coordination de ces politiques économiques au sein de l’Union européenne. Avant de l’adresser à la Commission européenne et à nos partenaires d’ici à la fin du mois, nous aurons l’occasion d’en débattre en séance publique mardi 26 avril, comme vous l’avez rappelé, monsieur le président.
Vous constaterez que ce document recèle peu de nouveautés : nos grandes orientations économiques et budgétaires n’ont pas changé car seule la constance, dans les objectifs et dans la méthode, permet d’obtenir des résultats tangibles et durables.
La constance dans la politique fiscale, c’est la poursuite des baisses d’impôts. Après avoir totalisé 24 milliards d’euros en 2015, le pacte de responsabilité représentera, avec le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), 34 milliards de baisses de cotisations et de fiscalité pour les entreprises en 2016. Ces allégements massifs soutiennent la production et l’emploi ; ils sont décisifs pour la prospérité du pays.
La constance dans la politique budgétaire, c’est la poursuite de la réduction du déficit grâce au plan d’économies de 50 milliards sur trois ans annoncé en 2014. Tous les organismes publics sont associés à cet effort, et toute dépense nouvelle est financée par des économies à due concurrence. C’est la condition pour mettre en œuvre les baisses de prélèvements tout en nous donnant les moyens d’agir pour financer nos priorités, comme pour réagir lorsque de nouveaux besoins se font sentir dans le courant d’un exercice budgétaire.
Comme nous l’avions anticipé, l’environnement macroéconomique s’améliore progressivement. Cette tendance devrait se poursuivre.
La croissance s’est installée sur des bases solides en 2015 : elle a atteint 1,2 %, dépassant l’objectif initial de 1 % que certains jugeaient pourtant optimiste. Cette dynamique, portée par la consommation et l’investissement, pourrait s’accélérer en 2016.
Les ménages voient leur pouvoir d’achat progresser fortement, grâce à la politique de modération fiscale ainsi qu’à la baisse du prix du pétrole : il a augmenté de 1,8 % l’an dernier. C’est sa plus forte progression depuis 2007, et il devrait rester dynamique en 2016 et 2017. En conséquence, la consommation progresse : après une hausse de 1,4 % l’an dernier, elle devrait croître de 1,6 % par an en 2016 et 2017.
Les entreprises voient leurs marges se redresser : c’est une étape nécessaire pour investir et produire en France. Ainsi, leur taux de marge a déjà repris les deux tiers du chemin perdu avec la crise, pour atteindre 31,4 % à la fin de l’année 2015. Avec le déploiement complet du pacte de responsabilité, le taux de marge reviendra à son niveau moyen d’avant crise. Tout cela crée les conditions d’une accélération de l’investissement des entreprises : après avoir progressé de 2 % l’an dernier, il devrait augmenter de plus de 3 % en 2016.
Dans ce contexte, l’économie française a renoué avec les créations d’emploi dans le secteur privé en 2015, avec 100 000 emplois créés. Ce rythme devrait s’accélérer dès cette année, grâce au renforcement de la reprise et au déploiement du plan d’urgence pour l’emploi.
En 2015, la croissance s’est donc affermie, marquant la première année de reprise économique effective.
Pour 2016, les derniers développements conjoncturels sont cohérents avec notre prévision de 1,5 % de croissance. Le Haut Conseil des finances publiques a rendu ce matin son avis sur les prévisions macroéconomiques associées au programme de stabilité et il considère cette prévision comme « atteignable ». Maintenir cette ancre permet d’assurer une stabilité essentielle à la conduite sereine de la politique budgétaire.
La seule modification majeure que contient ce document concerne l’inflation : alors que notre prévision était de 1 % pour 2016 à l’automne, elle devrait être à nouveau quasiment nulle cette année – 0,1 % selon nos prévisions – avant de revenir progressivement vers sa cible de 2 %. C’est la nouvelle baisse du prix du pétrole depuis janvier qui entraîne un redressement de l’inflation plus lent que prévu.
Si la situation s’améliore sur le front de l’économie, elle s’améliore aussi sur le front des finances publiques.
Permettez-moi de revenir tout d’abord sur l’année 2015. Le passé éclaire l’avenir, j’en suis persuadé, et les similitudes entre 2015 et 2016 ne manquent pas. Ce que nous avons réussi l’an dernier, nous pouvons le réussir cette année – la méthode a fait ses preuves.
Les résultats de 2015 sont meilleurs que prévu : le déficit s’établit à 3,5 % du PIB ; c’est mieux que ce que nous avions anticipé.
Les dépenses ont diminué de 1,4 milliard d’euros d’exécution à exécution – je pense que vous êtes sensible à ce point, monsieur le président : ce ne sont pas là des tendances. C’est le résultat d’une gestion réactive du budget : tout au long de l’année, nous avons su dégager de nouveaux moyens pour agir. Cette année, nous ferons de même : toute dépense nouvelle sera financée, à commencer par le plan emploi, le plan d’urgence en faveur des agriculteurs et les mesures en faveur de la jeunesse. Concrètement, ces dépenses seront financées par deux moyens principalement : la réserve de précaution a été augmentée de 1,8 milliard d’euros par le gel des crédits reportés de 2015 à 2016, et elle atteint aujourd’hui un peu plus de 11 milliards d’euros ; prochainement, un décret d’avance va gager les dépenses sur l’emploi par des économies supplémentaires.
Les comptes de la sécurité sociale se sont également améliorés en 2015. En quatre années, le déficit du régime général a été divisé par trois, enregistrant son niveau le plus bas depuis 2002. Là encore, ces bons résultats viennent de la maîtrise de la dépense : la progression des dépenses d’assurance maladie a été contenue à 2 %, niveau historiquement bas. Cette année encore, nous allons poursuivre cet effort ; l’objectif voté – 1,75 % – est ambitieux. L’avis du Comité d’alerte sur l’évolution des dépenses d’assurance maladie publié aujourd’hui confirme que nous pouvons l’atteindre.
Les élus locaux se sont également emparés du sujet du rétablissement des comptes publics. Permettez-moi de vous rappeler les faits : la dépense locale a ralenti, dépenses de fonctionnement comme dépenses de personnel, et les recettes ont progressé plus vite que les dépenses. La politique budgétaire du Gouvernement se révèle efficace : pour la première fois depuis 2003, le solde des administrations locales est excédentaire ! Cette année encore, grâce au mouvement désormais enclenché, la maîtrise de la dépense sera poursuivie et cette situation financière globalement bonne permettra aux collectivités de relancer leurs investissements : en 2015, les collectivités ont augmenté leurs dépôts sur le compte du Trésor ; elles ont donc mis de l’argent de côté et disposent des marges nécessaires pour relancer l’investissement.
En 2016 comme en 2015, nous prenons aussi des mesures complémentaires pour absorber l’impact négatif de la faible inflation sur les finances publiques : 3,8 milliards d’économies complémentaires vont être réalisées en 2016, au-delà du financement des dépenses nouvelles. En voici le détail précis : après financement des mesures nouvelles, les dépenses de l’État et des opérateurs seront diminuées d’un milliard d’euros ; un autre milliard d’économies sera également réalisé sur les dépenses sociales, avec notamment la pérennisation des économies constatées en 2015 ; enfin, 1,8 milliard d’euros seront économisés grâce à de moindres dépenses sur la charge d’intérêts. Cette dernière économie est permise par la seule révision à la baisse des taux d’intérêt – le taux à dix ans à la fin 2016 est désormais prévu à 1,25 %, contre 2,4 % en loi de finances initiale.
Pour 2017, les orientations fixées par ce programme de stabilité sont constantes et inchangées : poursuivre la réduction du déficit pour qu’il repasse en deçà de 3 %, continuer à baisser les impôts et financer tout cela par des économies. C’est ce que nous faisons depuis deux ans et c’est ce que nous continuerons à faire jusqu’à la fin du quinquennat.
J’en viens maintenant à la description un peu plus agrégée de notre trajectoire : le taux de progression de la dépense publique en 2014 et en 2015 a été limité à environ 1 %. Cette progression sera maintenue à un niveau similaire en 2016 et en 2017. Sur ces quatre années, nous avons engagé une vraie rupture avec le passé car la dépense avait progressé en moyenne de 3,2 % entre 2007 et 2012.
S’agissant des recettes, le taux de prélèvements obligatoires a baissé en 2015 pour la première fois depuis 2009. La baisse va se poursuivre ; nous atteindrons 44 % en 2017, avec le déploiement des baisses d’impôts du pacte de responsabilité et de solidarité.
Le résultat d’un déficit qui se réduit et d’une croissance qui repart, c’est une dette qui se stabilise. Celle-ci n’aura progressé que de 0,4 point en 2015 pour atteindre 95,7 % du PIB. C’est bien peu quand l’on regarde le rythme de progression de la dette depuis 2007.
Après avoir augmenté fortement depuis 2008, la dette est aujourd’hui quasi stabilisée. Maîtriser ainsi nos grands équilibres, c’est également la condition pour préserver la qualité de la signature de la France et se financer à bas coût. La semaine dernière, nous avons emprunté à dix ans à un taux de 0,43 % – c’est un record. Cette semaine même, nous avons réalisé une émission à maturité de cinquante ans à 1,9 %, événement rare, puisque la dernière opération de ce type avait eu lieu en 2010, à un taux de 4,2 %.
Ces bonnes conditions de financement nous permettront de dépenser à nouveau moins au titre des charges d’intérêts en 2016 qu’en 2015 – 43,1 milliards d’euros contre 44,1 milliards pour l’ensemble des administrations. Et comme il est d’usage, nos prévisions de taux d’intérêt restent prudentes : 1,25 % fin 2016, et 2 % fin 2017.
