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Mercredi 11 septembre 2013

Séance de 9 heures 30

Compte rendu n° 89

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet Président

– Table ronde, ouverte à la presse, sur la pollution de l’air, avec la participation de M. Martial Saddier, président du Conseil national de l’air ; M. Laurent Michel, directeur général de l’énergie et du climat ; M. Étienne de Vanssay, président de la fédération interprofessionnelle des métiers de l'environnement atmosphérique ; Mme José Cambou, secrétaire nationale de France nature environnement et Mme Régine Lange, présidente de la Fédération des associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (ATMO France).

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a organisé une table ronde sur la pollution de l’air, avec la participation de M. Martial Saddier, président du Conseil national de l’air ; M. Laurent Michel, directeur général de l’énergie et du climat ; M. Étienne de Vanssay, président de la Fédération interprofessionnelle des métiers de l'environnement atmosphérique (FIMEA) ; Mme José Cambou, secrétaire nationale de France nature environnement et Mme Régine Lange, présidente de la Fédération des associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (ATMO France).

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Face au problème de santé publique que constituent la pollution de l’air et l’exposition aux particules, la France a présenté en 2010 un programme d’amélioration de la qualité de l’air, ainsi qu’un plan Particules d’envergure nationale, que complètent, à l’échelon local, les plans de protection de l’atmosphère (PPA) et les expérimentations des zones d’actions prioritaires pour l’air (ZAPA).

À la suite de l’installation du comité interministériel de la qualité de l’air (CIQA), un plan d’urgence a été présenté le 6 février dernier. Il propose trente-huit mesures à partir de cinq priorités : favoriser le développement de toutes les formes de transport et de mobilité propres, réguler le flux de véhicules dans les zones particulièrement affectées par la pollution atmosphérique, réduire les émissions des installations de combustibles industriels et individuels, promouvoir fiscalement les véhicules et les solutions de mobilité vertueux, sensibiliser aux enjeux de la qualité de l’air.

Nous dresserons un bilan de la situation française face aux enjeux environnementaux et sanitaires, ainsi que de la mise en œuvre des principales politiques sectorielles. Nous réfléchirons, le cas échéant, aux moyens d’améliorer les instruments existants.

M. Martial Saddier, président du Conseil national de l’air. Le Conseil national de l’air (CNA) a été créé en 1997 après l’adoption de la loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie (LAURE). Sa composition, que le Grenelle de l’environnement a étendue aux représentants des syndicats de salariés, est fixée par décret. Ses membres sont nommés par arrêté. Le CNA est traditionnellement présidé par un élu, charge qui ne donne lieu à aucune rémunération directe ou indirecte. Un arrêté ministériel de Mme Kosciusko-Morizet m’a nommé à sa tête jusqu’en juin 2014.

Le CNA peut s’autosaisir ou être saisi par le ministère sur les projets de réglementation ou les textes législatifs. Au cours des derniers mois, il a rendu plusieurs avis à l’unanimité, ce dont je le remercie.

L’air que nous respirons est, pour deux tiers, de l’air intérieur et, pour un tiers, de l’air extérieur.

La qualité du premier dépend de celle des peintures, des produits domestiques et des matériaux du bâti. La consommation thermique et l’échange d’air se contrarient : plus on confine un bâtiment pour le protéger de la chaleur en été et des déperditions énergétiques en hiver, moins le renouvellement, donc la qualité de l’air, sont assurés. Des mesures visant à garantir la qualité de l’air intérieur monteront en puissance à partir de 2015. À cette date, nous posséderons une base de données sur la qualité de l’air intérieur dans notre pays.

L’action du CNA porte essentiellement sur la qualité de l’air extérieur. Outre l’ammoniac, l’ozone ou les précurseurs de l’ozone, les principaux polluants en France comme en Europe sont les particules fines, notamment les PM10, qui font l’objet d’un contentieux en cours avec la Commission européenne, et les oxydes d’azote, qui font l’objet d’un précontentieux. On relève des dépassements dans quinze à vingt zones pour les particules fines, et dans vingt à trente zones pour les oxydes d’azote. L’origine des particules fines est diverse : industrie, chauffage résidentiel, notamment à base d’énergie fossile, transport. Les oxydes d’azote, essentiellement imputables aux transports, sont présents dans les grandes concentrations urbaines.

Les répercussions de ces pollutions sur la santé publique sont bien connues. On leur impute 42 000 morts prématurées par an en France. Pour les personnes sensibles, la diminution de l’espérance de vie peut atteindre jusqu’à huit mois, ce qui se traduit sur le plan économique par une perte de 20 à 30 milliards d’euros par an. Au total, de 2,5 à 3 millions de personnes souffrent de l’asthme, auquel 10 % des jeunes ont déjà été confrontés, et 30 % des adultes connaissent des problèmes respiratoires peu ou prou liés à la concentration en PM10 et en oxyde d’azote.

Nous sommes tous concernés par le problème, puisqu’il ne connaît aucune frontière nationale, régionale, départementale ou communale, et qu’il ne pourra être réglé que sur une période suffisamment longue pour transcender les clivages politiques et l’alternance démocratique.

En France, l’industrie est le principal vecteur des PM10, avant le chauffage résidentiel tertiaire, le transport et l’agriculture. Les oxydes d’azote sont le fruit des transports routiers. Il faut toutefois distinguer le parc ancien, dont les véhicules posent problème, et le parc modernisé.

Priorité doit être donnée à l’action publique. Nous attendons un engagement fort de l’ensemble des décideurs. Des actions doivent être menées sur les anciens appareils de chauffage au bois et sur les cheminées ouvertes. Pour les énergies fossiles, le gaz naturel doit être préféré au charbon et au fioul. N’oublions pas enfin que les véhicules anciens, notamment ceux qui roulent au diesel, sont très polluants, et que le brûlage à l’air libre produit quantité de PM10.

Dix-sept États membres sont concernés par un contentieux ou un précontentieux avec l’Union européenne. Il est nécessaire d’adopter une vision globale, car les zones émettrices de polluants ne sont pas toujours celles où l’on souffre le plus de la pollution. Cependant, il est impératif de laisser aux représentants de l’État, préfets de département ou de région, ainsi qu’aux représentants des collectivités territoriales, la liberté de décider zone par zone des mesures appropriées. Tel est l’esprit des plans de prévention de l’atmosphère, conçus pour prendre en compte la spécificité de chaque secteur. Celui de la vallée de l’Arve, en Haute-Savoie, voté en février 2012, est particulièrement adapté aux conditions locales.

M. Laurent Michel, directeur général de l’énergie et du climat au ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie. Au ministère, la qualité de l’air intérieur est suivie par la direction générale de la prévention des risques, pour l’habitat, l’urbanisme et le paysage.

Une action publique nationale ou européenne s’est structurée depuis quelques années afin de réduire les émissions à la source en adoptant certains matériaux de construction et en interdisant certains produits. Pour informer les consommateurs, des matériaux de construction ou de décoration comme les peintures ont fait l’objet d’un étiquetage. En application des dispositions de la loi « Grenelle 2 », la qualité de l’air est surveillée dans certains établissements recevant du public.

Un plan d’action de la qualité de l’air intérieur, élaboré avec divers acteurs, fait l’objet d’une consultation auprès des membres du CNA, après avoir été présenté au groupe préfigurant le Conseil national de la transition écologique. Il sera intégré au troisième Plan national santé–environnement , en cours d’élaboration. Son but, à court comme à long terme, est de réduire les émissions à la source et de gérer l’aération comme la ventilation des bâtiments, en lien avec leur rénovation. Il mobilisera l’État, à la fois prescripteur et contrôleur, les collectivités locales, et les professionnels qui travaillent dans le secteur du bâtiment ou qui l’exploitent.

En ce qui concerne l’air extérieur, l’État, conformément à la mission que lui assignent les directives européennes, doit organiser la surveillance des polluants, informer la population de leur niveau de nocivité, élaborer des plans d’action pérennes quand les valeurs limites sont dépassées ou risquent de l’être, gérer les pics de pollution et prévoir des mesures d’urgence.

Le ministère chargé de l’environnement définit les réglementations relatives aux pollutions atmosphériques et, conformément aux dispositions européennes, assure une surveillance. Depuis plusieurs décennies, leur mise en œuvre repose en France sur un dispositif original. Les associations agréées de surveillance de la qualité de l’air rassemblent des représentants de l’État, des collectivités locales, des acteurs économiques et de la société civile, dont les associations de protection de l’environnement, qui travaillent désormais à la maille régionale.

Le Laboratoire central de surveillance de la qualité de l’air rassemble les forces de l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS), de l’École des mines de Douai et du Laboratoire national de métrologie et d’essais (LNE), organismes de référence technique et d’appui à la coordination.

Le bilan pour 2012 incite à l’optimisme autant qu’à la prudence. Même si, d’une année à l’autre, notre appréciation est perturbée par la variation des phénomènes météorologiques, on constate, en dépit d’une amélioration globale, des dépassements dans de nombreuses zones. Ces dernières années, si aucune grande tendance à la baisse n’a été constatée pour les particules fines et l’ozone, on note, pour le dioxyde d’azote, une légère diminution de la concentration et une réduction des zones en dépassement.

L’action de l’État comprend les stratégies nationales, comme le plan Particules, qui devrait être approuvé fin 2014 ou courant 2015, et le plan de réduction des émissions de polluants atmosphériques, en application de la directive européenne sur les plafonds d’émissions. Celle-ci adopte une vision internationale de long terme, et traite notamment le problème des pollutions transfrontalières.

Au niveau régional, les outils créés par la loi « Grenelle 2 », comme les schémas régionaux climat–air–énergie, ont pour but de définir le cadre d’action régional. Les PPA, introduits par la loi LAURE, doivent être élaborés dans les agglomérations de plus de 250 000 habitants et dans les zones où les valeurs limites risquent d’être dépassées. Ils doivent être compatibles avec les orientations des schémas régionaux. Depuis 2010, compte tenu des dépassements constatés et des contentieux en cours, nous avons voulu rendre ces PPA plus ambitieux, ce qui nous a conduits à augmenter leur budget. Trente-six PPA ont été révisés ou initiés, dont la moitié sera conclue cette année. Nous vérifions ex ante si nous pourrons les mettre sur pied, et supprimer par ce biais 80 % à 90 % des points noirs.

