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Mardi 3 décembre 2013

Séance de 17 heures 45

Compte rendu n° 26

Présidence de M. Jean-Paul Chanteguet Président

– Audition, ouverte à la presse, de M. Henri Poupart-Lafarge, président d’Alstom Transport, sur la mobilité durable

Commission
du développement durable et de l’aménagement du territoire

La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire a entendu M. Henri Poupart-Lafarge, président d’Alstom Transport, sur la mobilité durable.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Notre commission reçoit aujourd’hui pour la première fois M. Henri Poupart-Lafarge, président depuis juillet 2011 d’Alstom Transport, qui est l’un des leaders mondiaux de l’industrie ferroviaire. Il est accompagné de M. Jérôme Wallut, directeur général d’Alstom Transport France, et de M. Maurice Benassayag, directeur des relations extérieures.

Rappelons que les matériels et les services Alstom Transport sont présents dans les transports urbains et périurbains – métros et tramways –, le transport ferroviaire régional, les grandes lignes, ainsi que le transport de fret.

Deux thèmes ont été retenus pour cette réunion : le volet industriel de la réforme ferroviaire et les questions liées à la mobilité durable. Mais nous souhaiterions aussi vous entendre, monsieur le président, sur les innovations proposées par votre entreprise, sur le plan technique – qu’il s’agisse du système de métro léger Axiolis  ou du système de signalisation urbaine Urbalis Fluence  – ou sur celui des services, l’une des particularités majeures du groupe étant de proposer des systèmes « clés en main », incluant dans un contrat unique l’ensemble des matériels et prestations qui répondent au besoin d’un gestionnaire d’infrastructure ou d’un exploitant.

Enfin, pourriez-vous évoquer les grands contrats en cours tels la commande par la RATP de 70 trains pour le RER A, la commande par la SNCF de 40 rames TGV Euroduplex, ou l’annonce par M. Frédéric Cuvillier, il y a quelques jours, d’une première tranche de 510 millions d’euros pour le renouvellement des trains d’équilibre du territoire – TET –, auxquels les membres de la Commission sont très attachés ?

M. Henri Poupart-Lafarge, président d’Alstom Transport. Comme vous l’avez rappelé, monsieur le président, Alstom Transport est très connu pour sa production de matériel roulant à destination des réseaux de tramway, des lignes à grande vitesse, du métro ou du RER. Mais ce domaine ne représente en fait que la moitié de son activité, soit 3 milliards sur un chiffre d’affaires total de 6 milliards d’euros.

Le reste se divise en trois parties égales représentant chacune 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires. La première est la production de systèmes de signalisation, dont l’Urbalis Fluence, notre dernier-né. La deuxième concerne la maintenance, un service consistant à fournir chaque jour aux opérateurs le train qu’ils nous ont confié, pendant toute la durée de vie du train, et pour lequel nous sommes rémunérés au kilomètre parcouru. Cette activité n’est toutefois pas réalisée en France. Enfin, nous proposons des infrastructures – comme l’électrification ou la pose des rails – et des systèmes complets – par exemple un système complet de tramway incluant la fourniture de matériel roulant et l’intégration du réseau dans la ville. Notre société est donc plus diversifiée qu’il n’y paraît.

Sur les 25 000 employés d’Alstom Transport, 9 000 travaillent en France. De même, 2,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires sont réalisés dans notre pays, dont 1 milliard pour l’exportation. Par ailleurs, nos achats représentent 1,4 milliard d’euros, et pour chaque employé de notre société, nous en faisons travailler environ trois chez nos 4 000 fournisseurs. D’ailleurs, ce matin même, le Médiateur national des relations inter-entreprises nous a décerné le label « Relations fournisseurs responsables ». Nos relations avec nos fournisseurs – qui à 80 % sont français – sont fondées sur la proximité et le partenariat.

Pour résumer en quelques mots le message que je souhaite vous transmettre, je dirais que la France fournit à Alstom Transport trois choses nécessaires à sa survie : la recherche, une vitrine et un soutien à l’exportation.

Tout d’abord, 80 % de notre recherche-et-développement est réalisée en France. Pas seulement à Saint-Ouen, où se trouve notre siège et où travaillent 2 800 de nos employés, mais aussi en province. Certains d’entre vous le savent bien, dont la circonscription abrite un de nos dix autres sites.

Ensuite, la France est un marché domestique de première importance, puisque nous y réalisons un quart de notre chiffre d’affaires, et une vitrine. En général, nos produits sont lancés et développés en France avant d’être vendus à l’étranger.

Enfin, la France favorise notre activité internationale, non seulement en tant que vitrine, mais aussi parce qu’il y existe des mécanismes de soutien à l’export et des actions de coordination des acteurs de la filière – notamment via l’organisme interprofessionnel Fer de France.

Pour illustrer l’importance de notre marché domestique, le fret ferroviaire offre un parfait contre-exemple. En raison de la décroissance du secteur, la SNCF ne commande plus de locomotives destinées au fret, et a même annulé les commandes qu’elle avait effectuées il y a quelques années auprès d’Alstom. Dès lors, nous ne pouvons plus innover, ni intervenir dans le marché ouest-européen. En conséquence, dans notre site de Belfort, l’activité liée aux locomotives fret connaît une situation critique, et le cœur de la production tend à se déplacer vers la Russie et le Kazakhstan, soit de façon directe, soit à travers notre partenariat avec la société Transmashholding – TMH. Et tout naturellement, l’engineering va progressivement rejoindre cette zone.

