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Mardi 9 octobre 2012

Séance de 17 heures

Compte rendu n° 2

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Gilles Boeuf, président du Muséum national d’histoire naturelle

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu M. Gilles Boeuf, président du Muséum national d’histoire naturelle.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Soyez le bienvenu, Monsieur le président du Muséum national d’histoire naturelle. Un certain nombre d’entre nous ont participé à la conférence environnementale, notamment à la table ronde n° 2 sur la biodiversité, que vous avez animée. Or, la feuille de route établie lors de cette conférence prévoit le vote d’une loi-cadre sur la biodiversité en 2013, ainsi que la création d’une agence de la biodiversité. En vue d’apporter notre contribution au contenu de ce projet de loi, nous avons prévu d’organiser des rencontres sur la biodiversité, dont la présente constitue la première.

M. Gilles Boeuf évoquera certainement l’état de la biodiversité en France, les causes de son recul, et il ouvrira ainsi des pistes d’action et de réflexion.

Je considère pour ma part que la compétence en matière de protection et de valorisation de la biodiversité doit être transférée aux collectivités territoriales – en particulier aux régions – dans le cadre de l’acte III de la décentralisation. Nos auditions, l’examen prochain de cette loi-cadre et l’acte III de la décentralisation sont donc très étroitement liés.

M. Gilles Boeuf, président du Muséum national d’histoire naturelle. Le thème de la table ronde à laquelle Jean-Paul Chanteguet et moi-même avons participé il y a environ deux semaines m’a surpris, puisqu’il s’agissait de savoir comment « faire de la France un pays exemplaire en matière de reconquête de la biodiversité » – la notion de reconquête supposant qu’on l’avait quelque peu perdue auparavant.

Je vous remercie de m’avoir invité car dans ce pays, les relations entre parlementaires et chercheurs ne sont pas assez étroites. Ainsi n’y avait-il que quatre chercheurs – venus un peu par hasard et peut-être pas en qualité de chercheurs – sur les 300 personnes présentes lors de la conférence environnementale. Or, en tant que chercheur scientifique public, j’ai toujours été extrêmement attaché à nos relations avec le monde politique et le monde social. Quelle serait notre perception des enjeux de changement global, de perte de diversité biologique et de changement climatique – qui ont des conséquences sociales – sans les scientifiques ? Si ceux-ci n’ont aucune envie de prendre le pouvoir ni de décider, leur rôle est important dans le débat public : il consiste à apporter des avis éclairant la prise de décision et les méthodes de gestion de notre environnement. Et si je me suis longtemps défendu de tenir un discours politique, je m’aperçois que j’ai fini par en avoir un, non pas certes un discours partisan mais un discours de scientifique engagé. Lorsqu’en février 2007, le Président Chirac réunit une conférence à l’Élysée sur le climat et la biodiversité, les grands experts du climat étaient présents à ses côtés : Jean Jouzel, Édouard Bard, du Centre européen de recherche et d’enseignement des géosciences de l’environnement, et Hervé Le Treut, alors que Michel Loreau, Jacques Blondel, Robert Barbault, Yvan Le Maho et moi-même, en tant qu’écologues de la diversité, étaient dans la salle. Auprès du Président se trouvait également une « strate » intermédiaire constituée de Nicolas Hulot, Jean-Louis Étienne, Nicolas Vanier et Yann Arthus Bertrand. Mais pourquoi les scientifiques ont-ils besoin d’une telle strate intermédiaire pour dialoguer avec les élus ?

Je préside l’un des trois plus grands musées d’histoire naturelle du monde, avec la Smithsonian de Washington et le National History Museum de Londres. Il ne s’agit pas d’un musée d’art au sens classique du terme puisque les 70 millions d’objets qui y sont conservés sont d’abord des objets d’études, avant d’être des objets muséographiques. Nous avons cinq missions complémentaires : la recherche scientifique – notamment en matière de biodiversité –, l’enseignement, la gestion des collections nationales, l’expertise – avec plus de mille avis rendus par an, essentiellement à destination du ministère de l’écologie et du développement durable – et la dissémination muséographique, tous publics confondus.

La biodiversité, je m’y intéresse depuis longtemps : au cours des quatre dernières années, j’ai écrit sur le sujet une quarantaine d’articles scientifiques ou de chapitres de livres, donné à 250 conférences en France et dans le monde, participé à une cinquantaine d’émissions de télévision et de radio et publié dans des quotidiens tels que Le Parisien, Ouest France ou Le Monde. En outre, le Conseil scientifique du patrimoine naturel et de la biodiversité du ministère de l’écologie a collectivement écrit et distribué aux élus trois petits ouvrages sur la biodiversité en 2007, 2008 et 2012 : les histoires que l’on y raconte visent à sensibiliser le plus possible le lecteur au thème de la biodiversité et à la rendre aussi compréhensible que possible. Il y est question du secret de la nature et de ses réactions inimaginables aux agressions. Nos expérimentations ont en effet très souvent des résultats contraires à nos intuitions.

