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Délégation aux droits des femmes et l’égalité des chances entre les hommes et les femmes

Mardi 18 juin 2013

Séance de 17 heures 30

Compte rendu n° 32

Présidence de Mme Catherine Coutelle, Présidente

– Audition, ouverte à la presse, de Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes, sur les enjeux de la réforme du système des retraites au regard de la situation des femmes

– Informations relatives à la délégation

La délégation aux Droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes a procédé à l’audition de Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes, sur les enjeux de la réforme du système des retraites au regard de la situation des femmes.

L’audition commence à 17 heures 35.

Mme la présidente Catherine Coutelle. Mes chers collègues, nous auditionnons pour la troisième fois Mme Najat Vallaud-Belkacem, qui nous parlera aujourd’hui d’un sujet qui intéresse l’ensemble des Français, et tout particulièrement les femmes. La Délégation aux droits des femmes – je le dis en présence de Mme Marie-Jo Zimmermann, son ancienne présidente, qui a présenté en 2011 un rapport sur le sujet – s’est toujours préoccupée de l’injustice qui est faite aux femmes au moment de la retraite.

À la différence de ce qui s’est passé en 2010, la situation des femmes a été évoquée dès que l’on a décidé d’examiner à nouveau l’avenir des retraites. Nous ne pouvons que nous en réjouir.

Cette situation est connue de tous : l’inégalité des retraites des femmes perdure dans notre pays, en dépit des réformes de 1993, 2003 et 2010. En 2011, hors réversion, les retraites atteignaient en moyenne 932 euros par mois pour les femmes, contre 1 603 euros pour les hommes. Le différentiel est toujours de 40 à 50 % – suivant ce que l’on inclut dans la notion de retraite – et il progresse au fil des générations.

L’activité féminine augmentant, on pouvait imaginer qu’au fur et à mesure des années, les retraites des femmes rejoindraient celles des hommes. Mais il se trouve que des obstacles s’opposent à cette évolution. Le principal est la multiplication, à partir des années quatre-vingt-dix, des temps partiels, à l’origine de carrières hachées et incomplètes. Un autre est le fait que certaines femmes arrêtent leur carrière pour s’occuper de leurs enfants. Ces deux phénomènes font qu’aujourd’hui les femmes continuent à avoir des retraites beaucoup plus faibles que celles des hommes.

Je vous poserai deux questions. Que fait-on pour assurer une vie décente aux femmes qui ont une toute petite retraite ? Que fait-on pour stopper l’aggravation des inégalités en matière de retraite ?

M. Réphaël Hadas-Lebel est venu nous présenter le rapport 2013 du Conseil d’orientation des retraites (COR). Mme Yannick Moreau, quant à elle, vient de remettre le sien au Premier ministre. J’aurais aimé que ce dernier rapport soit un peu plus étoffé sur la situation des femmes.

Madame la ministre, nous avons compris que la méthode employée serait différente de celle de 2010, dans la mesure où une grande place sera faite – avant que le texte n’arrive au Parlement – à la négociation qui a été engagée avec les partenaires sociaux. Mais selon vous, à quel moment, par rapport à cette négociation, le Parlement devra-t-il intervenir ?

Mme Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes. Madame la présidente, Mesdames et Messieurs, en n’intégrant pas, dès le départ, dans une réforme des retraites, la question de l’égalité entre les hommes et les femmes, on court le risque, non seulement de conforter, mais encore d’aggraver les inégalités. À l’inverse, si l’on fait de l’égalité entre les hommes et les femmes un objectif de cette réforme, on pourra progresser. En effet, il y a peu de domaines dans lesquels on arrive à réduire de façon aussi évidente les inégalités. Nous avons donc une occasion en or devant nous.

En outre, les décisions que l’on est amené à prendre pour procéder à une réforme des retraites se construisent un peu comme un Lego, bloc par bloc. Si l’on attend d’avoir construit chaque bloc du Lego avant de poser la question de l’égalité, on aura laissé passer cette occasion.

Enfin, les décisions qui conduisent à modifier les règles de calcul de la pension, c’est-à-dire la manière dont on traduit la carrière en droits à la retraite, peuvent peser différemment sur les femmes et sur les hommes. De fait, les carrières des femmes ne sont pas encore tout à fait les mêmes que celles des hommes – par exemple, elles sont souvent moins continues. C’est une raison supplémentaire pour que nous abordions cette question de l’égalité hommes/femmes dès le début de notre réflexion sur la réforme des retraites.

Pour mon ministère, vous imaginez bien que c’est un sujet majeur. Il y a quelques mois, nous avons lancé la campagne Léa, une campagne de communication télévisée dans laquelle on faisait reprendre conscience aux Français de l’ampleur des inégalités existant entre les hommes et les femmes : inégalités professionnelles, inégalités dans la répartition des tâches domestiques, et inégalités de retraite.

Aujourd’hui, pour compléter ce que disait Mme la présidente, les hommes retraités perçoivent, en moyenne, chaque mois, une retraite de 1 749 euros, et les femmes, de 1 165 euros, soit un écart d’un tiers. Et près de 700 000 femmes de plus de soixante-cinq ans vivent aujourd’hui sous le seuil de pauvreté.