Les actions relèvent de l’État, des collectivités locales et des acteurs économiques. Les unes sont nationales. D’autres visent à appliquer localement des actions nationales. Un préfet peut prendre à cet effet des décisions réglementaires. D’autres actions volontaires peuvent être prises uniquement au niveau local, s’il s’agit de logistique ou de mesures d’accompagnement.

L’idée d’un plan d’urgence pour la qualité de l’air a été lancée à l’automne 2012 par Mme Delphine Batho, alors ministre de l’écologie, qui avait constaté l’impuissance des ZAPA à réguler la circulation des véhicules, notamment anciens, dans les zones à dépassement. Principalement tourné vers les grandes agglomérations, ce plan, qui prévoit trente-huit mesures, relance certaines actions du plan Particules. Certaines initiatives nationales seront déclinées dans les territoires et mises en œuvre grâce aux PPA. Le plan réorganise aussi la gestion des épisodes de pollution, qui peuvent désormais être mieux anticipés. Un arrêté ministériel décliné sous forme d’arrêtés préfectoraux ou interpréfectoraux est en cours de finalisation. Il concernera la circulation des véhicules polluants, le chauffage au bois et les activités agricoles. La gestion des pics n’est toutefois pas notre principal objectif, qui est de diminuer le niveau de fond de la pollution.

Nous sommes face à des enjeux lourds et complexes, mettant en jeu des acteurs multiples. Le temps n’est plus où une seule entreprise dont les rejets étaient mal épurés causait 95 % de la pollution d’une zone. Il faut agir avec tous les acteurs et prévoir plusieurs modalités d’action. L’État doit y veiller, non seulement par des financements, mais aussi en inventant et en mettant en œuvre des solutions.

M. Frédéric Bouvier, directeur du Laboratoire central de surveillance de la qualité de l’air (LCSQA). Le LCSQA est un groupement d’intérêt scientifique qui réunit les moyens humains et techniques du LNE, de l’INERIS et de l’École des mines de Douai. L’État a choisi d’associer les compétences dédiées à la qualité de l’air dans une structure souple, qui forme une sorte de consortium.

Notre mission est d’apporter un appui stratégique, technique et scientifique au dispositif français de surveillance de la qualité de l’air. Depuis 1991, nous réalisons des études techniques et prospectives pour améliorer le dispositif de surveillance. Nous gérons l’infrastructure essentielle, en centralisant les données fournies par les associations agréées et en mettant en place des chaînes d’étalonnage. Notre mission principale, outre l’appui au ministère et à la DGEC, est de coordonner le dispositif de surveillance, grâce à un travail étroit avec les associations agréées.

Nous transmettons les données françaises à l’échelon européen, notamment auprès de l’Agence européenne pour l’environnement et de la Commission européenne. En matière de normalisation, nous agissons avec l’AFNOR en France, le CEN européen ou l’ISO à l’échelon international. Pour les aspects techniques ou la modélisation, nous sommes présents dans les réseaux AQUILA (Air Quality Laboratories Association) et FAIRMODE (Forum for Air Quality Modelling), qui offrent une vision transversale des enjeux techniques de l’air.

Le dispositif de surveillance couvre l’ensemble du territoire français, puisque des associations agréées sont présentes dans vingt-six régions. Dans la vingt-septième, Mayotte, une action sera menée l’an prochain. Depuis 2006, toutes les agglomérations de plus de cent mille habitants font l’objet d’une surveillance. Entre 1990 et 2010, nous avons augmenté le nombre des stations de mesure fixes, tout en instaurant une rationalisation qui fait moins de place à la métrologie qu’aux outils de modélisation. Nous tentons de passer d’une logique de constat – fondée sur la connaissance de la qualité de l’air – à un appui visant à aider les pouvoirs publics à dimensionner et à réaliser leurs plans d’action. Les outils auxquels nous recourons permettent de faire de la modélisation et de la prospective.

Depuis 1996, nos effectifs sont passés de 140 à 490 personnes. Notre budget – 56 millions, soit quasiment un euro par habitant – est financé pour 38 % par l’État, pour 24 % par les collectivités et pour 33 % par les industriels.

La qualité de l’air en France est en amélioration. Certains polluants, comme le plomb, ont disparu de l’atmosphère depuis qu’on n’en trouve plus dans les carburants. C’est également le cas du monoxyde de carbone, qui ne se rencontre plus que dans l’air intérieur, et du dioxyde de soufre.

Les deux problèmes majeurs sont les oxydes d’azote et les particules fines. Les oxydes d’azote sont surtout présents en hiver, à cause du chauffage, des moteurs de véhicule, qui fonctionnent dans des conditions moins favorables, et de la stabilité atmosphérique, qui retient les polluants près du sol. Pour le dioxyde d’azote (NO2), vingt agglomérations sur soixante et une dépassent la valeur limite annuelle, principalement en raison du trafic ; pour les particules fines, seize agglomérations de plus de 100 000 habitants dépassent la valeur limite journalière. L’exposition des Français à ces polluants est donc particulièrement forte en zone urbaine.

La pollution à l’ozone, qui a besoin d’une réaction photochimique pour se développer, touche principalement, pendant l’été, le quart sud-est de la France. L’Ouest, où les vents dispersent les polluants, est plus protégé.

Compte tenu des impératifs de santé publique, il faut lutter au moins autant contre les pics de pollution que contre une exposition quotidienne. C’est pourquoi nous veillons à réduire la pollution en continu, conformément aux attentes des instances européennes.

Mme Régine Lange, présidente de la Fédération des associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (ATMO France). Les associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA) sont présentes sur tout le territoire, à raison d’une par région. Leur gouvernance, particulièrement originale, réunit des représentants de l’État, des associations de protection de l’environnement ou de la santé, des industriels et des collectivités locales. Leur mission est de surveiller, de prévoir et d’informer. Elles sont financées pour un petit tiers par l’État, dont elles reçoivent en tout 18 millions d’euros – ce qui est relativement peu – et emploient 500 salariés, experts ou techniciens. Leur gouvernance quadripartite et leur financement diversifié leur confèrent une transparence et une indépendance qui assurent la confiance des acteurs locaux.

Les associations travaillent sur la mobilisation du territoire. Les textes leur donnent un rôle important dans l’élaboration des PPA ou des SRCAE, pour lesquels elles fournissent études et évaluations. Elles n’ont donc pas attendu le LCSQA pour être au cœur de la mobilisation des acteurs locaux, y compris des industriels.

Bien que la qualité de l’air tende globalement à s’améliorer, les dépassements des valeurs limites restent nombreux. Notre tâche est de caractériser les pollutions atmosphériques. Si les progrès technologiques apportés à l’industrie et aux nouveaux véhicules réduisent certaines émissions, les transports et le chauffage du résidentiel tertiaire contribuent largement à la pollution de l’air dans les zones urbaines. De ce fait, l’exposition est très forte dans les zones qui concentrent des activités humaines et des habitations très denses. Nous devons articuler ces deux facteurs que sont l’émission de polluants et l’exposition des populations.

En juin 2012, le rapport de la Commission des comptes et de l’économie de l’environnement a évalué le coût de la pollution de l’air pour la collectivité à 20 à 30 milliards d’euros par an, soit 400 à 500 euros par habitant. Le calcul, qui ne tient pas compte des coûts indirects comme l’absentéisme, se fonde essentiellement sur le montant des soins et des morts prématurées. Le coût du contentieux européen est évalué à 100 millions d’euros pour la première année et à 85 millions d’euros pour les suivantes. Ces chiffres montrent qu’agir pour la qualité de l’air peut être un moyen de réduire la dépense publique.

Le plan d’urgence pour la qualité de l’air traite prioritairement des transports, mais le sujet ne peut être abordé que de manière transversale, tant sur le plan territorial qu’en raison des thèmes concernés.

L’État s’engage en matière de fiscalité et de normalisation. Les régions établissent les SRCAE. Le projet de loi de modernisation de l’action publique et d’affirmation des métropoles précisera la répartition des compétences. D’autres collectivités sont concernées, comme le département ou la commune.

Les leviers d’action sont variés : urbanisme, étalement urbain, répartition des activités sur le territoire, gestion des déchets et des émissions de l’incinération, chauffage collectif ou individuel... La transformation des plans climat–énergie territoriaux en plans climat–air–énergie territoriaux témoigne de la nécessité d’une transversalité.

Il faut intégrer la réflexion sur la qualité de l’air à celle sur le changement climatique. Ainsi, on a longtemps privilégié les véhicules utilisant le diesel pour réduire l’émission de CO2, mais ce carburant favorise l’émission de particules. Le bois constitue une énergie renouvelable, mais son utilisation émet des hydrocarbures aromatiques polycycliques. L’isolation des bâtiments limite la dépense énergétique, mais pose un problème de confinement. Ces effets contrastés doivent être pris en compte.

Peut-être allez-vous jouer un rôle central dans les textes qui viendront prochainement en discussion. Le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové prend en compte les conséquences de l’étalement urbain sur la qualité de l’air. Le projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles permettra de coordonner l’action publique locale. Celui relatif à la transition énergétique favorisera une plus grande prescriptibilité des SRCAE. Le projet de loi de finances pour 2014 peut favoriser, par le biais de la fiscalité, les sources propres et les équipements bénéfiques à la collectivité.

Nous avons regretté l’absence de toute représentation politique française lors des journées d’ouverture de l’année européenne de la qualité de l’air. Je vous invite à vous faire pardonner en assistant à la journée de clôture organisée par l’ATMO, qui se tiendra le 9 décembre à Strasbourg.

M. Étienne de Vanssay, président de la Fédération interprofessionnelle des métiers de l’environnement atmosphérique (FIMEA). La FIMEA représente tous les métiers de l’entreprise privée qui concourent à la réduction des pollutions atmosphériques. Elle recouvre des domaines aussi divers que l’ingénierie – conception ou réalisation –, les industries manufacturières, les services, la santé et l’environnement, ainsi que la réglementation, la normalisation, le droit, les assurances et la finance, sans compter les activités qui relèvent de la qualification des acteurs – formation, éducation, apprentissage – ou permettent de se projeter dans l’avenir : recherche et développement, innovation.

