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La séance est ouverte à 10 heures.
Présidence de M. René Dosière, président d’âge.
La Commission se réunit en vue de procéder à la nomination de son Bureau.
Nomination du président :
La Commission est saisie de la candidature de M. Jean-Jacques Urvoas.
Le nombre de candidats n’étant pas supérieur au nombre de sièges à pourvoir, M. Jean-Jacques Urvoas est proclamé président de la Commission, conformément à l’article 39, alinéa 4, du Règlement.
Présidence de M. Jean-Jacques Urvoas, président.
Nomination des vice-présidents :
La Commission est saisie des candidatures de Mme Marie-Françoise Bechtel, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, M. Jean-Frédéric Poisson et M. Dominique Raimbourg.
Le nombre des candidats n’étant pas supérieur à celui des postes à pourvoir, Mme Marie-Françoise Bechtel, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, M. Jean-Frédéric Poisson et M. Dominique Raimbourg sont proclamés vice-présidents de la Commission conformément à l’article 39, alinéa 4, du Règlement.
Nomination des secrétaires :
La Commission est saisie des candidatures de M. Philippe Gosselin, M. Paul Molac, Mme Élisabeth Pochon et M. Alain Tourret.
Le nombre des candidats n’étant pas supérieur à celui des postes à pourvoir, M. Philippe Gosselin, M. Paul Molac, Mme Élisabeth Pochon et M. Alain Tourret sont proclamés secrétaires de la Commission, conformément à l’article 39, alinéa 4, du Règlement.
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En conséquence, le Bureau de la Commission est ainsi constitué :
— Président : M. Jean-Jacques Urvoas
— Vice-présidents : Mme Marie-Françoise Bechtel
MM. Jean-Yves Le Bouillonnec
Jean-Frédéric Poisson
Dominique Raimbourg
— Secrétaires : M. Philippe Gosselin
M. Paul Molac
Mme Élisabeth Pochon
M. Alain Tourret
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La Commission examine, sur le rapport de Mme Françoise Descamps-Crosnier, après engagement de la procédure accélérée, le projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires (nos 1278 et 2880).
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Madame la ministre de la Décentralisation et de la fonction publique, je vous souhaite la bienvenue à la commission des Lois. Vous savez que vous trouverez ici une oreille attentive aux réformes que vous portez et une volonté de collaboration. Nous sommes extrêmement réceptifs aux différents projets de loi que le Gouvernement propose et nous souhaitons travailler dans de bonnes conditions, comme vous avez pu le constater à travers la manière dont nous avons anticipé l’examen du texte que nous abordons aujourd’hui.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la Décentralisation et de la fonction publique. En 2013, après plusieurs séances de discussion avec mes collègues du Gouvernement, nous avons décidé d’établir une séparation nette entre ce qui concernait les élus de la République et ce qui concernait les fonctionnaires, en leur consacrant deux textes différents : d’une part, la loi relative à la transparence de la vie publique, qui a déjà été adoptée ; d’autre part, le projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, que je vous présente aujourd’hui. Soyez assuré, monsieur le Président, que, tenant compte de vos déclarations, nous avons fait le maximum pour qu’il y ait un nombre minime d’amendements du Gouvernement déposés tardivement.
Le 17 juin dernier, j’ai déposé sur le Bureau de votre assemblée une lettre rectificative au projet de loi, dont le nombre d’articles est ainsi passé de cinquante-neuf à vingt-cinq, beaucoup de dispositions pouvant être prises par ordonnances.
Plus de trente ans après la « loi Le Pors » du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, notre objectif est de réaffirmer les valeurs qui guident l’action publique, ce qui me paraît particulièrement opportun dans la période que nous vivons. Il s’agit d’abord de renforcer la place des valeurs de la fonction publique et les dispositifs applicables en matière de déontologie : c’est le titre Ier. Il s’agit ensuite d’actualiser les obligations et les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires : c’est le titre II. Il s’agit enfin d’inscrire dans le statut général les premiers acquis de l’action du Gouvernement en faveur de l’exemplarité des employeurs publics : c’est le titre III.
Nous avons à réaffirmer les principes fondamentaux du statut général des fonctionnaires, texte peu connu sur lequel l’attention sera attirée à la faveur de ce projet de loi. L’article 1er pose les obligations de dignité – notion sur laquelle nous avons eu de très longues discussions avec les organisations syndicales –, d’impartialité, d’intégrité et de probité auxquelles doit répondre tout agent public. Il rappelle le respect du principe de laïcité, ce qui a semblé particulièrement important au Président de la République, au Premier ministre et à moi-même dans la période que nous connaissons. Cela implique que le fonctionnaire ne doit pas manifester son opinion religieuse dans l’exercice de ses fonctions. Nous avons discuté non seulement avec l’ensemble des représentants des fonctionnaires, mais aussi avec l’ensemble des autorités religieuses et philosophiques, pour nous accorder sur ce qu’implique l’application de ce principe, en particulier l’égalité de traitement pour toutes les personnes dans leur liberté de conscience et leur dignité.
Le projet de loi tend à renforcer certains droits des fonctionnaires. Il étend ainsi la protection fonctionnelle à tous les agents faisant l’objet de condamnations civiles ou de poursuites pénales en relation avec l’exercice de leurs fonctions, ainsi qu’à leurs familles. Rappelons ici que ce qui a motivé notre décision est un cas dramatique, lourd de conséquences en termes humains et financiers.
Le texte améliore la protection des lanceurs d’alerte.
Il instaure une limitation à trois ans du délai de prescription de l’action disciplinaire qui vise à éviter que ne traînent en longueur les dossiers de ce type.
Il comporte une modernisation des garanties disciplinaires et, en cas de poursuites pénales, le reclassement provisoire des agents placés sous contrôle judiciaire – question délicate qui passionne beaucoup de juristes.
Ces droits sont assortis d’obligations nouvelles.
Afin d’améliorer la prévention des conflits d’intérêts, le texte renforce les contrôles avant nomination – la liste des emplois concernés fera l’objet d’un décret en Conseil d’État – impose des obligations déclaratives – transmission préalable d’une déclaration d’intérêts et d’une déclaration de situation patrimoniale auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) – ainsi que l’obligation de gestion du patrimoine par un tiers.
Il procède, en outre, à une réforme des règles de cumul d’activités : interdiction du cumul de plusieurs emplois permanents – point sur lequel plusieurs d’entre vous nous ont aidé à progresser, même si nous ne sommes pas allés aussi loin que certains le souhaitent – ; resserrement des possibilités de cumuler son emploi avec la création ou la reprise d’une entreprise – sujet hautement délicat qui concerne le temps de travail – ; encadrement des activités accessoires et obligation pour l’agent à temps non complet d’établir une déclaration relative à son activité privée et de la transmettre à la commission de déontologie de la fonction publique (CDFP).
La commission de déontologie est renforcée par un pouvoir d’enquête et d’investigation, par la création de référents déontologues vers lesquels tous les fonctionnaires pourront se tourner et par une meilleure articulation de ses compétences avec celles de la HATVP, sujet délicat sur lequel nous reviendrons.
Enfin, il est procédé à une amélioration et une clarification des droits des agents contractuels : clarification des règles de calcul de l’ancienneté, enjeu important compte tenu de la forte proportion de contractuels – près de 30 % – dans l’ensemble de la fonction publique ; meilleure prise en compte de l’ancienneté pour bénéficier d’un contrat à durée indéterminée (CDI) ; titularisation ou transformation en CDI pour les agents occupant des postes permanents nécessitant des qualifications spécifiques auxquelles aucun corps de fonctionnaires ne répond.
J’en viens aux amendements du Gouvernement, Monsieur le Président. Cinq d’entre eux prennent directement en compte les avancées de l’agenda social : prorogation des dispositifs de titularisation institués par le ministre François Sauvadet – ce qui renvoie à ma remarque sur le nombre de contractuels, que beaucoup jugent excessif – ; généralisation de l’expérimentation du primo-recrutement en CDI ; amélioration de la carrière des représentants syndicaux, qui fait l’objet de deux amendements traduisant les avancées intervenues dans les négociations depuis 2013 ; clarification des règles de validité des accords, sujet également d’une actualité brûlante…
Une partie du projet de loi procède de la décision du Premier ministre d’appliquer le protocole que j’ai eu l’honneur de discuter avec l’ensemble des organisations syndicales – le texte n’ayant pas obtenu la majorité, il ne s’agit pas d’un accord. Les points qui ont réuni une quasi-unanimité sont ainsi inscrits dans le texte : mobilité, commissions, transformation des primes en points – laquelle constitue un premier pas vers un transfert de l’indemnitaire sur l’indiciaire, qui est une très ancienne revendication des fonctionnaires.
La loi, une fois votée, donnera lieu à de nombreux décrets relatifs aux modifications des statuts des corps concernés, aux carrières et aux indices.
Je vous remercie, monsieur le président, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés, pour votre attention.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. S’agissant des amendements, madame la ministre, je précise que la majorité de la commission des Lois – je ne peux parler pour l’opposition, absente aujourd’hui – a souhaité attirer l’attention du Gouvernement sur le fait que la Commission devait être en mesure de jouer pleinement son rôle. Il ne s’agit pas pour nous d’empêcher le Gouvernement de déposer des amendements, mais seulement de l’inviter à le faire en temps utile afin qu’ils puissent recueillir l’avis expert du rapporteur et être soumis à une fructueuse discussion collective en commission. Ainsi, nous porterons ensemble la loi que vous venez de nous présenter avec justesse. En revanche, tout amendement déposé après l’examen en commission aurait du mal à se faire adopter…
Mme Françoise Descamps-Crosnier, rapporteure. Monsieur le Président, madame la ministre, mes chers collègues, je n’ai pas besoin, après la présentation de Mme la ministre, de revenir en détail sur le contenu du projet de loi. Je préfère concentrer mon propos sur quelques considérations générales, avant de poser plusieurs questions précises.
Auparavant, une remarque sur la procédure : il était temps que ce projet de loi soit inscrit à l'ordre du jour !
D’abord parce que c'est le premier texte de la législature – et peut-être le dernier – portant sur la fonction publique.
Ensuite parce que ce projet de loi a été déposé en juillet 2013, c’est-à-dire il y a plus de deux ans, à un moment où les lois sur la transparence de la vie publique n'étaient pas encore définitivement adoptées. Depuis lors, la rapporteure que je suis a procédé à de nombreuses auditions et consultations, mais sans que la discussion parlementaire puisse s'engager sur ce texte.
Enfin, parce que de nombreuses contributions au débat national sur la fonction publique, ces dernières années, ont malheureusement eu tendance à adopter un parti pris qui n'a pas permis un débat honnête et serein. Les fonctionnaires ont été dépeints trop souvent d'une manière qui ne reflète en rien la qualité de notre fonction publique, ni le dévouement au service de l'intérêt général des femmes et des hommes qui la composent. Il y a lieu de moderniser le statut dont nous avons fêté les trente ans en 2013, et dont les dernières réformes ont écorné la conception traditionnelle que la France se fait de sa fonction publique. Nous engageons ce travail et je souhaite, comme le Gouvernement, qu'il se fasse dans l'honnêteté intellectuelle et la sincérité.
Je me réjouis donc que nous abordions enfin la discussion de ce projet de loi, même si son inscription à l'ordre du jour s'est faite au prix d'une réduction de son volume, la lettre rectificative du 17 juin 2015 s’accompagnant de nombreux renvois à des ordonnances. Il faut que le Parlement exerce sa compétence dans toute sa plénitude, et le choix opéré par le Gouvernement d'une très large habilitation me paraît discutable. Pour cette raison, je vous proposerai tout à l'heure des amendements visant à réintégrer, dans une version actualisée, la majeure partie des dispositions figurant dans la version initiale du projet de loi et à supprimer les renvois correspondants aux ordonnances. Il s'agit de dispositions relatives, d'une part, à la déontologie des juridictions administratives et financières et, d'autre part, à diverses règles statutaires concernant les membres de ces mêmes juridictions ainsi qu’à la mobilité des fonctionnaires de manière générale.