Le faible niveau de retraite des femmes est le résultat de parcours professionnels hachés, interrompus et d’un accès limité au marché du travail dans les années cinquante et soixante. Ces parcours discontinus les conduisent à devoir attendre très souvent l’âge limite pour bénéficier d’une retraite à taux plein.

Les droits acquis en matière de retraite sont étroitement liés aux carrières professionnelles, à l’importance des interruptions de carrières, des emplois occupés et des salaires perçus. Par définition, davantage d’interruptions de carrière, de temps partiels, de petits salaires et de précarité génère mécaniquement, pour les femmes, des droits à la retraite plus faibles.

Certes, on nous objectera que l’activité des femmes, ces dernières décennies, n’est pas celle des femmes des années cinquante, qu’elle s’est considérablement développée, que leurs parcours professionnels sont moins hachés, que les postes qu’elles occupent aujourd’hui sont sans commune mesure avec ceux qu’elles occupaient dans les années soixante-dix, qu’elles sont formées, qualifiées – leurs résultats scolaires sont d’ailleurs meilleurs que ceux des garçons – et que certaines d’entre elles exercent de hautes responsabilités. Pour autant, sur le marché du travail, les inégalités demeurent entre les femmes et les hommes. Et si on ne change rien à ces inégalités professionnelles et salariales, elles deviendront demain des inégalités de pensions de retraite. De fait, les inégalités de retraite sont un condensé des inégalités de rémunération et de carrière sur le marché du travail.

Dans un système contributif comme le nôtre, si l’on veut corriger ces inégalités primaires, il faut conduire une politique de discrimination positive. Il s’agit en effet de compenser, une fois arrivé l’âge de la retraite, les inégalités que l’on n’a pas pu attaquer à la racine. Voilà pourquoi il est important de fixer au régime de retraite de base un objectif de réduction des inégalités de pensions de retraite entre les femmes et les hommes. Aujourd’hui, il y a à peu près un tiers de différence entre la retraite des femmes et celle des hommes. Le COR a montré que ces écarts ne se résorberont pas spontanément. Par exemple, en 2040, pour la génération née dans les années soixante-dix, l’écart devrait rester de 20 %.

Pour autant, ce serait une erreur de vouloir compenser, par les régimes de retraite, l’intégralité de l’écart. Si nous voulons être rationnels, nous devons également faire en sorte d’intervenir sur les causes. Voilà pourquoi la stratégie que je vous propose pour tenter de faire disparaître, à l’horizon 2040, cet écart de 20 %, repose sur trois piliers.

Premier pilier : il s’agit d’annuler les inégalités de rémunération pendant que les hommes et les femmes sont sur le marché du travail – en particulier les inégalités de rémunération à temps de travail égal.

Pour ce faire, nous appliquons la loi sur l’égalité professionnelle, procédure de contrôle sur les entreprises, prise de sanctions ; on a assisté à la multiplication des plans d’action au cours de ces derniers mois.

Mais la loi de sécurisation de l’emploi, en luttant contre les effets néfastes du petit temps partiel – seuil minimum de 24 heures hebdomadaires, majoration de 10 % dès la première heure complémentaire – contribue elle aussi à la réduction des inégalités de rémunération.

Les politiques que nous menons pour briser, petit à petit, le plafond de verre qui subsiste dans les entreprises, vont également dans le bon sens. Par exemple, nous publierons désormais chaque année le taux de féminisation des comités directeurs des grandes entreprises pour inciter ces dernières – qui tiennent à préserver leur image de marque – à évoluer en la matière.

De même, la mise en place d’un plan crèche ou, plus globalement, les mesures visant à améliorer l’accueil de la petite enfance – le Premier ministre a récemment annoncé la création de 275 000 places – éviteront aux mères de jeunes enfants de devoir interrompre leur carrière.

Toutes ces politiques visant à réduire les inégalités de parcours et de rémunération seront complétées demain par l’accord sur la question de l’égalité professionnelle et de la qualité de vie au travail. Cet accord est très important parce qu’il a vocation à assurer l’effectivité des droits résultant des lois Roudy et Génisson. Une fois que les partenaires sociaux auront conclu cet accord, et j’espère qu’il sera conclu, on en tirera les conséquences dans le projet de loi global sur l’égalité entre les hommes et les femmes que j’ai l’intention de vous présenter.

Deuxième pilier : il s’agit, cette fois, d’aller encore plus loin sur la question du temps partiel, même si l’Accord national interprofessionnel ou ANI, devenu loi de sécurisation de l’emploi, en avait déjà traité. Pour en avoir discuté avec vous, je sais que votre délégation a pris cette question à bras-le-corps.

Comment renforcer les droits sociaux des salariés à temps partiel – qui, à 80 %, sont des femmes ? Je me souviens que vous aviez proposé que l’on rende enfin effectives les dispositions de l’article L. 241-3-1 du code de la sécurité sociale qui prévoit la possibilité de la prise en charge, par l’employeur, des cotisations patronales additionnelles sur la base d’un temps plein, lorsque le salarié à temps partiel en fait la demande. Ces dispositions, qui datent de plusieurs années, ne sont quasiment jamais appliquées. Il faudrait faire en sorte que le sujet soit plus largement abordé dans le cadre des négociations annuelles sur l’égalité. Nous devrons y réfléchir.