L’année 2010 a été « l’année de la biodiversité ». Étant donné les recommandations de Johannesburg en la matière, lors d’une rencontre avec des étudiants de l’École normale supérieure le 23 décembre 2009, je leur annonçai donc qu’une semaine plus tard, nous allions vivre un événement extraordinaire : la fin de l’érosion de la biodiversité. Cependant, les ayant retrouvés le 4 janvier, j’ai dû annoncer un échec : en effet, lors de la conférence de l’Unesco des 25-26 janvier 2010 à Paris, nous avons constaté que les recommandations formulées à Johannesburg, huit ans auparavant, n’avaient pas été tenues. On s’est contenté de reporter l’échéance à 2020. Mais comment réussir d’ici 2020 ce que l’on n’a pas été capable d’accomplir depuis 2002 ? En mai 2010, nous avons tout de même inauguré la conférence environnementale française à Chamonix qu’organisait la ministre de l’écologie de l’époque, Chantal Jouanno.

En tant que président du Muséum, je m’étais fixé trois buts pour cette année 2010 : définir la biodiversité, expliquer pourquoi il faut s’en préoccuper, et surtout, faire en sorte que l’on ne cesse pas de s’y consacrer après le 31 décembre 2010.

La biodiversité ne consiste pas en un catalogue d’espèces : la biodiversité, terme né il y a vingt-sept ans à peine, se définit comme la fraction vivante de la nature. Il ne faut pas confondre biodiversité et nature : comme en témoigne une météorite extraordinaire que possède le muséum et qui est dotée de la signature géochimique de la formation du Soleil. La biodiversité, elle, est apparue il y a environ 3,85 milliards d’années, lorsque la première cellule apparue dans l’océan ancestral s’est scindée en deux cellules clones qui, elles-mêmes, ont commencé à se scinder – soit 700 millions d’années après la mise en place du Soleil et de la Terre, au cours desquelles la nature fut certes présente sur la Terre, mais pas la vie.

Ensuite, la biodiversité est quelque chose dont on ne peut se passer. Ainsi sommes-nous tous dans cette salle de merveilleuses odes à la biodiversité, car nous sommes remplis de bactéries. Celles-ci existent depuis qu’il y a de la vie sur Terre et sont sorties de l’océan ancestral il y a 800 millions d’années, après s’y être divisées. Si nous sommes constitués de cent milliards de cellules fort diverses – neurones du cerveau, globules rouges du sang, cellules musculaires ou de notre cartilage – issues de la cellule initiale qu’est l’ovocyte maternel fécondé par un minuscule spermatozoïde paternel, l’organisme humain contient cependant mille fois plus de bactéries que de cellules, présentes dans nos cheveux, nos oreilles, notre intestin... Nous sommes donc partout entourés de cette diversité biologique indispensable pour nous qui en sommes des fragments : une diversité que nous retrouvons dans tout ce que nous mangeons et avec laquelle nous coopérons. L’exemple des médicaments illustre son intérêt industriel : en effet, les molécules anticancéreuses, anti-champignons, anti-virales, anti-bactérielles et antibiotiques sont issues de morceaux de plantes ou d’animaux marins ou terrestres, à l’instar de l’AZT, première molécule active contre le SIDA, que l’on trouve dans le sperme du hareng. Cette exploitation industrielle pose d’ailleurs un problème de piraterie et de pillage des plantes des populations autochtones en vue d’y trouver certaines molécules.

C’est pourquoi plus l’on abîme la biodiversité, plus l’on touche au capital naturel qui nous entoure et plus l’on crée de désordres. Or, en France, on est bien plus capable de valoriser les aspects culturels que naturels de notre patrimoine, alors même que les deux aspects sont liés, l’humain ayant construit une culture sur la nature. À cet égard, j’ai d’ailleurs beaucoup apprécié les récents discours du Président de la République et du Premier ministre qui, enfin, ont clairement affirmé qu’opposer la question économico-financière, la croissance économique et le plein emploi, considérés comme primordiaux dans la crise actuelle, d’une part, à la prise en compte des questions environnementales, d’autre part, c’est oublier que ces enjeux sont intimement liés, tant il est vrai que la crise actuelle est aussi une crise de raréfaction des ressources – qu’elles soient minérales ou vivantes.