Sur le fond, la philosophie générale de ce texte est connue : il s'agit de rénover les conditions de l'action publique, en modernisant le statut général des fonctionnaires.
Un important volet du texte est consacré à la réaffirmation des exigences déontologiques incombant aux fonctionnaires. Contrairement à certaines présentations, cette question n'a rien d'inédite : tout agent public doit, au quotidien, faire face à des obligations spécifiques, inhérentes à l'exercice de fonctions au nom de l'intérêt général et au service des usagers. Le projet de loi en prend acte, en introduisant explicitement dans le statut général une série d'outils qui permettront de consolider et de développer la culture déontologique au sein de la fonction publique : énumération des obligations des agents publics, prévention et traitement des conflits d'intérêts, instauration de référents déontologues, protection des lanceurs d'alerte, mise en place de déclarations d'intérêts et de déclarations de situation patrimoniale, redéfinition des possibilités de cumul d'activités, renforcement du contrôle du « pantouflage » dans le secteur privé, etc.
Il s'agit aussi – je veux ici le dire très clairement – de réaffirmer à l’intention des citoyens français, des usagers du service public, la qualité de notre fonction publique et l'exigence de son cadre d'action. C'est particulièrement important dans un contexte de très forte évolution des organisations et d'attentes toujours plus grandes de nos concitoyens vis-à-vis des services publics.
S’agissant de la déontologie, je souhaiterais vous interroger, madame la ministre, sur plusieurs points.
La définition du périmètre des agents qui seront tenus de déclarer leurs intérêts et leur patrimoine est renvoyée à des décrets en Conseil d'État. Pouvez-vous nous éclairer sur ce point et sur le choix qui consiste, je crois, à retenir un périmètre plus large pour les déclarations d'intérêts et un champ plus restreint pour les déclarations de patrimoine ? Quels seront respectivement les agents concernés ?
La répartition des compétences entre la commission de déontologie de la fonction publique (CDFP) et la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) soulève plusieurs interrogations. Le choix de confier à la Haute Autorité l'ensemble des déclarations de patrimoine va dans le bon sens, même s'il ne s'accompagne pas de moyens de contrôle suffisants : je vous proposerai des amendements visant à y remédier. Le projet de loi organise un nouveau système qui a pour ambition d'assurer une diffusion aussi large que possible de la culture déontologique dans nos administrations. La prévention des conflits d'intérêts est au cœur de cette approche. La commission de déontologie se voit confier un rôle beaucoup plus important qu'aujourd'hui : elle devient l'institution de référence en matière de déontologie et de prévention des conflits d'intérêts, notamment grâce à de nouvelles missions, dont l'examen des déclarations d'intérêts. Disposera-t-elle bien des moyens nécessaires pour prendre toute la mesure de cette dernière mission ?
À défaut de parvenir à une répartition totalement satisfaisante des compétences, laquelle ne pourrait être atteinte qu'au prix d'une fusion des deux organes de contrôle, il me semble indispensable que la commission de déontologie et la Haute Autorité puissent collaborer étroitement. Je vous proposerai un amendement en ce sens, afin de leur permettre d'échanger des informations en les déliant mutuellement du secret professionnel. Qu'en pensez-vous ?
Une innovation importante apportée par la lettre rectificative de juin dernier est l'instauration de référents déontologues. Par ce biais, c'est un véritable droit au conseil déontologique qui est créé pour les agents. Les référents seront, en raison de leur rôle de conseil de proximité, au cœur même de l'ambition de diffusion de la culture déontologique. Le cadre juridique proposé par le Gouvernement en ce qui les concerne est très ouvert : comment envisagez-vous leur fonctionnement ?
Dernière question sur la déontologie : le resserrement des possibilités de cumul d'activités suscite certaines inquiétudes, aussi bien chez les agents eux-mêmes que chez ceux qui réfléchissent aux évolutions de la fonction publique. Pour ma part, je regrette que nous ne disposions que de très peu de chiffres en la matière ; ils permettraient un examen objectif et donc plus serein de la situation. Pour ne citer que quelques exemples : combien de fonctionnaires sont devenus auto-entrepreneurs ces dernières années ? Les tendances récentes sont-elles à la hausse ou à la baisse ? Combien d'agents, dans les trois fonctions publiques, exercent des activités à titre accessoire ? Y a-t-il eu beaucoup de pratiques abusives ces dernières années, comme le suggère – mais sans réellement l'étayer – l'étude d'impact du projet de loi ? Il m'apparaît essentiel, tout en approuvant les principes que vous nous proposez d'adopter, madame la ministre, de nous assurer que nous ne déstabilisons pas, sans le vouloir, le cadre juridique qui accompagne des pratiques tout à fait acceptables du point de vue de la déontologie, notamment en ce qui concerne les catégories d'agents les plus modestes. C'est le souci qui animera, je le sais, certains membres de cette commission.
Toutefois la déontologie est loin d'être le seul objet du projet de loi, qui a une portée bien plus large : le texte propose plusieurs avancées statutaires importantes que je tiens à souligner.
C'est le cas de l'amélioration de la situation des agents non titulaires, notamment par le meilleur encadrement du recours au contrat et par une meilleure prise en compte de leur ancienneté. C'est le cas aussi grâce à l'extension de la protection fonctionnelle des agents et de leurs familles. Ce texte instaure aussi des mesures concrètes d'amélioration des garanties des agents en matière disciplinaire, avec l'instauration d'un délai de prescription alors que l'imprescriptibilité de l'action disciplinaire était jusqu'à présent la règle.
Ce texte réforme en outre le Conseil commun de la fonction publique.
Sans doute s'enrichira-t-il d'autres dispositions au cours de nos débats pour tenir compte des discussions et des négociations entre les employeurs publics et les organisations syndicales représentant les fonctionnaires.
Je souhaite vous soumettre plusieurs questions relatives aux droits et obligations des fonctionnaires.
S'agissant de la protection fonctionnelle, sait-on si son coût est constant, en augmentation ou en diminution ? La protection fonctionnelle étendue aux ayants droit est déjà la norme pour certaines catégories de fonctionnaires : est-elle très utilisée ?
S'agissant de la prescription disciplinaire, je vous proposerai un amendement permettant de préciser le délai à compter duquel la prescription commence à courir. Il me semble que la date à laquelle l'administration établit la matérialité des faits passibles de sanction est plus précise et plus protectrice pour les parties, car elle incite l'administration à établir la matérialité des faits avant d'engager une procédure disciplinaire. Par ailleurs, elle ne présuppose pas de mener systématiquement une enquête administrative quand les faits passibles de sanction sont avérés. Qu'en pensez-vous ?
S'agissant des sanctions disciplinaires : vous savez que de nombreuses collectivités territoriales sont attachées à la classification au sein des sanctions du premier groupe de l'exclusion temporaire pour une durée maximale de trois jours. Pourriez-vous nous indiquer les raisons qui ont fondé votre choix d'harmoniser les échelles de sanctions entre la fonction publique de l'État et la fonction publique hospitalière, plutôt qu’avec la fonction publique territoriale ?
Mes chers collègues, à travers ce projet de loi, nous allons essentiellement parler de l'action publique et de l'idée que nous nous en faisons. Ce texte important a pour ambition de contribuer à restaurer la confiance des citoyens dans la puissance publique. Loin de se limiter aux fonctionnaires et au seul champ de la fonction publique, il porte un enjeu essentiel : la crédibilité de l'action publique et donc de la République. C'est encore une belle mission qui attend notre commission aujourd'hui.
Mme la ministre. Mme la rapporteure a souligné que le projet de loi renvoyait trop largement à des ordonnances. Nous avons eu plusieurs échanges sur ce point et le Gouvernement émettra un avis favorable à plusieurs de ses amendements visant à revenir sur ces demandes d’habilitation, tout en respectant l’objectif commun que nous nous sommes fixé : disposer d’un texte concis, précis et lisible.
Mme la rapporteure a par ailleurs salué plusieurs évolutions du texte et je m’en réjouis car son avis est éclairé. Je tiens d’ailleurs ici à la remercier car, grâce au travail aussi intense que précis qu’elle a mené, nous avons pu réécrire certaines dispositions
S’agissant de la Haute Autorité, il est vrai que l’articulation avec la commission de déontologie donne une impression de frottement. Pour ce qui est des transmissions entre les deux instances, nous sommes prêts à accepter des évolutions. Le Gouvernement émettra ainsi un avis favorable à l’amendement, très bien rédigé, de Mme Descamps-Crosnier sur ce sujet.
Nous nous sommes longuement interrogés sur l’opportunité de conserver une commission de déontologie et avons finalement décidé de ne pas la supprimer. Il est important que cette commission joue en amont un rôle de conseil pour les agents eux-mêmes, pour les directeurs de ressources humaines et toute la hiérarchie. J’entends la remarque sur ses moyens. Nous nous sommes engagés à ce qu’elle en dispose. Il m’est apparu en outre, en discutant avec le président de la Haute Autorité, que conserver la commission de déontologie était aussi un moyen de ne pas encombrer cette instance. Elle agira comme un filtre, en amont, pour les dossiers susceptibles d’être soumis ensuite à la Haute Autorité.
Cela dit, nous avons veillé à ce que la commission de déontologie agisse en toute légitimité : composée de personnalités indépendantes, elle émet un avis collégial. Elle jouera un rôle fondamental pour diffuser les règles de bonne conduite à l’intérieur de la fonction publique, qui, rappelons-le, se compose de millions de personnes, réparties sur l’ensemble du territoire. Il est important que cette commission puisse être un relais entre les personnels, les directeurs des ressources humaines, les chefs de service. Son action sera d’autant plus importante que nous entendons renforcer le rôle de ces derniers en matière de prévention des conflits d’intérêts car ce sont eux qui se situent en première ligne. Ils pourront bénéficier de conseils et d’éclairages juridiques pour donner des instructions déontologiques aux agents placés sous leur autorité hiérarchique, mais aussi s’appuyer sur les référents déontologues, dont vous avez salué la création.
Sans doute devrons-nous revenir sur le fonctionnement conjoint de la commission de déontologie et de la Haute Autorité. Nous avons déjà établi une architecture où la haute fonction publique relèvera de la Haute Autorité, notamment pour assurer un lien entre déclarations d’intérêts et déclarations de situation patrimoniale.
Les déclarations d’intérêts concerneront plus particulièrement les agents présentant un risque de conflits d’intérêts du fait de leurs fonctions, qu’elles soient liées aux marchés publics, aux subventions ou aux agréments.
Les déclarations de situation patrimoniale s’appliqueront à un nombre restreint d’agents : il s’agira de ceux qui sont en contact direct avec le monde économique et qui sont susceptibles de quitter la fonction publique pour le secteur privé, ou qui peuvent tirer des bénéfices des relations qu’ils ont nouées.
Si le nombre d’agents concernés par ces deux types de déclaration diffère, c’est que les risques ne sont pas les mêmes. Eu égard au très grand nombre de collectivités territoriales, un marché public peut être entaché d’irrégularités même dans les plus petites d’entre elles. À cet égard, je salue le fait que beaucoup d’élus attentifs à nos travaux nous demandent de multiplier les contrôles sur les marchés publics. Ceux-ci constituent en effet le plus important fait générateur de doutes sur la probité de l’action publique. Et quand existent de tels doutes, il y a déstabilisation de la nation.
Madame la rapporteure, nous donnerons un avis favorable à tous vos amendements de très grande qualité portant sur ce volet.