Mme Yannick Moreau, dans son rapport, propose des pistes de travail intéressantes, pour mieux prendre en compte les carrières heurtées et celles des assurés à temps très partiel. Par exemple, vous savez qu’aujourd’hui, en dessous de 200 heures travaillées par trimestre, le trimestre n’est pas comptabilisé pour les droits à retraite. Selon ce rapport, ces heures qui donnent lieu à cotisation pourraient être totalisées en fin de carrière pour valider des trimestres supplémentaires utiles en cas d’années incomplètes. La limite serait de quatre trimestres par an, mais cela signifie que ces heures seraient enfin comptabilisées. C’est un sujet sur lequel je serai heureuse de vous entendre.

Troisième pilier de cette stratégie : réduire les inégalités au moment de la retraite. De ce point de vue, la réforme que l’on s’apprête à adopter constitue, je le redis, une opportunité extraordinaire. Je sais que Mme Marisol Touraine, qui en assure la responsabilité, y est extrêmement sensible.

Un certain nombre de pistes ont été proposées par Mme Yannick Moreau dans son rapport. Mais que les choses soient claires : aujourd’hui, aucune décision n’a été prise. La concertation débute jeudi par la Conférence sociale et durera jusqu’au mois de septembre.

Pour autant, je vous propose de revenir sur ce que pourraient être les objectifs de ce troisième pilier.

L’essentiel des efforts doivent porter sur les moyens de compenser la pénalité que subissent les femmes au moment des naissances, la Child Penalty. On pense en effet que celle-ci expliquerait quelque 10 % des écarts de salaires entre les femmes et les hommes. On manque de données pour évaluer son impact en matière de retraites. Voilà pourquoi j’ai demandé à l’Institut des politiques publiques, avec lequel nous avons passé une convention-cadre, de réaliser une étude approfondie sur cette question. Cette étude, qui dure depuis plusieurs mois, est sur le point d’être finalisée. Elle m’a semblé prometteuse, et je vous suggère d’auditionner ses auteurs.

Nous pensons par ailleurs que cette réforme des retraites doit être l’occasion de s’interroger sur les droits familiaux et conjugaux. Ceux-ci permettent de réduire un certain nombre d’inégalités qui découlent automatiquement du marché du travail et de la répartition inégale des responsabilités parentales. Mais ces droits sont assez peu lisibles et le rapport Moreau souligne qu’ils sont à l’origine d’un certain nombre de situations d’iniquité.

Ces droits recouvrent trois mécanismes différents : les bonifications de pension, les majorations de durée d’assurance, et l’assurance vieillesse des parents au foyer ou AVPF. Il faut reconnaître que ces trois droits cumulatifs contribuent aujourd’hui à réduire les inégalités entre les hommes et les femmes. Ils représentent même une part significative des droits à retraite des femmes qui ont liquidé leur pension, en 2010, au régime général.

Mais vous aurez sans doute remarqué que je parle de « droits familiaux » et non d’« avantages familiaux », qui est le vocabulaire habituellement utilisé. Je le fais sciemment, parce que je pense que le choix des mots a son importance. Ces trois mécanismes ne sont pas tant des avantages que des moyens de compenser, au moins en partie, au moment de la retraite, le manque à gagner lié au poids que font peser les enfants sur la carrière des femmes.

Certes, les parcours des femmes qui vont partir à la retraite demain ne seront pas les mêmes que ceux de leurs aînées. Elles sont en effet plus actives. En revanche, elles travaillent beaucoup plus souvent à temps partiel – 30 % des femmes actives sont aujourd’hui à temps partiel. Les écarts en termes de durée de validation, qui sont aujourd’hui importants, devraient se réduire très sensiblement. Mais ce sont les écarts de salaire – dans la mesure où ils intègrent, notamment, les effets du temps partiel – qui seront demain la cause principale des écarts de pension.

Le COR a fait des projections qui lui permettent de dire qu’à partir de 2020, l’écart entre les durées d’assurance moyenne des hommes et des femmes se réduirait à environ deux trimestres seulement et que l’écart entre les âges moyens de départ à la retraite des hommes et des femmes disparaîtrait progressivement. Restent les écarts de salaires.

Le premier des droits familiaux est la majoration de durée d’assurance, ou MDA, qui représente aujourd’hui environ 5 milliards. Son impact est réel, puisque le gain moyen de pension, sur l’ensemble des femmes, est estimé à environ 12 %. Ce mécanisme permet d’augmenter la durée d’assurance pour les mères, mais elle ne compense pas du tout la moindre progression salariale ou le fait d’être passée à temps partiel.

Par ailleurs, elle a un effet négatif sur le travail des femmes dans la mesure où celles qui ont connu peu d’interruptions de carrière entrent plus vite, vers la fin de leur vie active, dans la zone de surcote, et sont, de ce fait, « désincitées » à continuer à travailler.

Nous nous interrogeons donc sur la cible et sur les effets pervers de ce mécanisme de MDA.