Afin de mettre en évidence l’état actuel de la biodiversité et de proposer de meilleures méthodes de gestion des environnements, il nous faut nouer une relation intime entre les sciences naturelles et les sciences humaines et sociales. Notre éducation demeure en effet trop compartimentée, tant du point de vue des élèves – auxquels il conviendrait d’expliquer l’importance des mathématiques dans la compréhension des phénomènes et de l’anglais pour parler de chimie au niveau international – que des professeurs, eux-mêmes peu habitués à travailler de manière transversale. Or, le Muséum est l’une des institutions qui a le plus réfléchi à ces questions transversales, étudiant les populations autochtones, les océans, les mathématiques pures, la chimie, la biologie, la biologie moléculaire... C’est en effet la mise en relation de toutes ces matières qui permet aux chercheurs de répondre aux questionnements de la société et d’aider les élus, confrontés à de dramatiques problèmes environnementaux dans leur circonscription, à y faire face et à les expliquer. Ainsi, outre-mer, la confrontation aux espèces invasives introduites par l’homme, tels le chien, le chat ou le poulet, qui détruisent la faune locale – ainsi des chats vis-à-vis des oiseaux endémiques en Nouvelle Calédonie. En métropole, c’est la migration de la population vers les côtes qui pose un réel problème.

Mettre fin à l’érosion de la biodiversité constitue un travail de longue haleine. C’est pourquoi les scientifiques requièrent l’aide des politiques. Aujourd’hui, le citoyen dispose d’une meilleure perception du changement climatique que de la biodiversité. A-t-on mal communiqué ou insuffisamment expliqué les choses ? A-t-on abordé la question sous un angle inadapté ? Comment communiquer sur les OGM, les nano-technologies et la biologie de synthèse ? Viscéralement opposé à tous les extrémismes, non pas écolo mais écologue, j’estime qu’il ne s’agit pas de revenir à la bougie mais d’arriver à un système d’harmonie et de partage. Comme l’illustre l’histoire de la vallée de Tautavel, à vingt personnes, les êtres humains peuvent vivre de la chasse et de la cueillette sans détruire leur environnement, mais avec sept milliards d’habitants, l’humanité utilise l’agriculture : c’est donc un autre débat.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Vous disiez à l’instant qu’à l’inverse de ce qui se passe pour le changement climatique, il n’y a pas assez de prise de conscience pour la biodiversité. Il nous faut donc tous faire preuve de pédagogie. Or, si vous nous indiquiez les causes, cela nous permettrait de comprendre ce que nous ne devrions pas faire.

M. Gilles Boeuf. La perte de biodiversité a quatre causes.

Tout d’abord, le lien entre pollution et destruction, qui explique deux tiers de cette perte : l’homme détruit le vivant, par exemple pour construire des villes ou des ports. L’homme pollue également. Et si le documentaire réalisé sur la décharge gérée par Veolia située à Villeneuve-Loubet illustre bien ce phénomène de pollution, celui-ci, loin de se réduire aux décharges et aux poubelles, existe partout, y compris dans les zones où l’homme est absent, tels que les océans Pacifique et Arctique : l’eau de mer est acide au Vanuatu et la viande des Inuits est contaminée, ce qui entre autres rend l’allaitement maternel dangereux.

La deuxième cause réside dans la surexploitation des stocks, dont les meilleurs exemples sont la forêt tropicale et les pêches maritimes. Or, à la différence du changement climatique, auquel on doit s’adapter avant de pouvoir le freiner, on peut agir contre la surexploitation. L’été dernier, malgré le conflit congolais, je me suis rendu en Ouganda pour y observer les gorilles et les chimpanzés : je me suis rendu compte de l’impact de l’humain sur ces populations animales que nous sommes seuls à pouvoir sauver. Et contrairement à ce que je croyais naïvement, les espèces économiques, telles que le thon rouge, sont menacées et cela n’empêchera pas les gens d’aller pêcher le dernier spécimen vivant, quel qu’en soit le prix – qui atteint des sommets pour le thon rouge.

Les espèces invasives constituent la troisième cause de perte de biodiversité. À la différence des espèces envahissantes, déjà présentes localement et qui se mettent à proliférer en raison d’activités humaines, celles-ci sont exotiques, c’est-à-dire qu’elles viennent d’ailleurs – tel le chat en Nouvelle Calédonie ou le frelon asiatique en France – et sont également beaucoup plus insidieuses. La plupart du temps, cela se passe de façon presque invisible dans un premier temps. Ainsi, à Oman, on voit proliférer depuis trois ans des algues rouges. L’explication : les tankers qui se délestent de leurs ballasts venu de la mer du Nord : douze milliards de tonnes d’eau contenant des bactéries, des virus, des champignons et des phéro-micro-organismes, qui, une fois rejetés à la mer, produisent des phénomènes pathologiques dans l’indifférence générale.

Enfin, la dernière raison en est le changement climatique. Et il faut être de très mauvaise foi pour affirmer que l’homme n’y est pour rien !

M. Jean-Yves Caullet. J’appartiens à une génération, qui, au moment du choix de ses études, se voyait offrir des boulevards en matière de biochimie, tandis que la systématique était considérée comme datant du siècle passé. Assiste-t-on aujourd’hui à un retournement de situation, grâce à notre intérêt pour la biodiversité ? Quels sont les efforts nécessaires pour permettre à un maximum de personnes de l’apprécier ?