Depuis 2012, le Gouvernement et la majorité assument la responsabilité d’apurer des années de laisser-aller budgétaire : si nous n’avions rien fait, le déficit public se serait établi à près de 7 %. Au lieu de cela, il a été divisé par deux depuis le pic de la crise et il sera ramené sous les 3 % à horizon 2017.
Pour la première fois depuis l’année 2000, nous avons l’an dernier baissé à la fois le déficit et le taux de prélèvements obligatoires.
Voilà les éléments du débat passionné que nous ne manquerons pas d’avoir.
M. Emmanuel Macron, ministre de l’économie, de l’industrie et du numérique. Je viens pour ma part, comme chaque année, vous présenter le programme national de réforme, dans la continuité de ce que Christian Eckert vient de vous indiquer. J’évoquerai aussi ses premiers résultats – notre débat de l’an dernier avait, je m’en souviens, porté notamment sur leur évaluation.
Ce programme national de réforme comprend quatre axes principaux.
Il s’agit tout d’abord d’assurer la soutenabilité et la qualité des finances publiques. Cet aspect vient d’être détaillé, et je n’y reviens pas. Certaines de nos réformes – celles qui concernent, par exemple, les retraites et les retraites complémentaires – ont permis d’améliorer la soutenabilité de long terme de nos finances publiques. On connaît les éléments conjoncturels qui nous sont favorables, le niveau des taux d’intérêt par exemple ; il faut poursuivre nos réformes structurelles.
Le deuxième axe, c’est la poursuite du redressement de la compétitivité et de la productivité, mais aussi de l’amélioration de l’environnement des entreprises.
Cette amélioration passe par celle de la compétitivité-coût ; si les marges des entreprises étaient si basses, c’est aussi parce que pendant une décennie nous avons progressivement dérivé – non pas tant sous l’effet de décisions gouvernementales, mais en raison d’une dynamique salariale très décorrélée entre les principales économies de la zone euro. Nous avions donc perdu en compétitivité ; c’est pourquoi nous avons pris des mesures destinées à corriger cet état de fait, à commencer par le pacte de responsabilité et le CICE. Elles fonctionnent, puisque les marges s’améliorent, comme l’a dit Christian Eckert. Dans le PNR, nous faisons notamment état de notre volonté de pérenniser le CICE, par sa transformation en baisse durable de cotisations sociales, de la mise en œuvre du dernier volet du pacte – un peu de 6 milliards d’euros d’allégements de charges complémentaires résulteront de son entrée en vigueur au 1er avril, avec un ciblage important pour la compétitivité de l’industrie, puisque les charges seront allégées jusqu’à 3,5 SMIC – et de la poursuite de la suppression progressive de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S). Cette stratégie en matière de compétitivité-coût comprend une composante conjoncturelle, avec en particulier le dispositif « embauche PME », qui vient accélérer et accompagner la reprise ; il devrait permettre de créer 60 000 emplois supplémentaires d’ici à la fin 2016.
La compétitivité revêt également une dimension hors coût : ce qui importe, c’est de réussir une différenciation de l’offre, une montée en gamme tant de la production que de la formation, afin de désensibiliser notre économie à la concurrence des pays à bas coût et de conquérir de nouveaux marchés.
Le Gouvernement apporte donc son aide à la recherche et développement et à l’innovation. Les derniers chiffres de l’attractivité confirment que cette stratégie est bonne. Nous avons notamment pérennisé le crédit d’impôt recherche et prorogé pour un an le dispositif de suramortissement mis en place en 2015 – qui permet d’amortir 140 pour une décision d’investissement productif de 100. À cela s’ajoutent les mesures prises en matière de simplification de la vie des entreprises.
Ces mesures seront complétées par des dispositions structurantes pour l’entrepreneuriat. Certaines seront comprises dans le projet de loi présenté par Michel Sapin. Il s’agit de faciliter la création d’entreprises, notamment en poursuivant le mouvement de simplification des exigences de qualification pour chaque métier, tout en continuant naturellement de protéger la santé et la sécurité de tous. Il s’agit également de faciliter la croissance des entreprises, en simplifiant le passage du régime fiscal et social de la micro-entreprise au régime de droit commun, et en allégeant autant que faire se peut les obligations et les procédures. Enfin, l’amélioration de l’environnement économique passe par les simplifications en matière de numérique et par l’ouverture des données. La loi pour la croissance et l’activité a pris des mesures pour plusieurs secteurs ; ce mouvement sera poursuivi par voie réglementaire comme par voie législative, avec le projet de loi pour une République numérique. Il s’agit par exemple de donner une valeur juridique probante aux documents numériques. Nous amenderons également le projet de loi pour y inclure de nouvelles mesures visant à ouvrir les données dans les secteurs de l’énergie et du foncier notamment.
Le troisième axe concerne le fonctionnement du marché du travail.
Depuis 2012, nous avons adopté des réformes visant à permettre à nos entreprises de s’adapter à une conjoncture incertaine : nous avons ainsi, en 2013, réformé les plans de sauvegarde de l’emploi (PSE), à la suite de la signature de l’accord national interprofessionnel (ANI) ; nous avons également mis en place, en 2013, les accords de maintien dans l’emploi, qui ont été réformés et simplifiés en 2015.
Nous prenons également des mesures destinées à offrir plus de protections et à améliorer la qualité des accompagnements offerts aux salariés comme aux demandeurs d’emploi, dans un environnement où la fréquence des transitions professionnelles s’accélère : je pense à la portabilité des droits, à la réforme de la formation professionnelle, à l’instauration du compte personnel d’activité.
Nous avons enfin renforcé le cadre du dialogue social, que la loi relative au dialogue social a également permis de simplifier. D’autres mesures sont en discussion dans le cadre de la loi « travail », visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs.
Nous voulons continuer de donner plus de visibilité aux employeurs afin de faciliter la création d’emploi et de sécuriser les transitions pour les salariés.
Enfin, le quatrième axe concerne la promotion de l’inclusion sociale et de l’égalité des chances. C’est en parvenant à renforcer la sécurité individuelle que nous pourrons donner plus de flexibilité à notre économie. Cet équilibre est nécessaire pour affronter un monde où les ruptures de parcours sont plus nombreuses et les risques plus grands.
Il est essentiel de rendre plus facile pour les entreprises de s’organiser de façon flexible, par le dialogue social, et de renforcer l’entrepreneuriat ; mais ces mesures doivent être complétées par d’autres, visant à lutter contre la précarité et la pauvreté. On constate d’ailleurs, à cet égard, que la situation se dégrade fortement chez nos voisins.
Le Gouvernement a donc décidé une revalorisation des minima sociaux et pris des mesures en faveur de l’inclusion bancaire et de l’accès au logement. Il apporte un soutien particulier aux jeunes à travers le dispositif « garantie jeunes ».
Les mesures destinées à ouvrir le marché des biens et des services aux nouveaux entrants font également partie de cette stratégie d’inclusion sociale – je veux souligner ici la cohérence de notre politique. Ces mesures, qui rendent notre économie plus efficace, la rendent aussi plus juste, en permettant aux plus fragiles d’accéder qui au crédit, qui à la mobilité, qui à certaines professions.
Voilà, rapidement brossés, les quatre axes du PNR.
J’ai aussi parlé de résultats et d’évaluation.
Les marges des entreprises se redressent, même si nous n’avons pas encore retrouvé les niveaux d’avant la crise : cela doit nous conduire à rester à la fois prudents et volontaristes. Dans beaucoup d’entreprises, et notamment de PME, les marges demeurent très fragiles.
En matière de coût unitaire du travail, nous avons enrayé la dégradation du différentiel. Je rappelle qu’au début de la décennie 2000, le coût unitaire du travail pour des emplois industriels peu qualifiés était moins élevé en France qu’en Allemagne. Au début de cette décennie, il est devenu plus important. Depuis la fin de l’année 2014, nous avons réussi à inverser cette tendance sous l’effet conjugué des mesures de compétitivité que j’évoquais et de l’inflation salariale allemande liée aux négociations sociales, d’une part, et aux mesures décidées par le gouvernement de grande coalition d’autre part.
À plus longue échéance, selon les évaluations de nos services, qui sont toujours réalisées avec une grande prudence et qui sont cohérentes avec d’autres études, notamment de l’OCDE, les mesures présentées dans le PNR auront un impact brut de l’ordre de 4,8 points de PIB à l’horizon 2020 et de plus d’un million d’emplois créés. L’impact net est estimé à 2,5 points de PIB et de 670 000 emplois à horizon 2020, ce qui reste robuste et non négligeable. La décomposition de cet impact par catégorie de mesures figure page 19 du document. L’un des plus gros écarts entre le brut et le net concerne le CICE et le pacte de responsabilité et de solidarité pour une raison simple : il faut tenir compte de l’effet récessif des économies qui financent ce dispositif. On passe d’un impact sur le PIB de 1,7 point à l’horizon 2020 à un impact de 0,1 point, ce qui est tout à fait normal. On observe par contraste le caractère particulièrement robuste de toutes les mesures de soutien à l’investissement et à l’innovation dont l’impact est de 0,6 point en brut et de 0,5 point en net.
Voilà les quelques éclairages que je souhaitais vous apporter en complément des documents qui vous ont été transmis.
M. le président Gilles Carrez. Mes questions s’adressent pour une part à M. le secrétaire d’État et pour l’autre à M. le ministre.
Concernant les aspects financiers, le Haut Conseil des finances publiques a confirmé que vos prévisions macroéconomiques paraissaient atteignables.