Le deuxième des droits familiaux est l’assurance vieillesse des parents au foyer, ou AVPF, accordée aux bénéficiaires de certaines prestations familiales – notamment le complément de libre choix d’activité, ou CLCA, et le complément familial – sous conditions de ressources. Elle permet de valider des trimestres, par le rapport au compte du salarié, au régime général, d’un salaire mensuel équivalent au SMIC. Ce dispositif coûte environ 4,5 milliards d’euros à la CNAF. Il est toujours en phase de montée en charge, mais on considère qu’il a concerné un peu moins de 50 % des femmes qui sont parties en retraite en 2010.

Le troisième de ces droits familiaux est constitué par les bonifications de pension. Le dispositif en est très simple, puisqu’il consiste à majorer de 10 % la pension des parents de trois enfants et plus. On estime qu’il coûte aujourd’hui un peu moins de 6 milliards d’euros et qu’il devrait en coûter 10 milliards en 2040. Le problème est qu’il profite, de fait, davantage aux hommes qu’aux femmes. En effet, cette majoration est proportionnelle au salaire et donc proportionnelle à la pension, et avantage ceux qui ont les pensions les plus élevées – les hommes.

Ainsi, ces droits familiaux tendent à favoriser les pensions les plus élevées et accentuent, dans une certaine mesure, les inégalités – c’est le cas de la bonification de pension. Par ailleurs, ils privilégient très clairement la durée d’assurance sur le montant de la pension – c’est le cas de la MDA.

En conclusion, ce système est complexe, onéreux et parfois inadapté. Comment aménager ces dispositifs autour d’objectifs plus clairs, tout en veillant à ce que le système soit globalement efficace ? C’est un des sujets essentiels de la concertation qui va s’ouvrir. Mais j’accueillerai vos propositions avec beaucoup de soin.

Je voudrais terminer sur les pensions de réversion, qui bénéficient en très grande majorité aux femmes ; 90 % de ses bénéficiaires sont en effet des femmes. Ces pensions de réversion représentaient en 2010 une dépense annuelle, tous régimes confondus, de plus de 30 milliards d’euros. Il ne s’agit pas de les remettre en cause, mais de voir si elles sont adaptées aux changements sociétaux de notre pays, où il y a de plus en plus de divorces et de couples qui ne se marient jamais.

L’idée même des droits dérivés s’était imposée dans une société où le mariage était la forme prédominante de la vie en couple. La pension de réversion permettait d’éviter qu’en raison de la faiblesse des droits acquis par la femme au cours de sa vie professionnelle – faiblesse liée à la répartition inégalitaire des rôles au sein du couple –, celle-ci voie son niveau de vie chuter au décès de son conjoint. D’une certaine façon, la dépendance financière de celle-ci se trouvait compensée par la solidarité du couple au-delà même du décès de son conjoint.

Le problème est que le modèle sur lequel a été bâtie la pension de réversion n’est plus le modèle dominant et que les femmes qui se retrouveront seules au moment de leur retraite seront autant, voire davantage des femmes célibataires ou divorcées que des femmes veuves. Cela doit nous amener à chercher à renforcer plutôt les droits propres des femmes que les droits dérivés.

Je tiens à vous donner l’exemple, pour moi très parlant, d’une de mes administrées : son mari gagnant bien sa vie, elle arrête de travailler pour élever ses enfants. Le couple divorce. Elle se retrouve dans une situation précaire et ne touchera rien pendant des années, malgré les efforts qu’elle a fournis pendant sa vie de couple. Elle ne touchera une pension de réversion que très tardivement, lorsqu’elle partira elle-même à la retraite, et lorsque son ex-conjoint sera décédé. Et si cet ex-conjoint s’est remarié, le montant de la pension de réversion sera divisé entre les épouses successives.

Nous pouvons chercher des pistes à l’étranger. Il se trouve qu’en Allemagne, les droits à la retraite sont partagés au moment du divorce – c’est le splinting. Mais ce dispositif est difficile à appliquer à notre système de retraite, qui n’est pas un système à points et qui ne permet pas de calculer en temps réel, au cours de la carrière, les droits qui ont été acquis.

En conclusion, même si on peut commencer à y réfléchir, la question de la pension de réversion ne se résoudra que sur le long terme. En revanche, nous avons dès maintenant la capacité d’agir sur les droits familiaux. En en réorientant les masses financières, qui sont assez importantes, nous pourrions déjà résoudre certains problèmes.

Mme la présidente Catherine Coutelle. Madame la ministre, je vous remercie pour la façon dont vous avez posé les questions, auxquelles nous n’avons plus qu’à répondre.

Comme vous l’avez dit, le système des droits familiaux pèche par son opacité, sa complexité et parfois, par une certaine iniquité. Mais le système des retraites, qui ne se limite pas au régime de base du secteur privé, est lui-même très complexe. En outre, les femmes ne connaissent souvent leurs droits à la retraite – et donc ce qu’elles vont toucher – qu’au moment où elles y arrivent. C’est alors que se profilent des situations souvent dramatiques.

Le rapport Moreau préconise deux solutions pour réformer les droits familiaux : l’une radicale, et l’autre à évolution lente. Va-t-on vers une refonte complète de ces droits ? Celle-ci se justifierait, pour des raisons de justice. Mais elle risque de prendre du temps, car pour mener une telle réforme, il faudra faire des études d’impact.