Comment mesurer la valeur et l’intensité d’une biodiversité par rapport à une autre, étant donné qu’il est plus aisé de sensibiliser à la disparition d’une espèce visible qu’à celle d’un insecte tel que la mouche – que l’on écrase facilement d’une main alors même qu’elle contient autant d’informations génétiques que nous ?

Si les espèces invasives ne datent pas d’aujourd’hui, le brassage en est néanmoins beaucoup plus important désormais : quelles mesures imaginer pour éviter les accidents ?

Enfin, le stock d’espèces inconnues est extraordinairement important. La France, qui présente la particularité de comprendre des territoires extrêmement variés, notamment ultramarins, est-elle en mesure de relever un tel défi ?

Vous avez rendu un rapport à la précédente ministre de l’écologie, Mme Kosciusko-Morizet, intitulé L’apport des sciences participatives dans la connaissance de la biodiversité. Dès lors, pourriez-vous nous proposer une photographie des moyens du Muséum d’histoire naturelle et nous présenter un bilan, ainsi que les perspectives d’avenir des observatoires participatifs Spipoll et Vigie Nature ? Comment vous situez-vous entre la science participative et les lanceurs d’alerte ? Pourriez-vous dresser un bilan de la gestion du problème du frelon asiatique, espèce invasive la plus connue, ainsi que du Plan Abeille et des pollinisateurs sauvages ?

M. Stéphane Demilly. Si chacun connaît les activités destinées au grand public du Muséum, notamment l’emblématique Grande galerie de l’évolution, l’institution est aussi dédiée à la recherche et à l’enseignement. Le changement climatique faisant partie de vos nombreux thèmes de recherche, quelles sont les conclusions de vos travaux sur cet enjeu fondamental pour notre planète, sachant que le bilan du sommet Rio +20 de juin dernier est plus que mitigé, et la priorité accordée à la lutte contre le réchauffement climatique de plus en plus remise en cause ?

Quant aux secrets de la nature, ils sont une grande source d’intérêt pour l’industrie. C’est ainsi que l’industrie textile s’intéresse de plus en plus aux propriétés extraordinaires de la toile d’araignée. Le Muséum a donc probablement conclu des partenariats de recherche avec certaines entreprises sur ce sujet. Sans violer la confidentialité inhérente à ce type de contrats, pourriez-vous nous en fournir quelques exemples ?

Enfin, quels sont les principaux projets actuels de coopération ou d’échanges internationaux du Muséum, notamment dans le domaine de la biodiversité ?

Mme Laurence Abeille. Quels sont les projets ou travaux en cours au Muséum en matière de biodiversité en milieu urbain ?

M. Gilles Boeuf. Je rejoins tout à fait M. Jean-Yves Caullet quant à la systématique : le systématicien est aujourd’hui l’une des espèces les plus menacées de disparition, alors que c’est lui qui est le plus à même de mettre en évidence la biodiversité qui nous entoure. Ne faudrait-il pas, grâce au ministère de l’Écologie, mettre en place un corps d’ingénieurs spécialisés dans la description de la diversité biologique, afin de permettre aux jeunes chercheurs de valoriser leur travail en la matière ? En effet, actuellement, les chercheurs publics français sont appréciés et promus en fonction de leurs publications scientifiques. Or, les éditeurs de revues ne s’intéressent pas du tout à la description d’espèces nouvelles. Dans les musées du monde entier, il existe actuellement deux millions d’espèces déposées – l’homo sapiens inclus –, sur les dix à vingt millions d’espèces marines et continentales vivant sur la planète. Si on prend une douzaine de millions, il reste donc une douzaine de millions d’espèces à cataloguer. Et comme, depuis dix ans, entre seize mille et dix-huit mille espèces sont décrites chaque année – pour moitié par des « amateurs », le Muséum devant ensuite organiser cette connaissance –, il nous faudra entre 500 et 1 000 ans pour constituer un catalogue de ce qui nous entoure, même si, encore une fois, la biodiversité ne se réduit pas un catalogue d’espèces mais relève bien davantage d’interrelations entre les êtres vivants. En outre, la systématique s’est considérablement modernisée puisque désormais, lorsqu’on dépose une espèce nouvelle, on commence par en séquencer vingt gènes pour ensuite créer un code barre permettant de la distinguer beaucoup plus rapidement.