Les trains à grande vitesse sont un autre exemple des conséquences mécaniquement entraînées par une réduction de l’activité domestique. On assiste à une diminution du nombre de TGV commandés, et un débat a lieu sur le rythme de production, qui a atteint 11 trains par an. Nous sommes désormais à l’étiage : toute baisse supplémentaire mettrait en danger la structure industrielle, particulièrement à Belfort. En outre, nous ne serions plus en mesure d’investir suffisamment pour préparer le TGV du futur.

A contrario, compte tenu de son importance mondiale, nous sommes heureux de pouvoir exposer à Paris l’ensemble de nos produits, d’autant que la ville organise régulièrement des rencontres avec les représentants des grandes mégalopoles.

J’en viens aux commandes. En ce qui concerne la grande vitesse, même si la commande de 40 duplex est très importante, il n’en demeure pas moins que le rythme de production pour la SNCF est passé de 15 ou 16 TGV par an à seulement 11 par an. Les trains que nous développons ont une plus grande capacité : à prix identiques, ils offrent 10 % de places en plus. Quant aux TGV du futur, ils permettront, à conditions économiques équivalentes, d’emporter 20 % de voyageurs en plus. Nous sommes donc dans une dynamique de réduction du coût des trains ; l’efficacité économique est d’ailleurs notre premier objectif en termes d’innovation.

S’agissant des trains express régionaux, le contrat cadre signé entre la SNCF et Alstom Transport prévoit la construction de 182 rames Regiolis. C’est un produit d’une grande modularité, à même de répondre aux besoins des différentes régions, tout en étant construit à partir d’une plateforme commune, ce qui permettra d’amortir les coûts de développement sur la longue série et donnera à la SNCF la possibilité de développer des synergies entre différents centres de maintenance.

Dans la mesure où le plan de renouvellement des rames de TER n’est pas la hauteur de ce qui était prévu au départ, nous nous réjouissons des annonces qui viennent d’être faites au sujet des trains d’équilibre du territoire. En effet, les caractéristiques de la plateforme que nous avons développée pour Regiolis – niveau de confort, accélération, vitesse maximale – lui permettent de répondre également, moyennant quelques aménagements, aux besoins de ces trains. Nous comptons d’ailleurs continuer sur cette lancée : qu’il s’agisse de la nouvelle liaison ferroviaire franco-suisse – contrat CEVA –, ou des nouveaux prolongements des TET, cette plateforme nous semble adaptée à la circulation inter-cités, y compris au-delà de nos frontières, puisqu’elle est équipée de l’ERTMS – European Rail Traffic Management System, le système européen de surveillance du trafic ferroviaire.

S’agissant du métro, notre activité pour la RATP est soutenue et devrait croître avec le développement du Grand Paris. De nouveaux appels d’offres sont d’ores et déjà lancés, tandis que nous continuons à honorer les commandes en cours. Nous disposons en particulier d’une expertise forte sur les métros automatiques, que nous avons été les premiers à proposer – contrairement à notre habitude, c’est dans une ville étrangère, Singapour, que nous l’avons développé pour la première fois. Nous comptons sur la plateforme parisienne pour développer le matériel roulant et la signalisation. De même, nous avons vendu à Lille notre nouveau système de signalisation, Urbalis Fluence, qui offre un bon exemple de notre savoir-faire : nous l’avons développé en France – à Saint-Ouen –, la première utilisation a lieu en France – à Lille –, et celle-ci nous sert de modèle pour gagner des contrats à l’export, par exemple à Riyad, en Arabie saoudite.

En ce qui concerne le réseau express régional, une livraison de rames est en cours pour le RER A. Un nouvel appel d’offres devrait par ailleurs être attribué dans un peu plus d’un an, dont nous sommes en train de discuter les termes et les conditions du cahier des charges. Il est évidemment essentiel pour nous de pouvoir fournir la région, et donc d’avoir un bon dialogue avec la SNCF et le Syndicat des transports d’Île-de-France, à l’image de celui que nous avons avec nos propres fournisseurs.

J’en viens enfin aux deux types de tram. Le premier, le tram-train, est un nouveau produit, comme toujours développé en France – à Valenciennes –, vendu pour la première fois à Nantes, puis à la région Rhône-Alpes, et que nous souhaitons désormais proposer pour les liaisons transversales en Île-de-France. Grâce à cette vitrine, nous avons réussi à le vendre à Ottawa, pour équiper une ligne de LRT – Light Rail Transit, qu’il convient de distinguer des petits tramways – street cars.

Quant au tram lui-même, il remporte un grand succès dans de nombreuses villes. Dans les pays d’Europe centrale, les réseaux n’avaient pas été démontés : nos concurrents – Siemens, Bombardier – ont donc pris l’habitude de ne remplacer que les matériels roulants. En France, nous avons acquis un savoir-faire particulier, lié à la rénovation urbaine.