La fédération se donne pour mission de défendre la santé et la qualité de l’air. Quel meilleur message un élu peut-il porter ? Elle veut aussi structurer et développer la filière de l’air, qui est encore jeune, puisque ses intervenants les plus anciens n’ont qu’une vingtaine d’années. Cette filière multiple et dispersée doit s’organiser pour être forte sur le marché domestique et conquérir l’export, ce qui permettra de créer des emplois. La FIMEA constitue un vecteur puissant pour dynamiser les politiques publiques et diffuser un message à une multitude d’acteurs. Elle entend promouvoir le savoir-faire français en exploitant la thématique de la ville durable, à laquelle le Comité d’orientation stratégique des éco-industries (COSEI) est très attaché. Elle vise enfin à favoriser l’émergence d’une filière de formation, allant de l’éducation à la formation professionnelle, et concernant tous les niveaux de qualification jusqu’au doctorat.

En 2000, du fait des particules fines, l’espérance de vie a diminué de neuf mois en Europe, soit une perte annuelle de 4 millions d’années de vie, mais on escompte un allongement de trois mois à l’horizon de 2020, soit un gain de 1,7 million d’années. Actuellement, la pollution de l’air cause 386 000 décès prématurés par an en Europe, chiffre que nous espérons réduire à 251 000 en 2020. À cette date, le nombre de 110 000 hospitalisations graves par an chuterait à 47 000.

Le nombre de 21 400 décès prématurés par an imputables à l’ozone pourrait chuter à 600 et celui de 30 millions de jours sous médication respiratoire pourrait être réduit à 21 millions.

La filière de l’air n’a pas encore atteint sa taille critique, mais son marché peut être estimé à 1 milliard d’euros et à 10 000 emplois. Il ne s’agit que d’estimations, puisqu’il n’existe pas d’études concrètes sur un marché aussi dispersé, mais nous pensons que le chiffre d’affaires peut être multiplié par dix en cinq ans, et atteindre un milliard d’euros pour 100 000 emplois, plus ou moins qualifiés, qui ne seront pas délocalisables.

Il s’agit de proposer à l’export la vente de services urbains intégrés, dans une logique de portage des petites entreprises par les moyennes ou par les ETI, et de celles-ci par les grands groupes. En somme, il faut mettre en place un chaînage, grâce à l’implication de l’État. Celui-ci doit amener les entreprises sur les marchés internationaux où elles trouveront des contrats et leur garantir qu’elles seront payées. Il doit être l’agent de recouvrement des dettes et des créances des entreprises privées auprès des États étrangers, notamment de ceux du Maghreb.

Nous avons formulé des propositions d’actions concrètes pour un budget de 500 000 euros. Elles visent à identifier et à cartographier, sur le plan économique, l’écosystème de l’air en France, dont nous ne possédons que des estimations, à mobiliser et animer des relais de l’air au niveau public et privé, en mettant la FIMEA en rapport avec le LCSQA, le réseau ATMO et des associations dédiées à l’environnement comme Air intérieur en réseau, qui se veut un vecteur d’information pour tous les dirigeants d’établissement recevant du public.

Nous vous proposons en somme d’agréger la valeur française pour le déploiement sécurisé de nos champions à l’international, de porter la communication sur le savoir-faire français en terme de qualité de l’air par le biais de congrès en France et à l’étranger, de démultiplier les initiatives territoriales en faveur d’une meilleure qualité de l’air, de définir des normes sanitaires, notamment dans les établissements recevant du public, pour les populations fragiles, de favoriser l’émergence de formations diplômantes et qualifiantes sur des plaques régionales, de fédérer sur le territoire une union sacrée pour l’air, permettant d’articuler normes, décrets, plans nationaux, objectifs globaux et réalités locales, enfin de structurer et de promouvoir l’école française de la qualité de l’air.

Mme José Cambou, secrétaire nationale de France nature environnement. Depuis plusieurs dizaines d’années, la fédération France nature environnement et les associations de notre mouvement sont impliquées dans le dossier de l’air, en France comme à l’échelon européen.

Dès 1996, la France a joué un rôle précurseur non seulement sur le plan législatif, grâce à la loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie, mais du fait de la qualité de son réseau de surveillance, des modalités d’association de ceux qui élaborent les plans régionaux pour la qualité de l’air (PRQA) ou les PPA, et de la composition des AASQA.

Notre pays ne figure plus, cependant, parmi les bons élèves de l’Union européenne. Il ne respecte pas les directives qu’il a pourtant adoptées. Les condamnations qui l’ont sanctionné – pour dépassement du plafond de polluants ou insuffisance des plans d’action – étaient prévisibles. Le 8 janvier, il n’y avait aucun représentant politique français lors de la journée d’ouverture de l’année européenne de la qualité de l’air, en présence du commissaire européen de l’environnement. (Murmures sur les bancs UMP) En outre, la France n’a pas répondu à la consultation de la Commission européenne sur la révision de la stratégie de la qualité de l’air.

Les sources de pollution – chauffage, activités industrielles et agricoles, transports terrestre, aérien et maritime – sont multiples, comme les polluants. Dans un avis du 12 juillet 2012 sur la sélection des polluants à prendre en compte dans l’évaluation des risques sanitaires pour les études d’impact des infrastructures routières, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) indique : « Plus de 380 polluants ont été recensés en lien avec des infrastructures routières. L’identification de ces polluants couvrait différentes origines d’émission, incluant celles issues des véhicules, celles liées à l’usure, au fonctionnement et à l’entretien des véhicules et de l’infrastructure routière. » Dans ce seul domaine, soixante-dix-sept nouveaux polluants ont été recensés depuis 2004, en lien avec de nouvelles technologies ou de nouvelles découvertes.

Les effets sanitaires de la pollution de l’air sont identifiés grâce aux études toxicologiques et épidémiologiques françaises et internationales : problèmes respiratoires ou cardiovasculaires, cancers. On connaît en outre les effets mutagènes et cancérigènes de certains polluants. On peut cependant progresser dans la connaissance des « effets cocktails », ainsi que des interactions entre polluants atmosphériques et agents physiques, comme le bruit et les ondes. Le chiffre de 20 à 30 milliards d’euros, cité par Régine Lange, ne concerne que l’air extérieur et porte uniquement sur la France métropolitaine.

On connaît moins les effets de la pollution sur les milieux – végétation naturelle, forêt, cultures – ou, en zone urbaine, sur la dégradation du bâti, et par conséquent sur le coût d’entretien des bâtiments publics ou historiques.

Pour réaliser l’eurobaromètre de septembre 2012, 25 525 Européens, dont 1 004 Français, ont été interrogés. À la question « La qualité de l’air s’est-elle détériorée au cours des dix dernières années ? », 56 % des Européens et 70 % des Français répondent « Oui ». À la question « Les normes existantes de l’Union européenne en matière de qualité de l’air sont-elles adaptées ? », 58 % des Européens et 74 % des Français répondent : « Non, elles devraient être renforcées. ». À la question « Les plafonds d’émission nationaux existants sont-ils adaptés ? », 51 % des Européens et 69 % des Français répondent : « Non, ils devraient être renforcés. ». Qu’en conclure, sinon qu’il est urgent d’agir ?

L’État doit s’engager sur le plan national et international. Nous souhaitons qu’il renforce et fasse respecter la réglementation sur l’air extérieur, tant par source que de manière globale, en tenant compte des lignes directrices formulées par l’OMS.

Il doit également prendre en compte de manière cohérente les problématiques du climat et de la qualité de l’air intérieur et extérieur, en portant une attention particulière aux polluants atmosphériques, qui sont aussi d’importants forceurs du changement climatique.

Il doit intégrer la protection de la qualité de l’air et sa reconquête dans l’ensemble des politiques publiques. Nous attendons de la France qu’elle s’engage courageusement dans les négociations européennes sur la révision des plafonds d’émission nationaux.

Sur le terrain, il faut mener des actions de correction et de prévention. Même à l’extérieur d’un PPA, on peut travailler sur la mobilité ou éviter de situer une école maternelle près d’une voie à grande circulation.

En matière de recherche et d’expertise, il reste des besoins de financement, afin d’assurer la continuité du travail des équipes.

Enfin, l’information du public et la sensibilisation des jeunes sont essentielles, car il est nécessaire de comprendre pour agir. Il faut mettre en œuvre une formation initiale et continue des professionnels de santé sur les effets de la pollution, des professionnels du bâtiment sur la nécessité de construire sain, des urbanistes et des ingénieurs, enfin, sur la manière d’intégrer la question de l’air dans leurs réalisations : aménagement urbain, infrastructures, matériels ou process. La formation est le facteur clé qui permettra de faire évoluer la situation à long terme.

M. Jean-Yves Caullet. La pollution de l’air est un phénomène grave, coûteux, multiforme et qui nourrit parfois un certain fatalisme. Après avoir beaucoup progressé en termes de connaissance, nous devons avancer sur le terrain en nous mobilisant. Les compétences des professionnels publics et privés sont-elles suffisantes ? Quelle police existe-t-il pour l’eau et pour l’air ? Quel modèle économique faut-il retenir, puisque la collectivité n’a pas vocation à assumer seule toute charge qui relève de l’intérêt général ? Comment intégrer la qualité de l’air à l’aménagement du territoire ? Existe-t-il des stratégies efficaces de réparation ou de protection dans les milieux exposés ? La végétation peut-elle jouer un rôle d’alerte, de protection ou d’épuration ? Comment lui accorder une plus grande place dans nos plans d’urbanisme afin d’améliorer la qualité de l’air ?

M. Jacques Kossowski. Les mesures de protection de l’air votées dans le cadre de la loi « Grenelle 2 » sont-elles effectives ? Les PPA et les ZAPA ont-ils été mis en place ? Peut-on faire le lien entre l’augmentation de la pollution et celle de la population ? Est-il possible de réduire le coût de 30 milliards par an induit par la pollution de l’air ?