Toutefois, un sujet, sur lequel vous avez vous-même insisté, monsieur le secrétaire d’État, nous préoccupe particulièrement pour l’exercice 2016 : le financement des nouvelles dépenses. Le coût de ces nouvelles dépenses, qu’il s’agisse du plan emploi, des mesures en faveur de l’agriculture, ou de la défense et de la sécurité, de l’extension de la garantie jeunes, des dernières annonces pour la jeunesse ou de la hausse du point d’indice de la fonction publique, est estimé entre 5 et 7 milliards d’euros en année pleine, dont plus de la moitié en 2016. À ces dépenses nouvelles s’ajoutent les 3,8 milliards d’euros d’économies supplémentaires imposées par le réajustement à la baisse de l’inflation – les prévisions passant de 1 % à 0,1 %. Les économies à trouver pour la seule année 2016 se situeraient donc dans un ordre de grandeur de 7 à 8 milliards d’euros.
Or, pour seule réponse, vous avancez la réserve de précaution, agrémentée d’une nouveauté, puisqu’elle est, pour la première fois, étendue aux reports de crédits. La réserve va atteindre cette année presque 12 milliards d’euros en autorisations d’engagement. Cela signifie qu’à peine le budget voté, un mois entier de ce budget est gelé – je parle des crédits « pilotables », qui représentent une bonne centaine de milliards.
L’expérience des années précédentes montre qu’entre 4 et 4,5 milliards d’euros de crédits sur les crédits mis en réserve sont annulés chaque année. Pour 2016, le montant devrait s’élever à 8 milliards d’euros sur une réserve au maximum de 12 milliards d’euros dont une bonne partie n’est pas réellement opérationnelle. Comment allez-vous vous y prendre pour réaliser ces économies ?
De plus en plus, le recours à la technique du rabot, puisqu’il s’agit bien de cela, pose un problème de méthode. Pour effectuer les annulations de crédits nécessaires, on cherche les économies là où l’on peut, c’est-à-dire sur les crédits « pilotables », essentiellement des crédits d’investissement, des crédits d’avenir. Avec cette technique et faute de réformes structurelles, la gestion de nos finances publiques pose d’énormes difficultés. L’administration, y compris pour exercer des missions régaliennes, se trouve parfois dans le plus grand dénuement.
La question de la méthode vaut pour aujourd’hui et pour l’avenir, car, désormais privés de marge de manœuvre fiscale, nous devons nous intéresser aux dépenses.
J’en viens aux questions adressées à M. Macron. Ce matin, le Haut Conseil a fait état d’une divergence avec le Gouvernement sur la croissance potentielle. Il estime, à l’instar de la Commission européenne, que les prévisions de croissance potentielle sont excessives, trop optimistes, et que les différentes réformes que vous venez d’évoquer ne permettent pas de redresser de manière aussi importante que vous le souhaitez la croissance potentielle.
Je reconnais un point positif : les engagements pris dans le pacte de responsabilité sont tenus puisque les documents semblent indiquer que la dernière tranche prévue pour 2017, à savoir la suppression totale de la C3S et le début de l’abaissement progressif du taux de l’impôt sur les sociétés, sera exécutée. Nous souhaiterions avoir confirmation de ce point.
Je note une proposition très intéressante : sur le modèle du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu, est envisagée la mise en place d’une baisse des charges à la source, par transformation du CICE en baisse directe de cotisations sociales. Cela nous évitera de perdre du temps sur des amendements de conditionnalité du CICE, qui créent beaucoup d’incertitude et d’instabilité dans cette commission. Pouvez-vous nous confirmer que cette réforme souhaitable interviendra à un horizon proche, peut-être dans la loi de finances pour 2017 ?
Je souhaite enfin vous interroger sur quelques réformes qui sont à mes yeux structurelles et qui ne figurent pas dans le PNR alors même qu’elles vont augmenter de façon structurelle la dépense publique.
Première réforme, essentielle bien que conduite à bas bruit, qui aura des conséquences sur la société : l’ouverture de l’assistance aux jeunes qui arrivent sur le marché du travail. Le Gouvernement entre 1997 et 2002 s’est constamment opposé à l’idée d’ouvrir le revenu minimum d’insertion (RMI) aux moins de vingt-cinq ans. Or, aujourd’hui, avec le revenu de solidarité active (RSA), l’extension de la garantie jeunes et les mesures pour les étudiants, de facto est offert à la sortie des études le choix de l’assistance. Que pensez-vous de ce type de réponse structurelle ?
Deuxième réforme qui n’est pas mentionnée : la généralisation du tiers payant pour les consultations médicales. Il suffit d’observer les effets à la fin des années 1980 de la généralisation du tiers payant pour les médicaments : une hausse considérable de la consommation, en dépit du garde-fou que représentent la consultation et la délivrance sur ordonnance des produits. Cette réforme structurelle va modifier les comportements de nos concitoyens qui ne seront plus à même de mesurer le coût réel de la santé puisqu’ils n’en auront plus connaissance.
Troisième réforme structurelle en France, qui va à l’inverse de la politique menée dans les pays étrangers : la conjugaison d’une augmentation des effectifs dans la fonction publique et d’une hausse du point d’indice.
Mme Danielle Auroi, présidente de la commission des affaires européennes. Je remercie M. le président de la commission des finances de m’avoir conviée à cette audition. Il est extrêmement important que nos deux commissions s’associent à chaque étape du semestre européen.
Je voudrais vous poser quelques questions sur les perspectives économiques de moyen terme et sur les engagements qu’entend prendre le Gouvernement, notamment s’agissant des réformes structurelles qui constituent, je le rappelle, l’une des trois priorités de politique économique de la Commission européenne pour l’année 2016.
Je souhaite vous interroger sur trois sujets en m’appuyant sur le rapport pays pour la France, publié par la Commission européenne le 26 février dernier.
S’agissant, en premier lieu, de la transition écologique et énergétique, la Commission européenne a souligné les relatifs bons résultats de la France en matière de réduction des gaz à effet de serre et d’amélioration de l’efficacité énergétique, en particulier avec la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. S’il faut se féliciter des premières réalisations, il est évidemment nécessaire de maintenir les efforts. Quelles sont les intentions du Gouvernement en la matière ? Dans le domaine des transports, le report modal et l’amélioration de l’efficacité énergétique semblent poser des difficultés. Quelles réponses entendez-vous y apporter ?
En deuxième lieu, je rappelle que la dimension sociale est désormais intégrée au semestre européen et donc davantage prise en compte dans les échanges entre les États membres et la Commission européenne, en particulier la lutte contre la pauvreté, la réduction des inégalités et la lutte contre les exclusions. La Commission dresse, dans le rapport pays, des constats extrêmement préoccupants sur lesquels j’aimerais, messieurs les ministres, vous entendre. Le décrochage scolaire et la dualisation accrue du marché du travail dans notre pays sont-ils des défis suffisamment pris en compte par le Gouvernement dans le PNR ?
En dernier lieu, s’agissant de la relance de l’investissement, je vous indique que notre commission poursuit ses travaux sur le plan Juncker et qu’un rapport, assorti d’une proposition de résolution, sera présenté par nos rapporteurs, Razzy Hammadi et Arnaud Richard, début mai en commission.
La relance de l’investissement, qui constitue une autre des priorités de la Commission européenne pour 2016, enregistre, en France, des premiers résultats notables. Il convient ainsi de saluer le dynamisme des porteurs de projets français, particulièrement impliqués dans la mise en œuvre du plan d’investissement pour l’Europe, ainsi que la très large représentation des projets à caractère environnemental dans le total des projets acceptés ou financés. Près de 50 % des projets ayant bénéficié du soutien de la Banque européenne d’investissement en France, fin 2015, concernaient le climat, qu’il s’agisse du soutien à la rénovation thermique ou de la production d’énergies renouvelables. Comment s’articuleront, dans les années à venir, les programmes d’investissements d’avenir (PIA) et le plan Juncker ?
Enfin, au vu du scandale actuel des Panama papers, la France est-elle prête désormais à soutenir la proposition de directive sur le reporting extra-financier pays par pays ?
M. Dominique Lefebvre. Ce rendez-vous, devenu rituel, est utile car il intervient six mois après la présentation des hypothèses macroéconomiques qui sous-tendent la loi de finances initiale et six mois avant le prochain projet de loi de finances. C’est l’occasion de faire le point sur tous les sujets, y compris ceux qui tiennent à l’exécution 2016.
Il est aussi un moment utile parce nous examinons à la fois un programme de stabilité et ce qui lui permet de se réaliser, le programme national de réforme.
C’est enfin l’occasion pour le Parlement d’exprimer une position alors que les ministres vont engager les discussions avec la Commission européenne. Je veux les assurer du soutien du groupe Socialiste, républicain et citoyen.
Je n’ai pas eu le temps d’examiner dans le détail les documents qui nous ont été transmis ce matin. Je note qu’une annexe reprend point par point les recommandations formulées par la Commission européenne. J’aimerais avoir votre sentiment sur le climat des discussions qui s’engagent. Quels sont les points susceptibles de faire l’objet d’une divergence avec la Commission ? J’imagine que la Commission dira que tout cela va dans le bon sens mais que les perspectives 2017 sont insuffisamment documentées pour qu’elle puisse se prononcer sur le respect de l’objectif de 2,7 % de déficit en 2017.
Je ne remercierai jamais assez le président Carrez dont chaque intervention rappelle qu’il existe des politiques de droite et des politiques de gauche et que droite et gauche, ce n’est pas pareil.
L’enjeu des programmes qui nous sont présentés est double : tenir nos engagements européens et assurer concomitamment le retour à la croissance ; le redressement de nos finances publiques et la cohésion sociale. De ce point de vue, nous abordons la discussion avec la Commission en ayant tenu nos engagements. Les résultats sont là en 2015.