En effet, un projet de tramway donne l’occasion de repenser l’aménagement de la ville et de ses quartiers. Alstom Transport, avec les municipalités pour lesquelles nous travaillons, a donc acquis des compétences en matière d’intégration urbaine qui peuvent être exploitées à l’étranger. Car le renouveau du tramway ne concerne pas seulement l’Europe de l’Est – Moscou, par exemple, on peut l’observer aussi dans les pays émergents. Nous avons ainsi passé un contrat pour l’équipement de 13 villes en Algérie, nous travaillons également au Maroc, et nous avons été retenus pour la rénovation du quartier de Porto Maravilha, au Brésil, en prévision des Jeux Olympiques. Nous savons donc comment intégrer un réseau de tramway dans un tissu urbain. Grâce à cette compétence, les contrats que nous signons à l’étranger sont de type « clés en main » et incluent les infrastructures comme la maintenance.

Bien entendu, si nous vendons à la ville de Caracas des métros construits à Valenciennes, c’est grâce au gouvernement français et à la Coface. Nous bénéficions par ailleurs de l’existence d’une filière ferroviaire florissante, comportant trois opérateurs urbains – Keolis, Transdev, RATP-Dev –, deux importants ingénieristes, Systra et Egis, et un organisme interprofessionnel, Fer de France. Il est essentiel que nous travaillions ensemble à l’export : quand Systra ou Egis conseillent des clients étrangers, ils sont aussi des prescripteurs du modèle français et participent au soutien de la filière. C’est ainsi que, malgré les difficultés et le grand nombre de concurrents, nous ne nous en sortons pas trop mal.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Regiolis est un matériel plutôt destiné aux transports régionaux, mais vous avez laissé entendre qu’il pouvait être adapté. Sera-t-il possible de l’utiliser pour les trains d’équilibre du territoire ?

Vous vous êtes intéressés, avec la SNCF, au projet de ligne à grande vitesse entre Rio et São Paulo. Ce projet a-t-il été abandonné par les responsables brésiliens ?

Enfin, pouvez-vous nous parler du programme « Écorail innovation », auquel vous participez avec la Deutsche Bahn, et dont l’objectif est la mise au point, à l’horizon 2050, de matériel ferroviaire n’émettant aucun gaz à effet de serre ?

M. Gilles Savary. Alstom fait partie des « bijoux de la couronne » française : c’est un outil industriel remarquable au sein d’une filière qui, avec Fer de France, s’est structurée au cours des dernières années en intégrant tous les métiers, y compris ceux de l’avant-garde comme l’ingénierie.

La politique des transports, et en particulier ferroviaire, n’est jamais totalement dissociée des arrière-pensées de nos intérêts industriels, ce qui est tout à fait légitime. C’est vrai en Allemagne comme en France. Mais, dans notre pays, cette politique subit des changements profonds. Le rapport de notre collègue Philippe Duron, même s’il n’efface aucun projet, préconise de différer la construction de lignes à grande vitesse qui auraient pu vous donner un horizon industriel. Les avanies rencontrées par l’écotaxe poids lourds entraînent d’importantes difficultés dans le financement des infrastructures et du matériel. Comment vivez-vous ces événements ? La fin du tout-TGV, le renvoi des projets à des échéances plus lointaines, donc hypothétiques, gênent-ils l’industriel que vous êtes ? Comment allez-vous vous y adapter ?

Par ailleurs, je m’interroge sur les cycles de commandes de la SNCF. Disposez-vous d’une visibilité suffisante pour asseoir votre marché intérieur, dont la stabilité est essentielle pour une entreprise exportatrice comme la vôtre ?

M. Bertrand Pancher. En présentant la situation d’Alstom, grand groupe, fierté nationale, vous avez insisté sur la nécessité de soutenir le marché domestique français. À cet égard, les projets d’investissements de l’AFITF, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, et les doutes sur les moyens dont elle pourrait disposer, sont sources d’inquiétude. Même lorsque nous serons parvenus à débloquer l’application de la taxe poids lourds, seule la moitié de son produit, soit 400 millions d’euros par an, permettra d’alimenter l’agence en moyens financiers nouveaux. Dans cette hypothèse, nous pourrions consacrer aux infrastructures 30 milliards d’euros d’investissements d’ici à 2030, ce qui ne permettrait de construire, parmi les projets de lignes à grande vitesse envisagés, que la ligne Bordeaux-Toulouse.

Compte tenu des projections de l’AFITF, serez-vous en mesure de maintenir un rythme de production de 11 TGV par an ? À défaut, nous devrons trouver les moyens nécessaires pour conserver les sites de production sur notre territoire.

En France, le financement des infrastructures de transport pèse plus sur le contribuable que sur l’usager, si bien que nos moyens ne sont pas à la hauteur de nos ambitions. Vous avez exercé des responsabilités à la Banque mondiale, au ministère de l’économie et des finances et à la Direction du Trésor : auriez-vous des suggestions à faire sur les ressources nouvelles qui pourraient être trouvées ?

Par ailleurs, serait-il possible de mieux mobiliser les leviers de financement européens ? Ne pourrait-on pas adopter, au sein de l’Union, une politique plus ambitieuse, de façon à traiter enfin le problème du financement des grandes lignes européennes, dont la construction, pour le moment, ne fait malheureusement pas partie des projets français ?

M. Olivier Falorni. La dix-neuvième Conférence des parties à la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique, qui vient de s’achever, est porteuse d’espoir. Les 195 pays réunis à Varsovie se sont en effet engagés à communiquer, avant la conférence qui se tiendra à Paris en 2015, leurs propositions en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, afin qu’elles soient évaluées. C’est dans ce contexte que votre entreprise a ratifié la Déclaration de Varsovie sur le transport à faible émission de carbone et le développement durable, ce dont je vous félicite.