La valeur écologique des différentes espèces ne correspond pas bien sûr à un prix et n’est pas identique pour toutes. Certaines d’entre elles, dites « espèces clefs de voûte », organisent tout un écosystème, ce qui signifie que leur retrait le modifie entièrement – à l’instar de l’étoile de mer sur le littoral américain ou du castor, auquel deux mille espèces sont associées. Ainsi, s’il y a probablement plus d’espèces et de biodiversité en Guyane et dans les autres territoires ultramarins qu’en métropole, cela ne signifie pas que toutes les espèces qui y vivent aient été enregistrées dans les bases de données de notre inventaire national du patrimoine naturel – loin de là – ni que la valeur écologique de la biodiversité française se trouve essentiellement outre-mer. Les organisations non gouvernementales luttent pour défendre des espèces emblématiques telles que le tigre, le chimpanzé, l’ours polaire ou la baleine, et c’est bien normal, cela leur permet de récolter des financements. Au Muséum en revanche, nous luttons pour protéger « le vrac », la limace des Galapagos et le moustique des Bermudes qui, eux aussi, font partie des écosystèmes.

Quant aux espèces invasives, elles sont apparues dès que l’homme a commencé à se déplacer, ce qu’il a toujours fait en compagnie de ses espèces favorites, à commencer par le chien, il y a quinze mille ans, puis la chèvre et le cheval, il y a environ six mille ans, et surtout les rats et les souris. Ce transport d’animaux a créé des chocs dans certaines régions du monde, en particulier dans les îles du Pacifique où souvent, l’homme a épuisé le système pour ensuite repartir. L’exemple de la pêche à la crevette au Liban – où une espèce venue de la mer Rouge en a remplacé une autre native – est également éloquent. Il nous faut donc être très attentifs à la question, et légiférer pour interdire par exemple le rejet, sans traitement et en toute impunité, des eaux de ballast des grands navires qui apportent partout des micro-organismes extrêmement dommageables pour les environnements.

À l’heure actuelle, seules 20 % des espèces continentales et 14 % des espèces marines sont identifiées, d’où la nécessité d’un travail systémique. Mais hâtons-nous car, bien souvent, les espèces ont déjà disparu au moment où elles sont décrites ! S’il faut bien évidemment continuer à faire des descriptions d’espèces, il faut aussi trouver d’autres moyens d’évaluer la biodiversité, en particulier en Guyane, en Nouvelle-Calédonie et aux Antilles. L’outre-mer français est constitué de territoires, soit très petits et ultra peuplés, soit immenses et non habités. L’établissement de la diversité sur des listes reste très insuffisant : il est nécessaire de trouver des indicateurs, des scénarii d’évolution qui nous permettront de mieux estimer la biodiversité.

Je suis très attaché aux sciences participatives et j’ai un profond respect pour les personnes qui travaillent avec nous. Les programmes s’appuient sur un protocole commun. Je citerai STOC (suivi temporel des oiseaux communs) ; SPIPOLL (suivi photographique des insectes pollinisateurs), qui mobilise 10 000 personnes pour 1,5 million d’heures d’observation et qui a permis de montrer l’évolution des abeilles dans les terres agricoles et dans les terres non agricoles ; VigieNature, dont le but est d’observer les oiseaux communs, les escargots et les papillons de jardin, que nos compatriotes observent très attentivement, etc. Il nous appartient ensuite à nous, scientifiques, de restituer ces données. Le Muséum a un rôle central dans ce domaine, qui intéresse désormais également le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), mais aussi l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) dont le nouveau président souhaiterait mener avec nous deux programmes portant sur l’évolution des milieux, où l’enquêteur de base serait l’agriculteur. Donnez-nous les moyens de mener ces programmes très intéressants, qui présentent un double intérêt : obtenir des données et responsabiliser les observateurs.

Je suis un lanceur d’alerte, tout en me défendant d’être un catastrophiste : je m’emploie non pas à désespérer mes étudiants, mais à leur exposer la réalité. Je combats deux attitudes, encore fréquentes chez les scientifiques comme dans le grand public : le déni et la triche. Comment peut-on accepter d’entendre que « Dieu nous sauvera en 2100 » à propos de l’étude scientifique portant sur la montée des eaux en Caroline du Nord d’ici à la fin du siècle ? Comment accepter la falsification des données ? Travaillons avec des gens sérieux. Vous avez un rôle très important à jouer en la matière.

Le frelon asiatique n’est pas l’envahisseur qui m’inquiète le plus. Les plantes, comme l’ambroisie d’Uruguay, responsable de crises d’asthme chez 20 % des Français, les jussies, présentes dans le Sud de la France, et la jacinthe d’eau me préoccupent davantage. Claire Villemant, grande spécialiste du frelon asiatique, pourrait vous renseigner mieux que moi sur cet insecte.

L’Égypte, le Liban et la Syrie ont perdu 90 % de leurs abeilles. Dans certaines régions de Chine, elles ont même totalement disparu et ce sont les femmes qui doivent effectuer les opérations de pollinisation. Il est impératif de se pencher sur cette question très préoccupante. Les insectes pollinisateurs rendent un service au niveau mondial estimé à 172 milliards d’euros par an !