Vous m’avez demandé ensuite si la protection fonctionnelle était très utilisée. Les chiffres sont en réalité très variables : les magistrats et les policiers demandent certaines années plus que d’autres à bénéficier de cette protection – vous vous souvenez de l’affaire de Cherbourg. En ce qui concerne la fonction publique d’État, j’ai demandé à ce que l’ensemble des secrétaires généraux des ministères soient interrogés à ce propos d’ici à l’examen du texte en séance publique.
Aujourd’hui, cette protection fonctionnelle est insuffisamment encadrée. C’est seulement à la suite d’interventions de parlementaires auprès de ministres ou de responsables d’administration centrale que certains fonctionnaires ont pu en bénéficier ; personne ne leur en avait parlé auparavant. Le projet entraînera certainement une hausse du recours à cette procédure. Cependant, j’estime que les coûts seront à peu près inchangés. Il est de toute façon difficile de disposer de prévisions justes en ce domaine.
Il ne faut pas oublier qu’il y a une forme d’inquiétude chez les fonctionnaires face aux actions engagées à l’encontre de certains d’entre eux, et qui sont relayées par les médias, même si celles-ci ont fort heureusement, dans la plupart des cas, une issue favorable. Ils seront sans doute satisfaits par les nouvelles dispositions que nous proposons.
Vous avez enfin abordé le difficile sujet du point de départ du délai de prescription. Celui-ci requiert, vous avez raison, une approche très fine, et votre amendement me paraît proposer une bonne solution.
Enfin, vous avez insisté pour que le principe de l’exclusion temporaire d’une durée maximale de trois jours s’applique aux trois fonctions publiques. Vos travaux montrent que c’est sans doute, là encore, une bonne solution.
Mme Cécile Untermaier. Mes chers collègues, je tiens d’abord à féliciter notre rapporteure pour l’excellent travail qu’elle a effectué et à remercier Mme la ministre pour la présentation de cet important projet de loi dont nous avons souvent parlé depuis deux ans.
Le texte déposé en juillet 2013, à la date anniversaire des trente ans de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, a connu quelques rebondissements puisqu’il a été modifié, en juin 2015, par une lettre rectificative réduisant le nombre de ses articles de cinquante-neuf à vingt-cinq et d’un engagement de la procédure accélérée. Nous devons à notre président Jean-Jacques Urvoas d’avoir obtenu une date d’examen nous permettant un temps de travail suffisant en amont. Il est important de le souligner, car ce texte est important pour nous.
Le projet de loi ne remet pas en cause le statut général des fonctionnaires ni notre système de fonction publique, cadre le plus adapté pour garantir la continuité et la cohésion au service des collectivités publiques et des citoyens. Il réaffirme les valeurs guidant l’action publique, consacre l’exigence d’exemplarité des fonctionnaires, conforte l’unité du statut général et renforce les règles déontologiques s’appliquant aux agents publics.
Il s’inscrit bien dans la suite de la grande loi sur la transparence de la vie publique. Certains de ses articles sont d’ailleurs la réplique de ceux adoptés dans ladite loi.
Je ferai trois brèves remarques.
Premièrement, la jurisprudence administrative a depuis longtemps dégagé des obligations s’imposant aux fonctionnaires, telles que l’impartialité, l’intégrité, la probité, la dignité. Les principes généraux du droit se retrouvent aussi dans la présente loi aux côtés des principes constitutionnels de neutralité et de laïcité. Les agents publics connaissent ces règles de conduite et s’y conforment pour satisfaire l’intérêt général et l’exigence de service public.
Il est cependant essentiel d’asseoir les textes déontologiques sur un fondement législatif, comme le propose cette loi, et de sortir du « droit mou » qui caractérise trop souvent la déontologie. Nous devrions d’ailleurs ajouter à ces règles, ici rappelées aux fonctionnaires, l’obligation de réserve, dont l’absence est surprenante.
Le dispositif de la déclaration de patrimoine et de la déclaration d’intérêts, d’ores et déjà opérationnel pour les élus et les membres du Gouvernement, est largement étendu par ce texte. Au contraire de ce qui s’est passé pour la loi sur la transparence de la vie publique, nous ne disposons pas de la liste des postes ou emplois soumis à ces déclarations. Il est bien sûr difficile de dresser une telle liste dans la loi ; pourriez-vous néanmoins, madame la ministre, nous éclairer sur le contenu du futur décret d’application ? Quel sera le périmètre retenu, tant pour la déclaration de patrimoine que pour la déclaration d’intérêts ?
La question de la transmission de la déclaration d’intérêts à la commission de déontologie plutôt qu’à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique fait débat : nous y reviendrons certainement.
Quant aux ordonnances prévues par le texte, notre rapporteure a raison de demander le rétablissement de certaines dispositions dans la loi. Nous vous remercions, madame la ministre, d’en avoir convenu. Ces mesures figuraient d’ailleurs dans le texte initial. Ce projet de loi est emblématique pour la prévention du conflit d’intérêts : il serait donc très mal venu de confier l’examen de ces dispositions au seul Gouvernement, en lien avec le Conseil d’État et la Cour des comptes.
Nous nous posons de nombreuses questions sur le partage des tâches entre la commission de déontologie et la Haute Autorité. Ainsi, les modalités de la lutte contre le pantouflage ont suscité des débats au sein de notre groupe : nous nous réjouissons de ces dispositions, dont nous souhaitons qu’elles soient efficacement appliquées ; certains souhaitent toutefois que cette surveillance soit exercée par la Haute Autorité. Des amendements ont été déposés en ce sens et je me permets, madame la ministre, d’appeler votre attention sur ce point. Vos explications seront bienvenues.
De même, la loi, je l’ai dit, ne précise pas le périmètre de ceux qui devront faire une déclaration d’intérêts : ce point est pourtant essentiel pour apprécier si ces déclarations doivent être transmises à la commission de déontologie ou à la Haute Autorité. Notre groupe considère qu’une position médiane pourrait être que la Haute Autorité reçoive les déclarations d’intérêts posant problème au supérieur hiérarchique en charge de leur examen.
Le projet de loi modernise largement la fonction publique et résout des situations difficiles en assurant des droits nouveaux. Il simplifie et facilite le cumul d’activités, ce qui fera également débat.
Le groupe socialiste, républicain et citoyen soutient ce texte exigeant, important, et propre à conforter l’exemplarité et l’unité du statut de la fonction publique.
M. Marc Dolez. Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine déplore le recours à la procédure accélérée, qui va nous priver sur un sujet crucial d’un débat approfondi – procédure d’autant moins justifiée que la première version du projet de loi avait été déposée il y a plus de deux ans.
Ce texte comporte des dispositions positives : je pense à celles relatives à la prévention du conflit d’intérêts, à la protection des lanceurs d’alerte, à l’amélioration de la situation des agents contractuels.
En revanche, nous sommes dubitatifs sur l’article 1er. La jurisprudence en la matière est étoffée : quelle sera la valeur ajoutée de cet article ? Il nous paraîtrait plus opportun de réaffirmer les valeurs et les principes du service public et de la fonction publique.
Nous déplorons nous aussi le recours aux ordonnances sur des points majeurs du texte, où des réformes sont très attendues des agents. Je prends acte avec satisfaction des déclarations de Mme la ministre indiquant qu’elle était favorable à la réintégration de ces dispositions dans le texte.
Nous regrettons enfin que ce texte ne revienne pas sur les atteintes au statut de la fonction publique accumulées depuis trente ans. Je pense notamment à la « loi Galland » du 13 juillet 1987 modifiant les dispositions relatives à la fonction publique territoriale, et à la règle du trentième indivisible en cas de grève, dite « amendement Lamassoure ».
À ce stade, vous l’avez compris, notre groupe porte sur ce texte une appréciation en demi-teinte.
M. Pascal Popelin. Eh bien, je vais essayer de lui redonner de la couleur ! (Sourires.)
Le service public est l’un des murs porteurs de notre République. Les femmes et les hommes qui en sont chargés sont les dépositaires de valeurs et de principes ; ils garantissent les droits et les libertés, nous protègent de l’arbitraire. Neutralité, impartialité, probité, laïcité : ce sont les valeurs qui doivent inspirer l’action de tout détenteur d’un emploi public. C’est bien sûr l’affaire de chacun ; il revient néanmoins au législateur de fixer un cadre.
La jurisprudence n’a cessé de conforter ces principes, en particulier depuis la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Le texte que nous examinons les consacre.
Il fait également progresser le droit, notamment dans le domaine de la lutte contre les conflits d’intérêts, suivant les exigences définies par la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique. Il s’agit là d’un prolongement cohérent et nécessaire, conforme aux aspirations de nos concitoyens, qui attendent des agents publics qu’ils soient exemplaires.
Les fonctionnaires sont régulièrement décriés parce qu’ils disposeraient d’avantages dispendieux et exorbitants – peut-être faut-il voir là la raison de l’étonnante désertion, ce matin, de nos collègues du groupe Les Républicains. Mais il faut rappeler qu’un agent du service public, c’est, entre autres, un policier qui nous protège, un professionnel de santé qui nous soigne, un professeur qui éduque nos enfants. L’exercice de ces missions expose à des risques divers, pouvant aller jusqu’à la mise en danger de l’intégrité physique – on pense immédiatement aux policiers, mais l’agent d’une municipalité présent à un guichet est hélas de plus en plus souvent concerné.
Les fonctionnaires ont aussi des droits, et ce texte les renforce : je pense notamment aux dispositions sur le renforcement de la protection fonctionnelle des agents et de leur famille.
Pour toutes ces raisons, je soutiens ce texte, tout en approuvant les quelques réserves exprimées par Mme Untermaier.
M. Paul Molac. Le groupe écologiste estime que ce projet de loi va globalement dans le bon sens, en proposant diverses mesures pour améliorer le statut des fonctionnaires, clarifier leurs obligations et favoriser la titularisation, dans le prolongement de la « loi Sauvadet ».
Nous regrettons toutefois les conditions d’étude du texte ; en particulier, nous n’aurons que très peu de temps pour déposer des amendements pour la séance publique.
Certaines ordonnances prévues par le Gouvernement nous semblent porter sur des domaines dans lesquels une discussion parlementaire est nécessaire : nous saluons donc la volonté de Mme la rapporteure d’intégrer ces dispositions dans la loi.
L’article 3 crée un statut de lanceur d’alerte pour les fonctionnaires qui auraient connaissance d’un conflit d’intérêts. C’est cohérent, l’article 40 du code de procédure pénale faisant obligation à tout fonctionnaire de dénoncer une infraction dont il a connaissance. Il existe plusieurs statuts de lanceur d’alerte, ce qui paraît logique : alerter de l’existence d’un risque environnemental n’est pas la même chose qu’avoir connaissance d’une infraction pénale. Toutefois, les différences entre ces statuts devraient être clarifiées ; il est nécessaire d’apporter plus de cohérence.
Nous souhaitons également améliorer le partage des tâches entre la commission de déontologie et la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Certains fonctionnaires devront envoyer une déclaration d’intérêts à l’une et une déclaration de patrimoine à l’autre : cela nous semble assez incohérent. Plusieurs d’entre nous ont déposé des amendements sur ces points, mais tous n’ont pas passé les fourches caudines de l’article 40 de la Constitution : heureusement, nous pourrons débattre de ceux de Mme la rapporteure, que pour notre part nous soutiendrons.
Enfin, en liaison avec les syndicats, nous avons déposé des amendements portant sur la gestion des conflits disciplinaires.
Mme la ministre. Merci de ces interventions.
Nous avons très longuement, très minutieusement débattu avec les organisations syndicales de l’article 1er. Notre objectif partagé était bien de conforter, au XXIe siècle, le statut de la fonction publique – nous avions souhaité le réviser depuis 2013 pour des raisons évidentes sur lesquelles je ne reviens pas. J’entends vos réticences, monsieur Dolez, qui sont d’ailleurs partagées par certains. J’espère, très franchement, que nous avons trouvé un juste équilibre.