En juin, dans le cadre du programme Helios piloté par l’Institut de combustion, aérothermique, réactivité et environnement (ICARE) du CNRS, la première chambre de simulation atmosphérique à irradiation naturelle a été inaugurée à Orléans. C’est la troisième installation de ce type en Europe. Pouvez-vous détailler l’intérêt de ce projet, qui vise à mesurer l’impact du rayonnement solaire sur la pollution atmosphérique ?

Mme Laurence Abeille. On connaît fort bien les effets des polluants atmosphériques, sur lesquels nous possédons des données sanitaires et épidémiologiques précises. En outre, il existe des relevés de pollution fiables sur de longues durées. Raison de plus pour renforcer le travail des AASQA, à l’heure où Airparif connaît des difficultés, et pour leur assurer un financement à la hauteur de leurs besoins.

Afin de réduire l’utilisation des véhicules les plus polluants, dont l’effet ne se limite pas aux seuls axes routiers, il faut faire converger les tarifs de l’essence et du diesel, et supprimer le bonus écologique pour toutes les voitures qui utilisent le diesel. C’est non un choix industriel mais une décision de santé publique. En outre, pourquoi ne pas restaurer le bonus écologique pour les véhicules qui roulent au GPL ?

On peut aussi agir pour diminuer le trafic en ville, en augmentant l’offre de transports en commun économiques et fiables, en réduisant la présence des véhicules les plus polluants comme les 4 Í 4, en limitant la vitesse autorisée ou en instaurant une circulation alternée en cas de pic de pollution. Ces mesures vous semblent-elles acceptables socialement ?

Par ailleurs, existe-t-il des solutions – par exemple, des filtres fiables et peu coûteux – pour rendre le chauffage au bois moins polluant ?

Enfin, peut-on interdire l’emploi du formaldéhyde, présent dans de nombreux produits et qui pollue l’air intérieur ?

M. Bertrand Pancher. Sur bien des aspects, les normes de l’OMS sont plus strictes que celles de l’Union européenne, d’ailleurs plus contraignantes que nos obligations nationales. Selon une étude de l’Agence européenne de l’environnement, publiée en mars, la France fait partie des huit États membres qui dépassent les seuils d’émission de polluants atmosphériques.

Parmi les défaillances du système français, le commissaire européen à l’environnement Janez Potočnik pointe une gouvernance inadéquate, les responsabilités étant souvent locales ou régionales, même quand les sources de la pollution sont éloignées de ses effets. Il signale aussi la persistance de la pollution transfrontalière et la contribution insuffisante de certains secteurs à la réduction des émissions. Il dénonce notamment les installations de combustion de taille moyenne, l’épandage des lisiers et le trafic maritime. Il fustige enfin le manque de cohérence entre les réglementations. On s’est trop peu assuré, par exemple, que le basculement vers le diesel ou la biomasse ne compromettait pas la qualité de l’air. Quel avis portez-vous sur cette analyse ?

Quelle solution prônez-vous pour qu’industriels et pouvoirs publics deviennent de meilleurs acteurs de la qualité de l’air ? Que préconisez-vous en matière de gouvernance, pour renforcer la coordination entre Bruxelles et les autorités nationales ou locales ? Les mesures décidées ces dernières années pour améliorer la qualité de l’air sont-elles mises en œuvre ? Quel est le bilan des programmes réglementaires locaux ? Le plan d’urgence pour la qualité de l’air décidé par le Gouvernement en février a-t-il permis des avancées significatives ?

M. Jacques Krabal. L’air, c’est la vie : 15 000 litres d’air transitent chaque jour par nos voies respiratoires. Le 30 août, le troisième Plan cancer a rappelé les effets de la pollution environnementale sur la santé. Or, si l’on peut aisément lutter contre la pollution de l’eau ou la malbouffe, il est plus difficile d’agir sur la qualité de l’air. Des actions menées par le conseil régional de Picardie ont révélé la présence dans le milieu rural de quarante-sept molécules polluantes sur cent dix. Des pollutions aux pesticides ont été identifiées dans l’air. Comment peut-on agir dans ce domaine ?

Chacun déplore le manque de lisibilité et l’éclatement de l’action publique. Quels plans d’action territoriaux permettraient une plus grande efficacité ? Nous devons aussi poser la question des moyens, puisque les collectivités locales sont amenées à intervenir financièrement.

Pour l’heure, seule la quinzième mesure du plan d’urgence pour la qualité de l’air a été engagée. Quand les trente-sept autres seront-elles effectives ?

Le 17 juillet, l’ANSES, saisie par la direction générale de la santé et la direction générale de la prévention des risques, écrit, dans un avis relatif à l’effet sur la santé de la concentration du dioxyde de carbone dans l’air intérieur, que « la mesure CO2 ne peut être considérée seule comme un indicateur de pollution chimique de l’air intérieur ». Est-ce à dire que la réglementation française en matière d’aération doit être remise à jour ?

Le 13 juin, l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur a commencé une nouvelle campagne nationale de mesure et de recueil d’informations. Six cents classes seront suivies dans trois cents écoles maternelles et élémentaires. Qu’en sera-t-il des autres ? Qui finance le projet ?

Où en est la condamnation de la France par l’Europe, en ce qui concerne l’émission de particules fines ?

Au niveau européen, quelles actions seront menées pour améliorer la qualité de l’air et quelles évolutions peut-on attendre en matière de réglementation ?

M. Christian Hutin. L’État contribue faiblement au budget des AASQA, bien que notre pays soit un de ceux où la qualité de l’air est le mieux surveillée. Les associations sont également financées par la taxe générale sur les activités polluantes, qui diminue lorsque le nombre d’entreprises se réduit. Elles reçoivent enfin des collectivités territoriales, responsables en termes d’urbanisme ou de transport, une cotisation volontaire dont le montant est depuis trois ans en nette régression. De ce fait, le financement des AASQA, dont certaines ont déjà connu des déficits, court aujourd’hui un risque.

Un atout essentiel de ces associations est leur indépendance, qui tient à la qualité du travail des ingénieurs, des techniciens et des bénévoles. Il devient d’ailleurs difficile de leur trouver un président bénévole, compte tenu des responsabilités que celui-ci doit exercer. Un gouvernement précédent avait tenté de faire de ces associations des opérateurs d’État. C’était une erreur. Lorsque la communication du Gouvernement sur Tchernobyl était catastrophique, les AASQA de Picardie et d’Alsace ont pris l’initiative d’installer des balises de surveillance. Après la catastrophe de Fukushima, le ministère m’a interdit, en tant que président d’association régionale, de publier nos résultats – ce dont je me serais affranchi s’ils avaient été alarmants. Bien que colbertiste et chevènementiste, je juge indispensable que la communication de nos associations, qui sont libres et responsables, demeure transparente.

Mme Sophie Errante. Monsieur Laurent Michel, quels objectifs devraient, selon vous, fixer le troisième Plan national santé–environnement, en cours d’élaboration ?

Madame Régine Lange, une étude récente menée par ATMO Poitou-Charentes a montré que les concentrations d’insecticides et de fongicides dans l’air étaient nettement plus élevées dans les zones viticoles de la région que dans la ville centre. Pouvez-vous nous expliquer comment est calculée la concentration de pesticides dans l’air ? Quelle est la fiabilité des données obtenues ? Quelles bonnes pratiques préconiseriez-vous pour réduire l’incidence de cette pollution sur la santé ?

Monsieur de Vanssay, vous avez évoqué les filières de formation qu’il conviendrait de développer. Pourriez-vous nous présenter quelques métiers auxquelles elles conduiraient ?

M. Yannick Favennec. Le rapport de la mission de lutte contre l’inflation normative, remis au Premier ministre en mars 2013, recommande d’abroger les décrets n° 2010-788 et n° 2011-1728 relatifs à la qualité de l’air et à l’évaluation des moyens d’aération. Il préconise également de suspendre le décret en préparation relatif aux modalités d’évaluation des moyens d’aération. Quel est votre avis sur le sujet ?

Quelle est votre position sur ce qui pourrait être exigé des agriculteurs lors des pics de pollution ? Dans le projet du Gouvernement, on pourrait aller jusqu’à leur interdire le travail au sol et l’épandage de fertilisants en cas de dépassement du seuil d’alerte aux micro-particules. Ils s’inquiètent de ces mesures qui pénaliseraient gravement leur activité.

M. Denis Baupin. Il ne fait pas de doute que dans les zones d’habitat dense, en particulier à proximité des grands axes routiers, la pollution aux particules fines est très majoritairement due aux émissions des moteurs diesel. Les résultats des études d’Airparif sur le périphérique parisien sont sans ambiguïté.

Comme j’y avais déjà insisté l’an passé en tant que rapporteur pour avis sur les crédits de la transition énergétique, il faut absolument pérenniser le financement des AASQA. Or, en Ile-de-France, les Hauts-de-Seine, département « pauvre » s’il en est, chacun le sait, a cessé de financer Airparif. De même, la très défavorisée commune d’Issy-les-Moulineaux a décidé qu’il n’y aurait plus de capteur d’Airparif sur son territoire. Il n’est pas responsable de vouloir ainsi casser le thermomètre pour n’avoir pas à mesurer la température ! Notre collègue Martial Saddier nous ayant dit tout à l’heure qu’il n’existait pas de clivages partisans sur le sujet de la qualité de l’air, je souhaitais l’alerter de ces deux cas.

Nous regrettons que le projet de loi relatif à la consommation, en cours d’examen, n’ait pas autorisé les actions de groupe en matière de santé et d’environnement. Les victimes se comptent pourtant par milliers, voire dizaines de milliers. S’il était possible de mener des actions de groupe, les constructeurs automobiles notamment se sentiraient plus responsables. Pensons à toutes les personnes atteintes de pathologies respiratoires, mais aussi à des professionnels comme les chauffeurs de taxi qui passent toute la journée dans leur véhicule, là précisément où se concentre la pollution de l’air.

M. Guillaume Chevrollier. Je me félicite de tout ce qui est fait dans notre pays en matière de surveillance de la qualité de l’air depuis le Grenelle de l’environnement. Structures et outils sont nombreux. En tant que parlementaire, j’ai ainsi reçu le très complet rapport annuel élaboré par Air-Pays de la Loire.