J’en viens à la situation du Muséum, placé sous la tutelle conjointe du ministère de la recherche, qui assure l’essentiel de notre financement, et du ministère de l’écologie. Je précise que mon mandat prendra fin dans quatre mois et que l’État a décidé de supprimer les fonctions de directeur et de président au profit de celle de président-directeur général.

Aujourd’hui, le Muséum connaît une situation dramatique par manque de moyens. D’abord, je crains qu’il soit incapable de rembourser les traites, très élevées, du projet du zoo de Vincennes réalisé sous forme de partenariat public-privé, dont il aurait dû, à mon avis, se contenter d’être le partenaire intellectuel et scientifique. Ensuite, il lui manque 20 millions d’euros pour achever le Musée de l’Homme, installé palais de Chaillot à Paris, d’autant que la création d’un musée de l’histoire de l’humanité constitue un véritable défi. Aidez-nous, sinon ce projet n’aboutira pas.

J’ajoute que l’implantation sur l’Îlot Poliveau des bâtiments de la faculté de Censier, qui doit être désamiantée, ce que bien entendu je ne conteste pas, se fera malheureusement au détriment des terrains du Muséum.

Enfin, le Muséum manque cruellement de crédits pour la paléontologie, alors qu’il possède les plus belles collections européennes, sinon mondiales, de fossiles vertébrés. Notre galerie va fermer. La situation est tout aussi dramatique pour l’entomologie, alors que nous possédons la plus grande collection d’insectes au monde, avec 41 millions de spécimens.

Je ne dis pas que l’État a oublié le Muséum – qui est traité comme les autres – mais qu’il doit, pour le sauver, imaginer de grands projets, à l’image de la Grande Galerie de l’évolution.

S’agissant du changement climatique, nous regardons comment les informations du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) peuvent nous aider à gérer les scénarii que l’État nous demande. Nos nombreux travaux sur les migrations et les pertes de diversité biologique, menés grâce à l’aide des sciences participatives, ont ainsi démontré que, sur dix-huit ans, nos oiseaux ont migré de 33 kilomètres vers le Nord, et les papillons de 114 kilomètres.

Comme je l’ai écrit sur mon blog du Monde, la biodiversité a été la grande oubliée de la conférence Rio+20. La déclaration finale se contente de multiples formules du genre « Nous réaffirmons », « nous prenons acte », « nous notons ». Quel manque de courage ! Sur cinq décisions qui commencent par « nous décidons », trois ne servent à rien ! (Sourires). La question centrale est de savoir comment passer de connaissances scientifiques à un vrai travail sur le terrain.

Je me suis rendu à la conférence environnementale des Ateliers de la terre, la semaine dernière, à Évian, où deux mondes étaient représentés : les puissants et le peuple. J’y ai vu l’Indien Bunker Roy, fondateur du « collège des pieds nus » qui travaille à la formation de femmes âgées à l’énergie solaire : on a pu ainsi donner accès à cette énergie à 36 000 villages en Inde et en Afrique ! Inspirons-nous de cet exemple magnifique pour agir dès maintenant. Et arrêtons d’opposer la question de l’écologie, du partage et du bien-être, à celle de l’économie et du plein-emploi ; faute de quoi, nous irons droit dans le mur !

Le 10 décembre prochain, j’organiserai, en partenariat avec le Commissariat général au développement durable, un colloque intitulé « Systèmes bio inspirés : une opportunité pour la transition écologique », qui amènera des industriels, des ingénieurs et des scientifiques à réfléchir aux moyens d’aider les entreprises en s’inspirant de systèmes vivants naturels. Deux exemples. Il y a quelques années, les ingénieurs se sont inspirés de la vitesse de vol des grands rapaces pour donner aux ailes d’avion un profil relevé, ce qui a permis d’économiser 15 % de carburant ! Dans le désert de Libye, vit un petit coléoptère dont la structure des élytres lui permet de capter sa réserve d’eau – une goutte – pour la journée : cette structure a été modélisée pour produire de l’eau dans le désert du Chili ! Faisons preuve d’humilité : inspirons-nous de cette biodiversité, dont nous faisons partie !

En 2006, nous avons mené une importante expédition au Vanuatu. Nous nous sommes également rendus à Madagascar et au Mozambique. Nous sommes actuellement présents à Madang, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, et projetons de nous rendre en Guyane et en Nouvelle-Calédonie. La préservation de notre crédibilité nous impose de rendre la biodiversité que nous avons étudiée aux gens des pays qui nous ont accueillis : j’ai moi-même ramené, en juin 2011, des boîtes de coléoptères et 400 espèces de plantes au premier ministre du Vanuatu.

Enfin, on sait que la population mondiale se concentre désormais dans les villes, tendance qui s’accélèrera au cours des vingt prochaines années. Le Gouvernement a annoncé un objectif de « zéro artificialisation des sols » en 2025. Une vraie écologie urbaine se développe, grâce aux sciences participatives : 10 000 personnes sur Paris et les grandes villes ont répondu à notre programme « Sauvages de ma rue » ! Bref, ramenons la campagne en ville car, pour l’avenir, il nous faudra des villes totalement vertes.