Je ne ferai pas de commentaires sur la procédure. Quant aux ordonnances, en bonne intelligence avec Mme la rapporteure, nous serons, je le redis, favorables à un certain nombre d’amendements qui en réduiront le périmètre.
Le partage des tâches entre la commission de déontologie et la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique est un sujet difficile, qui est revenu plusieurs fois. La citoyenne que je suis et la ministre que je suis également ont eu d’ailleurs des débats nourris sur ce thème… Ceux qui occupent des emplois qui sont à la discrétion du Gouvernement, les collaborateurs du Président de la République, des cabinets ministériels ou des autorités territoriales fourniront leur déclaration d’intérêts à la Haute Autorité : nous nous situons là dans la continuité de la loi du 11 octobre 2013. En revanche, quelque 20 000 déclarations d’intérêts concernent des agents qui occupent des fonctions sensibles – ceux qui ont à traiter d’adjudications de marchés publics, à octroyer des subventions, des agréments… C’est une mesure importante, forte ! Nous allons fermer la porte aux doutes qui s’expriment depuis trop longtemps. Mais nous ne pouvons pas étouffer la Haute Autorité en lui confiant la vérification de toutes ces déclarations.
Ce débat n’est pas simple. Il concerne aussi le fonctionnement de la Haute Autorité. Nous restons dans l’esprit de la loi de 2013. Il nous faudra aussi soutenir les chefs de service, les directeurs des ressources humaines, les personnels des plus petites communautés de communes – auxquelles je pense beaucoup. La commission de déontologie pourra, je crois, effectuer un travail important.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous avons choisi ce partage des tâches. Nous y reviendrons à la faveur de la discussion des amendements.
La Commission en vient à l’examen des articles.
TITRE IER
DE LA DÉONTOLOGIE
Chapitre 1er
De la déontologie et de la prévention des conflits d’intérêts
Article 1er (chapitre IV et art. 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) : Obligations générales des fonctionnaires
La Commission est saisie des amendements CL31 et CL27 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.
Mme Anne-Yvonne Le Dain. Le premier de ces amendements tend à introduire dès le premier article de la loi le terme même de déontologie. Ces deux amendements visent également à inscrire parmi les devoirs du fonctionnaire la notion de « réserve », qui vaut y compris hors des horaires de service. C’est une notion élégante et forte, déjà appliquée au demeurant par les agents publics : ils ne se répandent pas partout pour se plaindre de la loi ou de leurs fonctions. La loi doit honorer la fonction publique en réaffirmant ce point.
Mme la rapporteure. Avis défavorable. La rédaction proposée n’est pas, me semble-t-il, nécessairement meilleure que celle du projet de loi, dans la mesure où le titre du nouveau chapitre IV du statut général devrait devenir « Des obligations et de la déontologie » : il faut éviter d’assimiler entièrement ces deux notions l’une à l’autre.
En outre, en faisant référence, à l’article 2, aux « principes déontologiques inhérents à l’exercice d’une fonction publique », nous laissons volontairement place à l’interprétation – par la pratique et la jurisprudence : ces principes ne s’épuisent pas forcément dans l’énumération dressée par Mme Le Dain.
D’autre part, ces amendements visent à mentionner le devoir de réserve parmi les obligations des fonctionnaires. L’obligation de réserve fait déjà partie des obligations applicables aux fonctionnaires, la jurisprudence administrative étant très abondante sur ce point. Il a été envisagé, un temps, de la consacrer dans le projet de loi, mais cela n’a pas paru opportun, la portée de cette obligation étant très variable selon les fonctions de l’agent, son rang hiérarchique, les circonstances... Il a donc paru préférable de s’en remettre à la jurisprudence. J’ajoute que le statut général comporte déjà les obligations de secret professionnel et de discrétion professionnelle, qui ne sont pas sans lien avec le devoir de réserve.
En tout état de cause, s’il fallait adopter une disposition sur cette question, il faudrait travailler à une meilleure rédaction.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Les passionnés du droit administratif sauront rappeler ici que le Conseil d’État s’était déjà, en 1935, penché sur le devoir de réserve, avec l’arrêt Bouzanquet.
Mme la ministre. Dans le droit fil des propos de Mme la rapporteure, j’émets un avis défavorable à l’amendement CL31 et m’en remets à la sagesse de la Commission sur l’amendement CL27.
Les obligations déontologiques ne s’imposent pas aux agents seulement lorsqu’ils exercent une mission : l’obligation de dignité, par exemple, qui a été longuement discutée, s’impose même en dehors des heures de service. La rédaction actuelle nous paraît plus satisfaisante : elle est plus simple d’interprétation et met toutes les obligations sur un même rang.
Quant au devoir de réserve, c’est un sujet crucial. La jurisprudence est d’une très grande qualité. Bien sûr, une nouvelle jurisprudence, fondée sur une nouvelle rédaction, serait sans doute excellente aussi. Mais prenons l’exemple d’un enseignant qui se trouve en désaccord avec le Gouvernement sur la réforme du collège.
M. Marc Dolez. Il a raison ! (Sourires.)
Mme la ministre. En quoi consiste, dans le cas de cet enseignant, l’obligation de réserve ? C’est très difficile à définir. Les organisations syndicales craignent que l’on ne puisse pas faire mieux que la jurisprudence pour faire le départ entre l’obligation de réserve et l’expression d’un fonctionnaire qui est aussi un citoyen.
Le Gouvernement préférerait donc que nous nous en tenions à cette jurisprudence.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Je ne comprends pas l’avis de sagesse du Gouvernement sur l’amendement CL27. En effet, il ne me paraît pas du tout opportun d’écrire que le fonctionnaire exerce ses fonctions « avec réserve » ! L’obligation de réserve, ce n’est pas cela ! Quant à la jurisprudence, elle est abondante, bien sûr, mais elle ne peut que l’être au vu de l’extrême diversité des situations. Je propose, avec tout le respect que j’ai pour ma collègue, que nous n’adoptions pas ces amendements.
Mme la ministre. Vous n’avez pas tort.
Mme Anne-Yvonne Le Dain. J’entends bien la profondeur des arguments. J’entends également qu’il existe sur l’obligation de réserve une jurisprudence de grande qualité. Je m’étonne toutefois que nous choisissions de nous y référer plutôt que de la consacrer dans la loi. Je retire mes amendements, mais les réécrirai en vue de la séance publique.
Les amendements CL31 et CL27 sont retirés.
La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL145 de la rapporteure.
Puis elle adopte l’article 1er modifié.
Article 2 (art. 25 bis [nouveau] de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) : Conflits d’intérêts des fonctionnaires
L’amendement CL37 de Mme Anne-Yvonne Le Dain est retiré.
La Commission examine l’amendement CL38 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.
Mme Anne-Yvonne Le Dain. La formule « veille à faire cesser » me paraît floue : écrire qu’un fonctionnaire est « tenu de faire cesser » les conflits d’intérêts lèverait l’ambiguïté. Cette formulation plus impérative crée un devoir d’expression interne, voire d’alerte : cela peut libérer la parole à l’intérieur des services. Cela vaut pour chaque agent, quelle que soit sa place dans la hiérarchie. Dans un monde où chacun est de plus en plus conscient, formé, informé, il convient que chacun prenne ses responsabilités et s’exprime.
Mme la rapporteure. Cette modification me paraîtrait sémantique, les deux formulations ayant le même sens. Il est préférable de conserver la rédaction actuelle, par souci de parallélisme avec la loi du 11 octobre 2013, qui prévoit que les membres du Gouvernement, les élus locaux et les personnes chargées d’une mission de service public « veillent à prévenir ou à faire cesser immédiatement tout conflit d’intérêts ».
Avis défavorable.
La Commission rejette l’amendement.
Elle se penche ensuite sur l’amendement CL14 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Cet amendement vise à rappeler que la lutte contre les conflits d’intérêts doit avant tout être préventive.
Mme la rapporteure. Avis défavorable. L’enjeu de la prévention apparaît déjà dans le texte, aux termes duquel un fonctionnaire « veille à faire cesser immédiatement ou à prévenir les situations de conflit d’intérêts dans lesquelles il se trouve ou pourrait se trouver ». Il est préférable d’en rester à la rédaction actuelle afin d’éviter de perturber à l’excès le fonctionnement quotidien des services.
L’amendement est retiré.
La Commission est saisie de l’amendement CL40 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.
Mme Anne-Yvonne Le Dain. Cet amendement tend à préciser qu’un fonctionnaire placé en situation de conflit d’intérêts saisit son supérieur hiérarchique par écrit. Cela rassurerait tout le monde. Les paroles verbales ne sont entendues que par ceux qui veulent bien les entendre !
Mme la rapporteure. Avis défavorable. Il s’agit là d’une précision d’ordre réglementaire. Il est préférable de conserver la rédaction actuelle, qui est aussi celle de la loi du 11 octobre 2013 : c’est bien le décret d’application de cette loi qui prévoit aujourd’hui que la procédure se fait par écrit.
Mme la ministre. Même avis.
La Commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL146 de la rapporteure.
Elle adopte enfin l’article 2 modifié.
Article 3 (art. 6, 6 bis, 6 ter A, 6 ter, 6 quinquies et 25 ter [nouveau] de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) : Protection des fonctionnaires lanceurs d’alerte éthique
La Commission examine l’amendement CL15 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Cet amendement vise à préciser la protection des lanceurs d’alerte, notamment pour ceux qui ne seraient pas des agents titulaires – l’extension à cette catégorie du régime de protection des lanceurs d’alerte est prévue par l’article 14 du projet de loi.
Différents cas de figure – la mutation, le licenciement, le reclassement, la qualification, la classification, l’interruption ou le non-renouvellement de contrat – ne sont pas prévus par le texte, contrairement à d’autres statuts de lanceurs d’alerte.
Mme la rapporteure. Je vous propose de retirer cet amendement. Je défendrai en effet tout à l’heure, à l’article 14, le sous-amendement CL248 aux termes duquel un décret dressera la liste de toutes les mesures spécifiques aux agents contractuels qui sont interdites à l’encontre d’un lanceur d’alerte.
L’amendement est retiré.
La Commission examine ensuite l’amendement CL147 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement vise à préciser que les futurs « référents déontologues » sont susceptibles de recevoir une « alerte éthique » lancée par un fonctionnaire ayant connaissance d’une situation de conflit d’intérêts.
Mme la ministre. C’est une bonne idée. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL149 de la rapporteure.
Elle examine ensuite l’amendement CL16 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Rien ne justifie qu’un fonctionnaire puisse être sanctionné pour avoir témoigné de « faits susceptibles d’être qualifiés de conflits d’intérêts » sous prétexte qu’il aurait eu connaissance de ces faits en dehors de l’exercice de ses fonctions. C’est même contraire à l’objectif de protection des lanceurs d’alerte. Cette restriction ne figure pas dans d’autres statuts de lanceurs d’alerte – ceux de la loi relative au renseignement ou de la loi Le Pors par exemple.
Mme la rapporteure. Nous modifions ici le statut général des fonctionnaires : il est logique que nous parlions de faits de conflits d’intérêts connus dans l’exercice des fonctions de l’agent public. C’est d’ailleurs la même solution qui a été retenue dans la loi du 11 octobre 2013.
La Commission rejette l’amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL150 de la rapporteure.
Elle aborde ensuite l’amendement CL17 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. C’est affaiblir la protection du lanceur d’alerte que de la limiter aux seuls cas où le fonctionnaire aurait d’abord alerté en vain son supérieur hiérarchique : d’une part, parce que le texte ne définit pas la notion d’« alerte vaine » ; d’autre part, parce que cette rédaction ne prend pas en compte les cas où le supérieur hiérarchique est lui-même la raison de l’alerte.
Mme la rapporteure. Je vous propose de retirer votre amendement, en grande partie satisfait par l’amendement CL148 qui suit.
L’amendement est retiré.