Par ailleurs, vous n’avez pas abordé le sujet du report à soixante-sept ans du départ à la retraite, que l’on justifie par une plus grande longévité. Certes, au sortir de la guerre, on n’imaginait pas vivre aussi longtemps. À ce propos, si les femmes ont une plus grande longévité que les hommes, elles vivent moins longtemps en bonne santé que ceux-ci.

Cette mesure est particulièrement injuste pour les femmes qui seront les plus nombreuses à devoir attendre soixante-sept ans pour partir en retraite avec un taux plein, du fait de l’allongement progressif de la durée de cotisation. Ne pourrait-on pas revenir à soixante-cinq ans ? Bien sûr, je suis consciente que l’enjeu de la prochaine réforme est d’éviter que nous ne nous retrouvions en 2020 avec un déficit de 20 milliards. Mais on voit mal comment certaines femmes pourraient travailler jusqu’à soixante-sept ans. Un accord sur la qualité de vie au travail, nous avez-vous dit, est sur le point d’être signé. Je m’en réjouis, mais je remarque que certains métiers, majoritairement occupés par des femmes, ne sont pas considérés comme pénibles. Dans les EHPAD, dans les crèches, dans les maisons de santé, les femmes qui vieillissent connaissent des problèmes musculaires. Elles n’effectuent pas un travail de force comme sur les chantiers, mais ces métiers n’en sont pas moins usants. Ces sujets-là sont encore à étudier.

Mme Edith Gueugneau. J’observe que pour éviter les inégalités de retraite, il faudrait déjà que l’on puisse permettre aux femmes d’occuper des temps pleins. Or on leur propose le plus souvent des temps partiels, notamment dans le secteur des services à la personne. Ce secteur crée certes de l’emploi pour les femmes, mais pas à temps plein.

Madame la ministre, je voudrais savoir quel outil nous pourrions mettre en place pour lutter contre les inégalités salariales.

Je remarque par ailleurs que les basses pensions mériteraient d’être revalorisées. Certaines sont en effet inférieures au seuil de pauvreté, ce qui est préoccupant. Par exemple, les femmes d’artisans ou d’agriculteurs qui ont travaillé avec leur conjoint ne touchent qu’une retraite de 350 ou de 400 euros.

Enfin, si les femmes arrêtent de travailler, c’est parce leur salaire n’est pas assez élevé pour que ce soit rentable. Lorsqu’elles travaillent à temps partiel, les entreprises pourraient payer une surcotisation. Mais elles ne le font pratiquement jamais. Comment les y obliger ?

Mme Marie-Jo Zimmermann. Je vous remercie, Madame la ministre, d’aborder devant la Délégation cette question de la retraite des femmes. Vous avez eu raison de distinguer la génération des femmes nées dans les années soixante-dix, dont la situation se sera sans aucun doute améliorée, au moment de la retraite, des générations précédentes. Je vous félicite également des efforts que vous déployez pour faire appliquer la loi sur l’égalité professionnelle. Sous la menace d’une sanction, les entreprises comprendront rapidement où est leur intérêt.

Vous proposez d’agir sur les droits familiaux. Certes, comme l’a fait remarquer Mme la présidente, le système est complexe et les situations multiples. Mais si le principe est posé et qu’on a la volonté politique nécessaire, on trouvera des solutions. C’est un espoir pour ces générations nées avant les années soixante-dix, dont la situation m’inquiète beaucoup.

Enfin, le sort des salariés à temps partiel a toujours été l’une de mes grandes préoccupations. Comme je l’ai dit à la délégation, la loi sur la sécurisation du travail, prise après la conclusion de l’ANI, aurait pu aller plus loin en matière de temps partiel, notamment en faveur des femmes. Voilà pourquoi il me semble absolument nécessaire, dans cette loi sur les retraites, de s’intéresser au temps partiel.

Mme Cécile Untermaier. Madame la ministre, comme tout un chacun, j’assure des permanences dans ma circonscription. Nous y recevons des femmes d’exploitants agricoles ou d’artisans qui se trouvent dans des situations telles qu’on ne sait pas comment leur répondre. Nous rencontrons également des femmes qui dépendent de plusieurs régimes, qui ne connaissent pas ce que sera leur future retraite et qui constatent, au moment où elles s’arrêtent de travailler, que tel régime ou tel dispositif aurait été beaucoup plus intéressant. Pour que ces femmes ne soient pas surprises par le niveau de leur retraite ou par le mode de calcul, nous avons un gros effort d’information à faire. Il faut reconnaître aussi que c’est toujours la formule la moins favorable qui leur est appliquée.

Je voudrais par ailleurs vous alerter une nouvelle fois sur le travail dominical. Les lois adoptées en 2008 et 2009 sous la présidence de M. Sarkozy ont abouti à une libéralisation, notamment dans le secteur de la grande distribution à dominante alimentaire. Ainsi, désormais, des femmes – qui sont majoritaires dans ces grandes surfaces – travaillent le dimanche au tarif de la semaine. C’est une régression pour ces salariées, aussi bien en termes de rémunération que de qualité de vie. Je compte donc sur notre ministre et sa détermination pour évoquer très sérieusement cette question qui concerne de nombreuses femmes – qui, en outre, travaillent le plus souvent à temps partiel.