Mme Chantal Berthelot. Déforestation, destruction des habitats, perte de la biodiversité, le mercure n’est pas le seul dommage infligé à l’environnement guyanais par l’orpaillage illégal. Quelles sont les pistes de travail pour reconquérir cette biodiversité ?

M. Jean-Marie Sermier. Depuis 1992, le terme de « biodiversité » est pris en compte au niveau international, notamment par la Convention sur la diversité biologique (CDB), adoptée à Rio. En France, la stratégie nationale pour la biodiversité a été lancée en 2004 sous la présidence de Jacques Chirac, le conseil général de l’environnement et du développement durable a été mis en place en 2011, et la loi Grenelle II a consacré plusieurs avancées, notamment la trame verte et bleue.

Monsieur le directeur, comment situez-vous la politique française sur la biodiversité au regard de celle des autres pays ?

Actuellement, entre 17 000 et 100 000 espèces sont susceptibles de disparaître de notre planète chaque année. Dispose-t-on d’indicateurs scientifiques fiables en la matière ?

Mme Marie-Line Reynaud. Il me semble que les travaux du Muséum mettent davantage l’accent sur le vivant – la faune et la flore –, que sur la géologie. Notre pays comporte pourtant de remarquables sites géologiques et paléontologiques, tel celui d’Angeac-Charente dans ma circonscription sites qu’une des dispositions du Grenelle 2 permet de préserver. Comment les protéger ? Travaillez-vous dans ce domaine ?

M. Édouard Philippe. Maire du Havre, où se trouvent de nombreux bassins, je suis un grand défenseur de la biodiversité en milieu urbain. Comme il existe des espèces clés de voûte, existe-t-il des espaces où le dispositif légal de protection de la biodiversité devrait être renforcé ? Autrement dit, que pensez-vous du caractère systématique de l’application de la loi ?

M. Philippe Plisson. Comment intégrer juridiquement l’outil « aire marine protégée » ? Quel est l’état d’avancement du projet de convention ayant pour objectif la protection des mers et des océans ?

En raison de la pénurie de chercheurs, un certain nombre de travaux restent inachevés, comme l’étude portant sur la famille des lombricidés. Quelle solution voyez-vous à ce problème ?

Mme Geneviève Gaillard. Monsieur le président, vos propos sont passionnants, et nous avons toujours autant de plaisir à vous écouter.

L'adoption d'une loi « biodiversité » dès 2013 et la création d’une agence nationale dédiée ont été confirmées par la feuille de route de la Conférence environnementale. Pensez-vous que cette agence nationale de la biodiversité, calquée sur le modèle de l’ADEME, constituera un bon outil ?

M. Charles-Ange Ginesy. Ces dernières années, les conférences de Copenhague et de Kyoto, tout comme le Grenelle de l’environnement, ont constitué des avancées. Néanmoins, la pression visant à créer des réserves naturelles dans lesquelles l’homme n’aurait plus sa place m’inquiète. L’activité agricole comme celle de nos chasseurs, notamment pour la protection des habitats, présentent en effet un grand intérêt. Faut-il accepter ces réserves totalement naturelles que quelques « ayatollahs » veulent nous imposer ?

M. Jean-Pierre Vigier. En Haute-Loire, où je suis élu, se trouve le site paléontologique de Lavoûte Chilhac, sur lequel ont été découverts dans les années soixante-dix des ossements de mammouths grâce aux recherches menées par Christian Guth et Odile Boeuf. Après seize ans d’interruption, les fouilles viennent de reprendre sur le site. Comment le Muséum pourrait-il nous aider à poursuivre l’activité de ce magnifique site, qui contribue au développement culturel, touristique et économique de notre territoire ?

M. Gilles Boeuf. Si la France veut conserver la Guyane, qui est l’un des plus beaux morceaux de diversité au monde, elle doit être beaucoup plus ferme. Pour ce faire, je pense qu’elle a besoin de l’aide de l’Europe. Des événements inacceptables se sont déroulés dans cette région. On trouve malheureusement au Brésil des sites Internet encourageant les gens à y venir orpailler ! Et il n’y a plus de patrouille dans le parc amazonien de 34 millions d’hectares, et je passe sur les conflits entre la gendarmerie et l’armée.

Le Grenelle de l’environnement a été un grand événement. La ministre m’a promis que les décrets d’application sur la trame verte et bleue seraient pris avant la fin de l’année. Les lois sur la biodiversité et sur la transition écologique devraient être votées en 2013.

Le Muséum travaille ainsi sur le patrimoine inerte, au travers de deux disciplines : la minéralogie dans sa dimension environnementale ; la cosmochimie, quand nous étudions les signatures géochimiques d’objets géologiques. Ce qui m’amène à parler de plus en plus de géodiversité.