Puis la Commission examine l’amendement CL148 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement vise à permettre au lanceur d’alerte de s’adresser préalablement à l’un de ses supérieurs hiérarchiques plutôt qu’à son supérieur direct.
Mme la ministre. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle examine ensuite l’amendement CL86 de Mme Cécile Untermaier.
Mme Françoise Dumas. Cet amendement vise à introduire dans la loi le principe de confidentialité afin de protéger non seulement l’auteur de l’alerte, mais aussi les intérêts ou personnes mises en cause. L’alerte s’applique lorsque les mécanismes internes habituels n’ont pas fonctionné et vise à faire cesser les faits susceptibles de constituer des dysfonctionnements voire, à terme, des infractions pénales. Il s’agit donc, en consacrant ce principe de confidentialité, d’assurer le respect de la distinction entre l’alerte et la délation. La confidentialité, gage de sérénité, nous semble indispensable, le temps que l’on puisse déterminer réellement si ce qui a été signalé méritait bien de l’être. Dans l’intérêt de tous, il importe de consacrer ce principe essentiel à la définition du droit commun de l’éthique. Car si la délation peut nuire, l’alerte peut sauver.
Mme la rapporteure. La rédaction de l’article 3 est calquée sur celle de toutes les lois qui ont mis en place des dispositifs de protection de lanceurs d’alerte. Or, aucun de ces textes ne consacre le principe de confidentialité. Qui plus est, on voit mal comment, en pratique, la confidentialité pourrait être respectée, dans la mesure où il s’agit précisément d’alerter, après avoir saisi en vain l’un de ses supérieurs hiérarchiques. Il faut que l’auteur de l’alerte soit connu afin que sa bonne foi puisse être vérifiée, de même que l’absence d’intention de nuire. Enfin, le Conseil d’État a engagé des travaux relatifs au statut des lanceurs d’alerte. Il conviendrait donc d’attendre la fin de ces travaux pour pouvoir légiférer avec précision.
Mme la ministre. Aucune loi, en effet, n’énonce ce principe de confidentialité, et Mme la rapporteure a raison de rappeler que le Premier ministre, compte tenu des remarques qui ont été formulées et de notre expérience récente, a souhaité consulter le Conseil d’État sur ce sujet et recevoir ses préconisations d’ici à la fin de l’année 2015 afin d’identifier dans tous les textes la teneur précise des mécanismes institués ainsi que leur portée, et de les harmoniser si nécessaire.
Dans l’attente de l’analyse du Conseil d’État, il nous semble préférable de limiter les amendements au projet de loi, le choix du Gouvernement ayant été de reprendre à l’identique, chaque fois que cela se justifie, les dispositions qui figurent dans la loi relative à la transparence de la vie publique. Nous visons ainsi la cohérence et la lisibilité de la loi par nos concitoyens. Je vous invite donc à retirer votre amendement. Si les travaux du Conseil d’État le justifient, nous ferons évoluer la loi dans un texte futur.
Mme Cécile Untermaier. Je vous remercie, madame la ministre, de ces explications qui nous permettent d’envisager le retrait de cet amendement. Nous avons tous, au sein de notre groupe, souscrit aux objectifs des deux lois d’octobre 2013 relatives à la transparence de la vie publique. Mais la situation est différente en l’occurrence, car il s’agit ici de la fonction publique : nous visons l’agent public souhaitant dénoncer un conflit d’intérêts tout en étant entouré de ses collègues, ce qui n’est pas forcément le cas des lanceurs d’alerte dont nous avons eu à connaître ces dernières années. La consécration du principe de confidentialité me semble donc, en l’espèce, un enjeu majeur. Le risque de se retrouver quotidiennement face à la personne sur laquelle on aurait fait peser des doutes peut constituer un frein à l’intention de porter à connaissance un conflit d’intérêts.
Nous entendons que le Conseil d’État travaille sur le sujet. Cela étant, s’il peut nous éclairer, il n’a pas à nous dicter ce que nous devons voter. Nous attendrons l’issue de sa réflexion, mais il eût été intéressant d’en disposer avant l’examen de ce projet de loi en séance publique pour pouvoir dès à présent améliorer le dispositif. Nous retirons notre amendement mais souhaitons que l’on réfléchisse à cette question d’ici au débat dans l’hémicycle.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Sait-on, madame la ministre, quand le Conseil d’État rendra ses travaux ?
Mme la ministre. D’ici à la fin de l’année, mais nous allons essayer d’accélérer les choses. Nous souhaitons, dans cet article, préciser le mode opératoire à suivre en cas de litige : pour ce faire, nous avons pris modèle sur les dispositions des lois relatives à la transparence de la vie publique. J’entends bien les propos qui viennent d’être tenus, mais il est très difficile de définir dans la loi la notion de confidentialité. Il sera toujours nécessaire de vérifier l’origine de l’alerte, ce qu’empêcherait l’application du principe de confidentialité s’il était consacré. C’est du fait de cette complexité, et de vos propositions, que nous avons demandé au Conseil d’État d’étudier la question. En attendant, nul n’est aujourd’hui en mesure d’éclairer le Gouvernement ou votre Commission sur la manière de rédiger des dispositions relatives à la confidentialité tout en faisant en sorte que soient vérifiées l’origine de toute alerte et ses motivations.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Nous attendrons donc l’avis du Conseil d’État.
L’amendement CL86 est retiré.
La Commission en vient à l’amendement CL64 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.
Mme Anne-Yvonne Le Dain. L’article 40 du code de procédure pénale dispose que : « Le procureur de la République reçoit les plaintes et les dénonciations et apprécie la suite à leur donner conformément aux dispositions de l’article 40-1 » du même code, lequel précise que : « Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l’exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d’un crime ou d’un délit est tenu d’en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs. »
Il me semble que l’alinéa 2 de l’article 3 du présent projet de loi vise à protéger les fonctionnaires et à préciser les contours non pas de la protection, mais des actes au titre desquels ils pourront être protégés. Il serait donc pertinent de préciser dans la loi que ce devoir d’information s’ajoute à celui défini à l’article 40 du code de procédure pénale. On soulignerait ainsi que, loin du « deux poids et deux mesures », le projet de loi conforte le droit et renforce la protection des personnes.
Mme la rapporteure. Il est inutile de préciser qu’un lanceur d’alerte peut saisir le parquet : l’article 3 mentionne déjà les autorités judiciaires parmi les destinataires de l’alerte, ce qui inclut naturellement le procureur de la République. L’amendement est donc satisfait. Je précise par ailleurs que tout conflit d’intérêts ne constitue pas nécessairement une infraction pénale. D’où la nécessité, à l’article 3, de distinguer les autorités judiciaires des autorités administratives. Je vous invite donc à retirer votre amendement.
Mme la ministre. Même avis.
Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je ne partage pas votre analyse, mais je retire mon amendement afin de le retravailler d’ici à l’examen du texte en séance publique.
L’amendement CL64 est retiré.
La Commission examine, en discussion commune, l’amendement CL151 de la rapporteure et l’amendement CL18 de M. Paul Molac.
Mme la rapporteure. L’amendement de M. Molac est presque identique au mien, mais ce dernier assure en outre une coordination rédactionnelle.
L’amendement CL18 est retiré.
La Commission adopte l’amendement CL151.
Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels CL153, CL154, CL155 et CL152 de la rapporteure.
Puis elle examine l’amendement CL19 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Il serait contre-productif de créer une nouvelle incrimination dérogatoire à l’article 226-10 du code pénal qui sanctionne la dénonciation calomnieuse, c’est-à-dire la révélation de faits que l’on sait partiellement ou totalement inexacts. Au demeurant, la quasi-totalité des statuts de lanceur d’alerte n’a créé aucun nouveau délit dérogatoire. Nous n’en voyons donc pas ici l’utilité.
Mme la rapporteure. M. Molac a raison de relever que ces dispositions ne figurent pas dans les autres législations protégeant les lanceurs d’alerte, mais il est nécessaire d’éviter les lancements d’alerte fantaisistes, excessifs ou animés par des ressentiments personnels. Il ne s’agit en outre que de la reprise de l’article 25 de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, qui concerne également les lanceurs d’alerte en matière de conflits d’intérêts. Avis défavorable, donc.
La Commission rejette l’amendement.
Elle est saisie de l’amendement CL20 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Cet amendement vise à compléter l’alinéa 5 afin de viser également le licenciement, le reclassement, la qualification, la classification et le non-renouvellement de contrat.
Mme la rapporteure. Mon sous-amendement CL248 à l’article 14 prévoit déjà qu’un décret énumérera toutes les mesures spécifiques aux agents contractuels ne pouvant être prises à l’encontre d’un lanceur d’alerte.
L’amendement est retiré.
La Commission en vient ensuite à l’amendement CL21 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Dans la continuité de l’article 3 qui harmonise plusieurs statuts de lanceurs d’alerte, cet amendement renforce certaines protections liées au statut de lanceur d’alerte : en prévoyant la nullité de l’acte discriminatoire, en supprimant une référence inutile et en visant explicitement le licenciement prononcé contre un lanceur d’alerte dans le domaine de la santé et de l’environnement.
Mme la rapporteure. Je vous invite également à retirer votre amendement au profit de mon sous-amendement CL248 à l’article 14.
L’amendement est retiré.
Puis la Commission adopte l’article 3 modifié.
Article 4 (art. 25 quater, 25 quinquies et 25 sexies [nouveaux] de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) : Obligations déclaratives des fonctionnaires
La Commission examine l’amendement CL28 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Les emplois à la décision du Gouvernement, faisant l’objet d’une nomination en conseil des ministres, qui relèvent du 7° de l’article 11 de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, ne doivent pas échapper à l’obligation de déclaration d’intérêts préalable.
Mme la rapporteure. Pour procéder à une telle extension, il faudrait modifier non pas l’article 4 qui traite du statut général des fonctionnaires, mais la loi du 11 octobre 2013 elle-même. Sur le fond, cette formalité serait très difficile à faire respecter en pratique. En outre, on peut émettre un doute quant à la constitutionnalité d’une telle mesure, en ce qu’elle soumet des nominations relevant du Président de la République à une condition non prévue à l’article 13 de la Constitution.
L’amendement est retiré.
La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL156 de la rapporteure.
Elle examine ensuite l’amendement CL22 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec la rédaction retenue dans la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique.
Mme la rapporteure. Avis favorable à cet amendement qui apporte une précision et constitue une harmonisation.
Mme la ministre. Même avis.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle en vient à l’amendement CL29 de M. Paul Molac.
M. René Dosière. Il nous semblerait pertinent de discuter en même temps de notre amendement CL89, qui a le même objet, et qui risque en outre de devenir sans objet si, entre-temps, l’amendement CL158 de Mme la rapporteure est adopté.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Ces deux amendements CL158 et CL89 seront en discussion commune, ce qui ne nous empêche pas de discuter préalablement de l’amendement CL29, qui ne porte pas sur le même alinéa.
M. Paul Molac. Le projet de loi prévoit, dans sa rédaction actuelle, que la déclaration d’intérêts des fonctionnaires sera adressée à la commission de déontologie de la fonction publique, tandis que la déclaration de situation patrimoniale le sera à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Dans un souci de cohérence, nous proposons que les personnels investis d’une certaine autorité remettent les deux déclarations à la même instance, en l’occurrence à la Haute Autorité.
Mme la rapporteure. L’idée peut paraître séduisante de prime abord, mais elle aboutirait à faire disparaître, dans les faits, la commission de déontologie: si nous confions les déclarations d’intérêts à la Haute Autorité, pourquoi ne pas lui confier aussi le contrôle des départs dans le secteur privé ainsi que celui des cumuls d’activités ?