Adoptée après d’âpres discussions, cette déclaration souligne la nécessité croissante pour les pays de renforcer leurs politiques et leurs programmes d’investissements dans la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, donc de favoriser le transport ferroviaire, moins polluant que le parc automobile ou que le transport par camion. Comment votre société compte-t-elle répondre aux exigences de cette déclaration ? Quels seront les critères environnementaux retenus pour concevoir vos nouveaux produits ?

L’innovation doit être aussi un facteur de développement de l’efficacité énergétique. Comment votre entreprise participe-t-elle au « verdissement » des trains, dont la durée de vie dépasse parfois 40 ans ?

Par ailleurs, la première rame du nouveau Citadis Compact, adapté aux villes moyennes, est sortie des ateliers de l’usine Alstom de La Rochelle pour équiper la ville d’Aubagne. D’autres villes en ont-elles commandé, et si oui, la production à plus grande échelle permettra-t-elle de faire baisser les coûts, dont l’importance est aujourd’hui un frein à l’équipement des collectivités ?

Vous développez, dans le cadre du programme Life+ de l’Union européenne, des technologies servant la protection de l’environnement comme la sous-station réversible Hesop, qui permet au tramway de récupérer la totalité de l’énergie électrique disponible au freinage. Pouvez-vous nous en dire plus ? Ce procédé est-il applicable aux métros et trains suburbains, particulièrement consommateurs d’énergie ?

Le groupe Alstom a annoncé au début du mois de novembre une réduction de ses effectifs, et évoqué la vente d’une participation minoritaire dans Alstom Transport afin de renforcer sa flexibilité financière. Selon votre PDG, Patrick Kron, quelques dizaines de postes seraient ainsi supprimés chez Alstom Transport en France.

De telles annonces conduisent les 1 321 salariés de l’usine Alstom Transport à La Rochelle ainsi que les employés des sous-traitants locaux à s’interroger. Quelles garanties pouvez-vous apporter en ce qui concerne le maintien de l’activité et des emplois sur le site ?

M. Alain Gest. À mon tour, au nom du groupe UMP je souhaite exprimer mon inquiétude de voir certains projets structurants arrêtés ou, du moins, suspendus. Compte tenu de la part du marché domestique dans votre activité, quelles conséquences auront ces décisions, ainsi que la suspension de l’application de l’écotaxe, sur Alstom Transport ?

Pouvez-vous revenir sur vos activités « clés en main », complémentaires de la fabrication de matériel roulant ?

Enfin, quel serait, selon vous, le coût raisonnable, par kilomètre, de la construction d’un tramway ? J’ai conscience qu’il doit varier selon la ville considérée, mais dans la mesure où vous équipez la ville d’Aubagne – qui, même en tenant compte de son agglomération, n’est pas très peuplée –, je me demande s’il existe un seuil démographique au-delà duquel il peut être intéressant d’engager des projets de cette nature.

Mme Suzanne Tallard. J’ai plaisir à rencontrer les représentants d’une société qui non seulement est un acteur majeur de la mobilité durable, mais joue également un grand rôle dans ma circonscription – l’usine d’Aytré emploie en effet plus de 1 300 personnes et fait vivre de nombreux sous-traitants.

Le tramway Citadis équipe une trentaine de villes en France et dans le monde. Chaque fois qu’il est installé, on voit bondir le nombre d’usagers du transport en commun ; il permet de structurer, de renouveler les villes et de les faire entrer dans le XXIe siècle ; il représente la modernité en matière de transport urbain.

La nouvelle version de ce tramway, le Compact – qui sera installé dans le pays d’Aubagne – est financièrement accessible pour des villes de 200 000 à 300 000 habitants. Quels sont les efforts de vos ingénieurs pour permettre à des villes de taille plus modeste d’adopter à leur tour ce matériel, dans sa version actuelle ou dans une version adaptée ? L’attente est en effet forte dans de nombreuses villes. Bien que les essais du Citadis aient lieu à La Rochelle, cette ville n’a ainsi pas encore les moyens de s’en équiper, ce qui est une grande source de frustration.

Vous évoluez dans un secteur d’excellence et très concurrentiel, ce qui vous conduit naturellement à faire preuve d’exigence à l’égard de vos sous-traitants. Or les donneurs d’ordres ont besoin des sous-traitants, et inversement. Quelle est votre politique pour maintenir dans les territoires un réseau de sous-traitants solide, et donc pérenne ?

Enfin, quels choix faites-vous pour que, de la naissance à la fin de vie de votre matériel, les objectifs du développement durable soient pris en compte ?

Mme Sophie Rohfritsch. Je vous ai entendu avec plaisir évoquer le tramway mais vous n’avez pas cité le Translohr, fleuron de l’entreprise NewTL qu’Alstom a rachetée au groupe Lohr Industrie avec l’aide du Fonds stratégique d’investissement pour la modique somme de 35 millions d’euros. Translohr est le seul tramway sur pneus au monde. Nous connaissons le plan de charge de l’entreprise jusqu’en 2014. Qu’en est-il pour la suite ? Dans la prospection en matière de mobilité durable à l’étranger, faites-vous la promotion de cet outil séduisant qui s’appuie sur une technologie bien maîtrisée et sur des personnels qualifiés ?