Sur les quelque 4 500 espèces minérales déposées dans les musées, 3 000 n’existeraient pas sans les bactéries. La meilleure signature de la Terre, c’est la vie. Les astrophysiciens eux-mêmes ne justifient-ils pas leurs missions dans l’espace par la recherche du vivant ? Et le patrimoine géologique renvoie à la géodiversité.

Paris compte trois collections minéralogiques : celle de Jussieu – université Pierre et Marie Curie –, celle de l’École des Mines et celle du Muséum. Réunissons-les sur un site emblématique pour en faire la plus belle collection minéralogique au monde ! Aidez-nous, car je crains que ce projet ne puisse aboutir pour des raisons financières.

Pour ma part, je n’envisage pas la création d’espaces où l’humain serait exclu. Je ne cherche pas à sauver la planète, comme certains le prétendent, mais à sauver le bien-être de l’humain sur la planète ! Les lois nous ont donné des outils, mais leur application devient problématique car je ne pense pas qu’une espèce de coléoptère, aussi emblématique soit-elle, justifie l’arrêt de chantiers. Ces lois ont été votées en réponse au mépris total dont faisaient preuve certaines castes dans ce pays pour les questions environnementales. Les choses ont évolué : mettons-nous autour d’une table pour revoir ce sujet en évitant les outrances.

J’ai travaillé en Ouganda, où 40 % des chimpanzés sauvages des réserves sont mutilés, après avoir été capturés par des braconniers ! Actuellement, il y a des projets de forages qui sont situés dans des parcs naturels. Vous le voyez : la situation n’est pas la même partout, chaque espèce n’a pas la même valeur dans tous les types d’écosystème.

La conférence environnementale a le mérite d’avoir existé. Elle a été calquée sur la conférence sociale, et les participants y ont réalisé un travail sérieux.

Il est impératif de travailler à des schémas de retour de la diversité en ville. J’y crois : on peut encore faire des choses, mais il faut se hâter.

L’extension au large des aires marines protégées est une nécessité et il faut légiférer en la matière. Il ne s’agit pas de créer des réserves où l’humain n’ira pas : les pêcheurs de Cerbère-Banyuls sont désormais très heureux de pêcher à la périphérie de la réserve, des poissons qui avaient disparu il y a vingt ans !

Le thème de l’océan sera abordé lors de la conférence d’Hyderabad. Il faut cesser de considérer l’océan seul : il y a une continuité entre le milieu continental terrestre et le milieu océanique.

Les parcs naturels régionaux et nationaux, les réserves naturelles, les conservatoires d’espaces naturels, les aires marines protégées, le Conservatoire du littoral, toutes ces structures doivent nous amener à réfléchir ensemble.

Selon nous, il y a une grande différence entre une agence de la nature et une agence de la biodiversité. Si celle-ci doit voir le jour, je préconise de supprimer auparavant toutes sortes de structures qui s’empilent, comme les ZNIEFF (zones naturelles d’intérêt écologique, faunistique et floristique), de réfléchir, grâce à un vrai débat public, aux domaines sur lesquels elle portera, et surtout, de lui donner des moyens adéquats.

Enfin, le Muséum possède un réseau de sites nationaux de préhistoire : celui de Lavoûte-Chilhac, la grotte du Lazaret, celle de Tautavel, l’abri Pataud et l’abri du Poisson. Venez nous rendre visite : nous vous aiderons avec plaisir.

M. le président. Merci beaucoup, monsieur le président, pour votre intervention très riche.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mardi 9 octobre 2012 à 17 heures

Présents. - Mme Laurence Abeille, M. Christian Assaf, Mme Catherine Beaubatie, Mme Chantal Berthelot, M. Philippe Bies, M. Florent Boudié, M. Christophe Bouillon, M. Vincent Burroni, M. Yann Capet, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, Mme Florence Delaunay, M. Stéphane Demilly, Mme Sophie Errante, Mme Geneviève Gaillard, M. Claude de Ganay, M. Alain Gest, M. Charles-Ange Ginesy, M. Jacques Krabal, Mme Valérie Lacroute, M. Alain Leboeuf, M. Arnaud Leroy, M. Michel Lesage, Mme Martine Lignières-Cassou, M. Olivier Marleix, M. Franck Marlin, M. Philippe Martin, M. Bertrand Pancher, M. Edouard Philippe, M. Philippe Plisson, Mme Catherine Quéré, Mme Marie-Line Reynaud, M. Martial Saddier, M. Gilbert Sauvan, M. Jean-Marie Sermier, M. Jean-Pierre Vigier

Excusés. - M. Yves Albarello, M. Julien Aubert, M. Denis Baupin, M. Alain Calmette, M. David Douillet, M. Philippe Duron, M. Laurent Furst, M. Christian Jacob, M. Rémi Pauvros, M. Gabriel Serville, M. David Vergé