Je tiens à souligner la constance qui caractérise les réformes que nous mettons en œuvre et qui ne sont pas toujours bien identifiées ou bien comprises. Cette constance dans la politique conduite est à l’origine des succès que nous enregistrons.
Je retiens de la lecture du PNR les débats qui nous attendent pour le projet de loi de finances pour 2017, en particulier la mise en œuvre du pacte de responsabilité. Nous aurons à discuter de sa dernière étape, de la manière de la rendre la plus efficace possible, dans le respect du volume des engagements pris à l’égard des entreprises. La suppression intégrale de la C3S envisagée par le Gouvernement doit être précédée d’un débat sur les mesures les plus pertinentes – nous l’avons déjà eu l’année dernière lorsque nous avons décidé de mettre en place le dispositif de suramortissement, dont l’efficacité est avérée, et, par conséquent, de retarder d’un trimestre la baisse des cotisations sociales. Si le volume des baisses de charges doit être respecté, les modalités de mise en œuvre de cette dernière tranche du pacte de responsabilité méritent d’être débattues.
Comme le président, j’ai noté, pour la première fois, me semble-t-il, la mention dans le PNR de la perspective du basculement du CICE en allégement de cotisations sociales – ce débat a eu lieu dans l’hémicycle, Yves Blein avait interrogé M. Eckert sur ce sujet. Je partage l’objectif mais je souligne qu’au regard du redressement des finances publiques, nous parlons d’un coût de 20 milliards d’euros, soit pour le budget de l’État, soit pour les entreprises, soit pour les deux. Les conditions du basculement, progressif ou pas, restent à préciser. Alors que le PNR évoque le projet de loi de finances pour 2017 pour la suppression de la C3S et la baisse de l’impôt sur les sociétés, il ne fixe aucune échéance sur ce point. Pouvez-vous nous en dire plus ?
J’ai bien entendu ce que vous nous avez indiqué sur l’exécution 2016. Je pensais poser la question et devancer ainsi celle de l’opposition mais le président m’a précédé. Il paraît logique de tenir compte des effets d’une inflation moindre à hauteur de 3,8 milliards en réduisant les dépenses. Avec une inflation moins forte, les coûts pour les administrations sont censés être moins élevés. Il me paraît donc normal de revoir les crédits fixés sur la base d’une inflation à 1 %.
Je ne suis pas complètement certain que les mesures nouvelles doivent s’additionner comme l’a fait le président Carrez. Il est vrai que la réserve de précaution s’élève aujourd’hui à 12 milliards d’euros. J’ai retrouvé les chiffres pour la loi de finances pour 2015 : nous avions finalement annulé 5,5 milliards d’euros et ouvert 6,5 milliards d’euros de crédits. La réserve de précaution est donc largement surdimensionnée à ce stade.
Par rapport aux objectifs de déficit nominal auxquels vous êtes très attachés, monsieur le président, en 2013 et 2014, la divergence entre les recettes prévues et les recettes réalisées a expliqué l’essentiel, non pas de la dégradation du déficit, mais de l’écart par rapport à nos objectifs. En l’espèce, si les recettes 2016 sont au rendez-vous, nous devrions pouvoir tenir la norme de dépense en 2016, si le Gouvernement nous confirme que telle est son intention.
M. Hervé Mariton. Le Haut Conseil des finances publiques a sévèrement critiqué ce matin votre évaluation de la croissance potentielle, laquelle vous permet de faire ressortir un effort structurel qui serait surévalué au regard de la réalité. Il serait intéressant que le Gouvernement nous explique comment il justifie cette croissance potentielle qui, de nouveau cette année, paraît surévaluée pour les besoins de la cause, mais avec un risque qui a été souligné par la Cour des comptes : si vous êtes cohérents avec vous-mêmes, si la croissance potentielle est au niveau que vous annoncez, cela signifie probablement que l’augmentation de l’investissement des entreprises que vous escomptez n’a pas lieu. En tout cas, vous ne pouvez pas avoir raison sur tous les tableaux. Il faut que vous nous répondiez, monsieur le secrétaire d’État.
Deuxième point, sur lequel je n’ai peut-être pas été assez attentif : le Gouvernement, depuis un certain temps, parle de 50 milliards d’euros d’économies. Chaque fois que des dépenses supplémentaires sont prévues, vous annoncez des économies supplémentaires. Mais le chiffre de référence, le totem, reste désespérément identique : 50 milliards. C’est donc qu’il y a un truc. J’aimerais que vous nous l’expliquiez.
S’agissant des dépenses, beaucoup a été dit par le président de la commission. Pourquoi choisissez-vous le moment où l’inflation est nulle et où le pouvoir d’achat augmente – vous vous en flattez, dont acte – pour augmenter le point d’indice ? Quelle curieuse idée !
Je note l’engagement sur une « barémisation » du CICE. Au demeurant dans le document, vous articulez CICE, pacte de responsabilité et baisse de charges jusqu’à 3,5 SMIC. Nous devons tous être attentifs au risque de tiers-mondisation de l’économie française, avec un effort de baisse de charges qui serait concentré sur les salaires au niveau du SMIC. La question de l’employabilité de la main-d’œuvre peu qualifiée et de l’entrée difficile sur le marché de l’emploi doit probablement trouver d’autres réponses plus pertinentes que la seule baisse des charges.
Le Gouvernement peut-il confirmer sa volonté de mettre en place une « barémisation » des cotisations sociales à spectre large, c’est-à-dire applicable au moins jusqu’à 3,5 SMIC ? Les décisions prises jusqu’à présent ont heureusement évolué pour éviter l’erreur qui a longtemps été commise – par les gouvernements de gauche comme de droite – de concentrer l’effort public au niveau du SMIC.
Les tableaux que comportent ces documents les rendent intéressants. Ils relèvent de ce que j’appellerai un volontarisme hors sol. S’agissant de la transition énergétique, c’est épatant : vous décrivez la politique gouvernementale en matière d’énergies renouvelables mais vous êtes moins bavards sur les perspectives en matière de réduction de la part du nucléaire. L’impact des efforts en faveur des énergies renouvelables est positif, mais je ne suis pas sûr que celui de la restriction du nucléaire, qui figure aussi dans la loi relative à la transition énergétique – comme la programmation pluriannuelle de l’énergie dont nous n’avons toujours pas connaissance – aille dans le même sens. Il serait bon de nous renseigner aussi sur les effets négatifs, sauf s’ils sont agrégés mais cela n’est écrit nulle part.
Enfin, l’annexe sur les investissements publics est intéressante. J’ai envie de vous demander de la compléter. Le Gouvernement avait plutôt bien démarré le mandat en matière d’infrastructures de transport – mon propos sera différent de celui de la présidente de la commission des affaires européennes – considérant qu’un certain nombre de projets n’étaient manifestement pas soutenables pour les finances publiques. Au fil du mandat, on a vu cette bonne disposition s’effriter, voire s’effondrer. Quelle est la vision du ministre de l’économie sur les critères d’investissement, en particulier dans le domaine ferroviaire ?
M. Éric Alauzet. La première de mes trois questions rejoint celle qu’a posée Gilles Carrez concernant les 6, 7 ou 8 milliards d’économies supplémentaires qu’il faudrait réaliser. J’ajoute que le dernier milliard est toujours plus difficile à trouver que le premier. En outre, l’exercice, parce qu’il ne s’inscrit pas dans le contexte de la préparation budgétaire, semble plus périlleux et plus aléatoire.
Mes questions suivantes portent sur les deux indicateurs que le ministre de l’économie a retenus, à savoir l’emploi et la croissance, pour évaluer la pertinence des politiques conduites.
Le pacte de responsabilité et les autres dispositifs sont censés créer de l’emploi. Il faut reconnaître de l’inertie au dispositif. Or, pour les économies de dépenses qui le financent, il n’y a pas d’inertie, les suppressions d’emplois sont quasiment instantanées. Parallèlement aux prévisions de création d’emplois, pouvez-vous nous indiquer les chiffes de pertes d’emplois publics et parapublics mais aussi les pertes dans le BTP liées à la baisse de l’investissement des collectivités locales ? Je suis sceptique sur la troisième phase de suppression de la C3S qui concerne les grandes entreprises. Est-ce véritablement de ces entreprises que l’on peut espérer la création d’emplois ? La balance avec les pertes d’emplois est-elle favorable ou pas ?
Ma troisième et dernière question porte sur la croissance dont nous venons de débattre avec M. Didier Migaud. À court terme, les prévisions du Gouvernement sont bonnes, et nous devons nous en réjouir : nous sommes dans les clous depuis l’an dernier. En revanche, à l’horizon de deux, trois ou quatre ans, l’incertitude est telle qu’elle nous fait redouter que les prévisions de croissance ne soient exagérément optimistes. Le président du Haut Conseil des finances publiques a distingué croissance potentielle et croissance réelle ; il a reconnu qu’il fallait revoir la liaison entre le déficit structurel et la croissance potentielle ; il a indiqué qu’une partie du déficit conjoncturel devait être traitée comme du déficit structurel, c’est-à-dire de manière beaucoup plus lourde, ce qui hypothèque les projets de croissance potentielle. Il faut regarder ce point avec attention.
En outre, je m’étonne de la position du FMI, qui s’alarme des prévisions économiques et reproche au Gouvernement de ne pas prendre les mesures structurelles nécessaires, mais qui n’anticipe pas deux risques importants : la faiblesse du taux de croissance, qui se situe à 1,5 % en moyenne ; le grignotage de cette croissance par des pertes qui sont notamment liées à l’évasion fiscale et à des fraudes de toute nature. Quelle est la croissance effective, celle dont la population ressent les effets ? À ces quelques milliards qui s’évaporent dans la nature et viennent amputer d’autant la croissance, il faut ajouter l’impact de la hausse des dépenses de réparation – sociales, environnementales et médicales – qui sont certes nécessaires mais pas dynamiques. Cette croissance, à la fois grignotée et moins dynamique qu’elle ne pourrait l’être, me donne quelques inquiétudes.