M. Yannick Favennec. Vous avez souligné le choix de la région Pays de la Loire en faveur du tram-train pour la réouverture d’une petite ligne, entre Nantes et Châteaubriand. Il existe en Mayenne des projets de réouverture d’anciennes lignes et de petites lignes, je pense notamment à la ligne Mayenne-Laval. Le tram-train est-il selon vous la solution de mobilité durable d’avenir ?

M. Florent Boudié. Pensez-vous que la suspension de l’écotaxe et les incertitudes quant à ses délais de mise en œuvre mettent en péril le financement des trains d’équilibre du territoire et plus généralement des infrastructures ?

Vous avez développé avec Hesop un système de récupération d’énergie qui maximise l’efficacité énergétique. Quelle part de la R&D est consacrée à la filière du stockage d’énergie, répertoriée comme une filière d’avenir ? J’ai cru comprendre que cette technologie permettait de réduire le coût d’infrastructure en accroissant l’autonomie du matériel roulant. Qu’en est-il ?

Parmi les 34 projets de reconquête industrielle figure le TGV du futur dont M. Jérôme Wallut est le chef de projet. Pouvez-vous préciser les perspectives ? Quand sera-t-il mis en service ?

M. Laurent Furst. J’ai la même passion que Mme Sophie Rohfritsch pour l’entreprise NewTL et la même confiance dans son avenir.

Vous n’avez pas mentionné un événement majeur dans le domaine ferroviaire en 2013 qui aura des incidences considérables sur l’industrie européenne : l’ouverture d’une ligne entre Hambourg et la Chine dédiée au transport de marchandises. Ce mode de transport est aujourd’hui deux fois plus rapide que la voie maritime – quatre fois demain – et il dispense des coûts portuaires. Quel regard portez-vous sur cette réalisation qui associe Deustche Bahn, Siemens et des entreprises chinoises ? Quel est selon vous l’avenir de ce type d’investissements ?

La part de la France dans le commerce intra-européen n’est plus que de 13 %. Notre pays est victime d’une forte désindustrialisation qui n’est pas encore terminée. Vous qui êtes un industriel, pensez-vous que le coût et la réglementation du travail soit un handicap pour le développement et la pérennité des emplois en France ?

M. Jean-Yves Caullet. Je ne vous demanderai pas si le CICE est un atout pour l’industrie car la question me semble hors sujet.

Vous avez présenté une filière d’excellence française à tous égards qui de surcroît bénéficie d’une vitrine lui permettant de partir à la conquête du marché mondial. Mais le modèle de développement français et le modèle européen ne sont plus aujourd’hui des modèles dominants. Comment anticiper et répondre aux attentes des clients dans le monde qui ne correspondent pas à ce modèle ? Comment leur vendre nos technologies alors que nous ne sommes plus en mesure de leur imposer notre modèle ?

Comment imaginez-vous le juste transport de demain ? La mobilité durable ne consiste pas nécessairement à aller toujours plus vite et plus loin. Il s’agit de combiner transport et aménagement du territoire afin de proposer les solutions les plus harmonieuses et pertinentes. À l’époque moderne, le transport était capable de tout faire et d’apporter une solution à tous les problèmes. L’ère du transport omnipotent est terminée : l’aménageur et le concepteur de transport doivent désormais travailler ensemble et non consécutivement. Comment anticipez-vous cette évolution pour le transport de demain ?

M. Jean-Pierre Vigier. Vous vous inscrivez dans une démarche active de mobilité durable dont l’objectif est d’offrir aux usagers une meilleure accessibilité du territoire et de faciliter le déplacement des personnes et des marchandises dans le respect de l’environnement.

Si la mobilité durable progresse en France, il n’en va pas nécessairement de même à l’étranger. Le développement d’Alstom à l’étranger peut-il dès lors s’appuyer sur ce concept qui n’est pas toujours la priorité des pays acheteurs ? Les efforts français et européens en faveur de la protection de la planète ne s’en trouvent-ils pas contrecarrés ?

M. Guillaume Chevrollier. Votre présentation est réconfortante et encourageante à plusieurs titres : un beau groupe industriel fabricant des fleurons – TGV, TER, tram –, 80 % de la R&D en France, 98 % des matériaux utilisés aisément recyclables. Vous avez évoqué les résultats prometteurs de la recherche sur l’utilisation des biomatériaux et la récupération d’énergie. Je sais qu’ils sont le fruit de la collaboration avec les pôles de compétitivité mis en place par la précédente majorité qui démontrent là leur efficacité.

Quelles synergies avec les autres modes de transport envisagez-vous de développer afin de favoriser la mobilité durable sur tout le territoire, notamment dans les zones rurales ?

M. Henri Poupart-Lafarge. Vous avez été nombreux à aborder la question du développement durable. Le train est par essence durable. Il est plus respectueux de l’environnement en termes d’émissions, d’emprise sur le sol ou de recyclabilité des matériaux, que les autres modes de transport. Néanmoins, cela ne nous exonère pas d’efforts pour rendre nos trains plus « verts » encore.

En la matière, vous avez évoqué le chiffre de 98 % de matériaux recyclables. Il faut y ajouter les progrès dans l’alimentation et la traction grâce aux moteurs à aimants permanents qui améliorent de 10 à 15 % la puissance du train.