La qualité de l’air intérieur est devenue un sujet majeur de santé publique avec le développement de l’asthme et des allergies respiratoires. Il faudrait y sensibiliser davantage tous les acteurs de l’habitat, les professionnels de l’immobilier, les bailleurs sociaux. On ne sait, par exemple, pas assez que la réhabilitation des logements anciens et la labellisation « bâtiment basse consommation » permettent d’améliorer notablement la qualité de l’air intérieur.

M. Philippe Plisson. La loi Grenelle II prévoyait la mise en place de zones d’actions prioritaires pour l’air. Ainsi, l’accès des centres villes aurait-il été interdit aux véhicules les plus polluants. Cette mesure a été abandonnée, car elle aurait pénalisé des citoyens rencontrant déjà des difficultés économiques. Le plan d’urgence pour la qualité de l’air de février 2013 préconise une politique incitative en matière de stationnement payant, en donnant la possibilité aux collectivités de moduler la redevance en fonction du niveau de pollution des véhicules. Outre qu’une telle mesure serait complexe à mettre en œuvre, elle risquerait, comme celle qui a été délaissée, de pénaliser les plus défavorisés de nos concitoyens. Une disposition générale sans discrimination ne serait-elle pas plus judicieuse ?

M. Jean-Marie Sermier. L’agriculture a souvent été montrée du doigt en matière de pollution de l’air. Elle serait, dit-on, responsable de 25% des émissions de particules PM10, principalement dues au travail du sol. Mais sait-on combien l’érosion naturelle des sols par les vents elle-même en produit ? Est-il possible de distinguer les particules selon leur origine et d’évaluer la part respective des deux types d’émission ? Les agriculteurs ont consenti des efforts importants en réduisant la part de leur travail au sol, en limitant les labours et en veillant à une présence plus régulière encore de végétaux sur les sols tout au long de l’année. L’agriculture serait également responsable de 98 % des émissions d’ammoniac. Les agriculteurs ont pourtant, là aussi, fait un effort considérable au travers de la mise aux normes des bâtiments d’élevage.

D’une manière générale, les mesures agro-environnementales ont été efficaces. Elles seront évaluées et rediscutées dans le cadre de la nouvelle PAC qui doit entrer en vigueur en 2014. Les associations et tous ceux qui se préoccupent de la qualité de l’air soutiendront-ils cette nouvelle PAC ?

M. Olivier Falorni. Les émissions de particules fines sont à l’origine de près de quarante mille décès prématurés par an, soit environ 5 % des décès. Afin de lutter contre la pollution atmosphérique, le précédent gouvernement avait mis en place en juillet 2010 un plan Particules. Pour répondre à l’objectif de réduction de 30 % des émissions de particules fines à l’horizon 2015, des ZAPA devaient être expérimentées. Jugée injuste sur le plan social et inefficace sur le plan écologique, cette mesure aurait surtout touché les Français les plus modestes. Le comité interministériel sur la qualité de l’air, qui a vu le jour après cet échec, a décidé la remise à plat du dispositif. Pouvez-vous, monsieur le directeur général de l’énergie et du climat, faire le point sur ses premiers travaux, concernant notamment la réduction des émissions de polluants par les bus et les poids lourds, ainsi que les procédures préfectorales en cas de pic de pollution ?

Comment affecter au mieux le produit de la contribution climat–énergie, dont on attend une incidence positive sur les émissions de gaz à effet de serre, la qualité de l’air et la consommation d’énergie ?

M. Jean-Pierre Vigier. En France, la qualité de l’air fait l’objet de mesures régulières et la population est régulièrement informée des résultats Mais l’air ne connaît pas les frontières ! En Europe, l’Allemagne est en train de fermer ses centrales nucléaires au profit de centrales à charbon fortement émettrices de CO2.Quelles en seront les conséquences sur la qualité de l’air ? Au niveau mondial, les pays émergents, notamment la Chine et l’Inde, qui sont en plein développement industriel, polluent beaucoup. Quelles actions efficaces entreprendre vis-à-vis de ces pays ?

M. Gilles Savary. Alors qu’on ne se préoccupe de qualité de l’air finalement que depuis peu – la politique en ce domaine est encore naissante –, des progrès spectaculaires ont d’ores et déjà été obtenus. J’appartiens à une génération qui a connu les industries au cœur des villes ! L’usage des barbecues et des cheminées ouvertes a probablement une incidence sur la qualité de l’air. Mais des générations entières n’ont eu jadis qu’une cheminée pour se chauffer. Prenons garde, à force d’interdits intégristes, à ne pas saper la légitimité des politiques menées.

Au niveau mondial, le transport automobile connaît un boom. Partout dans le monde, la marche à pied et le vélo sont délaissés au profit de l’automobile : c’est notamment le cas en Chine. Ne nous berçons pas d’illusions : la demande de mobilité n’est pas près de décroître. Peut-on attendre de nouveaux progrès en matière de carburants ? Les biocarburants peuvent-ils constituer une solution ?

M. Jean-Luc Moudenc. N’est-il pas dangereux qu’ATMO France dépende à ce point de crédits publics ? La pérennité de ces financements est-elle assurée ? Il est capital de garantir l’existence des AASQA qui jouent un rôle essentiel dans la lutte contre la pollution atmosphérique.

M. François-Michel Lambert. Élu de la métropole d’Aix-Marseille-Provence, au cœur de la zone la plus étendue de France où l’atmosphère est gravement polluée, je sais toute l’importance de la question de la qualité de l’air. Aucune des mesures prises depuis de nombreuses années n’a donné de résultat probant. Et pour cause ! En effet, on ne s’attaque pas au principal problème, qui est la circulation, alors qu’il faudrait promouvoir des manières différentes de circuler. Dans les zones où la pollution est principalement due au trafic routier, ne faudrait-il pas restreindre la circulation des véhicules les plus polluants, tout en accompagnant ces mesures coercitives d’aides à l’acquisition de véhicules non ou peu polluants comme les véhicules électriques ou roulant au GPL ou au GNV ? Pourquoi ne pas imposer aux administrations et établissements publics de s’équiper de telles flottes et aider les entreprises à le faire ?

M. Jean-Louis Bricout. Le rapport annuel de la fédération Transports et environnement, dont la presse s’est fait l’écho, nous apprend, et c’est heureux, que de 2007 à 2012, les émissions de CO2 ont sensiblement diminué, et qu’en juillet 2012, la Commission européenne a confirmé le seuil de 95 g de CO2 par km à atteindre en moyenne par chaque constructeur pour l’ensemble des voitures neuves qu’il mettra sur le marché en 2020. Mais ce rapport déplore aussi que la réglementation européenne comporte trop de dérogations qui empêchent de parvenir à un meilleur résultat. Ainsi depuis 2009, le dispositif des « super-crédits » permet aux constructeurs de compenser les niveaux élevés d’émission de leurs grosses cylindrées par ceux de leurs véhicules les moins polluants, comme les voitures électriques ou hybrides, dont les émissions de CO2 sont inférieures à 50 g/km. Ce rapport insiste aussi sur les écarts croissants entre les mesures effectuées par les constructeurs et celles effectuées sur le terrain. Que pourrait, selon vous, faire la France auprès de ses partenaires afin de limiter ces compensations ?

Mme Sophie Rohfritsch. Nos ingénieurs en génie climatique reçoivent-ils une formation en matière de qualité de l’air intérieur ? En effet, plus on améliore l’isolation des bâtiments, plus on les rend étanches, ce qui empêche un renouvellement suffisant de l’air. Il ne faudrait pas que dans ces habitations aux performances énergétiques exceptionnelles, on en arrive à moins bien vivre parce que le réflexe d’ouvrir les fenêtres doit y être banni afin de ne pas perturber le bon fonctionnement de la VMC double flux ! Comment réussir à vivre demain normalement dans nos maisons tout en y respirant un air sain ?

M. Jacques Alain Bénisti. L’Ile-de-France est l’une des régions les plus polluées du territoire national. Les émissions aéroportuaires d’oxyde d’azote et de particules vont pourtant y augmenter encore. En effet, la direction générale de l’aviation civile a décidé qu’à Orly, les gros porteurs, appareils pourtant les plus polluants et les plus bruyants, décolleraient de la piste 4, orientée à l’Est, si bien qu’ils survoleront une zone où vivent pas moins de deux millions d’habitants. L’industrie aéronautique fait des efforts considérables pour limiter les émissions des aéronefs. Encore faudrait-il que les pouvoirs publics ne ruinent pas ces efforts en prenant des décisions inappropriées.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Le Conseil général de l’environnement et du développement durable a évalué le volet « énergie » des SRCAE. Une évaluation semblable a-t-elle été conduite pour le volet « air » ?

M. Martial Saddier. La prise de conscience des problèmes autour de la qualité de l’air est aujourd’hui plus vive. Il importe de compléter les connaissances et d’en avoir une parfaite maîtrise. En effet, pour convaincre, il est essentiel que le diagnostic soit irréfutable sur le plan scientifique.

Si je pense qu’il appartient à l’État de veiller à ce que l’ensemble des territoires comme des acteurs publics et privés tiennent les engagements pris par notre pays pour le respect des normes européennes et mondiales, je pense aussi, à titre personnel, qu’il faut laisser une grande latitude aux acteurs locaux. En effet, les bassins de pollution sont locaux et il n’existe pas deux pollutions identiques. Tel est d’ailleurs l’esprit des PPA, dans lesquels le pouvoir de police est partagé même s’il est exercé par le préfet ou le directeur régional de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL).

Les PPA n’ont pas été mis en place seulement pour faire face aux pics de pollution. Leur optique est également réparatrice : un de leurs objectifs à moyen et long terme est de ramener en-dessous des seuils d’alerte la concentration de l’air en substances polluantes, là où ces seuils sont dépassés de manière récurrente. Sur ce point, d’importants progrès sont possibles.