Cela viderait de son contenu une bonne partie de la réforme, qui consiste à faire en sorte que la commission de déontologiemérite véritablement son nom. Alors que cette commission ne s’occupe aujourd’hui que des départs dans le secteur privé et des cumuls d’activités, le projet de loi tend à en faire l’organe de référence pour l’application à la fonction publique des règles que nous définissons aujourd’hui : les grands principes déontologiques applicables aux fonctionnaires, la prévention des conflits d’intérêts et la protection des lanceurs d’alerte. La commission de déontologie sera compétente sur tous ces points : elle pourra donner son avis sur les textes réglementaires, les chartes et codes de déontologie, et pourra aussi se prononcer sur des situations individuelles. Il est donc parfaitement logique que ce soit elle qui examine les déclarations d’intérêts, sur saisine de l’autorité hiérarchique.
De surcroît, cet amendement ne donnerait à la Haute Autorité aucun pouvoir de contrôle particulier. Or, on voit mal pourquoi une même institution ne disposerait pas des mêmes pouvoirs en fonction de la qualité des personnes qu’elle contrôle. Le contrôle des déclarations de patrimoine et des mandats de gestion financière est manifestement un autre métier, et nous pouvons nous féliciter que la lettre rectificative de juin dernier ait confié en la matière un véritable bloc de compétence à la Haute Autorité.
L'amendement vise également à ce que les agents tenus de déclarer leur patrimoine soient les mêmes que ceux tenus de déclarer leurs intérêts. Cette logique peut se défendre ; elle a d’ailleurs été suivie dans les lois d’octobre 2013 sur la transparence de la vie publique. Mais, s’agissant des fonctionnaires, le choix du Gouvernement, que je partage, est au contraire de découpler les deux obligations même si, dans les deux cas, la formulation du renvoi au décret en Conseil d’État est la même : il s'agit des emplois « dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifie ». Le périmètre des agents qui devront déclarer leur patrimoine devrait être plus restreint que celui des agents tenus de déclarer leurs intérêts. Autant l’objectif de prévention des conflits d'intérêts mérite d’être très largement partagé et diffusé au sein de la fonction publique, autant les possibilités d’enrichissement illicite et les risques de corruption concernent une fraction plus limitée d’agents publics − soit en raison de leur place dans la hiérarchie, soit en raison de certaines fonctions particulièrement exposées.
Peut-être Mme la ministre pourra-t-elle vous en dire davantage sur ce sujet. Pour ma part, j’émets un avis défavorable à l’amendement.
Mme la ministre. À chaque instrument correspond un objectif distinct : la déclaration de situation patrimoniale vise prioritairement à lutter contre la corruption, la déclaration d’intérêts à prévenir les conflits d’intérêts. Nous souhaitons développer une culture déontologique au sein de chaque service et nous appuyer pour ce faire sur une commission se caractérisant par sa bonne connaissance de tous les services. L’objectif est de faire en sorte que les différents outils créés par la loi – la déclaration d’intérêts, le référent déontologue et la Commission de déontologie– soient utilisés par les acteurs de terrain dans une logique de prévention quotidienne des risques déontologiques. La transmission des déclarations d’intérêts à la Haute Autorité ne permettra pas d’obtenir un tel résultat.
La comparaison avec les personnes qui relèvent de la loi relative à la transparence de la vie publique n’est pas pertinente, puisque celles-ci n’ont pas de supérieur hiérarchique. Tout au plus ont-elles une relation hiérarchique avec un ministre – relation très différente de celle que peut avoir un agent de l’administration avec ses propres supérieurs. Nous estimons donc que le régime de sanction disciplinaire ne peut être le même, et il paraît logique que des solutions différentes soient apportées à des situations aussi dissemblables.
Enfin, si nous ne gardions pas les deux instances tel que proposé, je crains fort que la Haute Autorité ne soit rapidement débordée…
M. René Dosière. Nous sommes favorables à l’orientation générale de l’amendement de M. Molac car elle correspond à celle de notre amendement CL89, mais nous sommes en désaccord sur deux points.
Le premier concerne le I de l’amendement CL29, dans lequel M. Molac propose que toutes les déclarations d’intérêts soient transmises à la Haute Autorité. Cela paraît excessif, comme l’a fait valoir Mme la ministre. Sur ce point, notre amendement CL89 est différent : il maintient le fait qu’il appartient au supérieur hiérarchique d’apprécier la situation, et c’est seulement lorsque ce dernier a un doute que la déclaration est transmise à la Haute Autorité. L’argument selon lequel cette dernière risquerait d’être submergée ne saurait donc être opposé à notre amendement.
Notre second point de désaccord concerne le V de l’amendement, qui assujettit à l’obligation de déclaration patrimoniale toutes les personnes soumises à l’obligation de déclarer leurs intérêts. S’agissant de fonctionnaires, cela n’est nullement pertinent.
Nous sommes en revanche d’accord avec M. Molac pour dire que, si la déclaration d’intérêts fait problème, c’est la Haute Autorité qui doit être saisie et non la commission de déontologie. Il s’agit en effet d’un domaine nouveau et nous avons confié à la Haute Autorité, dont l’indépendance est dès à présent reconnue, le soin de traiter de cette question et de développer une certaine culture. Cette instance sera progressivement amenée à travailler davantage sur le sujet et à prévoir une pédagogie des conflits d’intérêts. Pourquoi vouloir confier cette mission à une autre commission, dont l’indépendance est moins grande que celle de la Haute Autorité ? Pourquoi vouloir disperser les efforts, alors qu’il s’agit de faire de la pédagogie et de progresser dans un domaine nouveau ? Il me semble préférable de concentrer les tâches entre les mains de la Haute Autorité qui aura la compétence, la technicité et la pédagogie nécessaires.
La Commission rejette l’amendement CL29.
Elle adopte l’amendement rédactionnel CL157 de la rapporteure.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL158 de la rapporteure et CL89 de Mme Cécile Untermaier.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. L’amendement de la rapporteure est rédactionnel.
M. René Dosière. Pas seulement, puisqu’il confirme le rôle de la Commission de déontologie, ce à quoi s’oppose notre amendement.
Mme la rapporteure. J’ai présenté l’amendement CL158 comme rédactionnel dans la mesure où il confirme les dispositions du projet de loi.
Quant à l’amendement CL89, il ne donnerait à la Haute Autorité, je le répète, aucun pouvoir de contrôle particulier. Or on voit mal pourquoi une même institution ne disposerait pas des mêmes pouvoirs en fonction de la qualité des personnes qu’elle contrôle.
De plus, la Haute Autorité contrôle actuellement le contenu des déclarations de situation patrimoniale, mais n’a ni la culture ni la pratique nécessaires pour détecter des conflits d’intérêts, à la différence de la Commission de déontologie, à laquelle le projet de loi confère un rôle d’accompagnement quotidien des chefs de service. J’émets donc un avis défavorable à l’amendement CL89.
Mme la ministre. J’émets le même avis. Compte tenu de la composition actuelle de la Commission de déontologie, on ne peut prétendre que celle-ci ne serait pas indépendante.
M. René Dosière. Je me rappelle pourtant l’audition de M. Olivier Fouquet, président de la commission de déontologie, lors de la nomination de M. Pérol à la tête du groupe issu de la fusion des Banques populaires et des Caisses d’épargne…
Mme la ministre. Vous faites ici référence à l’avis de la Haute Autorité sur le cas que vous venez de citer et que je ne puis commenter.
Nous souhaitons instaurer une culture de la déontologie et donner toute sa place au contrôle des conflits d’intérêts. Nous établissons une distinction entre, d’une part, les situations de conflit d’intérêts dans lesquelles plusieurs milliers de personnes sont susceptibles de se trouver, et, d’autre part, les faits de corruption et d’enrichissement personnel. C’est finalement là que réside le « frottement » dont j’ai parlé tout à l’heure.
La prévention des conflits d’intérêts ne permet pas de prévenir toute corruption. Il convient en outre de faire preuve de prudence dans la rédaction de la loi, car les marges d’interprétation du texte ne seront pas minces. C’est pourquoi nous avons souhaité conserver la Commission de déontologie, en incluant dans sa composition une personnalité ayant une bonne connaissance des entreprises, de façon à éviter les conflits d’intérêts concernant des fonctionnaires créateurs d’entreprise.
J’entends vos arguments, et j’ai lu comme vous les commentaires émis à la suite du cas que vous avez cité. L’interrogation que vous émettez pourrait trouver réponse si nous allions jusqu’au bout de ce qui s’est produit, ce qui n’est point le rôle du législateur. Je maintiens donc ma position de prudence. En revanche, j’étudierai avec enthousiasme la possibilité d’introduire une procédure d’appel, enjeu que vous avez soulevé à juste titre, mais je ne suis pas encore en mesure de vous proposer un dispositif.
Pour toutes ces raisons, je suis défavorable à l’amendement CL89.
Mme Cécile Untermaier. Nous comprenons ces arguments, mais il convient de développer une conscience du conflit d’intérêts et de rassurer nos concitoyens. L’autorité indépendante que nous avons instaurée doit jouer, dans les cas difficiles, le rôle que les Français attendent d’elle. La commission de déontologie, en revanche, a un côté opaque, refermé sur la fonction publique, qui ne nous paraît pas adapté au règlement de ces cas. Nous nous opposons donc à l’amendement de la rapporteure et maintenons l’amendement CL89, qui a recueilli l’adhésion du groupe socialiste, républicain et citoyen.
La Commission rejette l'amendement CL158, puis adopte l’amendement CL89.
Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels CL159 et CL160 de la rapporteure, ainsi que son amendement de précision CL161.
Puis elle examine l’amendement CL162 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Il s’agit de rendre obligatoire la mise à jour régulière des déclarations d’intérêt.
La Commission adopte l'amendement.
Elle adopte également l’amendement rédactionnel CL163 de la rapporteure.
Elle en vient ensuite à l’amendement CL75 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.
Mme Anne-Yvonne Le Dain. Le terme de mission est trop vague pour permettre une réelle protection du fonctionnaire et des décisions qu’il serait amené à prendre – il s’agit en effet de décisions et non de simples intentions. Je propose donc de retenir la formulation suivante : « Les agents qui sont amenés à prendre des décisions ayant une incidence ou un impact en matière économique… »
Mme la rapporteure. Je trouve au contraire que c’est votre rédaction qui est plus vague, car elle ne se réfère plus aux missions des agents, formule qui a l’avantage d’être objective : à un poste donné, correspondent des missions précises. La notion de décisions introduit au contraire un élément factuel et contingent. Avis défavorable, donc.
Mme la ministre. Le Gouvernement s’apprêtait à s’en remettre à la sagesse des commissaires avant d’entendre la rapporteure. Je comprends bien l’objectif de l’amendement, mais certaines missions peuvent avoir des conséquences importantes qui ne sont pas directement d’ordre économique, tout en ayant un intérêt évident pour telle ou telle personne – si elles portent, par exemple, sur un équipement déterminant de zones d’expropriation.
La Commission rejette l’amendement.
Elle adopte ensuite successivement les amendements de précision CL164 et CL165 de précision de la rapporteure.
Puis elle examine l’amendement CL30 rectifié de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Cet amendement tend à aligner les conditions de dépôt et de contrôle des déclarations de situation patrimoniales sur celles prévues par la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique. Il précise notamment le contenu de la déclaration, les cas où elle n’est pas nécessaire, les conditions de contrôle par la Haute Autorité, et érige en délit la déclaration mensongère.
Mme la ministre. Avis favorable.
Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.
En conséquence, l’amendement CL166 de la rapporteure tombe.
La Commission examine l’amendement CL80 de M. Paul Molac.
Mme la rapporteure. Cet amendement est satisfait par mon amendement CL246 rectifié, qui viendra en discussion dans un instant.
L’amendement est retiré.
Puis la Commission examine, en discussion commune, les amendements CL82 et CL81 de M. Paul Molac.
Mme la rapporteure. Avis défavorable à l’amendement CL82, car il tend à appliquer à la fonction publique les mêmes sanctions pénales que celles prévues par la loi du 11 octobre 2013 sur la transparence de la vie publique et à donner à la Haute Autorité des pouvoirs renforcés de contrôle sur les déclarations de patrimoine. Je vous propose de vous rallier à mes amendements CL172 et CL247, qui sont mieux adaptés.