Mme Christine Pires Beaune. Merci à vous, messieurs les ministres, pour vos présentations synthétiques et claires. Cela étant, je regrette que nous disposions de trop peu de temps pour pouvoir consulter les documents. Monsieur le président, nous aurions peut-être pu décaler la réunion de notre commission.
Ma question porte sur la fraude fiscale. Au niveau national, une circulaire publiée en juin 2013 invitait les titulaires de comptes à l’étranger à déclarer ceux-ci au fameux service de traitement des déclarations rectificatives (STDR), dans une logique qui refuse l’impunité, comme vous l’aviez rappelé dans une autre enceinte. Il s’agit d’une vraie rupture avec les méthodes utilisées précédemment, à l’époque où les contribuables pouvaient se présenter de manière anonyme à une cellule opaque, afin de discuter de conditions fiscales qui les décideraient à éventuellement régulariser leur situation. Sous la précédente législature, la seule proposition de loi qui a été adoptée en la matière a consisté en une amnistie fiscale qui récompensait les évadés fiscaux d’avoir fraudé dès lors qu’ils revenaient dans la légalité.
Le STDR a rendu son rapport 2015 il y a quelques jours. Depuis sa création en 2013, il a reçu plus de 44 000 demandes de contribuables et il a traité plus de 11 000 dossiers, permettant l’encaissement de 4,4 milliards d’euros. Pour l’année 2015, les encaissements s’élèvent 2,6 milliards d’euros pour 7 800 dossiers traités, dont 515 avaient un lien avec des sociétés écran implantées au Panama et ont entraîné 760 millions d’euros de rappels pour un montant d’avoirs de 2,4 milliards d’euros, désormais sortis de l’ombre. Au passage, je voudrais remercier le consortium international des journalistes d’investigation qui est à l’origine des récentes révélations sur le Panama. Qu’envisagez-vous de faire au cours des deux années à venir à ce sujet ? Quelles conséquences financières cette affaire peut-elle avoir sur l’exercice 2016 ?
J’ai aussi une remarque à propos des collectivités locales. Monsieur le ministre, pour l’année 2015, vous avez annoncé une augmentation de 1,5 % des recettes de fonctionnement et une hausse de 1,46 % des dépenses de fonctionnement. On peut imaginer que le taux d’épargne brute des collectivités sera aussi en augmentation, ce qui n’est pas forcément une bonne nouvelle dans la mesure où ce mouvement peut résulter d’une hausse déraisonnable des impôts locaux et d’une baisse sévère de l’investissement public. J’espère que l’explication tient davantage aux efforts de rationalisation de la dépense publique mais il est encore trop tôt pour le dire. Vous avez aussi évoqué l’augmentation du dépôt de comptes des collectivités au Trésor, ce dont je ne doute pas. Cette situation macroéconomique que vous décrivez ne doit cependant pas masquer l’hétérogénéité des situations. Dans le Puy-de-Dôme, 16 % des communes avaient une épargne nette négative au 31 décembre 2014. J’attends les chiffres de 2015. Il est fort probable que ce taux soit en augmentation et que nous retrouvions les mêmes communes en difficulté.
Ma remarque n’a d’autre but que celui de soutenir une réforme – que j’attends de longue date – de la dotation globale de fonctionnement (DGF), la principale dotation de fonctionnement aux collectivités. Pour réussir cette réforme, il faudra peut-être mettre un peu d’huile dans les rouages. Si d’aventure nous devions revoir cette dernière marche, je voudrais être sûre que les collectivités recevraient une bouffée d’oxygène en contrepartie de la réforme.
Mme Marie-Christine Dalloz. Monsieur le président, vous avez fait allusion à l’article 50-1 de la Constitution. J’aimerais rappeler aussi l’article 14 de la loi de programmation des finances publiques du 28 décembre 2010, qui impose au Gouvernement, dans le cadre du programme de stabilité, d’organiser un débat en séance publique au Parlement, mais aussi un vote. En 2012, la procédure n’a pas été mise en œuvre en raison de l’élection présidentielle et, l’an dernier, vous vous êtes totalement exonérés de cette démarche. Que constate-t-on cette année ? Nous avons ici une réunion à la dernière minute, et un débat – sans vote – aura lieu le 26 avril dans l’hémicycle. Il faudrait revenir aux bonnes pratiques imposées par la loi. Il me semble qu’il en va aussi de votre crédibilité.
Cette introduction étant faite, revenons au fond. Le Haut Conseil des finances publiques estime que la perspective d’un taux de croissance de 1,5 % est encore atteignable. Les mots ont un sens et, en l’occurrence, le terme « encore » indique bien que l’objectif risque de ne pas être atteint. M. le secrétaire d’État nous a rappelé que les dépenses constatées ont diminué de 1,4 milliard d’euros entre 2014 et 2015. Puisque nous vous reprochions de donner des tendances, vous nous avez affirmé qu’il s’agissait là d’un montant réel, constaté. Cependant, en tenant compte de diverses baisses – des taux d’intérêt, des cours du pétrole, de notre contribution à l’Europe –, on en déduit qu’il y a une hausse des dépenses réelles. Ce bon résultat n’est dû qu’à des éléments extérieurs à votre politique.
Pour 2016, je m’inquiète de voir que deux coûts – la revalorisation du point d’indice pour l’ensemble de la fonction publique et les mesures liées à la sécurité de nos concitoyens – ne seront pas intégrés dans une loi de finances rectificative présentée cet été. C’est une mauvaise façon de travailler. Vous auriez dû nous présenter un collectif budgétaire dans le courant de l’été, afin que nous soyons au plus près des réalités budgétaires de 2016, plutôt que d’attendre une éventuelle embellie avant la fin de l’année. Les embellies ne viennent pas tous les ans, monsieur le ministre.
Mme Monique Rabin. Saluons le travail qui nous est présenté. Le Haut Conseil des finances publiques, qui est toujours un peu réservé et qui emploie un vocabulaire particulièrement neutre, juge que le Gouvernement est un peu optimiste. Pour ma part, je retiens la seconde partie de son appréciation, celle où il estime votre scénario plausible. Même si chacun tend à utiliser les parties de l’analyse qui l’intéressent, je crois que nous sommes sur la bonne pente depuis deux ans.
S’agissant de la dépense publique, mes propos vont contredire ceux de Marie-Christine Dalloz. Peut-être aurait-il fallu isoler l’impact de la baisse des taux d’intérêt et du coût de l’énergie, mais cela n’empêche pas de constater les efforts considérables qui ont été consentis au cours de cette législature, comparés aux évolutions précédentes et notamment celles de l’année 2011. Cette maîtrise des dépenses est indispensable pour ramener le déficit à 3,5 % du PIB et pour diminuer les impôts. Cette maîtrise a un réel sens puisqu’elle nous a permis de rendre du pouvoir d’achat à 12 millions de foyers fiscaux depuis trois ans, et de financer nos priorités. À cet égard, j’aimerais revenir sur le gel et le surgel dont il a été question : il serait bon d’en exonérer toutes les administrations chargées de la sécurité qui souffrent énormément, je pense à la police et à la gendarmerie...
M. le président Gilles Carrez. Et à la justice de M. Urvoas !
Mme Monique Rabin. Je pense aussi à la justice, en effet, car la situation des prisons mérite beaucoup d’attentions. S’il faut diminuer la dépense publique, il ne faut pas le faire à n’importe quel prix. J’ai lu avec beaucoup d’intérêt le programme pour 2017 de nos collègues Les Républicains qui prévoient d’économiser 100 milliards d’euros et d’exonérer le SMIC de toute cotisation. Un tel programme me fait peur. Il faut veiller à garder un cap politique en matière de dépenses publiques : les charges sont des cotisations, des revenus qui seront transférés aux retraités. À travers une diminution trop importante des dépenses, il ne faudrait pas donner l’impression d’oublier la protection matérielle et physique de nos concitoyens. Il faut aussi faire attention à nos administrations. J’ai la chance de représenter le Parlement au Conseil d’orientation du service des achats de l’État. Les hauts fonctionnaires, qui font énormément d’efforts pour moderniser notre pays, souffrent eux aussi. Soyons prudents face aux discours sur la diminution du nombre des fonctionnaires et le non-remplacement d’un fonctionnaire partant à la retraite sur deux.
M. Christophe Caresche. Ma première question porte sur la contribution tout à fait exceptionnelle des stocks à la croissance, sur laquelle le Haut Conseil des finances publiques s’est d’ailleurs étendu. Vous prévoyez des taux de 0,4 % en 2015 et 2016, puis un taux zéro au cours des années suivantes. Pourriez-vous nous donner votre analyse de ce phénomène exceptionnel ?
Avec ma seconde question, j’aimerais insister sur le désaccord manifeste qui subsiste avec la Commission européenne. Celle-ci propose un ajustement structurel de 0,8 point en 2016 et de 0,9 point en 2017, alors que vous prévoyez 0,5 point pour chacune de ces deux années. Ce désaccord tient-il à l’évaluation de la croissance potentielle ou à d’autres facteurs ?
M. Patrick Hetzel. L’examen des documents m’inspire une remarque liminaire : la dette publique nette continue d’augmenter. Il faut rappeler régulièrement ce point fondamental. Ensuite, j’aimerais rapprocher trois chiffres de ceux qui avaient été présentés par le Gouvernement le 16 septembre dernier, et notamment par vous, monsieur Eckert : la consommation des ménages, les investissements des entreprises, les créations nettes d’emplois dans le secteur privé.