De même, le TGV qui succédera au 2N2 actuellement en fabrication, offre 10 % de places supplémentaires pour une consommation d’énergie identique. On estime le gain en termes d’efficacité énergétique sur le matériel roulant entre 10 et 15 % d’une génération à l’autre.

Enfin, nous recherchons des économies sur l’infrastructure. Hesop, que vous avez cité, est une sous-station réversible de traction qui permet la récupération de l’énergie produite lors des phases de freinage et la réinjection de cette énergie, à l’extérieur du réseau ferroviaire, dans le réseau de distribution d’énergie. Ce procédé, parce qu’il limite la perturbation sur le réseau de traction ferroviaire, permet de réduire le nombre de sous-stations électriques nécessaires et d’améliorer le coût et l’efficacité énergétique du ferroviaire. Il n’existe pas encore de sous-station de ce type en France. Un exemplaire a été vendu en Angleterre et le projet en Arabie Saoudite en comporte.

La sous-station Hesop peut être associée à un système de stockage pour surmonter l’obstacle suivant : RTE ne prend pas en compte l’énergie réinjectée dans le réseau pour une durée inférieure à dix minutes. Il faut donc installer des systèmes de stockage d’énergie à côté de la sous-station pour pouvoir réinjecter une quantité d’énergie suffisante.

Concernant la mobilité multimodale, un projet de gare durable pour Versailles Chantiers, dans lequel l’installation d’une sous-station réversible permettrait de réinjecter l’énergie du freinage dans les voitures électriques, est à l’étude. Mais il se heurte aux difficultés techniques que j’évoquais de valorisation de l’énergie réinjectée dans le réseau. L’objectif premier des projets Hesop réside pour le moment dans la diminution du nombre de sous-stations dans l’infrastructure.

Dans le cas de l’Allemagne, le problème est différent. L’énergie produite par le freinage des trains au diesel n’est malheureusement pas récupérable puisqu’elle ne peut pas être réinjectée dans un réseau électrique qui n’existe pas. Deustche Bahn nous a demandé comment intégrer dans les trains régionaux diesel des systèmes de stockage d’énergie hybrides. Nous connaissons déjà ces systèmes pour les locomotives de manœuvre, qui permettent, outre des économies d’énergie, d’aller récupérer des voitures dans les usines grâce à une batterie chargée par le moteur diesel.

Je conteste l’idée selon laquelle les pays étrangers seraient moins soucieux de développement durable. Cela n’est pas tout à fait vrai dans le domaine du transport ferroviaire car cette préoccupation coïncide avec l’intérêt économique puisque la consommation énergétique constitue un levier commun. New Delhi s’est ainsi intéressé à la consommation électrique de nos métros. Nos efforts en faveur du développement durable peuvent tout à fait être valorisés à l’étranger.

Nous avons trop de fournisseurs trop faibles. Nous poursuivons nos efforts pour renforcer les partenariats avec nos fournisseurs pour des raisons qui ne sont pas seulement philanthropiques : le retard d’un fournisseur se retrouve inévitablement en bout de chaîne et peut avoir des conséquences catastrophiques dans les relations avec nos clients. Dans le cas de Regiolis par exemple, les difficultés d’un fournisseur ont eu des répercussions importantes sur l’outil de production.

Nous déplorons l’éparpillement des fournisseurs. C’est la raison pour laquelle nous soutenons les initiatives gouvernementales, comme le fonds d’investissement baptisé « Croissance rail », afin d’aider les fournisseurs à se regrouper. Ce regroupement doit permettre de gérer les importantes fluctuations de charge dans les usines qui constituent la principale difficulté de notre métier. Nous sommes particulièrement impliqués à La Rochelle et à Valenciennes.

Le Translohr est un bon exemple de ce que peut faire la filière ferroviaire. Lohr Industrie connaissait, et connaît toujours, des difficultés mais NewTL se porte aujourd’hui très bien. C’est vraiment un succès. La reprise a été possible grâce au concours du FSI et de l’État ainsi qu’à un fort soutien de la RATP.

Notre stratégie consistait à attendre l’inauguration de la ligne de tramway francilienne T5 car l’image du Translohr avait pâti des difficultés rencontrées à Clermont-Ferrand. Le succès du T5, grâce à l’appui des ingénieurs de la RATP, nous permet aujourd’hui d’envisager une accélération du développement commercial. Le Translohr bénéficie de notre réseau. Nous avons des projets en Italie, à Medellin en Colombie, et à Ganja en Azerbaïdjan. Le Translohr peut en outre profiter du savoir-faire clés en main d’Alstom puisqu’il s’agit d’un système global qui ne peut pas être installé par d’autres. C’est un bon exemple de redressement et je reste très confiant pour l’avenir. Je répète que Paris, avec le T5 en l’occurrence, constitue une vitrine importante pour notre activité.

Le coût d’un tramway est de 20 millions d’euros par kilomètre. Il faut savoir que les infrastructures, les déviations de réseau et le réaménagement urbain pèsent plus dans les dépenses que le matériel ferroviaire. Nous essayons de diminuer le prix de ce matériel et des infrastructures mais le génie civil représente une part importante du coût de réalisation du tramway.