Mme Martine Pinville. Madame la ministre, je voulais attirer votre attention sur les femmes âgées immigrées, qui sont arrivées par le biais du regroupement familial, avec un visa de tourisme, ou par d’autres moyens. Parmi elles, certaines ont travaillé, mais peu et sur de très courtes périodes. Elles ont une double peine : celle d’être femmes et celle d’être étrangères. C’est un sujet important, sur lequel nous devons nous pencher.

M. Sébastien Denaja. Madame la ministre, je vous ai entendu avec satisfaction rappeler que l’égalité entre les femmes et les hommes devait être un des objectifs de la réforme des retraites. En effet, cette dernière doit d’abord être une réforme de justice, une réforme pour l’égalité, avant même d’être une réforme comptable. Améliorer le sort des femmes au moment de la retraite est un enjeu positif et mobilisateur. Et, comme l’a rappelé notre collègue, la retraite est le premier sujet de préoccupation des personnes que nous recevons dans nos permanences.

Je voulais saluer également la prise en compte globale de la problématique. Il ne faut pas en en effet se limiter à la période des retraites. En amont de la retraite, il y a le travail des femmes. En aval, il y a la fiscalité applicable aux femmes retraitées. Avez-vous des éléments à nous communiquer sur ce dernier point ?

Mme la présidente Catherine Coutelle. Où en est-on de la suppression de la demi-part fiscale ? L’année dernière, j’avais tenté d’intervenir par amendement sur ce sujet, qui me tient à cœur. En effet, certaines personnes, en raison de cette suppression, peuvent devenir imposables et être soumises à de nouvelles charges dont elles étaient auparavant exonérées.

Mme Virginie Duby-Muller. Madame la ministre, je m’interroge sur le choix fait par François Hollande de prolonger la durée de cotisation plutôt que de reculer l’âge légal de la retraite. Cela pénalisera davantage les femmes qui ont le plus souvent des carrières incomplètes, et donc moins d’années de cotisation. Ne vaudrait-il pas mieux augmenter l’âge légal de départ à la retraite, en prenant en considération, par exemple, les années consacrées à l’éducation des enfants, lesquelles seraient ainsi davantage valorisées ?

Ensuite, j’ai l’impression qu’il y a une dichotomie entre votre discours, pétri de bonnes intentions – agir à la racine et réduire à la fois la situation de précarité des femmes et les inégalités professionnelles – et les mesures qui ont été récemment mises en œuvre par le Gouvernement. Le taux d’activité des femmes françaises est parmi les plus élevés et le taux de natalité est le plus important d’Europe. Or tout semble fait pour qu’elles préfèrent rester chez elles que de reprendre leur activité professionnelle : baisse du crédit d’impôt pour les emplois à domicile, durcissement des conditions d’attribution de la prestation d’accueil du jeune enfant – PAJE, révision du CLCA, baisse du quotient familial, suppression de la réduction d’impôt pour frais de scolarité.

Je me demande donc si l’on pourra continuer à réduire les disparités de pensions entre les femmes et les femmes, et atteindre l’objectif de faire disparaître cet écart de 20 % à l’horizon de 2040.

Mme Monique Orphé. La population de La Réunion est plus jeune que celle de l’hexagone. Nous avons 100 000 seniors, dont le niveau de retraite est très faible. 30 % touchent l’allocation de solidarité aux personnes âgées – ASPA – contre 7 % dans l’hexagone. Comment améliorer le salaire de référence ?

Certaines femmes arrivent à l’âge de la retraite complètement « cassées ». Celles qui travaillent dans les administrations publiques et les collectivités, dans les cantines ou les écoles maternelles, finissent par être atteintes de diverses pathologies comme les troubles musculosquelettiques – TMS – ou le diabète. Mais elles doivent attendre pour partir à la retraite parce qu’elles n’ont pas suffisamment de trimestres. Quand elles partent, elles ne touchent que la moitié de leur salaire. En fin de compte, elles ne gagnent pas plus qu’une personne qui n’aurait jamais travaillé. Ne pourrait-on pas améliorer le taux de liquidation ? Pourrait-on faire en sorte que ces femmes qui connaissent de graves difficultés de santé à 55 ou 60 ans, puissent partir et attendre de toucher une retraite à taux plein à 65 ans ?

Mme la ministre. Madame la présidente, vous vous demandiez si on allait vers une refonte complète des droits familiaux. Le rapport Moreau suggère leur remise à plat, avec création d’une majoration dès le premier enfant, et non plus à partir du troisième, comme c’est le cas pour l’actuelle bonification de pension.

Plus précisément, le schéma qui est proposé s’organise autour de deux mécanismes : d’abord, un dispositif unique de compensation de la réduction d’activité pour enfants, qui serait issu d’une fusion de l’AVPF et de la MDA ; ensuite, la mise en place d’une majoration de pension, qui serait liée à l’accouchement ou à l’adoption, et qui serait issue de la refonte de la bonification de pension pour trois enfants et de la MDA.

La commission Moreau a également envisagé d’autres schémas de réformes plus modestes. On pourrait se contenter, par exemple, de plafonner ou de forfaitiser la majoration de pension pour trois enfants, ou de mettre en place un dispositif de non-cumul entre l’AVPF ou la MDA. Plusieurs pistes ont été lancées.