Le législateur serait bien inspiré – je m’exprime ici à titre personnel et non en tant que président du Conseil national de l’air – d’exiger, lors de la vente d’un bien immobilier, un diagnostic sur le degré de pollution atmosphérique des appareils de chauffage, à l’instar de ceux déjà prévus pour l’installation électrique, l’assainissement autonome ou la performance énergétique. Pourquoi ne pas fixer à l’acheteur un délai pour mettre si nécessaire le chauffage en conformité, comme cela est prévu pour l’assainissement autonome ?

La loi Grenelle II avait conforté les PPA et prévu la mise en place de ZAPA. Il s’agissait, dans les zones de forte circulation, d’identifier et de contrôler les véhicules les plus polluants, voire de leur en empêcher l’accès. Ces restrictions, difficiles à expliquer, étaient impopulaires – ce n’est pas par plaisir que certains roulent dans une vieille voiture qui pollue, mais parce qu’ils n’ont pas les moyens de faire autrement. Ce Gouvernement a donc abandonné les ZAPA, mais les mesures alternatives proposées, encore en cours de discussion avec les collectivités, sous une forme et un nom différents, reviennent au même. Pour réduire la pollution de l’air liée au trafic automobile dans les grandes métropoles, il faut certes faciliter le renouvellement du parc et favoriser les transports collectifs. Mais on ne pourra pas faire l’économie, comme cela a déjà été fait dans d’autres pays européens, de limiter l’accès des véhicules individuels aux hyper-centres villes – ce qui n’est ni populaire, ni simple à expliquer vu l’impact social d’une telle mesure.

Madame Abeille et Monsieur Hutin, je m’associe à votre éloge du travail des AASQA. En 2013, leurs crédits ont augmenté de 5 % dans le budget de l’État. On observerait en revanche un désengagement des collectivités. Sur ce point, je réponds à M. Baupin : on trouvera certes toujours parmi les collectivités des exceptions qui confirment la règle, mais je persiste à penser que le sujet de la pollution de l’air doit être abordé de manière consensuelle, au-delà des clivages politiques ; en tout cas, j’en formule le souhait. Député du seul secteur où un PPA « nouvelle formule » a été élaboré avant la présidentielle et les législatives, celui de la vallée de l’Arve en Haute-Savoie, je puis témoigner que les collectivités du secteur financent beaucoup de mesures concrètes d’amélioration de la qualité de l’air et que leur engagement à ce titre est largement supérieur à leur contribution au fonctionnement des AASQA. Je n’en pense pas moins, comme vous tous, que les AASQA, qui réalisent un excellent travail, doivent continuer d’être soutenues.

Quelques mots sur le diesel. Nul ne prétend plus qu’il ne serait en rien responsable de la pollution atmosphérique : ce serait insensé. Mais il le serait tout autant de la lui imputer en totalité. Chacun sait comment les moteurs diesel sont devenus prédominants dans notre parc automobile. Deux grands constructeurs nationaux étaient les champions du monde de la motorisation diesel, de surcroît à une époque où la seule pollution identifiée et mesurée était celle des émissions de CO2, plus faibles pour les moteurs diesel que pour les moteurs essence. Avant 2007-2008, on ne pouvait pas mesurer la concentration en particules fines à un instant t. Les études épidémiologiques sur l’incidence sanitaire de cette pollution ne remontent pas non plus à trente ans en arrière ! Oui, les moteurs diesel anciens polluent. Il faudrait donc trouver le moyen d’accélérer le renouvellement du parc. L’entrée en vigueur des normes européennes anti-pollution Euro 5 le 1er janvier 2011, et Euro 6 en 2014, conduira naturellement à rééquilibrer les motorisations de notre parc. Les constructeurs prévoient qu’à l’horizon 2022, la part des véhicules essence devrait être remontée à 55% et celle des véhicules diesel descendue à 45%. Le respect de ces deux normes induit en effet un tel surcoût qu’il ne sera plus possible économiquement d’équiper un petit véhicule d’un moteur diesel. Je ne prends pas position davantage sur ce sujet du diesel. En tant que président du Conseil national de l’air, je me limiterai à dire que si nous pouvions faire disparaître d’un coup de baguette magique tout le parc de véhicules diesel non équipés de filtres à particules, nous le ferions… et que cela serait bénéfique pour la santé de nos concitoyens. Mais nous n’avons pas de telle solution.

En dépit des critiques dont il fait l’objet, le chauffage au bois demeure un mode de chauffage vertueux. La filière bois est une filière écologique. La combustion de bois sec dans un appareil labellisé « Flamme verte » ne dégage quasiment pas de particules. Il n’y a d’émissions nocives que lorsqu’on brûle du bois encore humide – il convient donc de mener tout un travail en amont avec la filière – ou dans un appareil défectueux.

Monsieur Pancher, oui, il est toujours possible de durcir les normes. Mais essayons déjà de respecter les normes actuelles.

Monsieur Krabal, le parallèle que vous avez établi entre l’eau et l’air, qui devraient chacun avoir leur police, est en effet pertinent.

Monsieur Favennec, je laisserai le directeur général de l’énergie et du climat vous répondre.

Monsieur Chevrollier, un vaste plan de mesure de la qualité de l’air intérieur est en train d’être élaboré pour la période 2015-2023.

Monsieur Falorni, le plan Particules a eu des incidences tout à fait positives.

Monsieur Lambert, il faudrait en effet « circuler autrement ». Les solutions ne sont pas faciles. Mais à terme, nous n’aurons pas d’autre choix.

Monsieur Sermier, les ministères de l’environnement et de l’agriculture travaillent actuellement à ce que l’agriculture prenne toute sa part – mais rien que sa part – dans la lutte contre la pollution par les particules fines, l’ammoniac et les précurseurs de l’ozone pouvant résulter du travail du sol, des effluents d’élevage, de l’épandage ou du brûlage de résidus organiques. Un important volet agricole figure à l’ordre du jour de la prochaine réunion du Conseil national de l’air, le 24 septembre prochain.

Monsieur Vigier, il serait effectivement impératif d’harmoniser les réglementations et les législations en Europe. L’agglomération lilloise, par exemple, est polluée par des particules fines émises dans des pays du nord de l’Europe. Il est donc important que tous les pays européens collaborent et qu’une cohérence minimale soit trouvée en matière de production énergétique.

Monsieur Bricout, je regrette que l’on mette davantage en lumière au niveau européen la norme CO2 que les normes relatives aux particules fines. Les acheteurs d’un véhicule neuf, encore aujourd’hui, ne prêtent attention qu’au niveau d’émissions de CO2 !

Monsieur Bénisti, les trajectoires de décollage et d’atterrissage des aéronefs sont déterminantes pour le niveau de pollution, tant atmosphérique que sonore. Existe-t-il une solution à Orly ? Je n’en sais rien, je l’espère. Je signale qu’on ne s’est longtemps préoccupé que de la concentration en polluants sur les tarmacs et des risques qu’elle représentait pour les personnels des aéroports.

M. Laurent Michel. Sur les 36 PPA entrés en révision, huit ont déjà été approuvés, douze le seront avant la fin de cette année et seize en 2014. Les onze zones en contentieux pour dépassement du seuil de concentration en particules fines sont couvertes par neuf PPA. Tous seront approuvés avant la fin de l’année.

Plusieurs des mesures du plan d’urgence pour la qualité de l’air relevant du niveau national sont d’ores et déjà en vigueur. L’arrêté précisant les modalités du « retrofit » des véhicules lourds a été publié le 14 mai dernier, ce qui permettra de préparer des plans d’accompagnement ainsi que les mesures éventuelles de restriction de circulation. Des études sont en cours sur la modulation de la redevance de stationnement en fonction du niveau de pollution des véhicules. Des mesures ont été prises en matière de covoiturage. Un appel à projets pour des transports en commun en site propre a été lancé, prenant en compte le critère de qualité de l’air : l’aide prévue de l’État se monte à 450 millions d’euros. Un appel à manifestation d’intérêt a été lancé en janvier 2013 en vue de soutenir les collectivités souhaitant développer les infrastructures de recharge électrique sur leur territoire. Des limitations de vitesse sur certaines portions d’autoroutes urbaines ont été décidées en Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Nord-Pas-de-Calais. L’arrêté relatif aux mesures d’urgence est finalisé. Les inspections générales auxquelles il avait été demandé de réfléchir à un dispositif peu coûteux, transparent et efficace, d’identification des véhicules en fonction de leur degré de pollution, qui permettrait d’asseoir d’éventuelles mesures de restriction de la circulation, ont rendu leurs conclusions. Il ne reste plus qu’à les analyser en détail.

Plusieurs mesures ont aussi été prises dans le cadre du plan Particules. Une dernière, en cours de finalisation, vise à renforcer les normes d’émissions pour les installations classées de combustion de biomasse.

Si peu de nouveaux progrès sont à attendre en matière de qualité des carburants routiers, il n’en va pas de même des carburants destinés aux navires. Des directives de l’Organisation maritime internationale et de l’Union européenne imposent d’ores et déjà de réduire leur teneur en soufre.

S’agissant des aéroports franciliens, je ne m’aventurerai pas à répondre sur la question des trajectoires. Je puis vous dire en revanche que le problème posé par les moteurs auxiliaires de puissance qui servent à tirer les aéronefs est bien identifié. Le PPA d’Ile-de-France, récemment arrêté, restreint l’utilisation de ces moteurs au profit de moyens alternatifs, fixes et mobiles, moins polluants sur le plan atmosphérique mais aussi sonore. Il faudrait par exemple équiper les aéroports de prises électriques au sol. L’aéroport de Nice est en train d’en installer. Si cela ne se généralise pas plus vite, c’est pour des raisons de coût.

Une part du produit de la fiscalité écologique pourrait être affectée au retrait des vieux véhicules diesel, ainsi qu’à la conversion des vieux appareils de chauffage à bois. Notre direction générale en fait en tout cas la proposition.

La biomasse est une énergie renouvelable, qui évite beaucoup d’émissions de CO2 à un coût modique pour la collectivité. Il faut donc encourager son utilisation en développant les réseaux de chaleur, dont les performances sont excellentes tant en matière de consommation énergétique que de limitation de la pollution, et en améliorant les appareils de chauffage individuels.