Le tramway compact Citadis, installé à Aubagne, a aussi été vendu à Avignon dans une forme un peu différente, une longueur de 22 mètres pour le premier contre 24 pour le second. Il paraît difficile d’envisager un tramway plus petit. Nous travaillons davantage sur le coût d’infrastructure. Nous disposons pour ce faire d’un outil, l’Appitrack, qui permet d’accélérer la construction des voies. Ce dernier est utilisé pour le métro et pourrait l’être pour les lignes à grande vitesse.

Il n’y a pas de seuil intangible pour l’implantation du tramway. Notre souci est d’apporter la solution la plus adaptée aux besoins d’un territoire donné. Nous ne privilégions pas un équipement plutôt qu’un autre.

Nous ne plaidons pas pour le tout-TGV. En revanche, nous sommes très préoccupés par un possible arrêt des commandes de matériel roulant de TGV. L’ensemble des rames de TGV, qu’il s’agisse des TGV PSE ou Atlantique, doivent être renouvelées – la première rame mise en service en 1981 fonctionne toujours, peut-être nos matériels sont-ils trop robustes… (Sourires) Notre demande pour relancer la production de TGV porte moins sur la création de nouvelles lignes de TGV – je ne me prononce pas sur le rapport de Philippe Duron – que sur le renouvellement des flottes.

La plateforme Coradia peut être déclinée dans une version pour le Regiolis – Coradia polyvalent – et dans une autre pour les TET – Coradia liner – puisqu’elle peut équiper des trains roulant de 120 à 200 kilomètres heure et pour des trajets de 150 kilomètres à six heures. Nous n’essayons pas de transposer le Regiolis aux TET. Une même plateforme technologique, en termes d’accélération, d’énergie et de confort de vibration, permet de s’adresser à plusieurs marchés. Il faut distinguer la plateforme technologique de la plateforme complète qui comprend l’aménagement intérieur, ce dernier étant adapté aux exigences de flux de passagers et de confort.

Quant au TGV brésilien, qui est un bon exemple de collaboration française, la date butoir pour l’appel d’offres était fixée au 16 août. Le marché a été reporté le 15 août parce que nous étions le seul candidat mais aussi à cause des manifestations en faveur du transport urbain et de la réorientation des investissements à son bénéfice. La présidente du Brésil a fait de la ligne à grande vitesse un axe fort de son programme électoral. La réalisation de ce projet dépendra donc du résultat des élections qui doivent se tenir dans un an.

Nous sommes soucieux du problème du financement que nombre d’entre vous ont évoqué. Il faut savoir qu’il existe différents modes de financement des infrastructures de transport en Europe. De nombreux rapports soulignent le déséquilibre du financement que nous ressentons au jour le jour et les tensions sur ce sujet comme en témoignent les péripéties de l’écotaxe poids lourds. Si le financement des TET devait être remis en cause, cela constituerait un problème majeur pour nous, pour la charge du site de Reichshoffen à partir de 2015 et pour le développement de la plateforme pour les trains régionaux en tant que telle.

Nous avons besoin de continuité. Chaque plateforme doit conserver un minimum de production annuelle sinon nous perdons la compétence et nos sous-traitants aussi. Nous devrons alors nous redéployer, ce que les sous-traitants n’ont pas les moyens de faire. Nous essayons de rester optimistes mais les difficultés de financement nous placent à l’étiage. Pour le Regiolis, nous sommes passés de 400 trains à 182 et pour le TGV, comme je l’ai indiqué, d’une quinzaine à 11 par an. Quant au tramway, les commandes sont soumises au cycle électoral. Nous avons assisté à de nombreuses inaugurations ces deux dernières années mais le rythme devrait désormais se ralentir pour s’intensifier de nouveau dans cinq ans. (Sourires)

À propos de La Rochelle, la conjoncture est difficile : l’usine est très chargée pour les TGV pendant un an et pour les trams pendant deux ans. C’est le moment où la production du TGV marocain s’arrêtera et où la SNCF baissera son rythme de commandes. L’emploi n’est pas menacé. Mais les fluctuations d’activité justifient a posteriori le recours à l’intérim qui nous est reproché – nous avions il y a deux ans 30 à 40 % d’intérimaires, il n’y en a plus aujourd’hui.

Le coût du travail est une donnée importante de l’équation de notre productivité. Mais la principale caractéristique du métier ferroviaire est la flexibilité. Nous avons conclu des accords de flexibilité en Allemagne, en Espagne et en Italie afin de gérer les creux et les pics de charge, dans la durée mais aussi à court terme, dans le cas d’un retard d’un fournisseur par exemple. Nous ne sommes pas une industrie dans laquelle la production est réglée comme du « papier à musique » : nous devons en permanence nous adapter.

Je suis un grand défenseur de la cause européenne pour le transport. Il y a beaucoup à faire. L’inefficacité du transport ferroviaire au niveau européen est presque choquante : celle-ci s’explique par des raisons historiques qui tiennent aux différences techniques entre les réseaux mais aussi à des considérations institutionnelles. Tout est décidé au niveau national. Je bataille pour l’adoption du quatrième paquet ferroviaire qui comporte un volet politique qui suscite des débats infinis – la séparation entre l’opérateur et le gestionnaire d’infrastructure – et un volet technique – le rôle de l’Agence ferroviaire européenne (ERA). Nous avons la chance d’avoir à Valenciennes, sur notre territoire, cette agence qui se bat pour asseoir son autorité. Le quatrième paquet lui en donnera les moyens. C’est très important.