Alors que vous prévoyiez une hausse de 1,7 % de la consommation des ménages en septembre dernier, vous tablez désormais sur une hausse de 1,6 %. L’écart est assez paradoxal – l’augmentation du pouvoir d’achat des ménages devrait avoir un effet positif sur leur consommation – et il va avoir des répercussions négatives sur les recettes de TVA attendues. Vous passez ce point sous silence.
Quant à la hausse des investissements des entreprises que vous estimiez à 4,9 % en septembre dernier, elle ne serait plus que de 3,2 % si j’en juge d’après vos documents et ceux de M. Migaud. L’écart est très significatif : les investissements des entreprises ne seront pas à la hauteur de ce que vous aviez imaginé. C’est d’autant plus inquiétant, qu’il y a six mois, vous mettiez en avant le CICE et le pacte de responsabilité. Vous indiquez d’ailleurs que les marges des entreprises sont en train de se reconstituer. Alors que vous vous réjouissez de certains éléments positifs, comment se fait-il que les investissements des entreprises ne suivent pas ?
En matière de créations nettes d’emplois dans le secteur privé, il y a aussi un écart entre vos annonces de septembre dernier et vos constats actuels. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi les 150 000 créations attendues ne seront pas au rendez-vous ?
Mme Véronique Louwagie. Pour ma part, j’aimerais vous interroger sur l’investissement local et sur le diagnostic du FMI.
En 2015, l’investissement local a décru de 4,6 milliards d’euros, essentiellement en raison de la baisse des dotations de l’État. Celles-ci s’inscrivent en baisse de 28 milliards d’euros sur la période 2014-2017, et de 10,5 milliards d’euros sur la période 2015-2017. Les collectivités vont aussi ressentir l’effet du dégel du point d’indice de la fonction publique. Elles sont également confrontées à tous les enjeux liés à la nouvelle politique territoriale, notamment à la fusion des communautés de communes, car ces restructurations mobilisent de l’énergie. Dans un premier temps, tout ceci est bénéfique pour les comptes de l’État, comme le souligne l’INSEE : c’est surtout grâce aux administrations publiques locales que le déficit public a été contenu à 3,5 % du PIB, un taux meilleur que prévu. Cependant, il y a là motif à inquiétude. Avez-vous pris en compte les incertitudes qui pèsent sur le budget de l’État, au regard de la baisse de l’investissement local qui risque de se poursuivre ?
Après avoir établi un diagnostic beaucoup plus pessimiste que les précédents, le FMI estime pour sa part que les États doivent élaborer un plan de secours. Il redoute que les décisions prises ne soient pas à la hauteur des besoins en matière de croissance économique. Le Gouvernement a-t-il envisagé un plan de secours, conformément aux préconisations dévoilées le 12 avril dernier par le FMI ?
M. Marc Goua. Si vous le permettez, j’aimerais tout d’abord signaler à ma collègue Véronique Louwagie qu’une enveloppe d’un milliard d’euros a été prévue en 2016 pour les collectivités qui seraient capables de présenter très rapidement des dossiers pour des investissements à engager avant la fin de l’année. Je crois savoir que, pour l’instant, l’utilisation de ces fonds n’est pas à la hauteur des espérances. Étant maire, j’estime aussi que l’on ne peut pas demander aux entreprises de réduire leurs frais de fonctionnement pour privilégier l’investissement, et ne pas nous appliquer la règle à nous-mêmes dans les collectivités.
Cela étant, je constate avec plaisir que de nouvelles mesures sont prévues pour améliorer la compétitivité des entreprises. Toutes celles que je visite – ce qui fait un certain nombre – demandent de la continuité et de la sécurité : il est évident qu’elles n’investissent pas pour six mois. Je me réjouis donc de la baisse de l’impôt sur les sociétés, mais ne serait-il pas possible d’accélérer le mouvement en établissant une distinction entre les bénéfices réinvestis et les bénéfices redistribués ? Une telle mesure aurait des effets vertueux sur les comportements de nos compatriotes et sur l’économie.
M. le ministre. Je vais d’abord répondre aux questions sur la croissance et notamment à celle que vous avez soulevée, monsieur le président, à propos de la croissance potentielle. Que ce soit par le Haut Conseil des finances publiques, la Commission européenne ou nous-mêmes, ce sujet doit être abordé avec beaucoup de modestie parce que le débat académique n’est absolument pas stabilisé. Si consensus il y a, il se fait plutôt autour de l’idée que personne ne sait vraiment intégrer certains facteurs – en particulier l’impact du numérique et de l’économie collaborative – dans la croissance potentielle de nos économies. Nous sommes face à une sorte de nouveau paradoxe de Solow. Nous devons donc rester très prudents et préciser que nos calculs ont un caractère très conventionnel. L’économie collaborative fait sortir beaucoup de notre richesse du PIB, mais elle crée aussi de l’emploi, des transferts de valeur. La modestie s’applique à nos propres prévisions.
Le Haut Conseil des finances publiques s’est appuyé sur un débat récurrent entre la Commission européenne et nos services. Ce débat, qui relève de la casuistique, a connu une parenthèse éphémère l’année dernière quand nous nous étions alignés sur les positions de la Commission qui avait elle-même fait un pas vers nous. Rappelons que, l’an dernier, la Commission avait évalué la croissance potentielle à 1,3 % pour 2016. Le point de divergence est toujours le même : elle ne prend pas en compte les mesures nouvelles que nous avions intégrées en estimant leur effet à 0,2 %. Revenant sur l’accord méthodologique que nous avions obtenu, la Commission a refait un calcul décalé de 0,2 %. C’est ce qui explique l’écart de 0,4 % qui existe en 2016 entre ses chiffres et les nôtres : 0,2 % de révision méthodologique et 0,2 % de mesures non prises en compte par la Commission. Nous allons vivre avec cet écart dans l’évaluation de la croissance potentielle : 1,1 % contre 1,5 % pour 2016 ; 1,2 % contre 1,5 % pour 2017.
Monsieur Caresche, vous nous avez interrogés sur la contribution des stocks à la croissance, dont l’INSEE a publié le chiffre pour 2015. L’essentiel de la contribution des stocks à la croissance en 2016 vient d’un effet d’acquis, c’est-à-dire de l’élan pris à la fin de l’année 2015. Comme l’ont souligné M. Alauzet et Mme Louwagie, le FMI a une approche particulièrement pessimiste, sachant qu’il est toujours plus pessimiste que d’autres institutions chargées de la prévision qui, elles, sont traditionnellement optimistes. Quoi qu’il en soit, tout cela montre que nous devons être extrêmement prudents.
Monsieur le président, vous m’avez aussi posé une question sur les mesures prises en faveur des jeunes. Pour clarifier les choses, j’indique qu’il n’y a pas de RSA pour les moins de vingt-cinq ans dans les mesures annoncées. Nous prévoyons une garantie jeunes qui n’est pas une mesure d’assistance car elle suppose un engagement actif dans un parcours - formation ou stage – et qui est ciblée. Pour 2017, le coût de cette mesure est évalué à 200 millions d’euros. Quant aux mesures jeunes, qui prolongent les bourses pendant quatre mois afin de favoriser le retour à l’emploi, elles sont conditionnées et limitées. Leur coût est estimé à 100 millions d’euros en 2017. Les deux mesures représentent donc un montant annuel de 300 millions d’euros. Elles sont conditionnées à des obligations de formation et, en particulier la première, visent le public des jeunes qui ne sont ni en emploi, ni en études, ni en formation, une catégorie que la Commission européenne désigne sous le terme de NEET (not in employment, education or training). S’il s’agissait d’un RSA jeunes, les masses financières n’auraient rien à voir avec les 300 millions d’euros prévus pour 2017.
La question qui nous est posée – et qui dépasse très largement notre débat du jour – est celle-ci : compte tenu des changements économiques et sociaux en cours, comment pouvons-nous repenser nos politiques d’entrée et d’évolution dans l’emploi ? La réforme de la formation professionnelle n’est qu’une partie de la réponse. Dans une économie de rupture, l’entrée dans l’emploi et le changement de parcours d’une entreprise à l’autre ou d’un secteur à l’autre sont de plus en plus difficiles pour les jeunes, en particulier pour ceux qui sont peu qualifiés. Il faut privilégier cette approche plutôt que de se focaliser sur le ciblage d’un public ou le coût d’une mesure. Quoi qu’il en soit, j’y insiste, les mesures annoncées ne relèvent pas d’une politique de l’assistance ; elles constituent un filet de sécurité dans un ensemble qui est actuellement imparfait, compte tenu des difficultés de l’entrée sur le marché du travail et des politiques de formation ou d’accompagnement.
Votre approche de la généralisation du tiers payant est un peu biaisée. On peut penser que la mesure aura un impact sur la trésorerie. Pour autant, posera-t-elle un problème structurel en contribuant à décaler nos dépenses de santé en général ? Je ne le crois pas, et d’autant moins quand je compare avec des pays comme les États-Unis qui ont des mécanismes plus forts en matière d’incitation ou de contrôle des individus. Aux États-Unis, le ratio des dépenses de santé rapportées au PIB est l’un des plus élevé au monde, et le système de santé est le plus inefficient. La généralisation du tiers payant permet l’accès aux soins, ce qui est bénéfique pour la croissance potentielle à long terme, mais elle a un effet sur la trésorerie à court terme. D’un point de vue structurel, cette mesure est loin d’être négative : son caractère inclusif est bon pour notre croissance potentielle.