Quant à l’amendement CL81, il est satisfait, lui aussi, par mon amendement CL246 rectifié.
Les amendements sont retirés.
La Commission examine ensuite l’amendement CL246 rectifié de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Il s’agit d’apporter des précisions sur le contenu des déclarations remises lors de la fin des fonctions et de dispenser l’intéressé d’une nouvelle déclaration lorsqu’une déclaration a déjà été remise moins de six mois auparavant.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l’amendement CL167 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Il s’agit de garantir la possibilité de poursuites pénales.
Mme la ministre. Avis favorable.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL168 de la rapporteure.
Elle examine l’amendement CL171 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Il s’agit de rendre obligatoire la mise à jour des déclarations de patrimoine.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte successivement l’amendement rédactionnel CL170 et l’amendement de conséquence CL169 de la rapporteure.
Elle étudie ensuite l’amendement CL172 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement vise à donner à la Haute Autorité des pouvoirs renforcés de contrôle des déclarations de patrimoine.
D'une part, il lui attribue un pouvoir d'injonction pour obtenir des documents complémentaires ou des explications sur une déclaration de patrimoine. Le fonctionnaire serait tenu de répondre à la Haute Autorité, sous peine de sanctions pénales prévues par l’amendement CL247 rectifié qui suit. Nous transposons ici le mécanisme de la loi du 11 octobre 2013.
D'autre part, la Haute Autorité pourrait obtenir les déclarations de revenus du fonctionnaire ou de son conjoint ainsi que des informations de l'administration fiscale. Il s'agit là aussi de reprendre les dispositions de la loi sur la transparence.
Mme la ministre. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle examine ensuite l’amendement CL247 rectifié de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement tend à sanctionner pénalement un fonctionnaire ayant méconnu une injonction de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique dans l’exercice de sa mission de contrôle des déclarations de situation. Il complète un de mes précédents amendements.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l’article 4 modifié.
Article 5 : Entrée en vigueur des obligations déclaratives
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CL173 de la rapporteure.
Puis elle en vient à l’amendement CL174 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. L’amendement permet d’harmoniser les sanctions en l'absence de déclaration pour les agents déjà en poste.
La Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l’article 5 modifié.
Chapitre II
Des cumuls d’activités
Article 6 (art. 25 septies [nouveau] de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) : Réforme des règles de cumul d’activités
Mme Anne-Yvonne Le Dain. Alors que l’on incite les fonctionnaires que sont les universitaires et les chercheurs à aller vers les entreprises et contribuer à leur développement, voire à en créer, je voudrais m’assurer que l’article 6 ne va pas nuire à cette ambition voulue de longue date par le législateur, en vue de leur permettre de s’intéresser encore plus à la création d’activités économiques susceptibles de créer des emplois.
Mme la ministre. Je vous rassure : il est hors de question que nos chercheurs ne créent pas d’entreprises. Nous allons au contraire les y encourager.
La Commission adopte successivement l'amendement de précision CL175 de la rapporteure, ses amendements rédactionnels CL176 et CL 177 et ses amendements de précision CL179, CL 178 et CL180.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL77 rectifié et CL79 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.
Mme Anne-Yvonne Le Dain. Il serait pertinent de préciser qu’il peut s’agir aussi de l’engagement de poursuites pénales. Quant au second amendement, il tend à retenir la notion de sommes « indûment perçues ».
Mme la rapporteure. S’agissant du premier amendement, cette précision n'est pas nécessaire : des sanctions pénales sont toujours possibles, par exemple pour prise illégale d'intérêts.
Quant au second, la rédaction du projet de loi est plus précise, car elle fait directement référence aux interdictions prévues dans cet article. Au contraire, le terme « indûment » est trop large.
Avis défavorable aux deux amendements, donc.
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ajouter le terme de « pénales » conduirait en outre à créer une peine accessoire aux dispositions prononcées par la juridiction pénale. Il faut surtout se garder de le faire !
Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je retire donc mes amendements, mais je réécrirai le second en vue de la discussion en séance publique.
Les amendements sont retirés.
Puis la Commission adopte l’article 6 modifié.
Article 7 (art. 37 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, art. 60 bis de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. 46-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) : Entrée en vigueur des règles de cumul d’activités
La Commission adopte les amendements CL181 rédactionnel et CL182 de précision de la rapporteure.
Puis elle adopte l’article 7 modifié.
Chapitre III
De la commission de déontologie de la fonction publique
Article 8 (art. 14 bis et 25 octies [nouveau] de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, art. 30 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, art. 21 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, art. L. 421-3, L. 531-3 et L. 531-7 du code de la recherche, art. L. 1313-10, L. 5323-4 et L. 6152-4 du code de la santé publique, art. L. 952-14-1 et L. 952-20 du code de l’éducation et art. L. 114-26 du code de la mutualité) : Composition et attributions de la commission de déontologie de la fonction publique
La Commission examine l'amendement CL183 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Il s’agit d’étendre le pouvoir consultatif de la commission de déontologie.
Mme la ministre. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle examine ensuite l’amendement CL184 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement est important car il permet un échange d'information entre la commission de déontologie et la Haute Autorité.
Mme la ministre. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte successivement l’amendement rédactionnel CL185 et l’amendement de précision CL186 de la rapporteure.
Elle en vient ensuite à l’amendement CL187 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. L’amendement tend à supprimer la limite de 20 % pour les retenues sur pension.
Mme la ministre. Défavorable, car le principe de proportionnalité est une obligation conventionnelle, dont le non-respect est notamment sanctionné par la Cour européenne des droits de l’homme.
La Commission rejette l’amendement.
Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL188 de la rapporteure.
Puis elle en vient à l’amendement CL189 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Il s’agit d’élargir la composition de la commission de déontologie.
Mme la ministre. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite l’amendement CL190 de la rapporteure, tendant à corriger une erreur de référence.
Puis elle en vient à l’amendement CL23 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Cet amendement vise à instaurer la parité femmes-hommes au sein de la commission de déontologiede la fonction publique.
Mme la rapporteure. Avis favorable. Il n’y a en effet qu’une femme parmi ses membres actuels…
Mme la ministre. Même avis.
La Commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL191 de la rapporteure.
Puis elle en vient à l’amendement CL192 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. L’amendement renvoie au décret pour le quorum et la voix prépondérante du président de la commission de déontologie.
Mme la ministre. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite l’amendement de coordination CL193 de la rapporteure.
Puis elle examine l’amendement CL93 du Gouvernement.
Mme la ministre. L’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires prévoit que lorsqu’un agent public est mis en cause par un tiers en raison de ses fonctions, la collectivité publique dont il dépend est tenue de le couvrir des condamnations civiles prononcées contre lui – dans la mesure où une faute personnelle détachable de l'exercice de ses fonctions ne lui est pas imputable –, de le protéger contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont il est victime, ainsi que de lui accorder sa protection dans le cas où il fait l'objet de poursuites pénales. Cette protection a autant pour objet la prise en charge des frais d’avocat engagés par l’intéressé pour se défendre que l’obligation pour l’administration de protéger dans tous les sens du terme son agent même s’il a perdu la qualité d’agent public à la date où il est statué sur sa demande.
Bien qu’ils exercent leur fonction dans des établissements publics de santé, les praticiens hospitaliers, qui sont mentionnés à l’article L. 6152-1 du code de la santé publique, ne sont pas des fonctionnaires, mais des agents publics soumis à un statut particulier – fixé par l’article R. 6152-1 et suivants du même code. Compte tenu de la nature de leur fonction, ils sont particulièrement exposés aux risques contre lesquels la protection juridique de l’employeur a été prévue. Or aucune disposition ne figure aujourd’hui dans ces articles pour leur assurer de façon incontestable le bénéfice de cette protection. Il convient donc de faire expressément référence à l’article 11 de la loi du 13 juillet 1983 dans la partie du code de la santé publique consacrée aux dispositions statutaires des praticiens hospitaliers. Cette protection fonctionnelle est un élément supplémentaire d’attractivité des établissements publics. L’absence totale de protection a en effet découragé certains.
Mme la rapporteure. Avis favorable. Il est important d’apporter cette sécurité juridique et de consacrer explicitement la protection fonctionnelle de ces agents dans la loi.
La Commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite successivement les amendements de coordination CL194 et CL 195 de la rapporteure.
Puis elle adopte l’article 8 modifié.
Article 9 (art. 25 nonies et 28 bis [nouveaux] de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et art. 11, 22 et 23 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique) : Institution de référents déontologues – Extension des obligations déclaratives aux directeurs de cabinet de certaines autorités territoriales – Coordinations
La Commission adopte successivement les amendements de précision CL196 et CL197 de la rapporteure, son amendement rédactionnel CL198 et ses amendements de précision CL199 et CL200.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL201 de la rapporteure, CL92 de Mme Cécile Untermaier et CL25 de M. Paul Molac.
Mme la rapporteure. Mon amendement se différencie de celui de Mme Untermaier par le fait qu’il retient le terme « autorités territoriales » – repris dans les lois statutaires – plutôt que celui de « personnes ».
Cet amendement élargit le champ des collaborateurs de cabinet d'autorités territoriales déjà soumis à la loi sur la transparence de la vie publique, en visant d’une part les collectivités et établissement publics de coopération intercommunale (EPCI) de plus de 20 000 habitants et non plus de 80 000 habitants, et d’autre part les directeurs adjoints et chefs de cabinet et non plus les seuls directeurs de cabinet, afin de tenir compte de la variété des situations locales.
L’amendement CL92 est retiré.
La Commission adopte l’amendement CL201.
En conséquence, l’amendement CL25 tombe.
La Commission examine ensuite les amendements CL203 et CL204 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Il s’agit de « toiletter » la loi sur la transparence de la vie publique.
Mme la ministre. Avis défavorable : ces amendements s’éloignent de l’objet du projet de loi.
La Commission adopte successivement ces deux amendements.
Puis elle en vient à l'amendement CL202 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement est important puisqu’il vise à permettre l’échange d'informations entre la Haute Autorité et la commission de déontologie.
Mme la ministre. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle examine ensuite l’amendement CL205 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Il s’agit encore de « toiletter » la loi sur la transparence de la vie publique.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte l’article 9 modifié.
Après l’article 9
La Commission examine l'amendement CL234 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement tend à réintroduire dans le projet de loi les dispositions relatives à la déontologie des membres des juridictions administratives.
Mme la ministre. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle examine ensuite l’amendement CL235 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Cet amendement est semblable au précédent, mais porte sur les juridictions financières.
Mme la ministre. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
TITRE II
DE LA MODERNISATION DES DROITS ET OBLIGATIONS DES FONCTIONNAIRES
Chapitre 1er
Du renforcement de la protection fonctionnelle des agents et de leurs familles
Article 10 (art. 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) : Clarification et renforcement de la protection fonctionnelle
La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL111, CL112, CL113, CL114, CL115, CL117, CL116, CL118, CL119 et CL121 de la rapporteure.
Puis elle adopte l’article 10 modifié.
Après l’article 10
La Commission examine l’amendement CL107 du Gouvernement.
Mme la ministre. Les ministères de l’intérieur et de la défense insistent sur la nécessité d’améliorer la protection de l’identité des membres des forces spéciales. Il s’agit d’un enjeu important, puisqu’il participe de l’obligation de protéger les agents publics exerçant leurs missions au péril de leur vie. Des amendements semblables seront proposés pour les forces de sécurité intérieure faisant face à des menaces du même type.