On évoque des projets d’autoroute ferroviaire en Europe. Il faut saisir les opportunités et les financements européens. Il faut se battre pour déployer l’ERTMS. Aujourd’hui, les pays de petite superficie l’ont fait. Deux pays sont en retard : la France et l’Allemagne. Il n’y aura pas d’Europe ferroviaire si le cœur géographique de l’Europe ne se conforme pas aux standards européens. Les pays sont plus ou moins habiles pour capter les financements.

L’Europe essaie de mettre en place des projets. Je préside l’Union des industries ferroviaires européennes (UNIFE). Nous développons dans ce cadre un programme de R&D commun « Shift2rail ». L’Europe pourrait le financer à hauteur de 500 millions d’euros sur sept ans, en complément des 500 millions apportés par l’industrie. Aujourd’hui, le financement européen de la recherche ferroviaire représente quelques millions seulement. Nous devons nous battre pour obtenir des financements européens.

Je cède la parole à M. Jérôme Wallut pour évoquer le TGV du futur.

M. Jérôme Wallut, directeur général d’Alstom Transport France. Notre ambition pour le TGV du futur est d’aller plus loin dans la performance économique. Le développement du trafic et la saturation des infrastructures, des voies comme des quais, nous poussent à augmenter la capacité des trains, mais en préservant le confort et en respectant la charge à l’essieu et la consommation énergique. L’innovation porte donc sur les matériaux et l’architecture des trains puisque la longueur des rames est limitée à 200 mètres. L’objectif, c’est de placer plus de 640 passagers avec le même niveau de service. Ainsi, le simple remplacement d’une rame TGV duplex, qui transporte 509 passagers, augmentera instantanément la capacité de 20 % et apportera une réponse au problème de la saturation des réseaux et aux contraintes d’investissement sans impact sur le yield management.

Nous finançons notre R&D en architecture des trains sur fonds propres et nous sommes maintenant prêts à lancer la phase industrielle. C’est pourquoi nous prospectons, en France notamment où il y a un besoin de renouvellement. Un tel produit permet dans certains cas de remplacer deux TGV par un seul et d’améliorer le modèle économique. Nous montons également des dossiers avec les équipementiers pour obtenir des financements du Commissariat général à l’industrie et de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie. Nous avons l’intention, pour chacune des innovations, d’impliquer des PME, des ETI et des laboratoires, pour mobiliser toute la filière.

M. Henri Poupart-Lafarge. Sur le futur créneau du transport de marchandises de Chine vers l’Europe, nous sommes idéalement placés car nous avons une usine au Kazakhstan où nous avons conclu un accord avec KTZ, la SNCF kazakhe, et des usines en Russie. Pour tout le tronçon entre la Chine et la frontière européenne – l’écartement des rails n’est pas le même –, nous sommes en mesure de fournir des locomotives. En revanche, pour aller des pays Baltes jusqu’à la France, la Deutsche Bahn est solidement implantée et tant qu’il n’y aura pas un renouveau du fret en France, il nous sera très difficile de nous positionner, d’autant que la DB a passé un contrat cadre avec Bombardier qui fournira toutes ses locomotives. Oui, le marché est extrêmement prometteur ; oui, les Kazakhs et les Russes s’y intéressent beaucoup car ils espèrent expédier en Chine leur charbon et leurs minerais.

Concernant une éventuelle vente partielle d’Alstom Transport, ne vous méprenez pas. Il n’est pas question de vendre des sous-ensembles d’Alstom Transport mais plutôt une partie de notre capital pour nouer des partenariats industriels, sachant qu’Alstom Group resterait majoritaire. Pour cela, nous avons le choix de faire appel soit à des financiers par le biais d’une mise en Bourse, soit à des partenaires pour resserrer les liens, notamment avec les Russes puisque nous sommes déjà présents au capital de TMH. Nous avons quelques mois pour voir si notre annonce a suscité l’intérêt.

M. le président Jean-Paul Chanteguet. Nous vous remercions d’avoir répondu à notre invitation ainsi qu’aux nombreuses questions qui vous ont été posées.

——fpfp——

Membres présents ou excusés

Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Réunion du mardi 3 décembre 2013 à 17 h 45

Présents. - M. Philippe Bies, M. Florent Boudié, M. Jean-Louis Bricout, M. Jean-Yves Caullet, M. Jean-Paul Chanteguet, M. Guillaume Chevrollier, Mme Sophie Errante, M. Olivier Falorni, M. Yannick Favennec, M. Laurent Furst, M. Alain Gest, M. François-Michel Lambert, M. Alain Leboeuf, M. Franck Montaugé, M. Alain Moyne-Bressand, M. Philippe Noguès, M. Bertrand Pancher, Mme Marie-Line Reynaud, Mme Sophie Rohfritsch, M. Gilbert Sauvan, M. Gilles Savary, Mme Suzanne Tallard, M. Jean-Pierre Vigier

Excusés. - M. Yves Albarello, M. Denis Baupin, Mme Chantal Berthelot, M. Christophe Bouillon, M. Jean-Jacques Cottel, Mme Françoise Dubois, Mme Geneviève Gaillard, M. Christian Jacob, M. Jacques Kossowski, M. Napole Polutélé, M. Martial Saddier, M. Jean-Marie Sermier, M. Gabriel Serville

Assistaient également à la réunion. - M. Dino Cinieri, M. Lionel Tardy