La revalorisation du point d’indice dans la fonction publique n’est pas une mesure structurelle. Quand on compare la trajectoire – hors mesures catégorielles – des fonctionnaires avec celle des autres actifs, on constate qu’un effort leur a été demandé au cours des dernières années par deux majorités successives. Il n’était pas illégitime de revoir le niveau du point. Si réforme structurelle de la fonction publique il doit y avoir, elle doit porter sur les missions, les périmètres, etc. En revanche, la revalorisation du point d’indice est une mesure conjoncturelle qui ne me paraît pas illégitime.
Madame Auroi, vous avez soulevé le sujet de l’investissement pour lequel deux actions sont en cours : le plan Juncker, qui représente 315 milliards d’euros pour l’ensemble des pays de l’Union européenne ; la nouvelle génération de programmes d’investissements d’avenir (PIA). Rappelons que le PIA a des composantes d’avances remboursables, de subventions ou de dotations, avec une partie maastrichtienne et l’autre non, alors que l’essentiel du plan Juncker est constitué de financements du type prêts à long terme. La part en fonds propres du plan s’élève à 21 milliards d’euros, et c’est l’effet de levier public et privé qui permet d’atteindre 315 milliards d’euros. La France est le premier pays bénéficiaire du plan avec 28 projets approuvés pour un montant de 11,3 milliards d’euros d’investissements, principalement dans les domaines du très haut débit et des énergies renouvelables.
M. le secrétaire d’État. Je vais être très impoli et interrompre le ministre pour appuyer son propos. Lundi dernier, j’étais avec le Premier ministre à la Banque européenne d’investissement (BEI), où nous avons signé pour 2,1 milliards d’euros d’engagement dans sept ou neuf projets : usine de traitement du lait, soutien aux PME, en partenariat notamment avec La Banque postale et la Banque publique d’investissement (BPI), etc.
M. le ministre. La troisième tranche du PIA, à partir de 2017, représentera 10 milliards d’euros, un montant fondé sur les évaluations réalisées par M. Maystadt, ancien responsable de la Banque européenne d’investissement, et par France Stratégie. Elle complétera et poursuivra le dispositif actuel du « PIA 2 », qui vient à expiration cette année, en rouvrant des crédits. Les deux actions sont complémentaires du point de vue du pilotage, et nous avons notre propre évaluation du PIA.
J’ai été interrogé par M. Mariton sur les investissements ferroviaires et, plus largement, publics. Le Gouvernement a engagé un effort sans précédent s’agissant de la sélectivité des investissements publics, au moyen d’une méthode générale et d’une nouvelle procédure d’évaluation horizontale. Grâce à l’évaluation que nous avons instaurée au-delà de 100 millions d’euros, avec l’appui du Commissariat général à l’investissement (CGI), les investissements ne sont pas automatiques et leur sélection est beaucoup moins discrétionnaire qu’auparavant. Le document de présentation qui vous a été remis synthétise à la page 157 les avis du CGI.
Dans le domaine ferroviaire, la priorité a été accordée à la rénovation du réseau plutôt qu’aux nouveaux investissements. Ce choix me paraît relever d’une bonne stratégie, car nous sommes confrontés à la vétusté du réseau après avoir privilégié pendant plusieurs décennies les nouveaux projets, sans nous donner la possibilité d’entretenir le réseau existant. Nous avons fait preuve de cohérence, dans le cadre de la réforme ferroviaire puis de la loi pour la croissance, en instaurant cette règle d’or qui garantit à l’établissement public la préservation de ses capacités à investir – dans le renouvellement exclusivement.
Au niveau industriel, cette politique d’investissement implique une contrainte, voire une gageure. En effet, nous avons développé des acteurs industriels français qui sont par construction captifs de la commande publique, et d’une commande publique en quelque sorte infinie. Le dimensionnement de l’appareil productif a été déterminé par ces politiques très volontaristes. Nous menons donc actuellement une politique d’accompagnement – je vous renvoie aux annonces récentes de commandes de trains par Alain Vidalies, qui marquent le maintien de notre volontarisme s’agissant du renouvellement, que les régions devront compléter –, mais afin de désensibiliser nos acteurs industriels vis-à-vis de l’investissement public. Ainsi cette politique s’articule-t-elle à celle qui vise la compétitivité.
Un exemple : Alstom Transport a besoin de se moderniser, de se différencier, d’accéder à de nouveaux marchés ; nous y œuvrons très régulièrement – le week-end dernier encore, en Algérie, où l’extension de la joint venture Cital a permis à l’entreprise, en particulier à son site de Reichshoffen, très menacé, d’obtenir un nouveau marché, donc de dégager des volumes en étant beaucoup moins sensible qu’auparavant à la commande publique.
Sans cette politique, nous en resterons à une économie relativement fermée et essentiellement tributaire de la commande publique. Tel est le défi que nous devons relever, dans plusieurs secteurs, dont le ferroviaire et le BTP : réussir cette transition qui ne se produira pas du jour au lendemain.
Le chiffrage en matière de nucléaire est très difficile, particulièrement en ce qui concerne l’emploi où il suppose de tenir compte du développement futur des activités de démantèlement et, surtout, de toute la nouvelle production, laquelle dépend de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) ainsi que des travaux que nous sommes en train de finaliser avec EDF. C’est un sujet important dont je sais qu’il vous tient à cœur, monsieur Mariton. Je suis à votre disposition si vous souhaitez que nous consacrions une audition à ces questions. Notre visibilité n’est pas totale, mais il est certain que l’évolution ne sera pas sans conséquences, et celles-ci doivent être bien évaluées. Il y a ici une approche très conservatrice de la part du nucléaire : vous avez raison ; mais je ne veux pas non plus adopter une approche catastrophiste. Il faut donc progresser sur cette question, en l’abordant du point de vue industriel.
S’agissant des énergies renouvelables, ce sont essentiellement des investissements privés qui justifient la dynamique de création d’emplois, dans la rénovation thermique comme dans la production de nouveaux ensembles ou dans le développement d’activités nouvelles.
Enfin, les chiffres d’emploi cités dans le document correspondent à des montants bruts. J’ai donné tout à l’heure quelques chiffres nets. Je vous propose, par souci de transparence, de transmettre à votre commission, pour chaque bloc de mesures, le chiffrage détaillé, en brut et en net, de leur effet sur le PIB et du nombre d’emplois qu’elles permettent de créer. Vous pourrez ainsi vérifier que l’écart entre le brut et le net est faible pour toutes les mesures d’investissement et d’innovation, contrairement à celui qui caractérise les effets du CICE et du pacte de responsabilité : 1,7 point de PIB et 520 000 emplois créés en brut, contre 0,1 point et 280 000 emplois en net. Je ne cite que cet exemple, qui va dans votre sens, monsieur Alauzet. Le différentiel s’explique bien par la capture de l’effet des mesures au niveau des collectivités locales, du fait des destructions d’emplois.
M. le secrétaire d’État. Je commencerai par un point de méthode. Il est d’usage que nous venions vous présenter le programme de stabilité, de même que le budget, à l’issue du Conseil des ministres, par respect pour votre commission qui a ainsi la primeur de ces documents. Mais si les commissaires souhaitent avoir davantage de temps pour les consulter, c’est tout à fait possible : nous sommes à votre disposition.
Madame la présidente de la commission des affaires européennes, nous avons toujours été favorables au reporting public pays par pays – chaque mot compte. Je me souviens parfaitement de l’épisode du mois de décembre ; je ne sais si vous étiez là.
Mme Danielle Auroi. Oui, je l’étais.
M. le secrétaire d’État. Dans ce cas, vous vous en souvenez aussi bien que moi. J’ai toujours dit que la France demandait à l’Europe d’instaurer ce reporting public pays par pays. J’ai toujours dit que, dès que l’Europe l’aurait instauré, nous nous engagions à le transcrire dans notre législation. Pierre Moscovici s’est exprimé ces jours-ci et s’exprimera de nouveau très prochainement sur cette question ; Michel Sapin emporte à Washington des propositions précises, y compris à ce sujet. Je précise que, dans la décision qu’il a rendue après nos travaux de décembre, le Conseil constitutionnel a clairement dit qu’il acceptait le reporting pays par pays dans la mesure où celui-ci n’était pas public, mais réservé aux administrations fiscales, et ce afin de ne pas entraver la liberté d’entreprendre. Il apparaît donc de plus en plus nécessaire qu’un autre principe constitutionnel, celui qui oblige à transposer les règles européennes, nous permette de procéder au reporting de manière solide, constitutionnellement fondée. J’ai été violemment pris à partie à ce sujet en décembre, et je le regrette. Mes propos ont toujours été clairs et nets. Afin de dissiper toute inquiétude s’il en était encore besoin, j’ajoute que le reporting public figure dans les propositions 12 et 13 de la liste de propositions que Michel Sapin et moi-même avons publiée à la suite de l’affaire des Panama papers.
En ce qui concerne le STDR et Panama, Mme Pires Beaune a eu raison de citer les chiffres de 2015. Ils méritent explication. J’ai entendu, en effet, que trois affaires concernant le Panama auraient été traitées au STDR. Mais, si le STDR est saisi d’une affaire dans laquelle un compte est localisé au Luxembourg, concernant une société basée aux Îles Vierges et créée par une autre société elle-même créée au Panama et ayant des bénéficiaires français, dans quelle catégorie faut-il la classer : France, Îles Vierges, Panama ou Luxembourg ? Nous avons adopté, notamment pour présenter le rapport auquel il a été fait allusion – et dont la publication, curieusement, était prévue avant l’affaire Panama –, le principe d’une classification selon la localisation du compte bancaire. Nous avons néanmoins cherché à savoir, à la suite de cette affaire, combien de dossiers traités en 2014 et 2015 concernaient Panama à un stade ou à un autre ; nous en avons trouvé 750 environ, qui représentent quelque 4 milliards d’euros d’avoirs et 1,2 milliard d’impôts et de pénalités perçus.