Nous sommes en train d’étudier, avec le ministère de l’agriculture, la manière dont le secteur agricole pourrait contribuer aux mesures d’urgence en cas de pic de pollution, sans être paralysé. Il faut trouver un juste équilibre, mais il n’y a pas de raison que les éventuelles mesures de restriction ne concernent que l’industrie et le trafic automobile. La direction générale de la prévention des risques travaille aussi, en lien avec la profession agricole, à une nouvelle réglementation pour les bâtiments d’élevage. Il s’agira ensuite tout autant d’accompagner que de prescrire.

Le financement des AASQA pose en effet problème. Il est bien difficile de voir à dix ans en matière de financements publics. Nous essayons déjà d’avoir une vision à trois ou cinq ans… Les crédits de l’État destinés aux AASQA ont augmenté de 5 % en 2013. Nous demandons qu’en 2014, ils soient maintenus à leur niveau actuel – ce dont il faudrait se féliciter dans un contexte de restrictions budgétaires. Il est important que les acteurs économiques continuent de participer au financement de ces associations de surveillance : la taxe générale sur les activités polluantes a été ajustée, de façon que les industriels contribuent toujours en dépit de la baisse des émissions polluantes de leurs activités. Il serait sans doute possible de travailler aussi avec certains acteurs du secteur des transports. Nous n’ignorons pas les difficultés financières de certaines collectivités. Espérons seulement que les désengagements qui ont pu être constatés ici ou là, en effet préoccupants, demeurent limités.

Le règlement européen relatif aux « super-crédits », permettant à un constructeur de compter double sa production de véhicules faiblement émissifs pour compenser celle de véhicules fortement émissifs, est en révision. L’Allemagne et la France ne sont pas d’accord sur le sujet. Tandis que l’on estime outre-Rhin qu’il faudrait accroître ces « super-crédits », on estime chez nous que si ce mécanisme donne une souplesse utile, il doit demeurer limité. Un compromis a été trouvé en juillet, qui devrait pouvoir être soumis au vote du Conseil européen après les élections allemandes. Nous ne souhaitons pas que la discussion soit rouverte.

Il est vrai qu’il existe des écarts entre les émissions théoriques annoncées par les constructeurs et les émissions réelles. Des travaux sont en cours. Le nouveau règlement relatif aux émissions de CO2 des véhicules prévoit, à terme, un nouveau protocole d’essais plus représentatif des conditions réelles et générant moins de distorsions que l’actuel, qui avantage quelque peu les gros véhicules. Il n’y a pas d’accord pour l’instant sur la date d’entrée en vigueur de ce nouveau protocole.

La mission de lutte contre l’inflation normative a préconisé l’abrogation du décret relatif à la surveillance de l’air intérieur dans certains établissements recevant du public, qu’elle juge absurde. Nous ne partageons pas du tout cet avis. Le Gouvernement a remis en consultation un dispositif légèrement modifié simplifiant l’agrément de certains organismes de contrôle de l’aération. Il n’a pas, à ma connaissance, l’intention d’abroger ce décret, lequel avait fait l’objet d’une très large concertation avec les collectivités, afin de trouver le meilleur rapport coûts-bénéfices, et d’une expérimentation ayant prouvé toute son utilité. De nouveaux tests seront lancés, précédés de campagnes d’information.

Le plan d’action en faveur de la qualité de l’air intérieur comportera des formations à l’intention des acteurs de la santé et du bâtiment. Le plan national Santé–environnement précédent avait prévu le financement, à titre expérimental, de conseillers en environnement intérieur, qui se déplaçaient à la demande dans les logements dont les occupants souffraient, par exemple, d’une pathologie respiratoire potentiellement imputable à une pollution. Il faudrait évaluer cette action, afin de la pérenniser si l’utilité en est avérée. Alors qu’elle était financée par le ministère de l’écologie, elle pourrait peut-être l’être au titre de la prévention sanitaire.

Certains produits potentiellement cancérigènes ont été interdits dans les matériaux de construction en France. Nous travaillons aujourd’hui à leur interdiction au niveau européen. D’autres produits doivent recevoir des restrictions d’usage ; d’autres encore être soumis à autorisation, ce qui signifie qu’ils sont interdits sauf si un utilisateur obtient de la Commission européenne une autorisation pour un usage donné et une durée limitée. Nous faisons tout pour que, dans le cadre du règlement REACH sur l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, le formaldéhyde soit classé comme cancérigène 1a et fasse l’objet d’une évaluation globale. Cette substance fait partie des polluants dont la présence doit être obligatoirement signalée sur l’étiquetage. On espère, par ce biais, inciter les consommateurs à se tourner vers des matériaux moins polluants.

M. Frédéric Bouvier. Le secteur agricole est un émetteur direct d’ammoniac et de particules. Mais ces émissions interagissent. Ainsi l’ammoniac est-il un précurseur de particules dites secondaires. Il faut tenir compte de tous les impacts indirects. Il est très important de connaître la composition chimique des particules, et donc de pouvoir mener des recherches, tant académiques qu’appliquées. Les enjeux de financement sont cruciaux pour les AASQA – je m’associe à tout ce qui a été dit à leur sujet – ou un programme comme Primequal, programme de recherche inter-organismes pour une meilleure qualité de l’air à l’échelle locale.

Pour mieux comprendre la pollution de l’air par les particules complexes, des modélisations sont indispensables. Un outil comme Prev’air permet de prévoir la qualité de l’atmosphère à l’échelle nationale, européenne et même mondiale. Il permet également d’évaluer les pollutions pouvant affecter notre pays en provenance de l’étranger. Les résultats qu’il donne ont été pris en compte dans le dimensionnement des plans d’action français. Hier encore, le seuil d’alerte de pollution aux particules était dépassé en Martinique, s’expliquant par le transport de poussières du Sahara jusqu’aux Antilles. On est en mesure de suivre ces nuages de particules et de les modéliser.

Pour ce qui est de la pollution de l’air par les pesticides, la France est en avance par rapport aux autres pays européens : une cinquantaine de polluants y sont réglementés, mais dans certaines régions, jusqu’à trois cents molécules peuvent être surveillées, ce qui permet de disposer de données plus complètes que ce qu’exige la réglementation. Il faut impérativement maintenir ce haut niveau de compétences.

La chambre de simulation atmosphérique à irradiation naturelle mise au point par l’Institut Icare, dans le cadre du programme Hélios, devrait permettre de mieux comprendre la pollution dans ce qu’on appelle le « champ proche », enjeu majeur de la recherche dans les années à venir. On mesure les émissions de polluants au pot d’échappement, par exemple, et on observe le devenir de ces substances à cinq mètres, dix mètres et au-delà, jusqu’à cent mètres du lieu d’émission.

L’information du public et des décideurs est essentielle. Au niveau régional, la population pourra s’informer auprès des AASQA, qui ont un portail internet et s’appuient sur de multiples outils pour leur communication. Au niveau national, le Laboratoire central de surveillance de la qualité de l’air a été chargé de créer un portail d’information et de réfléchir à un dispositif de vigilance atmosphérique lors des pics de pollution, analogue à celui mis en place par Météo–France lors d’événements météorologiques dangereux.

Mme Régine Lange. Le projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, en cours d’examen par le Parlement, devrait être l’occasion de réfléchir à la coordination des actions en matière de qualité de l’air et à une meilleure gouvernance locale. Un premier bilan des SRCAE montre qu’il faut renforcer les synergies entre leurs trois thématiques. Ce bilan fait également apparaître la nécessité d’observatoires régionaux pour les indicateurs retenus, de façon que ces informations environnementales soient, en toute transparence, accessibles à tous, comme le prévoit la convention d’Aarhus. Il importe que l’État et les régions conservent une responsabilité conjointe sur ces questions. Il serait intéressant, dans le cadre des futures conférences territoriales de l’action publique, d’évaluer l’efficacité de l’action publique en matière de qualité de l’air.

Il faut, de même, pouvoir évaluer l’efficacité des incitations fiscales, des investissements mais aussi les progrès réalisés dans les territoires. Une petite part du produit de la fiscalité écologique pourrait être affectée au financement de cette évaluation.

Comment intégrer le sujet de la qualité de l’air dans les stratégies d’aménagement du territoire ? Le projet de loi relatif à l’accès au logement et à l’urbanisme rénové, en cours de discussion, dispose que les futurs documents d’urbanisme devront être conformes aux SRCAE. Peut-être conviendrait-il que ces derniers soient opposables, comme cela avait été préconisé lors du débat sur la transition énergétique. Les schémas de cohérence territoriale (SCoT) prévoient d’ores et déjà la prise en compte des plans climat–énergie, lesquels pourraient comporter aussi un volet « air ».

Il n’existe toujours pas de norme concernant la teneur en pesticides de l’atmosphère. Les AASQA mènent malgré tout régulièrement des campagnes de mesure. Il est dommage que certaines d’entre elles aient été contraintes d’arrêter ce travail faute de financement, comme cela est arrivé récemment en Nord-Pas-de-Calais. Il serait important en effet de constituer des banques de données et de pouvoir retracer un historique. ATMO France insiste auprès du ministère pour que soit mise au point une méthodologie de mesure de cette teneur en pesticides.

Le secteur résidentiel est à l’origine de 30 % des émissions. S’agissant du chauffage au bois, souvenons-nous qu’à l’époque où tout le monde se chauffait ainsi, les densités de population étaient bien moindres qu’aujourd’hui. Comme en tout, c’est moins la moyenne qui importe que les pics. L’exposition aux particules issues de la combustion du bois est importante en milieu urbain et péri-urbain : les mesures établissent sans ambiguïté qu’elle augmente en hiver, aux heures où se mettent en route les chauffages. Et cette pollution provient pour l’essentiel des appareils individuels, les grandes installations collectives de chauffage à partir de la biomasse étant, elles, généralement conformes. Pourquoi ne pas songer à une prime à la casse pour accélérer le renouvellement des équipements ? Il faudrait aussi renforcer les normes et développer la labellisation des nouveaux appareils. Cela peut n’être pas sans incidence pour certaines filières économiques, mais des réorientations seraient possibles, dans le domaine de l’isolation par exemple.