Mme la rapporteure. Avis favorable.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Je voterai en faveur de l’amendement mais j’aimerais, madame la ministre, que, d’ici la séance publique, vous m’en expliquiez la pertinence. Je ne vois pas sa valeur ajoutée par rapport à l’article 39 sexies de la loi du 3 août 2009 qui, à ma connaissance, prévoit la même chose. Vous visez en effet notamment les unités d’intervention spécialisées dans la lutte antiterroriste, qui relèvent d’un arrêté du 7 avril 2011. Je me demande si votre amendement ne porte pas seulement sur les forces spéciales.
Mme la ministre. Les ministres concernés vont, d’ici l’examen en séance publique, retravailler l’amendement, qui vise bien les forces spéciales. Il a semblé, après une analyse fine des juristes concernés, que les mêmes considérations plaident pour que cette protection accrue soit offerte aux membres des unités d’intervention spécialisées dans la lutte contre le terrorisme, en particulier le Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) et l’unité Recherche, assistance, intervention, dissuasion (RAID). Lorsque la révélation d’identité cause une atteinte à l’intégrité physique ou psychique ou la mort de ces personnes ou de membres de leur famille, les peines aggravées ne sont pas de même nature que celles visées aux articles antérieurs. Mais nous vérifierons cela en fonction de vos observations.
M. le président Jean-Jacques Urvoas. Je vous remercie. Profitez-en pour dire aux ministres concernés que, lorsque des photos sont mises sur les sites internet de leur ministère, une obligation de floutage ne serait pas inutile…
Mme la ministre. Remarque pertinente, et d’ores et déjà transmise !
La Commission adopte l’amendement.
Elle en vient ensuite à l’amendement CL108 du Gouvernement.
Mme la ministre. L’amendement est de même nature que le précédent.
Mme la rapporteure. Avis favorable, mais il évoque un troisième alinéa de l’article 413-14 du code pénal, qui n’existe pas. Il faudrait faire référence au deuxième alinéa du même article.
Mme la ministre. J’accepte cette rectification.
La Commission adopte l’amendement ainsi rectifié.
Puis elle examine l’amendement CL106 du Gouvernement.
Mme la ministre. Cet amendement est d’une portée légèrement différente, il s’agit d’améliorer la protection sociale et juridique des agents de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et de tenir ainsi compte des conditions particulières d’exercice de leurs missions et des risques auxquels ils s’exposent.
Mme la rapporteure. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Article 11 (art. 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 45 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État) : Rétablissement dans ses fonctions ou reclassement provisoire d’un fonctionnaire suspendu et soumis à un contrôle judiciaire
La Commission est saisie de l’amendement CL83 de Mme Anne-Yvonne Le Dain.
Mme Anne-Yvonne Le Dain. Cet article est important puisqu’il a trait aux fautes graves, aux manquements aux obligations professionnelles et aux infractions de droit commun susceptibles d’être commis par des fonctionnaires ; le cas échéant, il est prévu que l’auteur de la faute peut être suspendu par l’autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline. Il me semble nécessaire de préciser que les faits concernés doivent présenter un « caractère de vraisemblance suffisant ».
La jurisprudence va dans ce sens et exige a minima que les faits qui justifient la suspension présentent, au jour où la décision est prise, un caractère de vraisemblance suffisant et pas de simples suspicions. L’intérêt du service comme l’intérêt des usagers doivent être préservés et de simples dénonciations ne peuvent justifier la notion de « faute grave » avant que celle-ci soit avérée. La notion de vraisemblance suffisante permet à la fois de suspendre et de garantir que le droit sera respecté et que l’intérêt d’une mise en cause soit préservé sans créer de fait deux systèmes de faute, l’un administratif, l’autre pénal.
Mme la rapporteure. L’article 11 ne modifie pas, sur ce point, l’état du droit. Les faits justifiants d’une suspension doivent avoir le caractère de faute grave. Mais il s’agit le plus souvent d’une faute présumée, l’agent mis en cause bénéficiant de la présomption d’innocence. J’appelle votre attention sur le fait qu’une telle décision considérée comme illégale en l’absence de faute grave est de nature à engager la responsabilité de l’administration.
Il ne me semble pas que le droit nécessite une modification sur ce point, en conséquence, je demande le retrait de cet amendement.
Mme Anne-Yvonne Le Dain. Je le retire, mais poursuis ma réflexion.
L’amendement est retiré.
La Commission adopte l’amendement rédactionnel AC122 de la rapporteure.
Puis elle adopte l’article 11 modifié.
Après l’article 11
La Commission est saisie de l’amendement CL211 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Il s’agit de réintroduire ce qui était prévu par l’ordonnance au sujet de la mobilité, à savoir le chapitre Ier bis : « De la mobilité », tel que prévu dans le projet de loi initial, à quelques ajustements près.
Mme la ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement ainsi qu’aux suivants, qui tendent à rétablir les articles 18 à 24 du projet de loi initial.
La Commission adopte l’amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements CL209, CL210, CL212, CL213, CL214, CL215 de la rapporteure.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL63 de Mme Ericka Bareigts et CL102 de Mme Maina Sage.
Mme Ericka Bareigts. Nous proposons d’intégrer dans la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d’État la prise en compte des centres d’intérêts moraux et matériels (CIMM) pour les mutations vers les territoires régis par les articles 73 et 74 de la Constitution. Un arrêt du Conseil d’État en date du 6 mars 2015 a en effet fragilisé les CIMM, qui constituent néanmoins une notion juridique consacrée par la jurisprudence ainsi que par la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE).
Mme Maina Sage. Je compléterai le propos de notre collègue en rappelant la situation particulière de ces fonctionnaires d’État qui servent au-delà de l’Hexagone. Sans vouloir nuire au principe d’égalité de traitement entre les fonctionnaires, il faut prendre en compte l’éloignement ; en relisant la loi de 1984, on retrouve les fondamentaux des principes de la mobilité de la fonction publique et de rapprochement du conjoint. Au-delà de celui-ci, je voudrais partager avec vous celui du rapprochement familial ; il ne s’agit pas de créer un droit nouveau ni de remettre en cause la notion de qualité du service public, mais bien de prendre conscience que la distance entre la métropole et nos territoires doit être considérée en priorité.
Lorsque l’on est muté à deux heures de train, on peut encore voir sa famille, le week-end, une fois par mois ou à Noël, mais lorsque l’on est muté à 20 000 kilomètres, ce n’est plus la même chose ; ce sont des situations difficiles à vivre pour ces familles. Je souhaite vivement que nous puissions, par ce texte, prendre en compte ces situations de célibat géographique.
Mme la rapporteure. Des ministres ont indiqué précédemment qu’une réflexion était en cours, une mission avait été confiée à Victorin Lurel, aussi souhaiterais-je entendre Mme la ministre afin d’obtenir des précisions.
Mme la ministre. Il faut le dire, la reconnaissance des centres d’intérêts moraux et matériels constitue un vrai progrès social ; c’est aussi un symbole politique, et les élus de Brest ou de Quimper, à qui huit heures de trajet aller-retour entre Paris et leur circonscription paraissent bien longues, sont conscients de la situation que vous évoquez, et qui est sans commune mesure avec la leur.
Je remercie les parlementaires des outre-mer pour le combat qu’ils mènent depuis longtemps en faveur de nos compatriotes qui souhaitent revenir près de leurs proches après dix, quinze ou vingt ans passés en Métropole à exercer des métiers difficiles. On peut le dire : il s’agit en priorité d’anciens agents de police. Il faut traiter différemment des fonctionnaires qui connaissent des situations différentes, et ce dans le respect des principes républicains. Votre collègue Patrick Lebreton a d’ailleurs remis un rapport sur ce sujet au Premier ministre, et nous sommes sur le point, au terme de trois ans de réflexion, de trouver enfin une solution, les organisations syndicales ayant fait des propositions alternatives en s’appuyant sur des arguments qui n’étaient pas irrecevables.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer vos amendements, en m’engageant à rechercher, dès cet après-midi, à partir de vos propositions, la meilleure formulation, qui comportera des précisions propres à éviter les recours immédiats susceptibles d’entacher une décision à la forte symbolique sociale et politique, et je présente au président de votre commission les excuses du Gouvernement pour ne pas avoir trouvé cette formulation idéale avant la présente réunion...
Mme la rapporteure. Je souhaite également le retrait des amendements, compte tenu de l’engagement pris par Mme la ministre d’aboutir à une solution d’ici à la séance publique, car nous n’aurons pas à examiner d’autre projet de loi consacré à la fonction publique avant longtemps.
Mme Ericka Bareigts. Je retire mon amendement car je sais l’attention que Mme la ministre porte à ce sujet dont nous débattons depuis 2012, en dialogue constant avec les associations et les syndicats. Je pense que nous sommes très près de trouver la meilleure rédaction, juridiquement protectrice, qui permettra aux fonctionnaires concernés d’exercer le métier qu’ils ont choisi et voulu, dans les meilleures conditions possibles, dans l’intérêt général.
Mme Maina Sage. L’essentiel est en effet d’aboutir à une solution juridiquement solide, et c’est pourquoi je retire également mon amendement.
M. le président. J’appelle votre attention sur le fait qu’en Nouvelle-Calédonie la notion de « centres d’intérêts moraux et matériels » n’a pas la même connotation que dans les autres territoires ultramarins. Il faut donc éviter que ce qui apporte une solution dans un territoire ne crée une difficulté dans un autre.
Les amendements sont retirés.
Chapitre II
De la modernisation des garanties disciplinaires des agents
Article 12 (art. 19 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) : Création d’un délai de prescription de l’action disciplinaire
La Commission examine l’article CL24 de M. Paul Molac.
M. Paul Molac. Cet amendement vise à objectiver le délai de prescription en prévoyant, pour l’administration, l’obligation d’inscrire au dossier de l’agent les faits passibles de sanction dès qu’elle en a connaissance.
Mme la rapporteure. Je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement au profit de mon amendement CL123 qui va dans le même sens.
L’amendement est retiré.
La Commission est saisie de l’amendement CL32 de M. Paul Molac.
Mme la rapporteure. Je suis défavorable à cet amendement, qui tend à réduire le délai de prescription à un an. Il me paraît préférable de le maintenir à trois ans.
Mme la ministre. Même avis.
La Commission rejette l’amendement.
Puis elle examine l’amendement CL123 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Je propose que l’établissement de la matérialité des faits passibles de sanction soit retenu comme point de départ du délai de prescription.
Mme la ministre. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle aborde ensuite l’amendement CL125 de la rapporteure.
Mme la rapporteure. Je propose que, lorsque les faits passibles de sanction constituent des crimes ou des délits, ce délai soit prorogé dans la limite des délais de prescription de l’action publique en la matière. Tous les cas ne sont pas identiques, et cela peut être important.
Mme la ministre. Avis favorable.
La Commission adopte l’amendement.
Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL124 de la rapporteure.
Puis elle adopte l’article 12 modifié.
La séance est levée à 12 heures 50.
——fpfp——
Membres présents ou excusés
Présents. - M. Ibrahim Aboubacar, M. Christian Assaf, M. Luc Belot, M. Erwann Binet, M. Jean-Michel Clément, Mme Françoise Descamps-Crosnier, M. Marc Dolez, M. René Dosière, Mme Laurence Dumont, M. Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Anne-Yvonne Le Dain, Mme Sandrine Mazetier, M. Paul Molac, M. Sébastien Pietrasanta, Mme Elisabeth Pochon, M. Pascal Popelin, M. Bernard Roman, Mme Maina Sage, Mme Cécile Untermaier, M. Jean-Jacques Urvoas, Mme Paola Zanetti
Excusés. - M. Sergio Coronado, Mme Pascale Crozon, M. Carlos Da Silva, M. Patrick Devedjian, M. Daniel Gibbes, M. Yves Goasdoué, M. Alfred Marie-Jeanne, M. Roger-Gérard Schwartzenberg, Mme Marie-Jo Zimmermann
Assistaient également à la réunion. - Mme Ericka Bareigts, Mme Françoise Dumas, Mme Chantal Guittet