Pour en avoir discuté, notamment avec Mme Yannick Moreau, je pense que le rapport n’a pas été suffisamment ambitieux en matière de refonte des droits familiaux. La commission n’est d’ailleurs pas allée au bout des simulations que l’on pouvait faire. Il faut donc continuer à travailler sur le sujet. L’Institut des politiques publiques, qui est très avancé dans son travail, est arrivé au constat qu’une remise à plat vraiment ambitieuse des avantages familiaux pourrait permettre de réduire de six points l’écart de pension entre les femmes et les hommes, ce qui conforte mon point de vue.

Mme la présidente Catherine Coutelle. Aura-t-on le temps de procéder à la refonte des droits familiaux dans le cadre de cette réforme, ou faudra-t-il remettre ce travail à plus tard ?

Mme la ministre. Je souhaite évidemment qu’on le fasse dans le cadre de cette réforme. Le rapport de l’IPP sera rendu public dans les jours qui viennent et sans doute pourrez-vous le recevoir dès la semaine prochaine. Vous serez donc à même de contribuer à ce travail. Madame la présidente, vous vous interrogiez sur le rôle du Parlement. Il est évident que vos propositions sur ce sujet sont très attendues.

Vous m’avez également demandé pourquoi on ne reviendrait pas sur le report à soixante-sept ans de l’âge de départ à la retraite. Que les choses soient claires : je partage l’idée que les mécanismes de décote de 2010 ont pénalisé les femmes. J’ai demandé à Mme Yannick Moreau pourquoi elle n’avait pas chiffré cette éventualité. Elle m’a répondu qu’elle ne disposait pas de suffisamment d’éléments pour le faire. C’est un sujet que l’on peut en effet regarder de plus près, mais il m’est difficile de vous en dire plus aujourd’hui.

Ensuite, sur le temps partiel, j’avais discuté avec vous d’une mesure qui a été reprise par la commission Moreau, et que je trouve intéressante : un salarié à temps partiel pourrait reporter d’une année sur l’autre les heures excédentaires qui n’ont pas donné lieu à validation de trimestres. Par exemple, une femme qui aurait cotisé 750 heures payées au SMIC validerait trois trimestres, donc trois fois 200 heures. Mais les 150 heures qui resteraient pourraient être reportées pour valider un autre trimestre. Cela augmenterait donc le nombre de trimestres validés.

Je pense qu’il faut aller dans le sens de cette proposition. Pour autant, cela ne résout pas le problème que vous avez été plusieurs à aborder : comment faire en sorte de rendre effective la possibilité laissée, par la loi, aux employeurs de surcotiser ? Nous pourrions au moins essayer d’obtenir que, dans les branches qui n’auraient pas conclu un accord sur les modalités d’organisation du temps partiel comme cela leur est imposé aujourd’hui par l’ANI, cette cotisation équivalent temps plein soit réclamée avec davantage de fermeté. Mais c’est le type de sujet qui sera abordé avec les partenaires sociaux. Nous y reviendrons après la conclusion de l’accord de demain, et je referai le point avec vous.

Mme Gueugneau s’est inquiétée des petites retraites. Là encore, le rapport Moreau fait des propositions intéressantes. On pourrait fixer une règle selon laquelle le montant minimal de la pension de retraite doit être équivalent à 85 % du SMIC pour les carrières complètes. C’est un point que l’on est en train d’étudier, car il faudra aussi s’intéresser aux carrières incomplètes. Ce serait une avancée intéressante.

S’agissant des services à la personne, vous avez tout à fait raison. Nous avons intérêt à ce qu’ils se développent, si ce n’est qu’ils créent par nature des emplois à temps partiel. Mais nous sortons là de la réforme des retraites. Quoi qu’il en soit, j’ai évoqué à plusieurs reprises cette question avec le Premier ministre. Je souhaite vivement que l’on s’attaque de façon ambitieuse au chantier des services à la personne et que l’on en étudie tous les aspects.

Les services à la personne libèrent certaines femmes : en déléguant un certain nombre de tâches domestiques, elles peuvent travailler. Mais nous devons nous préoccuper de ceux qui exercent ces tâches, et qui sont principalement des femmes. Or nous n’avons peut-être pas suffisamment travaillé sur la qualité de ces emplois – exercés souvent au domicile de l’employeur. L’un des réponses est la création de filières, mais aussi la professionnalisation des salariés. J’ai souhaité m’impliquer dans ce chantier des services à la personne, qui représentent un gisement d’emplois qu’il ne faut pas négliger. Vous en aurez des nouvelles assez prochainement.

Je pense avoir répondu à Mme Zimmermann à propos des droits familiaux. Et je suis d’accord avec elle : l’idéal serait d’aller plus loin que la loi de sécurisation de l’emploi, s’agissant du temps partiel.

Je répondrai à Mme Untermaier que le sujet des polypensionnés figure dans les priorités du rapport Moreau. La logique proposée consisterait à créer une passerelle entre les règles du régime général et celles des régimes spéciaux. C’est un sujet essentiel, qui concerne très souvent des femmes. Mais nous n’en sommes encore qu’au stade de la réflexion.