Il est difficile aujourd’hui, en Europe, de faire respecter les plafonds d’émissions – le contexte préélectoral en Allemagne et le renouvellement prochain du Parlement européen n’y sont sans doute pas étrangers. L’Union européenne a, pour le moment, renoncé à réviser la directive et se limite à inciter à son respect à l’horizon 2020. L’Allemagne notamment est réticente, attachée à la préservation de son industrie automobile et s’étant engagée à sortir du nucléaire, ce qui suppose qu’elle produise de l’électricité par d’autres moyens, dont certains très polluants pour l’air. Le commissaire européen à l’environnement devrait prochainement annoncer un « paquet Air », étendant le respect des normes d’émissions aux engins de chantier, renforçant les normes en matière de chauffage, encourageant l’éco-conception et réglementant les petites installations de 1 à 50 mégawatts.

Comment répartir le produit de la contribution climat–énergie ? Le financement des AASQA est aujourd’hui équilibré, provenant pour un tiers de l’État, un tiers des collectivités et un tiers de la taxe générale sur les activités polluantes, acquittée par les entreprises dont les activités ou les produits sont polluants. Le maintien des crédits de l’État est assurément une bonne nouvelle, mais cela ne suffira pas, d’autant que les compétences des AASQA s’élargissent et que leur rôle va croissant. Elles sont désormais en première ligne pour accompagner les collectivités et animer la préparation des PPA. Les collectivités font, en outre, de plus en plus souvent appel à elles comme outils d’aide à la décision. C’est grâce à tous ces financements, celui des collectivités en particulier, qu’elles peuvent continuer à développer les outils de modélisation, si importants. Il faut se féliciter que soit maintenue dans le projet de loi de finances pour 2014 la possibilité de déduction des dons effectués à leur profit. Comme les ressources provenant de la taxe générale sur les activités polluantes diminuent, l’industrie ayant considérablement réduit ses émissions, il serait intéressant de rechercher de nouveaux financements du côté du secteur du transport routier.

Les émissions des aéronefs sont en effet un problème. Mais une pollution très importante résulte aussi de l’activité et du trafic autour des aéroports. Le réseau des AASQA travaille actuellement, avec l’Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, à la mise au point d’une méthodologie de surveillance identique sur l’ensemble des plates-formes. Les seules à n’avoir pas aujourd’hui de dispositif de surveillance de la qualité de l’air sont les plates-formes franciliennes, qui possèdent leurs propres laboratoires. Espérons que cette situation évolue, car l’intérêt est de disposer des données les plus nombreuses et les plus diverses possibles.

M. Etienne de Vanssay. Si les AASQA ou le LCSQA n’étaient plus financés sur fonds publics, le risque serait qu’ils cherchent à se financer sur le marché concurrentiel comme cela se fait déjà. Cela aurait pour conséquence d’affaiblir les entreprises privées sur leur marché domestique et donc d’entraver leur développement à l’export, pourtant essentiel au rééquilibrage de notre balance commerciale. La reconnaissance internationale dont bénéficie notre système de mesure et de surveillance de la pollution atmosphérique ouvre des marchés à nos entreprises au Brésil, en Chine, au Maroc et partout sur le continent africain. Il est donc rentable d’investir dans ce domaine, à la fois sur le plan sanitaire mais aussi économique et social. Profitons également de l’avance que possède la France au niveau mondial dans le domaine de la surveillance de la qualité de l’air intérieur. Développons les formations, mutualisons les savoir-faire publics et privés, facilitons les transferts de compétences, recherchons de nouvelles formes de financement pour l’ingénierie publique, atout sur lequel nous appuyer pour être présents à l’export et développer l’emploi.

S’agissant de la qualité de l’air intérieur dans les bâtiments basse consommation, donc très étanches à l’air extérieur, une solution est de poser une obligation de résultat, et non pas seulement de moyens, et de subordonner la régulation des paramètres énergétiques à des indicateurs de qualité de l’air intérieur. Il faut changer de paradigme et replacer la santé humaine au centre des préoccupations.

Il existe une multitude de filières de formation autour de l’ingénierie de la mesure, mais il n’existe pas d’école spécialisée dans la mesure de la qualité de l’air. Il existe quelques formations de niveau master, hélas disparates. Les formations de technicien, de niveau bac + 2 ou bac + 3, font cruellement défaut. Nous devons former nous-mêmes nos techniciens, sachant que les titulaires de certains baccalauréats professionnels peuvent avoir un début de qualification dans le domaine. L’aération, la ventilation, l’énergie font partie du même champ de formation, qui est donc extrêmement vaste. Les filières sont actuellement trop dispersées.

Mme José Cambou. La présence accrue de végétation en ville permettrait certes de purifier l’air, mais il faut garder en mémoire, d’une part, les allergies provoquées par certains pollens, d’autre part, le fait que ces pollens eux-mêmes peuvent véhiculer des substances chimiques, potentialisant leurs effets néfastes. Il est important que les collectivités soient sensibilisées à ces aspects.

L’idéal serait bien sûr d’empêcher que les véhicules les plus polluants ne circulent en centre–ville, mais cette solution n’est pas simple à mettre en œuvre, car ce sont le plus souvent les personnes aux ressources les plus faibles qui roulent dans ces véhicules – je ne parle pas des 4 Í 4 ! (Sourires) Les transports en commun constituent bien sûr une alternative à la voiture individuelle, mais les dessertes sont notoirement insuffisantes en-dehors des heures de pointe du matin et du soir, alors même que le nombre d’emplois à horaires décalés ne cesse de s’accroître. Il faudrait revoir les horaires des transports collectifs.

Pour ce qui est des navires, il serait urgent d’appliquer la réglementation européenne au lieu de solliciter le report de son entrée en vigueur, comme l’a encore récemment fait certain ministre des transports…

Plutôt que de partir de l’offre de transports, il faudrait partir des besoins de mobilité. Vous connaissez l’un des slogans de France Nature Environnement : « Se déplacer moins, mieux, autrement ». Nous avons travaillé à la recherche de solutions concrètes pour le transport des personnes, mais aussi des marchandises, en tenant compte de la diversité des territoires et en nous inspirant des expériences de terrain concluantes.

Les normes fixées par l’OMS, souvent plus sévères que celles reprises dans les directives européennes, doivent rester le repère en matière de santé publique.

La population est certes informée des pics de pollution, mais il faut regretter qu’elle ne le soit pas – ou très peu – sur la pollution de fond, qui est pourtant le problème principal. On ne lui dit pas non plus assez ce qu’elle peut faire concrètement pour limiter la pollution de l’air et s’en protéger.

Voilà des années que nous demandions à l’ADEME de renforcer les normes pour la labellisation « Flamme verte » des appareils de chauffage au bois. Des progrès ont été enregistrés. Les réseaux de chaleur utilisant le bois – à condition que celui-ci soit d’origine locale ! – sont une solution intéressante sur le plan écologique, énergétique et même social, dans la mesure où il s’agit le plus souvent de projets territoriaux associant des acteurs locaux – y compris souvent de simples citoyens.

Je m’étonne, s’agissant de la pollution de l’air d’origine agricole, que n’aient pas été cités tout à l’heure les produits phytosanitaires. Il faut convaincre les agriculteurs que les pratiques agricoles peuvent contribuer à la pollution, mais aussi leur faire comprendre que la pollution a une incidence sur leurs cultures : ainsi, la pollution à l’ozone réduit-elle fortement les rendements.

Les lois de décentralisation, en cours d’examen ou à venir, donnent l’opportunité de rendre obligatoire pour les collectivités territoriales de participer au financement des AASQA. L’État ne finance que les mesures obligatoires : ainsi, celle de la teneur de l’air en pesticides n’est-elle pas comprise dans le périmètre. Il est important que les AASQA puissent s’appuyer sur des financements complémentaires.

L’ANSES évalue régulièrement les risques sanitaires présentés par divers polluants en matière d’air intérieur – elle a commencé par le formaldéhyde – et formule des avis et recommandations. Il conviendrait maintenant que l’État s’appuie sur ses avis pour prendre des mesures concrètes. S’agissant de la qualité de l’air intérieur de certains établissements recevant du public, le dispositif existant doit être maintenu. Il y va en effet de la protection de populations particulièrement sensibles. Il serait donc inacceptable que les décrets visés soient abrogés.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Mesdames, messieurs, je vous remercie pour la qualité de cette table ronde, qui a été particulièrement intéressante.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mercredi 11 septembre 2013 à 9 h 30

Présents. - Mme Laurence Abeille, Mme Sylviane Alaux, M. Yves Albarello, M. Christian Assaf, M. Julien Aubert, M. Alexis Bachelay, M. Serge Bardy, M. Denis Baupin, M. Jacques Alain Bénisti, M. Philippe Bies, M. Christophe Bouillon, M. Jean-Louis Bricout, Mme Sabine Buis, M. Alain Calmette, M. Yann Capet, M. Patrice Carvalho, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, M. Jean-Jacques Cottel, Mme Florence Delaunay, Mme Fanny Dombre Coste, M. David Douillet, Mme Françoise Dubois, M. Philippe Duron, Mme Sophie Errante, M. Olivier Falorni, M. Yannick Favennec, Mme Geneviève Gaillard, M. Claude de Ganay, M. Alain Gest, M. Jacques Kossowski, M. Jacques Krabal, Mme Valérie Lacroute, M. François-Michel Lambert, M. Alain Leboeuf, Mme Viviane Le Dissez, M. Michel Lesage, M. Laurent Marcangeli, M. Jean-Luc Moudenc, M. Philippe Noguès, M. Bertrand Pancher, M. Edouard Philippe, M. Christophe Priou, Mme Catherine Quéré, Mme Marie-Line Reynaud, Mme Sophie Rohfritsch, M. Martial Saddier, M. Gilbert Sauvan, M. Gilles Savary, M. Jean-Marie Sermier, M. Jean-Pierre Vigier, M. Patrick Vignal

Excusés. - Mme Chantal Berthelot, M. Christian Jacob, M. Arnaud Leroy, M. Franck Marlin, M. Napole Polutélé, M. Gabriel Serville, Mme Suzanne Tallard

Assistaient également à la réunion. - M. Gérard Bapt, M. Christophe Cavard, M. Christian Hutin, M. Franck Montaugé, M. Jean-Louis Touraine