Les effectifs sont aujourd’hui de 159 agents, en place au service central du STDR et dans les annexes régionales que nous avons créées. Avant l’affaire Panama, nous avions déjà décidé de porter leur nombre à 200 environ. En effet, nous avons 45 000 dossiers, et nous en traitons 6 000 ou 7 000 par an : il nous faut donc plus de personnel pour écluser le stock.
Y a-t-il plus ou moins de dossiers qu’auparavant ? Nous en avons reçu 341 en mars ; il n’est pas sûr que ce soit lié à l’affaire Panama, compte tenu du calendrier des événements. Cela représente 4 000 à 5 000 dossiers par an. Voilà les informations que je puis vous donner à ce stade.
Michel Sapin et moi-même avons rencontré Wolfgang Schäuble à Metz jeudi dernier pour nous mettre d’accord, ainsi qu’avec d’autres pays, sur les propositions qui seront défendues en commun aujourd’hui à Washington, et dans les deux semaines à venir en vue du prochain sommet européen.
Monsieur le président, le lanceur d’alerte que vous êtes sera bientôt protégé par la « loi Sapin » ! En la matière, vous êtes un récidiviste : l’année dernière à la même époque, vous donniez l’alerte dans les mêmes termes – il n’y avait pas assez d’inflation, il allait nous manquer 10 milliards d’euros de recettes, nous avions engagé des dépenses non prévues et le déficit de la France allait exploser. Voilà qui appelle les réponses suivantes.
Vous avez évoqué la faible inflation. Celle-ci a trois effets sur nos comptes publics. Elle a, premièrement, un effet, qui peut paraître négatif, sur les dépenses puisque l’on peut penser qu’elle provoque mécaniquement une diminution des recettes, de TVA par exemple, si la croissance ne compense pas ce déficit d’inflation. Or, nous avons prévu une croissance de 1,5 % – tout a été dit sur l’humilité des prévisionnistes ; je n’en rajouterai pas. Au demeurant, l’an dernier, nous étions dans la même situation : l’écart entre nos prévisions et l’inflation réelle était le même que cette année. Or, il a manqué tout au plus 1 milliard d’euros sur les 170 milliards de recettes de TVA. Ces dernières ont donc été au rendez-vous. Certes, je ne peux pas vous garantir que ce sera encore le cas cette année.
Elle a, deuxièmement, un effet sur les dépenses : une faible inflation permet de mieux tenir les budgets, puisque l’on achète à un prix moins élevé. Je prends un exemple caricatural. Si l’on a alloué à un ministère les crédits nécessaires pour acheter cent véhicules en tenant compte d’une inflation de 1 %, on peut penser que, si celle-ci est finalement de 0,1 %, ces véhicules lui coûteront moins cher et qu’il pourra donc économiser de l’argent. Je pourrais également mentionner le coût plus faible de l’énergie, dont tous les ministères – de même que les collectivités territoriales, nous y reviendrons – bénéficient, car tous doivent chauffer des bâtiments. Une faible inflation favorise donc la tenue des crédits budgétaires et permet même, parfois, d’en annuler un certain nombre. Tel est l’exercice auquel nous sommes en train de nous livrer avec tous les ministères. Faut-il traiter la justice et la défense à part, et considérer que tout est prioritaire, donc sanctuarisé ? Vous comprendrez que le secrétaire d’État au budget ne peut pas tenir ce type de discours. Je reviendrai, du reste, sur la situation du ministère de la justice.
Enfin une faible inflation a un troisième effet : elle diminue le coût de la charge de la dette, car les taux d’intérêt à dix ans et un certain nombre de produits financiers sont indexés sur l’inflation, de sorte qu’une moindre inflation, y compris au niveau européen, produit au moins autant d’économies que des taux d’intérêt faibles.
L’an dernier, les effets de ces trois facteurs se sont assez largement compensés et se sont même montrés, en définitive, plutôt favorables. Mais je ne dis pas que ce n’est pas un souci : nous avons corrigé nos prévisions sur ce point et nous y sommes attentifs.
Je voudrais dire un mot des collectivités territoriales. Mme Pires Beaune a rappelé l’hétérogénéité des situations, mais nous parlons, ici, de moyennes. En moyenne, donc, les recettes réelles de fonctionnement de l’ensemble des collectivités territoriales – communes, intercommunalités, départements et régions – ont augmenté d’1,5 %, en incluant la baisse des dotations, laquelle ne s’élève pas à 28 milliards, madame Louwagie – comme le prétend également M. Laignel, qui prend en compte quatre années de baisse de dotations –, mais à trois fois 3,667 milliards, soit 10,5 milliards. Les dépenses réelles de fonctionnement des collectivités ont, quant à elles, augmenté de 1,46 %.
Leur capacité d’autofinancement a donc, généralement, progressé. Du reste, les comptes au Trésor ont, je le redis, bénéficié d’environ 4 milliards de dépôts supplémentaires, ce qui signifie qu’il existe un certain nombre de disponibilités qui n’ont pas été mises en œuvre, et ce, pour diverses raisons que je n’aurai pas le temps d’exposer. Les dépenses de fonctionnement, qui s’accroissaient d’environ 3 % par an, augmentent donc cette année de 1,46 % et les recettes, comme nous l’avons toujours dit, n’ont pas baissé : elles ont même continué à augmenter, malgré la baisse des dotations.
Se pose donc la question de savoir à quoi est due cette augmentation des recettes. Pour le savoir, nous avons examiné attentivement les produits fiscaux : celui de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises reversée aux collectivités a progressé de 4,5 % et celui des droits de mutation à titre onéreux de 16 %, en raison d’une certaine reprise du marché immobilier. Par ailleurs, une augmentation des taux des impôts locaux a été décidée dans moins d’un tiers des communes et des intercommunalités. Nous avons donc également examiné les raisons de l’accroissement des recettes de taxe d’habitation, de taxe foncière sur les propriétés bâties et de cotisation foncière des entreprises, augmentation qui est de l’ordre de 2,6 milliards d’euros, soit 4 % à 5 %. Vous savez tous que l’augmentation des recettes d’impôts locaux peut avoir trois causes : l’augmentation de l’assiette générale – que vous avez votée et établie à 0,9 %, sans grande pression du Gouvernement –, l’augmentation physique des bases d’imposition et celle des taux. Les travaux de nos services nous ont permis de repérer que cette hausse de 4 à 5 % est due, pour un quart, soit 726 millions exactement, à l’augmentation des taux et pour 521 millions d’euros à la revalorisation forfaitaire, le reliquat étant lié à l’augmentation physique des bases. Je livre ces faits à votre réflexion.
Si vous souhaitez – j’ai également fait cette proposition au Sénat, qui semble faire la sourde oreille – que nous consacrions une séance de travail à la fiscalité locale, je suis prêt à répondre à vos sollicitations. Ensuite, toutes les questions politiques et stratégiques peuvent se poser.
Madame Dalloz, je vous signale que la baisse des dépenses de 1,4 milliard d’euros est calculée hors intérêts de la dette, pensions et comptes d’affectation spéciale (CAS). À ce propos, je précise que nous avons transféré 2 milliards de dépenses militaires d’un CAS vers le budget général, ce qui vient nous « pénaliser », si j’ose dire. En revanche, vous avez raison à propos de la baisse du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne, qui s’établit à 600 millions d’euros.
Un mot, enfin, sur le gel et le surgel des crédits budgétaires ainsi que sur la situation du ministère de la justice. Tout d’abord, geler des crédits ne signifie pas qu’on ne les dépensera pas. Il arrive en effet régulièrement que nous en dégelions, et pas seulement à la fin de l’année, mais dès juin – ce qui est plutôt rare – et septembre, ce qui est un peu plus fréquent. À ce propos, j’ai eu une explication de texte avec M. Urvoas, qui souhaite s’en remettre à un arbitrage qui dépasse ma modeste compétence. Vous en lirez certainement, un jour, le résultat dans les documents budgétaires, ou dans les journaux puisqu’il a choisi de parler davantage à ces derniers qu’à son collègue.
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Membres présents ou excusés
Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
Réunion du mercredi 13 avril 2016 à 12 heures
Présents. - M. Éric Alauzet, M. Jean-Claude Buisine, M. Christophe Caresche, M. Olivier Carré, M. Gilles Carrez, M. Alain Chrétien, M. Romain Colas, M. François Cornut-Gentille, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Jean-Louis Dumont, M. Marc Goua, M. Patrick Hetzel, M. Régis Juanico, M. Dominique Lefebvre, Mme Véronique Louwagie, M. Jean-François Mancel, M. Hervé Mariton, M. Jacques Pélissard, Mme Christine Pires Beaune, Mme Monique Rabin, M. Camille de Rocca Serra, M. Alain Rodet, M. Nicolas Sansu
Excusés. - M. Guillaume Bachelay, M. Dominique Baert, Mme Karine Berger, M. Alain Claeys, M. Olivier Dassault, M. Henri Emmanuelli, M. Marc Francina, M. Jean-Claude Fruteau, M. Jean-Louis Gagnaire, M. Joël Giraud, M. Jean-Pierre Gorges, M. Patrick Lebreton, M. Marc Le Fur, M. Victorin Lurel, M. Laurent Marcangeli, M. Patrick Ollier, Mme Valérie Rabault, M. Jean-Paul Tuaiva, M. Philippe Vigier, M. Laurent Wauquiez
Assistait également à la réunion. - Mme Danielle Auroi
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