Je lui répondrai également que le non travail le dimanche doit rester la règle. Les conditions de travail et de rémunération qui sont faites aux femmes qui travaillent le dimanche, notamment dans les grandes surfaces, nous incitent à rester sur ce principe.

Mme Pinville m’a interrogée sur les femmes âgées immigrées. Nous étudions cette question dans le cadre des conventions bilatérales que nous réactualisons avec un certain nombre de pays concernés, notamment en Afrique du Nord. La question du statut et des conditions de vie des personnes âgées fait partie des sujets traités. Si vous le voulez, nous pourrons en reparler. J’aimerais que vous travailliez avec nous sur le sujet.

M. Denaja m’a interrogée sur la fiscalité appliquée aux veuves retraitées – la demi-part fiscale. Nous abordons ce sujet sous l’angle de la réduction de la pauvreté. Je vous l’ai dit, 700 000 femmes se trouvent sous le seuil de pauvreté, une fois arrivées à l’âge de la retraite. Mais la demi-part fiscale attribuée aux veuves peut aussi être considérée comme une niche fiscale. Nous allons nous en préoccuper.

Mme Gueugneau s’est inquiétée de la situation des conjoints collaborateurs. Il se trouve que la France a transposé la directive européenne de 2010, qui pose le principe d’égalité de traitement. Par ailleurs, certaines dispositions du futur projet de loi sur l’égalité entre les hommes et les femmes concerneront les congés de maternité et paternité. Mais vous avez raison, la réforme des retraites devra également s’intéresser à ces conjoints collaborateurs. J’examinerai avec attention les propositions que vous pourrez faire sur ce sujet. En effet, je n’ai pas l’impression qu’il ait été abordé par le rapport Moreau.

Madame Duby-Muller, vous voyez une contradiction entre le fait de chercher à remettre les femmes dans l’emploi et les mesures prises par le Gouvernement qui ne les inciteraient pas à retravailler.

Les mesures adoptées dans le cadre de la réforme de la politique familiale – à laquelle j’ai participé – visent à permettre aux femmes de concilier travail et vie personnelle. Celles que vous avez mises en avant comme, par exemple, la réduction du quotient familial, ne doivent pas en occulter d’autres, très importantes, comme la création de places de crèches, le doublement du complément familial ou la revalorisation de 25 % de l’allocation de soutien familial.

La réforme de la politique familiale répond à un objectif de solidarité avec les familles les plus en précarité, et de modernisation de notre politique familiale. Il s’agit, notamment, de prendre en compte le fait que les femmes travaillent – d’où la création de places de crèche.

Je reconnais, madame Orphé, qu’à La Réunion, la pauvreté est plus grande que dans l’hexagone et les enjeux bien spécifiques. M. Victorin Lurel sera présent, en tant que ministre des outre-mer, à la Grande conférence sociale, et il aura le privilège de pouvoir participer à différents ateliers. Ce sera pour lui l’occasion de porter les enjeux de La Réunion.

Mesdames et messieurs les députés, voilà ce que je pouvais vous répondre. Vous avez compris que de nombreuses questions sont encore à l’étude. Certes, l’exercice auquel nous nous sommes pliés aujourd’hui ne constitue qu’une étape. Mais il était important de réaffirmer nos objectifs et de poser ces questionnements pour pouvoir avancer. Nous verrons comment s’engagera la Grande conférence sociale, qui devrait se terminer à la fin du mois de septembre. Les suggestions que vous pourrez nous faire parvenir d’ici là seront les bienvenues.

Mme la présidente Catherine Coutelle. Madame la ministre, nous apprécions beaucoup la manière dont vous avez engagé ce travail, dont nous serons les « coproducteurs ».

Le rapport Moreau suggère la mise en place d’un comité de pilotage des retraites. Celui-ci pourra proposer des ajustements, ce qui est fort judicieux. En effet, les mesures que l’on prend en matière de retraites ont parfois des conséquences que l’on n’avait pas envisagées au départ.

Mes chers collègues, le message que nous devons adresser à nos concitoyens est que nous allons améliorer les retraites, particulièrement les plus faibles d’entre elles. Ceux qui le peuvent devront faire des efforts, mais il n’est pas question de toucher aux petites et très petites retraites. Certains le craignent pourtant.

Madame la ministre, vous avez lancé un certain nombre de pistes. Je peux vous assurer que nous allons les étudier. Nous souhaitons vous revoir. Nous auditionnerons début juillet, comme vous l’avez suggéré, l’Institut des politiques publiques qui va remettre, à votre demande, un rapport sur les droits familiaux. Cette question est très importante, dans la mesure où les droits familiaux constituent une variable d’ajustement pour les retraites des femmes.

L’audition s’achève à 18 heures 45.

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Informations relatives à la Délégation

La Délégation a désigné, sur le projet de loi en préparation, pour l’égalité entre les femmes et les hommes :

– Mme Barbara Romagnan, rapporteure d’information (égalité dans la vie professionnelle et lutte contre la précarité) ;

– Mme Brigitte Bourguignon rapporteure d’information (parité) ;

– Mmes Edith Gueugneau et Monique Orphé, rapporteures d’information (protection des femmes contre violences).